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Les fondements de l'émergence économique de la République Démocratique du Congo : défis et perspectives.

( Télécharger le fichier original )
par Merseign LUZONZO
Université Catholique du Congo - Licence 2016
  

Disponible en mode multipage

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    Université Catholique du Congo (UCC)

    Faculté d'Economie et Développement

    Kinshasa/Limete

    Les fondements de l'émergence économique de la République Démocratique du Congo : défis et perspectives

    Par

    LUZONZO MENGA Emmanuel Merseign

    Mémoire de Licence

    Présenté et défendu en vue de l'obtention du

    Grade de Licencié en Economie et Développement

    Option : Gestion des Projets et Développement Rural

    Directeur : Pr Dr Onesime KUKATULA FALASH

    Septembre 2016

    EPIGRAPHE

    «A nation is great not by its size; it is the will, the cohesion, the stamina, the discipline of its people, and the quality of their leaders, which ensures it an honorable place in history.»

    LEE KUAN YEW

    REMERCIEMENTS

    Pour toutes les personnes qui, de près ou de loin, ont contribué à la réalisation de ce travail fastidieux.

    Il s'agit notamment de ma famille, en particulier mes géniteurs LUZONZO DOPA PASCAL et MENGA MENAYAME, et ma petite soeur LUZONZO PEGGY, pour le soutien moral et financier.

    Les remerciements vont aussi au Pr Dr KUKATULA FALASH Onesime, pour l'apport intellectuel et méthodologique Ô combien important pour l'accomplissement de ce travail.

    Sigles et abréviations

    ANAPI : Agence Nationale pour la Promotion des Investissements.

    BCC : Banque Centrale du Congo.

    BENIVM : Bangladesh, Ethiopie, Nigéria, Indonésie, Viêtnam, Mexique.

    BRICS : Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud.

    CAFRAD : Centre Africain de Formation et de Recherche Administratives pour le Développement.

    CESEG : Centre d'Etudes Stratégiques sur l'Emergence économique et la Gestion axée sur les résultats.

    CNUCED : Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement.

    COPIREP : Comité de Pilotage de la Réforme des Entreprises du Portefeuille de l'Etat.

    Cts : Cents.

    ENA : Ecole Nationale d'Administration.

    FC : Franc Congolais.

    FMI : Fonds Monétaire International.

    FPI : Fonds pour la Promotion de l'Industrie.

    GUCE : Guichet Unique pour la Création d'Entreprise.

    IDE : Investissement Direct Etranger

    IDH : Indice de Développement Humain.

    ISEME : Indice Synthétique de l'Emergence Economique.

    Lb : Livre

    MERCOSUR : Marché commun du Sud.

    Mlds: Milliards

    OCDE : Organisation de Coopération et de Développement Economiques.

    OMC : Organisation Mondiale du Commerce.

    O.T : Once tonique

    PAG : Plan d'actions du gouvernement

    PEG : Programme Economique du Gouvernement.

    PIB : Produit Intérieur Brut.

    PIR : Programme Intérimaire Renforcé.

    PMA : Pays les moins avancés.

    PMURR : Programme Multisectoriel d'Urgence de Réhabilitation et de Reconstruction.

    PPA : Parité de Pouvoir d'Achat.

    PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement.

    PRC : Programme Relais de Consolidation.

    PRC-GAP : Projet de Renforcement des Capacités de Gestion des fonctions de base de l'Administration Publique.

    RDC : République Démocratique du Congo.

    RDH : Rapport sur le Développement Humain.

    SEGUCE RDC : Société d'Exploitation du Guichet Unique du Commerce Extérieur de la République Démocratique du Congo.

    SFI : Société Financière Internationale.

    Stats : Statistiques.

    Tm : Tonne métrique.

    UNCTAD : United Nations Conference on Trade and Development.

    USD : United States Dollar.

    Liste des tableaux

    Tableau 1.1. Les 20 plus gros PIB dans le monde en 2015 et 2016 (estimations)................................................................................................................27

    Tableau 1.2. PIB et PIB/habitant des BRICS en 2015.....................................30

    Tableau 1.3. Evolution des exportations en valeur des BRICS, 2001-2014............35

    Tableau 1.4. Part des BRICS dans les exportations mondiales de marchandises, 2000-2014................................................................................................36

    Tableau 1.5. Réserves de change de certains pays émergents en 2012.......................36

    Tableau 1.6. Evolution des IDE entrants dans les BRICS 2005-2014................................................................................................38

    Tableau 1.7. Evolution de l'IDH dans les BRICS 1980-2014................................................................................................39

    Tableau 2.1. Les ressources minérales par province...................................................61

    Tableau 2.2. Réserves géologiques pour quelques minerais..............................63

    Tableau 2.3. Production minière et hydrocarbure 2008-2015............................64

    Tableau 2.4. Production agricole d'exportation.............................................66

    Tableau 2.5. Evolution de la contribution au PIB des 3 secteurs d'activité............72

    Tableau 2.6. Evolution du PIB et du PIB/habitant en RDC 2005-2015..................75

    Tableau 2.7. Répartition du PIB réel selon l'offre (2010-2015)..........................75

    Tableau 2.8. Répartition du PIB réel selon la demande (2010-2015)....................76

    Tableau 2.9. Solde de la balance des paiements en 2013 et 2014........................77

    Tableau 2.10. Evolution des cours moyens des matières premières d'origine minérale...........................................................................................78

    Tableau 3.1. Evolution des exportations et des importations de la RDC 2005-2015...............................................................................................................................83

    Tableau 3.2. Ventilation par secteur des projets d'investissement agréés par l'ANAPI et valeur des biens importés approuvés par la commission interministérielle des mines de 2010 à 2014....................................................................................85

    Tableau 3.3. Estimation du volume des investissements réalisés en RDC de 2010 à 2014................................................................................................86

    Tableau 3.4. Flux d'IDE entrants en RDC et part mondiale entre 2005 et 2014......87

    Tableau 3.5. Evolution par axe du PAG à Juin 2015.............................................91

    Tableau 3.6. Estimations de certains indicateurs en 2030 en comparaison avec ceux des BRICS en 2015............................................................................113

    Tableau 3.7. Estimations de certains indicateurs en 2030 en comparaison avec ceux des BENIVM en 2015.........................................................................114

    Liste des graphiques

    Graphique 1.1. Evolution des taux de croissance des BRICS, 2000-2015...............34

    Graphique 1.2. Evolution des exportations en valeur des BRICS, 2001-2014..........35

    Graphique 1.3. Réserves de change de quelques pays émergents et de quelques pays développés en 2012..............................................................................37

    Graphique 2.1. Evolution de la croissance économique et du PIB/habitant de la RDC, 1960-2010.........................................................................................55

    Graphique 2.2. Evolution de la production de certains minerais..........................65

    Graphique 2.3. Evolution de la croissance du PIB entre 2002 et 2015...................71

    Graphique 2.4. Evolution du taux d'inflation 2005-2015..................................74

    Graphique 3.1. Evolution du PIB dans les BRICS, BENIVM et en RDC, 2005-2015..............................................................................................115

    Graphique 3.2. Evolution des exportations des BRICS, BENIVM et en RDC, 2005-2015..............................................................................................116

    Graphique 3.3. Evolution des flux d'IDE entrants dans les BRICS, BENIVM et en RDC, 2005-2015...............................................................................117

    Graphique 3.4. Evolution de l'IDH des BRICS, BENIVM et RDC, 2000-2014......118

    Liste des encadrés

    Encadré 1.1. Les différentes classifications des pays émergents..........................24

    Encadré 1.2. L'Afrique est le continent émergent du XXIème Siècle...................25

    Encadré 1.3. Le consensus de Washington...................................................30

    Liste des cartes

    Carte 1. Carte administrative de la RDC......................................................58

    Carte 2. Les ressources minières de la RDC.................................................62

    Carte 3. Les types de végétation en RDC.....................................................67

    Carte 4. Carte climatique de la RDC..........................................................68

    Introduction générale

    1. Etat de la question

    L'émergence économique est un sujet d'actualité dans plusieurs pays sous-développés, qui ont pour objectif de faire accéder leur population au stade du bien-être socioéconomique auquel toute personne humaine aspire. En République Démocratique du Congo, pays regorgeant de nombreuses ressources naturelles et humaines pouvant lui permettre d'atteindre ce stade ultime de développement, toute personne susceptible d'apporter sa pierre à l'édifice du développement est la bienvenue. Malheureusement, la question de l'émergence économique apparaît plus comme une nécessité politicienne, qui n'intéresse que l'élite politique et économique, que comme une question d'intérêt national à laquelle la masse est acquise.

    Néanmoins, il existe une littérature florissante sur l'émergence économique en Afrique. Nous allons en présenter quelques uns des plus importants.

    - « L'émergence économique des nations : définition et mesure » : une étude présentée par Moubarack LO, Directeur Général du cabinet Emergence Consulting. Cette étude vise à proposer une possible définition de ce qu'est un pays émergent. Elle vise aussi à déterminer, à travers un indice synthétique de l'émergence économique (ISEME) combinant des variables relatives au PIB, à l'investissement et aux exportations et testé sur 46 pays d'Afrique, d'Amérique, d'Asie et d'Europe, le stade à partir duquel un pays accède à l'émergence économique.

    - « Pourquoi certains pays sont émergents et d'autres pas ?» : Mamadou KOULIBALY, Audace Institut Afrique. L'ouvrage décrit les changements opérés par les pays aujourd'hui émergents et les défis qu'ils ont dû relever pour atteindre le stade de l'émergence économique.

    - « Pour un Congo émergent » MATATA PONYO MAPON, premier ministre de la République Démocratique du Congo. Ouvrage paru aux éditions privé, Mars 2016. Dans ce livre-entretien avec le journaliste KIBAMBI SHINTWA, le ministre dresse un bilan de ses années passées au gouvernement de la RDC, et évoque les diverses réformes qu'il a engagées pour mettre le pays sur la voie de l'émergence à travers un redressement économique.

    - « Les trois (03) leviers de l'émergence économique en Afrique» : Firmin KITSORO KINZOUNZA. Conférence panafricaine sur la transformation et l'émergence du continent (quelles innovations et quelles capacités pour l'émergence économique et sociale de l'Afrique), présentée par le Centre d'Etudes Stratégiques sur l'Emergence économique et la Gestion axée sur les Résultats (CESEG) et le Centre Africain de Formation et de Recherche Administratives pour le Développement (CAFRAD), à Brazzaville. Dans cet ouvrage, l'auteur présente les résultats de recherches sur l'histoire économique des pays émergents. L'analyse de leur histoire économique laisse apparaître que leurs succès économiques reposent essentiellement sur des transformations socioculturelles. Cette étude a donc porté sur l'identification des leviers de ces transformations (processus d'émergence économique et sociale), qui sont : la gouvernance politique, l'administration publique et la technopole.

    Nous venons de présenter quatre des ouvrages sur l'émergence économique qui ont marqué notre attention, et qui recèlent d'informations importantes pour notre travail de recherche.

    L'originalité de notre travail réside dans le fait que nous allons mettre un point d'honneur à déceler les défis que la République Démocratique du Congo devrait relever pour atteindre l'émergence tant attendue, en comparaison avec les réalisations des pays aujourd'hui émergents.

    2. Problématique

    Le continent africain enregistre, depuis près d'une décennie, des performances remarquables sur le plan économique. En 2014 par exemple, l'Afrique subsaharienne connaît une croissance économique évaluée à 4,6%1(*). En 2015, le taux de croissance est revu à la baisse, à 4,5% selon le FMI2(*). La République Démocratique du Congo, elle, affiche des taux de croissance positifs depuis un peu plus de 10 ans, précisément depuis 2002. Une des caractéristiques de l'économie congolaise est sa stabilité sur le plan de la croissance économique, avec une moyenne de 6,5%3(*) entre 2002 et 2015. Un pic de 9,5% atteint en 2014, grâce notamment au dynamisme retrouvé des activités minières et aux perspectives de développement de l'activité agricole4(*). En 2015, la RDC réalise un taux de croissance de 6,9%, initialement prévu à 10,3% puis revu à 8,4%, baisse due à la diminution du cours des produits de base exportés par la RDC notamment l'or et le cuivre5(*).

    De plus, la situation économique du pays laisse transparaître trois caractéristiques majeures, notamment la résilience de sa croissance économique, la baisse sensible de l'inflation, la stabilité des prix intérieurs combinée avec des gains en points de croissance et une stabilisation du taux de change.

    - la résilience de la croissance économique de la RDC : entendons par résilience l'aptitude ou la capacité à résister aux chocs exogènes. On constate en effet que malgré les baisses observées en termes de croissance dans le monde, notamment dans les pays développés à cause de la crise financière de 2008, celle de la RDC résiste et se maintient à un bon niveau, bien supérieur à celle de la France par exemple, qui affiche en 2015 un taux de croissance de 1,5%, ou à la croissance mondiale qui en 2015 s'élève à 2,9%6(*).

    - La baisse sensible de l'inflation, avec un taux d'inflation qui est passé de 511,21% en 2000 à 0,313%7(*) pour le premier semestre de 2015, avec une stabilisation du taux à moins de 3%8(*) depuis 2012.

    - La stabilité des prix intérieurs, comme le prouvent les différents bulletins statistiques mensuels élaborés par la Banque Centrale du Congo, résultant des bonnes performances en matière de régulation de l'inflation, combinée avec des gains en points de croissance.

    Fort de ces nombreux constats, la République Démocratique du Congo, tout comme plusieurs autres Etats africains classés parmi les pays sous-développés, a décidé d'impulser le processus d'émergence économique, sous la houlette de l'Union Africaine. Ces économies étant dynamiques et en voie de transformation, les dirigeants des grandes puissances économiques s'accordent sur le fait que l'Afrique représente un pôle de développement économique d'importance mondiale, et que la République Démocratique du Congo est la plaque tournante du développement économique en Afrique.

    Le but de toute nation étant d'accéder au stade du développement intégral et de permettre à chacun de ses citoyens de vivre la vie qui a de la valeur à ses yeux (Amartya SEN), les gouvernements qui veulent accéder au stade du développement doivent, selon le processus de développement édicté par ROSTOW, passer par la phase du décollage, dont l'émergence économique est une variation adaptée à la mondialisation en cours. C'est ainsi que la plupart des pays africains ont élaboré des programmes en vue d'atteindre le stade de l'émergence économique à un horizon donné. La Côte d'Ivoire s'est donnée jusqu'en l'an 2020 pour atteindre l'émergence, la RDC s'est fixée l'horizon 2030, la République du Cameroun l'horizon 2035. Certains pays ont réalisé de bonnes performances économiques et sont aujourd'hui considérés comme des pays émergents (Malaisie, Chine, Inde, Taïwan, Corée du Sud, Afrique du Sud, Brésil, Thaïlande, Indonésie, Hong Kong, Russie, et bien d'autres), et leur impact sur l'économie mondiale est indiscutablement ressenti par tous. La Chine est ainsi devenue le premier exportateur mondial en 2009. Simple slogan pour les uns, réelle espérance pour les autres, l'émergence de la RDC à l'horizon 2030 est devenue pour le gouvernement congolais un véritable leitmotiv et pour l'opinion nationale un sujet de discussions interminables.

    En tant qu'économistes du développement, nous nous imposons une réflexion sur le thème de l'émergence, plus particulièrement celle de la RDC, notre mère patrie. La question fondamentale est celle de savoir quels sont les défis pour l'émergence du pays et comment il doit s'y prendre pour les relever, afin de prétendre s'insérer dans le monde émergent, niveau préalable au développement. Rappelons que l'atteinte du stade de pays développé est prévue pour l'an 2050 par l'actuel gouvernement.

    Au regard des réalisations économiques de la RDC et des fondamentaux pour l'émergence, quels sont donc les obstacles à surmonter pour la réussite du processus d'émergence ?

    Tout au long de ce travail, nous allons nous atteler à répondre à cette question centrale qui sera au coeur de nos réflexions, et qui est cruciale pour notre développement en tant que nation, et ce au vu des expériences heureuses d'autres pays qui comme le nôtre, font partie de la longue liste des pays sous-développés.

    3. Hypothèse de travail

    En observant les expériences passées et actuelles des pays aujourd'hui émergents, et en considérant le fait que ces pays furent il y a quelques années dans les mêmes situations de sous-développement économique et social que le nôtre, qui est classé parmi les pays les moins avancés de la planète (PMA), nous partons de l'hypothèse selon laquelle la République Démocratique du Congo devrait rencontrer certains préalables en surmontant certains défis qui se posent, notamment en ce qui concerne la stabilité politique et institutionnelle, la consolidation des acquis macroéconomiques, le développement des infrastructures, la libéralisation et la diversification de l'économie, en tenant compte des atouts (ressources naturelles et humaines importantes) dont elle dispose, pour atteindre le stade de l'émergence.

    4. Objet et intérêt du sujet

    L'étude que nous allons mener a pour objet de définir les défis de l'émergence économique de la RDC, en tenant compte des fondamentaux.

    Sur le plan scientifique, l'intérêt du sujet est qu'il permet de déterminer dans quelles conditions un pays aussi richement doté en ressources naturelles que la RDC, peut atteindre l'émergence économique en utilisant au mieux les ressources dont il dispose, au vu des différentes expériences et difficultés auxquelles sont confrontés aujourd'hui les pays émergents, dont les modèles de croissance sont en train d'être remis en question. Il contribue donc à renchérir les réflexions sur l'émergence économique des nations, surtout en Afrique subsaharienne.

    De plus, l'actualité économique et politique nationale et internationale fait ressortir le terme d'émergence économique, dans un contexte de mondialisation où l'environnement international influence inéluctablement les processus de croissance économique. Pour le pays, le sujet tient une importance particulière, car l'émergence est au centre des préoccupations du gouvernement actuel, et il importe de nourrir des réflexions susceptibles d'alimenter le débat et contribuer à la formulation et la mise en oeuvre des politiques en vue de l'atteinte de cet objectif.

    En tant qu'étudiant en économie et développement, le sujet est d'une importance considérable, car le stade du développement passe d'abord par l'étape de l'émergence économique. Les pays aujourd'hui émergents ont amorcé leur processus de rattrapage des pays développés et le niveau de vie y est nettement amélioré. Il importe donc d'analyser d'abord la notion d'émergence et surtout déterminer dans quelle mesure ce stade de développement peut être atteint avant de converger totalement vers les niveaux de vie des pays développés.

    5. Délimitation du sujet

    Nous allons prendre en compte les performances économiques enregistrées par la RDC depuis qu'elle connait une certaine stabilité sur le plan macroéconomique, soit depuis 2002 jusqu'à présent. Nous prendrons aussi en compte les données importantes que nous pouvons tirer de l'expérience des pays dits émergents sur la même période.

    6. Méthodes et techniques utilisées

    6.1 Les méthodes

    La méthode désigne l'ensemble des procédures logiques inhérentes à toute démarche scientifique. Elle est abstraite9(*).

    Pour mener à bien notre travail, nous allons mener tout d'abord une recherche exploratoire, qui consiste à prendre un premier contact avec le phénomène, partant des idées vagues que l'on en a. Elle essaie de répondre à la question « c'est quoi ? ». L'exploration va nous permettre de faire une analyse plus détaillée à partir des informations obtenues, donc de faire une recherche descriptive. Cette dernière permet de dépeindre le phénomène observé et de bien connaître la réalité. La méthode que nous allons alors utiliser dans le cadre de cette recherche exploratoire et descriptive est la méthode inductive, un mode de connaissance qui procède du relevé de cas particuliers en vue des conclusions générales. Il s'agira pour nous de définir clairement l'émergence économique comme phénomène, d'en connaître la réalité. Pour ce faire, nous nous servirons de l'observation de quelques pays ayant des économies émergentes, afin de tirer des conclusions générales quant à la définition de l'émergence économique.

    Ensuite, nous allons procéder à une recherche explicative, pour tenter de savoir le pourquoi de la situation observée. Pourquoi ces pays se sont retrouvés avec des économies émergentes, alors que d'autres, comme le nôtre, sont toujours au plus bas de l'échelle. Nous allons donc analyser les conditions remplies par ces pays avant d'atteindre le stade de l'émergence économique, et tenter d'analyser un réseau de relations qui relèveraient d'un lien de causalité (relation de cause à effet) ou de concomitance (simultanéité) entre le respect des dites conditions et l'atteinte de l'émergence économique. Nous allons ici utiliser la méthode déductive, qui consiste justement en un processus logique qui pose d'abord une affirmation générale, d'où elle tire des conclusions particulières. Ainsi, partant du principe théorique selon lequel le respect des différentes conditions a pour conséquence l'émergence économique des nations, nous allons donc en déduire que si les différents pays étudiés ont pu réaliser ces conditions et devenir émergents, la République Démocratique du Congo, si elle suit la même trajectoire, deviendra aussi une économie émergente.

    La méthode analytique sera utilisée pour étudier la situation de l'économie congolaise dans son ensemble.

    6.2 Techniques

    La technique est un moyen concret, une arme au service de la méthode qu'on utilise pour saisir une réalité, pour récolter les données. Elle est plus expressive10(*).

    La principale technique utilisée lors de notre travail est l'observation indirecte (analyse des documents). Nous utiliserons aussi l'observation directe, pour l'analyse de la situation en République Démocratique du Congo.

    7. Canevas

    En dehors de l'introduction générale et de la conclusion générale, notre travail comprendra trois chapitres.

    Le premier chapitre sera réservé aux considérations théoriques. Nous allons tenter de comprendre réellement ce que signifient les termes « émergence économique ». Nous analyserons l'émergence économique en profondeur, les pays émergents, leurs caractéristiques, les conditions de l'émergence, afin de mieux appréhender le sujet.

    Dans le second chapitre, nous allons procéder à une présentation de la République Démocratique du Congo. Nous allons présenter les multiples atouts dont dispose le pays et qui peuvent lui servir de base pour l'émergence. Nous ferons aussi le point sur la situation économique et politique ayant prévalu en RDC depuis son accession à l'indépendance jusqu'au début des années 2000, contexte précédant le début de la mise en place des réformes visant à améliorer la situation du pays. Enfin nous allons présenter l'économie congolaise depuis 2001 jusqu'à nous jours.

    Dans le troisième chapitre, nous allons tenter de faire une analyse comparative entre la situation des pays émergents, des futurs pays émergents et celle de la RDC.

    CHAPITRE I: Considérations générales et théoriques

    Nous allons commencer par présenter les concepts théoriques faisant l'objet de notre recherche. C'est ainsi que dans ce chapitre nous allons nous atteler à clarifier le concept de l'émergence, afin de comprendre réellement ce qu'il implique, ses origines, son évolution, définir les pays émergents, leurs caractéristiques communes. Nous allons aussi présenter les fondements et les critères de l'émergence, afin qu'ils soient bien compris.

    1.1 Définitions et origines

    Il convient de prime abord de signaler qu'il n'existe pas réellement de définition consensuelle du phénomène de l'émergence.

    Selon le dictionnaire Le Robert, « émerger » se dit d'un phénomène qui s'impose à l'attention par sa valeur. Ainsi, l'émergence peut se définir comme « la situation d'un pays qui, anciennement pauvre, émerge en suscitant l'intérêt et en se démarquant de la masse des nations sous-développées et situées en marge des échanges mondiaux de biens, de services et d'idées.11(*)»

    Le concept de l'émergence apparaît au milieu des années 1970 après le premier choc pétrolier. La découverte majeure était que les pays à marchés émergents offraient aux capitaux de nouvelles possibilités de placement à haut rendement et à risque convenable.

    Une explication de l'émergence découle de l'analyse du concept de la convergence entre pays pauvres et pays développés. On distingue traditionnellement la convergence absolue selon laquelle les pays pauvres auraient tendance à croître plus vite que les pays développés. Ils convergeraient donc vers les revenus par habitant des pays riches. La convergence conditionnelle évoquée par BARRO stipule que les économies, différant en termes de propension à épargner, de coût démographique, de capital humain, d'ouverture internationale, d'accès à la technologie ou de qualité des politiques publiques, la convergence ne se réalisera que sous certaines conditions. Ce postulat de convergence permet de dégager des clubs de convergence, qui sont des sous-groupes, parmi les pays en développement, faisant preuve de dynamiques de croissance homogènes12(*). Les pays émergents constituent donc un exemple de club de convergence, un groupe de pays qui parmi les pays en développement sont particulièrement dynamiques et portent des caractéristiques leur donnant des atouts pour converger vers les pays riches. L'émergence constituerait ainsi une transition et une étape intermédiaire entre la divergence (maintien dans la trappe de la pauvreté) et la convergence vers les pays riches. Elle est alors un préalable et une étape décisive vers la convergence et le développement intégral. En effet, la convergence vers les pays développés étant un long processus13(*), l'émergence représente une étape qui lorsqu'elle est franchie, rend plus soutenable le chantier de rattrapage des pays développés. Pour émerger, le pays pauvre doit se mettre aux normes internationales de compétitivité et s'aligner sur les meilleures pratiques. En franchissant le seuil de l'émergence, le pays anciennement pauvre obtient alors les mêmes niveaux d'éducation primaire et secondaire que les pays riches14(*), des taux d'épargne et d'investissement équivalents, des institutions, et des données démographiques relativement comparables.

    L'émergence étant un phénomène multidimensionnel, l'homme est au centre, au début et à la fin du développement, elle ne peut être considérée que sur sous l'angle économique. Les citoyens du pays qui émerge doivent sentir dans leur vie quotidienne que leur bien-être s'améliore et que de nouvelles opportunités d'éducation, de santé, d'emplois et de revenus se présentent pour eux. Il s'agit d'améliorer aussi les conditions sociales des habitants du pays. La qualité du capital humain (une population bien éduquée, bien nourrie et en bonne santé) est un des facteurs les plus déterminants de la croissance, surtout dans le nouvel environnement créé par la mondialisation où le savoir et le savoir-faire jouent un rôle central dans la hausse de la productivité des économies. L'émergence tient aussi compte de la qualité des institutions, qui lorsqu'elles favorisent la bonne gouvernance15(*), exercent un impact significatif sur la croissance économique future, en ce sens qu'elles favorisent la durabilité des bonnes pratiques en matière de politique économique. En outre, des institutions de qualité permettent de réduire la volatilité de la croissance et facilitent donc la réalisation des objectifs économiques et sociaux du pays considéré16(*).

