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à‰tablissements publics et gestion des étudiants internes. Cas de l'Unilu.

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par Jean-Claude KAPETA KAYATI
UNILU - licenié 2016
  

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CHAPITRE. I : PRESENTATION DE L'UNIVERSITE DE LUBUMBASHI

Dans ce chapitre, il est question de faire une description de notre champ de recherche qui est l'université de Lubumbashi. C'est dans cette perspective que nous allons tour à tour développer les considérations sur son aperçu historique, sa situation géographique, son organisation administrative et sa situation économique.

I.1. Aperçu historique de l'UNILU

Le décret royal du 26 octobre 1955 créa l'université officielle du Congo et du Rwanda-Urundi. Cette institution ouvrit ses portes le 11 novembre 1956. Les objectifs assignés à cette institution furent de dispenser un haut enseignement devant préparer la jeunesse à certaines professions pratiques et développer la recherche scientifique, faire progresser et diffuser la culture. Elle devait former et orienter en même temps que les européennes, l'élite des populations autochtones leur permettant de créer les conditions d'existence d'une société fraternelle.

L'université coloniale de Lubumbashi, une alternative de l'université confessionnelle de Kinshasa (Lovanium), avait la mission d'assurer la reproduction de la société des colons d'abord et ensuite, à compte-gouttes, celle d'une infime fraction d'Africains rompus à l'exercice intellectuel, ayant franchi de multiples examens sélectifs. Son vrai rôle, conforme à la vision du monde du colonisateur, était de former des cadres blancs pouvant travailler dans cette partie de la colonie qu'ils comptaient transformer en colonie de peuplement à l'instar de ce que les Anglo-saxons avaient fait de l'Afrique du sud et de la Rhodésie du sud. Il faut aussi reconnaitre que le désir des entreprises coloniales était de remplacer, dans certains services, les blancs qui coutaient très cher par des auxiliaires noirs.

Depuis sa création, l'université officielle du Congo belge et du Rwanda-Urundi avait une double mission locale à remplir, celle d'abord de satisfaire les besoins (en Agents spécialisés et techniciens) des entreprises naissantes et en pleine expansion et, ensuite, celle de servir les intérêts des colons qui prônaient un développement séparé du Katanga du reste de la colonie.

Avec l'accession du pays à l'indépendance et surtout avec la sécession Katangaise, l'université fut débaptisée et rebaptisée université de l'Etat à l'Elisabethville par ordonnance n°800/162 du 14 septembre 1960 relatif au statut de la nouvelle institution universitaire.

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Le gouvernement de l'Etat indépendant du Katanga la voulait authentiquement Katangaise. Comme pendant la période coloniale, l'université de l'Etat à l'Elisabethville dépendait, sur le plan académique des universités belges (Liège et Gand). Mais contrairement aux vieilles universités européennes tournées vers la recherche pure, le gouvernement du Katanga voulait, compte tenu des exigences du moment, transformer la jeune université de l'Etat à l'Elisabethville en une école technique et professionnelle immédiatement. L'idée était de former des cadres qui devaient être les plus qualifiés, les plus nombreux possible pour couvrir les besoins immédiats dans tous les secteurs de la vie Katangaise.

L'organe suprême de l'université de l'Etat à l'Elisabethville, le conseil supérieur, était composé, entre autres, du ministre de l'éducation du Katanga (président), du directeur de l'union minière du haut-Katanga et du représentant du comité spécial du Katanga (CSK). C'est un signe de la vitalité de la collaboration entre l'université de l'Etat à l'Elisabethville, le gouvernement Katangais et les milieux économiques Katangais.

En janvier 1963, la sécession Katangaise prit fin, le Katanga réintégra le Congo et l'université de l'Etat à l'Elisabethville prit le nom de l'université officielle du Congo. En 1971, sous le régime Mobutu, tous les établissements d'enseignement supérieur et universitaire furent, aux termes de l'ordonnance présidentielle N° 71/075 du 06 août 1971, fusionnés en une seule institution appelée université nationale du Zaïre (UNAZA) avec trois campus : Kinshasa, Kisangani et Lubumbashi. Officiellement, le régime du président Mobutu voulait rompre avec l'héritage colonial et créer un type d'homme nouveau compatible avec la révolution Zaïroise « authentique ». La réforme de l'enseignement en général et supérieur et universitaire en particulier répondait au souci du pouvoir en place de résoudre les problèmes que posait la société congolaise en pleine mutation et surtout de disposer des intellectuelles révolutionnaires « authentiques », engagés, dévoués et acquis à la cause du système politique en place, militants convaincus et convaincants.

