tudes
Travail de Fin d ' É
Travail de Fin d'Études dirigé par
Sandrine SALOMON, Cadre de santé formateur
INSTITUT DE FORMATION EN SOINS INFIRMIERS DU CENTRE
HOSPITALIER DE LISIEUX Promotion 2016-2019
Chloé DESPREZ
Prise en charge et qualité de vie d'un
patient schizophrène
Vers une juste distance dans la relation de
soins
Travail de Fin d'Études : Diplôme d'État en
Soins Infirmiers
UE 5.6 S6 : Analyse de la qualité et traitement des
données scientifiques et professionnelles
UE 3.4 S6 : Initiation à la démarche de
recherche
Date : 21/05/2019
Charte anti-plagiat de la Direction régionale
et départementale de la Jeunesse, des sports et de la Cohésion
sociale de Normandie
La Direction Régionale et Départementale de la
Jeunesse, des Sports et de la Cohésion sociale délivre sous
l'autorité du Préfet de région les diplômes du
travail social et des auxiliaires médicaux et sous l'autorité du
Ministre chargé des sports les diplômes du champ du sport et de
l'animation.
Elle est également garante de la qualité des
enseignements délivrés dans les dispositifs de formation
préparant à l'obtention de ces diplômes.
C'est dans le but de garantir la valeur des diplômes
qu'elle délivre et la qualité des dispositifs de formation
qu'elle évalue que les directives suivantes sont formulées
à l'endroit des étudiants et stagiaires en formation.
Article 1 :
« Le plagiat consiste à insérer dans tout
travail, écrit ou oral, des formulations, phrases, passages, images, en
les faisant passer pour siens. Le plagiat est réalisé de la part
de l'auteur du travail (devenu le plagiaire) par l'omission de la
référence correcte aux textes ou aux idées d'autrui et
à leur source ».1
Article 2 :
Tout étudiant, tout stagiaire s'engage à
encadrer par des guillemets tout texte ou partie de texte emprunté(e) ;
et à faire figurer explicitement dans l'ensemble de ses travaux les
références des sources de cet emprunt. Ce
référencement doit permettre au lecteur et correcteur de
vérifier l'exactitude des informations rapportées par
consultation des sources utilisées.
Article 3 :
Le plagiaire s'expose aux procédures disciplinaires
prévues au règlement intérieur de l'établissement
de formation. En application du Code de l'éducation2 et du
Code
1 Site Université de Genève
http://www.unige.ch/ses/telecharger/unige/directive-PLAGIAT-19092011.pdf
2 Article L331-3 du Code de l'éducation : « les
fraudes commises dans les examens et les concours publics qui ont pour objet
l'acquisition d'un diplôme délivré par l'Etat sont
réprimées dans les conditions fixées par la loi du 23
décembre 1901 réprimant les fraudes dans les examens et concours
publics ».
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 2
pénal3, Il s'expose également aux
poursuites et peines pénales que la DRDJSCS est en droit d'engager.
Cette exposition vaut également pour tout complice du délit.
Article 4 :
Tout étudiant et stagiaire s'engage à faire figurer
et à signer sur chacun de ses travaux, deuxième de couverture,
cette charte dument signée qui vaut engagement :
Je soussigné-e
atteste avoir pris connaissance de la charte anti
plagiat élaborée par la DRDJSCS de Normandie et de m'y être
conformé-e.
Et certifie que le mémoire/dossier
présenté étant le fruit de mon travail personnel, il ne
pourra être cité sans respect des principes de cette
charte
Fait à Le Suivi de la
signature
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 3
3 Articles 121-6 et 121-7 du Code pénal.
Remerciements
« Soyons reconnaissants aux personnes qui nous donnent
du bonheur; elles sont les charmants jardiniers par qui nos âmes
fleurissent » Marcel Proust
Je tiens tout d'abord à remercier ma
référente pédagogique, Mme Salomon, pour la qualité
de son accompagnement pendant ces trois années d'études. Je tiens
également à lui dire merci pour m'avoir soutenue tout au long de
ce mémoire et avoir su me guider dans mes questionnements tout en me
laissant libre de mes choix. Tout simplement, merci pour tout.
Mes remerciements vont ensuite à chaque membre de ma
famille pour le soutien, la bienveillance et l'amour qu'ils m'apportent chaque
jour. Merci d'avoir fait de moi ce que je suis aujourd'hui. Merci pour tout ce
que vous faites pour moi.
Un grand merci à ma deuxième famille, mes amis,
d'être d'aussi belles personnes et d'avoir fait également de moi
ce que je suis. Merci pour le bonheur et la joie de vivre que vous m'apportez
dans mon quotidien depuis toutes ces années.
Merci à toi Edgar, d'avoir pu créer en image ma
représentation de la schizophrénie. Mais surtout merci
d'être présent dans ma vie depuis tout ce temps. Merci pour ton
amour si précieux, ton soutien et tout le bonheur que tu m'apportes
à toi tout seul.
Merci à l'ensemble des professeurs de l'IFSI de Lisieux
pour leur bienveillance et leur investissement tout au long de ces trois
années.
Merci à toutes les personnes que j'ai pu rencontrer
lors de ma formation pour leur bienveillance et leur gentillesse mais aussi
pour m'avoir transmis leur savoir.
Merci à tous ceux que j'aurais pu oublier.
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 4
Ainsi, merci à toutes ces personnes de m'avoir permis de
réaliser ce travail.
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 5
DROITS D'AUTEURS
Cette création est mise à disposition selon le
Contrat : « Attribution-Pas d'Utilisation
Commerciale-Pas de modification 2.0 France
» disponible en ligne
http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/2.0/fr/
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 6
TABLE DES MATIERES
Introduction 8
1) Situation d'appel 9
2) Mes motivations 10
2.1. Motivations personnelles 10
2.2. Motivations professionnels 10
3) Du questionnement à la question de départ 12
3.1. Le questionnement 12
3.2. Le constat 13
3.3. La question de départ 13
4) Le cadre conceptuel 14
4.1. La schizophrénie 14
4.1.1. Définition de la schizophrénie 14
4.1.2. Les différentes formes classiques 15
4.1.3. Une maladie chronique 16
4.2. La qualité de vie d'un patient schizophrène
17
4.2.1. Qu'est-ce que la qualité de vie ? 17
4.2.2. La schizophrénie au quotidien 20
4.2.2.1. La distorsion des sensations 20
4.2.2.2. Les délires et les hallucinations 20
4.2.3. La schizophrénie et l'impact sur les relations
sociales 21
4.3. La prise en charge infirmière d'un patient
schizophrène 23
4.3.1. Les compétences relationnelles de
l'infirmière 23
4.3.2. Le travail en équipe 24
4.3.3. La relation de soin 26
4.4. La juste distance 28
5) L'enquête auprès des professionnels 31
5.1. Moyens d'enquête 31
5.2. Choix des professionnels 31
5.3. Lieu et temps de l'enquête 32
5.4. Les limites et les difficultés de l'enquête
32
6) L'analyse 33
7)
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 7
La problématique 43
8) La question de recherche 44
Conclusion 46
Références bibliographiques 48
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 8
INTRODUCTION
La schizophrénie est connue depuis plusieurs
années mais elle reste difficilement définissable de par sa
complexité. Il est important de préciser que ce travail de fin
d'étude met l'accent sur la souffrance du patient schizophrène,
sur ses angoisses intenses et son quotidien parfois éprouvant. Mais ce
mémoire a également pour mission modeste de pouvoir transmettre
à tous ceux qui le liront une vision plus positive de la
schizophrénie. Un travail essayant de modifier les
préjugés et de faire comprendre à l'autre que vivre avec
la schizophrénie est une souffrance, une maladie tout simplement.
Par ailleurs, le patient schizophrène doit se
reconstruire un lien avec le monde extérieur, parfois même le
construire. Il s'agit plus précisément d'un lien avec les
éléments relationnels et sociaux qui se rattachent à ce
monde. Mais cette réhabilitation n'est pas une chose évidente et
sous-entend un travail qui peut parfois être difficile pour le patient.
Les soignants doivent donc être en mesure de l'accompagner dans ce
changement et l'aider à avancer avec sa maladie. Il en découle
alors une relation entre le patient et le soignant dans le but de penser son
devenir et d'atteindre une qualité de vie pour lui. Cette relation de
soins consiste donc à l'accompagner dans ce mouvement où il va
tenter d'investir le monde qui l'entoure. Un affrontement et une source de
souffrance auxquels il devra faire face pour apprendre à vivre avec la
maladie. Mais cette relation ne semble pas être la seule notion
bénéfique pour le patient, nous parlerons également de la
juste distance dans cette dernière. Cette réflexion sur cette
juste distance trouve son origine dans une situation vécue avec un
patient schizophrène lors d'un stage en psychiatrie pendant ma
première année de formation. C'est pourquoi, mon travail de fin
d'étude porte sur ce sujet. Ainsi, dans un premier temps, nous
développerons à partir de cette réflexion, le cadre
théorique mettant en avant les différents concepts en lien avec
ma question de départ. Ensuite, en second lieu, afin de faire le
parallèle entre la théorie et la pratique et ainsi
concrétiser ou non mon travail de recherche, nous parlerons de l'analyse
élaborée grâce aux entretiens effectués
auprès d'infirmiers travaillant en psychiatrie. Un travail m'ayant
amené à réfléchir sur les actions permettant une
prise en charge de qualité du patient schizophrène.
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 9
1) Situation d'appel
Ma situation se passe lors de mon troisième stage de ma
première année d'étude en soins infirmiers dans l'une des
unités de moyen et long séjour d'un établissement public
de santé mentale.
Durant ma deuxième semaine de stage, un barbecue
était organisé ce jour dans notre secteur. En fin de
matinée, avec plusieurs membres de l'équipe nous décidons
de commencer à préparer l'installation pour le repas du midi
à l'extérieur dans le petit jardin de l'unité.
Après une trentaine de minutes, un de nos patients, Monsieur B, s'avance
vers nous avec un bouquet de fleur à la main. Monsieur B est un patient
de 27 ans, diagnostiqué schizophrène. Il est très
fermé et provocateur envers l'équipe soignante ce qui rend la
communication difficile dans la plupart des cas.
Il continue à s'avancer petit à petit avec les
fleurs et se dirige finalement progressivement dans ma direction puis
s'arrête face à moi. Le patient me tend le bouquet de fleurs et
ajoute qu'il est pour moi, que c'est un cadeau. A ce moment, la
stupéfaction m'envahit et me fige l'espace d'un instant, je ne m'y
attendais absolument pas. Je ne comprends pas pourquoi ce geste car ma
communication avec lui se limite pratiquement qu'à un bonjour et
à un sourire. Il est déjà arrivé que de
lui-même Monsieur B vienne me parler mais cela restait occasionnel car la
plupart du temps lorsque je lui parlais je n'avais pas toujours de
réponse de sa part. Je décide donc de lui demander où
est-ce qu'il a acheté ceci et surtout pourquoi il veut m'offrir ces
fleurs. Il me répond spontanément qu'il est sorti les acheter au
magasin en dehors de l'établissement et qu'il l'a fait parce qu'il avait
envie de m'en offrir. Je regarde brièvement les personnes de
l'équipe autour de moi qui semblaient surprises de ce geste et
mécontentes car Monsieur B n'a pas le droit de sortir de l'enceinte de
la structure. L'équipe ne me dit rien et me laisse gérer la
situation. Je commence donc par expliquer à Monsieur B que ce geste est
gentil de sa part puis je réaffirme ma position professionnelle en lui
faisant comprendre que je suis ici en stage en tant que soignante comme les
autres membres de l'équipe et qu'il ne peut pas se permettre d'agir de
cette façon. De plus, je lui rappelle qu'il a l'interdiction de sortir
en dehors de l'établissement même si cela part d'une bonne
intention. Je décide donc d'accepter les fleurs mais au nom de toutes
les personnes travaillant ici et non pas seulement pour moi, puis de les mettre
dans la salle à manger à la vue de tous pour que tout le monde en
profite, patients comme soignants.
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 10
2) Mes motivations
2.1. Motivations personnelles
En ce qui concerne mes motivations personnelles, il me
semblait évident de choisir un sujet sur la relation à l'autre,
un thème en concordance avec la personne que je suis. Les relations
humaines sont pour moi un épanouissement permanent qui me permet de
m'enrichir et d'avancer dans mon quotidien, je dirais même qu'elles sont
au centre de ma vie. Nous sommes tous en permanence en communication avec les
autres que ce soit verbale ou non verbale, que ce soit sur le plan personnel ou
professionnel. Il est donc important pour ma part de travailler sur ce sujet
qui est un paramètre essentiel à la vie. Les relations sociales
sont chacune d'elles uniques car chaque personne est différente et
n'interagit pas de la même manière. Elles peuvent parfois
être incertaines et aléatoires dans l'interprétation des
échanges, parfois non réciproques et unilatérales. Pour
moi, la relation à l'autre sous-entend adaptabilité et
tolérance, empathie, écoute et partage mais cette
définition ne sera pas la même pour tous. J'aime la relation sous
tous ses aspects. De ce fait, j'ai choisi celle de la psychiatrie car elle
illustre bien la diversité des relations possibles. Une relation
soignant soigné qui demande une attention particulière sur la
façon de communiquer et d'échanger, qui bouscule les idées
déjà construites sur les bonnes manières de faire. C'est
un secteur spécifique qui me fascine dont l'essentiel du travail est
basé sur la relation humaine. De plus, j'aime comprendre les choses, les
réactions de chacun et leur façon de penser pour avoir un
échange des plus bénéfiques possibles pour la personne.
C'est également pour cela que j'ai choisi de parler de cette situation
qui m'a beaucoup questionnée, essayé de comprendre ce qu'il s'est
passé.
2.2. Motivations professionnels
Tout d'abord, la psychiatrie est un domaine qui me fascine.
Tout au long de ma formation j'ai développé cette envie
incommensurable d'en apprendre de plus en plus à ce sujet et j'ai
souhaité de comprendre davantage le fonctionnement de chacun de mes
patients que j'ai pris ou que je prendrais en charge. C'est un domaine dans
lequel je me sens à l'aise, épanouie et qui me correspond. La
psychiatrie m'a réellement permis d'évoluer sur le plan
professionnel ainsi que dans ma tête et je me réjouis d'avoir
l'opportunité de réaliser ce travail qui clôturera ma
formation sur une spécialité qui m'a autant appris. Dans un
deuxième temps, j'ai décidé d'aborder cette situation en
particulier car lorsque j'ai été confrontée à cet
événement, beaucoup de questions sont apparues et m'ont
amenée à une réelle réflexion.
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 11
Je me suis repassé ce moment plusieurs fois dans ma
tête pour pouvoir essayer d'analyser ce qui a été
adapté ou non dans ma façon de gérer la situation et pour
essayer de trouver une raison, un sens à l'acte de mon patient. De plus,
j'ai choisi cette situation en psychiatrie car même si la distance
soignant-soigné est présente dans tous les autres domaines, les
circonstances et les enjeux sont ici différents pour ma part.
Ce que je cherche c'est de comprendre pourquoi mon patient a
ressenti cette envie alors que je pensais adopter une distance
thérapeutique suffisante. Cela m'a beaucoup interrogé sur ma
pratique et ma posture professionnelle en psychiatrie. J'ai ressenti le besoin
d'approfondir ce questionnement car ayant le projet de travailler dans ce
domaine, je me suis dit que si une situation similaire se représentait
je voudrais être capable d'adopter le meilleur des comportements face
à cet événement. Une réponse qui répondrait
à la fois aux besoins d'une distance thérapeutique adaptée
tout en ne détruisant pas la relation thérapeutique naissante.
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 12
3) Du questionnement à la question de
départ
3.1. Le questionnement
Psychopathologie :
- Qu'est-ce que la schizophrénie ?
- Quelles sont les différentes formes et leurs signes
?
- Quelles sont leurs points communs ?
- Quelles sont les traitements possibles ?
- Qu'est-ce qu'une maladie chronique ?
Psychologie :
- Que ressent un patient schizophrène ?
- En quoi l'affectivité des schizophrènes
est-elle perturbée ?
Sociologie :
- Quelles sont les représentations des personnes
atteintes de schizophrénie sur les
relations sociales ?
- Comment un schizophrène interagit-il avec les
personnes qui l'entourent ?
- C'est quoi la relation sociale ?
- Qu'est-ce que la distance dans une relation ?
- En psychiatrie, que représente la juste distance ?
- Qu'est-ce que la qualité de vie ?
Qualité des soins infirmiers en psychiatrie :
- Qu'est-ce qu'un projet de soins en psychiatrie ?
- Comment définir une relation de soins en psychiatrie
?
- Que signifie une juste distance en psychiatrie ?
- A partir de quoi cette distance peut-elle être
qualifiée de juste ?
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 13
- Qu'est-ce que la posture professionnelle ?
- Comment adopter une posture professionnelle en psychiatrie ?
- En quoi la prise en charge de patient souffrant de troubles
psychiatriques peut-elle être différente ?
- Quelle est la prise en charge adaptée pour un patient
schizophrène ?
- Quels éléments de la posture/attitude
professionnelle sont adaptés en psychiatrie ? - En quoi mon attitude
professionnelle a-t-elle un impact sur mon patient ?
- Comment conjuguer bienveillance avec une attitude et un langage
professionnel en psychiatrie ?
- En quoi une juste distance peut-elle être
bénéfique avec un patient schizophrène ?
- Comment établir un équilibre idéal entre
une juste distance nécessaire et une relation de soin naissante en
psychiatrie ?
3.2. Le constat
En psychiatrie, je constate qu'il est peut-être
compliqué pour une infirmière d'adapter une juste distance
thérapeutique avec un patient schizophrène en respectant la
relation de soin.
3.3. La question de départ
En psychiatrie, en quoi la juste distance dans la relation de
soin IDE avec un patient schizophrène permet-elle d'améliorer sa
qualité de vie ?
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 14
4) Le cadre conceptuel
4.1. La schizophrénie
4.1.1. Définition de la schizophrénie
Le terme « schizophrénie »
suggéré par le psychiatre suisse Eugen Bleuler, vient de deux
racines grecques, « schizo » et « phrénia
» signifiant « scinder » et « esprit
». Un mot qui permet d'illustrer l'idée de ce clivage du moi
chez la personne schizophrène. On pourrait également la
définir, en d'autres termes, par une dissociation de la pensée et
de la personnalité. Mais être schizophrène c'est aussi
vivre la réalité d'une autre façon et c'est une source
d'anxiété et d'affliction terrible pour ceux qui en souffrent. Un
aspect qui semble important de souligner pour comprendre que cette maladie est
psychiquement douloureuse et qu'elle peut perturber la vie de la personne
concernée mais aussi celle de sa famille et de ses amis. David H.Barlow
et V. Mark Durand déterminent la schizophrénie comme «
un syndrome complexe dont les effets sur la personne qui en souffre et sur ses
proches sont dévastateurs. Ce trouble peut affecter la perception, la
pensée, le discours et les gestes, en fait, chaque aspect du
fonctionnement quotidien. »
Ainsi nous retrouvons dans l'ouvrage « La
schizophrénie au quotidien » de Catherine Tobin le
témoignage de X.B., schizophrène, qui nous raconte que «
Contrairement à ce qu'on pense, nous ne sommes pas en dehors de la
réalité ; en fait nous sommes en contact avec tant de
réalités à la fois que nous en devenons confus et
accablés »
Par ailleurs, selon la Fondation Pierre Deniker c'est une
maladie qui touche 1 % de la population mondiale, un chiffre qui n'est pas
négligeable et qui nous montre que cette maladie n'est pas inusuelle. 85
% des cas apparaissent entre 15 et 25 ans.
Mais ne serait-il pas plus adapté de parler des
schizophrénies plutôt que de la schizophrénie ? Car en
effet selon le caractère et l'environnement de chaque individu, les
symptômes de la maladie seront très différents
d'après l'UNAFAM. Eugen Bleuler, cité ci-dessus, écrivait
: "Ce n'est pas une maladie au sens strict du terme, mais elle apparaît
être un groupe de maladies... pour cette raison, nous devrions parler de
schizophrénies au pluriel." Il semblerait donc que l'on retrouve
plusieurs formes de schizophrénies dont certaines ont été
décrites.
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 15
4.1.2. Les différentes formes
classiques
En effet, il demeure différentes formes cliniques de la
schizophrénie mais nous parlerons ici des plus fréquentes. Il est
important d'assimiler pour la suite le retentissement possible de chaque
état sur la relation à l'autre, c'est donc pour cela que nous
insisterons davantage sur l'impact des expressions rattachées à
chaque forme sur les rapports sociaux.