    La notion d'émergence est aussi considérée comme une adaptation à la mondialisation actuelle du concept de « décollage », qui est une des cinq étapes du développement édictées par Rostow17(*). Cette phase de décollage étant la plus importante pour les pays en développement, est une période où l'activité économique productive atteint un niveau critique et produit des changements qualitatifs qui mènent à une transformation structurelle massive et progressive dans l'économie et la société. « Le décollage est la période pendant laquelle la société finit par renverser les obstacles et les barrages qui s'opposaient à sa croissance régulière. Les facteurs de progrès économique, qui jusqu'ici n'ont agi que sporadiquement et avec une efficacité restreinte, élargissent leur action et en viennent à dominer la société. La croissance devient la fonction normale de l'économie. Les intérêts composés s'intègrent dans les coutumes et dans la structure même des institutions.18(*)»

    Toujours selon Rostow, cette étape est d'une durée relativement brève, une à deux décennies. Il pose trois conditions essentielles au décollage :

    - Un taux d'investissement productif qui passerait de moins de 5% à plus de 10% du revenu national, de ce fait il déborde nettement la pression démographique. Cette augmentation de l'investissement se fera par un large appel aux capitaux extérieurs.

    - La création d'industries motrices susceptibles d'entraîner l'apparition d'industries d'amont et d'aval. Ces industries pourront être stimulées dans leur croissance par le développement du commerce extérieur ou encore la substitution de la production nationale aux importations. Par ailleurs, une large diffusion des innovations et des taux d'intérêt faibles facilitent le mouvement d'industrialisation.

    - La mise en place rapide d'un appareil politique, social et institutionnel axé vers le développement afin que le taux de croissance de l'économie puisse par la suite rester constant.

    La mondialisation joue en effet un grand rôle dans le processus d'émergence : pour pouvoir se développer, tout pays pauvre doit tenir compte, dans la définition et la mise en oeuvre de sa stratégie de développement, de la donnée que constitue la mondialisation qui offre autant d'opportunités que de contraintes. Il doit chercher à exister sur la carte des réseaux mondiaux de production et d'échanges d'idées et de savoirs, de capitaux, de biens et services, sous peine de perdre en productivité, en compétitivité globale et en dynamisme économique. Pour cela, la démarche doit consister à attirer les investisseurs et à développer les exportations. La promotion des investissements doit viser à la fois investissements nationaux et Investissements Directs Etrangers (IDE), dont les flux sont passés de 55 milliards de dollars en 1980 à 1.228 milliards en 201419(*). Pour un pays pauvre, recevoir l'IDE présente plusieurs avantages notamment l'accès à de nouvelles technologies et techniques de production et de gestion, le renforcement des capacités des travailleurs et des entrepreneurs du pays par le biais de la formation sur le tas et de la sous-traitance, et l'ouverture de nombreux marchés à l'extérieur. Le développement des exportations est également devenu incontournable pour les pays en développement, ceci parce que les faits empiriques prouvent que les pays ouverts et orientés vers l'exportation ont, de manière générale, des niveaux de productivité et de croissance économique plus élevés (Singapour, Malaisie, Chine, etc.). En mettant en oeuvre le diptyque investissement-exportation, le pays anciennement pauvre augmente ainsi ses chances d'être un gagnant de la mondialisation, s'intègre mieux dans l'économie globale et peut légitimement aspirer au statut de pays émergent.

    Nous ne pouvons dissocier le phénomène des entités qui portent le phénomène, c'est ainsi que nous allons désormais nous atteler à décrire brièvement les pays émergents, faire une étude sur le groupe des BRICS afin de déterminer les caractéristiques majeures des pays émergents.

    1.2 Les pays émergents

    1.2.1 Généralités

    L'expression « emerging markets » ou marchés émergents a été inventée en 1981 par l'économiste néerlandais Antoine VAN AGTMAEL, pour désigner certaines économies du Tiers-Monde alors en phase de développement avancé. Elle s'applique à un pays du Tiers-Monde qui connaît depuis plusieurs années des taux de croissance élevés et qui est en train d'amorcer chez lui un processus de modernisation et de rattrapage des pays développés, tout en conservant des structures sociales très inégalitaires et en partie traditionnelles (Inde, Chine). Ce pays devient alors un pays émergent ou une économie émergente.

    Le pays émergent est un pays en phase de sortie du sous-développement, une économie à revenu intermédiaire et à fort potentiel de croissance, qui s'ouvre sur l'économie mondiale et connaît des transformations institutionnelles et structurelles d'importance. Cependant, la liste des pays auxquels s'applique ce terme varie selon les époques et les sources. Ainsi l'OCDE distingue 21 pays émergents à savoir l'Afrique du Sud, l'Argentine, le Bangladesh, le Brésil, le Chili, la Chine, la Colombie, la Hongrie, l'Inde, l'Indonésie, l'Iran, la Malaisie, le Mexique, le Pérou, les Philippines, la Pologne, la République Tchèque, la Russie, la Thaïlande, la Turquie. La banque HSBC n'en reconnaît que 6, à savoir l'Afrique du Sud, la Colombie, l'Egypte, l'Indonésie, la Turquie et le Vietnam. La banque Goldman Sachs reconnaît comme pays émergents l'Afrique du Sud, le Bangladesh, le Brésil, la Chine, la Corée du Sud, l'Egypte, l'Inde, l'Indonésie, l'Iran, le Mexique, le Nigéria, le Pakistan, les Philippines, la Russie, la Turquie, le Vietnam20(*).

    Encadré 1.1. Les différentes classifications des pays émergents

    2001: BRIC, par Jim O'NEILL, Goldman Sachs, pour désigner les fonds investissant dans quatre pays: Brésil, Russie, Inde et Chine.

    2005: Next Eleven (les onze prochaines économies émergentes), par Jim O'NEILL: Bangladesh, Corée du Sud, Egypte, Indonésie, Iran, Mexique, Nigéria, Pakistan, Philippines, Turquie et Vietnam.

    2009: BIICS ou BICIS: Brésil, Inde, Indonésie, Chine et Afrique du Sud.

    2010: CIVETS, par un analyste de l'Economist Intelligence Unit et rendu public par la banque HSBC: Colombie, Indonésie, Vietnam, Egypte, Turquie et Afrique du Sud.

    2010: MIST, par Jim O'NEILL: Mexique, Indonésie, Corée du Sud, et Turquie.

    2011: EAGLES (Emerging And Growth Leading Economies), par le groupe bancaire espagnol BBVA Research: BRIC + MIST + Taïwan.

    2011: BRICS, par Jim O'NEILL: Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud.

    2011: E7 (Emergent 7): BRIC + Mexique + Indonésie et Turquie.

    2011: MIKT, par Jim O'NEILL: Mexique, Indonésie, Corée du Sud et Turquie.

    2012: M3, par l'institution financière Silk Road Management: Mongolie, Mozambique et Myanmar.

    2013: BENIVM, par Laurence DAZIANO : Bangladesh, Ethiopie, Nigéria, Indonésie, Vietnam et Mexique.

    2014: Fragile Five, par James Lord de Morgan Stanley: Afrique du Sud, Brésil, Inde, Indonésie et Turquie.

    DAZIANO L., Les pays émergents. Approche géo-économique, Armand Colin, Collection U, 2014.

    En 2001, Jim O'NEILL, économiste à la banque Goldman Sachs, parle pour la première fois du groupe des BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine) pour désigner parmi les pays émergents, 4 économies prometteuses21(*). En 2010, Michael GEOGHEGAN invente l'acronyme CIVETS pour désigner le groupe constitué par la Colombie, l'Indonésie, le Viêtnam, la Turquie et l'Afrique du Sud. En 2014, la COFACE22(*) donne une liste de 10 nouveaux pays qui remplissent les critères de l'émergence : la Colombie, l'Indonésie, le Pérou, les Philippines et le Sri Lanka qui bénéficient d'un climat d'affaires convenable, et le Kenya, la Tanzanie, la Zambie, le Bangladesh, l'Ethiopie, qui sont soumis à un environnement des affaires difficile ou extrêmement difficile, ce qui pourrait être un frein à l'exploitation de leur potentiel.

    Encadré 1.2. L'Afrique est le continent émergent du XXIème Siècle

    Dès 2011, l'institut Coe-Rexecode soulignait, dans une étude économique consacrée à l'Afrique, le potentiel de ce continent. Selon ses prévisions, le PIB africain dépasserait le PIB des pays de l'Est en 2033 ; le PIB africain total augmenterait de 600% en 40 ans ; à l'horizon 2050, le PIB africain talonnerait celui de l'Europe des 27 ; et entre 2010 et 2050, le PIB africain passerait de 20 à 80% du PIB des Etats-Unis.

    L'Afrique connaît un profond renouvellement de ses fondements macroéconomiques. Le développement n'est pas possible dans un espace géographique dépeuplé. Avec des densités de 8 habitants par kilomètre carré, l'Afrique connaissait des taux de peuplement qui avoisinaient ceux des départements français les moins peuplés (Lozère, Creuse). Avec un taux de peuplement aussi faible, les infrastructures ne sont pas rentables, l'agriculture ne peut être industrialisée et l'absence de villes denses empêche les économies d'échelle croissantes. Avec une prévision « réaliste » de deux milliards d'habitants en 2050, plus que la Chine et trois fois plus que la population européenne à cette date, l'Afrique pourra assurer son développement par sa population. L'urbanisation et la densification des territoires accélèrent le commerce et la hausse de la productivité. Les ressources naturelles fournissent également un fondement structurel de la croissance, qu'il s'agisse de ressources énergétiques, minières ou forestières. Certes, l'Afrique minière devra gérer son « effet richesse » ainsi qu'améliorer substantiellement sa gouvernance. Les mutations économiques actuelles offrent la possibilité de croire que l'Afrique va connaître une croissance structurelle dans les prochaines décennies. Le défi sera de gagner les points de croissance qui permettront, au-delà de l'accroissement démographique, de tirer le revenu de la population par le haut.

    Le Nigéria et l'Ethiopie sont les figures de proue de l'émergence africaine. Démographiquement moins nombreux (entre 10 et 40 millions d'habitants) et aussi beaucoup plus dépendants de leurs ressources en matières premières, et notamment pétrolières et gazières, des pays comme l'Angola, le Ghana, la Côte d'Ivoire et le Mozambique représentent le futur économique de l'Afrique. L'Angola a enregistré un taux de croissance de 6,8% en 2012 et 5,6% en 2013, grâce au secteur pétrolier. Le Mozambique deviendra, dans les dix prochaines années, l'eldorado des matières premières : gaz et pétrole récemment découverts dans le bassin de la Rovuma, exploitation du charbon au large du Zambèze... a tel point que le Mozambique devrait dépasser, d'ici quinze ans, la production gazière du Qatar. Au Ghana, la croissance (+ 5,5% en 2013) repose sur une économie diversifiée, dopée par le pétrole et le secteur minier, ainsi qu'une grande stabilité politique.

    DAZIANO L., Les pays émergents. Approche géo-économique, Armand Colin, Collection U, 2014.

    Il faut noter qu'il existe depuis 1992 une catégorie de pays, les « Frontier Markets », catégorie de pays que l'on peut qualifier de « pays aux limites de l'émergence ». Cette catégorie regroupe des pays de plus faible rentabilité qui sont classés notamment par les institutions financières comme Morgan Stanley Capital International. Ainsi, pour un pays comme le Nigéria qui est la première économie d'Afrique en 2015, se pose la question de le classer ou non comme pays émergent. Le Crédit Agricole le classe dans la catégorie des pays à fort potentiels, alors que Morgan Stanley Capital International le classe dans celle des « Frontier Markets », ou encore dans celle des BENIVM (Bangladesh, Ethiopie, Nigéria, Indonésie, Vietnam, Mexique), qui est la nouvelle proposition de regroupement faite par Laurence DAZIANO pour qualifier les futurs émergents. On voit donc que les listes de pays émergents sont diverses et variées, un pays pouvant être considéré par une institution comme émergent tandis qu'une autre ne le reconnaît pas comme tel. Les pays qui mettent tout le monde d'accord sur leur statut de pays émergent sont les pays membres du BRICS (que nous allons voir plus bas), encore que l'appartenance à ce groupe de l'Afrique du Sud soit assez contestée23(*).

    Si ces économies ont fait (et continuent de faire) l'objet d'une étude très poussée, c'est parce qu'elles ont une part de plus en plus grande dans la production des richesses mondiales. En effet, d'après le FMI, le poids des pays émergents dans le PIB mondial est passé de 27,4% en 1992 à plus de 40% en 2011, et atteindrait plus de 4524(*)% en 2017. Le tableau 1.1 présente les pays aux plus gros PIB (nominaux) dans le monde en milliards de dollars américains, selon le FMI.

    Tableau 1.1 : Les 20 plus gros PIB dans le monde en 2015 et 2016 (estimations).

    Pays

    PIB 2015

    PIB (estimations 2016)

    USA

    17947

    18698

    Chine

    10983

    12254

    Japon

    4123

    4171

    Allemagne

    3358

    3473

    Royaume-Uni

    2849

    3055

    France

    2422

    2488

    Brésil

    1773

    1673

    Inde

    2091

    2385

    Italie

    1816

    1868

    Russie

    1325

    1179

    Canada

    1552

    1592

    Corée du Sud

    1377

    1450

    Australie

    1224

    1253

    Espagne

    1199

    1265

    Mexique

    1144

    1187

    Indonésie

    858

    876

    Pays Bas

    738

    783

    Turquie

    733

    721

    Arabie Saoudite

    653

    643

    Suisse

    665

    688

    Source : FMI et Banque Mondiale, Avril 2016.

    Le tableau 1.1 présente le classement des 20 premières économies mondiales en 2015 et 2016 (prévisions) en milliards de dollars, parmi lesquelles on retrouve 7 pays émergents, à savoir la Chine, le Brésil, l'Inde, la Russie, le Mexique, l'Indonésie et la Turquie. En 2015 les pays émergents pèsent pour 32% du PIB du groupe, soit 18907 milliards USD sur 58830 milliards USD. Les prévisions pour l'année 2016 sont de 20348 milliards USD de PIB pour les pays émergents du groupe sur le total du PIB qui s'élèverait à 61702 milliards USD, une part estimée à 33% pour les 7 émergents.

    Avec cette part sans cesse croissante du PIB des économies émergentes dans celui du groupe des 20 premières économies mondiales, les pays émergents sont de plus en plus en train de conquérir le monde. Lorsqu'on analyse les « Statistiques du Commerce International », documents produits par l'Organisation Mondiale du Commerce, on constate que ce sont en grande partie les pays émergents qui sont les grands acteurs du commerce mondial de marchandises. Par exemple, en ce qui concerne les produits manufacturés, nous avons 9 pays émergents sur les 15 principaux exportateurs, 10 pays émergents sur les 15 principaux importateurs25(*), et leur part est sans cesse croissante dans le commerce mondial. Suite à leurs belles performances économiques, l'appartenance de ces pays à ce groupe n'est pas figée. Ainsi, la Corée du Sud, anciennement pays émergent, fait aujourd'hui partie des pays de l'OCDE, considérés comme les pays développés.

    Ces pays émergents, avec les opportunités qu'ils présentent (croissance démographique, développement des classes moyennes consommatrices et connectées, ressources naturelles abondantes), représentent un enjeu stratégique majeur pour les puissances de l'OCDE, car ils sont à la fois des marchés porteurs et des concurrents avec lesquels de nouveaux partenariats doivent s'inventer.

    1.2.2 Les grands pays émergents : les BRICS

    « La chute du mur de Berlin en 1989, puis la mondialisation ont accentué l'émergence de nouvelles puissances du Sud, alors que les pays riches connaissaient, à l'exception des USA, une croissance modérée. Au début des années 2000, le concept d'émergence économique est repris par certaines grandes banques (anglo-saxonnes) comme Goldman Sachs et HSBC, pour classifier les économies prometteuses dans lesquelles il faut investir. En 2001, Jim O'Neill, chef économiste de la banque Goldman Sachs, publie une note dans laquelle il définit les nouveaux pays émergents. Il y présente la notion de BRIC, pour désigner le Brésil, la Russie, l'Inde et la Chine comme des puissances économiques montantes appelées à remettre en cause la domination des pays riches dans l'économie mondiale. Pour cela, il part d'un critère simple, l'impact de la population sur la sphère économique. Le plus petit pays démographiquement est alors la Russie avec ses 140 millions d'habitants, avant l'ajout de l'Afrique du Sud en 2011. Il en déduit que si les pays augmentaient leur productivité, ils deviendraient des géants économiques du fait de la taille de leur marché intérieur, de la croissance du commerce mondial et de la globalisation. Ses calculs lui montrent qu'en 2037, le PIB combiné de ces quatre pays pourrait être plus élevé que le PIB combiné du G7. La Chine est devenue la deuxième économie mondiale devant le Japon, la Russie, le Brésil et l'Inde ont dépassé le Canada. En 2011, l'Afrique du Sud rejoint le groupe, malgré sa dimension démographique modeste (48 millions d'habitants en 2011) par rapport aux géants indien, chinois, brésilien et russe, grâce aux efforts des milieux d'affaires sud-africains très influents et très intégrés au monde économique anglo-saxon, et de la bourse de Johannesburg qui est une plaque tournante pour les matières premières.26(*)».

    Les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) constituent sans conteste le groupe de pays émergents le plus important, assurant aujourd'hui plus de 30% de la croissance mondiale contre moins de 10% il y a 20 ans27(*). Les pays du groupe BRICS occupent 26% du territoire mondial, et totalisent 42% de la population mondiale. Dans le tableau suivant sont consignés le PIB (en milliards USD), la population (en millions d'habitants) et le PIB par habitant (en milliers USD) de chaque pays membre du BRICS.

    Tableau 1.2 : PIB et PIB/habitant des BRICS en 2015.

    Indicateurs

    Brésil

    Russie

    Inde

    Chine

    Afrique du Sud

    PIB

    1.773

    1.325

    2.091

    10.983

    312,957

    Population

    204

    143,5

    1.270

    1.400

    55

    PIB/habitant

    8.691

    9.233

    1.646

    7.845

    5.690

    Source : Elaboré sur base des données du FMI et de la Banque mondiale, Avril 2016.

    Les BRICS ont donc des économies qui font presque jeu égal avec les économies occidentales et ils s'organisent avec l'intention de mettre en place une nouvelle gouvernance économique et politique mondiale, malgré des intérêts parfois divergents et des antagonismes profonds. Ces pays se sont développés en suivant un modèle économique fondé sur un Etat fort et une priorité à l'exportation, un marché intérieur protégé et un effort considérable d'épargne et d'éducation, comme le Japon et les dragons avant eux.

    Encadré 1.3. Le consensus de Washington

    Le consensus de Washington présente les recommandations de politique économique d'inspiration libérale préconisées par le Trésor américain, le FMI et la Banque Mondiale. Elles sont au nombre de dix, à savoir :

    - Une discipline budgétaire, avec une préférence pour la réduction des dépenses plutôt que l'augmentation des recettes ;

    - Une réorientation vers les dépenses de santé et éducation, réduction des subventions ;

    - Une réforme fiscale avec assiette large et taux marginaux pondérés ;

    - Un taux d'intérêt déterminé par le marché ;

    - Un taux de change déterminé par le marché ;

    - Une libéralisation des importations ;

    - Une libéralisation des investissements ;

    - La privatisation ;

    - La dérégulation, suppression des barrières internes et externes et du contrôle des prix ;

    - Un renforcement des droits de propriété.

    GOLDSTEIN A. et LEMOINE F., L'économie des BRICS, La découverte, Paris 2013.

    Les transformations structurelles se sont opérées au sein des BRIC. Ces changements structurels qui ont accompagné la croissance sont :

    - Une contraction de l'agriculture pour se lancer dans les industries et les services, sauf au Brésil, pays éminemment agricole.

    - Une présence de plus en plus forte dans les productions mondiales : les BRIC couvrent un large spectre des productions mondiales depuis les produits manufacturés (Chine) jusqu'aux matières premières industrielles et agricoles (Brésil) et aux ressources énergétiques (Russie), en passant par les services (Inde).

    - Une accumulation du capital : capital naturel, capital humain et capital physique.

    Ces pays ont mené des politiques de réforme et d'ouverture économiques au cours des trente dernières années, qui leur ont permis de mobiliser plus efficacement leurs ressources internes. L'Etat a réduit ses interventions directes dans l'activité économique et endossé un nouveau rôle : celui de mettre en place les institutions nécessaires pour réguler l'économie (système fiscal, bancaire, régime de propriété, etc.). A la faveur du Consensus de Washington, ces pays ont opéré :

    - Des réformes systémiques dans un contexte de relative stabilité macroéconomique : à partir des années 1990, les gouvernements de ces pays lancent une série de réformes qui vont transformer leurs systèmes économiques. En Mars 1990, le gouvernement brésilien lance une nouvelle politique industrielle qui comporte un vaste programme de libéralisation du commerce extérieur et un plan de privatisation. En juillet 1991, l'Inde négocie un accord d'urgence avec le FMI et met en place un programme de stabilisation et de réformes structurelles. Le gouvernement russe, quant à lui, opte pour une « thérapie de choc » en 1992, c'est-à-dire une libéralisation brutale des prix, une réduction drastique des tarifs douaniers et une forte dévaluation du rouble. En Chine, on relance les réformes et l'ouverture engagée en 1978 et gelées depuis 1989.

    - Des privatisations : dans ces pays, des PME, des grandes entreprises d'Etat, ont été privatisées, restructurées. En Chine par exemple, le processus a fait une place aux investisseurs étrangers, tout en gardant un contrôle étatique. Ainsi, plusieurs entreprises à capital mixte ont été constituées, et beaucoup introduites dans la bourse de Hong Kong.

    - La maîtrise des finances publiques : les BRIC sont parvenus à équilibrer leurs finances publiques par des réformes fiscales, une plus grande discipline budgétaire, mais aussi grâce à leur forte croissance économique. Ces réformes ont eu une forte incidence sur les finances publiques, les dépenses (réorientation au profit des dépenses sociales) comme sur les recettes. Au Brésil par exemple, la loi de responsabilité fiscale (2000) a plafonné les dépenses de personnel de l'administration centrale et des Etats, et mis des limites à l'endettement public.

    - La réforme du système bancaire : la libéralisation du secteur bancaire dans les BRIC.

    Avec la libéralisation des mouvements de capitaux, les BRICS font figure d'eldorado pour les multinationales du monde entier, dans toutes les industries. Les raisons qui ont déclenché cet engouement sont d'ordre économique (forte croissance et montée des classes de consommateurs aisés, abondance des ressources naturelles, disponibilité en main d'oeuvre bon marché y compris par les travailleurs qualifiés, voire hautement qualifiés) et institutionnel (suppression d'obstacles à la libre circulation des capitaux, privatisations, réductions des barrières commerciales avec le MERCOSUR pour le Brésil et l'accession à l'OMC pour la Chine). Les mesures d'aide que les autorités ont offertes aux sociétés étrangères sous forme d'exonérations fiscales, de mise à disposition de terrains et d'infrastructures, et autres subventions, ont aussi joué leur rôle. Les entreprises étrangères qui investissent dans ces grandes économies émergentes ont deux objectifs, à savoir tirer parti des bas coûts salariaux de ces pays en y délocalisant la production de certains segments de la chaîne de valeur pour desservir les marchés extérieurs (délocalisation), et produire pour satisfaire la demande intérieure, ce qui nécessite d'être proche du marché, afin de se positionner au mieux pour répondre aux exigences des consommateurs en termes de prix, de qualité, de variété.

    Alors qu'ils ne comptaient que pour 8,5% du PIB mondial en 2001 (Brésil pour 1,7%, Russie pour 0,9%, Inde pour 1,5%, Chine pour 4,1%, Afrique du Sud pour 0,3%)28(*), ces cinq pays émergents, regroupant à peu près la moitié de la population mondiale et plus d'un quart de la superficie mondiale, représentent un peu plus de 22% du PIB mondial en 2015 (Brésil pour 2,4% , Russie pour 1,8%, Inde pour 2,8%, Chine pour 15%, Afrique du Sud 0,4% pour %)29(*). En effet, le PIB mondial en 2015 s'élève à 73434 milliards USD, et celui des BRICS à 16484,957 milliards USD30(*). Pour l'année 2015, les BRICS connaissent de légères baisses dues à la situation économique mondiale. Ainsi, le Brésil connaît un taux de croissance négatif qui s'élève à environ -3,5% par rapport à l'année précédente. La Chine affiche son taux de croissance le plus bas depuis 25 ans, soit 6,9%. Les taux de croissance de la Russie, de l'Inde et de l'Afrique du Sud s'élèvent respectivement à -3,8%, 7,4%, 1,3%. Le graphique suivant illustre parfaitement cette réalité.

    Graphique 1.1 : Evolution des taux de croissance des BRICS, 2000-2015.

    Source : Elaboré sur base des données ci-haut citées.

    « Les BRICS ont fait d'immenses contributions à l'économie mondiale dans la création d'emplois, la réduction de la pauvreté, l'afflux de capitaux, les exportations et importations, entre autres. Au cours des deux dernières décennies, leur rôle dans le commerce mondial s'est considérablement accru et leur part a plus que quadruplé, passant de 3,6 % en 1990 à 15 % en 201031(*). » Leur présence exportatrice est passée de 7,5 % du total mondial des exportations de marchandises en 2000 à 18,3% en 2014, avec 12,3 % pour la seule Chine32(*).

