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Chambre d'isolement : du point de vue des patients. Impact d'un temps d'élaboration sur le vécu des patients après un séjour en chambre d'isolement dans une unité d'hospitalisation de psychiatrie adulte

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par Charlotte Mouillerac
Université Paris 8 - Master 1 psychologie clinique et psychopathologie 2007
  

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Annexes

GRILLE D'ENTRETIEN

En préambule :

Explications sur les buts de cette recherche

Explications sur le fait que je vais prendre des notes

1- Vous souvenez-vous de votre dernier séjour en CSI. C'était quand ? Ca a duré combien de temps ?

2- Vous souvenez-vous pourquoi vous y étiez allé ? Dans quelles conditions ?

3- Comment s'était déroulé le séjour ? Racontez-moi

4- Comment étiez-vous au début ?

5- Comment étiez vous à la fin ?

6- Est-ce que vous vous rappelez quels étaient vos sentiments en CSI ?

7- A votre avis, pourquoi parle-t-on de chambre de soins intensifs ?

8- Pensez-vous qu'on s'occupe différemment des patients en CSI ?

9- Qu'est-ce qui fait du bien en CSI ?

10- Qu'est-ce qui est difficile en CSI ?

11- A quoi sert la CSI à votre avis ?

12- Et pour vous, à quoi vous a-t-elle servi ?

13- Est-ce que ça a changé quelque chose à votre prise en charge, à votre projet de soins ?

14- Est-ce que ça a changé quelque chose à votre relation aux soignants ?

15- Vous souvenez-vous avoir eu des temps de parole en CSI ? Pouvez-vous en parler ?

16- Vous rappelez-vous avoir eu un entretien de recueil du vécu avec M. Perret ? Qu'en avez-vous pensé (utile, suffisant ?)

17- Avez-vous pu parler de la CSI à quelqu'un d'autre ?

A- Commentaire :

TRANSCRIPTION DES ENTRETIENS ET RELEVÉ DES DONNÉES

Entretien 1

Date de mise en CI : 20/10/06

Date de sortie de CI : 26/10/06

Durée totale : 6 jours

Lieu : Pussin (UHCD)

Indications : - Etat dissociatif +

- Dissociation, destructuration

- Acte agressif, violence gestuelle ou verbale, attitudes ou comportements
menaçants : « violence verbale à l'encontre des patients et se fait agresser en
retour
 ».

Statut : HO

Diagnostic CIM 10 : schizophrénie

Année de naissance : 1967

Sexe : M

Circonstances de MCI :

Le patient a été mis en isolement dès son entrée à l'UHCD Pussin.

Il est arrivé menotté, avec la police.

Très agité, il a du être contenu jusqu'au 4ème jour puis décontenu progressivement à partir du 3ème jour.

Les 2 premiers jours, il refuse le traitement et doit le recevoir en injectable.

Il a des temps de sortie progressive à partir du 6ème jour.

Durant cette période, il est angoissé, somnolent, dans le déni, la minimisation des faits (avait jeté le chat de son frère par la fenêtre et menacé de mort le médecin d'SOS) et l'opposition. Quelques sourires immotivés.

Résumé de la période d'isolement :

Isolement dès l'entrée. Primo-hospitalisation. Est arrivé menotté avec la police. A nécessité l'intervention de renforts. Très agité.

A été contenu jusqu'au 23 (essais de décontention à partir du 22). A eu des temps de sortie progressifs à partir du 25.

Dans le déni des troubles, minimisant les actes qui l'ont conduit à être hospitalisé (a jeté un chat par la fenêtre et menacé le médecin de SOS). Opposant.

Entretien de recueil du vécu :

N'en a pas bénéficié

Attitude durant l'entretien de recherche :

Patient très opératoire qui répond aux questions sans plus de commentaire. Aucune critique de l'épisode qui lui a valu cette période d'isolement. Déni des troubles. Encore très projectif. Vérifie en même temps ce que j'écris.

18- Vous souvenez-vous de votre dernier séjour en CSI. C'était quand ? Ca a duré combien de temps ?

En novembre 2006, pendant 3 jours

19- Vous souvenez-vous pourquoi vous y étiez allé ? Dans quelles conditions ?

Suite à une tentative de fugue. [Pense qu'il serait rentré à la maison]

20- Comment s'était déroulé le séjour ? Racontez-moi

Je suis resté attaché aux mains et aux pieds pendant les 3 jours.

21- Comment étiez-vous au début ?

Au début, très angoissé

22- Comment étiez vous à la fin ?

Mieux mais encore un peu angoissé. C'est à cause des injections qui m'ont calmé.

23- Est-ce que vous vous rappelez quels étaient vos sentiments en CSI ?

Sentiment de colère contre les médecins et peur d'y rester longtemps. Je connaissais l'histoire de gens qui y étaient restés longtemps.

Je n'ai pas eu d'explications.

24- A votre avis, pourquoi parle-t-on de chambre de soins intensifs ?

Parce qu'on a beaucoup de médicaments

Il n'y a pas eu de parole apaisante. Les visites des soignants étaient aux moments des repas. On a détaché une main pour que je mange.

25- Pensez-vous qu'on s'occupe différemment des patients en CSI ?

Je ne sais pas

26- Qu'est-ce qui fait du bien en CSI ?

Rien

27- Qu'est-ce qui est difficile en CSI ?

L'isolement. Le fait d'être seul, enfermé.

28- A quoi sert la CSI à votre avis ?

Ca sert à isoler, à sanctionner. Sur moi c'était désastreux. Ca m'a complètement déprimé.

A la fin, j'étais plus déprimé qu'au début.

29- Et pour vous, à quoi vous a-t-elle servi ?

A rien

30- Est-ce que ça a changé quelque chose à votre prise en charge, à votre projet de soins ?

Rien

31- Est-ce que ça a changé quelque chose à votre relation aux soignants ?

Rien

32- Vous souvenez-vous avoir eu des temps de parole en CSI ? Pouvez-vous en parler ?

Non

33- Vous rappelez-vous avoir eu un entretien de recueil du vécu avec M. Perret ? Qu'en avez-vous pensé (utile, suffisant ?)

Non. Ça aurait pu être utile pour avoir des explications. Je ne savais pas que ça existait.

34- Commentaire :

C'est dégueulasse et scandaleux. Une honte. Dans le futur ça va disparaître. Si une personne est agitée ou veut fuguer, il faut la laisser faire.

Relevé par thèmes

A- Ressenti

Angoisse, peur : très angoissé / encore un peu angoissé / peur d'y rester longtemps

Apaisement : mieux / à cause des injections qui m'ont calmé

Colère : colère contre les médecins

Incompréhension : je n'ai pas eu d'explication

Mal être : désastreux

Solitude, abandon, isolement isolement / seul, enfermé

Tristesse : déprimé / plus déprimé qu'au début

B- Utilité

Ne sert à rien : à rien

C- Soin intensif

Beaucoup de médicaments : parce qu'on a beaucoup de médicaments

Néfaste : dégueulasse et scandaleux / une honte

D- Temps de parole

Pas de temps de parole : pas eu d'explication du médecin / non

E- Entretien de recueil du vécu

Aurait pu être utile : Ça aurait pu être utile pour avoir des explications

Entretien 2

Date de mise en CI : 05/09/06

Date de sortie de CI : 18/09/06, puis est mutée à Saint-Exupéry où est placée en CSA (chambre de soins attentifs)

Durée totale : 13 jours

Lieu : Pussin (UHCD)

Indications : - Etat dissociatif aggravé par prise de toxiques + fugue à son arrivée

Statut : HDT

Diagnostic CIM 10 : trouble schizotypique

Année de naissance : 1982

Sexe : F

Circonstances de MCI :

A son entrée, a tenté de fuguer.

Résumé de la période d'isolement :

Entretien de recueil du vécu :

N'en a pas bénéficié

Attitude durant l'entretien de recherche :

Patiente très coopérante, espère qu'elle va arriver à bien répondre, fait de son mieux. Se rapproche physiquement de ma chaise pendant l'entretien. Est en confiance. A du mal à se rappeler.

1- Vous souvenez-vous de votre dernier séjour en CSI. C'était quand ? Ca a duré combien de temps ?

[Ne se rappelle pas quand.] Ca a duré 2 semaines.

2- Vous souvenez-vous pourquoi vous y étiez allé ? Dans quelles conditions ?

[A du mal à se rappeler.] Je pense que j'étais sortie sans autorisation dans le parc.

Ou bien le médecin m'a dit que je ne prenais pas soin de moi et qu'il fallait qu'on m'aide à mieux prendre soin de moi. J'étais d'accord, il n'y a pas eu besoin de renforts.

3- Comment s'était déroulé le séjour ? Racontez-moi

Pas très bien. C'est trop renfermé. Le temps ne passe pas vite.

Je ne voyais personne. Si, je voyais les infirmiers.

4- Comment étiez-vous au début ?

Au début, angoissée, un peu agitée.

Je restais dans le lit.

5- Comment étiez vous à la fin ?

Après c'est parti, je ne sais pas pourquoi.

J'étais plus calme. Je voulais sortir.

6- Est-ce que vous vous rappelez quels étaient vos sentiments en CSI ?

Du stress. [Je demande une précision] Je ne me sentais pas tranquille.

Pas de peur, plutôt de la tristesse d'être enfermée.

7- A votre avis, pourquoi parle-t-on de chambre de soins intensifs ?

Je ne sais pas. Non, il n'y a pas de soins supplémentaires. Pareil que dehors.

8- Pensez-vous qu'on s'occupe différemment des patients en CSI ?

Non. C'est pareil.

9- Qu'est-ce qui fait du bien en CSI ?

Etre au calme

10- Qu'est-ce qui est difficile en CSI ?

Tout. Que ce soit une pièce petite comme ça.

11- A quoi sert la CSI à votre avis ?

A se calmer. A progresser. C'est un petit peu utile.

12- Et pour vous, à quoi vous a-t-elle servi ?

A rien.

[Question : Et par rapport à l'objectif de départ ?]

Ca m'a aidée à prendre mieux soin de moi.

13- Est-ce que ça a changé quelque chose à votre prise en charge, à votre projet de soins ?

Rien

14- Est-ce que ça a changé quelque chose à votre relation aux soignants ?

Rien

15- Vous souvenez-vous avoir eu des temps de parole en CSI ? Pouvez-vous en parler ?

