Chapitre 1. Evolution des types d'occupation du
sol dans le terroir de Ndokayo de 1987 à
2011.
Introduction
L'identification des types d'occupation du sol se fait par des
perspectives variées. Les observations de terrain et l'exploitation des
données multisources notamment , les images satellitales à
très haute résolution et la carte de la végétation
de Letouzey, ont permis de distinguer cinq types d'occupation du sol dans le
terroir de Ndokayo. Il s'agit nettement de la zone d'habitation, des cultures,
de la jachère, de la savane arbustive dense et de la galerie
forestière. La détection des changements des types d'occupation
du sol passe nécessairement par une étude de l'évolution
spatio-temporelle. L'étude de l'évolution spatio-temporelle des
types d'occupation du sol s'appuie sur une analyse diachronique des
informations sur les parcelles enquêtées constituées en
base de données SIG. Les données recueillies sur les parcelles
couvrent la période allant de 1987 à 2011. Dans ce chapitre, il
est question, tout d'abord de caractériser ces différents types
d'occupations du sol dans le terroir. Ensuite, il s'agira de retracer leur
évolution durant la période 1987 - 2011.
1.1. Caractérisation des types d'occupation du
sol
Chaque type d'occupation du sol dans le terroir s'identifie
par rapport aux autres. En effet, un type d'occupation du sol se
caractérise par des aspects distinctifs, notamment l'activité ou
alors l'ensemble des activités qui s'y pratiquent ou auxquelles elle est
destinée. Ainsi, qu'il s'agisse de la zone d'habitation, des cultures,
des jachères ou encore de la savane arbustive dense et de la galerie
forestière, chacun présente des caractéristiques qui
permettent de l'identifier nettement par observation directe sur le terrain ou
sur les images satellitales et les photographies aériennes.
27
1.1.1. La zone d'habitation
La zone d'habitation est un type d'occupation du sol qui
correspond aux superficies occupées par le bâti,
c'est-à-dire les maisons d'habitation et les voies de desserte.
L'habitat présente deux principaux aspects dans le terroir. On distingue
les habitations modernes et les habitations traditionnelles.
Les habitations modernes se caractérisent par un
matériau de construction définitif, les habitations sont
construites en dure ou en semi dure (Photo1.).
Photo 1. Habitation de type moderne à
Ndokayo.
Cliché: Pouïra Jean Bodel
28
Habitées en majorités par les
réfugiés centrafricains, les habitations traditionnelles sont
faites de matériaux provisoires notamment de branchage et en terre
battue localement appelée « poto-poto » (Photo 2. et
3).
Photo 2. Habitation traditionnelle en terre
battue.
La Photo 2 présente une habitation traditionnelle
en terre battue ce type d'habitation est généralement
habité par les populations autochtones. Les habitations en terre battue
ne nécessitent aucun moyen financier.
Cliché et commentaire : Pouïra Jean Bodel
29
Photo 3. Habitation traditionnelle en natte de
raphia.
La Photo 3 met en exergue des habitations traditionnelles
en raphia. Les habitations en raphia sont le plus retrouvées dans les
camps des réfugiés centrafricains.
Cliché et commentaire : Pouïra Jean Bodel
1.1.2. Les cultures
C'est le deuxième type d'occupation identifiable dans
le terroir. Au voisinage de la zone d'habitation et quelques fois,
éloignées, les cultures sont des terres entretenues
destinées à la production alimentaire. Ce sont tout simplement
des terrains agricoles. Elles sont principalement occupées par
Manihot esculata.
30
Photo 4. . Champs de Manihot esculata
La Photo 4 présente une vue d'un champ de culture.
En premier plan Manihot esculata, la plante la plus cultivée dans le
terroir. En arrière-plan la savane arbustive dense qui est
défrichée et laisse progressivement place aux cultures.
Cliché et commentaire : Pouïra Jean Bodel.
Les cultures, dans le terroir, sont des superficies
destinées à la production des produits vivriers, notamment
Manihot esculata, pour la consommation des ménages. Les
cultures constituent un élément capital de l'anthropisation des
lieux et par conséquent de la mise en valeur du sol. Les cultures se
distinguent très nettement des jachères.
31
1.1.3. Les jachères
Si les jachères prennent place après la mise en
valeur agricole des terres, elles se distinguent très nettement des
cultures. Ce sont des terres labourables, anciennement occupées par les
cultures et délaissées dans l'optique d'une reconstitution en
éléments nutritifs à l'effet de les faire produire de
nouveau plus abondamment. Sur les jachères, se développent des
repousses des plantes anciennement cultivées (Photo 5).
Photo 5. Une jachère
Cliché: Pouïra Jean Bodel
32
Les jachères sont parfois anciennes. Sur celles-ci, il
se produit une reconquête ligneuse, elles présentent l'aspect de
la savane arbustive claire dégradée. Aussi, sur les
anciennes jachères, se développement
Chromolaena odorata, une espèce envahissante.
