FACULTY OF LAW
AND POLITICAL SCIENCE
P.O BOX: 1365 Soa
Tel: (237)22 06 26 98 / Fax (237) 22 23 84
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FACULTE DES SCIENCES
JURIDIQUES ET POLITIQUES
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L'AFRICOM DANS LA POLITIQUE AMERICAINE DE SECURITE EN
AFRIQUE : L'EVOLUTION DOCTRINALE A L'EPREUVE DES CONTRAINTES
GEOSTRATEGIQUES
Mémoire présenté et soutenu
publiquement en vue de l'obtention du Master en science politique
Par :
FOUMANE André Désiré V
Sous la direction de :
PR. WULLSON MVOMO ELA
Historien des Relations Internationales,
Stratégiste,
Directeur du Centre de Recherches de
l'EIFORCES,
Enseignant à l'IRIC, à l'EIFORCES et
à l'ESIG
Année académique 2012-2013
AVERTISSEMENT
Les opinions exprimées dans ce mémoire sont
purement personnelles à son auteur et n'engagent que lui. Elles ne
traduisent en rien, la position officielle de l'université de
Yaoundé II.
DEDICACES
A notre mère, Madame FOUMANE née TANGONO
AKONO Marie pour son soutien et éducation ;
A notre grand Frère, FOUMANE André
Désiré pour son soutien.
REMERCIEMENTS
Nos remerciements s'adressent à nos parents qui
ont consenti tous leurs efforts pour prendre soin de nous et améliorer
notre condition d'homme ; ainsi qu'à nos frères et soeurs
pour leur soutien moral, financier et matériel.
Nous exprimons aussi notre sincère gratitude
à notre directeur de mémoire, le Pr. Wullson MVOMO ELA, pour son
orientation et son encadrement tout au long de cette recherche. Nous exprimons
également nos remerciements aux responsables de l'Ecole
Supérieure Internationale de Guerre (ESIG), où nous avons en
grande partie mené cette étude. Nous pensons aux colonels BOUBA
BAKARI, chef de Groupement Enseignement Général, SEME ANDONG
Pierre, chef de Groupement Enseignement Opérationnel et ETOUNDI
Emmanuel, chef de la Division Soutien, qui ont fait preuve de
disponibilité et d'attention à notre égard.
Nous ne saurions oublier d'adresser un merci
particulier aux stagiaires de la neuvième promotion de l'ESIG. Notamment
au Commandant KUMA Pley, officier supérieur américain qui nous a
beaucoup renseigné sur les activités militaires
américaines ; au colonel BILOA, ainsi qu'au commandant MELOU
Hervé. Nous pensons aux officiers originaires de divers Etats africains
qui nous ont édifiés sur les activités militaires
américaines dans leurs Etats respectifs.
LISTE DES SIGLES ET DES ABREVIATIONS
ACOTA: Africa Contingency Operations Training
Assistance
ACRF: Africa Crisis Response Forces
ACRI: Africa Crisis Response Initiative
ADM: Armes de Destruction Massive
AGOA: Africa Growth and Opportunity Act
AIEA: Agence Internationale de l'Energie
Atomique
AIS : Automatic Identification System
AMISOM : Mission de l'Union Africaine en
Somalie
APS : Africa Partnership Station
AQMI : Al-Qaïda au Maghreb
Islamique
ATA : Anti-Terrorism Assistance
BAMOSD : Mouvement Pour
l'Auto-détermination de Bakassi
BMI : Bureau Maritime International
CEDEAO: Communauté Economique des
Etats d'Afrique de l'Ouest
CEEAC: Communauté Economique des Etats
de l'Afrique centrale
CESA : Centre Africain d'Etudes
Stratégiques
CGG : Commission du Golfe de
Guinée
CIJ : Cour Internationale de Justice
CIRGL : Conférence Internationale
sur la Région des Grands Lacs
CJTF-HOA: Combined Joint Task-Force Horn of
Africa
CMC : Centre Multinational de
Coordination
COM : Centre Opérationnel de la
Marine
COPAX : Conseil de Paix et de
Sécurité de l'Afrique Centrale
CRESMAC :Centre Régional de
Sécurité Maritime de l'Afrique Centrale
CSL: Cooperative Security Location
DNI: Director of National Intelligence
DOD: Department of Defense
DOS: Department of State
EACTI: East Africa Counter-terrorism
Initiative
EARSI: East Africa Regional Strategic
Initiative
ESF: Economic Support Funds
ESIG : Ecole Supérieure
Internationale de Guerre
FIS : Front Islamique du Salut
FOS : Foward Operating Site
FUC : Front Uni pour le Changement
GAO: U.S. Government Accountability Office
GFT: Gouvernement Fédéral de
transition
GIA: Groupe Islamique armé
GSPC: Groupe Salafiste pour la
Prédication et le Combat
GWOT: Global War On Terror
IAEA: Initiative Anti-terroriste pour
l'Afrique de l'Est
IMET: International Military Education
Training
IMO: International Maritime Organization
INCLE: International Narcotics Control and
Law Enforcement
INR: Bureau of Intelligence and Research
LRA: Armée de Résistance du
Seigneur
MAIB: Mouvement pour
l'Autodétermination de l'Ile de Bioko
MCC: Millennium Challenge Corporation
MCTF: Marines Corps Task Force
MDJT: Mouvement pour la Démocratie et
la Justice du Tchad
MEDCAP: Medical Civil Action Program
MEND: Mouvement pour l'Emancipation du Delta
du Niger
MNLA: Mouvement National de Libération
de l'Azawad
MOB: Main Operating Base
MOOTW: Military Opérations Other Than
War
MUJAO: Mouvement pour l'Unicité et le
Djihad en Afrique de l'Ouest
NADR: Nonproliferation,
Antiterrorism,Demining and Related programs
NDAA: National Defense Autorisation Act
NDPVF : Force des Volontaires du Peuple
du Delta du Niger
OEF-HOA: Operation Enduring Freedom-Horn of
Africa
OEF-TS: Operation Enduring
Freedom-Trans-Sahara
ONLF: Ogaden National Liberation Front
OTAN: Organisation du Traité de
l'Atlantique Nord
PKO: Peacekeeping Operations
PSI: Initiative Pan-Sahel
QDR: Quadrennial Defense Review
RAF: Regionally Aligned Force
RDC : République
Démocratique du Congo
RMA: Révolution des les Affaires
Militaires
RSR: Renseigement, Surveillance,
Reconnaissance
SACEUR: Supreme Allied Commander Europe
SOF: Special Operations Forces
SPRI: Scott Polar Research Institute
TSCTP: Trans-Sahara Counter-terrorism
Partnership
URSS: Union des Républiques
Socialistes Soviétiques
USA: Etats-Unis d'Amérique
USAF: United States Air Force Africa
USAFRICOM: United States Africa Command
USARAF: United States Army Africa
USCENTCOM: United States Central Command
USD: United-States Dollar
US EUCOM: United States European Command
USNAVAF: United States Naval Force Africa
USNORTHCOM: United States Northern Command
USOCAFRICA: United States Special Operations
Command Africa
USPACOM: United States Pacific Command
USSOCOM: United States Special Operations
Command
USSOUTHCOM: United States Southern Command
USTRANSCOM : United States
Transportation Command
UTI : Union de tribunaux islamiques
VETCAP: Veterinary Civil Action Program
ZEE : Zone Economique Exclusive
LISTE DES ILLUSTRATIONS
Les Cartes:
Carte n°1: Zone de responsabilité des
commandements militaires américains. Sources:
www.wikipedia.org,
Consulté le 7 juillet 2013;
Carte n°2 : le terrorisme en Afrique. Sources :
journal.liberation.fr
, consulté le 7 Septembre 2014;
Carte 3 : ZEE dans le Golfe de Guinée. Sources:
http://aquaculture-aquablog.blogspot.com/2010/01/afrique-de-grands-pecheurs-ruines-par.html,
consulté le 2 Avril 2014;
Carte n° 4: bases de surveillance américaines en
Afrique. Sources:
www.jeuneafrique.com,
consulté le 5 Septembre 2014.
LISTE DES ANNEXES
ANNEXE I : carte du Golfe de Guinée (prise de vue
satellite), Source :
www.memoireonline.com,
consulté le 6 Septembre 2014 ;
ANNEXE II : les ressources pétrolières du
Golfe de Guinée, source : BP Statistical Review of World energy,
2002 ;
ANNEXE III : La piraterie maritime en
2012,Source :
http://lechoduchampdebataille.blogspot.com/2012/01/lutte-contre-la-piraterie-maritime.html,
consulté le 6 Septembre 2014.
ANNEXE IV : Les initiatives militaires
américaines en Afrique depuis 2002,Source :
www.mémoireonline.com,
consulté le 6 Septembre 2014 ;
ANNEXE V: Regional Program Funding,
v Table 1: East Africa Regional Strategic Initiative
(EARSI), Source: PKO, NAD and INCLE figures provided by the U.S. Department of
State Bureau of African Affairs.$, in thousands;
v Table 2. Assistance Provided through Section 1206 of the
FY2006 NDAA $, in thousands, Source: U.S. Department of Defense.
ANNEXE VI: Résolution 2039 du conseil de
sécurité de l'ONU, adoptée le 29 Février 2012 et
concernant la sureté et la sécurité maritimes dans le
golfe de Guinée ;
ANNEXE VII : Communiqué final des chefs
d'Etats et de gouvernements de la CEEAC, de la CEDEAO et de la CGG sur la
sureté et la sécurité maritimes dans le golfe de
Guinée ;
ANNEXE VIII : Mémorandum d'entente entre la
CEEAC, CEDEAO et la CGG sur la sureté et la sécurité dans
l'espace maritime de l'Afrique Centrale et de l'Ouest
RESUME
Depuis les attentats des ambassades américaines
en Afrique de l'Est et surtout ceux du 11 Septembre 2001, l'Afrique, qui
n'était que périphérique dans la planification
stratégique américaine, du coup, a acquis de l'importance.
Considéré comme étant un terreau du terrorisme
international, elle fait l'objet d'une attention particulière.
D'où la création d'un commandement unifié qui lui est
dédié. Dans la mesure où elle est née dans un
environnement stratégique particulier, cette structure est
encadrée par une nouvelle doctrine qui insiste plus sur la
prévention des conflits. C'est pourquoi dans ses activités
quotidiennes, l'AFRICOM met l'accent sur le renforcement des capacités
des armées africaines. L'objectif officiel de cet effort est de
permettre aux partenaires d'assurer leur propre sécurité face aux
nouvelles menaces. Pour assurer la réalisation de cette évolution
doctrinale, ce commandement s'attèle également à la
conduite d'activités civiles et humanitaires. Mais face aux enjeux qui
existent sur le continent africain, l'opérationnalisation de la nouvelle
approche sécuritaire se trouve quelque peu mise à mal. Les
américains demeurant fidèles à leur culture
stratégique qui met en bonne place, la mobilisation et l'utilisation de
l'outil militaire dans le déploiement extérieur. Ce qui
prédispose l'AFRICOM à renforcer une présence militaire
sur le terrain. Et ce loin de la bienveillance et de l'altruisme profus dans le
discours officiel américain.
MOTS CLES : AFRICOM ;
doctrine ; culture stratégique ; contraintes
géostratégiques.
ABSTRACT
Since the attacks on American embassies in East Africa and
especially those of September 11, 2001, Africa, which was only peripheral in
American strategic planning, so, has gained importance. Considered as a
breeding ground for international terrorism, it is the subject of special
attention. Hence the creation of a unified command dedicated to it. Born from a
particular strategic environment, this structure is framed by a new doctrine
that puts more emphasis on conflict prevention. That is why in his daily
activities, AFRICOM focuses on strengthening the capacity of African armies.
The official aim is to enable them to provide their own security against new
threats. To ensure the realization of this doctrinal evolution, this command is
also conducting civil and humanitarian activities. But faced with the
challenges that exist on the African continent, the implementation of the new
security approach is somewhat undermined. This is because Americans remain tied
to their strategic culture that prominently gives preference to the
mobilization and use of the military tool in the US foreign deployment. That
predisposes AFRICOM to strengthen a military presence on the ground. Far from
the benevolence and altruism professed in American public communication.
KEY WORDS: AFRICOM; doctrine; strategic
culture; geostrategic constraints.
SOMMAIRE
AVERTISSEMENT.......................................................................................I
DEDICACES.............................................................................................II
REMERCIEMENTS III
LISTE DES SIGLES ET DES ABREVIATIONS IV
LISTE DES ILLUSTRATIONS VIII
LISTE DES ANNEXES IX
RESUME X
ABSTRACT XI
SOMMAIRE XII
INTRODUCTION 1
PREMIERE PARTIE : L'AFRICOM ET LE
RENFORCEMENT DES CAPACITES DES ARMEES AFRICAINES 23
CHAPITRE I : LA PLACE DE LA
FORMATION MILITAIRE DANS L'AGENDA DE L'AFRICOM 26
CHAPITRE II : UNE
APPRECIATION CRITIQUE DE L'ASSISTANCE SECURITAIRE AMERICAINE EN AFRIQUE
49
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE 74
DEUXIEME PARTIE : L'AFRICOM DANS LE
RENFORCEMENT DE LA PRESENCE MILITAIRE AMERICAINE EN AFRIQUE 75
CHAPITRE III : LA PLACE
MARGINALE DE LA DIPLOMATIE DANS LES ACTIONS DE L'AFRICOM 78
CHAPITRE IV: L'AFRICOM: UN
COMMANDEMENT FIDELE A LA CULTURE STRATEGIQUE AMERICAINE 101
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE 126
CONCLUSION GENERALE 127
BIBLIOGRAPHIE 132
ANNEXES 144
TABLE DES MATIERES 145
INTRODUCTION
I. CONTEXTE DE L'ETUDE
Depuis la chute du mur de Berlin, la politique
africaine des Etats-Unis, qui jusque-là était concentrée
sur l'endiguement du communisme connait une réorientation. Ce continent
qui était alors considéré comme un appendice colonial de
l'Europe occidentale1(*)
fait désormais l'objet d'une relative attention. Washington s'y
attèle depuis lors à la consolidation de la démocratie,
l'enrayage des crises, le soutien au développement économique ou
encore la lutte contre les pandémies2(*). Avec la décennie 1990, marquée par les
attentats des ambassades américaines de Dar es-Salaam et de Nairobi en
Août 1998, l'Afrique se révèlera comme un terrain fragile
et favorable au terrorisme international. Un phénomène qui
atteindra d'une manière inédite le territoire américain,
le 11 Septembre 2001 avec les attentats de New York et de Washington. En
réponse, l'administration Bush lance une riposte planétaire
contre le terrorisme ou encore Global War On Terror3(*). Cette action anti-terroriste
s'étendra aussi au continent africain. Il s'agit d'une implication
sécuritaire qui aboutit, le 6 Février 2007, à l'annonce
par le président G. W. Bush, de la création d'un commandement
unifié pour l'Afrique. Ce qui apparait comme un tournant majeur et un
acte inédit dans la politique africaine des Etats-Unis, et cela pour
deux raisons. Premièrement, avant la création de ce commandement,
le déploiement militaire américain y était assuré
par trois commandements différents. Il s'agit du Commandement Central
(US CENTCOM), du Commandement du Pacifique (US PACOM) et du Commandement
européen (US EUCOM)4(*). Chacun d'eux abordant les questions de
sécurité en Afrique selon ses approches. Or un tel partage ne
permettait pas aux Etats-Unis de mettre sur pied une politique de
sécurité cohérente. La deuxième raison traduisant
l'originalité de cet acte posé par l'administration Bush
concerne le passage d'une coordination civile à une coordination
militaire des activités sécuritaires américaines en
Afrique. Car, avant la création de l'AFRICOM, celles-ci étaient
sous la responsabilité du Département d'Etat qui, aujourd'hui,
est quelque peu en deuxième ligne. La primauté étant
désormais reconnue au Département de la Défense. Cela
consacre la militarisation de la politique américaine en Afrique.
Puisque Plusieurs tâches civiles sont remplies par des militaires. Il en
est ainsi de l'assistance humanitaire, du développement
économique, de l'assistance civique ou encore de l'assistance
sanitaire5(*). Cette
nouvelle approche tranche avec l'approche sécuritaire post-bipolaire des
Etats-Unis en Afrique, qui s'est caractérisée par une
marginalisation relative du continent dans la planification stratégique
américaine. Cela était perceptible lors de l'entrée,
à la Maison Blanche de G. W. Bush. Ce dernier pensant que ce continent
ne correspondait pas aux intérêts stratégiques nationaux
des Etats-Unis, d'où son hostilité aux opérations de
rétablissement de la paix en Afrique6(*). Mais cet état de chose sera rapidement remis
en cause par les attentats du 11 Septembre 2001. Le chef de fil du
réseau Al-Qaïda ayant séjourné en Afrique,
notamment au Soudan. C'est quelques années plus tard que le
président Bush, avec beaucoup de réalisme mettra sur pied, le
commandement américain pour l'Afrique. Par ailleurs cet
événement historique intervient dans un contexte marqué
par la percée sur le continent africain, de puissances émergentes
comme la Chine, le Brésil ou encore l'Inde. A cela s'ajoute le
délabrement de l'environnement sécuritaire du Golfe
Arabo-persique, par ailleurs source d'approvisionnement important de Washington
en ressources énergétiques. Or avec 100 milliards de barils
prouvés7(*),
l'Afrique se présente comme une alternative fiable sur le plan de la
sécurité énergétique des Etats-Unis. Même si
ce nouvel outilgéopolitique semble être fondamental pour relever
de tels défis, il butte cependant sur une certaine prudence et
même une inquiétude de la part des africains. L'on peut
aisément comprendre sur cette base, la prolifération de
déclarations de la part des autorités américaines. Et ce
dans la perspective de rassurer les sceptiques. On peut dans ce sens, lire sur
le site du Commandement Américain pour l'Afrique que l'AFRICOM cherche
à « bolser security on the continent, to prevent and
respond to humanitarian crises, to improve cooperative efforts with African
nations to stem transnational terrorism, and to sustain enduring efforts that
contribute to African unity »8(*). Au-delà de ce discours officiel, ce travail se
propose d'analyser la réalité du déploiement de cette
institution sur le continent africain. Ce qui revient à interroger les
intentions fondamentales qui ont motivé la création d'un
commandement spécifiquement dédié à l'Afrique.
II. INTERET DU SUJET
Sur le Plan heuristique, ce travail a le
mérite d'analyser la mise sur pied de l'AFRICOM à l'aune de
l'évolution doctrinale que connait la politique américaine de
sécurité en Afrique. Il montre notamment comment la puissance
américaine essaie de s'adapter à l'évolution de
l'environnement stratégique africain. Et ce afin de faire face aux
nouveaux défis sécuritaires qui s'y posent. En tant qu'outil
géopolitique, le commandement américain pour l'Afrique
permettrait dans ce sens aux USA, de mieux faire face aux enjeux
géostratégiques qui existent sur ce continent. Au-delà des
déclarations officielles faisant état de la bienveillance des
autorités américaines, nous essayons d'explorer la
réalité du déploiement de cette institution sur le terrain
ainsi que les variables qui conditionnent ce comportement. L'on essaye
également de mettre en exergue, l'émergence de l'Afrique comme
nouveau pivot géostratégique. Du fait de la compétition
dont elle fait désormais l'objet entre les grandes
puissances.Relativement aux menaces non conventionnelles qui règnent sur
le continent, ce travail tente une explication de la difficile adaptation des
solutions américaines à l'évolution de l'environnement
sécuritaire. L'on insiste notamment sur la place de la culture
stratégique américaine dans le déploiement de la nouvelle
institution. Par ailleurs, ce travail met en lumière les grandes
tendances qui caractérisent l'assistance militaire américaine en
Afrique, ainsi que les principales variables qui la structurent. Au-delà
de sa mission officielle, nous explorons d'autres fonctions de cette
assistance. Celle-ci est de plus en plus utilisée comme tremplin devant
favoriser la percée militaire de Washington sur le terrain.
Sur le plan pratique, ce sujet permettrait
aux autorités politiques et militaires africaines de se rendre à
l'évidence de ce que représente pour leurs Etats, l'implication
progressive des Etats-Unis dans les questions sécuritaires sur le
continent. Celles-ci pourraient aussi s'interroger de manière lucide sur
les enjeux de la création d'un commandement unifié pour
l'Afrique. Elles pourraient de cette façon avoir une idée claire
sur le type de rapports qu'il faudrait entretenir avec l'AFRICOM. En ce moment
où l'Afrique essaie de construire une architecture de paix et de
sécurité, ce travailtente une mise en lumière des revers
qui pourraient accompagner une adhésion aveugle des africains aux
programmes sécuritaires américains. Cela pourrait leur permettre
d'éviter la perte du contrôle de ce dispositif sécuritaire
en gestation. Elles pourraient ainsi maîtriser les problématiques
sécuritaires sur le continent. C'est la conscience géopolitique
des africains qui est à ce niveau interpelée. Et ce dans la
mesure où ils peinent à mettre sur pied, un dispositif
sécuritaire autonome à l'échelle continentale. Une
situation qui les rend dépendants de l'assistance sécuritaire
étrangère. Or c'est ce soutien exogène qui favorise la
percée des forces impérialistes sur leur sol. C'est notamment le
cas de l'AFRICOM.
III. CONSTRUCTION DE L'OBJET
Elle passe par la clarification conceptuelle
(1) et la délimitation du sujet
(2).
1. Clarification conceptuelle
a. L'AFRICOM
Ce concept désigne le sixième
commandement combattant que les Etats-Unis ont créé et qui
concerne le continent Africain. Sa création avait été
annoncée le 6 Février 2007 par l'administration Bush, dans la
cadre de l'Unified Command Plan. Il entre officiellement en fonction
le 1er Octobre 2008. Jusqu'ici, sa base est restée à Stuttgart en
Allemagne, au centre du commandement européen (EUCOM). Et ce, du fait de
l'hostilité des autorités africaines à l'installation de
celle-ci sur leur sol9(*).
Ce commandement unifié est venu se substituer à trois autres qui,
jusqu'alors assuraient la responsabilité des activités
sécuritaires américaines en Afrique. Il s'agit de l'US EUCOM, de
l'US PACOM et de l'US CENTCOM. Cependant, l'AFRICOM diffère en principe
des autres en ceci qu'il n'a pas vocation à faire la guerre. En fait,
Pour Henry Ryan, un haut responsable du ministère américain de la
défense, cette structure n'a ni vocation à lutter contre le
terrorisme ni à endiguer l'offensive chinoise10(*). Donc, officiellement, ce
commandement a pour but de protéger les intérêts de
sécurité nationale des Etats-Unis par le renforcement de la
capacités militaires des pays africains et des organisations
régionales, et si nécessaire, par la conduite des
opérations militaires afin de combattre la criminalité
internationale et de créer un environnement de paix susceptible de
garantir la bonne gouvernance et le développement durable en
Afrique11(*).
Carte n°1: Zone de responsabilité des commandements
militaires américains. Sources:
www.wikipedia.org12(*)
b. POLITIQUE AMERICAINE DE SECURITE (en
Afrique) :
Après les années de Guerre Froide
pendant lesquelles le déploiement américain en Afrique
était essentiellement structuré par l'endiguement du communisme,
c'est à partir des années 1990 que l'on peut parler d'une
véritable implication de Washington dans les problématiques
sécuritaires africaines. En réalité, la politique
africaine des Etats-Unis en matière de sécurité depuis la
chute du mur de Berlin peut s'appréhender en trois phases. La
première qui va de 1991 à 1994 est celle dite de l'engagement.
Initié sous Bush Sr, l'accent était mis sur les questions
humanitaires avec pour point culminant la participation de Washington à
la mission des Nations Unies en Somalie en 199213(*). La deuxième phase va de 1994 à 1998,
avec pour postulat que les Etats-Unis n'avaient qu'un intérêt
limité en Afrique. D'où la non-intervention au Rwanda en 1994. La
dernière phase va de 1998 à 2001. Il s'agit de la réponse
aux attentats des ambassades américaines en Afrique de l'Est et surtout
aux attaques des Twin Towers14(*). Ce dernier événement a
donné à l'Afrique, une importance aux yeux de Washington. Pour
être quelque peu complet sur la question de la politique de
sécurité américaine sur le continent, l'on peut ajouter
une dernière phase qui va du 6 Février 2007 à nos jours.
Elle commence par la création de l'AFRICOM qui est un acte inédit
dans l'histoire américano-africaine.
c. DOCTRINE :
Généralement, toute action stratégique se
réalise selon un répertoire opérationnel. Le contenu de ce
dernier très souvent, varie selon le contexte et les circonstances. Il
s'arrime à l'évolution de l'environnement. C'est une relecture
des finalités politiques en fonction des défis auxquels on fait
face. Ce cadre variable qui régit l'action stratégique peut
porter le nom de doctrine. Ce concept désigne plus
spécifiquement, l'ensemble des conceptions qui sous-tendent une
stratégie. Elle opère un choix parmi la diversité des
solutions envisagées par la théorie en fonction des circonstances
et des besoins du moment15(*). Elle peut également être
assimilée comme une construction intellectuelle qui formule le savoir
jugé nécessaire et suffisant pour guider les personnels
militaires - mieux l'ensemble des forces - dans leur action
opérationnelle. Dans ce sens, elle prescrit les règles et les
conditions optimales de leurs conduites d'action16(*). Par ailleurs, la doctrine
fournit aux chefs à différents niveaux, des principes pour
organiser les moyens dont ils disposent et elle énumère des modes
d'action possible parmi lesquels ils peuvent choisir en fonction du
contexte17(*). Ceci montre
que d'une manière générale, toute doctrine est
amenée à évoluer, à connaître des
transformations. C'est ce qui la différencie fondamentalement de la
culture.
v De la différence entre doctrine et
culture
Le débat relatif à la permanence et à la
contingence des méthodes régissant l'action stratégique
renseigne sur la cloison qui existe entre ces deux concepts. La culture
stratégique a été consacrée depuis les
années 1980 par les relations internationales et les études
stratégiques. L'idée la plus saillante qui est ici mise en
exergue est celle selon laquelle les actions des autorités sont
influencées et orientées par l'expérience et les
préférences historiques18(*). Les expériences historiques occupent ici, une
place primordiale dans la mesure où elles se sédimentent dans le
répertoire d'actions des sociétés. Elles leur offrent
ainsi un ensemble de solutions applicables à différentes
situations. Cette fidélité à l'histoire est soutenue par
Ken BOOTH. Pour lui en effet, l'histoire est l'introduction idéale aux
études stratégiques. Car c'est elle qui permet de comprendre les
traditions nationales et les idiosyncrasies de la pensée
stratégique ; elle seule donne une idée de la
complexité des causes et de la dynamique des
évènements ; elle montre ce qui est durable et ce qui est
transitoire19(*). Cette
posture aboutit à l'élaboration de lois et de règles
relatives aux invariants de toute action stratégique. C'est la position
des « scientifiques » à la tête desquels se
trouve JOMINI.
La culture s'oppose à la doctrine dans le
mesure où la dernière, loin de s'atteler à mettre en
évidence, des invariants, insiste sur l'efficacité pratique. Dans
la perspective de Colin S. GRAY, la doctrine enseigne ce qu'il faut faire et
comment être préparé à le faire20(*) ; elle explique les
objectifs, identifie les tâches et façonne les outils de
l'organisation ; elle aide une organisation militaire - ou une
société - à entretenir la cohésion interne sur la
manière de se préparer et de poursuivre les
opérations21(*).
Elle précise, pour ce faire, les règles et les procédures
permettant de conduire l'action22(*). Même si elle s'attèle à fixer un
guide pour l'action, force est de préciser que celui-ci n'est valable
que dans un environnement donné. Le contenu doctrinal étant sujet
à des transformations afin de prévenir la
désuétude. L'objectif est également de produire un
répertoire d'actions producteur d'efficacité. De ceci, l'on peut
retenir que la doctrine est l'ensemble de principes définis dans un
contexte spécifique, destinés à régir l'action,
l'organisation et l'emploi des forces afin d'atteindre les buts
stratégiques.
v De la nature de la doctrine
Dans son acception traditionnelle, elle se limitait au
domaine militaire. Il s'agissait de permettre au général de mener
ses batailles avec la plus grande efficacité. Elle se fixait pour but
d'amener à la bataille, le maximum de moyens dans les conditions les
plus favorables23(*).
Cette approche était pertinente à l'époque où la
stratégie pouvait encore se limiter à l'art du
général. L'action stratégique pouvait encore être
perçue comme étant limitée au seul domaine
opérationnel comme le montrait JOMINI24(*). Mais avec l'élargissement contemporain de ce
domaine, la doctrine a vu son champ s'élargir pour englober non
seulement la guerre mais aussi les opérations autres que la guerre ou la
manoeuvre de crise25(*). A
l'époque contemporaine, la doctrine n'est plus limitée à
la seule autorité militaire. Cet acteur traditionnel est de plus en plus
concurrencé par le pouvoir politique. Celui-ci intervenant
désormais tant dans la définition des moyens que dans leur mise
en oeuvre, y compris sur le terrain26(*).
d. CONTRAINTES GEOSTRATEGIQUES
Au-delà des discours et des intentions,
l'environnement stratégique est constitué
d'éléments qui peuvent rendre caduques toutes les
prévisions. Cet environnement est constitué de
réalités et de contraintes dont la complexité est traduite
dans le concept même de stratégie. En tant qu'art de l'action
finalisée, volontaire et difficile, la stratégie est au coeur de
la praxéologie ou science de l'action27(*). La difficulté de cette action est liée
à un ensemble d'obstacles et de contraintes. C'est toute la substance de
l'incertitude dont parle CLAUSEWITZ28(*). La réalisation des objectifs d'une action
stratégique est profondément conditionnée par la
configuration des forces en présence. Elle nécessite des moyens
conséquents qui relèvent de la rationalité des acteurs.
Le besoin des américains de réaliser
leurs objectifs en Afrique est mis à l'épreuve par certaines
contraintes. Celles-ci sont d'abord stratégiques dans la mesure
où elles entravent une meilleure conduite des actions des USA sur le
continent. Elles sont géostratégiques dans la mesure où
elles relèvent de l'échelle macrogéographique.
C'est-à-dire une dimension spatiale suffisante pour exclure la
constitution d'un théâtre unique29(*). Les contraintes auxquelles les USA font face
aujourd'hui s'étendent à l'échelle de tout le continent
africain. Leur prise en compte devrait permettre à Washington de
perpétuer son influence à l'échelle globale. Parmi elles,
l'on peut citer la présence grandissante de la Chine et d'autres Etats
émergeants sur le continent, la croissance de nouvelles menaces qui
entravent son accès aux ressources énergétiques. La
stratégie de compétition chinoise par exemple, est basée
sur le « Consensus de Beijing ». Contrairement au
« Consensus de Washington », celui-ci vise un
« développement sans condition »30(*). Par ailleurs, les
exportations africaines vers Pékin ont cru de 40%. Elles sont en effet
passées de 4,8 millions en 2001 à 28.8 millions USD en
200631(*). A cela
s'ajoutent les nombreuses menaces qui planent sur les intérêts
américains sur le continent. C'est le cas de la piraterie maritime ou
encore du terrorisme. Tout ceci montre que le déploiement de la
puissance américaine en Afrique se fait face à des
réalités assez complexes qui entravent sans cesse ses actions. Ce
qui nécessite une posture assez particulière.
2. Délimitation du sujet
La délimitation du sujet se fait sur le plan
spatial (a) et sur celui temporel (b).
a. Délimitation spatiale
Le cadre spatial de notre travail est l'Afrique.
Puisque ce continent, qui aujourd'hui, compte 54 Etats fait, depuis la chute
du mur de Berlin, l'objet d'un important déploiement de la part des
Etats-Unis. Et ce, pour y traquer les facteurs d'insécurité et
pour s'approvisionner en ressources énergétiques. Malgré
une prise en compte du continent dans sa généralité, il
faut dire que certaines régions sont davantage ciblées par les
actions de l'AFRICOM par rapport à d'autres. C'est le cas du Sahel, de
la Corne de l'Afrique mais aussi du Golfe de Guinée qui vont faire
l'objet d'un traitement particulier. Ce continent est
hétérogène sur le plan sociologique. On y retrouve non
seulement des populations francophones, anglophones mais aussi lusophones. Un
bon nombre d'entre elles utilisant également des langues locales. Cette
hétérogénéité sociologique se perçoit
également à travers les appartenances religieuses. L'on y trouve
ainsi des chrétiens, des musulmans ou encore des animistes.
L'autre composante spatiale de ce travail concerne les
Etats-Unis. Puisque cet Etat fait montre aujourd'hui, d'une grande mobilisation
pour les questions sécuritaires en Afrique. Washington investit le plus
de moyens dans sa sécurité. Cela se traduit par le fait que ses
dépenses militaires représentent entre 45 et 50% de celles
mondiales32(*).
b. Délimitation temporelle
Le cadre temporel qui nous intéressera ici
s'étend de 1990 à nos jours. Ce choix a été fait
par ce que 1990 est la date du début d'une réelle implication des
Etats-Unis dans les questions de sécurité en Afrique, en raison
de la dissémination de la menace, y compris dans cette région qui
jusque-là, avait été sous le joug des puissances
européennes. Washington est passé d'une posture de retrait
à une prise en charge des questions de sécurité sur le
continent. Cette dynamique aboutit, en 2007 à la création d'un
commandement unifié pour l'Afrique.
IV. REVUE DE LA LITTERATURE
Bien que sa création soit récente,
l'AFRICOM a déjà fait l'objet d'une littérature non
négligeable. Que ce soit de la part des chercheurs ou encore des
autorités officielles. Leurs différentes contributions peuvent se
classer en deux courants. Le premier regroupe ceux des auteurs qui adoptent une
approche réaliste pour décrire cette structure pendant que le
deuxième est constitué de ceux qui louent son altruisme. Ces
perceptions se traduisent également dans la réception africaine
de ce commandement.
v Les études liées à une
perception réaliste de l'AFRICOM
Ici, ce qui est le plus mis en visibilité par les
auteurs, c'est la défense et même la promotion des
intérêts américains. C'est notamment le cas de Timothy A.
HAZEN qui, dans son étude sur ce commandement, aborde la question des
objectifs. Il estime en effet qu'il est destiné à faire coexister
les activités civiles à côté de celles
traditionnelles relevant de la force militaire. Ainsi, à
côté de la formation des armées africaines et du soutien
humanitaire qui relèvent du soft power, se trouve la lutte
contre le terrorisme33(*).
Par ailleurs, après une observation de ces activités, il note que
cette institution est condamnée à mettre l'accent sur l'usage de
la force militaire. Sinon il fera face à de nombreuses critiques et
pire, il risquera d'entraver les intérêts américains sur le
continent34(*).
Ces travaux ont le mérite d'aborder le champ
d'action du commandement américain pour l'Afrique et surtout de montrer
la nouvelle orientation de la politique sécuritaire des Etats-Unis sur
le continent. C'est-à-dire celle qui perçoit les activités
civiles comme étant des facteurs de prévention et de
résolution des conflits. En outre cette étude montre la place
prépondérante qu'occupe l'intérêt national dans
l'agenda américain, en relevant la consubstantialité entre ce
commandement et la lutte contre le terrorisme. Cependant, parlant des
programmes de formation, l'auteur ne montre pas comment ils sont
répartis à travers le continent et quels sont leurs implications
sur la sécurité en Afrique.
Une approche semblable à celle-là est
adoptée par Alain FOGUE. Pour lui, l'AFRICOM est une structure qui met
l'accent sur la lutte contre le terrorisme et qui prend pour prétexte,
les questions humanitaires, le développement, et la prévention
des conflits en Afrique35(*). Sa vocation, poursuit-il est la lutte
préventive et active contre le terrorisme dont la menace contre les
intérêts américains en Afrique est une
réalité. Il montre par ailleurs que sa création a
été motivée par le souci de Washington de protéger
ses intérêts sans cesse croissants sur le continent.
Cette démarche pour le moins réaliste est
très proche de la notre parce que plaçant l'intérêt
des Etats-Unis au centre même des préoccupations de cette
structure. Cette étude a également la vertu de montrer la place
périphérique qu'occupent les problématiques humanitaires
et civiles dans l'agenda réel de l'AFRICOM. Etant donné que
celles-ci ne servent que de tremplin à la réalisation des
objectifs de politique étrangère des Etats-Unis. Mais, ce travail
aborde plus la question des raisons qui ont présidé à la
création du commandement américain pour Afrique.
C'est-à-dire qu'il se focalise sur le pourquoi de sa mise sur pied. Si
notre approche, comme celle d'Alain FOGUE, s'intéresse à la
question du pourquoi, elle répond plus à une démarche
appréciative du fonctionnement et du déploiement de cette
institution. Et c'est à travers cette appréciation que nous
espérons identifier les motivations géopolitiques qui ont conduit
à sa création. Nous essayons également de dégager
les grandes tendances qui en découlent mais aussi d'aborder l'aspect
lié aux résultats.
De son coté, Stefan GÄNZLE écrit que le
commandement Américain répond à un souci du DOD de jouer
un rôle majeur dans la formulation et la conception de la politique
étrangère de Washington en Afrique36(*). La création de cette
structure, d'après lui, permet au Pentagone d'avoir une place importante
dans le trio « développement, diplomatie et
défense » en matière de politique africaine. Cela
étant du à l'impératif de lutte contre le terrorisme sur
le continent37(*). La
composante civile est, selon lui, instrumentalisée pour une meilleure
acceptation des actions du Pentagone38(*).
Ce travail est important dans la mesure où il
trouve en la lutte contre le terrorisme, la raison fondamentale de la
création du commandement américain. Tout comme dans les travaux
évoqués plus haut, l'intérêt des Etats-Unis est mis
en avant. Il nous permet de comprendre pourquoi ce commandement militaire
associe des civils. Mais il n'aborde pas les conséquences de cette
militarisation de la politique étrangère américaine sur le
continent. Puisque sur le plan des faits, celle-ci commence à produire
des résultats. Un autre aspect qu'élude ce travail concerne les
conséquences de la focalisation de l'AFRICOM sur la défense des
intérêts américains.
v Travaux portant sur une vision altruiste de
l'AFRICOM
Dans ce groupe, les auteurs s'attèlent à montrer
la bienveillance du commandement américain pour l'Afrique. C'est
notamment le cas soit des autorités américaines, soit de
chercheurs associés à l'opération de charme à la
quelle s'est livré Washington pour légitimer sa nouvelle
structure.
C'est notamment le cas de Theresa WHELAN. Après
avoir rassuré que la création de l'AFRICOM n'aura aucun impact
sur la souveraineté des Etats Africains, elle avait
précisé que cette structure était destinée à
renforcer le partenariat entre Washington et les Etats du continent. De telle
manière que celui-ci soit bénéfique pour tous39(*). Unique en son genre du fait
de la participation des civils, ce commandement va surtout s'atteler à
travailler avec les africains pour les aider à faire face aux
défis sécuritaires liés à l'assistance humanitaire,
à l'aide en cas de catastrophe, aux maladies, à la
déforestation, à l'action civique ainsi qu'à la
construction des capacités des armées africaines40(*).
Ces déclarations de WHELAN Theresa montrent la
reconversion civile du traitement de l'insécurité en Afrique.
Celle-ci n'étant plus seulement basée sur des menaces militaires
mais également sur le délabrement de la structure sociale du fait
de la mauvaise gouvernance, de la multiplication des conflits internes et du
manque des capacités régulatrices de l'Etat. Cependant, cette
présentation du commandement américain élude -
peut-être à dessein - d'aborder la question de la défense
des intérêts stratégiques.
Allant quelque peu dans le même sens, Rich
JUERGENS pense que l'AFRICOM est différent des autres commandements
combattants. En effet, contrairement à l'EUCOM, au PACOM ou encore au
CENTCOM, cette structure n'a pas pour mission principale de mener des
opérations militaires. Il s'agit plutôt de construire les
capacités des armées partenaires, de promouvoir la
démocratie, la croissance économique ou encore de favoriser
l'éclosion d'un marché libre41(*). L'autre marque de la spécificité de ce
commandement est sa structure interministérielle qui tranche avec celles
des autres commandements américains42(*).
Démontrer la spécificité du
commandement américain pour l'Afrique permet de voir le souci de
Washington d'adapter sa nouvelle stratégie aux réalités
africaines. Puisque l'environnement sécuritaire de ce continent ne
répond pas aux exigences stratégiques post- Guerre Froide qui ont
présidé à la mise sur pied des autres Commandements. Mais
ce travail présente la faiblesse de ne pas montrer si l'AFRICOM
fonctionne vraiment comme il a été annoncé par les
autorités américaines et si il se démarque vraiment de
l'approche traditionnelle dans la quelle sont inscrits les autres.
C'est-à-dire la priorisation des opérations militaires.
v Sur la réception de l'AFRICOM en
Afrique
Le commandement américain pour l'Afrique a fait
l'objet d'une véritable polémique dès sa création.
Il n'a pas suscité autant d'enthousiasme qu'espéraient les
autorités américaines. Cette réception a été
duale. Certains y étaient favorables tandis que d'autres en
étaient réfractaires.
Ø L'opinion défavorable à
l'AFRICOM.
Cette tendance était animée soit par des
hommes politiques, soit par des scientifiques, ou encore par des journalistes,
sans compter l'opinion publique africaine d'une manière
générale. Pour M. SAADOUNE, cette institution essuie de
nombreuses critiques. Certains considèrent qu'elle consacre la
militarisation de la politique extérieure américaine sur le
continent43(*). Cet auteur
prend l'exemple de Mark FANCHER, membre de la conférence
américaine des avocats noirs. Pour ce dernier en effet, ce commandement
n'est rien d'autre qu'un instrument visant à garantir l'accès de
l'industrie pétrolière américaine aux larges
réserves énergétiques de l'Afrique44(*).
Ces travaux ont le mérite de montrer le
degré d'hostilité des africains à l'égard de la
mise sur pied de ce cette structure. Ils montrent toute la difficulté
qu'éprouvent les américains à se déployer sur le
continent. L'on peut comprendre avec SAADOUNE que l'opposition à
l'AFRICOM ne se déroule pas uniquement en Afrique. Mais également
sur le territoire américain. Notamment au sein de la communauté
noire plus ou moins solidaire de ses « frères »
africains. Face à cette opposition, l'on pourrait également avoir
l'impression que finalement les africains ont compris les enjeux
stratégiques qui entourent le déploiement américain sur
leur sol. Ces derniers éprouveraient ainsi une crainte face à la
militarisation de leur continent.
C'est justement ce que l'on peut reprocher à
ces travaux. Puisqu'ils n'expliquent pas ce qui pourrait être à la
base de ce sursaut « patriotique » brusque. Est-ce le
résultat d'un processus d'éveil stratégique ? Ou
alors un simple mouvement d'humeur. Par ailleurs, ces travaux s'attèlent
à montrer la posture des africains face à l'AFRICOM sans montrer
son véritable déploiement sur le continent. C'est justement
là un des points focaux de notre travail.
Pour sa part, Amadou BAMBA NIANG stigmatise ce
commandement. Il pense que son objectif principal est de mettre l'Afrique
sous-tutelle. C'est depuis les années 1990 que le général
James Jones, commandant de l'EUCOM, note l'importance de la mise sur pied d'un
commandement unifié pour l'Afrique. Malgré les messages de
bienveillance qu'envoient l'amiral Robert MOELLER, l'installation de l'AFRICOM
sur le continent le mettra en ligne de mire de tous les groupes
anti-américains dont les actions pourront s'intensifier sur le
continent45(*).
Ces travaux de NIANG établissent bien un lien
entre la militarisation de l'Afrique par Washington et la possibilité de
l'augmentation de l'insécurité. Etant donné que
l'installation des infrastructures de l'AFRICOM dans un Etat, du coup l'expose
aux attaques de certains groupes politico-militaires actifs sur le continent.
L'auteur soulève un aspect qui parait assez pédagogique. Celui-ci
est lié au danger que représente l'assistance militaire
américaine pour les Etats africains. En réalité, plus on
bénéficie des « faveurs », de la
superpuissance46(*), plus
on apparait comme l'ennemi des groupes armés africains. C'est une
thèse qui s'est vérifiée notamment lors de l'attaque du
centre de Westgate au Kenya, le 21 Septembre 2013. Cela n'est pas surprenant
lorsqu'on sait que ca pays est l'un des principaux bénéficiaires
de l'aide militaire américaine sur le continent.
