IV. ETAT DES LIEUX DU SUJET
L'état de la question ou la recension des écrits
consiste à faire le tour des livres et des articles les plus importants
qui existent déjà sur le sujet qu'on veut étudier. Cela
évite d'une part de « défoncer des portes ouvertes »,
soit d'aborder un problème surexploité ou résolu par la
science. Cela
3 Gorgui Ciss, Mathias Eric Owana Nguini, Pablo
Stefanoni, Jean Bosco Talla, l'impératif des alliances en
démocratie, Yaoundé, Ed. PUA, 2013
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permet d'autre part de poser une meilleure
problématique et qui tient compte de l'état actuel des
connaissances et qui utilise des concepts et une formulation correcte au regard
de la science.
Pour ce qui est de cette réflexion sur les
regroupements politiques et Processus électoral en République
Démocratique du Congo : enjeux et défis, nous affirmons d'une
manière honnête que nous ne sommes pas le premier à
entreprendre cette réflexion. Il est évident que plusieurs
chercheurs ont déjà eu l'occasion de traiter d'un sujet analogue
sous d'autres aspects en y apportant des solutions afférentes, nous
croyons à des points de convergence et divergence avec les travails
antérieurs de nos prédécesseurs sur l'épineux
problème des alliances, coalitions, plateformes et processus
électoral en République Démocratique du Congo ou
à-travers le monde.
A ce niveau, il faut signaler que lorsque plusieurs chercheurs
font leurs études sur un même sujet ils n'aboutissent pas à
un même résultat car chacun d'eux aura sa méthode et
techniques, une problématique et des hypothèses de travail
spécifiques.
La contribution que nos lecteurs attendent de ce travail peut
ne pas être extravagant mais juste un complément d'information aux
conclusions de nos prédécesseurs.
Dès lors, nous ne nous sommes pas soustrait à cette
démarche scientifique qui nous paraît plausible c'est pour quoi
avant de poser clairement notre problématique, nous allons dans la
mesure du possible lire quelques travaux, ouvrages, articles
antérieures, que nous avons pu consulter qui sont proches du notre :
En premier lieu, le livret de Gorgui Ciss, Mathias Eric Owona
Nguini, Pablo Stefanoni, Jean-bosco Talla3, dénommée :
« L'impératif des alliances dans une démocratie ». Ce
livret part du constat que dans chaque démocratie, construire une
majorité est nécessaire pour atteindre ses objectifs politiques,
qu'il s'agisse de remporter des élections ou de faire adopter une
décision politique comme un projet de loi ou un plan d'action. Cet
impératif de constitution de majorités s'impose aux
différents acteurs de la vie politique, y compris aux associations ; aux
syndicats etc. Même un dirigeant tout-puissant a besoin, au moins de
temps à autre, de convaincre et de rallier d'autres personnes ou groupes
qui ne lui sont pas nécessairement proches,
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d'harmoniser les points de vue ou de trouver un compromis
autour d'une question précise. Ceci est également vrai au niveau
international, en ce qui concerne les relations entre les Etats. Les Etats
faibles peuvent faire face à des Etats plus puissants en s'associant au
moment opportun, même s'il ne s'agit que de régler une question
bien précise, par exemple à l'occasion d'accords commerciaux.
Pour ces auteurs, les sociétés africaines sont
caractérisées par le pluralisme en termes de géographie,
langues, religions, idéologies, valeurs etc. ainsi que par des
institutions particulières qui orientent la manière de prendre
des décisions, imposer un point de vue singulier sans faire valoir celui
des autres est difficile, voire impossible, notamment dans une longue
durée. Il s'en suit donc que tout ce qui relève de la politique
nécessite le dialogue, la prise en compte d'autrui et le compromis.
C'est sur cette base que les coalitions et alliances d'intérêts
peuvent être construites - des alliances qui sont incontournables
notamment pour celui qui se trouve dans une position minoritaire et qui cherche
à promouvoir son projet de société, son programme d'action
ou à préparer des élections. Une coalition ou une alliance
n'est pas toujours facile à créer, tant à
l'intérieur d'une organisation qu'avec d'autres. Le Cameroun et
notamment ses partis d'opposition, en sont des exemples éloquents.
