CONCLUSION
Ce travail avait pour objectif principal d'établir une
relation entre les processus de déclenchement des
phénomènes de sable tels qu'ils sont observés sur le
Sahara et l'apport des données issues de l'observation spatiale. Les
phénomènes de sable sont identifiés à partir des
données météorologiques classiques, ce qui permet d'en
étudier la répartition spatio-temporelle. Notre analyse confirme
l'existence de zones sources et de périodes favorables à
l'occurrence des évènements de sable saharien. L'apport des
sciences de l'espace est manifeste et des simulations globales montrent
l'intérêt d'incorporer ces produits à ceux fournis
habituellement par la modélisation de l'atmosphère et du climat.
Nous avons ainsi utilisé les sorties d'un modèle global
(modèle couplé GOCART, NASA), et il s'avère qu'il existe
une relation statistique significative entre les fréquences d'occurrence
des phénomènes de sable (tels que mesurés par les stations
météorologiques du Sahara) et l'épaisseur optique
d'aérosols (AOT), paramètres issu de l'observation spatiale.
Dans le cadre de ce travail, et à partir d'analyses de
la climatologie du phénomène sur la période 1968-2002,
nous pouvons mettre en évidence la période favorable à son
occurrence située entre mars et juin. Le centre du Sahara (région
d'In-Salah) présente la plus forte occurrence, habituellement le
siège du centre de la dépression thermique saharienne. Au plan
spatial, une régionalisation du phénomène du sable fait
ressortir quatre régions homogènes: une région au Nord du
Sahara, une deuxième région à l'Est, une troisième
à l'Ouest et une dernière au Sud saharien.
Nous avons utilisé les résultats du
modèle global GOCART de NASA pour identifier une relation entre les
données de sol (fréquences d'occurrence du
phénomène) et les données spatiales. Le modèle
GOCART a été développé conjointement par le Georgia
Institute of Technology et la NASA (Goddard Space Flight Center) et porte sur
la chimie et le transport des aérosols. Au plan global, le modèle
GOCART obtient des résultats satisfaisants sur les principales
régions sources du monde dont le Sahara. L'épaisseur optique
(AOT) simulée par le modèle a été utilisée
comme prédicteur dans notre stratégie de modélisation
statistique. Les résultats obtenus, pour les mois où le
coefficient de corrélation est significatif, montrent qu'il existe un
potentiel significatif de prédiction du phénomène du
sable. L'influence des températures de surface océanique (SST)
est très marquée entre les mois de septembre et janvier, ainsi
qu'entre les mois de mars et mai. L'influence de l'AOT est importante dans la
période d'octobre à décembre.
Cette étude montre qu'il est possible d'élaborer
des modèles de prévision mensuelle des vents de poussière
et de sable en se basant sur l'approche statistique. Les indicateurs tel que
l'AOT et les SST ont montré un intérêt particulier. Ces
résultats sont encourageants et permettent d'envisager des prolongements
scientifiques importants.
En matière d'amélioration des systèmes
d'observation, il est clair que l'observation permet de pallier l'insuffisance
des réseaux au sol en régions sahariennes. Dans le cas des
phénomènes de sable, l'AOT est un paramètre pertinent
qu'il faut recueillir et suivre. Cependant, la perspective d'un
approfondissement physique de cette problématique nécessitera de
mieux caractériser les signatures radiométriques des surfaces
désertiques. La cartographie des états de surface au Sahara est
un élément clé pour l'identification des zones
potentiellement favorables au déclenchement des
phénomènes de sable. Par ailleurs, il sera
nécessaire de déterminer les vitesses seuils d'érosion
(exemple à partir de Météosat Infrarouge, en utilisant
l'indice IDDI -Infrared Difference Dust Index) et d'établir une
cartographie de ce paramètre sur les zones sources. Le système
AERONET est également une source pertinente de données. Une
station AERONET est opérationnelle en Algérie (Blida) et il est
recommandé d'étendre ce réseau pour caractériser
les régions semi-arides et désertiques.
Dans le domaine de la modélisation, cet axe de
recherche s'inscrit dans la thématique du cycle bio-géophysique
des aérosols désertiques. Les actions futures doivent viser la
modélisation du processus de soulèvement et de transport du sable
à plusieurs échelles : locale, synoptique, régionale et
planétaire. Cette démarche s'inscrit dans un cadre collaboratif
et l'utilisation du modèle global GOCART devrait inciter à des
efforts de modélisation régionale sur un domaine couvrant le
Sahara et ses marges proches. Les applications de ce type de simulations
futures sont nombreuses : agriculture, transport, lutte anti-acridienne,
aménagement du territoire. A une autre échelle, et compte tenu du
rôle de forçage radiatif du sable sur le climat global, cet axe de
recherche pourra s'inscrire dans la perspective d'étude du changement
climatique global et de ses impacts régionaux.
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