· La schizophrénie paranoïde
Comme son nom le suppose cette schizophrénie est
dominée par le délire paranoïde avec des idées
délirantes qui sont verbalisées de façon explicite par le
patient. Le mot paranoïa est d'origine grecque, « para
» et « noos » signifiant « à
côté de » et « l'esprit ». En outre,
le délire comporte des expériences d'étrangeté, de
dépersonnalisation et d'influence. C'est la forme que l'on retrouve le
plus souvent et qui reste la plus complète de par la richesse de ses
symptômes. La dissociation et le délire en font partie ainsi qu'un
univers subjectif qui se créé petit à petit. Un univers
autistique dans un monde fermé à la communication et donc
à la relation à l'autre. Le patient vit comme dans une bulle qui
serait impénétrable ce qui rend difficile le maintien d'une
activité sociale.
· L'hébéphrénie
« Hébé » signifiant jeunesse
en grec, illustre le fait que cette forme est précoce, autrement dit
qu'elle touche le sujet jeune. La dissociation et le retrait sont les
symptômes qui la caractérisent dans un premier temps. On remarque
souvent une pauvreté dans les éléments délirants ce
qui permet de la distinguer. Selon le site
psychologie.com, cette forme
représente 20 % des schizophrénies. En ce qui concerne l'impact
sur les relations sociales, l'évolution qui se fait progressivement dans
l'indifférence et la dissociation laisse s'installer un état
déficitaire et des capacités d'adaptation sociale de plus en plus
affaiblies. L'appauvrissement intellectuel et relationnel entraine donc une
désinsertion sociale importante.
· La catatonie
Ce terme provient du mot allemand Katatonie qui est
lui-même composé du grec « kata » signifiant
« en dessous » et de « tonos » traduit
par « tension ». Elle peut évoluer vers le mutisme et
l'immobilité presque totale, une sorte de délire corporel qui
pourrait
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 16
traduire physiquement la dissociation mentale. Le
déficit cognitif qui existe dans cette forme se caractérise
également par l'absence d'initiative, une diminution des
habilités et l'indifférence affective. Le patient a une attitude
très négative dans tous les actes de son quotidien, que ce soit
physiquement ou mentalement. Il est important de comprendre que cette forme est
la plus grave. Les interactions sociales sont quasi nulles et il est
très difficile de maintenir une vie relationnelle mais c'est une forme
qui reste très rare.
· La psychose schizo-affective
Dysthymique vient du grec « dys » et «
thymie » se traduisant par «de travers» et
«humeur». C'est une forme qui se rapproche des troubles bipolaires de
par le caractère maniaque ou dépressif des signes
associés. Or, la distinction est possible en raison d'une
présence d'idées délirantes mais aussi d'hallucinations.
Elle affecte tout particulièrement la cognition et l'émotion. Il
existe donc une diminution significative du niveau de fonctionnement social et
personnel lié à ces troubles même si l'adaptation
socio-familiale est souvent conservée.
En somme, il est indéniable que les
schizophrénies s'accompagnent toutes d'une modification de l'ensemble
des capacités sociales à des degrés différents. Ces
altérations sont constantes et variables dans le temps. D'autre part,
toutes ces formes sont comme nous l'avons vu précédemment
différentes les unes des autres. Mais il existe pourtant un aspect que
l'on retrouve dans chacune d'elle et qui impacte également sur les
relations sociales du patient ; il s'agit de la chronicité de la
maladie.
4.1.3. Une maladie chronique
La schizophrénie est en effet une maladie dite
chronique. On utilise ce terme pour définir le fait qu'elle ne peut pas
être soignée rapidement. D'après la définition de
l'OMS, les maladies chroniques « sont des affections de longue
durée qui en règle générale évoluent
lentement », c'est donc une prise en charge de plusieurs
années voir même de plusieurs décennies. Il est important
de comprendre que la maladie chronique entraine de la souffrance morale et
sociale au quotidien, une angoisse permanente. Deux sentiments nuisibles qui
viennent s'ajouter à la souffrance et à l'angoisse qui perdure
dans la schizophrénie de par les délires, les hallucinations, le
repli et la perte d'unité de son être. Ce sont tous ces
symptômes qui se modulent dans le temps sur une durée
indéterminée ainsi
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 17
que leurs interactions simultanées qui entrainent un
mal être intense. La chronicité témoigne d'une perturbation
durable et profonde de la personnalité.
De plus, l'importance d'un diagnostic précoce de la
schizophrénie est donc, comme pour toutes autres maladies chroniques,
une priorité. Plus la maladie est prise en charge dans ses débuts
et plus le patient a de temps pour l'accepter, la comprendre et apprendre
à vivre avec dans les meilleures conditions. L'entourage proche ainsi
que les soignants vont jouer un rôle clef dans l'acceptation de la
maladie chronique et dans la façon dont le malade va se percevoir
lui-même, un aspect fondamental qui participe réellement au
traitement de la schizophrénie. Le but étant de vivre la maladie
avec plus de facilité et en participant à une vie sociale.
Quant à la législation, la loi du 9 août
2004 relative à la politique de santé publique, prend en compte
le besoin d'améliorer la qualité de vie des personnes atteintes
de maladie chronique. Le plan qui en découle s'appuie sur la loi du 13
août 2004 qui porte sur la réforme de l'assurance maladie, avec
l'instauration de la coordination et l'organisation du parcours de soins
personnalisé pour les maladies chroniques. De plus, il s'appuie sur la
loi du 11 février 2005 relative à l'égalité des
droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes
handicapée. Une loi qui intègre les conséquences des
maladies chroniques dans la définition du handicap.
Mais qu'est-ce que la qualité de vie ? Il paraît
difficile de définir ce terme dans le sens où chaque personne est
différente et ne voit pas la vie de la même manière.
Cependant il semblerait que des bases plus ou moins similaires pour tous,
soient établies. C'est ce que nous verrons en deuxième point pour
comprendre ce que nous mettons sous l'expression d'une vie de
qualité.
4.2. La qualité de vie d'un patient
schizophrène
4.2.1. Qu'est-ce que la qualité de vie ?
La qualité de vie est un concept inscrit dans l'air du
temps qui apparaît difficile à définir de par son
caractère multidimensionnel et abstrait. En effet, c'est une notion
vague et individuelle dans le sens où chaque personne est unique et
possède des composantes différentes. Une variabilité
évidente qui justifie ce consensus. Ainsi, l'objectif ici n'est pas
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 18
d'essayer de définir ce que peut être une vie de
qualité mais plutôt de s'intéresser aux différents
aspects de cette dernière.
Cependant, pour introduire cette notion et nous aider à
voir plus clair, l'OMS la décrit en 1994 dans l'article «
Quelle qualité de vie ? » comme «la façon
dont les individus perçoivent leur position dans la vie, dans le
contexte de la culture et du système de valeurs dans lesquels ils vivent
et en relation avec leurs buts, attentes, normes et préoccupations. Il
s'agit d'un concept large, qui incorpore de façon comple e la
santé ph sique d'une personne, son état psychologique, son
degré d'indépendance, ses relations sociales, ses convictions
personnelles et sa relation avec des éléments importants de
l'environnement. » Cette perspective nous permet donc de dire qu'une
vie de qualité relève d'une évaluation personnelle. En
d'autres termes, seule la personne concernée peut auto-évaluer sa
vie par rapport à ce qui est essentiel pour elle ainsi qu'à sa
manière de vivre. De plus, Il semblerait également que plusieurs
domaines se dégagent de cette perception de vie : l'état physique
et psychologique, les rapports sociaux, le niveau de dépendance,
l'environnement et la spiritualité. En ce qui concerne ces
différentes catégories, l'OMS prend en compte pour chacune d'elle
plusieurs aspects dans l'évaluation de cette qualité de vie. Tout
d'abord, dans la dimension physique, les caractéristiques
définies se rapportent à la douleur et l'inconfort,
l'énergie et la lassitude ainsi que le sommeil et le repos. Dans
l'état psychologique, on parle des sentiments positifs et
négatifs, de la réflexion, de l'apprentissage et de la
concentration mais aussi de l'estime de soi ou de l'image corporelle. Ensuite,
par le niveau de dépendance, l'organisme associe la mobilité, les
activités de la vie quotidienne, la capacité à travailler
et la dépendance liée à la médication. Les aspects
des rapports sociaux, eux, se basent sur les relations personnelles, le soutien
et l'activité sexuelle. Enfin, l'environnement s'apparente à la
sécurité, au contexte familial, aux ressources financières
mais encore aux occasions d'acquérir des connaissances et des
distractions. En somme, chaque élément cité semblerait
jouer un rôle important dans la qualité de vie de l'être
humain. Une synergie constante où l'incidence d'un aspect peut provoquer
des réactions sur plusieurs domaines à la fois.
D'autre part, dans l'article « La qualité de
vie, voie vers l'autonomie, l'intégrité et la dignité
», B. Baertschi nous expose l'idée selon laquelle nous
pourrions prétendre à une certaine qualité lorsque nous
sommes maître de notre vie. Les réelles relations humaines, fortes
et stables sont également nécessaires à un
épanouissement personnel mais il faut garder en tête que
préserver son autonomie et son indépendance est aussi important.
L'auteur nous précise par la suite qu'« une vie de
qualité doit donc être une vie inscrite dans l'autonomie, dans
l'intégrité et dans la dignité ». Tout d'abord,
une vie inscrite dans
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 19
l'autonomie ce n'est pas être spectateur de celle-ci,
c'est pouvoir la mener telle qu'on la veut en ayant une direction et des
projets. Par ailleurs, l'intégrité sous-entend ici de faire ce
qui semble être juste pour nous, par rapport à ce que l'on est. Un
concept qui inclut des aspects psychologiques et moraux qui restent en
mouvement constant dans le temps. Plus précisément, qui fluctuent
en fonction des années, de l'âge, de la maturité mais aussi
de l'état de santé de la personne, des événements.
C'est cette intégrité qui nous permet de nous faire une place
dans la société en tant que personne entière et
singulière. En ce qui concerne la dignité, il semble qu'il y ait
deux sens à cette notion, le respect que mérite chaque personne
et le respect induit par soi-même. Ainsi, chaque homme a de la valeur et
doit être respecté quel qu'il soit. Cependant, la valeur
établie pour chaque personne peut être mise en jeu,
dégradée ou modifiée suivant les situations et les
événements que la vie réserve. Ce qui peut amener de la
souffrance et du dégout envers soi-même et modifier notre valeur
intérieure. Un déclin qu'il soit physique ou psychologique peut
générer cette destruction de l'image qu'on a de soi. La valeur
humaine est établie dans le monde mais la dignité que l'on relie
à son estime est plus fragile et instable car elle dépend des
situations que l'on rencontre, de notre état et des actions d'autrui
envers nous. La perte de cette estime nuit réellement à la
qualité de vie de la personne, il est donc essentiel d'accorder du temps
aux personnes dites vulnérables pour les aider à retrouver cette
confiance en soi, en respectant le fait qu'une vie dite « bonne
» sous-entend que l'on puisse la mener selon ses choix.
Au fond, nous comprenons que la détermination de la
qualité de vie est un concept confus et en mouvement permanent mais
qu'il existe malgré tout quelques aspects plus ou moins
déterminants qui semblent être propre à chaque vie humaine.
Des critères qui ne sont pas toujours évidents à acheminer
dans la mesure où nous ne pouvons pas toujours tout contrôler ; ce
qui peut générer un changement négatif sur notre
épanouissement personnel. Ainsi, si nous rattachons les concepts vus
avec les répercussions des symptômes de la schizophrénie,
nous pouvons sous-entendre que certains critères abordés
précédemment seront touchés par cette maladie et
modifieront la qualité de vie souhaitée par le patient. Ce qui
est important maintenant, c'est avant tout de comprendre ce que vit une
personne atteinte de schizophrénie dans sa vie quotidienne pour pouvoir
par la suite connaître quels aspects de la maladie peut freiner le
développement de certaines dimensions dans leur existence.
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 20
4.2.2. La schizophrénie au quotidien
4.2.2.1. La distorsion des sensations
En règle générale, notre corps est en
capacité de percevoir les stimuli grâce à nos organes
sensoriels. Ces sens interagissent avec le cerveau de façon à
pouvoir les classer par ordre d'importance et à répondre de
façon rationnelle. Cependant, la personne schizophrène, elle, ne
sera pas capable de trier ses ressentis pour réagir de façon
adaptée. Dans des situations du quotidien où nous serions en
capacité d'ajuster nos actes avec nos sens en fonction de leur
nécessité, le schizophrène mélange ses sensations.
La perception de ses sens est confuse et certains sens prennent le dessus sur
d'autres à des instants où ils ne le devraient pas. Cette
discordance affecte son comportement sur chaque moment de sa vie. Par exemple,
la souffrance ressentie est identique à la nôtre mais elle se
présentera à des moments paraissant parfois illogiques. Si nous
nous brûlons nous réagissons immédiatement en raison de ce
que nous ressentons, mais la personne malade ne se rendra peut-être pas
compte de sa douleur, même si cela la blesse car une autre sensation
prend l'avantage.
Par ailleurs, dans l'article « l'effet d'une
brûlure » Virginie Jardel, infirmière, nous raconte
l'histoire de Bérénice, une de ses patientes atteinte de
schizophrénie. Elle nous explique que lorsqu'elle lui effleure le bras
pour l'apaiser, Bérénice s'énerve, l'insulte et
interprète ce geste comme un contact violent. Toucher son bras revient
à un coup agressif pour elle et par conséquent entraine une
réelle douleur pour Bérénice, alors qu'à l'origine
cet acte n'est qu'une démonstration de compassion et de bienveillance
envers elle dans le but de la rassurer, la soutenir. Un exemple qui illustre
bien cette distorsion des sensations qui est l'une des caractéristiques
éprouvantes de la schizophrénie.
En définitive, cette altération est un
élément de la maladie qui peut entrainer un comportement
illogique et incohérent intervenant sur la qualité de vie.
4.2.2.2. Les délires et les hallucinations
Les délires et les hallucinations sont des
manifestations de la schizophrénie bien connus par la
société. Mais il est pourtant important de préciser que
ces caractéristiques ne
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 21
sont pas seulement liées à cette maladie. En
effet, une personne peut tout à fait présenter ces
symptômes sans pour autant être diagnostiqué
systématiquement comme schizophrène.
Selon C. Tobin, les délires « sont des
constructions mentales fausses, de fausses interprétations à
partir d'observations vraies. » Et les hallucinations elles, «
sont des perceptions vraiment ressenties, mais sans support réel,
qui n'e istent que dans la tête de celui qui les vit. » Dans la
schizophrénie les hallucinations sont souvent auditives mais leurs
caractéristiques peuvent être multiples et sont très
différentes d'un individu à un autre, tout comme les
délires. Il existe d'ailleurs plusieurs thèmes comme le
délire de persécution, le délire mystique, de grandeur ou
encore de « métamorphose ». D'autre part, nous
pouvons affirmer que nous avons une limite bien précise de notre corps,
ce qui nous permet de nous distinguer d'autrui, mais la personne atteinte de
schizophrénie n'a pas toujours cette même délimitation
naturelle de son corps. En effet, il peut parfois se voir incarné dans
les personnes qui l'entourent et cela plusieurs fois en même temps. Il
peut également ne plus ressentir certaines parties de son corps comme si
elles ne lui appartenaient plus, comme un membre qui se dissocie du reste et
dont il n'a plus conscience. Des doutes sur leur appartenance peuvent
s'installer et créer un climat angoissant pour la personne au
quotidien.
Au fond, si l'on considère tous les aspects
déjà vus en faisant les liens, il semble évident que la
relation à l'autre sera déséquilibrée chez la
personne atteinte de schizophrénie. Toutes ces discordances dans le
quotidien ne peuvent qu'influencer vers un comportement asocial, vers une
relation aux autres perturbée, remplie d'incompréhension et de
difficulté. Chaque jour cela impacte la dimension sociale et donc la
qualité de vie. Le retentissement des symptômes de la
schizophrénie sur les relations sociales du quotidien est un aspect
primordial qui semble nécessaire d'aborder pour pouvoir comprendre le
schizophrène dans sa relation à l'autre et l'impact de celle-ci
sur la qualité de sa vie.
4.2.3. La schizophrénie et l'impact sur les
relations sociales
Interagir avec l'autre et reconnaître ses comportements
ainsi que ses postures et ses émotions, deviner l'attitude de l'autre et
ses conséquences pour s'adapter font partie des grands principes
complexes et naturels de l'homme.
Cependant, dans l'article sur « la
schizophrénie et l'intersubjectivité » C .Passerieux
nous confie que de nos jours il est admis que la schizophrénie entraine
une modification
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 22
d'intensité variable de ces capacités sociales
naturelles. Plusieurs aptitudes relationnelles se retrouvent donc
touchées comme la reconnaissance des émotions, la capacité
à distinguer soi et autrui, les compétences permettant
d'attribuer un état psychique à autrui ou à
soi-même. Ces troubles sociaux induisent une incapacité à
faire preuve d'empathie envers les gens qui les entourent même dans les
interactions les plus basiques. D'autre part, en raison de ces
fragilités relationnelles, les personnes atteintes de
schizophrénie ne saisissent pas les gestes et les paroles implicites
d'autrui. En effet, les sous-entendus ne sont pas une évidence comme ils
pourraient l'être pour nous. L'interprétation ne sera pas la
même. Cela amène souvent des conversations à doubles sens,
remplies d'incompréhension. L'une des grandes difficultés pour
les schizophrènes, c'est d'être capable de reconnaître
intuitivement et de prendre en compte les sentiments de l'autre dans
l'interaction. Il existe donc une incapacité à adapter ses
émotions par rapport aux comportements d'autrui ce qui installe un
climat d'indifférence. Cela rend les relations unilatérales et
atténue ce principe de réciprocité établie
naturellement dans les échanges humains.
Toutes ces discordances entrainent la personne malade à
un repli sur soi qui s'accompagne d'une souffrance permanente, affectant sa
qualité de vie. C'est en cela que l'équipe soignante doit
intervenir pour tendre vers une réadaptation psychosociale.
L'infirmière ainsi que les autres membres de l'équipe
pluridisciplinaire doivent être en mesure de repérer ces
déséquilibres qui sont souvent inexistants aux yeux du patient.
Par ailleurs, il est dans l'intérêt de ce dernier de l'aider
à reconnaître ses difficultés pour pouvoir l'accompagner
dans sa réhabilitation sociale et son quotidien. Une prise en charge qui
aidera le patient à vivre au mieux avec sa maladie et à essayer
d'atteindre la qualité de vie qu'il souhaite pour lui.
Ainsi, nous parlerons en dernier lieu des différentes
notions qui se rattachent à la prise en charge infirmière d'un
patient schizophrène pour pouvoir repérer et comprendre en quoi
elle peut favoriser le maintien et la réinsertion des personnes dans
leur cadre de vie.
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 23
4.3. La prise en charge infirmière d'un patient
schizophrène
4.3.1. Les compétences relationnelles de
l'infirmière
Afin de prendre en charge au mieux la schizophrénie et
construire une relation de soin avec le patient, l'infirmière doit avant
tout posséder des qualités humaines et relationnelles. En effet,
la dimension relationnelle en psychiatrie est primordiale. C'est elle qui
permettra de mettre en place cette relation de confiance entre le patient et le
soignant. L'attitude relationnelle de l'infirmière doit être
adaptée à chaque situation, aux circonstances et à
l'histoire de vie de chaque patient. C'est donc à la diversité
des relations humaines que l'infirmière est amenée à faire
face. Nous verrons donc ci-dessous les qualités qui semblent
essentielles de posséder pour prendre en charge un patient
schizophrène. Il est important de préciser que les
compétences abordées ne sont pas les seules, les capacités
relationnelles sont multiples mais celles dont nous allons parler semble
être établies comme étant les principales.
De ce fait, savoir écouter, dans un premier temps, est
fondamental et reste avant tout une des caractéristiques de toute
relation humaine. L'écoute participe à la création de la
relation de confiance en prouvant au patient schizophrène l'estime qu'on
lui porte ainsi que notre disponibilité et notre envie de l'aider. Cela
lui donne l'opportunité de verbaliser sur sa maladie et sur ses conflits
intérieurs vécus et ainsi l'aider à mettre de l'ordre dans
ses idées et ses pensées. De plus, prendre en compte la parole du
patient, c'est tout d'abord le reconnaitre en tant que personne et ne pas
seulement l'assimiler à sa maladie. La communication est
également essentielle pour que l'infirmière puisse aider le
patient et sa famille à parer à la souffrance résultant de
la maladie. Elle doit être en capacité d'expliquer et de
transmettre les informations adaptées pour que le malade soit bien
informé et bien soigné. D'autre part, l'empathie apparait comme
un des concepts primordiaux dans la prise en charge de la schizophrénie.
