III.2 Motivations
intrinsèques et extrinsèques
La dichotomie proposée par le modèle de Herzberg
(1966), bien que controversée, a l'avantage de distinguer ce qui
relève d'intérêts associés mais étrangers au
travail lui-même, sources extrinsèques comme le salaire, les
primes, le statut, de ce qui revient à l'activité
réalisée, intrinsèque, et porte sur le sentiment de
réalisation de soi, comme le fait d'aimer ce que l'on fait, d'avoir un
travail intéressant en soi, et d'y trouver une certaine autonomie. Si
l'on ne suppose pas qu'une motivation est exclusive d'une autre, ce
qu'induisent les questionnaires, et qu'elle n'est pas unilatéralement
positive ou négative mais peut porter tantôt à agir,
tantôt à freiner l'action, on peut garder, avec
Kaséréka (1999), l'idée de deux sources distinctes de
motivation : l'une, intrinsèque, fondée sur
l'intérêt économique et social trouvé ou
espéré en échange d'un travail, l'autre,
extrinsèque, provenant de ce qu'apporte le travail en lui-même
comme réalisation de soi.
Avec les aspects intrinsèques, on trouve alors des
valeurs qui sont attachées au travail, comme le fait d'apprendre des
nouvelles choses, le travail diversifié et intéressant en
lui-même, l'autonomie, le développement de ses capacités.
C'est le versant du travail qui permet de viser la qualité et de
s'approprier un espace, un domaine de compétences, et de parvenir
à plusieurs à réaliser un projet. La motivation
intrinsèque est ainsi liée à des conduites
D'auto-détermination (Déci&al. 1985). C'est
aussi l'inverse d'un travail aliénant, contraignant, et sans but.
La motivation devient ainsi l'expression d'une construction
personnelle trouvée à travers une activité. Dans ce sens
elle s'apparente à l'implication (qui est traitée plus loin).
Elle est inhérente au sentiment de contrôler, de maîtriser
une situation, ce qui peut être acquis par le fait d'en comprendre le
sens, de la dominer en sachant l'analyser, de se considérer comme une
source de détermination sur les réalités
extérieures ou de chercher à l'être. La notion
d'appropriation rend bien compte de ce processus qui situe le travail comme une
activité apportant un plus en terme de développement personnel.
Elle s'oppose par là même à une motivation provenant d'une
influence extérieure, sorte d'appât manipulateur pour obtenir
l'exécution d'un travail ou d'un effort supplémentaire
(Levy-Leboyer, 1998) qui dès lors ne peut être
qu'une charge, une obligation morale ou une forme de soumission.
Cependant, il ne s'agit pas de conclure en opposant simplement
une pression extérieure, toujours plus ou moins manipulatrice, à
un projet personnel qui serait décontextualisé. L'incitation par
le salaire ou la perspective de promotion peut aussi apporter un
mieux-être, tandis que l'entière autonomie peut cacher une
exigence de responsabilité individuelle accrue et devenir un miroir aux
alouettes. Il suffit de considérer le «petit» transporteur
privé, à son compte, mais devant rembourser l'achat de son camion
et donc accepter des conditions de travail difficiles et peu
rémunératrices, pour comprendre qu'une certaine autonomie peut
avoir son revers.
Mais il faut remarquer aussi que ces difficultés sont
le plus souvent surmontées par le sentiment d'exercer un métier
fort, dans une communauté de métier participant à la
construction de formes identitaires originales (Combes & Sammer, 1995).
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