En fait, la réforme de l'enseignement supérieur et universitaire est intervenue après les incidents des étudiants de l'université de lovanium de Kinshasa de 1969 et de 1971 qui contestaient le système politique en place et après leur enrôlement au sein de l'armée nationale Congolaise. Cette réforme avait un fond plus politique que vraiment culturel dans la mesure où le gouvernement voulait avoir une main mise effective sur l'enseignement supérieur et universitaire dont le contrôle lui échappait jusqu'alors. La reforme lui permettait

donc à la fois de se débarrasser des éléments contestataires ou antirévolutionnaires et de rendre ainsi loyale la ville de Kinshasa.

En même temps, le régime de Mobutu voulait mettre un terme au système d'enseignement linéaire, héritage colonial. En effet, avant cette réforme, les écoles primaires et secondaires étaient considérées comme des étapes d'un processus menant nécessairement à l'université. Le caractère général des connaissances transmises à l'élève et à l'étudiant rendait ces derniers inutiles à la société tant qu'ils n'avaient pas terminé leurs études et obtenu leur diplôme universitaire. La professionnalisation de l'enseignement secondaire, supérieur et universitaire s'imposait alors.

Au Katanga, le système de professionnalisation renforçait les liens entre l'université de Lubumbashi et les milieux industriels et miniers locaux. En effet, la fusion des facultés polytechniques et des sciences, par exemple, a concentré dans la ville cuprifère tous les enseignements de génie minier.

La faculté polytechnique, grâce à ses départements de chimie industrielle, de métallurgie et exploitation des mines, alimentait les industries minières en personnels qualifiés (ingénieurs civils, chimistes, métallurgistes et des mines) tandis que la faculté des sciences, spécialement le département de Géologie, leur livrait des géologues destinés à la fois au département géologique et aux missions de sondage de la Gécamines. L'engagement des finalistes de l'université augmentait progressivement le taux d'Africanisation des cadres dans les différentes entreprises locales.

Dix ans plus tard, en 1981, le régime de Mobutu décida une nouvelle réforme de l'enseignement supérieur et universitaire. Officiellement, si le président Mobutu se séparait de la structure de l'UNASA, c'était à cause de sa mauvaise gestion et de l'importante bureaucratie qui résultait de la reforme précédente.

A l'issu de la promulgation de l'ordonnance présidentielle N°81/143 du 03 octobre 1981, il fut décidé de revenir à une certaine autonomie au niveau des universités et des instituts supérieurs pédagogiques et techniques. Dans ce contexte, les trois campus devinrent des universités autonomes ayant chacune leurs comités de gestion propres, mais gérées par le même conseil d'Administration. C'est donc en 1981 que le campus de Lubumbashi devint l'université de Lubumbashi.

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35 Ilunga Kasongo cité par D.DIBWE DIA MWEMBU, l'université de Lubumbashi 1990-2002. Société en détresse, pari sur l'avenir, éd harmattan, paris, 2002, P.10

La mission dévolue à cette dernière fut triple : assurer la formation des cadres de conception dans les domaines les plus divers de la vie nationale. A ce titre, elle dispense des enseignements inscrits à ses programmes de manière à favoriser l'éclosion des idées neuves et le développement des aptitudes professionnelles ; organiser la recherche scientifique fondamentale et appliquée, orientée vers la solution des problèmes spécifiques du Zaïre, compte tenu néanmoins de l'évolution de la science, des techniques et de la technologie dans le monde. De ces missions se dégage un corollaire : la prise de conscience de notre université de la nécessité de s'ouvrir au milieu qui la génère pour s'y rendre utile. Elle contribue ainsi, non seulement à l'effort de développement de sa microsociété, mais aussi et, par-là, à l'édification de la nation tout entière.

I.1.1. L'université de Lubumbashi dans la tourmente des années 1990

Du haut lieu de savoir à l'espace contestataire, les études universitaires sont d'une importance pour la société. Elles permettent la formation de l'élite dans le développement du pays. L'université entreprend aussi des recherches dont les résultats peuvent servir à répondre aux besoins de la société. Le rôle de l'université est donc incontournable dans le processus du développement d'une société ou d'un pays. A partir de ces deux principales activités, il est clair de constater que l'université offre une des voies, une des stratégies pour accéder au développement.