    Tableau 1.3 : Evolution des exportations en valeur des BRICS, 2001-2014 (mlds USD).

     

    2001

    2014

    Brésil

    58

    225

    Russie

    102

    498

    Inde

    43

    322

    Chine

    266

    2.342

    Afrique du Sud

    29

    91

    Source : Elaboré sur base des données issues des statistiques du commerce international 2001, 2010, 2014.

    Graphique 1.2 : Evolution des exportations en valeur des BRICS, 2001-2014 (milliards USD).

    Source : Elaboré sur base des données contenues dans les Statistiques Internationales du Commerce 2001, 2010, 2012, 2015.

    Le graphique 1.2 montre l'évolution des exportations en valeur des BRICS entre 2001 et 2014.

    Tableau 1.4 : Part des BRICS dans les exportations mondiales de marchandises, 2000-2014 (%).

     

    2000

    2005

    2008

    2009

    2014

    Brésil

    0,9

    1,1

    1,2

    1,2

    2,6

    Russie

    1,6

    2,3

    2,9

    2,4

    1,2

    Inde

    0,7

    0,9

    1,2

    1,3

    1,7

    Chine

    3,9

    7,3

    8,9

    9,6

    12,3

    Afrique du Sud

    0,5

    0,5

    0,5

    0,5

    0,5

    BRICS

    7,5

    12,2

    14,8

    15,1

    18,3

    Source : Elaboré à partir des données recueillies dans la base de données UNCTAD stat, et des Statistiques internationales du commerce 2015.

    Cette formidable ascension commerciale est largement due aux performances chinoises. Ce dynamisme permet aux BRICS et autres pays émergents d'accumuler des réserves de change supérieures à celles des pays développés.

    Tableau 1.5 : Réserves de change de certains pays émergents en 2012 (milliards UDS)

     

    Réserves de change

    Chine

    3.330

    Brésil

    373,910

    Russie

    511,213

    Inde

    286,692

    Afrique du Sud

    48,916

    Thaïlande

    173,204

    Source : Elaboré sur base des données du FMI, Juin 2012.

    Graphique 1.3 : Réserves de change de quelques pays émergents et de quelques pays développés en 2012.

    Source : Elaboré sur base des données de la Banque Mondiale.

    « En matière d'IDE, les pays BRICS restent les principaux pays d'accueil des flux d'IDE à destination des pays en développement. Au cours de la dernière décennie, les flux d'IDE vers ces pays ont augmenté de manière tendancielle.33(*)»

    Tableau 1.6 : Evolution des IDE entrants dans les BRIC 2005-2014 (mlds USD).

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    2005

    2006

    2007

    2008

    2009

    2010

    2011

    2012

    2013

    2014

    Chine

    72

    73

    84

    108

    95

    115

    124

    121

    124

    129

    Brésil

    15

    19

    35

    45

    26

    49

    67

    66

    64

    62

    Russie

    16

    38

    56

    75

    37

    43

    55

    51

    69

    21

    Inde

    8

    20

    25

    47

    36

    27

    36

    24

    28

    34

    Total

    111

    150

    200

    275

    191

    234

    282

    262

    285

    246

    Sources : Elaboré sur base des rapports sur l'investissement dans le monde 2012, 2013, 2014, 2015, et la base des données de la CNUCED.

    Les BRIC reçoivent à eux seuls 20% des flux mondiaux IDE entrants en 2014. La Chine à elle seule reçoit 10,5% des flux mondiaux d'IDE. Lorsqu'on sait que l'investissement est une variable importante dans le processus d'émergence, l'on comprend mieux pourquoi les BRICS sont considérés comme les grands émergents.

    Quoi qu'il en soit, les pays membres du BRICS ne connaissent pas d'évolution que sur le plan économique. Comme nous l'avons précisé plus haut, plusieurs transformations s'opèrent dans les pays émergents, notamment en ce qui concerne les aspects sociaux de la vie. C'est ainsi qu'on a pu constater une nette évolution de leur Indice de Développement Humain entre 1980 et 2015. Le tableau 1.7 présente l'évolution de l'IDH des BRICS : la Chine passe d'un IDH faible de 0,427 à un IDH élevé de 0,727. L'Inde passe d'un IDH faible de 0,369 à un IDH moyen de 0,609. Ceci dénote une nette amélioration du niveau de vie dans ces pays émergents.

    Tableau 1.7 : Evolution de l'IDH dans les BRICS 1980-2014.

     

    1980

    1990

    2000

    2005

    2010

    2014

    Brésil

    0,545

    0,612

    0,682

    0,705

    0,739

    0,755

    Russie

    -

    0,729

    0,717

    0,750

    0,773

    0,798

    Inde

    0,369

    0,431

    0,483

    0,527

    0,570

    0,609

    Chine

    0,423

    0,502

    0,591

    0,645

    0,701

    0,727

    Afrique du Sud

    0,569

    0,619

    0,628

    0,608

    0,638

    0,658

    Source : Elaboré sur base des données du RDH 2014, PNUD.

    Intéressons nous maintenant de près aux caractéristiques généralement reconnues aux pays émergents.

    1.2. Les caractéristiques des pays émergents

    Bien qu'il n'existe pas de définition précise de l'émergence, on peut déceler, en analysant les pays émergents, quelques caractéristiques communes à ces derniers. Parmi ces caractéristiques, les changements structurels sont cités : rénovation juridique et institutionnelle, passage d'un type de production agraire à un type industriel, ouverture au marché mondial des produits et services et aux flux internationaux de capitaux. François LAFARGUE, docteur en géopolitique, dans un article intitulé : « Des économies émergentes aux puissances émergentes 34(*)», propose les caractéristiques suivantes :

    - Des revenus intermédiaires : les pays émergents ont un revenu par habitant en PPA compris entre 10 et 75% du revenu moyen de l'Union Européenne. Ainsi, les pays les moins avancés de la planète tels que la RDC, le Niger, et les pays développés comme la France, l'Allemagne, sont exclus du groupe. Cependant, on observe une hausse régulière du PIB et du revenu par habitant des pays émergents. Le Brésil par exemple, affiche un PIB par habitant de 8691 dollars USD, contre 37728 dollars USD pour la France et 531,2 dollars35(*) pour la RDC. En 1990, le Brésil, la Chine, l'Inde, la Russie et l'Afrique du Sud représentaient 8,4 % de la richesse mondiale. Cette part s'établit désormais à 22%. Avec un taux de croissance annuel de 8 %, le PIB de l'Inde devrait dépasser celui de la France dès la fin de la décennie 2010.

    - Une croissance et un rattrapage économiques : durant ces dernières années, les pays émergents ont connu une croissance économique soutenue et rapide, supérieure à la croissance mondiale et à celle des pays développés. A titre d'exemple, le taux de croissance de la Chine s'est élevé à 6,9% en 2015 (le taux le plus faible depuis 25 ans), celui de l'Inde à 7,3% contre 3,3% de taux de croissance mondiale. Ce rattrapage du retard économique qu'ils ont subi notamment à cause de la colonisation, permettent à ces pays de peser aujourd'hui dans la balance mondiale.

    - Une progression du commerce extérieur supérieure à celle des échanges internationaux : par exemple, la part de la Chine dans le commerce international qui est passée de 3,65 % en 2000 à 9,6 % en 2009, ce qui représente en valeur une augmentation de 380 %36(*). Pendant cette même période, les échanges internationaux ont été multipliés par deux. Ce dynamisme commercial permet à ces États d'accumuler des réserves de change indispensables à l'acquisition de technologies et de biens de consommation à l'étranger (Tableau 1.5). La Chine a ainsi accumulé 3.330 milliards USD de réserves de change en 2015.

    - Des transformations institutionnelles et une ouverture économique : durant les 20 dernières années, ces économies ont connu une série de transformations institutionnelles qui les ont davantage intégrées aux échanges mondiaux. En effet, ces pays ont mis en place des stratégies d'import-substitution (substitution des importations par les productions nationales), et de facilitation des investissements nationaux et étrangers37(*). Il s'agit surtout d'investissements productifs dans les secteurs de l'industrie manufacturière et la haute technologie (Embraer au Brésil, Samsung, Daewoo en Corée du Sud, International SOS à Singapour), de l'industrie des Bâtiments et Travaux Publics, etc.

    - Des entreprises de taille mondiale implantées dans plusieurs pays (multinationales) et dont le capital est en majorité ou en partie détenu par des actionnaires privés. Il existe ainsi de nombreuses sociétés chinoises (comme Petrochina et la China National Petroleum Corporation), indiennes (Reliance, Oil and Natural Gas Corporation) et brésiliennes (Petrobras, Vale), qui développent leurs activités à l'étranger. Ainsi, pour la première fois, les capitaux brésiliens placés à l'étranger ont été en 2008 d'un montant supérieur à ceux venus de l'étranger et accueillis dans le pays. La Chine a été en 2009 le cinquième investisseur mondial, ses investissements se concentrant pour les deux tiers en Asie. Entre 2000 et 2009, le montant du stock des investissements directs à l'étranger du Brésil, de la Chine, de l'Inde et de la Russie a été multiplié par sept. Ces investissements concernent tous les secteurs d'activité économique : la construction automobile, avec les achats des constructeurs automobiles Jaguar par l'indien Tata et Volvo par le chinois Geely ; l'agroalimentaire, le brésilien JBS, qui est le premier producteur et transformateur au monde de viande de boeuf, a notamment pris le contrôle de plusieurs de ses concurrents en Europe et aux États-Unis ; les hydrocarbures , le rachat par des entreprises chinoises du canadien Addax Petroleum et de l'argentin Bridas. Il s'agit également de prises de participation par le biais de fonds d'investissements privés ou publics. L'État chinois à travers l'agence publique State Administration of Foreign Exchange, gestionnaire de ses réserves de change, détient 1,6 % du capital de Total et 1,1% de celui de British Petroleum. Le russe Digital Sky Technologies a pris des participations dans de nombreuses sociétés informatiques comme la messagerie ICQ ou le réseau social Facebook.

    - Diversification de l'économie qui ne repose pas seulement sur l'exportation de matières premières. Cette diversification permet à ces pays d'éviter de subir les effets négatifs dus à la volatilité des prix de ces produits. Ceci dans le but de préserver la stabilité des recettes d'exportation. Le Brésil, pays bien doté en ressources naturelles a su diversifier son économie, exportant à la fois des matières premières, des produits semi-manufacturés et des produits manufacturés.

    - Un dynamisme démographique et un nombre croissant de consommateurs qui permettent au pays d'offrir de bonnes perspectives économiques, surtout avec la naissance d'une classe moyenne assez large (100 millions de personnes au Brésil). En effet, ces économies émergentes sont de véritables locomotives locales dans leurs régions avec une forte population, des ressources naturelles substantielles, de grands marchés de consommateurs avec un certain pouvoir d'achat. Ce qui leur confère un certain leadership régional. (Le Brésil en Amérique latine, la Chine en Asie). Dans ces pays, une très grande proportion de la demande potentielle est transformée en demande effective donc solvable.

    Mamadou KOULIBALY, président d'Audace Institut Afrique, dans un ouvrage intitulé « Pourquoi certains pays sont émergents et d'autres pas ? 38(*)», ajoute :

    - Des politiques macroéconomiques ouvertes et responsables : avec ces dotations naturelles en hommes motivés et en ressources, ces pays ont adopté de bonnes politiques macro-économiques qui ont stimulé l'émergence des marchés. Ces politiques créent des marchés financiers où les capitaux peuvent découvrir des opportunités de placement qui rassurent les investisseurs. Ces politiques macroéconomiques portent sur l'ouverture de leur système bancaire aux marchés mondiaux et la libéralisation des marchés financiers locaux pour les rendre susceptibles de recevoir les IDE et les capitaux privés (Cas du Brésil). Elles portent aussi sur des politiques monétaires prudentes et responsables agencées à des politiques fiscales qui maîtrisent les déficits publics et assurent le remboursement de la dette publique intérieure et extérieure. Elles s'engagent dans des opérations de privatisation des entreprises du secteur public et du patrimoine foncier de l'Etat.

    - Une rupture avec les structures traditionnelles inefficaces : dans ces économies, le choix a été fait clairement de rompre avec les structures traditionnelles politiques et économiques archaïques pour en adopter de plus modernes et de plus simplifiées. Elles sont donc en transition avec des reformes structurelles de fond aussi bien dans le domaine économique que dans les domaines politique et social. Les anciennes structures fondées sur l'action de l'Etat, puissance publique, ont été jugées inefficaces ou inutiles. Les reformes ouvrent et libèrent des marchés qui apportent la croissance économique au pays, l'emploi aux populations et la stabilité politique aux citoyens. La tradition, dans ces pays, était, par exemple, en matière de commerce international, d'exporter des produits bruts sans y apporter de valeur ajoutée. Mais, très rapidement, avec les capitaux privés et les IDE qui sont arrivés, les exportations ont été diversifiées et se sont intégrées correctement dans l'économie mondiale non pas par le protectionnisme ou par l'assistance d'autres Etats, mais par le commerce libre et la finance privée. Ces nouveaux marchés en retour créent des opportunités profitables à tous et permettent à ces économies qui traditionnellement souffraient du moindre choc exogène, de devenir plus résistantes aux chocs, ce qui rassure les investisseurs et stabilise encore plus les pays. La valeur ajoutée dans les activités exportatrices est devenue de plus en plus forte et les recettes fiscales des Etats se sont aussi élevées, ce qui leur a permis de réduire leurs dettes et les déficits publics tout en réalisant d'ambitieux programmes sociaux en direction des populations les plus vulnérables.

    A ces caractéristiques, on peut ajouter :

    - Une inégale distribution des revenus : l'indice de Gini au Brésil par exemple est de 51.

    - La forte prédominance de l'informel : le secteur informel représente à peu près 60%39(*) des activités économiques ;

    - Des écarts de productivité du travail entre entreprises particulièrement prononcés ;

    - La corruption y est très répandue, et une opacité dans les décisions gouvernementales est également observée, malgré les efforts pour l'instauration de l'Etat de droit : on peut citer ici le scandale de corruption Petrobras au Brésil, ou encore le maquillage des comptes publics par l'ex-présidente brésilienne Dilma Roussef.

    1.3 Les fondements et critères de l'émergence économique

    1.3.1 Les fondements de l'émergence

    L'atteinte de l'émergence est conditionnée par le respect de certains pré-requis. Ces conditions, qui ont été respectées par les pays émergents, constituent les fondamentaux pour tout pays pauvre qui aspire à l'émergence. Cela implique que les pays qui veulent atteindre l'émergence doivent subir bon nombre de transformations pour se détacher des handicaps qui les maintiennent dans la pauvreté.

    Parmi les éléments fondamentaux de l'émergence, il y les transformations que le pays opère sur le plan politique, institutionnel, économique. En effet, l'amélioration de la gouvernance politique, la création d'un vrai leadership politique, la promotion de la paix et de la stabilité, la mise en place d'un plan national de développement, la mise en oeuvre de réformes destinées à faciliter les investissements dans le pays, la lutte contre la corruption et la pratique de règles de la bonne gouvernance grâce à une administration publique nettoyée et performante, sont autant d'éléments fondamentaux pour l'atteinte de l'émergence. Les pays pauvres qui opèrent ces transformations se placent sur la voie de l'émergence, car elles sont à la base des avancées économiques devant permettre au pays d'atteindre cet objectif.

    La croissance et le développement des BRICS ont été possibles parce qu'ils ont réussi à mobiliser leurs ressources et atouts naturels grâce aux échanges internationaux, ainsi qu'aux politiques de réforme et d'ouverture qu'ils ont mis en oeuvre. Ces pays ont appliqué les 10 recommandations de politique économique d'inspiration libérale connues sous le nom de Consensus de Washington (voir Encadré 1.1).

    Parmi les principales leçons qu'on peut tirer de la croissance des BRICS sur la dernière décennie, se trouvent, entre autres l'adoption d'une politique économique libérale, la stabilité politique et institutionnelle, et un pragmatisme dans la mise en oeuvre des réformes.

    Le pays pauvre qui aspire à l'émergence doit chercher à atteindre le niveau de compétitivité et d'attractivité le plus élevé possible, afin de s'attirer les investissements nécessaires à son développement. Il doit donc mettre en place un environnement de classe internationale. Pour renforcer sa compétitivité internationale, le pays doit disposer de :

    1.3.1.1 Une stabilité politique et macroéconomique

    L'un des fondements de l'émergence des pays est l'existence de la stabilité politique et sociale, d'un bon cadre de vie (sécurité, propreté, présence d'infrastructures), d'un cadre macroéconomique stable avec des taux d'inflation et de chômage modérés ou faibles, un taux de change réaliste, une gestion saine et dynamique des finances publiques avec une priorité accordée aux investissements dans le développement des ressources humaines, afin de favoriser le développement endogène.

    1.3.1.2 Un cadre réglementaire de qualité

    L'atteinte de l'émergence est aussi tributaire de la qualité des institutions qui mettent en place le cadre réglementaire pour l'exercice des activités économiques créatrices de richesses. Ainsi, les transformations institutionnelles visant la rationalisation des procédures administratives liées à l'exercice des activités, la lutte contre la corruption, la promotion d'une administration publique compétente, intègre, crédible, accueillante et déterminée à faire gagner le secteur privé, la mise en place d'un système juridique et judiciaire crédible, capable de faire appliquer la loi, dans l'équité et la transparence, sont autant d'éléments permettant d'améliorer la compétitivité et l'attractivité du pays nécessaire pour l'atteinte de l'émergence. Ce cadre réglementaire incitatif devrait permettre au pays d'améliorer ses performances économiques.

    1.3.1.3 Un dynamisme et une ouverture économique

    Le pays qui aspire à l'émergence doit aussi opérer certaines transformations économiques :

    - Une croissance du PIB en hausse tendancielle ;

    - Une libéralisation des activités économiques et des prix pour favoriser la concurrence et la compétition ;

    - L'ouverture de l'économie sur l'extérieur par la libéralisation des échanges et la création de grands marchés intégrés avec les voisins et l'encouragement des IDE.

    - La limitation de l'intervention de l'Etat dans l'économie au strict nécessaire ;

    - L'existence d'un secteur privé local dynamique, compétitif, créatif, intègre et visionnaire, la promotion de l'initiative privée.

    - La capacité à générer une forte épargne locale et la disponibilité d'un bon système bancaire et financier local, régulé par des instances de supervision efficaces et capables de faire une allocation optimale des ressources.

    - La mise en place d'un système incitatif de qualité, en ce qui concerne la fiscalité, les terrains et bâtiments industriels, la politique agricole, etc.

    1.3.1.4 Des bases à long terme du développement

    Le pays doit avoir la capacité d'absorber et de s'adapter aux nouvelles technologies, disposer d'une main d'oeuvre disponible locale bien formée, qualifiée, productive et alliée avec les employeurs pour faire progresser l'entreprise. Il faut aussi une répartition équitable des fruits de la croissance pour renforcer la cohésion sociale et l'existence des bonnes infrastructures et d'un bon système de télécommunications.

    1.3.1.5 La capacité et la volonté d'attirer les investissements

    Dans l'optique d'améliorer son attractivité, le pays doit mettre en oeuvre des actions concrètes destinées à attirer les investissements.

    - La mise en oeuvre d'une bonne promotion du pays, à travers des agences de promotion et des stratégies de communication gagnantes ;

    - La mise en oeuvre d'un consensus national sur les orientations pour les rendre irréversibles.

    Ces transformations préalables à l'émergence s'accompagnent d'une transformation structurelle, c'est-à-dire « un transfert massif de ressources d'un secteur à un autre, du fait de changements intervenus au niveau des fondamentaux et des politiques économiques. 40(*)» Il s'agit des transformations destinées à accompagner la croissance, des changements dans la composition de la demande, du commerce extérieur, de la production et dans l'utilisation des facteurs de production à mesure qu'augmente le revenu par tête. Cela signifie un changement de la composition sectorielle du PIB, la part du secteur primaire en termes d'emplois et de production se dirigeant vers l'industrie et les services, et implique une utilisation plus grande des technologies et une meilleure productivité dans tous les secteurs. Concrètement, elle consiste en une réallocation du capital et du travail de l'agriculture à des secteurs plus productifs, une croissance des exportations et un afflux de capital étranger.

    Le pays doit, à travers un diagnostic stratégique, identifier les obstacles les plus sérieux qui freinent sa compétitivité et engager les réformes prioritaires ayant le plus d'impact sur la croissance. Ces axes de réformes doivent être accompagnés de blocs de réformes cohérents et complémentaires, en vertu du principe de super-modularité, car lorsque plusieurs blocs de réforme sont interdépendants, changer certains sans changer les autres réduit les chances de succès des réformes.

    Nous pouvons dire que les fondements de l'émergence résident dans les transformations engagées par le pays sur les plans institutionnel, politique, économique et social. Les transformations institutionnelles (cadre réglementaire des affaires incitatif, bonnes pratiques de gouvernance, absence de corruption, allègement des procédures administratives, partenariat étroit entre l'Etat et le secteur privé, etc.) et politiques (mise sur pied d'un plan de développement basé sur une vision développementaliste claire et une stratégie cohérente mise en oeuvre avec volontarisme et constance, amélioration du leadership politique qui doit être transformationnel, stabilité politique et sociale, promotion de la paix, etc.), permettent d'améliorer la compétitivité du pays et créent un climat de confiance pour les investisseurs tant nationaux qu'étrangers. Les transformations économiques s'opèrent alors, l'économie du pays devient plus dynamique, la libéralisation des activités économiques favorisant le dynamisme du secteur privé local, et l'ouverture du pays à l'extérieur (Outward-looking Policy) attire les investissements étrangers qui viennent ajouter du dynamisme à l'économie. La structure de l'économie change, passant d'une économie essentiellement agricole à une économie industrielle, de la production et l'exportation de produits primaires à la production et l'exportation de produits manufacturés. A ceci s'ajoute la création d'un consensus national autour de l'objectif d'émergence, afin qu'il y ait une cohérence de l'agenda sur la durée, de sorte que tous les gouvernements qui se succèdent dans le pays appliquent la politique déterminée par la même ligne conductrice et consolide ainsi les acquis de ses prédécesseurs. L'insertion de la population en tant qu'acteur de l'émergence doit se faire à travers des actions concrètes, une communication forte permettant l'appropriation de la vision par les populations. Tels sont les éléments fondamentaux de l'émergence économique des pays.

    1.4 Les critères d'analyse de l'émergence

    Les critères utilisés pour singulariser les pays émergents sont généralement des critères financiers permettant d'estimer les risques d'investissement dans ces pays. Pour approfondir le concept d'émergence, il convient de partir de critères plus larges et diversifiés qui permettent d'estimer un potentiel de croissance. L'analyse de Jim O'NEILL quand il crée le concept de BRIC, est de combiner les facteurs économique et démographique. A ces deux facteurs, on peut ajouter trois autres critères cumulatifs pour obtenir une analyse plus détaillée. Ces cinq critères peuvent être retenus pour identifier les prochains émergents et permettent de définir clairement l'émergence. Il s'agit :

    - De la population : elle doit être suffisamment nombreuse, au-moins 100 millions d'habitants, afin de constituer un marché domestique important qui constitue à la fois le premier débouché de l'industrie locale, mais également le débouché des importations nécessaires à l'équilibre des échanges. La croissance démographique doit être importante, plus la population est jeune et éduquée, plus elle pourra contribuer au développement économique.

    - De la croissance économique potentielle : le taux de croissance doit osciller autour de 5%.

    - D'une urbanisation importante fortement dynamique : puisque l'urbanisation est un facteur fondamental dans le décollage économique, la ville permettant le développement des transports, l'accès à l'eau potable et à l'électricité. Elle facilite les échanges, et est donc indispensable à l'émergence.

    - Du besoin en infrastructures permettant d'accompagner le décollage économique. Il s'agit de faciliter les déplacements avec la construction des routes, des ponts, des voies ferrées, aéroports et infrastructures énergétiques. Il s'agit également d'assurer l'équilibre du mix énergétique pour atténuer la dépendance vis-à-vis des fournisseurs extérieurs, et l'accès à l'eau courante et son traitement pour augmenter l'hygiène et diminuer la mortalité infantile.

    - D'une stabilité politique pour permettre de mettre en oeuvre des projets à long terme. Un pouvoir stable, détenteur d'une vision à long terme et d'une permanence dans les institutions, permet des politiques de grands travaux comme la construction d'infrastructures énergétiques, de lignes ferroviaires à grande vitesse ou d'aéroports, nécessaires pour le développement économique d'un pays.

    1.5 Les incidences de l'émergence sur les conditions sociales des populations des pays émergents

    Nous avons précisé plus haut que l'émergence n'est pas qu'un phénomène économique, il entraîne aussi des changements sociaux. Les pays émergents ont donc amélioré les conditions de vie de leur population, sur les plans de la santé, de l'éducation, de la protection sociale et de la préservation de l'environnement. Ces améliorations répondent aux impératifs des théories de la croissance endogène, qui stipulent qu'une population bien éduquée, en bonne santé, vivant dans un environnement sain, concourt à la formation et à l'amélioration de la croissance. Pour y arriver, ces pays ont mis en place des politiques visant à favoriser un meilleur accès à une éducation de base et à une éducation supérieure de qualité, un meilleur accès aux soins de santé de qualité, la mise en place de la protection sociale et de règles visant la protection de l'environnement et la réduction de la pauvreté. Les politiques de réduction de la pauvreté dans ces pays émergents ont visé principalement les transferts de revenus, les investissements en infrastructures, l'accès à une meilleure alimentation, la mobilisation sociale, le renforcement de l'agriculture familiale et l'auto emploi. Toutes ces mesures sont prises dans le cadre de l'amélioration des conditions de vie des populations de ces pays qui enregistrent des taux de croissance annuels très élevés, l'idée étant que ces améliorations concourent à soutenir et à faire durer la croissance.

