Annexe2 Communiqué et déclaration
Cher/es Compatriotes,
C'est avec gravité, détermination et espoir que je
vous écris en cette journée très particulière.
Gravité parce
qu'aujourd'hui est une journée d'échec. J'ai vécue un
échec en tant que leader, nous vivons un échec en tant que
nation.
Nous avions un rendez-vous avec l'histoire et nous avons
raté notre rendez-vous. Lamentablement. J'avais une
responsabilité de nous conduire avec succès à ce
rendez-vous et nous n'avons pas pu l'honorer.
Aujourd'hui, nous devrions être en train de
célébrer un nouveau départ pour notre pays. En lieu et
place nous assistons au spectacle du statu quo qui reprend son emprise sur nos
vies. Nous aurions dû être remplie de nouvelle énergie,
d'optimisme et de dynamisme, mais plutôt nous restons, pour l'instant,
pris au piège; stagnant.
Si je m suis mis en avant, c'est parce que je croyais
sincèrement et je continue à croire que nous avons besoin de
fraîcheur, d'un leadership nouveau, du leadership d'une nouvelle
génération, d'un leadership innovateur et efficace, d'un
leadership qui puisse nous redonner espoir et permettre au Cameroun de croire
en lui-même à nouveau.
Je crois en la capacité du Cameroun à devenir un
leader parmi les nations. Nous avons encore à réaliser cet
exploit.
Je crois en notre capacité en tant que Camerounais/es
à prendre notre destin en mains. Nous avons encore à franchir
cette étape déterminante.
Je crois en notre pouvoir en tant que peuple de combattre
n'importe quel système, n'importe quel groupe d'individus, n'importe
quel individu singulier qui a pris en otage notre nation depuis plus de 50 ans.
Nous avons encore à exercer ce pouvoir qui est le nôtre de cette
manière.
En conséquence, nous ne pourrons pas commencer dès
aujourd'hui à mettre en oeuvre la stratégie visant à
créer 500.000 nouveaux emplois pour nos jeunes. Nous n'allons pas
commencer dès aujourd'hui à aider nos commerçant/es,
sauveteurs, agriculteurs et pêcheurs à transformer leur travail
dans le secteur informel en emplois dans le secteur formel, avec des salaires
raisonnables, une assurance et la sécurité sociale pour eux et
pour leurs familles. Nous n'allons pas commencer la réforme de la
fonction publique, du secteur de la santé et du système
éducatif afin de fournir des services de qualité à
l'ensemble de nos citoyens. Nous n'allons pas commencer à bâtir Le
Cameroun Leader. Aujourd'hui nous sommes encore, pour le moment, dans
l'inertie.
En tant que leader, en tant que votre leader, mon coeur est lourd
et mon esprit est grave.
Dans cette situation, sobre, je vous écris avec une
détermination absolue, car rien de
mieux pour tirer des leçons que l'échec. Notre expérience
électorale a été nécessaire et importante. Elle
nous a fourni des leçons clés et a gravé un sentiment
d'importance et d'urgence dans chacun de nos esprits.
Leçon n ° 1: La réforme du
système électoral est notre priorité
incontestable - En tant que camerounais/es nous sommes convaincus
aujourd'hui, que nous ne pouvons plus nuire à notre propre avenir et
nous offrir en spectacle au reste du monde avec des élections
frauduleuses et gérés dans le ridicule le plus absolu. La
priorité incontestable pour chacun d'entre nous en tant que citoyen, est
de réformer notre système électoral. Notre
démocratie, notre développement et notre avenir immédiat
en tant que nation en dépend.
La responsabilité pour cette réforme ne peut se
limiter à des partis politiques, au gouvernement, à la
société civile ou aux médias. Cette responsabilité
est individuelle et elle est collective. Chaque Camerounais a un rôle
à jouer. En tant qu'individus et groupes, nous devons faire peser une
pression extrême sur le régime actuel afin de rendre cette
réforme inévitable. Nous devons commencer aujourd'hui et nous ne
devons pas fléchir. En tant que leader, je vous réaffirme ma
détermination à me focaliser sur cette réforme
jusqu'à ce que nous l'obtenions.
Leçon n ° 2: Nous devons consolider nos
efforts et bâtir une formidable machine politique - Il est
important de confronter le fait que l'abstention et l'inaction sont les
complices du régime actuel. L'avenir de notre nation ne peut pas
être la responsabilité de quelques leaders politiques, quelques
journalistes ou de quelques citoyens. Chaque camerounais, chaque camerounaise a
un rôle à jouer. Vous pouvez penser que votre contribution
intellectuelle, matérielle ou financière est petite, mais elle
est vitale pour nous permettre d'atteindre l'objectif de changement pour notre
pays. Nul ne peut avoir le luxe de rester à l'écart, d'agir en
spectateur ou en spectatrice. Chaque Camerounais vivant à
l'intérieur ou à l'extérieur du Cameroun, doit à sa
manière propre, être un acteur. En tant que leader, je vous
réaffirme ma détermination à renforcer notre organisation
politique pour la rendre encore plus inclusive, plus stratégique et plus
incisive que jamais; à la mettre en réseau et en synergie
d'action avec tous les autres organismes, petits et grands, qui sont
focalisés sur l'objectif d'apporter le changement au Cameroun.
