Centre International De Formation Européenne Master
des Hautes Études Européennes et Internationales
Filière Méditerranéenne
Année académique 2015-2016
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE
L'UNION EUROPÉENNE
MALONGTE NDOMBI Alice Grace
Mémoire rédigé sous la direction
du Dr. Laurent BAECHLER, Directeur de la filière
anglophone
Juin 2016
Centre International De Formation Européenne Master
des Hautes Études Européennes et Internationales
Filière
Méditerranéenne
Année académique 2015-2016
Juin 2016
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
MALONGTE NDOMBI Alice Grace
Mémoire rédigé sous la direction du Dr.
Laurent BAECHLER, Directeur de la filière anglophone
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
i
DÉDICACE
Ames parents,
Toute ma reconnaissance pour les valeurs
qu'ils m'ont inculquées et le sens de l'effort
qu'ils m'ont donné
II
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
REMERCIEMENTS
Nous tenons à exprimer notre gratitude aux personnes
suivantes :
+ A Monsieur Laurent BAECHLER, notre Directeur de recherche,
pour ses conseils avisés. Nous vous sommes reconnaissants pour le temps
que vous avez consacré à la lecture, l'analyse et la correction
de ce travail de recherche.
+ A Monsieur Angel ANGELIDIS, Ancien Conseiller du Parlement
Européen chargé des affaires agroalimentaires et
forestières, pour son expertise sur la stratégie
forestière de l'Union Européenne. Nous vous sommes
profondément reconnaissants pour votre disponibilité et la
passion que vous avez éveillée en nous pour un sujet aussi
complexe.
+ A Monsieur Parfait OUMBA, spécialiste du Droit de
l'environnement, pour son soutien, les conseils qu'il nous a prodigués
et son travail de relecture.
+ Aux membres de la Direction Générale «
Agriculture et Développement Rural » de la Commission
Européenne, Maria GAFO et Maroulia VLACHOU, pour les documents et
informations transmis.
+ A l'ensemble du corps professoral de la filière
méditerranéenne du Master en Études Européennes et
Internationales, pour leur encadrement académique.
+ A tous ceux qui ont contribué de près ou de
loin à la rédaction de cette étude.
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
DÉCLARATION D'AUTHENTICITÉ
Je soussigné, MALONGTE NDOMBI Alice Grace, certifie que
ce mémoire a été conçu et rédigé
personnellement. Toutes les sources ont été clairement
mentionnées.
Ce mémoire n'a jamais été
présenté dans le cadre d'une autre formation et n'a pas encore
fait l'objet d'une publication.
III
Lieu et Date : Istanbul, le 11 Juin 2016.
iv
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
SIGLES ET ABRÉVIATIONS
v AGFORWARD : Agroforestry that Will Advance
Rural Development
v APV : Accord de Partenariat Volontaire
v CCNUCC : Convention-Cadre des Nations Unies
sur les Changements Climatiques
v CDD : Commission des Nations Unies pour le
Développement Durable
v CEE : Communauté Économique
Européenne
v CMPFE/MCFPE: Conférence
Ministérielle pour la Protection des Forêts en Europe
v CNUED : Conférence des Nations Unies
sur l'Environnement et le Développement
v COMAGRI : Commission du Parlement
Européen pour l'Agriculture et le Développement
v COP : Conférence des Parties
v CPF: Comité Permanent Forestier
v EFFIS : European Forest Fire Information
System
v ENPI-FLEG: European Neighborhood Policy -
Forest Law Enforcement and Governance
v EUROFOR : Europe and the Forest
v FAO : Organisation des Nations Unies pour
l'Alimentation et l'Agriculture
v FEADER : Fonds Européen Agricole pour
le Développement Rural
v FEDER : Fonds Européen de
Développement Économique et Social
v FEOGA : Fonds Européen d'Orientation
et de Garantie Agricole
v FIF : Forum Intergouvernemental sur les
Forêts
v FLEGT : Forest Law Enforcement, Governance
and Trade
v FNUF : Forum des Nations Unies sur les
Forêts
v FP7 : Septième programme-cadre de
recherche et de développement technologique
v
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
v FSE : Fonds Social Européen
v ISPA : Instrument Structurel de
Préadhésion
v LIFE : Instrument Financier pour
l'Environnement
v MARS : Monitoring Agriculture with Remote
Sensing
v MERA : MARS and Environmental Related
Activities
v OIF : Organisation Internationale de la
Francophonie
v ONF : Office National des Forêts
v ONG : Organisation Non Gouvernementale
v ONU : Organisation des Nations Unies
v PAC : Politique Agricole Commune
v PDR : Programme de Développement
Rural
v PECO : Pays d'Europe Centrale et Orientale
v PED : Pays en Développement
v PFN : Programme Forestier National
v PHARE : Poland and Hungary Assistance for
restructuring of the Economy
v PIB : Produit Intérieur Brut
v PIF : Panel Intergouvernemental sur la
Forêt
v PNUE : Programme des Nations Unies pour
l'Environnement
v PSE : Parti Socialiste Européen
v REDD : Reducing Emissions from Deforestation
and Forest Degradation
v SAPARD : Special Accession Programme for
Agriculture and Rural Development
v TFUE : Traité sur le Fonctionnement de
l'Union Européenne
v TOM : Territoire d'Outre mer
v TUE : Traité sur l'Union
Européenne
v UE : Union Européenne
v UICN : Union Internationale pour la
Conservation de la Nature
v WWF : World Wild Fund
vi
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
SOMMAIRE
DÉDICACE i
REMERCIEMENTS ii
DÉCLARATION D'AUTHENTICITÉ iii
SIGLES ET ABRÉVIATIONS iv
SOMMAIRE vi
RÉSUMÉ ix
ABSTRACT x
INTRODUCTION GÉNÉRALE 1
I- CONTEXTE DE L'ÉTUDE 1
II- DÉLIMITATION DE L'ÉTUDE 3
III- OBJECTIFS DE L'ÉTUDE 4
IV- INTÉRÊT DE L'ÉTUDE 5
V- CADRE CONCEPTUEL 6
VI- REVUE DE LA LITTÉRATURE 8
VII- PROBLÉMATIQUE 16
VIII- HYPOTHÈSES 17
IX- CADRE MÉTHODOLOGIQUE 18
X- EXPLICATION ET JUSTIFICATION DU PLAN 21 CHAPITRE I :
UNE VISION QUI S'INSCRIT DANS UNE PERSPECTIVE
ÉVOLUTIVE 23
SECTION 1 : LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE 1998 23
SECTION 2 :LE PLAN D'ACTION DE L'UE EN FAVEUR DES FORETS 29
SECTION 3 : LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE 2013 33
CHAPITRE II : RAPPORTS ENTRE LA POLITIQUE DE
DÉVELOPPEMENT
RURAL ET LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UE 36
vii
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
SECTION 1 : LES FORETS DANS LE MONDE RURAL 37
SECTION 2 :L'AGROFORESTERIE, UNE PRATIQUE ENCOURAGÉE
PAR L'UNION EUROPÉENNE 43
CHAPITRE III : LES FORETS COMME FACTEUR DE
COOPÉRATION
ENTRE L'UE ET LE MONDE EXTÉRIEUR 50
SECTION 1 : L'ACTION FORESTIÈRE EN LIEN AVEC
L'ADHÉSION DE
NOUVEAUX ÉTATS 51
SECTION 2 :L'ACTION POUR L'AMÉLIORATION DE LA
GOUVERNANCE FORESTIÈRE DANS LES PED 56
CHAPITRE IV : LA PERSISTANCE DE QUESTIONS MAJEURES ET LES
PERSPECTIVES POUR LA CONSTRUCTION D'UNE UNION
EUROPÉENNE FORESTIÈRE 61
SECTION 1 : LA PERSISTANCE DE QUESTIONS MAJEURES 61
SECTION 2 : PERSPECTIVES EN VUE DE LA CONSTRUCTION D'UNE
UNION EUROPÉENNE FORESTIÈRE 67
CONCLUSION GÉNÉRALE 71
BIBLIOGRAPHIE 73
TABLE DES MATIÈRES 81
VIII
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
LISTE DES FIGURES ET TABLEAUX
? FIGURES
Figure 1 Le cycle des politiques publiques 20
Figure 2 Matrice du Plan d'action de l'UE en faveur des
forêts 31
Figure 3 Dépenses réalisées en
comparaison des ressources allouées 43
Figure 4 Avantages économiques, environnementaux et
sociaux de l'agroforesterie
46
Figure 5 L'agroforesterie dans les Programmes de
Développement Rural 47
Figure 6 Initiatives de l'UE ayant un impact sur les
forêts 66
? TABLEAUX
Tableau 1 Cadre d'évaluation de la gestion durable des
forêts au niveau
paneuropéen 15
Tableau 2 Dépenses réalisées en
comparaison des ressources allouées 42
Tableau 3 Ressources allouées à la mesure 222 et
Dépenses effectives (PDRs
2007-2013) 48 Tableau 4 Indicateurs de résultats
présentant le taux d'implémentation de la
mesure 222 (PDRs 2007-2013) 48 Tableau 5 Montant des
financements accordés aux secteurs agricole et environnemental dans le
cadre du programme PHARE pour la période 1990-1999
(En million d'euros) 53 Tableau 6 Dotation
budgétaire annuelle entre 2000 et 2003 (en millions d'euros)54 Tableau 7
Estimation statistique de la mesure forestière dans le programme
SAPARD pendant la période 2000-2006 55
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
RÉSUMÉ
Ce mémoire propose d'étudier la stratégie
forestière de l'Union Européenne et s'inscrit dans un contexte
mondial de plus en plus marqué par la prépondérance des
questions climatiques.
Depuis quelques années déjà, les
forêts sont au centre des débats tant médiatiques,
scientifiques que sociopolitiques. Les gouvernements, les organisations
internationales ainsi que les chercheurs se penchent sur la question de leur
gestion durable. Il convient de dire que cet écosystème joue un
rôle essentiel sur la régulation du climat, la préservation
de la biodiversité et des sols, mais aussi sur la santé et la
survie des populations qui vivent à ses dépens directement ou
indirectement.
Ayant pris conscience des enjeux qui entourent l'exploitation
responsable des forêts, l'Union Européenne a organisé
plusieurs forums et pris part à de multiples conférences
internationales concernant la protection et la préservation de leur
biodiversité. Il s'agit entre autres du Xème Congrès
forestier mondial (Paris 1991), de la Conférence des Nations Unies sur
l'Environnement et le Développement (Rio 1992) et des conférences
interministérielles sur la protection des forêts en Europe
(Strasbourg 1990, Helsinki 1993, Lisbonne 1998, Vienne 2003, Varsovie 2007,
Oslo 2011). A travers ces différentes initiatives européennes et
internationales, l'Union Européenne s'est engagée à
participer de façon dynamique à la conservation des massifs
forestiers. C'est dans cette optique qu'elle met sur pied une stratégie
forestière en 1998. Cette stratégie a connu une évolution
en 2013 avec la mise en place d'une nouvelle approche. Cependant, la
stratégie est fondée sur l'harmonisation des politiques
forestières des États membres étant donné que
l'Union Européenne ne dispose pas encore de compétences
nécessaires à l'élaboration d'une politique
forestière commune.
ix
Mots-clés : Forêt,
stratégie, stratégie forestière.
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
ABSTRACT
This paper proposes to study the forestry strategy of the
European Union and is part of a global context increasingly marked by the
preponderance of climate issues.
For several years, forests are central to the media,
scientific and sociopolitical debates. Governments, international organizations
and researchers address the issue of their sustainable management. This
ecosystem plays a vital role in regulating climate, preserving biodiversity and
soil, and also on the health and survival of people living at its expense
directly or indirectly.
Aware of the issues surrounding the sustainable exploitation
of forests, the European Union has organized several forums and participated in
numerous international conferences on the protection and conservation of their
biodiversity. This includes the tenth World Forestry Congress (Paris 1991), the
United Nations Conference on Environment and Development (Rio 1992) and
inter-ministerial conferences (Strasbourg 1990, Helsinki 1993, Lisbon 1998,
Vienna 2003, Warsaw 2007, Oslo 2011). Trough these various European and
international initiatives, the EU has committed to participate vigorously in
the conservation of forests. It is in this light that the EU has established a
forestry strategy in 1998. This strategy has evolved in 2013 with the
establishment of a new approach. However, the strategy is based on the
harmonization of national forest policies, since the European Union does not
yet have skills to develop a common forestry policy.
X
Key Words: Forests, Strategy,
Forestry strategy.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 1
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
INTRODUCTION GÉNÉRALE
I- CONTEXTE DE L'ÉTUDE
Les premières interrogations sur la protection de
l'environnement se sont matérialisées par l'organisation de
« sommets de la Terre ». Ces sommets, meetings
décennaux entre dirigeants du monde, permettent de déterminer les
moyens de promouvoir le développement durable sur toute la
planète. Depuis 1972, cinq rencontres ont eu lieu : Stockholm (1972),
Nairobi (1982), Rio de Janeiro (1992), Johannesburg (2002) et une autre que
l'on a appelé « Rio+20 » car elle s'est tenue pour la
seconde fois à Rio de Janeiro (2012). La première rencontre a
été l'occasion de placer les questions écologiques au
centre des préoccupations internationales. A l'issue de ce sommet, le
Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE) a vu le jour. En 1987,
suite à l'échec de la conférence de Nairobi, la Commission
mondiale sur l'environnement et le développement de l'ONU, publie un
rapport sur le développement durable intitulé « Notre
avenir à tous ». Communément connu comme le Rapport
Brundtland, du nom de la norvégienne ayant présidé la
Commission, il a été utilisé comme base au premier sommet
de Rio de Janeiro. La Conférence des Nations Unies sur l'Environnement
et le Développement (CNUED) qui s'est tenue en 1992 au Brésil
apparaît comme le plus important des sommets de la Terre car elle est le
symbole d'un consensus mondial sur la nécessité de
protéger l'environnement. Réunissant une centaine de chefs
d'État et de gouvernements, ainsi que plusieurs représentants
d'ONG, le sommet s'est conclu par l'adoption de plusieurs documents : Le
programme Action 21 (encore appelé Agenda 21), la Déclaration de
Rio sur l'environnement et le développement, la Convention-cadre des
Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC)', la
Convention des Nations Unies sur la diversité biologique et la
Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification. Ces
différents documents marquent le début
1 Pour l'application de cette convention, le
protocole de Kyoto qui vise la réduction des gaz à effet de serre
a été conclu en 1997.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 2
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
d'un questionnement sur une gestion durable des forêts.
Cependant les États n'ont pas pu aboutir à l'émergence
d'un accord légalement contraignant sur les forêts. En
compensation, une « Déclaration de principes, non juridiquement
contraignante mais faisant autorité, pour un consensus mondial sur la
gestion, la conservation et l'exploitation écologiquement viable de tous
les types de forets » a été adoptée.
Après le sommet de Rio, la Commission des Nations Unies
pour le Développement Durable (CDD) a poursuivi le dialogue
international sur les forêts en établissant deux nouveaux
organismes intergouvernementaux : il s'agit du Panel Intergouvernemental sur la
Forêt (PIF) mis sur pied entre 1995 et 1997, ainsi que du Forum
Intergouvernemental sur les Forêts (FIF) créé entre 1997 et
2000. Cependant, malgré ces initiatives, les États n'ont pas pu
s'accorder sur la création d'un Fonds global pour les forêts dont
le but serait de financer la gestion durable des forêts. D'autre part, au
vu de l'urgence que représente la lutte contre l'exploitation
illégale des forêts, un Forum des Nations Unies sur les
Forêts (FNUF) a été créé en 2000. Il est la
plateforme qui promeut la gestion et la conservation de tous types de
forêts. Cette initiative a encouragé la lutte contre la
déforestation ainsi que l'harmonisation des politiques
forestières au niveau global.
A ce jour, il n'existe donc aucun accord spécifique
contraignant sur la protection des forêts dans leur
totalité2. Dans le souci de réglementer le commerce de
certaines matières premières telles que le bois d'oeuvre, trois
accords sur les bois tropicaux ont été signés
respectivement en 1983, 1994 et 2006. Malgré leur portée
limitée, étant donné qu'ils ne prennent en compte que
« le bois tropical non conifère à usage industriel
», ces accords sont les seuls instruments contraignants qui
s'occupent spécifiquement de la lutte contre le
déboisement3. Toutefois, une avancée notable peut
être relevée avec l'Accord de Paris signé lors de la
20ème Conférence de l'ONU pour lutter contre le
changement climatique (COP21). Cet accord juridiquement contraignant et
universel sur le climat comporte un article spécial concernant la
protection des forêts. L'article 5, puisqu'il s'agit de ce dernier,
reconnaît le rôle que jouent les forêts en tant que puits de
carbone et dès
2Caroline DOMMEN,
Philippe CULLET, Droit international de l'environnement: textes
de base et références, Londres, Kluwer Law International, 1998,
P.304.
3 Ibid, P.305
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 3
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
lors leur importance dans l'atténuation des changements
climatiques. Il invite ainsi les pays à adopter des pratiques de gestion
durable des forêts et met en avant le REDD+, initiative internationale
qui vise la réduction des émissions de gaz à effet de
serre liées à dégradation et à la destruction des
forêts.
L'espace paneuropéen, très concerné par
les questions écologiques, a fait naître une Conférence
Ministérielle pour la Protection des Forêts en Europe (MCPFE) en
1990. Ce processus régional, qui compte à ce jour quarante-six
pays européens dont les membres de l'UE, est la plateforme qui permet le
dialogue et la coopération sur des questions ayant trait aux
forêts. De plus, la Conférence encourage la participation de pays
non-européens et d'organisations internationales qui revêtent le
statut d'observateurs. Depuis ses débuts en 1990 à ce jour, six
conférences ministérielles se sont déroulées :
Strasbourg (1990), Helsinki (1993), Lisbonne (1998), Vienne (2003), Varsovie
(2007) et Oslo (2011).
II- DÉLIMITATION DE L'ÉTUDE
La présente étude est circonscrite autour trois
principaux aspects: d'abord spatial qui rend compte de l'espace
géographique (A), ensuite, temporel (B), et, enfin matériel qui
traduit le champ disciplinaire qui encadre le thème de recherche (C).
A- Délimitation spatiale
Nous avons choisi l'espace de l'Union Européenne comme
cadre d'étude. Ce choix peut être justifié au double plan
du statut de l'UE par rapport au régime international des forêts
et de l'importance de ce secteur dans son économie. En effet, l'Union
Européenne joue un rôle de premier plan dans la mise sur pied d'un
accord juridiquement contraignant sur les forêts. Malgré le fait
qu'un accord pareil n'existe pas encore, l'Union s'est engagée à
lutter pour le renforcement et la mise en oeuvre des mesures internationales
existantes. Elle s'est également engagée à encourager
toute initiative ayant trait aux questions forestières. Afin de stimuler
une évolution du régime international des forêts, elle a
même entamé les négociations pour un accord pareil au sein
de l'espace paneuropéen dans le cadre de la Conférence
Ministérielle pour la Protection des Forêts en Europe. Ainsi,
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 4
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
nous pouvons constater que l'existence d'une stratégie
en faveur des forêts et du secteur forestier concourt à renforcer
la puissance normative de cette organisation.
B. Délimitation temporelle
Ce travail de recherche couvre la période de 1998
à 2013.En effet, après diverses tentatives qui n'ont pu aboutir
à l'émergence d'une politique forestière commune, c'est en
1998 que la stratégie forestière de l'Union Européenne est
formalisée par une Résolution du Conseil du 15 décembre
1998. Cette première stratégie a été mise en oeuvre
entre 1998 et 2005, période après laquelle elle a
été évaluée. Les conclusions de l'évaluation
réalisée par les services de la Commission ont conduit à
la création d'un plan d'action pour les forêts en 2006. Ce dernier
a été mis en oeuvre entre 2007 et 2012. L'année 2013,
quant à elle, marque l'émergence d'une nouvelle stratégie
de l'Union Européenne en faveur des forêts et du secteur
forestier. On peut ainsi comparer les différentes approches
adoptées par ces trois politiques intrinsèquement liées
car elles visent le même but qui est la gestion durable et
multifonctionnelle des forêts.
C. Délimitation matérielle
Cette étude porte sur la stratégie
forestière de l'Union Européenne. L'examen de cette question
commande à ce qu'une incursion soit faite dans la sociologie de l'action
publique. Effectivement, cette branche de la sociologie politique a pour
vocation de saisir l'État. Nous voulons nous inscrire dans une
perspective de Policy Analysis afin de comprendre les processus qui
sous-tendent l'émergence et la mise en oeuvre, l'évaluation et
l'évolution de la stratégie forestière de l'UE.