    1.6 L'émergence : influence politique et diplomatique

    Un des points les plus importants lorsqu'on aborde le thème de l'émergence est l'influence politique et diplomatique que les pays émergents exercent dans le monde. En effet, l'on constate depuis de nombreuses années que l'influence économique des pays émergents leur offre la scène mondiale pour l'expression de leurs revendications politiques.

    C'est ainsi que les pays membres du groupe BRICS, conscients de leur nouvelle influence mondiale, vont oeuvrer pour une révision des relations existant entre la périphérie et le centre, de la configuration du système international. Ils veulent par exemple un élargissement du nombre de membres permanents du Conseil de Sécurité des Nations Unies, afin d'y intégrer l'Afrique (Afrique du Sud) et l'Amérique du Sud (Brésil). Ils réclament aussi des conditions démocratiques pour le choix des dirigeants des institutions financières internationales que sont la Banque Mondiale et le FMI. Jusque-là, une règle veut que le dirigeant du FMI soit un européen et celui de la Banque Mondiale un ressortissant des Etats-Unis d'Amérique. Les BRICS optent donc pour la mise en place des règles démocratiques dans le système international actuel, pour plus de justice et d'équité, pour le respect des règles du droit international en matière de pratiques hégémoniques (notamment de la part des USA et de leurs alliés européens). Les BRICS veulent casser le monopole politique occidental, et cette attitude reflète le rapport de forces changeant dans le monde.

    Alors depuis le début des années 2000, le monde émergent a gagné plus de force sur le plan diplomatique, et a beaucoup gagné en crédibilité. En témoigne l'attribution, à ces pays encore en développement, de l'organisation de plusieurs évènements sportifs d'envergure internationale. Nous pouvons citer l'organisation de la Coupe du Monde de football en 2002 à la Corée du Sud (avec le Japon), celle des Jeux Olympiques d'été à la Chine en 2008, celle de la Coupe du Monde de football en 2010 à l'Afrique du Sud, celle des Jeux Olympiques d'hiver à la Russie en 2014, celle de la Coupe du Monde de football au Brésil en 2014 et celle des Jeux Olympiques d'été de 2016 au Brésil. Une autre preuve de l'affirmation politique des pays émergents est la création du G20 par les membres du G7, nouveau groupe dont le but est « de favoriser la stabilité financière internationale et de créer des possibilités de dialogues entre les pays industrialisés et les pays émergents ». L'attribution de la présidence du G20 se fait entre pays développés et pays émergents, tout comme l'organisation des sommets (l'Inde en 2002, le Mexique en 2003, la Chine en 2005, l'Afrique du Sud en 2007, le Brésil en 2008, le Mexique en 2012, la Russie en 2013, la Turquie en 2015, la Chine en 2016). Sur le plan diplomatique, ces pays ont renforcé leur présence mondiale, notamment le Brésil qui a créé 68 postes diplomatiques depuis la présidence de Lula et envoyé des milliers de soldats (casques bleus) dans les missions onusiennes.

    Conclusion partielle

    Nous sommes arrivés à la fin de ce chapitre. Il nous a permis de mieux appréhender le concept de l'émergence. Bien qu'il soit difficile d'en donner une définition stricte, on peut dire que l'émergence est le stade d'un pays qui est à mi-chemin entre les pays sous-développés et les pays développés, qui a réduit considérablement son retard vis-à-vis de ces derniers grâce à des réformes entreprises, lui permettant de figurer à une meilleure place sur l'échiquier mondial. Ces réformes consistent notamment en une plus grande ouverture de l'économie, afin qu'elle puisse bénéficier des IDE, en des politiques de promotion des exportations couplées à une substitution des importations, des politiques de facilitation des investissements afin que ces derniers affluent tant de l'intérieur que de l'extérieur. Ces pays émergents, répartis dans plusieurs zones géographiques, ont amélioré tant les conditions économiques que les conditions sociales de leurs populations, ce qui leur permet d'être aujourd'hui, bien que n'ayant pas encore atteint le stade du développement, des valeurs sur lesquelles l'économie mondiale doit compter. Ce qui caractérise ces pays, c'est leur capacité à concurrencer sur le plan économique les pays développés. Un groupe de pays émergents en particulier a retenu notre attention, en l'occurrence les BRICS, considérés à juste titre par les économistes comme les futurs maîtres de l'économie mondiale, tant leurs prouesses économiques depuis les années 1990 ont impressionné et continuent d'impressionner.

    CHAPITRE II : Présentation de la République Démocratique du Congo

    Dans ce chapitre, nous allons procéder à la présentation de la République Démocratique du Congo. Nous allons faire le point sur la situation politique et économique ayant prévalu dans le pays depuis son accession à l'indépendance jusqu'en 2001, date à laquelle certaines réformes commencent à être mises en oeuvre dans le but de remettre le pays sur les rails, afin de mieux comprendre la particularité du contexte dans lequel le pays se lance sur la voie de l'émergence. Nous allons aussi présenter les atouts dont dispose le pays pour prétendre à l'émergence économique, ainsi que la situation économique actuelle du pays.

    2.1 Le contexte politique des années 1960-2000

    Nous n'allons pas ici raconter toute l'histoire politique du pays. Simplement, nous allons reprendre les grandes parties de l'histoire politique de notre pays.

    Le territoire qui porte aujourd'hui le nom de République Démocratique du Congo est peuplé depuis plus de 200.000 ans avant J-C. Le Roi des belges Leopold II décide d'en prendre possession dès 1879 et à la conférence de Berlin, le pays lui est attribué. Le secteur contrôlé prend alors le nom d'Etat Indépendant du Congo. Le roi lègue son territoire à la Belgique en 1908, et le territoire devient le Congo belge.

    Vers la fin des années 1950, des mouvements indépendantistes commencent à apparaître au niveau des populations congolaises colonisées comme partout en Afrique. Le pays, après une longue vague de discussions avec la métropole, finit par acquérir son indépendance politique le 30 Juin 1960. Indépendance politique car il s'avéra plus tard que l'indépendance économique, la vraie indépendance, n'avait pas été acquis, et que les congolais s'étaient lancés dans une aventure dont ils n'avaient pas réellement évalué tous les enjeux. La période d'après indépendance (à partir de 1960) est marquée par des querelles entre les principaux acteurs congolais de l'indépendance. Sécessions de certaines parties du pays qui réclament elles aussi leur indépendance, querelles de leadership entre le président de la république élu et son premier ministre qui se renvoient et se récusent mutuellement. Ces tensions finissent par donner lieu à un coup d'Etat, comme dans beaucoup de pays africains, qui plonge le pays sous le règne de la dictature. Comme dans toute bonne dictature, c'est un climat de tensions qui règne, défavorisant les investissements tant étrangers que nationaux. Il faut souligner ici la politique de nationalisation des entreprises privées et des propriétés foncières qui appartenaient à des ressortissants ou groupes financiers étrangers, prise par le régime de Mobutu, qui n'a pas favorisé le climat des investissements. La « zaïrianisation », réalisée au cours de l'année 1974 a constitué l'un des évènements des plus importants de la période. Le but était, pour le Zaïre, de se réapproprier l'essentiel du tissu économique du pays. Un échec notoire, la politique étant mal menée, les entreprises nationalisées sont offertes à des proches du président qui les utilisent comme des portefeuilles privés. Petit à petit, le clan qui entoure le président pille systématiquement les ressources du pays, tandis que le reste du pays vit dans la pauvreté.

    Dès les années 1990, le vent de la démocratie souffle sur l'Afrique. La démocratisation du régime passe par des grèves, des manifestations diverses et des marches de protestation qui agitent la capitale Kinshasa. Les pillages de 1991 et 1993 n'arrangent pas la situation du pays, jusqu'à la chute de Mobutu en 1997. Débute alors une longue période de guerre 1996-2003, le pays étant divisé entre plusieurs armées qui s'affrontent, ajoutée à cela la guerre d'invasion à laquelle le pays doit faire face.

    Nous avons donc en RDC, depuis l'accession à l'indépendance, un climat politique et sécuritaire compliqué, jonché de coups d'Etat et de tensions internes, ayant inévitablement des répercussions sur le plan socioéconomique.

    2.2 Contexte économique de la période 1960-2000

    Les tensions politiques ont eu inévitablement un impact significatif sur la santé de l'économie congolaise.

    Dès l'arrivée de Mobutu au pouvoir, ce dernier « s'engage à regagner la confiance des milieux d'affaires étrangers. En 1966, les puissantes industries minières du Kasaï et du Katanga ont été nationalisées. C'est alors l'âge d'or du Congo, maintenant indépendant : en 1967, 1 franc congolais équivaut alors à 2 dollars américains, les écoles publiques se développent et l'exode rural s'accélère ; les prix du café, du cuivre et d'autres minerais sont florissants. La réalisation des grands travaux (le barrage hydroélectrique d'Inga sur le Congo), le financement d'un programme spatial donnent l'impression que le Zaïre, à l'image de certains pays asiatiques, est un dragon africain.41(*) » Déjà dès la période 1965-1969, le pays contracte une dette d'environ 127 millions USD, pour financer ces grands travaux.

    L'économie connaît une période de relative prospérité entre 1966 et 1973, avec des taux de croissance positifs, comme en témoigne le graphique 2.1. Cependant, elle n'est encore tournée que vers l'exportation des matières premières (or, diamant, cobalt, coltan (Colombite-Tantalite), cuivre), et est donc très fragile.

    Graphique 2.1 : Evolution de la croissance économique et du PIB par habitant de la RDC, 1960-2010.

    Source : HERDERSCHEE J., MUKOKO SAMBA D., TSHIMENGA TSHIBANGU M., Résilience d'un géant africain : accélérer la croissance et promouvoir l'emploi en République Démocratique du Congo, volume I : Synthèse, contexte historique et macroéconomique. Kinshasa : MEDIASPAUL, 2012. P.12.

    A partir de 1973, avec la chute des cours du pétrole, et surtout en 1974 celle du cours du cuivre, principal produit d'exportation du pays, la situation économique dégringole. Le pays ayant subi en 1971 une crise financière après s'être largement endetté pour lancer des programmes de développement qualifiés « d'éléphants blancs », non rentables, il s'endette encore auprès d'institutions privées, les ressources minières potentielles et réelles du Zaïre servant de gage. La chute du cours du cuivre ne facilitera pas le remboursement de cette dette qui n'en finit pas de grossir. Débutent alors les mesures d'austérité avec la prise en charge de la situation financière du pays par le FMI. « Ce programme de stabilisation implique des conditionnalités strictes de dévaluation de la monnaie, de diminution des dépenses publiques et de garanties pour garantir le service de la dette. La diminution des dépenses publiques prend forme sous prétexte de bonne gestion des grandes sociétés mixtes du pays mais ce sont les populations congolaises qui en souffrent et la gabegie continue.42(*)» Les politiques de zaïrianisation et de radicalisation ne facilitant pas les choses, le taux de croissance de l'économie chute jusqu'en 1979 et ne redevient positif qu'avec la remontée des cours des matières premières (Graphique 2.1). « Avant les conflits récents, une combinaison de chocs économiques négatifs et de mauvaise gestion de l'économie ont défavorisé la croissance économique depuis l'indépendance. Un effondrement des exportations, exacerbé par une forte dépendance à deux minerais (le cuivre et le cobalt) et à deux produits agricoles (l'huile de palme et le café), ont entamé un cercle vicieux de politiques fiscales et monétaires erratiques, la perte de la valeur de la monnaie, un effondrement financier et l'hyperinflation. Ce cycle continu a conduit à une baisse des investissements privés et publics. Les chocs externes ont aussi été exacerbés par une mauvaise gestion économique. En 1991, le pays pouvait alors de facto déclarer faillite.43(*)»

    L'économie de la RDC était donc sur une pente résolument négative durant la quasi-totalité de la deuxième République, non seulement à cause de la situation politique du pays, miné par des coups d'Etat et autres tensions sécuritaires, mais aussi à cause de la mauvaise gestion des affaires publiques. Une situation plutôt paradoxale, pour un pays qui regorge d'innombrables ressources naturelles pouvant lui permettre, comme d'autres pays (Australie, Afrique du Sud), d'améliorer significativement le niveau de vie de leurs populations, si elles sont bien gérées.

    2.3 Présentation du pays et de ses atouts

    2.3.1 Présentation du pays

    La République Démocratique du Congo (RDC) est un grand pays d'Afrique centrale dont la superficie est de 2.345.000 km². La population est estimée à environ 73.171.00044(*) d'habitants en 2016, avec un taux de croissance démographique d'environ 2,5%45(*) l'an. Le pays partage ses 9.165 kilomètres de frontières avec 9 pays, à savoir la République Centrafricaine, le Soudan, l'Ouganda, le Rwanda, le Burundi, la Tanzanie, la Zambie, l'Angola et la République du Congo. C'est un pays extrêmement bien doté en ressources naturelles diverses, à la fois forestières, agricoles, minières, qui sont très prisées de par le monde au vu de leur importance pour l'industrie technologique et autres industries de pointe. Le pays dispose d'un vaste réseau hydrographique, de forêts luxuriantes (la forêt équatoriale représente la deuxième réserve d'oxygène après la forêt amazonienne) et de 80 millions d'hectares de terres arables, pouvant nourrir jusqu'à un milliard de personnes. Il est divisé en 26 provinces, et compte environ 400 ethnies.

    Carte 1 : Carte administrative de la RDC

    2.3.2 Les ressources naturelles du pays

    Les besoins en matières premières des pays développés et des BRICS, notamment pour alimenter la croissance chinoise, ont fait émerger une nouvelle génération de pays exportateurs. Ces économies sont moins diversifiées que la première vague des pays émergents, et disposent de colossales réserves de matières premières qui requièrent un effort capitalistique substantiel pour être exploitées. Il s'agit du Mozambique, l'Angola, la République Démocratique du Congo, la Mongolie, le Kazakhstan, l'Azerbaïdjan, le Qatar, les Emirats Arabes Unis et la Papouasie Nouvelle Guinée.

    L'Afrique est un continent richement doté en ressources naturelles (or, diamants, charbon, pétrole, coltan), dont une bonne partie se retrouve en RDC. Elle est la deuxième région exportatrice de pétrole. Elle possède le tiers des réserves minières mondiales et ses forêts constituent le premier bassin forestier mondial. Les pays africains pourraient profiter de l'accroissement de la demande mondiale, et la raréfaction des ressources.

    La RDC en particulier, qualifiée de scandale géologique, présente une multitude d'atouts :

    - des minerais en abondance dans le sous-sol, notamment le cuivre, le coltan, l'étain, le fer, le manganèse, l'or, le zinc, etc. évaluées à 4 trillions de dollars46(*) (voir carte minière), ainsi que la présence d'hydrocarbures;

    - des forêts luxuriantes estimées à 160 millions d'hectares (dont seulement 9% sont sous concession)47(*) soit environ 67% de la surface du pays ;

    - un large réseau hydrographique avec plusieurs lacs, rivières, fleuves qui traversent le pays (voir carte hydrographique) ;

    - un sol riche et fertile, permettant la production de produits agricoles (café, cacao, huile de palme, maïs, palmistes, etc.);

    - une population nombreuse, évaluée à plus de 70 millions d'habitants en 2015 (le dernier recensement de la population date des années 1980) ;

    - Un climat favorable à l'agriculture (voir carte climatique).

    Malgré ces atouts naturels évidents, le développement ne suit pas encore. Cependant, ces énormes potentialités attirent particulièrement les entreprises multinationales, notamment dans le secteur de l'extraction minière. Par exemple en 2010, la RDC a fourni 51% de la production mondiale de cobalt, et le quart de la production mondiale de diamants industriels48(*). Plus particulièrement, les deux provinces du Nord et Sud Kivu forment une des régions les plus riches en ressources minières, avec trois minerais dominants : l'or, la cassitérite, le coltan (voir tableau 2.1). Qui plus est, « alors qu'un peu partout dans le monde les ressources minières ont été déjà fortement entamées, sinon épuisées, dans cette région, la plupart des gisements sont encore vierges ou mal exploités 49(*)». C'est d'ailleurs la raison pour laquelle cette région est en proie à une instabilité chronique sur le plan sécuritaire, elle attise les convoitises.

    La réforme du secteur minier avec l'adoption du code minier en 2002, par l'ouverture aux privés, a permis d'attirer en RDC de plusieurs filiales de grandes multinationales. On peut citer TENKE FUNGURUME MINING, KIBALI GOLD MINING, KOLWEZI COPPER COMPANY, ASHANTI GOLDFIELD KILO, TWANGISA MINING, MUTANDA MINING. Cette présence massive a entraîné l'accroissement notable du volume de production minière de la RDC, de 2006 à 2015 (voir tableau 2.3).

    Tableau 2.1 : Les ressources minérales par province

    Provinces

    Minéraux

    Bandundu

    Diamant, pétrole, kaolin, argile.

    Bas-Congo

    Bauxite, pyroschite, calcaire, phosphate, vanadium, diamant, or, cuivre, plomb, zinc, manganèse, marbre, granite noir et rose, sel gemme, fer, argile, gypse, talc, silice, kaolin, baryte, schiste bitumineux

    Equateur

    Fer, cuivre et minéraux associés, or, diamant, calcaire, kaolin, argile, granite, niobium, ocre

    Province orientale

    Or, diamant, fer, argent, argile, cuivre, kaolin, niobium, ocre, schiste bitumineux, talc

    Kasaï oriental

    Diamant, fer, argent, nickel, étain, argile, cobalt, platine, cuivre, fer, kaolin, plomb

    Kasaï occidental

    Diamant, or, manganèse, chrome, nickel, argile, cobalt, platine, cuivre, fer, kaolin, plomb

    Katanga

    Cuivre et métaux associés, cobalt, manganèse, calcaire, uranium, charbon, niobium, or, platine, lithium, talc, tantale, wolfram, zinc, argile, bismuth, germanium, cassitérite, fer, granite, monazite, gypse, kaolin, saline, béryl (émeraude), saphir

    Nord Kivu

    Or, niobium, tantalite, cassitérite, béryl, tungstène, manganite, argile, bastnaésite, charbon, granite, monazite, platine, wolfram, zinc, tantale

    Sud Kivu

    Or, niobium, tantalite, cassitérite, saphir, amblyogonite, argent, argile, bastnaésite, béryl, bismuth, diamant, diatomite, monazite, wolfram, zinc, tantale

    Maniema

    Etain, diamant, cassitérite, or, amblyogonite, lithium, argile, cuivre, fer, kaolin, manganèse, colombium, plomb, talc, tantale, wolfram

    Kinshasa

    Argile, silice, kaolin, grès arkosique

    Source : Ministère de l'Economie nationale, Opportunités dans le secteur minier.

    Carte 2 : Les ressources minières de la RDC

    Source : La carte des minerais en RDC [en ligne]. Disponible sur : https://www.pagewebcongo.com/actions.php?a=dbo_articles&rid=45

    Cette carte présente la répartition par province des différents minerais et hydrocarbures présents en RDC50(*).

    Tableau 2.2 : Réserves géologiques pour quelques minerais

     

    Substances minérales

    Quantités (tonnes)

    1

    Cuivre

    75.000.000

    2

    Lithium

    31.000.000

    3

    Niobium

    30.000.000

    4

    Manganèse

    7.000.000

    5

    Zinc

    7.000.000

    6

    Cobalt

    4.500.000

    7

    Fer

    1.000.000

    8

    Cassitérite

    450.000

    9

    Or

    600

    10

    Diamant

    206.000.000 (carats)

    Source : Ministère de l'Economie nationale, Opportunités dans le secteur minier.

    Le tableau 2.2 présente les réserves géologiques pour certains minerais en RDC. Comme on peut le constater, le pays regorge d'énormes ressources minières, pouvant lui permettre d'amorcer son processus d'émergence, d'autant plus que la production minière a beaucoup évolué sur la dernière décennie, comme on peut le constater dans le tableau 2.3.

    Tableau 2.3 : Production minière et hydrocarbures 2008-2015

     

    2008

    2009

    2010

    2011

    2012

    2013

    2014

    2015

    Cu

    335066

    309181

    497537

    499198

    619942

    922016

    1030129

    1039007

    Cob

    42461

    56258

    97693

    99475

    86433

    76593

    74712

    83529

    D.I

    806,6

    1008,5

    912

    997,3

    569,3

    245,77

    244,04

    1505,37

    Zinc

    15465

    19636

    9223

    14758

    10572

    12114

    20617

    12602

    D.A

    20146

    16871

    16051

    17601

    19154

    16653

    14689

    14284

    O.B

    150

    220

    173,8

    414

    4529

    6112

    23937

    31791

    Cas.

    19719

    15512

    16963

    18598

    18981

    6231

    7295

    8304

    Wo.

    715

    351,8

    77

    45,2

    71

    115,3

    16,3

    106,4

    Col.

    630

    463,7

    279

    382,9

    585,5

    500

    1140,4

    2102

    Pét.

    8365264

    9382311

    8628042

    8557920

    8545450

    8351350

    8362023

    8247348

    Source : Banque Centrale du Congo, Bulletin d'informations statistiques Avril 2016.

    Les productions sont calculées en tonnes métriques (t.m.), sauf pour le diamant industriel et le diamant artisanal (carats), l'or brut (kilo), et le pétrole brut (barils).

    Remarque : Cu=Cuivre, Cob=Cobalt, DI=Diamant Industriel, D.A=Diamant artisanal, O.B=Or brut, Cas.=Cassitérite, Wo.=Wolframite, Col.=Coltan, Pét.=Pétrole.

    Graphique 2.2 : Evolution de la production de certains minerais (t.m.) 2008-2015.

    Source : Etabli sur base des données du tableau 2.3

    Ce graphique montre bien que la production de cuivre en RDC a connu une envolée sur la dernière décennie.

    Outre les productions minières, la RDC enregistre aussi des productions agricoles, pour la plupart destinées à l'exportation, comme le café (dont la production est en pleine relance), le cacao, le caoutchouc. Le tableau 2.4 présente ces productions depuis 2008.

    Tableau 2.4 : Production agricole d'exportation

     

    2008

    2009

    2010

    2011

    2012

    2013

    2014

    2015

    Café (t)

    12146

    9070

    9607

    7805

    8302

    8629

    10406

    9692

    Cacao (t)

    54,9

    56,8

    44,5

    37,8

    584,6

    379,3

    1396

    1401

    Caoutchouc (t)

    2505

    2594

    2429

    1817

    1740

    1012

    1074,8

    1346

    Huile de palme (t)

    7176

    5908

    6621

    8872

    7181

    9543

    13113

    13423

    Huile de palmistes (t)

    361

    370

    366

    418

    1249

    996

    1319

    1361

    Bois grumes (m3)

    140711

    107415

    203528

    183468

    186234

    187034

    234811

    250515

    Bois sciés (m3)

    46650

    40538

    24951

    33431

    33943

    39981

    40371

    43070

    Source : Banque Centrale du Congo, Bulletin d'informations statistiques Avril 2016.

    Carte 3: Les types de végétation en RDC

    Source : Wikipedia, Géographie de la République Démocratique du Congo [en ligne]. Disponible sur : https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Géographie_de_la_République_démocratique_du_Congo

    L'on peut voir sur cette carte que la végétation en RDC est principalement dominée par la forêt, qui recèle tant d'espèces végétales prisées et de bois pouvant servir à améliorer ou augmenter les recettes d'exportation.

    Carte 4 : La carte climatique de la RDC

    Source : Wikipedia, Géographie de la République Démocratique du Congo [en ligne]. Disponible sur : https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Géographie_de_la_République_démocratique_du_Congo

    Avec un climat équatorial dans la majeure partie du pays et des précipitations abondantes, la RDC bénéficie d'un climat favorable pour les activités agricoles et pastorales. On peut aussi voir sur cette carte le réseau hydrographique de la RDC.

    2.3.3 Evolution de la population

    Nous savons que la population joue un rôle non négligeable dans le processus d'émergence, car elle sert à la fois de main d'oeuvre et de marché pour les productions. Une forte population, pourvu qu'elle soit bien éduquée, est un atout pour les pays.

    La RDC dispose d'une population nombreuse, environ 73.171.00051(*) habitants en 2016, contre 26.360.000 habitants en 198052(*), avec environ 50,1% de la population entre 15 et 64 ans53(*).

    2.3.4 Infrastructures en République Démocratique du Congo

    La République Démocratique du Congo dispose de plusieurs infrastructures telles que les ports, aéroports, routes, chemins de fer, qui servent pour l'acheminement des biens produits des centres de production vers les lieux de consommation ou de distribution. On peut citer ici les ports de Matadi et Boma dans le Kongo Central, les aéroports de N'djili, Goma, Lubumbashi, Mbuji-Mayi, Kisangani, etc. Le réseau routier comprend plus de 150.000 km de routes.

    Nous venons de passer en revue les différents atouts dont regorge la RDC et qui pourraient, efficacement utilisés, le conduire vers l'émergence. Voyons maintenant la situation de l'économie congolaise depuis qu'elle a renoué avec une croissance positive après le long passage à vide des décennies précédentes.

    2.4 L'économie congolaise après 2000

    Nous allons nous intéresser à l'évolution de l'économie congolaise depuis le début des années 2000. Cette analyse nous permettra de dégager certains éléments fondamentaux pour l'émergence.

    2.4.1 La politique économique du gouvernement à partir de 2001

    L'année 2002 marque le retour d'une croissance positive pour l'économie congolaise, avec un taux de croissance cette année là de 3,5%. En effet, avec le retour en 2001 des Institutions Financières Internationales (FMI et Banque Mondiale) et des autres partenaires traditionnels de la RDC, l'économie congolaise a renoué avec la croissance. Les différents programmes pluriannuels qui ont été mis en oeuvre entre 2001 et 2010 ont vraisemblablement porté certains de leurs fruits, eu égard au redressement économique qui s'est opéré durant cette période.

