Introduction partielle
Cette partie est consacrée à la revue de
littérature. Elle présente les travaux déjà
réalisés sur le sujet, ce qui a permis de cadrer l'étude
avec des concepts appropriés susceptibles de faciliter la
compréhension. Elle expose les milieux physique et humain et est
subdivisée en deux chapitres. Il s'agit du cadre théorique ; le
cadre géographique de l'étude et l'approche
méthodologique.
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CHAPITRE I : LE CADRE THÉORIQUE DE
L'ÉTUDE
Ce chapitre situe le cadre théorique de l'étude.
Il développe la problématique, les hypothèses, les
objectifs de la recherche et la revue de littérature.
I. I. La problématique
Cette partie est essentiellement consacrée au contexte
de l'étude et aux questions qui ont guidé la réalisation
de la recherche.
I. I. 1. Le contexte de l'étude
Les pays d'Afrique situés au sud du Sahara sont
confrontés concomitamment entre autres à la gestion des
ressources humaines et celles des ressources naturelles. La dernière
revêt une importance capitale en raison des aléas climatiques, de
la croissance démographique et de la forte pression qui pèsent
sur elles (TOURE EL H., 2011). Elles subissent également une pression
croissante, du fait de leur commercialisation accrue, des changements dans les
systèmes de production et dans l'écologie (BAGRE S. A. et
al., 2003).
L'Afrique de l'Ouest est dotée d'importantes ressources
naturelles. Celles-ci font vivre beaucoup de populations à faible revenu
(CSAO, 2008). Cependant, force est de constater que la pression exercée
par les populations locales sur ces ressources conduit le plus souvent à
leurs dégradations. Le processus de dégradation des terres en
partie lié à la modification des conditions du peuplement
(accroissement de la population, migrations et urbanisation, diminution de la
durée des jachères) a accentué la dégradation du
milieu. Dans ces pays, les manifestations les plus visibles de ce processus de
dégradation sont l'accélération de l'érosion,
l'appauvrissement et la salinisation des sols, la réduction de la
diversité et de la productivité des ressources
végétales, la modification de l'équilibre des
écosystèmes naturels. Ces phénomènes aggravent la
paupérisation des communautés humaines dépendantes de ces
écosystèmes (CSAO, op. cit.).
Le Burkina Faso est l'un des pays africains à fort taux
de croissance démographique 3,1 % (recensement général de
la population et de l'habitation (RGPH 2006)). Selon ce même recensement,
le pays enregistrait en moyenne 435 000 habitants supplémentaires par an
et sa population aurait atteint 18 450 494 individus en 2015. Ce dynamisme de
la population a engendré principalement dans le centre du pays une
densification du peuplement et une consommation rapide de l'espace agricole.
Cette pression démographique s'est faite parallèlement à
la dégradation des conditions de production (DRABO I. et al.,
2003).
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Par ailleurs, l'augmentation de la population engendre des
besoins sociaux, notamment alimentaires. Malheureusement, la production
agricole des paysans, ne pouvant pas satisfaire cette demande, mettait ainsi le
pays dans un déficit agricole. Face à cette situation,
l'État burkinabè a initié à la fin des
années 90 une politique incitant le privé à investir dans
la production agricole afin de surmonter les insuffisances de l'agriculture
familiale considérée comme peu performante, peu ouverte aux
innovations et à la professionnalisation agricole. Depuis lors, de
nombreux acteurs non ruraux, qualifiés d'agrobusiness men ou de nouveaux
acteurs se sont engagés dans l'acquisition des terres agricoles en
milieu rural et particulièrement dans des zones proches des grands
centres urbains (ZONGO M., 2010). Il estime que les grandes entreprises
agricoles privées sont plus productrices que les exploitations
familiales (ADAMCZEWSKI A. et al., 2013). Dans cet élan de
promotion de l'agriculture intensive avec des moyens modernes adéquats,
le gouvernement encourage les investissements tous azimuts. Rappelons que le
Premier Ministre burkinabè (4 juin 2007 au 18 avril 2011) n'a
cessé de répéter pendant l'hivernage de 2009 : « il
faut donner la terre à ceux qui ont les moyens de la cultiver »
(LEGMA A.V., l'indépendant n° 806 du 17/02/09, cité par
OUDET M., 2009). Ce qui veut dire que la terre au Burkina Faso doit être
à la disposition de ceux qui peuvent la valoriser. Dans cette
catégorie de nouveaux propriétaires figurent des membres du
gouvernement et des hommes d'affaires (OUDET M., op.cit.). Cette situation a
permis aux « nouveaux riches » de s'accaparer des domaines fonciers
à l'intérieur du pays et peu à peu à la
périphérie de Ouagadougou, dans la province du Kadiogo. Ce
phénomène, qu'il soit l'oeuvre d'investisseurs nationaux ou
étrangers, risque d'entraîner la disparition de la classe paysanne
productive et la naissance d'un prolétariat agricole
précarisé, à travers l'expulsion à termes des
producteurs et des communautés de leurs terres (GBAGUIDI L., 2010).
La province du Kadiogo abritant la capitale politique du pays
(Ouagadougou) renferme 12,3 % de la population du Burkina Faso. Elle se
caractérise par une densité exceptionnellement importante de 615
habitants au km2. La plus grande proportion de sa population (85,4
%) habite la ville de Ouagadougou (RGPH, 2006). La croissance
démographique et la migration des populations vers les grandes villes
sont des éléments qui contribuent à accroître la
population urbaine. Ce poids démographique a certainement eu un impact
sur l'espace urbain (COMPAORE G., 1993). De 1904 (fin de la mise en place de
l'Administration coloniale) à nos jours, la ville de Ouagadougou a connu
de profondes mutations démographique et spatiale (TRAORE Y., 2010). En
effet, sa population est passée de 8 000 habitants en 1904 sur une
superficie de 1500 hectares à 2 000 000 habitants en 2010
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sur un espace de 54 400 hectares, soit un taux d'extension de
3626.66 %. Cette extension est imputable au développement de l'habitat
dit « spontané » et aux « lotissements » de grande
envergure (KEDOWIDE C. M. G. et al., 2010).
La croissance démographique couplée à la
pauvreté des citadins et à la disponibilité d'espace
engendre du coup l'extension spatiale de la ville (KABORE I., 2013). Aussi,
l'accroissement de la population en général et celle des zones
urbaines en particulier entraînent des besoins nouveaux tels que les
infrastructures socio-économiques, les équipements, les voies de
communication, les emplois, les logements, etc. Pour réussir ce
challenge de l'habitat décent, l'État ou des partenaires
privés procèdent périodiquement à des lotissements.
Mais, ces aménagements posent souvent des problèmes
environnementaux qu'il convient de bien analyser. Également, les
populations achètent des terrains non bâtis, en dehors de tout
cadre légal, qu'ils mettent en valeur à leur façon (zone
non lotie).
L'extension de la ville de Ouagadougou empiète sur les
espaces cultivables. En effet, les besoins en terrains à bâtir ont
poussé les néo-citadins et les citadins eux-mêmes à
se lancer dans une spéculation foncière effrénée au
détriment de la production agricole (COMPAORE G., 2003). Au fur et
à mesure, certains champs sont transformés en lieu d'habitation.
Les paysans qui exploitaient les espaces cultivables proches de la ville sont
alors obligés de se mettre à la recherche d'autres emplois, car
les travaux champêtres deviennent de plus en plus difficiles. Par
ailleurs, l'agriculture extensive pratiquée sur les terres peu fertiles
sous l'effet des aléas climatiques n'arrive pas à satisfaire les
besoins alimentaires de la population qui augmentent d'année en
année (OUATTARA S. et al., 2004 ; TIENDREBEOGO Y., 2013).
L'occupation des sols analysée à partir des
images satellitaires (spot de 1986), indique, que les ressources naturelles
subissent une pression croissante. Cela est certainement due à leur
commercialisation accrue, à l'augmentation de la population, aux
changements dans les systèmes de production et dans l'écologie
(BAGRE S. A. et al., 2003). Cette situation a pour corollaire la
dégradation continue des ressources naturelles se traduisant ainsi par
la régression de la couverture végétale, l'ensablement des
retenues d'eau, la dégradation des sols, etc. L'intervention de l'homme
dans le milieu à travers les activités indispensables qu'il
mène pour sa survie (agriculture sur brûlis) et les actions non
viables qu'il pose y prennent souvent l'aspect de véritables agressions.
Aujourd'hui, la province du Kadiogo se trouve installée dans un
processus cumulatif de détérioration du milieu biophysique.
L'influence de Ouagadougou s'exerce fortement sur ses
alentours immédiats (50 km) et même lointain. La
dégradation progressive du couvert végétal devient alors
un problème préoccupant. Elle résulte pour une bonne part
des interférences des activités humaines sur la
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couverture végétale de type savanesque, donc
particulièrement sensible (COMPAORE G., 1993). L'utilisation des
ressources naturelles, notamment de la terre et la signification de sa fonction
pour les différents acteurs évoluent avec le temps. Ainsi, la
gestion des ressources naturelles devient de plus en plus difficile dans un
contexte marqué par une émergence de nouveaux
propriétaires terriens dans cette partie du pays et
particulièrement à la périphérie de Ouagadougou.
L'exploitation irrationnelle ou exagérée de ces terres peut
contribuer à la dégradation du milieu, voire la disparition de
certaines ressources. Par ailleurs, la privatisation des terres à grande
échelle diminue les surfaces cultivables des paysans.
La pauvreté touche 50,7 % des habitants du Burkina Faso
et est l'un des principaux obstacles aux efforts de développement du
pays (INSD, 2010). En effet, la pauvreté de la population les
amène à adopter des méthodes de production et de
consommation non viables et défavorables à l'environnement
(FEM-FIDA, 2002 ; TIENDREBEOGO Y., 2013). L'insuffisance de revenus limite
l'accès des enfants à l'éducation et des personnes malades
aux soins de santé (Politique Nationale de la Population, 2000). Bien
que cette population rurale soit pauvre, elle possède encore un bien
précieux (la terre) d'où elle tire l'essentiel de sa subsistance.
La vente des terres sans investissement producteur accentuerait la
pauvreté de cette population qui vit déjà dans des
conditions difficiles.
La terre est l'élément fondamental des
ressources naturelles, car c'est sur elle que reposent d'autres
éléments (eau, flore, faune, etc.). C'est en ce sens que sa
gestion rationnelle doit être une condition nécessaire pour
parvenir au développement durable. Or, dans le contexte actuel de
développement au Burkina Faso, surtout dans sa partie périurbaine
et rurale, la question foncière reste préoccupante (SOME B. F.,
2002). Selon FRATICELLI M., (2012), les ressources naturelles étaient
autrefois gérées de façon plus ou moins collective au sein
des communautés villageoises. On pouvait parler de « biens communs
» à un ou à plusieurs groupes sociaux. Aujourd'hui, les
habitants périurbains de Ouagadougou se trouvent
dépossédés de leurs terres agricoles. Quelle serait alors
la situation d'une telle population vivant déjà dans des
conditions difficiles ? En plus, les nouveaux acheteurs du foncier exploitent
la terre à des fins commerciales. Alors, quelle place accordent-ils
à la gestion des ressources naturelles ? Aussi l'exploitation des terres
par les agrobusiness men à la périphérie de Ouagadougou
doit-elle être faite sans tenir compte de l'équilibre
environnemental, pour permettre une régulation de l'air dans la ville et
une gestion durable des ressources naturelles ? Ainsi, pour comprendre les
enjeux liés à la pression foncière sur la gestion des
ressources naturelles dans un contexte de développement durable, nous
nous sommes intéressé à l'étude des
problèmes que peut engendrer la privatisation des terres dans la
province du Kadiogo,
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notamment à la périphérie ouest de la
ville de Ouagadougou. Également, dans cette étude, il est
question de connaître les stratégies développées par
les paysans pour assurer leur ration quotidienne malgré la diminution de
leurs espaces cultivables.
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