Si les revers de l'aide militaire américaine
sont mis en lumière ici, l'on peut tout de même noter l'absence de
l'analyse liée au rôle que pourraient jouer les principaux
alliés de l'AFRICOM. L'auteur aurait pu explorer le rôle que
jouent des Etats comme l'Ethiopie, le Maroc ou encore le Nigéria qui ont
ce statut. Par ailleurs, il insiste sur des conjectures liées à
la mise sur pied de l'AFRICOM. Même s'il se base sur l'expérience,
il reste focalisé sur des probabilités sans apprécier la
réalité des actions de cette institution.
Ø L'opinion favorable à
l'AFRICOM
Si l'opinion africaine a été en
majeure partie défavorable à la mise sur pied du commandement
américain pour l'Afrique, quelques voix se sont tout de même
levées pour exprimer leur adhésion. La plus intéressante
et la plus polémique est sans doute celle de la présidente Ellen
Johnson Sirleaf. L'acceptation par la présidente libérienne de
l'AFRICOM est soulevée par allAfrica dans un article47(*). Celui-ci revient sur un
rapport publié en 2011 et qui explique les véritables raisons de
ce soutien à l'institution américaine. L'on peut y lire que
l'objectif, pour la présidente Ellen Johnson, est de protéger et
promouvoir les intérêts de certaines industries
américaines. Notamment la Soros Fund Management ainsi que la
Newmont Mining Corporation, respectivement dirigées par Georges
Soros et Nathaniel Rothschild. Tous les deux sont de grands hommes d'affaires
américains qui ont de l'influence dans la politique de leur pays. Ils
sont, selon ce rapport, impliqués dans la reconfiguration du paysage
politique de plusieurs Etats africains. Alors, en demandant l'installation de
la base de l'AFRICOM dans son pays, Ellen Johnson voulait se positionner comme
une alliée importante de Washington sur le continent48(*). C'est en récompense de
cela, selon cet auteur, qu'elle a reçu le Prix Nobel de la Paix juste
avant les élections de 2011. L'objectif étant de favoriser sa
victoire lors de ce scrutin.
L'on voit bien qu'il est évoqué ici
certains des problèmes les plus fondamentaux du continent africain,
à savoir la cécité stratégique et le manque de
volonté politique. L'auteur montre bien comment un dirigeant
préfère brader son pays, voire tout un continent au profit de ses
intérêts personnels et de ses calculs politiques. Il est
également mis en exergue, le jeu trouble auquel jouent certains chefs
d'Etats avec des industriels étrangers. Donnant du coup à ces
derniers, un énorme pouvoir dans le jeu politique de leurs pays.
L'auteur présente avec une pertinence certaine, le prototype même
des dirigeants de l'Etat postcolonial. Ceux qui n'ont pas le courage de refuser
ou au moins de dénoncer la domination extérieure. Ceux qui se
soucient très peu de l'avenir de leurs populations. Enfin, un autre
aspect intéressant de ce travail est la mise à nue du rôle
des grands groupes industriels dans la politique extérieure des Etats.
Ceux-ci, forts de leur pouvoir financier, financent les campagnes
électorales de différents candidats. En retour, leurs
préférences sont mises en avant dans l'agenda du président
élu. Ils peuvent ainsi « dicter leurs lois » dans la
politique internationale. Y compris en matière de reconfiguration du
paysage politique des Etats étrangers.
Si ce travail identifie le positionnement politique de
la présidente libérienne comme étant le principal facteur
de son soutien à l'AFRICOM, il omet de souligner les besoins liés
la réhabilitation de l'appareil sécuritaire. Cela est pertinent
dans la mesure où ce pays sort d'une guerre très sanglante. L'une
des conséquences étant l'hyper-fragilisation du dispositif
sécuritaire national. Si l'AFRICOM s'intéresse notamment à
la formation des armées, on pourrait comprendre le besoin du
Libéria de bénéficier de cet
« avantage » en ayant sa base sur son territoire.
Il ya également un besoin pour cet Etat de
l'Afrique de l'Ouest de jouer un rôle géopolitique important.
Puisqu'en se positionnant comme pivot américain dans la région,
il pourrait se servir de cette influence pour avoir une emprise sur les
questions sécuritaires et politiques qui y sont soulevées. Il
pourrait alors passer d'un petit Etat perdu aux confins de l'Afrique à
un acteur géopolitique important. C'est justement un des aspects les
plus importants qu'aborde notre étude.
V. PROBLEMATIQUE
La politique étrangère des Etats-Unis a
traditionnellement considéré l'Afrique comme étant
périphérique par rapports aux intérêts
géostratégiques américains à travers le monde. Si
depuis la fin de la guerre froide, l'on a perçu certaines actions de cet
Etat en faveur de la sécurité sur le continent, cette tendance va
s'intensifier après les attentats du 11 Septembre 2001, avec la mise sur
pied de plusieurs programmes d'assistance militaire. Ce continent
commençait alors à devenir un enjeu sécuritaire important
pour Washington.
L'engagement américain pour les questions de
sécurité en Afrique connait un tournant décisif lorsque
l'administration Bush décide de créer, le 6 Février 2007,
un commandement unifié dédié à cette partie du
monde. Cet acte est considéré comme étant inédit.
Puisque jusqu'ici, la tâche désormais dévolue à
l'AFRICOM était autrefois assurée par trois commandements
différents que sont le PACOM, l'EUCOM et le CENTCOM. La création
de cette structure s'inscrit dans une logique d'évolution de la doctrine
américaine de sécurité dans le monde. Et ce suite aux
expériences douloureuses d'Irak et d'Afghanistan. On comprend
logiquement pourquoi sa mise sur pied s'est accompagnée d'une grande
mobilisation discursive de la part des autorités américaines. Et
ceci en vue, non seulement d'affirmer sa spécificité, mais
également de faire taire les critiques y relatives. Ce discours
insistait surtout sur la bienveillance de cette institution en mettant en avant
l'assistance humanitaire, sécuritaire ou encore le développement
économique et la bonne gouvernance en Afrique. Cependant,
l'appréciation du déploiement du commandement américain
pour l'Afrique nécessite une plus grande lucidité. Une telle
grille de lecture devant permettre de mieux appréhender les objectifs de
cette institution.
QUESTION PRINCIPALE :
Alors, face à l'environnement
stratégique africain, quelles sont les motivations
géostratégiques et géopolitiques qui ont
présidé à la mise sur pied de l'AFRICOM ?
QUESTION SECONDAIRES :
Qu'est-ce qui explique l'implication des Etats-Unis
dans les questions sécuritaires en Afrique au point de créer un
commandement qui lui est uniquement dédié ? Qu'est-ce qui
explique l'évolution que connait la doctrine américaine de
sécurité en Afrique ?
A quels résultats aboutit la formation que proposent
les Etats-Unis aux armées africaines notamment sur le plan de la
performance et de la stabilité régionale ?
VI. HYPOTHESES
Comme tout travail scientifique, notre étude
part d'une hypothèse principale (1) et des
hypothèses secondaires (2).
1. Hypothèse principale
Au travers du déploiement de l'AFRICOM en
Afrique, il est possible de comprendre que sa mise sur pied a été
motivée non seulement par le souci de Washington d'adapter ses
réponses sécuritaires à l'environnement stratégique
africain, marqué par la prégnance de nouvelles menaces, mais
également par le besoin du renforcement de ses capacités
militaires sur le terrain. Et ce afin de mieux dissuader les puissances
émergentes qui y sont en pleine expansion et tous ceux qui s'attaquent
aux intérêts américains.
2. Hypothèses secondaires
Dans le souci de s'adapter aux réalités
sécuritaires africaines, le commandement américain fait de
l'assistance sécuritaire, un référentiel important de son
agenda. Pour cela, il propose aux africains,de multiples programmes de
formation et exercices qu'il organise annuellement. Cette démarche vise
à les rendre capables de faire face aux nouvelles menaces dans un
contexte marqué par une évolution de l'environnement
sécuritaire.
Malgré la bienveillance dont fait preuve, le
discours officiel américain, l'AFRICOM demeure fidèle à la
culture stratégique américaine qui met en bonne place, l'usage
ferme de la force militaire dans l'engagement extérieur. Cette posture
permet à Washington de mieux répondre aux contraintes
géostratégiques liées à la promotion de ses
intérêts en Afrique.
VII. CONSTRUCTION DE LA DEMARCHE
Après avoir déterminé notre
approche théorique(1), nous allons tabler sur nos choix
méthodologiques(2).
1. Approche théorique
Dans le cadre de ce travail, nous allons mobiliser la
théorie réaliste. Car, elle permettrait le mieux
d'analyser ce sujet. Selon les réalistes, les Etats sont les principaux
acteurs des relations internationales, ils sont motivés par la
défense de leurs intérêts définis en termes de
puissance49(*) et la
confrontation d'intérêts opposés condamne la scène
internationale à de nombreux conflits. Cette théorie nous permet
de mieux percevoir les visées stratégiques de l'AFRICOM en
Afrique et les stratégies des Etats de la zone pour tirer un
bénéfice de ce partenariat.
L'autre théorie pertinente ici est celle
constructiviste. Elle postule que les objets n'ont pas de
réalité matérielle, mais n'existent que parce qu'un
ensemble de personnes croient et disent qu'ils existent et agissent en
conséquence50(*).
Toujours selon cette théorie, la politique mondiale est
déterminée par une structure cognitive composée des
idées, croyances, valeurs, normes et institutions partagées par
les acteurs51(*). Le
constructivisme permettra de faire ressortir les processus cognitifs qui
président à la définition et à la
désignation des menaces par l'acteur qui, ici est la puissance
américaine.
2. Approche méthodologique
Elle concerne la collecte (a) et
l'analyse des données (b).
a. Collecte des données
Relativement aux techniques de collecte des
données, nous allons recourir à la recherche
documentaire - en analysant des documents officiels, des ouvrages, des
articles de presse et autres revues scientifiques -. Nous mobiliserons
également la recherche empirique par le canal des
entretiens individuels effectués avec des officiers américains et
africains.
b. Analyse des données
Les sciences sociales proposent un arsenal
méthodologique pour analyser les faits et autres données à
la disposition du chercheur. Dans le cadre de notre recherche, nous
mobiliserons la méthode historique. En effet, en tant
qu'instrument de l'explication causale, cette méthode participe de
l'étude des phénomènes sociaux en marche. Car, on peut
difficilement imaginer une explication qui ne soit diachronique,
c'est-à-dire génétique et donc révélatrice
des changements et des métamorphoses52(*). Cette méthode permettra de montrer la
trajectoire du partenariat stratégique des Etats-Unis en Afrique.
Cependant, du fait des limites de l'approche diachronique - étant plus
descriptive qu'explicative - l'on va lui ajouter le
fonctionnalisme. Cette méthode répond plus
à une démarche synchronique. C'est-à-dire qu'elle
s'attache à mettre en lumière les rapports qui relient entre eux,
les phénomènes qui se produisent simultanément53(*). Cette méthode nous
permettra de mieux cerner les contours de ce sujet. Elle repose sur la notion
de fonction qui se rapporte « aux processus vitaux ou organiques dans
la mesure où ils contribuent au maintien de
l'organisme »54(*). Le fonctionnalisme va nous permettre d'explorer les
fonctions manifestes et latentes du commandement américain pour
l'Afrique.
L'analysestratégique apparait
comme une méthode pertinente pouvant permettre une meilleure explication
des rapports existant entre les acteurs évoqués dans cette
étude. La mobilisation de la stratégie comme cadre d'analyse
présente en effet un certain nombre d'avantages. Elle pourrait notamment
bien renseigner sur les finalités réelles de l'AFRICOM. Cela est
vrai dans la mesure où l'action finalisée est au coeur de toute
stratégie55(*).
Cette dernière elle-même consiste à mettre en oeuvre une
praxis avec une certaine logique, elle est une gestion de la fin, des voies et
des moyens, donc la stratégie est une façon de conduire
l'action56(*). La
référence à l'analyse stratégique permettra ainsi
d'explorer la démarche, les logiques, les moyens et même les
intelligences de ce commandement dans la perspective d'atteindre ses
objectifs.
VIII. PLAN D'ORGANISATION DU TRAVAIL
Les principaux axes d'analyse qui constituent l'architecture
de ce travail sont au nombre de deux. Le premier concerne l'AFRICOM et le
renforcement des capacités des armées africaines
(première partie) tandis que le deuxième montre
le rôle de cette institution dans le renforcement de la présence
militaire américaine en Afrique (deuxième
partie).
PREMIERE PARTIE
L'AFRICOM ET LE RENFORCEMENT DES CAPACITES DES
ARMEES AFRICAINES
Depuis les attentats du 11 Septembre 2001,
après ceux de Dar Es-Salaam et de Nairobi en 1998, l'Afrique est
durablement inscrite dans la riposte planétaire contre le terrorisme
lancée par les Etats-Unis. Ce continent qui jusque-là
n'était que très périphérique dans la planification
stratégique américaine, du coup, acquiert de l'importance aux
yeux de la superpuissance. Afin de prévenir les flux probables des
membres d'Al-Qaïda vers la Corne de l'Afrique du fait de
l'intervention en Afghanistan, en Octobre 2001, Washington décide d'y
créer la CJTF-HOA. Mise sur pied en Octobre 2002 par le CENTCOM, cette
force multinationale sous commandement américain est
transférée, le premier Octobre 2008, au commandement
américain pour l'Afrique. La création d'un commandement
spécifique pour ce continent marque le début d'une ère
nouvelle dans les relations américano-africaines. Non seulement, elle
révèle la place désormais importante qu'occupe l'Afrique
dans le dispositif géopolitique américain, mais également
elle traduit la volonté de Washington de prendre en charge les
problématiques sécuritaires locales. Or si
l'insécurité est l'une des variables explicatives de la
réorientation de ce pays vers le continent, celle-ci revêt un
aspect particulier. Elle n'est plus forcément le fait d'une puissance
rivale, mais de plus en plus de groupuscules disséminés et
imprévisibles. Faire face à de telles menaces exige un engagement
de proximité et de contact loin du « fétichisme
technologique » qu'alimentait la Révolution dans les Affaires
Militaires (RMA)57(*).
En effet, Dans un contexte marqué par des
guerres de faible ampleur et dont l'inéluctabilité du contact est
de mise, les américains redoutent le « syndrome
somalien ». Car le peuple américain est réticent aux
engagements militaires extérieurs parce qu'ils engendrent des pertes. Or
d'après l'opinion américaine, la vie américaine est
sacrée58(*). Dans
le souci de concilier nécessité de traitement de
l'insécurité et préservation des vies américaines,
les autorités de Washington optent pour la formation de
« Proxy forces ». Il s'agit de forces
sous-traitantes combattant au profit des intérêts
américains59(*).
Pour y parvenir, l'AFRICOM met l'accent sur le renforcement des
capacités des armées africaines.
Depuis les attentats du 11 Septembre 2001, le
continent africain est considéré comme un vivier pour le
terrorisme international. Les Etats africains ne contrôlant pas
l'ensemble de leurs espaces territoriaux, du fait du manque de moyens
financiers, matériels et humains. C'est dans ce sens que l'habilitation
des forces africaines apparaît de manière claire dans le discours
politique qui accompagne la mise sur pied du commandement américain. Il
s'agit ici de pallier les carences des armées africaines et de les
rendre plus efficaces face aux nouvelles menaces. Cependant, même si des
programmes d'assistance sécuritaire sont mis en pratique avec en bonne
place, la formation militaire (Chapitre I), ceux-ci ont
néanmoins, malgré leur raison d'être, certaines tendances
et certains résultats qui méritent d'être
évoqués au travers d'une analyse critique (Chapitre
II).
Chapitre I : La place de la formation
militaire dans l'agenda de l'AFRICOM
Lors de sa création le 6 Février 2007,
les autorités américaines assignaient un certain nombre de
missions au commandement dédié à l'Afrique. Parlant de
cette institution, Theresa WHELAN énonçait que: «this
new Command will strengthen our security cooperation with Africa and help to
create new opportunities to bolster the capabilities of our partners in
Africa...»60(*).
Cette déclaration est assez représentative de la place qu'occupe
la formation militaire dans l'agenda de cette structure. Vu sous cet angle, ce
commandement s'écarte en principe de la ligne directrice des cinq
autres. La plupart d'entre eux étant nés au sortir de la seconde
guerre mondiale. Mis sur pied depuis 1945, ce réseau de commandements
avait pour principale mission, d'endiguer l'expansion de l'Union
Soviétique. Il s'agissait également pour les Etats-Unis d'assurer
une permanence mondiale contre une menace croissante et multiple et de
contrôler plusieurs crises simultanément61(*). Or le contexte de
création de l'AFRICOM n'est pas le même. Car, même si la
Chine est un adversaire de plus en plus sérieux pour Washington, elle ne
l'est pas autant que l'était l'URSS. Par ailleurs, l'opposition entre
Washington et Pékin est plus économique et commerciale. C'est
peut-être pour cela que les ambitions militaires de cette institution ne
sont pas affirmées avec la plus grande fermeté et la plus grande
visibilité. Elle s'attèle plutôt - officiellement -
à former les armées africaines. Répondant ainsi à
un encadrement doctrinal spécifique (Section I), avec
une place centrale reconnue à la formation militaire (Section
II).
SECTION I : ENCADREMENT DOCTRINAL DE
L'AFRICOM
L'AFRICOM, à en croire les autorités
américaines, présente un caractère particulier en ceci
qu'il n'est pas concentré sur le combat tel que c'est le cas avec les
autres commandements combattants américains dans le monde, mais
plutôt sur la prévention des conflits62(*). Cette démarche est
l'aboutissement d'une évolution doctrinale qui consacre l'approche
globale de la sécurité comme nouveau paradigme d'engagement
militaire américain (A), une telle doctrine
présentant de nombreux enjeux dans l'environnement africain
(B).
A. L'évolution de la doctrine
sécuritaire américaine en Afrique depuis 1990
Face à une multiplication des conflits
post-guerre froide en Afrique, les Etats-Unis ont fait preuve d'une certaine
prudence relativement aux interventions militaires directes sur le continent
africain. Privilégiant plutôt l'assistance militaire. Cette
dynamique s'accentue avec l'échec de l'intervention en Somalie où
18 soldats américains avaient perdu la vie63(*). La chute de l'URSS ayant
érigé les Etats-Unis en superpuissance, ces derniers vont se
concentrer sur les Military Operations Other Than War (MOOTW)
(1) qui seront plus tard remplacées par les
opérations dites de Stability Operations
(2).
1. La doctrine «Military Operations Other
Than War»
Depuis la fin de la Guerre Froide, l'engagement
sécuritaire américain sur le continent africain s'est
opéré dans le cadre d'une doctrine militaire baptisée
Military Operations Other Than War ou opérations militaires
autres que la guerre. Définie par le Département de la
Défense et publiée le 16 Juin 1995, elle est basée sur le
postulat selon lequel dans un contexte d'incertitude - lié à
l'effondrement de l'URSS, - seule la suprématie militaire peut garantir
une assurance contre la nouvelle donne64(*). Cette doctrine a également pour
arrière-plan, la doctrine de sécurité américaine
annoncée à Aspen en Aout 1990. Celle-ci insistait sur la
nécessité de la présence à l'avant destinée
à manifester l' « engagement en temps de paix »
pour la protection de leurs intérêts à l'étranger,
la capacité de réponse rapide et efficace aux crises
régionales et l'aptitude à reconstituer des moyens de
défense important au cas où l'Union Soviétique
redeviendrait une menace65(*).
La doctrine MOOTW fait suite à un
rapport du Département de la Défense paru dans la Bottom-up
review publiée en Octobre 1993. Les conclusions de ces travaux
mettent l'accent sur une stratégie fondée sur l'engagement, la
prévention et le partenariat, afin de contrer les risques et de saisir
les opportunités offertes par la nouvelle ère66(*). En tant que paradigme
d'engagement militaire, cette doctrine consacre l'utilisation des
capacités militaires dans des opérations militaires autres que le
combat direct généralement dans un cadre multinational ou
interministériel67(*).
Fondées sur la prévention des conflits,
les MOOTW englobent les opérations en faveur de la paix, les
actions humanitaires effectuées par les armées ainsi que toutes
interventions militaires de nature limitée. Ces opérations se
rangent sous deux groupes. Celles qui se font en temps de paix, il s'agit
notamment de la lutte contre la drogue, du secours apporté en cas de
catastrophe, du soutien aux autorités civiles, de la construction de la
paix et de l'assistance extérieure68(*). Le deuxième concerne celles des
opérations qui se déroulent dans un environnement conflictuel.
L'on peut noter ici, des frappes et des raids qui seraient le fait des forces
américaines, des opérations d'imposition de la paix, de soutien
à une insurrection, des actions anti-terroristes, ou des missions de
maintien de la paix69(*).
C'est cette doctrine qui a présidé à la mise en place
d'institutions telles que la Force de Réponse aux crises Africaines
(ACRF) lancée en Septembre 1996. Celle-ci sera très vite
remplacée par l'Initiative de Réponse aux Crises africaines
(ACRI) destinée à former les officiers africains dans le maintien
de la paix tel que défini par le Chapitre VI de la charte des Nations
Unies. Cette initiative sera elle-même remplacée par African
Contigency Operations Training and Assistance (ACOTA). Créée
en 2004, cette dernière est destinée à renforcer les
capacités des armées africaines à participer à des
opérations militaires telles que définies dans le chapitre VII de
la Charte des Nations Unies70(*).
Parmi les autres programmes de formation qui ont
été mis sur pied dans le cadre de cette doctrine, l'on peut citer
l'International Military Education Training (IMET). Ce programme
prévoit la formation d'officiers dans les écoles
américaines. Ainsi, jusqu'en 2001, les militaires de 31 Pays africains y
avaient reçu un enseignement71(*). Si la doctrine MOOTW s'est
avérée importante dans le sens du renforcement des
capacités des armées africaines pour faire face à la
prolifération des conflits de l'ère post-guerre froide, celle-ci
s'est avérée particulièrement nocive face à un
environnement sécuritaire évolutif. Pour le général
Vincent DESPORTES, elle est très marquée par une culture
classique et donc inadaptée à gérer les nouvelles formes
de crises72(*). En effet,
elle martèle que les armées existent « to win the
Nation's War »73(*). C'est-à-dire pour gagner des guerres de
nations. Ce qui relève pourtant de l'ancienne approche militariste. Sur
le terrain la doctrine MOOTW s'est avérée limitée.
D'où sa substitution par un autre paradigme d'engagement militaire qui
se veut plus adapté.
2. La doctrine «Stability
Operations»
Lorsqu'il s'interrogeait sur la
« possibilité de trouver une façon efficace de
n'utiliser qu'une partie de la puissance »74(*), Henry KISSINGER mettait
à nu ce qui allait constituer l'un des obstacles les plus redoutables
aux engagements militaires américains. Fondamentalement basée sur
la suprématie militaire, l'action extérieure américaine
rencontre de nombreuses difficultés. D'où le besoin d'une
révision de la doctrine d'engagement.
Sur le plan théorique, le problème de la
dialectique permanence/contingence du cadre d'action stratégique est
clairement posé. Généralement, l'on identifie deux grandes
tendances. La première, qui est représentée par Antoine
Henry JOMINI, insiste sur l'existence de principes universels et immuables qui
sous-tendent toute action stratégique. La deuxième
représentée par Carl Von CLAUSEWITZ insiste sur l'incertitude
permanente et donc sur la nécessaire révision de la doctrine
d'action75(*). En effet,
assimilant la stratégie à une science, JOMINI estime qu'elle peut
être soumise à des maximes dogmatiques qui approchent les axiomes
des sciences positives76(*). En d'autres termes, toute stratégie devrait
obéir à des règles sécrétées par
l'expérience historique et dont la négligence pourrait mener
à l'échec. A l'opposé de cette conception, l'approche
défendue par CLAUSEWITZ s'oppose à toute élaboration de
règles. Pour lui, toute guerre - ou plus largement - toute
stratégie est le royaume de l'incertitude et le domaine du hasard. En
conséquence, les trois quarts des évènements sur lesquels
repose l'action sont plongés dans le brouillard d'une incertitude plus
ou moins profonde77(*).
C'est tout le sens des concepts de « brouillard de la
guerre » ou encore de « friction ». Les partisans
de cette thèse montrent la difficulté de
l'opérationnalisation de méthodes et techniques
préalablement définies. Une telle situation est favorisée
par l'imparfaite connaissance des intentions et des capacités de
l'ennemi ; l'imprécision des calculs et des solutions78(*). Le Maréchal de SAXE
notait déjà que « la guerre est une science couverte de
ténèbres dans l'obscurité desquelles on ne marche pas d'un
pas assuré »79(*). L'activité guerrière ou
stratégique échapperait ainsi à toute
schématisation ou mathématisation. C'est pourquoi, face à
la complexité de l'environnement conflictuel, les théoriciens de
la nature « artistique » de la stratégie estiment
qu'elle doit être adaptée à un contexte particulier. Cela
commande la définition de nouveaux objectifs politiques.
Ce débat paradigmatique entre permanence et
contingence du cadre d'action stratégique renseigne assez bien sur
l'évolution qu'a connue la doctrine d'engagement des Etats-Unis
implémentée par l'AFRICOM. En effet, puisque fondée sur la
suprématie militaire, la doctrine MOOTW s'avérait de
plus en plus inadaptée face à l'évolution des
réalités sécuritaires du monde. Les interventions
militaires en Irak et en Afghanistan sur ce plan sont assez instructives. En
Irak par exemple, malgré l'expédition militaire
américaine, sur le plan politique, les tensions entre sunnites et
chiites s'aggravent, ainsi que le conflit avec les Kurdes et le Premier
ministre Nouri Al-Maliki n'est plus aimé ni par son
gouvernement, ni par la population. Par ailleurs, la corruption s'est
répandue dans tous les secteurs du pays, et la stabilité et la
sécurité sont loin d'être rétablies80(*). Cet échec est
également reconnu par le Département américain de la
Défense qui note que la réussite d'une action
étrangère ne s'apprécie pas que sur le plan militaire,
mais aussi en termes de reconstruction des infrastructures, de soutien au
développent économique, d'établissement de l'Etat de
droit, d'instauration d'une gouvernance responsable, d'établissement des
services essentiels, et de construction d'une nation où les
autorités militaires sont soumises à celles civiles81(*).
En réalité, la sonnette d'alarme sur la
nécessité de réviser la doctrine d'engagement
extérieur des Etats-Unis a été tirée par l'US
Marines Corps. C'était dans un document intitulé
« Marines Corps Concept for a Changing Security
Environment ». Publié en 2006, ce document note
l'importance mais également l'insuffisance des opérations
militaires classiques. Il met alors l'accent sur l'entrainement et le conseil
des forces de sécurité de la nation hôte, le
rétablissement des services de base, la promotion de la bonne
gouvernance ou encore le développement économique82(*). Le Marines Corps a
été relayé par le secrétaire à la
défense Robert Gates. S'opposant à la pensée militaire
classique qui est animée par les élus et les grands groupes
militaro-industriels, ce dernier indique un nouveau principe directeur pour la
stratégie de défense nationale, à savoir
l'équilibre. Il s'agit d'une meilleure intégration des moyens
militaires et civils dans le sens d'une meilleure coopération
civilo-militaire83(*). Ces
recommandations de R. Gates sont pertinentes d'autant plus que dans les guerres
d'aujourd'hui, l'efficacité militaire ne se mesure plus par le
degré destruction - si chère à Washington - mais par la
capacité des forces armées à créer les conditions
d'un dialogue et d'un consensus politique84(*).
Cette inquiétude des autorités
américaines relativement à leurs engagements militaires à
l'étranger a entrainé la conception d'une nouvelle doctrine en
2010. C'est celle desStability Operations. Il s'agit d'une approche
globale placée sous l'autorité du Département d'Etat en
collaboration avec d'autres agences et services. Le concept de Stability
Operations a trois composantes. Notamment, les activités de
réponses initiales qui visent la création d'un environnement sain
et sécurisé ainsi que la réponse aux besoins humanitaires
immédiats de la population ; ensuite les activités de
transformation qui concernent la sécurité dans son sens large, la
reconstruction et l'habilitation des forces de sécurité
partenaires ; enfin, les activités de soutien qui se focalisent sur
les efforts à long terme destinés à reconstruire les
capacités de l'Etat bénéficiaire et à créer
des conditions favorables au développement durable85(*). Ainsi contrairement aux
autres Commandements américains qui sont centrés sur le combat,
l'AFRICOM insiste en priorité sur la prévention des
conflits86(*). Ce
commandement est considéré comme un laboratoire de mise en oeuvre
expérimentale d'une approche globale de la sécurité.
Puisque ses activités sont basées sur l'assistance sanitaire,
l'aide humanitaire, l'action humanitaire contre les mines, la réponse
aux catastrophes, la réforme du secteur de sécurité ainsi
que sur les opérations de soutien à la paix87(*). C'est cet encadrement
doctrinal qui fait du Commandement Américain pour l'Afrique, un
commandement spécifique pouvant répondre à des enjeux
spécifiques.
B. Les enjeux de la doctrine «Stability
operations»
Depuis son adoption en 2010, cette doctrine
représente un grand espoir pour les autorités américaines.
Puisqu'elle devrait permettre de mieux aborder les problématiques
sécuritaires sur le continent. En réalité, il s'agit
d'adapter les réponses sécuritaires américaines
(2) à la spécificité de l'environnement
africain (1).
1. la spécificité de l'environnement
sécuritaire africain
Depuis la fin de la guerre froide, le continent
africain se trouve dans une spirale conflictuelle qui s'assimile à une
pandémie. En effet, ce continent est l'un des plus touchés par
une suite ininterrompue de guerres permanentes et de violences folles88(*). Il s'agit en majeure partie
de guerres intra-étatiques. On est passé des guerres
interétatiques - dont le champ de références était
structuré par un ordre politique articulé autour de l'Etat-nation
- à des guerres où la destruction se fait de
l'intérieur89(*).
L'affrontement des volontés - dialectique des volontés, - en tant
qu'essence de la stratégie n'a plus lieu entre les Etats. Il se
déroule désormais au niveau des individus90(*). Ceux-ci s'opposent soit entre
eux, soit à l'Etat auquel ils font un certain nombre de reproches.
Parmi les variables explicatives de ces conflits, se trouve en
bonne place, le processus de démocratisation mal négocié
qui avait donné lieu depuis 1990, à de nombreux conflits aux
conséquences dramatiques91(*). Ainsi une rébellion serait la réaction
à une répression politique. Par ailleurs, on peut
également considérer les actions de ces groupes violents comme la
recherche de la justice sociale. Il s'agit notamment de
l'inégalité dans le revenu des ménages ainsi que
l'inégalité dans la propriété des terres92(*). Cet aspect pose le
problème de la bonne gouvernance politico-économique qui est
encore quelque peu absente dans la gestion des Etats africains.
Cette multitude de conflits a des conséquences
qui entament véritablement les capacités régulatrices et
distributrices de l'Etat. En effet, pendant la guerre civile, l'Etat
détourne une partie de ses ressources des activités productives
vers des activités destructives. Le plus souvent, il augmente ses
dépenses militaires. Or une telle augmentation présente le risque
d'entrainer la diminution des sommes affectées à d'autres
secteurs tels que la santé et l'infrastructure93(*). Le cas du Tchad est assez
illustratif de la logique d'augmentation des dépenses militaires en
période de conflit. En effet, depuis l'arrivée au pouvoir
d'Idriss Déby en 1990, l'on a assisté à la signature des
accords de paix entre le gouvernement et les rebelles du Mouvement pour la
Démocratie et la Justice du Tchad (MDJT), notamment à Tripoli, en
Janvier 2002. Ceux-ci prévoyaient la cessation des hostilités et
l'amnistie générale. Cependant la résurgence des
hostilités en Mars-Avril 2006 a entrainé une augmentation presque
vertigineuse des dépenses militaires. Celles-ci sont passées de
68,9 millions USD en 2005 à 446,0 millions USD en 200794(*). Il fallait pour le
président Déby, combattre les rebelles du Front Uni pour le
Changement (FUC). Par ailleurs, entre 2002 et 2007, les dépenses
consacrées aux secteurs sociaux n'ont augmenté que de 9% contre
19% pour le secteur de la sécurité. Pour être plus
précis, la part des services sociaux dans les dépenses publiques
de ce pays entre 2006 et 2008 est passée d'environ 23% à moins de
20%95(*).
Pour le cas du Mali, ce pays s'est vu envahir en Mars
2012 par des groupes insurgés de nature différente. Il s'agissait
du Mouvement National de Libération de l'Azawad (MNLA), Ansar
Eddine, AQMI ou encore le MUJAO96(*).Cette invasion rapide s'explique par
l'incapacité de cet Etat à assurer le contrôle sur
l'ensemble de son territoire, ses capacités de régulation
étant très réduites. En effet, suite à
l'insurrection des Touaregs de 2000, le gouvernement s'est engagé dans
une riposte dans le Nord du Pays. Les dépenses militaires franchissaient
pour la première fois, la barre des 80 millions USD. En fait, celles-ci
passaient de 76,3 millions en 1999 à 88,5 millions USD en 200097(*). Or malgré ces efforts
qui permettent d'atteindre la somme de 153,0 millions USD en 201298(*), le pays ne sera pas
épargné. Car il ne disposait que de 33 chars d'assaut (12 T-55 et
21 T-34 de fabrication russe) ; 2 BM-21 ; 8 canons D-30 et une
dizaine d'obusier de différents calibres ; 4 avions de combat
(MIG-21), 10 avions de transport, 4 hélicoptères d'interception
et deux de transport99(*).
Ce qui en fait une armée modeste et donc incapable d'assurer le
contrôle de 1 240 192 km² de superficie. Ce pays devient donc une
terre fertile à l'installation de groupes criminels divers.
Ceci montre clairement que la menace aux
intérêts américains en Afrique n'est plus prioritairement
liée à l'aspect militaire, mais plutôt au potentiel de
fragilisation des Etats africains. Les facteurs les plus importants
étant la pauvreté, la mauvaise gouvernance, les
épidémies, le manque de démocratie ou encore les faibles
capacités des forces de défense. Ce qui commande une adaptation
des réponses sécuritaires américaines à
l'environnement africain.
2. L'adaptation des réponses sécuritaires
à l'environnement africain
Depuis la chute du mur de Berlin et surtout les
attentats du 11 Septembre, l'Afrique représente un enjeu important pour
la sécurité américaine. En effet, selon les
autorités américaines, ce continent s'avère
particulièrement fertile aux nouvelles menaces comme le terrorisme, la
piraterie maritime ainsi que diverses activités criminelles. Washington
attribue cet état de choses à l'incapacité des africains
à contrôler l'ensemble de leurs territoires. Pour désigner
ces Etats, le Département d'Etat américain parle
fort-à-propos d'Etats défaillants (falling states),
d'Etats fragiles (weak states) et même souvent d'Etats faillis
(failled states). Ce dernier type d'Etat est celui qui exerce une
autorité limitée sur son territoire et qui abrite des zones de
« non-droit »100(*). Cette réalité a fait dire au
gouvernement américain que : « Weak State like
Afghanistan, can pose as great danger to our national interest as
strong »101(*). Pourtant tel qu'indiqué plus haut, certains
Etats africains présentent ces caractéristiques.
La réduction des capacités de
régulation inhérente aux conflits et à l'insuffisance des
moyens met à rude épreuve, la sécurité
américaine. Etant donné que certaines régions africaines
sont devenues des havres pour les terroristes. Parce que disposant de grands
« espaces non gouvernés » qui permettent aux
terroristes et criminels de se réfugier, acquérir et entreposer
des armes, recruter des membres et surtout mener des
opérations102(*).
C'est le cas du Sahara, qui, en quelques années est devenu un espace de
« non-droit » où les contrebandiers et trafiquants
en tout genre ont tracé une série de pistes en marge des voies
officielles, où les migrants développent leurs propres
réseaux de route et où AQMI a pris possession du Nord-est du Mali
qui échappe à l'autorité de l'Etat central103(*). Dans un tel contexte
caractérisé par l'asymétrie qui est une forme de menace
multiple, diffuse et imprévisible, l'adoption d'approches militaires
classiques liées au combat s'avère limitée. Il faut pour
cela mettre en place des approches multiples, afin de la contrer104(*). Cette menace est
liée à des problèmes sociaux courants tels que le
bien-être, la santé, l'éducation, la démocratie.
C'est toute la signification du concept de sécurité humaine. L'on
comprend ainsi le sens de la doctrine Stability Operations qui semble
plus adaptée à un tel environnement sécuritaire.
Puisqu'abordant la sécurité dans son sens le plus large afin de
prévenir les crises.
La définition de la sécurité des
Etats-Unis rime désormais avec la stabilité des Etats africains.
C'est la raison pour laquelle, «Preventing conflicts, stabilizing
crisis and building security sector capacity are essential elements of
America's National Security approach»105(*). Cette approche proactive
destinée à éviter les conflits reflète
l'évolution de la stratégie du Département de la
Défense. Ainsi, il affirme: «We want to help develop a stable
environment in which civil society can be built and that the quality of life
for the citizenry can be improved»106(*). Le nouveau paradigme d'engagement militaire
américain est donc beaucoup plus basé sur la prévention
que sur la réaction.
La focalisation de Washington sur le facteur humain -
qui est central dans la conflictualité contemporaine - pourrait faire
croire que finalement, ce pays a abandonné l'un des principes
fondamentaux de sa culture stratégique. C'est-à-dire qu'il a
cessé non seulement de se prévaloir de son statut
d'hyperpuissance - qui conduit
à l'«over-confidence » - mais
également de mépriser l'ennemi107(*). Cette tendance laisse également
transparaître une sorte de politisation de la stratégie
américaine tant souhaitée par l'Amiral Mullen. Ce dernier, lors
de son discours du 3 Mars 2010 à l'Université du Texas, avait
proposé une relecture de la culture stratégique de son pays.
Rejetant l'idée de rupture entre action politique et action des
armées, il estime que la défense et la diplomatie ne sont pas
exclusives chacune mais doivent se compléter tout au long du processus
compliqué de l'action internationale108(*). Il s'agit donc d'une réorientation
clausewitzienne de la pensée militaire américaine.
Cette-à-dire que les autorités américaines ressentent
désormais le besoin de subordonner l'action militaire à des
objectifs politiques plus larges. Notamment ceux liés à la
construction d'une société stable et autonome. C'est la raison
pour laquelle l'AFRICOM met en bonne place, la formation des armées
africaines pour que celles-ci puissent assurer elles-mêmes leur propre
sécurité.
SECTION II - LA FORMATION MILITAIRE : UN
REFERENTIEL IMPORTANT DANS LE FONCTIONNEMENT DE L'AFRICOM
Dans la nouvelle stratégie du DOD en Afrique, la
sous-traitance des questions de sécurité aux forces africaines
est cardinale. Pour y parvenir, le nouveau Commandement américain qui a
la charge de la mise en oeuvre de cette stratégie, assure la formation
des armées africaines pour les rendre capables de faire face aux
défis sécuritaires sur le continent. D'ailleurs, parlant de
l'AFRICOM, le DOD avait précisé : « Its
principal mission will be in the area of security cooperation and building
partnership capability.» Cette déclaration montre la place
importante qu'occupe la coopération sécuritaire dans les
objectifs du commandement américain. Cette activité est en
majeure partie focalisée sur la lutte contre le terrorisme
(A) ainsi que sur la lutte contre la piraterie maritime
(B).
A. La mobilisation américaine en faveur de la
lutte contre le terrorisme en Afrique
Dans le cadre de la Global War On Terror (GWOT)
engagée par l'administration Bush en 2001, l'Afrique est un client assez
important. En effet, c'est sur ce continent que deux ambassades
américaines ont été visées par la nébuleuse
Al-Qaïda en 1998. Il s'agit de celles de Nairobi et de Dar
es-Salaam. Les attentats du 11 Septembre 2001 ont accru l'inquiétude des
autorités américaines de voir ce continent devenir un
véritable bastion terroriste. Pour prévenir cette
éventualité, l'AFRICOM s'attèle à combattre la
menace terroriste toujours prégnante sur le continent
(1) en multipliant des programmes de lutte contre le
terrorisme (2).
1. Prégnance de la menace terroriste en
Afrique
Carte n°2 : le terrorisme en Afrique. Sources :
journal.liberation.fr
, consulté le 7 Septembre 2014
Depuis l'éviction du FIS (Front Islamique du Salut),
vainqueur des élections algériennes de 1992, ce pays fait face
à une grande insurrection. En effet, sous l'effet de la frustration, ce
mouvement politique se transformera en GIA (Groupe Islamique Armé) et
entrera dans la clandestinité pour combattre le gouvernement. Devenue
GSPC en 1998, cette insurrection connaît une évolution doctrinale
qui sera consacrée par son alliance, le 11 Septembre 2006, à
Al-Qaïda, devenant Al-Qaïda au Maghreb
Islamique109(*). Dans le
nouveau label, l'objectif est de mener le jihad non seulement en
Algérie, mais aussi à d'autres pays du Maghreb tels que le Maroc,
la Libye, ou encore la Tunisie110(*). Au vu de l'extension géographique de ce
groupe et des liens qu'il noue avec d'autres groupes considérés
comme terroristes à travers l'Afrique, il est possible de parler d'une
multinationale du terrorisme sur le continent. Et cela en raison d'une alliance
composée de personnels de toutes nationalités, aux parcours
professionnels et humains très différents111(*). Ce qui en fait une menace
transnationale, dans le sens où elle implique la connexion entre groupes
à travers le continent : l'action clandestine devenant plurielle,
ouverte et solidaire. Cette connexion se fait entre des groupes qui ont un sens
similaire de la lutte, une connaissance commune de la clandestinité, un
usage de méthodes voisines et par conséquent un besoin identique
de matériels et de supports112(*). Cette tendance se fait déjà sentir en
Afrique du Nord où l'on évoque de plus en plus des liens entre
AQMI et Boko Haram. Les deux groupes seraient en intelligence
depuis 2010 lorsque l'Emir d'AQMI, Abdel Malek avait publiquement
proposé son soutien à la rébellion nigériane
à travers l'apport en hommes, en équipements et en matière
de formation113(*). Sur
le terrain, il est même indiqué que Boko Haram se livre
à des prises d'otages au compte d'AQMI, en échange
d'argent, d'armes, et de munitions114(*).
L'Afrique de l'Est est également
considérée comme une région prolifique au terrorisme
international. Elle abrite des groupes intégristes dans plusieurs de ses
Etats comme l'Ethiopie, l'Erythrée, les Comores, l'île Tanzanienne
de Zanzibar, et même le Soudan qui est désormais
considéré comme un sanctuaire pour les fondamentalistes
islamistes désireux d'essaimer dans les pays voisins115(*). Cependant le pays qui
attire le plus d'attention dans la région est la Somalie. En effet
depuis la chute de Siyad Barré en 1991, le territoire est divisé
en trois entités distinctes. Le Somaliland au Nord, le
Puntland à l'Est et la côte méridionale qui
pourrait être considérée comme le coeur politique du pays.
Or cette dernière partie n'est sous aucun contrôle effectif,
malgré le renversement de l'Union des Tribunaux Islamiques en
Décembre 2006 par l'armée éthiopienne et surtout
l'instauration d'un gouvernement de transition en 2009. En
réalité, dans ce territoire, s'épanouissent milices
privées, gangs mafieux, mouvements islamistes, groupuscules armés
de tous types116(*).
Au nombre des groupes islamistes en activité
dans le pays l'on a celui qui est baptisé Al-Ittihaad al-Islami
(Unité de l'Islam). Celui-ci est actif dans l'Ogaden
éthiopien et en Somalie méridionale. Ce groupe, du fait de ces
liens historiques avec Al-Qaïda, est très souvent mis en
cause dans les attentats qui sont fomentés dans la région. Selon
un Rapport du Département d'Etat américain, il serait responsable
des attentats d'Addis-Abeba en 1996 et 1997. Par ailleurs, depuis 2007, lors de
l'invasion éthiopienne, un autre groupe fait parler de lui. Il s'agit
d'Al-Shabaab qui est un mouvement à idéologie islamiste
sunnite avec pour objectif, la création d'un Etat islamique en Somalie.