Leçon n ° 3: Nous devons être
intransigeants et inébranlable dans la défense de nos droits et
nos intérêts à long terme - Beaucoup d'entre nous
ne connaissent pas leurs droits. Beaucoup ont été convaincus au
fil de 50 ans d'oppression que quand on nous refuse nos droits, c'est à
nous de changer notre comportement, pas à l'oppresseur de modifier le
sien. Beaucoup d'entre nous sommes tellement habitués à la
pauvreté et tellement concentrés sur la satisfaction des besoins
immédiats que nous sommes incapables de définir nos
intérêts à long terme. Il est impératif pour nous
d'acquérir les compétences, de bâtir les outils et les
organisations qui nous permettront en tant qu'individus et en tant que
collectif d'identifier et de défendre nos droits et nos
intérêts à long terme. Il est impératif que nous
refusions d'écouter tout soupçon de suggestion que lorsque nous
sommes menacés nous devons renoncer à nos droits ou à nos
intérêts, par peur ou par soumission à l'oppresseur.. Nous
ne devons pas être imprudents. Nous devons cependant être
intransigeants et implacables dans notre préparation et dans notre
organisation pour la défense de nos droits en toutes circonstances et
contre tout oppresseur. En tant que leader, je suis déterminée
face à la manipulation et l'oppression extrême de ce
régime, à me battre pour nos droits et nos intérêts
collectifs à long terme jusqu'à ce que nous les obtenions.
Dans la mesure où malgré le fait que nous avons
perdu ce tronçon de la course, nous avons gagnés
énormément et l'objectif final est plus proche que jamais ;
je vous écris avec espoir.
Je vous écris avec espoir, car l'objectif de changement et
de construction d'un Cameroun Leader est plus fort et plus clair que jamais.
Je vous écris avec espoir parce que nos priorités sont limpides.
Je vous écris avec espoir car notre équipe est plus grande, plus
habile et plus résolue que jamais.
Cette journée, qui marque un échec temporaire,
marque aussi le début de la prochaine étape de notre route vers
la révolution démocratique. Des milliers de Camerounais nous ont
rejoints et plus nous rejoignent chaque jour. Il devient évident pour
de plus en plus de camerounais/es que nous n'avons d'autre choix que de prendre
notre destin en main. Il devient évident pour la plupart d'entre nous
que tous les outils et démarches démocratiques et non-violentes
sont utiles pour nous permettre d'atteindre notre objectif.
Je vous écris avec espoir, car nous savons ce que nous
devons faire:
· Construire une organisation qui est inclusive de tous les
camerounais/es; forte de ses ressources financières, humaines et
matérielles; claire dans sa stratégie et ses objectifs et
absolument efficace dans sa capacité à apporter le changement
à notre pays
· Faire peser la pression extrême sur le régime
en place, afin de réformer efficacement le système
électoral et apporter le changement dans la gouvernance que nous
recherchons
· Construire un réseau national et international de
camerounais/es dédiés et focalisés à produire ce
changement pour notre pays
Je vous écris avec espoir, parce qu'en tant que leader
vous m'avez manifestés de l'amour, du soutien et de la loyauté
dans l'adversité extrême. Plus important encore, nous sommes
sortis de cette adversité plus forts, plus déterminés et
plus unis que jamais.
Gravité, détermination et espoir: de ce lieu nous
allons conduire notre offensive, de cet endroit nous allons construire notre
force, de cet endroit nous allons être plus audacieux, plus incisif et
plus efficace.
Mahatma Gandhi a dit «D'abord ils vous ignorent,
ensuite ils se moquent de vous, ensuite ils vous combattent, et puis vous
gagnez».
Mes cher/es compatriotes camerounais/es, ils nous ont combattus.
Maintenant, en tant qu'une équipe nationale, composée de millions
concitoyens, il est l'heure de gagner.
Il est l'heure !
Chaque peuple, chaque nation, a son périple. Nous,
camerounais avons parfois le sentiment que le nôtre n'a pas de fin. En
tant que peuple, nous avons lutté contre l'oppression pendant plus de 90
ans. Plusieurs fois nous avons eu des rendez-vous avec l'histoire et à
chaque fois nous en sommes ressortis insatisfaits, frustrés, nous
demandant si notre liberté ne viendrait jamais ...
Le 1er Rendez-vous
Lock Priso et Douala Manga Bell furent les précurseurs,
menant des luttes contre la domination allemande dès le début du
20ième siècle. Le 22 juillet 1931, les femmes
commerçantes de Douala décident que ça suffit, elles
marchent sur le bureau du gouverneur français pour protester contre les
taxes exorbitantes. De là jusqu'au début des années
soixante, les nationalistes se battent des deux côtés du Mungo
pour mettre fin à l'oppression des colonisateurs. Ndeh Ntumazah, Um
Nyobe, Emmanuel Endeley, Marthe Moumié, Augustine Ngom Jua, Gertrude
Omog, les femmes Anlu de Kom, etc. sont tous des noms dont l'histoire reste
à écrire afin que nos enfants puissent eux aussi construire leur
avenir en s'appuyant sur la fondation de vraies héroïnes et
héros pour faire face aux challenges de la vie. Trente ans de lutte de
libération. Les nationalistes sont vainqueurs car ils construisent une
vraie vision de l'indépendance, ils déclenchent un mouvement de
libération à travers l'Afrique et, surtout, ils nous laissent un
merveilleux héritage de fierté, la soif inextinguible d'une
véritable indépendance. Mais ils perdent, nous perdons car ils ne
dirigeront pas notre pays. Ils seront tués. Décapités. Et
avec eux, notre première tentative de nous définir par et pour
nous-mêmes. C'est notre premier rendez-vous avec l'histoire et nous en
repartons la gorge nouée du goût amer de la défaite. C'est
le point départ de la construction d'une fondation confuse, corrompue et
douteuse qui est celle du Cameroun aujourd'hui.
