INTRODUCTION
L'étude des masses ou nuages de poussières
d'origine désertique, souvent appelés brumes sèches ou
vents de sable lorsque le phénomène est plus intense, est d'un
intérêt considérable dans divers domaines.
Les vents de sable exercent un effet important sur le bilan
radiatif atmosphérique global. De ce fait, et en raison de leur
extension géographique, ils jouent un rôle non moins important
dans le processus du changement climatique à travers la modification des
propriétés physico-chimiques de l'atmosphère. La
composition de l'atmosphère et le climat sont étroitement
liés. Il est maintenant clairement établi que la planète
s'est réchauffée lors du siècle dernier, et ce
principalement suite à l'augmentation des gaz à effet de serre
liée aux activités humaines (IPCC, 1995). En fait, toute
variation de constituants atmosphériques peut avoir des
conséquences sur la dynamique du climat. Ainsi d'autres espèces,
aussi présentes en traces dans l'atmosphère, comme les
aérosols troposphériques sont susceptibles de modifier le
climat.
Les aérosols sont issus de l'érosion
éolienne. Aussi, leurs sources géographiques sont
concentrées dans les zones arides et semi-arides, localisées de
part et d'autre de l'équateur, dans la ceinture d'anticyclones
tropicaux.
Par conséquent, toute modification du climat (naturelle
ou par suite des activités anthropiques) entraîne des variations
de ces émissions, et donc de l'effet radiatif et climatique des
aérosols. Le cycle de poussières désertiques
(émission - transport - dépôt) a aussi pour
conséquence une désertification en zones source par perte de
nutriments de la couche superficielle du sol et un enrichissement du milieu en
zones de retombée océanique ou continentale. Enfin, les
aérosols, en aggravant les conditions météorologiques,
peuvent intervenir dans divers aspects socioéconomiques, notamment en
nuisant au trafic aérien ou à la
télétransmission.
La composition et la granulométrie des aérosols
varient selon leur origine. Ils sont soit d'origine anthropique (comme les
poussières industrielles, le carbone suie ou les aérosols de
sulfate issus de l'oxydation du SO2...), soit d'origine naturelle
(poussières minérales ou sels de mer, débris
végétaux, sulfates issus de l'activité biologique marine
ou des volcans...). Intégrée sur une colonne d'air, la
concentration moyenne de chaque espèce et leurs propriétés
optiques permettent une estimation de la contribution à l'effet radiatif
direct global de chaque type d'aérosol. Ainsi, par exemple, les
aérosols désertiques, majoritaires en masse très efficaces
optiquement, contribuent de façon équivalente à
l'épaisseur optique.
L'apparition des satellites d'observation de la terre et de
son atmosphère ont permis d'intensifier les mesures d'aérosols et
contribué à pallier l'insuffisance du réseau
radiométrique au sol. La télédétection satellitale
est l'outil privilégié susceptible de nous fournir à des
échelles de temps et d'espace suffisantes une information objective sur
les aérosols désertiques.
Au cours des 20 dernières années, des efforts
importants ont été entrepris pour mieux comprendre les processus
physiques liés au mouvement des aérosols. Les programmes de
mesure sur le terrain ont permis de mieux connaître les
propriétés physiques et la composition des aérosols, mais
en général, ces campagnes étaient
limitées dans le temps et l'espace. Par contre,
l'observation satellitale offre une plus grande extension spatio-temporelle,
mais elle est limitée par le nombre des variables physiques mesurables.
Ainsi, les deux systèmes d'observations (stations terrestres et
satellites) doivent se compléter pour offrir une perspective plus
complète des processus des aérosols et de leurs effets sur le
climat global.
L'approche consiste à utiliser des modèles
globaux qui intègrent leurs deux catégories d'observations (sols
et satellite). A cet égard, il existe une variable qui permet de relier
les deux types de mesures et de valider un tel modèle. Il s'agit de
L'EPAISSEUR OPTIQUE DES AEROSOLS (Aerosol Optical Thickness,
AOT par abréviation). Cette variable est directement déduite de
l'observation par satellite et par les mesures terrestres. Sa simulation
à l'aide d'un modèle complexe constitue une grande utilité
pour la prévision des aérosols.
Dans notre travail, nous utilisons le modèle GOCART
(Global Ozone Chemistry Aerosol Radiation and Transport)
développé en 2001 (Chin et al, 2001). Ce modèle
concerne différents types d'aérosols (sulfates, sable, carbone
organique, particules d'origine marine) qui prévoit les concentrations,
les profils verticaux ainsi que l'épaisseur optique (AOT) et ceci avec
une échelle temporelle de trois (03) mois.
Ce projet de fin d'études s'articule autour de deux
parties :
1. Dans la première, nous avons jugé utile de
procéder à une recherche documentaire sur les déserts et
leurs caractéristiques; l'érosion éolienne qui est le
résultat des actions du vent au sol, donc des vents de sable; les
aérosols et leur cycle (émission, transport et
dépôt) ainsi que le mouvement d'un grain qui est à
l'origine de la formation des dunes.