    Le Programme Intérimaire Renforcé, lancé le 26 Mai 2001, avait pour objectif de casser l'hyperinflation, d'unifier le taux de change, de libéraliser l'économie, de créer un environnement favorable à la croissance et de poser les bases de la relance économique. Terminé le 31 Mars 2002, ce programme a bénéficié de l'appui du FMI. Comme résultats, l'hyperinflation a été éradiquée, passant de 511,2% en 2000 à 3,8% en Janvier 2002. Le taux de change a été stabilisé durant cette période, passant de 312,3 Francs congolais à 323,7 Francs congolais pour 1 USD. La gestion des dépenses publiques a été améliorée, l'année 2001 s'étant soldée par un excédent budgétaire de 1,2 milliards de FC (0,88% du PIB), tandis que l'année 2000 s'était soldée par un déficit de 10,5 milliards de FC (3,1% du PIB)54(*). L'économie a été remise sur la voie d'une stabilisation macroéconomique, le taux de croissance redevient positif. (Graphique 2.3)

    Puis vient le Programme Economique du Gouvernement I (PEG I) / Programme Multisectoriel d'Urgence de Réhabilitation et de Reconstruction (PMURR) entre 2002 et 2005, avec pour objectif de consolider la stabilité macroéconomique par l'amélioration de la gestion des finances publiques et la poursuite d'une politique monétaire visant à affermir la stabilité des prix intérieurs et du taux de change, l'amélioration du climat des affaires et la relance de la croissance en vue de réduire la pauvreté. L'objectif de croissance a été atteint, car sur la période 2001-2005 le taux de croissance du PIB s'élève à environ 4%. (Tableau 2.5)

    Graphique 2.3 : Evolution de la croissance du PIB entre 2002 et 2015 (%).

    Source : BCC, Rapport sur la politique monétaire 2014.

    Un Programme Relais de Consolidation a été mis en oeuvre en 2006 pour corriger les déséquilibres à la base de la suspension du PMURR, mais lui non plus n'atteindra pas ses objectifs. Il sera reconduit en 2007-2008 avec un suivi du FMI (Programme Suivi par les Services du FMI). Sa mise en oeuvre concluante a permis la conclusion du Programme Economique du Gouvernement II (PEG II) entre 2009 et 2012. Ce dernier avait pour objectif la consolidation de la stabilité macroéconomique, l'amélioration de la gestion des finances publiques, le renforcement de l'indépendance de la Banque Centrale et l'assainissement du climat des affaires.

    Tableau 2.5 : Evolution de la contribution au PIB des trois secteurs d'activité.

    Secteurs d'activité

     

    Périodes

     
     

    2001-2005

    2006-2010

    2011-2015

    Secteur primaire

    Secteur secondaire

    Secteur tertiaire

    35%

    29%

    36%

    39%

    14%

    47%

    42%

    15%

    39%

    Taux moyen de la période

    4%

    5,3%

    7,8%

    Source : HERDERSCHEE, J., MUKOKO SAMBA, D., TSHIMENGA TSHIBANGU, M., Op.cit.

    Depuis 2012, le gouvernement s'est engagé dans un programme dénommé « Révolution de la Modernité » avec pour finalité l'atteinte de l'émergence pour le pays d'ici 2030. Les objectifs de ce programme sont : une politique monétaire adéquate, la stabilisation du cadre macroéconomique, la relance des investissements productifs dans certains secteurs, la réduction de la pauvreté et l'amélioration des conditions de vie de la population, la redistribution des fruits de la croissance économique et la diversification de l'économie nationale. Au niveau des résultats, le cadre macroéconomique est resté relativement stable : l'inflation a été maîtrisée et maintenue à moins de 3% à partir de 2012 (Graphique 2.4), le taux de change est resté relativement stable avec environ 920 FC pour 1 USD, les taux de croissance sont élevés sur la période 2011-2015 avec un taux de croissance moyen de 7,8%. Cependant, le taux de chômage est toujours élevé, estimé à plus de la moitié de la population active. Le gouvernement a également investi dans le secteur agricole avec le programme de création des parcs agro industriels.

    En ce qui concerne la réduction de la pauvreté et l'amélioration des conditions de vie de la population, la longévité et la robustesse de la croissance économique offre quelques perspectives. Quant à la redistribution des fruits de la croissance, le gouvernement de la République soutient qu'elle s'opère progressivement, au travers du budget qui est passé de 400 millions USD en 1994 à 8,496 milliards USD en 2015. Dans ce budget, des sommes sont allouées aux secteurs de l'éducation et de la santé (en 2015 respectivement 1068,9 milliards FC et 674,7 milliards FC étaient prévus par le gouvernement). « Pour la diversification de l'économie nationale, un vaste programme socioéconomique a été mis en place par le gouvernement, visant l'amélioration des conditions de vie de la population et la diversification de l'économie, en vue de s'affranchir de la dépendance envers le secteur minier et constituer un socle de résilience et d'inclusivité. Ainsi, des investissements ont été effectués dans le secteur de l'agriculture en vue d'améliorer la production agricole, dans des projets de densification des voies de communication internes (routes, rails) en vue de relier les centres de production aux centres de consommation, dans les transports urbains, dans la construction d'infrastructures sportives, etc. qui sont aussi des canaux de diffusion de la croissance.55(*)»

    Tous ces objectifs sont contenus et chiffrés dans le Programme d'Action du Gouvernement (PAG 2012-2016).

    Graphique 2.4 : Evolution du taux d'inflation 2005-2015.

    Source : Elaboration de l'auteur sur base des données de la Banque Centrale du Congo.

    2.4.2 Les résultats des politiques économiques menées

    Sur la dernière décennie (2005-2015), le PIB de la RDC a cru en moyenne de 6,7% en moyenne, passant de 12 milliards USD en 2005 à 37,9 milliards USD en 2015. Le PIB réel est de 21,30 milliards USD en 2015, calculé sur base des prix de 2005 (voir tableau 2.6). Le tableau 2.5 montre l'évolution de la contribution des différents secteurs d'activité à cette production. On note une prédominance du secteur primaire sur la période 2011-2015 (42% du PIB réel). Cela s'explique par le dynamisme retrouvé dans l'extraction minière. En effet, l'extraction minière contribue pour 24% au PIB réel sur la période 2010-2015, l'industrie manufacturière 11% et les services 36% (Tableau 2.7). On note aussi une envolée de la valeur des exportations du pays.

    Tableau 2.6 : Evolution du PIB et du PIB/habitant en RDC entre 2005 et 2015.

     

    PIB nominal (mlds USD)

    PIB réel (mlds USD)

    PIB nom/habitant (USD)

    PIB réel/habitant (USD)

    2005

    12

    12

    221,5

    221,5

    2006

    14,5

    12,6

    260,1

    226,7

    2007

    16,7

    13,4

    292,7

    234,2

    2008

    19,7

    14,2

    335,3

    241,9

    2009

    18,7

    14,6

    309,8

    241,9

    2010

    21,6

    15,7

    346,8

    252

    2011

    25,8

    16,8

    404,2

    262

    2012

    29,3

    17,9

    446,2

    273

    2013

    32,7

    19,5

    484

    288,3

    2014

    35,9

    21,3

    514

    307,1

    2015

    37,9

    22,8

    530

    319,1

    Source : Banque Centrale du Congo, Bulletin d'informations statistiques Avril 2016.

    Tableau 2.7 : Répartition du PIB réel selon l'offre (2010-2015)

    Ressources

    2010-2015

    Agriculture, forêt, élevage, chasse et pêche

    Extraction minière

    Industries manufacturières

    Services

    18%

    24%

    11%

    36%

    Source : Elaboré sur base des données de la Banque Centrale du Congo.

    Suivant l'approche par la demande, c'est la consommation qui domine, avec une moyenne de 89% entre 2010 et 2015.

    Tableau 2.8 : Répartition du PIB réel selon la demande (2010-2015)

    Emplois

    2010-2015

    Consommation

    Investissement

    Exportations

    Importations

    89%

    25%

    25%

    40%

    Source : Elaboré sur base des données de la Banque Centrale du Congo.

    La consommation est surtout privée (86% du PIB en 2014 et 201556(*)), tout comme les investissements (75% du PIB en 2014 et 201557(*)). Les exportations des produits miniers, notamment le cuivre, le cobalt, le coltan, représentent la grande majorité des exportations des biens et services (84% en 2014 et 201558(*)). Or les prix de ces produits sont soumis à une forte volatilité et varient fortement en fonction de la demande mondiale. Les pays est actuellement dans une passe difficile, à cause notamment de la baisse des recettes d'exportation due à la baisse des cours des matières premières d'origine minérale qui sont exportées (voir tableau 2.10). La demande mondiale, en particulier la demande chinoise ayant baissé en 2015, les pays exportateurs de minerais comme la RDC se trouvent de facto touchés. Les réserves de change de la RDC s'élevaient fin 2015 à 1.403,58 millions USD, soit 5,79 semaines d'importation59(*).

    La balance des paiements de la RDC est excédentaire en 2014 (100,3 millions USD), tout comme en 2013. Cet excédent est dû surtout aux bonnes opérations réalisées dans le compte des opérations financières, notamment avec les flux d'IDE entrants en RDC.

    Tableau 2.9 : Soldes de la balance des paiements (millions USD)

    Soldes

    2013

    2014

    Balance commerciale

    Balance des services

    Balance des revenus

    Balance des transferts courants

    943,1

    -2.255

    -2.875,4

    1.265,7

    1.001,8

    -2.516,3

    -3.043,8

    1.638,4

    Compte des transactions courantes

    -2.921,6

    -2.919,8

    Compte Capital et opérations financières

    2.988,7

    3.186,5

    Erreurs et omissions

    -5,4

    -166,4

    Solde global

    61,7

    100,3

    Source : Banque Centrale du Congo, Rapport sur la politique monétaire 2014

    Tableau 2.10 : Evolution des cours moyens des matières premières d'origine minérale (USD)

    Produits

    cotations

    Moyenne 2012

    Moyenne 2013

    Moyenne 2014

    Moyenne 2015

    Cuivre

    $/tm

    7944,35

    7329,5

    6859,33

    5509,01

    Zinc

    $/tm

    1946

    1909,88

    2160,9

    1933,04

    Cobalt

    $/lb

    13,91

    12,98

    14,75

    13,51

    Diamant

    $/carat

    13,54

    14,36

    14,55

    15,02

    Coltan

    $/lb

    117,14

    115,03

    92,25

    77,98

    Or

    $/o.t

    1657,89

    1411,72

    1266,29

    1161,09

    Argent

    Cts/o.t

    3124,63

    2389,37

    1908,36

    1571,95

    Pétrole (Brent)

    $/baril

    111,61

    108,65

    99,4

    53,63

    Source : Banque Centrale du Congo, Bulletin d'informations statistiques Avril 2016.

    Ce tableau nous montre clairement la décadence des cours des produits miniers qui constituent l'essentiel des exportations du pays, notamment le cuivre dont le cours moyen passe de 7944,35 USD la tonne métrique en 2012 à 5509,01 USD en 2015. Même constat pour le coltan, dont le cours moyen sur le marché est passé de 117,14 USD la livre en 2012 à 77,98 USD en 2015.

    Conclusion partielle

    Nous sommes arrivés au terme de ce second chapitre consacré à la présentation de la RDC. Nous avons brièvement passé en revue les contextes politique et économique qui ont prévalu dans le pays depuis son indépendance jusqu'au début des années 2000, lorsqu'il a commencé à sortir la tête de l'eau pour aujourd'hui avoir l'émergence économique comme objectif. Des nos analyses, il ressort que le pays s'est remis sur la bonne voie à partir du début des années 2000, ce qui lui permet des présenter un cadre macroéconomique relativement stable, des exportations et des flux IDE entrants en hausse, avec la recrudescence de filiales d'entreprises multinationales.

    Cependant, la dépendance envers le secteur minier réduit considérablement les perspectives d'émergence, le pays étant actuellement dans une situation difficile due à la baisse des cours des matières premières. Cette crise tend à bousculer l'équilibre macroéconomique, notamment avec la flambée des prix sur le marché.

    Chapitre III : éléments fondamentaux, obstacles et analyse des perspectives pour l'émergence de la République Démocratique du Congo

    Dans ce chapitre, nous allons présenter les éléments qui, au regard des recherches effectuées sur l'émergence économique, peuvent servir de base pour l'émergence de la RDC. Nous allons aussi procéder à l'analyse des obstacles qui se posent encore nombreux sur la route de l'émergence du pays. Enfin, nous allons, par une analyse comparative avec les BRICS qui sont des pays émergents et les BENIVM considérés comme les futurs émergents, analyser les perspectives pour un Congo émergent.

    3.1 Les éléments fondamentaux pour l'émergence de la RDC

    Au regard de ce qui précède et des expériences déjà réalisées par des pays émergents comme les BRICS, la Malaisie, nous pouvons déterminer les éléments qui, après analyse de la situation du pays depuis l'indépendance, peuvent être des éléments fondamentaux de l'émergence de la RDC.

    3.1.1 La stabilité macroéconomique

    La RDC présente, depuis le début des années 2000, un cadre macroéconomique amélioré. En effet, les réformes engagées avec l'appui des institutions de Bretton Woods ont permis un retour à la stabilité macroéconomique. Comme gage de cette amélioration, nous pouvons citer l'évolution du produit intérieur brut mesurée par le taux de croissance, une relative stabilité du taux de change, la maîtrise de l'inflation et une plus grande rigueur dans la gestion budgétaire.

    3.1.1.1 L'augmentation de la production intérieure brute

    L'augmentation du PIB est mesurée par le taux de croissance. La RDC enregistre depuis 2002 des taux de croissance élevés, avec une moyenne de 6,9% sur la période 2002-2015 (voir graphique 2.3). Ce relatif dynamisme de l'économie nationale sur une période aussi longue, est une caractéristique que partagent les pays émergents. Une croissance économique rapide et soutenue depuis le début des années 1980, leur a permis d'émerger et de prendre position sur l'échiquier mondial. Le dynamisme de l'économie congolaise depuis 2002, porté principalement par les exportations des produits miniers et la hausse constante de la demande intérieure, s'est révélé être un des éléments ayant favorisé l'attrait des investisseurs pour le pays, comme nous le verrons plus tard.

    En effet, l'augmentation de la production du pays, l'augmentation du niveau des exportations, la hausse de la consommation interne, ont pu jouer sur le moral des investisseurs qui ont flairé là une occasion de faire des affaires, eu égard à l'embellie de la situation économique naissante. De plus, le tableau 2.7 montre une évolution positive du niveau du PIB par habitant, passant de 221,5 USD en 2005 à 530 USD. Cette augmentation pourrait aussi être un élément explicatif de la hausse de la consommation engendrant la hausse de la production. Quand on sait que seuls les pays qui présentent une situation économique encourageante bénéficient de l'afflux des capitaux nationaux et étrangers, une telle augmentation de la production sur une aussi longue période, constitue un atout, une base sur laquelle peuvent venir se greffer les capitaux pour amorcer le processus de l'émergence.

    3.1.1.2 Amélioration et stabilisation du taux de change et de l'inflation

    Entre 2005 et 2015, le cours du dollar sur le marché congolais est passé de 458,55 FC le dollar fin 2005, à 950 FC en Décembre 2015. Depuis Décembre 2010, le cours est resté relativement stable, variant entre 900 FC (cours le plus bas) et 950 FC (cours le plus haut). Cette stabilité du taux de change a aussi un impact sur le taux d'inflation, qui est tombé sous la barre des 3% depuis 2012 (voir graphique 2.4).

    3.1.1.3 Meilleure gestion des finances publiques

    Les programmes mis en place par les gouvernements de la RDC depuis 2001 ont mis l'accent sur l'amélioration de la gestion des finances publiques (PEG I, PRC, PEG II). Le budget du pays est ainsi passé de 300 millions USD au début de la décennie, à 8.476 milliards USD. Le gouvernement propose des budgets équilibrés en recettes et en dépenses, qu'il peut repartir entre les 6 axes de son programme d'action (Voir tableau 3.5). Ce programme d'action du gouvernement a pu être mis en oeuvre jusque-là grâce à une gestion rigoureuse des finances publiques, les dépenses liées à l'amélioration du capital humain étant priorisées (voir tableau 3.7).

    Avec l'amélioration des agrégats macroéconomiques, l'économie congolaise a gagné en dynamisme et en confiance. Les taux de croissance élevés et en constante évolution, des taux de change et d'inflation stables, des finances publiques équilibrées, ont concouru à dynamiser l'activité économique congolaise, suite aux réformes engagées à partir de 2001. L'amélioration du cadre macroéconomique est donc un des éléments de base pour l'émergence en RDC.

    3.1.2 L'augmentation du niveau des exportations

    Dans la première partie, nous avons vu que les pays qui souhaitaient émerger ont mis en place le diptyque exportations-investissements, comme les dragons, la Chine ou les tigres l'ont fait, en appliquant le modèle de développement d'Akamatsu. Les pays émergents sont alors ceux qui ont une grande capacité d'exportation de leurs produits, ce qui leur permet de s'insérer dans le commerce mondial (voir tableau 1.4).

    En ce qui concerne la RDC, le niveau des exportations en valeur n'a cessé de croître plus de 10% par an depuis 2005 (tableau 3.1).

    Tableau 3.1 : Evolution des exportations et des importations de la RDC en millions USD (2005-2015)

    Années

    Exportations

    Importations

    2005

    2.442

    2.818

    2006

    2.765

    3.620

    2007

    6.540

    7.641

    2008

    7.722

    8.854

    2009

    5.000

    6.738

    2010

    8.927

    9.940

    2011

    10.817

    11.840

    2012

    9.336

    10.840

    2013

    10.165

    12.545

    2014

    11.924

    14.319

    2015

    10.392

    12.324

    Sources : Elaboré sur base des données de la CNUCED.

    Comme nous pouvons le constater, les exportations de la RDC sont en nette évolution depuis le début des années 2000, comme celles des BRICS, mais pas dans les mêmes proportions. L'augmentation du niveau des exportations du pays apparaît donc comme un préalable indispensable pour l'émergence. Dans le cas de la RDC, cette évolution est de bon augure pour l'émergence de l'économie. Il importe donc de le mentionner comme un élément de base pour l'émergence du pays, bien que la structure de ces exportations soit essentiellement dominée par des produits à faible valeur ajoutée. Néanmoins, la RDC peut s'appuyer sur sa forte capacité d'exportation, utiliser les devises gagnées pour améliorer le niveau des investissements en infrastructures et ainsi renforcer sa marche vers l'émergence.

    3.1.3 La recrudescence des investissements grâce aux diverses réformes visant l'amélioration du cadre des affaires et l'incitation à l'investissement

    Les investissements constituent la deuxième composante du diptyque exportations-investissements. Nous avons vu que les pays émergents ont mis en place des réformes visant à faciliter l'arrivée de capitaux étrangers, et améliorer le niveau des investissements productifs. Ainsi, ils ont libéralisé plusieurs secteurs et ouvert leur économie au monde, en améliorant le climat des affaires.

    En RDC, plusieurs réformes ont été menées pour favoriser les investissements nationaux et étrangers, élément de base de l'émergence. Les révisions du code des investissements et du code minier, dès l'année 2002, en sont deux exemples. En effet, le nouveau code des investissements (loi n°004/2002 du 21 Février 2002 portant code des investissements) permet aux projets d'investissements directs, nationaux et étrangers, réalisés en RDC dans les secteurs non expressément réservés à l'Etat ou non exclus par la liste négative, de bénéficier d'un certain nombre d'avantages douaniers (exonération totale des droits et taxes à l'importation pour les machines, l'outillage et le matériel neufs), fiscaux et parafiscaux (exonération de la contribution professionnelle sur les revenus), ainsi que de certaines garanties générales (Article 1 du Code). Dans le même esprit de facilitation des investissements, l'article 225 du code minier stipule que tous les investisseurs du secteur minier doivent faire approuver par les ministres des mines et des finances, avant de commencer leurs travaux, la liste comprenant le nombre et la valeur des biens mobiliers, d'équipements, véhicules, de substances minérales et autres qui rentrent dans le champ d'application du régime douanier et fiscal privilégié prévu.

    La philosophie du nouveau code des investissements repose sur une politique incitative à l'investissement. Ainsi, dès 2003, l'Agence Nationale pour la Promotion des Investissements (ANAPI) a agréé 74 investissements étrangers, pour un coût d'investissement total de 2.126.857.076 USD et 8.993 emplois créés60(*). Le tableau 3.2 présente la ventilation par secteur des investissements agréés par l'ANAPI entre 2010 et 2014. On note 658 projets d'investissements, plus de 100 projets par an, dans les secteurs des services, de l'industrie, de l'agriculture et foresterie, et des infrastructures.

    Le tableau 3.3 présente le volume des investissements réalisés en RDC (code des investissements et code minier). Il ressort que le secteur minier reçoit les investissements les plus lourds en capital, le pays étant richement doté en ressources minières. Les investissements miniers sont réalisés en RDC à plus de 80%61(*) par les filiales ou succursales des entreprises étrangères. Il s'agit donc d'Investissements Directs Etrangers.

    Tableau 3.2 : Ventilation par secteur des projets d'investissement agréés par l'ANAPI et valeur des biens importés approuvés par la commission interministérielle des mines de 2010 à 2014 en USD.

     

    Services

    Industries

    Agriculture et foresterie

    Infrastructures

    2010

    52 projets

    527.661.064

    53 projets

    932.720.736

    14 projets

    323.160.114

    2 projets

    23.320.012

    2011

    84 projets

    2.050.647.162

    54 projets

    765.634.935

    12 projets

    58.844.765

    5 projets

    99.285.316

    2012

    72 projets

    2.641.194.227

    59 projets

    1.247.601.016

    9 projets

    53.770.894

    2 projets

    37.983.892

    2013

    51 projets

    1.888.176.427

    53 projets

    600.080.447

    5 projets

    23.840.358

    4 projets

    53.392.516

    2014

    61 projets

    2.480.334.902

    61 projets

    921.568.581

    3 projets

    5.433.030

    2 projets

    180.097.302

    Source : ANAPI, https://www.investindrc.cd/fr/generalites-sur-la-rdc/environnement-economique-des-investissements/volume-des-investissements-directs-etrangers

    Tableau 3.3 : Estimations du volume des investissements réalisés en RDC de 2010 à 2014 (USD)

     

    Projets

     
     

    Années

    Code des investissements

    Code minier

    Total

    2010

    1.806.861.926

    3.848.505.917

    6.655.367.843

    2011

    2.974.412.178

    2.881.553.208

    5.855.965.386

    2012

    3.980.550.029

    9.415.896.365

    13.396.446.394

    2013

    2.565.489.748

    5.413.163.493

    7.978.653.241

    2014

    3.587.433.815

    3.658.174.334

    7.245.608.149

    Source : ANAPI, https://www.investindrc.cd/fr/generalites-sur-la-rdc/environnement-economique-des-investissements/volume-des-investissements-directs-etrangers

    Les investissements réalisés en RDC (agréés par l'ANAPI) représentent entre 2010 et 2014 plus de 20% du PIB chaque année.

    Tableau 3.4 : Flux d'IDE entrants en RDC et part mondiale entre 2005 et 2014(millions USD)

    Années

    Flux d'IDE RDC

    Flux d'IDE monde

    Part de la RDC dans les flux mondiaux (%)

    2005

    266,6

    927.402,3

    0,03

    2006

    256,1189

    1.393.034

    0,02

    2007

    1.808,033

    1.871.702

    0,1

    2008

    1.726,843

    1.489.732

    0,12

    2009

    864,0072

    1.186.513

    0,07

    2010

    2.939,27

    1.328.215

    0,22

    2011

    1.686,9

    1.564.935

    0,11

    2012

    3.312,143

    1.403.115

    0,24

    2013

    2.098,249

    1.467.149

    0,14

    2014

    2.063,173

    1.228.283

    0,17

    Source : Elaboré sur base des données de la CNUCED, UNCTAD Stats.

    On constate que les flux d'IDE entrants en RDC ont considérablement cru entre 2005 et 2014, passant de 266,6 millions en 2005 à 2.063,173 en 2014, avec un pic de 3.312,143 milliards USD en 2012.

    L'on peut alors affirmer que la révision du code des investissements a considérablement joué sur l'évolution du volume des investissements en RDC.

    Toujours dans le cadre de la facilitation des investissements et l'amélioration du climat des affaires, le gouvernement de la RDC a procédé à la création d'un Guichet Unique pour la Création d'Entreprises (GUCE). Le résultat est probant : en trois ans, de Mai 2013 à Avril 2016, 21.154 entreprises créées62(*), personnes morales et physiques. Avec ce guichet, la création d'une entreprise en RDC se fait en trois procédures, à un seul endroit, en trois jours au maximum (la moyenne dans le monde en 2015 est de 20 jours63(*)) et moyennant 120 USD. C'est donc un gain de temps et d'argent considérable pour les entrepreneurs. Dans le même ordre d'idées, il a été créé en RDC, un Guichet Unique Intégral pour le Commerce Extérieur, avec pour but de faciliter et simplifier les opérations du commerce extérieur. La finalité est la transparence dans les opérations (pré-dédouanement, dédouanement et post-dédouanement).

    Le renforcement des capacités du Fonds de Promotion de l'Industrie (FPI), organe chargé d'identifier et de financer les projets d'investissements porteurs de croissance dans le secteur industriel, notamment les industries manufacturières, est aussi une action destinée à améliorer le niveau des investissements, par le soutien aux industries existantes, la promotion des industries nouvelles, la promotion des petites et moyennes entreprises.