Ce groupe s'est illustré le 21 Septembre 2013, lorsqu'il a
attaqué le centre commercial de Westgate à Nairobi. Une attaque
qui était une réaction à la campagne militaire que le
Kenya avait entreprise en Octobre 2011. Ce Faisant, cet attentat venait
démontrer comme d'autres par le passé, l'ampleur de la menace
terroriste dans cette région en particulier et en Afrique en
général. D'où l'urgence pour Washington de la combattre,
notamment en formant les forces de défense africaines.
2. La multiplication des programmes de lutte contre le
terrorisme en Afrique
Le redimensionnement doctrinal et géographique
de certains groupes locaux tels que le GSPC algérien ainsi que leur
connexion à d'autres groupes africains pour finalement s'insérer
au « réseau djihadiste transnational » fait de
l'Afrique, une zone d'intérêt stratégique pour les
Etats-Unis. Ceux-ci craignant en effet que la région toute
entière ne tombe aux mains des islamistes. Pour ce faire, les
américains mettent en avant, la coopération militaire avec les
nations partenaires. Lors du séminaire organisé du 8 au 10
Février 2003 à Washington par le Centre Africain d'Etudes
Stratégiques (CESA), Paul Wolfowitz déclarait :
« La lutte mondiale contre le terrorisme n'est pas seulement une
affaire américaine ou du monde développé ; elle
concerne également de plus en plus l'Afrique. Nous coopérons
étroitement avec nombre de nos partenaires africains afin de lutter
contre le terrorisme »117(*).
Ainsi, dans la partie Nord-ouest du continent,
L'engagement américain est consécutif à l'existence de
grands espaces mal gouvernés et non contrôlés qui
pourraient constituer des sanctuaires pour les terroristes118(*). C'est pourquoi en 2002, le
Département d'Etat lançait la Pan-Sahel Initiative
(PSI). Ce programme vise à aider le Mali, le Tchad, le Niger et la
Mauritanie à combattre la contrebande, les criminels internationaux et
les mouvements terroristes119(*). L'Initiative Pan-Sahel comporte une partie de
formation et d'appui de 60 jours pour renforcer les aptitudes des forces de
police et de sécurité, la sécurité des
aéroports et les procédures d'immigration et de douane120(*). Par la suite, naîtra
le Trans-Sahara Counter-terrorism Partnership (TSCTP) en 2005. Il est
censé combattre l'extrémisme violent et défaire les
organisations terroristes qui règnent au Maghreb et au Sahel en
renforçant les capacités anti-terroristes et la coordination
régionale et en discréditant l'idéologie
terroriste121(*).
Un autre levier anti-terroriste de l'AFRICOM au
Maghreb et au Sahara est l'Opération de liberté durable dans le
Trans-Sahara (Operation Enduring Freedom Trans-Sahara - OEF-TS). Il a
pour but d'aider les pays de ces régions à combattre
l'idéologie terroriste et le terrorisme à travers le partage de
l'information, l'interopérabilité des systèmes de
communication, l'organisation d'exercices militaires multinationaux conjoints
et combinés afin de promouvoir la coopération entre
Etats122(*). Ce
programme concerne des pays tels que l'Algérie, le Burkina Faso, le
Tchad, le Mali, la Mauritanie, le Maroc, le Niger, le Nigeria, le
Sénégal et la Tunisie. Les armées de ces différents
Etats doivent être capables de mener des opérations conjointes
contre les groupes terroristes123(*). Ce programme est rentré sous la
responsabilité de l'AFRICOM à la fin de l'Année 2008.
En Afrique de l'Est, Washington a mis sur pied
l'Initiative Anti-terroriste pour l'Afrique de l'Est (IAEA) en Juin 2003. Son
but est de juguler la menace terroriste dans cette région. Il concerne
entre autres des domaines comme la sécurité des côtes et
des frontières, la formation d'agents de police, d'immigration et de
douane, la sécurité portuaire et aéroportuaire ou encore
le démantèlement des réseaux financiers des
terroristes124(*). Un an
plus tôt, le CENTCOM mettait sur pied le Groupement des Forces
Interarmées et multinationales pour la corne de l'Afrique (CJTF-HOA).
Celui-ci a pour mission, de démasquer, combattre, désorganiser et
écarter toute activité terroriste dans la Corne de
l'Afrique125(*). Ainsi
cette force entraine les forces de sécurité dans la région
en matière de lutte anti-terroriste.
Dans le cadre de ces programmes, le commandement
américain organise environ une quinzaine d'exercices militaires par an
avec ses partenaires africains. Parmi ceux qui concernent la lutte contre le
terrorisme, l'on peut citer l'exercice Fintlock. Débuté
en 2006, il est planifié par la Special Operations Command
(SOCOM), dans la perspective de développer les capacités et la
collaboration entre les forces de sécurité dans la protection des
populations civiles. Se déroulant dans les nations du Sahel, il a pour
mission de promouvoir la coopération régionale afin de permettre
aux africains de stabiliser l'Afrique du Nord-Ouest. Et cela en
réduisant les sanctuaires et les soutiens aux organisations
extrémistes126(*). L'on peut également citerAfrica
lion. Il s'agit d'un exercice bilatéral annuel entre les Etats-Unis
et le Maroc. Il est destiné à promouvoir
l'interopérabilité et la compréhension mutuelle des
tactiques, techniques et procédures de chaque nation127(*).
Toutes ces initiatives montrent à suffisance le
degré d'engagement de l'AFRICOM dans la lutte contre le terrorisme en
Afrique. Un tel engouement se perçoit aussi dans la lutte contre la
piraterie maritime sur le continent.
B. La mobilisation américaine en faveur de la
lutte contre la piraterie maritime en Afrique
La piraterie maritime est l'une des plus grandes
menaces auxquelles le continent fait face aujourd'hui. Appréhendé
sous un prisme essentiellement intra-africain, ce phénomène cause
d'énormes dommages aux Etats du continent. Mais si l'on aborde la
question sous une perspective internationale, on se rend très vite
compte des enjeux que représente son éradication. En effet, la
piraterie maritime constitue une entrave au principe de la liberté des
mers. Or lorsqu'on sait que l'espace maritime abrite 90% du commerce mondial,
on comprend très logiquement pourquoi face à l'ampleur de la
menace (1), les Etats-Unis mettent sur pied des programmes de
formation pour la juguler (2).
1. L'ampleur de la menace
Lorsqu'on parle de piraterie maritime en Afrique, deux
régions viennent à l'esprit. Il s'agit de la Corne de l'Afrique
et du Golfe de Guinée. Car, ce sont deux zones qui sont le
théâtre d'attaques de pirates qui ont lieu sur le continent. Elles
ont toutes les deux en commun d'être des zones stratégiques. En
effet la Corne de l'Afrique est située à proximité d'une
grande route maritime qui assure le trafic entre l'Extrême-Orient et
l'Europe. Avec 20 410 navires y ayant transité en 2007, elle
assure, avec le Canal de Suez, plus de 7.5% du transport maritime
mondial128(*). De son
coté, le Golfe de Guinée est la région qui produit le plus
de pétrole en Afrique. En 2007, les Etats-Unis y importaient 18% de leur
consommation. Ce chiffre devrait atteindre 25% en 2025129(*).
L'ampleur de la menace ne peut s'apprécier
qu'au travers des chiffres qui sont publiés sur ce
phénomène. Même si la côte Est-africaine connait une
baisse d'attaques depuis 2012 avec 99 incidents contre 286 en 2011130(*), la Somalie dont les
ressortissants en sont les principaux acteurs, est toujours en
déliquescence. Par ailleurs, pendant que le nombre d'incident diminue,
leur taux de réussite augmente. C'est ainsi que sur 99 incidents
signalés en 2012, 13 se sont débouchés sur des
détournements de navires - ce qui fait un taux de réussite de
13,13% - alors qu'au cours de l'année précédente, ce
chiffre était de 11,54%. Puisque sur 286 attaques, seuls 33 navires
avaient été détournés131(*). Cette tendance
« baissière » vient quelque peu édulcorer la
réputation pas très enviable de ce pays d'Afrique de l'Est. Et
surtout lorsqu'on sait que c'est depuis le 4 Avril 2008 que ce pays se
révèle comme étant un acteur important du paysage maritime
international à travers la saisie d'un Navire de
croisière132(*).
Ce yacht qu'on appelait le Ponant avait à son bord, une
trentaine de membre d'équipage dont 22 français. Par ailleurs,
sur les 293 attaques enregistrées la même année, le Golfe
d'Aden et la Corne de l'Afrique en concentraient 92 auxquelles s'ajoutent 19
attaques perpétrées dans les eaux territoriales
somaliennes133(*).
Pour ce qui est du Golfe de Guinée, il faut
dire qu'il est devenu la deuxième région du monde la plus
affectée par les actes de piraterie. Parlant des chiffres, selon les
Bureau Maritime International, on est passé de 40 incidents en 2008
à 64 en 2012 en passant par 51 en 2011134(*). Ce qui traduit une réelle croissance de ce
phénomène dans la région.
Une telle situation ne peut être qu'alarmante
lorsqu'on sait que la plupart des échanges commerciaux, de nos jours
s'opèrent beaucoup plus par voie maritime. Sur le plan financier, selon
des estimations de 2012, les Etats de la zone du Golfe de Guinée
perdraient 2 millions USD par an du fait de ce
phénomène135(*). Si l'on ajoute à cela les pertes subies par
les Etats industrialisés du fait du détournement des navires et
des attaques des plateformes pétrolières, on peut comprendre la
mobilisation américaine à ce sujet. Dans l'approche de l'AFRICOM,
si le traitement social de la question est envisagé, il n'empêche
que l'accent soit mis sur la formation des forces de sécurité
africaines pour mieux y faire face.
2. La formation des armées africaines dans la
lutte contre la piraterie maritime
La piraterie maritime représente une grande
entrave à la santé de la marine marchande internationale. En
effet, dans son rapport de 2004, le BMI estimait que son impact
économique se chiffrait à 16 Milliards USD par an. Le niveau
élevé de ces pertes est en grande partie du à la
maritimisation économique136(*). Cette nouvelle donne de l'économie mondiale
est alimentée par les stratégies maritimes de différents
Etats du monde. Ceux-ci menant une politique « locale »
visant à développer les littoraux nationaux et une
géostratégie « globale » envisageant
l'insertion de la nation entière dans les réseaux maritimes
internationaux137(*). Or
cette propension vers les mers est particulièrement prononcée aux
Etats-Unis. Et ce du fait de leur position Géographique. En effet, dans
la perspective de Alfred Tayer MAHAN, « Si un Etat est
situé de manière à n'être ni forcé à
se défendre, ni poussé à s'étendre du coté
de la terre, ses aspirations seront dirigées vers la
mer »138(*). Si l'insularité peut expliquer le besoin de
Washington de contrôler l'espace maritime, les motivations sont
également économiques. C'est pourquoi en tant que nation
maritime, il fait de la libre navigation dans les mers, une condition
essentielle à sa prospérité économique. D'où
son engagement pour la lutte contre piraterie maritime sur les côtes
africaines. Pour ce faire, il travaille en synergie avec les Etats
côtiers.
Le cadre institutionnel fédérateur de
l'assistance militaire en matière de lutte contre la piraterie maritime
en Afrique est l'Africa Partership Station (APS). Lancé en
Octobre 2007 en organisant une première mission avec les Etats
africains, ce partenariat est destiné à renforcer les
capacités des partenaires africains à travers la formation, les
exercices et les opérations conjointes. Ce programme augmente la
conscience et le professionnalisme maritime des Etats et facilite
l'intégration régionale139(*). Dans le cadre de ce partenariat, l'AFRICOM organise
annuellement des exercices militaires sur le continent. C'est le cas de
l'exercice Africa Endeavour qui est un exercice interarmées
visant à développer l'interopérabilité en
matière de transmission et d'échange d'informations entre les
armées. Dans le même sillage, l'exercice ObangameExpress
est organisé chaque année par cette structure. Il s'agit d'un
exercice multinational destiné à augmenter les capacités
anti-piraterie des nations partenaires et à dissuader d'autres criminels
maritimes dans le Golfe de Guinée. Au-delà de l'avantage
lié à la création d'un cadre de partage de l'information
entre les armées, cette initiative permet aux nations du Golfe de
Guinée de mieux contrôler et de faire respecter leurs eaux
territoriales et leurs Zones Economiques Exclusives140(*). Sous les auspices du
Général Carter Ham alors commandant de l'AFRICOM, la session 2013
de cet exercice maritime avait proposé une large variété
de formations telles que l'arraisonnement et le contrôle des navires, des
opérations aériennes, des entrainements de communication et le
partage d'informations à l'échelle régionale141(*). Parmi les Etats
participants, il y avait le Cameroun, la Côte d'Ivoire, le Nigeria, la
Guinée équatoriale, le Gabon, la République du Congo,
São Tomé-et-Principe ou encore le Togo. Il y avait
également des Etats européens et américains tels que la
France, la Belgique, les Pays-Bas, l'Espagne ; le Brésil et bien
entendu les Etats-Unis.En Afrique de l'Est, l'AFRICOM supervise l'exercice
« Cutlass Express ». Il est basé sur la
lutte contre la piraterie à travers le partage de l'information et des
opérations coordonnées entre les marines internationales.
Dans un contexte marqué par une menace
disséminée, imprévisible et mutante, la nouvelle
stratégie sécuritaire américaine met officiellement
l'accent davantage sur la prévention que sur la réaction. Cette
nouvelle posture qui se fait sentir dès 2006 se traduit dans la doctrine
qui encadre le commandement américain pour l'Afrique. Cette doctrine qui
porte le nom de Stability Operations naît des cendres de celle
dite de MOOTW. Cette dernière ayant montré ses limites
sur le terrain. Le nouveau cadre d'engagement américain répond
donc officiellement à un besoin d'adaptation des réponses
sécuritaires à la spécificité de l'environnement
africain. C'est pourquoi l'AFRICOM fait de la formation des armées, un
référentiel important de son fonctionnement. Cette habilitation
des forces de défense et de sécurité se fait au travers de
la multiplication des programmes de lutte contre le terrorisme et la piraterie
maritime. Tous les deux toujours prégnants sur le continent. La
promotion de la formation militaire devrait permettre aux Etats africains
d'assurer leur propre sécurité. Il s'agit également pour
Washington de réduire quelque peu son engagement direct sur le sol
africain à travers le développement de forces sous-traitantes
agissant au service de ses intérêts. Cela permet de réduire
les pertes humaines au sein de l'armée - face auxquelles l'opinion
américaine affiche une grande hostilité. Cette démarche
est également destinée à limiter les critiques africaines
sur la nouvelle institution militaire. Cela montre que l'assistance militaire
américaine se fonde sur des raisons qui vont au-delà du simple
besoin d'adaptation des solutions à l'environnement sécuritaire
africain. Il s'agit en réalité pour Washington de protéger
ses intérêts menacés par les phénomènes
cités plus haut. Or une assistance sécuritaire fondamentalement
basée sur la protection des intérêts américains
semble avoir de nombreuses difficultés à assurer de
manière optimale, la sécurité sur le continent. Puisque
n'ayant pas pour référentiel dominant, la défense des
intérêts africains. D'où la nécessité d'une
appréciation critique de l'engagement de l'AFRICOM dans ce domaine.
Chapitre II : Une appréciation critique
de l'assistance sécuritaire américaine en
Afrique
Lors de sa création, l'AFRICOM a été
désigné comme étant responsable de la coordination des
activités de coopération sécuritaire américaines en
Afrique. Comme indiqué plus haut, cette structure a fait de la formation
militaire, l'une de ses activités principales. Si l'on s'y limite, cette
tendance apparemment altruiste peut faire ombrage à la mission
principale du Commandement Américain. Cet objectif principal
transparaît - malgré toute la rhétorique diplomatique -
dans le discours officiel. D'ailleurs, le général Carter HAM
déclarait sans ambiguïté que : « Africa
Command protects and defends the national security
interests »142(*). En réalité, loin de répondre
à une logique de solidarité internationale, la multiplication de
partenariats sécuritaires entre Washington et les Etats africains
répond plus à des besoins de cohérence. Il s'agit de
protéger les intérêts américains en s'arrimant
à l'environnement sécuritaire post-11 Septembre.
L'imprévisibilité et l'incertitude
liées aux nouvelles menaces poussent la superpuissance à mener
une lutte indirecte. C'est-à-dire par le biais de partenariats avec les
acteurs régionaux portant sur la sécurité143(*). Prescrite par le QDR de
2006, cette stratégie « indirecte »
répondrait également à une exigence des
réalités stratégiques liées aux réseaux
transnationaux. Car le caractère régional ou global du
problème frappe d'impertinence toute initiative unilatérale.
D'où le nécessité de la construction des capacités
des forces africaines144(*). Au-delà de ces précisions et
à l'observation, on se rend compte que l'assistance sécuritaire
américaine présente des disparités, des
irrégularités et des incongruités qui attirent tout de
même la curiosité des chercheurs. Très poussée dans
certaines régions du continent, elle est très morose dans
d'autres. Parfois, elle se trouve en désaccord avec les valeurs
fondatrices même de la société américaine. Des
éléments dont l'étude attentive pourrait permettre de
dégager les principales caractéristiques de cette assistance.
Ce que l'on sait d'emblée c'est que
l'engagement sécuritaire américain se fonde plus sur des
considérations réalistes qu'altruistes. Car celle-ci a pour
principal référentiel, la défense des
intérêts américains. Vu sous cet angle, les
préoccupations des africains sont considérées comme
étant périphériques. Ainsi pour mieux défendre ses
intérêts sur le continent, la superpuissance se sert d'une
assistance sécuritaire aux logiques biens spécifiques et
productrice d'incertitudes en termes de résultats (section
II), ceci lui permettant de prétendre à la
définition du paradigme sécuritaire prééminent
(section I).
SECTION I : ASSISTANCE MILITAIRE ET
REDEFINITION DU PARADIGME SECURITAIRE
L'assistance militaire est un pilier important dans la
stratégie américaine en Afrique. Celle-ci se concentre sur
certains thèmes qui constituent les priorités des USA. Or cela
semble avoir un impact assez fort sur les priorités sécuritaires
des Etats partenaires. Ceux-ci s'intéressant de plus en plus à
des référentiels que la Washington juge prioritaires. Ainsi par
effet d'entrainement, les priorités des Etats-Unis deviennent celles des
Etats africains. Cela est assez perceptible sur les questions de
l'insécurité maritime dans le Golfe de Guinée
(A) et de l'insécurité dans la Corne de
l'Afrique (B).
A. Le cas de l'insécurité maritime dans
le Golfe de Guinée
L'insécurité maritime dans le Golfe de
Guinée n'est pas un phénomène nouveau. Depuis plusieurs
années, cette zone fait face à de nombreuses crises. Celles-ci
étant liées entre autres à la délimitation des
frontières maritimes. Or depuis quelques temps, cette
problématique a quasiment disparu du débat sécuritaire de
la région (1), celui-ci étant désormais
dominé par la question de la piraterie maritime (2).
1. Quasi-disparition des problématiques
sécuritaires traditionnelles
v La question de l'exploitation harmonieuse des
ressources naturelles
Du fait de sa configuration géographique, le Golfe de
guinée est une région très conflictogène. En effet,
le bassin atlantique de l'Afrique centrale dispose d'un Etat fractionné
et semi-insulaire - la Guinée Equatoriale - et d'un Etat
archipélagique composé de deux îles principales : Sao
Tome et Principe145(*).
Cet éparpillement de certains territoires en fait un espace maritime
où les souverainetés des Etats se prolongent, se heurtent et se
superposent146(*). Dans
une telle configuration territoriale, les principes consacrés par la
convention de Montego Bay sont inapplicables. En fait, adopté
le 30 Avril 1982, en Jamaïque, ce texte divise l'espace océanique
en plusieurs zones maritimes sous juridiction nationale. Il s'agit de la mer
territoriale - 12 mile marins, - de la zone contiguë - 24
mile marins - et de la Zone Economique Exclusive (ZEE) qui va
jusqu'à 200 mile à partir de la côte. Or, l'espace
maritime d'Afrique centrale est caractérisé par la
proximité des territoires insulaires des rivages des Etats littoraux.
Conséquence, aucun Etat littoral qui borde ces eaux ne peut
espérer se projeter jusqu'à 200 miles de son littoral sans
rencontrer d'interruption du au prolongement de l'autre147(*).
Cette réalité a créé un
certain nombre de conflits sur fond de richesse pétrolière entre
ces Etats. C'est notamment le cas du différend entre le Gabon et la
Guinée Equatoriale qui remonte à 1963. Celui-ci est lié
à la dispute des ilots de Mbanié, Cocotier et Conga, tous
situés dans les baies de Corisco148(*). Il avait même abouti le 14 Août 1972,
à une expédition militaire de la part du Gabon pour revendiquer
la souveraineté de Mbanié149(*). D'autres différends territoriaux ont
existé ou existent encore entre le Cameroun et le Nigéria -
à propos de Bakassi - ou encore entre le Ghana et la
Côte-d'Ivoire. Tous ces différends portant sur la
délimitation des frontières maritimes. Pour y faire face, les
Etats du Golfe de Guinée ont mis sur pied la Commission du Golfe de
Guinée (CGG).
Cette institution a été initiée
à Yaoundé, par le Cameroun et le Nigéria lors des travaux
de leur commission des frontières. Ces travaux ont eu lieu du 27 au 30
Août 1991. La CGG est créée plus tard à Libreville
en 1999. Elle est chargée de « faciliter les consultations
régionales afin de prévenir, gérer et régler les
conflits pouvant découler de la délimitation des
frontières maritimes et de l'exploitation économique et
commerciale des ressources naturelles à l'intérieur des
frontières nationales »150(*). Donc fondamentalement, c'est de la
difficulté liée à la délimitation des espaces
maritimes entre les Etats de la région qu'est née institution.
Elle répond à la « nécessité de
mettre en place un mécanisme de dialogue et de concertation propre
à prévenir, gérer et régler les conflits
liés à l'exploitation économique et commerciale des
ressources naturelles situées aux limites territoriales et notamment aux
Zones Economiques Exclusives »151(*).
Contrairement à cette impulsion donnée
par la CGG, les questions de l'exploitation harmonieuse des ressources
naturelles et de la délimitation collégiale des frontières
maritimes deviennent de plus en plus absentes dans le débat concernant
la sécurité maritime en Afrique. Ainsi, si l'on observe le sommet
de Yaoundé - qui s'est tenu du 25 au 26 Juin 2013 - sur la
sécurité et la sureté maritime, le constat est clair.
L'ensemble des discours ignoraient quasiment ces problématiques
traditionnelles. Que ce soit les présidents de la CEDEAO, de la CEEAC ou
le représentant de la CGG, les discours ont convergé vers
d'autres référentiels.
Par ailleurs, cette réalité est traduite
par la virtualité de l'institution CGG. En effet, non seulement elle est
quasiment absente dans le débat relatif à la
sécurité maritime, mais également l'on a du mal à
voir le rôle qu'elle joue au quotidien pour la résolution des
litiges relatifs à la délimitation des frontières
maritimes. Si l'on prend l'exemple du différend entre le Gabon et la
Guinée Equatoriale, la rencontre qui a permis de faire un grand pas vers
la solution a été organisée à l'initiative du
secrétaire général des Nations Unies Kofi Annan. Elle
s'est tenue à Genève le 27 Février 2006 entre les
présidents Omar Bongo Ondimba (Gabon) et Theodoro Obiang Nguéma
Mbazogo (Guinée Equatoriale). C'est à cette occasion que les deux
chefs d'Etats ont décidé « procéder à
la délimitation définitive de leur frontières maritimes et
terrestres »152(*). On voit très bien que le rôle
prépondérant dans ce différend n'a pas été
joué par la CGG.
Similairement, les accords de Green Tree153(*) entre le Cameroun et le
Nigéria ont été signés à Green Tree
aux Etats-Unis, le 12 Juin 2006 sous les auspices du secrétaire
général des Nations Unies Kofi Annan. Les présidents Paul
Biya (Cameroun) et Olusegun Obassandjo (Nigéria) ont
négocié sur la base de l'arrêt rendu par la Cour
Internationale de Justice (CIJ) le 10 Octobre 2002, qui donnait raison au
Cameroun. Là encore, la CGG est restée virtuelle. Cette
virtualité traduit une réalité liée à
l'évolution du débat sécuritaire maritime en Afrique. Il
s'agit de la focalisation des attentions de l'ensemble des acteurs sur la
question de la piraterie maritime.
v La question des groupes insurrectionnels actifs dans
les zones maritimes
Contrairement à ce que consacre le discours
officiel des acteurs dominants, l'insécurité maritime ne se
limite pas aux actes de piraterie, de pêche illégale ou encore de
vols à main armée. Au-delà de la problématique
liée à la délimitation harmonieuse des frontières
maritimes et à une exploitation collégiale des ressources, il ya
un autre problème tout aussi intéressant. Il s'agit de celui qui
concerne les activités de certains groupes politico-militaires qui
entravent également la sécurité et la sureté des
mers. Ces derniers ont des revendications parfois politiques qui vont
au-delà de la simple volonté de nuire au trafic maritime.
C'est notamment le cas du Mouvement pour
l'Emancipation du Delta du Niger (MEND). Celui-ci est dans le viseur des
Etats-Unis. Selon l'AFRICOM, il constitue un des facteurs qui entravent les
intérêts sécuritaires américains dans le Golfe de
Guinée. Considéré comme étant un acteur important
de l'insécurité maritime, il est qualifié de gang
illégal154(*). Or
l'on sait qu'il est fondamentalement engagé dans un combat qui a pout
référentiel dominant, une meilleure redistribution des ressources
pétrolières du Nigéria. Son endiguement ne saurait donc se
résoudre à la multiplication d'actions anti-piraterie. Mais par
un compromis politique avec le gouvernement.
D'autres groupes peuvent être cités ici.
L'on a le cas du MAIB155(*), duBAMOSD ou encore des BFF. Tous méritant un
traitement particulier. Au vu de leur nature, ces menaces ne sont que
très peu sensibles aux seules mesures
« anti-piraterie ». Car elles biaisent la
compréhension de la situation et éludent les problèmes
fondamentaux qui sont également constitutifs de cette
insécurité. Or c'est cette approche qui encadre la mobilisation
institutionnelle des Etats du Golfe de Guinée dans le traitement de
l'insécurité maritime.
Carte 3 : ZEE dans le Golfe de Guinée. Sources:
http://aquaculture-aquablog.blogspot.com/2010/01/afrique-de-grands-pecheurs-ruines-par.html,
consulté le 2 Avril 2014
2. Mobilisation institutionnelle et Cristallisation du
débat sécuritaire autour de la luttecontre la piraterie
maritime
L'assistance américaine en vue de la lutte
contre la piraterie maritime dans le Golfe de Guinée a un double impact
sur les politiques sécuritaires régionales. Premièrement,
elle est une sorte de pression exercée sur les Etats de cette zone.
Pression allant dans le sens d'une stigmatisation de leur incapacité
à y faire face. Deuxièmement, la multiplication des programmes de
formation américains renforce le sentiment d'urgence sur cette question.
Sans toutefois estimer que la piraterie maritime ne représente pas une
menace, encore moins que la situation n'est pas urgente, l'on précise
seulement qu'elle a éclipsé d'autres problématiques
liées elles-aussi à la sécurité maritime et qui
méritent de l'attention.
Par effet d'entrainement la piraterie maritime est
devenue le référentiel dominant de la mobilisation discursive et
institutionnelle sur la question de l'insécurité maritime. Ce
thème fait l'objet de nombreux sommets de la part des organisations
sous-régionales d'Afrique centrale et occidentale. La preuve en est que
le premier sommet sur la sécurité et la sureté maritimes
à l'échelle du Golfe de Guinée était
focalisé sur la piraterie maritime156(*). Puisque le conseil de sécurité des
Nations Unies, dans sa résolution 2039 du 29 février 2012, avait
recommandé à la CEEAC, à la CEDEAO et la Commission du
Golfe de Guinée, la tenue d'un sommet des Chefs d'Etats et de
Gouvernements sur la piraterie maritime et les vols à main armée
dans le Golfe de Guinée.
La Commission du Golfe de Guinée dont la
création a été fondamentalement motivée par la
problématique frontalière, sur le plan pratique est moribonde.
Elle n'a tenu sa toute première réunion (« Sommet »)
qu'en 2006 à Libreville, or elle doit se réunir chaque
année157(*). En
outre, son centre d'intérêt traditionnel ne parait tellement pas
à l'ordre du jour de ces sommets. C'est ainsi qu'au sommet de la CGG qui
s'est tenu à Malabo en Août 2013, le président
équato-guinéen a estimé que face à la
recrudescence des actes de piraterie, il était nécessaire
d'entreprendre une action collective, concertée et coordonnée
à travers « la création d'un service de surveillance et
de sécurité maritime qui opère dans les États
membres pour compenser ces actes qui violent la sécurité et la
stabilité de la zone, ainsi que l'intégration de tous les Etats
riverains du Golfe en tant que pays membres de cette organisation.
»158(*). Ceci
montre clairement que la piraterie maritime est au centre des
préoccupations de cette institution.
Pour faire face à l'insécurité
maritime, les Etats de le CEEAC, dans le cadre du Conseil de Paix et de
Sécurité de l'Afrique Centrale (COPAX), ont mis sur pied, le
Centre Régionale de Sécurité Maritime de l'Afrique
Centrale (CERSMAC). Créé par le protocole d'Accord sur la gestion
de la stratégie de sécurisation des intérêts vitaux
en mer, signé à Kinshasa le 24 Octobre 2004, cette structure est
désignée comme étant le principal organe chargé de
la mise en oeuvre de la stratégie sous-régionale de
sécurisation des espaces maritimes. Il est assisté du Centre
Multinational de Coordination (CMC) et du Centre Opérationnel de la
Marine (COM). La CEEAC a même été divisée en trois
zones. Il s'agit des zones A, B et D. La dernière organisera des
patrouilles conjointes entre les principaux Etats membres à partir du 7
Mai 2009 à Douala159(*). Par la suite, un plan de surveillance
baptisé SECMAR 1 sera signé par les chefs d'Etats Majors
Généraux de cette zone160(*).
Dans cette reconversion thématique, la
sécurité des installations et infrastructures maritimes est
devenu le point focal de la sécurité maritime. Or même si
ces nouveaux référentiels représentent des enjeux
importants dans la vie économique des Etats africains, leur mise en
exclusivité par les Etats-Unis répond bien à une logique
stratégique. Il s'agit de confiner les pays de cette région
à la défense des intérêts américains
hautement importants en mer. Donc la redéfinition des priorités
en matière de sécurité maritime dans le Golfe de
Guinée s'inscrit dans le sens de l'entretien d'une sous-traitance
stratégique également perceptible dans le traitement de
l'insécurité en Afrique de l'Est.
B. L'insécurité en Afrique de l'Est
Depuis les attentats des ambassades américaines
de 1998 et surtout ceux du 11septembre 2001, l'Afrique est devenu un front
important dans la lutte contre le terrorisme menée par les Etats-Unis.
Ils mettent à cet effet l'accent sur l'assistance sécuritaire qui
se traduit par de nombreux programmes de formation. Or cette démarche,
puisque basée sur la lutte contre le terrorisme (1),
érige cette menace en principal facteur d'insécurité dans
la région (2).
1. Une assistance militaire anti-terroriste en Afrique
de l'Est
L'Afrique de l'Est est une zone hautement
stratégique pour les Etats-Unis, puisque c'est ici que se trouve la
Corne de l'Afrique. Or c'est à partir de cette dernière
région que Washington peut surveiller la production et
l'évacuation du pétrole du Golfe Arabo-persique, veiller sur
l'équilibre régional en particulier sur l'Irak et l'Iran,
contrôler le débouché de la Mer Rouge et du canal de Suez
ou encore intervenir si nécessaire en Afrique161(*). Tous ces atouts constituent
autant d'enjeux stratégiques pour lui. Or les intérêts
américains dans la région sont sous la menace permanente de
groupes armés depuis les attaques des ambassades en 1998.
Déjà, en Février 2008, cette inquiétude se
confirmait par les propos de chef du Renseignement National (Director of
National Intelligence), McCONNELL qui affirmait devant le congrès
qu'au début de l'année 2006, Al-Qaïda
s'était installé en Somalie de manière
considérable162(*). Cette mise engarde venait s'ajouter à
d'autres qui lui sont antérieures et qui ont permis à Washington
de prendre la mesure de la menace.
C'est pourquoi depuis les attentats de Nairobi et de
Dar es-Salaam, les Etats-Unis multiplient les initiatives d'assistance
militaire. Ces programmes sont basés sur la stratégie du
contre-terrorisme qui consiste, d'après le DOD, à entreprendre
une action soit directement contre les réseaux terroristes, soit
indirectement afin de rendre l'environnement régional impraticable pour
des réseaux163(*). Cette déclaration présente les
objectifs de l'assistance militaire américaine en Afrique de l'Est. Il
s'agit de rendre les armées de la région capables d'endiguer et
de traquer les mouvements considérés comme terroristes. Pour y
parvenir, Washington met en place un certain nombre de programmes
destinés à renforcer les capacités des armées
locales. Il s'agit notamment de l'Initiative Antiterroriste de l'Afrique de
l'Est (EACTI). C'est un programme qui est sous la tutelle du Département
d'Etat et qui a été mis sur pied en 2003. Celui-ci est
destiné à renforcer les capacités antiterroristes de
Djibouti, de l'Ethiopie, de l'Erythrée, du Kenya, de la Tanzanie et de
l'Ouganda164(*). Sur les
années 2003 et 2004, le gouvernement l'a doté de plus de 100
millions USD165(*). Dans
le cadre de cette initiative, des Pays comme le Kenya, l'Ethiopie ou encore
Djibouti ont reçu de la formation et du matériel tactique. Ils
ont également reçu des fonds pour renforcer leurs contrôles
frontaliers. Ces Etats tout comme l'Erythrée, la Tanzanie et l'Ouganda
ont également bénéficié de la formation de leurs
forces de police, du renforcement de leurs capacités de contrôle
côtier166(*).
L'autre programme important dans le dispositif
anti-terroriste américain en Afrique de l'Est est le Groupement des
Forces Interarmées et Multinationales pour la Corne de l'Afrique
(CJTF-HOA). C'est une force qui a été mise sur pied en Octobre
2002 par le CENTCOM avec pour mission, détecter, perturber et enfin
vaincre les groupes terroristes transnationaux opérant dans la
région167(*). Ses
prémices se trouvent dans la Stratégie de Sécurité
Nationale de 2002 qui la confinait à des actions militaires visant
à détecter et à détruire les terroristes avant
qu'ils n'atteignent les frontières américaines. Mais depuis peu,
cette mission a graduellement évolué pour inclure
désormais la coopération militaire dans le cadre d'une approche
indirecte de lutte anti-terroriste168(*). Dans sa zone de responsabilité qui comprend
l'Ethiopie, l'Erythrée, le Kenya, Djibouti, les Seychelles, la Somalie
et le Soudan, cette structure assure la formation des armées en
matière de lutte anti-terroriste, de collecte des renseignements, de
professionnalisation ou encore de conduite des actions civiles. Les deux
programmes américains étudiés ici montrent clairement que
l'assistance sécuritaire américaine est fondamentalement
basée sur la lutte contre le terrorisme. Or cela contribue à
ériger ce phénomène en défi sécuritaire
prioritaire pour les Etats de l'Afrique de l'Est.
2. La reconversion anti-terroriste des efforts
sécuritaires en Afrique de l'Est
L'activisme américain pour la lutte contre le
terrorisme en Afrique de l'Est a un grand impact sur la définition de
l'ordre des priorités sécuritaires dans cette région. En
effet, la tendance qui se dessine est que la plupart de ces Etats consacrent
plus d'efforts à la lutte contre le terrorisme. Cela faisant penser
à une sous-traitance stratégique au profit de leur sponsor qu'est
la puissance américaine. C'est ainsi que grâce au soutien qu'elle
avait bénéficié des Etats-Unis, l'Ethiopie envahissait la
Somalie en Décembre 2006. Après que l'Union des Tribunaux
Islamiques ait pris le pouvoir. Le soutien des Special Operations
Forces (SOF) - ou Forces d'opérations Spéciales -
américaines a confirmé la thèse d'une expédition
anti-terroriste169(*).
En réalité, l'intervention éthiopienne en Somalie
s'inscrivait dans le cadre de la Guerre Globale contre la Terreur (GWOT)
engagée par les Etats-Unis en 2001. Et c'est à l'aune de ce
paradigme anti-terroriste que ce conflit avait été
géré170(*). Selon ce paradigme il n'y avait pas de
différence entre les militants djihadistes internationaux et les
islamistes locaux. Les autorités américaines avaient alors
affirmé que l'Union des Tribunaux Islamiques et Al-Qaïda
sont un et identiques171(*). Or une telle analyse n'était pas
adaptée à la nature de la menace qui avait des
spécificités locales ne relevant forcément pas du jihad
international d'Al-Qaïda. Cela est d'autant plus pertinent qu'il
est recommandé dans un tel contexte de résoudre le conflit selon
une approche « bottom-up » qui implique la
participation au premier plan, des populations locales et selon la culture
locale172(*). Ainsi,
dans un processus où devraient participer les leaders religieuses
locaux, les notables de communautés ou encore la société
civile, l'application de la charia à une échelle locale pourrait
être une solution provisoire. Puisque répondant à la
culture locale173(*).
Dans un tel contexte, la force militaire ne doit créer que les
pré-conditions à d'autres actions destinées à
gérer le problème selon la culture locale.
C'est ce que semble n'avoir pas compris la Mission de
l'Union Africaine en Somalie (AMISOM). Celle-ci s'est naïvement
empêtrée dans l'application aveugle de la stratégie
anti-terroriste de la GWOT qui consiste à identifier et à
détruire les terroristes174(*). En effet, l'AMISOM, dans son obsession
anti-terroriste, a juste relayé l'action de l'Ethiopie qui consistait
à renverser le régime de l'UTI. Or ce régime avait
commencé à stabiliser le pays. En écartant les partisans
de l'UTI du processus politique et en essayant d'imposer un ordre
étranger aux spécificités locales, les interventions de
l'Ethiopie et de l'Union Africaine ont abouti à un échec. L'hyper
militarisation à des fins de « lutte contre le
terrorisme » ayant conduit à un désordre dans le Sud du
pays175(*).
Ceci montre à suffisance comment la logique
anti-terroriste américaine a supplanté la tradition de
règlement des conflits de l'UA qui d'habitude met l'accent sur la
négociation. Ce que semblent avoir oublié les dirigeants de cette
institution c'est que dans une guerre asymétrique, la victoire tactique
peut ne pas aboutir à la victoire stratégique. Mieux la victoire
purement militaire ne charrie pas automatiquement le succès politique
pourtant crucial dans ce genre d'opération176(*). Vaincre les rebelles de
l'UTI sur le terrain ne suffit pas à enclencher un processus politique
plein de succès. Par contre, l'usage orgueilleux de moyens militaires -
formation et logistique - largement fournis par Washington ne peut que
réduire les rebelles à la clandestinité et accroître
l'insurrection. Car - sans mettre l'accent sur les conditions
d'évolution du contexte social, politique et économique, - les
activités de destruction peuvent délégitimer la force au
sein de l'opinion nationale177(*). Malheureusement tel a été le cas en
Somalie. D'abord lors de l'intervention éthiopienne qui a
entrainé la création de la milice Al-Shabaab et ensuite
lors du déploiement de l'AMISOM qui ne cesse d'être la cible
d'attaques de la part de différents groupes armés.
L'on peut ainsi logiquement aboutir à la
conclusion de l'échec de la Mission africaine dans le pays. Car non
seulement l'usage aveugle de la violence ne peut qu'entrainer la violence, mais
elle handicape également le processus politique. Jusqu'ici, l'AMISOM n'a
pas pu favoriser le dialogue politique entre les groupes armés -
considérés comme étant terroristes - et le Gouvernement
Fédéral de Transition (GFT). Elle se limite plutôt à
diaboliser un camp tandis que l'autre est légitimé. Ce qui ne
facilite pas le processus de sortie de crise et renforce l'insurrection.
La façon dont le conflit somalien est
géré montre à suffisance à quel point la lutte
contre le terrorisme occupe désormais une place
privilégiée dans l'agenda sécuritaire des Etats africains.
Dans ce sens, ces Etats sont devenus des sous-traitants stratégiques aux
problèmes sécuritaires américains. Cette situation est
alimentée par l'assistance sécuritaire de Washington qui,
à l'observation a certaines logiques spécifiques avec des
résultats incertains.
SECTION II : LOGIQUES D'UNE
ASSISTANCE SECURITAIRE AUX RESULTATS INCERTAINS
Pour prévenir et combattre les menaces à
leurs intérêts, les Etats-Unis s'investissent dans le renforcement
d'alliances avec les Etats africains. Une analyse attentive de cette assistance
sécuritaire laisse entrevoir un certain nombre de tendances qui semblent
caractériser la coopération militaire américano-africaine.
Celle-ci est déterminée par une variable principale mais pas
exclusive. Il s'agit de l'ampleur de la menace dans différentes
régions. Il parait assez claire que cette variable conditionne la
nature, la destination et surtout le volume de l'aide militaire
américaine sur le continent africain. Il n'est donc pas surprenant de la
voir se concentrer dans certaines régions puisqu'elle répond
à une logique sélective (A) cela aboutissant
à des résultats mitigés (B).
A. Une assistance militaire sélective
Dans un contexte marqué par la
prolifération de nouvelles menaces en Afrique, le renforcement et le
maintien des capacités de réponse aux crises est indispensable
pour les Etats-Unis. Cela demande d'énormes moyens. Si cette contrainte
peut expliquer la sélectivité de l'assistance militaire
américaine178(*),
elle n'est pas suffisante. Car, dans les faits, les principaux programmes
sécuritaires de cet Etat sur le continent africain se concentrent
très souvent dans des zones considérées comme étant
d'intérêt stratégique (1), tout en
marginalisant celles considérées comme étant
périphériques (2).
1. priorisation des zones à
intérêts stratégiques
L'assistance militaire des Etats-Unis en Afrique est
en majeure partie conditionnée par l'existence d'une menace à
leurs intérêts stratégiques. L'objectif ici étant de
rendre les armées de certaines régions plus aptes à y
faire face. Sur le continent, les régions qui bénéficient
des plus importants programmes d'assistance militaire américains sont
l'Afrique du Nord, l'Afrique de l'Est et le Golfe de guinée. Ces
différentes zones représentent ou regorgent des
intérêts stratégiques pour les USA. En Afrique du Nord, les
vastes terres du Sahara, de la Mauritanie à l'Ouest au Soudan à
l'Est, qui ont été des itinéraires de contrebande depuis
des siècles, peuvent aussi être des secteurs de choix pour les
groupes terroristes179(*). L'Afrique de l'Est - et beaucoup plus
précisément la Corne de l'Afrique - qui jouxte une route maritime
importante, constitue un front important dans la lutte contre le terrorisme.
Pour sa part, le Golfe de Guinée est la région où se
trouvent les deux premiers producteurs de pétrole en Afrique. Il s'agit
respectivement du Nigéria et de l'Angola. La production du premier
devrait, selon les estimations, atteindre les 4,42 millions de baril par jours
à l'horizon 2020, pendant que les prévisions du deuxième
s'estiment à 3,28 millions de barils par jour180(*).
Du fait de ces atouts, ces différentes
régions constituent des intérêts stratégiques de la
part de Washington. C'est la raison pour laquelle elles concentrent la plupart
de ses programmes d'assistance militaire. En Afrique du Nord, l'on peut
énumérer des programmes comme la PSI créée en
2002 ; le TSCTP initié en 2005 ou encore l'OEF-TS lancée
à la fin d'année 2008. Cette partie de l'Afrique
bénéficie également d'un certain nombre d'exercices
militaires. C'est le cas des exercices Fintlock ou encore Africa
Lion. Tous deux basés sur la lutte contre le terrorisme. Même
si le Golfe de Guinée ne fait pas l'objet de la mise sur pied d'un
Programme à la dimension de ceux cités plus haut, il est tout de
même le théâtre de plusieurs exercices militaires conjoints.
C'est le cas d'Obangame Express, de Med Accord Central ou
encore d'Africa Endeavour181(*).