Il n'y avait pas tellement de temps de parole. Un peu avec les infirmiers. Un peu avec le médecin, pour savoir comment ça va, mais pas trop sur les sentiments.

16- Vous rappelez-vous avoir eu un entretien de recueil du vécu avec M. Perret ? Qu'en avez-vous pensé (utile, suffisant ?)

Non. Je ne savais pas que ça existait. Ca ne sert à rien d'en parler. Peut-être que ça ferait du bien. [ne sait pas]

17- Commentaire ?

C'est dur.

Relevé par thèmes

A- Ressenti

Angoisse, peur : au début, angoissée

Apaisement : après, plus calme / au calme

Ennui, temps long le temps ne passe pas vite

Mal être c'est dur

Oppression : trop renfermé / une pièce petite comme ça

Solitude, abandon je ne voyais personne

Tension interne : un peu agitée / du stress, pas tranquille

Tristesse, déprime : tristesse d'être enfermée

B- Utilité

Ne sert à rien : à rien

A calmer : à se calmer

A progresser : à progresser / à prendre mieux soin de moi

Utile : un petit peu utile

C- Soin intensif

Pas de soin intensif : Non, il n'y a pas de soins supplémentaires. Pareil que dehors

D- Temps de parole

Pas de temps de parole : pas tellement de temps de parole

Pas assez de temps  : Un peu avec les infirmiers. Un peu avec le médecin

Consignes, évaluations : pour savoir comment ça va, mais pas trop sur les sentiments

E- Entretien de recueil du vécu

Aurait pu être utile : Peut-être que ça ferait du bien

Ne sert à rien : Ça ne sert à rien d'en parler

Entretien 3

Date de mise en CI : 09/02/05

Date de sortie de CI : 17/04/05, puis est muté en UMD

Durée totale : 57 jours

Lieu : Saint-Exupéry

Indications : - Agitation psychomotrice

- Acte agressif, violence gestuelle ou verbale, attitudes ou comportements
menaçants

Statut : HO

Diagnostic CIM 10 : autres troubles délirants persistants

Année de naissance : 1958

Sexe : M

Circonstances de MCI :

Résumé de la période d'isolement :

A été contenu.

Entretien de recueil du vécu :

N'en a pas bénéficié

Attitude durant l'entretien de recherche : Patient qui a de grosses difficultés à garder le fil. Mélange CSI et UMD. Confond isolement et cadre de soin (limitations des droits de sortie)

Nécessité de lui rappeler sans cesse le fil conducteur.

Aucune conscience des troubles. Défenses paranoïaques.

Troubles cognitifs suite à une rupture d'anévrisme. Troubles de mémoire.

Très peu de capacités d'élaboration.

1- Vous souvenez-vous de votre dernier séjour en CSI. C'était quand ? Ca a duré combien de temps ?

Il y a deux ans (confond avec son séjour en UMD)

2- Vous souvenez-vous pourquoi vous y étiez allé ? Dans quelles conditions ?

J'étais insupportable parce que je n'avais pas pu avoir de permission chez ses parents. J'étais devenu méchant parce qu'enfermé à l'hôpital. J'ai été emmené de force avec des renforts.

3- Comment s'était déroulé le séjour ? Racontez-moi

Pas de sortie dans le parc. Isolé. Ca travaille dans la tête. Etre enfermé est insupportable.

4- Comment étiez-vous au début ?

Enervé. Tout le monde était d'accord pour que j'aille à Sarreguemines, ça m'a énervé.

5- Comment étiez vous à la fin ?

6- Est-ce que vous vous rappelez quels étaient vos sentiments en CSI ?

En colère. On gamberge. Je suis pas malade. Il y a des gens pire que moi qui ont un appartement. Je ne vois pas pourquoi je suis hospitalisé.

7- A votre avis, pourquoi parle-t-on de chambre de soins intensifs ?

Pas un soin : une punition.

8- Pensez-vous qu'on s'occupe différemment des patients en CSI ?

On est enfermé mais il n'y a pas de soins particuliers.

9- Qu'est-ce qui fait du bien en CSI ?

Rien

10- Qu'est-ce qui est difficile en CSI ?

Etre enfermé. Ne pas avoir de cigarette.

11- A quoi sert la CSI à votre avis ?

A donner une leçon, à dire : il faut être comme ça. Pour ceux qui fument de la drogue : ça les arrête, y a que ça.

12- Et pour vous, à quoi vous a-t-elle servi ?

Ca a réussi à me remettre dans le droit chemin. (Sarreguemines)

13- Est-ce que ça a changé quelque chose à votre prise en charge, à votre projet de soins ?

Rien

14- Est-ce que ça a changé quelque chose à votre relation aux soignants ?

A la fin (à Sarreguemines) on se tutoyait. Ils sont plus cool maintenant.

15- Vous souvenez-vous avoir eu des temps de parole en CSI ? Pouvez-vous en parler ?

Non

16- Vous rappelez-vous avoir eu un entretien de recueil du vécu avec M. Perret ? Qu'en avez-vous pensé (utile, suffisant ?)

Non.

17- Commentaire :

Aucun commentaire

Relevé par thèmes

A- Ressenti

Agitation psychomotrice : ça travaille dans la tête / on gamberge

Colère : en colère

Punition : pas un soin, une punition

Sensation d'enfermement, d'être en prison : etre enfermé est insupportable / être enfermé

B- Utilité

Donner une leçon : à donner une leçon

Normaliser : à dire : il faut être comme ça / remettre dans le droit chemin

Arrêter quand ça dérape : ça les arrête (ceux qui fument de la drogue)

C- Soin intensif

Pas un soin : pas un soin

Pas de soin intensif : pas un soin / pas de soins particuliers

D- Temps de parole

Pas de temps de parole : non

E- Entretien de recueil du vécu

Entretien 4

Date de mise en CI : 07/03/07

Date de sortie de CI : 12/04/07

Durée totale : 36 jours

Lieu : Fontaine et Roseau (1 jour) puis Saint-Exupéry

Indications : - Agitation psychomotrice

- Dissociation, destructuration

- Acte agressif, violence gestuelle ou verbale, attitudes ou comportements
menaçants

Statut : HO

Diagnostic CIM 10 : trouble affectif bipolaire

Année de naissance : 1958

Sexe : M

Circonstances de MCI :

Suite à un problème familial (sa mère est partie sans le prévenir), le patient a manifesté de l'agressivité et a proféré des menaces. Il a été amené par la police et a dû être contenu, avec appel de renforts, à son arrivée à Fontaine Roseau où il est resté 1 jour.

Résumé de la période d'isolement :

Le patient a été décontenu à Saint-Exupéry. L'humeur était triste avec présence d'idées suicidaires. Des temps de sortie provisoire ont été organisés à partir du 13/03 mais différentes transgressions du cadre (cache du tabac sous le matelas) puis des menaces envers un infirmier conduisent à la poursuite de l'isolement et à une mutation à l'USIP (unité de soins intensifs psychiatriques).

Entretien de recueil du vécu :

N'en a pas bénéficié

Attitude durant l'entretien de recherche :

On sent dans cet entretien que le patient mesure ses paroles chaque fois qu'il est question de l'équipe soignante, comme s'il retenait de la colère ou de la violence. Il minimise les menaces proférées.

Plusieurs fois il passe du « je » au « ils », comme pour mettre à distance des propos qui semblent évoquer directement ou pas son histoire personnelle.

Il est encore en HO mais elle va être levée quelques heures après et une sortie est prévue dans les jours qui suivent avec un retour au domicile parental.

Il est revenu 3 jours plus tôt de l'USIP, où il a passé 1 mois et où il s'est montré un « malade modèle ».

C'est un patient qui a fait de la prison.

1- Vous souvenez-vous de votre dernier séjour en CSI. C'était quand ? Ca a duré combien de temps ?

Le mois dernier pendant 35 jours : 30 jours à Saint-Exupéry et 5 jours à l'USIP.

2- Vous souvenez-vous pourquoi vous y étiez allé ? Dans quelles conditions ?

Suite à des propos menaçants à un infirmier. Je l'ai menacé sans vraiment le menacer. J'ai dit : si demain c'était l'apocalypse tu serais le premier que j'égorgerais. J'ai dit ça comme une plaisanterie. Il l'a pris au sérieux et l'a répété au docteur Ribault.

Et après j'ai essayé de rentrer une cigarette dans la CI, ça m'a coûté préjudice.

3- Comment s'était déroulé le séjour ? Racontez-moi

C'est la rage. D'être enfermé. On se pose des questions : pourquoi moi, pourquoi moi ? Pourquoi toujours moi ? Avec le regret des propos qu'on a eu, de notre conduite.

On fait rien, y a rien à faire. Vous attendez... les repas ; les cigarettes. Toujours en instance d'attente. Les 35 jours pareils. Ca passe vite. On s'habitue.

C'est dur, très dur.

Des fois le traitement ne convient pas. Tous les jours vous vous sentez mal dans votre peau. Vous vous sentez abandonné, entre 4 murs. Surtout sans visite dit que parfois on a droit aux visites à l'USIP]

4- Comment étiez-vous au début ?

En colère. Très mal. La haine contre la société.

5- Comment étiez vous à la fin ?

Ca diminue. On finit par s'habituer. Ca s'apaise.

6- Est-ce que vous vous rappelez quels étaient vos sentiments en CSI ?

La colère, c'est tout.

7- A votre avis, pourquoi parle-t-on de chambre de soins intensifs ?

C'est pour les malades difficiles. Pas du soin intensif. Plutôt une punition.

8- Pensez-vous qu'on s'occupe différemment des patients en CSI ?

9- Qu'est-ce qui fait du bien en CSI ?

Ce qui serait bien c'est de la musique classique, un haut parleur accroché au mur, même si c'était contrôlé par eux. Les informations.

Avoir des discussions avec des psychologues, avec d'autres patients.

La CI ça change votre état, vous êtes apaisé

En fait, rien ne fait du bien en CI.

10- Qu'est-ce qui est difficile en CSI ?

Le silence, ça angoisse. Ca fatigue, l'isolement. C'est ce qui vous donne un air d'être apaisé. En vérité, sa maladie elle est toujours latente, elle sommeille. C'est la fatigue qui donne l'air apaisé.

11- A quoi sert la CSI à votre avis ?