Selon Ilunga Kasongo : « dire la vérité, éclairer le pouvoir et le peuple, la nation sur son passé, son présent et son avenir, influer à temps sur les mécanismes régulateurs de la société en vue d'assurer à cette dernière une survie valable et un développement », c'est la raison d'être des investissements colossaux dont cette institution a bénéficié.35 Ces investissements relèvent de ressources humaines, des matériels et des moyens financiers qui lui ont été octroyés depuis sa création, pendant la période coloniale jusqu'à la fin des années 1970.

En 1969, les étudiants de l'université de Lovanium (actuelle université de Kinshasa), mécontents de la détérioration de leurs conditions de vie, organisent une marche de protestation pacifique. Les militaires intervinrent et on déplora des morts dans les rangs des manifestants. La situation se détériora davantage en 1971, lors de la commémoration du deuxième anniversaire des victimes de juin 1969. A partir de ce moment, l'université

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congolaise fut considérée par le régime de Mobutu comme un espace contestataire. Il fallait donc la déstructurer et la restructurer à son goût, la détourner de sa mission, la politiser. Mobutu décida la fusion des trois universités en une seule qu'il appela : université nationale du Zaïre (UNAZA). Les étudiants continuaient cependant à bénéficier de la bourse d'étude, de la restauration et du transport.

Un coup d'oeil dans le passé nous permettra d'évaluer les conditions de vie des étudiants avant les années 1990. Ecoutons cette enseignante nous donner ses impressions sur la bourse et la restauration, Ilunga Kabongo : « en entrant en premier graduat (1979-1980), j'étais boursière (75 Zaïre). Les frais de minerval ainsi que les frais de loyer étaient retenus à la source (bourse) jusqu'en 1982. Les cartes pour le restaurant nous étaient d'abord données gratuitement jusqu'en 1983, puis moyennant un montant de 30 Zaïres à partir de 1983, pendant qu'on recevait 150 Zaïres pour la bourse ou mieux 100 Zaïres, parce qu'on nous retenait 50 Zaïres de minerval. Avec les 100 Zaïres qui nous restaient, nous payions la carte de restaurant à 30 Zaïres, le loyer à 60 Zaïres par mois et on restait ainsi avec 64 Zaïres comme argent de poche et cela en tant qu'interne.

Ce qui me fait réfléchir, c'est le fait que nous ayons été la dernière promotion à bénéficier et de la bourse et de la restauration (1983-1984). Ça me fait toujours très mal lorsque je vois maintenant les étudiants se tracasser pour le minerval, le loyer et pour la nourriture. » 36

La bourse, la restauration et le transport furent supprimés au début des années 1980. Cette période coïncide depuis l'inauguration de la politique improductive de Zaïrianisation en novembre 1973. Cette période connait d'abord la chute du cours du cuivre, ensuite, la Gécamines principale pourvoyeuse de l'Etat en devises fortes connait des difficultés d'approvisionnement suite à la détérioration de la structure économique du Congo et à la fermeture de la voie de Lobito. Cette politique a aussi découragé les investisseurs étrangers.

En outre, en 1977 et en 1978, le Congo fut secoué par les deux guerres du Shaba. En 1979, la production du cuivre enregistra une chute vertigineuse. Cette situation économique catastrophique qui n'avait pas pu faire atteindre au président Mobutu son « plan 80 » avait surement pesé dans la décision du gouvernement de mettre fin aux trois « B »,

36 Ilunga Kabongo cité par Donatien DIBWE op cit, P.12

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c'est-à-dire la restauration « bouffe », la bourse et le transport « bus ». Mais, bien avant la détérioration de l'économie congolaise, le président Mobutu, qui n'avait pas pardonné aux étudiants les injures proférées contre lui, avait promis de leur réserver une surprise fâcheuse.

Après la manifestation du 04 juin 1971 à Kinshasa qui avaient poussé le président Mobutu à envoyer un grand nombre d'étudiants dans l'armée, et, après qu'il a créé l'université nationale du Zaïre (UNASA), en fusionnant les trois universités et en les soumettant à un rectorat unique, celui-ci vint prononcer un discours à la commune Kenya, au stade qui portait son nom. Dans ce discours, le président Mobutu dressa la population contre les étudiants en lui disant : « c'est vous qui payez l'impôt et ce sont ces étudiants qui s'amusent avec et pourtant vous ne vivez pas comme eux. Comme ils sont incorrigibles, il faut les punir. Je sais que même celui qui viendra après moi aura chaux avec ces jeunes gens. Comme ils sont ingrats, je vais supprimer tous les avantages dont ils bénéficient au cours de leurs études ». C'est ainsi que petit à petit certains avantages disparurent.