L'Afrique de l'Est a bénéficié de
la mise sur pied de programmes tels que l'EACTI en 2003, remplacée par
l'EARSI en 2009. Par ailleurs, c'est cette région qui dispose de la plus
grande base américaine sur le continent. Il s'agit de celle du Camp
Lemonnier à Djibouti. Cette base abrite la CJTF-HOA qui est le bras
armé de l'OEF-HOA. Cette région abrite également des
exercices militaires. L'on peut citer Cutlass Express, Estearn
Accord ou encore Natural Fire. L'importance de cette
région aux yeux de Washington s'est confirmée à l'occasion
du conflit en Somalie. Plus précisément après la prise de
Mogadiscio par l'Union des Tribunaux Islamiques. La mobilisation des Etats-Unis
face à cette situation avait été grande.Washington avait
alors apporté son soutien à l'AMISOM. Cela s'est fait à
travers un soutien logistique et une formation avant le déploiement des
troupes. Ainsi dans le cadre de l'ACOTA, plus de 8400 soldats ougandais ainsi
que 7000 burundais ont été formés avant leur intervention
en Somalie182(*). Par
ailleurs, le Kenya qui est un acteur important dans la
« stabilisation » de la Somalie est l'un des plus grands
bénéficiaires du programme Anti-Terrorism Assistance
(ATA) dans le monde. En 2010, il était à la quatrième
place derrière l'Afghanistan, la Jordanie et le Pakistan183(*). Ces différents
éléments témoignent de la sélectivité de
l'assistance militaire américaine.
Au-delà du nombre de programmes accordés
à ces différentes régions prioritaires, la tendance
à la priorisation des zones d'intérêts stratégiques
se traduit également dans les volumes de fonds alloués dans le
cadre des initiatives sécuritaires. Ainsi, dans le Sahel, la PSI -
devenue TSCTP - qui avait un budget de 16 millions USD en 2005 a vu celui-ci
augmenter jusqu'à 100 millions USD en 2007. Cette somme étant
devenue le budget annuel de ce programme184(*). De même, selon les chiffres de 2011, l'EACTI,
supervisée par le DOS avait un budget de 100 millions USD185(*). Par ailleurs, en Afrique de
l'Est, depuis 2007 - date de la prise de pouvoir par l'Union des Tribunaux
Islamiques en Somalie - l'aide militaire bilatérale des Etats-Unis
destinée aux pays de la région a considérablement
augmenté. Au Kenya, les financements du DOD sont passés de 453
000 USD en 2006 à 5 793 000 USD en 2007 ; en Ethiopie, on est
passé de 63 000 USD en 2006 à 9 357 000 USD ; un autre
exemple est celui de Djibouti où ces sommes sont passées de 15
000 USD en 2006 à 8 903 000 en 2007186(*). Ceci fait de l'année 2007, une année
cruciale dans l'assistance militaire américaine en Afrique de l'Est. Ces
chiffres permettent également de voir que le soutien accordé
à l'Afrique dans les politiques sécuritaires de Washington
était largement motivé par la stratégie de lutte contre le
terrorisme187(*). Si
donc la promotion des intérêts stratégiques constituent le
principal référentiel de la mobilisation des programmes de
coopération sécuritaire américains, l'on comprend tout
logiquement que les zones qui ne présentent pas ces enjeux soient
marginalisées.
2. Marginalisation des « zones
périphériques »
Contrairement à la description faite plus haut,
certains coins de l'Afrique sont considérés comme étant
périphériques dans la planification stratégique
américaine. Cela s'explique par le faible degré d'importance
qu'ils représentent pour les USA. Les menaces aux intérêts
américains n'y seraient pas aussi importantes et virulentes que dans les
régions jugées prioritaires. A l'intérieur de l'Afrique de
l'Est que nous avons identifié comme zone d'intérêt
stratégique, ces disparités sont bien perceptibles. Lorsqu'on
observe l'assistance militaire américaine assurée à
travers la section 1206 de la National Defense Autorisation
Act188(*) (NDAA) de
2006, l'on se rend compte que la somme attribuée à un pays comme
l'Ethiopie - 34,800 USD entre 2006 et 2010 - est largement supérieure
à celle allouée à un ensemble de pays que sont la
Tanzanie, le Mozambique, l'Ile Maurice et les Seychelles. Cette dernière
ne s'élève qu'à 9300 USD sur la même période
et elle est presque concentrée sur la sécurité
maritime189(*).
Pourtant, l'essentiel de l'assistance américaine dans la région
se focalise sur la lutte contre le terrorisme. L'on pourrait expliquer une
telle déconsidération par le fait que ces Etats ne soient pas
géographiquement proches de la Somalie comme le sont des pays tels que
le Kenya, Djibouti ou encore l'Ethiopie. Cela ne leur conférant pas une
position géographique clé dans le traitement de la menace
terroriste à Mogadiscio. C'est pour cela que les Etats-Unis
préfèrent d'autres acteurs plus proche du champ de bataille.
Une logique quelque peu semblable s'applique
également à l'Afrique australe et aux Grands Lacs. En effet, bien
que la partie Sud du Continent représente des enjeux pour les Etats-Unis
- notamment d'énormes ressources naturelles et l'émergence de
l'Afrique du Sud - la superpuissance n'y fait pas face à une menace de
grande envergure comme le terrorisme ou la piraterie maritime. Et même en
l'existence d'une menace réelle, Washington se sert de l'Afrique du Sud
comme Etat pivot pour l'endiguer. Dans ce contexte, on peut naturellement
comprendre que la région ne bénéficie pas d'un grand
programme d'assistance sécuritaire.
Dans les Grand Lacs, depuis que le gouvernement
soudanais et perçu comme étant la plus grande menace à la
stabilité régionale, les Etats-Unis ont entrepris d'accorder le
maximum de soutien aux ennemis de Khartoum190(*). C'est ainsi que le Rwanda et l'Ouganda ont
bénéficié de son soutien militaire. Si cette assistance
peut être prise en compte, elle n'a rien à voir avec celle dont
ont bénéficié certains Etats du Maghreb ou de la Corne de
l'Afrique. Par ailleurs la RDC qui vit un terrible conflit depuis le milieu des
années 1990 ne bénéficie que de sommes très
modestes de l'aide militaire américaine. Dans un conflit qui a fait plus
de 5 millions de morts, Washington n'a pu débourser que 5,5 millions USD
en 2009 pour la réforme d'une armée congolaise de 164 000 hommes.
Celle-ci devant protéger 65 millions de personnes191(*). Cette somme est très
insignifiante si on la compare à celle allouée à un petit
Etat comme le Libéria. Ce pays en cette année 2009, a reçu
49,65 millions USD pour la formation de 2000 soldats devant protéger 4
millions d'habitants192(*). L'intérêt porté à ce
pays peut être expliqué par la volonté de Washington de
protéger ses intérêts économiques sur le terrain.
L'habilitation des forces libériennes devrait leur permettre d'assurer
la sécurité des groupes industriels américains qui
opèrent dans cet Etat193(*).
Vu sous cet angle, la guerre de la RDC, plus
dévastatrice que celle de la Somalie, ne fait pas l'objet d'autant
d'attention de la part des USA. L'on n'observe pas un grand enthousiasme de la
part de Washington pour la résolution du conflit congolais comme c'est
le cas avec celui somalien. Celui-ci s'était déjà
opposé à une intervention internationale décidée
par les résolutions 1078 et 1080 du conseil de sécurité
des Nations Unies194(*).
Cette intervention devait être menée par une force multinationale.
Et ce dans la perspective de venir en aide aux centaines de milliers de
réfugiés qui avaient été attaqués dans leurs
camps dans le Kivu par les rebelles Banyamulenge et l'armée rwandaise.
Cette désinvolture, voire cette complicité américaine
traduit le peu d'intérêt accordé par Washington à
certaines problématiques conflictuelles en Afrique. Il s'agit de
conflits qui ne remettent pas fondamentalement en cause ses
intérêts. C'est pourquoi l'on n'a pas vu autant de fermeté
de sa part face aux groupes rebelles congolais comme c'est le cas en Somalie.
Par ailleurs on comprend difficilement pourquoi l'Union des Tribunaux
Islamiques est qualifiée de groupe terroriste pendant que le M23, qui
terrorise également la population pour l'atteinte d'objectifs politiques
reste épargné de cette qualification. Par contre l'assistance
sécuritaire américaine allait plutôt dans le sens du
renforcement de la posture des groupes rebelles. Puisque ceux-ci
bénéficiaient de l'appui du Rwanda, alors allié important
de la superpuissance195(*).
Tout ce qui a été démontré
plus haut montre à suffisance que les ressources allouées dans le
cadre de l'assistance sécuritaire américaine ne reflètent
pas les priorités les plus pressantes des africains196(*). Conséquence, cette
assistance se déploie difficilement aujourd'hui, car elle aboutit
à des résultats mitigés.
B. Résultats mitigés de l'assistance
sécuritaire américaine
Ayant pour principal référentiel, la
défense des intérêts américains, l'assistance
militaire des Etats-Unis aux Etats africains n'aboutit pas très souvent
aux résultats escomptés officiellement. C'est-à-dire la
prévention et la réduction des conflits. Dans le soutien qu'il
apporte aux autorités du continent, Washington a contribué
à la construction d'Etats pivots qui sont des acteurs importants dans le
maintien de la stabilité régionale (1)
même si ceux-ci ont très souvent été tentés
par l'aventure hégémonique (2).
1. Les Etats pivots : des acteurs importants pour
la stabilité régionale
L'aide militaire américaine a un pan
bilatéral assez important. Cette démarche consacre l'habilitation
de certaines puissances régionales. Celles-ci devant désormais
assurer le maintien de la stabilité à l'échelle de la
région. La « politique de l'Etat pivot » est
fondée sur la pratique renouvelée d'alliances techniques
informelles avec certains Etats africains considérés comme
leaders régionaux197(*). Cette politique a connu une nouvelle impulsion en
raison de la mort de 18 soldats américains à Mogadiscio en 1993
et de l'arrivée au pouvoir de Bill Clinton lors des élections de
Novembre 1994. La nouvelle administration est quelque peu réticente aux
interventions militaires américaines en Afrique. D'où
l'élaboration de la « doctrine Powell ». Alors
secrétaire d'Etat, ce dernier estime qu'il faut cultiver des liens
étroits avec les puissances régionales du continent qui devraient
assurer la stabilité dans leurs régions198(*). Cela permettant à
Washington d'éviter au maximum de s'engager directement sur le continent
tout en conservant une capacité de maitrise des questions
stratégiques cruciales qui y sont soulevées199(*). L'Etat pivot a un double
rôle dans le maintien de la stabilité régionale. Il est non
seulement un acteur diplomatique important, mais aussi un commando
avancé pour les interventions militaires.
Forts du soutien qu'ils bénéficient des
USA, les Etats pivots jouent un rôle diplomatique indispensable à
la stabilité régionale. En effet, les partenaires clés de
Washington travaillent soit à prévenir, soit à stabiliser
les situations de crises intra et interétatiques. C'est à travers
cette grille que l'on peut apprécier l'activisme diplomatique de
l'Ouganda pour la résolution des crises qui sévissent dans la
région des Grands Lacs. Ce fut le cas le 24 Novembre 2012 lorsque le
Président Yoweri Museveni organisait le cinquième sommet
extraordinaire de la Conférence Internationale sur la Région des
Grands Lacs (CIRGL). Celui-ci s'est tenu à Kampala. Ce même Etat
avait déjà organisé d'autres sommets extraordinaires sur
le même conflit. Ils ont lieu les 7 et 8 Août ; le 8
Septembre ; ou encore le 8 Octobre 2012. Les performances diplomatiques
ougandaises se révèlent également le 9 Juin 2011. C'est
à cette date que furent signés à Kampala, un accord entre
le Gouvernement Fédéral de Transition (GFT) de Sharif Sheikh
Ahmed et le représentant du parlement fédéral de
transition en la personne de Sharif Hassan Sheikh Aden. Ces négociations
se sont déroulées sous les auspices du président Museveni.
Cet accord avait abouti sur une entente concernant le processus de terminaison
de la transition200(*).
Sur un plan strictement militaire, certains Etats
considérés comme étant pivots peuvent servir de tremplin
ou de bases-arrière aux forces américaines. Mais ces derniers
peuvent également eux-mêmes s'investir militairement dans les
conflits régionaux en vertu de la puissance militaire qui est issue de
leur coopération militaire avec Washington.
Dans le premier cas de figure, on peut noter le
rôle de Djibouti dans la lutte contre la piraterie maritime dans la
Corne de l'Afrique. Du fait de sa position géostratégique, ce
pays constitue un véritable poste d'observation des activités
liées à ce phénomène. C'est en vertu de cet atout
qu'il abrite la base de la CJTF-HOA. Ce qui fait de lui, un hub
anti-piraterie201(*). La base militaire du camp
Lemonnier est aussi déterminante dans la lutte contre
Al-Qaïda au Moyen-Orient. Elle est la base arrière de
certaines attaques comme celle de Novembre 2002 au Yémen202(*). Cependant, force est de
noter que ce pays ne se limite pas essentiellement à une posture de base
arrière. Il s'investi également dans des interventions
militaires. C'est ainsi qu'il avait décidé de l'envoi, en
Somalie, de 1000 hommes en fin d'année 2011. L'objectif étant de
sécuriser davantage la capitale Mogadiscio et participer notamment
à la surveillance de l'aéroport203(*). L'activisme de Djibouti en Afrique de l'Est est
certes considérable, mais elle n'est que très modeste à
côté de celle du Kenya par exemple.
En effet, depuis le déclenchement de la guerre
contre Laurent Désiré Kabila, le Kenya est désigné
comme la nouvelle figure du dispositif américain dans les Grands Lacs.
Bénéficiant de la plupart des programmes américains dans
la zone, il est considéré comme le meilleur pilier
régional possible204(*). C'est en vertu du soutien militaire
américain que Nairobi était intervenu en somalie en Octobre
2011. L'objectif étant de combattre les milices Al-Shabaab mais
aussi de protéger sa frontière Nord-est sans cesse
harcelée par les raids des Shifta, c'est-à-dire des
bandits somalis205(*).
Cette action militaire a été porteuse d'une relative
stabilité. Car en Novembre 2011, l'armée kényane a
joué un rôle déterminant dans la prise du port de Kismaayo.
Parce qu'ayant poussé en première ligne les miliciens de leur
allié local Ahmed Madobe dont les forces ont ensuite assuré le
plus gros de la sécurité de la région de Juba206(*). L'intervention
kényane en Somalie est assez représentative du rôle que
peut jouer un Etat pivot en matière de stabilité
régionale. Cependant, cette posture de force dont
bénéficient certains alliés de Washington sur le continent
africain peut aboutir à une dérive hégémonique.
2. La recherche hégémonique : le
revers de la médaille
La coopération militaire bilatérale
américaine avec les Etats africains est fondée sur l'habilitation
de certaines puissances régionales. Celles-ci s'érigent de facto
en leaders sur certaines questions, notamment sécuritaires. Certains
Etats pivots deviennent les principaux prétendants au pilotage des
questions de sécurité et d'autres deviennent des puissances
militaires interventionnistes.
Dans le premier cas de figure l'on peut citer
l'Algérie. En effet, l'entretien de liens sécuritaires entre ce
pays et les Etats-Unis a commencé à la fin des années
1990. Avec les attentats du 11 Septembre 2001, le profile géopolitique
du Maghreb a significativement augmenté aux yeux des USA. Cet
évènement ayant révélé la
nécessité pour Washington de diversifier ses sources
d'approvisionnements en hydrocarbures et d'engager une lutte intense conte le
terrorisme207(*). Dans
ce contexte, il renfoncera sa coopération sécuritaire avec
l'Algérie afin qu'elle soit le principal pilier de la lutte contre ce
phénomène dans la région. Par exemple, entre 2000 et 2010,
l'aide bilatérale accordée à cet Etat a cru de 10%.
Puisqu'elle est passée de 115000 USD à 1,7 millions USD. Or la
conséquence de cette assistance est la prétention d'Alger
à assurer le leadership régional en matière de
contreterrorisme208(*).
Cette volonté hégémonique a été
perçue à l'occasion de l'initiation de la mise sur pied d'une
base militaire conjointe en 2010. C'était un projet animé par
l'Algérie, le Mali, la Mauritanie et le Niger. Non seulement la
majorité des 25000 hommes de la base de Tamanrasset étaient
algériens, mais aussi le Maroc avait été malicieusement
écarté. La raison de l'Algérie était que ce dernier
Etat n'était pas concerné par les problèmes de
sécurité du Sahel209(*). Mais en réalité cette marginalisation
était une manière pour Alger de régler ses comptes
à l'Etat marocain par rapport à la question du Sahara Occidental.
Il s'agit là d'un exemple d'instrumentalisation de l'assistance
militaire américaine à des fins géopolitiques.
La deuxième modalité d'expression
hégémonique est basée sur les interventions militaires.
Dans ce cas de figure, certains africains se servent du soutien militaire
américain pour atteindre leurs objectifs géopolitiques à
travers des actions armées extérieures. L'intervention
éthiopienne en Somalie, dans cette perspective est un cas
d'école. Cette campagne militaire a lieu en Décembre 2006.
Officiellement, il s'agissait de combattre les groupes terroristes actifs dans
le pays. Mais il faut noter que ce n'était pas la première fois
qu'Addis-Abeba intervenait militairement en Somalie. Cela avait
déjà été le cas en 1997 et en 1998, dans le souci
de détruire les forces rebelles de l'Ogaden National Liberation
Front (ONLF). L'action militaire demandé par le premier ministre
Éthiopien Meles Zenawi visait les islamistes d'Al-Ittihaad
al-islami. Car ce groupe est actif dans l'Ogaden qui revendique son
autonomie face à l'Etat éthiopien210(*).Mais fondamentalement,
l'interventionnisme d'Addis-Abeba dans la région s'explique non
seulement par un besoin de désenclavement vers la mer Rouge -
d'où son soutien aux indépendantistes du Somaliland -
mais également par la nécessité de contrôler les
îles Dalhak211(*).
C'est ce que François THUAL résume lorsqu'il note que le grand
enjeu des convulsions géopolitiques dans la Corne de l'Afrique a pour
toile de fond, le verrouillage de la mer Rouge212(*).
Sur le plan des résultats, loin de restaurer la
sécurité à l'intérieur de la Somalie,
l'intervention militaire éthiopienne y militarise depuis le début
de l'année 2007, des contradictions politiques et sociales et compromet
la reconstruction progressive du tissu social et politique national213(*). Par ailleurs, il ya
l'existence d'un non-droit dans le pays et les insurgés livrent une
guerre à l'Ethiopie et au GFT. L'on dénonce également des
abus commis par les forces du GFT et de l'Ethiopie214(*). L'implication
américaine dans cette opération favorise la multiplication des
radicaux sur le sol somalien. Ces derniers faisant front par un
anti-américanisme215(*). C'est dans ce sens que l'on peut comprendre les
propos de l'un des responsables d'Al-Qaïda, Ayman AL-ZAWAHIRI.
Celui-ci demandait aux musulmans de mener le Djihad en Somalie dans
« cette croisade lancée par les Etats-Unis et les Nations
Unies contre l'islam et les musulmans»216(*). Cette déclaration
montre les effets pervers de l'intervention américano-éthiopienne
en Somalie. Elle montre également ce à quoi aboutit parfois
l'assistance militaire de Washington à certains Etats africains.
Encadrée fondamentalement par la
défense des intérêts nationaux, l'assistance militaire
américaine traduit certaines logiques et dynamiques. Loin de
répondre aux besoins sécuritaires des Etats africains, elle
répond plutôt à d'autres exigences. Le principal
référentiel est la lutte contre les nouvelles menaces. Par un
effet d'entrainement, c'est ce nouveau paradigme qui se trouve au centre des
priorités sécuritaires des africains. Ceci étant le fait
de la multiplicité des programmes sécuritaires que Washington
leur propose. Il ya ainsi une redéfinition du paradigme
sécuritaire. Elle se traduit par la marginalisation de certaines
problématiques et approches sécuritaires traditionnelles. En
même temps, le débat sécuritaire et la mobilisation
institutionnelle se font dans le sens des préférences et
exigences des Etats-Unis. C'est ainsi que la lutte contre la piraterie maritime
et le terrorisme sont érigés en priorité respectivement
pour le Golfe de guinée et pour l'Afrique de l'Est. Ce faisant, la
référence permanente à ces deux phénomènes
fait de l'aide militaire américaine, une aide sélective. Car
elle se déploie en fonction de l'ampleur de ces menaces. Les
régions d'intérêts stratégiques sont
privilégiées au détriment de celles
« périphériques ». Cette
sélectivité aboutit à la constitution d'Etats pivots, qui
tout en assurant une relative stabilité régionale, peuvent
être tentés par l'aventure hégémonique. Du coup, la
stabilité tant recherchée s'en trouve entamée. C'est
pourquoi l'assistance américaine aboutit à des résultats
mitigés.
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
La création du commandement américain
pour l'Afrique en Octobre 2007 marque un tournant majeur dans la politique
africaine des Etats-Unis. Car elle permet d'apprécier l'importance que
représente désormais le continent dans la planification
stratégique américaine. Par ailleurs, la mise sur pied de cette
structure est le résultatd'une nouvelle approche dans la
stratégie américaine de traitement de l'insécurité
à travers le monde. Cette tendance novatrice est perceptible dans la
doctrine qui encadre l'AFRICOM. Elle insiste sur la prévention des
conflits notamment à travers la construction des capacités des
forces de défense et de sécurité africaines. Issues des
expériences d'Irak et d'Afghanistan, cette doctrine dite de
Stability Operations met l'accent sur la formation militaire. Celle-ci
devant permettre à Washington de limiter sa présence sur le
terrain tout en maitrisant les situations de conflits au travers de forces
sous-traitantes. Or contrairement à ce qui est annoncé dans le
discours officiel américain, cette assistance sécuritaire
entraine la cristallisation du débat sécuritaire sur des
problématiques qui ne relèvent pas forcément des
priorités africaines mais de celles américaines. En
conséquence, l'on se trouve face à une assistance militaire qui a
des logiques particulières liées à la préservation
des intérêts américains. D'où sa
sélectivité, puisque privilégiant des régions et
des Etats dits pivots. Cette rationalité ne permet cependant pas de
traiter véritablement l'insécurité sur le continent. Elle
aboutit au contraire à des résultats mitigés allant d'une
relative stabilisation à une création et une réactivation
des crises et conflits.
Alors, malgré l'engagement dans l'habilitation
des armées africaines, l'on se rend compte que l'AFRICOM a pour
référentiel dominant, la défense des intérêts
américains. Ce qui d'emblée édulcore le discours altruiste
des USA lors de la création de cette structure. Si l'on considère
même la particularité du contexte stratégique africain -
avancée de la Chine, diversification des sources d'approvisionnement en
hydrocarbures, prégnance du terrorisme, - l'on peut bien comprendre que
ce commandement ait également pour mission, de renforcer la
présence militaire américaine sur le terrain.
DEUXIEME PARTIE
L'AFRICOM DANS LE RENFORCEMENT DE LA PRESENCE MILITAIRE
AMERICAINE EN AFRIQUE
Crée le 6 février 2007, l'AFRICOM est le
sixième commandement géographique des Etats-Unis dans le monde.
Dans le discours officiel, l'on évoque très souvent sa
spécificité par rapport aux autres commandements
américains. Ces derniers ayant été conçus selon les
exigences géostratégiques de la guerre froide. Il fallait en
effets contenir l'expansion de l'Union Soviétique à travers le
monde. Cela recommandait l'adoption d'une approche offensive basée sur
la puissance militaire. Contrairement à ces commandements
géographiques, l'AFRICOM, selon les autorités américaines,
rompt avec la posture militariste. Il met plutôt l'accent sur la
prévention des conflits à travers la focalisation sur des
questions économiques, sociales ou encore humanitaires. Ce qui pourrait
faire penser à un certain altruisme de la part de Washington. Ce
discours apparemment novateur suscite un certain nombre d'interrogations. La
première concerne l'effectivité d'une telle transformation de la
doctrine américaine d'engagement international. La deuxième est
relative aux raisons fondamentales de la mise sur pied d'un commandement
militaire pour le traitement de questions civiles. Si nous nous trouvons dans
un champ géopolitique et si justement toute étude
géopolitique s'attèle entre autres à mettre en
évidence les motivations et les intentions des acteurs217(*), alors il serait très
logique de questionner le rôle central de l'AFRICOM sur le continent
africain. La première piste de réflexion devrait concerner le
contexte particulier dans lequel est née cette institution. Celui-ci est
marqué par la montée en puissance de la Chine en Afrique, la
nécessité pour Washington de diversifier ses sources
d'approvisionnements en hydrocarbures et surtout la lutte contre le terrorisme.
Ce qui d'emblée recommande une posture des plus réalistes. Il
serait d'ailleurs difficile d'imaginer des militaires
« humanitaires » américains assister passivement
à l'attaque des intérêts de leur pays par des groupes
armés. Cela suppose que la présence militaire s'accompagne de la
possibilité de l'usage de la force. Est-ce que face à de telles
exigences, l'AFRICOM resterait toujours fidèle à sa doctrine de
Stability Operations ? Cela est difficilement concevable face
à l'importance des enjeux. Milady ORTIZ assimilait déjà ce
commandement à deux autres dans le monde. Il s'agit du PACOM et du
SOUTHCOM. Avec le premier, il partage la mission de la lutte contre les groupes
insurgés pendant qu'il lutte contre le trafic de drogue comme le
deuxième218(*).
D'autres observateurs vont plus loin en voyant à travers la
création de ce commandement, la volonté de Washington de mieux
structurer sa présence sur le continent face à la menace
terroriste219(*) et
à la piraterie maritime. Et ce dans la perspective de mieux
sécuriser ses approvisionnements en hydrocarbures. Ces défis
sécuritaires sont tellement importants que l'AFRICOM s'attèle
à renforcer la présence militaire américaine en Afrique.
Or cela n'est possible qu'il reste fidèle à la culture
stratégique des USA (chapitre IV) qui n'accorde qu'une
place marginale à la diplomatie (chapitre III).
Chapitre III : La
place marginale de la diplomatie dans les actions de l'AFRICOM
En tant que cadre doctrinal du commandement américain
pour l'Afrique, La « Stability Operations », dans
sa conception, s'attaque aux causes profondes des conflits. Et ce sont ces
causes qui devraient le plus retenir son attention. Ce qui recommande une
posture des plus diplomatiques. Car la diplomatie, grâce aux vertus de la
négociation et du compromis, devrait permettre de désamorcer ou
de résoudre pacifiquement les crises. C'est pour y répondre que
les autorités américaines ont fait de ce commandement, une
structure interministérielle. Il est pour ce faire constitué,
au-delà du DOD, du DOS ou encore de l'USAID. L'inclusion du DOS devrait
permettre à cette institution de mener à bien ses actions
notamment sur le plan diplomatique. Mais l'implémentation des missions
diplomatiques du DOS au sein du commandement n'est possible que s'il ya un
réel équilibre civilo-militaire. Or de plus en plus, des voix
s'élèvent pour s'inquiéter du risque d'affaiblissement du
secrétaire d'Etat dans l'élaboration de l'agenda américain
dans les relations avec les Etats étrangers220(*). Ce
déséquilibre entre le civil et le militaire est également
dénoncé par Mark MALAN. Pour ce dernier, la politique
extérieure américaine est de plus en plus dominée par le
Pentagone. Du coup, les capacités des civils à conduire des
politiques de reconstruction à long terme se trouvent
réduites221(*).
Par ailleurs, il doute de la capacité de l'armée à
construire les Etats, étant donné qu'elle a été
conçue pour les envahir et non pour les construire222(*). Sur le terrain, ce
pessimisme semble se confirmer à travers les actions concrètes de
l'AFRICOM. Car s'il s'implique dans la prévention des conflits, toutes
ses actions ne vont pas dans le sens d'une réelle diplomatie.
C'est-à-dire d'une posture de rupture fondamentale face à la
tradition interventionniste américaine. L'attitude de cette institution
est plutôt tributaire de la nature des enjeux et de contraintes
géostratégiques qui structurent l'environnement
stratégique africain. Dans ce sens, plus ces enjeux sont importants,
moins l'AFRICOM s'accommode des convenances diplomatiques. Cette
hypothèse se vérifie assez clairement aujourd'hui dans les
réponses qu'apporte cette structure (section II) aux
problématiques sécuritaires complexes du continent africain
(section I).
SECTION I : COMPLEXITE DES
PROBLEMATIQUES SECURITAIRES EN AFRIQUE
Loin des conceptions et des perceptions simplistes des
menaces qui règnent sur le continent africain, la question de
l'insécurité en Afrique nécessite une analyse plus lucide.
C'est-à-dire celle qui recherche une explication locale des
problèmes. Cela permet d'éviter de tomber dans le piège de
la généralisation abusive. Cette spécificité locale
de l'insécurité rend assez complexe certaines crises et conflits.
C'est notamment le cas de l'insurrection (A) et de la
piraterie maritime en Afrique (B).
A. La question de l'insurrection en Afrique
Aujourd'hui, le continent africain est parsemé
de groupes insurgés. La plupart d'entre eux s'érigent contre
l'ordre politique interne et d'autres ont de plus en plus des tendances
transnationales. Cependant ils ont tous pour point commun, l'encrage local de
leurs origines. Donc loin des clichés qu'en donnent les acteurs
dominants à l'échelle internationale, la compréhension de
leurs dynamiques nécessite une étude locale fondamentale. Si l'on
s'en tient aux deux qui vont être explorés ici, force est de noter
que la problématique du GSPC ne peut se comprendre qu'à travers
la question de l'aspiration à une plus grande participation politique en
Algérie (1). De l'autre coté, l'on peut mieux
appréhender les dynamiques de Boko Haram si on interroge
l'état de la justice sociale au Nigéria (2).
1. Le GSPC et l'aspiration à une plus grande
participation politique en Algérie
Suite aux élections municipales de Juin 1990,
suivies du premier tour des législatives de Décembre 1991, la
scène politique est sur le point d'être dominée par un
parti confessionnel qui porte le nom de Front Islamique du Salut (FIS).
Très vite l'armée reprend le pouvoir et écarte cette
formation du paysage politique officiel du pays. C'est cette interruption du
processus électoral par les militaires qui marque le début de
l'insurrection armée dans le pays en Mars 1992. Ainsi, à la suite
du « Congrès d'unification » d'Avril 1994, plusieurs
groupes islamistes se retrouvent au sein du Groupe Islamique Armé
(GIA)223(*). La
constitution de ce groupe était une sorte de réponse à la
répression dont faisaient face les islamistes, le FIS ayant
été dissout en Mars 1992. Quelques années plus tard,
précisément en 1998, c'est la naissance du GSPC sous la direction
d'Amara Saïfi. Cette insurrection, à ses origines, se fixe pour
objectif, de renverser le gouvernement algérien224(*). Ce qui montre clairement
qu'il n'est pas fondamentalement un groupe Djihadiste comme ont tendance
à le faire croire les acteurs dominants. Ce n'est que par la suite que
son discours et son champ d'action ont évolué. S'étendant
désormais à d'autres Etats du Maghreb comme la Mauritanie,
l'objectif du GSPC intègre désormais la réislamisation de
la société à travers l'établissement d'un
Califat225(*). Cette
évolution aboutit, le 11 Septembre 2006, à son association
à Al-Qaïda. La fusion entre les deux groupes mène à
la mise sur pied, en Janvier 2007, d'Al-Qaïda au Maghreb
Islamique (AQMI). Cette nouvelle étape sonne l'entrée du GSPC
dans le sillage du « djihadisme » international. Cette
mutation de simples aspirations politiques locales à l'adhésion
à un discours djihadiste international est le résultat de la
stratégie d'Al-Qaïda. En effet, ce groupe s'investit dans
la cooptation de groupes insurgés locaux et l'instrumentalisation de
leurs frustrations pour les associer à son combat226(*). Dans ce sens, le groupe
islamiste mondial établit des liens avec des insurrections locales en
leur proposant ses financements, son savoir-faire, des conseils et du soutien
en termes de propagande. En échange, il reçoit leur soutien qui
se traduit par la promotion de la propagande djihadiste et la conduite
d'actions terroristes locales227(*). Même si Al-Qaïda n'agit pas
comme un haut commandement pour les niveaux supposés inférieurs,
il assure leur dynamisme financier et opérationnel. Par ailleurs, il se
nourrit de frustrations locales et les intègre dans des cadres
idéologiques plus larges. Il ya donc un travail de redéfinition
des mécontentements locaux en termes islamistes et djihadistes228(*). Cette démarche
d'Al-Qaïda montre comment des groupes locaux comme le GSPC sont
devenus des organisations djihadistes. Donc les origines de l'insurrection
algérienne ne résident pas dans des aspirations djihadistes
internationales.
En réalité, la reconversion islamiste,
mieux, la radicalisation des membres du groupe est du à deux facteurs.
Premièrement, leur participation à la guerre d'Afghanistan contre
l'URSS et plusieurs contacts avec Oussama Ben Laden229(*). Deuxièmement,
l'alliance à Al-Qaïda était moins due à une
affinité idéologique qu'à des questions de financement.
C'était la position de la faction dure du GSPC tenue par El Para qui
refusait l'amnistie que proposait le gouvernement. Son objectif était de
s'allier à Al-Qaïda pour bénéficier de ses
faveurs, notamment financières. C'est entre autres cet opportunisme qui
explique la reconversion djihadiste du discours de ce groupe. Ce qui montre
qu'il ne relève fondamentalement pas du terrorisme international comme
le disent les américains. Même devenu AQMI, il conserve son
identité locale qui est liée à des questions de lutte
politique interne avec le gouvernement algérien. Cette posture se
vérifie assez clairement dans les dernières attaques du groupe.
Notamment lors de l'attaque du site gazier d'In Amenas du 16 Janvier 2013.
L'objectif des assaillants était de mettre le gouvernement
algérien à l'épreuve et de démontrer son
incapacité à gérer les crises. C'est une sorte de
dénigrement politique qui ne relève pas d'emblée du
djihadisme. Ainsi, un groupe que l'on qualifie d'une manière simpliste
de « terroriste » recouvre une réalité
beaucoup plus complexe et nécessite une analyse plus lucide comme ce
pourrait être le cas avec Boko Haram.
2. Boko Haram et la recherche de la justice
sociale au Nigeria
Contrairement aux clichés de qualification
terroriste promus dans le cadre de la lutte mondiale contre le terrorisme,
l'insurrection au Nord du Nigéria commande une plus grande attention sur
les dynamiques sociopolitiques et socio-économiques qui structurent la
société nigériane. En effet, ce pays est confronté
à une crise de gouvernance. Puisque le gouvernement
fédéral est incapable de subvenir aux besoins de base des
populations du Nord du Pays à majorité musulmane. Cette partie
affiche le plus mauvais résultat en termes de niveau d'éducation,
de pauvreté ou encore de mortalité infantile230(*). A ces tares, l'on peut
ajouter la corruption galopante, le chômage des jeunes. C'est ce
chômage qui est à l'origine du phénomène des
Almajiri. C'est-à-dire des milliers de jeunes provenant des
familles défavorisées, n'ayant pas les moyens de les engager
à l'école et n'ayant pour seul recours que les écoles
coraniques et la mendicité231(*). Par ailleurs, dans l'Etat du Borno, les
trois-quarts de la population vivent sous le seuil de la pauvreté ;
seuls 2% des enfants de moins de 15 mois y sont vaccinés ;
relativement à l'accès à l'éducation, 83% des
jeunes sont illettrés, 48,5% des enfants en âge d'être
scolarisés ne le sont pas ; enfin, 34,8% des musulmans de 4
à 16 ans n'ont jamais fréquenté une école232(*). Cette
précarité crée des conditions propices à la
prolifération du discours djihadiste qui, dans le cas d'espèce
est instrumentalisé pour la revendication de la justice sociale.
En guise de rappel historique, c'est en 2002 qu'un
groupe de jeunes islamistes fréquentant une mosquée de Maiduguri,
capitale de l'Etat du Borno, déclare que les autorités de la
ville et les autorités islamiques en général sont
corrompues233(*).
Après s'être installés dans le village de Kanama, les
membres de cette nouvelle dynamique, sous l'impulsion de leur leader Muhammad
ALI, adoptent une philosophie anti-Etat et invitent les musulmans à les
rejoindre234(*).
Après avoir été assiégé par la police dans
une mosquée en 2003, ils retournent à Maiduguri où ils
fondent leur propre mosquée. C'est depuis ce temps que l'on les
désigne sous le nom Boko Haram. Condamné à la
clandestinité depuis Juillet 2009, ce groupe estime que le
délabrement de la société nigériane tire ses
origines du système étatique tel que conçu par l'occident.
C'est ce système qui est porteur des germes de la dépravation, de
la corruption ou encore de l'injustice dont souffre le Nord du pays.
D'où le slogan de ce groupe selon lequel « la civilisation
occidentale est un péché ». Pour ces activistes, le
seul moyen de sortir de cette situation est l'instauration de la
Charia. La loi islamique serait dépositaire d'un code moral
indispensable au processus d'épuration du corps social nigérian.
Le califat ainsi souhaité serait garant du bien être
socio-économique et moral de tout nigérian. La discrimination et
l'injustice n'auraient aucune place dans cette société.
Par ailleurs, l'on pourrait également
comprendre la secte Boko Haram à l'aune de la théorie du
complot. Ainsi, ce groupe serait au coeur des batilles politiques entre le
Nord musulmans et le Sud chrétien du Nigéria. Il aurait de ce
fait pour objectif d'exacerber l'impression d'un pays à deux vitesses
avec des lois différentes d'une région une autre235(*). Cette thèse de la
conspiration postule également que les Yusufiyaas236(*) animeraient l'opposition
nordiste en vue de miner l'assise d'un gouvernement présidé par
un chrétien237(*). Cette approche est intéressante dans la
mesure où elle souligne la dimension interne de l'insurrection au Nord
du Nigéria. Même si cette organisation fait montre de tendances
djihadistes transnationales aujourd'hui, cela est du, moins à ses
postulats doctrinaux d'origine qu'aux contacts noués entre ses membres
exilés et les réseaux djihadistes internationaux238(*). Cette précision est
d'autant plus pertinente que le mouvement de M. Yusuf n'a pas initialement des
visées djihadistes et terroristes. Mais c'est plutôt la
répression des forces de sécurité qui contribuent à
le radicaliser239(*).
Au vu de ces différentes démonstrations,
l'on se rend bien compte que le conflit au Nord du Nigéria, à la
base, n'est pas religieux. Il s'agit d'une révolte sociale basée
sur une sorte de théologie de la libération en faveur de la
justice240(*). La
religion y est plutôt utilisée comme catalyseur dans la
perspective de la mobilisation du plus grand nombre de membres. Par ailleurs,
elle est perçue par les insurgés comme le principal, voire
l'unique référentiel qui devrait encadrer la restauration de
l'équilibre social au Nigéria. Ainsi la multiplicité des
facettes explicatives de la question de Boko Haram tout comme c'est le
cas avec le GSPC montre à suffisance la complexité de la
problématique de l'insurrection en Afrique. Ce qui est aux antipodes des
clichés simplificateurs qui ont pour principal
référentiel, le terrorisme international. Cette démarche
se perçoit également dans le traitement de la piraterie maritime
qui est pourtant un problème tout aussi complexe que l'insurrection.
B. Le cas de la piraterie maritime en
Afrique
Sur le continent africain, deux régions sont
principalement touchées par le phénomène de la piraterie
maritime. Il s'agit de la Corne de l'Afrique et du Golfe de Guinée. Si
l'on peut expliquer la manifestation de ce phénomène dans ces
régions par leurs propriétés stratégiques, l'on ne
pourrait cependant pas négliger les problèmes auxquels font face
les différents Etats qui les constituent. Ainsi, derrière le
concept de piraterie maritime, se cache une réalité assez
complexe. Ce phénomène est intimement lié aux
problèmes auxquels les Etats africains font face. Vu sous cet angle, on
pourrait l'expliquer non seulement par des facteurs socio-économiques
(1) mais aussi par la vitalité des batailles politiques
(2).
1. L'explication socio-économique du
phénomène
Bien que cette théorie soit parfois
nuancée, la piraterie maritime a bien des liens avec la situation
socioéconomique des Etats. Ce phénomène vu sous cet angle
émerge plus facilement dans un contexte de pauvreté et de
déliquescence totale. Une telle société serait un terreau
fertile au recrutement des pirates. Le chômage et le manque de
perspective d'avenir condamnant les jeunes à vivre dans
l'oisiveté et à se livrer à des pratiques
illégales.
Dans la Corne de l'Afrique, la piraterie maritime est
en majeure partie alimentée pas des personnes originaires de Somalie.
Cette réalité n'est que logique lorsqu'on sait que cet Etat est
aujourd'hui en faillite depuis la chute de Siad Barré en 1991. Depuis
cette date, le pays a été plongé dans un état de
délabrement et n'a jamais réussi à recouvrer une
quelconque stabilité jusqu'aujourd'hui241(*). Cet état de décomposition
avancée s'est accompagné d'une terrible crise humanitaire en
raison des effets conjugués de la sécheresse, de la crise
alimentaire et des violences242(*). Ainsi, lors de la crise alimentaire de 2011, 29000
personnes ont perdu la vie243(*). Par ailleurs, en 2009, 3,2 millions de somaliens
dépendaient de l'aide humanitaire soit environ 40% de la population du
pays. Le taux de prévalence de malnutrition chez les enfants
s'élève à 18,6%244(*). Si l'on ajoute à cela le chômage en
pleine effervescence dans un tel contexte, on comprend très clairement
pourquoi de nombreux jeunes se lancent dans cette activité
« lucrative » qu'est la piraterie maritime. Et ce dans la
perspective d'assurer leur bien-être dans un Etat sans repères
socio-économiques. Cette activité offre ainsi de l'emploi
à des jeunes désemparés qui estiment n'avoir aucune autre
source de revenus245(*).
Cependant, force est de préciser que
l'explication socio-économique n'est pas exclusive. Elle est d'ailleurs
contestée par une autre approche qui estime que ce
phénomène n'a pas de lien direct avec la pauvreté. Car le
Nigéria qui est l'un des pays les plus touchés du continent n'est
pas le plus pauvre du littoral africain. Au contraire la piraterie y va de pair
avec une période de croissance économique tirée par la
hausse des prix du baril de pétrole au milieu des années
2000246(*). Pendant ce
temps, on pourrait s'étonner de la relative absence de la piraterie dans
des pays pauvres comme le Mozambique ou encore la RDC247(*). Ces nuances sont
importantes dans la mesure où on pourrait s'interroger sur les moyens
des pirates. En effet, les équipements utilisés ne peuvent
être à la portée de pauvres marins. Il s'agit notamment des
lance roquettes RPG-7, des radios, des radars, des GPS et parfois même
des technologies comme Automatic Identification System (AIS). Ce
dernier permettant aux ravisseurs d'identifier les navires à distance,
leur approvisionnement, leur vitesse, la route et la destination248(*). Par ailleurs, il est
difficilement compréhensible que de pauvres pécheurs somaliens
puissent opérer jusqu'à 800 km des côtes comme ce fut le
cas à la mi-novembre 2008 lorsque le supertanker saoudien, Sirius
Star avait été détourné par des
pirates249(*). En
réalité, ce genre d'opération nécessite beaucoup de
moyens. Car il faut disposer d'embarcation puissante et d'une énorme
quantité de carburant. Si l'on ajoute à cela, la
complexité des modes de versement et d'écoulement des
rançons, on pourrait admettre l'intervention de grands hommes d'affaire
dans les activités de piraterie maritime.
Si cette nuance valait la peine, elle n'évacue
cependant pas la base socioéconomique du phénomène.
Puisqu'en réalité, les milliers de jeunes sans emploi qui sont
recrutés dans cette activité le sont facilement par manque de
perspective d'avenir. Ils ne sont forcément pas les concepteurs ou les
planificateurs des attaques, mais peuvent en être de simples
exécutants. Leur disponibilité est indispensable pour la
prospérité de la piraterie maritime. La pauvreté devient
ainsi le catalyseur d'un phénomène qui se trouve également
au coeur des batailles politiques.
2. Un phénomène au coeur des batailles
politiques
Une autre variable explicative de la complexité
du phénomène de piraterie maritime est son insertion dans une
certaine mesure, dans les luttes politiques en Afrique. Elle peut être
utilisée comme moyen d'expression des mécontentements, mais
surtout comme marque des oppositions qui existent entre différents
groupes. Le lien entre piraterie et politique peut être fait à
l'aune de la définition que donne Carl SCHMITT à ce dernier
concept. Pour cet auteur en effet, le principal critère du politique est
la discrimination de l'ami et de l'ennemi dans le sens de l'expression du
degré extrême de l'union ou de la désunion entre groupes
différents250(*).