A isoler des autres patients quand un patient est menaçant. C'est comme les UMD. Ca sert à se protéger soi-même et les autres.[dit qu'il ne pense pas qu'il aurait pu être dangereux lui-même]

12- Et pour vous, à quoi vous a-t-elle servi ?

A faire le point sur moi-même, sur ma vie, sur l'avenir, on pense beaucoup à l'avenir : que vais-je faire, que vais-je devenir ?

13- Est-ce que ça a changé quelque chose à votre prise en charge, à votre projet de soins ?

Je sens un changement. Deux aides-soignants m'ont dit que j'avais changé. Mais ça ne fait pas longtemps que je suis revenu de l'USIP, je ne me rends pas compte.

14- Est-ce que ça a changé quelque chose à votre relation aux soignants ?

Oui, beaucoup même. Ils ont pas été méchants, plus compatissants, ça crée une sympathie. Mais pour le moment je ne sais pas, ça ne fait pas assez longtemps que je suis sorti.

15- Vous souvenez-vous avoir eu des temps de parole en CSI ? Pouvez-vous en parler ?

Non, ça manque ça. Ils ne viennent pas discuter avec vous. Il manque des psychologues, des psychiatres, des psychanalystes, je ne sais pas. Il faudrait plus d'écoute du patient. Les patients ont en mémoire un lourd passé. Ils ont été abusés, malmenés, abusés sexuellement, c'est ça la maladie. Si ils pouvaient parler, ils seraient sur la voie de la guérison. Mais là, enfermé entre 4 murs, il n'y a pas de discussion.

Les médecins font des évaluations, mais ça tient à rien du tout. C'est des évaluations, pas des temps de parole. Il faudrait des psychologues, qu'ils extraient la maladie du patient. Il n'y a que la parole qui peut faire ça.

Silencieux, face à soi-même, on guérit pas.

Nul médicament ne viendra à bout de vos souvenirs. Ils sont ancrés en vous, ça fait du mal. On ne peut qu'en parler.

16- Vous rappelez-vous avoir eu un entretien de recueil du vécu avec M. Perret ? Qu'en avez-vous pensé (utile, suffisant ?)

Non. Ca serait bien, oui, d'autant que c'est une personne charmante [authenticité ?]. Ca m'a manqué.

18 Commentaire :

C'est difficile à vivre.

La famille n'est pas au courant parce que je n'ai pas de visites depuis 2 mois. On se sent complètement abandonné. [dit qu'il pourrait leur en parler]

C'est difficile surtout quand on est attaché. [dit qu'il a été attaché chaque fois qu'il a été en CI]

C'est le silence, le désert, un endroit pas accueillant. On croit que c'est l'enfer qui vous arrive, qui vous tombe sur la tête.

Je suis encore fatigué, ça m'a beaucoup affecté moralement, je suis plus dans la déprime.

L'isolement, ça ne guérit pas.

Relevé par thèmes

E- Ressenti

Apaisement on finit par s'habituer / ça s'apaise

Fatigue ça fatigue, l'isolement / c'est la fatigue qui donne l'air apaisé / encore fatigué

Colère rage d'être enfermé / en colère / haine contre la société

Ennui, temps long rien à faire / toujours en instance d'attente

Incompréhension pourquoi moi ?

Mal être c'est dur, très dur / mal dans votre peau / très mal / l'enfer

Solitude, abandon abandonné / le silence ,le désert

Regrets regret des propos qu'on a eu

Tristesse, déprime  beaucoup affecté moralement / plus dans la déprime

F- Utilité

A améliorer la relation aux soignants : oui, beaucoup même / ça crée une sympathie

A calmer : vous êtes apaisé

A changer : ça change votre état

A protéger : à isoler des autres patients quand un patient est menaçant /

à se protéger soi-même et les autres

Pour les malades difficiles : pour les malades difficiles / comme les UMD

A faire le point : à faire le point

A évaluer : les médecins font des évaluations

A rien : silencieux, face à soi-même, on guérit pas / l'isolement, ça ne guérit pas

G- Soin intensif

Pas du soin intensif : pas du soin intensif

H- Temps de parole

Pas de temps de parole : non / enfermé entre 4 murs, il n'y a pas de discussion

Ca manque : ça manque ça / il manque des psychologues, des psychiatres, des psychanalystes /

il faudrait plus d'écoute du patient

Consignes, évaluations : c'est des évaluations, pas des temps de parole

I- Entretien de recueil du vécu

Aurait pu être utile : Ca serait bien, oui / Ca m'a manqué

Entretien 5

Date de mise en CI : 24/05/07

Date de sortie de CI : 29/05/07 puis mutation à Saint-Exupéry

Durée totale : 5 jours

Lieu : Fontaine et Roseau (Unité pour psychotiques déficitaires)

Statut : HO

Indications : - Agitation aux urgences. Patient délirant avec humeur haute.

Circonstances de MCI :

Diagnostic CIM 10 : schizophrénie

Année de naissance : 1952

Sexe : M

Résumé de la période d'isolement :

A eu une altercation avec un voisin. A sorti un couteau.

A été contenu pendant 13 heures au début.

Calme malgré quelques « vociférations » et paroles virulentes.

Patient volubile mais conciliant avec une allure impressionnante et un vécu persécutoire.

N'a pas pu bénéficier de temps de sortie progressifs étant donné le type d'unité.

Est porteur de chaussures orthopédiques.

Entretien de recueil du vécu :

N'en a pas bénéficié

Attitude durant l'entretien de recherche :

Grandes difficultés à se concentrer. Part dans de longs récits détaillés après chaque réponse, sans rapport avec le sujet (non transcrits). Doit être sans arrêt arrêté et ramené au thème de départ.

Beaucoup d'excitation et de théâtralisme : se met en scène comme un « gros méchant », injurieux et vulgaire. A été vu en entretien le matin même par le docteur Ribault qu'il connaît bien et s'est montré beaucoup plus posé et adapté. Probablement intimidé par le cadre de cet entretien de recherche, et se défend en cherchant à m'impressionner.

Plus calme vers la fin. S'excuse à deux reprises.

1- Vous souvenez-vous de votre dernier séjour en CSI. C'était quand ? Ca a duré combien de temps ?

Mercredi dernier ou le mercredi d'avant. Pendant 4 ou 5 jours. A Fontaine-Roseau.

2- Vous souvenez-vous pourquoi vous y étiez allé ? Dans quelles conditions ?

Ils m'ont pris pour un brigand, un meurtrier. Pieds et poings liés, si fort que j'avais des marques aux pieds. [Montre ses chevilles]

Une infirmière, ou un médecin, m'a dit : moi, je vous détache, ça m'a fait plaisir parce que ça faisait mal. Je disais : pas si fort.

J'étais agité, pas d'accord pour y aller.

C'était parce que j'avais un couteau, mais j'ai menacé personne, je suis pas un meurtrier. C'était pour me défendre. Un voisin qui pouvait pas me piffer. On a dit que je faisais peur à tout le monde mais c'est moi qui avais peur.

3- Comment s'était déroulé le séjour ? Racontez-moi

Pas de bagarre, très poli, même si je les aimais pas.

On s'emmerde. Quand on arrive à dormir, on passe le temps. Je tournais autour de mon lit.

Il y avait une lumière qui s'allumait dès que je bougeais, quand on se met dessous, au WC. C'est le modernisme. On arrive, ça s'allume tout seul. C'est la merde. Quand mon lit était en face de la lampe, je bougeais un pied, ça s'allumait. Toute la nuit comme ça. Je pouvais pas dormir.

Des drogues, complètement ensuqué, parce que je dormais pas la nuit : on élimine pas les médicaments quand on ne dort pas.

J'étais constamment bourré de médicaments. Plus de médocs que ce que j'avais à manger. Quand on est en cellule, on mange pas beaucoup. Des petites portions comme chez Bocuse. Je disais : j'ai pas assez à manger mais il n'y avait pas de rab.

Les infirmières très gentilles, adorables.

Pas de sorties, juste pour aller à la douche. Toute la journée enfermé, alors qu'au Vinatier j'avais droit à ¼ d'heure de sortie.

4- Comment étiez-vous au début ?

Angoissé, agité.

5- Comment étiez vous à la fin ?

Calme, détendu.

6- Est-ce que vous vous rappelez quels étaient vos sentiments en CSI ?

J'en avais marre, une semaine de plus, j'aurais pété les plombs.

7- A votre avis, pourquoi parle-t-on de chambre de soins intensifs ?

J'en sais rien. C'est pareil que d'habitude à part qu'on est enfermé.

8- Pensez-vous qu'on s'occupe différemment des patients en CSI ?

On s'en occupe beaucoup, ils venaient souvent me voir, ils étaient gentils, tous.

9- Qu'est-ce qui fait du bien en CSI ?

Rien. La sonnette pour appeler.

10- Qu'est-ce qui est difficile en CSI ?

Les caméras. Ils me prennent pour un con. Planquée sous les boutons de la lumière. Aussi dans la salle de bains, dans un bouton rond, c'est dégueulasse.

L'enfermement.

J'ai besoin de mes chaussures, je peux pas marcher, sans chaussures. Je marche, mais très difficilement, sur la pointe des pieds. Alors à force de tourner autour du lit, j'avais mal aux pieds.

11- A quoi sert la CSI à votre avis ?

A calmer les personnes énervées.

12- Et pour vous, à quoi vous a-t-elle servi ?

A ça. A quoi d'autre ça servirait ?

13- Est-ce que ça a changé quelque chose à votre prise en charge, à votre projet de soins ?

Oui. Les gens sont plus gentils.

14- Est-ce que ça a changé quelque chose à votre relation aux soignants ?

Oui, et comment ! Moi, je m'énerve après tout le monde. Je ne suis pas méchant. Allez au fond de votre chambre, qu'ils me disaient. Je comprends pas, parce qu'après, avec leur plateau qui est lourd et qui peut être dangereux, elles étaient à 10 cm de moi pour me mettre le sucre dans le café !

Ca me fait penser aux anciennes prisons : ils passaient directement le plateau par l'espèce de chatière dans la porte.

15- Vous souvenez-vous avoir eu des temps de parole en CSI ? Pouvez-vous en parler ?

Rien. Si : j'ai demandé de baisser le traitement.

Le médecin a voulu que je raconte ma vie, mais tintin !

16- Vous rappelez-vous avoir eu un entretien de recueil du vécu avec M. Perret ? Qu'en avez-vous pensé (utile, suffisant ?)