III- OBJECTIFS DE L'ÉTUDE
Cette étude revêt un objectif
général qui s'accompagne de deux objectifs spécifiques. La
présente recherche a pour objectif général
d'évaluer la contribution de la stratégie forestière de
l'Union Européenne aux objectifs prévus
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 5
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
dans le TUE (Article 3). Concrètement, il sera question
de voir comment les activités menées dans le cadre de cette
stratégie permettent à l'Union Européenne
d'accroître la compétitivité de sa filière bois,
d'assurer le progrès social et le développement rural, de
protéger et d'améliorer la qualité de l'environnement.
Pour ce faire, il sera question :
? de comprendre la vision qui encadre la stratégie
forestière de l'Union Européenne.
? d'apprécier les mesures prises afin
d'améliorer la coordination entre la stratégie forestière
et les autres politiques communautaires.
IV- INTÉRÊT DE L'ÉTUDE
Le développement durable et son triptyque
équité sociale - efficacité économique - protection
de l'environnement ont revêtu une importance planétaire. Les
forêts, qui ont à la fois une valeur économique et une
valeur sociale, sont au coeur des accords internationaux et des plans d'action
régionaux. C'est dans ce contexte que nous voulons évaluer la
stratégie forestière de l'Union Européenne. Il est urgent
de questionner son implémentation. De plus, nous nous interrogeons sur
les résultats atteints et les difficultés qui se sont
révélées lors de sa mise en oeuvre.
A- Intérêt scientifique
De multiples études ont été
déjà menées sur les forêts notamment en ce qui
concerne les politiques y afférentes. Notre travail, sans
prétendre épuiser la question, apporte sa modeste contribution
à l'appréhension de la stratégie forestière de
l'Union Européenne. Nous comptons, à partir d'une lecture globale
de ce plan d'action communautaire, participer à la recherche et à
l'élaboration de la littérature dans le domaine de la mise en
valeur et de la gestion des forêts en Europe. L'intérêt au
plan scientifique est d'autant plus grand que le thème nous permet de
faire une évaluation de ladite stratégie.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 6
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
B- Intérêt social
D'un point de vue social, la forêt apparaît comme
un bien commun. Considérant les différents services qu'elle rend
à l'humanité tels que la purification de l'air, cet espace doit
être protégé. Les espaces boisés couvrent plus de
40% du territoire de l'Union Européenne et grâce aux
différents aménagements forestiers cette superficie a crû
de 0,4% par an pendant les dernières décennies4. De ce
fait, mettre en place des instruments de politique publique pour veiller
à leur conservation devient une préoccupation majeure.
L'intérêt d'un tel sujet réside dans l'impératif de
mettre en pratique « un développement qui répond aux
besoins du présent sans compromettre la capacité des
générations futures à répondre aux leurs
»5.
V- CADRE CONCEPTUEL
Dans le cadre de la présente étude, les concepts
de base qui feront l'objet de clarification sont : Stratégie,
forêt et stratégie forestière.
? Stratégie
Le concept de la « Stratégie » est
issu du monde de la guerre. Ce terme a été popularisé par
le général prussien Carl Von Clausewitz à travers son
traité De la guerre paru en 18326. La
stratégie apparaît comme « L'usage des combats au service
des fins de la guerre »7. De cette définition, il
ressort que la stratégie est un ensemble de moyens qui permettent
d'atteindre des objectifs. Dans le contexte de la guerre, les combats
permettent de mettre en oeuvre ces moyens afin de vaincre l'ennemi. A partir du
XXème siècle, le mot « stratégie » est
appliqué à d'autres domaines notamment l'économie, la
sociologie des organisations8, le
4COM (659) final, P.2.
5 Rapport Brundtland, Avril 1987, Chapitre 2, P.40.
http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/sites/odyssee-developpement-durable/files/5/rapportbrundtland.pdf
6Jean Marie DUCREUX, René ABATE, Nicolas
KACHANER, Le grand livre de la Stratégie, Paris, Eyrolles,
2009, P.16.
7Carl Von CLAUSEWITZ, De la
guerre, Paris, Ed Gérard
Lebovici, 1989, P.110.
8Dans leur ouvrage intitulé L' Acteur et
le Système (1977), Michel CROZIER et Erhard FRIEDBERG l'utilisent
notamment pour mettre sur pied une grille d'analyse appelée «
analyse stratégique ». Elle consiste à étudier la
manière dont les acteurs poursuivent leurs objectifs à travers
les actions qu'ils entreprennent et les ressources dont ils disposent au sein
d'une organisation donnée.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 7
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
développement durable. On parle notamment de «
stratégie d'entreprise », d' « acteur
stratégique » ou encore de « stratégie de
développement ». Dans le cadre de ce travail, la
stratégie est un plan d'actions dont la mise en oeuvre permet
d'atteindre des objectifs. Elle consiste donc à définir les buts
et à choisir les modes d'action ainsi que les modes d'allocation des
ressources disponibles qui permettront d'atteindre ces finalités.
? Forêt
Les conceptions du terme « forêt »
sont nombreuses et sujettes à controverses. Dans le cadre des
Organisations Internationales, cette définition prend en compte
plusieurs critères : la surface, la densité, la hauteur des
arbres, le taux de recouvrement du sol, la situation géographique. De ce
fait, ce que l'on appelle forêt au Sahel diffère de ce qu'il en
est en Europe9. Le Programme des Nations Unies pour l'Environnement
(PNUE) classifie les forêts en deux groupes en se basant sur leur seuil
de couverture. Ainsi, l'on distingue les « forêts fermées
» (plus de 40% de couverture) des « forêts ouvertes
» (10 à 40% de couverture).Quant à l'Organisation des
Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), une forêt est
un ensemble de terres couvrant une superficie supérieure à 0,5
hectare, avec des arbres ayant une hauteur de plus de 5 mètres et un
couvert arboré dépassant 10%. Cette définition exclue les
terres destinées à l'agriculture ou au paysage urbain 10
.Ces dernières sont regroupées sur l'expression «
autres terres boisées ».Dans le cadre de notre
étude, nous utiliserons la définition retenue lors de la
septième conférence (Marrakech 2001) des parties au Protocole de
Kyoto à la Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements
Climatiques (CCNUCC) adopté en 1998 et ratifié à ce jour
par 191 États membres de l'ONU. Ladite définition ne fait aucune
différence entre « forêt » et « autres
terres boisées » :
9Au Sahel, un boisement est considéré
comme forêt lorsque son taux de recouvrement atteint 10 % alors qu'en
Europe, c'est à partir d'un taux de recouvrement égal 20 % et
d'une superficie supérieure à un demi-hectare qu'une terre est
appelée « forêt ».
10 FAO/Programme d'évaluation des ressources
forestières, Mise à jour de l'évaluation des
ressources forestières mondiales à 2005 : Termes et
définitions, Rome, 2005, PP. 16 et 17.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 8
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
On entend par forêt une terre d'une superficie
minimale comprise entre 0,05 et 1 hectare portant des arbres dont le houppier
couvre plus de 10 à 30% de la surface (ou ayant une densité de
peuplement équivalente) et qui peuvent atteindre à
maturité une hauteur minimale de 2 à 5 mètres. Une
forêt peut être constituée soit formations denses dont les
divers étages et le sous-bois couvrent une forte proportion du sol, soit
de formation claire. Les jeunes peuplements naturels et toutes les plantations
composées d'arbres dont le houppier ne couvre pas encore 10 à 30%
de la superficie ou qui n'atteignent pas encore une hauteur de 2 à 5
mètres sont classés dans la catégorie des forêts, de
même que les espaces faisant normalement partie des terres
forestières qui sont temporairement déboisées à la
suite d'une intervention humaine telle que l'abattage ou de
phénomènes naturels, mais qui devraient redevenir des
forêts11.
Dans le cadre de ce mémoire, nous allons
considérer la forêt comme un espace recouvert d'arbres.
? Stratégie Forestière
Nous considérons qu'une stratégie
forestière est un plan d'action dont le but est la gestion durable des
forêts. Elle définit un certain nombre de principes et d'actions
dont la mise en oeuvre est nécessaire à la protection et à
la conservation des espaces boisés et de leur biodiversité.
VI- REVUE DE LA LITTÉRATURE
L'Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation
évalue la couverture forestière mondiale à environ 31% des
terres émergées12. Les forêts fournissent divers
biens et services à l'Humanité, d'où leur importance
indéniable. En effet, les écosystèmes forestiers
remplissent des fonctions multiples et variées, allant de
l'économique au culturel. C'est la raison pour laquelle l'on emploie
généralement le concept de « rôle multifonctionnel
».
11 CCNUC, Rapport de la Conférence des
Parties sur les Travaux de sa septième session tenue à Marrakech
du 29 Octobre au 10 Novembre 2001, Addendum 1, Partie 2 : Mesures prises
par la conférence des parties, Vol I, P. 60,
http://unfccc.int/resource/docs/french/cop7/cp713a01f.pdf
12FAO, Évaluation des ressources forestières
mondiales, 2010.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 9
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
La « multifonctionnalité »est une
notion qui a émergé dans la sphère internationale dans les
années 1990 à la suite des débats sur le
développement durable13. Pour David ABLER, elle est la
caractéristique de toute activité qui peut produire
différents résultats et ainsi contribuer à plusieurs
objectifs à la fois14.Ce concept a été mis au
point afin de concilier la fonction de production et les fonctions
complémentaires assurées par des activités telles que
l'agriculture. Sa prise en compte dans les arènes internationales et
nationales se justifie à travers le voeu de réduire les
externalités négatives des activités humaines sur
l'environnement.
En ce qui concerne les écosystèmes forestiers,
on leur attribue trois principaux rôles : un rôle
socioéconomique, un rôle écologique et un rôle
culturel. Sur le plan socioéconomique. Sur le plan
socioéconomique, les forêts fournissent des ressources ligneuses
et des ressources non-ligneuses. Il s'agit de la fonction la plus ancienne
reconnue aux forêts. Le bois est la principale matière
première recherchée en forêt. Il tient une place
substantielle dans l'économie des pays qui sont dotés
d'importantes ressources forestières tels que le Brésil, le Congo
ou la Finlande. Le bois est utilisé à travers de nombreuses
activités telles que l'ameublement, la construction, la cuisine, le
chauffage, la décoration, etc., d'où l'importance de la
filière-bois. Le secteur forestier est l'un des plus importants dans
l'économie de l'Union Européenne, étant donné que
cette dernière est le premier marché bois du monde. L'ensemble de
la production de cette filière s'évalue à environ 150
milliards d'ECU, soit 3% du PIB de l'Union. L'ensemble de la filière
bois (sylviculture, industries du bois, du meuble et du papier...) contribuent
de façon significative à l'emploi. Le nombre total de personnes
employées dans la filière bois de l'UE peut être
évalué à 3.5 millions15. D'autre
13 Elodie VALETTE et al., «
Émergence de la notion de service environnemental dans les
politiques agricoles en France : L'ébauche d'un changement de
paradigme», Vertigo, Volume 12, N°3, 2012,
http://vertigo.revues.org/12925,
consulté le 1/06/2016.
14David ABLER, « Multifunctionality,
agricultural policy, and environmental policy », Agriculture and Resource
Economics Review, N°33, 2004, PP.8-17.
15Commission Européenne, Communication de
la Commission au Parlement, au Conseil, au Comité Économique et
Social Européen et au Comité des Régions : Une nouvelle
stratégie de l'UE pour les forêts et le secteur forestier
[COM (2013) 659 Final], Bruxelles, P.8.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 10
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
part, l'UE est le premier producteur mondial de produits
industriels provenant du bois et le deuxième consommateur de bois au
monde après les États-Unis16.
Outre le bois, la forêt fournit d'autres produits tels
que le gibier, le lège, les substances médicinales, les fruits,
les champignons, le caoutchouc, les ingrédients culinaires... Dans la
plupart des zones rurales du monde, les populations dépendent fortement
de la forêt pour leur subsistance alimentaire à partir
d'activités telles que la chasse et la cueillette. C'est par exemple le
cas en Afrique centrale où la récolte d'insectes de la
forêt tels que les chenilles contribue fortement à la
sécurité alimentaire 17 . Plusieurs industries de
transformation dépendent des ressources forestières pour la
production de leurs biens : papier, cosmétiques, alimentaire,
pharmaceutique. De plus, l'exploitation forestière est source de revenus
pour les ménages.
S'agissant des services environnementaux et culturels des
écosystèmes forestiers, ils n'ont pas une valeur marchande. C'est
en ce sens qu'ils sont considérés comme un bien commun à
l'Humanité. Sur le plan environnemental, il faut noter que les
forêts assurent la régulation du climat. Grâce à la
photosynthèse, les arbres captent du carbone et sont alors
considérés comme des « puits de carbone » ou
les « poumons de la Terre ». Lorsqu'il y a
déforestation, les gaz à effet de serre se propagent en grande
quantité dans l'atmosphère. Ce rôle a d'ailleurs
été reconnu dans le Protocole de Kyoto. Par ailleurs, les
forêts permettent le refroidissement de la Terre à travers
l'évapotranspiration et la création de nuages. Également,
les forêts sont un réservoir de biodiversité. Dans sa
Communication sur une nouvelle stratégie de l'UE pour les forêts
et le secteur forestier, la Commission a reconnu que les
écosystèmes forestiers sont un habitat pour diverses
espèces animales et végétales : « Of all biotopes
in Europe, forests are home for the largest number of species on the continent
and provide important environmental functions, such as conservation of
biodiversity and the
16 Geneviève REV et Muriel MAHE, «
Perspectives pour la stratégie forestière européenne
», Étude externe commandée par le Parlement
Européen (PE. 355.366), Sous la direction du Dr. Angel ANGELIDIS,
Luxembourg, Juillet 2005, P.23.
17FAO, Contribution des insectes de la forêt
à la sécurité alimentaire, Produits forestiers non
ligneux, Document de travail N°1, 2004.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 11
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
protection of water and soil18». De
plus, les forêts jouent un rôle important dans la purification de
l'eau. Grâce à leurs racines, les arbres absorbent les polluants,
métaux lourds et autres substances nocives présentes dans les
nappes phréatiques.
Sur le plan culturel, « la forêt crée
des liens. Refuge des esprits, des légendes et des génies, elle
donne du sens. C'est l'un des services intangibles que l'économie
actuelle ne sait pas répondre19 ». Pour Nicole
HUYBENS, les forêts n'ont pas qu'une fonction de production, celle qui
est le plus mise en valeur par l'économie conventionnelle. Elle
considère que « l'économie conventionnelle
néglige une grande partie des liens des humains avec la
forêt20 ». Les forêts ont une valeur
culturelle et spirituelle pour les communautés qui vivent alentours
(pygmées d'Afrique centrale, Indiens de l'Amazonie). C'est dans cette
optique qu'elles la préservent. En outre, les forêts ont une
fonction récréative (chasse, écotourisme) et participent
à la diversification du paysage.
Cependant, au fur et à mesure que les années
avancent, la couverture forestière mondiale diminue sous l'effet des
phénomènes naturels (tempêtes, changements climatiques...)
et des pressions sociales exercées sur les forêts par les humains
à travers leurs activités quotidiennes. Afin que les
générations présentes profitent pleinement des biens et
services offerts par la forêt sans pour autant compromettre ceux auxquels
peuvent bénéficier les générations futures, il est
nécessaire de mettre en oeuvre une gestion durable de leurs ressources.
L'Organisation Internationale des Bois Tropicaux définit la gestion
durable des forêts comme une « gestion des forêts visant
à atteindre des objectifs clairement définis concernant la
production de biens et de services forestiers désirés, sans
porter atteinte à leur valeur intrinsèque ni compromettre leur
productivité future et dans entraîner d'effets indésirables
sur l'environnement physique et social21 ». Lors du Sommet
de la Terre de Rio de Janeiro en 1992, les États ont convenu sur du fait
que « les ressources et les terres forestières doivent
être gérées d'une façon écologiquement viable
afin de répondre aux besoins sociaux, économiques,
18 Communication de la Commission au Conseil et au
Parlement Européen/ Rapport sur l'implémentation de la
Stratégie forestière de l'UE [COM (2005) 84 final], P.2.
19 OIF, Forêts et Humains : Une
communauté de destins, Points de repère, N°21, 2012,
P.19.
20 Ibid.
21
http://www.itto.int/fr/sustainableforestmanagement/,
consulté le 03/06/2016.
Maintenance and appropriate enhancement of forest
resources and their contribution to global carbon cycles
Forest area
Age structure and/or diameter distribution of forest
Growing stock
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
écologiques, culturels et spirituels des
générations actuelles et futures 22». La
notion de « gestion durable des forêts »
découle du changement de paradigme qui a conduit à la prise en
compte des services non marchands rendus par les écosystèmes
forestiers. Depuis une vingtaine d'années, cette notion est au coeur de
l'agenda politique international23. Comme le souligne Parfait OUMBA,
la gestion durable ne recouvre pas le même sens pour tout le
monde24. En général, l'on reconnaît que la
gestion durable des forêts doit garantir leur rôle multifonctionnel
; on parle alors de « gestion multifonctionnelle ».
Néanmoins, les critères et indicateurs de la gestion durable des
forêts varient d'un espace géographique à un autre,
étant donné que les forêts ne sont pas soumises aux
mêmes menaces partout dans le monde.
Au niveau paneuropéen, il existe deux types de
critères utilisés pour évaluer la gestion durable des
forêts. D'une part, nous avons des critères quantitatifs et
d'autre part, des critères qualitatifs. Ils ont été
développés lors de la quatrième conférence
ministérielle pour la protection des forêts en Europe comme une
politique commune dont l'objectif est d'encadrer la gestion durable des
forêts.
TYPES CRITERIONS INDICATORS
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 12
22 Article 2 alinéa b de la
Déclaration de principes, non juridiquement contraignante mais faisant
autorité, pour un consensus mondial sur la gestion, la conservation et
l'exploitation écologiquement viable de tous les types de
forêts.
23 Priscilla GAREAU, « Approches de
gestion durable et démocratique des forêts dans le monde
», Vertigo, Volume 6, N°2, Septembre 2005.
24 Parfait OUMBA, « Développement
durable et gestion des forêts du bassin du Congo : Etude comparative des
politiques forestières du Cameroun et de la République du Congo
», Mémoire présenté en vue de l'obtention du
Master en Droit International et Comparé de l'Environnement, Sous la
direction de Jean Louis CLERGIE, Université de Limoges, Août
2007.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 13
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
Maintenance, Conservation and appropriate enhancement of
biological diversity in Forest ecosystems
Regeneration
Introduced tree species
Naturalness
Deadwood
Genetic resources
Landscapes pattern
Threatened forest species
Protected forests
Maintenance and
encouragement of productive functions of forests (Wood and
Non-
wood)
Maintenance of forest ecosystem health and vitality
Increments and fellings Roundwood
Non-wood goods
Services
Forest under management plans
Deposition of air polluants Soil condition Defoliation
Forest damage
Tree species composition
Maintenance of other socio- economic functions
and conditions
Maintenance and appropriate enhancement of protective
functions in forest management (notably soil and water)
Forest holdings
Contribution of forest sector to GDP
Net revenue
Expenditures on services The forest sector workforce Occupational
safety and health
Protective forests - Soil, water and other ecosystems
functions
Protective forests - Infrastructure and managed natural
resources
Carbon stock
Policies, institutions and instruments by Policy area
Land use and forest area Carbon balance
Health and vitality
Production and use of wood Production and use of non-wood good
and services Biodiversity
Protective forests Economic viability Employment (including
health and safety)
Public awareness and participation
Research, training and education
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
Wood consumption
Trade in wood
Energy from wood resources
Accessibility for recreation Cultural and spiritual values
National forest programmes or similar or related policies
Overall policies, institutions and instruments for
sustainable forest management
|
Institutional frameworks
|
Legal/regulatory
frameworks and international commitments
|
|
Financial instruments and economic policy
|
|
Informational means
|
Qualitative
|
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 14
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 15
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
Cultural and spiritual values
|
Tableau 1 Cadre d'évaluation de la
gestion durable des forêts au niveau paneuropéen25
Comme nous pouvons le voir dans le tableau
précédent, les politiques forestières sont des outils qui
concourent à la mise en oeuvre de la gestion durable des forêts.
On parle généralement de « Politique forestière
nationale » pour désigner « les différentes
lois adoptées par un État dans le cadre de la gestion de sa
foresterie26 ». Nous estimons que cette conception est
réductrice car, pour d'autres chercheurs, il s'agit plutôt d'un
« plan de travail adopté et poursuivi27 ».
En d'autres termes, il ne s'agit pas seulement de textes juridiques mais
surtout d'un ensemble plus vaste, un « système rationnel
» c'est-à-dire une approche qui guide les décisions
publiques en matière de gestion forestière. La politique
forestière nationale ne doit pas évoluer en marge des politiques
connexes. Au contraire, elles doivent « s'harmoniser aussi avec les
politiques émanant d'autres autorités publiques comme celles sur
la protection de l'environnement, le changement climatique, l'agriculture,
l'industrie et le commerce »28.Également, elle doit
être arrimée aux engagements contractés dans l'arène
internationale en matière de forêts. Comme l'on se retrouve dans
le champ de l'action publique, il faut savoir que l'émergence d'une
politique forestière nationale est le résultat de la
participation des acteurs non étatiques au processus décisionnel.