Il poursuit en notant que l'ennemi est un ensemble d'individus groupés,
affrontant un ensemble de même nature et engagés dans une lutte
pour le moins virtuelle c'es-à-dire effectivement possible. Ce concept
inclut au niveau de la réalité concrète,
l'éventualité d'une lutte251(*). La politique se caractérise donc par un
degré assez élevé d'opposition entre groupes, celle-ci
donnant lieu à des luttes. Loin d'une simple opposition entre
adversaires ou entre concurrents économiques, religieux ou culturels, le
politique en est la traduction extrême. Cependant ce concept ne
désigne pas un domaine d'activité propre mais seulement le
degré d'intensité d'une association ou d'une dissociation
d'êtres humains dont les motifs peuvent être d'ordre religieux,
national, économique ou autres et provoquent, à des
époques différentes, des regroupements et des scissions de types
différents252(*).
Le concept du politique est
étroitement lié à la théorie du
partisan253(*). En
effet, le partisan, en tant que combattant irrégulier254(*), remet en cause l'ordre de
l'Etat ainsi que sa capacité à prétendre au monopole de la
violence légitime. Dans le cas d'espèce, les pirates pourraient
être assimilés à des partisans. Car même si les
animateurs de cette activité ne s'inscrivent pas dans une lutte
armée violente à la dimension d'une guerre civile, leurs actions
peuvent tout de même traduire une certaine rébellion face à
l'autorité étatique. Cela pouvant aller jusqu'à la
prétention à une reconfiguration du paysage politique national.
En effet, la piraterie maritime est utilisée par
certains groupes comme tactique de combat pour discréditer les
autorités publiques, faire régner en permanence un sentiment
d'insécurité généralisée ou encore affirmer
leur autonomie. Au Nigéria par exemple, le MEND, créé en
Septembre 2005 s'inscrit clairement dans cette logique. Même si la
majorité d'explication des actions du mouvement le confinent souvent
à de simples revendications socioéconomiques255(*), ses actions et ses
revendications ont une portée politique assez importante. Tout d'abord,
en commettant des actes de piraterie en haute mer contre des navires marchands
et en sabotant les plateformes pétrolières des
sociétés pétrolières étrangères, le
MEND démontre l'incapacité des autorités
fédérales à contrôler l'ensemble du territoire et
à y garantir la sécurité pour les investisseurs
étrangers. C'est donc une manière pour ces militants de
discréditer le gouvernement, non seulement aux yeux des ses propres
populations mais aussi de potentiels investisseurs. Il ya ici une politisation
des milieux criminels et une criminalisation de l'opposition politique, la
piraterie maritime faisant partie des répertoires de contestation
politique256(*). C'est
dans ce sens que les rebelles du MEND sont utilisés et financés
par les gouverneurs locaux pour se débarrasser de leurs rivaux au moment
des élections257(*). Les actes de piraterie que posent les pirates ainsi
recrutés ont pour objectif, de démontrer l'incapacité des
autorités en place à gérer l'Etat et à assurer le
bien-être des populations. La violence ainsi mobilisée se
substitue au débat politique. Mais elle est porteuse d'arguments tout
aussi pertinents que ceux mobilisés au cours d'un débat politique
normal.
Pour revenir au cas du Nigéria, du fait de la
multiplication des actes de piraterie par le MEND, la production nationale a
décru de 20%. Cela a forcément eu un effet néfaste sur
l'économie et donc sur la réputation du gouvernement
nigérian. Cet aspect est d'autant plus pertinent que le Nigéria
tire 80% de ses revenus fiscaux de la production
pétrolière258(*). Donc asphyxier cette activité revient
à porter un coup sérieux à l'ensemble de l'économie
du pays. L'on voit ainsi clairement comment la piraterie maritime est
utilisée à des fins de compétition politique. Cette grille
de lecture pourrait dans une certaine mesure expliquer l'arrivée au
pouvoir en Avril 2011 de Goodluck Jonathan259(*). Car dans l'histoire du Nigéria, c'est la
première fois qu'un ressortissant de la région du Delta du Niger
est élu président. Ses prédécesseurs ayant
été des nordistes. Cette élection intervient un peu
plus de cinq ans après la création du MEND. Ce groupe qui
succède au NDPVF260(*), en entreprenant ses actions violentes dont la
piraterie maritime, a forcément participé au dénigrement
des régimes dirigés par les musulmans et a renforcé la
victimisation du peuple du Delta. Ceci aurait attiré les faveurs
électorales des populations en faveur de l'un des ressortissants de
cette région.
Une autre criminalisation des luttes politiques est la
revendication par certains groupes de leur autonomie. La piraterie maritime est
parfois utilisée comme tactique de combat. Celle-ci leur permet
d'affirmer leur capacité de nuisance et surtout de faire plier les
autorités dont ils revendiquent l'autonomie. L'exemple le plus patent
est celui des mouvements autonomistes de la péninsule de Bakassi. En
effet, des groupes tels que le BAMOSD261(*) et le Bakassi Freedom Fighters se montre
très actifs dans ce type de lutte. Ils sont tous très
remontés contre la rétrocession de la péninsule
pétrolifère au Cameroun par le Nigéria du fait de la
signature des accords de Green Tree entre les deux pays en Juin 2006
par les deux Etats262(*). C'est ainsi que le BBF avait mené une grande
opération de piraterie le 31 Octobre 2008 en attaquant un Supply
Boat, le SS SAGITTA en manoeuvre de sécurisation d'un
Tanker en chargement ainsi que ce tanker263(*). Ces différentes démonstrations
montrent quels sont les usages politiques de la piraterie maritime. Il s'agit
en réalité de la dimension complexe d'un phénomène
que les acteurs dominants de la scène internationale considèrent
très souvent comme étant fondé sur un réseau bien
organisé à l'échelle internationale. Sans renier la
dimension transnationale et internationale de la piraterie, l'on précise
juste que sa compréhension passe par une prise en compte de
l'environnement politique, économique, social et même culturel
dans lequel elle se développe. Or lorsque l'on analyse les
réponses qu'apporte l'AFRICOM aux problématiques
sécuritaires africaines, on a du mal à percevoir toutes ces
précautions.
SECTION II : LA REPONSE DE L'AFRICOM
AUX PROBLEMATIQUES SECURITAIRES AFRICAINES
Le traitement de l'insécurité en Afrique
est une tâche assez ardue, du fait de la complexité des
problèmes qui y sont répertoriés. Cela nécessite
beaucoup de précautions ainsi qu'une grande attention. Et ce dans le
souci de ne pas tomber dans les catégories simplistes dans lesquelles
sont très souvent classés les groupes qui animent cette
insécurité. Or lorsqu'on explore avec acuité les
paradigmes théoriques et doctrinaux à travers lesquels est
conçu l'AFRICOM, l'on se demande bien si toutes ces précautions
sont prises. En réalité, l'un des principaux
référentiels de la politique américainede
sécuritéen Afrique est l'éradication des nouvelles
menaces. C'est ce référentiel qui semble dominer les
réponses qu'apporte le nouveau commandement américain aux
problématiques sécuritaires sur le continent. On comprend
dès lors pourquoi les actions sécuritaires de la nouvelle
structure américaine se fondent sur une construction de la menace
liée à des logiques cognitives particulières
(A) même si le cadre doctrinal de cette institution lui
impose une certaine implication civilo-militaire (B).
A. Logiques cognitives et construction des
menaces
Pour comprendre les réponses du commandement
américain aux problématiques sécuritaires africaines, il
est important d'explorer les logiques cognitives américaines
liées à la conception et à la construction de la menace.
En tant que situation organisée ou exploitée par un adversaire
avec une intention hostile visant à causer des dommages matériels
ou immatériels étendus et durables264(*), toute menace se
perçoit en fonction d'un système de référence.
Celui-ci étant lui-même fondé sur des
propriétés cognitives existant dans la société.
Cela donne au concept de menace, une flexibilité qui s'opère dans
le sens des objectifs stratégiques des dirigeants. Ce postulat est bien
perceptible non seulement dans la stratégie
d' « agrégation » américaine relative
à la qualification « terroriste » des groupes
armés (1) mais aussi dans l'utilisation du concept
d' « espaces non gouvernés » en Afrique
(2).
1. La stratégie d' «
agrégation » dans la qualification
« terroriste » des groupes armés
Parmi les missions de l'AFRICOM, figurent en bonne
place, les questions de sécurité sur le continent africain. Cet
aspect est d'autant plus important que la conflictualité en Afrique est
animée par de nombreux groupes armés. Que ce soit le MEND, AQMI,
Boko Haram ou encore Al Shabaab, la liste est assez longue.
Dans un tel contexte, on peut comprendre que les intérêts
américains soient menacés. Puisque cette superpuissance est
très souvent accusée d'être impérialiste. Depuis
l'émergence de ces nouvelles formes de menaces de l'ère
post-guerre froide, l'approche sécuritaire américaine a connu une
évolution. Les représentations dominantes de la
sécurité changeant au gré des époques, des
civilisations, des cultures et des circonstances politiques265(*). Même si l'approche de
lutte contre les menaces a changé, l'on peut tout de même faire un
rapprochement entre la démarche de l'époque de la guerre froide
et celle d'aujourd'hui. Il s'agit de la tendance à la
« généralisation ». En effet, celle-ci
consiste à considérer tout conflit local comme relevant de
catégories conflictuelles internationales. Dans ce sens, la
spécificité des conflits est négligée au profit de
leur insertion dans des structures conflictuelles plus larges. C'est ce que
BERSCHINSKI appelle la politique
d « agrégation » ou policy of
agregation. Celle-ci consiste à mettre toutes les insurrections -
qu'elles soient locales, régionales ou internationales - sous la seule
bannière du terrorisme international266(*). Elle a été définie en 2001
lorsque l'administration Bush lançait la Global War On Terror
(GWOT). C'est cette « agrégation » qui
structure la guerre mondiale contre le terrorisme.
En effet, les tristes évènements des
Etats-Unis en 2001 ont créé une psychose qui, à son tour a
entrainé une reconstruction sémantique et idéologique
abusive du terme terrorisme. En conséquence, la plupart des groupes
politico-militaires sur le continent sont assimilés au
terrorisme267(*). Or ces
groupes combattent très souvent pour des questions légitimes.
Cette approche est issue de l'idéologie anti-terroriste post-11
Septembre qui commande la qualification terroriste des activités
criminelles et donc l'invention de l'ennemi268(*).
Dans le cadre de la stratégie
d'agrégation, la menace est monolithique, dans ce sens que les groupes
armés en Afrique ne sont pas étudié en fonction de
l'environnement dans lequel ils opèrent. Le traitement de la menace a
pour principal référentiel, la lutte contre le terrorisme. Sans
interroger les causes qui président à l'émergence de ces
groupes, la démarche « agrégative » insiste
sur la promotion des initiatives anti-terroristes269(*). Puisque le combat que
mènent les mouvements armés en Afrique n'est perçu
qu'à l'aune du terrorisme international. Or chaque insurrection locale
est en partie basée sur des problèmes locaux assez complexes. Vu
sous cet angle, les différents groupes n'ont pas forcément pour
référentiel, la promotion du djihad international même
s'ils peuvent avoir des contacts avec les organisations terroristes
internationales270(*).
Tous ces groupes ont des revendications qui méritent une attention.
C'est le cas du GSPC qui aspire à une plus grande participation
politique en Algérie ; ou encore de Boko Haram qui
revendique une meilleure redistribution des rentes étatiques au
Nigéria. Ce sont ces revendications qui sont souvent
instrumentalisées par les groupes terroristes internationaux.
D'où la reconversion djihadiste des revendications qui ne
l'étaient pas au départ271(*).
En réalité, la politique
d' « agrégation » est largement motivée
par la culture stratégique américaine où il ya une
tendance permanente à la diabolisation de l'ennemi selon une perception
manichéenne du monde. Ce qui donne à ce dernier, un
caractère amoral qui lui ôte le droit à l'existence
politique. C'est-à-dire qu'il n'est plus un interlocuteur avec qui l'on
peut discuter, puisqu'il est identifié au mal. Il ne mérite
qu'une punition brutale et violente272(*). Il s'agit d'une approche policière et
pénale de résolution des conflits. Elle met l'accent sur la
punition qu'on doit infliger au contrevenant et non sur la possibilité
de dialoguer avec lui. La conception essentiellement punitive des engagements
militaires américains s'explique également par une conception
strictement opérationnelle de la stratégie. Héritée
de JOMINI, ce principe insiste sur la nécessité de la conduite de
la guerre par des professionnels, à l'abri de toute considération
politique. Car l'ingérence du politique dès le début des
hostilités risquerait de porter préjudice à la
réalisation des objectifs militaires273(*). La guerre n'est donc pas - comme le
prétendait CLAUSEWITZ - la continuation de la politique par d'autres
moyens. Son objectif est de gagner et de remporter des victoires274(*). Une action militaire
brutale et débarrassée de toute négociation politique est
ce qui est réservé aux groupes insurgés africains qui sont
considérés comme faisant partie du terrorisme international.
Relativement au comportement de l'AFRICOM, certains
observateurs s'inquiétaient déjà de le voir poursuivre
cette stratégie. Cette inquiétude n'est pas fortuite, car les
différentes actions anti-terroristes de ce commandement sur le continent
démontrent clairement ses allures belliqueuses. Ainsi, depuis 2007 -
date de sa création - les Etats-Unis ont mené au moins sept raids
militaires contre des cibles d'Al-Qaïda en Somalie. En
l'occurrence, il ya eu des attaques comme celle navale de Mars 2008 contre
Saleh Ali Saleh ; l'attaque d'un missile de croisière
américain au centre de la Somalie qui a causé la mort de Aden
Hashi Ayro - chef d'Al Shabaab- et celle d'autres cadres du
groupe275(*). A travers
ces interventions militaires, on perçoit bien que Washington ne fait pas
de différences entre Al-Qaïda - qui est une organisation
globale - et Al Shabaab - qui est une insurrection locale liée
à des problèmes locaux et spécifiques. C'est dans ce sens
que face aux attentats de Kampala de Juillet 2010, l'AFRICOM avait
estimé que cette opération menée par des rebelles
somaliens démontrait la capacité d'Al-Qaïda
à exporter le conflit hors du territoire somalien et donc, cela
constituait une menace directe à la sécurité des
Etats-Unis276(*). Cette
position du nouveau commandement américain est assez
représentative de la démarche de définition et d'invention
de la menace qui est profondément constructiviste. Ceci permettant
à Washington de multiplier ses possibilités d'intervention sur un
continent qui est considéré comme étant parsemé
d' « espaces non gouvernés ».
2. La mobilisation du concept
d' « espaces non gouvernés » en
Afrique
La construction et la désignation des menaces
sont importantes dans le dispositif stratégique américain. Elles
passent par la structuration d'un système de référence
cognitif sur lequel s'appuient les décideurs pour leur production
discursive. En effet, la cognition influence à la fois
l'interprétation d'une situation, l'évaluation d'une menace, les
comportements, actions et réactions des acteurs277(*). C'est à l'aune de ce
cadre théorique que l'on peut lire l'érection du concept
d' « espaces non gouvernés » comme l'un des
points focaux de la stratégie sécuritaire américaine en
Afrique. Si l'idée est contenue dans la Stratégie de
Sécurité Nationale, ce terme est utilisé en 2003 par
Donald Rumsfeld. Il déclare alors: « There are ungoverned
areas in the world, as the general said, and that is a problem. That makes it
easier for people who are trying to evade attention and capture to continue
function, because literally areas that no one is governing»278(*). Cette idée est aussi
évoquée dans un article de Stewart M. POWELL, paru dans l'Air
Force Magazine en 2004. Pour les auteurs de ces travaux, le désert
Nord-africain est un aimant pour les terroristes du fait de sa surface, du
manque de contrôle et d'autorité de l'Etat qui y
règne279(*). Pour
le DOD, il s'agit d'un espace physique ou non physique où il ya une
absence des capacités étatiques ou de la volonté politique
permettant d'y exercer un contrôle280(*). Dans le discours officiel américain, ces
espaces africains sur lesquels l'autorité des Etats n'est presque pas
exercée sont des terreaux favorables au développent
d'activités terroristes et criminelles. Les exemples cités
à cet effet sont le Sahel, le Delta du Niger, la Somalie, la RDC ou
encore le chenal du Mozambique281(*). C'est également dans ce sens qu'aborde le
général WARD lorsqu'il déclare : « les
régions non contrôlées du Trans-Sahara et de la Corne de
l'Afrique offrent un sanctuaire aux terroristes liés à
l'islamisme extrémiste, aux trafiquants de drogue et aux groupes
insurgés »282(*).
L'émergence de ce concept marque une
évolution paradigmatique dans la pensée stratégique
américaine. Il est devenu l'élément descriptif du
paradigme sécuritaire post-11 Septembre283(*) et une menace pour le XXIe
siècle. Si la pertinence de ce nouveau paradigme sécuritaire
n'est pas à renier complètement, l'on peut cependant interroger
l'opportunité de sa mobilisation, les objectifs et les logiques qui le
sous-tendent. Sous cet angle, il semble qu'il s'agisse encore d'un terme qui
fait partie du répertoire conceptuel des Etats-Unis. Il permet à
Washington de mieux mener ses actions extérieures tout en évitant
de faire face aux invectives de l'opinion nationale et internationale. C'est un
outil rhétorique dans le discours de l'AFRICOM parce qu'il
redéploie l'image de l'identité africaine ancrée dans la
politique étrangère des Etats-Unis284(*). Loin de traduire la
réalité des menaces en Afrique, il est basé sur des
représentations qui insistent sur l'incapacité des africains
à contrôler leurs territoires et donc à se gouverner. Le
continent serait ainsi chaotique, puisque vulnérable au face au
terrorisme, au désordre, à l'instabilité, à la
pauvreté, aux maladies, aux crimes et à la corruption. Face
à ce triste tableau, Washington présente son soutien comme
étant salutaire285(*). Or cette démarche essentiellement
idéologique trahit la volonté des USA de justifier certaines de
leurs actions au travers de l'AFRICOM. En réalité,
étiqueter l'Afrique comme un terreau du terrorisme international
justifie la multiplication de programmes sécuritaires américains.
Or que ce soit les programmes de formation des militaires ou ceux civils, cela
renforce la présence militaire américaine. Puisque sous le
nouveau commandement, les militaires sont les principaux exécutants des
taches du DOD, du DOS ou encore de l'USAID. L'on voit clairement que
derrière cette construction de la menace, l'objectif est de permettre
à l'AFRICOM d'exécuter dans la plénitude, la politique
définie dans la GWOT.
La dimension idéologique de ce concept est
illustrée par l'ambigüité même du terme
« gouverné ». A l'observation, on se rend compte que
dans une certaine mesure, les Etats frappés
d' « ingouvernabilité » sont ceux dans lesquels
les populations sont plus ou moins hostiles aux valeurs américaines.
C'est notamment le cas de la Somalie où l'Union des Tribunaux Islamiques
avait été bien accueillie dans certaines partie du pays par
plusieurs somaliens286(*). Ce qui implique clairement un rejet de valeurs
extérieures promues par les autorités jusqu'alors en place. A
travers cela, transparait le postulat selon lequel la
gouvernabilité telle que définie par les Etats-Unis, est
liée à l'application de politiques compatibles à celles
américaines, notamment l'économie de marché et la
démocratie libérale287(*) .
Tout comme la stratégie
d' « agrégation » qui permet une qualification
terroriste plus aisée de différents groupes politico-militaires
africains, le concept d' « espaces non
gouvernés » est du ressort des constructions de la part de
Washington. Même si ces deux concepts permettent d'inscrire les actions
militaires américaines dans des catégories légales
relativement acceptables par l'opinion mondiale, ils édulcorent
cependant la bienveillance annoncée dans le cadre de l'AFRICOM. Puisque
le cadre doctrinal de cette institution la prédestinait prioritairement
à des missions civiles.
B. La réponse civilo-militaire aux questions
sécuritaires africaines
Si l'on s'en tient au discours officiel
américain, le commandement américain pour l'Afrique a pour trame
fondamentale, la prévention des crises. Cette approche marginalise en
quelque sorte les campagnes militaires au profit d'activités civiles. La
mise en prépondérance de telles activités permet de
traiter les problèmes à leurs racines pour des solutions
durables. Dans cette perspective, l'AFRICOM s'investit dans des questions non
seulement socio-économiques (1) mais aussi humanitaires
(2).
1. L'implication socio-économique de l'AFRICOM
Au-delà des réponses militaires, le
commandement américain apporte également des réponses
sociales aux problématiques sécuritaires africaines. Cette
nouvelle démarche s'inscrit dans la perspective d'une approche globale
de la sécurité. Elle prétend au règlement durable
et rapide des crises par la synergie d'actions réalisées par les
différents intervenants dans les domaines de la gouvernance, de la
sécurité, et du développement économique et
social288(*). Si ce
paradigme consacre la mise en prépondérance des civils dans les
activités sécuritaires, sous l'AFRICOM, il est en majeure partie,
le fait de militaires.
Le traitement de questions sociales et
économiques par le commandement américain a pour objectif
d'empêcher l'augmentation de la pauvreté, du chômage, des
maladies ou encore de l'analphabétisme. Puisque ces
éléments sont de nature à créer un environnement
favorable au développement d'activités illicites telles que la
piraterie maritime, les trafics de tout genre et même le terrorisme. Les
populations désemparées pouvant facilement être
recrutées par les réseaux internationaux qui animent ces
différents phénomènes. L'on comprend dès lors que
le commandement américain soit impliqué dans des projets
agro-pastoraux sur le continent. En effet, lorsqu'on sait qu'après
l'agriculture, l'élevage est la deuxième plus grande ressource
alimentaire de l'Afrique de l'Ouest, la construction de lieux de vaccination et
de soin du bétail semble déterminante pour son éclosion.
Cette activité s'inscrivait dans le cadre du programme d'assistance de
l'AFRICOM qui a fondé et facilité la construction et
la réhabilitation de sept centres de vaccination et d'examen du
bétail à travers la Mauritanie289(*).
Par ailleurs, le commandement américain
se sert du Programme Civil d'Action Médical (MEDCAP) et du Programme
Civild'Action Vétérinaire (VETCAP) pour assurer les services
médicaux de base. Il s'agit de projets liés à des actions
civiles médicales et vétérinaires. L'objectif ici est de
réduire le risque lié aux maladies à travers la
collaboration avec le personnel médical des Etats partenaires. Le MEDCAP
par exemple est animé par le 13e Corps Médical
Expéditionnaire de la Navy. Il a permis de traiter 550 patient jusqu'en
2003. En outre, le 20 Juin 2012, les soldats du 3e escadron de la Task Force
Raptor, stationnés à Djibouti ont apporté un soutien en
termes de formation au personnel médical djiboutien290(*).
Ces actions sont sensées créer un
environnement sain dans lequel les populations ne seraient pas
vulnérables aux tentations des groupes criminels et terroristes
internationaux. Puisque vivant dans des conditions de vie acceptables. Donc
selon l'approche de l'AFRICOM, l'amélioration des conditions de vie des
africains est un élément essentiel dans la prévention des
conflits sur le continent. Cependant, si cette démarche s'appuie sur des
activités socio-économiques, l'on ne saurait négliger
l'importance des actions humanitaires que mène le commandement
américain.
2. L'AFRICOM et les questions humanitaires en Afrique
Faisant face - avec d'énormes
difficultés - à des catastrophes naturelles et à des
conflits endémiques, l'Afrique est régulièrement le
théâtre de nombreux désastres humanitaires. Ces situations
entrainent très souvent la pauvreté et les
épidémies qui constituent des facteurs de
détérioration des sociétés locales. Face à
de tels cas, même les autorités africaines deviennent
impuissantes. La conséquence liée à ce type
d'évènement est très souvent la faillite de l'Etat. Or
d'après Washington, ce type d'Etat constitue une menace pour sa
sécurité. Puisque qu'il abrite des espaces non
contrôlés par les autorités. Ce qui constitue autant de
havres potentiels pour les terroristes et autres trafiquants de toutes natures.
De cette mise au point, transparaît la nécessité d'un
soutien humanitaire aux Etats africains. C'est entre autres ce à quoi
s'attèle le commandement américain pour l'Afrique.
A travers la CJTF-HOA, l'AFRICOM soutien des missions
humanitaires en Afrique de l'Est. Il s'implique dans l'évacuation
aérienne, le ravitaillement humanitaire en Somalie et au Kenya291(*). En outre, il a
facilité le déploiement de détecteurs de
température à travers la région. Ceux-ci devant fournir
des données climatologiques afin de prédire les conditions
climatiques hostiles et en limiter les effets comme la sécheresse et les
inondations292(*). Par
ailleurs, de concert avec les forces de défense ougandaises, la CJTF-HOA
a organisé, du 18 au 27 Novembre 2012, une opération de formation
sanitaire. Cette formation permettrait aux professionnels de mieux faire face
aux maladies qui affectent les hommes et les animaux293(*). Un autre exemple qui
témoigne de l'implication du commandement américain dans les
questions humanitaires en Afrique est ce programme de formation humanitaire de
déminage qu'ont dirigé les Marines. Celui-ci a
été dirigé avec l'armée kényane du 15
Janvier au 5 Février 2013 à l'école humanitaire de soutien
à la paix du Kenya. Le but de l'opération étant de
renforcer les capacités institutionnelles du Kenya en formant les
futures instructeurs afin qu'ils puissent instruire d'autres294(*).
Cette démarche préventive répond
plus à une stratégie à but négatif. C'est un mode
de stratégie qui est destiné à protéger l'acteur
des buts positifs et des capacités de coercition de l'adversaire, afin
de garder le minimum de liberté d'action indispensable pour
développer ses propres actions à buts positifs295(*). L'accent est mis ici sur
des actions dites d'interdiction. Celles-ci consistent à créer
des conditions susceptibles d'entraver la réalisation des buts
stratégiques de l'adversaire. Dans le cas d'espèce,
l'amélioration des conditions de vie des africains par l'AFRICOM est
destinée à rendre les populations moins vulnérables face
à la tentation de rallier des groupes extrémistes violents. Il
s'agit donc d'une stratégie de nature défensive qui cherche
à parer les initiatives et à devancer les intentions
adverses296(*).
Selon la doctrine qui encadre le commandement américain
pour l'Afrique, la prévention des conflits sur le continent serait le
meilleur moyen de traiter l'insécurité qui y règne. Ce qui
suppose une posture plus diplomatique que militariste. Or la simple nature de
cette institution entrave la priorisation des actions diplomatiques dans son
fonctionnement quotidien. Dominée par des militaires, il est très
difficile d'imaginer l'AFRICOM privilégier des négociations
à la place des interventions militaires. Dans la culture
stratégique américaine, l'armée n'est faite que pour punir
ceux qui violent l'ordre « normal » des choses. Elle ne
doit pas s'encombrer de considérations politiques. Cette conception
essentiellement pénale et policière des engagements
américains comporte certains corollaires. Premièrement, les
problématiques sécuritaires africaines sont abordées avec
une grande simplicité. La complexité qui les entoure étant
quelque peu négligée.
Malgré le fait que le commandement
américain apporte des réponses civilo-militaires aux menaces
prégnantes en Afrique, son référentiel
praxéologique demeure profondément offensif. Cela se traduit dans
la promotion de la politique dite
d' « agrégation » qui consacre une assimilation
monolithique de toutes les menaces sous le prisme de la menace terroriste. Ce
paradigme est destiné à légitimer les actions militaires
des Etats-Unis, face à une opinion internationale de plus en plus
méfiante à leur égard. Cette campagne de construction des
menaces est également perçue au travers de la mobilisation du
concept d' « espaces non gouvernés ». Ce
concept est destiné à frapper d'incapacité, les
gouvernements africains face à la multiplication de « zones
grises » sur leurs territoires respectifs. Ce qui constitue des
raisons « légitimes » d'intervention pour un
commandement qui reste fidèle à la culture stratégique
américaine.
Chapitre IV: l'AFRICOM: un commandement
fidèle à la culture stratégique
américaine
Dans le souci de prévenir les menaces et d'amenuiser
les facteurs d'insécurité en Afrique, les Etats-Unis ont
décidé d'encadrer leur nouveau commandement sur le continent par
une doctrine qui relève d'une démarche plus proactive que
réactive. Cette logique qui tire ses racines des expériences
d'Irak et d'Afghanistan, relève d'une approche globale de la
sécurité. Elle devrait, d'après les USA, entrainer une
diminution considérable des actions militaires. Or à
l'épreuve de la réalité et au-delà des discours,
l'on se rend compte que cet Etat a du mal à démordre avec sa
vision militariste des relations internationales. Cela est d'autant plus
pertinent qu'avec les incertitudes et l'imprévisibilité de
l'environnement du XXIe siècle, il a été
emmené à faire de la puissance militaire, un pilier de son
leadership mondial297(*). Les raisons liées à la
perpétuation de cette logique militariste sont à rechercher dans
la culture stratégique américaine dont l'AFRICOM reste
prisonnier. La rupture pourtant clamée par les autorités
américaines ne peut qu'être non assurée. Puisqu'elle
concerne ce qu'il ya de plus compliqué et de plus long à faire
évoluer : à savoir la culture298(*). Il serait donc
difficilement concevable que ce sixième commandement géographique
s'écarte de cette ligne directrice qui sous-tend l'engagement
extérieur américain.
La culture stratégique se définit comme
« l'ensemble des pratiques traditionnelles et des habitudes de
pensée qui dans une société géographiquement
définie, gouvernent l'organisation et l'emploi de la force militaire au
service d'objectifs politiques »299(*). Vue sous cet angle, la
culture stratégique constitue un cadre théorique et conceptuel
qui régit l'engagement militaire d'un Etat. Vincent DESPORTES la
considère comme le cadre dans lequel les idées
stratégiques et les décisions de défense sont
débattues. La culture stratégique est productrice d'une double
dynamique: non seulement elle limite la liberté d'action, elle constitue
également un terreau pour l'agir300(*). Elle se structure et se fossilise au cours de
l'histoire d'une société politique, façonnée par
les victoires et les défaites, les joies et les peines partagées
par un peuple. Née de la pratique et de l'expérience, la culture
stratégique s'inscrit durablement dans l'agir collectif d'un Etat. En
conséquence, elle prédispose à une démarche plus ou
moins prédictible, puisque reposant sur un répertoire d'actions
relativement routinier.
Ainsi posé, ce cadre d'action conditionne
également la posture, les actions et le fonctionnement de l'AFRICOM. Car
lors de sa mise sur pied, Washington était motivé autant par sa
culture stratégique nationale (section I) que par la
volonté d'inscrire cette structure dans l'offensive militaire
américaine en Afrique (section II).
SECTION I: PRESENTATION GENERALE DE LA
CULTURE STRATEGIQUE AMERICAINE
Profondément ancrée dans l'histoire, la
culture stratégique américaine puise ses sources dans la culture
du peuple américain qui façonne les comportements des citoyens de
cet Etat. Le comportement américain, en tant que vecteur important de la
pensée militaire de Washington, a été en grande partie
façonné par les « pères fondateurs »
de cette nation. Ces pèlerins d'obédience puritaine ont eu une
trajectoire historique déterminante dans leur appréhension du
monde. Pourchassés en Angleterre à cause de leur foi, ces
religieux se persuadaient de l'aspect divin de leur combat et se
considéraient plus tard comme peuple élu de Dieu, le reste du
monde étant dans les ténèbres. Par ailleurs vouant un
culte à la réussite individuelle et au projet, ils forgent
l'optimisme, le dynamisme, le volontarisme ou encore le pragmatisme qui
constituent le « rêve américain ». Ces
éléments ont pour conséquence le goût de l'action,
la propension à aller de l'avant, la recherche de l'efficacité et
surtout l'impatience301(*). Même s'ils ne relèvent pas de
l'exhaustivité, ces quelques éléments comportementaux
donnent à la culture stratégique américaine une forte
teneur axiologique (A) qui alimente une stratégie
profondément offensive (B).
A. Une forte teneur axiologique
Les « pères fondateurs »
des Etats-Unis, depuis leur installation sur leurs nouvelles terres,
nourrissent des « mythes fondateurs » qui jusqu'à ce
jour, déterminent la façon dont les américains
perçoivent le monde extérieur. L'un des mythes les plus saillants
est sans doute la « destinée manifeste ». Selon
celui-ci, le peuple américain est élu de Dieu et est
supérieur à tous les autres peuples du monde. Le sénateur
Beveridge relevait fort-à-propos que « Dieu nous a fait
les maitres-organisateurs de l'univers pour remplacer le chaos dominant par un
autre système »302(*). Cette croyance débouche sur la promotion
d'un légalisme et d'un moralisme à l'américaine
(1), mais également sur un esprit de croisade
(2).
1. Légalisme et moralisme à
l'américaine
La croyance en une « destinée
manifeste » aux Etats-Unis alimente l'idée de
l'exceptionnalisme du peuple américain. Dans ce sens, ce peuple serait
unique en son genre et on ne saurait l'assimiler à n'importe quel autre
dans le monde. Ce postulat se traduit par un discours « donneur de
leçons », n'imposant de sacrifices qu'aux autres et axé
sur une prétendue supériorité du plus fort303(*). Ainsi, la politique
étrangère des Etats-Unis repose sur des valeurs
considérées comme fondatrices de la société
américaine. On mobilise à cet effet le concept "American
Creed" pour désigner la « dignité essentielle
de l'être humain, égalité fondamentale des hommes et droit
inaliénable de liberté et de justice »304(*). Les éléments
structurant de ce concept sont l'accomplissement personnel qui se traduit par
la promotion de l'individualisme et du libéralisme. L'Etat étant
désormais contraint de laisser des espaces à l'individu pour que
celui-ci puisse s'accomplir et s'épanouir. C'est pourquoi Washington
fait de la démocratie, un des principes cardinaux de son action
extérieur.
Sur le plan idéologique, le courant
idéaliste est de ceux qui impulsent cette dynamique. Basé
fondamentalement sur l'exceptionnalité morale des Etats-Unis, il se
divise en deux tendances. Pendant que l'idéalisme libéral vise
à rendre le système international plus harmonieux et moins
propice aux affrontements - et cela grâce aux institutions
internationales, - l'idéalisme conservateur s'attèle à
mobiliser de grands principes universels pour justifier et fonder une politique
vouée à la suprématie américaine et à la
promotion du capitalisme305(*). Ainsi, les droits humains et les valeurs
démocratiques devraient être des composantes déterminantes
de la politique étrangère américaine. Ce qui traduit le
désir de façonner le monde à l'image des
Etats-Unis306(*). Cela
passe par la diffusion à grande échelle, des valeurs
américaines et donc par une « moralisation de la politique
étrangère ». Ainsi pour le président Wilson,
« Nous sommes au début d'une ère où il doit
être claire que ce sont les mêmes critères de comportement
et de définition du mal valables pour les citoyens des Etats
civilisés qui doivent être respectés par les nations et
leurs gouvernements »307(*). L'on voit bien qu'il s'agit ici de faire de
Washington, le phare de l'humanité. Étant donné que c'est
lui qui devrait définir les règles applicables au reste du monde.
Si l'on se fie à la grille de lecture
déclinée plus haut, les Etats-Unis ont l'exclusivité de la
définition du bon et du mauvais. Et ce, en fonction de leurs propres
appréciations et perceptions du monde. Ils sont garants de l'ordre
juridique international qui doit primer sans tenir compte des
mécontentements des peuples308(*). Tous les peuples du monde doivent tendre vers un
même idéal qui est celui américain et qui met l'accent sur
des principes tels que la paix, le respect de la règle de droit, la
démocratie, le respect des droits de l'homme et des libertés
individuelles si fièrement proclamés dans la constitution des
1778.
Cet arrière-plan moral de la culture
stratégique américaine aboutit très logiquement au
messianisme. Washington s'érigeant en défenseur de grandes
causes, un gendarme à l'échelle mondiale. Punissant tous ceux qui
transgressent la « loi » largement définie par lui.
Ces « délinquants » ne sauraient rester impunis.
Ainsi, ils font très souvent l'objet de croisades fortement
ancrées dans l'engagement extérieur américain.
2. L'esprit de croisade
Si selon les « pères
fondateurs », les Etats-Unis ont été
désignés par Dieu pour diriger et veiller sur le monde, on peut
bien comprendre le messianisme qui caractérise la perception
américaine du monde extérieur. Il est, d'après eux,
constitué de peuples qui vivent dans l'impureté et la corruption.
C'est cette discrimination du bien et du mal, du bon et du mauvais qui fonde le
manichéisme profondément ancré dans la culture
stratégique américaine. Cette tendance est portée par la
nouvelle droite américaine qui est, elle-même, la traduction
politique d'un mouvement religieux des années 1920. Celui-ci se
considère comme étant « fondamental ».
C'est-à-dire issu des vrais fondements de la foi
chrétienne309(*).
Au nom de ce fondamentalisme, toutes les autres valeurs qui ne relèvent
pas du répertoire axiologique de Washington sont frappées
d'illégitimité et d'illégalité. Dans cette
perspective, la superpuissance se réserve le droit de se mobiliser pour
punir le « contrevenant ». C'est ici que la
« Rogue Doctrine » trouve toute sa place.
Consistant en la désignation d'Etats parias ou encore
« hors-la-loi », cette doctrine est au centre du
système américain de classement et de punition310(*). Pour Beveridge,
sénateur de l'Indiana, Dieu « nous a donné le
goût de l'autorité afin que nous puissions gouverner les peuples
sauvages ou délinquants »311(*).
Le discours fondamentaliste qui caractérise la
culture américaine forge l'argument selon lequel les engagements
extérieurs de Washington sont des croisades. C'est-à-dire des
combats du Bien contre le Mal, de Dieu contre le Diable ou encore de l'esprit
divin contre la matière corrompue312(*). Cette tendance se traduit dans les noms
donnés aux expéditions militaires américaines à
travers le monde. L'on parle notamment de l'opération "Restore
hope" en Somalie à partir de Décembre 1992. Elle est
officiellement destinée à « redonner
espoir », en permettant l'acheminement de l'aide humanitaire, afin de
sauver les somaliens de la famine utilisée comme arme de guerre par les
hommes du Général Farah Aïdid. Ces miliciens sont alors
identifiés au Mal. Une autre expédition militaire
assimilée à une croisade est l'opération "Enduring
Freedom". Elle est destinée à punir, puis reverser le
régime taliban accusé d'avoir joué un rôle central
dans les attentats du 11 Septembre 2001. Par ailleurs, l'opération
"Iraqi Freedom" devait « garantir la liberté des
irakiens » en prévenant l'utilisation par Saddam Hussein,
d'armes de destruction massive. Cette dernière campagne se fondait sur
la nécessité ressentie par l'administration Bush
d'éliminer tous les « méchants » qui
possèderaient de telles armes313(*). Pour empêcher ce scénario, la
National Security Strategy de Septembre 2001 énoncée
à West Point par G. W. Bush met l'accent sur l'action préventive,
tout en marginalisant la dissuasion. Cette nouvelle approche devrait permettre
de faire face à ce que la maison Blache qualifie de
l' « Axe du Mal » désignant l'Irak, l'Iran et
la Corée du Nord.
Etant donné la non-détention d'ADM par
l'Irak de Saddam Hussein comme le prétendait le secrétaire
à la défense Donald Rumsfeld314(*), l'on voit bien qu'il ya une propension chez les
dirigeants américains à construire des ennemis en diabolisant les
adversaires potentiels ou existants. Cette tendance est largement animée
par les néoconservateurs américains. Conférant une grande
importance à la puissance militaire et à l'exportation de la
démocratie, les partisans de ce courant de pensée estiment que
« l'Amérique doit assurer l'ordre mondial et la
défense de la liberté »315(*). Le discours sur la croisade
s'est accru dans la politique étrangère des Etats-Unis depuis
l'élaboration en 2000, d'un document intitulé: "Rebuilding
America's Defenses: Strategy, Forces and Ressources For a New
Century"316(*). Ce
document a été conçu par un groupe de
néoconservateurs appelé Project for a New American Century
(PNAC)317(*). Les
conclusions qui en ressortent insistent sur le développant et le
déploiement d'un système anti-missile; sur le contrôle de
nouveaux espaces internationaux et du cyberespace; ainsi que la
préservation de la Pax Americana à travers la
prééminence des militaires de Washington afin d'assurer un XXIe
siècle unipolaire318(*). Ces conclusions particulièrement ambitieuses
ne peuvent être réalisées que par une diabolisation des
adversaires. La focalisation sur la croisade permet aux dirigeants de soulever
les passions et de susciter de l'adhésion d'un peuple marqué par
une tradition antimilitariste. En effet, chez les américains, la guerre
est considérée comme une aberration, dans la mesure où
elle est contraire aux principes et institutions démocratiques. La
guerre empêche l'accomplissement personnel et constitue une menace aux
libertés319(*).
En suscitant l'adhésion populaire, le discours sur la croisade constitue
un moteur pour l'action et prédispose à une stratégie
profondément offensive.
B. Une stratégie profondément
offensive
Comme il a été noté plus haut, la
réticence du peuple américain face à l'utilisation de
l'outil militaire peut être atténuée par le
soulèvement des passions populaires. Cependant, une fois engagée,
l'armée américaine est tenue de produire rapidement des
résultats satisfaisants à un peuple optimiste et triomphaliste.
Dans la mesure où la guerre est considérée comme un
phénomène qui bouleverse « l'ordre normal »
des choses, la mission des militaires consiste juste à punir et à
vaincre celui qui en est responsable et de retourner immédiatement au
pays: c'est l'essence même de la stratégie de
l' « Uppercut »320(*). Pour y parvenir, les
Etats-Unis privilégient l'offensive. Cette stratégie s'inspire
des enseignements du théoricien suisse Antoine Henry JOMINIqui,
d'après Bruno COLSON, constituent le socle même de la culture
stratégique américaine321(*). Comme ce dernier, Les américains accordent
beaucoup d'importance non seulement à l'initiative et à la
concentration des forces (1), mais également à
la manoeuvre et à l'anéantissement de l'ennemi
(2).
1. Primat de l'initiative et de la
concentration des forces
La culture stratégique américaine s'inspire
largement de JOMINI qui lui-même est très admiratif de
Napoléon. En effet le théoricien suisse, dans ses travaux,
questionne fondamentalement les causes de la réussite de Napoléon
dans ses campagnes de 1796-97 en Italie, à Marengo, à Austerlitz
et à Iéna. Il parvient à les identifier à travers
certaines variables. Par la suite, les facteurs de ces succès militaires
sont érigés en principes de la guerre. Ceux-ci servent
désormais de guide opérationnel à tous ceux qui veulent
s'engager dans l'action militaire322(*). Parmi les principes évoqués se
trouvent en bonne place les deux qui structurent cette partie. A savoir
l'initiative et la concentration des forces.
En effet, dans son Traité des grandes
opérations militaires, JOMINI émet comme premier principe,
la nécessité de « prendre l'initiative des
mouvements »323(*). Fondé sur la rapidité et la
promptitude, ce principe permet de prendre de l'avance et d'anticiper sur les
actions ennemies. Il estime « qu'un Etat fait mieux d'envahir ses
voisins que de se laisser attaquer lui-même »324(*). L'anticipation ainsi
privilégiée procure un avantage significatif dans l'action
stratégique. Par ailleurs, célébrant les vertus de
l'offensive assimilée à l'initiative des mouvements,
JOMINI précise qu'elle « porte la guerre sur le sol
étranger, elle ménage son propre pays, diminue les ressources de
l'ennemi et augmente les siennes ». Il rassure par la
suite que « celui qui a pris cette initiative sait d'avance ce
qu'il fait et ce qu'il veut...Celui qui attend est prévenu partout;
l'ennemi tombe sur des fractions de son armée; il ne sait ni où
son adversaire veut porter ses efforts, ni les moyens qu'il doit lui
opposer »325(*).
Le deuxième principe intéressant ici est
le quatrième évoqué par le théoricien suisse. Il
s'agit de la concentration des forces. A ce sujet, il recommande de
garder toutes les forces réunies pour qu'elles soient mieux
contrôlées par le chef militaire. La concentration ainsi
vantée devrait procurer un avantage en cas de bataille. Car la
dispersion des forces peut être fatale en cas rencontre avec l'ennemi.