Selon C. Rogers « percevoir de manière empathique, c'est
percevoir le monde subjectif d'autrui comme si on était cette personne
sans toutefois jamais perdre de vue qu'il s'agit d'une situation analogue,
comme si » en d'autres termes, l'infirmière doit être
proche du patient pour pouvoir comprendre ce qu'il vit et l'aider à
avancer mais elle ne doit pas oublier que la distance a également son
importance pour ne pas penser, parler ou agir à la place du patient. En
ce qui concerne la patience, c'est une attitude nécessaire qui permet de
faire face à des comportements parfois difficiles. En effet, le patient
schizophrène vit beaucoup de stress, d'anxiété et parfois
des moments d'agressivité, il est donc important de savoir garder son
calme pour gérer au mieux les
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 24
situations difficiles et apporter un climat de bienveillance.
De plus, cette qualité est précieuse car elle permet de ne pas se
décourager dans une prise en charge qui peut être plus ou moins
longue en raison de sa chronicité. Enfin, toutes ces capacités
relationnelles doivent s'accompagner d'une bonne connaissance de soi.
L'infirmière doit être capable de reconnaître et accepter
ses propres sentiments. Il faut qu'elle soit authentique avec une attitude
spontanée et la plus naturelle possible. En effet, elle doit être
en accord avec elle-même pour favoriser chez le patient
schizophrène la croissance et le développement de
l'authenticité.
Ainsi, les compétences relationnelles permettent
d'établir une relation avec le patient pour lui permettre d'avancer et
de faire face à la maladie. Le schizophrène souffre dans sa
pensée au quotidien et il ne peut pas gérer seul les conflits
internes qui éclosent entre ses idées. Les repères de vie
qu'il s'est établis sont bousculés et c'est grâce à
ces qualités que le soignant pourra tenter de l'aider.
L'infirmière se trouve à la base de cette prise en charge et
c'est pour cela qu'elle doit être en mesure d'établir une
relation. Cependant elle doit également avoir des compétences
relationnelles pour pouvoir travailler en équipe. En effet, l'esprit
d'équipe est aussi une qualité nécessaire car c'est en
groupe que la prise en charge se dessine et c'est grâce au travail de
chaque professionnel que la relation de soin peut prendre forme.
4.3.2. Le travail en équipe
Tout d'abord, le travail en équipe est un point
essentiel du métier d'infirmier établi dans son code de
déontologie. Selon l'article R. 4312-28 «L'infirmier doit, dans
l'intérêt des patients, entretenir de bons rapports avec les
membres des autres professions de santé. Il respecte
l'indépendance professionnelle de ceu -ci ». De plus, selon
l'article R. 4312-25. « Les infirmiers doivent entretenir entre eux
des rapports de bonne confraternité. Ils se doivent assistance dans
l'adversité et il lui est interdit de calomnier un autre professionnel
de santé, de médire de lui ou de se faire l'écho de propos
susceptibles de lui nuire dans l'e ercice de sa profession »
Ainsi, dans un contexte de soin, une équipe est
définie selon M. Phaneuf comme étant une combinaison de personnes
qui travaillent ensemble en ayant pleinement conscience de leur appartenance au
groupe. Leur but étant d'atteindre un objectif commun. Chaque
professionnel d'un service peut être amené à aider l'autre.
Aucun soignant ne peut être
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 25
réellement présent pour le patient s'il n'est
pas lui-même soutenu par une équipe. Chaque membre est une
ressource pour les autres membres. P. Cauvin la définit comme
étant « le lieu où se développent les
solidarités, où se renforcent les actions de chacun par le jeu
des échanges, où s'unifie l'activité, où se
créé un esprit commun ». Une dynamique les unit mais
chaque dynamique est unique car les caractéristiques qui s'y rattachent
sont propres à chacune d'elle. De ce fait, en psychiatrie, c'est le
rendement des échanges, des idées de chacun et des
réflexions de toute une équipe qui permettent une bonne prise en
charge des patients. C'est donc pour cela que l'interprofessionalité est
primordiale et qu'il est important pour l'infirmière de connaître
et de comprendre le rôle des professionnels avec lesquels elle est
amenée à collaborer. Ainsi, travailler ensemble permet de
comprendre, à travers la disparité de ces membres, la
complexité des conflits intérieurs d'un patient
schizophrène. L'équipe peut également permettre de
contenir la pensée et l'émoi du patient. Ce qui rend le
caractère difficile de ses angoisses plus supportable car elles peuvent
être partagées avec les différents professionnels du
groupe. Cela permet à la personne schizophrène de diriger ses
émotions dans plusieurs directions, et donc d'en atténuer la
force, ce qui peut éviter une éventuelle rupture
thérapeutique. De plus, les actions à mettre en place dans la
prise en charge doivent être décidées ensemble et mises en
oeuvre de façon logique pour favoriser la compréhension et
l'adhésion de la personne malade. C'est en équipe et surtout avec
le patient que son projet de vie se construit. Cette harmonie et ce projet dit
thérapeutique lui permettent d'avoir des repères ainsi qu'un
cadre déterminé, rassurant et sécurisant. Le but
étant de pouvoir l'accompagner au mieux vers une réadaptation.
Enfin, nous pouvons donc affirmer que l'équipe
soignante est un réel pilier dans la prise en charge et dans la mise en
place d'une relation de soin avec un patient schizophrène.
L'instauration d'un cadre thérapeutique ne peut se faire sans l'alliance
de plusieurs professionnels et du patient. Il existe donc un réel
travail de groupe sur la création du projet de vie,
déterminé avec le malade, pour l'accompagner dans ses
pensées et dans ses perspectives d'avenir. Le tout en soignant sans en
avoir l'air. L'attention particulière portée au patient semble
donc être une évidence, mais que signifie réellement la
notion de relation de soin citée précédemment ? Nous
essayerons par la suite de comprendre ce processus relationnel mis en place par
les soignants afin de discerner en quoi elle est peut être
bénéfique pour le patient schizophrène.
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 26
4.3.3. La relation de soin
Dans ce concept de relation de soin, nous pouvons tout d'abord
dégager deux termes pour tenter de la comprendre. Tout d'abord, le terme
de « relation » provient de latin « relatio » qui
signifie « rapport, communication avec d'autres personnes ».
Le mot « soin » lui, émane du latin «
soniare » se traduisant par « s'occuper de. ».
Mais dans un premier temps, il apparait important de préciser que cette
relation trouve son origine dans deux contextes. En effet, la relation de soin
peut être d'origine fonctionnelle. En d'autres termes elle nait d'un soin
« à faire ». Mais elle possède
également une seconde nature qui selon W. Hesbeen est « une
relation d'attention à la personne, une relation singulière,
sensible et subtile et qui se veut de nature aidante. ». C'est donc
sur cette dernière que nous nous intéresserons par la suite.
Ainsi, C. Duboys et G. Perrin nous explique dans l'ouvrage
« Le métier d'infirmière en France » que cette
relation n'est pas une simple conversation, elle « commence par
l'observation, l'écoute : l'infirmière qui a une bonne
connaissance d'elle-même, de sa fonction, de certains concepts
théoriques sur lesquels s'appuie sa pratique prendra soin de la
personne. C'est-à-dire l'accompagner, l'aider à se prendre
elle-même en charge. L`action de l'infirmière porte sur la
personne et son environnement afin de l'aider à identifier ce qui pose
problème et à utiliser ses ressources internes.
L'infirmière tente de trouver les réponses satisfaisantes en
facilitant l'e pression du vécu de la personne soignée, dans le
cadre de la démarche de soins, ou de l'alliance thérapeutique
». Cette relation désigne donc une attention
particulière portée à la personne malade pour qu'elle
puisse se sentir considérée et soutenue. Elle prend place dans
une démarche de soin pour aider le patient à trouver ses propres
ressources, et ainsi les mobiliser pour tendre vers une autonomie et un bien
être en apprenant à agir au mieux, face aux obstacles de la
maladie.
En psychiatrie, il est essentiel de retenir que la relation de
soin est au centre du traitement. En effet, cette relation permet
d'établir un cadre de soins dans le but d'accompagner le patient
schizophrène et de le soigner. Ce cadre est un repère pour lui,
il prend en compte les besoins et les souhaits du patient et lui permet de
gérer au mieux ses symptômes, ses émotions et ses conflits
internes. En d'autres termes, il doit lui permettre de vivre au mieux avec ses
difficultés. C'est donc pour cela que la construction de la relation de
soin est indispensable dans la mise en place du procédé
thérapeutique. De plus, elle dépend principalement de la
confiance que le patient a envers le soignant. La confiance est une chose qui
se met en place et qui peut prendre du temps, elle a besoin d'être
entretenue et
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Lisieux | Mai 2019 27
nourrie. Chaque moment avec lui peut donc être favorable
à une communication pour entretenir une relation de confiance et ainsi
identifier avec lui ses besoins, ses peurs et ses envies. Elle sous-entend une
réciprocité entre les deux personnes. Il faut que le soignant et
le patient schizophrène s'investissent tous deux dans la relation de
soins. Il en découle alors une alliance thérapeutique. Le terme
« thérapeutique » a un sens bien précis, il
signifie « qui soigne ». Si on l'associe au mot «
alliance » on parle alors d'un lien qui se constitue entre le
patient et le soignant afin de permettre le commencement et la
continuité du cadre de soins. Le but de ce dernier étant de
construire un projet de vie avec la personne sans oublier de prendre en compte
la réalité et les difficultés de la maladie. Mais le terme
de « thérapeutique » peut également être
utilisé autour d'une activité ou d'un entretien. En effet, ces
deux actions font partie prenante de la relation de soin et ont toutes les deux
pour objectif d'accompagner le patient schizophrène dans l'acceptation
de sa maladie et ainsi lui apprendre à vivre avec. En ce qui concerne
l'entretien thérapeutique, il s'agit d'un dispositif s'appuyant sur le
dialogue et visant à rendre compte de la souffrance rencontrée
par le patient schizophrène et à la diminuer. Par dialogue, il
faut comprendre que cela donne la possibilité au patient de verbaliser
ses ressentis dans un climat de bienveillance. Les entretiens sont donc au
centre des soins car la communication entre patient et soignant permet de faire
avancer le projet de soins et la mise en place d'un accompagnement
adapté. Il est important de préciser ici qu'il existe
différents types d'entretiens. D'ailleurs ils sont souvent
associés au travail du psychiatre, mais l'infirmier peut lui aussi
proposer des rencontres programmées ou tout simplement à la
demande du patient. On parle alors d'entretien infirmier. Les activités
thérapeutiques sont souvent basées sur la vie quotidienne pour
pouvoir retrouver de l'autonomie. Elles permettent également de
travailler sur l'aspect social pour que le patient schizophrène puisse
développer ses rapports sociaux qui sont appauvris par la maladie. Les
conflits internes que vit le patient et qui le font souffrir sont aussi
évoqués lors des activités. Celles-ci d'aborder les
difficultés ressenties. En somme, il est évident que tous ces
éléments sont liés entre eux et sont dépendants les
uns des autres. Chaque aspect est indispensable pour une prise en charge de
qualité du patient schizophrène. Le cadre de soin, les entretiens
ou encore les activités ne peuvent prendre effet sans une relation de
soins et vice versa. On peut alors parler d'une synergie relationnelle
où tous ces aspects agissent ensemble afin de créer un effet
thérapeutique plus fort et plus probant pour le patient.
Ainsi, au même titre que les médicaments, la
relation de soin est un outil de travail pour soigner le malade
schizophrène et pour apprendre à le connaître. Il est
indéniable que
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 28
chaque personne est unique et possède les ressources
nécessaires pour diriger sa vie, pour faire des choix. C'est donc pour
cela que la relation de soin est mise en place, dans le but de pouvoir aider le
patient schizophrène à reconnaître ce qui est bon pour lui
selon ses projets. Cependant, il faut savoir que cette relation de soin peut se
rattacher à la notion de distance, ce qui peut apparaître
paradoxal. En effet, le professionnel doit oser la relation mais doit
également être en mesure de garder une certaine distance entre le
patient et lui dans le but de se protéger et de protéger le
patient schizophrène.
4.4. La juste distance
Pour Silvana Monello Houssin, « il e iste deu
manières de s'approcher ou prendre du recul: dans l'espace avec son
corps et à l'intérieur de soi. La pro imité ph sique peut
e ister alors que nous sommes psychiquement loin, tout comme nous pouvons
être physiquement distants et psychiquement proches.» Il semble
donc que cette notion de distance se rattache à la fois à
l'aspect physique mais également à la dimension psychique. La
juste distance sous-entend alors de prendre en compte ces deux aspects pour
trouver l'équilibre, et même si, selon D. Friard « la pro
émie ne s'évalue pas en centimètre », il faut
garder en tête qu'il serait difficile d'écouter ou de rassurer un
patient qui se trouve loin de nous. Ainsi, cette distance peut être
caractérisée de « juste » mais aussi de «
bonne » ou encore de « thérapeutique »
mais ces expressions sont abstraites et rendent ce concept non palpable et
difficilement définissable.
Cependant, pour illustrer cette notion de juste distance et
nous aider à la comprendre, l'UNAFAM nous raconte une simple histoire :
«Deu hérissons s'aimaient tendrement ; pour se prouver leur
amour ils s'entrelaçaient très fort, ce qui les faisait souffrir.
Vo ant cela, ils décidèrent de se séparer, ce qui les
rendait malheureux. Alors, ils essayèrent de se retrouver en se
rapprochant doucement et, progressivement, ils réussirent ainsi à
trouver la bonne distance pour s'aimer sans se faire souffrir.»
Malgré le caractère «intime» de cette histoire, cette
métaphore nous permet tout simplement de comprendre les deux
extrêmes dans une relation: être trop proche ou trop distant. Deux
aspects qui seraient délétères dans la prise en charge du
patient. La juste distance sous-entend donc une évaluation des
circonstances et un travail progressif pour arriver à trouver
l'équilibre idéal et ainsi protéger les deux
protagonistes.
D'autre part, selon P. Prayez, la juste distance est la «
capacité à être au contact d'autrui malgré la
différence des places ». Ainsi, dans un contexte de soin, nous
comprenons donc que la juste distance n'est pas d'être distant avec le
patient mais plutôt d'être là pour
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lui, pour l'accompagner tout au long de la prise en charge,
sans oublier notre statut de soignant. Autrement dit, le soignant ne doit pas
oublier le but défini lorsqu'il est en relation avec le patient. De
plus, dans l'article « oser la relation », D. Friard nous
explique que « penser la relation seulement à partir de la
distance empêche de penser la proxémie. Qui ose la relation doit
donc savoir la doser pour allier les deux. Doser la relation implique de
considérer la distance comme un traitement en mesurant les
bénéfices qu'elle aura sur le patient » en d'autres
termes, il faut avoir conscience de cette distance et de cette
proxémie dans la relation, pour pouvoir établir une
distance juste et thérapeutique pour le patient. Ensuite, P. Sureau dans
« de la confiance dans la relation de soin »,
représente la relation entre patient et soignant par une
métaphore: un élastique « dont chacun tient une
extrémité ». Il nous dit que « la distance qui
sépare les deux acteurs peut alors varier en même temps que la
tension de l'élastique: selon qu'ils seront proches ou distants, selon
que l'élastique sera tendu ou non, l'enjeu de la relation changera.
» c'est à dire que si par exemple un des deux acteurs devient trop
distant, il sera difficile de garder le lien de confiance établi avec le
patient. Une confiance qui, comme nous l'avons vu, est primordiale. Ainsi, nous
comprenons que la juste distance thérapeutique n'est pas figée et
souvent remise en question. Elle bouge suivant les situations, les
circonstances et en fonction de la dynamique de la relation. Elle fluctue
également en fonction de l'évolution du patient
schizophrène, de ses envies et de son projet de vie. Il convient donc au
soignant d'évaluer lui-même cette distance et d'adapter celle-ci
pour une bonne prise en charge et pour que le patient se sente bien.
D'une part, comme nous l'avons vu précédemment,
la relation de soin constitue un élément primordial dans la prise
en charge. Mais être en relation avec un patient contraint ou non, marque
une différence. En effet, ces situations peuvent amener le soignant
à reconsidérer cette notion de juste distance car lorsque l'on
prend en charge un patient schizophrène hospitalisé sous
contrainte, délirant, qui affirme n'avoir aucun problème, il en
découle une difficulté. L'intensité des troubles et le
refus de se faire soigner sous-entend de prendre contrôle de sa
liberté d'aller et venir, pour sa protection et pour la protection
d'autrui. Il apparait donc plus compliqué de créer un lien avec
une personne persécutée à qui on impose des mesures
répressives, qui l'empêchent de faire ce dont il a envie. La
personne peut également penser que les soignants sont là pour lui
faire du mal et ne comprendra pas toujours ce qu'il se passe. La distance
apparait donc ici comme plus facile, comme si la proxémie était
une chose inaccessible et impossible à mettre en place. Nous pouvons
dire que cette distance apparait comme nécessaire dans le sens où
le soignant ne doit pas être trop proche du patient pour ne pas entrer
dans son délire et mettre en péril la prise en charge. Pourtant,
la personne schizophrène a malgré tout besoin d'une rencontre,
de
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 30
construire un lien avec les soignants pour pouvoir avancer
avec sa maladie. Il y a donc ici une réelle difficulté dans
l'établissement d'une bonne distance.
Ainsi, la juste distance doit donc être
considérée comme un outil thérapeutique, pour stabiliser
la relation de soin. Une distance qui sépare tout en gardant une
approche suffisante, un équilibre qui se traduit par une valse entre
écartement et rapprochement. Le soignant doit donc fixer des limites
dans la relation et les maintenir, prendre du recul mais aussi être
humble pour passer le relais dans les situations difficiles afin de se
protéger et de protéger le patient. En outre, plus la distance
est juste dans la relation entre le patient et le soignant, plus la confiance
s'installera et permettra donc une prise en charge de qualité.
Pour conclure, il semblerait donc que tous les concepts
abordés dans ce cadre théorique soient en lien les uns avec les
autres et confirment le raisonnement de ma question de départ. Mais nous
savons que la théorie n'est pas toujours identique à la pratique
et peut être différente. La suite de mon travail consistera donc
à rencontrer des professionnels ayant une expérience en
psychiatrie et plus précisément avec les patients
schizophrènes. Le but étant de comparer mes recherches avec la
réalité pour ensuite faire une analyse des données et
ainsi essayer d'approfondir de la plus juste manière mon sujet de
départ.
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 31
5) L'enquête auprès des professionnels 5.1.
Moyens d'enquête
Afin de confronter mes recherches à la
réalité du terrain et ainsi approfondir ma question de
départ, j'ai décidé de réaliser deux entretiens
semi-directifs. Mon choix s'est porté sur cet outil car ce type
d'entretien est une technique de communication basée sur le partage qui
permet à la fois de centrer la discussion autour de thèmes
définis en lien avec mon sujet et à la fois d'élargir mon
champ de recherche. Globalement, il faut savoir que l'entretien n'enferme pas
le discours et permet également de développer et d'orienter les
propos. Ce qui est important. Le but de mes entretiens étant de pouvoir
apporter une richesse et des précisions sur mon cadre conceptuel mais
aussi de découvrir de nouvelles choses. De plus, mon sujet étant
principalement basé sur le relationnel, il était important de
choisir une méthode qualitative. En d'autres termes, un outil qui me
permettrait de recueillir le ressenti et le vécu des soignants. Des
aspects qui sont non quantifiables. Ainsi, pour pouvoir recueillir l'avis et
l'expérience des professionnels, je me suis appuyée sur un guide
d'entretien construit au préalable en fonction de mes recherches
théoriques. (Cf. Annexe 1)
Par ailleurs, ces entretiens ont été
enregistrés avec l'accord des professionnels puis retranscrits par la
suite (Cf. Annexe 2 et Annexe 3). A la demande des soignants
interrogés, le tutoiement a été utilisé lors de
l'échange.