En effet,« une politique forestière ne doit pas être
imposée unilatéralement par le gouvernement29
».En d'autres termes, la politique forestière est une convention
entre le gouvernement et les parties intéressées.
L'autorité publique assure la mise en oeuvre de la politique
forestière à partir d'instruments de nature variée :
juridiques, économiques, informationnels. Quant aux acteurs
non-étatiques, ils participent également à
l'implémentation de la politique avec leurs propres
25Tableau réalisé à partir des
informations contenues dans le « State of Europe forest 2011
». 26Parfait OUMBA, Ibid.
27 FAO, Élaborer une politique
forestière efficace, Études FAO Forêts, N° 161,
2010,
www.fao.org/forestry,
consulté le 1/06/2016.
28Ibid. 29Ibid.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 16
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
moyens30. On peut donc constater que la mise en
oeuvre de la politique forestière nationale dépend d'une bonne
coopération entre les différentes parties prenantes. Elle doit
être coordonnée avec les politiques connexes car « en
pratique, la mise en oeuvre de différentes politiques exige toujours une
coordination à différents niveaux - qu'elles soient ou non
élaborées en collaboration ».Cela participe de la
cohérence de l'action publique.
Selon Robin DEGRON, la notion de politique forestière
est « susceptible d'évoluer vers un cadre spatial ouvert
à la dimension européenne et au fait
régional31 ».En effet, l'Union Européenne
devient peu à peu le nouveau centre décisionnel en matière
forestière et remet en question l'existence de l'État comme
auteur principal de la politique forestière32. Cependant, la
« politique forestière de l'Union
Européenne33 » se distingue des politiques
forestières nationales en ce sens qu'elle n'est pas contraignante mais
repose sur une approche volontariste. Parlant de la stratégie
forestière de l'UE, cet auteur estime que « les objectifs de
celle-ci recoupent en effet largement ceux fixés par
l'Union34 ». Effectivement, les objectifs de cette
stratégie se rapprochent de ceux définis dans l'article 3 du
Traité sur l'Union Européenne à savoir la
compétitivité de l'économie donc de la
filière-bois, le plein emploi et le progrès social, la
préservation de l'environnement
VII- PROBLÉMATIQUE
Au regard de ce qui précède, il apparaît
que les forêts ont une importance capitale pour l'Humanité dans la
mesure où ces écosystèmes fournissent divers biens et
services. Malheureusement, les forêts sont menacées par l'Homme
dont elles assurent pourtant la protection contre les changements climatiques.
Dans le but d'éviter la disparition des massifs forestiers du fait d'une
exploitation incontrôlée, les États ont
décidé d'assurer sa gestion durable en définissant divers
instruments dont les politiques forestières. La gestion durable des
forêts ayant
30Ibid.
31 Robin DEGRON, « L'espace de la politique
forestière en question », Revue géographique de
l'Est, Volume 49 / 2-3, 2009,
https://rge.revues.org/1904,
consulté le 1/06/2016.
32Ibid.
33Expression utilisée par
l'auteur.
34Ibid.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 17
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
recouvert une importance capitale pour leur survie, on peut
observer le passage de la politique forestière de l'espace national
à l'espace régional européen. Au niveau
paneuropéen, des critères et indicateurs ont été
élaborés dans le cadre de la Conférence
Ministérielle pour la Protection des Forêts en Europe à
Vienne afin d'évaluer la mise en oeuvre de la gestion durable des
forêts dans les pays européens. Quant à l'Union
Européenne, elle a mis au point une stratégie forestière
en 1998, laquelle a été modifiée en 2007 et en 2013. Cette
action traduit, a priori, une évolution non seulement dans l'approche
mais aussi dans les outils et techniques nécessaires à une
gestion durable des forêts. Ainsi, chevillons-nous notre travail autour
de la question suivante : Dans quelle mesure les activités
menées dans le cadre de la stratégie forestière permettent
aux forêts et au secteur forestier de contribuer aux objectifs de l'UE
?
VIII- HYPOTHÈSES
L'Hypothèse peut être considérée
comme « une proposition de réponse à une question
posée35 ». En d'autres termes, elle
représente la réponse proposée par le chercheur à
la question de recherche présentée dans la problématique.
Ainsi, nous pensons que les activités mises en oeuvre dans le cadre de
la stratégie forestière permettent aux forêts et au secteur
forestier de contribuer aux objectifs de l'UE dans la mesure où les
États membres s'investissent activement dans l'application des
recommandations et l'opérationnalisation de ladite stratégie.
Cette affirmation peut être vérifiée de deux
manières : D'une part, les États implémentent la
stratégie forestière parce qu'ils partagent une même vision
qui évolue vers une compréhension commune des enjeux liés
à la gestion durable des forêts. D'autre part, les
activités réalisées dans le cadre de la stratégie
forestière sont coordonnées avec les autres politiques communes
de l'Union.
35
www.unige.ch/fapse/pegei/methodologie/plan/hypothèse/,
consulté le 10/06/2016.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 18
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
IX- CADRE MÉTHODOLOGIQUE
Dans l'optique de mener à bien cette recherche, il
apparait nécessaire de s'appuyer sur un ensemble
d'éléments notamment une méthode d'analyse (A) et des
techniques de collecte de données (B).
A- Méthode d'analyse utilisée.
Comme l'affirment Richard BALME et Sylvain BROUARD, «
l'analyse des politiques publiques rassemble, aujourd'hui, des travaux
empruntant des méthodes diversifiées, couvrant un spectre
relativement large 36 ». En effet, l'analyse des
politiques publiques est une branche de la science politique qui s'est
formée en adoptant des méthodes variées issues d'autres
domaines tels que l'économie, la sociologie ou encore la psychologie. En
outre, l'on peut constater que les politiques publiques européennes
deviennent de plus en plus un objet d'analyse en science politique en ce sens
que « l'intégration européenne est aujourd'hui un objet
en voie de normalisation37 ».
Pour mieux aborder la question posée dans cette
étude, nous allons mobiliser deux grilles d'analyse, d'une part
l'analyse séquentielle des politiques publiques, d'autre part le
paradigme de la rationalité limitée.
L'analyse séquentielle des politiques
publiques
L'approche séquentielle est une méthode
d'analyse des politiques publiques développée par Charles JONES
en 1970 dans son livre An introduction to the study of Public Policy.
Elle consiste à découper les phases qui entourent
l'évolution d'une politique publique. En effet « cette approche
se présente comme
36 Richard BALME et Sylvain BROUARD, « Les
conséquences des choix politiques : choix rationnel et action publique
», Revue française de Science Politique, Presses de Science Po.,
Volume 55,
https://www.cairn.info/revue-francaise-de-science-politique-2005-1-page-33.htm,
consulté le 03/06/2016.
37 Patrick HASSENTEUFEL et Yves SUREL, «
Des politiques publiques comme les autres ?Construction de l'objet et
outils d'analyse des politiques publiques européennes »,
Politique européenne, N°1, Janvier 2000, PP.8-24,
http://www.cairn.info/revue-politique-europeenne-200-1-page-8.htm,
consulté le 03/06/2016.
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
un cadre d'analyse fondé sur le principe du
séquençage, c'est-à-dire une grille organisée en
séquences d'action permettant de diviser un processus politique - le
développement d'une politique publique - en étapes
distinctes38 ». Autrement dit, cette méthode
définit un cadre logique dans lequel on peut identifier les
différentes étapes d'un processus politique. Le but de l'analyse
séquentielle est de décrire le cycle d'une politique publique
(Figure 1). Charles Jones découpe l'évolution
d'une politique publique en cinq principales étapes qui peuvent
êtres composées à leur tour de sous-étapes :
l'identification du problème, le développement du programme, sa
mise en oeuvre, son évaluation et sa terminaison. Contrairement à
ce que pensent d'autres chercheurs, nous estimons que ce modèle n'est
pas linéaire même si, à première vue, il en donne
l'impression. En effet, à chacune des étapes, il est possible de
faire un retour en arrière pour améliorer la politique publique
en prenant en compte d'autres paramètres qui auraient
échappé à l'analyse du problème. En outre, «
les séquences peuvent se chevaucher, être inversées
dans le temps ou, pour certaines, être tout simplement
absentes39 ».
L'approche séquentielle réduit la
complexité qui caractérise la décision publique en mettant
en ordre ses mécanismes. Elle apparaît comme la grille qui nous
permettra d'analyser l'évolution de la stratégie
forestière de l'Union Européenne. Nous pourrons donc voir les
différents processus qui ont conduit à l'émergence de
cette stratégie, ainsi que sa mise en oeuvre.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 19
38 Sophie JACQUOT, « Approche
séquentielle (Stages approach)», Dictionnaire des politiques
publiques, Presses de Science Po, 2010, PP.82-90.
39Ibid.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 20
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
Figure 1 Le cycle des politiques
publiques40
L'approche selon la rationalité
limitée
Il s'agit d'une approche qui dérive des théories
du choix rationnel initiées en économie par des auteurs
néoclassiques tels que Léon WALRAS. Pour ces économistes,
les acteurs sont rationnels, c'est-à-dire qu'ils cherchent à
maximiser l'utilité des biens qu'ils consomment ou le profit de leur
entreprise, sous la contrainte du revenu dont ils disposent ou des facteurs de
production (capital et travail). Cependant, contrairement à ce que
prônent les tenants de l'école néoclassique, «
l'homo oeconomicus » n'a pas une rationalité absolue. En
effet, sa rationalité est limitée par des facteurs tels que
l'accès à l'information. Le paradigme de la «
rationalité limitée » a été introduit
en science par l'économiste et sociologue américain Herbert
Alexander SIMON. En transposant cette théorie au domaine de l'action
publique, on peut se rendre compte que les acteurs des politiques publiques
n'ont pas toujours des intérêts clairement identifiés et
des stratégies clairement définies. Leurs actions peuvent
être limitées par
Dans notre étude, nous nous servirons de cette approche
pour montrer que les visées de l'Union Européenne en
matière forestière sont limitées par le principe de
subsidiarité, par les intérêts de ses États membres.
A partir de cette grille d'analyse, nous allons également constater
qu'il y a une incohérence entre les ambitions de l'UE sur la
scène internationale c'est-à-dire son action pour
40Source : Steve JACOB et Nathalie SCHIFFINO,
« Docteur Folamour apprivoisé ? Les politiques publiques du
risque », Politique et sociétés, Société
québécoise de science politique, Volume 26, N° 2-3, 2007,
P.45-72
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 21
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
l'adoption d'un texte juridiquement contraignant sur les
forêts et sa stratégie forestière.
B- Techniques de collecte de données
Dans notre étude, nous avons privilégié
deux types de techniques de collecte de données, la recherche
documentaire et l'entretien.
La recherche documentaire nous a permis de constituer une
vaste revue de la littérature sur les forêts, les enjeux
liés à leur conservation et la stratégie forestière
de l'Union Européenne. Nos sources écrites proviennent de
quelques bases de données, notamment celle du Centre International de
Formation Européenne, de la Commission Européenne, de
bibliothèques et revues en ligne etc. Nos consultations ont porté
essentiellement sur les oeuvres scientifiques, ainsi que sur quelques rapports
et textes juridiques.
L'entretien qui est donc un échange verbal entre deux
personnes se déroulant dans un cadre convivial, nous permettra de
récolter des informations pertinentes et fiables. La technique
d'enquête qui a été retenue pour ce travail est donc
l'entretien semi-directif. Elle consistera à poser des questions
libellées d'avance à certains membres de la Direction
Générale « Agriculture et Développement Rural
» de la Commission Européenne et certains spécialistes
des questions forestières. Le choix porté sur l'entretien semi
directif se justifie par le fait que c'est un mode d'entretien qui canalise le
sujet par des questions précises. L'enquêté est à ce
titre libre de répondre comme il le désire, mais en restant dans
le cadre établi.
X- EXPLICATION ET JUSTIFICATION DU PLAN
Dans le souci d'apporter des réponses
appropriées à notre questionnement, le présent travail de
recherche s'articulera autour de quatre chapitres. Le premier chapitre analyse
l'évolution de la stratégie forestière de l'Union
Européenne entre 1998 et 2013 (Chapitre I). Le deuxième met
l'accent sur les rapports entre la stratégie forestière et la
politique de développement durable (Chapitre II). Il nous
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 22
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
permettra de voir comment les mesures forestières ont
été introduites dans les Programmes de Développement
Durable. Quant au troisième chapitre, il présente les
forêts comme un facteur de coopération entre l'UE et le monde
extérieur (Chapitre III). Nous pourrons ainsi observer l'engagement de
l'Union dans la promotion d'une gestion durable des forêts. Enfin, le
quatrième aborde les questions majeures qui persistent et suggère
des perspectives pour la construction d'une Union Européenne
forestière (Chapitre IV).
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 23
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
CHAPITRE I : UNE VISION QUI S'INSCRIT DANS UNE
PERSPECTIVE ÉVOLUTIVE
La première stratégie forestière de
l'Union Européenne qui vit le jour en 1998 était un balbutiement
c'est-à-dire qu'elle était un instrument préliminaire
à la définition d'une stratégie claire, la
stratégie de 2013. En effet, après l'évaluation
effectuée par la Commission et le compte-rendu fait au Conseil
Européen à travers la Communication, on peut constater que la
stratégie de 1998 fixe uniquement un cadre aux actions nationales et/ou
communautaires concernant les forêts. Il s'agissait d'un cadre de
référence qui présentait surtout les principes d'une
gestion durable des forêts au sein de l'Union Européenne. En
d'autres termes, la stratégie forestière de 1998 était un
ensemble de recommandations (Section 1). Ainsi, dans le but de rendre dynamique
cette initiative balbutiante et de la traduire en actions pratiques, un plan
d'action de l'UE en faveur des forêts sera exécuté entre
2007 et 2011 (Section 2) et aboutira à l'élaboration d'une
nouvelle stratégie forestière en 2013 (Section 3).
SECTION 1 : LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE
1998
Il s'agit d'une action dont l'ambition était de fournir
un cadre formel aux différentes opérations et programmes en
matière de gestion du secteur forestier. Nous observerons que son
émergence est la résultante d'un processus difficile (I). Cette
stratégie fixe essentiellement un ensemble de principes visant la
gestion forestière durable (II). Son existence a permis la mise en
oeuvre d'initiatives variées et adressant les défis
économiques, socioculturels et environnementaux auxquels sont soumis les
forêts (III).
I- Processus d'émergence de la stratégie
Les différentes actions communautaires qui ont
été réalisées pour la forêt et le secteur
forestier après la création de la CEE avaient pour base juridique
d'autres politiques telles que la PAC ou encore la Politique de
Coopération au
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 24
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
développement41. Ce déficit a
été corrigé dans les années 90 grâce à
la réalisation d'une étude intitulée « L'Europe
et la forêt » par le groupement EUROFOR et l'ONF (France), sous
l'égide de l'ancienne DG IV « Études
»42. Ce travail fut à l'origine de la
première initiative du Parlement Européen en accord avec
l'Article 138B du Traité de Maastricht qui dispose :
Dans la mesure où le présent Traité
le prévoit, le Parlement européen participe au processus
conduisant à l'adoption des actes communautaires, en exerçant ses
attributions dans le cadre des procédures définies aux articles
189B et 189G, ainsi qu'en rendant des avis conformes ou en donnant des avis
consultatifs.
Le Parlement européen peut, à la
majorité de ses membres, demander à la commission de soumettre
toute proposition appropriée sur les questions qui lui paraissent
nécessiter l'élaboration d'un acte communautaire pour la mise en
oeuvre du présent traité.
L'étude éditée a ensuite
été transmise par le Parlement Européen à la
COMAGRI afin qu'elle produise un rapport d'initiative. Ce rapport, plus connu
sous le nom de « Rapport THOMAS », présentait les
différentes options possibles concernant la gestion du secteur forestier
de l'Union Européenne : La première option envisageait la
continuité des dynamiques en place depuis 1957 tandis que la
deuxième préférait l'établissement d'une
réelle politique forestière assortie de la création d'un
Fonds forestier.
Pour le député britannique David THOMAS,
rapporteur désigné par le Groupe politique chargé de
présenter le travail selon les règles de fonctionnement de la
COMAGRI, il était préférable de se limiter à la
première option. Sa position traduisait celle de son pays, le
Royaume-Uni. Aussi, le rapport fut publié en 1996, un an après la
révision des Traités, et l'occasion de donner une base juridique
à la
41 Il s'agissait des dispositions suivantes du
Traité de 1957 : Articles 37 (43 TFUE), 158 (174 TFUE) à 162 (178
TFUE), 174 (191 TFUE), 310 (217 TFUE) et 133 (207 TFUE).
42 Actuelle« Direction
Générale des services de recherche parlementaire », il
s'agit de l'une des huit Directions Générales du Parlement
Européen. Elle « a pour mission de réaliser ou de faire
réaliser des études et recherches à la demande des
députés ou des organes de l'assemblée ».
(Olivier COSTA, « Administrer le parlement européen : Les paradoxes
d'un secrétariat général incontournable, mais faible
» in Politique Européenne, N°11, Mars 2003, P150, pp
143-161).
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 25
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
forêt ne fut pas saisie. Par ailleurs, en 1995 trois
nouveaux pays (Autriche, Suède et Finlande) rejoignirent les rangs de
l'UE, augmentant ainsi le nombre de pays hostiles à une politique
forestière européenne. En effet, les pays scandinaves, faisant
partie des pays d'Europe ayant la plus grande couverture forestière, ont
une économie qui dépend fortement de l'exploitation
forestière. De ce fait, ils se rapprochèrent des pays qui ne
voulaient pas d'une politique forestière commune.
En 1997, le Parlement Européen invita la Commission
à faire usage de son pouvoir d'initiative afin de proposer une base
juridique pour les forêts de l'Union Européenne. C'est ainsi que,
la Commission fit une « Communication au Parlement Européen et
au Conseil sur Une stratégie forestière pour l'Union
Européenne » {COM(1998) 649}, le 03 Novembre 1998. Suite
à cette Communication, la « Résolution du Conseil du 15
Décembre 1998 relative à une la stratégie
forestière pour l'Union Européenne » (1999/C 56/ 01)
fut adoptée.
II- Principes fondamentaux de la stratégie
L'Union Européenne a déterminé un
ensemble d'éléments fondamentaux constituant les principes de
base de sa stratégie forestière. Ils peuvent être
répartis dans deux catégories, d'une part les principes
généraux qui forment le socle de la stratégie
forestière et d'autre part, les autres principes qui contribuent
à la mise en oeuvre des premiers.
1) Principes généraux
Dans l'Article premier de la Résolution du Conseil de
1998, l'Union Européenne reconnaît le rôle multifonctionnel
des forêts comme principe général de sa stratégie
forestière. En effet, les forêts jouent à la fois un
rôle social, économique, environnemental, écologique et
culturel. Elles sont un réservoir de biodiversité et participent
au développement de la société en contribuant à la
promotion de l'emploi, au bien-être et à la qualité de
l'environnement :« La forêt produit du bois, héberge la
faune, protège le sol contre l'érosion, filtre l'eau, occulte le
bruit, ressource promeneurs, joggeurs et cavaliers43 ».
43 Roger FICHANT, La faune des Forêts et
l'Homme, Quae, P.77
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 26
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
Afin de garantir ce rôle multifonctionnel, l'Union
Européenne préconise une gestion durable. La gestion durable des
forêts est un outil qui permet la conservation et la promotion de la
biodiversité et la lutte contre les changements climatiques. La
Conférence Ministérielle sur la Protection des Forêts en
Europe, (Helsinki, 1993) l'a défini comme « l'utilisation des
forêts et des terrains boisés d'une manière et à une
intensité telles qu'elles maintiennent leur diversité biologique,
leur productivité, leur capacité de
régénération, leur vitalité et leur capacité
à satisfaire, actuellement et dans le futur, les fonctions
écologiques, économiques et sociales pertinentes, aux niveaux
local, national et mondial, sans causer de préjudices à d'autres
écosystèmes ».
2) Les autres principes
Ces autres principes viennent renforcer l'application des
principes généraux qui sous-tendent la stratégie
forestière.