C'est pour cette raison qu'il recommande, au jour de la bataille, de diriger le
gros des forces sur le point décisif du champ de bataille, ou sur la
partie de la ligne ennemie qu'il importerait d'accabler326(*).
Même si ces éléments font partie
d'une doctrine d'action militaire basée sur des guerres du
XVIIIe siècle, il n'empêche qu'ils continuent de
sous-tendre l'action militaire américaine jusqu'à nos jours. La
théorie de JOMINI a été intériorisée dans la
culture stratégique américaine, grâce notamment à
l'esprit pragmatique lié à l'esprit des Lumières qui
imprégnait les « pères fondateurs ». En
réalité, le côté scientifique et rationnel de JOMINI
correspondait mieux à l' « engineering
mentality » des américains327(*). La preuve en est que
l'académie militaire de West Point - créée en 1802 - qui
deviendra le principal lieu de diffusion de la pensée de JOMINI,
était d'abord une école de formation d'ingénieurs. La
plupart de ses responsables ont été formés à
l'Ecole militaire européenne, alors dominée par les succès
de Napoléon. Que ce soit Winfield Scott ou Sylvanus Tayer, la
référence au système français des fortifications
est de taille. Grand admirateur de Napoléon, l'enseignant de la science
de la guerre Dennis Hart Mahan croit, tout comme JOMINI, que la seule chance de
succès à la guerre est dans la concentration maximale des forces.
Il vante également la concentration des forces au point
décisif et y voit le principe fondamental de l'art de la
guerre328(*). Un autre
grand admirateur de JOMINI issu de l'académie de l'US Army de
West Point est Robert Edward Lee. Appartenant au camp des
confédérés lors de la guerre de sécession, il est
le commandant de l'armée de la Virginie du Nord. Sur le terrain, il
privilégie l'opération avec la plus grande masse des forces sur
le point décisif. Grand défenseur de la concentration des forces,
il a également une obsession pour l'initiative329(*). Comme on peut le voir
à travers les officiers formés à l'académie de West
Point, la concentration des forces et l'initiative sont des
principes structurants de la culture stratégique américaine. Il
en ressort que Washington voue un culte aux enseignements de JOMINI qui a
également mis l'accent sur la manoeuvre et
l'anéantissement de l'ennemi.
2. Entre manoeuvre et
anéantissement de l'ennemi
Ces deux principes « jominiens »
qui caractérisent l'Américan Way of War sont
relativement antithétiques. Pendant que le premier, s'assimilant
à l'attrition, privilégie le contournement du dispositif ennemi
et son épuisement, l'autre met l'accent sur l'affrontement et la
bataille. Cependant, la manoeuvre peut concourir - même si elle
prend beaucoup de temps - à anéantir l'armée ennemie. Les
grands généraux ont toujours adopté
anéantissement et attrition selon les circonstances330(*). Chez JOMINI, la
manoeuvre est le deuxième principe. Il parle de la
« manoeuvre sur les derrières ». Cela
consiste à diriger ses forces sur la partie faible de l'armée
ennemie ou de préférence seulement face à ses fractions.
L'affrontement massif est marginalisé dans ce cas. La manoeuvre peut
consister à se porter sur les communications de l'armée adverse.
Cela permettant de réduire l'incertitude dans laquelle le
général doit vivre et prendre des résolutions331(*). Ainsi posé, la
manoeuvre accorde peu d'importance au choc frontal. Elle est destinée
à affaiblir et à épuiser l'ennemi en l'attaquant sur ses
points vulnérables. La place qu'occupe cette démarche dans la
culture stratégique américaine est traduite dans le
règlement américain du service de campagne FM 100-5. Ce manuel
reconnait sa capacité à conduire à la victoire, tout en
mettant en garde contre une manoeuvre trop enveloppante qui nécessite
une supériorité numérique considérable332(*). Dans l'histoire militaire
des Etats-Unis, Ulysses Simpson Grant en a été un des grands
promoteurs. Nommé commandant en chef de toutes les forces de l'Union en
Février 1864 - c'est-à-dire en pleine guerre de sécession,
- il ne visait pas prioritairement la destruction de l'armée ennemie,
mais plutôt la destruction de ses supports logistiques. Une
stratégie d'attrition qui n'était possible qu'à travers le
mouvement tournant et peu d'affrontements333(*). Ce fut le cas lors de la bataille de Vicksburg
pendant cette guerre en Avril 1863334(*).
Pour ce qui est de l'anéantissement de
l'ennemi, il faut noter qu'il s'agit du douzième principe
proposé par JOMINI. Ce denier insiste sur la poursuite à outrance
de l'armée vaincue. D'où l'importance de la concentration des
forces. Cela est pertinent dans la mesure où la marche en masse est
destinée à anéantir l'armée ennemie en cas de
bataille335(*). En
effet, face à une opinion nationale très exigeante et dont les
passions sont souvent soulevées par un discours messianique et
manichéen, les militaires américains sont très souvent
portés vers la guerre totale. Car, selon eux, ce n'est que celle-ci qui
peut leur permettre d'en découdre le plus rapidement possible avec
l'ennemi. Si la nature d'une guerre s'apprécie sur la base d'une
sociologie compréhensive - c'est-à-dire celle qui
interprète le sens des conduites humaines, - on peut alors interroger
l'enjeu que Washington donne à ses engagements militaires336(*). En réalité,
après leur fuite de l'Angleterre et leur installation sur le continent
américain, les « pères fondateurs » ont
nourri une suspicion permanente à l'égard du monde
extérieur. Cette peur étant née des sévices subis
en Europe. En conséquence, toute menace est perçue comme une
tentative renouvelée d'oppression du peuple américain. Lorsqu'une
guerre découle d'une situation pareille, elle est
considérée comme un moyen d'assurer la survie de ce peuple et de
sa civilisation. De cette logique, transparait une perception absolutiste des
enjeux du conflit, l'objet principal étant considéré par
Washington comme étant fondamental et non négociable. Or une
telle mobilisation pour la survie d'un groupe constitue l'essence même de
la guerre totale337(*).
Dans l'Américan Way of War, la
référence à l'anéantissement et à la guerre
totale apparait de manière flagrante. Ce qui suppose une
référence à CLAUSEWITZ. Puisque pour ce dernier, dans la
guerre, « les forces - ennemies - doivent être détruites,
c'est-à-dire réduites à une condition où elles ne
sont plus aptes à continuer la lutte »338(*). Cette tradition tire ses
racines des guerres indiennes du XIXe siècle. En effets, pour
faire face à ces insurrections, le commandant en chef des forces
américaines, le général Shéridan faisait observer
que: « La culture de la nation indienne va bientôt
intégralement disparaître avec la destruction de la puissance de
cette dernière »339(*). Considérées par WEIGLEY comme une
lutte pour la survie, ces guerres ont fait montre de l'obsession pour la guerre
totale et l'anéantissement. Le Général Sherman
recommandait à ses troupes d'exterminer les Sioux y compris les
femmes et les enfants. Cela devait, poursuit-il, limiter le travail
d'extermination futur340(*). Ce discours focalisé sur la destruction de
l'ennemi et ayant pour élément central la puissance, constitue la
trame fondamentale de la doctrine stratégique américaine. Il
s'agit d'un référentiel qui a constitué le leitmotiv de la
plupart des chefs militaires de l'histoire des Etats-Unis. Ce fut le cas de
Grant lors de la guerre de sécession dans les années 1860; ou
encore de John J. Pershing, lors de première guerre mondiale où
les Etats-Unis sont intervenus en 1917.
Profondément ancrés dans sa
pensée militaire, les principes sus-dénommés conditionnent
toute action entreprise par Washington. Si l'on considère la
capacité de « projeter la puissance » comme
étant au coeur de la culture stratégique
américaine341(*),
cela n'étant possible qu'à travers l'offensive, l'on peut bien
comprendre que l'AFRICOM reste fidèle à cette ligne d'action.
C'est-à-dire qu'il soit un outil de l'offensive militaire de Washington
sur le continent africain.
SECTION II : L'AFRICOM DANS
L'OFFENSIVE MILITAIRE AMERICAINE EN AFRIQUE
Le commandement militaire américain pour
l'Afrique fait partie de l'arsenal stratégique des USA. Il est donc
tout-à-fait logique qu'il réponde aux mêmes logiques que
les autres commandements conçus dans le contexte de la guerre froide.
Même s'il naît dans un contexte sécuritaire particulier et
est encadré par une doctrine novatrice, cet outil scelle la
militarisation de l'Afrique par Washington. Cela est un impératif dans
la mesure où « la Chine est entrain d'acquérir le
contrôle des ressources naturelles, elle supplante les entrepreneurs
occidentaux dans la réalisation de grands projets infrastructurels et
elle accorde des prêts souples et autres éléments
stimulants pour soutenir son avantage dans la
compétition »342(*). Pour faire face à cette percée
inexorable de Pékin sur le continent, Washington s'inscrit dans une
dynamique d'occupation territoriale (A) tout en
renforçant son interventionnisme (B).
A. La dynamique d'occupation territoriale
La question de l'occupation territoriale est un
élément crucial en géopolitique et en
géostratégie. Car elle permet le contrôle de régions
entières. Si elle relève d'une stratégie de domination
adaptée à une époque surannée, elle garde sa
pertinence aujourd'hui. Et cela parce qu'elle permet à une entité
politique de veiller de plus près à la préservation des
ses intérêts. C'est, semble-il, dans cette logique que
s'inscrivent les Etats-Unis lorsqu'ils multiplient les bases militaires
(1) et se servent de l'APS pour contrôler les mers
bordant le continent (2).
1. Multiplication des bases militaires
L'occupation territoriale est une donnée
importante de la pratique stratégique américaine qui est, comme
il a été démontré plus haut,
imprégnée des enseignements de JOMINI. Car ce denier
développe une conception beaucoup plus
« territoriale » de la stratégie343(*). Il s'agit d'une vision
relativement proche de celle de François THUAL. Pour ce dernier en
effet, « contrôler et contrer » constituent les deux
constantes comportementales qui tissent la trame de tout projet et de toute
action géopolitique344(*). Contrôler entendu dans le sens de
l'occupation, de la possession et de la maîtrise directe d'un territoire;
et contrer consistant à empêcher un autre groupe ou force
politique de s'emparer d'un territoire ou de s'y installer directement ou
indirectement345(*).
Cette logique est assez perceptible dans l'installation des bases militaires
américaines en Afrique.
Même si l'occupation dont il est question ici
n'est pas identique à celle du XVIIe ou du XVIIIe siècle, qui
était assez visible, il ya tout de même lieu de parler
d'occupation à des fins de contrôle. Il est vrai que les
Etats-Unis ne possèdent qu'une seule grande base militaire en Afrique.
Elle se trouve à Djibouti, au Camp Lemonnier, dans le cadre de
la CJTF-HOA créée par le CENTCOM en Octobre 2002. Mais si l'on se
place sous le seul angle de la visibilité et de la grandeur de ces
installations, on risquerait de manquer de lucidité pour aborder ce
problème en profondeur. Celui-ci étant plus compliqué que
ça.
Il existe en réalité trois types de
bases militaires. Les Main Operating Bases (MOB) ou bases principales
d'opérations. Il s'agit de très grandes installations qui
abritent d'importants moyens logistiques et humains; Il ya les Foward
Operating Sites (FOS) ou sites avancés d'opérations. Il
s'agit de sites constitués de forces de soutien, d'équipes et
d'équipements pré-positionnés; il ya enfin les
Cooperative Security Locations (CSL) ou emplacements
coopératifs de sécurité. Ce sont des installations de
l'Etat hôte avec présence étrangère ou non. Ceux-ci
assurent un accès en cas d'éventualité346(*). Cette typologie nous
renseigne que le Commandement américain ne dispose d'aucun MOB sur le
continent. Par contre il y supervise quatre FOS. Le principal est celui qui a
été cité plus haut, c'est-à-dire celui de Djibouti.
Un autre est situé sur le territoire britannique d'outre-mer de
Saint-Helena dans l'océan Atlantique. Il s'agit d'une base
logistique de l'USTRANSCOM qui vient en soutien à l'AFRICOM. Deux autres
se trouvent à Dakar au Sénégal et à Entebbe en
Ouganda347(*).
Si les grandes bases militaires sont encore peu
nombreuses, l'on assiste plutôt à un foisonnement d'emplacements
coopératifs de sécurité. Cette prolifération se
fait sur la base du « Base Access Agreement for Cooperative
Security Locations and Foward Operating Sites ». Signé
avec les Etats africains, il permet à Washington d'utiliser les
facilités militaires des ces derniers. D'où la mise sur pied d'un
véritable « réseau de
facilités »348(*). La mise à nue de ce réseau de base a
notamment été faite par le Washington Post, le 14 Juin
2012. Selon ce journal, ces emplacements sont supervisés par les forces
des opérations spéciales, mais gérés en grande
partie par des sociétés privées de sécurité.
C'est notamment le cas de la « facilité »
située à l'aéroport international de Ouagadougou - mise
sur pied en 2008 - où travaillent discrètement une soixantaine
d'américains349(*). Cette base qui supervise des opérations de
surveillance aérienne sur le Sahara est accompagnée de plusieurs
autres. L'on peut citer celle de Manda Bay au Kenya où sont
stationnés une centaine de commandos américains prêts
à intervenir aux larges des côtes somaliennes en cas de
besoin350(*). Il en
existe également à Victoria aux Seychelles, à Gao au Mali
ou encore à Niamey au Niger.
La faible existence de grandes bases en Afrique
s'explique non seulement par la méfiance que suscite la présence
militaire américaine sur le continent, mais aussi par la nature actuelle
de la menace. Car face à un terrorisme mobile et fuyant, il ya la
nécessité d'une nouvelle configuration des bases militaires. Les
grandes installations, dans ce cas, s'avèrent relativement
inadaptées. Les forces devant se rapprocher de la menace. Ainsi, ces CSL
permettent à Washington, selon Carter Ham devant la commission du
Congrès, de renforcer les moyens RSR (renseignement, surveillance,
reconnaissance)351(*).
Cette occupation territoriale se fait donc à des fins de surveillance et
de contrôle comme c'est le cas avec l'APS.
2. APS comme instrument de contrôle des eaux
africaines
L'Africa Partnership Station (APS) est un
programme de coopération sécuritaire mis sur pied en 2007 par
l'US Naval Forces Europe-Africa. Supervisé par l'AFRICOM, il a pour
mission de renforcer le partenariat maritime mondial à travers la
formation et les activités de collaboration afin d'améliorer la
sécurité et la sureté maritimes en Afrique352(*). Ce discours altruiste et
flatteur ne doit pas oblitérer le fait que ce programme fait partie
intégrante de la stratégie navale américaine qui, depuis
Alfred Tayer MAHAN, est fondamentalement offensive. Pour ce dernier en effet,
l'offensive a une valeur dissuasive353(*). Traditionnellement, c'est une stratégie
directe qui encadre le déploiement naval de la Navy. Elle
consiste pour une entité à concevoir et à exécuter
une manoeuvre des forces qui tienne plus compte de ses propres facteurs de
puissance que des vulnérabilités de l'autre354(*). Ce mode a
caractérisé l'ensemble de l'oeuvre de MAHAN avec une
référence répétitive aux principes tels que la
destruction de la flotte ennemie ou l'offensive.
Si cette stratégie était valable dans le
cadre d'une guerre conventionnelle, c'est-à-dire face à une
flotte adverse clairement identifiée, elle perd quelque peu de sa
pertinence dans le cadre d'une guerre asymétrique. De telles
fluctuations, d'après POIRIER, nécessitent une adaptation qui
aboutit à des combinaisons entre différents modes d'action
stratégique. Dans le cas d'espèce, la combinaison qui semble
encadrer la nouvelle stratégie navale de la Navy relève
de la dissuasion. Il s'agit de la jonction entre l'action
d' « interdiction » - destinée à
ôter à l'Autre, toute possibilité de réussite dans
la dialectique conflictuelle - et l'emploi virtuel des forces - qui consiste
à peser sur la volonté de l'adversaire en brandissant ses
capacités d'action. L'objectif ici est d'anticiper une intention ou une
velléité d'initiative adverse et de la bloquer avant qu'elle ne
soit lancée355(*). En l'absence d'une flotte hostile
déclarée, c'est cette forme que semble prendre la
stratégie navale américaine à l'ère de
l'AFRICOM.
Lorsqu'on observe le déploiement naval du
commandement américain sur le continent, on perçoit une dynamique
centrale issue de la Maritime Strategy des années 1980.
Définie par la Navy, elle se structure entre autres autour de
la Sea Control. Elle consiste à maîtriser les mers de
sorte que l'ennemi ne puisse rompre les lignes de communication essentielles.
Cette approche est encadrée par le Livre Blanc publié par la
marine américaine en 1994. Intitulé "Fowrad... from the
sea", celui-ci met l'accent sur l'action sur le littoral356(*). Cela se perçoit
à travers le pré-positionnement de navires américains qui,
officiellement mènent des activités de formation des
armées africaines. Supervisées par l'AFRICOM, les missions de
l'APS consistent en un voyage de six à sept mois au cours duquel ces
navires parcourent un certain nombre de pays africains. Ces bâtiments
accostent dans les Etats devant bénéficier de la formation. Ce
fut le cas de l'USS Nashville en 2009 mais également de Fort McHenry qui
ont parcouru une dizaine de pays africains. Cependant au-delà de
l'objectif officiel lié à la formation, l'on peut, au travers
d'une analyse minutieuse, identifier d'autres intentions.
Il s'agit en réalité de patrouiller en
permanence sur les côtes africaines afin de prévenir toute action
illégale comme la piraterie ou le terrorisme. Le voyage de six mois
permet avec une relative constance, de maintenir une présence sur ces
côtes où se déroulent très souvent des
activités suspectes. La patrouille ainsi instituée joue un
rôle de dissuasion pour divers groupes qui pourraient s'attaquer aux
intérêts américains dans le Golfe de Guinée. Les
Etats-Unis peuvent ainsi résoudre les deux problèmes que pose la
géopolitique du pétrole. C'est-à-dire contrôler les
ressources pétrolières et de contrôler les voies
d'acheminement357(*).
Par ailleurs, la multiplication de navires
américains sur les côtes africaines constitue une alternative
à la présence d'une grande base militaire sur le continent.
Contrairement aux emplacements terrestres qui font l'objet de nombreuses
critiques de la part des africains, les navires sont perçus avec moins
de méfiance. Puisqu'étant destinés officiellement à
assurer la formation des forces de sécurité locales. Ces
bâtiments pourraient ainsi remplir la fonction de bases militaires
off-shore358(*)
et être déterminantes non seulement dans le contrôle des
eaux africaines mais également dans la conduite des opérations
militaires sur terre359(*).
B. La perpétuation de la dynamique
interventionniste
Malgré une production discursive officielle
mettant l'accent sur la prévention des conflits et les actions
humanitaires, les activités de l'AFRICOM sont conditionnées par
des contraintes géostratégiques. C'est-à- dire la
prétention de Washington à demeurer la superpuissance mondiale
comme le recommande l'Ecole hégémoniste. Fondée sur une
approche unilatéraliste, cette Ecole espère voir les Etats-Unis
contrôler le système international à travers la
défense de l'intérêt national, la conquête et la
guerre360(*). Restant
fidèle à cette logique traditionnelle, l'AFRICOM a
été accompagné d'une organisation et réorganisation
institutionnelle (1) devant lui permettre de mener à
bien ses opérations militaires (2).
1. Organisation et réorganisation
institutionnelle
Depuis la création de ce commandement en 2007,
plusieurs observateurs sont d'avis que la politique africaine des Etats-Unis
est de plus en plus militarisée. Cela est du notamment au rôle
prépondérant que joue désormais le DOD dans les relations
afro-américaines. Mais cette tendance ne s'observe pas qu'avec la
création de l'AFRICOM. En réalité, si elle est
accentuée avec les attentats du 11 Septembre, c'est à travers le
Gold Water Nichols Act de 1986 que l'impulsion est donnée.
Cette loi qui réorganise le Pentagone accroit également son
importance dans l'élaboration et la formulation de la politique
étrangère des Etats-Unis. Cela aboutissant à une
« Pentagonisation » de la diplomatie
américaine361(*).
Cela entraine un déséquilibre entre le civil et le militaire. La
priorité étant la lutte contre le terrorisme au détriment
de la diplomatie. Du coup, les militaires se voient confiés des missions
qui relèvent de la compétence civile. Cette tendance est
aujourd'hui accentuée par l'AFRICOM qui intègre le DOS et l'USAID
ou encore le MCC. Cela s'explique par la nécessité d'avoir des
soldats prêts à intervenir sur le sol africain et se traduit par
le maintien de budgets militaires élevés.
Ce dernier aspect est particulièrement crucial.
Car il permet d'explorer le rôle que joue le complexe militaro-industriel
dans la militarisation de la politique étrangère
américaine. Constitué de grands groupes industriels de production
d'armements tels que Lockheed Martin, Northrop Grumman ou
encore Raytheon, ce complexe est une source de financement des
campagnes de certains candidats américains. En conséquence, il
compte également jouer un rôle important dans la prise de
décisions en matière de politique
étrangère362(*). Cela pourrait expliquer la configuration
institutionnelle militariste qui entoure le commandement américain pour
l'Afrique. En effet, dès sa création, l'AFRICOM a
été doté de composantes issues de différents corps
d'armées américains. L'on peut citer l'US Naval Force Africa
(USNAVAF). C'est la composante "Navy" de cette structure. Elle
est destinée à mener des opérations anti-terroristes,
à assurer la sécurité maritime et à renforcer les
capacités des africains à parvenir à un environnement
sécurisé363(*). Il existe également une composante terrestre
appeléeUS Army Africa (USARAF). Elle est destinée
à renforcer les capacités terrestres des armées
africaines, soutenir les opérations de l'AFRICOM ainsi qu'à mener
des actions décisives afin de créer un environnement
sûr364(*).
L'US Air Force Africa (USAF) pour sa part en est la composante
aérienne. Basée à Ramstein, elle mène des
opérations de sécurité en Afrique. Au-delà de ces
trois détachements, il ya également l'US Marines Corps Forces
Africa - qui est la composante "Marines" de ce
commandement ; et la US Special Operations Command Africa
(USOCAFRICA) qui en est la composante des opérations
spéciales.
L'autre facette de la réorganisation
institutionnelle liée à l'AFRICOM concerne la création
d'une Régionally Aligned Force (RAF) - ou force à
vocation régionale - pour l'Afrique. Il s'agit d'un ensemble
d'équipes et de sections hautement entrainées et formées
pour des missions spécifiques et dans des situations
régionales365(*).
Dans le discours officiel américain, cette force répond plus
à des besoins d'assistance sécuritaire et d'adaptation aux
cultures locales. Destinée à conduire des missions
opérationnelles, des exercices militaires ou des activités de
coopération sécuritaire sur le continent366(*), cette force
bénéficie d'un pré-positionnement sur le terrain. Ce qui
lui permet d'assurer une présence militaire effective.
Le concept de RAF a été
matérialisé en 2013 lorsque la deuxième Brigade de la
première Division d'infanterie a été
désignée comme devant venir en soutien à l'AFRICOM. Connue
sous le nom de "Dagger Brigade" ou « Brigade
Poignard » et composée de 3500 soldats, elle planifie le
déploiement - dans 35 pays à travers l'Afrique - d'unités
allant de petites équipes d'entrainement à des bataillons de 800
membres367(*). Autant de
soldats qui, bien que concentrés sur la formation militaire, sont
prêts à intervenir en cas d'urgence. Ce sixième
commandement géographique offre donc à l'armée
américaine, des fondations structurelles et organisationnelles pour une
action plus rapide en réponse aux crises humanitaires régionales.
Il offre également un cadre d'intervention anti-terroriste à
Washington lorsque ses intérêts nationaux sont en jeu368(*). Au vu de ce qui a
été dit plus haut, il semble claire que la réorganisation
institutionnelle qui a accompagné la création de l'AFRICOM est
destinée à mieux le disposer à conduire des
opérations militaires sur le continent.
2. La multiplication des opérations
militaires
Les interventions militaires occupent une place centrale
dans le déploiement mondial des Etats-Unis. Reposant sur l'offensive,
elles permettent à Washington de préserver son « Grand
domaine ». C'est-à-dire toutes les régions
destinées à subvenir aux besoins de l'économie
américaine. En d'autres termes, il s'agit de l'espace mondial
stratégiquement indispensable pour assurer la maîtrise du
monde369(*). Cette
nécessité permanente a fait de Washington, une hyperpuissance
militaire, utilisant l'armée comme le principal outil de sa politique
étrangère370(*). Vu sous cet angle, l'AFRICOM est plus un instrument
militaire destiné à garantir l'intégrité du
« Grand domaine » américain en Afrique. Il
mène à cet effet des opérations militaires sur le
continent. Que ce soit des interventions spectaculaires comme en Libye ou des
opérations beaucoup plus discrètes.
Depuis sa création en 2007 et sa mise en
fonction en 2008, la plus grande opération militaire menée par le
commandement américain est la guerre en Libye. Il s'agit de
l'opération "Odyssey Dawn" - ou Aube de l'Odyssée -
lancée officiellement le 19 Mars 2011. Placée sous le
commandement de l'AFRICOM, elle fait suite aux résolutions 1970 et 1973
du conseil de sécurité des Nations Unies371(*). Assurant le niveau de
commandement le plus élevé, l'AFRICOM supervisait la structure de
commandement et de contrôle. Et cela depuis le navire Mount WHITNEY
prépositionné en méditerranée372(*) avec pour commandant des
opérations, la général Carter Ham. Par la suite, le
commandement a été transféré à la
Supreme Allied Commander Europe (SACEUR) appartenant à l'OTAN
qui en assure l'exécution depuis le premier Avril 2011.
Ce transfert de compétence était un
élément de ce qui allait devenir un principe clé de la
Stratégie de Sécurité Nationale des Etats-Unis. En effet,
dans sa National Security Strategy de 2014, le président Obama
insiste sur le « leading from Behind ». Cette
« direction par l'arrière » vise à
responsabiliser les alliés américains de l'OTAN. Un moyen pour
les USA de redéfinir leur rôle. Tout en s'engageant politiquement,
ils aspirent à être de moins en moins au-devant de la scène
militaire, mais restant la main cachée des opérations
militaires373(*). Ainsi,
la grande campagne aérienne menée par les pays de l'OTAN, dont la
France, contre le régime de Kadhafi était largement soutenue par
les moyens matériels que Washington avait mis à leur disposition.
De même que plusieurs opérations étaient dirigées
par lui depuis la base de l'AFRICOM à Stuttgart374(*). Ce fut également le
cas au Mali où les Etats-Unis ont transféré à
l'armée française, la direction de l'intervention tout en se
contentant de la coordonner et de la soutenir par une technologie
avancée comme celle des drones375(*). Même s'il reste relativement en retrait, cet
Etat, à travers son commandement pour l'Afrique, reste constant dans la
conduite des opérations militaires.
Lorsqu'on observe l'environnement sécuritaire
africain, on se rend compte que la posture du leading from behind
annoncée dans la NSS de 2014 correspond bien au type de
menaces auxquelles fait face l'Etat américain. En effet, en l'absence
d'un adversaire africain capable de contrebalancer ses ambitions
hégémoniques sur le continent, - même si la Chine est de
plus en plus inquiétante - Washington se concentre sur les nouvelles
menaces qui sont fuyantes, mobiles et dissimulées. Celles-ci
relèvent de ce que les américains ont appelé les Low
Intensity Conflicts (LIC) ou Conflits à Faible Intensité.
Selon le manuel de l'US Army, ce concept désigne
une « lutte limitée de caractère
politico-militaire visant à remplir des objectifs politiques,
économiques, sociaux ou psychologiques... »376(*). Face à une telle
réalité, la mobilisation d'un arsenal de feu écrasant
s'avère d'emblée inadaptée. Premièrement en raison
de la rapidité avec laquelle surgissent les crises régionales.
Celle-ci étant en déphasage avec la lenteur liée au
déploiement d'unités classiques et d'une logistique imposante.
Deuxièmement, le but de l'action n'est plus forcément de
détruire le potentiel militaire ou économique de l'adversaire,
mais de le dissuader d'entreprendre ou de poursuivre son action377(*). Pour une entreprise
efficace et précise, Washington privilégie des forces
spéciales378(*)
qui mènent des opérations spéciales379(*). Ces unités non
conventionnelles, discrètes et parfois secrètes, opèrent
à l'abri des projecteurs de la société internationale. Se
trouve ainsi valorisée, une guerre de corps expéditionnaires
facilement mobilisables et permanemment opérationnels. Cette tendance
avait déjà été annoncée par le
secrétaire à la défense D. Rumsfeld lors de la
réorganisation de l'armée après le 11 Septembre 2001. Il
évoquait le concept d' « armée
modulaire » renvoyant à une armée
« composée de brigades plus petites et
indépendantes »380(*).
Désormais, de petites unités, mieux, des
forces expéditionnaires opèrent plus ou moins secrètement
à travers le continent africain. Ainsi, en Avril 2014, le Pentagone
annonçait l'augmentation du Marine Corps Task Force (MCTF) - ou
Corps Expéditionnaire du Corps des Marines - qui apporte son
soutien à l'AFRICOM. L'Air-ground Task Force pour sa part
devrait passer de 600 à 775 personnels381(*). Ce qui montre bien que la stratégie du
commandement américain est caractérisée par des
opérations de faible ampleur et des missions spéciales382(*). L'on comprend dès
lors pourquoi Washington a déployé une centaine de soldats en
Afrique centrale en Octobre 2011 pour se lancer à la recherche de Joseph
Kony de la LRA383(*). Ce
fut également le cas en Février 2013 lorsque le président
Obama avait notifié le congrès sur le déploiement de 100
spécialistes militaires au Niger en soutien aux efforts de renseignement
dans la région. Ces derniers entre autres supervisent des drones
stationnés dans ce pays384(*). Cette surveillance aérienne s'accentue dans
certains pays comme le Nigéria où opèrent des drones de
type Global Hawket des avions de surveillance MC-12385(*). Pendant que des
Pilatus surveillent le Sahara et le Sahel depuis Ouagadougou, des
drones Reaper décollent de Victoria pour surveiller l'Afrique
de l'Ouest386(*). A
travers ces données, on se rend bien compte que l'AFRICOM est plus
guerrier que l'on pourrait le croire. Et ce contrairement aux discours
pacifistes et de bienveillance que multiplient les autorités
américaines à son sujet.
Carte n° 4: bases de surveillance américaines en
Afrique. Sources:
www.jeuneafrique.com,
consulté le 5 Septembre 2014
Tout compte fait, le commandement américain pour
l'Afrique est fidèle à la culture stratégique
américaine. Malgré le pacifisme évoqué dans le
discours officiel, la mise en avant de la puissance militaire tant
vantée par la pensée militaire de Washington permet de maintenir
son emprise sur le monde. Façonnée tout au long de l'histoire
à travers la pensée des « pères
fondateurs », la culture stratégique américaine est
caractérisée par une forte teneur axiologique. Les engagements
extérieurs américains sont ainsi régulièrement
motivés par le légalisme et le moralisme. Il s'agit d'aller en
croisade contre ceux qui troublent l' « ordre normal »
des choses. Contre un tel ennemi assimilé très souvent au diable,
la stratégie la plus prisée par les USA est l'offensive
inspirée de la pensée militaire de JOMINI qui lui-même,
s'inspire largement de Napoléon. Tout comme le théoricien suisse,
les américains insistent sur des principes tels que
l'initiative et la concentration des forces d'une part, et la
manoeuvre et/ou l'anéantissementdel'ennemi d'autre
part. L'American Way of War façonne profondément les
actions de l'AFRICOM dans son offensive militaire sur le continent africain.
Cette institution s'inscrit dans une dynamique d'occupation territoriale. Et ce
à travers la multiplication des bases militaires et les activités
de l'APS. Il s'agit d'une militarisation du continent qui se traduit par une
réorganisation du dispositif militaire et institutionnel
américain. Ce qui crée un cadre propice à la conduite des
interventions militaires. L'AFRICOM devient ainsi un outil central dans la
préservation de la puissance militaire des Etats-Unis en Afrique.
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE
Face aux enjeux géostratégiques et
au-delà des discours, l'AFRICOM est appelé à
répondre à des contraintes de terrain qui ignorent les
prescriptions théoriques. Face à une opinion qui voue un culte
à l'optimisme, à l'efficacité et au triomphalisme, toute
action extérieure est condamnée à réussir. Cette
institution ne déroge pas à ces usages stratégiques
américains. C'est dans ce sens que malgré la bienveillance de la
doctrine qui l'encadre, elle est obligée de contribuer au renforcement
de la présence militaire américaine sur le continent. Le constat
à ce sujet est clair. Cette structure, bien qu'elle s'implique dans des
activités civiles, n'accorde que très peu de place à la
diplomatie. Surtout lorsqu'elle fait face à des groupes
considérés comme relevant du Mal, selon une vision
manichéenne du monde. L'AFRICOM s'attèle donc à mener des
croisades depuis des bases militaires de plus en plus nombreuses sur le sol
africain. Cette permanence en termes d'offensives militaires - comme le
recommande la culture stratégique américaine - s'accompagne d'une
simplification évidente des problématiques sécuritaires
locales. L'usage orgueilleux de la force, sur la base d'une appréciation
monolithique d'une diversité de menaces, loin de stabiliser les Etats en
crise, réactive plutôt les conflits. Donc contrairement aux
annonces discursives, l'AFRICOM est plus un instrument plus militariste que
tout autre chose. Il correspond ainsi à la culture stratégique
américaine.
CONCLUSION GENERALE
A l'heure des nouvelles formes de menaces387(*), les USA ressentent le
besoin de procéder à une relecture de leur politique
sécuritaire sur le continent africain. C'est ce nouveau
référentiel qui préside à la naissance du
commandement américain pour l'Afrique. Cet acte inédit de la
diplomatie américaine s'accompagne d'une production discursive.
L'objectif de la manoeuvre est de rassurer l'opinion africaine, assez
méfiante de la présence militaire américaine sur le
continent. Le discours officiel de Washington insiste sur la bienveillance de
la nouvelle institution. Elle devrait, d'après lui, aider les africains
à assurer leur sécurité face au terrorisme, à la
piraterie ainsi qu'à diverses activités illicites. De telles
déclarations donnent lieu à un débat sur les motivations
géopolitiques et géostratégiques qui ont
présidé à la mise sur pied de l'AFRICOM. C'est la
tâche principale que nous nous somme donnée. Cependant, sans se
limiter à de simples déclarations relatives aux intentions
réelles de ce commandement, nous avons choisi d'interroger son
déploiement réel sur le continent africain. Il était
question d'étudierl'effectivité de ses actions face aux nouvelles
problématiques sécuritaires locales et surtout, face aux enjeux
géostratégiques prégnants sur ce continent.
En première analyse, il a été
montré que les USA, à travers la création de cet outil,
étaient animés par un souci d'adaptation de leurs réponses
sécuritaires aux spécificités conflictuelles africaines.
Car, face à un environnement stratégique évolutif, la
puissance militaire brute s'avère quelque peu limitée. Washington
choisit alors de s'attaquer aux causes des conflits au lieu de se contenter de
réagir face à eux. C'est dans ce sens qu'il insiste sur le
renforcement des capacités des armées africaines. Il s'agit
d'habiliter les forces locales à faire face aux crises. Et cela est
favorisé par la formation militaire qui est un élément
central de l'agenda de l'AFRICOM. La focalisation sur cette activité est
le fruit d'une évolution doctrinale. L'on est en effet passé de
la doctrine desMOOTW à celle desStability Operations.
Tandis que la première envisage la probabilité des guerres de
nations, la deuxième met l'accent sur la prévention des conflits.
Non seulement cette démarche constitue une source de pouvoir en douceur
- puisque promouvant la culture américaine388(*), - elle permet
également d'adapter les réponses sécuritaires à
l'environnement africain.
La formation militaire ainsi privilégiée
se fait au-travers d'une prolifération de programmes de lutte contre le
terrorisme et la piraterie maritime en Afrique. Cela est censé permettre
aux africains de combattre efficacement ces menaces pour le bien-être de
leurs Etats et populations. Mais sur le plan des résultats, cela n'est
pas forcément le cas. Car l'assistance sécuritaire de Washington
est très conditionnée par l'ampleur des menaces qui planent sur
ses intérêts. Il s'agit là de la toile de fond d'une
appréciation critique qui permet de dégager un certain nombre de
tendances relatives à ce soutien que les USA apportent aux Etats
africains. Il en ressort que cette assistance travaille à une
redéfinition du paradigme sécuritaire sur le continent. Elle
érige en priorités pour ces Etats, des problématiques
sécuritaires qui sont au centre de l'agenda des Etats-Unis. L'on peut
par exemple citer la sécurité maritime dans le Golfe de
Guinée où la focalisation sur la piraterie a quelque peu
éclipsé des questions considérées comme
étant traditionnelles. C'est le cas de la délimitation
frontalière ainsi que de l'exploitation harmonieuse des ressources
naturelles dans cette zone. Ce thème est quasiment absent lors des
grandes rencontres l'institution phare qu'est la CGG. Cela est d'autant plus
regrettable que c'est à la faveur de lui que cette institution est
née. La majeure partie de la mobilisation institutionnelle concerne
plutôt la sécurité des infrastructures et des richesses
maritimes. C'est dans le même sillage que l'on a assisté à
une reconversion anti-terroriste des efforts sécuritaires en Afrique de
l'Ouest. Les Etats de cette région ayant fortement
bénéficié de programmes d'assistance contre-terroristes
assurés par la CJTF-HOA et plus tard par l'AFRICOM.
Comme autre grande tendance de l'assistance
sécuritaire américaine, il ya la sélectivité. Sa
nature, son volume et sa fréquence sont conditionnées par
l'ampleur de la menace présente dans une région. C'est ainsi
qu'elle privilégie des zone d'intérêts stratégiques
comme la Corne de l'Afrique, l'Afrique du Nord ou le Golfe de Guinée. Ce
sont eux qui bénéficient de la plupart des programmes
sécuritaires de l'AFRICOM. D'autres régions et Etats sont
considérés comme étant périphériques. Etant
donné le fait que les intérêts américains n'y sont
pas fortement menacés, ils sont marginalisés. Cette
discrimination a fait naître des Etats pivots qui, tout en contribuant
à la stabilité régionale, peuvent également
être tentés par l'aventure hégémonique. Produisant
des résultats contraires à ceux escomptés en
réactivant les conflits au lieu de les endiguer.
Au-delà du renforcement des capacités
des armées africaines, l'AFRICOM travaille également au
renforcement de la présence militaire américaine sur le
continent. Cette approche est vérifiable au-travers de la place qu'il
accorde à la diplomatie dans ses activités. Si des actions
civiles - notamment socio-économiques et humanitaires - sont à
noter dans son déploiement, celles-ci restent assez modestes. La plus
grande importance étant accordée aux militaires qui, non
seulement assurent en grande partie la conduite de ces actions, mais se fondent
sur un répertoire cognitif pour mieux mettre en oeuvre leur
stratégie. Ils mobilisent à cet effet le concept
d'« espaces non gouvernés » dans le cadre d'une
« stratégie d'agrégation ». C'est cette
réponse qui est apportée à des problématiques aussi
complexes que le terrorisme et la piraterie maritime. Cette complexité
repose sur le fait que ces deux phénomènes ont tous un ancrage
local. Loin des clichés simplistes qui sont véhiculés par
les acteurs dominants.
Il s'agit là, d'une démarchequi ne concorde pas
avec la nouvelle approche sécuritaire définie par la
Stability Operations et l'on se demande d'ailleurs pourquoi. Cela ne
devrait pas être surprenant dans la mesure où tous les Etats ont
des préférences stratégiques dominantes, enracinées
dans leurs expériences formatives et influencées, dans une
certaine mesure, par des caractéristiques philosophiques, politiques,
culturelles, cognitives de l'Etat et de ses élites389(*). Ces
préférences conditionnent fortement leur engagement militaire.
L'on comprend alors la tendance militariste de l'AFRICOM. Elle s'explique par
sa fidélité à la culture stratégique
américaine. Cela est d'autant plus pertinent que la pensée
militaire américaine est caractérisée non seulement par
une forte teneur axiologique, mais également par un primat reconnu
à l'offensive. C'est la raison pour la quelle ce commandement
mène une offensive militaire sur le continent. Et ce au-travers d'une
dynamique d'occupation territoriale qui se matérialise par la
multiplication des « bases militaires » et par
l'instrumentalisation de l'APS. La militarisation de l'Afrique se fait
également à travers la perpétuation de la dynamique
interventionniste. Washington multiplie des opérations militaires sur la
base d'une réorganisation institutionnelle qui sert de cadre
d'intervention à l'AFRICOM.
Malgré sa mise sur pied dans un cadre doctrinal
novateur, le commandement américain pour l'Afrique s'attèle
à la réalisation du projet géopolitique et
géostratégique américain sur le continent. C'est la
raison pour laquelle il accorde une place si négligeable à la
diplomatie. S'adossant sur un traitement supposé de questions civiles,
il trouve un terrain fertile façonné par l'incapacité des
africains à assurer leur propre sécurité. Car si les
dirigeants de ce continent avaient réussi à mettre sur pied une
architecture de paix et de sécurité, ils ne seraient
peut-être pas si dépendants de l'assistance américaine.
Ainsi, l'AFRICOM, ne trouverait pas un terreau propice à son
déploiement. Donc la militarisation du continent par Washington est
favorisée par le déficit de conscience stratégique des
africains.
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Site officiel du département de la Défense
américain,
www.defenselink.mil.
Site officiel du département d'Etat américain,
www.state.gov.
ANNEXES
ANNEXE I : carte du Golfe de Guinée (prise
de vue satellite)
Source :
www.memoireonline.com,
consulté le 6 Septembre 2014
ANNEXE II : les ressources
pétrolières du Golfe de Guinée
Annexe III : La piraterie maritime en 2012
Source :
http://lechoduchampdebataille.blogspot.com/2012/01/lutte-contre-la-piraterie-maritime.html,
consulté le 6 Septembre 2014.
ANNEXE IV: Les initiatives militaires
américaines en Afrique depuis 2002
Source :
www.mémoireonline.com,
consulté le 6 Septembre 2014
ANNEXE V: Regional Program Funding
Table 1: East Africa Regional Strategic Initiative
(EARSI)
$, in thousands
Account
|
Program
|
Recipient(s)
|
FY2009
|
FY2010
|
PKO
|
Train and Equip (T&E) CT Unit
|
Djibouti
|
1,930
|
167
|
T&E of CT Unit
|
Kenya
|
2,770
|
--
|
Contractor support to develop and monitor EARSI
program
|
AFRICOM
|
300
|
--
|
Small boats
|
Djibouti
|
--
|
1,011
|
T&E of Republican National Guard
|
Djibouti
|
--
|
2,200
|
MD-500 helicopter support Kenya
|
Kenya
|
--
|
2,500
|
T&E of technical intelligence platoon
|
kenya
|
--
|
3,000
|
Military intelligence curriculum development
|
Tanzania
|
--
|
157
|
CT training
|
Uganda
|
--
|
675
|
Civil-military operations
|
Djibouti, Kenya, Tanzania,Uganda
|
--
|
290
|
TOTAL
|
|
5,000
|
10,000
|
NADR
|
Law enforcement capacity (ATA)
|
N/A
|
N/A
|
7,600
|
Counterterrorism Finance (CTF)
|
N/A
|
N/A
|
N/A
|
PISCES upgrades (TIP)
Border patrol training (RSI)
|
Djibouti, Ethiopia, Tanzania,
Uganda
Kenya, Tanzania, Uganda
|
N/A
N/A
|
1,625
500
|
Airport screening T&E (RSI)
|
Djibouti
|
N/A
|
500
|
Airport security training (RSI)
|
Ethiopia
|
N/A
|
500
|
Police/Media/Community relations consultation (RSI)
|
Kenya, Tanzania, Uganda
|
N/A
|
390
|
Additional programs (RSI)
|
N/A
|
N/A
|
N/A
|
TOTAL
|
|
N/A
|
12,990
|
INCLE
|
Criminal justice sector T&E all N/A 1,900
|
|
|
|
Program support all -- 100
|
|
|
|
TOTAL
|
|
N/A
|
2,000
|
ESF
|
Youth and Livelihood program Somalia 2,000 N/A
|
|
|
|
Eastleigh Youth program
|
Kenya
|
150
|
N/A
|
Garissa Youth Project
|
Kenya
|
3,000
|
N/A
|
Cross-border dialogue Kenya,
|
Somalia
|
375
|
N/A
|
Source: PKO, NADR and INCLE figures provided by
the U.S. Department of State Bureau of African Affairs.