Le 2ième
Rendez-vous
1989 et nous sommes de nouveau agités. Corruption,
incompétence, oppression continue ont complètement anéanti
tous les espoirs que nous nous sommes permis en 1982 croyant assister à
la fin de la dictature. Les voix se lèvent à Garoua, Bertoua,
Ebolowa, Bafoussam, Buéa, Douala, Yaoundé et au quartier de
Ntarikon. Yondo Black, Vincent Feko, Henriette Ekwe, Albert Mukong, Ni John Fru
Ndi et bien d'autres font eux aussi partie de cette histoire qui reste à
écrire. L'espoir renaît une fois de plus. Le raz-de-marée
venu de Bamenda prend de l'ampleur et se propage dans l'ensemble du pays. Du
sang sera versé, des vies volées, des villes mortes feront partie
de notre quotidien et les cartons rouges nous informerons que la nation est en
guerre contre l'oppression. C'est le 11 Octobre 1992, nous sommes certains que
nous avons enfin atteint l'indépendance pour laquelle nous nous battons
depuis près d'un siècle. Les bulletins sont mis dans les urnes,
le comptage initial est merveilleux. La liberté enfin ! Les
résultats ne demandent qu'à être proclamés. Une fois
de plus nous avons gagné car la nation s'est exprimée
massivement sur le choix de son destin. Nous aurions désormais multiples
partis politiques, maillons essentiel de la démocratie. Mais quand le
résultat final est prononcé la victoire nous est refusée.
La liberté totale, l'indépendance complète ne sera pas
pour cette fois-ci non plus.
20 ans plus tard et il semble que nous ayons perdu non
seulement notre chemin, mais aussi que nous ayons perdu notre volonté.
Au moment où nous semblons nous résigner à ce qu'on nous
dit être notre destin, vint Février 2008. Notre rage surgit.
L'injustice de la vie dans un pays qui est riche, mais où 40% de ses
citoyens vivent avec moins de 738 fcfa par jour. La vie inimaginable dans un
pays où près de 500 personnes peuvent mourir du choléra
parce que moins de 30% de sa population rurale a accès à l'eau
potable et seulement 14% de cette même population a accès à
des toilettes décentes. Quel scandale ! Dans ce même pays, le
chef de l'Etat, dont le travail consiste à s'assurer que les citoyens
ont de l'eau potable et des toilettes adéquates, se permet d'aller en
vacances pour dépenser plus de € 1,000,000 en moins d'un mois.
Echec sur échec, scandale sur scandale et nous nous rappelons que nous
valons mieux que ça, que nous avons un potentiel extraordinaire qui
attend d'être atteint. Cette combinaison de scandales et de ressources,
d'échecs et de potentiels ; cette combinaison tourbillonne le sang
de nos ancêtres qui est en nous.
Nous nous rappelons que nous sommes les enfants de combattants
et combattantes de la liberté. Nous sommes les descendants des
nationalistes qui ont combattu des ennemis plus redoutables que celui qui est
en face de nous. Nous sommes d'une lignée de héros et
d'héroïnes qui n'ont jamais céder face à la tyrannie
et l'oppression.
La seule et unique raison de tout leur être, de leur
combat, l'accomplissement de leur destin, c'est nous.
Pour nous, pour cette génération qui est la
nôtre, il est l'heure...
Le 3ième et Décisif
Rendez-vous
2011 est notre prochain rendez-vous avec l'histoire. Nous le
savons. C'est le tour de notre génération ; il est l'heure
pour nous. Porter ce combat, nous le devons. Réaliser cette
révolution pacifique, nous le devons. Nous nous le devons, nous le
devons à nos ancêtres et nous le devons à nos enfants.
Il est l'heure! La seule question que chacun de nous doit se
poser est "Quel est mon rôle?", "Quelle est ma tâche?" Alors que
nous nous avançons vers cette 3ième rencontre
décisive, certaines choses clés doivent être faites:
· Reprenons notre pouvoir - Nous devons
inverser la structure du pouvoir au Cameroun. C'est notre pays. Ce sont nos
droits. Nous ne pouvons continuer à permettre que notre pouvoir
collectif soit usurpé par une petite minorité.
· Reprenons en main nos
élections - Nous ne devons pas permettre la confiscation des
élections par un individu ou un petit groupe de personnes. Le
système électoral nous appartient. C'est notre possession
fondamentale en tant que citoyens. Par conséquence,
o Prenons possession de notre droit -
Inscrivons nous sur la liste électorale
o Organisons nous - Rejoignez un groupe qui
lutte pour la réforme électorale
o Faisons entendre notre voix - Allez
à ELECAM, posez des questions, exigez des réponses, participez.
o Mobilisons nous - Par l'action
non-violente, mais déterminée, en tant que peuple, nous sommes
à mesure de nous assurer de la transparence et de l'équité
dans ce système électoral
2011 est notre rendez-vous avec l'histoire. Il est l'heure,
notre heure, l'heure du peuple. Abolissons la peur, levons-nous, agissons,
ensemble nous allons oser inventer l'avenir de notre cher Cameroun.