5.2. Choix des professionnels
En ce qui concerne le choix des personnes interrogées,
mon sujet étant principalement porté sur la psychiatrie, il me
semblait légitime de questionner des soignants travaillant dans ce
domaine. J'ai donc pris contact avec un infirmier et une infirmière
exerçant tous deux en psychiatrie mais pas dans le même type de
structure. Choisir des lieux d'exercices différents se justifie par le
fait que je voulais recueillir diverses expériences avec
différents patients. J'ai également cherché à
rencontrer des infirmiers avec un parcours et des âges différents
pour pouvoir comparer et voir si les réponses variaient en fonction de
ces éléments. Pour finir, il me semble important de
préciser que le fait d'avoir choisi un homme et une femme n'est qu'un
simple hasard, cela n'est pas un choix particulier.
Ainsi, suite aux informations recueillies au cours de
l'entretien, le premier infirmier rencontré est un homme ayant
commencé à l'IFSI en 2013 pour terminer en 2016. Il a tout
d'abord travaillé dans un service d'entrant en psychiatrie pendant 1 an
puis a effectué 10 mois de nuit dans le même service. Maintenant,
il travaille dans un service de réhabilitation
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 32
depuis quelques mois. En ce qui concerne l'infirmière
interrogée lors du second entretien, il s'agit d'une femme qui a
commencé à travailler en psychiatrie en 1988 quand elle avait une
vingtaine d'années en tant qu'aide-soignante en service
d'hospitalisation. Elle a eu l'opportunité de faire l'école
d'infirmière, ce qui lui a ensuite permis de travailler dans un centre
d'accueil de crise sur Paris et d'acquérir beaucoup de connaissances.
Elle a également eu l'occasion de travailler sur le domaine de la
précarité avec des gens à la rue lors de cette
expérience. Par la suite, elle est arrivée en 2008 aux urgences
psychiatriques puis après cela a travailler dans un centre
d'hébergement thérapeutique pour les adolescents. En 2017, elle
commença à travailler dans une unité de moyen/long
séjour en psychiatrie, mais depuis peu, elle fait partie d'une
équipe mobile du même pôle.
5.3. Lieu et temps de l'enquête
Concernant l'environnement et le temps de chaque entretien, ma
première rencontre a été réalisée chez la
personne interrogée. Un endroit calme où nous avons
échangé pendant vingt minutes et sans aucune interruption pendant
cette discussion. Concernant mon deuxième entretien, il s'est
déroulé sur le lieu d'exercice de la personne, dans un bureau
calme, sans interruption. Cependant, la pièce étant près
de la route, nous avons parfois rencontré des nuisances sonores mais
cela n'a pas altéré la qualité de l'entretien qui a
duré une trentaine de minutes. Ces différents lieux ont
été choisis pour des raisons pratiques et organisationnelles et
en accord avec chaque professionnel.
5.4. Les limites et les difficultés de
l'enquête
Lors de l'enquête, il s'est parfois
révélé compliqué de me faire comprendre par rapport
à mes questions. Certaines subtilités dans le sens des mots
choisis n'ont pas directement été perçues et ont
demandé une explication ou une reformulation. De plus, le fait d'avoir
des questions prédéfinies m'a parfois bloqué dans la
dynamique du discours. En effet, à certains moments dans
l'échange, j'ai eu l'impression de poser des questions plus que de
discuter avec mon interlocuteur. J'écoutais attentivement les
réponses très détaillées et authentiques des
soignants mais il m'est parfois arrivé de ne pas rebondir dessus comme
j'aurai souhaité le faire, car parfois je restais focalisée sur
les questions rédigées au préalable.
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 33
6) L'analyse
L'étude qui va suivre constitue la finalité de
ce mémoire de fin d'études. En effet, cette analyse des
entretiens menés auprès des professionnels a pour objectif de
dégager des axes d'ouverture et des éléments permettant de
comprendre davantage ma question de départ. Afin de m'aider dans cette
analyse, j'ai donc réalisé un tableau reprenant les
éléments du cadre théorique ainsi que les dires des
infirmiers interrogés (Cf. Annexe 4)
1er thème : La
schizophrénie
Par rapport à la schizophrénie, les deux
infirmiers s'accordent sur un même mot pour la caractériser : la
dissociation. Dans la théorie, ce terme est également
présent pour la définir, on parle plus précisément
de dissociation de la pensée et de la personnalité. L'IDE 1
explique que « c'est la déconne ion avec la
réalité, on voit les choses différemment, on capte les
choses différemment » et ajoute que « la
réalité que nous, nous allons vivre chaque jour, cette
réalité-là va être totalement vécue et vue
d'un oeil différent par une personne dissociée. » et
selon les recherches, être schizophrène c'est vivre la
réalité d'une autre façon. L'IDE 1 nous précise que
« son jugement de la réalité, ses sentiments par rapport
à la réalité vont être altérés, ses
pensées et sa perception vont l'être aussi » un aspect
que l'on retrouve dans la définition de David H.Barlow et V. Mark Durand
qui détermine la schizophrénie comme un trouble qui peut «
affecter la perception, la pensée, le discours et les gestes
». D'autre part, l'IDE 2 parle de grandes difficultés et de
grande souffrance, une idée similaire à la théorie qui dit
que cette maladie est une source d'anxiété et de souffrance
terrible qui affecte la vie de la personne. L'IDE 1 souligne également
le caractère difficile de cette maladie. De plus, nous retrouvons une
similitude entre le cadre conceptuel et les dires de l'IDE 1 par rapport au
fait que la schizophrénie s'illustre avec l'idée d'un clivage du
Moi. Enfin, l'IDE 1 insiste sur le fait qu'il ne faut pas confondre la
dissociation avec les troubles dissociatifs de l'identité qui ne
concernent que très peu d'individus. Une chose non abordée dans
mon cadre théorique.
Sous thème : Une maladie chronique
En ce qui concerne la chronicité de la maladie, l'IDE 1
et l'IDE 2 semblent tous deux en accord avec le cadre conceptuel qui explique
que la schizophrénie est une maladie chronique car elle ne se
guérit pas. De plus, selon l'OMS, les maladies chroniques sont des
« affections de longue durée », une chose que
confirme l'IDE 2 en caractérisant la
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 34
schizophrénie comme étant une maladie longue.
Elle parle également d'une maladie qui peut se stabiliser suivant les
rencontres thérapeutiques, ce qui rejoint l'idée de l'IDE 1 qui
nous dit que les soignants sont là pour les aider à vivre leur
vie dans le monde et dans la société c'est à dire à
vivre correctement avec la maladie. De plus, la théorie semble se
rapprocher de ce point de vue, car selon les recherches, les soignants sont
là pour pouvoir aider le patient à vivre avec les symptômes
de la maladie et l'aider à retrouver une vie sociale. Enfin, nous
retrouvons dans les deux entretiens, un lien avec le handicap. En effet, l'IDE
2 semble voir la schizophrénie comme quelque chose qui «
handicape le quotidien » tout comme l'IDE 1 qui pense que les
schizophrènes sont des personnes handicapées. L'IDE 1 utilise
même une métaphore simple pour expliquer son point de vue : «
comme une personne en fauteuil roulant aurait besoin d'une rampe
d'accès pour accéder à une porte et bah ces
personnes-là ont besoin d'une rampe pour accéder à des
activités qu'ils aiment, à du travail qu'ils aiment »
deux idées similaires qui font donc écho au cadre
théorique et plus précisément à la loi du 11
février 2005 relative à l'égalité des droits et des
chances, la participation et la citoyenneté des personnes
handicapées, qui intègre les conséquences des maladies
chroniques dans la définition du handicap. Ainsi, il semblerait donc que
la schizophrénie soit vue comme un handicap pour la personne.
2ème thème : La qualité de vie
d'un patient schizophrène
Dans un premier temps, il semblerait que les deux infirmiers
interrogés aient une vision différente de ce que peut être
la qualité de vie malgré quelques similarités. En effet,
pour l'IDE 1, la qualité de vie sous-entend de pouvoir être
heureux avec ce que l'on a et ne pas forcément chercher plus, il ajoute
que c'est « arriver à vivre avec notre passé, notre
présent et l'idée qu'on peut se faire de l'avenir ».
Pour l'IDE 2, il s'agit plutôt de vivre avec soi-même et avec ses
difficultés, ce qui pourrait malgré tout se rattacher subtilement
à la notion de vivre avec son passé, son présent et son
futur décrit par l'IDE 1. Par rapport à la théorie, aucun
des deux points de vue n'est réellement similaire aux recherches car
pour B. Baertschi « une vie de qualité doit donc être une
vie inscrite dans l'autonomie, dans l'intégrité et dans la
dignité ». Des termes qui ne sont pas abordés par les
deux infirmiers. Cependant, toutes ces visions divergentes peuvent confirmer ce
qui est inscrit dans le cadre conceptuel. En effet, cette différence
peut consolider le fait que la qualité de vie est un concept vague et
propre à chacun et qu'elle relève de l'unicité de chaque
personne, de ce qui est essentiel pour elle, ainsi qu'à sa
manière de vivre.
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 35
En ce qui concerne l'impact de la schizophrénie sur la
qualité de vie, l'IDE 1, de par sa perception de la qualité de
vie, nous explique que le patient schizophrène « n'a pas
forcément de projection sur l'avenir parce que toutes ses pensées
sont centrées vers le présent et ce qu'il ressent au jour le jour
peut être très mauvais et très triste pour lui voir
très terrifiant » Pour l'IDE 2, il semblerait que la maladie
impacte la vie du patient lorsque les symptômes de la maladie commencent
à handicaper le quotidien du patient et plus précisément
« quand la personne ne peut plus rien faire, ne peut plus être
avec l'autre, ne peut plus être avec lui-même ». L'IDE 1
nous parle plus précisément de ces symptômes et insiste
notamment sur la dissociation. Pour lui, c'est ce qui perturbe la vie du
patient car « ils ne vont pas voir la réalité de la
même manière que nous ». Il nous dit qu'ils vont voir
des choses qui les persécutent et qui les font souffrir. D'ailleurs, C.
Tobin définit les hallucinations comme « des perceptions
vraiment ressenties, mais sans support réel, qui n'e istent que dans la
tête de celui qui les vit. » et caractérise les
délires comme « des constructions mentales fausses, de fausses
interprétations à partir d'observations vraies. ». De
plus, d'après les recherches, le patient schizophrène peut avoir
des doutes sur son appartenance, ce qui peut installer et créer un
climat angoissant au quotidien, ce que l'IDE 1 semble confirmer en nous disant
que les patients « vont avoir l'impression que leur vie n'a pas de
sens, qu'il a des choses qui interrompent leur vie ». Par rapport
à ces symptômes, l'IDE 2 nous parle également de
l'isolement et de la rupture de lien avec l'entourage que peut entrainer la
maladie et qui peut être difficile pour certains schizophrènes. Un
aspect que l'on retrouve dans le cadre conceptuel qui nous dit que les
symptômes affectent le comportement du patient chaque jour et entrainent
un repli sur soi s'accompagnant d'une grande souffrance constante affectant
donc sa qualité de vie. Il est dit également que les
symptômes de la schizophrénie impactent sur les capacités
sociales de la personne, notamment sur la reconnaissance des émotions et
des sentiments ainsi qu'à la capacité à distinguer soi et
autrui. Une notion qui renvoie à la rupture de lien social et à
l'isolement cité par l'IDE 2. Ainsi, l'IDE 2 nous raconte que, selon
elle, pour que le patient puisse avoir une qualité de vie satisfaisante
« il faut pouvoir vivre avec les symptômes et pouvoir garder les
liens avec la famille et les amis », une chose qui reste difficile
chez les patients schizophrènes. Elle nous dit aussi qu'il faut qu'il
« puisse avoir une vie harmonieuse même si elle peut ne pas
l'être ». Par cette phrase, l'IDE 2 veut expliquer qu'une vie
harmonieuse est subjective comme nous l'avons vu dans la théorie. En
d'autres termes, ce qui sera harmonieux pour certains patients sera
peut-être dysharmonieux pour nous soignants car nous aurons un regard
différent. Mais ceci « est une partie de son équilibre
psychique » qu'il faut savoir respecter.
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Lisieux | Mai 2019 36
3ème thème: La relation de soin
infirmier avec un patient schizophrène
Tout d'abord, d'après la théorie, il existerait
deux origines dans la relation de soins. L'une pouvant être fonctionnelle
c'est à dire « qui naît d'un soins à faire » et
l'autre pouvant être selon, W. Hesbeen «une relation d'attention
à la personne, une relation singulière, sensible et subtile et
qui se veut de nature aidante». L'IDE 2 semble être consciente
de ces deux natures et nous parle d'une relation de soins avec plusieurs
significations. Elle explique par exemple qu'une relation peut découler
d'un soin technique mais que celle-ci sera plus courte et différente que
celle en psychiatrie.
Par rapport à la place de la relation de soin dans la
prise en charge d'un patient schizophrène, l'IDE 1 et 2, semblent se
rejoindre sur le fait que cette relation est une chose très importante
et essentielle. L'IDE 2 la place au centre de la prise en charge ainsi que
l'IDE 1 qui recherche cette relation en premier lieu pour établir un
lien avec le patient. La construction de la relation de soin semble donc
être indispensable dans la mise en place du procédé
thérapeutique car c'est aussi ce que l'on retrouve dans la partie
théorique. Pour l'IDE 1 la relation de soins sous-entend de gagner un
lien de confiance, une chose importante pour avancer dans la prise en charge.
La confiance entre soignant et patient permet donc de faire avancer ce dernier
dans sa maladie et ainsi le faire avancer dans sa vie. En théorie, ce
lien dépend également de la confiance que le patient a envers le
soignant et c'est cette relation de confiance qui permet d'identifier avec lui
ses besoins, ses peurs et ses envies. Dans le cadre conceptuel, on parle
notamment d'alliance thérapeutique pour caractériser le lien
permettant un cadre de soin. Un terme non cité par les deux
professionnels.
Ensuite, de par mes recherches j'ai pu constater que les
activités et les entretiens font partie prenante de la relation de soin
et ont toutes les deux pour objectif d'accompagner le patient
schizophrène dans l'acceptation de sa maladie et ainsi lui apprendre
à vivre avec. L'IDE 1 comme l'IDE 2 font vivre cette relation par des
médiations et des activités également. Mais contrairement
à la théorie et à l'IDE 1, l'IDE 2 estime qu'il n'est pas
toujours nécessaire de faire des entretiens cliniques. Elle dit
plutôt favoriser le tiers pour être en lien et pas seulement la
discussion, un lien d'ordre indirect quand le lien direct n'est pas possible.
Mais elle explique que la relation dépendra aussi de chaque situation.
Le plus important étant d'apporter quelque chose au patient, qui l'aide
et qui lui donne envie de continuer la prise en charge. Pour finir, l'IDE 1
apporte deux nouveaux aspects qui n'ont pas été abordé
lors de la partie conceptuelle. La première idée est qu'il
semblerait que le patient puisse
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 37
parfois associer le soignant à la
réalité, une réalité à laquelle il peut se
tenir et se fier, ce qui lui permettra d'avancer dans les périodes de
crise et renforcera la relation de soins. De plus, selon l'IDE 1,
l'hospitalisation favoriserait ce lien également, car le patient est
présent dans une structure et demande de l'aide. Et même si le
patient est dans le refus de soin et qu'il entraine une difficulté, le
cadre hospitalier sous-entend malgré tout une rencontre et une prise en
charge.
Sous thème : Les compétences relationnelles
de l'IDE
Dans le cadre conceptuel, plusieurs compétences sont
abordées. Tout d'abord, l'écoute fait partie de ces
compétences, il est dit que prendre en compte la parole du patient,
c'est tout d'abord le reconnaitre en tant que personne et ne pas seulement
l'assimiler à sa maladie. L'IDE 1 et l'IDE 2 ne parle pas
spécifiquement de cette notion mais l'IDE 1 s'accorde avec la
théorie pour dire que le patient schizophrène a besoin
d'être reconnu en tant que personne et non pas en tant que malade.
Ensuite, le cadre nous parle d'empathie, une attitude qui apparaît comme
un des concepts primordiaux dans la prise en charge de la schizophrénie.
Une chose que l'IDE 2 confirme, en nous disant que le soignant doit être
dans l'empathie. Par rapport à la communication et à la patience
qui sont citées dans la théorie, aucun des deux infirmiers n'a
utilisé ce terme. En ce qui concerne l'authenticité, l'IDE 2 est
en accord avec le cadre pour dire que la subjectivité,
l'authenticité et le fait d'être soi-même, favorise la
relation. Il semblerait donc que l'infirmière doit être capable de
reconnaître et accepter ses propres sentiments. Être authentique
avec une attitude spontanée et naturelle. L'IDE 1 ne désigne
aucune notion particulière pour parler des compétences
relationnelles mais il nous parle de l'attitude aidante que le soignant doit
adopter. L'IDE 1 explique que le soignant doit se montrer aidant envers les
personnes dans le but de créer la relation de soin et le lien de
confiance pour ensuite l'amener à réfléchir sur ses
comportements, sur ses délires, ses sentiments. Une attitude qui peut
sous-entendre de posséder les compétences abordées dans la
théorie car ce sont elles qui permettent d'établir une relation
et de la confiance avec le patient pour lui permettre d'avancer et de faire
face à la maladie.
Enfin, l'IDE 2 nous parle de non jugement de la personne et de
tolérance. Elle explique également que l'humilité est
importante c'est-à-dire, qu'il faut « être convaincu de
ce que l'on fait sans porter de médaille ». Trois notions qui
ne sont pas citées dans la partie théorique mais qui semblent
malgré tout importantes car dans le cadre, les compétences
abordées ne sont pas les seules, les capacités relationnelles
sont multiples.
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 38
Sous thème: Les difficultés dans la
relation de soins
En ce qui concerne les difficultés rencontrées
dans la relation de soins, il semblerait que l'IDE 1 et 2 pensent la même
chose. En effet, les deux professionnels s'accordent sur le fait qu'il existe
une difficulté lorsqu'ils sont face à un patient très
persécuté, délirant et non accessible. En s'appuyant sur
le cadre conceptuel, il semblerait qu'il existe un obstacle dans la relation
lorsque le patient est délirant et affirme n'avoir aucun
problème. Il apparait donc plus compliqué de créer un lien
avec une personne persécutée qui est dans le refus de soin. Dans
la théorie, le contexte d'une hospitalisation sous contrainte est
mentionnée. Cependant, nous pouvons préciser que l'IDE 1 et l'IDE
2 n'abordent pas spécifiquement cette notion lorsqu'ils parlent de cette
difficulté. L'IDE 2 ajoute que : « des gens qui sont
très en crise, qui sont très très très
délirant ce n'est pas facile d'établir une relation ».
De plus, la personne peut également penser que les soignants sont
là pour lui faire du mal, ce que confirme l'IDE 1 : « Ils vont
penser qu'on est là pour leur faire du mal, ils vont avoir
éventuellement des voix qui vont leur dire qu'on est là pour
faire du mal et c'est difficile pour eux. »
Face à ces difficultés, l'IDE 1 nous explique
que quand ces patients sont mieux, il peut essayer de montrer au patient que
les soignants sont là pour lui, pour l'aider. Il utilise les entretiens
et les activités thérapeutiques pour vivre des moments avec eux
et ainsi leur montrer sa bienveillance et établir un lien de confiance.
Un fonctionnement différent de l'IDE 2 qui aborde le travail en
équipe pour y faire face. Elle explique qu'elle transmet à ses
collègues lorsqu'elle est confrontée à une situation
difficile : « J'ai toujours bossé en individuel mais
grâce au collectif (...) je fais toute seule j'ai ma pensée, j'ai
mes idées mais par exemple quand je rencontre des difficultés
avec un patient je me réfère à l'équipe
».
Sous thème : Le travail en
équipe
Dans un premier temps, il semblerait que l'IDE 1 et l'IDE 2
soit d'accord avec le cadre pour dire que le travail en équipe est une
chose très importante pour plusieurs raisons et qu'il est présent
partout et à tout moment dans la prise en charge. Ils semblent tous deux
penser également que les transmissions et la communication en
équipe sont primordiales car les choses vécues par chaque
soignant avec le patient seront transmises entre collègue dans le but de
connaître le patient et d'établir une prise charge de
qualité ainsi qu'une relation de confiance. L'IDE 1 nous dit même
que : « Toutes les informations sont
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 39
importantes donc le fait qu'il y ait une équipe
pluridisciplinaire qui se transmet toutes les infos, ça aide à ce
que tous ensemble on soit dans le sens du patient, qu'on soit là pour
lui et son bien-être. » L `IDE 2 confirme ceci : « Je
ramène l'information à l'équipe pluridisciplinaire pour
partager, avancer et faire une bonne prise en charge ». Il semblerait
donc que le travail en équipe va permettre de continuer, d'avancer avec
le patient et que le fait de transmettre les informations entre professionnels
permet une prise en charge adaptée. Dans la théorie, P. Cauvin
définit le travail en équipe comme étant « le
lieu où se développent les solidarités, où se
renforcent les actions de chacun par le jeu des échanges, où
s'unifie l'activité, où se crée un esprit commun
» Une définition qui représente bien l'idée de
l'IDE 1 et l'IDE 2 avec un but commun qui est ici de mettre en place en
équipe une bonne prise en charge des patients schizophrènes. De
plus, d'après le cadre, travailler ensemble permet de comprendre,
à travers la disparité de ces membres, la complexité des
conflits intérieurs d'un patient schizophrène.
Ensuite, l'IDE 2 nous dit aussi que l'équipe permet de
« passer la main » quand on est en difficulté pour
avancer dans la prise en charge et pour le bien du patient. L'IDE 1 semble
d'accord avec ça et nous explique que « l'équipe
pluridisciplinaire joue un rôle important parce que ce qu'on ne va pas
réussir à faire en tant que soignant peut être qu'un
médecin psychiatre du fait de son statut va réussir à le
faire passer au soignant et inversement ce que le médecin ne va pas
réussir à faire parce que peut-être il sera vu comme le
persécuteur et bah nous soignant on peut travailler dessus.
»
L'IDE 2 est d'accord avec le cadre conceptuel pour dire que
chaque professionnel d'un service est une ressource et peut être
amené à aider l'autre. Elle nous dit qu'une équipe se
serre les coudes, que le fait d'être plusieurs a un côté
rassurant. Il semblerait que l'IDE 1 pense la même chose.
Enfin, contrairement à l'IDE 1 et à la
théorie, l'IDE 2 explique que l'équipe peut être
bénéfique ou non pour le patient schizophrène suivant les
situations. Elle nous dit que « Des fois c'est mieu que ce soit
restreint c'est mieu qu'il y ait qu'une seule personne ». Cependant,
l'IDE 2 rejoint le cadre et l'IDE 1 pour dire qu'il est parfois
bénéfique d'être plusieurs pour qu'il y ait du relais parce
que cela peut être lourd quand la communication est difficile. Dans les
recherches théoriques, l'équipe peut permettre de contenir la
pensée et l'émoi du patient, ce qui rend le caractère
difficile de ses angoisses plus supportable car elles peuvent être
partagées avec les différents soignants. Cela permet à la
personne schizophrène de diriger ses émotions dans plusieurs
directions, et donc d'en atténuer la force. L'IDE 2 souligne
également qu'il n'y a « rien de défini mais des fois il
y a des situations
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Lisieux | Mai 2019 40
où c'est bien que ça se dilue pour la
personne et la distance elle est là aussi c'est une façon de
mettre une distance ». Une idée qui s'apparente à celle
du cadre conceptuel.
4ème thème: La juste
distance
Sur la question de la juste distance, l'IDE 1 et 2 font tous
deux allusion au fait qu'il faut tout d'abord entrer en relation et
créer un lien avec le patient, ce qui prend du temps. Une fois cette
relation installée, la notion de juste distance prend place et c'est
à l'infirmière d'évaluer s'il doit être proche ou
distant ainsi que de poser des limites dans la relation. Dans le cadre
conceptuel, la juste distance sous-entend une évaluation des
circonstances et un travail progressif pour arriver à trouver
l'équilibre idéal, ce qui reprend les dires des deux infirmiers.
Il est dit également que les soignant doivent évaluer
eux-même cette distance et adapter celle-ci pour une bonne prise en
charge et pour que le patient se sente bien. L'IDE 2 est d'accord et ajoute que
« Le but c'est que le patient se sente bien quelques soit cette
distance qu'on a pu mettre avec la personne. »
D'après l'IDE 1 et 2, la juste distance sous-entend de
ne pas être trop proche, ni trop distant, c'est-à-dire qu'il faut
être là pour le patient mais savoir être distant quand cela
est nécessaire. Ce que l'on retrouve dans le cadre conceptuel, car il
est indiqué que la juste distance est une distance qui sépare
tout en gardant une approche suffisante, un équilibre qui se traduit par
une valse entre écartement et rapprochement. Ce n'est pas tant
être distant avec le patient mais plutôt d'être là
pour lui, pour l'accompagner tout au long de la prise en charge sans oublier
que nous sommes soignants. De plus, l'IDE 2 comme dans la théorie, nous
précise que cette distance fluctue en fonction de la personne et des
situations. Il est dit que la juste distance thérapeutique n'est pas
figée, qu'elle est mouvement constant. Elle bouge en fonction de
l'évolution du patient schizophrène, de ses envies et de son
projet de vie mais aussi en fonction des situations et de la relation. Ensuite,
l'IDE 2 finit par préciser que « c'est une chose
compliquée, l'être humain est compliqué 'a pas vraiment de
recette.
»
Par rapport aux bénéfices de cette juste
distance sur le patient schizophrène, l'IDE 2 nous dit que «
Plus tu vas savoir quand il faut être distant avec le patient, plus
ça va être bénéfique pour lui. Si tu arrives et que
tu es proche alors qu'il faut que tu sois distante, ça va être
enfermant pour le patient, tu ne seras pas en train de l'aider. »
L'IDE 1 semble d'accord avec l'IDE 2 mais l'exprime différemment :
« La juste distance thérapeutique est déterminante dans
le prise en charge d'un patient schizophrène car il faut que le patient
soit en confiance (...) et en même temps il faut aussi qu'on le confronte
à la réalité (...) pour trouver des mo ens de contrer ses
phases d'angoisses et ses phases de délire donc il faut
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 41
qu'on soit à la fois soignant, aidant de leur
côté et en même temps qu'on les confronte aussi un petit peu
avec la réalité. ». La théorie parle
également de la confiance et nous dit que plus la distance est juste
dans la relation entre le patient et le soignant, plus la confiance
s'installera et permettra une prise en charge de qualité. De plus, D.
Friard nous explique que « penser la relation seulement à
partir de la distance empêche de penser la proxémie. Qui ose la
relation doit donc savoir la doser pour allier les deux. Doser la relation
implique de considérer la distance comme un traitement en mesurant les
bénéfices qu'elle aura sur le patient », une chose que
confirme donc l'IDE 1 et l'IDE 2.
Dans la théorie, le soignant doit fixer des limites
dans la relation de soins et les maintenir. Ainsi, l'IDE 1 et 2 sont d'accord
et ont pour cela la même façon de faire. Pour les deux infirmiers,
il faut recadrer le patient pour garder cette juste distance lorsque ceci est
nécessaire. L'IDE 1 rappellera au patient qu'il n'est pas son ami et
qu'il est là en tant que soignant, pour l'aider. L'IDE 2 procède
de la même manière que l'IDE 1. Ce dernier nous explique
également qu'il appelle les patients par leur prénom mais que
pour garder la bonne distance, il garde le « vous ». Il nous explique
que cela va permettre « à la fois de rentrer dans leur
intimité (...) et en même temps de garder le vous qui fait qu'on
garde ce statut professionnel. »
Par ailleurs dans la partie théorique, la distance
apparait parfois comme nécessaire dans certaines situations dans le sens
où le soignant ne doit pas être trop proche du patient pour ne pas
entrer dans son délire et mettre en péril la prise en charge.
L'IDE 1 et l'IDE 2 sembleraient penser la même chose. En effet, pour
l'IDE 2, il y a des patients pour lesquels « il ne faut pas trop
être proche parce qu'on rentre dans leur bulle et eux ils nous
incorporent à leur délire ». L'IDE 1 nous explique une
idée similaire : « Je suis dans la juste distance dans le sens
où je suis du côté du patient, des fois j'accepte certains
éléments délirants sans pour autant les confirmer, c'est
à dire que j'acquiesce, mais je ne rentre pas dans son
délire.»
De plus, selon l'IDE 2, par rapport à la notion de
clivage chez le patient schizophrène, le soignant peut parfois devenir
le mauvais objet et il faut l'accepter et respecter ça. Elle nous dit
aussi « qu'il il faut savoir être là et ne pas être
là aussi, déjà pour pas que le patient soit
persécuté ». L'IDE 1 est en accord avec cette
idée car selon lui, la juste distance c'est à la fois être
là dans les bons moments mais aussi dans les mauvais : « quand
ils font des choses qui sont en dehors de la réalité, des fois
les confronter à ça, ça va peut-être nous
positionner pendant un temps en tant que persécuteur ».
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
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Enfin, dans le cadre conceptuel, il faut être humble
pour passer le relais dans les situations difficiles afin de se protéger
et de protéger le patient et l'IDE 2 est en accord avec ceci. Elle nous
explique que l'humilité est importante car il faut pouvoir passer la
main quand ceci est nécessaire pour garder une juste distance.
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Lisieux | Mai 2019 43
7) La problématique
A l'issue de cette analyse, j'ai donc pu relever plusieurs
éléments de réponse et ainsi en déduire des
hypothèses en lien avec ma question de départ qui est : «
En psychiatrie, en quoi la juste distance dans la relation de soin IDE avec
un patient schizophrène permet-elle d'améliorer sa qualité
de vie ? ».
Globalement, nous pouvons constater que la juste distance peut
apparaitre comme une chose bénéfique pour le patient
schizophrène. En effet, il semblerait que plus la distance est
adaptée à la relation de soins, plus cela permet d'avancer dans
la prise en charge et donc d'aider le patient à progresser dans sa
maladie et ainsi améliorer sa qualité de vie. Comme nous l'avons
vu, la juste distance n'est pas une notion figée et évolue en
fonction de la dynamique de la relation mais aussi en fonction des situations
et de l'évolution du patient. Cet équilibre entre « trop
proche » et « trop distant » semble donc découler de la
relation et du lien de confiance entre le patient et le soignant. Une relation
de soins qui est également une notion importante dans la prise en
charge. Cependant, la confrontation entre la théorie et la pratique,
nous permet de constater une difficulté dans la relation de soins avec
le patient schizophrène délirant et non accessible. En effet, il
apparait plus difficile d'établir un contact avec un patient
persécuté qui est dans le déni de ses symptômes.
Ainsi, étant donné que la relation de soin est primordiale dans
la prise en charge de la personne schizophrène mais qu'il existe une
difficulté lorsque le patient est en phase aigüe de sa maladie
alors nous pouvons nous questionner sur les moyens qui permet une approche
thérapeutique avec le patient délirant. Quels types de
démarche de soins est-il possible de mettre en place ? Comment un
patient délirant en état aigu pourrait-il envisager de collaborer
en toute confiance avec les soignants ? De plus, étant donné que
la juste distance semble bénéfique pour le patient mais qu'elle
fluctue en fonction de la relation de soin et plus précisément en
fonction des situations et de l'état de la personne malade alors nous
pouvons également nous demander comment trouver la juste distance
thérapeutique dans la relation lorsque nous sommes face à une
phase aigüe ?
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8) La question de recherche
Face à ce constat et après plusieurs
réflexions, une nouvelle question m'est donc apparue :
« En quoi, l'IDE peut-elle garder une juste distance
dans une relation de soin fragilisée par l'état de crise
aigüe d'un patient schizophrène ? »
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Lisieux | Mai 2019 45
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CONCLUSION
Tout d'abord, l'élaboration de ce travail de recherche
centré sur le patient schizophrène et la juste distance a
été pour moi une ressource personnelle et professionnelle
certaine. En effet, cette exploration a pu m'éclairer sur la
genèse de ma réflexion qui émanait de ma situation d'appel
et m'a permis de mûrir sur ma façon de faire et de voir les
choses. J'ai également pu apprendre à affiner mes
compétences de sélection et de synthèse d'informations
tout au long de la conception car ce sujet m'intéressant
considérablement, il n'a pas toujours été évident
pour moi de rester centrée sur ma question de départ. Cependant,
ce mémoire fut pour moi un réel épanouissement personnel
et intellectuel. J'ai pu prendre conscience de certaines choses et en confirmer
d'autres, tant sur le plan personnel que professionnel. J'ai eu la chance de
rencontrer des professionnels passionnés avec une envie incontestable de
transmettre leur savoir et leur expérience, ce qui a été
très enrichissant. Mon exaltation pour les relations humaines et la
psychiatrie n'a cessé de se développer tout au long de mon
travail et confirme donc mon projet professionnel. Aristote disait : «
Là où vos talents et les besoins du monde se rencontrent,
là se trouve votre vocation » et je pense avoir trouvé la
mienne. Par ailleurs, ce mémoire m'a réellement permis de prendre
part à une véritable réflexion sur ma pratique
professionnelle. En effet, à travers ce travail, j'ai pu davantage me
rendre compte de ce que peut être la schizophrénie au quotidien
pour la personne qui la vit et cela a renforcé mon objectif de mettre en
place des prises en charge de qualité pour pouvoir les accompagner vers
un mieux-être possible. La prise en charge du patient schizophrène
dans notre société n'a jamais été aussi importante
à mes yeux. Elle nécessite à mon sens une véritable
attention de la part des soignants mais tout en gardant à l'esprit que
le travail de chaque infirmier est un investissement subjectif. De plus, les
concepts approfondis lors de ce travail vont pouvoir me guider dans mes futures
prises en charge. J'ai pu confirmer que la relation de soins est une chose
primordiale dans ce domaine. Mais j'ai aussi pu comprendre que la
qualité de vie est propre à chaque être humain, tout comme
la juste distance qui ne détient pas de recette. Mais elle semble
malgré tout être un équilibre entre distance et
proxémie, et semble être bénéfique pour le
patient.
Enfin, lors de mon analyse j'ai donc pu constater qu'il existe
une réelle difficulté dans la relation de soins et dans cette
recherche de juste distance avec un patient schizophrène en phase
aiguë. Ainsi, ma réflexion ne s'arrête pas ici et j'ai pu en
déduire plusieurs hypothèses pour la suite. En effet, mes
recherches s'orienteraient tout d'abord sur ce que signifie vraiment une phase
active chez un patient schizophrène. A la suite, je pense qu'il
pourrait
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 47
être intéressant de faire des recherches sur la
phase résiduelle, la période qui suit un épisode aigu de
la maladie ainsi que sur la phrase prodromique qui est la période au
cours de laquelle les signes avant-coureurs de la maladie se manifestent. Tout
ceci dans le but de pouvoir en comprendre les mécanismes et pouvoir
connaître davantage le patient schizophrène. Approfondir l'impact
de ces phases sur la juste distance et la relation de soin pourrait être
important mais aussi essayer de comprendre le rôle et l'impact du
soignant dans ces périodes de crise. Enfin, il serait peut-être
envisageable de recueillir des expériences de soignants travaillant en
psychiatrie ainsi que des témoignages de patients schizophrènes
en allant les rencontrer. Par ailleurs, après quelques recherches, j'ai
pu trouver un article en lien avec ce sujet, un texte de D. Friard
intitulé « L'approche thérapeutique du patient
délirant » qui semble très intéressant. Mais
comme le dit l'auteur dans cette article : « Il faut conclure
là où l'on souhaiterait développer. »
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 48
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DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 52
TABLE DES ANNEXES
Annexe 1. Guide d'entretien 53
Annexe 2. Restranscription de l'entretien 1 55
Annexe 3. Restranscription de l'entretien 2 60
Annexe 4. Tableau d'analyse 65
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Lisieux | Mai 2019 53
Annexe 1. Guide d'entretien
Le parcours des professionnels
Objectif: Comparer et analyser les ressemblances et les
différences entre les réponses selon l'expérience
Pourriez-vous me parler de votre parcours professionnel ?
? Année d'obtention du diplôme ? Ancienneté
dans le service
? Formations complémentaires si oui, lesquels ?
Thème 1 : La schizophrénie
Objectif: Recueillir les représentations des soignants
sur la schizophrénie
Quels mots choisiriez-vous pour expliquer la
schizophrénie ?
Pour vous, en quoi la schizophrénie est-elle une maladie
chronique ? Thème 2 : La qualité de vie d'un patient
schizophrène
Objectif: Prendre connaissance des différents aspects
identifiés par les soignants sur l'impact de la maladie sur le quotidien
des patients
Quelles idées vous faites-vous de la qualité de
vie ? (termes, mots, représentations, association...)
Selon vous, en quoi la schizophrénie impact-elle la
qualité de vie du patient ? Thème 3 : La relation de soin
infirmier
Objectif: Identifier la place de la relation de soin IDE avec un
patient schizophrène dans sa prise en charge
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 54
Selon vous, quelle place à la relation de soin dans la
prise en charge avec un patient schizophrène ?
Objectif: Recueillir l'avis et l'expérience des soignants
afin d'identifier les différents aspects de la relation de soin avec un
patient schizophrène ainsi que les compétences relationnelles de
l'infirmière
Et par quels moyens la faite vous vivre ?
Qu'est ce qui favorise selon vous la relation de soin avec un
patient schizophrène ?
Que rencontrez-vous comme difficultés dans la relation
de soin avec des patients schizophrènes ?
Face aux difficultés rencontrées, que mettez-vous
en place ou sur quoi vous appuyez-vous ?
Thème 4 : La juste distance dans la relation
Objectif : Recueillir l'avis et l'expérience des
soignants sur la juste distance dans la relation de soin avec un patient
schizophrène
Qu'est-ce que pour vous la « juste distance » ?
Pour vous, en quoi la juste distance peut-elle être
déterminante dans la prise en charge d'un patient schizophrène
?
Les réajustements possibles
Objectif: Créer une ouverture pour permettre aux
infirmiers de s'exprimer sur des points non abordés lors de l'entretien
qui leurs semblent importants et ainsi clôturer l'échange
Selon vous, qu'est ce qui n'a pas était abordé
lors de cette entretien et que vous voudriez partager ?
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 55
Annexe 2. Restranscription de l'entretien 1
- « Alors du coup dans un premier temps, peux-tu me
parler de ton parcours professionnel ? Plus précisément,
l'année d'obtention de ton diplôme, ton ancienneté dans le
service et si tu as fait des formations complémentaires. »
- « Alors moi j'ai commencé en 2013 à
l'IFSI et j'ai fini fin 2016, après j'ai d'abord travaillé dans
un service d'entrant en psychiatrie pendant 1 an, j'ai ensuite fais 10 mois de
nuit dans le même service et maintenant je suis dans un service de
réhabilitation en psychiatrie depuis quelques mois. »
- « Parfait, alors du coup je vais te poser des petites
questions tout d'abord sur la schizophrénie donc ma première
question est : quels mots tu choisirai pour expliquer la schizophrénie?
»
- L'IDE me répond sans hésitation « La
dissociation ! » un léger silence s'installe puis l'IDE enchaine
rapidement : « La dissociation c'est par exemple, euh.. (soupir) la
déconnexion avec la réalité, on voit les choses
différemment, on capte les choses différemment, les patients
euh.. dissociés euh.. vont pas avoir les mêmes centres
d'intérêts, les mêmes analyses que des personnes entre
guillemets « normales » même si ils sont tout à fait
normaux vu que ce sont des êtres humains comme nous mais euh.. la
dissociation mentale par exemple c'est.. » un silence s'installe quelques
secondes, l'IDE regarde face à lui et réfléchie un
instant, il poursuit : « la dissociation mentale c'est une
séparation du Moi, c'est par exemple.. La réalité que
nous, nous allons vivre chaque jour, cette réalité la va
être totalement vécu et vu d'un oeil différent par une
personne dissociées c'est-à-dire que son jugement de la
réalité va être altéré, ses sentiments par
rapport à la réalité vont être
altérés, ses pensées vont l'être aussi donc
ça va faire de lui quelqu'un entre guillemets « bizarre »
qu'on va trouver étrange, qu'on va trouver différent de nous
parce qu'il ne verra pas la même chose, il ne s'attardera pas sur les
mêmes choses, il regardera des choses qui n'existent pas et du coup pour
moi c'est ce qui définit le plus la schizophrénie c'est ce qu'on
appelle nous la dissociation en psychiatrie, c'est ce qui le rend.. le rend
différent de nous, et c'est ce qui parait pour la plupart des gens un
peu étrange, c'est ce qu'on va remarquer chez ses personnes. »
- Je lui sourit et acquiesce d'un signe de tête puis je
lui dis : « ok, très bien.. du coup deuxième question,
j'aimerai savoir maintenant pour toi, en quoi la schizophrénie est-elle
une maladie chronique ? »
- « La schizophrénie c'est une maladie chronique
parce qu'elle ne se guérit pas, c'est-à-dire qu'il faut qu'on
descende un peu de notre piédestal et qu'on se dise que les patients
qu'on reçoit au jour de jour on ne va pas les guérir mais on va
les aider à vivre leur vie, dans le monde et dans la
société actuelle par des moyens, des médiations
extérieures ou intra/extra hospitalière qui vont pouvoir leur
permettre de vivre correctement avec la maladie. » Il me sourit.