Non. J'accepte tout, je m'en fous, le bon, le mauvais. Mais je réagis différemment.

[Ca vous a manqué ?]

Bien sûr, personne ne parle avec moi. J'essaie de me faire des amis, je donne des clopes. Et quand j'ai plus de clopes, y a plus personne. Je suis trop gentil.

17- Commentaire :

Rien. A part cette lumière. Il fallait attendre une minute pour que ça s'éteigne.

Relevé par thèmes

A- Ressenti

Angoisse, peur angoissé

Agitation agité

Apaisement calme, détendu

Ennui, temps long on s'emmerde

Ensuqué des drogues, complètement ensuqué / bourré de médicaments

Mal être une semaine de plus, j'aurais pété les plombs / on mange pas beaucoup

Sensation d'enfermement, d'être en prison : l'enfermement

Solitude, chaleur des visites des soignants les infirmières très gentilles,

B- Utilité

A améliorer la relation aux soignants : les gens sont plus gentils / oui

A calmer : à calmer les personnes énervées

C- Soin intensif

Attention des soignants : on s'en occupe beaucoup

Pas de soin intensif : pareil que d'habitude à part qu'on est enfermé

D- Temps de parole

Pas de temps de parole : Rien.

Des consignes Si : j'ai demandé de baisser le traitement.

E- Entretien de recueil du vécu

Aurait pu être utile : J'accepte tout, je m'en fous /

[Ca vous a manqué ?]Bien sûr, personne ne parle avec moi.

Entretien A

Date de mise en CI : 02/04/07

Date de sortie de CI : 03/04/07 puis CSA le 16/04/07

Durée totale : 1 jour

Lieu : Saint-Exupéry

Indications : - Dissociation, destructuration

Statut : HDT

Diagnostic CIM 10 : schizophrénie

Année de naissance : 1974

Sexe : M

Circonstances de MCI :

Résumé de la période d'isolement :

Entretien de recueil du vécu :

Attitude durant l'entretien de recherche :

Cet entretien a été proposé 15 jours auparavant au cours d'un entretien hebdomadaire mené par le psychologue en l'absence du médecin. Ces entretiens sont habituellement menés conjointement par le psychologue et le docteur Ribault.

Le patient a d'abord accepté de participer puis a changé d'avis quand le psychologue lui a rappelé l'entretien de recueil du vécu qu'ils avaient eu à sa sortie de CI.

Il a ensuite renouvelé vigoureusement son refus le lendemain au tour devant le docteur Ribault.

J'ai ensuite plusieurs fois eu l'occasion de croiser le patient dans les couloirs, où il montrait une plus grande réserve à mon égard. J'ai également pu le rencontrer deux fois à l'atelier Mine de Rien (groupe médiatisé ouvert), où nous avons progressivement pu nous « ré apprivoiser » mutuellement, sans que jamais je ne ré aborde la question.

L'après midi suivant la deuxième séance de ce groupe, il m'a abordée dans le couloir en me demandant : « on en parle de la CI ? ». J'ai donc aussitôt organisé cet entretien.

Au cours de l'entretien, il répond de manière fluide, tout en contrôlant ce que je note ou pas.

Il y a des choses que je ne dois pas noter, d'autres pour lesquelles au contraire il faut que je note.

Vers la 14ème question, il est fatigué et manque de s'arrêter.

Il reste bien concentré sur le thème, ne fait pas de digressions.

Il prend soin de moi, remarque qu'il me faut écrire vite. Il est aussi sensible à l'humour, qui lui permet d'arriver au bout malgré la fatigue.

Son discours n'est pas trop hermétique, alors qu'il peut l'être parfois au point de devenir incompréhensible.

On le sent en confiance avec l'unité et le docteur Ribault : « C'est elle qui sait ».

Il est par contre en contentieux avec M. Perret qu'il soupçonne d'essayer de le piéger et de lire dans sa tête à son insu. Mais il relativise, disant que c'est peut-être nécessaire.

1- Vous souvenez-vous de votre dernier séjour en CSI. C'était quand ? Ca a duré combien de temps ?

C'était au début de l'année. Ne sait pas combien de temps ça a duré.

2- Vous souvenez-vous pourquoi vous y étiez allé ? Dans quelles conditions ?

Pour de bonnes raisons. Un comportement comme beaucoup d'entre nous. Rarement pour la maladie. Quelqu'un qui est malade ne peut pas se permettre d'être pénible. Il est plutôt intérieur.

3- Comment s'était déroulé le séjour ? Racontez-moi

On essaie d'y vivre. La première journée se passe, le matin on se réveille, on est content de voir du monde. La moindre visite fait un chaud au coeur. Le matin tout se passe très bien, on prend sa douche.

Le repas, on vient prendre de vos nouvelles, ça amène quelque chose de bon.

4- Comment étiez-vous au début ?

La première fois on regarde autour de nous et on fait un état des choses, ce qui est à notre portée. On est tout seul dans une pièce. C'est blanc, avec des néons, une fenêtre, des robinets. On fait un état des lieux.

5- Comment étiez vous à la fin ?

Il y a les visites du docteur, c'est chaleureux. Elle fait un bilan des jours qui passent. Parole mais surtout concertation. On espère beaucoup du docteur, peut-être pas d'en sortir, mais...[demande que je ne note pas la fin de cette phrase]

On sort transformé. Les patients fument moins, sont moins stressés. On revoit les médicaments et ça donne un résultat, mieux en général, sauf une fois [fait allusion à un patient particulier].

6- Est-ce que vous vous rappelez quels étaient vos sentiments en CSI ?

Ennui mais imagination. On peut rester planté des heures à regarder le décor et à faire travailler l'imagination.

On dort. Il n'y a pas beaucoup de bruit. La clim fait du bruit mais ça fait une présence, on s'y fait. Le moteur c'est une notion de temps pour moi. Un peu comme une montre. [demande que je ne note pas] Ca berce. On voit la pendule, ça remonte le moral. Parfois quand on la regarde on est surpris par l'heure qu'il est.

7- A votre avis, pourquoi parle-t-on de chambre de soins intensifs ?

Le Docteur Ribault me l'avait dit. On est à l'abri du bruit extérieur. C'est statique, c'est plein. C'est un environnement sain - ou simple. Pas de cigarette, température régulée, toilette, simplicité. On simplifie la vie. Notion d'isolement, isolement des cigarettes. On est cocooné [insiste sur ce mot]

Il y a une bonne relation entre les patients et les infirmiers.

8- Pensez-vous qu'on s'occupe différemment des patients en CSI ?

9- Qu'est-ce qui fait du bien en CSI ?

C'est reposant. Ca passe doucement.

10- Qu'est-ce qui est difficile en CSI ?

Rien. Le temps, surtout au début. Après on obtient la nostalgie et on veut sortir de là. A un moment où c'est trop, on est calmé à fond et ça suffit.

11- A quoi sert la CSI à votre avis ?

C'est quand il y a un comportement déplacé. Ca permet de s'interroger sur son comportement et d'y remédier.

12- Et pour vous, à quoi vous a-t-elle servi ?

Avec la présence du docteur assez souvent. Impression qu'on prend bien soin de nous.

13- Est-ce que ça a changé quelque chose à votre prise en charge, à votre projet de soins ?

Rien

14- Est-ce que ça a changé quelque chose à votre relation aux soignants ?

Plus proche

15- Vous souvenez-vous avoir eu des temps de parole en CSI ? Pouvez-vous en parler ?

Quand le docteur vient.

16- Vous rappelez-vous avoir eu un entretien de recueil du vécu avec M. Perret ? Qu'en avez-vous pensé (utile, suffisant ?)

[S'en souvient. Entretien qui a été mentionné par M. Perret quand je lui ai proposé de participer à mes entretiens de recherche] C'est inutile. Tout sert à tout. Je pense qu'on a assez cherché dans tous les sens, ça va 5 minutes. Les choses sont claires. On peut être un bon ou un mauvais psychologue. C'est une percée dans la tête [me demande de rayer ça], une ruse à des fins de soins. [Réfléchit] Des fois il en faut un peu.

18 Commentaire :

C'est un manque de liberté comme un autre, plus restreint.

Relevé par thèmes

E- Ressenti

Apaisement calmé à fond et ça suffit

Solitude, chaleur des visites des soignants content de voir du monde / chaud au coeur /

les visites du docteur, c'est chaleureux /

on vient prendre de vos nouvelles / ça amène quelque chose de bon

Désorientation spatio-temporelle surpris par l'heure qu'il est

Ennui, temps long ennui / le temps surtout au début

Impression de bénéfique mais imagination

Rassurant, sensation de cocooning ça berce / ça passe doucement /

impression qu'on prend bien soin de vous

Reposant, calme reposant

F- Utilité

A améliorer la relation aux soignants : plus proche

A calmer : les patients sont moins stressés

A changer : on sort transformé

A faire le point : ça permet de s'interroger sur son comportement et d'y remédier

A moins fumer : les patients fument moins

A arrêter quand ça dérape : quand il y a un comportement déplacé

A trouver un bon dosage : on revoit les médicaments et ça donne un résultat, mieux en général

A évaluer : elle fait un bilan des jours qui passent

G- Soin intensif

Absence de cigarettes : isolement des cigarettes

Absence de stimulations : On est à l'abri du bruit extérieur

Attention des soignants : présence du docteur assez souvent

Cocooning : on est cocooné

Environnement simplifié: C'est statique, c'est plein. C'est un environnement sain - ou simple

température régulée, toilette, simplicité. On simplifie la vie

Concertation : Parole mais surtout concertation

H- Temps de parole

I- Entretien de recueil du vécu

Inutile : C'est inutile. Tout sert à tout.

Intrusif : Je pense qu'on a assez cherché dans tous les sens, ça va 5 minutes

Peut être utile : Des fois il en faut un peu.

Entretien B

Date de mise en CI : 12/04/07

Date de sortie de CI : 04/05/07

Durée totale : 24 jours

Lieu : Saint-Exupéry

Indications : - Dissociation, destructuration

- Acte agressif, violence gestuelle ou verbale, attitudes ou comportements
menaçants

Statut : HDT

Diagnostic CIM 10 : schizophrénie

Année de naissance : 1965

Sexe : M

Circonstances de MCI :

A l'approche de son anniversaire, le patient a vécu une recrudescence d'angoisse de persécution et a dû être mis en CSA (chambre de soins attentifs). Le passage en CSI avec appel de renforts a été décidé devant une aggravation de son état.