    Une autre réforme, est celle de la libéralisation des certains secteurs, notamment l'énergie et les assurances. Jusque-là, ces deux secteurs étaient monopolisés par des entreprises publiques dont les performances laissent à désirer, particulièrement dans le domaine de l'énergie. La libéralisation de ce secteur, effective depuis fin 2015, permettra l'arrivée de nouveaux investisseurs sur le marché congolais, qui se caractérise par sa grande taille. L'énergie étant un secteur indispensable pour l'atteinte de l'émergence, il est important de privatiser le secteur afin que les meilleures firmes viennent investir et améliorer la desserte en énergie dans le pays. Pour le secteur des assurances, la libéralisation devrait permettre la montée des IDE dans le secteur financier et la diversification du secteur productif, avec notamment le développement de la « banque assurance », car certaines banques commerciales pourraient être tentées d'intégrer les assurances dans leur portefeuille d'activités. Le développement même de la banque assurance en RDC permettra aussi de rassurer les investisseurs sur le fait qu'ils pourront compter sur un système financier fiable en investissant dans le pays. En effet, pour les potentiels investisseurs, la présence d'entreprises d'assurances dans le pays peut être un élément important dans la décision d'investissement, ces dernières pouvant assurer certains de leurs risques.

    Ces différentes réformes mises en oeuvre participent à l'amélioration du climat des affaires, à la facilitation des investissements. Signalons que la RDC a gagné quelques places dans le dernier classement du « Doing Business » de la Banque Mondiale, étude qui évalue la qualité et l'évolution du climat des affaires à travers 189 économies, via une multitude de critères allant de la facilité de création d'une entreprise à la protection des droits de propriété, la pression fiscale ou encore l'accès à l'électricité. Le pays se place 184ème sur 189 pays, avec 38,14 points64(*). Il s'agit donc là de bases sur lesquelles peut s'appuyer l'émergence de la RDC. Le relatif succès de toutes ces réformes est dû à des transformations effectuées en amont. En effet, comme dans les pays émergents, les avancées économiques en RDC font suite à un ensemble de transformations au niveau institutionnel.

    3.1.4 La gouvernance politique, la qualité des ressources humaines, la poursuite de l'autosuffisance alimentaire et le développement des infrastructures

    Dans son ouvrage « Les trois leviers de l'émergence économique en Afrique », KINZOUNZA identifie le système de gouvernance politique, la qualité des ressources humaines, l'autosuffisance alimentaire et la qualité des infrastructures comme fondamentaux de l'émergence.

    3.1.4.1 La gouvernance politique

    « La gouvernance politique désigne la capacité institutionnelle qui consiste à élaborer, mettre en oeuvre et assurer le suivi des politiques publiques destinées à corriger les dysfonctionnements de la société et de l'environnement.65(*)»

    En RDC, l'on constate que la mise en oeuvre des politiques publiques dans plusieurs domaines est effective, avec la mise sur pied du programme d'action du gouvernement (2012-2016). Ces politiques menées dans les domaines prioritaires que sont l'autosuffisance alimentaire, l'éducation et la santé, l'énergie, les infrastructures et les voies de communication, et la réduction de la pauvreté, connaissent des avancées. Le tableau 3.5 présente l'exécution budgétaire par axe du PAG à fin Juin 2015. On constate que les budgets prévus pour ces différentes actions au premier semestre 2015, sont effectivement exécutés. Des actions concrètes sont réalisées : pour le premier axe, la poursuite de la réforme de l'administration publique est effective, avec par exemple l'organisation des concours de l'Ecole Normale d'Administration (ENA) qui recrute chaque année une centaine de jeunes diplômés pour dynamiser l'administration. Ou encore la poursuite du processus de décentralisation avec l'organisation des nouvelles provinces. Pour l'axe 4, la réhabilitation de plusieurs écoles et hôpitaux.

    Tableau 3.5 : Evolution par axe du PAG à Juin 2015 (mlds de FC)

     

    Axes

    Prévisions 6 mois

    Exécution

    Taux d'exécution

    1

    Poursuivre et finaliser les réformes institutionnelles en vue de renforcer l'efficacité de l'Etat

    1 172 191 992 986

    668 315 236 360

    57,0

    2

    Consolider la stabilité macroéconomique et accélérer la croissance et la création d'emplois

    986 044 608 361

    750 987 290 875

    76,2

    3

    Poursuivre la construction et la modernisation des infrastructures de base

    326 994 326 277

    107 610 784 885

    32,9

    4

    Améliorer le cadre de vie et les conditions sociales de la population

    1 253 890 887 428

    637 090 045 054

    50,8

    5

    Renforcer le capital humain et l'éducation à la citoyenneté

    22 975 825 924

    22 676 349 344

    98,7

    6

    Renforcer la diplomatie et la coopération au développement

    31 011 840 738

    18 097 459 997

    58,4

     

    Total

    3 793 109 481 714

    2 204 777 166 515

    58,1

    Source : Rapport d'exécution de la loi des finances à fin Juin 2015, Ministère du Budget.

    On peut donc dire que la gouvernance politique est effective en RDC, car nous voyons que certaines politiques publiques élaborées sont mises en oeuvre, et leur exécution fait l'objet d'un suivi, d'où la publication des rapports d'exécution, des édits de suivi budgétaire, etc.

    3.1.4.2 La qualité des ressources humaines

    Comme nous l'avons vu dans la première partie de notre étude, les pays émergents ont mis sur pied des réformes visant à améliorer la qualité de leur capital humain, par des actions destinées à favoriser une éducation de qualité et une bonne santé à leurs populations. La mise en oeuvre de ces actions a servi de base à leur processus d'émergence, car une population bien éduquée, instruite et en bonne santé, fourni un soutien intellectuel et manuel aux réformes entreprises. C'est en mettant en place la politique de l'éducation obligatoire et en accélérant le rythme de l'enseignement supérieur, que « la Chine donc est passée de pays fort d'humains, à pays fort de ressources humaines.66(*)».

    En RDC, l'éducation et la santé ciblées comme secteurs prioritaires, ont bénéficié et continuent de bénéficier de moyens pour améliorer le cadre de vie et les conditions sociales de la population (axe 4 du PAG), et renforcer le capital humain (axe 5 du PAG), à travers la réhabilitation d'écoles et d'hôpitaux dans le pays (1000 écoles réhabilitées fin 2015), et des actions pour améliorer l'adéquation entre la formation et le marché de l'emploi (création de l'Institut National pour la Préparation Professionnelle). La part de l'éducation dans le budget est passée de 1% en 1990 à 16% aujourd'hui67(*). L'objectif de l'amélioration de la qualité des ressources humaines est donc une priorité du gouvernement, et la mise en oeuvre progressive d'actions concrètes allant dans ce sens est une bonne base pour un pays qui se met sur la voie de l'émergence, car nous pourrions passer comme la Chine d'un pays fort d'humains à un pays fort de ressources humaines, élément indispensable pour l'émergence.

    En outre, toujours dans le cadre de l'amélioration de la qualité des ressources humaines, l'administration publique, en tant qu'organe chargé de mettre en place le cadre institutionnel et légal favorable à la création, à la croissance et la protection des entreprises, se doit d'être bien organisée. Dans les pays émergents d'Asie, un accent particulier a été mis sur la formation des agents des services publics, ceci pour leur assurer des compétences spécifiques, car l'administration publique joue un rôle crucial dans le développement économique d'un pays. En RDC, une réforme est mise en oeuvre pour moderniser, redynamiser et vivifier l'administration publique qui est vieillissante et inefficace. Le but est de la doter de nouveaux agents plus jeunes et plus compétents. Pour ce faire, il a été créé en 2013 l'Ecole Nationale d'Administration (ENA) pour la formation des cadres et agents de l'Etat. L'ENA reçoit chaque année, sur base d'un concours, des jeunes congolais, avec pour objectif de les former pour en faire des fonctionnaires rompus aux questions administratives, de management public, de conception, mise en oeuvre et suivi des politiques publiques dans les territoires, et à la maîtrise des grands enjeux contemporains68(*).

    La mise en oeuvre de cette réforme en faveur de l'administration publique en RDC est donc de bon augure pour l'amélioration de l'efficacité dans les services publics. Sachant que l'efficacité de l'administration publique est un élément fondamental de l'émergence (cas de Singapour, la Malaisie), l'amélioration de la productivité de l'administration publique congolaise, si la réforme est bien suivie, est un élément qui vaut son pesant d'or dans le processus d'émergence en RDC.

    3.1.4.3 Des actions visant l'atteinte de l'autosuffisance alimentaire

    L'atteinte de l'autosuffisance alimentaire permet à un pays de réduire les importations des produits alimentaires. La RDC, avec son énorme potentiel agricole, devrait être capable d'atteindre l'autosuffisance alimentaire. Cet objectif est contenu dans le programme d'action du gouvernement à son axe 2, où il est prévu dans le budget chaque année des moyens pour la croissance du secteur de l'agriculture et de l'élevage (112,1 milliards de FC en 2015), ainsi que celle du secteur de la chasse et de la pêche (5,3 milliards de FC en 2015)69(*). Le développement de parcs agricoles est aussi prévu. L'objectif de l'autosuffisance alimentaire est aussi soutenu par le lancement de la campagne de création de 22 parcs agroindustriels à travers le pays, dont le premier dans la région de Bukanga Lonzo, a déjà commencé la production de maïs, commercialisée dans la ville de Kinshasa à un prix compétitif.

    Une autre action menée dans le cadre de l'atteinte de l'autosuffisance alimentaire est la relance des activités du Domaine Agroindustriel Présidentiel de la N'sele (DAIPN), qui offre divers produits alimentaires sur les marchés de Kinshasa à des prix compétitifs, bien que la production soit encore trop insuffisante pour combler les besoins du marché.

    Comme on le voit, à travers le financement chaque année plus important des actions concrètes visant à améliorer l'accès des populations à une bonne alimentation, le gouvernement de la RDC montre qu'il vise l'autosuffisance alimentaire, élément indispensable pour se mettre sur la voie de l'émergence.

    3.1.4.4 La qualité des infrastructures

    La stratégie pour le développement des infrastructures en RDC est contenue dans le programme d'action du gouvernement, précisément en son axe 3. La poursuite de la construction et la modernisation des infrastructures de base, lancées dès 2007 avec le programme des 5 chantiers, reçoit une attention particulière de la part du gouvernement. En effet, la construction et la réhabilitation des routes, des voiries, des ports, des aéroports, chemins de fer, voies maritimes et fluviales, sont mises en oeuvre dans le but d'améliorer la dotation du pays en infrastructures, nécessité absolue pour l'émergence économique du pays. Les résultats dans le domaine sont les plus visibles, l'extension du réseau routier étant considéré par la rue comme la « seule vraie réalisation des dirigeants actuels ». Nous pouvons citer : la relance des lignes de chemin de fer, la construction d'aéroports dans les provinces, la construction de l'aérogare modulaire à Kinshasa, l'extension des routes nationales, etc.

    Pour clore cette première partie, remarquons qu'en RDC, une multitude de réformes (stabilisation macroéconomique, promotion du pays pour inciter les investissements, facilitation de la création d'entreprises, promotion de l'industrie congolaise, modernisation de l'administration publique, amélioration des infrastructures de base, etc.) ont été élaborées et sont mises en oeuvre dans le but d'atteindre à terme l'émergence tant souhaitée. Les actions concrètes visant à améliorer la qualité des ressources humaines nécessaires pour soutenir l'émergence, à atteindre l'autosuffisance alimentaire et à améliorer la dotation du pays en infrastructures de base sont en cours de réalisation, et constituent, comme pour les pays qui ont amorcé le processus d'émergence il y a des années, des bases solides sur lesquelles l'émergence peut s'appuyer et offrent de bonnes perspectives pour l'avenir. Ce qui nous prouve que la gouvernance politique est de mise, car toutes ces réformes engagées depuis 2001 ont donné lieu à certains résultats, bien qu'encore trop insuffisants eu égard à la grandeur du territoire et de la population, notamment en termes d'amélioration de certains agrégats macroéconomiques (PIB, taux de croissance, taux de change, taux d'inflation), d'amélioration du volume des investissements et des exportations.

    Cependant, le pays est pauvre, la majorité de la population subit les affres du chômage et vit encore en dessous du seuil de pauvreté. Cette réalité démontre qu'il existe de nombreux défis que doit encore relever le pays dans sa marche vers l'émergence, bien que les réalisations déjà opérées laissent entrevoir des perspectives relativement bonnes pour l'avenir. Dans la seconde partie de ce chapitre, nous allons déceler les obstacles qui se dressent sur la route de l'émergence de la RDC et proposer pistes de solutions pour les surmonter.

    3.2 Quels défis pour l'émergence de la RDC ?

    Ici nous allons faire ressortir les obstacles qui se posent nombreux sur la route de l'émergence de la RDC et les défis qu'ils imposent de relever, et proposer quelques moyens pour les surmonter. Nous allons les scinder en trois catégories, à savoir les obstacles sur le plan économique, les obstacles sur le plan politique et institutionnel, les obstacles sur les plans social et environnemental. Cette scission tient au fait que l'émergence étant un phénomène multidimensionnel, elle exige de dépasser plusieurs blocages qui sont aussi d'origines diverses. Néanmoins, ils restent tous imbriqués les uns aux autres.

    3.2.1 Les obstacles d'ordre économique

    Au cours de notre recherche, nous avons ciblé plusieurs obstacles d'ordre économique à surmonter pour l'atteinte de l'émergence.

    3.2.1.1 La faible diversification de l'économie congolaise

    L'un des défis que le pays doit relever est son addiction au secteur minier. En effet, l'économie congolaise, depuis la période coloniale, est essentiellement orientée vers l'extraction des minerais dont regorge le sous-sol congolais. En effet, pour les colons, le pays ne devait servir que de fournisseur de ressources minières pour les économies occidentales. Encore aujourd'hui, les ressources minières constituent la majeure partie des produits exportés par le pays (plus de 80% des exportations). Le défi est de taille, d'abord parce que la plupart des structures de production du pays ne sont pas adaptées à d'autres activités que celles de l'extraction minière, et surtout parce que la trop forte dotation du pays en ressources minières prisées partout dans le monde laisse comme une impression de richesse déjà acquise. En effet, on a l'impression qu'en RDC le fait d'avoir un sous-sol richement doté de ressources minières est une fin en soi, que l'exploitation de cette dotation naturelle exceptionnelle et l'exportation de ces produits devraient suffire pour résoudre tous les problèmes de développement du pays. Ce qui explique sûrement la faiblesse des structures de production manufacturières dans le pays, depuis son indépendance.

    En outre, le fait de baser son économie sur la production des biens qui ne sont pas consommés à l'intérieur du pays, l'expose aux variations de la situation économique mondiale, qui n'est pas toujours rose par les temps qui courent. Si la situation est mauvaise, la demande des pays qui importent ces produits diminue, entraînant la baisse des prix. L'addiction aux ressources minières, dont les prix subissent régulièrement des fluctuations, est donc une stratégie de développement suicidaire pour tout pays, car personne ne peut prédire les chutes de prix, et la capacité de résilience dans ce cas n'est pas garantie. Il importe donc de développer d'autres industries que celles de l'extraction minière, faible en valeur ajoutée et dont les bénéfices dépendent en grande partie de la conjoncture économique mondiale. Une transformation structurelle s'impose, afin de transférer les ressources du secteur minier à faible valeur ajoutée vers le secteur industriel manufacturier plus productif. Nous proposons donc le développement des industries manufacturières telles que l'industrie du textile, fortes en main d'oeuvre, afin de réaliser dans le pays des productions à même de combler la demande intérieure. Il faut développer les industries dont les produits seront plus facilement consommés à l'intérieur du pays, et ne pas attendre toujours des revenus de l'extérieur. C'est ce qu'on fait les pays comme la Chine, le Japon, Singapour, à l'aube de leur processus d'émergence, avec l'application du modèle de développement dit « en vol d'oies sauvages ».

    3.2.1.2 Le faible positionnement de la RDC dans l'économie mondiale

    Le deuxième obstacle à l'émergence, directement lié au précédent, est la faible insertion de l'économie congolaise dans l'économie mondiale. En effet, suite aux effets pervers de l'exportation de minerais sans valeur ajoutée, il est compliqué pour la RDC de se trouver dans le coeur de la création mondiale de richesses. La production et l'exportation de quelques produits sans valeur ajoutée n'est pas une stratégie pour s'insérer dans le flux des échanges internationaux, insertion indispensable pour tout pays qui se veut émergent. Nous avons vu dans la première partie que la Chine par exemple, en 2001 pesait déjà pour 4,1% dans le PIB mondial, et en 2015 elle contribue dans la création mondiale de richesses à hauteur de 15%. Cela grâce à une insertion progressive dans le flux des échanges commerciaux entre les pays, consécutive à la diversification de la production du pays (fer et acier, jouets, automobiles, chaussures, produits laitiers, etc.).

    Le défi est donc l'amélioration de la position de la RDC dans la production de richesses dans le monde, et dans les échanges internationaux. Une étude que nous avons effectuée précédemment nous permet d'affirmer que le commerce extérieur de la RDC ne représente même pas 1% des échanges mondiaux de biens et services, alors que la Chine représente 12,3% des exportations mondiales. Le PIB de la RDC en 2015 (37,92 milliards USD) ne représente que 0,05% du PIB mondial évalué à 73.434 milliards USD en 2015, contrairement aux pays émergents comme la Chine et ses 15% du PIB mondial, le Brésil 2,4%, l'Inde 2,8%.

    En ce qui concerne les flux d'investissements directs étrangers entrants, la RDC n'a reçu environ que 0,2% en moyenne du total mondial depuis 2005 (tableau 3.5). En comparaison, la Chine reçoit plus de 9%, le Brésil plus de 4%. Cette faible part dans les flux d'IDE entrants est clairement un obstacle à l'émergence, car les pays pauvres ont grandement besoin des capitaux venant des autres parties du monde, notamment des pays émergents qui ont une forte capacité d'investissement. Le pays se doit d'améliorer encore son attractivité et sa compétitivité internationale.

    Nous proposons donc que le gouvernement prenne des décisions en matière de politique d'investissement propices à améliorer la position de la RDC dans les chaînes de valeur mondiales. « Les chaînes de valeur mondiales contribuent à la diffusion géographique de la création de la valeur ajoutée et de l'emploi, plutôt que de concentrer ceux-ci là où seulement peut être assurée la réalisation des tâches les plus complexes. Elles peuvent ainsi accélérer le rattrapage (niveaux PIB et de revenu) des pays en développement et favoriser une plus grande convergence économique entre les pays.70(*)». L'insertion du pays dans les chaînes de valeur mondiales permettrait non seulement d'améliorer la contribution de l'économie congolaise à la production mondiale de richesses, mais aussi de créer de l'emploi. En effet, « les chaînes de valeur mondiales sont plus fréquentes dans certains secteurs où les activités peuvent être plus facilement fragmentées - par exemple les biens électroniques, construction automobile, confection - et elles portent aussi sur des activités concernant les services (46% de la valeur ajoutée dans les exportations mondiales viennent d'activités du secteur des services du fait que des services sont nécessaires à la plupart des exportations manufacturières).71(*)»

    Ces chaînes de valeur étant en majorité coordonnées par les entreprises multinationales (80%72(*) du commerce mondial), qui basent leur décision d'investir sur des facteurs géostratégiques dépendant de l'activité considérée au sein de la chaîne de valeur, la RDC se placerait en bonne position pour attirer des activités de fabrication et d'assemblage de composantes électroniques, grâce à sa dotation naturelle en ressources naturelles nécessaires à leur fabrication, et sa forte population jeune sans emploi. La position géographique du pays est aussi un atout pour la décision des investisseurs. Le gouvernement devrait donc évaluer les avantages et les inconvénients d'une telle insertion qui pourrait être créatrice de plus de richesses et aider à l'atteinte de l'objectif d'émergence, et mettre en place un cadre directeur pour les chaînes de valeur mondiales et le développement tel que prôné par la CNUCED dans son rapport sur l'investissement dans le monde en 2013.

    Un des grands défis pour l'émergence est alors le positionnement de la RDC dans l'économie mondiale par une meilleure insertion du pays dans la chaîne de valeurs mondiales. Ceci suppose d'abord une véritable intégration régionale afin de créer une chaîne de valeur régionale avec les autres pays de la région, comme cela est le cas avec la Chine et les autres pays de l'Asie du Sud-est. D'où la nécessité de l'amélioration du climat politique et la sécurité dans la sous-région.

    3.2.1.3 La faible industrialisation de l'économie congolaise

    Cet obstacle est aussi lié aux deux précédents, car la faible industrialisation de l'économie est à la base de la faible insertion du pays dans l'économie mondiale. En effet, on constate qu'en RDC la tendance est plus aux investissements d'import-export de produits, qu'au développement du tissu industriel. Une situation qui peut s'expliquer par le coût élevé pour l'installation et le développement d'industries, comparé au coût dans le secteur du commerce. Ainsi, les congolais et les étrangers qui investissent préfèrent les opérations d'importation de produits alimentaires, des produits manufacturés divers qu'ils revendent dans le pays. Ceci leur coûte moins cher que les activités de fabrication qui demandent beaucoup de main-d'oeuvre, des machines, et donc qui ont un coût plus élevé. Les privés sont plus enclins à investir dans le secteur minier et dans l'import-export, que dans les activités industrielles créatrices de valeur et d'emplois. Rien d'étonnant à ce que les activités manufacturières ne représentent que 11% du PIB (voir tableau 2.2). Lorsqu'on suit l'évolution de la Chine, on constate que dès le départ l'accent a été mis sur le développement des industries manufacturières nécessitant de la main d'oeuvre et des machines (industrie textile, fabrication de jouets, confection de chaussures, etc.), l'industrialisation étant une base pour l'émergence.

    Dans le contexte de la RDC qui regorge de ressources minières tant prisées par les industries technologiques pour la fabrication des appareils téléphoniques, des ordinateurs, et autres gadgets électroniques, nous proposons la création d'industries de fabrication et d'assemblage de ces composantes électroniques, de façon à gagner en savoir-faire en attirant la technologie, afin d'exporter des produits manufacturés, et s'insérer à un meilleur niveau dans les chaînes de valeur mondiales créatrices de richesses. Nous proposons aussi que des industries agroindustrielles soient implantées afin de profiter des richesses du sol pour produire sur place ce qu'on peut produire, plutôt que de toujours importer. C'est la deuxième phase du processus de développement prôné et appliqué par les pays émergents d'Asie, la création d'industries nationales pour limiter la perte des devises dues à l'importation excessive des biens pouvant être produits localement.

    3.2.1.4 L'absence de technopoles

    « Les technopoles et les pôles de technologie sont des groupements d'organisation de recherche et d'affaires qui s'attachent au développement scientifiques en englobant un processus allant de l'étape du laboratoire jusqu'à celle de la fabrication du produit. Ainsi, la technopole désigne un espace précis, le point singulier d'un territoire où se concentrent et s'irriguent mutuellement les activités économiques liées aux techniques nouvelles. Physiquement, c'est un ensemble d'entreprises (majoritairement petites et moyennes) structuré dans un environnement de qualité. Cet ensemble est situé généralement dans un système relationnel fermé avec des universités et des Instituts de recherche technique, publics et privés.73(*)» Avec l'administration publique et la gouvernance politique, la technopole est un des trois leviers de l'émergence en Afrique d'après KINZOUNZA74(*).

    En RDC, la création de technopoles est un défi à relever pour l'émergence, car les technopoles, selon les besoins du pays, peuvent permettre la professionnalisation des enseignements et susciter l'esprit d'entreprise grâce aux fermes-écoles, ateliers-écoles, bureaux d'études-écoles, laboratoires-écoles, etc. Elles peuvent aussi servir à créer une nouvelle génération d'entrepreneurs grâce aux diplômés des Ecoles d'ingénieurs, des Instituts supérieurs de Management, des Facultés des sciences, des Lycées techniques et des Lycées agricoles et par le biais des incubateurs des entreprises. Elles peuvent donc servir à l'accompagnement de l'industrialisation, de l'insertion dans les chaînes de valeur mondiales, par des études, des tests de produits, des formations, etc.

    3.2.1.5 L'absence d'un secteur financier de taille

    Pour développer les investissements dans un pays en attirant les capitaux étrangers, il faut que le pays soit attractif aussi sur le plan financier. Il faut que les investisseurs y trouvent les moyens de se financer en cas de besoin. Pour cela, il faut que le marché financier dans le pays soit développé, ce qui n'est pas encore le cas en RDC, où malgré la recrudescence des banques commerciales, l'économie n'est pas encore assez financiarisée. Le faible taux de bancarisation en RDC ne favorise pas le développement du secteur financier, les dépôts faisant les crédits, s'il n'y a pas assez de dépôts dans les banques, la contribution de ces dernières dans le financement des projets d'investissement dans le pays n'est pas significative. L'analyse de la situation dans les pays émergents laisse entrevoir une forte financiarisation de l'économie, favorisant les investissements au travers des prêts accordés, des recapitalisations, etc. ce qui ne peut se faire que si le secteur bancaire est assez fort et fiable. En RDC, la récente déconvenue due à la liquidation de la Banque Internationale pour l'Afrique au Congo (BIAC) ne favorise pas la confiance dans le système bancaire congolais.

    Il importe donc de travailler à faire de ce secteur un secteur fiable, sur lequel on peut compter, de manière à faire de la RDC une place financière en Afrique centrale, comme c'est le cas avec les places financières en Asie du sud-est (Singapour, Hong Kong).