Kah Walla
Citoyenne Camerounaise
Interpellation : Lettre ouverte au président
Paul Biya
Pour la candidate à la prochaine élection
présidentielle, la transition au Cameroun en 2011 est
inéluctable, mais le chef de l'Etat peut encore peser sur son
contrôle à travers des élections libres et
transparentes.
Monsieur le Président, Vous ne me tiendrez pas rigueur
de vous écrire, alors que vous êtes absent du Cameroun, notre
pays. Bien que citoyenne et contribuable camerounaise, je n'ai, hélas,
pas le privilège d'être informée de vos
déplacements. Je vous écris en comptant sur votre entourage, et
la technologie moderne pour que cette lettre vous parvienne au plus
tôt. Monsieur le Président, je suis certaine que vous observez
avec beaucoup d'intérêt, autant que nous autres camerounais/es, le
vent vif annonciateur d'une ère nouvelle, qui souffle en ce moment sur
le Maghreb et le Moyen-Orient. C'est une saison incroyable pour les peuples
opprimés, des décennies durant, décidés à
prendre leur destin entre leurs mains. Ils sont non seulement en train de
gagner des batailles, mais ressortent victorieux des luttes pour
l'indépendance, la liberté et la dignité humaine qu'ils
mènent contre leurs dirigeants depuis des décennies. C'est une
très mauvaise saison pour les présidents qui ont
été au pouvoir pendant plus de 20 ans, en maintenant leur pouvoir
à travers des élections rituelles, douteuses, qui ne sont
crédibles, ni aux yeux de leur peuple ni aux yeux de la
communauté internationale. Les Camerounais ne sont pas seulement
assis sur les bords de leurs sièges en observation, mais nous sommes en
communion avec ces peuples en esprit. Nous les comprenons au plus profond de
nous-mêmes. Nous admirons les mesures qu'ils ont prises pour
contrôler leur propre destin. Nous sommes admiratifs face au courage dont
ils font preuve en osant inventer leur propre avenir. Et parce que nous
avons les mêmes aspirations, nous collectons des informations, nous les
analysons et nous tirons les leçons de leurs victoires. En voici
quelques-unes :
Leçon n ° 1: Quand le peuple agit, aucune
force ne peut l'arrêter. Nous avons appris que lorsque le Peuple est
déterminé, il peut changer non seulement les dirigeants, mais
l'ensemble d'un système de gouvernement. Nous avons appris que
même les forces armées répressives peuvent être
neutralisées par la force indéniable de la population. Quand le
Peuple agit, les choses changent. Leçon n ° 2: Ce n'est pas
seulement la force de notre action en tant que peuple qui est importante, mais
également la détermination et la durée de celle-ci, qui
assureront la victoire. Nous avons appris des Tunisiens, que, contrairement
à ce que nous avons fait en 1992, il est nécessaire de maintenir
la pression jusqu'à ce que le but ultime soit atteint. Leçon n
° 3: Et celle-ci, Monsieur le Président, est la leçon la
plus importante. Une transition organisée est la meilleure. Il est
préférable pour un pays de tenir des élections libres et
équitables pour permettre aux personnes qui se sont
préparées et qui ont pensé une transition, de l'assurer.
Le soulèvement du peuple dans la rue se produit lorsque tous les moyens
organisés de transition ont été refusés. C'est le
pire des scénarii pour des présidents «inamovibles».
Car à ce stade, le Peuple n'est plus prêt à accepter des
solutions tempérées, des demi-mesures, des à peu
près... Il n'offrira pas de sortie digne au dictateur. Il n'offrira pas
de sortie digne à son entourage et à ceux qui le
soutiennent. En tant que citoyenne engagée, politiquement active et
candidate à l'élection présidentielle, j'ai pensé,
M. le Président, qu'il était important d'attirer votre attention
sur ces leçons que nous avons tirées des combats que
mènent des peuples qui vivent dans des conditions comparables à
celles du peuple camerounais.
Je voudrais conclure avec quelques
points: Un monde s'écroule, Monsieur le président, celui des
dictatures. Le vent du changement qui souffle actuellement, ne fera que
recueillir vigueur et élan au fur et à mesure des mois qui
passent et que Septembre / Octobre 2011 arrivent à grands pas. Les
Camerounais sont déterminés en cette année à
prendre leur destin entre leurs mains. Nous ferons cette transition
volontiers, de manière organisée, par le biais d'une
élection ... à condition. À condition que les exigences
minimales pour une élection libre et équitable soient
respectées. A condition que la volonté politique pour une
transition démocratique soit démontrée sans
ambigüité. A condition que personne, absolument personne, ne nous
empêche de quelque manière que ce soit, d'exercer notre libre
arbitre et nos droits d'électeurs/trices et de citoyen/nes
camerounais/es. Aujourd'hui, vos collègues font des concessions
à la population uniquement lors qu'ils ont le dos contre le mur,
uniquement parce que leur propre survie est en jeu. Il est dans nos meilleurs
intérêts tous ensembles, M. le Président, que vous
écoutiez maintenant les ONG, partis politiques et camerounais/es
ordinaires qui ne réclament rien d'autre qu'un un bon système
électoral depuis deux décennies. Il est dans nos meilleurs
intérêts tous ensembles, que vous agissiez rapidement et fermement
pour apporter les changements qui sont nécessaires pour assurer une
transition, juste, libre et en douceur.