Résumé de la période d'isolement :

Au début, alternance de moments d'agitation intense (crie, tape sur la porte) et de calme. Grandes fluctuations de l'humeur. A dû être contenu aux quatre membres du 12/04 au 17/04. A pu avoir des temps de sortie provisoires à partir du 23/04.

Entretien de recueil du vécu :

Calme. Ne conteste pas la décision dont il reconnaît le bien-fondé puisqu'il a retrouvé son calme. Expérience dure, surtout la contention. C'est par la voix qu'il traduit son agitation (et sa destructuration psychique) : « je parle et je chante ».

Dit que ce qui était difficile à supporter était de ne pas pouvoir fumer. Entretien qui dérive ensuite vers un entretien classique.

Attitude durant l'entretien de recherche :

Patient qui est dans la plainte. Tonalité dépressive et immature.

Il a du mal à se concentrer sur le sujet à partir de la moitié du questionnaire, je dois le recentrer plusieurs fois.

1- Vous souvenez-vous de votre dernier séjour en CSI. C'était quand ? Ca a duré combien de temps ?

Il n'y a pas longtemps. J'y passe encore la nuit et les siestes [en réalité, est sorti de la CI il y 3 semaines et l'a réintégrée il y a 3 jours pour ces courtes périodes car n'arrivait pas à respecter ses temps en chambre]

2- Vous souvenez-vous pourquoi vous y étiez allé ? Dans quelles conditions ?

Parce que j'ai fumé du cannabis.

3- Comment s'était déroulé le séjour ? Racontez-moi

Au début, j'étais attaché, les deux mains et les deux pieds. C'est la misère. Qu'ils arrêtent de faire ça aux gens ! Attaché c'est pire. Au moins qu'ils n'attachent que les pieds ou que les mains. C'est parce qu'ils ont peur qu'ils fassent quelque chose. Je comprends pas qu'on attache les pieds et les mains. On peut pas se gratter. Des fois on nage dans la pisse.

J'ai vraiment souffert. Pourvu que ça ne se reproduise plus.

J'y suis allé forcé, avec des renforts. Il y en a beaucoup, l'un il vous attrape les pieds, les autres les mains, un il vous étrangle. Pendant qu'ils vous attachent, ils vous déshabillent et ils vous mettent en pyjama, tout à la fois.

Etre détaché ça fait du bien, on se sent libre malgré qu'on est encore en CI, on marche, on peut circuler, le sang circule.

Les journées, c'est la misère, on pleure, on rigole, on pense à ce qu'on a fait avant, on rigole de quand on était enfant. Ca fait repenser au passé, il faut bien s`occuper sinon on devient fou.

La CI ça arrange rien. Il vaut mieux que le médecin il vous parle [pour que ça s'arrange].

4- Comment étiez-vous au début ?

Au début, agité, je frappais, je tapais dans la porte. Après on comprend que ça sert à rien. On garde le silence et c'est eux qui viennent me voir. Alors je réponds pas. Quand c'est le médecin je dis que ça va, pour qu'elle me laisse sortir.

Les infirmiers je les respecte comme mes amis. Ils sont super ici à Saint-Ex [cite des noms]

5- Comment étiez vous à la fin ?

Quand on nous relâche on se sent libre mais après on remarque qu'on est en prison. Ca fait 2 ans que je suis là.

6- Est-ce que vous vous rappelez quels étaient vos sentiments en CSI ?

Pas de sentiments. On a tous les sentiments. Un coup on rigole, un coup on pleure.

7- A votre avis, pourquoi parle-t-on de chambre de soins intensifs ?

Ca soigne. Ca calme les gens. Ca les pose. Moi ça m'a calmé.

Avant, le premier qui disait un mot, je luis mettais un coup de boule. Maintenant, c'est plus la discipline.

Il y a les piqûres aussi. J'ai horreur de ça. Si on n'est pas calme, ils viennent avec une boîte, il y a du coton et la seringue. J'en ai eu beaucoup en 2 ans. 5 ou 6.

8- Pensez-vous qu'on s'occupe différemment des patients en CSI ?

Oui, il y a des patients qu'on ne traite pas de la même façon : Une femme qui a fait Heil Hitler à ma mère, elle n'est restée que 2 jours. Moi, 2 mois. Les arabes sont moins bien traités. [n'a pas compris la question, je la lui répète]

C'est pareil. Pas de soins particuliers.

9- Qu'est-ce qui fait du bien en CSI ?

Rien. Avoir de l'eau potable à boire. Pas celle qui est là-dedans, elle est imbuvable.

Le calme, c'est bien. Rien d'autre.

10- Qu'est-ce qui est difficile en CSI ?

Quand on est attaché. [montre sa cheville où l'on voit une cicatrice à la place des contentions]

L'attente. On ne sait pas quand on sort.

11- A quoi sert la CSI à votre avis ?

A emmerder les gens, à les embêter encore plus, à les faire souffrir encore plus. A l'hôpital on est toujours en prison, c'est la liberté qu'on vous prend.

Depuis 1999, j'arrête pas de faire de l'isolement.

12- Et pour vous, à quoi vous a-t-elle servi ?

A être bien avec les gens qui m'entourent [les autres patients]. A être calme, tranquille.

C'est utile [se ravise] mais pas trop, non. Pas plus d'un mois.

13- Est-ce que ça a changé quelque chose à votre prise en charge, à votre projet de soins ?

14- Est-ce que ça a changé quelque chose à votre relation aux soignants ?

Ils sont gentils avec moi, ils me font plus confiance. Avant, je faisais n'importe quoi. Je vieillis.

15- Vous souvenez-vous avoir eu des temps de parole en CSI ? Pouvez-vous en parler ?

Oui. Le docteur Vignat est venu me voir. Il m'a dit : « Pourquoi vous refusez qu'on vous soigne ? ». C'est un très bon médecin.

Pas de temps de parole avec les infirmiers, les médecins. C'est la misère, j'ai jamais de sous, jamais rien, j'ai 42 ans, comment je vais être à 50 ans ?

16- Vous rappelez-vous avoir eu un entretien de recueil du vécu avec M. Perret ? Qu'en avez-vous pensé (utile, suffisant ?)

Je ne me rappelle pas, j'ai des problèmes de mémoire. [C'était 10 jours auparavant]

18 Commentaire :

Relevé par thèmes

A- Ressenti

Agitation : agité

Instabilité de l'humeur on pleure, on rigole, tous les sentiments

Ennui, temps long il faut bien s'occuper / l'attente

Mal être c'est la misère / sinon on devient fou

Sensation d'enfermement, d'être en prison : Quand on nous relâche on se sent libre

Résignation Après on comprend que ça sert à rien. On garde le silence

B- Utilité

A améliorer la relation aux soignants : ils sont gentils avec moi, ils me font plus confiance

A calmer : à être calme, tranquille / Ca calme les gens. Ca les pose / moi, ça m'a calmé

Pour les malades difficiles maintenant, c'est plus la discipline

A faire le point : ça fait repenser au passé

Néfaste : à emmerder les gens, à les embêter encore plus, à les faire souffrir encore plus

A rien : la CI ça arrange rien

A soigner : ça soigne

C- Soin intensif

Pas du soin intensif : C'est pareil. Pas de soins particuliers

Absence de stimulations : le calme, c'est bien

D- Temps de parole

Pas de temps de parole : pas de temps de parole avec les infirmiers, les médecins

E- Entretien de recueil du vécu

Ne se souvient pas : Je ne me rappelle pas, j'ai des problèmes de mémoire.

Entretien C

Date de mise en CI : 11/05/07

Date de sortie de CI : 15/05/07

Durée totale : 4 jours

Lieu : Saint-Exupéry

Indications : - Agitation psychomotrice

- Dissociation, destructuration

- Acte agressif, violence gestuelle ou verbale, attitudes ou comportements
menaçants : « violence verbale à l'encontre des patients et se fait agresser en
retour
 ».

Statut :

Diagnostic CIM 10 : schizophrénie

Année de naissance : 1961

Sexe : F

Circonstances de MCI :

La patiente vient de traverser une période de crise qui a duré environ 3 semaines après qu'elle ait dû renoncer à un appartement qu'elle conservait depuis des années.

La décision de MCI a été prise suite à une altercation avec un autre patient. La patiente l'a agressé verbalement, de manière raciste, et il a répliqué en lui donnant un coup de poing qui lui a percé le tympan.

Les propos racistes sont fréquents chez elle et lui ont déjà valu plusieurs avertissements. Elle a même une fois été mise dehors, pendant deux jours.

Résumé de la période d'isolement :

Au début, elle est sur un mode revendicateur, dénonçant l'injustice dont elle pensait être victime.

Elle s'apaise ensuite, chante, fait de la gymnastique...

Elle a des temps de sortie accompagnée dans l'unité, pendant lesquels elle fume une cigarette.

Entretien de recueil du vécu :

A l'entretien de recueil du vécu, elle est dans le déni de toute responsabilité, parle de décision arbitraire du médecin.

Elle dit ne pas avoir souffert étant donné qu'elle aime la solitude et qu'elle n'a pas la notion du temps (ce qui revient très souvent dans son discours).

Attitude durant l'entretien de recherche :

Au moment de l'entretien, la patiente est à nouveau calme dans le service après la période de crise.

Elle fait beaucoup de digressions sur l'hypnose, mais c'est son mode de communication habituel.

Il a fallu insister un peu pour la convaincre de participer car, disait-elle, elle l'avait déjà fait avec M. Perret qui l'avait hypnotisée, elle ne voyait pas l'intérêt. Elle a accepté quand j'ai parlé de mes études.

Elle se montre très coopérante pendant l'entretien. Elle arrive à rester concentrée sur le sujet quand les questions sont précises. Quand la consigne est libre (y a-t-il des choses que vous voudriez rajouter ?), elle perd de vue le thème de l'entretien et a besoin qu'on le lui rappelle.

1- Vous souvenez-vous de votre dernier séjour en CSI. C'était quand ? Ca a duré combien de temps ?

Récemment mais je ne sais pas quand parce que je suis sous hypnose. Ca a duré un jour et demi ou deux jours et demi.

2- Vous souvenez-vous pourquoi vous y étiez allé ? Dans quelles conditions ?