Les principes de subsidiarité et de
responsabilité partagée dirigent la mise en oeuvre de la
stratégie forestière, étant donné que le
Traité de Rome ne prévoit pas de dispositions relatives à
une politique commune en matière de sylviculture. A cet effet, l'Article
5 du TFUE dispose en son troisième alinéa : « En vertu
du principe de subsidiarité, dans les domaines qui ne relèvent
pas de sa compétence exclusive, l'Union intervient seulement si, et dans
la mesure où, les objectifs de l'action envisagée ne peuvent pas
être atteints de manière suffisante par les États membres,
tant au niveau central qu'au niveau régional et local, amis peuvent
l'être mieux, en raison des dimensions ou des effets de l'action
envisagée, au niveau de l'Union ». De ce fait, la
responsabilité principale de la stratégie forestière
réside entre les mains des États membres. Afin, de respecter les
engagements pris au niveau de la communauté internationale, ces
États devront mettre en place des Programmes Forestiers Nationaux ou des
outils appropriés pour veiller à la gestion durable des
forêts.
Un autre principe évoqué est la participation
dynamique de l'Union Européenne et de ses États membres à
tous les processus internationaux en relation avec le secteur forestier. Dans
ce sens, l'Union Européenne et ses États membres participent
à toutes les initiatives internationales qui ont trait aux
forêts.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 27
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
On le voit par exemple avec le programme REDD+ où ils
financent de nombreux projets sur la gestion durable des forêts. Ensuite,
le principe suivant vise la nécessité d'améliorer les
relations (coordination, communication, coopération) entre la Commission
et les États membres, ainsi qu'entre les États membres. Afin
d'accroître l'efficacité et l'efficience de la stratégie
forestière, l'UE détermine comme autre élément
fondamental la nécessité de favoriser une approche transparente
et d'encourager la participation d'autres acteurs tels que les
propriétaires de forêts.
III- Mise en oeuvre de la stratégie
A travers sa Résolution du 15 décembre 1998, le
Conseil a invité la Commission à lui faire un rapport sur
l'implémentation de la stratégie forestière dans un
délai de cinq ans44. Ce rapport a été
présenté le 10 mars 2005. Le document principal, la Communication
de la Commission au Conseil et au Parlement Européen {COM (2005) 84
final), est accompagné d'un document de travail des services de la
Commission {SEC (2005) 333} qui expose de façon détaillée
les différentes mesures et initiatives mises en oeuvre entre 1999 et
2004.
La production dudit rapport a été rendue
possible par les informations recueillies auprès des organisations
professionnelles et autres acteurs du secteur forestier grâce à
une procédure de consultation lancée par la Commission. Les
principales conclusions de cette consultation ont été
conciliées dans un rapport de synthèse45. On peut
constater qu'il y a eu le souci de respecter l'esprit de la stratégie
(approche transparente et participative) en incluant toutes les parties
prenantes dans le processus d'élaboration du rapport sur son
implémentation.
Au début des années 2000, afin de traduire les
recommandations de la stratégie forestière en actions pratiques,
plusieurs pays ont développé des PFN. D'après l'approche
commune adoptée lors de la 4ème CMPFE (Vienne 2003),
un PFN est « Un processus participatif, holistique, intersectoriel et
itératif de planification, de mise en oeuvre, de contrôle et
d'évaluation des politiques, aux niveaux national et/ou sub-national,
dont l'objectif est de continuer d'améliorer,
44Article 18 de la Résolution du Conseil
du 15 Décembre 1998 relative à une stratégie
forestière pour l'UE.
45Report from the stakeholder consultation on the
draft Commission staff working document.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 28
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
conformément à la Résolution H1
d'Helsinki, la gestion forestière durable, et de contribuer au
développement durable46 ».Dans ce cas de figure,
l'on retrouve entre autres le Danemark (2002), la Finlande (1999), l'Allemagne
(2003), l'Espagne (2000) et la Hongrie (2004). D'autres pays, comme la France
(2003) et la Grèce (2003), ont plutôt révisé une loi
forestière existante ou adopté une nouvelle loi en prélude
à la conception d'un PFN. Afin de mener une gestion durable des
forêts, conserver la biodiversité et participer au
développement durable, il y a la nécessité d'adopter une
approche intersectorielle. Les PFN apparaissent comme l'un des moyens qui
jouent l'interface entre le secteur forestier et les autres secteurs qui
influencent sa gestion. En effet, leur cadre d'action permet de prendre en
compte les impacts intersectoriels sur les forêts et encourage la
participation des acteurs non institutionnels.
Par ailleurs, dans le cadre des activités de
surveillance et de protection des forêts contre la pollution
atmosphérique et les incendies, un plan d'action a vu le jour sous le
nom de « Forest Focus47 » en 2003. Pendant les
cinq années de sa mise en oeuvre, il permettait également la
collecte d'informations sur la biodiversité, les sols, les changements
climatiques et la séquestration du carbone. L'on peut aisément
constater que « Cette évolution marque une étape
importante vers une conception de la surveillance des forêts plus large,
en phase avec les objectifs multifonctionnels assignés et
réaffirmés de la stratégie forestière, ainsi
qu'avec les outils de suivi correspondants, en cours de développement
dans de multiples enceintes48 ». Ces outils de suivi sont
les bases de données, « Forest Focus » qui contient
des informations sur l'état des forêts de l'Union, «
Biosoil » contenant des informations sur la biodiversité
et les sols49, ainsi que le système européen
d'information sur les feux de forêt (EFFIS). Il faut préciser que
cette action de surveillance et de protection des écosystèmes
forestiers s'inscrivait dans la continuité du Règlement (CEE)
N° 3528/86 du Conseil du 17 novembre 1986 relatif à la protection
des forêts dans la Communauté contre la pollution
46 Ministère de l'Agriculture, de
l'Alimentation, de la Pêche et des Affaires Rurales, «
Déclaration et Résolution de Vienne », Novembre
2003, P.10.
47 Règlement (EC) N° 2152/2003 du
Parlement Européen et du Conseil du 17 Novembre 2003 concernant la
surveillance des forêts et les interactions environnementales dans la
Communauté.
48 Geneviève REV et Muriel MAHE, op.cit.,
P.48.
49 COM/2010/0430/ Rapport de la Commission au
Parlement Européen et au Conseil sur la mise en oeuvre de l'action
Forest Focus.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 29
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
atmosphérique et du Règlement (CEE)
N° 2158/92 relatif à la protection des forêts dans la
Communauté contre les incendies qui sont échus en 2002.
En dépit de toutes ces réalisations, la
Commission Européenne a reconnu la nécessité de mettre sur
pied un nouveau cadre de référence pour les initiatives et
programmes en relation avec les forêts. Ce nouveau cadre aurait pour
vocation de représenter une vision commune du secteur forestier
basée sur une approche transsectorielle et une promotion plus active de
la gestion durable des forêts
SECTION 2 :LE PLAN D'ACTION DE L'UE EN FAVEUR DES
FORETS
L'élaboration d'un plan d'action en faveur des
forêts résulte d'une demande faite par le Conseil à la
Commission à la suite de l'évaluation de la stratégie
forestière en 200550.S'inscrivant dans la continuité,
« La Communication de la Commission au Conseil et au Parlement
Européen concernant un plan d'action de l'Union Européenne en
faveur des forêts 51 » rappelle certains principes qui
sous-tendent la stratégie forestière de 1998 à savoir la
bonne gestion des ressources forestières de l'UE, le principe de
subsidiarité et l'utilisation des PFN comme outils de mise en oeuvre des
engagements internationaux. Ce plan d'action, qui adressait plusieurs objectifs
et actions-clés (I), va permettre à l'Union et à ses
États membres de réaliser quelques avancées dans la
gestion de leur patrimoine forestier (II).
I- Objectifs et actions-clés du plan d'action
Le plan d'action de l'UE en faveur des forêts avait pour
objectif général de promouvoir la gestion durable des
forêts et de protéger leur rôle multifonctionnel. Il
était accompagné de quatre objectifs spécifiques, chacun
assorti d'actions opérationnelles. L'on peut ainsi constater que ce
nouveau cadre de référence est basé sur une «
planification stratégique ». Cet outil de gestion qui se
rapporte surtout au monde des affaires est de plus en plus utilisé dans
le domaine des
50 Conclusions du Conseil sur le plan d'action de
l'UE en faveur des forêts, 2662e réunion du Conseil
agriculture et pêche des 30 et 31 Mai 2005.
51COM (2006) 302 final.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 30
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
politiques publiques. Elle consiste à établir
une vision, définir les moyens nécessaires et les actions
particulières à mener pour parvenir à sa
réalisation.
Le premier objectif est l'amélioration à long
terme de la compétitivité de la sylviculture et l'accroissement
de l'utilisation durable des ressources et services
écosystémiques des forêts. Pour ce faire, il faut
encourager l'innovation et la recherche dans le secteur forestier, ainsi que la
formation des personnes exerçant dans ce secteur. Afin d'atteindre cet
objectif, la Commission a reconnu la nécessité d'étudier
l'impact de la mondialisation sur l'activité forestière dans
l'Union. Cette étude a pour but d'identifier les facteurs qui permettent
la viabilité économique du secteur. Également, il
s'agissait de promouvoir l'utilisation de la biomasse forestière comme
source d'énergie afin de permettre l'autonomie énergétique
et la création d'emplois dans les zones rurales.
Le deuxième objectif est la protection de
l'environnement. En d'autres termes, il s'agissait de renforcer la
biodiversité et la résilience des écosystèmes
forestiers. Il était donc impératif de veiller à
l'implémentation de l'action de surveillance Forest focus. De
plus, il était question pour l'UE de trouver de nouveaux moyens
d'atténuer les changements climatiques afin de respecter les obligations
prescrites par la CCNUCC et le protocole de Kyoto. La réalisation de cet
objectif impose une meilleure observation des forêts et
l'amélioration des recherches dans le domaine.
En ce qui concerne le troisième objectif, il portait
sur la contribution des États membres à une meilleure
qualité de vie à travers l'éducation et la vulgarisation
de l'information en matière d'environnement et le maintien des fonctions
protectrices des forêts. Dit autrement, les États membres devaient
encourager les investissements permettant l'amélioration de
l'utilité publique des forêts urbaines et périurbaines,
ainsi que promouvoir l'éducation des citoyens sur la gestion durable des
forêts.
Quant au dernier objectif, il était axé sur
l'amélioration de la cohérence et de la coordination des
politiques et initiatives liées aux forêts. Aussi, il convenait
d'améliorer la communication entre les États membres et la
Commission, ainsi que le partage d'informations entre les États membres
eux-mêmes. Cela devait
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 31
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
passer par le renforcement du rôle du Comité
Permanent Forestier, organe assurant la courroie entre les services de la
Commission et les Etats membres.
Figure 2 Matrice du Plan d'action de l'UE en
faveur des forêts52
II- Réalisations principales
L'évaluation ex-post du Plan d'action de l'UE en faveur
des forêts montre qu'il a donné une structure propice à la
réalisation de plusieurs activités pendant les quatre
années de sa mise en oeuvre53. Nous pouvons constater que
cela a été possible grâce au fait que des actions
spécifiques aient été ciblées.
Les principales innovations de ce plan d'action sont surtout
notables dans le domaine de la recherche. En effet, afin d'améliorer le
domaine des connaissances sur le secteur forestier, la Commission a
financé diverses études telles que celle des effets de la
mondialisation sur la viabilité économique de la
52 Source : Evaluation ex-post du plan d'action de
l'UE en faveur des forêtsréalisée par l'Institut
Européen des Forêts (IEF), l'Institut pour la Politique
Environnementale Européenne (IEEP) et le Centre Technologique Forestier
de Catalogne (CTFC), (No. AGRI-2011-EVAL-07), Août 2012.
53Ex-post Evaluation of the EU Forest Action Plan (No.
30-CE-0453512/00-22), Août 2012.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 32
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
sylviculture de l'UE54 ou celle sur la valeur
économique des eaux souterraines et de la biodiversité dans les
forêts européennes55. Ces activités de recherche
ont été financées à travers le septième
programme-cadre de recherche et de développement technologique
(7e PC).
Également, des changements peuvent être
notés sur le plan de la coopération et de la communication entre
les services de la Commission, les États membres et d'autres parties
intéressées (propriétaires des forêts, industries
forestières...). Ainsi, pendant la période 2009-2011, la
Commission a régulièrement transmis des rapports au CPF sur les
développements dans la filière bois de l'UE. Les multiples
conférences qui se sont tenues ont permis de recueillir les avis des
experts sur des questions forestières56. Les États
membres ont partagé leurs expériences lors des rencontres
organisées au sein du CPF.
En ce qui concerne l'éducation sur la gestion durable
des forêts, les États membres ont offert des formations
professionnelles aux étudiants et aux personnes employées dans le
secteur forestier. Aussi, ils ont mis à la disposition des
propriétaires de forêts des services de conseils et ont
organisé des séances de travail afin de soutenir la
coopération entre ces acteurs.
A l'issue de cette présentation du plan d'action en
faveur des forêts, nous pouvons constater qu'il a été un
instrument d'opérationnalisation de la stratégie
forestière. Malgré les progrès réalisés
grâce à sa mise en oeuvre, il n'a pas pu à être un
cadre suffisant à la réalisation des objectifs de Lisbonne et de
Göteborg (Figure 2) et à la réelle
émergence d'une réponse commune face au besoin de dialogue
multi-niveaux.
54Sten NILSSON, Ewald RAMETSTEINER et al.,
Study of the effects of Globalization on the Economic Viability of EU
Forestry (No. AGRI-G4-2006,06), Institut International des systems
d'analyse appliqués, 2006.
55 Final repot study on the economic value of
groundwater and biodiversity in European forests (070307/2007/486510).
56 La conférence sur la contribution de la
recherche forestière au renforcement de la gouvernance dans le secteur a
été organisée par la plateforme technologique pour la
filière forestière (FTP).
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 33
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
SECTION 3 : LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE
2013
La nouvelle stratégie de l'UE pour les forêts et
le secteur forestier voit le jour le 20 septembre 2009 grâce à une
« Communication de la Commission au Parlement Européen, au
Conseil, au Comité économique et social européen et au
Comité des régions ». La cohérence étant
nécessaire dans les actions qui concernent le secteur forestier, la
nouvelle stratégie ne rompt pas avec l'ancienne puisqu'elle conserve les
mêmes principes. Son émergence résulte de la
nécessité d'adopter un nouveau cadre global et cohérent
(I) ainsi qu'une démarche détaillée adressant
différents domaines qui ont des répercussions sur la gestion des
forêts (II).
I- La nécessité d'un nouveau cadre
d'action
La nécessité d'élaborer une nouvelle
stratégie forestière naît à la fois de
l'évaluation ex-post du plan forestier (2007-2011), des défis qui
se posent au secteur forestier de l'Union et du besoin de cohérence et
de synergie au niveau des politiques en rapport avec les forêts.
Depuis la mise en place de la première
stratégie, une évolution dans la perception des forêts par
la société de l'UE a été remarquée. Cette
évolution découle de l'importance grandissante des forêts
dans la lutte contre les changements climatiques - le rôle de puits de
carbone est mondialement reconnu - de la valeur ajoutée qu'elles
apportent au développement rural et de la place significative qu'elles
ont conquis dans l'économie de l'Union Européenne. De ce fait, il
était nécessaire de redéfinir le cadre de la
stratégie forestière de l'UE afin de favoriser une gestion
durable et équilibrée du potentiel multifonctionnel des
forêts de l'UE et permettre ainsi aux forêts de fonctionner
correctement. Également, cette redéfinition passait par la
fourniture de réponses adaptées à la demande croissante de
matières premières et d'énergies renouvelables. Ceci dans
le but de diversifier les marchés dans les secteurs traditionnels et
ceux de la bioéconomie et de la bioénergie. Par ailleurs, il
s'agit de stimuler la croissance de la filière bois en relevant les
défis auxquels elle fait face en matière d'innovation, de
concurrence internationale ou d'efficacité dans la gestion des
ressources.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 34
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
D'autre part, la nouvelle stratégie forestière
vise à améliorer la protection des forêts et de la
biodiversité contre les menaces que sont les tempêtes, les
changements climatiques et les incendies. Aussi, ce nouveau cadre vient
encourager au sein de l'Union et de ses États membres une consommation
responsable des ressources forestières étant donné que
leur consommation a des incidences sur les forêts du monde entier. Enfin,
cette stratégie reconnaît la nécessité de
développer un système d'information adéquat pour garantir
le suivi des objectifs précédents.
A travers les objectifs susmentionnés, l'on voit
l'ambition que nourrit ce nouveau cadre. C'est la raison pour laquelle le
secteur forestier et les forêts ont été inclues dans le
cadre financier pluriannuel 2014-2020.
II- Des domaines prioritaires interconnectés
La nouvelle stratégie identifie pour sa mise en oeuvre
efficace et efficiente huit domaines prioritaires. Chaque domaine est
accompagné d'orientations stratégiques qui adressent les points
saillants de sa compréhension.
Les quatre premiers domaines visent la contribution de la
gestion durable des forêts aux objectifs sociétaux que sont la
promotion des communautés rurales et urbaines, l'amélioration de
la compétitivité et de la durabilité de la filière
bois et de l'économie verte, le renforcement de la capacité
d'adaptation des forêts aux changements climatiques et
l'amélioration de leurs services écosystémiques. Pour
atteindre ces objectifs, les États membres doivent donner la
priorité aux investissements dans la modernisation des techniques
forestières, les nouveaux procédés d'utilisation des
ressources et la protection des forêts.
Les deux domaines suivants visent l'amélioration de la
base de connaissances sur les forêts. Pour mieux comprendre les
défis complexes et divers auxquels le secteur forestier fait face, il
est impératif pour l'UE de renforcer sa base de connaissances sur les
forêts. C'est dans cette optique que l'Union stimule la recherche et
l'innovation dans le secteur des forêts.
Quant aux deux derniers domaines prioritaires, ils visent
l'amélioration de la coordination et de la communication. Les
forêts étant au coeur de plusieurs stratégies
transversales, il est essentiel pour les États membres ainsi que pour
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 35
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
toutes les parties concernées de coopérer, de
communiquer et de coordonner leurs actions. Cela permettra de poser des actions
cohérentes et efficaces. Également, dans une perspective
internationale, la nouvelle stratégie cherche à garantir la
cohérence entre les politiques, les objectifs et les engagements de
l'Union et des États membres aux initiatives qui concerne le secteur
forestier.
Au vu de ce qui précède, nous pouvons constater
une évolution manifeste de la vision de l'UE et de ses États
membres sur son secteur forestier. Au fur et à mesure que les
expériences se multiplient dans le domaine de la gestion durable des
forêts, la vision paneuropéenne s'éclaircit. La
première stratégie forestière élaborée par
l'Union Européenne a permis à l'organisation régionale de
prendre conscience de l'importance d'une conservation et d'une protection des
écosystèmes forestiers et de leur biodiversité. Elle lui a
permis de définir des principes basiques nécessaires à la
gestion durable des forêts. Mais nombre de facteurs montrent qu'elle
n'était pas adaptée aux nouveaux challenges aussi bien
socioéconomiques qu'environnementaux de l'Union Européenne,
défis créés par un contexte international de plus en plus
globalisé. En effet, la lutte contre les changements climatiques qui
affectent de plus en plus notre planète, l'élargissement à
de nouveaux États, l'urgence d'une transition vers les énergies
renouvelables notamment la biomasse forestière, le renforcement de la
compétitivité des industries forestières, le
développement rural sont des thématiques qui ont demandé
à l'Union Européenne et à ses États membres de
mettre en place un nouveau cadre traduisant une vision et une approche globales
de son secteur forestier.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 36
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
CHAPITRE II : RAPPORTS ENTRE LA POLITIQUE DE
DÉVELOPPEMENT RURAL ET LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UE
D'après Frantz SCHMITHUSEN, « Sans disposer de
compétences spécifiques dans le domaine des forêts, l'UE a
adopté de nombreuses mesures dans d'autres domaines politiques qui ont
des impacts immédiats et largement positifs sur les forêts et la
gestion des forêts »57. En d'autres termes, les
forêts sont concernées par de nombreuses initiatives et politiques
communes de l'Union Européenne adoptées par le Parlement.
L'ambition de la stratégie forestière de l'UE est de servir
d'instrument de coordination entre ces différentes politiques qui ont un
effet direct ou indirect sur les forêts. Parmi les politiques marquantes,
se trouvent notamment la politique énergétique, la politique
environnementale, la politique commerciale, la politique régionale, de
la politique industrielle et de la politique de développement rural. Ce
chapitre a pour ambition d'analyser les rapports qui existent entre la
stratégie forestière de l'UE et sa politique de
développement rural. Cette politique naît de la réforme de
la PAC adoptée par les chefs d'États et de Gouvernement à
Berlin en 1999, le Règlement (CE) N° 1257/1999 du Conseil du 17
mai 1999 concernant le soutient au développement rural par le Fonds
Européen d'Orientation et de Garantie Agricole (FEOGA). A travers
ce règlement, le Conseil de l'UE a voulu mettre l'accent sur une
approche globale et durable du développement rural. L'on peut dire que
« Jusqu'à une époque récente, le
développement rural était envisagé du point de vue de la
production alimentaire et agricole58 ».En effet, les
premiers programmes de développement rural mis en oeuvre entre 2000 et
2006 étaient particulièrement axés sur l'agriculture, les
activités sylvicoles étant fortement marginalisées. Mais
avec les défis majeurs qui concernent notamment l'amélioration
des conditions de vie des populations rurales, l'accroissement de la
compétitivité du secteur forestier, l'atténuation des
changements climatiques, les nouveaux programmes de
57Frantz SCHMITHUSEN, « Analyser les
impacts des politiques au niveau intersectoriel - aspects juridiques et
politiques », Impacts intersectoriels des politiques
forestières et des autres secteurs, Étude FAO Forêts,
N°142, Rome, P29.