- Je lui rends son sourire et poursuit « Donc ensuite
j'aimerai parler avec toi de la qualité de vie des patients
schizophrènes, mais tout d'abord quelles idées tu te fais de la
qualité de vie ? En général ? donc si il y a des termes,
des représentations que tu voudrais me dire par rapport à cette
qualité de vie car c'est un peu compliqué à déf..
» Je ne finis pas ma phrase car l'IDE prend la parole et me répond
spontanément et de façon dynamique:
- « Et bien la qualité de la vie pour moi c'est
arriver à être heureux avec ce qu'on a sans pour autant chercher
plus et arriver à vivre avec notre passé, notre présent et
l'idée qu'on peut se faire de l'avenir, ce qui peut être
compliqué pour quelqu'un de schizophrène parce que des fois il va
avoir des périodes où il va être mal, des périodes
qu'il oubliera, il n'a pas forcément de projection sur l'avenir parce
que toutes ses pensées sont centrées vers le présent et ce
qu'il ressent au jour le jour peut être très mauvais et
très triste pour lui voir très
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Lisieux | Mai 2019 56
terrifiant et voilà.. donc pour moi la qualité
de la vie ça se résume à.. à comment je pourrais
dire (soupir).. à être heureux (nous rions gentiment) »
- « Non mais c'est vrai, tout à fait c'est
important, et au final ma deuxième question c'était en quoi la
schizophrénie impact-elle la qualité de vie du patient ? donc
c'est un peu ce que tu viens d'expliquer.. »
- « Et bien oui, de par la dissociation que j'expliquais
tout à l'heure ils vont pas voir la réalité de la
même manière que nous, du coup bah ces patients la vont être
un peu différent parce que si ils voient des choses qui les
persécute, qui leur fait du mal, et bah leur qualité de vie va
être amoindrie parce qu'ils vont avoir l'impression d'être des
moins que rien, que leur vie n'a pas de sens, que y'a des choses qui
interrompent leur vie et qui leur font du mal. »
- « Ok, donc ensuite, euh, le thème que je
voudrais aborder est sur la relation de soin infirmier » Il
m'écoute et acquiesce, je continue ma phrase: « du coup ma question
c'est tout d'abord selon toi, quelle place à la relation de soin dans la
prise en charge avec un patient schizophrène ? »
- Il me répond directement avec assurance: « oh
bah ça c'est très très important parce que c'est ce qu'on
cherche en premier dans la prise en charge, c'est établir un lien avec
le patient. Euh.. la relation de soignant soignée c'est presque ce qu'il
y a de plus important parce que quand vous prenez en charge une personne
schizophrène qui ne voit pas les mêmes choses que vous, qui
interprète pas les mêmes choses que vous ou qui n'a pas les
même pensées et le même jugement et bah elle va pas
forcément vous faire confiance et il faut gagner ce lien de confiance
pour pouvoir avancer ensemble derrière et quand on est un pied à
terre de la réalité et quand cette personne vous associe avec la
réalité et après même quand elle est dans des phases
de mal-être ou elle voit des choses si elle vous voit et qu'elle vous
associe, vous avec votre tête et votre blouse blanche avec la
réalité et avec quelque chose auquel elle peut se tenir et croire
et se fier et bah ça l'aidera à avancer dans ses périodes
de crise et donc à nous faire confiance. Donc nous on est là pour
les aider avec nos traitements, nos médiations et s'ils nous font
confiance et bah c'est comme ça qu'ils pourront avancer dans leur
maladie et nous on pourra avancer dans la prise en charge et donc ils pourront
avancer dans leur vie. »
- « Très bien et du coup par quels moyens tu la
fait vivre ? (silence) cette relation ? »
- « Et bien, moi j'essaye toujours de créer des
liens avec les patients, j'essaye de leur faire des petites blagues, j'essaye
euh.. de leur demander comment ça va, comment s'est passé les
petites médiations qu'ils font, de savoir ce qu'ils font au jour le jour
euh.. quels moyens thérapeutiques ou personnelles ils mettent en place
pour lutter dans leur période d'angoisse, dans leur période de
stress, où ils vont moins bien et quand j'ai repéré
ça et qu'il se confie à moi, bah après moi j'essaye de
leur rappeler ses petites choses et du coup ça leur rappel les moments
où ils ont réussi à aller mieux et du coup c'est comme
ça qui nous font confiance. » - « hum.. du coup, ensuite je
voulais savoir qu'est ce qui favorise selon toi la relation de soin avec un
patient schizophrène ? »
- Il me regarde et répète ce que je viens de
dire: « qu'est ce qui favorise la relation de soin.. » un silence
s'installe, je sens que la question est un peu flou pour lui, je décide
donc d'expliquer davantage : « Qu'est ce qui va faire que tu peux la
mettre en place en d'autres termes.. »
- « euh.. et bah déjà l'hospitalisation
parce que moi je travaille dans un milieu intra hospitalier donc le faite que
la personne soit la bah moi je vais la prendre en charge donc je vais favoriser
la relation de soin parce que le patient est la et parce qu'elle demande de
l'aide et même si elle ne demande pas d'aide je vais aller vers elle et
je vais me montrer comme aidant envers cette personne et du coup c'est en
ça que je vais favoriser cette relation de soin parce que si le patient
me voit comme aidant comme je disais avant et bah elle me fera confiance et une
fois qu'elle me fait confiance et bah là c'est gagné (nous rions)
là je peux lui montrer un peu comment moi je vois la chose et l'amener
peu à peu à réfléchir sur ses
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 57
comportements, sur ses délires éventuellement,
sur ce qui se passe au jour le jour avec les traitements qui agissent et le
retour à la réalité. »
- « Ok, et du coup qu'est-ce que tu rencontres comme
difficultés dans la relation de soin avec le patient schizophrène
? »
- « La difficulté que je rencontre principalement
avec les patients schizophrènes, c'est avec des patients
schizophrène qui vont être persécutés, c'est
à dire qui vont penser qu'on est là
pour leur faire du mal, ils vont avoir éventuellement
des voix qui vont leur dire qu'on est là pour faire du mal et c'est
difficile pour eux étant donné qu'ils sont dissociés de
faire le.. de distinguer la réalité et.. la.. enfin la
réalité qu'ils voient et la réalité qui est la
nôtre, nous qui ne sommes pas schizophrène, donc voilà.
»
- « Et donc face à ses difficultés la, que
tu as rencontré, qu'est-ce que tu mets en place ? sur quoi tu t'appuies
? »
- « euh par rapport à la persécution, et
bah moi j'essaye toujours de de.. dans la période où les patients
vont mieux de leur montrer qu'on est là pour les aider, de faire des
petites
médiations avec eux c'est à dire de faire un jeu
de société, de sortir dehors avec eux si ils aiment ça,
d'aller fumer une cigarette si ils aiment ça, j'essaye de.. Tous leur
petits bonheurs du quotidien, j'essaye de les vivres avec eux pour qu'ils
m'associent à quelqu'un d'aidant et de leur côté et ainsi
me faire confiance. »
- J'enchaine directement et lui demande « mais du coup le
travail en équipe dans tout ça ? dans la relation, dans les
difficultés rencontrées..? »
- « bah le travail en équipe il est partout, parce
que tout ce qu'on va vivre avec le patient on va le raconter à nos
collègues et nos collègues vont se servir de ce que nous on a
déjà
loué.. euh nié euh lié pardon.. (nous
rions) de tout ce qu'on a déjà lié avec le patient ils
vont
s'en servir, on sait que telle patient n'aime pas qu'on lui
parle de tel sujet parce que ça le rend mal, ça l'angoisse,
ça lui fait peur, ça le rend énervé et ça le
contrarie alors dans ces
cas-là on va pas aller lui parler de ça pour le
moment comme ça on va pas le contrarié et
comme ça on va faire une relation soignant
soigné de qualité et comme ça il va nous faire confiance
et derrière à un moment ou un autre on va le confronter avec ses
choses qu'il n'a
pas envie de parler pour pouvoir le faire avancer lui, et donc
aussi l'équipe pluridisciplinaire
elle joue un rôle important parce que ce qu'on va pas
réussir à faire en tant que soignant peut être que un
médecin psychiatre du fait de son statut va réussir à le
faire passer au
soignant et inversement ce que le médecin ne va pas
réussir à faire parce que peut-être il
sera vu comme le persécuteur et bah nous soignant on
peut travailler dessus, les ergothérapeute par exemple peuvent
travailler sur autres choses grâce à des médiations
telles que la cuisine ou des activités que les patients
aiment, euh lorsque les patients se
confie au médecin psychologue et que le médecin
nous confie ce que les patients leur disent et bah nous on peut travailler
dessus après derrière aussi, enfin toutes les informations
sont
importantes donc le fait qu'il y ai une équipe
pluridisciplinaire qui se transmet toutes les infos et bah ça aide
à ce que tous ensemble on soit dans le sens du patient, qu'on soit
là pour lui et son bien-être. »
- « C'est ça (nous sourions) et du coup
dernière question enfin non il en reste 3 (nous rions), par rapport
à la juste distance, qu'est-ce que pour toi la juste distance ?
»
- « La juste distance pour moi, ce que j'applique avec
mes patients par exemple, un exemple
simple, ça va être.. essayer de nier.. de louer
euh.. de lié un lien pardon (nous rions) bon, d'essayer de nouer un
lien, une fois que ce lien se met en place je leur demande comment
ils veulent qu'on les appelle. Les trois quart des patients
ils préfèrent qu'on les appelle par
leur prénom donc je les appelle par leur prénom
mais je garde le « vous ». C'est à dire que je vais les
appeler chacun par leur prénom tout en gardant le « vous » ce
qui va me
permettre à la fois de rentrer dans leur
intimité en les appelant par leur prénom et en même
temps de garder le vous qui fait qu'on garde ce statut
professionnel et en même temps dans les moments où ça va
pas, ça nous permet de garder une distance et dire ouh attention je
suis pas votre ami, moi je suis un soignant je suis de votre
côté mais je suis pas votre copain, je suis pas là pour
jouer avec vous, je suis pas là pour être d'accord avec tous ce
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 58
que vous dite, je suis là pour vous aider. Je ne suis
pas là pour être votre ami enfaite donc je garde la juste distance
comme ça. Et, la juste distance euh.. c'est aussi par exemple,
être là dans les bons comme dans les mauvais moments avec les
patients c'est à dire à la fois être d'accord avec eux
quand ils font des choses correctes et en même temps quand ils font des
choses incorrects ou quand ils font des choses euh.. qui sont en dehors de la
réalité, des fois les confronter à ça, ce qui va
peut-être nous positionner pendant un temps en tant que
persécuteur mais ce qui va permettre au patient d'avancer donc je suis
dans le juste distance dans le sens où je suis du côté du
patient, des fois j'accepte certains éléments délirants
sans pour autant les confirmer, c'est à dire que je dis jamais oui au
patient c'est vrai ce que vous dites, j'acquiesce, je dis d'accord mais je dis
pas, je rentre pas dans son délire, j'accepte pas ce qu'il dit mais en
même temps je vais pas le confronter toute suite à la
réalité tant que j'ai pas un lien. »
- « D'accord et pour toi, en quoi la ju..djuste olala
(nous rions) la juste distance peut-elle être déterminante dans la
prise en charge d'un patient schizophrène ? Côté positif
comme côté négatif »
- « et bah la juste distance thérapeutique elle
est forcément déterminante parce que.. (prend une grande
respiration) il faut que le patient se lie à nous, il faut qu'il arrive
à se confier, il faut qu'on arrive à lui faire croire en nos
thérapeutiques et en ce qu'on pense et en la façon de le faire
guérir et en même temps il faut aussi qu'on le confronte à
la réalité comme je disais, qu'on lui dise ce qu'il ne va pas,
qu'on lui explique comment, comment.. comment il peut trouver des moyens de
contrer ses phases d'angoisses et ses phases de délire donc il faut
qu'on soit à la fois soignant, aidant de leur côté et en
même temps qu'on les confronte aussi un petit peu avec la
réalité avec parfois leur trouble de personnalité, leur
trouble du comportement, et euh leurs délires donc il faut qu'on joue
à la fois un rôle d'aidant proche enfin proche.. avec qui quand
ils sont hospitalisés, qu'ils sont avec nous tous les jours donc qu'ils
nous voient donc ils nous aiment beaucoup et en même temps des fois quand
eux rentre dans notre intimité il faut aussi qu'on leur rappel qu'on est
pas intime quoi par exemple euh.. moi les patients ils m'appellent par mon
prénom mais quand il me demande mon nom de famille, je ne leurs dis
jamais parce qu'ils doivent pas me voir en tant qu'ami, ils doivent me voir en
tant que professionnel qui est là pour les aider, qui peut être
sympa, qui peut rire, qui peut les accompagner à droite à gauche
mais qui en même temps quand ils délirent peut aussi les
contentioner par exemple et leur faire une injection si c'est ce qu'on doit
faire. Donc voilà donc à la fois être quelqu'un qui quand
ils vont bien est toujours là et qui aussi quand ils vont mal est
toujours là mais quand ils vont trop loin est capable aussi de les
« sanctionner » entre guillemets c'est à dire pas les
sanctionner mais leur faire une injection et leur dire écoutez là
il va falloir qu'on vous fasse une injection, il va falloir se reposer un petit
peu parce que vous dormez pas, parce que ça fait 5 jours que vous dormez
pas, que votre vision de la réalité elle est plus bonne et que du
coup, du coup voilà.. va falloir que je leur fasse ça et
même si ils sont pas contents, même si ils veulent pas et bah
là à ce moment-là je deviens quelqu'un qu'ils aiment pas
trop sur l'instant T, qui peuvent insulter, qui peuvent essayer de frapper..
(il inspire fortement) et pourtant c'est pas pour ça que 5 jours
après ou même voir le lendemain, après que je les ai
repris, après leur avoir dit que ce qu'ils faisaient c'était pas
bien, c'était pas normal et bah ils ne m'aiment pas sur le moment et
pourtant toujours les jours d'après ils viennent nous voir ils
s'excusent ou ils reparlent avec nous de ce qu'il s'est passé, ce qui
nous montre que nous on était dans le bon parce que bah parce que
même si sur l'instant T on a l'impression qu'ils nous détestent,
quelques jours après ils sont d'accord avec nous, une fois que le
conflit est passé, une fois que les thérapeutique ont
commencé à
fonctionner voilà..
- « Oui ils ont compris que c'était
bénéfique pour eux au final ? »
- « Oui voilà ! Au final, on va leur faire
comprendre le bénéfice de nos actes tout en... (il prend une
grande inspiration) tout en faisant certains actes qui vont les aider et
certains
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 59
actes qui vont les aider par la contrainte et certains actes
qui vont les aider euh.. par le plaisir »
- « oui, d'accord donc j'ai une dernière petite
question, qu'est ce qui selon toi n'a pas était abordé la pendant
cette entretien et que tu voudrais partager ? »
- « euuuuuuuuuuuuuh.. »
- « Ce n'est pas une obligation» lui dis-je en lui
souriant.
- Il me sourit et me dit « Il faut toujours se rappeler
qu'il y a une très mauvaise vision de la schizophrénie, en
l'occurrence les gens pensent toujours que la schizophrénie c'est un
trouble dissociatif de l'identité et le trouble dissociatif de
l'identité c'est.. c'est Gollum dans le seigneur des anneaux (rires)
c'est la personne qui a deux personnalité en elle et change de
personnalité d'un instant T à un autre alors que la
schizophrénie c'est pas ça » dit-il d'un ton sérieux.
« Les troubles dissociatifs de l'identité c'est peu de patient
vraiment très peu, les schizophrènes ils se font du mal à
eux en général et pas du mal aux autres, les schizophrènes
ils le vivent pas bien du tout d'avoir des voix dans leur tête qui les
insultent à longueur de journée et ils sont très contents
d'avoir des gens qui s'occupent d'eux qui les reconnaissent en tant que
personne et non en tant que schizophrène et en tant que malade. C'est
des personnes handicapés, c'est des personnes comme tout le monde qui
ont besoins de rampes d'accès comme une personne en fauteuil roulant
aurait besoin d'une rampe d'accès pour accéder à une porte
et bah ces personnes-là ont besoin d'une rampe pour accéder
à des activités qu'ils aiment, à du travail qu'ils aiment
et puis des fois ils vont avoir des périodes plus durs donc il y a
besoin de s'adapter à ces personnes-là et arrêter ce
regard, ce regard.. hautain et mauvais porté par les médias et
beaucoup de choses que sont les schizophrènes tueurs, il faut savoir
que.. je sais pas combien de pourcentage mais une gros pourcentage des
schizophrènes se font du mal à eux et ils font pas du mal aux
autres.
- « On est d'accord » nous sourions. « Et je
voudrais rajouter une toute petite question parce que c'est vrai que j'ai envie
d'en parler mais tu vois, par rapport à la relation avec l'autre, le
patient par rapport aux relations sociales, qu'est-ce que tu pourrais me dire ?
»
- « Et bah de par la dissociation, les patients
schizophrènes vont avoir du mal à lier.. à louer..
à nier... oh bah j'aurais eu du mal avec celui-là (nous rions)
donc à nouer des liens sociaux parce que ayant une réalité
parfois altérée et différente, un jugement
différent et des pensées différentes des autres personnes,
ils vont et bah ils vont avoir un comportement que je dirais « bizarre
», avec des bizarreries de comportements et ces bizarreries la bah elles
vont amener les autres personnes sans cette pathologie à avoir une
crainte de ces personnes et enfaite il faut juste réussir à
comprendre que il voit juste le monde d'une façon différente et
leur réalité n'est pas la nôtre et c'est pas pour ça
qu'il peuvent pas être heureux, et qu'ils peuvent pas non plus
réaliser des choses très bien, mieux que d'autres.. c'est pas
parce qu'une personne schizophrène va avoir beaucoup de mal à
créer des liens qu'elle va en être incapable et elle va être
même capable des fois d'aimer des personnes plus que nous on va
être capable et d'avoir plus d'empathie que nous envers d'autres patients
parce qu'ils ressentent les mêmes chose qu'eux. » Il me sourit.
- Je lui rend son sourire tout en lui disant : « Ok
parfait.. merci bien! »
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 60
Annexe 3. Restranscription de l'entretien 2
« Hop, alors du coup ma première question donc
c'est une question un peu pour te découvrir, est-ce que tu peux me
parler de ton parcours professionnel donc l'année d'obtention de ton
diplôme, l'ancienneté dans le service, et si tu as fait des
formations complémentaires »
- « Alors.. Moi j'ai commencé à travailler
en psychiatrie j'avais une vingtaine d'année, j'en ai 52 aujourd'hui,
j'ai commencé en tant qu'aide-soignante voilà en service
d'hospitalisation. J'ai eu la chance de faire l'école
d'infirmière qui m'a permis de travailler aujourd'hui et j'ai eu une
grande expérience dans un centre d'accueil de crise sur Paris, ensuite
en 2008 je suis arrivée dans la région à côté
de Caen, à Lisieux aux urgences psy. Après j'ai travaillé
dans une centre d'hébergement thérapeutique pour les ados et en
2017, en unité de moyen/long séjour sur l'hôpital et depuis
peu je suis dans une équipe mobile du même pôle,
voilà donc depuis 1988 je beigne dans la psychiatrie. » (Nous
rions)
- « Parfait.. »
- « Et ! J'oublie de dire que ma formation essentielle
c'est toute ma période où j'ai travaillé au centre
d'accueil où j'ai commencé très jeune, où j'ai
grandi avec mes pères et mes mères de la psychiatrie, la zone
comment dire de la psychothérapie institutionnelle et en même
temps ce qui m'a beaucoup beaucoup forgé c'est que j'ai eu l'occasion de
travailler sur le domaine de la précarité avec des gens à
la rue sur Paris. Et ça une fois qu'on à travailler avec eux,
enfin avec eux en tout cas autour des gens qui s'occupe d'eux et autour d'eux,
après on peut travailler n'importe où »
- « Ok, c'est très intéressant ! »
- « Oui c'est important ! »
- « Donc ensuite, nous allons parler un peu de la
schizophrénie, donc ma question c'est quels mots tu pourrais choisir
pour expliquer la schizophrénie ? Sans la définir mais
voilà si je te dis schizophrénie, est ce qu'il y a un mot ou des
mots en particulier qui te viennent à l'esprit ? »
- « Bah alors schizophrénie, je dirais
dissociation, souffrance, difficultés voilà.. Grande souffrance
et grandes difficultés »
- « Ok parfait et euh du coup en quoi la
schizophrénie pour toi, c'est une maladie chronique ? »
- « euh... chronique dans le sens où la maladie
est longue et que malheureusement je ne pense pas qu'elle puisse se
guérir au sens propre du mot guérir, elle peut se stabiliser
à un moment donné dans la vie, revenir, repartir, revenir,
repartir. Tout dépend du suivi, tout dépend des rencontres
thérapeutique que la personne euh.. Rencontre. »
- J'acquiesce puis je continue: « ok, donc ensuite je
parlerai de la qualité de vie d'un patient schizophrène donc ma
première question c'est quelles idées tu te fais de la
qualité de vie ? Mais en général ? » Je sens qu'elle
hésite, je rajoute donc : « Je sais que c'est vaste, mais tu peux
me dire des termes, des mots, des représentations »
- « Qualité de vie chez eux ou partout ? »
- « Oui, pour toi ! Qu'est que la qualité de vie pour
toi ? »
- « Bah si je fais par rapport aux patients
schizophrènes déjà, le premier truc qui me vient à
l'esprit c'est qu'ils puissent vivre avec ses symptômes, qu'il soit
délirant ou pas délirant, qu'il puisse avoir une vie euh.. une
vie.. alors voilà harmonieuse même si pour moi des fois ça
peut ne pas l'être.. Je sais pas si tu comprends ? c'est à dire
des fois voilà.. tu peux voir des choses qui te stupéfait mais
enfaite il faut savoir que dans la dysharmonie, dans ton regard dysharmonique,
la personne peut être en harmonie quand même. Alors
évidemment ce sera pas tes codes, la personne qui va pas se laver, elle
va pas se laver tous les jours un exemple hein.. Y'en a plein d'autre mais elle
va pas se laver tous les jours bah voilà toi tu te laves tous les jours
par exemple et bah c'est pas parce que lui non qu'il est forcément mal
quoi, c'est parce que c'est une partie de son équilibre psychique.
»
- « Oui je vois, peut être que pour lui tout va bien
»
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 61
- « Oui voilà et qu'il faut pas toucher à
ça. Chez le schizophrène par exemple, puisqu'ils ont besoin
d'avoir cette « saleté » entre guillemet pour se
protéger voilà. Et puis bah il faut pouvoir vivre avec les
symptômes et pouvoir garder les liens avec la famille et les amis, garder
les liens parce que ça c'est compliqué chez les patients
schizophrène »
- « Et toi, du coup ta qualité de vie à toi
? »
- « Bah pouvoir vivre avec moi, avec mes
difficultés avec moi-même, voilà pareil que le
schizophrène sauf que je le suis pas ! Pas encore ! (Nous rions)
»
- « Du coup ma prochaine question c'est donc selon toi en
quoi la schizophrénie impact-elle sur la qualité de vie du
patient ? En quoi la maladie, ses symptômes vont impacter dessus ?
»
- « Bah à partir de moment où la maladie
commence à handicaper son quotidien quoi, quand la personne ne peut plus
rien faire, ne peut plus être avec l'autre euh.. ne peut plus être
avec lui-même déjà ou elle-même et euh.. l'isolement,
la rupture de lien, c'est ça qui est horrible pour certains
schizophrène pas tous mais pour la plupart quand même c'est
l'isolement et la rupture de lien. »
- J'acquiesce puis je continue : « Alors, la suite, par
rapport à la relation de soin infirmier, donc là j'ai plusieurs
questions et la premier c'est selon toi quelle place à la relation de
soin dans la prise en charge avec un patient schizophrène ? »
- « Alors moi où est ce que je la met bah
ça dépend des situations, euh.. avec le schizophrène de
par mon expérience je me sers du tiers, des fois je fais pas avec la
personne elle-même, parce que c'est trop compliqué donc du coup je
me sers de chose aux alentours comme par exemple ce matin tous les mois
j'accompagne une dame schizophrène faire ses courses et j'accepte
d'aller à l'endroit où elle m'emmène, elle est très
persécuté et j'accepte de faire des kilomètres alors
qu'elle a des magasins près de chez elle. Le tiers c'est d'accepter que
c'est stupide d'aller aussi loin faire des courses mais je respecte son univers
parce que c'est comme ça. Donc moi mes accompagnements je les fais pas
forcément, avec elle surtout, avec des entretiens cliniques parce que je
pense que c'est pas nécessaire par contre je me sers de ce qui est du
tiers comme d'aller faire les courses avec elle ça, ça fait lien.
C'est ça qui me permet d'être en lien avec elle, c'est pas
forcément la discussion c'est ça que je veux dire, j'ai une autre
patiente je vais laver son linge au lavomatique avec elle et pourtant elle peut
le faire seul mais vu que le lien est difficile et bah je fais avec autre
chose. Faire du tiers enfin prendre du tiers ça peut être
n'importe quoi. Alors je ne sais pas si tu comprends le tiers ? Enfin c'est
puisque je ne peux pas avoir un lien direct, que ce n'est pas possible je mets
un lien indirect pour aller vers elle »
- « -Et c'est comme ça que tu crées le
lien, la relation de soin ? »
- « Oui ou même d'être à
côté ça peut être aidant et sans jugement surtout
mais la relation de soins en psychiatrie c'est essentielle, je la place quand
même au centre et c'est être là, être dans l'empathie,
c'est pas la même que quand tu es en diabétologie, pour expliquer
à quelqu'un qui va avoir des insulines.. c'est un exemple palpable hein
ou même en orthopédie la personne qui se casse la hanche toi en
tant qu'infirmière tu vas avoir une relation d'aide mais ça va
pas être la même enfin tu vas éduquer, enfin tu vas
être dans l'empathie par rapport à la douleur tu vas te soucier de
lui mais c'est une relation plus courte, c'est une relation de soin mais dans
le sens plus technique c'est une relation qui découle du soin technique
je sais pas si tu vois.. »
- « Si je comprends et du coup par quel moyen tu la fait
vivre cette relation ? Comme tu m'expliquais un peu déjà..
»
- « Bah oui ça dépend ça peut
être aller chez la personne ça peut être.. enfin je parle
par rapport à l'équipe mobile mais en moyen long séjour je
vais mettre en place des choses pour que ce soit plus vivant pour eux, je vais
essayer de ramener un peu de punch (elle claque des doigts), mettre en place
des activités qui les stimule voilà je pense que c'est comme
ça que je l'a fait vivre »
- « Donc j'avais mis, qu'est-ce qui favorise selon toi la
relation de soin avec un patient ? »
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 62
- « Et bah l'empathie, d'être convaincu en ce que
tu fais sans porter de médaille tu vois parce que des fois moi je suis
convaincu que si je vais faire ça bah j'aime pas trop le mot convaincu..
tout en gardant.. faut être humble, dans l'humilité et aussi par
exemple si tu rentres chez un patient et que tu cries « oh bah c'est sale
chez vous la » tu vas pas favoriser la relation, il faut s'adapter au
patient, à sa façon d'être, son univers. »
- « Oui il faut de la tolérance ? »
- « De la tolérance oui voilà et de
l'humilité moi je m'en fou si c'est sale chez lui je rentre dans son
univers à lui donc favoriser c'est respecter aussi, c'est le fait que je
l'aide et que ça lui apporte quand je repars, il faut qu'il est envie de
me revoir.. alors toutes les infirmières de pense pas comme moi..
»
- « Mais c'est le but des entretiens ça me permet
de voir différent point de vue et chacun est différent »
- « Oui parce que d'autre vont favoriser ça et
après elle pourra être en lien enfin voilà. Et la
subjectivité et ce que tu es, être authentique et soi-même
favorise la relation. »
- « D'accord donc ensuite.. oui, qu'est-ce que tu
rencontres comme difficulté dans la relation de soin avec les
schizophrénie ?
- « Alors avec certains patient qui peuvent être
tellement mal.. le faite qu'il soit pas accessible. Des gens qui sont
très en crise, qui sont très très très
délirant c'est pas facile quoi d'établir une relation. Ca nous
arrive après on sait faire ce qu'on a appris mais quand même euh..
aussi moi si je vais chez quelqu'un que je ne connais pas ça m'est
arrivé ici et de sentir que la personne était complètement
parasité et que je ne le connaissais pas et du fait que je ne le
connaissais pas bah j'étais pas à l'aise voilà donc le
fait de ne pas connaître la personne et d'avoir un patient très
délirant ça peut être une difficulté et c'est pour
ça l'humilité elle est là aussi c'est pas parce que j'ai
bossé 30 ans que je sais tout faire. Voila moi quand je rencontre
quelqu'un y'a un temps d'adaptation, voilà je peux être
gêné par la non accessibilité de la personne, pour un
premier contact en tout cas après quand tu connais bien la personne et
qu'elle est fermé c'est différent. »
- « Et du coup face à ses difficultés que
tu me parle là qu'est-ce que toi tu vas mettre en place, sur quoi tu vas
d'appuyer? »
- « Bah déjà j'en parle à mes
collègues, je transmet à mes collègues. J'ai toujours
bossé en individuel mais grâce au collectif. Tu vois je fais toute
seule j'ai ma pensée j'ai mes idées mais par exemple quand je
rencontre des difficultés avec un patient je me réfère
à l'équipe. Après, par exemple quand j'ai rencontré
mon patient là à 12h je savais pas ce que j'allais lui dire parce
que je savais pas comment il était, je l'avais jamais vu et j'ai pas
besoin d'appeler mes collègues pour leur dire bah tiens qu'est ce qui
faut que je lui dise mais je me sers du collectif dans le sens où
après je retransmets mes informations, mon ressenti, mon vécu et
on discute avec l'équipe pour faire le point. Donc tu vois après
avoir vu un patient, je ramène l'information à l'équipe
pluridisciplinaire, je ramène au collectif pour partager et pour avancer
et faire une bonne prise en charge »
- « Et ce travail en équipe il va jouer quel
rôle dans la prise en charge du patient schizophrène surtout ?
- « Bah déjà il va me permettre de
continuer, d'avancer avec le patient et le fait de transmettre les informations
entre nous, ça va permettre une prise en charge adaptée. Notre
travail relationnel en grande partie c'est pas vraiment concret au final il
n'est pas palpable donc la transmission ça le rend palpable. Le fait de
faire des transmissions écrites, de raconter à mes
collègues c'est une façon de réfléchir ensemble
à la prise en charge, que ce soit concret. Quand on fait des
activités avec les patients, qu'on discute et qu'on parle de leur
difficulté bah après j'espère que ce qu'on met en place en
équipe bah ça permet d'établir la confiance, de
créer un lien et de la confiance avec le patient. Et aussi si je vois
que j'ai des difficultés avec le patient, que je sens que je ne peux pas
suivre cette personne et ça peut arriver de dire à sa
collègue « oulala j'aimerai bien que tu prennes en charge ce
patient parce qu'avec moi ça le fait pas du tout, je le sens pas, je
vais pas être thérapeutique » tu vois ? et du coup moi je
passe la main facilement quand j'estime que c'est nécessaire, je
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 63
m'acharne pas. Je vais voir mon collègue par exemple et
je vais lui dire tiens Monsieur R là je préférerais que tu
aille le voir en tant que mec parce que pour ce problème là je me
sentais pas à l'aise en tant que fille et je sentais que je n'allais pas
être aidante pour lui tu vois? Voilà.. Et puis il faut retenir en
psychiatrie, que c'est important de pouvoir dire à l'autre bah
écoute je sais pas, des fois tu sais pas mais c'est bien de le dire
parce que le but c'est pas de mal faire les choses, c'est pas faire les choses
pour se prouver qu'on sait tout. C'est bien de le dire quand on est dans
l'impasse, qu'on sait pas, c'est pas une tare. Aujourd'hui on veut tout savoir
et des fois quand je dis que je ne sais pas, ça choque alors que c'est
normal et important et je pense au patient avant tout. Des fois c'est
perçu comme de la nonchalance alors que non, et puis des fois je vais
dire je sais pas et ma collègue après va me dire qu'elle non plus
donc il faut savoir le dire dans une équipe pour pouvoir avancer dans la
prise en charge avec les patients, pour leur bien quoi. Et puis au final, on se
serre les coudes dans une équipe, même quand ça va pas bah
ça a un côté rassurant d'être plusieurs.
- « Oui ça c'est vrai ! »
- « Et je voulais rajouter aussi que par rapport au
patient schizophrène l'équipe peut être
bénéfique ou non pour lui suivant les situations, des fois c'est
mieux que ce soit restreint c'est mieux qu'il y est qu'une seule personne et
des fois bah c'est mieux d'être plusieurs pour qu'il y ait du relais, des
fois parce que c'est lourd, ça dépend, soit parce que la
communication est difficile c'est dur et par exemple avec monsieur T un patient
schizophrène dont je m'occupe, il vaut mieux être une seule
personne, pareil avec une autre patient il vaut mieux être toute seule
mais avec Madame V par exemple bah elle s'est bien qu'on soit plusieurs.
Voilà y'a rien de défini mais des fois y'a des situations
où c'est bien que ça se dilue pour la personne et la distance
elle est là aussi c'est une façon de mettre une distance ou au
contraire il vaut mieux être proche comme Monsieur T, en ce moment je
suis proche de lui parce que c'est nécessaire tu vois ? »
J'acquiesce puis elle continue : « mais à un moment donner hop
quand je vais sentir que ça voilà bah je vais me retirer (elle
recule sur sa chaise et s'éloigne de la table pour m'illustrer la
distance) »
- « Et bien justement par rapport à cette juste
distance, qu'est-ce que c'est pour toi la juste distance ? »
- « Bah c'est au fur et à mesure de ton
expérience et de la chronolo.. enfin comment je pourrais dire.. du
timing. C'est à dire qu'il faut du temps quand même pour rentrer
en relation, c'est une fois que tu es entrée en relation avec le
patient, où tu sens qu'il y a quelque chose qui s'est créé
avec le patient bah c'est toi qui va sentir et savoir si il faut que tu sois
proche ou loin. A un moment donné il faut savoir se retirer et prendre
du recul. Tu sais bien que le schizophrène il est dans sa bulle, y'a des
patients qui veulent bien qu'on les touche et d'autres qui veulent pas, donc
y'a 15 000 façon de faire. Après la distance voilà il faut
savoir être la et il faut savoir ne pas être là aussi,
déjà pour pas que le patient soit persécuté par
exemple. Et puis des fois chez certains schizophrènes y'a cette notion
de clivage, et si tu connais pas ça bah des fois tu vas être le
mauvais objet mais faut.. comment dire.. c'est pas grave quoi, il faut pas te
dire « oh bah moi ce patient là il m'aime plus il veut plus,
pourquoi avec toi il veut bien et pas moi » c'est nécessaire, une
fois si tu es le mauvais objet enfin par rapport à mon expérience
il faut faire avec ça, si la personne ne veut plus me voir pour x
raisons je ne vais pas être blesser, je vais essayer de le comprendre
mais pas d'aller lui demander pourquoi mon collègue et pas moi. Je
respecte son choix. Donc c'est ça aussi la distance quand tu sens que
y'a un clivage faut pas aller au charbon quoi ! »
- « Oui d'accord je vois et donc en quoi la juste
distance peut-elle être déterminante dans la prise en charge du
patient schizophrène ? Là c'est plutôt ce qui va être
bénéfique et au contraire ce qui ne le sera pas dans cette juste
distance, point positif et point négatif de la juste distance dans la
prise en charge.. »
- « Qu'est ce qui est déterminant.. bah.. par
exemple quand on est très inquiet pour un patient, quand y'a une notion
de passage à l'acte bah on a envie d'être proche quoi
après..
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 64
après euh.. enfin c'est ce que je disais tout à
l'heure plus tu vas savoir quand il faut être distant avec le patient bah
plus ça va être bénéfique pour lui. Si tu arrives et
que tu es proche alors qu'il faut que tu sois distante bah ça va
être enfermant pour le patient, tu seras pas en train de l'aider. Imagine
toi tu es dans ta bulle t'a envie d'être toute seule, tu bouquines par
exemple tu as besoin de ça et moi j'arrive je parle avec toi, je te pose
des questions enfin je veux dire, ça va te déranger, faut faire
attention à pas être intrusif ! voilà donc le but c'est que
le patient se sente bien quelque soit cette distance qu'on a pu mettre avec la
personne, alors des fois on sait pas des fois on se trompe, des fois je me suis
approché alors qu'il fallait que je recule ou des fois je me suis
reculé alors que c'était pas nécessaire enfin tu vois
c'est une chose compliqué, l'être humain est compliqué y'a
pas vraiment de recette on s'adapte ! »
- « Oui ! Mais c'est pour ça qu'on aime la
psychiatrie » dis-je en rigolant
- « Mais oui c'est ça ! « (nous rions) «
Et pour finir malgré cette distance qui est parfois
nécessaire, il faut que le patient se sente bien et
qu'il se sente bien quand on est proche aussi. Il faut respecter l'univers du
schizophrène enfin j'aime pas dire ça mais oui respecter son
univers à lui, ne pas être trop intrusif parce que être
intrusif c'est casser sa bulle, c'est rentrer dans son monde. Et au contraire
ne pas être trop distant non plus des fois non plus parce qu'il va avoir
besoin de nous. Et puis tu vois y'a des patients pour lesquelles faut pas trop
être proche parce qu'on rentre dans leur bulle et eux ils nous
incorporent à leur délire donc faut savoir se protéger
aussi en tant que soignant tu vois ? Moi ça m'est arrivé de me
dire oula il m'incorpore à son délire la donc j'ai pris les
distances nécessaires, à un moment donné je lui ai
même dis je suis pas une amie et on sentait qu'il voulait m'accaparer
pour lui tout seul. Je lui ai dit que j'étais là pour lui, que
j'étais soignante et j'ai mis une réelle distance »
- « Et ça a marché ? »
- « Ouais ouais ça a marché, donc c'est
soit toi qui décide à quel moment il faut être distant
parce que ça va pas être bon si tu rentres dans le délire
du patient et qu'il t'accapare, si tu fais partie de sa continuité c'est
pas bon du tout »
- « Oui ça va pas l'aider ! »
- « Non du tout ! »
- « Ca marche je vois, et du coup j'ai une
dernière petite question, c'est qu'est ce qui n'a pas été
abordé la pendant notre discussion et que toi tu aimerais partager ?
»
- « Par rapport à la schizophrénie bah je
pense pas que tu vas pas en parler dans ton mémoire mais la psychiatrie
se casse la figure quand même et je trouve que le schizophrène est
moins bien pris en charge qu'avant quoi. On donne peu de moyen. Après
voilà ça m'empêche pas de croire en ce que je fais
»
- « Bah c'est important ça ! »
- « Bah oui mais sinon autrement voilà »
- « Et bah merci beaucoup c'était très
intéressant, je pense qu'on a répondu à tout. Je te
remercie ! »
Annexe 4. Tableau d'analyse
Thèmes
Sous thème éventuels
|
Entretien 1
|
Entretien 2
|
Eléments du cadre conceptuel
|
Thème 1 : La schizophrénie
|
L'IDE 1 caractérise la
|
L'IDE 2 caractérise la
|
Par rapport à mes recherches, la
|
|
schizophrénie par la
|
schizophrénie par une
|
schizophrénie est définie par une
|
|
dissociation. Il explique que la
|
«grande souffrance » et « de
|
dissociation de la pensée et de la
|
|
dissociation « c'est la
|
grandes difficultés ». Elle utilise
|
personnalité.
|
|
déconnexion avec la réalité, on
|
également le terme
|
Elle s'illustre avec l'idée d'un
|
|
voit les choses différemment, on
capte les choses
différemment ». Il ajoute que c'est « une
séparation du Moi » et nous dit que « la réalité
que nous, nous allons vivre chaque
jour, cette réalité la va
être totalement vécu et vu d'un oeil
différent par une personne dissociées
c'est-à-dire que son
|
« dissociation » pour la définir.
|
clivage du Moi.