2. La deuxième partie porte sur l'étude
climatologique du sable au Sahara; les méthodes de détection et
de suivi des aérosols (modèle GOCART), comparaison du sable avec
le modèle GOCART et la prévision du phénomène
à l'échelle mensuelle.
Dans la deuxième partie, les outils utilisés sont :
SYSTAT 10, SURFER 7 et EXCEL 97
OBJECTIF
Les vents de sable contribuent au dessèchement et
à la désertification des régions sources arides,
semi-arides et désertiques par perte en substances nutritives. Leur
impact sur le couvert végétal et donc sur la production agricole
n'est pas négligeable. Mais ils participent aussi à la
création de zones de sédimentation terrestres ou
océaniques fertiles. Dans ces zones océaniques, la production en
phytoplanctons et en poissons y est particulièrement forte (Lundholm,
1979). Les vents de sable exercent un effet marqué sur le bilan radiatif
atmosphérique donc sur l'évapotranspiration. Avec leurs
extensions considérables, ils jouent un rôle non moins important
dans le processus de changements climatiques. En effet, les aérosols
désertiques modifient le profil vertical de température de
l'atmosphère, limitant les phénomènes de convection et par
là même réduisant les précipitations (Coakley et
Cess, 1985).
Notre travail consiste à établir des
modèles de prévision statistique du sable à une
échelle temporelle d'un mois et deux mois. Une prévision fiable
à l'échelle mensuelle constitue un apport appréciable pour
la prise de décision dans la stratégie de gestion pour divers
secteurs tels que le transport aéronautique ou routier,
l'aménagement du territoire, l'environnement et la santé.
Cette étude vise à mieux cerner le comportement
du phénomène de sable, à travers l'analyse des zones
sources et de sa typologie; une étude climatologique donne un
aperçu de la situation au Sahara. Notre travail consiste ensuite
à comparer les sorties du modèle GOCART de NASA avec les
données du terrain; enfin, on s'intéresse à la
prévision de ce phénomène à plusieurs mois
d'échéance tout en essayant de valider le modèle GOCART
sur la région du Sahara. Le modèle couplé GOCART est
largement basé sur l'utilisation de données satellitales.
L'intérêt et l'apport des sciences de l'espace sont mis en
évidence dans la perspective de projets futurs.
METHODOLOGIE
La prévision statistique est devenue un outil essentiel
dans le domaine des sciences atmosphériques. Il existe
différentes approches statistiques pouvant produire des
prévisions mensuelles, saisonnières, annuelles ou
pluri-annuelles. Toutes sont basées sur la recherche d'un signal
à travers l'analyse des données historiques (Harrison,
1995); l'une d'entre elles, est l'analyse de régression utilisant
la méthode des moindres carrés, qui cherche à
établir une expression de régression entre une ou plusieurs
variables indépendantes (prédicteurs) et une variable
dépendante (prédictand).
On s'intéresse à la prévision à
plusieurs mois d'échéance des paramètres et/ou
phénomènes climatiques; par exemple la pluie, la
température, le vent, la fréquence d'occurrence d'orages, le
nombre de tempêtes, les débits de rivières, les risques de
sécheresse et des inondations; ce sont les prédictands
habituellement étudiés. On cherche des paramètres
informatifs dans l'atmosphère permettant cette prévision tel que
la température de surface de la mer (SST). Dans notre cas, nous allons
nous servir de l'épaisseur optique d'aérosol (Aerosol Optical
Thickness : AOT), prévue par un modèle global et des SST. La
méthodologie développée dans ce mémoire vise la
prévision mensuelle du sable dans le sud algérien basée
sur la méthode statistique de régression linéaire. Il
s'agira d'élaborer pour le Sahara des modèles statistiques de
prévision mensuelle, avec comme entrées, deux paramètres :
l'épaisseur optique d'aérosol (AOT)
issue du modèle GOCART.(modèle
développé conjointement par le Georgia Institute of Technology et
la NASA - Goddard Space Flight Center) ainsi que les anomalies des
températures de surface de la mer (SST); et comme sorties, la
fréquence d'occurrence du phénomène de sable.
1. REGRESSION LINEAIRE
La régression linéaire est facilement
assimilée dans son cas le plus simple (linéaire avec une seule
variable indépendante) en décrivant la relation linéaire
entre deux variables, x et y.
Conventionnellement, le symbole x est utilisé pour la
variable indépendante ou prédicteur; et y pour
la variable dépendante ou prédictant. Souvent en prévision
climatique, plus d'un seul prédicteur est nécessaire, mais
l'idée de la régression simple peut être
généralisée pour les cas les pus complexes de la
régression linéaire multiple.
La régression linéaire simple a pour but de
trouver une relation entre deux variables, dont les points tracés sur un
repère cartésien se rapprochent de l'allure d'une droite. La
régression choisit la droite qui produit la moindre erreur de
prévision des observations données y et
x; l'équation de la droite est appelée :
"modèle". Le critère le plus utilisé est qui minimise la
somme des carrés des erreurs. En adoptant le critère des moindres
carrés, le résultat est un ajustement des points à une
droite en minimisant les écarts entre cette droite et les points.