58 FAO, « La Foresterie et le
développement rural », Étude FAO Forêts,
N°26, Rome, 1981, P.1.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 37
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
développement rural ont considéré la
sylviculture au même titre que l'agriculture. D'autant plus que l'un des
principes directeurs de la stratégie forestière de l'UE est
« l'optimisation de la contribution des forêts et du secteur
forestier au développement rural 59 ». C'est la
raison pour laquelle, la politique de développement rural est le
principal outil de financement de la stratégie forestière
à travers le Fonds Européen Agricole pour le Développement
Durable (FEADER). Les programmes mis en oeuvre à partir de 2007 montrent
que les forêts et le secteur forestier peuvent participer au
développement rural (Section 1) et que l'Union Européenne a pris
conscience qu'il est nécessaire d'encourager des pratiques qui allient
agriculture et sylviculture pour une meilleure gestion du sol (Section 2).
SECTION 1 : LES FORETS DANS LE MONDE RURAL
Partout dans le monde, les personnes vivant dans les zones
rurales font face à plus de difficultés que celles qui sont
installées dans les zones urbaines, notamment en ce qui concerne la
qualité de vie. Cela s'explique par le fait que ces zones ont peu
d'opportunités de création d'emplois et de richesse, ainsi qu'un
manque d'infrastructures. Cette situation entraine la migration de la
population jeune vers des zones plus viables. Prenant acte de cela, plusieurs
gouvernements ont décidé de consigner le développement des
zones rurales dans leurs agendas nationaux afin d'améliorer les
conditions de vie des populations qui s'y trouvent. Il est important de
préciser que les zones rurales représentent 92% du territoire
total de l'Union Européenne60 et sont habitées par 56%
de sa population61. Cela donne une importance considérable
à la politique de développement rural. L'agriculture et la
sylviculture étant les principales activités menées dans
ces zones, les stratégies de développement rural se concentrent
en grande partie sur leurs ressources. De plus en plus, l'attention se porte
sur le potentiel du secteur
59COM (2013) 659 Final, P.6
60Barbir C.F., «Forest role in the
sustainable development of rural communities, with reference to particular
situations in area administrated by Podu Iloaiei Forest District, Iasi County,
Romania», Journal of Horticulture, Forestry and Biotechnology, Volume
16 (2), 2012, P.279.
61V. KUPCAK, «Regional importance of
forests and forestry for rural development», Acta Universitatis
agriculturae et silviculturae mendelianae brunensis, Volume LIX, N°4,
2011, P.137.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 38
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
forestier à favoriser le développement des
espaces ruraux (I), d'où l'inclusion de mesures forestières dans
les programmes de développement rural (II).
I- La contribution du secteur forestier au
développement
rural dans l'Union Européenne
L'on peut constater un changement de paradigme en ce qui
concerne la contribution des forêts au développement
rural62. Les premières études dans le domaine se sont
focalisées surtout sur la fonction de production des forêts comme
un moyen d'évolution économique, à travers la provision
d'emplois, de revenus et de matières premières. Les études
actuelles donnent beaucoup plus d'importance à leurs services
écologiques et d'utilité publique comme moteur de
développement rural.
La principale relation entre foresterie et monde rural passe
par le concours des produits et services forestiers aux moyens de subsistance
des populations rurales63. Dans sa communication sur une nouvelle
stratégie de l'UE pour les forêts et le secteur forestier, la
Commission a reconnu que « Les forêts contribuent au
développement rural et représentent près de trois millions
d'emplois64 ». En effet, dans les communautés
fortement rurales de l'Union Européenne, les activités
forestières sont une source importante d'emplois : «
Considérées sous un autre angle, les régions
essentiellement rurales représentaient 42,4% de la valeur ajoutée
dans l'agriculture, la sylviculture et la pêche à travers l'UE et
54,9% de l'emploi dans ce secteur. Cela souligne non seulement l'importance de
ce secteur pour les régions essentiellement rurales, mais aussi
l'importance de ces régions pour ce secteur65 ».
Servant de base à la diversification économique, elles se
distinguent souvent par un faible coût d'installation et par un
accès facile et ouvert au marché. L'on peut observer que «
Les petites entreprises du secteur
62 Birgit H.M. ELANDS, K. Freerk WIERSUM,
«Forestry and rural development in Europe: an exploration of
socio-political discourses», Forest Policy and Economics, N°3,
2001, P.5.
63H. GREGERSEN et al., Analyse d'impacts de projets
forestiers:problèmes et stratégies, Études FAO
Forêts, N°114, Rome, 1995, P.13.
64COM (2013) 659 final, P.2.
65
http://ec.europa.eu/eurostat/statitics-
explained/index.php/rural development statistics by
urban-rural typology/fr, consulté le 05/06/2016.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 39
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
traditionnel, qui récoltent et transforment des
produits forestiers constituent l'une des principales sources d'emploi et de
revenus non agricoles pour les ruraux66 ».
Par ailleurs, les forêts offrent de multiples biens et
services publics environnementaux tels que l'épuration de l'air,
l'amélioration du paysage rural, ressources renouvelables, la
réduction des émissions de gaz à effet de serre, etc.
Elles permettent la réalisation d'activités
récréatives telles que l'écotourisme et la chasse.
Nous pouvons donc observer que la contribution du secteur
forestier au développement rural est diverse. Les forêts sont
passées de leur fonction traditionnelle de production à des
fonctions de consommation et de protection.
II- Les mesures forestières dans les programmes
de
développement rural (2007-2013)
Le Règlement (CE) n° 1698/2005 du Conseil
concernant le soutien au développement rural par le FEADER du 20
septembre 2005 comporte au total 40 mesures réparties entre quatre
axes thématiques : L'axe 1 qui concerne l'amélioration de la
compétitivité des secteurs agricoles et forestiers ; l'axe 2 dont
les mesures visent l'amélioration de l'environnement et de l'espace
rural ; l'axe 3 qui porte sur la qualité de vie en milieu rural et la
diversification de l'économie rurale ; l'axe 4 qui vise les
stratégies locales de développement et la promotion des
partenariats public-privé. La moitié de ces mesures a un lien
direct ou indirect avec le secteur forestier67. Parmi ces
dernières, l'on dénombre huit principales mesures
forestières que l'on trouve entre le premier et le deuxième axe
:122, 221, 222, 223, 224, 225, 226 et 227. Nous présenterons toutes les
mesures à l'exception de la mesure 222 car elle sera spécialement
examinée dans la section suivante.
La mesure 122 se réfère à
l'amélioration de la valeur économique des
forêts68. Elle s'adresse aux propriétaires
privés, aux communes, ainsi qu'à des
66 H. GREGERSEN et al., op. cit., P.14
67European Network for Rural Development,
Forestry measures in the 2007-2013 Rural Development
Programmes, December 2010, P.14.
68Article 27 du Règlement (CE) n°
1698/2005.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 40
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
associations de propriétaires privés ou de
communes. L'aide peut être apportée à des investissements
dans des opérations telles que l'élagage, l'amincissement des
arbres, la certification ou encore l'amélioration de la composition des
espèces. Toutes les actions qui permettent d'améliorer la valeur
économique des exploitations forestières, hormis les
opérations de maintenance, sont éligibles. Cependant, pour des
exploitations forestières dont la taille est supérieure à
celle fixée par les États membres dans leurs PDRs, cette aide
s'adresse uniquement à la préparation du plan de gestion des
forêts. Les taux d'aide varient selon les régions
concernées : l'aide prend en charge 60% des investissements pour les
forêts classées sous Natura 2000 (zones de handicaps naturels),
85% pour les forêts se trouvant sur les TOM, 50% pour les zones n'entrant
pas dans les deux groupes précédents. Cette mesure se trouve dans
50 PDRs.
La mesure 221 concerne le premier boisement des terres
agricoles69. Les zones éligibles à cette aide sont
sélectionnées par les États en fonction de leurs besoins
écologiques. En effet, le boisement contribue à plusieurs
objectifs écologiques tels que l'atténuation des changements
climatiques ou la protection du sol et de l'eau. Cette mesure prend en charge
les coûts d'installation, les coûts d'entretien (prime annuelle par
hectare accordée pendant une période maximale de cinq ans), les
pertes de revenus agricoles causées par le boisement (prime annuelle par
hectare boisé pendant une période maximale de 15 ans).L'aide
varie en fonction des régions concernées : 80% pour les espaces
Natura 2000, 85% pour les zones d'outre-mer et 70% pour les autres zones. L'on
trouve cette mesure dans 66 PDRs.
La mesure 223 renvoie au premier boisement des terres non
destinées à l'agriculture70. Les coûts
d'installation sont pris en charge. S'il s'agit de terres agricoles
abandonnées, une prime annuelle par hectare peut être
accordée pendant 5 ans maximum afin de couvrir les coûts
d'entretien. La répartition des taux d'aide est pareille à la
mesure précédente. 40 programmes de développement rural
prennent en compte cette mesure.
69Article 43 du Règlement (CE) n°
1698/2005. 70Article 45 du Règlement (CE) n°
1698/2005.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 41
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
La mesure 224 concerne les paiements Natura 200071.
Il s'agit d'une aide accordée aux propriétaires forestiers
privés ou leurs associations qui subissent des coûts
supplémentaires et pertes de revenus dues aux restrictions à
l'utilisation de leurs forêts imposées par les directives
concernant la conservation de la biodiversité72 . Cette
mesure se trouve seulement dans 15 PDRs. Cela peut s'expliquer par le fait que,
pendant la période d'implémentation des programmes, les plans de
gestion Natura 2000 n'étaient pas encore complètement
établis. De ce fait, les États ont hésité à
considérer cette mesure dans leurs PDRs, vu l'incertitude de son
application réelle sur le terrain.
La mesure 225 se rapporte aux paiements
sylvoenvironnementaux73. Ainsi, lorsqu'un propriétaire prend
des engagements sylvoenvironnementaux - engagements visant
l'amélioration de la valeur écologique des forêts -
lesquels vont au-delà des exigences obligatoires, une aide lui est
accordée afin de compenser les coûts supplémentaires et les
pertes de revenus conséquents. Ces engagements sont
généralement conclus pour une durée minimale de cinq ans
et maximale de sept ans. Cette mesure a été insérée
dans 28 PDRs.
La mesure 226 est relative à la reconstitution du
potentiel forestier et à l'adoption de mesures
préventives74. Cette aide concerne les forêts
dégradées par des catastrophes naturelles ou des incendies. Un
soutien est également prévu afin de prévenir de telles
menaces dans les forêts soumises à un risque d'incendie
élevé ou moyen. Cette mesure est l'une des plus importantes car
elle se trouve dans 60 PDRs.
La mesure 227 concerne les investissements non
productifs75. Dans ce cadre, une aide est prévue pour les
investissements qui améliorent la valeur écologique des
forêts sans pour autant créer de bénéfices
significatifs chez ceux qui les réalisent. Elle est liée aux
engagements pris au titre de la mesure 225 et aux investissements qui
augmentent l'utilité publique des forêts. Il s'agit de la
71Article 46 du Règlement (CE) n°
1698/2005.
72 Directive 79/409/CEE du Conseil du 2 avril 1979
concernant la conservation des oiseaux
sauvages.
Directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la
conservation des habitats naturels
ainsi que de la faune et de la flore sauvages.
73Article 47 du Règlement (CE) n°
1698/2005.
74Article 48 du Règlement (CE) n°
1698/2005.
75Article 49 du Règlement (CE) n°
1698/2005.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 42
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
mesure forestière qui a le plus d'occurrence dans les
programmes de développement rural. En effet, on la trouve dans 71
PDRs.
La Commission Européenne a validé 88 Programmes
de Développement Rural, nationaux ou régionaux, soumis par les
États membres. Tous ces programmes, à l'exception de ceux de
Malte et d'Ireland, comportaient des mesures liées directement ou
indirectement aux forêts. Pour mettre en oeuvre les mesures
forestières comprises dans ces programmes de développement rural,
l'Union Européenne des 27 avait prévu un montant total de 4.5
milliards d'euros. La quasi-totalité des ressources totales a
été allouée aux mesures 221, 226 et 227. A la fin de la
période fixée pour l'implémentation des PDRs, seulement
2.9 milliards ont été effectivement dépensés, pour
un niveau d'implémentation moyen (51,27%).Les mesures forestières
incluses dans les PDRs ont reçu moins d'intérêt que les
mesures agricoles.
Mesure
|
PDRs ayant considéré
la mesure
|
PDRs ayant implémenté
|
Allocation totale Million €
|
Dépenses réelles Million
€
|
Niveau d'implémentation de la
mesure (%)
|
122
|
50
|
48
|
369
|
225
|
56.5
|
221
|
66
|
63
|
1711
|
1312
|
47
|
222
|
19
|
5
|
15
|
0.522
|
2.2
|
223
|
40
|
31
|
257
|
122
|
31
|
224
|
15
|
13
|
75
|
37
|
87.5
|
225
|
28
|
26
|
134
|
47
|
51
|
226
|
60
|
56
|
1622
|
1040
|
52
|
227
|
71
|
65
|
773
|
429
|
83
|
TOTAL
|
4587
|
2987.522
|
51.275%
|
Tableau 2 Dépenses
réalisées en comparaison des ressources allouées
76Source: Third report on the implementation of the
national strategy plan and the Community strategic guidelines for rural
development (2007-2013) of June 11, 2015 [COM (2015) 288 final]
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 43
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
1800 1600 1400 1200 1000
800
600
400
200
0
|
|
|
|
|
Allocation totale Dépenses réelles
|
122 221 222 223 224 225 226 227
Figure 3 Dépenses
réalisées en comparaison des ressources allouées
Dans sa communication sur une nouvelle stratégie de
l'UE pour les forêts et le secteur forestier, la Commission a
estimé qu'il est important d'améliorer l'efficacité des
mesures forestières mises en oeuvre à travers la politique de
développement rural77. Cette action passe par la formation et
la sensibilisation des populations rurales sur les thématiques
forestières.
SECTION 2 :L'AGROFORESTERIE, UNE PRATIQUE
ENCOURAGÉE PAR L'UNION EUROPÉENNE
En ce qui concerne l'utilisation des sols, il faut
généralement choisir entre une destination agricole et une
destination forestière. Mais l'agroforesterie permet de faire un
compromis entre ces deux choix. En effet, il s'agit d'une pratique qui permet
de combiner des éléments de la sylviculture avec la production
agricole et/ou animale sur une même parcelle afin de
bénéficier des interactions qui en résultent. Lorsque les
trois composantes sont associées, on parle d'agrosylvopastoralisme. Pour
la plupart des experts en utilisation des sols, l'agroforesterie porte une
connotation tropicale. Ils considèrent l'agroforesterie
77COM (2013) 659 Final, P.8
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 44
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
comme une pratique exercée exclusivement dans les zones
tropicales. Cette perception est partiellement erronée car diverses
études montrent que, même si ce type d'agriculture est
omniprésent dans les pays tropicaux, il est également prometteur
dans les zones tempérées78. D'ailleurs, la tendance
actuelle dans la gestion des écosystèmes dans les pays
industrialisés conseille d'adopter les principes agroforestiers afin de
mitiger les dégâts environnementaux causés ou
aggravés par une agriculture intensive ou une exploitation
forestière abusive79. C'est dans cette optique que l'Union
Européenne a reconnu les avantages économiques, sociaux et
écologiques de l'agroforesterie (I) et lui a ainsi accordé une
place importante dans sa politique de développement rural (II).
I- Avantages économiques, environnementaux et
perspectives
sociales de l'agroforesterie
Le Centre International pour la Recherche en
Agroforesterie80 (ICRAF) définit le terme «
agroforesterie » comme « un système dynamique de
gestion des ressources naturelles reposant sur des fondements
écologiques, qui intègre des arbres dans les exploitations
agricoles et le paysage rural et permet ainsi de diversifier et maintenir la
production afin d'améliorer les conditions sociales, économiques
et environnementales de l'ensemble des utilisateurs de la
terre81». A travers cette définition, nous pouvons
nous rendre compte que les systèmes agroforestiers ont de multiples
bénéfices. D'ailleurs, ils permettent d'atteindre les objectifs
prévus par l'Agenda 21 de la Convention de Rio : Combattre la
déforestation (Chapitre 11), gérer les écosystèmes
fragiles en luttant contre la désertification et la sécheresse
(Chapitre 12), promouvoir un développement agricole et rural durable
(Chapitre 14). Julie Simard le confirme en affirmant que l'agroforesterie
« est devenue une nécessité pour résorber les
problématiques
78 Michael A. GOLD, James W. HANOVER,
«Agroforestry systems for the temperate zone» in
Agroforestry Systems, Volume 5, Issue 2, June 1987, PP. 109-121.
Byington E. K., «Agroforestry in the temperate
zone», Agroforestry Classification and Management, ed. K. G/
MacDicken, and N.T. Vergara, New York, John Wiley & Sons, 228-289.
79Antonio RIGUEIRO-RODRIGUEZ, Jim McADAM, Maria Rosa
MOSQUERA-LOSADA, Agroforestry in Europe, Springer, 2009, P.v.
80Actuel Centre Agroforestier Mondial.
81Antonio RIGUEIRO-RODRIGUEZ, Jim McADAM, Maria Rosa
MOSQUERA-LOSADA, Op. cit., P.3.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 45
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
environnementales rencontrées en milieu
agricole82». Nous verrons dans cette section que
l'agroforesterie peut fournir des solutions à plusieurs défis
auxquels font face l'UE et ses États membres tels que la
réduction des gaz à effet de serre, l'amélioration des
conditions de vie et la conservation des sols.
Sur le plan économique, l'agroforesterie permet aux
agriculteurs de diversifier leurs activités, donc leurs productions et
leurs rentrées. Elle leur permet également de réduire le
risque lié à une mauvaise récolte. Effectivement, selon
DUPRAZ et LIAGRE, les systèmes agroforestriers sont meilleurs que les
monocultures en matière de productivité et de variations
climatiques83. Cela est dû aux interactions entre les
différentes composantes du système (cultures, arbres et animaux).
De plus, les arbres présents sur le terrain améliorent la
répartition des engrais dans le sol84. De ce fait, la
pratique agroforestière permet aux agriculteurs de réduire leurs
dépenses en fertilisants et pesticides.
Les principaux avantages environnementaux sont la
séquestration du carbone et la protection du sol. En ce qui concerne le
premier avantage, considérant le contexte actuel des changements
climatiques, il faut reconnaître que les systèmes agroforestiers
ont un potentiel important de séquestration du carbone. En effet, les
arbres ont la capacité de l'amasser dans leur biomasse aussi bien
aérienne que racinaire 85 .Pour l'Union Européenne et
ses États membres, l'agroforesterie représente un moyen
intéressant pour atteindre leurs objectifs de réduction des gaz
à effet de serre86. Ainsi, le carbone séquestré
grâce aux systèmes agroforestiers pourrait faire l'objet
d'échange sur le marché européen du carbone à
travers les mécanismes de flexibilité (Mise en oeuvre conjointe
et Mécanisme pour un Développement propre) prévus par le
Protocole de Kyoto 87 . D'autre part,
82 Julie SIMARD, « L'agroforesterie, une
avenue de développement durable pour l'agriculture
québécoise ? », Essai présenté au Centre
de Formation en Environnement en vue de l'obtention du grade de Maître en
Environnement, Sous la direction de Alain COGLIASTRO, Québec,
Université de Sherbrooke, Mai 2012, P.ii.
83 Christian DUPRAZ et Fabien LIAGRE, Agroforesterie.
Des arbres et des cultures, Paris, France agricole, 2011, 432 pages.
84Antonio RIGUEIRO-RODRIGUEZ, Jim McADAM, Maria Rosa
MOSQUERA-LOSADA, op. cit., P.50.
85 José SHIBU, « Agroforestry for
ecosystem services and environmental benefits: an overview»,
Agroforestry systems, vol. 76, n° 1, P 1-10.
86 L'UE et ses Etats membres se sont engagés
à réduire d'au moins 20% les émissions de gaz à
effet de serre d'ici à 2020.
87 Xavier HAMON, Christian DUPRAZ, Fabien LIAGRE,
« L'Agroforesterie :Outil de séquestration du carbone en
agriculture », Décembre 2009, P. 1-5.