En outre, les contributions de ce livret posent la question de
la création des alliances et des coalitions et celle de savoir comment
celles-ci peuvent contribuer à la résolution de problèmes
politiques et à la construction de l'action démocratique au sein
des mouvements sociaux, des partis et des gouvernements.
Ils s'interrogent sur les différents types d'alliances
et de coalitions ainsi que les facteurs clés de leur succès ou de
leur échec dans but de tirer profit des expériences faites en
Amérique Latine et au Sénégal pour éclaircir
ensuite la situation des alliances politiques au Cameroun en s'interrogeant
ainsi : Pourquoi est-il si difficile, dans le pays, de construire des
coalitions et des alliances fortes et durables qui pourraient encadrer l'action
politique et sociale, c'est-à-dire des alliances qui ne seraient pas
forcement motivées par l'argent et l'exercice de la domination ?
Une des fonctions clés des partis politiques est
l'agrégation des intérêts sociétaux. Mais si trois
cents partis politiques différents, ou même la douzaine qui existe
réellement sur le terrain, tirent dans toutes les directions, les
intérêts qui existent au sein de la société
camerounaise ne peuvent être
4 F .MUKAYA MUTSHIPAY, Alliances politiques en RDC
: Atouts et Faiblesses. Cas de l'Union pour la Nation aux élections de
2006, Mémoire online, G3 SPA, FSSPA, UNIKIN, 2009.
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articulés adéquatement. L'attention que la
Fondation Friedrich-Ebert porte à la question obéit donc à
une motivation simple : il s'agit de contribuer à une réflexion
qui aidera les différents acteurs dans leurs efforts pour construire au
Cameroun une démocratie forte, participative et stable.
Au regard ce qui devance, nous concourons avec nos
prédécesseurs sur le fait que dans un Etat démocratique la
constitution des regroupements, alliances, coalitions, et plateformes
politiques est un impératif qu'il s'agisse : de remporter les
élections, faire adopter ses décisions et projets politiques,
d'harmoniser ses points de vue avec les autres ou soit de faire face à
un adversaire commun de taille au regard non seulement du multipartisme
politique mais aussi de la diversité linguistique, religieuse,
idéologique et géographique
S'agissant de l'antinomie, ce livret est une quête de la
fondation Friedrich-Ebert, ayant comme axes principales cerner les facteurs
clés de succès et échecs des alliances et coalitions
politiques dans l'optique de construire une démocratie camerounaise
forte, participative et stable alors que la nôtre, est une recherche
scientifique pour permettre aux partis d'atteindre leurs objectifs politiques :
la conquête du pouvoir politique en anticipant les obstacles et les
conséquences émanant du jeu d'alliances et coalitions
politiques.
En deuxième lieu, Fabrice MUKAYA
MUTSHIPAYI4, dans son travail intitulé « les Alliances
Politiques en République Démocratique du Congo: Atouts et
faiblesses. Cas de l'Union pour la Nation aux élections de 2006 (UN). La
préoccupation de l'auteur fut de savoir :
? Qu'est-ce qui peut être à la base de la
faiblesse des Alliances politiques en République Démocratique du
Congo ?
? Celles qui ont eu les atouts ou la chance de réussir
aux élections, respectent-elles leurs engagements et promesses faites
aux électeurs ?
Sur ce, Il est parti des hypothèses par lesquelles : La
Faiblesse des certaines alliances politiques en République
Démocratique du Congo sont dites suite à l'appartenance
idéologique des partis, formation et regroupements politiques ;
idéologiquement parlant, toute formation politique ne partage pas une
même vision politique, les démocrates n'ont pas
5 I. MALILO MALILO, scrutin à un tour et
coalition des partis politiques en RDC, L2 SPA, FSSPA, UNILU, 2018,
inédit.
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une même vision politique que les libéralistes,
les conservatistes ou progressistes. Ces genres d'alliances sont celles contre
la nature et ne peuvent réussir. Pour lui, certaines alliances sont
créées sur base des affinités tribales et ethniques. Ce
qui lui pousse d'affirmer et soutenir d'autres aspects tels que : l'inculture
électorale, l'irresponsabilité des dirigeants congolais, ses
aspects sont aussi les nerfs de la faiblesse de certaines alliances politiques
en RDC.