Je ne vais pas
énumérer les changements nécessaires ici : ils figurent
dans diverses correspondances que vous avez reçu, de moi et de nombreux
autres Camerounais soucieux de l'avenir de leur pays. En effet,
différents groupes ont été et continuent à
être en contact avec vos services pour travailler concrètement sur
ces éléments. Il serait important, que vous en tant que Chef de
la Nation, fassiez comprendre à vos équipes, que votre
volonté et vision sont que les changements soient apportés
à notre système électoral afin que le Cameroun sorte de ce
processus électoral sans dommages. Monsieur le Président, nous
sommes en 2011 et... Il est l'Heure ! Nous sommes les Camerounais/es qui
mèneront à bout leur lutte pour l'indépendance
totale. Il est de notre intérêt à tous que nous fassions
cela paisiblement, avec dignité et surtout avec une équité
et une transparence irréprochables, conformément aux attentes du
peuple camerounais. Qu'une transition ait lieu en 2011 dépend de
nous, Peuple Camerounais. Comment cette transition aura lieu ? Dans une
très grande mesure, Monsieur le Président, cela dépend de
vous.
Par Kah Walla * * Citoyenne Engagée Camerounaise
Patriotique, Candidate à la Présidence de la République
du Cameroun
Interview Kah Walla au magazine New African
1- Comment va le Cameroun ?
Le moins que l'on puisse dire est que le Cameroun ne se porte
pas bien. Le Cameroun reste loin de refléter dans son fonctionnement
actuel le dynamisme, la richesse et l'excellence auxquels une dotation
exceptionnelle en ressources humaines et naturelles le destinerait.
Le diagnostic que nous avons présenté durant la
dernière élection présidentielle reste plus que jamais
d'actualité.
En effet, le Cameroun reste un pays géré par un
système caractérisé par
??La défense et la préservation des
intérêts d'une minorité au détriment de
l'intérêt général.
??L'arrogance des représentants de l'Etat
vis-à-vis des populations.
??La perte de confiance des citoyens/nes dans les
institutions de la République.
??La navigation à vue dans la conduite des affaires
publiques.
??L'impuissance de la puissance publique devant les
problèmes économiques et sociaux qui préoccupent les
Camerounais/es.
Pour le Cameroon People's Party (CPP), il est toujours
l'heure de construire un Cameroun Leader, de mettre en oeuvre et de
pérenniser un système de gouvernance qui :
??Garantit la démocratie, les libertés civiques
et l'Etat de Droit
??Assure à tous, les services de base de
manière équitable et efficace.
??Entretient un environnement économique libre, juste
et propice pour créer l'emploi et la richesse pour les
Camerounais(es).
??Encourage et défend la transparence, le
mérite et l'excellence dans tous les domaines.
??Rend les gouvernants / es comptables de l'utilisation des
ressources de la nation devant l'ensemble des Camerounais/es.
2 - Comment envisagez-vous l'avenir du Cameroun avec et
sans Paul Biya ?
Tout d'abord, précisons que l'avenir du Cameroun ne
dépend pas que de Paul Biya mais de l'ensemble des Camerounais / es. Cet
avenir peut être plus triste ou plus radieux. Tout dépend des
Camerounais / es. Le Cameroun ne peut pas être plus évolué
que les Camerounais / es.
Au Cameroon People's Party (CPP), nous sommes convaincus que
si le peuple se lève, les choses changeront. Il est plus qu'urgent de
mener une révolution démocratique dans notre pays en vue de
permettre au peuple camerounais de :
??Reprendre son pouvoir sur le plan politique
??Construire sa puissance sur le plan
économique
??Bâtir de nouveaux systèmes sur le plan
social
C'est le sens ainsi que l'objet de notre démarche
politique actuelle.
3 - Croyez-vous vraiment à l'alternance ? Si oui,
sous quelle forme ? Sinon Qu'est-ce-qui constitue le véritable obstacle
?
Au-delà de la simple alternance entendue comme la
prise du pouvoir par un autre parti que le RDPC, nous pensons qu'il nous faut
une réelle alternative de gouvernance capable, au-delà du
changement de personnes, de transformer le système camerounais. Au CPP
nous croyons que c'est possible. D'abord parce qu'elle est vivement attendue de
la part des populations et surtout parce qu'elle est objectivement possible au
regard de la situation générale de notre pays.
Elle peut être pacifique ou violente. Mais sa forme et
sa nature dépendront surtout de l'évolution et des
résultats des dynamiques au sein de trois grandes catégories
d'acteurs / trices :
??La majorité présidentielle composée du
RDPC, de ses alliés et des partis satellites ;
??Les partis politiques de l'opposition progressiste
;
??La population camerounaise aiguillonnée par des
organisations de la société civile.
Au CPP, nous travaillons pour qu'elle soit populaire,
démocratique et non-violente. Dans cette logique, les principaux
obstacles tiennent moins au parti au pouvoir qu'aux insuffisances
stratégiques et organisationnelles des forces de l'opposition ainsi
qu'à une insuffisante prise de conscience des populations.
4 - Depuis quelques années, le président
Paul Biya a engagé une lutte contre la corruption et les
détournements de deniers publics à travers une opération
baptisée « Epervier », qui a déjà permis de
traquer une bonne cargaison de directeurs généraux, plus d'une
quinzaine d'anciens ministres, pas moins de trois anciens secrétaire
généraux de la présidence de la République et un
ancien Premier ministre. Quel commentaire vous suscite cette opération
et comment jugez-vous son déroulement ?