Table 2. Assistance Provided through Section 1206
of the FY2006 NDAA
$, in thousands
Recipient(s)
|
Program
|
FY2006
|
FY2007
|
FY2008
|
FY2009
|
FY2010
|
Totals
|
Djibouti
|
Maritime Domain Awareness
(MDA),Response,
Interdiction, and coastalSecurity Enhancement
|
--
|
8.0
|
--
|
--
|
--
|
27.7
|
East Africa Regional Security Initiative(EARSI)
|
--
|
0.9
|
--
|
--
|
--
|
Counterterrorist (CT)
Communications Package
|
--
|
--
|
5.1
|
--
|
--
|
CT Capabilities Package
|
--
|
--
|
--
|
3.3
|
--
|
Regional Maritime Awareness CT Capability
|
--
|
--
|
--
|
--
|
10.4
|
Ethiopia
|
EARSI
|
--
|
9.3
|
--
|
--
|
--
|
34.8
|
CT Communications and Combat Engineering Capability
|
--
|
--
|
13.3
|
--
|
--
|
Night Vision Capability Package
|
--
|
--
|
1.9
|
--
|
--
|
Regiment and Platoon CT Initiative
|
--
|
--
|
--
|
10.3
|
--
|
Kenya
|
EARSI
Border Security Initiative
|
--
--
|
3.1
--
|
--
4.1
|
--
--
|
--
--
|
37.5
|
Border and Coastal Security
Enhancement
|
--
|
--
|
6.6
|
--
|
--
|
Maritime Security Initiative
|
--
|
--
|
--
|
15.2
|
--
|
Border CT Security
|
--
|
--
|
--
|
--
|
8.5
|
Tanzania
|
EARSI.
|
--
|
0.9
|
--
|
--
|
--
|
0.9
|
Mozambique
Tanzania, Mauritius,
Seychelles
|
South East African Maritime Security
Initiative
|
--
|
--
|
--
|
8.4
|
--
|
8.4
|
Total Africa
|
|
0
|
22.2
|
31
|
37.2
|
18.9
|
109.2
|
Source: U.S. Department of Defense
Résolution 2039 (2012)
Adoptée par le Conseil de sécurité à
sa 6727e séance, le 29 février 2012
Le Conseil de sécurité,
Rappelant sa déclaration du 30 août 2011
et sa résolution 2018(2011) du 31 octobre 2011 sur les actes de
piraterie et les vols à main armée dans le golfe de
Guinée,
Vivement préoccupé par la menace que
les actes de piraterie et les vols à main armée commis en mer
dans le golfe de Guinée font peser sur la navigation internationale, la
sécurité et le développement économique des
États de la région,
Conscient du fait que les actes de piraterie et les
vols à main armée commis en mer dans le golfe de Guinée
affectent les pays riverains, y compris leur arrière-pays, et les pays
sans littoral de la région,
Préoccupé par la menace que les actes
de piraterie et les vols à main armée commis en mer font peser
sur la sécurité des gens de mer et d'autres personnes, notamment
lorsqu'elles sont retenues en otage, et vivement préoccupé par la
violence exercée par les pirates et les personnes impliquées dans
les actes de piraterie et les vols à main armée en mer dans le
golfe de Guinée,
Réaffirmant que le droit international, tel
que consacré dans la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer
du 10 décembre 1982, en particulier ses articles 100, 101 et 105,
définit le cadre juridique de la lutte contre la piraterie et le vol
à main armée en mer, parmi d'autres activités
maritimes,
Affirmant son attachement à la
souveraineté et à l'intégrité territoriale des
États du golfe de Guinée et de leurs voisins,
Affirmant également que les dispositions de la
présente résolution s'appliquent à la seule situation dans
le golfe de Guinée,
Conscient qu'il est urgent de mettre au point et
d'adopter des mesures efficaces et concrètes pour lutter contre la
piraterie et les vols à main armée en mer dans le golfe de
Guinée,
S/RES/2039 (2012)
Soulignant qu'il importe de faire fond sur les
initiatives nationales, régionales et extrarégionales existantes
pour renforcer la sûreté et la sécurité maritimes
dans le golfe de Guinée,
Se félicitant des initiatives
déjà prises par des États de la région et les
organisations régionales, à savoir la Communauté
économique des États de l'Afrique centrale (CEEAC), la
Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest
(CEDEAO), la Commission du golfe de Guinée (CGG) et l'Organisation
maritime de l'Afrique de l'Ouest et du Centre (OMAOC), pour renforcer la
sûreté et la sécurité dans le golfe de
Guinée,
Notant le mécanisme d'ensemble conjoint pour
la sécurité maritime de la CEEAC visant à lutter contre la
piraterie dans la sous-région centrafricaine, y compris la
stratégie adoptée par le Conseil de paix et de
sécurité de l'Afrique centrale en février 2008, la
création du Centre régional pour la sécurité
maritime en Afrique centrale (CRESMAC) à Pointe-Noire (Congo), ainsi que
les centres de coordination multinationaux,
Notant également les mesures
préparatoires prises par la CEDEAO en vue d'élaborer une
politique de sécurité maritime à la faveur d'une
stratégie de sécurité maritime intégrée et
d'un plan maritime intégré,
Notant qu'il importe d'adopter une approche globale
conduite par les pays de la région pour lutter contre la menace que
représentent les actes de piraterie et les vols à main
armée commis en mer dans le golfe de Guinée et leurs causes
sous-jacentes,
Notant également la nécessité
d'une aide internationale s'inscrivant dans une stratégie d'ensemble
d'appui aux efforts nationaux et régionaux visant à aider les
États de la région qui s'efforcent de lutter contre la piraterie
et les vols à main armée en mer dans le golfe de
Guinée,
Soulignant que la coordination des efforts
déployés au plan régional est nécessaire pour
élaborer une stratégie d'ensemble visant à éliminer
la menace que constituent la piraterie et les vols à main armée
en mer dans le golfe de Guinée afin de parvenir à interdire et
à prévenir ces activités criminelles et à faire en
sorte que les personnes qui se livrent à la piraterie et aux vols
à main armée en mer soient poursuivies et, en cas de
condamnation, punies en tenant dûment compte des règles et
principes généralement reconnus du droit international,
Redisant que les États de la région
doivent jouer un rôle moteur pour lutter contre la menace de la piraterie
et des vols à main armée en mer dans le golfe de Guinée et
s'attaquer à leurs causes sous-jacentes, en étroite
coopération avec les organisations dans la région, ainsi que
leurs partenaires,
Saluant le concours apporté par des
États Membres et organisations internationales aux efforts nationaux et
régionaux en cours visant à sécuriser les zones
côtières du golfe de Guinée et à conduire des
opérations navales, y compris les patrouilles conjointes
effectuées par la République fédérale du Nigeria et
la République du Bénin au large des côtes
béninoises, et souhaitant que d'autres apportent leur concours, sur
demande,
Se déclarant préoccupépar les graves menaces
que la criminalité transnationale organisée, notamment le trafic
des armes et des stupéfiants, la piraterie et les vols à main
armée en mer, fait peser sur la paix et la stabilité
12-24772
ES/2039 (2012)
internationales dans différentes régions du monde,
en particulier en Afrique de l'Ouest et dans la région du Sahel,
Affirmantson attachement sans réserve à la
promotion du maintien de la paix et de la stabilité dans la
région du golfe de Guinée,
1. Se félicite du rapport de la mission
d'évaluation du Secrétaire général sur la
piraterie dans le golfe de Guinée, qui a été
dépêchée dans la région du 7 au 24 novembre
2011;
2. Encourage les autorités nationales ainsi que
leurs partenaires régionaux et internationaux à envisager
d'appliquer les recommandations de la mission d'évaluation, comme
il convient;
3. Souligne que c'est au premier chef-aux États
du golfe de Guinée qu'il incombe de lutter contre la piraterie et les
vols à main armée en mer dans le golfe de Guinée et
dans ce contexte les exhorte à oeuvrer, par l'intermédiaire de la
CEEAC, de la CEDEAO et de la CGG, à la convocation du Sommet conjoint
des États du golfe de Guinée qui doit se tenir pour
élaborer une stratégie régionale de lutte contre la
piraterie, en coopération avec l'Union africaine;
4. Prie le Secrétaire général, par
l'intermédiaire du Bureau des Nations Unies pour l'Afrique de l'Ouest
et du Bureau régional des Nations Unies pour l'Afrique centrale,
d'aider les États et les organisations sous-régionales à
convoquer le Sommet conjoint, comme prévu dans la résolution
2018 (2011), dans la mesure du possible;
5. Prie instamment les États de la région
du golfe de Guinée d'agir sans tarder, à l'échelle
nationale et régionale, avec le concours de la
communauté internationale lorsque cela est possible, sur la base d'un
accord mutuel, en vue d'élaborer et de mettre en oeuvre des
stratégies nationales de sécurité maritime, notamment
pour ce qui est de mettre en place un cadre juridique visant à
prévenir et réprimer les actes de piraterie et les vols
à main armée en mer, ainsi que de poursuivre les auteurs de
ces crimes et de punir quiconque en est reconnu coupable, et encourage la
coopération régionale en la matière;
6. Encourage le Bénin et le Nigeria à
poursuivre leurs patrouilles conjointes le long des côtes
béninoises au-delà de mars 2012, les pays du golfe de
Guinée devant continuer d'oeuvrer à se donner les moyens de
sécuriser indépendamment leur littoral et encourage
également les partenaires internationaux à envisager
de fournir un appui, selon que de besoin, à cette fin, dans la mesure
du possible;
7. Encourage les États du golfe de
Guinée, la CEDEAO, la CEEAC et la CGG à créer et
à mettre en oeuvre des centres de coordination pour la
sécurité maritime nationale et transrégionale dans la
région du golfe de Guinée en faisant fond sur les initiatives
existantes, notamment celles prises sous les auspices de l'Organisation
maritime internationale;
8. Encourage les partenaires internationaux à
fournir un appui aux États et aux organisations de la région pour
leur permettre de renforcer leur capacité de lutter contre la
piraterie et les actes de vol à main armée en mer dans le golfe
de Guinée, y compris de mener des patrouilles régionales,
d'établir et d'animer des centres de coordination et
d'échange d'information conjoints, et d'appliquer efficacement
la stratégie régionale, une fois qu'elle aura été
adoptée;
12-24772
RES/2039 (20T2)
9. Priele Secrétaire général d'appuyer les
efforts visant à mobiliser des ressources à la suite de
l'élaboration de la stratégie régionale pour aider
au renforcement des capacités nationales et régionales, en
consultation étroite avec les États et les organisations
régionales et extrarégionales;
10. Prie également le Secrétaire
général de le tenir régulièrement
informé, par le biais du Bureau des Nations Unies pour l'Afrique de
l'Ouest et du Bureau régional des Nations Unies pour l'Afrique
centrale, de la situation de la piraterie et des vols à main
armée en mer dans le golfe de Guinée, y compris des
progrès faits concernant le Sommet, ainsi que ceux accomplis par la
CEDEAO, la CEEAC et la CGG, en vue de l'élaboration d'une
stratégie globale de lutte contre la piraterie et les vols à
main armée en mer;
11. Décidede rester saisi de la question.
Communiqué Final du Sommet des Chefs d'Etat et
de Gouvernement de la Communauté Economique des Etats de l'Afrique
Centrale (CEEAC), de la Communauté Economique des Etats de l'Afrique de
l'Ouest (CEDEAO) et de la Commission du Golfe de Guinée (CGG) sur la
Sûreté et la Sécurité Maritimes dans le golfe de
Guinée
1. Le sommet des chefs d'Etat et de gouvernement de la
Communauté économique des Etats de l'Afrique centrale (CEEAC), de
la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest
(CEDEAO) et de la Commission du golfe de Guinée (CGG), s'est tenu
à Yaoundé, en République du Cameroun, les 24 et 25 juin
2013, pour l'adoption des documents stratégiques
relatifs à la sûreté et à la sécurité
maritimes dans le golfe de Guinée, dans le cadre de la mise en oeuvre de
la Résolution 2039 (2012) du Conseil de sécurité des
Nations unies.
2. Ce sommet historique a été
précédé le 21 juin 2013 d'un symposium international sur
les défis sécuritaires dans le golfe de Guinée, et en date
du 22 juin 2013, d'une réunion des ministres des affaires
étrangères.
3. La cérémonie d'ouverture du sommet a
été présidée par S.E.M. Paul Biya, président
de la République du Cameroun. Les travaux du sommet ont
été présidés par S.E.M. Idriss Deby Itno,
président de la République du Tchad, président en exercice
de la CEEAC ;
4. Le bureau était en outre composé de :
- 1er vice président : S.E.M. Paul Biya,
président de la République du Cameroun,
- 2e vice président : S.E.M. Alassane Ouattara,
président de la République de Côte d'Ivoire,
- Rapporteur : S.E.M. Candido Pereira Dos Santos Vandunen,
représentant le président en exercice de la CGG.
5. Le sommet a enregistré en outre la participation des
chefs d'Etat ci-après :
- S.E.M. Thomas Boni Yayi, président de la
République du Bénin ;
- S.E.M. Blaise Compaoré, président de la
République du Burkina Faso ;
- S.E.M. Denis Sassou N'guesso, président de la
République du Congo ;
- S.E.M. Ali Bongo Ondimba, président de la
République gabonaise ;
- S.E.M. Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, président de la
République de Guinée équatoriale ;
- S.E.M. Mahamadou Issoufou, président de la
République du Niger ;
- S.E.M. Goodluck Ebele Jonathan, président de la
République fédérale du Nigeria ;
- S.E.M. Manuel Pinto Da Costa, président de la
République démocratique de Sao Tomé-et-Principe ;
- S.E.M. Faure Gnassingbé, président de la
République togolaise ;
- S.E.M. Manuel Serifo Nhamadjo, président de la
Transition en Guinée Bissau.
6. Les pays suivants ont été
représentés : Angola, Burundi, Cap-Vert, République
démocratique du Congo, Gambie, Ghana, Guinée, Libéria,
Mali, Sénégal et Sierra Léone.
7. Etaient également présents à ce moment
:
- S.E.M. Nassour Guelengdouksia Ouaïdou,
secrétaire général de la CEEAC ;
- S.E.M. Kadré Désiré Ouedraogo,
président de la Commission de la CEDEAO ;
- S.E.M. Miguel Trovoada, secrétaire exécutif de
la CGG.
8. Ont également pris part au sommet :
- S.E.M. Abou Moussa, représentant du secrétaire
général des Nations unies
- S.E.M. Anthony Maruping, représentant de la
présidente de la Commission de l'Union africaine.
9. Etaient présents en qualité d'observateurs :
- Les pays suivants : Allemagne, Belgique, Brésil,
Chine, Espagne, Etats-Unis d'Amérique, France, Japon, Royaume-Uni et
Russie ;
- Et les institutions suivantes : Union européenne
(UE), Organisation maritime internationale (OMI), Organisation maritime de
l'Afrique de l'Ouest et du Centre (OMAOC), Commandement américain pour
l'Afrique (AFRICOM et Centre d'études stratégiques de l'Afrique
(CESA).
10. Le sommet des chefs d'Etats et de gouvernement a pris acte
du rapport de la Conférence interministérielle CEEAC - CEDEAO -
CGG sur la sûreté et la sécurité maritimes dans le
golfe de Guinée qui s'est tenue à Cotonou en République du
Bénin le 19 mars 2013.
11. Après des échanges fructueux sur le rapport
de la conférence interministérielle et sur les projets des textes
soumis à leur adoption pour ladite conférence, les chefs d'Etat
et de gouvernement ont :
a. réaffirmé leur adhésion aux textes
fondamentaux de la CEEAC, de la CEDEAO et de la CGG relatifs à la bonne
gouvernance, à la paix et à la sécurité ;
b. réitéré leur préoccupation face
aux graves menaces posées par la piraterie, les vols à main
armée et autres activités maritimes illicites dans le golfe de
Guinée ;
c. salué l'adoption des Résolutions 2018 (2011)
et 2039 (2012) par le Conseil de sécurité des Nations unies et de
la stratégie africaine intégrée pour les mers et les
océans - horizon 2050 par l'Union africaine.
12. Les chefs d'Etat et de gouvernement se sont
félicités des initiatives prises par la CEEAC, la CEDEAO et la
CGG sur la sécurité maritime, notamment la stratégie
visant à garantir les intérêts vitaux en mer des Etats de
la CEEAC, de l'élaboration en cours de la stratégie maritime
intégrée de la CEDEAO et de la stratégie de la CGG pour la
gestion de la paix et de la sécurité dans la région, de la
fructueuse coopération entre les régions de l'Afrique centrale et
de l'Afrique de l'Ouest, sur la sûreté et la
sécurité maritimes et de la tenue du présent sommet sur la
sûreté et la sécurité maritimes à
Yaoundé en République du Cameroun, visant à adopter une
stratégie régionale.
13. Désireux de conjuguer leurs efforts en vue de
définir un cadre juridique commun et approprié pour lutter contre
la piraterie, les vols à main armée et les autres
activités illicites commis en mer dans le domaine maritime de l'Afrique
centrale et de l'Afrique de l'Ouest, les chefs d'Etat et de gouvernement :
- Ont adopté le code de conduite relative à la
prévention et à la répression des actes de piraterie, des
vols à main armée, à l'encontre des navires et des
activités maritimes illicites en Afrique de l'Ouest et du Centre,
signé en séance par les ministres des Etats de l'Afrique centrale
et de l'Ouest ; et dont la mise en oeuvre sera évaluée
après un délai de trois ans ;
- Ont adopté le mémorandum d'entente entre la
CEEAC, la CEDEAO, et la C.G.G. sur la sûreté et la
sécurité dans l'espace maritime de l'Afrique centrale et de
l'Afrique de l'Ouest, signé en séance par le secrétaire
général de la CEEAC, le président de la Commission de la
CEDEAO et le secrétaire exécutif de la CGG.
14. Les chefs d'Etat et de gouvernement ont adopté et
signé une Déclaration sur la sûreté et la
sécurité dans l'espace maritime commun dite «
Déclaration de Yaoundé ».
15. Les chefs d'Etat et de gouvernement ont instruit la CEEAC,
la CEDEAO et la CGG de rendre opérationnel le mécanisme de mise
en oeuvre des décisions du mémorandum d'entente avec l'appui des
partenaires.
16. Les chefs d'Etat et de gouvernement ont
décidé que le Cameroun abritera le siège du Centre
interrégional de coordination, prévu par le mémorandum
d'entente entre la CEEAC, la CEDEAO et la CGG sur la sûreté et la
sécurité dans l'espace maritime de l'Afrique centrale et de
l'Afrique de l'Ouest.
17. Les chefs d'Etat et de gouvernement ont
décidé de rester saisis de la question.
18. Enfin, les chefs d'Etat et de gouvernement ont
exprimé leurs sincères remerciements à S.E.M. Paul Biya,
président de la République du Cameroun, au gouvernement et au
peuple camerounais pour l'accueil chaleureux et les facilités mises
à la disposition pour la réussite du sommet.
Fait à Yaoundé, le 25 juin 2013
MEMORANDUM D'ENTENTE
ENTRE
LA COMMUNAUTE ECONOMIQUE DES ETATS DE L'AFRIQUE CENTRALE
(CEEAC),
LA COMMUNAUTE ECONOMIQUE DES ETATS DE L'AFRIQUE DE L'OUEST
(CEDEAO)
ET
LA COMMISSION DU GOLFE DE GUINEE (CGG)
SUR
LA SURETE ET LA SECURITE DANS L'ESPACE MARITIME DE i/AFRIQUE
CENTRALE ET DE L'AFRIQUE DE L'OUEST
La Communauté Economique des Etats de l'Afrique
Centrale, agissant par l'entremise du Secrétariat Général
ayant son siège au quartier Haut-de-Guégué, à
Libreville, BP 2112 République du Gabon, ci-après
désignée « CEEAC » ;
La Communauté Economique des Etats de l'Afrique de
l'Ouest agissant par l'entremise de la Commission, ayant son siège au
101, Yakubu Gowon Crescent, Asokoro District P.M.B 401 Abuja, République
Fédérale du Nigeria, ci-après désignée
« CEDEAO » ;
La Commission du Golfe de Guinée (CGG) agissant par
l'entremise du Secrétariat Exécutif, ayant son siège au
43, 2 ANDAR, Rua Guileme Pereira Inglès, Luanda Angola, ci-après
désignée « CGG » ;
1
En présence des Chefs d'Etat et de Gouvernement ou de
leurs représentants dûment mandatés et des partenaires
stratégiques bilatéraux et multilatéraux ;
PREAMBULE
Vu le Traité instituant la CEEAC du 18
octobre 1983 ;
Vu le Traité Révisé de
la CEDEAO du 23 juillet 1993 signé à Cotonou ;
Vu le Traité instituant la CGG du 03
juillet 2001 signé à Libreville ;
Vu le Règlement CMS/REG.1/02/12 du 17
février 2012, donnant mandat à la Commission de la CEDEAO pour
élaborer la Stratégie maritime intégrée de la
Communauté, signé à Abuja ;
Considérant que Le but de la CEEAC est
de promouvoir et de renforcer une coopération harmonieuse et un
développement équilibré et auto-entretenu dans tous les
domaines de l'activité économique et sociale, d'accroître
et de maintenir la stabilité économique, de renforcer les
étroites relations pacifiques entre ses Etats membres et de contribuer
au progrès et au développement du continent africain ;
Considérant que le but principal de la
CEDEAO est de promouvoir la coopération, l'intégration et le
maintien de la stabilité régionale avec pour objectif de
créer une union économique et monétaire ouest-africaine ;
Considérant les dispositions du
Protocole portant création du Conseil de Paix et de
Sécurité de l'Union Africaine (UA) adopté par la
première session de la conférence de l'Union Africaine à
Durban, le 09 juillet 2002 ;
Considérant également les
dispositions du Protocole d'accord de coopération dans le domaine de la
paix et de la sécurité entre l'UA, les Communautés
Economiques Régionales et les mécanismes régionaux
adoptées le 28 juin 2008 ;
Considérant en outre la
Déclaration de Luanda adoptée lors de la conférence de la
Commission du Golfe de Guinée sur la paix et la sécurité
dans la région du Golfe de Guinée, le 29 novembre 2011,
concernant la vente de pétrole volé ;
Rappelant les dispositions pertinentes des
Résolutions 2018 du 31 octobre 2011 et 2039 du 29 février 2012 du
Conseil de Sécurité des Nations Unies qui appellent à
l'élaboration et à la mise en oeuvre de stratégies
régionales, sous régionales et nationales de sûreté
et de sécurité maritimes ;
Rappelant les dispositions pertinentes de la
Charte de l'ONU et de l'Acte Constitutif de l'UA ;
Conscientes du fait que la piraterie, les
vols à main armée et les autres activités illicites commis
en mer dans l'espace maritime de l'Afrique Centrale et de l'Afrique de l'Ouest
constituent un obstacle à l'intégration régionale et au
développement économique durable de leurs régions ;
Prenant en compte la Déclaration des
Chefs d'Etat et de Gouvernement des Etats membres de la CEEAC, de la CEDEAO et
de la CGG sur la sûreté et la sécurité maritimes
dans l'espace maritime commun, signée à Yaoundé (Cameroun)
le 25 juin 2013 ;
Rappelant les objectifs de la
Stratégie africaine intégrée pour les mers et les
océans -horizon 2050 (Stratégie AIM 2050) adoptée à
Addis-Abeba le 6 décembre 2012 ;
Déterminées à renforcer
leur coopération et la coordination de leurs actions en vue d'assurer la
sûreté et la sécurité dans l'espace maritime de
l'Afrique Centrale et de l'Afrique de l'Ouest ;
Ayant pris connaissance des recommandations
importantes issues du Rapport de la Mission d'évaluation de l'ONU sur la
piraterie dans le Golfe de Guinée du 24 novembre 2011.
2
Conviennent de ce qui suit :
CHAPITRE I : DEFINITIONS ET OBJECTIFS
Article 1 : DEFINITIONS
Pour la compréhension du présent
mémorandum, les abréviations et expressions ci-dessous sont
définies comme suit :
§ « CEEAC » : Communauté Economique des
Etats de l'Afrique Centrale ;
§ « CEDEAO » : Communauté Economique des
Etats de l'Afrique de l'Ouest ;
§ « CGG » : Commission du Golfe de
Guinée ;
§ « Espace maritime » : l'espace maritime de
l'Afrique Centrale et de l'Afrique de l'Ouest ;
§ « Hauts Responsables » : le Secrétaire
Général de la CEEAC, le Président de la Commission de la
CEDEAO et le Secrétaire Exécutif de la CGG ou leurs
représentants dûment mandatés ;
§ « Parties ou Signataires »: la CEEAC, la
CEDEAO, la CGG ;
§ « Partenaires stratégiques
bilatéraux et multilatéraux »: les partenaires techniques et
financiers, aux niveaux national et international, selon le présent
accord ;
§ « Stratégie régionale de
sûreté et de sécurité maritimes » : la
stratégie maritime élaborée par la CEEAC, la CEDEAO et la
CGG.
Article 2 : OBJECTIFS
Le présent Mémorandum est conclu en vue de
réaliser une meilleure coopération entre les centres
régionaux de sécurité maritime de la CEEAC, de la CEDEAO
et de la CGG. Cette coopération vise une synergie des actions à
travers une mutualisation et une interopérabilité des moyens
communautaires.
A ce titre, il poursuit les objectifs spécifiques
ci-après :
a. la coordination et la mise en oeuvre des activités
conjointes ;
b. la promotion d'un partenariat étroit entre les
Parties ;
c. l'échange régulier d'informations et le
partage des expériences ;
d. l'harmonisation des procédures de contrôle des
navires, des installations portuaires, des gens de mer, des armateurs et des
assureurs en matière de sûreté et de sécurité
maritimes ;
e. l'harmonisation des législations en matière
de piraterie et des autres activités illicites commises en mer ;
f. l'adoption et la mise en oeuvre d'une méthodologie
d'identification automatique des navires (AIS) ;
g. le renforcement de la coopération avec
l'Organisation Internationale de la Police Criminelle (OIPC-INTERPOL) ;
h. la promotion de la lutte contre la criminalité en
mer.
CHAPITRE II: PRINCIPES ET DOMAINES DE COOPERATION
Article 3 : PRINCIPES
La mise en oeuvre du présent Mémorandum est
guidée par les principes du droit international ci-après :
a. la subsidiarité ;
3
b. la complémentarité ;
c. l'égalité ;
d. l'indépendance ;
e. le consensus
f. la coopération.
Article 4 : DOMAINES DE COOPERATION
Afin de réaliser les objectifs spécifiques
énoncés à l'article 2 du présent Mémorandum,
les Parties coopèrent dans tous les domaines concernant la
sûreté et la sécurité maritimes, notamment :
a. la coopération technique ;
b. la formation et le renforcement des capacités ;
c. la gestion de l'information et la collecte des
données ;
d. la mobilisation des ressources nécessaires à
la réalisation des objectifs ;
e. la coordination des actions conjointes ;
f. la gestion des frontières maritimes ;
g. tout autre domaine d'intérêt commun pertinent
reconnu comme tel par les Parties.
CHAPITRE III: DISPOSITIF DE MISE EN OEUVRE ET DE SUIVI
Article 5 : MISE EN OEUVRE
1. Afin de mettre en oeuvre les dispositions du présent
Mémorandum, les Parties conviennent de :
a. la tenue d'une réunion annuelle des Hauts
Responsables de la CEEAC, de la CEDEAO et de la CGG, qui assure l'orientation,
le suivi et l'évaluation de la coopération régionale ;
b. la création d'un Centre Interrégional de
Coordination (CIC) qui assure la mise en oeuvre de la Stratégie
régionale de sûreté et de sécurité maritimes.
2. L'organisation et le fonctionnement de ces instances sont
précisés par des textes additionnels.
Article 6 : APPUI DES PARTENAIRES
L'appui de tous les partenaires stratégiques
internationaux, bilatéraux et multilatéraux, est envisagé
dans la mise en oeuvre du présent Mémorandum.
CHAPITRE IV: DISPOSITIONS TRANSITOIRES ET FINALES
Article 7 : AMENDEMENT- DENONCIATION - RETRAIT
a. Le présent Mémorandum peut être
amendé par accord mutuel des Parties.
b. Il peut, par ailleurs, être dénoncé par
chacune des Parties sous réserve du respect d'un préavis d'au
moins trois (3) mois, notifié aux autres Signataires par la Partie qui
en prend l'initiative, sans préjudice de la poursuite des
activités en cours.
c. Le retrait de l'une des Parties ne remet pas en cause
l'application du présent Mémorandum par les Parties restantes,
dans leur domaine maritime.
Article 8 : REGLEMENT DES DIFFERENDS
Tout différend relatif à l'interprétation
et/ou l'application du présent Mémorandum est réglé
par la voie diplomatique.
4
Article 9 : ENTREE EN VIGUEUR
Le présent Mémorandum d'entente entre en vigueur
à compter de la date de sa signature par les Parties. Il est
rédigé en douze (12) exemplaires, trois (3) en anglais, trois (3)
en espagnol, trois (3) en français et trois (3) en portugais. Les quatre
textes faisant également foi sont remis à chaque Partie.
Article 10 : PUBLICATION
§ Le présent Mémorandum d'entente est
publié dans les langues de travail des Etats membres de la CEEAC, de la
CEDEAO et de la CGG.
§ Il est également publié dans les journaux
officiels des Etats membres de la CEEAC, de la CEDEAO et de la CGG.
En foi de quoi, les Parties ont apposé leurs
signatures au bas du présent Mémorandum d'entente.
Adopté à Yaoundé, République du
Cameroun, le 25 juin 2013
Pour la CEEAC,
Le Secrétaire Général
................................................................................................
Nassour GUELENDOUKSIA OUAIDOU
Pour la CEDEAO,
Le Président de la Commission
.................................................................................................
Kadré Desiré OUEDRAOGO
Pour la CGG,
Le Secrétaire Exécutif
.................................................................................................
Miguel TROVOADA
5
TABLE DES MATIERES
AVERTISSEMENT I
DEDICACES II
REMERCIEMENTS .....................III
LISTE DES SIGLES ET DES ABREVIATIONS
......IV
LISTE DES ILLUSTRATIONS .............VIII
LISTE DES ANNEXES ......................IX
RESUME ..............X
ABSTRACT XI
SOMMAIRE XII
INTRODUCTION 1
I. CONTEXTE DE L'ETUDE 2
II. INTERET DU SUJET 4
III. CONSTRUCTION DE L'OBJET 5
1. Clarification conceptuelle 5
2. Délimitation du sujet .....11
IV. REVUE DE LA LITTERATURE 11
V. PROBLEMATIQUE ..............18
VI. HYPOTHESES 19
1. Hypothèse principale 19
2. Hypothèses secondaires 20
VII. CONSTRUCTION DE LA DEMARCHE 20
1. Approche théorique 20
2. Approche méthodologique 21
VIII. PLAN D'ORGANISATION DU TRAVAIL 22
PREMIERE PARTIE : L'AFRICOM ET LE
RENFORCEMENT DES CAPACITES DES ARMEES AFRICAINES 23
CHAPITRE I : LA PLACE DE LA
FORMATION MILITAIRE DANS L'AGENDA DE L'AFRICOM 26
SECTION I : ENCADREMENT DOCTRINAL DE
L'AFRICOM 27
A. L'évolution de la doctrine
sécuritaire américaine en Afrique depuis 1990 27
1. La doctrine «Military Operations
Other Than War» 28
2.La doctrine «Stability
Operations» 30
B. Les enjeux de la doctrine
«Stability operations» 33
1. La spécificité de
l'environnement sécuritaire africain 33
2.L'adaptation des réponses
sécuritaires à l'environnement africain 36
SECTIONII : LA FORMATION
MILITAIRE : UN REFERENTIEL IMPORTANT DANS LE FONCTIONNEMENT DE L'AFRICOM
38
A. La mobilisation américaine en
faveur de la lutte contre le terrorisme en Afrique 38
1. Prégnance de la menace terroriste
en Afrique .38
2. La multiplication des programmes de lutte
contre le terrorisme en Afrique 41
B.La mobilisation américaine en faveur
de la lutte contre la piraterie maritime en Afrique 43
1. L'ampleur de la menace 44
2. La formation des armées africaines
dans la lutte contre la piraterie maritime 45
CHAPITRE II : UNE
APPRECIATION CRITIQUE DE L'ASSISTANCE SECURITAIRE AMERICAINE EN AFRIQUE
49
SECTION I : ASSISTANCE MILITAIRE ET
REDEFINITION DU PARADIGME SECURITAIRE 51
A. Le cas de l'insécurité
maritime dans le Golfe de Guinée 51
1. Quasi-disparition des
problématiques sécuritaires traditionnelles 51
2. Mobilisation institutionnelle et
Cristallisation du débat sécuritaire autour de la lutte contre
la piraterie maritime 55
B. L'insécurité en Afrique de
l'Est .57
1. Une assistance militaire anti-terroriste
en Afrique de l'Est 57
2. la reconversion anti-terroriste des
efforts sécuritaires en Afrique de l'Est 59
SECTION II : LOGIQUES D'UNE ASSISTANCE
SECURITAIRE AUX RESULTATS INCERTAINS 62
A - Une assistance militaire sélective
62
1.priorisation des zones
d'intérêts stratégiques 62
2.Marginalisation des « zones
périphériques »
....................................65
B. Résultats mitigés de
l'assistance sécuritaire américaine 67
1.Les Etats pivots : des acteurs
importants pour la stabilité régionale 67
2.La recherche
hégémonique : le revers de la médaille 70
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE 74
DEUXIEME PARTIE : L'AFRICOM DANS LE
RENFORCEMENT DE LA PRESENCE MILITAIRE AMERICAINE EN AFRIQUE 75
CHAPITRE III : LA PLACE
MARGINALE DE LA DIPLOMATIE DANS LES ACTIONS DE L'AFRICOM 78
SECTION I : COMPLEXITE DES
PROBLEMATIQUES SECURITAIRES EN AFRIQUE ...79
A. La question de l'insurrection en Afrique
80
1. Le GSPC et l'aspiration à une plus
grande participation politique en Algérie 80
2.Boko Haram et la recherche de la
justice sociale au Nigeria 82
B - Le cas de la piraterie maritime en
Afrique 84
1. L'explication socio-économique du
phénomène 85
2. Un phénomène au coeur des
batailles politiques 86
SECTION II : LA REPONSE DE L'AFRICOM AUX
PROBLEMATIQUES SECURITAIRES AFRICAINES 90
A. La construction des menaces 90
1.La stratégie d' «
agrégation » dans la qualification
« terroriste » des groupes armés 90
2. La mobilisation du concept
d' « espaces non gouvernés » en Afrique 93
B. La réponse civilo-militaire aux
questions sécuritaires africaines ...96
1.L'implication socio-économique de
l'AFRICOM ...96
2.L'AFRICOM et les questions humanitaires en
Afrique 98
CHAPITRE IV: L'AFRICOM: UN
COMMANDEMENT FIDELE A LA CULTURE STRATEGIQUE AMERICAINE 101
SECTION I: PRESENTATION GENERALE DE LA
CULTURE STRATEGIQUE AMERICAINE 103
A - Une forte teneur axiologique 103
1.Légalisme et moralisme à
l'américaine 104
2.L'esprit de croisade 105
B. Une stratégie profondément
offensive 108
1. Primat de l'initiative et de la
concentration des forces 108
2. Entre manoeuvre et anéantissement
de l'ennemi........................................... .........110
SECTIONII : L'AFRICOM DANS L'OFFENSIVE
MILITAIRE AMERICAINE EN AFRIQUE 113
A. La dynamique d'occupation territoriale
113
1.Multiplication des bases militaires 114
2. APS comme instrument de contrôle des
eaux africaines ...116
B. La perpétuation de la dynamique
interventionniste 118
1. Organisation et réorganisation
institutionnelle 118
2. La multiplication des opérations
militaires 121
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE 126
CONCLUSION GENERALE 127
BIBLIOGRAPHIE 132
ANNEXES 144
TABLE DES MATIERES 145
* 1 Le comportement des
autorités américaines vers l'Afrique était ambigu. Car
elles ne voulaient pas s'aliéner leurs alliés de l'OTAN. Voir P.
DUIGNAN, L. H. GANN, L'Afrique et les Etats-Unis. Une histoire, Paris,
Economica (trad.), 1990, pp. 368-369.
* 2 Yves BOYER,
« Le regain d'intérêt américain pour
l'Afrique : quelles conséquences militaires et
stratégiques », Note de la Fondation Pour la Recherche
Stratégique, décembre 2006.
* 3 Caroline PAILHE,
« La politique pyromane de Washington : les transferts
militaires des Etats-Unis vers le Moyen-Orient », Rapport du
GRIP, Bruxelles, 2009, p.12.
* 4 Lauren PLOCH,
«Africa Command. US Strategic interest and the role of the US military in
Africa», Congressional Research Service, July 22, 2011,
disponible sur www.fas.org , consulté le 15 Mars 2013.
* 5PLOCH, ibid.
* 6Face à la
non-intervention des Etats-Unis au Rwanda en 1994, G. W. Bush faisait observer
que même si « personne n'aime voir cela sur son écran de
télévision », la décision de l'administration
Clinton était la bonne.Voir Peter SCHRAEDER, « Finie la
rhétorique, vive la géopolitique »,Politique
africaine, n°82, Juin 2001, p.136.
* 7Alain FOGUE, « le
commandement militaire américain pour l'Afrique (AFRICOM) : un
élément du projet géostratégique américain
en Afrique », Diploweb.com, 21 Novembre 2011.
* 8«About AFRICOM,»
United States Africa Command website, available onlineat
http://www.africom.mil/AboutAFRICOM.asp,
consulté le 14 Décembre 2013.
* 9Alain FOGUE, «
AFRICOM...», op. cit.
* 10Cité par Alain
FOGUE, ibid.
* 11Ibid.
* 12 Consulté le 7
juillet 2013
* 13Stefan GANZLE,
«AFRICOM and US Africa policy: `pentagonising' foreign policy or providing
a model for joint approach?,» African Security Review, Institute
for Security Studies, March 2011, p. 73.
* 14Ibid.
* 15Hervé
COUTAU-EGARIE, « Doctrine », in Thierry de MONTBRIAL, Jean
KLEIN, Dictionnaire de stratégie, Paris, Paris, PUF, 2000, p.
193.
* 16Lucien POIRIER, Le
Chantier stratégique. Entretiens avec Gérard Chaliand,
Hachette-Pluriel, 1997, p. 129. Cité par Pascal VANNESSON,
« Penser les guerres nouvelles : La doctrine miliaire en
question », Pouvoirs, n° 125, pp. 81-82.
* 17 Pascal VANNESSON,
« Penser les guerres nouvelles : La doctrine miliaire en
question », ibid., p. 82.
* 18 Bruno COLSON,
« Culture stratégique », in Thierry de MONTBRIAL,
Jean KLEIN, op. cit., p. 150.
* 19 Cité par Bruno
COLSON, ibid. p. 151
* 20 Colin S. GRAY,
Modern strategy, Oxford University Press, New York, 1999, p. 36.
* 21 Ibid. p. 37.
* 22 Loup FRANCART, «
L a démarche doctrinale », Objectif doctrine, janvier
1999, p. 10-12. Cité par Pascal VANNESSON, « Penser les
guerres nouvelles : La doctrine miliaire en question », op.
cit., p. 82.
* 23 Hervé
COUTAU-BEGARIE, « Doctrine », in Thierry de MONTBRIAL, Jean
KLEIN, op. cit., p. 193
* 24 Vincent DESPORTES,
L'Amérique en Armes. Anatomie d'une puissance militaire, Paris,
Economica, 2002, 158.
* 25 COUTAU-BEGARIE,
ibid.
* 26 Ibid.
* 27Thierry de MONITBRIAL,
« Stratégie », in Thierry de MONTBRIAL, op. cit., p.
527
* 28Carl Von CLAUSEWITZ, De
la guerre, Paris, Perrin (trad.), 2006, p. 78.
* 29Martin MOTTE,
« Géostratégie », in Thierry de MONTBRIAL,
ibid., p. 268.
* 30Parlant du
« Consensus de Washington », les USA ont proposé,
dans le cadre de l'AGOA, des accords commerciaux pour 37 Nations
éligibles. A condition que celles-ci libéralisent,
dérégulent, privatisent et ne sapent pas les
intérêts de politique étrangère des Etats-Unis.
SAUTMAN, HAIROUG, 2007, p. 82. Cité par Darrel D. IRWIN, «How the
Dragon of Prosperity Uses State Power and Resources in Africa to Displace
Western Influence», National Strategy Forum Review, Volume 22,
Issue 1, Winter 2013, p. 12.
* 31Ibid., p. 14
* 32Caroline PAILHE,
« La politique pyromane...», op. cit., p. 19.
* 33Timothy A. HAZEN,
« AFRICOM : A new National Security Approach for the
21st Century ? », National Strategy Forum
Review, Volume 22, Issue 1, Winter 2013,disponiblesur le site
www.nationalstrategy.com.pp.
6-7.
* 34Ibid., pp. 9-10.
* 35Alain FOGUE, « le
commandement militaire américain pour l'Afrique
(AFRICOM)... », op. cit.
* 36Stefan GÄNZLE,
«AFRICOM and US Africa policy», op. cit., p. 76.
* 37Ibid.,p. 80.
* 38Ibid., p. 76.
* 39 Theresa
WHELAN, «Why Africom», US Department of Defense, August
2007. Disponible sur le lien (
http://no0ilcanarias.files.wordpress.com/2012/10/why-africom-whelan-august20071.pdf),
consulté le 13 Novembre 2013
* 40 Ibid.
* 41 Rich
JUERGENS, «AFRICOM: Combatant Command for the 21st
Century», Joint Forces Staff College, 13 June, 2008, pp. 8-10.
* 42 Ibid., p. i.
* 43 M SAADOUNE,
« L'AFRICOM opérationnelle le 1er
Octobre », Le quotidien d'Oran, 30 Septembre 2008.
Disponible sur
www.algeria-watch.org ,
consulté le 8 Septembre 2014.
* 44 Ibid.
* 45 Amadou Bamba NIANG,
« L'Africom : un commandement pour mettre l'Afrique
sous-tutelle », Afribone, 19 Novembre 2007,
www.afribone.com , consulté
le 9 Septembre 2014.
* 46 Ce concept sera
utilisé pour designer les Etats-Unis d'Amérique.
* 47allAfrica,
« Liberia: Report Reveals Why Ellen Wants Africom in
Liberia », 11 Octobre 2012. Disponible sur
http://allafrica.com/stories/201210110846.html,
consulté le 10 Septembre 2014.
* 48Ibid.
* 49Hans MORGENTHAU,
Politics among Nations. The struggle for power and peace, New York,
Alfred A. Knopf, second edition revised and enlarged, 1955, pp. 3-12.
* 50Dario BATISTELLA,
Théories des relations internationales,
2eédition, Paris, Presses de la FondationNationale des
Sciences politiques, 2006, p.287
* 51M. Finnemore, K. Sikkink,
« Taking Stock, The constructivist Research Program in international
relations and comparative politics », Annual Review of
Political Science, 2001, pp. 391-416.
* 52Madeleine GRAWITZ,
Méthodes des sciences sociales, Paris, Dalloz, 2001. p. 422.
* 53J-C.Loubet DEL BAYLE,
initiation aux méthodes des sciences sociales, Paris-Montreuil,
L'Harmattan, 2007, p.24.
* 54Madeleine GRAWITZ, ibid.,
p.424.
* 55DESPORTES Vincent, PHELIZON
J. F., Introduction à la stratégie, Paris, Economica,
2007, p. 30.
* 56 Ibid.
* 57Ce concept qui fait de
la supériorité technologique, un élément
déterminant pour la victoire se trouve limité dans un contexte
où la menace est diffuse au sein de la population. Les frappes de
précision et à distance n'ont plus droit de cité. Voir
Général Vincent DESPORTES, Le piège américain.
Pourquoi les Etats-Unis peuvent perdre les guerres d'aujourd'hui, Paris,
Economica, 2011, pp. 249-254.
* 58Ibid., p.222.
* 59Ibid.
* 60Theresa WHELAN,
«Why AFRICOM,» op. cit.