Par ailleurs, ses enquêtes montrent que les alliances
politiques qui ont parvenues à remporter les élections, les
alliés se mirent à partager le gâteau politique au
détriment de la population qui les a voté, les promesses et
autres engagements ne sont pas respectés, il retient aussi que lors du
partage de gâteau entre eux, quelques mésententes fragilisent un
tout petit peu ces alliances. C'est ainsi qu'il les appelle des alliances
électorales, ne sont pas forcément politiques car une longue vie
à ces dernières n'est garantie que dans les textes qui
régissent les alliés mais pas dans l'applicabilité.
De ce qui précédé et après analyse
du travail en cours nous nous retrouvons dans une même ligne de conduite
soutenant tous les idées selon lesquelles : l'appartenance
idéologique, l'inculture électorale, la formation des alliances
politiques sur base des affinités tribalo-ethniques est un défi
quant à l'atteinte des enjeux assignés par les regroupements
politiques mais notre travail se démarque de celui de Fabrice MUKAYA
MUTSHIPAYI dans l'optique où notre recherche porte sur plusieurs cycles
électoraux.
En troisième lieu, nous évoquons le travail
d'Ibrahim MALILO5, sur le «scrutin à un tour et
coalition des partis politiques en République Démocratique du
Congo». Dans ce travail, l'auteur met l'accent sur l'influence du scrutin
à un tour sur la coalition de partis politiques en République
Démocratique du Congo ?
Pour cet auteur ; En 2006, les élections ont
été à deux tour, au premier tour il y avait 33 candidats
et parmi ces derniers, aucun n'avait obtenu la majorité absolue du
suffrage exprimé, c'est ainsi que le second tour a été
organisé. C'est à l'issu du second tour qu'il observe un mariage
entre les fédéralistes et les unitaristes avec leurs
idéologies différentes pour
6 P. BIYOYA MAKUTU et Rossy MUKENDI TSHIMANGA,
Alliances et coalitions politiques en RDC : causes et conséquences,
Kinshasa, Ed. Journal of african eletions, 2011, p.230-231.
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conquérir le pouvoir politique c'est-à-dire le
second tour avait influencé la coalition des partis politiques.
A la lumière de ce qui vient être évoque,
il pense que les élections présidentielles ont été
organisé à deux tour en 2006 le second tour avait
influencé la coalition des partis politiques en guise de
conquérir le Pouvoir politique par les élections, en 2011 les
élections ont été organisé à la
majorité simple au suffrage exprimé communément
appelé scrutin a un tour, chose ecballium , c'est de voir les
fédéralistes et les unitaristes s'unir et partagent la même
idéologie et leur partis politiques avec comme finalité
d'atteindre les objectifs assignés, en l'occurrence : la conquête
, l'exercice et la pérennisation du pouvoir politique .
Dans cette même logique nous cheminons avec notre
prédécesseur sur le vocable coalition mais, notre étude
discorde de celle d'Ibrahim MALILO MALILO dans la mesure où nous
considérons le changement de mode scrutin intervenu en 2011
c'est-à-dire le passage du scrutin majoritaire à deux tours au
scrutin majoritaire pur et simple réalisé par la loi
n°11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de certains articles
de la constitution de la République Démocratique du Congo du 18
février 2006; non pas comme un facteur influant sur la formation des
coalitions politiques mais plutôt comme étant un frein par rapport
à la maximisation de chance de réussite des coalitions politiques
expliquant ainsi leurs faiblesse.
En quatrième lieu, Philippe BIYOYA MAKUTU et Rossy
MUKENDI TSHIMANGA6, dans leur article intitulé : «
Alliances et coalitions des partis politiques en République
Démocratique du Congo: Causes et Conséquences ». La
sollicitude de ces écrivains était de cerner les causes et les
conséquences résultant des élections de 2006 et de
2011.