Bien que l'opération épervier a
été présentée et perçue comme salutaire et
bénéfique pour l'assainissement des pratiques de gestion
publique, il faut souligner qu'elle a pris un tout autre visage dans sa mise en
oeuvre.
En effet, cette dernière semble être un
instrument pour règlements de comptes politiciens. Jusqu'ici, elle ne
s'est pas avérée être une stratégie efficace pour
lutter contre la corruption. Elle n'a pas pu neutraliser les
prévaricateurs de la République dont beaucoup restent en
activité.
Par ailleurs, l'amplification du problème de la mal
gouvernance, le non-respect des droits de ceux qui sont interpellés, les
vices de procédure, la cacophonie, les atermoiements et les revirements
spectaculaires auxquels on assiste, accroissent le sentiment qu'il y a anguille
sous roche.
Le Cameroon People's Party (CPP) estime qu'il faut de la
clarté et le respect de la procédure. Il faut respecter les
droits des prévenus. Il faut sanctionner lorsque, conformément au
droit, les faits de corruption et de détournements sont établis.
Et plus important, il faut reformer notre système de gouvernance pour
prévenir de tels faits, et finalement, essentiellement, il faut tout
faire pour récupérer les fonds pour le Trésor
public.
5 - Sensiblement un an après sa
réélection, le président Paul Biya est-il sur la voie du
changement ?
Non. Nous observons que rien dans le système n'a
changé. Ce dernier continue à gouverner de manière
improductive. Fondamentalement, les conditions pour que le véritable
changement survienne sont loin d'être réunies. Nous sommes
toujours dans une logique de saupoudrage permanent. Rien de radical ni de
significativement porteur ne sortira de la dynamique gouvernementale
actuelle.
6 - Avec la création d'Elecam, la refonte du
fichier électoral et l'instauration de la biométrie, le
président Paul Biya n'est-il pas en train de conduire le pays vers la
voie de la démocratie ?
Gardons-nous d'utiliser de bien grands mots pour
décrire de petits rafistolages sans lendemain historique. La
démarche actuelle de Paul Biya a deux constantes essentielles : la ruse
et l'embuscade. Elle n'est nullement consensuelle et loin de remplir les
exigences d'un cadre démocratique moderne. Elle procède
essentiellement de ce que l'on peut qualifier « d'étapisme
dilatoire ».
Il est aujourd'hui possible de mettre en place l'ensemble des
revendications qui datent d'au moins 20 ans et qui sont susceptibles de faire
entrer notre pays dans le giron des nations démocratiques et
exemplaires.
En guise d'illustration, on peut citer :
??Une élection présidentielle à deux
tours
??Un bulletin unique pour chaque élection
??Un code électoral unique et consensuel
??Un calendrier électoral clair et connu de tous
à l'avance
??Un ELECAM indépendant, efficace et efficient qui
pourrait susciter la confiance des Camerounais / es
??Un découpage électoral
équitable
??Etc.
Ces revendications loin d'être exhaustives ne suffisent
pas non plus à asseoir en profondeur la démocratie. Nous avons
encore à :
??Refonder nos institutions fondamentales
pour équilibrer les trois branches du pouvoir
(exécutif, législatif et judiciaire) et créer des canaux
permettant au peuple de s'exprimer dans le fonctionnement des institutions
républicaines : Constitution, Parlement, Systèmes
judiciaires.
??Réformer les systèmes
qui garantissent l'alternance et l'implication du peuple dans
la gestion de la cité : Système électoral,
Décentralisation.
??Faciliter l'émergence de
véritables contre-pouvoirs : Partis politiques, Syndicats, groupements
professionnels, Médias.
Tels sont les chantiers pour faire du Cameroun une
véritable République exemplaire.
7 - Le G7 dont vous faites partie considère le
nouveau code électoral comme un « document dangereux ».
Pourquoi ?
Ce code électoral est dangereux pour plusieurs
raisons.
Premièrement, il ne tient pas compte dans le fond de
l'essentiel des propositions visant à faire des élections au
Cameroun un exercice véritablement transparent, impartial et libre. Nous
pensons aux propositions sur le nombre de tours, sur les candidatures
indépendantes, sur l'indépendance de l'organe en charge de la
gestion des élections, sur le découpage électoral,
etc.
Deuxièmement, il transforme par certaines de ses
dispositions (les cautions aux différentes élections) le
processus électoral en un système censitaire c'est-à-dire
réservé aux riches.
Troisièmement, il n'est pas le fruit de consultations
réelles et à ce titre, ne fait pas consensus. Dans cet ordre, il
ne règle donc aucun problème et participe à entretenir la
méfiance, la suspicion et le faible engouement des populations pour des
élections. Il ouvre donc la voie à des contestations
systématiques qui peuvent déboucher sur des crises
profondes.
Le fait que dans sa première version, figurait une
disposition concernant l'abrogation du mandat impératif des
députés convainc de la malveillance et de la mauvaise foi du
régime actuel.
Il y a en apparence des « avancées » mais la
réalité est le verrouillage.
En l'état actuel, les partis politiques du G7 sont
d'accord pour dire que ce code bafoue les principes fondamentaux de notre
Constitution, s'oppose à l'aspiration démocratique des
Camerounais / es et ne participe pas à l'amélioration de la
gouvernance.