    3.2.1.6 L'inefficacité des entreprises publiques

    Le manque de rentabilité des entreprises publiques est un des obstacles à l'émergence en RDC, car les entreprises publiques jouent un rôle non négligeable dans la mobilisation de ressources pour l'Etat. Dans les pays émergents, les entreprises publiques sont tellement rentables qu'elles s'attirent des capitaux et s'imposent pour certaines dans le monde comme des multinationales (PETROBRAS au Brésil par exemple). Les entreprises publiques congolaises présentent des défauts dans la gestion, n'arrivent pas à faire leur travail convenablement, ne se conforment pas aux standards de performance des entreprises publiques des pays émergents et des pays développés. C'est pourquoi une réforme des entreprises publiques a été élaborée dès 2008. Quoi qu'il en soit, les entreprises publiques congolaises comme la Société Nationale d'Electricité, l'Office Congolais de Contrôle (OCC) ou la REGIDESO, parce qu'elles présentent des défauts dans leur gestion (scandales de détournement de fonds à la SNEL, grèves des travailleurs à l'OCC pour dénoncer la mauvaise gestion de l'entité, services mal rendus, vétusté de l'outil de travail, arriérés de salaires, etc.), subissent des dysfonctionnements et les objectifs qui leur sont assignés ne sont pas atteints.

    Le défi à relever ici est donc de faire des entreprises publiques de véritables créateurs de richesses à l'instar des grandes entreprises d'Etat brésiliennes (Petrobras), des ressources dont l'Etat a besoin pour augmenter son budget. L'ouverture de leur capital à des entreprises privées ayant un vrai souci de rentabilité serait une bonne chose. Dans le cas de la SNEL par exemple, la production et la distribution d'électricité serait accrue si une c'était une entreprise privée qui reprenait la gestion, car les entreprises privées sont mues par la recherche du profit. Ainsi, elle veillerait à ce que les choses soient bien faites, que l'énergie électrique soit produite en quantité nécessaire et correctement repartie pour que les factures soient payées régulièrement par les usagers. De cette façon, l'entreprise gagne en confiance et l'Etat peut tirer plus de revenus. Il serait donc de bon aloi de favoriser la reprise des entreprises publiques par des privés ou des prises de participations à un niveau permettant à l'investisseur d'avoir un droit de gestion.

    3.2.1.7 Le faible taux de desserte en énergie

    L'émergence est un phénomène qui requiert une utilisation importante d'énergie, car indispensable pour faire fonctionner les centres de production. En RDC, l'énergie électrique, qui devrait pourtant être une formalité en plein XXIème siècle, est une denrée rare. On estime le taux de desserte en énergie électrique à moins de 15% dans le pays. Autant dire que la majeure partie du pays ne bénéficie pas convenablement de cette énergie, pourtant indispensable pour la production de richesses. On voit bien que c'est une des conséquences directes des incapacités constatées dans la gestion des entités chargées de la production d'énergie. Comment lancer des projets d'industrialisation sans amélioration au niveau des sources d'énergie ? Le manque d'électricité augmente les coûts d'exploitation des entreprises dans le pays, car pour pallier l'absence d'énergie électrique, il faut se munir des groupes électrogènes coûteux. Pour tenter de résoudre ce problème, la SNEL a donné la possibilité aux entreprises de se raccorder à des cabines de courant privées. Mais il est évident que ce n'est pas une mesure qui va résoudre le problème sur le long terme. Il s'agit donc d'un obstacle de taille sur la route de l'émergence, et un défi très important à relever par le gouvernement de la RDC. Les pays aujourd'hui émergents utilisent, gèrent et exportent même de grandes quantités d'énergie (Chine).

    Nous proposons le développement de nouvelles formes d'énergie pour accompagner l'énergie hydroélectrique, car la construction des centrales électriques pour la production de courant et le raccordement de tout le pays sont des opérations coûteuses en temps et en argent. Le développement de l'énergie photovoltaïque, de l'énergie éolienne, pourrait être confié aux technopoles qui étudieraient les modalités d'utilisation de ces formes d'énergies pour le bien de tous.

    3.2.1.8 La prééminence du secteur informel dans les activités économiques du pays

    Les activités économiques en RDC sont à 80% informelles. Le secteur informel occupe plus de 80% de la population active, le chômage étant extrêmement élevé, se réfugier dans la tenue d'activités informelles de subsistance apparaît comme la seule réponse au dénuement économique provoqué par la situation de chômeur. Le secteur informel emploie donc le plus de congolais, et comporte un grand nombre d'activités économiques non connues de l'Etat, non comptabilisées dans les comptes de l'Etat, du fait justement de leur illégalité. Bien que le secteur soit reconnu comme n'étant pourvoyeur que de revenus de subsistance, donc faibles, il y a des activités qui peuvent se révéler tout aussi fructueuses sinon même plus que les activités du secteur formel. Ce qui pose le problème de la fiscalisation du secteur informel. Les entreprises du secteur formel se plaignent d'une concurrence déloyale, car les entités économiques oeuvrant de façon informelle ne paient ni taxes ni impôts, ont donc des coûts de production moins élevés. En tant qu'entités économiques, réalisant leurs activités sur le sol congolais, elles devraient être soumises à une imposition. Mais au regard de la précarité ambiante, l'Etat laisse faire. Cependant, ces productions informelles, si elles étaient prises en compte, amélioreraient significativement le niveau de production du pays. Leur importance dans la création des richesses et la distribution des revenus en RDC n'est pas à négliger, d'où la nécessité de leur prise en compte par l'Etat.

    Les entreprises informelles étant des activités de subsistance pour la plupart, il serait difficile de les imposer comme des activités formelles. Néanmoins, il faut trouver un moyen pour l'Etat d'en tirer quelque chose vu leur nombre et leur importance. Quelques tentatives ont été lancées dans certains marchés de la ville de Kinshasa, comme le paiement par les agents économiques d'une somme de 50.000 FC par an, montant qui a été considéré comme trop élevé par les agents économiques informels. Une réflexion s'impose à ce niveau, car un secteur informel trop fort et incontrôlé, c'est des ressources en moins pour l'Etat congolais qui a terriblement besoin de moyens financiers pour accompagner toutes les réformes précédant l'émergence.

    3.2.2 Les obstacles d'ordre politique, institutionnel et culturel

    Sur la route de l'émergence, se dressent divers obstacles dus aux insuffisances dans la gouvernance politique, dans les organisations formelles et informelles (valeurs, normes, coutumes, traditions), les procédures et le cadre réglementaire qui guident l'activité économique dans le pays. En effet, l'une des conditions de l'émergence est « l'existence ou l'émergence rapide d'un système politique, social et institutionnel qui, en exploitant finement l'expansion initiale dans le secteur moderne et les effets économiques du décollage, arrive à donner à la croissance un caractère continu.75(*)»

    3.2.2.1 Un climat politique morose

    Les tensions et querelles politiques forment un grand obstacle sur la route vers l'émergence. Le climat politique morose ne favorise pas les investissements, entame la confiance de ces derniers quand à l'avenir du pays et donc de leurs capitaux. Quand on a en mémoire les pillages ayant eu lieu en 1991 et 1993, durant une période de tensions politiques, ou plus récemment ceux de Janvier 2015 à Kinshasa, toujours à cause du climat politique morose, on comprend mieux l'importance de surmonter le défi, très difficile, des querelles politiques. En plus de ne pas favoriser le climat des affaires, une situation politique tendue, telle que celle que nous vivons dans le pays en cette année électorale 2016, ne favorise pas non plus l'adhésion des élites (intellectuelles, politiques, économiques) ni de la population, à l'objectif de l'émergence, qui doit être une vision commune de toute la société. L'objectif de l'émergence, n'est pas, comme certains peuvent le penser, un objectif de la majorité au pouvoir, ni d'une catégorie spéciale de personnes, mais ce doit être une vision commune, en laquelle toute la société se reconnaît.

    En RDC, démocratie oblige, chacun veut conquérir le pouvoir. Malheureusement, les politiciens au pouvoir et leurs opposants s'affrontent en bafouant les règles démocratiques. Les opposants minoritaires, ne veulent pas reconnaître leur statut de minoritaire, et ne reconnaissent jamais aucune légitimité à ceux qui sont au pouvoir. Cela donne lieu à des réactions toujours négatives à l'égard des réalisations du gouvernement considéré comme illégitime. Les opposants, considérant qu'ils ne peuvent pas travailler avec un gouvernement illégitime, ne contribuent pas à la réflexion sur l'émergence. En réponse à ces attaques, ceux qui ont le pouvoir isolent les opposants de la gestion des affaires publiques. Ces dérives dans le chef de ceux qui sont censés orienter le développement du pays, ajoutées aux querelles politiciennes qui se substituent au réel débat politique devant orienter le progrès, ne sont pas favorables à la poursuite de l'émergence, la population congolaise n'étant pas assez impliquée pour la réussite de l'objectif. Au final, au lieu que le débat politique prôné par la démocratie soit favorable à la poursuite de l'objectif commun de progrès économique et social, on constate que c'est l'occasion pour certains de tenter de bloquer les actions du gouvernement, en dénigrant systématiquement les réalisations, sans pour autant apporter de solutions concrètes. Le seul objectif des politiciens c'est la conquête du pouvoir, peu importe la situation économique et sociale. D'où la nécessité de se poser les vraies questions quant au système de gouvernance politique à mettre en place pour la réussite de l'objectif d'émergence. Les dérives observées dans l'application des règles démocratiques, comme la contestation systématique des résultats des élections, le refus de reconnaître la légitimité à ceux qui sont élus, nous font penser que l'adoption des régimes politiques en vigueur dans le monde occidental, n'a pas été la meilleure décision prise par les dirigeants africains. Ces régimes ne sont peut-être pas adaptés au contexte de l'Afrique, d'autant plus qu'aucun Etat africain ne s'est développé depuis qu'on a adopté la « démocratie à l'occidentale ». Le Bénin n'est rien d'autre que le pays avec la plus ancienne tradition démocratique en Afrique, en termes de résultats économiques, rien de concluant.

    La nécessité de rééquilibrer cette démocratie à notre contexte propre s'impose car les querelles politiques créent un climat de suspicion pour les potentiels investisseurs. Rappelons que l'Etat de Singapour n'avait qu'un parti politique tout au long de son processus d'émergence (le People's Action Party), la Chine aujourd'hui est toujours dirigée par le Parti Communiste. Des pays où le parti unique a été instauré mais qui ont connu le progrès économique et social, certainement parce que la contestation a été contenue et l'objectif de progrès mis en avant par la société toute entière. Nous ne prônons pas le retour à la dictature, mais nous nous interrogeons sur la démocratie qui depuis qu'elle est instituée en Afrique en général et en RDC en particulier, n'a pas apporté d'amélioration significative dans la marche vers le développement, à cause de la mauvaise compréhension de tous ses prescrits par ceux qui l'ont adoptée sans tenir compte du contexte particulier de notre pays. Nous sommes désormais obligés de passer de dialogues en dialogues pour trouver des consensus politiques, alors que la démocratie consacre le consensus par les élections qui donnent la tendance de la majorité.

    Nous invitons donc les acteurs politiques à prendre leurs responsabilités et à mettre en place le climat politique apaisé en mesure de favoriser la facilitation des investissements étrangers directs en RDC, afin que le pays prenne le chemin de l'émergence comme prévu.

    3.2.2.2 Un système pas ou très peu méritocratique

    En RDC, les nominations aux postes importants de décision sont faites non sur base d'un système méritocratique comme c'est le cas dans beaucoup de pays émergents, mais plutôt sur base d'affinités politiques, personnelles, parfois même confessionnelles. C'est un système qui ne favorise pas le progrès, car ne récompensant pas toujours les plus méritants.

    La nécessité de surmonter cet obstacle s'inscrit dans la poursuite de l'objectif d'émergence, car l'émergence nécessite que l'action de l'Etat soit efficace. Le pragmatisme est de rigueur si on veut atteindre l'émergence, il importe donc de s'entourer de personnes efficaces dans leur travail. Comme disent les anglosaxons «put the right person in the right place». Nous proposons donc que les membres du gouvernement ainsi que ceux de l'administration publique soient recrutés sur base de concours et évalués régulièrement, en utilisant les méthodes de gestion des ressources humaines et le système de notation des grandes entreprises multinationales. Cela permettra d'avoir une meilleure justice sociale et au service de l'Etat des personnes efficaces, l'efficacité étant un élément important pour la conduite des politiques publiques.

    3.2.2.3 Les mentalités rétrogrades

    La révolution des mentalités est un des plus grands défis à surmonter en RDC, et qui conditionne significativement la réalisation de l'émergence. En effet, nous considérons qu'il est de l'obligation des politiques d'impulser le changement dans le chef des mentalités, en menant le combat contre les antivaleurs et toutes les pratiques qui ne favorisent pas le développement. Les mentalités rétrogrades se traduisent au niveau politique par les pratiques telles que la corruption, la concussion, les détournements de fonds publics, qui sont des antivaleurs contre lesquelles tout gouvernement qui vise l'émergence devrait s'ériger. Dès lors qu'au plus haut niveau ces pratiques passent sans que leurs auteurs ne soient punis, la base les considère comme normales et elles deviennent la norme dans la société.

    Il est donc important de punir sévèrement les auteurs d'actes tels que la corruption, les détournements de fonds publics. Il faut vaincre l'impunité régnante dans le pays. Le défi de surmonter la barrière des mentalités rétrogrades doit s'opérer dans toutes les sphères sociales, depuis les politiciens jusqu'au petit peuple, en passant par l'administration publique et le pouvoir judiciaire. Il faut donc promouvoir la bonne gouvernance, la transparence dans la gestion des affaires publiques.

    3.2.3 Les obstacles sociaux et environnementaux

    Des obstacles d'ordre social se dressent aussi sur la route de l'émergence de la RDC.

    3.2.3.1 Le chômage et la pauvreté des populations

    En RDC, le taux officiel de chômage est situé autour de 50%, et celui de la pauvreté à plus de 60%. Cela représente des millions de personnes. La situation constatée sur le terrain laisse penser que ces chiffres officiels sont minimisés, et que l'étendue de la pauvreté et du chômage est un sérieux obstacle dans la poursuite de l'objectif d'émergence. En effet, on ne peut viser l'émergence avec une population qui ne travaille pas, et qui de fait, vit dans la misère. Le fondement même de l'émergence des pays aujourd'hui émergents a résidé dans la capacité de créer des emplois qui ont permis le développement du pays. En RDC, on voit difficilement comment l'émergence peut être atteinte si les principaux acteurs de cette émergence ne sont pas impliqués dans le processus. Car l'homme est au centre de tout. C'est le travail de leurs populations qui a été la première pierre de l'émergence dans les pays d'Asie du sud-est et au Brésil.

    En outre, la pauvreté de la population ne créé pas non plus les conditions favorables à l'émergence, à cause du fait que le dénuement économique n'est pas propice à la consommation. Les millions de personnes ayant un faible pouvoir d'achat ne peuvent donc pas accompagner le processus de nationalisme économique, car incapables de consommer les produits fabriqués et de soutenir le processus d'émergence. Dans ces conditions de pauvreté, le pays peine à se doter même d'une épargne nationale suffisante (l'épargne privée étant très faible ou inexistante) pour engager des projets de développement.

    Le gouvernement de la RDC devrait donc tenir compte des facteurs pauvreté et chômage en accélérant effectivement la création d'emplois pour réduire le chômage grandissant. Les efforts sont encore largement insuffisants pour donner un emploi à tous les jeunes qui viennent sur le marché du travail chaque année. D'où la recommandation faite d'investir dans les secteurs de production à forte intensité de main d'oeuvre, afin d'endiguer rapidement le chômage et réduire la pauvreté, comme l'ont fait les pays émergents d'Asie au début de leur processus d'émergence. L'importance de surmonter cet obstacle est que cela permettra de créer un consensus entre la population et le gouvernement autour du processus d'émergence. Généralement, la population en majorité pauvre et sans emploi, n'adhère pas aux objectifs ciblés par les gouvernements, car elle se sent exclue des prises de décisions quant à l'avenir du pays. Cette situation peut s'expliquer par le fait que la population ignore parfois les tenants et les aboutissants des différentes politiques menées par le gouvernement, en l'occurrence la poursuite de l'émergence. Le concept en lui-même est d'ailleurs très flou pour la plupart, d'où la nécessité de mener de vastes campagnes d'information pour recevoir l'adhésion de toute cette population qui est censée porter l'émergence et bénéficier des avantages y afférents, en dépassant les divergences idéologiques et d'intérêts personnels. Il faut donc que la population adhère à l'objectif de l'émergence et que chacun où il se trouve travaille en ce sens. Pour favoriser cette adhésion sociale, le gouvernement doit créer un cadre incitatif en engageant des actions visant à résorber le chômage et réduire la pauvreté.

    3.2.3.2 Un environnement mal géré et non protégé

    La protection de l'environnement est un enjeu mondial. Comme nous l'avons vu dans le premier chapitre, la protection de l'environnement est l'un des chevaux de bataille des pays émergents, et constitue aussi un défi à relever sur la route de l'émergence, car nul n'ignore l'importance de l'environnement, qui détermine les conditions de subsistance et de bien-être des personnes (qualité de l'eau, de l'air, du sol, pour la production de richesses). Autant dire que si la gestion de l'environnement n'est pas bonne, surviennent toujours des problèmes prompts à retarder le progrès. En RDC, la gestion des déchets ménagers laisse à désirer, la politique de salubrité publique n'est pas bien menée. Il suffit juste d'arpenter les rues de Kinshasa pour se rendre compte qu'il faut une vraie politique de gestion responsable des déchets ménagers et industriels en RDC. Sinon, on vivra dans un environnement qui n'est pas propice au progrès souhaité. De plus, la nécessité de protéger les forêts de la surexploitation s'impose, le pays abritant la majeure partie de la forêt équatoriale qui est la deuxième réserve mondiale d'oxygène après la forêt amazonienne au Brésil.

    Les impératifs environnementaux impliquent aussi une meilleure gestion des ressources naturelles, une utilisation responsable afin de léguer un monde vivable aux générations suivantes. D'où le concept de développement durable. La RDC qui possède une réserve de bois et d'oxygène d'importance mondiale, avec la forêt équatoriale, est donc profondément impliquée dans la gestion responsable et la préservation de la nature.

    L'on constate que beaucoup reste encore à faire pour l'atteinte de l'émergence. Les défis les plus importants à relever sont ceux ayant trait au changement des mentalités, à la stabilité politique et institutionnelle, aux transformations économiques à opérer. La nécessité de créer un consensus national autour de l'émergence s'impose. L'émergence doit être insérée dans la planification du futur intrinsèque à chaque citoyen congolais, comme c'est le cas dans les pays comme la Malaisie. Le rendez-vous a été donné par le gouvernement en 2030 pour un Congo émergent. Voyons quelles sont les perspectives pour l'avenir.

    3.3 Quid de l'émergence en 2030 : analyse comparative RDC, BRIC et BENIVM

    Dans cette partie, nous allons tenter d'analyser l'objectif de l'émergence en 2030 que le gouvernement de la République s'est donné dès 2012, dans le cadre du programme de la Révolution de la modernité. Pour ce faire, nous allons partir des observations faites sur les pays émergents et les prochains émergents (BENIVM notamment), afin de voir dans quelle mesure les performances économiques de la RDC sur les prochaines 15 années pourraient lui permettre de prétendre à l'émergence au même titre que les BENIVM ou d'être émergent comme les BRICS. Il s'agit de voir si avec les prévisions de croissance en ce qui concerne notamment les éléments du diptyque exportations-investissements et le produit intérieur brut, la RDC pourrait atteindre le niveau de ces 11 pays.

    Pour l'atteinte de l'émergence à l'horizon 2030, la RDC s'est dotée d'un nouveau plan national stratégique de développement 2017-2021, qui succède au PAG 2012-2016. En effet, les précédents plans (DSRP I, DSCRP I, DSCRP II, PAG) ont atteint leurs objectifs principaux (stabilité macroéconomique et reconstruction, réduction de la pauvreté, croissance économique, renforcement des institutions, création d'emplois, etc.).

    « La période 2012-2016 correspond à la phase de préparation de l'émergence, avec la consolidation de la paix et de la démocratie, la stabilisation macroéconomique. La période 2017-2021 devrait correspondre, d'après le plan national stratégique de développement, à la phase de décollage vers l'émergence. Des transformations structurelles et économiques sont prévues, ainsi qu'une amorce de la transition pour l'inclusion sociale. La période 2022-2031 devrait correspondre à un développement socioéconomique soutenu, l'inclusion sociale et la réduction des inégalités.

    Dans l'immédiat, le plan national stratégique de développement se décline en huit objectifs, à savoir :

    - La stabilisation, la reconstruction des zones affectées par les conflits ;

    - Le renforcement de la démocratie et de la gouvernance politique, judiciaire et administrative ;

    - L'accélération de la diversification économique ;

    - Le développement des infrastructures économiques ;

    - Le développement du secteur privé et du secteur financier ;

    - Le développement et la valorisation des ressources humaines ;

    - Le développement social et l'inclusion des groupes vulnérables ;

    - Le développement durable et la mobilisation des ressources pour le financement privé et public de la stratégie 76(*)».

    Le rendez-vous ayant été pris pour 2030, nous avons tenté d'analyser dans quelles mesures l'émergence pourrait être atteinte d'ici cette date fatidique. Il ressort de notre analyse que sur le plan économique, la RDC ne pourra pas atteindre le niveau des pays aujourd'hui émergents. En effet, même avec un taux de croissance moyen de 11% (moyenne de la période 2005-2015) par an sur la période 2016-2030, la RDC ne réaliserait que 201 milliards USD de PIB en 2030, soit 1.861 USD par habitant pour une population qui aura cru elle aussi de 2,6% en moyenne par an, si le taux d'accroissement démographique reste le même que celui de la période 2005-2015. Ce qui donne un revenu intermédiaire (certes inférieur à celui de 2000 USD par habitant visé par le plan national stratégique de développement), et un revenu de 5 USD par habitant par jour, nettement en dessous de la moyenne des BRICS, dont les PIB par habitant varient entre 15 et 25 USD par jour. En appliquant la même formule pour les exportations, on constate qu'avec un taux de croissance annuel moyen de 18%, en 2030 la RDC exporterait pour environ 216,4 milliards USD, pas loin du niveau actuel du Brésil (231 milliards). Et si on considère la valeur des exportations mondiales en 2014, les exportations congolaises pèseraient pour 1,13% dans ce total. Pour ce qui est des IDE entrants, ils ont cru en RDC de 22% entre 2005 et 2015. Avec le même taux de croissance pour la période 2016-2030, le niveau des IDE en 2030 serait d'environ 50 milliards USD, ce qui représente environ 4% du total mondial des flux d'IDE entrants en 2015.

    Tableau 3.6 : Estimations de certains indicateurs en 2030 en comparaison avec ceux des BRIC en 2015.

    Indicateurs

    Brésil

    Russie

    Chine

    Inde

    RDC (2030)

    PIB (mlds USD)

    1.773

    1.325

    10.983

    2.091

    201

    Population (millions)

    204

    143,5

    1.400

    1.270

    108

    PIB/habitant (USD)

    8.691

    9.233

    7.845

    1.646

    1.861

    PIB/hbt/jr (USD)

    24

    25

    21

    4,5

    5

    Flux d'IDE entrants (mlds USD)

    62

    51

    129

    34

    50

    Exportations (mlds USD)

    225

    498

    2.342

    491

    216

    Source : Elaboré sur base des données de la CNUCED, UNCTAD Stats.

    Tableau 3.7 : Estimations de certains indicateurs en 2030 en comparaison avec ceux des BENIVM en 2015.

    Indicateurs

    Bangladesh

    Ethiopie

    Nigéria

    Indonésie

    Viêtnam

    Mexique

    RDC (2030)

    PIB (mlds USD)

    195

    62

    481

    862

    194

    1.144

    201

    Pop. (millions)

    160

    92

    186

    258

    91

    122

    108

    PIB/hbt (USD)

    1.219

    674

    2.586

    3.341

    2.132

    9.377

    1.861

    PIB/hbt/jr (USD)

    3

    2

    7

    9

    6

    26

    5

    Flux d'IDE (mlds USD)

    1.527

    1.200

    4.694

    22.580

    9.200

    22.995

    50

    Exp. (mlds USD)

    34

    6

    87

    182

    174

    404

    216

    Source : Elaboré sur base des données de la CNUCED, UNCTAD Stats.

    Graphique 3.1 : Evolution du PIB dans les BRICS, BENIVM et en RDC, en milliards USD (2005-2015)

    Source : Elaboré sur base des données de la Banque mondiale.

    Graphique 3.2 : Evolution des exportations des BRICS, BENIVM et RDC en milliards USD (2005-2015)

    Source : Elaboré sur base des données de la Banque Mondiale.

    Le graphique 3.2 montre l'évolution des exportations des BRICS, des BENIVM et de la RDC entre 2005 et 2015, ainsi que les prévisions pour 2016 et 2017. L'on constate que les exportations de la RDC sont encore trop faibles en comparaison avec celles des pays émergents et des futurs pays émergents. D'où la nécessité de redoubler d'efforts pour améliorer la valeur des exportations. Le graphique 3.3 représente l'évolution des flux d'IDE des ces mêmes pays entre 2005 et 2014, et le constat est que les flux d'IDE entrants en RDC sont en évolution depuis 2005, mais encore trop faibles pour avoir un impact significatif sur le processus d'émergence. Le graphique 3.4 représente quant à lui l'évolution de l'IDH dans les BRIC, BENIVM et en RDC, entre 2000 et 2014. On constate que l'IDH de la RDC a sensiblement évolué, mais reste faible, en comparaison avec celui des pays émergents comme la Russie qui affiche un IDH élevé, et des futurs émergents comme le Mexique ou l'Indonésie qui affichent des IDH élevés ou moyens.

    Graphique 3.3 : Evolution des flux d'IDE entrants dans les BRICS, BENIVM, RDC en milliards USD (2005-2014)

    Source : Elaboré sur base des données de la CNUCED, UNCTAD Stats.