Il s'agit, selon ce témoignage également, de la bourse, de la restauration et du transport des étudiants ou des trois « B » mentionnés plus haut. A partir des années 1980, les étudiants devaient financer eux-mêmes leurs études en payant le minerval. Au début des années 1990, les frais étaient fixés de commun accord entre les représentants des étudiants, les membres du comité de gestion et les représentants des syndicats des enseignants et des administratifs.

Nous allons maintenant décrire la longue période caractérisée par un processus de destruction et de sape de l'espace de savoir qui commence dans les années 1980. La réduction des moyens du développement de l'université de Lubumbashi, les conditions de vie des enseignants comme celles de tous les fonctionnaires et agents de l'Etat ont commencé à se dégrader à partir des années 1980, conséquence à la fois de la négligence dont témoigne le pouvoir de Mobutu à l'égard de l'enseignement et sans doute de la crise économique provoquée par la politique de Zaïrianisations inaugurée en novembre 1973.

L'enseignement ne fut-il pas considéré comme la cinquième roue d'une voiture ? En effet, c'est ainsi que le président Mobutu s'était exclamé dans son discours du 04 février 1981 : « il n'y a pas que l'université qui permet la réussite de l'homme dans la vie ». Cette attitude du président Mobutu montre suffisamment le peu de place qu'occupait l'enseignement dans la mentalité des dirigeants de la deuxième République. Mobutu ne regrettait-il pas lors de son discours prononcé le 24 juin 1989 à Kinkole, la part importante du

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budget consacrée à l'enseignement supérieur et universitaire qui, selon lui, ne rapportait pas grand-chose sur le plan national! D'ailleurs, au fil du temps, ce n'est plus le diplôme universitaire qui garantissait l'emploi et le bien-être du Zaïrois, mais le degré de son militantisme, de son attachement ou, mieux de son dévouement au parti-Etat, le mouvement populaire de la révolution (MPR).

A partir des années 1980, l'Etat n'accorde plus les moyens de sa politique à l'enseignement supérieur et universitaire en général et à l'université de Lubumbashi en particulier. L'université congolaise continua à s'enliser dans la pauvreté. Sa descente aux enfers était une évidence.

L'infime proportion des crédits versés par rapport aux crédits sollicités illustre parfaitement la situation : crédits 1985 : sollicités : 39.763.828 Zaïres, accordés : 9.637.794Zaïres (24,2%), versés : 5.547.110 Zaïres, soit 14% du montant sollicité et 57,6% du montant accordé. Crédits 1986 : sollicités : 116.497.499 Zaïres, accordés : 9.637.794 Zaïres (8,3%), versés : 5.622.043 Zaïres, soit 4,8% du montant sollicité et 58,3% du montant accordé. Crédits 1987 : sollicités : 103.998.149 Zaïres, accordés : 21.110.628 Zaïres (20,3%), versés : 9.485.749 Zaïres, soit 9,1% du montant sollicité et 44,9% du montant accordé. Crédits 1988 : sollicités : 141.804.457 Zaïres, accordés : 15.199.652 Zaïres (10,7%), versés : 4.496.448 Zaïres, soit 3,2% du montant sollicité et 29,6% du montant accordé.

Crédits 1989 : sollicités : 311.949.722 Zaïres, accordés : 21.630.003 Zaïres (6,9%) versés : 18.158.193 Zaïres soit 5,8% du montant sollicité 83,9% du montant accordé. Crédits 1990 : sollicités : 363.494.034 Zaïres, accordés : 138.119.004 Zaïres (38%), versés : 19.777.913 Zaïres soit 4,6% du montant sollicité et 12,1% du montant accordé.37

Une simple opération mathématique nous permet de constater que de 1985 à 1990, les frais de fonctionnement et d'investissement versés par le gouvernement à l'université de Lubumbashi ont été dérisoires dans la mesure où ils n'ont jamais dépassé les 14% des montants sollicités par cette institution d'enseignement. Leurs proportions ont varié entre 3,2% en 1989 et 14% en 1985.

Apres 1990, l'université de Lubumbashi ne reçoit plus les frais de fonctionnement et d'investissement ; elle était condamnée. Elle dut cependant se résoudre à se contenter des frais de scolarité payés par les étudiants. La clochardisation de l'enseignement et de l'étudiant

37 Julien Musinda cité par Donatien DIBWE op cit, P.16

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constitue un des aspects d'un long processus de destruction lente et progressive de l'espace du savoir par le pouvoir politique. Aux travaux de sape du pouvoir s'ajoute la crise économique amorcée en novembre 1973 et accentuée au cours des années 1990 par la longue transition politique conflictuelle et sanglante.