* 61Philippe BOULANGER,
Géographie militaire, Paris, Ellipses, 2006, pp. 214-217.
* 62Theresa WHELAN,
«Why AFRICOM,» op. cit.
* 63Robert BERSCHINSKY,
« African Dilemma: The Global War On Terrorism, capacity Building,
Humanitarianism, and the future of U.S. Security Policy in Africa. »,
Strategic Studies Institute of the U.S. Army War College, November 21, 2007,
disponiblesur
http://www.strategicstudiesinstitute.army.mil/pdffiles/pub827.pdf.
consulté le 15 Mai 2014.
* 64 Nicole VILBOUX, Les
stratégies de puissance américaines, Paris, Ellipses, 2002,
p. 25
* 65Ibid., pp. 26-27.
* 66Ibid., p.30.
* 67DOD, Chairman of the
Joint Chiefs of Staff, Joint Pub 3-07 : Joint Doctrine for Military
Operation Other Than War, Washington DC, 16 juin 1995, p. I-1.
* 68N. Vilboux, Les
stratégies de puissance américaines, op.cit. p. 31.
* 69 Ibid.
* 70Dibril DIOP,
« l'Afrique dans le nouveau dispositif sécuritaire des
Etats-Unis. De la lutte contre le terrorisme à l'exploitation des
opportunités commerciales. Les nouveaux paradigmes de
l'interventionnisme américain », CERIUM,
Université de Montréal, juin 2009, p. 6.
* 71 Niagalé
BAGAYOKO-PENONE, « Approches française et américaine de
la sécurité en Afrique subsaharienne », La Revue
Internationale et Stratégique, n. 42, été 2001, p.
166.
* 72 Vincent DESPORTES,
Le piège américain. Pourquoi les Etats-Unis peuvent perdre
les guerres d'aujourd'hui, op. cit., p. 274.
* 73Ibid., pp. 274-275.
* 74Henry KISSINGER,
Nuclear Weapon, cité par V. DESPORTES, ibid., p.274.
* 75Philippe BRAILLARD,
Gianluca MASPOLI, « La
« Révolution dans les affaires militaires : paradigmes
stratégiques, limites et illusions », Annuaire
Français de Relations Internationales, Volume III, 2002, p. 632.
* 76Antoine-Henri JOMINI,
Précis de l'art de la guerre, Paris, Perrin, 2001, p. 287.
* 77Carl Von CLAUSEWITZ,
De la guerre, op. cit., p. 78.
* 78Gérard CHALIAND,
Arnaud BLIN, Dictionnaire de stratégie militaire, Paris Perrin,
1998, p. 232.
* 79 Cité par
Gérard CHALIAND, ibid., p. 34.
* 80Al-Ayat,
« Irak, l'échec américain », Courier
International, 15 Mars 2013 Disponible sur
www.courrierinternational.com consulté le 28 janvier 2014.
* 81JCS, Stability
Operations, Joint Publication 3-07, 29 Septembre 2011, p. vii.
* 82Paul HAERI, De la
guerre à la paix, pacification et stabilisation post-conflit, Paris
Economica 2008, p. 67.
* 83Vincent DESPORTES,
Le piège américain..., op. cit., p. 264.
* 84Frank BURBAGE,
« L'efficacité militaire : spécificité et
paradoxe », Entretien avec le colonel Patrick Destremau, Cahiers
Philosophiques, 2010/1, n° 121, pp. 109-113.
* 85JCS, «Stability
Operations» Joint Publication 3-07, op. cit. pp. vii-viii.
* 86 Statement of General
Cater HAM before the Senate Armed Services Committee, DOD, 2012 Posture, United
States Africa Command, March 1st , 2012, disponiblesur le site de
l'AFRICOM www.africom.mil. consulté le 22 Novembre 2013.
* 87Yves AUNIS,
« AFRICOM, un laboratoire de mise en oeuvre de l'approche
globale », in Diplomatie, 15 Février 2011.
* 88Jean Du Bois de
GAUDUSSON, « Nouveaux conflits, Solutions
nouvelles ? », Questions Internationales, n° 5,
janvier-février 2004, p. 4.
* 89Bernard WICHT,
« Vers l'ordre oblique : la contre guérilla à
l'âge de l'infoguerre », in Hervé COUTAU-BEGARIE (dir.),
Stratégies irrégulières, Paris, Economica, 2010,
pp. 831-836.
* 90Ibid., p. 835.
* 91Alain FOGUE, Enjeux
géostratégiques et conflits politiques en Afrique noire,
Paris, L'Harmattan, 2008, p. 10.
* 92Banque Mondiale,
Briser la spirale des conflits. Guerre civile et politique de
développement, Paris, Nouveaux Horizons, 2005, pp. 87-88.
* 93Ibid., p.31.
* 94Voir données
statistiques du SIPRI.
* 95Unicef, Les enfants, les
DSRP et les budgets au Tchad, Notes de Synthèse, février
2009, p. 3.
* 96Cherif OUAZANI,
« Operation Remobilisation », Jeune Afrique, n.
2683, du 10 au 16 Juin 2012, p. 24.
* 97Données du
SIPRI.
* 98Ibid.
* 99Cherif OUAZANI,
« Operation Remobilisation », op. cit., p. 27.
* 100JCS, Stability
Operations, Joint Publication 3-07, op. cit., p. ix.
* 101 White House,
National Security Strategy of the United State of America, Washington,
DC, Septembre2002, p. v.
* 102 BELLAMY,
« L'engagement des Etats-Unis en matière de
sécurité en Afrique », Bulletin de la
sécurité africaine, n° 1, Juin 2009, Centre d'Etude
Stratégique d'Afrique, disponible sur le lien
http://www.africacenter.org,
consulté le 4 Février 2014.
* 103Emmanuel GREGOIRE,
« Le Sahara. Quelques signes inquiétants de conflits à
venir... », Les Grand Dossiers de Diplomatie, n. 7,
février-mars 2012, p. 90.
* 104Sophia
CLEMENT-NOGUIER, « Un concept aux multiples facettes.
Sécurité du fort contre asymétrie du faible »,
Revue Internationale et Stratégique, n. 51, Automne 2003, p.
92.
* 1052010 Quadrennial
Defense Review.
* 106DOD, «News
Briefing with principal Deputy under Secretary Henry from pentagon»,
February 7, 2007.
* 107Vincent DESPORTES, J.
F., PHELIZON, Introduction à la stratégie, Paris,
Economica, 2007, p. 74.
* 108Cité par
DESPORTES (Vincent), Le piège américain..., op. cit., p.
266
* 109William ASSANVO,
« Etat de la menace terroriste en Afrique de l'Ouest »,
Les Notes d'Ovida, n° 12, juillet 2012. Disponible sur
www.ovida-afrido.org consulté le 11 Mai 2013.
* 110Ibid.
* 111Franck-Emmanuel
CAILLAND, Bruno DELAMOTTE, « Terrorisme et contre-terrorisme
après les attentats du 11 Septembre 2001 », in Pascal BONIFACE
(dir.), Les leçons du 11 Septembre, Paris, PUF, 2001, p. 60.
* 112Nathalie CETTINA,
terrorisme, l'histoire de sa mondialisation, Paris, L'Harmattan, 1999,
p. 20.
* 113Jean-Pierre FILIU,
« Could Al-Qaeda turn African in the Sahel ?», Carnegie
Papers, number 112, June 2010, disponible sur
http://carnegieendowment.org/files/al_qaeda_sahel.pdf
consulté le 15 Mai 2013.
* 114Emmanuel OGALA,
«exclusive: Boko Haram gets N40million donation from Algeria»,
Premium Times, May 13, 2012.
http://premiumtimesng.com,
Consulté le 2 Mars 2014.
* 115A. R. GANDOUR,
Jihad humanitaire. Enquête sur les ONG islamiques, Paris,
Flamarion, 2002. Cité par Dibril DIOP, « l'Afrique dans le
nouveau dispositif sécuritaire des Etats-Unis. De la lutte contre le
terrorisme à l'exploitation des opportunités commerciales. Les
nouveaux paradigmes de l'interventionnisme américain », op.
cit., p. 4.
* 116Patrick DOMBROWSKY,
« Dangereuse Corne de l'Afrique »,
Géostratégiques, n. 38, 1er trimestre 2013,
p. 17.
* 117Cité par Dibril
DIOP, « L'Afrique dans le nouveau dispositif sécuritaire des
Etats-Unis... » op. cit, p. 6.
* 118Ibid., p. 13-14.
* 119Pierre ABRAMOVICI,
« Activisme Militaire de Washington en Afrique », Le
Monde Diplomatique, Juillet 2004, p. 14.
* 120D. DIOP, juin 2009,
op. cit. p. 14.
* 121Lauren PLOCH,
«Africa Command: U.S Strategic Interests and the Role of the U.S. Military
in Africa», Congressional Research Service, Report for Congress,
July 2007.
* 122Alain FOGUE,
« Le Commandement Militaire Américain pour
l'Afrique », op. cit.
* 123Lauren PLOCH, Juillet
2007, op. cit.
* 124D. DIOP, juin 2009,
op. cit. p. 12.
* 125A. FOGUE, Ibid.
* 126Informations
disponibles sur le site d'AFRICOM.
* 127Ibid.
* 128Simon LETENDRE,
« Le péril maritime : l'exemple du canal de
Suez », Perspective Monde, Université de Sherbrooke,
24 février 2008.
* 129Luis AMARO,
« L'Afrique de l'Ouest, la nouvelle aventure des impérialismes
états-unien et européen », Investig'Action,
disponible sur
http://www.michelcollon.info/IMG/article_PDF/article_a2843.pdf,
consulté le 6 Septembre 2014.
* 130International Maritime
Organization,Annual Report on Acts of Piracy and armed Robbery Against
Ships, London, April 2, 2013, p. 2.
* 131Ibid.
* 132Hassan DJAMA FARAH,
« Djibouti : un hub anti-piraterie et un acteur principal de
médiation dans la crise somalienne », Diplomatie, n. 56,
mai-juin, 2012, p. 44.
* 133Rapport annuel 2008 du
Bureau Maritime International consacré à la piraterie.
* 134 Ces données
sont issues d'un croisement entre les rapports du BMI de 2008 et de 2011, mais
également celui de l'IMO de 2012.
* 135 E. Susan RICE
(Remarks by), At a security Council Debate on Piracy and Maritime Armed Robbery
in the Gulf of Guinea, New York, February 27, 2012.
* 136Ce concept traduit
l'augmentation impressionnante des flux commerciaux à travers la mer.
Voir Martin MOTTE, « Stratégie maritime », in
Thierry de MONTBRIAL et Jean KLEIN, Dictionnaire de stratégie,
op. cit., p.563.
* 137Ibid., p. 560
* 138Cité par
Martin MOTTE, « Stratégie maritime », ibid., p.
559.
* 139 Report of the
conference held at Chatman House, «Maritime security in the Gulf of
Guinea,» London, December 6, 2012, pp. 31-32.
* 140Howard JASON,
« Obangame Express 2013 comes to a successful close »,
disponible sur
www.africom.mil, Consulté le
15 Janvier2014.
* 141Ibid.
* 142Statement of General
Cater HAM, 2012 Posture, March 1st, 2012, op. cit.
* 143Jim FISHER-THOMPSON,
« Les partenariats régionaux des Etats-Unis au service de la
lutte contre le terrorisme », 27 Mai 2006.
* 144Gregory M.KAUSNER,
Institute for Foreign Policy Analysis - USSOCOM Conference, Washington, DC,
June 5, 2013.
* 145 Eustache AKONO
ATANGANE, « Le problème de la délimitation des espaces
maritimes en Afrique centrale », Revue Africaine d'Etudes
politiques et stratégiques, n°4, Université de
Yaoundé II, 2007, p. 253.
* 146Ibid., p. 244..
* 147Ibid., pp. 255.
* 148Ibid., p. 253.
* 149Antoine-Denis
N'DIMINA-MOUGALA, « Le pétrole, source de conflits
territoriaux en Afrique centrale au XXe et au début du
XXIe siècle », ENJEUX, n° 26,
janvier-mars 2006, p. 54.
* 150 Disponible sur le
Site de la Commission du Golfe de Guinée.
* 151Agences France
Presses, 19 Novembre 1999, cité par AKONO Eustache « Le
problème de la délimitation des espaces maritimes en Afrique
centrale », op. cit., p. 246.
* 152Jean-Dominique GESLIN,
« Gabon-Guinée Equatoriale, Mbanié convoité par
les pétroliers », cité par Eustache AKONO,
« Le problème de la délimitation des espaces maritimes
en Afrique centrale », op.cit., p. 253.
* 153 Ces accords
précisaient les modalités de retrait et de transfert
d'autorité dans la péninsule de Bakassi. Celle-ci revenant
désormais au Cameroun.
* 154Olivier BRAULT, LCL,
French Air Force, «Roles for SOF in a staggering Nigeria», Air
Command and Staff College Air University, Maxwell Air Force Base, Alabama April
2009, pp. 9-10.
* 155Au-delà des
différends entre Etats du Golfe de Guinée, la question de la
délimitation des frontières entraine des problèmes
identitaires. C'est le cas des mouvements indépendantistes tels que le
BakassiFreedomFighters, au Cameroun qui n'accepte pas le verdict de la
CIJ et qui espère se séparer de ce pays. En Guinée
Equatoriale, la difficile coupure des zones de souveraineté a
donné naissance au Movimento para la Autodeterminacion de la Isla de
Bioko (MAIB) qui a des prétentions séparatistes. Ce
mouvement, tout comme celui qui a été cité plus haut,
constitue une menace d'éclatement de la Guinée Equatoriale. Or on
n'entend presque pas leur nom lors des grands sommets sur la
sécurité maritime. Peut-être uniquement comme des groupes
de pirates qu'il faut combattre.
* 156Africa Presse,
« Sommet sur la Sécurité maritime dans le Golfe de
Guinée: Solidarité africaine, crédibilité pour le
Cameroun », disponible sur www.africapresse.com,
consulté le 4 Février 2014.
* 157La Brève du
Golfe de Guinée, 1ère Année, n°1, mai,
2009, p. 1.
* 158Site de l'Association
France- Guinée Equatoriale,
www.france-guineeequatoriale.org
consulté le 12 Aout 2013
* 159J. V. NTUDA EBODE,
« prévenir et traiter les menaces de l'après Bakassi,
une nécessité », Honneur et
fidélité, Mai 2010, p.16.
* 160 Ibid.
* 161Dibril DIOP,
« L'Afrique dans le nouveau dispositif sécuritaire des
Etats-Unis... », op. cit., pp. 1-2.
* 162 DNI John M.
McCONNELL, Remarks during a Senate Armed Services Committee hearing, February
27, 2008.
* 163Cité par Lauren
PLOCH, «Countering Terrorism in East Africa: The U.S.
Response»,Congressional Research Service, November 3, 2010, p.
13.Disponible sur
http://fas.org/sgp/crs/terror/R41473.pdf,
consulté le15 Avril 2013.
* 164PLOCH, ibid., p. 23
* 165Ibid., p. 24.
* 166Ibid., p. 25.
* 167CJTF-HOA, Fact Sheet,
December 2006.
* 168PLOCH,
«Countering Terrorism in East Africa...», op. cit., p. 26.
* 169Robert BERSCHINSKI,
«AFRICOM's dilemma: The «Global War On Terrorism», capacity
Building, Humanitarianism, And the Future of U.S. Security Policy in
Africa,» op. cit.
* 170Ibid.
* 171Andrew CAWTHORNE,
« U.S. Says AL-Qaida Behind Somali Islamists, »,
Reuters News, Via Factiva, December 14, 2006.
* 172Interview avec David
KILCULLEN, International Review of the Red Cross, vol 93, n° 883,
p. 596.
* 173Ibid.
* 174Ibid., p. 592.
* 175Ibid., p. 596.
* 176Judah GRUNSTEIN,
« General Vincent Desportes: The Likely War », Small
War Journal, 2008,
www.smallwarjounal.com,
consulté le 20 Juin 2013.
* 177Ibid.
* 178Nicole VILBOUX, Les
stratégies de puissance américaine, op. cit., p. 18.
* 179DibrilDIOP, juin 2009,
op. cit., p. 13.
* 180Ibid., p. 9.
* 181Même si ce
dernier a déjà eu lieu dans d'autres régions, la plupart
de ses activités jusqu'ici se sont déroulées dans des
Etats du Golfe de Guinée.
* 182Lauren PLOCH,
« Countering Terrorism in East Africa: The U.S. Response »,
op. cit. p. 30.
* 183Ibid., p. 33.
* 184U.S. Government
Accountability Office (GAO), Combating Terrorism: Action Needed to Enhance
Implementation of Trans-Sahara Counterterrorism Partnership, July 2008
* 185Stefan GANZLE,
«AFRICOM and US Africa Policy: `Pentagonising' foreign Policy or providing
a model for Joint approaches?» op. cit., pp. 74.
* 186 U.S. Department of
State, Congressional Budget Justifications for Foreign Operations FY2005-2011
for State Department bilateral figures; U.S. Department of State Bureau of
African Affairs for regional figures; and Office of the Secretary of Defense,
AFRICOM, and DSCA for DOD figures.
* 187GANZLE, «AFRICOM
and US Africa Policy: `Pentagonising' foreign Policy or providing a model for
Joint approaches?» op. cit., p. 74.
* 188La Loi d'Autorisation
de la Défense Nationale a créé une autorisation triennale
permettant conjointement au DOD et au DOS de planifier, d'exécuter et de
superviser des programmes de formation annuels, régionaux ou
bilatéraux allant jusqu'à 300 millions USD.
* 189U.S. Department of
Defense.
* 190 René LEMARCHAND,
« La politique des Etats-Unis dans l'Afrique des grands
lacs », Floride, Avril 1999.
* 191Marc MALAN,
« U.S. Civil Military-Imbalance for Global Engagement. Lesson from
the Operational Level in Africa », Refugees International,
July 2008, p. i.
* 192Ibid.
* 193 C'est notamment le cas
de la Soros Fund Management ainsi que de la Newmont Mining Corporation,
appartenant respectivement à Georges Soros et à Nathaniel
Rothschild.
* 194Jean Daniel ABA,
« Les approches française et américaine du maintien de
la paix en Afrique », Revue Africaine d'Etudes Politiques et
Stratégiques, n° 7, Université de Yaoundé II,
2010, pp. 97-98.
* 195René
LEMARCHAND, « La politique des Etats-Unis dans l'Afrique des grands
lacs », op. cit.
* 196Mark MALAN,
« U.S. Civil-Military Imbalance ... », op. cit., p. i.
* 197 Niagalé BAGAYOKO,
« La politique américaine de sécurité en Afrique
subsaharienne sous le président Clinton », Afrique
Contemporaine, n° 197, p. 16.
* 198Peter J. SCHRAEDER,
« Finie la rhétorique, vive la
géopolitique », Politique Africaine, n°82, juin
2001, pp. 139-142.
* 199Niagalé
BAGAYOKO-PENONE, « La politique américaine de
sécurité en Afrique... », ibid.
* 200Safeworld, Back to the
basic: The trust deficit and What the Kampala accord tells us about the need
for more inclusive decision making process, July 2011.
www.saferworld.org,
consulté le 11 Novembre 2013.
* 201Djama FARAH HASSAN,
« Djibouti : un hub anti-piraterie et un acteur principal de la
médiation dans la crise somalienne», op. cit., p. 44-46.
* 202Jean-Marie COLLIN,
« Situation de Djibouti et intérêts militaires
étrangers », Association Culture Progrès,
Avril 2011.
* 203DJAMA FARAH, «
Djibouti : un hub anti-piraterie ... », op. cit., p. 46.
* 204Niagalé
BAGAYOKO-PENONE, « Approches française et américaine de
la sécurité en Afrique subsaharienne », op. cit., p.
162.
* 205Gérard PRUNIER,
« Terrorisme somalien, malaise kényan », Le
Monde diplomatique, novembre 2013, p. 10.
* 206Ibid.
* 207J. P. ENTELIS,
cité par Alexis ARIEFF, « U.S. - Algerian Security Cooperation
and Regional Counterterrorism », IRRI, July, 2011.
* 208Ibid.
* 209Ibid.
* 210Dibril DIOP, 2009, op.
cit. p. 3
* 211 Ils constituent le
lieu de transit de la route maritime entre Eilat et l'Océan indien. Au
vu de cette propriété stratégique, leur contrôle
pourrait servir de monnaie d'échange à l'Ethiopie face aux
puissances occidentales qui veulent prévenir une arabisation de
la mer Rouge : route maritime importante. Voir François THUAL,
Controller et contrer. Stratégies géopolitiques, Paris,
Ellipses, 2000, pp 125-238.
* 212Ibid., p. 155.
* 213Roland MARCHAL,
« Somalie : un nouveau front antiterroriste ? »,
Les Etudes du CERI, n°135, juin 2007.
* 214 Robert BERSCHINSKI,
«AFRICOM's dilemma: The «Global War On Terrorism», capacity
Building, Humanitarianism, And the Future of U.S. Security Policy in
Africa,» op. cit.
* 215Roland MARCHAL,
ibid.
* 216
Audio
Message from Dr. Ayman AL-ZAWAHIRI Issued by as-Sahab Addressed to Muslims:
«Set Out and Support Your Brothers in Somalia» - January 2007,
disponible sur
https://ent.siteintelgroup.com/Multimedia/site-institute-1-4-07-zawahiri-audio-support-somali-brothers.html,
consulté le 15 Mai 2013.
* 217François
THUAL, Contrôler et contrer, op. cit. p. 7.
* 218Milady ORTIZ,
« U.S Africa Command: A New Way of Thinking », National
Security Watch, Ausa Institute of Land Warfare, 13 March 2008.
* 219Dibril DIOP, juin 2009
op. cit. p.15.
* 220 L.PLOCH,
« Africa Command: U.S. Strategic Interests », cité
par ORTIZ Milady, « U.S Africa Command: A New Way of
Thinking », op. cit.
* 221Mark MALAN,
« U.S. Civil-Military Imbalance for Global Engagement ..., op. cit.,
p. i.
* 222Ibid.
* 223William ASSANVO,
« Etat de la menace terroriste en Afrique de l'Ouest », op.
cit.
* 224Ibid.
* 225Ibid.
* 226David KILCULLEN,
« Countering Global Insurgency », op. cit.
* 227Ibid.
* 228BERSCHINSKI,
« AFRICOM's Dilemma... », op. cit.
* 229Omar CHIKHI,
l'ex-conseiller aux affaires religieuses du GIA cité par Evan F.
KOHLMAN, « Two Decades of Jihad in Algeria : The GIA, the GSPC,
and Al-Qaïda », The NEFA Foundation, May 2007, p. 5,
disponible sur
http://www.actforamericaeducation.com
, consulté le 4 Septembre 2014.
* 230ASSANVO,
« Etat de la menace terroriste en Afrique de l'Ouest », op.
cit.
* 231Ibid.
* 232VICKY Alain,
« Aux origines de la secte Boko Haram », Le Monde
Diplomatique, avril 2012, disponible sur
http://www.monde-diplomatique.fr,
consulté le 22 Avril 2014 .
* 233Pascal De GENDT,
« BokoHaram, le reflet des problèmes
nigérians », Analyses et Etudes, Siréas,
Bruxelles, novembre 2012.
* 234Ibid.
* 235Antoine PEROUSE DE
MONCLOS, « BokoHaram et le terrorisme islamiste au
Nigéria : insurrection religieuse, contestation politique ou
protestation sociale », Questions de recherche, n°40,
Juin 2012, p. 18 disponible sur
http://www.ceri-sciences-po.org/publica/qdr.htm,
consulté le 6 Mai 2013.
* 236C'est le nom
donné aux fidèles de Mohammed Yusuf, ex-chef spirituel de
BokoHaram.
* 237Antoine PEROUSE DE
MONCLOS, « Boko Haram... », ibid., p. 20.
* 238 Ibid., p. 15.
* 239Ibid., p. 16.
* 240Ibid., p.10.
* 241Patrick DOMBROWSKY,
« Dangereuse Corne de l'Afrique », op. cit., p. 13.
* 242DibrilDIOP,
« Les dispositifs militaires et juridiques suffisent-ils pour venir
à bout de la piraterie ? », Centre d'Etudes et de
Recherches Internationales, Université de Montréal,
septembre 2009, p. 3.
* 243Macleans CA,
« U.S. estimates nearly 30,000 children have died in
famine », 5 août 2011.
* 244Dibril DIOP, Ibid
* 245Karsten vonHOESSLIN,
« La nébuleuse pirate en Somalie »,
Diplomatie, n° 56, mai-juin 2012, p. 42.
* 246Marc-Antoine PEROUSE
DE MONCLOS, « La piraterie maritime au Nigéria : un
phénomène ancien en voie de modernisation »,
Diplomatie, n° 56, mai-juin 2012, p. 49.
* 247Ibid.
* 248DibrilDIOP,
« Les dispositifs militaires et juridiques suffisent-ils pour venir
à bout de la piraterie ? », op. cit., p. 8.
* 249Ibid.
* 250Carl SCHMITT, La
notion de politique. Théorie du partisan, trad. Paris, Flammarion,
1992, p. 64.
* 251Ibid., pp. 67-70.
* 252Ibid. p. 77.
* 253David CUMIN,
« La théorie du partisan de Carl SCHMITT », in
Hervé COUTAU-BEGARIE (dir.), Stratégies
irrégulières, op. cit., p. 51
* 254 C'est-à-dire
un combattant qui n'appartient pas à l'armée étatique,
ibid., p. 52.
* 25560% des 31 millions
d'habitants que compte le Delta du Niger vivent sous le seuil de la
pauvreté, alors que cette région génère à
elle seule 95% des entrées en devises et 80% du budget d Nigéria.
Le MEND revendique à cet effet, l'attribution de 25 à 50% des
revenus pétroliers aux régions productrices au lieu des 13% qui
leur sont actuellement alloués. Voir Michel LUNTUMBUE,
« Mouvement pour l'Emancipation du Delta du Niger »,
GRIP, Note d'Analyse, 7 octobre 2011.
* 256Marc-Antoine PEROUSE
DE MONCLOS, « La piraterie maritime au Nigéria : un
phénomène ancien en voie de modernisation », op. cit.,
p. 50.
* 257Ibid. p. 49.
* 258 US Department of
Energy, «OPEC Revenues Fact Sheet», January 2006
* 259Cette date est
utilisée sous réserve de ce que ce président est
arrivé au pouvoir plus tôt. Car il avait succédé
constitutionnellement à Yar'Adua le 9 mai 2010, après avoir
assuré l'intérim depuis le 9 Février de la même
année.
* 260 Force des Volontaires
du Peuples du Delta du Niger.
* 261 Mouvement Pour
l'Auto-détermination de Bakassi.
* 262J. V. NTUDAEBODE,
« Prévenir et traiter les menaces de l'après Bakassi,
une nécessité », op. cit., p. 14.
* 263Ibid.
* 264Daniel HERVOUET,
Franck BORNOIS, Comprendre la Défense, Paris, Economica, 1999,
p. 25.
* 265André COLLET,
Défense et Sécurité Internationale face aux
défis du XXIe siècle, Panazol, Lavauzelle, 2005,
p. 10.
* 266Robert BERSCHINSKI,
« AFRICOM's Dilemma: The Global War On Terrorism, Capacity Building,
Humanitarianism, And the Future of US Security Policy in Africa », op
cit.
* 267Marc Louis ROPIVIA,
« criminalité et activités illicites dans le golfe de
Guinée : interprétation critique et typologie »,
in Piraterie et terrorisme : De nouveaux défis
sécuritaires en Afrique centrale, Institut Friedrich Ebert
Stiftung, Presses Universitaires d'Afrique, Yaoundé, Mars, 2010, pp
221-222.
* 268Ibid., p. 230.
* 269 Robert BERSCHINSKI,
« AFRICOM's Dilemma: The Global War On Terrorism... », op.
cit.
* 270David KILCULLEN,
« Countering Global Insurgency », op. cit.
* 271Ibid.
* 272DESPORTES V, Le
piège américain, op. cit., pp. 108-109.
* 273Ibid., p. 125.
* 274Ibid. pp. 28-29.
* 275 Lauren PLOCH,
« Countering Terrorism in East Africa: The U.S. Response »,
op. cit. p. 14.
* 276 Carter HAM before the
senate, April 7, 2011, op cit.
* 277Vincent EIFFLING,
« Approche cognitive de la position américaine sur les aspects
sécuritaires de la question nucléaire iranienne »,
Note d'Analyse, Université Catholique de Louvain, octobre 2010,
disponible sur le lien
http://www.uclouvain.be/265598.html.
consulté le 17 Mai 2014.
* 278 Donald Rumsfeld,
cité par McNeill CASEY, «Ungoverned Spaces: African and U.S
Foreign Policy in Africa», Honors Capstone, Spring 2008.
* 279Stewart M. POWELL,
« Swamp of Terror in the Sahara », Air force
Magazine, November 2004, p. 51.
* 280Theresa WHELAN,
«Africa's Ungoverned Space», Nacao&Defesa, N°
114-3, 2006, p. 64.
* 281Ibid., p. 69.
* 282 William E. WARD,
«US Africa Command 2008 Posture Statement», Stuttgart, March 13,
2008.
* 283 McNeill
CASEY, «Ungoverned Spaces: African and U.S Foreign Policy in
Africa», op. cit.
* 284Ibid.
* 285Ibid.
* 286L. PLOCH,
« Countering Terrorism in East Africa ...», op. cit. p.
6.
* 287McNeill
CASEY, « Ungoverned Spaces: African and U.S Foreign Policy in
Africa », op. cit.
* 288Yves AUNIS,
« AFRICOM, un laboratoire de mise en oeuvre de l'approche
globale », op. cit.
* 289US AFRICOM Public
Affairs, « AFRICOM's Humanitarian Assistance Program Helps Ranchers
in Mauritania », disponible sur le site de l'AFRICOM.
* 290Andrew CAYA (Sgt.),
«CJTF assists with Djiboutian medical needs», CJTF-HOA Public
Affairs, June 20, 2012.
* 291Lauren PLOCH,
« Countering Terrorism in East Africa : The U.S.
Response », op. cit. p. 27.
* 292Ibid.
* 293Pulivarti SHEJAL,
«One health training in Moroto improves local infrastructure, builds
relationships», CJTF-HOA Public Affairs, Moroto District
(Uganda), January 11, 2013.
* 294Rachel WALLER,
«U.S. Navy Conduct humanitarian Mine Action Train the Trainers With the
Kenyan Army», CJTF-HOA Public Affairs, Nairobi, March 20,
2013.
* 295La stratégie
à but positif, qui se fonde sur des actions de coercition, est celle
dont les initiatives sont productrices d'effets de transformation ou de
création. C'est tout le contraire de celle dont il est question ici.
Voir Lucien POIRIER, Stratégie Théorique II, Paris,
Economica, 1987, p. 122.
* 296 Ibid., p. 123.
* 297 Nicole VILBOUX,
Les stratégies de puissance américaine, op. cit., p.
19.
* 298Vincent DESPORTES
(Général), Le piège américain. Pourquoi les
Etats-Unis peuvent perdre les guerres d'aujourd'hui, op.cit., p. 291.
* 299Carnes LORD, "American
strategic culture," 1985 cité par Bruno COLSON, La culture
stratégique américaine. L'influence de Jomini, Paris,
Economica, 1993, p. 1.
* 300Vincent DESPORTES,
L'Amérique en armes. Anatomie d'une puissance militaire, op.
cit., p.3.
* 301Ibid., pp. 22-36.
* 302Cité par
Vincent DESPORTES, l'Amérique en armes, op. cit., p. 28.
* 303Bernard VINCENT,
La destinée manifeste, cité par V. DESPORTES, Ibid., p.
28.
* 304Gunnar MYRDAL,
American dilemma, cité par Vincent DESPORTES, ibid p. 33.
* 305Charles Philippe
DAVID, Louis BALTHAZAR, Justin VAISSE, La politique étrangère
des Etats-Unis. Fondements, acteurs, formulation, 2e édition revue
et augmentée, Paris, Les Presses de Science Po., 2008, pp. 112-118.
* 306Ibid., pp. 104-112.
* 307Discours au
Congrès, 3 Avril 1997, cité par Vincent DESPORTES, Le
piège américain, op cit., p. 34.
* 308Bruno COLSON,
« La culture stratégique américaine, » in
Gérard Chaliand, Arnaud Blin, Dictionnaire de stratégie
militaire, Paris, Perrin, 1998, p. 130.
* 309Blandine CHELINI,
« Au nom du Christ et de l'Amérique, le fondamentalisme
américain et son impact géopolitique », in Aymeric
Chauprade, Géopolitique des Etats-Unis. Culture,
intérêt, stratégies, Paris Ellipses, 2003, p.75
* 310Vincent DESPORTES,
L'Amérique en armes, op. cit., p. 49.
* 311Cité par V.
DESPORTES, le piège américain, op. cit., pp. 12-13.
* 312Blandine CHELINI,
ibid., p. 76.
* 313Georges PERKOVICH,
« La révolution nucléaire de Bush. Un changement de
régime de non prolifération », in William ARKIN,
PhillisBENNIS, William HARTUNG..., Les Etats-Unis à contre-courant.
Critiques américaines à l'égard d'une politique
étrangère unilatéraliste, Bruxelles, GRIP, 2004, pp.
119-120
* 314Contrairement à
lui qui affirmait détenir des preuves en "béton" des liens
existant entre Saddam Hussein et Al-Qaïda et à d'autres
autorités américaines qui accusaient Bagdad de posséder
des ADM, L'AIEA faisant observer que les capacités de l'Irak en
matière nucléaire étaient encore presque nulles.
C'était également l'avis des chercheurs de l'INR (Bureau of
Intelligence and Research) du département américain de
l'énergie. Voir à ce sujet John B. JUDIS et Spencer ACKERMAN,
« comment on a `vendu' la guerre d'Irak », in William
ARKIN, Phillis BENNIS, William HARTUNG..., ibid., pp. 149-155.
* 315 Justin VAISSE,
« La croisade des néoconservateurs », cité
par Emmanuel Mourlon-Druol, La stratégie Nord américaine
après le 11 Septembre. Un réel renouveau?, Paris,
L'Harmattan, 2005, p. 30.
* 316Rebâtir les
Défense de l'Amérique: Stratégie, forces et ressources
pour un nouveau siècle.
* 317A ce groupe
appartiennent entre autres Paul Wolfowitz, alors secrétaire adjoint
à la défense; Dick Cheney, alors vice président ou encore
son secrétaire général I. Lewis Libby.
* 318William ARKIN,
PhillisBENNIS, William HARTUNG..., Les Etats-Unis à contre-courant.
Critiques américaines à l'égard d'une politique
étrangère unilatéraliste, op. cit., pp. 36-38.
* 319V. DESPORTES,
L'Amérique en armes, op. cit., p. 112.
* 320Ibid., p.150.
* 321Bruno COLSON, La
culture stratégique américaine, op. cit., p. 1.
* 322Ibid., pp. 13-14.
* 323Ibid., p. 15.
* 324Antoine-Henri JOMINI,
Précis de l'art de la guerre, Paris, Perrin, 2001, p. 64.
* 325Ibid., pp. 129-130.
* 326Ibid., p. 127.
* 327V. DESPORTES, le
piège américain, op. cit., p. 125.
* 328Bruno COLSON, La
culture stratégique américaine, op. cit., pp. 52-53.
* 329Ibid., pp. 122-129.
* 330William K.NAYLOR,
The Principles of War, cité par Bruno COLSON, ibid., pp. 204.
* 331Bruno COLSON, Ibid.,
pp. 15-16.
* 332Ibid., p 205.
* 333Ibid., pp. 150-151.
* 334Ibid., p. 148.
* 335Ibid., pp. 17-19.
* 336Laure BARDIES,
« Raisonnement stratégique et outils conceptuels: de la guerre
aux logiques de la guerre », ResMilitaris, vol. 2, no 3,
Eté 2012.
* 337Ibid.
* 338Carl Von CLAUSEWITZ,
De la guerre, Paris, Perrin (trad.), 2006, p. 60.
* 339Russel F. WEIGLEY,
The American Way of War: A History of United State Military Strategy and
Policy, New york-Londres, Macmillan, 1973, p. 162, cité par V.
DESPORTES, L'Amérique en armes, op. cit., p. 208.
* 340Russel F. WEIGLEY,
The American Way of War, cité par V. DESPORTES, Ibid., p.
225.
* 341Bruno COLSON,
« La Culture stratégique américaine », in
Gérard Chaliand, Arnaud Blin, Dictionnaire de stratégie
militaire, op. cit., p. 135.
* 342Antony LAKE, Christine
Todd WHITMAN, "More Than Humanitarianism: A Strategic U.S. Approach Toward
Africa," cité par Kevin H GOVERN, «21st Century Africa as an 'Arc
of Instability': U.S. and African economic, security and development Policies
Advanced Through U.S. Africa Command Initiatives», Connecticut Journal
of International Law, Vol. 26:281, 2011, p. 320.
* 343Bruno COLSON,
« La Culture stratégique américaine », in
Gérard Chaliand, Arnaud Blin, Dictionnaire de stratégie
militaire, op. cit., p. 22.
* 344François THUAL,
Contrôler et contrer. Stratégies géopolitiques,
op. cit, p. 5.
* 345Ibid., p. 5.
* 346 Cette typologie est
développée par Dan LAWNER, Nathalie MATTHEWS, Adriana PIOTROWSKA,
«The Trust imperative: Challenges and Recommendations for U.S. Africom's
African Partnership,»Defense Concepts, Volume 4, Edition 3,
Journal of the Center for Advanced Defense Studies, 2009, pp. 90-91.
* 347Ibid. p.92.
* 348Ce concept a
été notamment évoqué bien avant la situation qui
prévaut aujourd'hui par ZaKiLAIDI, « contraintes et enjeux de
la politique américaine en Afrique », Politique
Africaine, n° 12, décembre 1983, p. 40-41.
* 349Remi CARAYOL, Claude
LEBLANC, « Etats-Unis: leurs guerres secrètes en
Afrique », 29 Juin 2012, disponible sur le site de Jeune Afrique
www.jeuneafrique.com,
consulté le 15 Mai 2014.
* 350Ibid.
* 351Cité par Remi
CARAYOL..., ibid.
* 352Telle est sa mission
officielle déclinée par le Lieutenant Commander Suzana
BRUGLER, « Africa Partnership Station Aims to Organize for
2013 »,U.S. Naval Forces Europe- Africa, U.S. 6th Fleet Public
Affairs, Garmish, Germany, April 9, 2012,
www.africom.mil, consulté le
2 Janvier 2014.
* 353Alfred Tayer MAHAN,
"CurrentFallaciesUpon Naval Subjects", cité par Bruno COLSON, La
culture stratégique américaine, op. cit., p. 197.
* 354Lucien POIRIER,
Stratégie théorique II, op. cit., p. 128.
* 355Ibid., pp. 122-132.
* 356Nicole VILBOUX,
Les stratégies de puissance américaines, op. cit., pp.
130-134.
* 357FweleyDIANGITUKWA,
Les grandes puissances et le pétrole africain. Etats-Unis-Chine: Une
compétition larvée pour l'hégémonie
planétaire, Paris, L'Harmattan, 2009, pp. 32-34.
* 358Robert A. PAPE, "The
Strategic Logic of Suicide Terrorism", American Political Review,
n° 1, August 2003.
* 359Ce fut le cas du
navire USS MOUNT WHITNEY qui, pendant l'opération Aube de
l'Odyssée en Libye, a offert une plate-forme vitale en termes de
commandement et de contrôle permettant de mener à bien les
opérations conjointes. Informations disponibles sur le site de l'AFRICOM
www.africom.com,
consulté le 15 Mai 2014.
* 360Charles Philippe
DAVID, Louis BALTHAZAR, Justin VAISSE, La politique étrangère
des Etats-Unis. Fondements, acteurs, formulation, op. cit., pp.
136-137.
* 361Ibid., p. 491.
* 362Michelle CIARROCCA,
William HARTHUNG, « Le complexe militaro-industriel associé
aux think tanks. Réservoir d'experts et doctrine militaire
agressive », in William Arkin, PhillisBennis, William Hartung...,
Les Etats-Unis à contre-courant. Critiques américaines
à l'égard d'une politique étrangère
unilatéraliste, op. cit., pp. 71-92.
* 363Disponible sur
www.africom.mil.
* 364Ibid.
* 365Kimberly FIELD, James
LEARMONT and Jason CHARLAND, "US Land Power in Regional Focus. Regionally
Aligned Forces: Business Not as Usual", Parameters, 43(3), Autumn
2013, p. 55.
* 366Ibid, p. 56.
* 367Bill Van AUKEN,
« Etats-Unis: Un autre volet de la 'guerre contre le terrorisme' dans
la ruée vers l'Afrique », Global Reseach, janvier
2013.
* 368Timothy HAZEN,
"AFRICOM: A New National Securiry Approach for the 21st Century", op. cit., p.
6.
* 369Noam CHOMSKY, De
la guerre comme politique étrangère des Etats-Unis,
Marseille, Agone, 2004, p. 33-34.
* 370Philippe RICHARDOT,
Les Etats-Unis. Hyperpuissance militaire, Paris Economica, 2005, p.
7.
* 371La première
adoptée le 26 Février 2011 dénonce l'hostilité et
la violence qui émanent du gouvernement libyen, instaure un embargo sur
les armes ainsi qu'une interdiction de voyager et le gel des avoirs du clan
Kadhafi; La résolution 1973, au-delà d'instaurer une zone
d'exclusion aérienne, exige des autorités libyennes, un
cessez-le-feu immédiat et autorise les Etats membres de l'ONU à
prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les
populations et les zones civiles menacées. Ces recommandations ont
été reprises par Thierry Esser DUPONT, "Libye: Opération
'Odyssey Dawn", Revue Militaire Belge n° 3, 11 décembre
2011, p.28.
* 372Ibid., p. 29.
* 373Voir Analyse du CSS,
« La NSS 2014: Sur la voie d'une doctrine Obama? », n° 134,
mai 2013, Zurich.
* 374Ibid.
* 375Ibid.
* 376US army operational
concept for low intensity conflict, cité par Eric
DENÉCÉ, Forces spéciales. L'Avenir de la guerre,
Monaco,EDITION DU ROCHER, 2002, p. 141.
* 377DENÉCÉ,
Ibid., p. 14.
* 378 Ce sont des
unités hautement spécialisées, capables d'intervenir sans
délai et d'une façon non clandestine, sur tout le spectre
d'évolution des crises, en menant à bien des opérations
militaires non conventionnelles. Voir DENÉCÉ Ibid., p. 15.
* 379« Par
opération spéciale, il faut entendre l'ensemble des actions qu'un
volume réduit de forces, engagé secrètement, pour une
durée pouvant aller de quelques heures à plusieurs semaines, est
amené à réaliser afin d'obtenir un résultat
décisif dans un contexte hautement hostile ». Ibid., p.
240.
* 380Cité par
Emmanuel MOURLON-DRUOL, La stratégie Nord américaine
après le 11 Septembre. Un reel renouveau?, op. cit., p. 83.
* 381Andrew TILGHMAN,
«DOD quietly expanding Africom missions»,Navy Time, April
16, 2014.
* 382Ibid.
* 383Kristof TITECA, Ronald
R. ATKINSON, "Why is the US hunting for Joseph Kony?", May 11, 2014 disponible
sur
http://www.aljazeera.com,
consulté le 13 Aout 2014.
* 384Jim GARAMONE, "Africa
Command Deploys 100 Service Member to Niger", American Forces Press
Service, Washington, February 22, 2013.
* 385 Disponible sur le
site de Jeune Afrique, « Nigéria: des drones américains
pour retrouver les lycéennes détenues par Boko Haram »,
15 Mai 2014.
* 386Remi CARAYOL, Claude
LEBLANC, "Etats-Unis: leurs guerre secrètes en Afrique", op. cit.
* 387 Même s'il
s'agit de vielles menaces qui se sont juste modernisées en s'adaptant
aux conditions de l'évolution du monde.
* 388 Joseph NYE, Le
leadership américain. Quand les règles du jeu changent,
Nancy, Presses Universitaires de Nancy (trad.), 1992, p. 175.
* 389 Bruno COLSON,
« Culture stratégique », in Thierry de MONTBRIAL et
Jean KLEIN, Dictionnaire de stratégie, op. cit., p. 150.
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