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
concernant les sols européens, il convient de remarquer
qu'ils sont affectés, dans leur majorité, par l'érosion
hydrique et éolienne88. Les systèmes agroforestiers
permettent de réduire cette érosion à travers la
présence d'arbres sur les terres agricoles. En effet, grâce
à leurs racines, ils attirent les eaux de ruissellement et facilitent
l'infiltration de l'eau dans le sol89.
Au niveau des perspectives sociales, la diversification des
activités sur les terrains agricoles encourage la création
d'emplois en milieu rural90. Également, la présence
des arbres sur ces terres améliore le paysage rural. Nous pouvons aussi
dire que l'agroforesterie est un moteur de développement local car elle
donne l'occasion aux utilisateurs de la terre de mettre sur le marché
divers produits.
Social
· Landscape value
· Jobs creation
· Local
development
Economic
· Savings in nutrients
· Diversification of activities
· Good productivity
Agroforestry pratices
Environmental
· Carbon sequestration
· Soil conservation
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 46
Figure 4 Avantages économiques,
environnementaux et sociaux de l'agroforesterie
II- L'agroforesterie dans les Programmes de
Développement rural
La prise en compte des systèmes agroforestiers dans la
législation européenne date du 20 septembre 2005 avec le
Règlement (CE) n° 1698/2005. A travers ce texte, le Conseil
considère que « Les systèmes agroforestiers ont une
valeur élevée des points de vue écologique et social,
puisqu'ils associent des
88Antonio RIGUEIRO-RODRIGUEZ, Jim McADAM, Maria Rosa
MOSQUERA-LOSADA, op. cit., P.60.
89 Julie SIMARD, opcit, P.49.
90 FAO, Les arbres hors forêt : vers une
meilleure prise en compte, Cahier FAO Conservation, N° 35, Rome,
2001, P. 154.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 47
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
activités d'agriculture extensive et des
activités sylvicoles, qui ont pour objectif la production de bois et
d'autres produits sylvicoles de grande qualité. Il convient d'oeuvrer en
faveur de leur mise en place91 ». De ce fait, l'Union
Européenne et ses États membres ont décidé
d'accorder une aide financière aux agriculteurs qui la mettent en place
dans leurs activités, l'aide couvrant les coûts d'installation des
systèmes agroforestiers sur les terres agricoles92.
Sur un total de 88 programmes de développement rural
validés par la Commission Européenne, 19 tiennent compte de
l'agroforesterie. Ces programmes sont répartis comme suit : Chypre (1),
Espagne (6), France (3), Hongrie (1), Italie (5), Portugal (2), Royaume-Uni
(1). 15 millions d'euros ont été prévus par le FEADER afin
de soutenir ces programmes. Il était prévu que plus de 3000
agriculteurs puissent bénéficier de cette aide en
établissant pour la première fois des systèmes
agroforestiers sur 60 mille hectares de terres agricoles.
Figure 5 L'agroforesterie dans les Programmes
de Développement Rural93
Cependant, contrairement aux autres mesures
forestières, la mesure 222 a reçu très peu d'attention de
la part des États membres de l'Union Européenne. Comme le
montrent les tableaux suivants, plusieurs pays qui avaient
considéré cette mesure se sont désistés
(Royaume-Uni, et Chypre) et ont été remplacés par la
Belgique. Le premier tableau montre que seulement 3.4% des ressources
prévues pour cette mesure ont été effectivement
dépensées. Le deuxième tableau nous permet de constater
que, sur les 3000 bénéficiaires probables, seulement 64
agriculteurs ou propriétaires de terres ont pu bénéficier
de l'aide prévue (2,3%) et
91(39) du Règlement (CE) n° 1698/2005.
92Article 44 du Règlement (CE) n°
1698/2005.
93Source: lamas SZEDLAK,
«Agroforestry in Rural Developments Programmes, 2007-2013 and
beyond».
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 48
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
seulement 1.260 ha sur les 60.000 prévus ont
été concernés par l'aide (2,1%)94.Sur les deux
tableaux, l'on peut remarquer que la Hongrie est le pays qui a le taux
d'implémentation le plus élevé.
Country
|
Regions
|
Allocated resources
|
Financial execution
|
Implementation rate
|
|
|
000€
|
000€
|
%
|
Belgium
|
Flanders
|
500
|
0
|
0
|
France
|
Guadeloupe, Guyane
|
3228
|
39
|
1.2
|
Hungary
|
|
2813
|
380
|
13.5
|
Italy
|
Marche, Lazio, Umbria, Veneto, Sicilia
|
1300
|
10
|
0.8
|
Portugal
|
Mainland, Azores
|
6804
|
93
|
1.4
|
Spain
|
Aragón, Asturias, Canarias, Extremadura, Galicia
|
411
|
0
|
0
|
Total EU27
|
|
15056
|
522
|
3.4
|
Tableau 3 Ressources allouées à
la mesure 222 et Dépenses effectives (PDRs 2007-2013)
|
Beneficiaries (n)
|
Area (ha)
|
Country
|
Target
|
Realised
|
Implementation rate
|
Target
|
Realised
|
Implementation rate
|
Belgium
|
75
|
0
|
0
|
250
|
0
|
0
|
France
|
610
|
4
|
0.7
|
3032
|
34
|
1.1
|
Hungary
|
300
|
59
|
19.7
|
3000
|
594
|
19.8
|
Italy
|
1032
|
1
|
0.1
|
6729
|
9
|
0.1
|
Portugal
|
575
|
0
|
0
|
15025
|
0
|
0
|
Spain
|
205
|
0
|
0
|
1600
|
0
|
0
|
Total EU27
|
2797
|
64
|
2.3
|
29636
|
637
|
2.1
|
Tableau 4 Indicateurs de résultats
présentant le taux d'implémentation de la mesure 222 (PDRs
2007-
2013)96
D'après ce qui précède, on peut
aisément constater une faible implémentation des programmes de
développement rural ayant pris en compte les systèmes
agroforestiers. En comparaison avec les autres mesures forestières, les
ressources économiques allouées à la mesure 222
étaient limitées. Plus, il y a eu une utilisation insuffisante de
ces ressources. Andrea PINASELLI apporte plusieurs raisons qui peuvent
expliquer l'échec de ces PDR97. D'abord, l'on peut relever le
manque de connaissances en agroforesterie. P.K NAIR l'a également
94Andrea PINASELLI, D. MARANDOLA, S. MARONGIU, et al.,
« The role of rural development policy
in supporting agroforestry systems in EU », EURAF,
Juin 2014,
P.6.
http://www.cnr.it/istituti/Allegato
80167.doc , consulté le 21/05/2014.
95Source : idem, P.10.
96Source : Ibidem.
97Idem, P7-8.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 49
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
reconnu dans ces propos, « As the editors say, the
European Union has recognized the economic, ecological and social advantages of
agroforestry in its rural development policy; but the implementation of the
policy is adversely affected by the lack of adequate information on the
subject98 ». D'autre part, la mesure ne prenait
pas en compte tous les types de systèmes agroforestiers. Elle
considérait uniquement les « silvoarable practices
».D'autres systèmes tels que l'agrosylvopastoralisme ont
été écartés des PDR. Enfin, l'aide accordée
ne couvrait que les coûts d'installation des systèmes. Des fonds
n'ont pas été prévus pour supporter les coûts de
gestion de ces systèmes.
Toutefois, il faut également remarquer que cette
première expérience a permis à l'agroforesterie
d'être prise en compte dans la politique de développement rural de
l'Union Européenne. L'UE a un intérêt grandissant pour
l'agroforesterie comme le montrent les PDR prévus pour la période
2014-2020. La réforme du deuxième pilier de la PAC prévoit
de corriger certaines erreurs relevées ci-dessus99. Ainsi
l'aide couvrira non seulement les coûts d'installation mais aussi ceux de
l'entretien des systèmes agroforestiers. Également, la mesure ne
sera plus adressée seulement aux agriculteurs et propriétaires
privés de terres mais aussi aux associations et
municipalités100. D'autre part, l'intérêt que
l'UE porte à l'agroforesterie est également visible à
travers le projet de recherche scientifique AGFORWARD qui vise à faire
la promotion de l'agroforesterie en Europe101. Il s'agit d'un projet
financé par le FP7, septième programme cadre de l'UE pour la
recherche et le développement technologique. Ayant commencé en
2014, ce projet va permettre de vulgariser l'information sur les
systèmes agroforestiers.
98Antonio RIGUEIRO-RODRIGUEZ, Jim McADAM, Maria Rosa
MOSQUERA-LOSADA, op. cit, P.v. 99Règlement UE
N°1305/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 17 Novembre 2013
relatif au soutien au développement rural par le FEADER.
100 Idem, article 23.
101www.agforward.eu,
consulté le 15/05/2016.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 50
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
CHAPITRE III : LES FORETS COMME FACTEUR DE
COOPÉRATION ENTRE L'UE ET LE MONDE EXTÉRIEUR
Donner une définition à l'identité
internationale de l'UE nous amène à questionner le fondement de
sa puissance dans le jeu politique mondial. Plusieurs auteurs102 qui
se sont heurtés à ce questionnement tendent à dire que la
puissance de l'Union Européenne dérive de sa capacité
à diffuser ses normes sur la scène internationale. En effet,
certains tels que Zaki LAIDI justifient cette thèse par l'échec
de la Communauté Européenne de Défense, projet
rejeté par l'Assemblée Nationale française le 30
août 1954. Ainsi, pour Ian MANNERS, « pendant l'ère
post-guerre froide, l'UE a de plus en plus tenu lieu de pouvoir normatif en
politique internationale et ce, même si cette conceptualisation est
quelque peu mise à mal depuis l'invasion de l'Irak et la
stratégie européenne de sécurité de
2003103 ». L'on peut même parler d'une «
hégémonie normative de l'UE » au vu des multiples
initiatives mises en oeuvre dans le cadre de la politique de coopération
au développement, principal instrument de son action extérieure.
Cette hégémonie s'explique par le fait que le marché
européen est le plus important au monde et les pays qui veulent y
participer sont obligés de s'arrimer aux normes européennes, les
normes environnementales étant les plus strictes. Pour Laidi, le
périmètre normatif de l'UE s'articule autour de trois composantes
intéressantes qui sont la gouvernance mondiale, la régulation de
la concurrence mondiale et l'environnement104. Effectivement,
à travers sa participation active à tous les processus
internationaux qui visent la protection de l'environnement, notamment des
forêts, l'UE a réussi à s'ériger comme le garant
d'un développement durable. Sa lutte contre la déforestation et
la dégradation des
102 Ian MANNERS, «The European Union's normative power:
critical perspectives and perspectives on the critical», Normative power
Europe, Palgrave Macmillian, 2011, PP.226-247.
Zaki LAIDI, La norme sans la force, l'énigme de la
puissance européenn , Presses de Sciences-Po, 2005, PP.296
103 Ian MANNERS, « L'identité internationale
de l'Union Européenne : Un pouvoir normatif dans le jeu politique
mondial », Bernard Adam (Dir.), Europe, puissance tranquille ? :
Rôle et identité sur la scène mondiale, Bruxelles,
Éditions Complexe, 2007, P.1
104 Zaki LAIDI, « L'Europe, puissance normative
internationale », Politiques Européennes, Presses de Sciences
-Po, 2009, PP.227-242.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 51
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
forêts lui a permis de développer une action
extérieure en faveur de la gestion durable des forêts. D'ailleurs,
la Communication de la Commission sur une stratégie de l'UE en faveur
des forêts et du secteur forestier insiste sur le fait qu'il faut
accentuer ladite action. Pour ce faire, « La Commission et les
États membres soutiendront une gestion durable des forêts en
Europe et ailleurs dans le monde, en insistant sur le rôle que les
forêts peuvent jouer dans la transition vers une économie verte,
dans le contexte de la coopération au développement et de
l'action extérieure de l'UE105 ». Ceci est une
innovation apportée par la nouvelle stratégie forestière.
De façon explicite, l'UE exprime son engagement pour la valorisation
d'une gestion durable des forêts dans le monde. Même si cela n'a
pas été clairement exposé ni dans la stratégie
forestière de 1998, ni dans le plan d'action de 2007, l'on peut
constater cette action forestière extérieure dans les processus
d'adhésion (Section 1), ainsi que dans le financement de programmes de
gouvernance forestière dans le monde (Section 2).
SECTION 1 : L'ACTION FORESTIÈRE EN LIEN AVEC
L'ADHÉSION DE NOUVEAUX ÉTATS
Après la chute du rideau de fer entre 1989 et 1990, les
anciens pays du bloc de l'Est, communément connus sous l'appellation de
Pays d'Europe Centrale et Orientale (PECOs)106, vont soumettre leur
demande d'adhésion à l'Union Européenne. Ces nouveaux
États désirent se joindre à cette organisation
régionale parce qu'elle représente un espace libéral et un
pôle de croissance économique. Mais l'adhésion à la
Communauté est soumise à des conditionnalités politique et
économique. En effet, les critères de Copenhague
requièrent « des institutions stables garantissant la
démocratie, l'état de droit, les droits de l'Homme, le respect
des minorités et leur protection107 » ainsi qu'une
« économie de marché viable ainsi que la capacité
de faire face à la pression concurrentielle et aux
105 COM (2013) 659 final, P.16
106 Il s'agit de dix pays : Hongrie (31 mars 1994), Pologne (5
avril 1994), Roumanie (22 juin 1995), Slovaquie (27 juin 1995), Lettonie (27
octobre 1995), Estonie (24 novembre 1995), Lituanie (8 décembre 1995),
Bulgarie (14 décembre 1995), République Tchèque (17
janvier 1996) et Slovénie (10 juin 1996).
107www.europedia.moussis.eu,
consulté le 08/06/2016.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 52
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
forces du marché à l'intérieur de
l'Union108 ». En d'autres termes, il était question
pour ces pays issus du système soviétique d'adopter
l'éthique démocratique et les principes du libéralisme
économique. Il s'agit d'exigences que ne remplissent pas les PECOs au
moment de leur demande d'adhésion. De ce fait, l'Union va signer des
accords d'association avec ces nouveaux États afin de préparer
leur accession. Dans cette optique, plusieurs programmes d'aide
financière seront élaborés : PHARE, SAPARD et ISPA. Parmi
ces mesures d'accompagnement, seul le SAPARD s'intéresse directement au
secteur forestier (II), mais il convient de préciser que certaines
activités développées dans le PHARE ont eu des influences
sur le secteur forestier (I).
I- Le programme PHARE
Créé par le Règlement (CEE) n°
3906/89 du Conseil, du 18 décembre 1989, le programme PHARE était
uniquement destiné - comme son nom l'indique - aux nouvelles
démocraties naissantes de la Pologne et de la Hongrie. En effet, «
au départ, ce n'est qu'un règlement dont la mission
première était de délivrer une aide économique et
financière en faveur de deux pays, la république de Hongrie et la
république populaire de Pologne109 ». Peu à
peu, grâce à de nouvelles demandes d'adhésion, il va
devenir le principal instrument financier de la politique de
préadhésion pour les pays d'Europe centrale et orientale. Ainsi,
sa couverture géographique s'étendra aux pays baltes en 1991,
à la Slovénie en 1992, la République Tchèque et la
Slovaquie en 1993, aux pays des Balkans entre 1995 et 1996, à la Turquie
en 2001.
Programme d'assistance dans la transition démocratique,
le PHARE est orienté vers les réformes institutionnelles et la
restructuration économique. Il s'adresse à cinq principaux
domaines dont l'environnement et l'agriculture. Le tableau 5 présente le
montant des financements accordés à ces deux secteurs entre 1990
et 1999. Il convient de préciser que les forêts n'étaient
pas directement concernées par cet instrument financier, mais
étant liées aux secteurs
108Idem.
109 Mathieu BRIOUDES, Rapport basé sur un
mémoire DESS « Environnement et développement
sylvicoles, Université Montesquieu Bordeaux IV, Année
Universitaire 2002-2003 », École polytechnique
fédérale de Zurich, 2004, P.13.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 53
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
environnemental et agricole, les activités y
financées ont eu des incidences sur le secteur forestier. Cependant, il
serait difficile d'évaluer les financements qui ont été
directement dirigés vers les activités forestières.
Secteur
|
Engagements
|
Contrats
|
Paiements
|
Agriculture
|
622.40
|
491.36
|
460.28
|
Environnement et sécurité nucléaire
|
954.22
|
603.90
|
498.08
|
Tableau 5 Montant des financements accordés aux
secteurs agricole et environnemental dans le cadre du programme PHARE pour
la période 1990-1999 (En million d'euros)110
Il faut néanmoins remarquer que de très rares
projets portant sur le secteur forestier ont été mis sur pied
dans certains pays. C'est par exemple le cas en Estonie en 2003 avec un projet
de renforcement de la gestion forestière (CRIS n°
2003/005-026.08.01). D'un montant total de 965 mille euros, ce projet avait
pour but de renforcer les capacités des autorités administratives
dans l'implémentation du Règlement du Conseil (CEE) N°
1615/89, du 29 mai 1989, instaurant un système européen
d'information et de communication forestières (EFICS). C'est
également le cas en Pologne en 1994 avec l'établissement d'un
programme de protection forestière (PL 9403). S'élevant à
12 millions d'euros, le programme visait entre autres la protection des
forêts contre les feux de forêts et les parasites, le renforcement
et le développement des capacités de l'administration
forestière, ainsi que la préservation de la
biodiversité.
Au-delà de ces programmes nationaux, on note
également l'existence de projets multinationaux à l'instar du
MERA 92 et du MERA 95. Le MERA est un projet qui s'inscrit dans le cadre du
« PHARE multi-country environment programme111 ».
Initié en 1992, il est implémenté dans six pays (Pologne,
République tchèque, Slovaquie, Roumanie, Bulgarie et Hongrie) et
s'oriente vers l'agriculture et l'environnement. En 1995, cinq autres pays vont
se joindre aux premiers. Ces projets, menés dans le cadre de la
recherche, ont principalement permis de recueillir des données sur les
forêts des pays concernés.
110Source : Ibid,
P.16.
111 J.F. DALLEMAND et V. PERDIGAO, PHARE
Multi-country environment programme. MERA Project, Space
Applications Institute, 1998, P.3.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 54
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
A partir de ce qui précède, nous pouvons
constater que le secteur forestier ne faisait pas partie des
préoccupations premières du programme PHARE. C'est ce qui
explique la rareté des projets dans ce domaine et le faible financement
des projets existants.
II- L'Instrument Agricole de Préadhésion
L'instrument agricole de préadhésion ou SAPARD
voit le jour par le Règlement (CE) N° 1268/99 du Conseil, du 21
juin 1999, relatif à une aide communautaire à des mesures de
préadhésion en faveur de l'agriculture et du développement
rural dans les pays candidats d'Europe centrale et orientale, au cours de la
période préadhésion. Il s'agit d'un cadre d'aide
communautaire dans « la mise en oeuvre de l'acquis communautaire
concernant la politique agricole commune et les politiques connexes, ainsi que
la résolution des problèmes prioritaires du secteur agricole et
des zones rurales des pays candidats 112». Par
l'expression « politiques connexes », l'on peut
aisément constaté que le champ d'application de cet instrument
financier n'est pas clairement défini. Il peut donc s'appliquer à
d'autres secteurs tels que l'environnement et l'industrie, mais aussi aux
forêts d'autant plus qu'il s'agit de thématiques qui y sont
directement liées. Comme prévu au sommet de Berlin en 1999, le
SAPARD reçoit une dotation budgétaire annuelle de 520 millions
d'euros (Tableau 6). Cependant, les frais réellement
dépensés entre 2001 et 2002 n'atteignent même pas la
moitié de l'allocation budgétaire. C'est en 2003 qu'une nette
amélioration est réalisée.
SAPARD
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
Engagements
|
Paiements
|
E
|
P
|
E
|
P
|
E
|
P
|
528,9
|
-
|
539,6
|
30,5
|
554,5
|
123,7
|
560
|
438,9
|
Tableau 6 Dotation budgétaire annuelle entre
2000 et 2003 (en millions d'euros)
L'une des quinze actions éligibles à un soutien
financier est centrée sur le secteur forestier en milieu rural : «
sylviculture y compris le boisement),
112 Article 1 du Règlement (CE) N°
1268/99
113 Mathieu BRIOUDES, op.cit., P.23.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 55
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
investissements dans les exploitations sylvicoles
appartenant à des propriétaires privés et transformation
et commercialisation des produits sylvicoles114 ». Cette
mesure est incluse dans les plans de sept pays : Bulgarie, Estonie, Lettonie,
Lituanie, Pologne, Roumanie et Slovaquie. La contribution maximale de l'Union
Européenne pour cette mesure entre 2000 et 2006 s'élève
à 167 millions d'euros, soit 5% de sa contribution au SAPARD
(Tableau 7). Or, les contributions pour d'autres secteurs tels
que celui des infrastructures et de l'exploitation agricole sont assez
représentatives, soit respectivement 21% et 22%. Une fois de plus, nous
pouvons constater que le secteur forestier est délaissé au profit
d'autres, malgré la volonté de l'Union Européenne
d'encourager les investissements dans ce domaine.