Il est dit également que la
schizophrénie est une source d'anxiété
et de souffrance terrible car la réalité sera vécue d'une
autre façon.
|
|
jugement de la réalité, ses
|
|
D'après David H.Barlow et V.
|
|
sentiments par rapport à la
|
|
Mark Durand, la schizophrénie
|
|
réalité vont être altérés,
ses
|
|
« peut affecter la perception, la
|
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 65
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 66
|
|
|
pensées et sa perception vont
l'être aussi.» A ne pas
confondre avec les troubles
dissociatifs de l'identité qui
concerne peu d'individu. Il
souligne également que la schizophrénie est une
maladie difficile à vivre
|
|
pensée, le discours et les gestes,
en fait, chaque aspect du fonctionnement quotidien.
|
Sous thème :
chronique
|
Une
|
maladie
|
L'IDE 1 explique ensuite que la schizophrénie est une
maladie
chronique car « elle ne se
guérit pas » mais que nous pouvons « les
aider à vivre leur vie, dans le monde et dans la
société actuelle par des
moyens, des médiations
extérieures ou intra/extra hospitalière qui
vont pouvoir leur permettre de vivre correctement avec la maladie »
Il nous décrit également que «
|
L'IDE 2 explique que la maladie est chronique « dans le
sens où la maladie est longue et que malheureusement elle ne puisse se
guérir au sens propre du mot guérir, elle peut se stabiliser
à un moment donné dans la vie, revenir, repartir, revenir,
repartir.
Tout dépend du suivi, tout
dépend des rencontres thérapeutiques
»
L'IDE 2 parle également d'une
maladie qui « handicap le
|
Selon mes recherches, la
schizophrénie est une maladie chronique car elle ne
peut pas
être soignée. L'OMS définit
les maladies dites chroniques comme étant des « affections de
longue
durée qui en règle
générale évolue lentement ».
L'entourage ainsi que les
soignants jouent un rôle important dans l'acceptation de
la maladie et dans la façon dont le malade se perçoit. La prise
en charge a
|
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 67
|
ce sont des personnes
handicapés, ce sont des
personnes comme tout le
monde qui ont besoins de
rampes d'accès comme une
personne en fauteuil roulant
aurait besoin d'une rampe
d'accès pour accéder à une porte et
bah ces personnes-là ont besoin d'une rampe pour accéder à
des activités qu'ils
aiment, à du travail qu'ils aiment »
|
quotidien »
|
donc pour but de pouvoir aider le patient à vivre avec sa
maladie,
avec plus de facilité et en participant à une
vie sociale.
La loi du 11 février 2005 relative à
l'égalité des droits et des
chances, la participation et la
citoyenneté des personnes
handicapée, une loi qui intègre les
conséquences des maladies chroniques dans la définition du
handicap. La schizophrénie est
donc un handicap pour la personne.
|
Thème 2 : La qualité de vie d'un patient
schizophrène
|
Par rapport à la qualité de vie,
l'IDE 1 explique que pour lui « être heureux avec
ce que l'on a sans pour autant chercher
plus ». Il ajoute que c'est « arriver à vivre
avec notre passé,
notre présent et l'idée qu'on peut se faire de
l'avenir »
|
Pour l'IDE 2, une vie de qualité c'est vivre avec
soi-même, avec ses difficultés.
Selon l'IDE 2, pour que le patient puisse avoir une
qualité
de vie satisfaisante « il faut
pouvoir vivre avec les symptômes et pouvoir garder
est un concept difficile à
définirc'est
|
Dans la théorie, la qualité de vie
car c'est un concept vague et individuel dans le sens
où chaque personne est unique. Elle relève d'une
évaluation personnelle par rapport à ce qui est essentielle pour
la personne ainsi qu'à sa
|
En se basant sur cette perception, par rapport à la
qualité de vie du patient
schizophrène, l'IDE nous explique qu'il peut
être compliqué pour un schizophrène de vivre avec ces
notions « parce que des fois il va avoir des périodes où il
va être mal, des périodes qu'il oubliera, il n'a pas
forcément de projection sur l'avenir parce que toutes ses pensées
sont centrées vers le présent et ce qu'il ressent au jour le jour
peut être très mauvais et très triste pour lui voir
très terrifiant »
Il explique également que la dissociation impacte sur
la vie du patient car « ils ne vont pas voir la réalité de
la même manière que nous ». Leur
les liens avec la famille et les amis (...) c'est
compliqué chez les patients schizophrènes ». Mais aussi
« qu'il puisse avoir une vie harmonieuse même si elle peut ne pas
l'être » par cette phrase l'IDE 2 veut
expliquer qu'une vie harmonieuse est subjective. Ce qui
sera harmonieux pour certains patients sera peut-être dysharmonieux pour
nous soignant car nous avons un regard différent. Mais ceci « est
une partie de son équilibre psychique ».
Elle explique que lorsque les symptômes de la maladie
commence à handicaper le quotidien du patient la qualité de vie
est perturbé, « quand la personne ne peut plus rien faire, ne peut
plus être avec l'autre,
manière de vivre.
Selon C. Tobin, les délires « sont des constructions
mentales
fausses, de fausses
interprétations à partir d'observations
vraies. » Et les hallucinations elles, « sont des perceptions
vraiment ressenties, mais sans support réel, qui n'existent que dans la
tête de celui qui les vit. »
D'après les recherches, des doutes sur leur
appartenance peuvent s'installer et créer un climat angoissant pour la
personne au quotidien. De plus, la schizophrénie entraine une
modification des capacités sociales naturelles.
Les symptômes affectent le comportement du patient
sur
|
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 68
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 69
|
qualité de vie vont être perturbé parce
qu'« ils voient des choses qui les persécute, qui leur font
du mal (...) ils vont avoir l'impression que leur vie n'a
pas de sens, qu'il y a des choses qui interrompent leur vie et qui leur font du
mal. »
|
ne peut plus être avec lui-même déjà
»
Elle ajoute que « l'isolement, la rupture de lien, c'est
ça qui est
horrible pour certains schizophrène »
|
chaque moment de sa vie ce qui
entraine à un repli sur soi qui s'accompagne d'une
souffrance permanente affectant sa qualité de vie.
|
Thème 3 : La relation de soin
|
Pour l'IDE 1, la relation de soin
|
Pour l'IDE 2, la relation de soin
|
Dans le cadre conceptuel, la
|
infirmier avec un patient
|
est très importante. Il nous dit
|
a plusieurs significations. Par
|
relation de soin est essentielle en
|
schizophrène
|
que « c'est ce qu'on cherche en
|
exemple la relation de soins
|
psychiatrie et elle est au centre
|
|
premier dans la prise en charge,
c'est établir un lien avec le
|
peut être « dans le sens plus technique, c'est une
relation qui
|
du traitement.
|
|
patient. » Gagner ce lien de
|
découle du soin technique » une
|
Il existe deux origines dans la
|
|
confiance est une chose
|
relation plus courte et différente
|
relation de soins, l'une peut être
|
|
importante pour pouvoir avancer
|
de la relation de soins en
|
d'origine fonctionnelle « qui naît
|
|
dans la prise en charge.
|
psychiatrie.
|
d'un soins à faire » mais elle peut
être aussi selon W. Hesbeen
|
|
Il ajoute également que « quand
|
Elle nous dit également que « la
|
«une relation d'attention à la
|
|
on est un pied à terre de la réalité et
quand cette personne
|
relation de soins en psychiatrie
c'est essentielle je la place
|
personne, une relation singulière, sensible et subtile et
qui se veut
|
|
vous associe avec la réalité et
|
quand même au centre ». Mais
|
de nature aidante » La
|
|
que même quand elle est dans
|
elle explique que la relation de
|
construction de la relation de soin
|
|
des phases de mal-être où elle
|
soins dépend des situations.
|
est indispensable dans la mise en
|
|
voit des choses si elle vous voit
|
Elle nous dit « je me sers du
|
place du procédé thérapeutique.
|
|
et qu'elle vous associe, vous
|
tiers, des fois je ne fais pas avec
|
|
|
avec votre tête et votre blouse
|
la personne elle-même, parce
|
De plus, elle dépend
|
|
blanche avec la réalité et avec
|
que c'est trop compliqué donc
|
principalement de la confiance
|
|
quelque chose auquel elle peut
|
du coup je me sers de chose
|
que le patient a envers le
|
|
se tenir et croire et se fier cela
|
aux alentours » « puisque je ne
|
soignant. Chaque moment avec
|
|
l'aidera à avancer dans ses
périodes de crise et donc aussi
|
peux pas avoir un lien direct, que ce n'est pas possible je
|
lui peut donc être favorable à une
communication pour entretenir
|
|
à nous faire confiance »
|
mets un lien indirect »
|
une relation de confiance et ainsi identifier avec lui ses
besoins, ses
|
|
L'IDE 1 nous explique que les
|
L'IDE 2 met en place des
|
peurs et ses envies. Il en découle
|
|
soignants sont là pour aider le
|
activités qui stimule les patients
|
alors une alliance thérapeutique.
|
|
patient de par les traitements et
|
et pense que c'est de cette
|
On parle alors d'un lien qui se
|
|
des médiations.
|
façon qu'elle fait vivre la relation
|
constitue entre le patient et le
|
|
|
de soins également. Mais elle
|
soignant afin de permettre le
|
|
La confiance entre soignant et
|
ne fait pas forcément vivre la
|
commencement et la continuité
|
|
patient permet de faire avancer ce dernier dans sa maladie car
|
relation avec des entretiens
cliniques parce qu'elle pense
|
du cadre de soin. Dans la théorie, les activités et
les entretiens font
|
|
elle permet d'avancer dans la
|
que parfois ceci n'est pas
|
partie prenante de la relation de
|
|
prise en charge et donc de faire
|
nécessaire. Le tiers permet
|
soin et ont toutes les deux pour
|
|
avancer les patients dans leur vie.
|
d'être en lien avec le patient,
« ce n'est pas forcément la
|
objectif d'accompagner le patient schizophrène dans
l'acceptation
|
|
|
discussion » C'est le fait que
|
de sa maladie et ainsi lui
|
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 70
|
Pour l'IDE 1, l'hospitalisation
également favorise la relation car le patient est
présent dans la structure et demande de l'aide.
|
je l'aide et que ça lui apporte quand je repars, il faut
qu'il est envie de me revoir »
|
apprendre à vivre avec.
|
|
Il ajoute que même si un patient
ne veut pas d'aide,
l'hospitalisation fait que le soignant se montrera aidant peu
importe les situations.
|
|
|
Sous thème : Les difficultés dans
|
Par rapport aux difficultés
|
L'IDE 2 nous explique qu'elle
|
Dans la théorie, il existe une
|
la relation de soins
|
rencontrées dans la relation de
|
rencontre des difficultés lorsque
|
difficulté dans la relation lorsque
|
|
soins, l'IDE 1 nous raconte que la principale difficulté
rencontrée
|
les patients vont vraiment mal,
«le fait qu'il ne soit pas
|
que l'on prend en charge un
patient schizophrène hospitalisé
|
|
est avec les patients très
|
accessible ». « Des gens qui
|
sous contrainte, délirant, qui
|
|
persécutés c'est-à-dire « qui
|
sont très en crise, qui sont très
|
affirme n'avoir aucun problème.
|
|
vont penser qu'on est là pour
|
très très délirant ce n'est pas
|
L'intensité des troubles et le refus
|
|
leur faire du mal, ils vont avoir
|
facile d'établir une relation » De
|
de se faire soigner sous-entend
|
|
éventuellement des voix qui
|
plus, il existe une difficulté
|
de prendre contrôle de sa liberté
|
|
vont leur dire qu'on est là pour
|
lorsqu'elle ne connaît pas le
|
d'aller et venir pour sa protection
|
|
faire du mal et c'est difficile pour
|
patient. De par son travail dans
|
et pour la protection d'autrui. Il
|
|
eux. »
|
l'équipe mobile, il lui arrive de
ne pas connaître le patient lors
|
apparait donc plus compliqué de créer un lien avec
une personne
|
|
Face à ses difficultés, l'IDE
|
du premier contact, une
|
persécutée à qui on impose des
|
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 71
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes
IFSI de Lisieux | Mai 2019 72
|
explique que quand ces patients vont mieux, il peut essayer de
leur montrer que les soignants sont là pour eux, pour les aider.
Il utilise les entretiens et les
activités thérapeutiques pour vivre des
moments avec eux et
ainsi leur montrer sa
bienveillance et établir la confiance.
|
personne très délirante et une
non connaissance de la personne entraine une difficulté
également.
|
mesures répressives, qui lui
empêche de faire ce dont il a
envie. La personne peut
également penser que les soignants sont là
pour leur faire du mal et ne comprendra pas toujours ce qu'il se
passe.
|
Sous thème : Les compétences relationnelles
|
L'IDE 1 explique que le soignant doit se
montrer aidant envers les personnes dans le but de créer la relation de
soin et le lien
de confiance pour ensuite
l'amener à réfléchir sur
ses comportements, sur ses délires, ses sentiments.
« Ils sont très contents d'avoir des gens
qui s'occupent d'eux
qui les reconnaissent en tant que personne et non en tant
que
|
Pour l'IDE 2, « la subjectivité et
ce que tu es, être authentique et soi-même favorise la relation
»
« sans jugement surtout »
« C'est être là, être
dans
l'empathie » et « être
convaincu en ce que tu fais sans porter de médaille » Il
faut de l'humilité et également de la
tolérance.
|
Par rapport à mes recherches,
l'écoute est une
compétence relationnelle, il est dit que prendre en compte
la parole du patient, c'est tout d'abord le reconnaitre en
tant que personne et ne pas
seulement l'assimiler à
sa maladie.
La communication et la patience sont également
essentielles
L'empathie apparaît comme un
|
|
schizophrène et en tant que
malade »
|
|
des concepts primordiaux dans la
prise en charge de la schizophrénie.
L'infirmière doit être capable de
reconnaître et accepter ses propres sentiments, il faut
qu'elle soit authentique avec une attitude
spontanée et la plus naturelle possible.
|
Sous thème : Le travail en équipe
|
Pour lui, le travail en équipe est
partout. Il explique dans un
premier temps que les transmissions sont importantes car
les choses vécues avec le
patient seront transmis entre
collègue dans le but de connaître le patient
et d'établir une prise charge de qualité ainsi qu'une relation de
confiance.
Il ajoute que « l'équipe
pluridisciplinaire joue un rôle important parce que
ce qu'on ne
|
Par rapport aux difficultés
rencontrées et pour y faire face, l'IDE 2 nous parle du
travail en équipe. Elle explique qu'elle en
parle à ces collègues, qu'elle transmet
à ces collègues. « J'ai
toujours bossé en individuel mais grâce au
collectif (...) je fais toute seule j'ai ma pensée j'ai mes idées
mais par exemple
quand je rencontre des difficultés avec un patient
je me réfère à l'équipe ». Elle se sers
du collectif « dans le sens où
|
Dans la théorie, chaque
professionnel d'un service peut être amené
à aider l'autre. Aucun soignant ne peut être réellement
présent pour le patient s'il n'est pas lui-même soutenu par une
équipe. Chaque membre est une
ressource pour les autres membres.
L'interprofessionalité est
primordiale en psychiatrie, c'est le
rendement des échanges, des idées de chacun
et des réflexions
|
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 73
va pas réussir à faire en tant que soignant peut
être qu'un médecin psychiatre du fait de son statut va
réussir à le faire passer au soignant et inversement ce que le
médecin ne va pas réussir à faire parce que
peut-être il sera vu comme le persécuteur et bah nous soignant on
peut travailler dessus. » En d'autres termes, chaque membre de
l'équipe pluridisciplinaire est important et permet d'avancer dans la
prise en charge suivant les situations.
L'IDE 1 nous dit aussi que « lorsque les patients se
confie au médecin psychologue et que le médecin nous confie ce
que les patients leur disent » ils peuvent alors travailler dessus
derrière.
après je retransmets mes informations, mon ressenti,
mon vécu et on discute avec l'équipe pour faire le point. Je
ramène
l'information à l'équipe pluridisciplinaire,
je ramène au collectif pour partager et pour avancer et faire une bonne
prise en charge. Le travail en équipe « va me permettre de
continuer, d'avancer avec le patient et le fait de transmettre les informations
entre nous, ça va permettre une prise en charge adaptée »
« On se serre les coudes dans une équipe,
même quand ça va pas bah ça a un côté
rassurant d'être plusieurs. » L'IDE nous dit aussi que
l'équipe permet de « passer la main » quand on est en
difficulté pour avancer dans la prise en charge et pour le
de toute une équipe qui permettent une bonne prise en
charge des patients.
P. Cauvin la définit comme étant « le lieu
où se développent les solidarités, où se renforcent
les actions de chacun par le jeu des échanges, où s'unifie
l'activité, où se crée un esprit commun »
Travailler ensemble permet de comprendre, à travers la
disparité de ces membres, la complexité des conflits
intérieurs d'un patient schizophrène.
L'équipe peut également
permettre de contenir la pensée et l'émoi du
patient, ce qui rend le caractère difficile de ses angoisses plus
supportable car elles peuvent être partagées avec les
différents professionnels du
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 74
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 75
|
« Toutes les informations sont
|
bien du patient. Il faut savoir dire
|
groupe. Cela permet à la
|
|
importantes donc le fait qu'il y ait
|
quand on ne sait pas.
|
personne schizophrène de diriger
|
|
une équipe pluridisciplinaire qui
|
|
ses émotions dans plusieurs
|
|
se transmet toutes les infos, ça aide à ce que tous
ensemble on
|
Elle ajoute que l'équipe peut
être bénéfique ou non pour le
|
directions, et donc d'en atténuer la force.
|
|
soit dans le sens du patient,
qu'on soit là pour lui et son bien-
|
patient schizophrène suivant les
situations. « Des fois c'est
|
Le but est de pouvoir
|
|
être. »
|
mieux que ce soit restreint c'est
|
accompagner le patient au mieux
|
|
|
mieux qu'il y est qu'une seule personne et des fois bah c'est
mieux d'être plusieurs pour qu'il y ait du relais, des fois parce que
c'est lourd, ça dépend, soit parce que la communication est
difficile. » Il n'y a « rien de défini mais des fois y'a des
situations où c'est bien que ça se dilue pour la personne et la
distance elle est là aussi c'est une façon de mettre une distance
»
|
vers une réadaptation.
|
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 2
DESPREZ Chloé | Mémoire IFSI Lisieux | mai
2019
<Chloé>
|
<Desprez>
|
<21 Mai 2019>
|
Prise en charge et qualité de vie d'un patient
schizophrène / vers une juste distance dans la relation de
soin
|
PARTENARIAT UNIVERSITAIRE : Université de Caen
|
Résumé : La qualité
de vie subjective d'un patient schizophrène constitue un enjeu essentiel
pour les soignants, de même que la relation de soin. En effet, ces
personnes ont besoin d'une rencontre et d'un accompagnement pour pouvoir faire
face aux répercussions sociales et à la souffrance que peut
engendrer cette maladie. Le but étant de pouvoir tendre vers une
réinsertion sociale et un mieux-être. Au cours de cette relation
de soin, le soignant met en place une juste distance pour pouvoir se
protéger et protéger le patient. Ainsi, dans ce contexte, cette
étude propose d'explorer de quelles manières cette juste distance
peut permettre d'améliorer la qualité de vie du patient
schizophrène. Pour tenter d'approfondir cette réflexion, une
enquête qualitative basée sur des entretiens a été
menée auprès de deux infirmiers travaillant en psychiatrie. Il en
ressort que la juste distance dans la relation de soin apparaît
réellement comme bénéfique pour le patient pour plusieurs
raisons. Cependant il semblerait exister une difficulté
particulière lorsque le patient schizophrène est en état
de crise aiguë. Ces résultats invitent donc à repenser la
juste distance et la relation de soins d'une autre manière mais toujours
en gardant à l'esprit l'enjeu d'une prise en charge optimale pour le
patient schizophrène. (212 mots)
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Mots clés : schizophrénie,
qualité de vie, relation de soin, juste distance
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Abstract: The subjective quality of life for
schizophrenic patient is an essential issue for nursing staff, as the
relationship during the treatment. Indeed, these people need a meeting and a
support to face up with the social aftermath and suffering that can produce
this disease. The goal is to be able to move towards a social reintegration and
wellness. During this treatment relationship, the nurse implements a right
distance to protect themselves and the patient. In this context, this study
proposes to explore how this right distance can improve the quality of life of
schizophrenic patient. To attempt this reflection in depth, a qualitative
survey, based on interviews, was lead in the eyes of two nurses working in
psychiatry. What emerges from this study is that the right distance in
treatment relationship appears to be beneficial for patient for many reasons.
However, it would seem that a particular difficulty exist when the
schizophrenic patient is in a sharp fit. These results look inviting to revamp
the correct distance and the treatment relationship, but always bear the
concern of an optimal care for the schizophrenic patient in mind. (186
words)
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Keywords : schizophrenia, quality of life, treatment
relationship, right distance
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