Gratuitement à cause des autres qui m'ont agressée et c'est sur moi que ça retombe à cause des mots que j'emploie. Ils le prennent mal et du coup c'est moi qui trinque soi-disant parce que je suis raciste ou que j'ai des mots qui dérangent. Si c'était quelqu'un d'autre...

Ca s'est passé tranquillement, sans renforts.

3- Comment s'était déroulé le séjour ? Racontez-moi

Normalement. Quand j'ai sommeil, je dors. La journée, je fais ma gymnastique, je chante, je danse. Le déjeuner, la douche, les médicaments matin, midi et soir.

La douche est juste à côté. Les infirmiers sont là, j'ai une aide, pour m'accompagner.

4- Comment étiez-vous au début ?

Normalement. Je n'ai rien à me reprocher.

5- Comment étiez vous à la fin ?

Pareil, sauf que j'ai eu des menaces de ceux à cause de qui j'y suis allée.

6- Est-ce que vous vous rappelez quels étaient vos sentiments en CSI ?

Aucun sentiment. Je me sentais bien, au moins je ne fume pas, c'est bien.

7- A votre avis, pourquoi parle-t-on de chambre de soins intensifs ?

Rien du tout comme soins intensifs. J'en sais rien, je suis pas médecin.

Je vois pas pourquoi on dit soin intensif, peut-être parce qu'on reste plus longtemps, une fois je suis restée une semaine. [enchaîne sur des souvenirs d'hospitalisation]

8- Pensez-vous qu'on s'occupe différemment des patients en CSI ?

Pour moi c'est pareil, j'en sais rien.

9- Qu'est-ce qui fait du bien en CSI ?

D'arrêter de fumer. Le calme, ça ne me dérange pas parce que j'aime la solitude. Il n'y a jamais de silence parce que dans ma tête je chante des chansons, je réfléchis, je me rappelle des souvenirs.

10- Qu'est-ce qui est difficile en CSI ?

Ne pas avoir de chasse d'eau. Quand on va aux toilettes, on tire sa chasse d'eau, c'est la moindre des choses.

Comme d'habitude, sauf que je comprends pas le comportement du docteur R. qui veut m'obliger à penser comme elle. Je suis obligée de mentir, de lui donner raison parce qu'elle est contre mes idées.

11- A quoi sert la CSI à votre avis ?

J'en sais rien. Pour les autres ça sert à éviter les disputes, les bagarres et même ceux qui se disputent pas, à les isoler pour leur pensée. [Je demande une explication] Si elles ont des pensées qui dépassent la normale, elles vont prendre des crises.

Mais je ne comprends pas : pourquoi les mettre au maximum d'eux-mêmes, au lieu de discuter avec elles ? Il y a des gens qui crient, qui tapent aux portes.

12- Et pour vous, à quoi vous a-t-elle servi ?

A rien qu'à arrêter de fumer. [Mais vous avez repris ensuite ?] C'est parce qu'en moi je ne suis pas seule, j'ai quelqu'un qui manipule mon esprit, sans arrêt je suis obligée de faire attention à ce que je pense et ressens.

13- Est-ce que ça a changé quelque chose à votre prise en charge, à votre projet de soins ?

Je ne sais pas. Rien qu'on m'ait dit.

14- Est-ce que ça a changé quelque chose à votre relation aux soignants ?

Si ça devait se répéter souvent, je dirais que c'est des mauvais soins, qu'ils ne considèrent pas la personne, qu'ils ne voient que l'apparence et ce qu'il y a sur le dossier.

Sachant qu'un mot peut vouloir dure plusieurs choses.

15- Vous souvenez-vous avoir eu des temps de parole en CSI ? Pouvez-vous en parler ?

Non. Ils sont venus prendre la tension, la température, pour la douche, et me dire vous sortez à telle heure pour tel temps... Plus des consignes, pas des paroles.

16- Vous rappelez-vous avoir eu un entretien de recueil du vécu avec M. Perret ? Qu'en avez-vous pensé (utile, suffisant ?)

Non, c'était le même système que le vôtre [des questions]. Mais il me mettait sous hypnose et j'étais très en colère car il m'y a mis sans que je m'en rende compte. J'ai fait des petits yeux [méfiants] et il m'a donné aucune explication.

On a parlé de la chambre d'isolement mais pas que de ça.

Non, ça ne m'aide en rien d'en parler.

17- Commentaire :

Je me rappelle d'un jeune ado et le lui parlais beaucoup de la nature et quand il était en chambre d'isolement je lui disais : dessine des fleurs, et il donnait des coups de pieds dans la porte. Je lui ai dis : excuse moi et après un jour il a compris. Il est parti. Je voulais l'aider en lui faisant des électrochocs positifs, en parlant de la nature, des belles choses.

Je voudrais qu'avant qu'on mette les gens en CI sans faire attention aux cris... il y a des manipulateurs qui manipulent les médecins, on peut pas le voir parce qu'on pense trop aux malades... discuter avant avec l'infirmière et ne pas nous prendre pour des imbéciles.

Plus de discussion, parce que parfois, en 5 secondes il y a une bagarre et ils vous mettent en CI et c'est nous qui trinquons.

Je tiens à rajouter qu'ils sont capables de penser à votre place, ils l'utilisent partout [l'hypnose].

Relevé par thèmes

A- Ressenti

Calme normalement / aucun sentiment, je me sentais bien / le calme, ça ne me dérange pas

Punition, injustice : c'est moi qui trinque

B- Utilité

A protéger : à éviter les disputes, les bagarres

A rassembler : à les isoler pour leur pensée

A arrêter quand ça dérape : si elles ont des pensées qui dépassent la normale,

elles vont prendre des crises.

C- Soin intensif

Absence de stimulations : le calme, ça ne me dérange pas

Pas du soin intensif : rien du tout comme soins intensifs / je vois pas pourquoi on dit soin intensif /

pour moi c'est pareil,

D- Temps de parole

Pas de temps de parole : non

Consignes, évaluations : plus des consignes, pas des paroles.

E- Entretien de recueil du vécu

Intrusif : il me mettait sous hypnose et j'étais très en colère

car il m'y a mis sans que je m'en rende compte / il m'a donné aucune explication.

Inutile Non, ça ne m'aide en rien d'en parler.

Entretien D

Date de mise en CI : 01/03/07

Date de sortie de CI : 10/03/07

Durée totale : 10 jours

Lieu : Saint-Exupéry

Indications : - Dissociation, destructuration

- Confusion, désorientation

Statut : HL

Diagnostic CIM 10 : trouble schizo-affectif, type maniaque

Année de naissance : 1952

Sexe : M

Circonstances de MCI :

Résumé de la période d'isolement :

Temps de sortie à partir du 3ème jour.

Entretien de recueil du vécu :

Attitude durant l'entretien de recherche :

L'humeur est plutôt triste mais sans excès, après une période d'agitation maniaque ayant nécessité un séjour en CSA d'une dizaine de jours.

Le patient est posé, répond sans difficulté, ni problème de concentration.

1- Vous souvenez-vous de votre dernier séjour en CSI. C'était quand ? Ca a duré combien de temps ?

Je ne sais plus. Ca duré un mois à peu près.

2- Vous souvenez-vous pourquoi vous y étiez allé ? Dans quelles conditions ?

Je ne sais plus quelle raison ils m'avaient donnée. J'avais déconné, fait une connerie. J'étais d'accord, ça s'est passé dans le calme.

3- Comment s'était déroulé le séjour ? Racontez-moi

Au début c'est dur et après on s'habitue. C'est le quotidien, bouteille d'eau, passage des infirmiers...

Une fois, j'étais en contention. C'est pas marrant, de ne pas pouvoir pisser, pisser dans le bocal. [Combien de temps ?] Quelques semaines.

On dort, y a que ça à faire. Dormir, boire, manger.

On est contraint par la force. On est réveillé le matin, petit déjeuner, on va dans la douche, pendant ce temps ils refont le lit, on se remet dans le lit, le médecin vient nous voir. C'est très routinier.

4- Comment étiez-vous au début ?

Je n'étais pas agité. Plutôt angoissé. Speed.

5- Comment étiez vous à la fin ?

Plus clean, moins speed.

6- Est-ce que vous vous rappelez quels étaient vos sentiments en CSI ?

Déplacé. Je me demandais ce que je faisais dans cette chambre.

[Déplacé : pour pas à votre place ?]

Oui. C'est un sentiment négatif. Comment dire... ?

7- A votre avis, pourquoi parle-t-on de chambre de soins intensifs ?

Parce qu'on fait des soins intensifs. On suit son évolution de près. Le lavage, la mourriture, le lit, tout ce qui va avec : plus cadré.

8- Pensez-vous qu'on s'occupe différemment des patients en CSI ?

Pareil

9- Qu'est-ce qui fait du bien en CSI ?

Le repos.

10- Qu'est-ce qui est difficile en CSI ?

D'être enfermé, pas pouvoir sortir, être prisonnier, quoi.

Les contentions, c'est plus dur. Mais c'est exceptionnel.

Le problème, c'est qu'on m'enlève mes lunettes et je ne vois pas l'heure qu'il est, si c'est le jour ou la nuit. Le temps est long.

11- A quoi sert la CSI à votre avis ?

A calmer un état de crise. A récupérer les bouts qui s'en vont. Faire d'un état nerveux un état stable.

12- Et pour vous, à quoi vous a-t-elle servi ?

Je me le demande... Je ne sais pas.

C'est une solution. Pas terrible mais y a pas autre chose.

13- Est-ce que ça a changé quelque chose à votre prise en charge, à votre projet de soins ?

Non

14- Est-ce que ça a changé quelque chose à votre relation aux soignants ?

Un peu. Avec certains j'ai plus de relations qu'avec d'autres.

15- Vous souvenez-vous avoir eu des temps de parole en CSI ? Pouvez-vous en parler ?

Oui. Le médecin qui vient, [cite des noms de médecins hommes]. Ils vous parlent mais ils restent pas longtemps. Je peux répondre, mais brièvement. C'est plus des questions/réponses.

Avec les infirmiers, pendant le temps de la cigarette, oui, quand même. C'est toujours trop court. Ils sont pressés, je crois.

16- Vous rappelez-vous avoir eu un entretien de recueil du vécu avec M. Perret ? Qu'en avez-vous pensé (utile, suffisant ?)