Pays
|
Contribution maximale de l'UE pour le
secteur forestier Million €
|
Pourcentage sur la contribution totale de l'UE au
SAPARD
|
Bulgarie
|
30.0
|
8.3%
|
République Tchèque
|
0
|
0%
|
Estonie
|
1.1
|
1.3%
|
Hongrie
|
0
|
0%
|
Lettonie
|
4.6
|
3%
|
Lituanie
|
7.7
|
3.7%
|
Pologne
|
6.2
|
1%
|
Roumanie
|
108.0
|
10%
|
Slovaquie
|
9.7
|
7.6%
|
Slovénie
|
0
|
0%
|
TOTAL
|
167.3
|
5%
|
Tableau 7 Estimation statistique de la mesure
forestière dans le programme SAPARD pendant la période
2000-2006115
De ce qui précède, on peut constater que la
forêt n'est presque pas prise en compte dans les programmes de
préadhésion. Dans le PHARE, elle est totalement ignorée et
ne bénéficie que des activités développées
dans le cadre de l'agriculture
114Article 2 du Règlement (CE) N° 1268/99
(Mesure 14).
115Source : Commission Européenne,
Sustainable Forestry and the European Union, Bruxelles, 2003, P.18.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 56
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
et de l'environnement. Quant au SAPARD, il possède une
mesure qui adresse directement les thématiques forestières.
Cependant le financement de cette mesure est moindre par rapport à celui
consacré à d'autres domaines. Et pourtant, les pays d'Europe
centrale et orientale ont un potentiel sylvicole qui, exploité, aurait
permis de valoriser leur économie. L'étude des programmes de
préadhésion montre que les PECOs ont plutôt orienté
leurs priorités vers d'autres secteurs au lieu de mettre en valeur leurs
forêts à travers ces opportunités de financement.
SECTION 2 :L'ACTION POUR L'AMÉLIORATION DE
LA GOUVERNANCE FORESTIÈRE DANS LES PED
La déforestation dans le monde est directement
liée à l'exploitation illégale des forêts dans les
Pays en Développement. Ces actions concourent à l'aggravation des
effets des changements climatiques. L'Union Européenne et ses
États membres se sont engagés dans le cadre du REDD+ à
financer des projets visant à réduire les émissions
provenant de la déforestation et de la dégradation des
forêts. De ce fait, l'amélioration de la gouvernance
forestière dans les pays affectés par ce fléau peut
contribuer à atténuer les effets des changements climatiques sur
la planète entière. La gouvernance forestière peut
être appréhendée comme « le modus operandi par
lequel les fonctionnaires et les institutions acquièrent et exercent
leur autorité dans la gestion des ressources
forestières116 ». Ainsi, financer la gouvernance
forestière revient à renforcer les capacités des acteurs
étatiques et non étatiques dans la gestion durable des ressources
forestières. L'Union Européenne utilise deux cadres de
financement de la gouvernance forestière : d'une part, elle le fait
à travers sa politique de voisinage (I), d'autre part elle
I- La gouvernance forestière dans la politique de
voisinage
La politique européenne de voisinage a
été mise sur pied en 2004 dans le but de stabiliser les relations
entre l'Union Européenne élargie et les pays voisins.
116 Note d'orientation préparée par l'OIBT et la
FAO sur « Gouvernance et atténuation des effets des changements
climatiques »,
www.fao.org/forestry,
consulté le 08/06/2016.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 57
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
Après l'élargissement de l'Union à dix
nouveaux pays en 2004, l'Union Européenne a voulu éviter
l'apparition de nouvelles lignes de division en Europe. Elle a donc voulu
offrir à ses voisins des relations privilégiées. La PEV se
distingue de l'élargissement en ce sens que l'UE offre à ses
voisins tout sauf les institutions c'est-à-dire que les pays voisins
auront accès à un grand nombre de facilités mais ne
pourront pas bénéficier d'une adhésion complète
117 . La coopération entre l'UE et les pays partenaires
à la PEV se fait sur la base de plans d'action bilatéraux. Les
objectifs de cette politique se rapprochent des critères de Copenhague
c'est-à-dire la démocratie, les droits de l'Homme, les principes
d'économie de marché, le développement durable et la
gouvernance. Pour réaliser ces objectifs, l'Union met à la
disposition de ses partenaires une aide financière et technique.
Dans le cadre de la politique de voisinage, il existe une
action dirigée vers la gouvernance forestière. Elle voit le jour
en 2005 grâce à la Déclaration de Saint-Pétersbourg
signée par la Commission Européenne et 44 gouvernements d'Europe
et d'Asie septentrionale qui s'engagent à lutter contre l'exploitation
forestière illégale et à améliorer la gouvernance
forestière. Le projet ENPI-FLEG qui naît dans ce cadre s'adresse
à sept pays : Arménie, Géorgie, Azerbaïdjan,
Moldavie, Ukraine, Bélarussie et Russie. Réalisé en
partenariat avec la Banque Mondiale, l'Union Internationale pour la
Conservation de la Nature (UICN) et le Fonds Mondial pour la Nature (WWF), il
vise à renforcer la mise en oeuvre de la législation
forestière dans les pays concernés et ainsi encourager une
gestion durable des ressources forestières entre 2012 et 2016.
Les pays concernés par ce projet ont des ressources
forestières considérables. C'est par exemple le cas de la Russie
dont la Taïga représente 20% de la couverture forestière
mondiale. Les forêts de cette région permettent la subsistance
d'environ 170 million de personnes118. Cependant, la
pauvreté, la corruption, l'ineffectivité des politiques et de la
législation forestières participent à l'accroissement de
l'exploitation illégale forestière dans cette région.
C'est la
117 « Sharing everything but institutions »
est la formule originale utilisée par le président de la
Commission Européenne en service en 2004, Romano Prodi, dans son
discours du 5 Décembre 2002,
http://europa.eu/rapid/press-release
SPEECH-02-619 en.htm, consulté le 08/06/2016.
118 Déclaration de Saint-Pétersbourg.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 58
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
raison qui sous-tend l'existence de ce projet régional
et sa déclinaison en activités nationales.
Lorsqu'on analyse les activités mises en oeuvre dans le
cadre du projet ENPI-FLEG, l'on peut les répertorier en trois
principales catégories : la recherche, la formation et la mise sur pied
de systèmes de surveillance forestière. Dans le cadre de la
recherche, les activités ont permis d'emmener des études. Ainsi,
entre mai et août 2014, dans les régions rurales des sept pays,
les populations ont été soumises à un sondage dont le but
était d'évaluer leur dépendance aux
forêts119. En ce qui concerne, la formation, des ateliers et
des conférences ont permis aux acteurs concernés
d'acquérir de nouvelles compétences dans le domaine de la gestion
durable des forêts. C'est par exemple le cas en Arménie où
un atelier de formation fut organisé du 04 au 05 octobre 2014 pour les
entreprises forestières sur l'implémentation d'un système
de traçabilité du bois120. Également, le projet
a permis la constitution de groupes de jeunes forestiers dans les pays
concernés et leur formation sur les questions forestières. Aussi,
la forêt a été incluse dans les programmes scolaires en
Moldavie et les élèves ont l'opportunité de
découvrir les défis auxquels est soumis le secteur forestier dans
le contexte du développement durable. S'agissant des activités de
surveillance, elles concernaient principalement la mise en place de
systèmes de traçabilité permettant de vérifier la
légalité de la chaîne d'approvisionnement du bois
récolté. En Moldavie par exemple, un système de
traçabilité du bois a été développé
afin de contrôler l'exploitation des ressources
forestières121.
II- Le programme FLEGT
Le plan d'action FLEGT est une initiative communautaire
établie en 2003 afin de lutter contre l'exploitation forestière
et vise l'application des réglementations forestières, la
gouvernance dans le secteur forestier et encourage les échanges
commerciaux entre les pays producteurs de bois et l'UE. Cette initiative
s'inscrit dans le respect des principes de la stratégie
forestière notamment celui qui concerne la participation de l'Union et
de ses États membres
119ENPI.East-FLEG II, Regional Bulletin, Autumn 2014,
P.7. 120Idem, P.21.
121 ENPI.East-FLEG II, Regional Newsletter, Winter 2016, P.10.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 59
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
aux processus internationaux qui concernent les forêts.
Les principaux instruments qui accompagnent la mise en oeuvre de ce plan sont
les APV que l'UE signe avec les pays producteurs de bois partenaires au
processus FLEGT. Il s'agit d'accords commerciaux bilatéraux
juridiquement contraignants qui définissent les engagements et les
actions des deux parties en matière de lutte contre l'exploitation
illégale des forêts. A l'heure actuelle, plusieurs pays ont
adhéré à ce partenariat : le Cameroun, le Centrafrique, le
Ghana, l'Indonésie, le Centrafrique, le Libéria et la
République du Congo. D'autres pays tels que le Vietnam et la Malaisie
sont en phase de négociation tandis que certains pays comme la Colombie
et le Pérou semblent intéressés par cette initiative
prometteuse pour l'avenir des forêts dans le monde122.
Les principaux aboutissements du FLEGT concernent
l'application du principe de transparence dans les pays partenaires de l'UE. En
effet, la gestion forestière fait généralement partie des
domaines exclusifs de l'autorité publique et les données
concernant cette gestion ne sont pas mises à la disposition du public.
Avec la mise en oeuvre de l'APV-FLEGT, on a pu remarquer une
amélioration de la gouvernance forestière concernant la
transparence et la participation des acteurs non étatiques. Ainsi «
grâce aux informations mises à leur disposition, les acteurs
de la société civile ont déjà pu dénoncer la
corruption et les illégalités au Cameroun, au Ghana et au
Libéria, et ont parfois pu mettre le gouvernement et les entreprises
face à leurs responsabilités 123».
A la suite de l'analyse de l'action en faveur de
l'amélioration de la gouvernance forestière dans le monde, nous
pouvons constater que les deux modes d'approche ont de faibles similitudes mais
d'importantes différences. Sur le plan de la procédure, les deux
cadres se rapprochent car ils reposent sur des accords bilatéraux
conclus par chaque pays avec l'Union Européenne. Également, ces
deux projets évoluent dans le cadre de l'action extérieure ou
aide au développement octroyée aux PED par l'UE. Cependant,
contrairement au projet ENPI-FLEG, il ne s'agit pas seulement de mettre en
oeuvre la gouvernance
122 Emmanuel HEUSE, « Etat d'avancement du Plan
d'action FLEGT au niveau international », Forum sur la Gouvernance
forestière en Afrique (Kinshasa, 11 au 12 septembre 2012), P.9
123 FERN, De l'ombre à la Lumière. Forêts,
transparence et APV dans cinq pays africains, P.6.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 60
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
forestière au niveau national dans le cadre du FLEGT.
Son fonctionnement permet l'établissement de liens d'échange
entre l'UE et les pays partenaires. En effet, pour le projet ENPI-FLEG, il
n'est pas fait mention du « Trade ». Cela peut
sûrement s'expliquer par le fait que les pays inclus dans ce projet sont
des partenaires privilégiés de l'Union Européenne à
travers sa politique de voisinage. De ce fait, les liens d'échange sont
déjà pris en compte par l'entière politique. Par contre,
les pays inclus dans le FLEGT ne sont pas des « voisins »
mais des partenaires éloignés de l'UE. Ainsi, l'UE a
trouvé nécessaire de définir clairement les rapports qui
la lient à ces pays dans le cadre du FLEGT.A partir de ces
différentes initiatives, nous pouvons constater qu'il y a une
hiérarchisation de rapports de partenariats à travers la
politique extérieure de l'Union Européenne. Le voisinage de l'UE
est beaucoup plus pris en considération que les autres pays du monde qui
n'en font pas partie. Par ailleurs, le FLEGT ne repose pas sur une
déclaration de principes comme l'autre projet, mais sur des accords
juridiquement contraignants. Cela signifie que les acteurs inclus dans le FLEGT
sont obligés de respecter les engagements pris dans ce cadre sous peine
de sanctions ou de mesures restrictives. Toutefois, l'on peut remettre en
question l'équilibre de ces rapports. En effet, nous pouvons remarquer
que ces deux projets reposent sur des rapports
déséquilibrés entre une organisation régionale,
c'est-à-dire un ensemble de pays, et chaque pays pris solitairement. Il
y a donc risque que ces partenariats ne soient pas « gagnant-gagnant
» mais profitent beaucoup plus à l'UE qui a la latitude
d'imposer ses standards aux pays extérieurs, étant donné
qu'elle représente le plus grand marché mondial.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 61
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
CHAPITRE IV : LA PERSISTANCE DE QUESTIONS MAJEURES
ET LES PERSPECTIVES POUR LA CONSTRUCTION D'UNE UNION
EUROPÉENNE FORESTIÈRE
Dans le chapitre précédent, nous avons pu
observer que, dans le cadre de sa politique extérieure, l'Union
Européenne est engagée sur plusieurs terrains en vue de la
gestion durable des forêts et la lutte contre l'exploitation
illégale des ressources ligneuses. Plus grand marché mondial de
bois, elle privilégie le bois récolté dans des conditions
légales. Au titre de ses engagements et de ceux de ses États
membres, elle encourage le respect de la législation forestière
et la mise en place d'une gouvernance forestière dans les pays avec
lesquels elle a développé des partenariats. D'ailleurs, elle
milite pour l'adoption d'un accord international contraignant sur les
forêts afin que leur gestion partout dans le monde obéisse aux
principes du développement durable. Cependant, l'on peut constater un
écart entre ses ambitions internationales et ses initiatives
communautaires dirigées vers les forêts et le secteur forestier.
En effet, il existe un contraste important entre le discours politique et les
actions implémentées. Les positions des États membres, des
entreprises forestières et des propriétaires privés
divergent de celle du Parlement Européen, d'où la persistance de
questions majeures (Section 1). Afin de parvenir à une Union
Européenne forestière, il est nécessaire que ces
problématiques soient examinées et que de nouvelles perspectives
soient envisagées (Section 2).
SECTION 1 : LA PERSISTANCE DE QUESTIONS MAJEURES
La stratégie forestière de l'Union
Européenne fixe un cadre à toutes les actions qui touchent de
près ou de loin les forêts et le secteur forestier. Son ambition
est de veiller à la gestion durable des forêts et de leurs
ressources, afin de garantir leur rôle multifonctionnel. Cependant, elle
fait face à des problématiques qui entachent sa bonne mise en
oeuvre. Ces dernières ont fait jour
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 62
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
dès la mise sur pied de la stratégie
forestière. Mais, nous pouvons dire que l'Union Européenne a
choisi de les ignorer afin d'éviter des divisions en son sein. L'on peut
observer qu'il y a un conflit entre les volontés environnementales de
l'Union Européenne et les égoïsmes économiques de ses
États membres. Ce conflit ne permet pas l'émergence d'une
politique forestière commune (Section 1) et conduit à la
fragmentation des politiques ayant un impact sur le secteur forestier de l'UE
(Section 2).
I- La base juridique de la stratégie
forestière
Le Dr. Angel ANGELIDIS pense que le problème
fondamental qui se pose pour le secteur forestier de l'Union Européenne
est l'élaboration d'une politique forestière commune. En effet,
dans leur contribution au livre vert de la Commission, les services du
Parlement Européen ont rappelé la nécessité de
créer dans les Traités de l'UE une base juridique
spécifique pour les forêts124.
Dans sa Communication sur une nouvelle stratégie pour
les forêts et le secteur forestier, la Commission rappelle que le
Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne ne fait aucune
mention d'une politique communautaire pour le secteur forestier. Mais cette
absence n'interdit pas la conception d'une politique forestière
européenne officielle qui nécessite, toutefois, que les
décisions soient prises à l'unanimité et non à la
majorité qualifiée, comme le rappelle le Dr. ANGELIDIS. C'est
pourquoi cette volonté s'est toujours heurtée au véto de
certains États membres125 :
- L'Allemagne et l'Autriche qui estiment que les forêts
doivent relever uniquement de la compétence nationale/régionale
;
- Le Royaume Uni qui est hostile à toute extension des
compétences au niveau européen à cause du coût
budgétaire que cela peut produire ;
- Les pays scandinaves (Suède, Finlande, Danemark) qui
préfèrent un laisser-faire commercial favorisant leurs
entreprises agroforestières nationales telles que IKEA ;
124 Dr. Angel ANGELIDIS et Christian PINAUDEAU, «
Remarques sur la stratégie forestière de l'Union
Européenne », Doc 2013-081, Décembre 2013, P.9.
125Réponses recueillies lors d'un entretien
avec le Dr. Angelidis le 10/05/2016.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 63
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
- La plupart des nouveaux États membres (Bulgarie,
Hongrie, Pologne) faisant partie de la zone d'influence allemande.
C'est ce qu'explique le Dr. ANGELIDIS à travers ces
termes « A cet égard, la Commission a
préféré suivre les États membres (Allemagne,
Autriche, Suède, Finlande, Grande-Bretagne...) qui s'opposent
frontalement à une ingérence de l'UE dans le secteur forestier,
considéré comme fondamental du point de vue économique et
de compétence administrative interne »126. De ce
fait, ils requièrent toujours le respect du principe de
subsidiarité. En effet, l'Union Européenne ne peut agir que dans
le cadre des compétences attribuées à elles par les
États membres dans les Traités. La forêt ayant
été ignorée par les Traités sur l'UE, cette
compétence relève du domaine national.
Par ailleurs, il convient de relever que la première et
la deuxième stratégie forestière de l'UE sont
basées sur des sources juridiques du droit européen non
contraignantes. En effet, la résolution du Conseil, suggère
« une volonté politique d'agir dans un certain domaine
127 ». Quant à la communication de la Commission,
elle fait partie de son pouvoir d'initiative et forme de base au Conseil et au
Parlement pour agir sur les Traités. En effet, « toutes les
politiques communes, toute la législation européenne, tous les
programmes de l'UE sont adoptés par les organes législatifs
après initiative de la Commission sous forme de
communications128». Toutefois, il demeure que la
stratégie forestière a un pouvoir juridique faible car elle n'est
pas contraignante. Elle est limitée par le principe de
subsidiarité qui rappelle que seuls les États sont responsables
du domaine forestier et garants de la mise en oeuvre de la stratégie
forestière. De ce fait, l'on peut dire que « la
stratégie forestière n'est qu'une `ligne de conduite' non
contraignante pour les États membres »129. En
d'autres termes, la stratégie forestière n'est qu'un ensemble de
principes que l'Union Européenne invite les États membres
à suivre. Cette action dépend alors de la volonté et de la
bonne foi
126 Dr. Angel ANGELIDIS et Christian PINAUDEAU, op.cit, P.2.
127www.europedia.moussis.eu,
consulté le 03/06/2016. 128Ibid.
129 Dr. Angel ANGELIDIS et Christian PINAUDEAU, op.cit, P.4.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 64
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
de chaque État car il n'existe aucune sanction qui
pourrait les contraindre à se plier aux exigences de l'UE.
Par conséquent, « Pour autant que ce
déficit persiste, les actions communautaires pour les forêts
continueront à dépendre d'autres politiques et pâtir de
problèmes de conception, de planification et de coordination
»130. Il apparaît donc primordial de clarifier la
base juridique de la stratégie forestière. Pour ce faire, il faut
déterminer quelle forme juridique peut permettre à la
stratégie forestière de s'inscrire dans les lignes directives des
stratégies de Lisbonne et de Göteborg. En d'autres termes, il faut
se demander sous quelle base juridique la stratégie forestière
peut aider de façon efficace et efficiente l'UE à avoir une
économie compétitive respectueuse de l'environnement,
c'est-à-dire faible en émissions de gaz à effet de serre,
et qui permet d'améliorer durablement les conditions de vie des
populations au sein de l'UE.
II- La fragmentation des initiatives liées aux
forêts et le financement
des actions forestières
Lorsqu'on se penche sur la stratégie forestière
de l'Union Européenne, l'on peut aisément constater qu'elle ne
fait qu'encadrer les différentes politiques et initiatives qui ont un
lien avec les forêts dans l'Union Européenne. En effet, il existe
diverses et multiples politiques qui influencent la gestion des forêts et
des produits forestiers.
D'une part, il y a les différentes politiques qui ont
un lien avec l'économie et l'emploi au sein de l'Union
Européenne. Parmi ces politiques figurent la Politique de
Développement rural, la Politique Industrielle, la Politique
Régionale ou encore la Politique Sociale. Ces politiques disposent de
fonds qui permettent de financer les initiatives forestières de l'UE
:
- Le Fonds Européen Agricole pour le
Développement Rural (FEADER)
qui est le principal instrument de financement de la
stratégie forestière. Comme nous l'avons vu au deuxième
chapitre, il a permis de financer les mesures forestières incluses dans
les Programmes de Développement Rural de la période 2007-2013. La
nouvelle réforme de la Politique de
130 Dr. Angel ANGELIDIS et Christian PINAUDEAU, op.cit
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 65
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
Développement Rural prévoit de financer
certaines actions liées à la forêt entre 2014 et 2020.