La conjugaison de ces facteurs politiques et économiques a provoqué la dégradation des conditions de vie des enseignants et aussi des étudiants. Le salaire était non seulement irrégulier et insuffisant, mais aussi le pouvoir d'achat s'amenuisait du jour au lendemain. La création en avril 1991 du syndicat des enseignants et des administratifs se situe dans le cadre de la mise sur pied des stratégies de réhabilitation de la fonction enseignante et, partant de lutte contre la clochardisation. Fort de cet esprit professoral, les enseignants conditionnèrent l'organisation de la deuxième session des examens 1990-1991 au paiement d'un salaire minimal pour les mois de juillet, août et septembre 1991 dont le montant variait entre 500 USD pour l'assistant (premier mandat) et 1000 USD pour le professeur ordinaire. Ils n'eurent que des miettes.

Mais la session se déroula tant bien que mal. Face au non-respect par le gouvernement des accords signés, les professeurs prirent les parents à témoins à travers cette lettre publiée dans le journal MUKUBA : « chers parents, en effet, vous êtes en droit de savoir que nos étudiants, vos chers enfants, vivent dans l'incertitude totale du lendemain et dans une tourmente qui ne saurait laisser indifférents que des hommes sans coeur. Vous êtes également sans ignorer que les conditions de vie et de travail de l'enseignement n'ont fait que s'empirer. Devant pareille situation, on ne peut plus une vie inhumaine, les enseignants responsables auxquels vous avez confié vos enfants ne peuvent continuer de se taire.

Aussi, l'association de membres du corps académiques et scientifique de l'université de Lubumbashi (ACASUL) estime de son devoir de vous tenir pleinement informer des faits qui risquent de déboucher sur une catastrophe intellectuelle et sociale. Depuis deux ans, nous avons engagé des négociations avec le gouvernement pour l'amélioration des salaires des professeurs et des conditions générales de travail à l'université. Ces négociations avaient abouti à un accord signé conjointement en date du 11 juin 1991 par le comité de suivi des professeurs et le gouvernement. Le salaire minimum fixé par cet accord n'étant pas entré en application, l'ACASUL a décrété, en date du 02 septembre 1991 une grève à durée illimitée.

Pour des raisons sociales, l'ACASUL avait toutefois décidé unilatéralement de suspendre cette grève pour permettre aux étudiants de passer la deuxième session de l'année problématique 1990-1991. Malgré ce geste de bonne volonté, le salaire minimum n'a pas été appliqué jusqu'au premier février 1992 où le premier ministre NGUZ annonçait solennellement, au stade Mobutu de Lubumbashi, la mise en application d'un autre nouveau taux de salaire. Là, encore, cet autre nouveau barème n'a jamais été appliqué ; ce qui fait qu'à ce jour, le salaire le plus élevé à l'université, c'est-à-dire celui du professeur le plus gradé et le plus ancien, représente environ le quart de celui d'un huissier à la présidence de la république. Nous professeurs, chefs de travaux et assistants regroupés dans l'ACASUL, conscients de la noblesse de notre profession disons NON à la médiocrité. Nous réclamons le rétablissement des conditions saines pour assurer un enseignement de qualité à nos étudiants ».

La politisation de l'institution comme nous venons de le signaler, la réforme de l'enseignement supérieur et universitaire est intervenue après les incidents des étudiants de l'université Lovanium de Kinshasa de 1969 et de 1971 qui contestaient le système politique en place et après leur enrôlement au sein de l'armée nationale congolaise.

Cette réforme avait un fond plus politique que vraiment culturel dans la mesure où le gouvernement voulait avoir une main mise effective sur l'enseignement supérieur et universitaire dont le contrôle lui échappait jusqu'alors. La reforme lui permettait donc à la fois de se débarrasser des éléments contestateurs ou « antirévolutionnaires » et de rendre ainsi dévouée à sa cause la ville de Kinshasa.

La politisation de l'enseignement supérieur et universitaire devint effective avec l'implantation dans chaque institution de l'enseignement supérieur et universitaire en général et au campus de Lubumbashi en particulier, des structures du parti-Etat. Toutes les autorités académiques, à tous les niveaux, étaient devenues des représentants du parti-Etat, membre des comités sectionnaires ou sous sectionnaires du parti, donc des militants convaincus. Une structure de la jeunesse du mouvement populaire de la révolution (JMPR) fut aussi installée parmi la population estudiantine. Des brigades furent formées, ce sont là les oreilles et les yeux du parti et du pouvoir au sein de la communauté universitaire.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry