2.2.1.1. Hydratation des espaces inter foliaires :
Lors de l'hydratation d'une éprouvette d'argile
sèche, l'eau pénètre dans l'espace inter foliaire et
s'organise en couches mono moléculaires, puis interagit avec les
feuillets et les cations déjà présents. Cette hydratation
favorise la création d'une pression, appelée pression de
disjonction, qui a pour conséquence une augmentation de la distance
inter foliaire et donc un gonflement de l'ensemble des deux feuillets, c'est le
gonflement cristallin (Yong, 1999).
Ce gonflement n'est possible que lorsque les liaisons
interfeuillets sont très faibles pour laisser pénétrer
l'eau dans l'espace interfoliaire. C'est le cas par exemple de la
montmorillonite.
Le phénomène de gonflement est influencé
par la nature des cations interfoliaire. Ainsi la montmorillonite sodique
(Na+) gonfle plus qu'une montmorillonite calcique (Ca2+)
(Dardaine et al, 1985; Saiyouri, 1996). En effet, le rayon ionique de
Na+est plus proche de la taille de la molécule d'eau et son
interaction avec cette dernière est plus faible que pour le cation
Ca2+. L'eau se répartit alors plus facilement à la
surface du feuillet.
Dans les argiles illitiques, le gonflement cristallin est
très faible et il est quasiment inexistant dans les kaolinites.
D'après Tessier (1990), ce type de gonflement ne
représente qu'environ le dixième du gonflement macroscopique
total d'une argile gonflante. Il est donc nécessaire selon lui
d'envisager un autre mécanisme de gonflement que celui relevant
uniquement des seules variations interfoliaire.
2.2.1.2. Répulsion entre les particules :
Le gonflement osmotique se produit lorsque l'énergie
d'hydratation est suffisante pour franchir la barrière de potentiel due
aux forces électrostatiques attractives entre feuillets.
L'adsorption des cations par les particules argileuses et la
formation de la double couche diffuse sont responsables de la répulsion
des deux particules (Mitchell, 1993). En effet, dans une argile sèche,
les cations sont fortement adsorbés à la surface des feuillets
argileux. Les cations en excès, par rapport à ceux assurant
l'électroneutralité des particules argileuses et des anions
associés, sont présents sous forme de sels. Si l'argile
sèche est placée au contact de l'eau, les sels s'y dissolvent,
mais les différents ions se répartissent de manière non
homogène, la concentration en cation devient plus forte au voisinage des
surfaces externes des argiles, tandis que les anions ont plutôt tendance
à s'éloigner des surfaces argileuses. La zone perturbée,
ainsi créée par cette répartition non homogène des
cations et des anions, est appelée la double couche diffuse (Bolt, 1956)
.Cette dernière assure l'électroneutralité du
système entre la particule d'argile et la double couche diffuse du
modèle de Stern. La théorie de la double couche diffuse a permis
de démontrer mathématiquement que le recouvrement de deux couches
diffuses de même signe est responsable de la répulsion de deux
particules (Van Damme, 2002). Appliquée à la multitude de
particules
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constituant une éprouvette d'argile, cette
théorie permet d'expliquer le gonflement à l'échelle
macroscopique.
Une autre approche plus fréquemment utilisée
permet, selon Mitchell (1993), d'expliquer le gonflement de manière plus
pratique, c'est le concept de "pression osmotique". Dans cette approche, du
fait des différences de concentration au sein de la couche diffuse, des
pressions osmotiques sont développées à chaque fois que
les doubles couches de deux particules se chevauchent. La surface argileuse
chargée négativement jouerait un rôle comparable à
celui d'une membrane semi-perméable, séparant deux solutions de
concentration en sel différentes (aucun cation ne vient cependant
traverser la surface argileuse) (Van Damme, 2002). La différence de
pression osmotique créée entre les deux particules et la solution
à l'équilibre environnant les particules d'argile est
appelée "pression de répulsion inter
particulaire". On peut alors imaginer qu'à l'échelle
macroscopique, ce phénomène d'origine microscopique,
répété un très grand nombre de fois, se
répercute par l'apparition d'un gonflement observable. Rappelons
également que le gonflement d'un sol argileux dépend non
seulement de la minéralogie des argiles mais aussi de la texture (Bauer-
Plaindoux et al., 1998), c'est-à-dire de l'agencement du
squelette et du réseau poreux de ces minéraux au sein des autres
minéraux constituants le matériau. Sous certaines conditions, les
minéraux argileux gonflants peuvent se retrouver piéger au sein
d'une matrice siliceuse ou carbonatée, créant des complexes
susceptibles d'empêcher ou d'annuler le Gonflement de ces
minéraux.
En résumé, la pression osmotique joue un
rôle prépondérant dans le gonflement des argiles
saturées. Une diminution de contraintes effectives dans le sol se
traduit au niveau macroscopique par le gonflement des argiles. La
théorie de la double couche fournit une interprétation
intéressante des phénomènes physico-chimiques sur le plan
qualitatif, mais l'application quantitative de cette théorie aux
minéraux argileux ne permet pas toutefois de caractériser au
mieux la texture réelle et complexe d'un matériau argileux. De
plus, lorsque les argiles ne sont plus saturées, suite à une
dessiccation répétée par exemple, d'autres forces
deviennent prépondérantes dans l'hydratation des argiles, comme
les forces d'attraction dues aux charges électriques, les forces
capillaires de Van der Waals et les forces dérivant de l'énergie
d'hydratation des cations échangeables (TranNgoc Lan, 1989). L'ensemble
de ces forces constitue la force de succion qui agit directement sur les
molécules d'eau. Cette succion est faible à nulle pour des sols
saturés et très forte pour des sols secs.
2.2.2. Le Gonflement au sens mécanique :
Le phénomène de gonflement, de même que le
tassement, peut provenir d'une modification de l'état de contraintes
dans le sol en présence d'eau. Un sol est constitué de 3 phases
:
? phase solide (les particules solides)
? phase liquide (eau interstitielle en général)
? phase gazeuse (bulles d'air).
Le sol est saturé si la phase gazeuse disparait,
c'est-à-dire si tous les vides
interparticulaires sont occupés par l'eau interstitielle.
Considérons ici un élément de sol saturé
à
l'équilibre. Dans un sol saturé soumis à
une contrainte totale ó (géostatique ou surcharge
extérieure óe), cette dernière se
décompose de la façon suivante :
óe= ó = ó'+u (Théorie de
Terzaghi, 1951)
Où u désigne la pression interstitielle de l'eau
des pores et ó' la contrainte effective, c'est-à-dire
la contrainte exercée sur le squelette solide du sol.
Si l'élément de sol considéré est
situé sous la nappe phréatique à une cote z, la
pression
interstitielle est égale à la pression
exercée par la colonne d'eau sus-jacente, soit u0 =
ãw.z. Si l'on permet alors au sol de se drainer, un
phénomène de consolidation va se développer, correspondant
à l'expulsion de l'eau en surplus. Un nouvel équilibre va alors
s'établir pour l'état de contraintes, avec :
u0= 0
ó'= óe
Dans un milieu poreux, l'existence conjointe d'une phase
gazeuse et liquide provoque le développement de ménisques
capillaires air-eau. Le développement de ces ménisques dans la
structure du sol est la caractéristique principale d'un milieu non
saturé (Delage et Cui, 2000), et traduit une pression négative de
l'eau appelée succion. Si la contrainte se est alors supprimée,
le même phénomène se produit en sens inverse, et
immédiatement :
u = -óe
ó' = óe
La pression interstitielle u devient négative (succion
négative) et opposée à la variation de la contrainte
totale. Dans des conditions de libre circulation de l'eau, un
phénomène de gonflement va alors se développer, exprimant
l'absorption de l'eau et le transfert d'une contrainte négative de l'eau
sur le squelette solide, jusqu'à l'état final où :
u = 0
ó' = 0
Il est donc possible d'affirmer que si la consolidation exprime
une diminution de la pression interstitielle jusqu'à u0, le gonflement
exprime quant à lui la diminution de la succion (-u) jusqu'à son
annulation. La succion capillaire du terrain s'exprime alors par la relation
suivante :
S = ua-uw
Où ua représente la pression de l'air dans le sol
et uw, la pression interstitielle de l'eau dans le sol.
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