Raison pour laquelle des travaux sont en cours en vue de
mettre sur la place publique un code électoral unique
alternatif.
8 - Et si vous étiez très proche de
l'actuel président du Cameroun, quels conseils lui donneriez-vous
?
Le 09 Février 2011, dans une lettre ouverte à
Paul Biya, nous lui signifions déjà que la saison actuelle
était très mauvaise pour les présidents qui ont
été aux commandes pendant plus de 20 ans, en maintenant leur
pouvoir à travers des élections rituelles et douteuses,
élections qui ne sont crédibles, ni aux yeux de leur peuple ni
aux yeux de la communauté internationale.
Nous sommes aujourd'hui convaincus qu'après 30
années d'exercice de pouvoir infructueux, on est forcément
usé.
Nous lui avons suggéré fortement de mettre en
place les conditions et les mécanismes d'une transition
organisée.
Nous sommes convaincus qu'une transition organisée est
la meilleure option. Il est préférable pour un pays de tenir des
élections libres et équitables pour permettre aux personnes qui
se sont préparées et qui ont pensé une transition, de
l'assurer. Le soulèvement du peuple dans la rue se produit lorsque tous
les moyens organisés de transition ont été refusés.
C'est le pire des scénarii pour des présidents
«inamovibles». Car à ce stade, le Peuple n'est plus prêt
à accepter des solutions tempérées, des demi-mesures, des
à peu près... Il n'offrira pas de sortie digne au dictateur. Il
n'offrira pas de sortie digne à son entourage et à ceux qui le
soutiennent.
Celui qui rend une révolution pacifique impossible,
rend une révolution violente inévitable comme le disait John
Kennedy.
Ceci n'est naturellement pas notre souhait mais la
vérité historique la plus froide.
9 - Quelle est la position de votre parti quant aux
élections législatives et municipales, renvoyées
l'année prochaine ?
Avant tout, il est important de rappeler que le CPP pense que
toute prorogation du mandat des députés et des conseillers
municipaux aurait dû obéir à un préalable
fondamental qu'est une démarche systématique de dialogue et de
travail dans la conduite de la réforme. Dans cette logique, la mise en
place d'un groupe de travail comprenant les représentants des partis
politiques et organisations de la société civile s'impose
toujours pour s'assurer :
??De la définition d'un agenda sérieux et
complet de reformes
??De l'adoption de mesures consensuelles
??Du fonctionnement véritable des commissions
électorales mixtes
En l'absence d'une démarche inclusive, transparente et
consensuelle de réforme du système électoral,
prétexte du renvoi des élections, nous courons le risque de rater
une occasion historique de renforcement de la démocratie et de l'Etat de
droit dans notre pays.
En attendant, le CPP en tant que parti au pouvoir ayant
l'objectif de transformer positivement et durablement le système de
gouvernance au Cameroun se prépare pour les prochaines
élections.
Nous comptons présenter des candidats / es dans toutes
les circonscriptions où nous estimons avoir de réelles chances de
l'emporter. A ce titre, nos listes devront comporter partout :
??30 % de personnes de sexe opposé,
??de 50 % de jeunes âgés entre 23 et 35
ans,
??de 10 % de personnes vivant avec un handicap.
Nous comptons également nous associer à
l'ensemble des autres forces progressistes pour mutualiser nos ressources en
vue de sécuriser le vote.
Partout où nous n'aurons pas nos propres candidats /
es, nous soutiendrons tous ceux et celles qui présentent des visions et
des programmes convergents avec ceux du CPP dans l'opposition
progressiste.
10 - Vous faites partie de ceux qui, à un moment
revendiquaient à cor et à cri, l'organisation des
élections après l'instauration de la biométrie dans les
opérations électorales. Aujourd'hui, le président Paul a
accepté la mise en place de la biométrie. Jusque-là, vous
semblez ne pas être satisfaites. Qu'est-ce qui explique votre position
?
La biométrie est certes une revendication qui vient
formellement d'être prise en compte. Compte tenu de notre passé,
il faut encore s'assurer que le contenu correspond bien à ce qui est
annoncé. Si on prend les exemples d'Elecam sensé être
indépendant et le code électoral unique actuel, on a toutes les
raisons d'être méfiants.
Le pouvoir actuel, comme nous l'avons déjà dit
ne veut pas d'élections libres et transparentes. Sinon, pourquoi
refuse-t-il d'admettre des revendications et propositions des partis
politiques, de la société civile, des leaders d'opinion, des
autorités religieuses, etc ? Il est permanemment dans la ruse et
l'embuscade. Le pouvoir pour le pouvoir semble être son seul leitmotiv,
le principe dominant et constant de sa praxis politique.
Un processus électoral véritablement
satisfaisant commande que nous remplissions d'autres exigences qui
relèvent des aspects politiques, juridiques et techniques.
A l'heure actuelle, nous sommes loin du compte.
11 - Lors de la présidentielle de 2011, les
Camerounais, dans leur grande majorité, avaient demandé à
l'opposition d'élaborer des stratégies d'unification politique,
autour d'une candidature consensuelle et d'orientations programmatiques
communes. Pourquoi l'opposition, dans son ensemble avait rejeté cette
proposition ? Pensiez-vous sincèrement que l'opposition
(fragmentée et fragilisée par un passé qui pèse
comme une chape de plomb sur ses épaules) était en mesure de
battre Paul Biya, à l'issue d'un scrutin à un tour ?
