CONCLUSION
Cette recherche portant sur la création
d'entreprises en Guinée : cas des jeunes de Conakry
visait à répondre à la question suivante : qu'est-ce
qui empêche le passage des jeunes de Conakry à l'acte
entrepreneurial ?L'idée derrière cette question vient d'une
double observation. D'un côté, le gouvernement guinéen,
préoccupé par la situation de chômage des jeunes a pris des
initiatives pour les amener à faire face à leurs problèmes
en s'auto-employant. De l'autre côté, la situation des jeunes
guinéens, loin de s'améliorer, s'aggrave de mal en pire. Cela
amène à explorer deux pistes, et c'est ce que nous avons fait,
analyser la stratégie utilisée pour inciter les jeunes à
l'entrepreneuriat et étudier le comportement des jeunes face à
l'entrepreneuriat.
Pour guider notre réflexion durant cette recherche,
nous sommes partis d'une hypothèse multidimensionnelle. L'objectif
étant d'arriver à une meilleure compréhension du
phénomène. Nous avions présumé que l'inadaptation
des politiques de promotion de l'entrepreneuriat jeune contribue à la
complexité du processus entrepreneurial qui, à son tour, a un
effet à la baisse sur la culture entrepreneuriale et handicape le
passage des jeunes de Conakry à l'acte entrepreneurial.
Nous avons également opté pour une
démarche scientifique de recherche au contenu mixte. Nous avons eu
recours à des techniques quantitatives et qualitatives. Nos
données proviennent de sources diverses. Certaines données
viennent des jeunes eux-mêmes. Nous les avons classés en deux (2)
catégories. La première catégorie était
composée de jeunes n'ayant aucune expérience entrepreneuriale et
la seconde était constituée de jeunes créateurs
d'entreprises. Les autres informations proviennent des structures d'appui
à l'entrepreneuriat jeune. L'intérêt deprocéder
ainsi était de réunir un maximum d'informations en vue de faire
une confrontation nécessaire à une compréhension plus
affinée.
Suite à nos analyses, nous sommes arrivés
à certains résultats qui sont évoqués plus haut.
Nous en faisons un petit condensé à présent.
Il ressort de nos données que les jeunes de Conakry
sont animés d'un fort désir d'entreprendre. Plus de la
moitié d'entre eux ont une vision positive de l'entrepreneuriat,
souhaitent créer une entreprise et pensent pouvoir le faire dans les
prochains cinq ans. Ce désir entrepreneurial très
développé dépend en large mesure de l'influence de
l'environnement des jeunes. Ils sont nombreux, ceux qui déclarent avoir
été encouragés à se lancer dans le monde
entrepreneurial par un proche, un ami, un mentor. La plupart de ceux qui
préfèrent se lancer déclarent avoir au moins un membre de
leur famille qui est ou a été entrepreneur. La réussite
des entreprises créées par ces proches parents subjugue plus d'un
jeune et rend attrayant le monde entrepreneurial pour eux.
Mais très malheureusement, ce fort désir
d'entreprendre des jeunes ne se concrétise pas dans la plupart des cas
en création d'entreprises. Les jeunes ont souvent une mauvaise
interprétation du projet entrepreneurial. À la découverte
de ce qu'il signifie, beaucoup de jeunes abandonnent le chemin. Cette situation
est liée à plusieurs facteurs. Le manque de financement de
l'investissement de leur projet, le manque de confiance en soi, la
complexité du processus entrepreneurial qui leur est proposé en
sont des exemples. Quant à ceux qui parviennent à passer ce cap,
ils se buttent à d'autres problèmes. Il s'agit notamment des
difficultés à trouver des clients pour ses produits/services, la
faible rentabilité de l'entreprise, la non croissance de
l'entreprise.
En plus, les entreprises créées par les jeunes
évoluent dans des secteurs qui ne nécessitent pas un
investissement important. Le corollaire à cela est qu'une telle
entreprise ne réalise généralement pas un chiffre
d'affaires important. Elle ne permet donc pas à son propriétaire
de s'épanouir et de combler son besoin d'accomplissement.
En ce qui concerne les politiques d'appui à
l'entrepreneuriat des jeunes, il faut retenir qu'elles ne sont pas de nature
holistique. Il n'y a que quelques institutions qui s'en occupent. Les
politiques appliquées se concentrent uniquement sur la création
d'entreprises au lieu du développement de la culture entrepreneuriale
qui est un préalable et le fondement même du développement
entrepreneurial. La stratégie utilisée est aussi traditionnelle.
Elles mettent les jeunes dans un processus qu'ils ne maitrisent pas ou qu'ils
ont du mal à maîtriser et qui est complexe. Cela limite ou retarde
leur passage à l'action. Certains finissent même par se lasser et
se décourager.
Cette recherche, bien que poursuivant des objectifs ambitieux
et prenant en compte plusieurs dimensions de l'étude en entrepreneuriat,
peut être complétée par des recherches similaires et
complémentaires. Les résultats que nous avons obtenus nous ont
amené à réfléchir sur d'autres pistes de recherche.
Nous entrevoyons faire des recherches sur les thématiques
suivantes :
- Le rôle des établissements académiques
et scolaires dans le développement d'une culture entrepreneuriale chez
les jeunes ;
- La contribution des établissements financiers dans la
constitution d'une société entrepreneuriale ;
- Les créateurs d'entreprises et le processus
entrepreneurial : le rôle du business plan.
À l'instar de toute recherche, notre étude
comporte certaines limites qui ne remettent toutefois pas en question les
résultats obtenus.Nous aurions pu mieux meubler cette recherche en y
intégrant des données sur les statistiques de création
d'entreprises par les jeunes au cours de ces dix (10) dernières
années. Des contraintes liées à l'indisponibilité
de telles informations ou difficilement accessibles ont limité une
interprétation plus approfondie du phénomène.
Une faible représentation des structures d'aide
à la création d'entreprisesparmi les interviewés a
également limité l'obtention d'informations divergentes qui
auraient pu être très intéressantes dans l'analyse de la
politique d'aide à la création d'entreprises.
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