Le Gabon face à la cybercriminalité: enjeux et défispar Larry Warren DIYEMBOU BOUMAM'HA Université Omar Bongo - Master Géosciences Politiques du Monde Contemporain 2019 |
INTRODUCTION GENERALEI - Justification de l'étudeOrganisé à Genève en 2003 et à Tunis en 2005, le premier Sommet Mondial sur la Société de l'Information (SMSI), est venu sonner le triomphe mais surtout dynamiser et accréditer le constat selon lequel, la décennie quatre-vingt-dix a vu jaillir et s'imposer dans les débats de sociétés comme une donne imparable, aussi bien dans les pays du Nord que ceux du Sud et ce dans tous les domaines (politique, économique, scientifique...), le paradigme1(*) de la Société de l'information et sa déclinaison, les technologies de l'information et de la communication. La notion de NTIC ou NTCI, mais encore TIC, désignant les Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication, fait référence à la fusion de trois secteurs historiquement distincts aux niveaux technique, juridique et économiqueà savoir : les télécommunications, l'audiovisuel et l'informatique. Le développement des TIC au cours de la décennie 2000-2010, a renforcé la croyance en un monde devenu « village planétaire » comme l'évoquait déjà le sociologue Marshall McLuhan dès la fin de l'année 1968. En effet, sur le plan géopolitique, McLuhan prédisait ainsi dans son ouvrage paru en 1967 - War and Peace in the Global Village - la mondialisation de l'information. Allant quelque part de pair avec celle de l'économie, la mondialisation de l'information serait inévitablement génératrice d'affrontements2(*). On y voit notamment émerger de nouvelles possibilités techniques de communication, promouvant la connexion permanente du monde entier. En outre, cet espace communicationnel ainsi créé, s'interpénètre avec les espaces terrestre, maritime, aérien, extra atmosphérique et cybernétique, dont la protection et la sécurisation s'inscrivent dans le champ de compétences régaliennes de l'Etat. Il est alors évident que l'essor des NTIC et surtout la vulgarisation accrue d'Internet, ont provoqué des bouleversements majeurs à l'échelle de la planète. Or, étant donné que toute activité humaine porteuse de progrès détient souvent en germe ses vices et ses travers, le développement d'Internet a contribué à l'apparition de nouvelles menaces que l'on peut regrouper aisément sous le vocable de cybercriminalité. Le choix de notre sujet est justifié par deux raisons principales : d'une part, la hausse de la cybercriminalité à l'échelle mondiale, et d'autre part, la position du Gabon quant à la perception qu'il a de cette menace. En effet, le Gabon aspire à devenir la « locomotive » des TIC en Afrique centrale avec l'objectif à long terme, de diversifier sa traditionnelle économie de rente par le truchement du Gabon des Services et des TIC et accroître ainsi son économie numérique. Cependant, il doit aujourd'hui faire face à la cybercriminalité qui se pose comme un facteur réel de déstabilisation de cette économie numérique et partant, un défi majeur en termes de développement. Et enfin, le concept de cybercriminalité n'ayant pas à notre connaissance encore fait l'objet de travaux de recherche dans le cadre du Master Recherche en Géosciences Politiques du Monde Contemporain, du Département de Géographie de l'Université Omar Bongo de Libreville, ce travail propose modestement une lecture géopolitique des enjeux et défis de la cybercriminalité au Gabon à l'aune d'une géographie de la Société de l'information, d'une « géographie 2.0 »3(*) et d'une géopolitique de l'insertion des TIC. * 1 Un paradigme est une découverte scientifique universellement reconnue qui, pour un temps, fournit à un groupe de chercheurs des problèmes types et des solutions. Cf. Thomas Samuel KUHN, La Structure des révolutions scientifiques, Paris, Flammarion, (Coll. « Champs-Sciences »), 2008, p. 57. * 2 Le cyberespace de par les possibilités qu'il offre à tous ses utilisateurs, est devenu un lieu de conflictualité entre les différents acteurs. McLuhan estime qu'une des principales caractéristiques du village planétaire, est l'anarchie qu'il génère sous plusieurs formes. L'interconnexion des réseaux créerait selon ce dernier, une insécurité totale. * 3 Ce concept de géographie 2.0 est développé par Jérémie VALENTIN dans sa thèse de doctorat en géographie. Il stipule que sous l'impulsion des TIC, la production et la diffusion du savoir géographique sont appelées à subir de profondes transformations. Pour parler autrement, il s'agit, de la consommation « augmentée » de l'espace géographique à l'aide des Systèmes d'information géographique (SIG). |
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