Première précision, il n'y a pas une opposition
mais des oppositions au Cameroun. L'expression courante « opposition
camerounaise » exprime en des termes simples une réalité
pour le moins complexe, dynamique et multiforme. Dans cette vaste toile, se
trouve des acteurs et des appareils qui, évidemment, ne se
caractérisent pas par la même idéologie, le même
discours, les mêmes priorités et les mêmes logiques
d'intervention. Il en découle de façon évidente qu'il faut
faire la différence entre des partis qui ne sont là que pour
garantir des situations de rente à leurs promoteurs et ceux qui ont une
réelle stratégie pour la conquête et l'exercice du pouvoir
pour le bien des camerounais.
Ensuite, c'est vrai que s'il y avait moins de formations
politiques, indubitablement le jeu politique serait moins brouillé pour
les électeurs / trices. Mais il se trouve que ce n'est pas le cas et
nous avons l'obligation en tant qu'acteurs / trices politiques de faire en
sorte que le bon grain puisse facilement être distingué de
l'ivraie.
Néanmoins des regroupements sous la forme de
coalitions ou de plateformes peuvent se mettre en place. Elles peuvent se faire
sur la base idéologique ou sur la base de problématiques
d'intérêt général tel que le combat pour un code
électoral.
C'est le sens des regroupements observables depuis peu sur la
scène politique nationale. Il reste à travailler pour qu'elles
aboutissent dans les plus brefs délais à des résultats
probants. C'est une condition sine qua none de la réussite du changement
dans notre pays.
12 - Après le scrutin, le groupe de sept (G7) dont
vous faites partie, a appelé le peuple camerounais à se
mobiliser, à descendre dans la rue, au cas où la Cour
suprême venait à désigner un vainqueur. Malheureusement,
votre appel à la révolte n'a pas prospéré. Pourquoi
le peuple ne vous a-t-il pas suivi ?
Nous n'avons pas appelé les Camerounais / es à
la révolte. La propagande et la désinformation du régime
en place l'ont présenté comme tel. Ce qui est clair, c'est que
l'appel à manifester pour dénoncer la fraude électorale et
protester contre un régime qui foule aux pieds les droits et
libertés n'est en rien un
crime encore moins une erreur. Au contraire, ce type de
sursaut est hautement salutaire pour le pays. Il est d'ailleurs autorisé
par la constitution.
Le « peuple » ne nous a pas suivi pour des raisons
évidentes.
Primo, le taux de participation était très
faible, ce qui dénote une très faible confiance des Camerounais /
es dans le processus.
Deuxio, la désinformation et le matraquage
médiatique ont largement contribué à dénaturer
l'objet et le sens de notre déclaration.
Tertio, le déploiement disproportionné des
forces de sécurité et la campagne d'intimidation étaient
suffisants pour dissuader des populations qui, par ailleurs, n'ont pas ces
dernières années, développées une culture de la
participation politique au sens conventionnel du terme.
Cependant, cette déclaration a eu le mérite de
dénoncer devant le peuple et l'histoire une énième
escroquerie politique.
13 - Il y a quelques années, vous étiez
encore militant du Social Democratic Front (SDF), principal parti de
l'opposition. Aujourd'hui, vous trônez à la tête du Cameroon
People's party. Qu'est-ce qui vous a poussée à taper dans la
fourmilière ?
Elles étaient simples. Il ne s'agissait pas d'un
désaccord avec l'idéologie officielle du parti car je me sens
toujours très proche du courant dit social-démocrate. Il ne
s'agit pas non plus d'une question de personnes car j'ai pour principe de
considérer que les organisations et les systèmes sont plus
importants que les personnes. Il ne s'agit pas non plus d'une prétendue
affaire de malversation financière car ceux qui suivent de près
l'actualité politique camerounaise à l'époque ont eu la
preuve de l'inanité de telles accusations.
J'ai démissionné du SDF pour des raisons de
principe et de stratégie. Précisément pour des raisons de
divergences profondes avec une part significative du leadership actuel de ce
parti sur la façon dont il convenait d'aborder les
échéances électorales actuelles au Cameroun. Ma conviction
profonde est celle-ci : le changement au Cameroun se fera avec et par les
Camerounais/es. S'il faut reformer le système électoral, il faut
compte tenu du relatif échec des démarches passées, songer
sérieusement à faire que le peuple s'approprie ce combat. Lorsque
le peuple se lève, les choses changent. S'il faut gagner des
élections, c'est encore et surtout avec le peuple que cela doit se
faire. Toute stratégie qui de mon point de vue ne prend pas en compte
cet élément est, il me semble vouée à
l'échec.
J'ai pris mes responsabilités en démissionnant.
La cohérence avec mes principes et mon analyse de la situation m'y
conduisaient naturellement. La solution facile et personnelle aurait voulu que
je reste dans le « confort » du
parti, faisant tranquillement mon trou en attendant mon
heure. Je ne l'ai pas fait car cela ne correspond nullement à ce que je
suis et à ce qu'attendent les Camerounais/es. Les hommes et les femmes
ne sont pas faits pour le parti et le mouvement. C'est au contraire le parti et
le mouvement qui sont fait pour les hommes et les femmes. Lorsqu'on oublie ces
vérités à la base de tout engagement sain et
sincère dans la vie politique, on perd l'essentiel et, sans en
être conscient, malgré ce que l'on dit et fait, on s'oppose au
vent de l'histoire.
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