Non. Je ne savais pas que ça existait. Oui, ça peut être utile, sur le vif, à exprimer les sentiments, voir comment ça va.

[Ca vous a manqué ?]

Pas vraiment

17- Commentaire :

C'est pas idéal mais il n'y a pas autre chose. On ne peut pas changer l'ordre établi.

Relevé par thèmes

A- Ressenti

Angoisse, peur angoissé

Apaisement après on s'habitue / plus clean, moins speed

Désorientation spatio-temporelle si c'est le jour ou la nuit

Ennui, temps long on dort, y a que ça à faire / le temps est long

Mal être au début c'est dur / déplacé / c'est un sentiment négatif

Sensation d'enfermement, d'être en prison : enfermé, prisonnier

Tension interne speed

Incompréhension je me demandais ce que je faisais dans cette chambre

B- Utilité

A améliorer la relation aux soignants : un peu. Avec certains j'ai plus de relations qu'avec d'autres

A calmer : à calmer un état de crise

A se rassembler : récupérer les bouts qui s'en vont.

A stabiliser : faire d'un état nerveux un état stable

A rien : je me le demande... Je ne sais pas / C'est une solution. Pas terrible mais y a pas autre chose

C- Soin intensif

Absence de stimulations : le repos

Attention des soignants : on suit son évolution de près

Plus cadré plus cadré

Pas de soin intensif : pareil

D- Temps de parole

Consignes, évaluations : plus des questions/réponses

Pas assez de temps : ils vous parlent mais ils restent pas longtemps /

c'est toujours trop court. Ils sont pressés, je crois

E- Entretien de recueil du vécu

Ne s'en souvient pas : Non. Je ne savais pas que ça existait.

Peut être utile : Oui, ça peut être utile, sur le vif, à exprimer les sentiments, voir comment ça va.

Ça n'a pas manqué : [Ça vous a manqué ?] Pas vraiment

Sujet E

Date de mise en CI : 27/03/06

Date de sortie de CI : 04/04/06

Durée totale : 8 jours

Lieu : Saint-Exupéry

Indications : - Acte agressif, violence gestuelle ou verbale, attitudes ou comportements
menaçants : « passage à l'acte violent sur une patiente de l'unité ».

Statut : HO

Diagnostic CIM 10 : schizophrénie

Année de naissance : 1977

Sexe : M

Circonstances de MCI :

A donné une claque à une patiente de l'unité et a eu une altercation avec un patient.

Résumé de la période d'isolement :

Est resté calme mais tendu, ne comprenant pas ce qui était prévu pour lui. Vécu persécutoire. Parle de cellule, d'injustice.

A déjà été isolé auparavant, sur de plus longues périodes.

Entretien de recueil du vécu :

Le patient souhaitait déjà rencontrer M. Perret avant d'être isolé.

Pendant cet entretien, il est détendu et investit l'échange. Il reconnaît les raisons de l'isolement mais ne s'y attarde pas.

Il exprime un ressenti très physique : sensations corporelles de chaleur, de transpiration et peur d'étouffer. Il parle d'un manque aigu de cigarette qui a affecté sa relation avec l'équipe infirmière.

Comme il ne veut pas s'étendre sur le sujet, l'entretien s'oriente ensuite vers un entretien classique.

Attitude durant l'entretien de recherche :

Patient qui revient dans l'unité 1 à 2 fois par semaines pour des consultations. Il a accueilli ma demande d'entretien avec beaucoup d'angoisse et a d'abord refusé de participer, tout en m'en reparlant à chacune de nos rencontres. Il me donne enfin son accord la veille de mon départ.

Il est alors dans une période difficile. Il vient de commencer un stage d'évaluation, vient d'être victime d'une agression (par son beau-père ?), lutte contre une rechute qu'on sent proche.

Vu en entretien un peu avant par le médecin, il est dans un questionnement sur son diagnostic et sur le traitement prescrit. Il se montre soupçonneux, dans un mouvement qui est nettement projectif : c'est lui qu'il remet en question au terme d'une semaine où il a été beaucoup en difficulté. Déstabilisé, il cherche des explications à son état : ainsi dira-t-il que c'est la chambre d'isolement qui l'a rendu « bipolaire ».

Ses propos sont empreints d'angoisse et de persécution. Il est néanmoins relativement apaisé quand il répond à mes questions.

1- Vous souvenez-vous de votre dernier séjour en CSI. C'était quand ? Ca a duré combien de temps ?

Il y a 3 ou 4 ans. Pendant 1 mois, 2 mois et demi.

2- Vous souvenez-vous pourquoi vous y étiez allé ? Dans quelles conditions ?

3- Comment s'était déroulé le séjour ? Racontez-moi

Au bout d'un moment, on n'a plus de forces, on s'épuise.

4- Comment étiez-vous au début ?

5- Comment étiez vous à la fin ?

6- Est-ce que vous vous rappelez quels étaient vos sentiments en CSI ?

Un sentiment de vide, de trou noir. Une sensation de ne pas pouvoir respirer. On a peur, on se sent vide. C'est oppressant, angoissant, on est enfermé [montre sa gorge].

On a l'impression que c'est une punition, il y a une odeur quand on y rentre, on ne sait pas pourquoi on y va.

7- A votre avis, pourquoi parle-t-on de chambre de soins intensifs ?

Parce que certaines personnes sont attachées et même si ils hurlent les médecins ne viennent pas et des fois ça peut durer éternellement jusqu'à avoir un trou noir dans la tête.

C'est très intensif parce que c'est pire que les menottes, on peut pas dormir.

8- Pensez-vous qu'on s'occupe différemment des patients en CSI ?

9- Qu'est-ce qui fait du bien en CSI ?

Les pauses cigarettes et la douche le matin, les repas aussi parce qu'on n'a rien d'autre à faire que manger quand on est en chambre d'isolement.

10- Qu'est-ce qui est difficile en CSI ?

Ce que je supportais pas, c'est quand je voyais plusieurs médecins, nombreux pour regarder, c'est plutôt effrayant, ça fait peur.

11- A quoi sert la CSI à votre avis ?

A ouvrir la personnalité de la personne pour que le médecin découvre...

12- Et pour vous, à quoi vous a-t-elle servi ?

A avoir des hauts et des bas. Avant, j'étais une personne qui changeait jamais, une personne simple, avec sa personnalité, maintenant je suis bipolaire.

13- Est-ce que ça a changé quelque chose à votre prise en charge, à votre projet de soins ?

14- Est-ce que ça a changé quelque chose à votre relation aux soignants ?

Oui, surtout dans ma tête, j'étais comme un homme qui s'en allait au fin fond du désert sans savoir se guider.

[Je demande des précisions]

Pareil, pas plus ou moins confiance. L'important, c'est plutôt de retrouver les patients pour rigoler et parler dans le service. [quand on sort de la CI].

15- Vous souvenez-vous avoir eu des temps de parole en CSI ? Pouvez-vous en parler ?

On est impatient d'en avoir chaque fois qu'on entend la porte s'ouvrir. Ca dépend de l'heure, s'ils sont pressés ou pas.

16- Vous rappelez-vous avoir eu un entretien de recueil du vécu avec M. Perret ? Qu'en avez-vous pensé (utile, suffisant ?)

C'est moi qui lui réclame toujours mais il est dans l'incapacité de me recevoir.

Le seul entretien intéressant avec M. Perret, c'a été quand on a parlé pour avoir mon appartement. Mais on a jamais parlé de la chambre d'iso. Si M. Perret s'intéressait vraiment à ce qui nous arrive dans la tête en chambre d'isolement, je serais pas bipolaire.

18 Commentaire :

En chambre d'isolement, on ne peut rien dire, il faut la boucler. J'y ai été très longtemps et après je me suis enfui, je ne voulais plus être à l'hôpital. La chambre d'isolement, c'est très dur. Ils croyaient que j'étais dangereux. Quand ils ont compris que je n'étais pas dangereux, ils m'ont laissé sortir pour fumer une cigarette.

Relevé par thèmes

A- Ressenti

Angoisse, peur : angoissant / effrayant / peur

Ennui, temps long rien d'autre à faire que manger

Fatigue on n'a plus de forces, on s'épuise

Incompréhension on ne sait pas pourquoi on y va

Vide vide, trou noir

Mal-être il y a une odeur quand on y rentre / c'est très dur

Punition : punition

Oppression : sensation de ne pas pouvoir respirer / oppressant / enfermé

Sensation d'enfermement, d'être en prison  on est enfermé [montre sa gorge]

Solitude on est impatient d'en avoir chaque fois qu'on entend la porte s'ouvrir

B- Utilité

A évaluer : à ouvrir la personnalité de la personne pour que le médecin découvre...

A rien : pareil, pas plus ou moins confiance.

Néfaste : à avoir des hauts et des bas

C- Soin intensif

Contention : parce que certaines personnes sont attachées

D- Temps de parole

Pas assez de temps : ça dépend de l'heure, s'ils sont pressés ou pas

E- Entretien de recueil du vécu

Ne s'en souvient pas : C'est moi qui lui réclame toujours

mais il est dans l'incapacité de me recevoir. Mais on a jamais parlé de la chambre d'iso.

Entretien F

Date de mise en CI : 27/04/07

Date de sortie de CI : 02/05/07

Durée totale : 6 jours

Lieu : Alphée (UHCD)

Indications : - Etat d'agitation psychomotrice avec discours incohérent et agressif

Statut : HO

Diagnostic CIM 10 : Trouble affectif bipolaire

Année de naissance : 1964

Sexe : M

Circonstances de MCI :

A été amené menotté par la police dans un état de grande agitation maniaque.

Résumé de la période d'isolement :

A eu des sorties progressives à partir du 30/04

Entretien de recueil du vécu :

N'en a pas bénéficié

Il s'agit d'un patient qui a une grande capacité d'introspection et qui recherche énormément le lien et la discussion avec les soignants. Ayant été hospitalisé à plusieurs reprises, et isolé plusieurs fois également, il a donc eu beaucoup d'occasions d'élaborer autour de la CI avec des soignants.

Attitude durant l'entretien de recherche :

L'entretien dure 1/2h. Le patient est dans une phase maniaque qui commence à s'apaiser, laissant apparaître la dépression sous jacente. Il a l'air fatigué et triste. Il parle sans interruption. Les idées s'enchaînent vite mais il reste concentré sur le sujet. Pas de coq à l'âne, pas de jeux de mots. Il est sérieux et grave.