- Le Fonds Européen de Développement
Économique et Régional (FEDER) fait partie des fonds
structurels de l'Union Européenne. Il a été
créé en 1975 afin de réduire disparités entre
diverses régions de l'UE. Contrairement au FEADER, le règlement
de ce fonds ne comporte aucune mesure forestière. Toutefois, certaines
actions énumérées au cinquième article du
règlement permettent d'apporter un soutien aux entreprises
forestières : l'amélioration de la compétitivité
des PME, la transition vers une économie propre, l'adaptation aux
changements climatiques, la préservation et la protection de
l'environnement, la promotion d'une utilisation rationnelle des ressources,
etc.
- Le Fonds Social Européen (FSE) est
également l'un des fonds structurels de l'UE. Il a été
créé en 1957 dans le cadre du Traité de Rome afin de
soutenir l'accès à l'emploi, ainsi que la formation des citoyens
de l'Union. Le règlement de ce fonds ne prévoit aucune mesure
forestière mais il peut soutenir certaines actions qui ont un impact sur
le secteur forestier. Il s'agit entre autres de : la création d'une
entreprise forestière, les stratégies de développement
local qui visent les forêts, les formations dans les entreprises
forestières.
Ensuite, il y a les différentes politiques
environnementales et énergétiques. Dans ce groupe, nous avons les
initiatives qui concernent la protection de la biodiversité et de leurs
écosystèmes, l'atténuation des changements climatiques, la
réduction des émissions de gaz à effet de serre, la
gestion de l'eau, la promotion des énergies vertes telles que la
biomasse, la gestion rationnelle des ressources. La forêt se trouve
concernée par chacune des initiatives citées
précédemment. Ainsi, le programme LIFE, qui est le principal
instrument de financement des programmes environnementaux, contribue à
l'implémentation de mesures qui visent la protection des forêts
contre les incendies et la restauration des forêts
dégradées par des catastrophes naturelles.
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
Enfin, il existe d'autres initiatives qui ont une influence
secondaire sur le secteur forestier. Il s'agit entre autres de la politique
extérieure de l'Union Européenne et de sa Politique de Recherche.
A travers les partenariats FLEGT et FLEG, l'Union Européenne finance les
programmes de gouvernance forestière dans plusieurs pays partenaires. Le
programme Horizon 2020 est l'instrument financier qui soutient la recherche.
Des requêtes peuvent y être présentées dans le cadre
de programme de recherche sur l'adaptation des forêts aux changements
climatiques ou l'utilisation efficace des ressources forestières.
Figure 6 Initiatives de l'UE ayant un impact sur
les forêts131
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 66
Au vu de cet éventail large de politiques
influençant la gestion des forêts et de leurs ressources, il est
difficile de coordonner les actions qui s'inscrivent dans leurs cadres. C'est
la raison pour laquelle, il est important que l'Union Européenne mette
sur pied un fonds spécifique à la stratégie
forestière. Ce dernier permettra de financer efficacement les
initiatives communautaires se rapportant au secteur forestier.
131 Source : Guillaume De BUREN et al., Les soutiens de
l'Union Européenne dans le domaine de la forêt au regard des
programmes helvétiques, Zurich, École Polytechnique
fédérale de Zurich, 2005, P.6.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 67
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
SECTION 2 : PERSPECTIVES EN VUE DE LA CONSTRUCTION
D'UNE UNION EUROPÉENNE FORESTIÈRE
A travers les rapports et les communications de la Commission,
l'on peut remarquer que l'Union Européenne a la volonté de
prendre en considération le potentiel de ses forêts. Les
différentes réformes subies par sa stratégie
forestière montrent que l'UE tend à devenir une union
forestière, c'est-à-dire qu'elle veut considérer les
ressources forestières comme des éléments à part
entière pouvant être intégrés dans les
Traités. Toutefois, la construction d'une Union Européenne des
forêts nécessite que plusieurs conditions soient remplies, d'une
part l'élaboration d'une vision commune (I) et d'autre part, la mise en
place d'outils de suivi adaptés (II).
I- L'élaboration d'une vision commune
Plusieurs éléments montrent que la
stratégie forestière s'inscrit dans une perspective
évolutive. En effet, au vu des enjeux sécuritaires qui se posent
au monde entier en général et à l'Union Européenne
en particulier, la Commission a estimé qu'il était
nécessaire de redéfinir le cadre d'action de la stratégie
de l'UE en faveur des forêts et du secteur forestier. La nouvelle
stratégie forestière a adopté une démarche plus
large afin de considérer les nouveaux défis qui s'adressent aux
forêts et à la filière-bois. Mais en ce qui concerne la
base juridique de cette stratégie forestière, l'on peut dire
qu'il y a régression car l'évolution normale est d'aboutir
à une politique forestière, donc à l'insertion du secteur
forestier dans les traités sur l'UE. Or, la Communication de la
Commission a une valeur juridique faible et moindre que le Règlement du
Conseil de 1998. Cette régression est la preuve que la vision qui
sous-tend la stratégie de l'UE en faveur des forêts et du secteur
forestier n'est pas claire. Comme le constatent Geneviève REY et Muriel
MAIRE, « L'UE consacre néanmoins incontestablement des moyens
financiers et humains importants au secteur forestier, tant en interne qu'en
coopération. Mais ces moyens sont mis en oeuvre sans ligne directrice
claire ni coordination et donc sans possibilité de procéder
à une véritable
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 68
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
évaluation132 ». Ceci
simplement parce que les États membres ne s'accordent pas sur ce que la
stratégie forestière représente et la façon dont
elle doit être mise en oeuvre.
La vision stratégique qui est une notion issue du
management des entreprises peut être transposée aux
administrations publiques. En effet, la tendance actuelle consiste à
gérer les États et organisations régionales comme des
entreprises, d'où la question de la performance de l'action publique. La
vision stratégique se compose de trois éléments : d'abord
des principes directeurs, ensuite d'un objectif central et enfin d'un projet
ambitieux s'inscrivant dans la durée. Concernant les principes
directeurs, il s'agit de valeurs sur lesquelles repose la politique que l'on
veut mettre en oeuvre. Ils forment l'éthique de la stratégie.
Quant à l'objectif central, il représente la raison qui justifie
l'existence de la stratégie. En ce qui concerne le projet, il doit
être le résultat d'une réflexion collective produite par
les différentes composantes d'une communauté. La vision
stratégique représente la compréhension commune des
défis auxquels fait face une communauté et la manière dont
elle décide de les adresser.
132 Geneviève REV et Muriel MAHE, op.cit.,
PP.11-12.
133
Afin de s'inscrire dans l'approche du développement
durable, il est nécessaire que tous les acteurs concernés
participent à la définition d'une vision pour la stratégie
forestière de l'Union Européenne car «
l'élaboration d'une vision implique la recherche de consensus qui
résulte des préoccupations ou des valeurs collectives qui offrent
l'environnement naturel et construit désiré et qui permettent le
fonctionnement optimal des activités133 ». Ces
acteurs sont les citoyens européens, les propriétaires
privés, les entreprises forestières, les ONG environnementales,
les États membres et les différentes institutions de l'UE. Ils
peuvent se réunir dans le cadre d'un forum forestier dont la mise sur
pied est nécessaire afin de permettre les échanges et
l'information des citoyens européens sur les thématiques
liées aux forêts et au secteur forestier. Il est important de
demander aux citoyens de l'UE ce qu'ils attendent et souhaitent de leurs
forêts et de leur secteur
www.mamrot.gouv.qc.ca/amenagement-du-territoire/guide-de-la-prise-de-decision-en-urbanisme/planification/vision-stratégique/
, consulté le 29/05/2016.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 69
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
forestier. Également, il faut se questionner sur ce
qu'il convient faire pour « assurer le développement durable de
la forêt et du secteur forestier pour qu'ils contribuent pleinement
à la qualité de vie des citoyens européens, à
travers l'ensemble des biens et services qu'ils procurent dans les domaines
économique, environnemental, social et culturel134
». Ce diagnostic préalable va permettre d'aboutir à une
vision claire et commune de la stratégie forestière.
II- La mise en place d'outils de suivi des forêts
adaptés
A l'heure actuelle, il n'existe pas d'outils adaptés
pour assurer le suivi des forêts de l'Union Européenne. Le cadre
dans lequel était effectué le monitoring des
écosystèmes forestiers de l'Union Européenne, Forest
Focus, a pris fin en 2007. Malheureusement, il n'a pas encore été
remplacé par d'autres outils de monitoring adaptés. De plus, l'on
peut constater la fragmentation du cadre de suivi existant. En effet, il est
difficile d'harmoniser les divers dispositifs de suivi qui existent
actuellement (EFFIS, Biosoil). Or, en l'absence d'un système
d'information harmonisé, il apparaît difficile de coordonner les
différentes actions - économiques, écologiques,
climatiques, énergétiques - qui interagissent avec la gestion des
forêts dans l'espace européen 135 . Pour l'instant, il
n'existe que des inventaires forestiers qui répondent aux besoins
nationaux, étant donné que les forêts des États
membres n'ont pas les mêmes caractéristiques et ne sont pas
soumises aux mêmes agressions. Ainsi, chaque Politique Forestière
Nationale est élaborée dans le but de cibler les risques auxquels
est soumise chaque forêt.
Nous pensons qu'il est nécessaire de fixer un cadre
institutionnel et technique à l'échelle de l'Union
Européenne dans lequel le suivi des forêts peut être
effectué de manière efficace et efficiente, à partir de
nouvelles approches, car cela fait partie de la gestion durable des
forêts. Développer de nouvelles approches de monitoring revient
à prendre en compte les éléments qualitatifs (valeur
culturelle) et quantitatifs qui entourent les forêts et le secteur
forestier. L'urgence réside dans la création d'un observatoire
européen
134 Geneviève REV et Muriel MAHE, op.cit., P.37.
135IGN Magazine, « Vers une information
européenne harmonisée », Numéro 32, Septembre
2013.
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
des forêts. Cet observatoire va permettre d'assurer le
suivi des forêts non pas seulement dans l'UE mais à
l'échelle paneuropéenne en formulant des indicateurs communs.
Grâce à ces derniers, l'on pourra faire le monitoring du couvert
forestier, de la gestion forestière et de la filière-bois ainsi
que de la conservation de la biodiversité des forêts. Cela va
conduire à l'élaboration d'un système d'information commun
nécessaire à l'existence d'une information forestière
européenne fiable.
Par ailleurs, les forêts européennes, notamment
celles du sud de l'Europe, sont exposées à des risques graves
d'incendies et de tempêtes du fait des pressions sociales exercées
sur elles. Ces menaces entraînent des pertes considérables et sont
aggravés par les changements climatiques. Les règlements relatifs
à la protection des forêts contre la pollution
atmosphérique et contre les incendies ont été
annulés en 1999 par la Cour de Justice des Communautés
Européennes 136 . Étant donné qu'ils n'ont pas
encore été remplacés, on note un manque d'instruments de
protection des forêts contre les risques et crises graves. Il est donc
impératif que l'UE se dote d'une action communautaire de protection des
forêts et de gestion des risques auxquels
elles sont soumises.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 70
136 Arrêt de la Cour du 25 Février 1999 (Affaires
jointes C-164/97 et C-165/97). Les dispositions de ces Règlements vont
toutefois continuer d'être appliquées jusqu'en 2002 où
elles seront refondues au sein « Forest Focus ». A son tour,
ce schéma disparaîtra en 2007.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 71
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
CONCLUSION GÉNÉRALE
La question d'une politique forestière communautaire
est directement liée à celle du transfert des compétences
nationales vers l'Union Européenne. Selon les théories de
l'intégration régionale telles que l'approche de Bela BALASSA,
l'on peut voir que l'aboutissement du processus régional,
l'intégration politique, nécessite un transfert de la
souveraineté des États vers une institution supranationale qui
l'exercera désormais à leur place. Or, dans l'histoire de la
construction européenne, s'est toujours posée la question de la
délimitation des compétences détenues par l'Union
Européenne. L'UE est passée d'une organisation de
coopération intergouvernementale à une organisation presque
supranationale, puisqu'il existe des secteurs tels que l'agriculture où
elle exerce une compétence exclusive. Cependant, les États
membres se sont toujours demandés jusqu'à quel niveau ils peuvent
transférer leur pouvoir au « Léviathan européen
». Pour Charles De GAULLE, l'organisation régionale doit
être « une confédération, c'est-à-dire un
organisme commun auquel les divers États, sans perdre leur corps, leur
âme, leur figure, délèguent une part de leur
souveraineté en matière stratégique, économique,
culturelle137 ». D'où sa préférence
pour une « Europe des Nations » c'est-à-dire une
communauté se réduisant à une simple coopération
intergouvernementale. Cette remise en question du pouvoir de la
communauté européenne est visible dans l'échec de la
Communauté de défense européenne en le 30 août 1954,
projet rejeté par l'Assemblée Nationale française.
La stratégie forestière de l'Union
Européenne a pour vocation de définir un cadre pour la
réalisation d'initiatives favorisant la gestion durable des forêts
et la valorisation de la filière-bois de l'Union Européenne. Mise
sur pied en 1998, elle dénote d'une volonté de l'UE et de ses
États membres d'assurer une gestion multifonctionnelle de leurs
forêts et de s'acquitter également des engagements pris dans la
sphère internationale. Sa réforme en 2007 et en 2013 traduit le
besoin de mieux intégrer les produits forestiers dans le corpus
réglementaire et
137
http://www.charles-de-gaulle.org/pages/l-homme/dossiers-thematiques/de-gaulle-et-le-
monde/de-gaulle-lrsquoeurope/documents/citations-du-general-de-gaulle-sur-l-europe-ii.php,
consulté le 09/06/2016.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 72
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
institutionnel de l'Union Européenne. Cette
préoccupation ne faisait pas partie des priorités du
Traité de Rome, puisque la sylviculture, activité rurale de
nature, était intégrée dans la PAC. C'est ce qui explique
l'inexistence d'une politique forestière commune à tous les
États membres de l'UE. Pour rectifier ce que l'on peut considérer
comme une erreur de parcours, le Parlement Européen a toujours
appelé la Commission Européenne à faire usage de son
pouvoir d'initiative. Ce qui s'est traduit par la production de rapports et de
Communications sur la question forestière. Mais l'échec de la
mise en place d'une politique forestière européenne est la preuve
de l'inadéquation qui existe entre l'ambition de l'Union
Européenne en tant qu'institution et les volontés de ses
États membres. En effet, les forêts représentent de grandes
opportunités économiques pour les États tels que
l'Allemagne et la Finlande qui préfèrent alors s'accrocher au
principe de subsidiarité pour que ce secteur échappe à la
mainmise de l'institution supranationale. Cela reflète encore la
difficile adéquation entre les nécessités
écologiques soulignées dans les discours officiels de l'UE et les
ambitions économiques poursuivies par les États membres.
Toutefois, comme l'ont souligné plusieurs auteurs
à l'instar de Robin DEGRON, on peut dire qu'une Union Européenne
forestière se construit progressivement. Les forêts prennent de
plus en plus de place dans les politiques européennes (Politique
environnementale, politique énergétique, politique de
développement rural) au vu des enjeux climatiques qui s'imposent
à la planète entière. Consciente qu'elle doit montrer le
bon exemple afin que la Communauté internationale convienne d'un accord
juridiquement contraignant sur les forêts, l'Union Européenne met
en oeuvre de multiples initiatives afin que se mette en place une
véritable politique forestière européenne. Sa
participation aux processus internationaux qui visent la protection des
forêts et sa promotion d'une gestion durable des forêts, montrent
l'engagement qu'elle nourrit pour une reconnaissance effective des forêts
en tant que poumons de la planète. Même si des dysfonctionnements
internes l'empêchent d'atteindre son ambition, l'Union Européenne
a au moins compris qu'il est plus que nécessaire de conserver la
biodiversité forestière, d'où le financement de projets de
gouvernance forestière
dans le monde.
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 73
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
BIBLIOGRAPHIE
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contraignante mais faisant autorité, pour un consensus mondial sur la
gestion, la conservation et l'exploitation écologiquement viable de tous
les types de forêts.
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la conservation des oiseaux sauvages.
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Européen et du Conseil du 17 Novembre 2003 concernant la surveillance
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septembre 2005 concernant le soutien au développement rural par le
FEADER.
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Européen et du Conseil du 17 Novembre 2013 relatif au soutien au
développement rural par le FEADER.
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EUROPÉENNE
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Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 81
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
TABLE DES MATIÈRES
DÉDICACE i
REMERCIEMENTS ii
DÉCLARATION D'AUTHENTICITÉ iii
SIGLES ET ABRÉVIATIONS iv
SOMMAIRE vi
RÉSUMÉ ix
ABSTRACT x
INTRODUCTION GÉNÉRALE 1
I- CONTEXTE DE L'ÉTUDE 1
II- DÉLIMITATION DE L'ÉTUDE 3
A- Délimitation spatiale 3
B- Délimitation temporelle 4
C- Délimitation matérielle 4
III- OBJECTIFS DE L'ÉTUDE 4
IV- INTÉRÊT DE L'ÉTUDE 5
A- Intérêt scientifique 5
B- Intérêt social 6
V- CADRE CONCEPTUEL 6
VI- REVUE DE LA LITTÉRATURE 8
VII- PROBLÉMATIQUE 16
VIII- HYPOTHÈSES 17
IX- CADRE MÉTHODOLOGIQUE 18
A- Méthode d'analyse utilisée. 18
B- Techniques de collecte de données 21
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 82
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
X- EXPLICATION ET JUSTIFICATION DU PLAN 21
CHAPITRE I : UNE VISION QUI S'INSCRIT DANS UNE
PERSPECTIVE
ÉVOLUTIVE 23
SECTION 1 : LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE 1998 23
I- Processus d'émergence de la stratégie 23
II- Principes fondamentaux de la stratégie 25
III- Mise en oeuvre de la stratégie 27
SECTION 2 :LE PLAN D'ACTION DE L'UE EN FAVEUR DES FORETS 29
I- Objectifs et actions-clés du plan d'action 29
II- Réalisations principales 31
SECTION 3 : LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE 2013 33
I- La nécessité d'un nouveau cadre d'action 33
II- Des domaines prioritaires interconnectés 34
CHAPITRE II : RAPPORTS ENTRE LA POLITIQUE DE
DÉVELOPPEMENT
RURAL ET LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UE 36
SECTION 1 : LES FORETS DANS LE MONDE RURAL 37
I- La contribution du secteur forestier au développement
rural dans l'Union
Européenne 38
II- Les mesures forestières dans les programmes de
développement rural
(2007-2013) 39
SECTION 2 :L'AGROFORESTERIE, UNE PRATIQUE
ENCOURAGÉE
PAR L'UNION EUROPÉENNE 43
I- Avantages économiques, environnementaux et
perspectives sociales de
l'agroforesterie 44
II- L'agroforesterie dans les Programmes de Développement
rural 46
CHAPITRE III : LES FORETS COMME FACTEUR DE
COOPÉRATION
ENTRE L'UE ET LE MONDE EXTÉRIEUR 50
Master des Hautes Études Européennes et
Internationales (CIFE) 83
LA STRATÉGIE FORESTIÈRE DE L'UNION
EUROPÉENNE
SECTION 1 : L'ACTION FORESTIÈRE EN LIEN AVEC
L'ADHÉSION DE
NOUVEAUX ÉTATS 51
I- Le programme PHARE 52
II- L'Instrument Agricole de Préadhésion 54
SECTION 2 :L'ACTION POUR L'AMÉLIORATION DE
LA
GOUVERNANCE FORESTIÈRE DANS LES PED 56
I- La gouvernance forestière dans la politique de
voisinage 56
II- Le programme FLEGT 58
CHAPITRE IV : LA PERSISTANCE DE QUESTIONS MAJEURES ET LES
PERSPECTIVES POUR LA CONSTRUCTION D'UNE UNION
EUROPÉENNE FORESTIÈRE 61
SECTION 1 : LA PERSISTANCE DE QUESTIONS MAJEURES 61
I- La base juridique de la stratégie forestière
62
II- La fragmentation des initiatives liées aux
forêts et le financement des
actions forestières 64
SECTION 2 : PERSPECTIVES EN VUE DE LA CONSTRUCTION
D'UNE
UNION EUROPÉENNE FORESTIÈRE 67
I- L'élaboration d'une vision commune 67
II- La mise en place d'outils de suivi des forêts
adaptés 69
CONCLUSION GÉNÉRALE 71
BIBLIOGRAPHIE 73
TABLE DES MATIÈRES 81
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