Cependant, la droite d'ajustement essaye d'éviter les grands
écarts. La valeur estimée par le modèle est donnée
par : y = a + b.x, pour chaque valeur de x,
a et b sont respectivement l'ordonnée
à l'origine et la pente de la droite de régression ou encore
coefficients de la régression. L'ajustement entre les deux variables est
linéaire comme illustré dans la figure ci-dessous :
ei
0
-1
-2
-20 -10 0 10 20
prédicteur
prédictand
Figure 1 : Illustration de la droite
d'ajustement
a. Distribution des résidus
Pour chaque valeur yi du prédictand
observée dans le passé, on calcule l'écart entre cette
valeur et la valeur estimée à l'aide de la droite d'ajustement
linéaire, cet écart est appelé
résidu. Un meilleur ajustement implique donc normalité
de la loi de distribution des résidus et un fort coefficient de
corrélation linéaire (Pearson) entre x et
y.
b. La fiabilité de l'ajustement à la
droite de régression
La qualité de l'ajustement du modèle est
primordiale pour exprimer si le modèle est pertinent ou non. Cette
qualité est définie à travers l'analyse combinée
des différents écarts qui amènent à deux mesures
fondamentales : le coefficient de détermination R2
et le rapport de Fisher F qui
synthétisent la qualité de l'ajustement du modèle. Les
écarts en question sont :
EQM : L'erreur quadratique moyenne
EQM =
|
|
|
1
|
|
n
ei ,
2
? ( )
|
(
|
n
|
|
2)
|
|
-
|
1
|
n
SQT : La somme quadratique des totaux, SQT =
2
? i - ,
( y y )
1
proportionnelle à la variance de Y au facteur (n-1)
2
n
SQR : La somme quadratique de la
régression = [ ]
)
? yi y
-
1
n
= 2
b 2 ( x x )
? i -
1
n
SQE : La somme quadratique des erreurs =2
? ( )
e i
1
, on peut vérifier
Facilement l'identité suivante SQT = SQR +SQE
Ainsi on a :
· Le coefficient de
détermination R2, dans le cas d'une
régression linéaire simple c'est le carré du coefficient
de corrélation entre X et Y. R2 donne la
proportion de la variance du prédictand (proportionnelle à SQT)
décrite par la régression (SQR). Pour une régression
parfaite, SQR=SQT et SQE=0, R2=1. Pour une régression
d'aucune informativité, SQR=0 et SQE=SQT et R2=0. Ainsi
à lui seul ce coefficient permet de mesurer la qualité de
l'ajustement, plus il avoisine 1 plus l'ajustement est meilleur, plus il s'en
éloigne plus il est mauvais.
· Le rapport de Fisher (F ratio) F = RQM /
EQM
RQM est la moyenne quadratique de la régression, dans
le cas d'une simple régression, RQM=SQR, EQM = SQE/(N-2), c'est le
rapport entre la variance due à la régression - donc
l'information utile- et la variance due aux écarts à
l'ajustements -les erreurs-. Il mesure en quelque sorte le rapport entre le
signal et le bruit. Le logiciel statistique permet de donner les valeurs de R
et F, ce dernier est assorti de sa p-value. Ainsi on peut résumer
l'analyse de la qualité d'ajustement du modèle par les deux
illustrations suivantes :
Bon ajustement Mauvais ajustement
Bonne pente Petite pente
R2 élevé et F élevé R2
petit, EQM élevé, F petit
Figure 2 : Qualité de l'ajustement
2. PERFORMANCE DES MODELES DE PREVISION
Toute prévision est soumise à des tests de
vérification. Cette vérification est par conséquent le
processus de détermination de la qualité des prévisions.
Il existe un grand nombre de procédures de vérification des
prévisions, mais toutes, mesurent le degré de liaison entre les
valeurs prévues et celles observées du prédictant.
a. La cross-validation : Pour
estimer la qualité du modèle, on a recours à une
procédure appelée cross-validation (Michaelson, 1987).
Dans la cross-validation, les données sont à la fois
données d'apprentissage (données servant à élaborer
le modèle de prévision) et données tests (données
estimant la qualité du modèle). La procédure consiste
à partitionner les données en des échantillons
d'apprentissage de taille n-1 (n étant
la taille de l'échantillon). Dans ce cas, le nombre de partitions de
données est égal à n, l'équation
du modèle est donc recalculée pour chaque partition. Le
résultat est n équations de prévision
similaires, chacune étant élaborée sans la contribution
d'une observation du prédictant.
b. Le skill : Cette méthode
permet de comparer l'élément observé et
l'élément prévu. On calcule la corrélation entre
ces deux valeurs. Cette corrélation est appelée : SKILL,
ou la limite d'acceptabilité du modèle. Les spécialistes
s'accordent à dire que lorsque le SKILL est supérieur ou
égale à 0.3 (SKILL = 0.3), le modèle est acceptable.
c. La simulation : C'est la
vérification qui peut être faite en comparant visuellement la
courbe du prédictant observé à celle du même
prédictant prévu.
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