A la fin, il prolonge l'entretien en me racontant comment il est arrivé à Saint-Exupéry.

Il avait arrêté son traitement depuis plus de 15 jours. Ses parents étaient partis. Il avait eu des mots avec son fils pour une histoire de mauvaise note à l'école. Mieux valait que ce soit les flics qui l'aient amené à l'hôpital plutôt que les pompiers parce que ça aurait pu être beaucoup plus grave [me laisse penser à une possible TS]

Dit que c'est la première fois qu'il a un entretien sur ce thème et que ça lui a fait du bien. A relativiser car est encore en phase maniaque et fait des compliments à tous les membres du personnel.

1- Vous souvenez-vous de votre dernier séjour en CSI. C'était quand ? Ca a duré combien de temps ?

Le 26 avril, pendant 4 nuits et 5 jours. J'avais eu une injection avant, donc j'étais calme même si pas d'accord.

2- Vous souvenez-vous pourquoi vous y étiez allé ? Dans quelles conditions ?

Parce que j'étais extrêmement agité en arrivant des urgences. Pour ma sécurité et celle des autres. Avec du recul je pense qu'ils ont eu raison et que c'était une bonne chose.

3- Comment s'était déroulé le séjour ? Racontez-moi

Au début, effrayant. Aucun décor. Comme d'être jeté dans un trou tout blanc. Le premier instinct est de remettre tout de suite le pied dehors.

En prison on sait qu'il y a du monde. Là, il n'y a pas de bruit avec la double porte calfeutrée, on ne voit rien de la fenêtre.

On ne peut pas évacuer soi-même ses déchets et ça donne un sentiment de honte, d'être un animal. On perd le statut d'humain, comme un chien qu'on a enfermé en lui disant je reviens te chercher.

Le temps est rythmé par les repas, chronologie de la journée.

On est éclairé en permanence : la nuit n'a pas de sens.

Il faudrait installer un haut parleur, une radio murale, de la musique classique, une voix humaine.

On appelle, mais on n'est jamais entendu à cause de la double porte. On appelle : Madame l'infirmière !

Les repas servent de repère.

On essaie de dialoguer, on demande des choses, comme les clopes, pour voir quelqu'un. C'est comme une relation prisonnier/bourreau (comme dans La Ligne Verte)

C'est l'ultime punition pour un patient, en tout cas c'est comme ça qu'on en parle entre nous.

C'est « game over », on n'est plus dans la partie.

Ne pas pouvoir s'essuyer comme on voudrait après être allé aux toilettes, ça fait que les patients peuvent rester une journée sale, avant qu'on les amène à la douche.

4- Comment étiez-vous au début ?

On essaie de plaire, de montrer qu'on a été maté.

On se dit : « Je suis devenu une bête sauvage » puis la forme humaine en nous nous dit qu'il faut dialoguer.

Il y a les injections. On comprend vite qu'il faut montrer la fesse et se laisser faire.

5- Comment étiez vous à la fin ?

Ils ont compris que je recherchais les contacts humains et ils m'ont fait sortir au bout de 4 jours.

6- Est-ce que vous vous rappelez quels étaient vos sentiments en CSI ?

De la rage de m'être fait avoir, de n'avoir pas pu me contrôler, contre le système, pas contre les soignants. Un sentiment d'injustice au début.

L'impression qu'on restera toujours des gens faibles, qu'on n'avance pas et que ça se répète à l'hôpital : comme dehors, on n'est pas grand-chose.

Impression d'être devenu une merde.

7- A votre avis, pourquoi parle-t-on de chambre de soins intensifs ?

Tous les regards sont braqués sur vous. On essaie de vous trouver un bon dosage, on regarde comment vous réagissez entre les repas, par exemple. On évalue.

8- Pensez-vous qu'on s'occupe différemment des patients en CSI ?

9- Qu'est-ce qui fait du bien en CSI ?

Le bruit des clés qui rassure : « c'est bon, ils viennent ». Pas comme en prison où c'est effrayant parce que ça peut vouloir dire qu'on va au tribunal par exemple. Là, c'est plus libérateur.

Après 24h, une quiétude, parce qu'on n'est plus agressé par quoi que ce soit. Plus d'agression sonore, visuelle. Le vide redevient rassurant. On est seul avec soi-même, on rêve, pas de cauchemars, comme dans le roman de Jack London.

10- Qu'est-ce qui est difficile en CSI ?

Les 1ères 24 h on tape aux portes et puis ça s'arrête.

Les 2-3 premières heures c'est un cauchemar. L'impression d'être banni, puni, maudit.

11- A quoi sert la CSI à votre avis ?

On y met ceux qui sont rebelles, pas les agneaux. C'est pour contenir ceux qui pourraient être dangereux pour eux ou les autres... [donne l'exemple d'un patient calme qui ne pourrait pas y aller, puis se ravise et rajoute :]... ou pour ramener au calme rapidement.

Ca a une utilité. Sinon il n'y aurait plus de limite dans les délires, c'est un signal, pareil qu'en ville, il y a un commissariat. Ca sert de garde-fou, de panneau stop « de danger ponctuel ».

12- Et pour vous, à quoi vous a-t-elle servi ?

Elle a permis un apaisement. Refondu sur moi-même. Permis de refaire le point.

C'est pas plus mal, rien qui me pousse à la destruction. C'était propre, un univers pur, sans souillure. Blanc, qu'on n'a pas envie de salir. J'ai fait du yoga pour m'échapper mais on ne peut pas.

C'est quand même une forme de cage. On est séparé des autres et de soi-même car on ne peut pas parler à l'autre.

C'est vous-même dans une boule enfermée dans un grand cube. On n'en est plus maître. Le maître c'est le médecin. On s'arrange pour plaire pour en sortir.

13- Est-ce que ça a changé quelque chose à votre prise en charge, à votre projet de soins ?

Oui parce que j'ai touché le fond. J'ai vu jusqu'où je pouvais aller dans la chute. Ca permet d'aller de l'avant, vers la sortie. J'avance vers ma sortie.

14- Est-ce que ça a changé quelque chose à votre relation aux soignants ?

Un plus grand respect. Ils doivent être autant effrayés que nous, de recevoir des coups. Ce sont surtout des femmes, qui viennent avec un plateau. C'est lourd, ça peut faire mal. J'ai de l'estime. On les remercie de leur gentillesse, de leur compassion, de leur sympathie. C'est encourageant.

Les hommes, c'est plus pour la cigarette. Ils relativisent : « T'inquiète pas, Bonhomme ». c'est plus rude mais avec une touche d'humour qui aide à se sentir humain.

15- Vous souvenez-vous avoir eu des temps de parole en CSI ? Pouvez-vous en parler ?

Non. On amène le plateau et ils repartent. Ils n'ont pas le temps.

16- Vous rappelez-vous avoir eu un entretien de recueil du vécu avec M. Perret ? Qu'en avez-vous pensé (utile, suffisant ?)

J'étais à Alphée. Je ne savais pas que ça existait. J'aurais aimé. Pour rejeter cette mauvaise période, l'extraire de mon vécu, car c'est violent. Ca donne l'impression qu'on nous pousse à l'intérieur de nous. [fait le geste avec ses mains, puis le geste d'écraser du pied].

Même en prison on ne traite pas les gens comme ça.

On se radoucit parce qu'on voit qu'on nous amène à manger, qu'on s'occupe de nous.

18 Commentaire :

Ma famille ne sait même pas ce que c'est. Ils prendraient peur, ils prendraient un avocat pour porter plainte.

Ce qui pourrait être amélioré :

- de la musique classique douce

- avoir une veilleuse à l'intérieur

- On est désorienté dans le temps et l'espace mais il vaut mieux ne pas avoir de pendule, c'est encore pire [on voit trop passer les minutes]

- Si on pouvait avoir une collation à 16h comme les autres patients. C'est trop long entre les 2 repas. Et une bouteille d'eau.

Le terme de « punir » n'est pas adapté mais c'est ce qui est ressenti. On est condamné. On est dans les limbes.

Si on m'y remet, c'est que j'aurais fait une faute grave, comme ne pas prendre le traitement.

Relevé par thèmes

A- Ressenti

Angoisse, peur au début, effrayant

Apaisement après 24h une quiétude / apaisement / le vide devient rassurant

Colère rage de m'être fait avoir

Désorientation spatio-temporelle la nuit n'a pas de sens / on est désorienté dans le temps et l'espace

Ennui, temps long c'est trop long entre les deux repas

Honte, sentiment de dégradation devenu une merde / sentiment de honte, d'être un animal

Impuissance gens faible /, game over, plus dans la partie / on n'en est plus maître

Mal être cauchemar, c'est violent / impression qu'on nous pousse à l'intérieur de nous

Vide trou blanc

Injustice sentiment d'injustice

Punition : banni, puni, maudit / l'ultime punition / punir, c'est ce qui est ressenti

condamné / limbes

Pureté, propreté: propre, un univers pur, sans souillure

Solitude, abandon, chaleur des visites des soignants jamais entendu /

essaie de dialoguer pour voir quelqu'un /le bruit des clés qui rassure

B- Utilité

A améliorer la relation aux soignants : un plus grand respect

A arrêter quand ça dérape : un signal, pareil qu'en ville, il y a un commissariat

ça sert de garde-fou, de panneau stop « de danger ponctuel 

A calmer : pour ramener au calme rapidement

A donner une leçon : ceux qui sont rebelles

A évaluer : on regarde comment vous réagissez / on évalue

A faire le point : j'ai vu jusqu'où je pouvais aller dans la chute /

permis de refaire le point / ça permet d'aller de l'avant, vers la sortie

A protéger : pour contenir ceux qui pourraient être dangereux pour eux ou les autres

A trouver un bon dosage : trouver un bon dosage

A se rassembler : refondu sur moi-même

C- Soin intensif

Absence de stimulations : plus agressé par quoi que ce soit / plus d'agression sonore, visuelle

Attention des soignants : tous les regards sont braqués sur vous

Pas un soin : même en prison on ne traite pas les gens comme ça.

D- Temps de parole

Pas de temps de parole : non

Pas assez de temps : On amène le plateau et ils repartent. Ils n'ont pas le temps

E- Entretien de recueil du vécu

Aurait pu être utile : J'aurais aimé. Pour rejeter cette mauvaise période, l'extraire de mon vécu

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