    Graphique 3.4 : Evolution de l'IDH des BRICS, BENIVM et RDC entre 2000 et 2014.

    Source : Elaboré sur base des données du RDH 2014, PNUD.

    Au regard des prévisions et des comparaisons que nous venons d'établir entre la RDC, les BRICS et les BENIVM, nous pouvons conclure que si la croissance du PIB, des IDE en faveur de la RDC et de ses exportations reste identique à celle de la période 2005-2015, le pays pourrait atteindre le niveau actuel des BENIVM en 2030, c'est-à-dire celui des futurs pays émergents. Autant dire que l'objectif d'un Congo émergent en 2030 ne peut être atteint que si l'économie congolaise connaît un développement sans précédent sur les prochaines années, en privilégiant notamment la diversification des activités économiques. Une situation invraisemblable, au vu de la conjoncture économique mondiale morose, marquée notamment par un ralentissement de la demande mondiale, ce qui n'est pas pour arranger les affaires d'une économie congolaise fortement tributaire de cette demande. En 2030, la RDC sera donc au mieux un pays à revenu intermédiaire, contrairement à ce que prévoit le Plan National Stratégique de Développement, qui table sur l'atteinte du stade de pays à revenu intermédiaire en 2021.

    Conclusion partielle

    Au terme de ce chapitre, nous pouvons dire que la RDC présente plusieurs éléments fondamentaux de l'émergence, notamment une relative stabilité macroéconomique, une hausse des exportations, des réformes libérales ayant favorisé une recrudescence des IDE dans le pays, des infrastructures de base en cours de construction. Cependant, des efforts colossaux restent encore à fournir pour atteindre la stabilité institutionnelle et politique, véritables tremplins pour l'attrait des investissements étrangers. Par ailleurs, la mise en place d'un leadership politique transformationnel, la diversification des activités économiques, l'industrialisation du pays, l'amélioration des performances des entreprises publiques sont des défis à relever pour atteindre l'émergence. Eu égard aux prévisions et aux comparaisons effectuées entre les BRICS, les BENIVM et la RDC, il apparaît évident que l'émergence en 2030 est une utopie, à moins que ne s'opère un véritable miracle économique. Il ressort de nos analyses que la RDC pourrait, en 2030, au mieux atteindre le niveau des pays qui ont aujourd'hui des revenus intermédiaires.

    Conclusion générale

    Nous sommes arrivés au terme de notre travail. Dans le premier chapitre, nous avons fait le point sur le phénomène de l'émergence, afin d'en cerner la réalité. Dans le deuxième chapitre, nous avons fait une présentation de la République Démocratique du Congo, en mettant l'accent sur les potentialités dont regorge le pays. Dans le troisième et dernier chapitre, nous avons analysé les fondements de l'émergence de le RDC et dressé la liste des obstacles à surmonter par le pays afin d'atteindre l'objectif affiché de l'émergence économique.

    L'émergence est un phénomène dont on ne peut se passer aujourd'hui dans le débat sur le développement, et qui ne passe pas inaperçu dans l'opinion publique, tant ses effets sont visibles sur la répartition mondiale des richesses et la distribution des rôles entre les pays et les régions. En effet, ce phénomène multidimensionnel a entraîné une sérieuse remise en question du processus de développement des nations. Il est désormais clairement admis que pour tout pays pauvre désireux d'améliorer les conditions de vie de ses populations, le passage par le stade de l'émergence est une étape primordiale. Or l'atteinte de l'émergence peut se révéler être un réel parcours du combattant pour les pays pauvres. En effet, pour ces pays trop longtemps minés par des querelles politiques menant parfois à des problèmes sécuritaires comme en RDC (coups d'Etat, sécessions, guerres tribales), par des incapacités dans la gestion des affaires publiques, des programmes économiques douteux, la sortie du tunnel ne se fera pas sans difficultés. Les structures économiques, institutionnelles et même mentales ne sont pas adaptées aux enjeux contemporains du développement. La solution réside donc dans les changements qui doivent être opérés dans ces pays pour qu'ils se mettent sur la voie du développement, et qui constituent les fondamentaux de l'émergence.

    Après observation et analyse de l'émergence des pays aujourd'hui considérés comme pays émergents, notamment les dragons et tigres asiatiques et le groupe des BRICS, nous avons pu mettre en exergue quelques caractéristiques qui leur sont communes et ressortir les fondamentaux appliqués par ces pays à l'aube de leur processus d'émergence. Il ressort de cette analyse que les pays émergents sont ceux qui ont su se constituer en pôles d'attraction des investissements, diversifier et accélérer durablement et harmonieusement leur croissance économique, et qui se sont ainsi intégré avec succès dans l'économie mondiale. Cela n'a été possible que parce que ces pays ont mis en place un cadre institutionnel incitatif pour les investissements, présenté une stabilité politique et macroéconomique, et mis sur pied une transformation structurelle de l'économie.

    L'on est alors en mesure de déterminer les fondements de l'émergence, partant de l'expérience des pays émergents : une vision à long terme déclinée en un plan stratégique national et en actions opérationnelles (vision politique) ; une communication forte permettant l'appropriation de la vision par les populations, ainsi qu'un consensus national autour de l'objectif d'émergence, de sorte que les populations et les acteurs politiques, qu'ils soient de l'opposition ou de la majorité, travaillent tous pour la réussite de l'émergence (leadership politique transformationnel) ; un partenariat étroit entre l'Etat et le secteur privé qui met en oeuvre la vision politique sur le plan économique ; la mise à niveau du secteur public qui doit être efficace pour élaborer et mettre en oeuvre un cadre institutionnel de qualité (administration publique au service du développement) ; le changement de mentalités, l'adoption au niveau national de nouvelles valeurs propices à l'émergence (lutte contre la corruption, la gabegie financière, le laxisme, promotion de la recherche effrénée de la performance, de l'intégrité, la discipline, la rigueur dans le travail) surtout dans le service public qui doit garantir la qualité du cadre institutionnel et la bonne gouvernance.

    La situation en RDC est caractérisée par des forts taux de croissance depuis 2002, une relative stabilité sur le plan macroéconomique, des exportations et des investissements directs étrangers entrants qui ont cru respectivement de 16% et 22% entre 2005 et 2015. Des résultats économiques obtenus au prix d'efforts et de réformes visant notamment à améliorer l'attractivité du pays. On peut remarquer l'existence d'une vision politique à long terme déclinée en un plan stratégique national et des actions opérationnelles depuis 2001 avec les différents programmes économiques du gouvernement, qui visaient d'abord la stabilité politique, le rétablissement de la paix et de la sécurité, la stabilité macroéconomique, la reconstruction, la réduction de la pauvreté, etc. (DSRP, DSCRP 1, DSCRP 2), et qui visent maintenant l'atteinte de l'émergence (PAG 2012-2016, PNSD 2017-2021 et 2022-2030). En outre, la mise à niveau du service public est en oeuvre, notamment avec les projets de renforcement des capacités des acteurs du secteur public (PRC-GAP en 2011), la réforme des entreprises publiques mise en oeuvre par le COPIREP, la formation de nouveaux cadres et agents de l'Etat à travers l'Ecole Nationale d'Administration, l'administration publique étant chargée d'assurer l'élaboration, la mise en oeuvre et le suivi du cadre institutionnel garant de la bonne gouvernance.

    Cependant, beaucoup reste encore à faire, notamment en ce qui concerne la stabilité politique, car les querelles politiques semblent interminables en RDC. Ces tensions politiques empêchent la création d'un consensus national autour de l'émergence, et l'appropriation par les populations de la vision, de sorte que chaque leader politique cherche à imposer sa vision au détriment d'une vision de développement qui se doit d'être nationale. Le climat politique tendu influe aussi sur les flux d'investissements étrangers, car personne ne veut investir dans un pays où tous les cinq ans plane l'ombre d'un chaos, à cause des échéances électorales. De plus, l'opinion publique congolaise n'est pas assez bien renseignée sur le phénomène d'émergence. Ce dernier reste un concept étranger et lointain pour la majorité des congolais. En outre, la faiblesse du leadership politique, qui du reste n'est pas transformationnel, entrave l'adoption par la communauté nationale des valeurs clés pour la réussite du processus d'émergence que sont la recherche de la performance, la discipline et la rigueur dans le travail. La faible diversification des activités économiques, la faiblesse des infrastructures de base, la faible industrialisation du pays, sont autant de défis qu'il faut relever pour voir la RDC devenir un pays émergent.

    Enfin, l'objectif affiché par le gouvernement congolais d'atteindre l'émergence en 2030, apparaît non réaliste au vu des prévisions et des comparaisons effectuées, qui montrent clairement que la RDC ne pourrait atteindre à cet horizon que le niveau des futurs émergents d'aujourd'hui, donc au mieux être un pays à revenu intermédiaire. Quoi qu'il en soit, les jalons de l'émergence ont été posés, et il appartient à chacun d'accompagner le processus par le travail et la discipline. Le processus d'émergence est un travail de longue haleine, qui demande un effort national conséquent. Mais comme le dit une sagesse populaire bien connue, « un voyage de 1000 kilomètres commence par un pas ».

    Bibliographie

    Ouvrages

    DAZIANO Laurence, Les pays émergents : Approche géo-économique, Armand Colin, Collection U, 2014.

    GOLDSTEIN Andrea et LEMOINE Françoise, L'économie des BRICS, La découverte, Paris, 2013.

    HERDERSCHEE Johannes, MUKOKO SAMBA Daniel, TSHIMENGA TSHIBANGU Michael, Résilience d'un géant africain: accélérer et promouvoir l'emploi en République Démocratique du Congo, Volume I : synthèse, contexte historique et macroéconomique, Kinshasa, MEDIASPAUL, 2012.

    KINZOUNZA Firmin, Les 3 leviers de l'émergence économique en Afrique. Conférence panafricaine : transformations et émergence du continent (quelles innovations et quelles capacités pour l'émergence économique et sociale de l'Afrique), CESEG et CAFRAD, Novembre 2013, Brazzaville.

    KOULIBALY Mamadou, Pourquoi certains pays sont émergents et d'autres pas.

    LO Moubarack, L'émergence économique des nations : définition et mesure.

    LO Moubarack, Emergence et transformation structurelle.

    MATATA PONYO Augustin, Pour un Congo émergent, Editions Privé, Paris, 2016.

    ROSTOW Walt Whitman, Les cinq étapes de la croissance économique, Le seuil, Paris, 1970.

    SALAMA Pierre, Des pays toujours émergents ?, La documentation française, Paris, 2014, Collection Doc' en poche place au débat.

    VERCUEIL Julien, Les pays émergents Brésil-Russie-Inde-Chine : mutations économiques, crises et défis, Editions Bréal, 2015.

    WEERTS Audrey, Ressources naturelles au Kivu : vers l'institutionnalisation du pillage ?

    Articles

    L.S, Fondements de l'émergence : le cas de la Chine expliqué aux journalistes ivoiriens, @bidjan.net [en ligne], 17 Mai 2015. Disponible sur : https//:www.news.abidjan.net/h/551893.html

    LAFARGUE François, Des économies émergentes aux puissances émergentes, Questions internationales, Septembre-Octobre 2011.

    Les années Mobutu (1965-1989) : l'accroissement de la dette odieuse.

    SANNAT Charles, Les BRICS locomotive de l'économie mondiale, Le Contrarien, [en ligne], 19 Mai 2015. Disponible sur : https//:www.lecontrarien.com/les-brics-locomotive-de-leconomie-mondiale-20-05-2015-economie

    Rapports

    Banque Centrale du Congo, Bulletin d'informations statistiques Avril 2016.

    Banque Centrale du Congo, Condensé d'informations statistiques Juillet 2016.

    Banque Centrale du Congo, Rapports sur la politique monétaire 2014, 2015.

    Banque Centrale du Congo, Rapport annuel 2014.

    Banque Mondiale, Rapport Doing Business 2016.

    CNUCED, Rapports sur l'investissement dans le monde 2011, 2012, 2013, 2014, 2015.

    OCDE, Perspectives de la croissance dans le monde, 2015.

    OMC, Statistiques internationales du commerce 2001, 2010, 2012, 2014, 2015.

    PNUD, Note technique : priorités de développement 2017-2021, République Démocratique du Congo.

    Cours

    KABANGA Donatien, Cours de questions approfondies d'économie de développement. Kinshasa : Université Catholique du Congo, 2010-2011, 74 p.

    TSHIMANGA Claudine, Cours de collecte et analyse des données, première licence. Kinshasa : Université Catholique du Congo, 2014-2015, 53 p.

    Mémoires

    KAMPIKA NTUMBA Fred, Dette extérieure des PPTE, enjeux et perspectives pour un développement durable. Mémoire de licence en économie monétaire et internationale, Kinshasa : Université Protestante au Congo, 2009.

    TOURE Fodé Saliou, La coopération de l'Afrique avec les pays « BRICS », une troisième voie pour le développement de l'Afrique ? Mémoire présenté comme exigence partielle de la maîtrise en sciences politiques, Montréal : Université du Québec, 2013, 185 p.

    Table des matières

    Introduction générale 10

    1. Etat de la question 10

    2. Problématique 11

    3. Hypothèse de travail 14

    4. Objet et intérêt du sujet 14

    5. Délimitation du sujet 15

    6. Méthodes et techniques utilisées 16

    6.1. Les méthodes 16

    6.2. Techniques 17

    7. Canevas 17

    CHAPITRE I: Considérations générales et théoriques 19

    1.1. Définitions et origines 19

    1.2. Les pays émergents 23

    1.2.1 Généralités 23

    1.2.2. Les grands pays émergents : les BRICS 28

    1.3. Les caractéristiques des pays émergents 39

    1.4. Les fondements et critères de l'émergence économique 44

    1.4.1. Les fondements de l'émergence 44

    1.4.2. Les critères d'analyse de l'émergence 48

    1.5. Les incidences de l'émergence sur les conditions sociales des populations des pays émergents 50

    1.6. L'émergence : influence politique et diplomatique 50

    Conclusion partielle 52

    CHAPITRE II : Présentation de la République Démocratique du Congo 53

    2.1. Le contexte politique des années 1960-2000 53

    2.2. Contexte économique de la période 1960-2000 54

    2.3. Présentation du pays et de ses atouts 57

    2.3.1. Présentation du pays 57

    2.3.2. Les ressources naturelles du pays 58

    2.3.3. Evolution de la population 68

    2.3.4. Infrastructures en République Démocratique du Congo 69

    2.4. L'économie congolaise après 2000 69

    2.4.1. La politique économique du gouvernement à partir de 2001 69

    2.4.2. Les résultats des politiques économiques menées 74

    Conclusion partielle 79

    Chapitre III : éléments fondamentaux, obstacles et analyse des perspectives pour l'émergence de la République Démocratique du Congo 80

    3.1. Les éléments fondamentaux pour l'émergence de la RDC 80

    3.1.1. La stabilité macroéconomique 80

    3.1.2. L'augmentation du niveau des exportations 82

    3.1.3. La recrudescence des investissements grâce aux diverses réformes visant l'amélioration du cadre des affaires et l'incitation à l'investissement 83

    3.1.4. La gouvernance politique, la qualité des ressources humaines, la poursuite de l'autosuffisance alimentaire et le développement des infrastructures 89

    3.2. Quels défis pour l'émergence de la RDC ? 95

    3.2.1. Les obstacles d'ordre économique 96

    3.2.2. Les obstacles d'ordre politique, institutionnel et culturel 105

    3.2.3. Les obstacles sociaux et environnementaux 108

    3.3. Quid de l'émergence en 2030 : analyse comparative RDC, BRIC et BENIVM 111

    Conclusion partielle 119

    Conclusion générale 120

    Bibliographie 124

    * 1 FAUJAS, A., Croissance en Afrique : coup de mou en 2015, selon la Banque Mondiale, Jeune Afrique, 2015, https://www.jeuneafrique.com/234748/economie/croissance-en-afrique-coup-de-mou-en-2015-selon-la-banque-mondiale/ (mis à jour le 22 septembre 2015).

    * 2 FMI, World Economic Outlook, April 2015.

    * 3 Taux obtenu sur base des données de la Banque Centrale du Congo.

    * 4 Revue Congolaise de politique économique. Vulnérabilité économique et résilience, Mars 2015, volume 1, numéro 1, page 1.

    * 5 Banque Centrale du Congo. Rapport sur la politique monétaire au premier semestre 2015, N°010-Février 2015.

    * 6 OCDE, Perspectives de la croissance dans le monde, 2015.

    * 7 Banque Centrale du Congo. Rapport sur la politique monétaire au premier semestre 2015, N°010-Février 2015.

    * 8 Banque Centrale du Congo, Condensé d'informations statistiques, Avril 2016.

    * 9 TSHIMANGA C., Cours de Collecte et analyse des données première licence, 2014-2015, inédit.

    * 10 TSHIMANGA C., Cours de Collecte et analyse des données première licence, 2014-2015, inédit.

    * 11LO M., L'émergence économique des nations : définition et mesure, P.3.

    * 12 Ibidem, P.8.

    * 13 La Corée du Sud ne parvient toujours pas à rattraper les USA en termes de revenus par habitant. Même si elle a fortement réduit le gap initial, son PIB par tête ne représentait que 54% en 2003 de celui des USA contre près de 11% en 1960. Si la tendance de convergence se maintient, elle ne pourra au mieux égaler le revenu par habitant des USA qu'après 2020, soit 60 ans après avoir commencé son processus de convergence.

    * 14 Pas le supérieur qui deviendra déterminant au fur et à mesure que le pays s'approche de la frontière technologique.

    * 15 Droits humains et démocratiques respectés, stabilité politique et absence de violence politique, efficacité du gouvernement, simplicité et rapidité des procédures administratives, respect des règles de droit et lutte contre la corruption.

    * 16 LO M., L'émergence économique des nations : définition et mesure.

    * 17 La société traditionnelle, les conditions préalables au décollage, le décollage, l'ère de la maturité, la société de la consommation de masse.

    * 18 ROSTOW W.W., Les cinq étapes de la croissance économique, Paris, Le Seuil, 1970, p.15.

    * 19 Base de données de la CNUCED, UNCTAD STATS.

    * 20 LAFARGUE F., « Des économies émergentes aux puissances émergentes », Questions Internationales, Septembre-Octobre 2011, P.103.

    * 21 En 2011 l'Afrique du Sud s'ajoute au BRIC qui devient BRICS.

    * 22 La Compagnie Française d'Assurance pour le Commerce Extérieur.

    * 23 En effet, plusieurs institutions contestent à l'Afrique du Sud sa place dans ce regroupement de pays émergents. D'aucuns pensent qu'elle n'est là que pour compléter le tableau en représentant l'Afrique. D'autres estiment que la Chine ayant proposé l'Afrique du Sud comme cinquième membre du BRIC en 2011, l'a fait en considérant que l'Afrique du Sud était une bonne voie d'accès à l'Afrique, et donc que cette insertion dans le groupe n'avait qu'une visée stratégique.

    * 24 SANNAT C., Les BRICS locomotive de l'économie mondiale [en ligne], Le contrarien, 2015, Disponible sur : www.lecontrarien.com/les-brics-locomotive-de-leconomie-mondiale-20-05-2015-economie. (05/10/2015)

    * 25 OMC, Statistiques Mondiales du Commerce 2015.

    * 26 DAZIANO L., Les pays émergents, approche géo-économique, Armand Colin, Collection U, 2014.

    * 27 SANNAT C., Les BRICS locomotive de l'économie mondiale [en ligne], Le contrarien, 2015, Disponible sur : www.lecontrarien.com/les-brics-locomotive-de-leconomie-mondiale-20-05-2015-economie. (05/10/2015)

    * 28 TOURE F.S., La coopération de l'Afrique avec les pays « BRICS », une troisième voie pour le développement de l'Afrique ? Mémoire présenté comme exigence partielle de la maîtrise en sciences politiques, Montréal : Université du Québec, 2013, 185 p, p. 9

    * 29 Résultats obtenus après des calculs effectués sur la base des données du FMI et de la Banque Mondiale.

    * 30 FMI et Banque mondiale, Avril 2016.

    * 31 TOURE F.S., op.cit.

    * 32 OMC, Statistiques Internationales du Commerce 2015.

    * 33 TOURE F.S., op.cit. P.9

    * 34 F. LAFARGUE, « Des économies émergentes aux puissances émergentes », Questions Internationales, Septembre-Octobre 2011

    * 35 Banque Centrale du Congo, Condensé d'informations statistiques, Juillet 2016.

    * 36 Données de l'OMC, Statistiques Internationales du Commerce 2010.

    * 37 La politique de l'Economic Development Board (EDB), Bureau créé par le gouvernement singapourien pour faciliter, et éventuellement subventionner les investissements étrangers, tant que Singapour y a un intérêt.

    * 38 KOULIBALY M., « Pourquoi certains pays sont émergents et d'autres pas ? », Audace Institut Afrique.

    * 39 SALAMA P., Des pays toujours émergents ?, La documentation française, Paris 2014, Collection Doc' en poche Place au débat.

    * 40 LO M., Emergence et transformation structurelle.

    * 41 Economie de la République Démocratique du Congo, disponible sur : https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Economie_de_la_République_démocratique_du_Congo

    * 42 Les années Mobutu (1965-1989) : l'accroissement exponentiel d'une dette odieuse.

    * 43 ULLOA, A. SCHEUERMAIER, M. BAISSAC, C. Chapitre 4 : Contraintes à la croissance économique République Démocratique du Congo. In : HERDERSCHEE, J. MUKOKO SAMBA, D. TSHIMENGA TSHIBANGU, M. Résilience d'un géant africain : accélérer la croissance et promouvoir l'emploi en République Démocratique du Congo, volume I : Synthèse, contexte historique et macroéconomique. Kinshasa : MEDIASPAUL, 2012. P.176

    * 44 Banque Centrale du Congo, Condensé d'informations statistiques, Juillet 2016.

    * 45 Calculé sur base des données issues du Bulletin d'informations statistiques de la banque Centrale du Congo, Avril 2016.

    * 46 Aperçu sur les ressources minérales de la République Démocratique du Congo, document numérique.

    * 47 MATATA PONYO, Pour un Congo émergent, Editions Privé, Paris, 2016.

    * 48 ITIE RD Congo, Industries extractives, https://eiti.org/fr/republique-democratique-du-congo, cité dans WEERTS Audrey, Ressources naturelles au Kivu : vers l'institutionnalisation du pillage ?

    * 49 BRAECKMAN C., Les nouveaux prédateurs. Politiques de puissances en Afrique centrale, Paris, Fayard, 2009 (2ème édition) cité dans WEERTS Audrey, Op.cit.

    * 50 Copper : cuivre ; tin : étain ; coal : charbon ; gold : or ; oil : pétrole ; tin belt : ceinture d'étain ; copper belt : ceinture de cuivre

    * 51 Banque Centrale du Congo, Condensé d'informations statistiques, Juillet 2016.

    * 52 Base de données de la Banque Mondiale.

    * 53 Wikipedia, Démographie de la République Démocratique du Congo [en ligne]. Disponible sur https://fr.wikipedia.org/wiki/Démographie_de_la_République_Démocratique_du_Congo

    * 54 KAMPIKA NTUMBA F., Dette extérieure des PPTE, enjeux et perspectives pour un développement durable, 2009. Inédit

    * 55Ministère de l'Economie Nationale de la RDC, Politique Economique du gouvernement 2001-2030 [en ligne], 25 Novembre 2015. Disponible sur https:/mineconomie.gouv.cd/spih.php?article5

    * 56 Calculs effectués sur base des données de la BCC.

    * 57 Idem.

    * 58 Idem.

    * 59 Banque Centrale du Congo, Condensé d'informations statistiques Juillet 2016.

    * 60 KABANGA D., Cours de questions approfondies d'économie de développement 2010-2011, P.56, Inédit.

    * 61 ANAPI, Volume des investissements directs étrangers. Fiche technique sur les investissements en RDC [en ligne], 01er Février 2016. Disponible sur : https://investindrc.cd/fr/generalites-sur-la-rdc/environnement-economique-des-investissements/volume-des-investissements-directs-etrangers

    * 62 Guichet Unique de Création d'Entreprise, République Démocratique du Congo, [en ligne] https:/www.fr.guichetunique.cd

    * 63 World Bank Group, Doing business 2016 : mesure de la qualité et de l'efficience du cadre réglementaire.

    * 64 Banque Mondiale, Rapport Doing Business 2016.

    * 65 KINZOUNZA F., Les trois leviers de l'émergence en Afrique, P.4, Brazzaville, Novembre 2013.

    * 66 Fondements de l'émergence : le cas de la Chine expliqué aux journalistes ivoiriens, @bidj@n.net, Mai 2015. Disponible sur https:/www.news.abidjan.net/h/551893.html

    * 67 MATATA PONYO, op. Cit.

    * 68 Ministère de la Fonction Publique, Arrêté N°CAB.MIN/FP/J-CK/ENA/CJ-LID/GMK/004/2015 du 19 Février 2015 instituant les grands axes du programme de formation à l'Ecole Nationale d'Administration.

    * 69 Ministère du Budget, Budget citoyen 2015, P.8, Kinshasa, Février 2015.

    * 70 CNUCED, Rapport sur l'investissement dans le monde 2013, P. 25, Nations Unies, New York et Genève, 2013.

    * 71 CNUCED, Op. Cit., P.22.

    * 72 CNUCED, Op. Cit., P.23.

    * 73 Wikipedia, Technopole [en ligne]. Disponible sur https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Tecnopole

    * 74 KINZOUNZA F., Op.cit.

    * 75 LO M., L'émergence économique des nations : définition et mesure.

    * 76 PNUD, Note technique : Priorités de développement 2017-2021, République Démocratique du Congo.






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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984