Au terme de leur recherche, ils relèvent que depuis
2006 la logique des alliances et coalitions politiques en RDC ne paraît
pas conciliable avec l'objectif de rationalisation du régime
parlementaire opérée par la constitution du 18 février
2006. Les gouvernements successifs de la troisième république ont
été constitués de façon extra-parlementaire,
exacerbant des tensions entre l'exécutif et législatif. Les
alliances électorales ainsi que les coalitions parlementaires n'auront
contribué qu'à accroitre ou à accentuer les
déséquilibres institutionnels entre le sénat et
l'Assemblée Nationale autour
7 Michel LE BRETON et
Karine Van Der Straeten, Alliances électorales et gouvernementales : la
contribution de la théorie des jeux coopératifs à la
science politique in revue d'économie politique
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par exemple de la loi concernant la réforme de la CENI,
et à l'intérieur de chaque camp. Les élections de 2011 ont
démontré d'énormes difficultés pour l'opposition
à se rassembler ou s'unir autour d'un candidat, comme option
stratégique face au candidat de la majorité présidentielle
tandis que la majorité présidentielle ne réussissait pas
à dégager une réelle majorité, que les calculs
électoraux subordonnaient aux résultats électoraux. Pour
avoir raison de l'opposition et de l'électorat difficile, les partis se
réclamant de la majorité avaient préféré le
fractionnement de la coalition par la démultiplication des partis. Ce
cas témoigne si besoin de la particularité de la pratique et de
la théorie congolaises du jeu des alliances et coalitions politiques.
D'après eux, l'avenir de cette dialectique
majorité-opposition en RDC dépendra de la loi sur les partis
politiques qui devra imposer les partis politiques populaires et attrape-tout,
et aussi de la constitutionnalisation des partis comme en République
fédérale d'Allemagne; et aussi de la réforme du
système électoral qui devra être décentralisé
et conçu pour garantir la compétitivité électorale
et le triomphe de la vérité des urnes pourvue que d'autres
réformes interviennent pour donner à la démocratie
congolaise une dimension plus consensuelle.
Avec des partis faibles et non compétitifs, la
dévolution du pouvoir en RDC demeurera un facteur d'instabilité
et de crises politiques récurrentes.
Notre particularité par rapport à Biyoya Makutu
et Mukendi Tshimanga réside dans le fait que notre étude ne
considère pas seulement les conséquences des alliances et
coalitions politiques émanant des élections de deux mille six et
onze mais aussi celles de deux mille dix-huit.
En ce qui concerne le point de convergence, il convient de
noter que les regroupements politiques formés en 2006 et 2011 n'auront
contribué qu'accentuer les tensions, les déséquilibres
institutionnels entre le Sénat et l'Assemblée Nationale, le
fractionnement de la coalition politique par la démultiplication des
partis politiques.
En cinquième lieu, Michel BRETO et Karine VAN DER
STRAETEN7, dans leur article dénommé : «
Alliances électorales et gouvernementales : la contribution de la
théorie des jeux coopératifs à la science politique
». Ces auteurs offrent une présentation synthétique des
principaux travaux
8 R. Quivy et L.V
COMPONHOUDT, Manuel de recherche en sciences sociales, Paris, Ed. Dunod,
1995, P.101
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théoriques portant sur la formation des coalitions
électorales et gouvernementales et utilisant comme socle
méthodologique la théorie des jeux coopératifs avec ou
sans utilité transférable.
En outre, ils présentent le cadre théorique des
coalitions gouvernementales et les principaux résultats
théoriques et empiriques de la littérature, tout en exposant un
modèle général permettant d'étudier l'influence du
mode de scrutin la nature des alliances électorales, avec une attention
particulière aux applications françaises, ils étalent
aussi un expose d'un modèle non coopératif devenu presque
canonique dans cette littérature et dont on compare les
équilibrés aux solutions issues des jeux coopératifs.
Brièvement parlant cet article propose au lecteur une
perspective large sur les efforts réalisés grâce à
la théorie des jeux coopératifs pour offrir des modèles
structurels des alliances politiques. L'enjeu de ces modèles est de
permettre de comprendre à la fois qualitativement et quantitativement
les rapports de force qui façonnent le fonctionnement des coalitions
politiques et également étudier l'impact de l'environnement
institutionnel sur ces alliances. Dans cette même ordre d'idées
nous sommes d'avis avec eux car, le mode de scrutin ainsi que les
modèles structurels impactent sur la nature, la constitution, le
fonctionnement et sur la réalisation des objectifs arrogés par
les alliances politiques dans une république mais notre quête
s'écarte plus de celle de Michel BRETON et Karine VAN DER STRAETEN dans
la mesure où nous examinons : les enjeux, les défis et les
conséquences des regroupements politiques en recourant à un
modèle structurel axé sur l'approche qualitative et non sur une
approche combinatoire mêlant l'approche qualitative et l'approche
quantitative.
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