Toutefois, les jachères anciennes se distinguent
nettement de la savane arbustive dense.
1.1.4. La savane arbustive dense
La savane arbustive dense constitue l'espace pastoral dans le
terroir. Le tapis herbacé est dominé par le Penicetum.
Ce type de végétation pousse sur des sols ferrallitiques et
latéritiques par endroits. Ce dernier facteur justifie en partie leur
caractère assez ouvert, l'autre facteur étant l'action
anthropique. Avec la pression humaine, la savane arbustive dense tend à
la dégradation (Photo 6).
Photo 6. Savane arbustive dense.
Cliché: Pouïra Jean Bodel
33
La savane arbustive est dominée par les espèces
tels que Hymenocardia acida, Annona Senegalensis, Aubrevillia Kerstingii,
Burkea africana, Vitex doniana, Lannea schimperi, Lophira lanceolata, Albizia
Zygia, Crossopteryx februfiga, Ficus capensis, Nauclea latifolia, Piliostigma
tonningii, Strychnos spinosa et Terminalia laxiflora (Figure
2).
Source : relevés floristiques, 2011.
Figure 2. Fréquences spécifiques dans la
savane arbustive dense
En plus de la savane arbustive dense, la
végétation du terroir est aussi constituée de la galerie
forestière. La galerie forestière est caractéristique de
cette zone de transition climatique, située à cheval entre les
domaines équatorial et tropical sec.
34
1.1.5. La galerie forestière
La galerie forestière est un type d'occupation du sol
non négligeable dans le terroir. Ce type de végétation est
localisé dans les encaissements où coulent les cours d'eau.
L'importance de cette unité de la végétation est
liée au drainage. Ainsi, celle des petits cours d'eau est peu fournie.
Dans les grandes rivières, les galeries forestières ont une
physionomie proche de la forêt dense, avec des ligneux pouvant atteindre
une trentaine de mètres et même dépassant quelquefois une
quarantaine de mètres.
La galerie forestière est riche en espèces
ligneuses. Les plus rencontrées sont : Uapaca togoensis, Anoyeisus
leiocarpus, Clausena anisata, Gacinia ovalifolia, Syzygium guineensis,
Dyospiros mespiliformis, Erythtrolium africanum (Figure 3).
Source : relevés floristiques, 2011.
Figure 3. Fréquences spécifiques dans la
galerie forestière
1.2. Processus de l'évolution des types d'occupation
du sol de 1987 à 2011
Présenter le processus de l'évolution de chaque
type d'occupation du sol dans le terroir sous-entend que l'état des
lieux des parcelles enquêtées soit dressé. Ainsi nous
dressons l'état des lieux de ces parcelles enquêtées pour
les années 1987, 2000 et 2011. Ces opérations débouchent
à coup sûr la détection des changements. Toutefois, il est
nécessaire de signaler que seuls les types d'occupation du sol de
l'emprise humaine à savoir la zone d'habitation, les cultures et les
jachères sont concernés par l'analyse diachronique. S'agissant de
la savane arbustive et de la galerie, l'analyse de leur évolution est
faite sous la base des relevés phytogéographiques.
1.2.1. Evolution de la zone d'habitation
L'analyse des données recueillies sur 105 parcelles de
la zone d'habitation permet de constater une évolution progressive de ce
type d'occupation du sol dans le terroir. En effet, sur ces 105 parcelles
représentant au total 151,831 ha, 23,57 ha ont été
créés avant 1988 ; 6,16 ha entre 1988 et 2000. Entre 2001 et
2011, la zone d'habitation s'enrichit de 122,1 ha (Figure 4 et Tableau 1).
Source : levés GPS et enquêtes parcellaires,
2011.
35
Figure 4. Evolution des superficies de la zone
d'habitation
36
Tableau 1. Evolution des superficies de la zone
d'habitation en Ha
Périodes
|
Avant 1988
|
1988 - 2000
|
2001 - 2011
|
Superficies totales en ha
|
23,57
|
6,161
|
122,1
|
Source : levés GPS et enquêtes parcellaires,
2011.
Par ailleurs, l'analyse des données attributaires sur
ces différentes parcelles de la zone habitation révèle
qu'elles étaient essentiellement des terres savanicoles avant leur
occupation. Les profils historiques ont tout aussi révélé
que la plupart d'entre elles avaient été occupées par les
petites superficies de cultures au voisinage des habitations.
37
Figure 5. Evolution de la zone d'habitation.
38
1.2.2. Evolution des cultures
Les cultures constituent sans doute dans le terroir, le type
d'occupation du sol qui a connu une évolution spectaculaire. L'analyse
des données sur les parcelles enquêtées
révèle une évolution progressive des cultures (Figure
6).
Sources: levés GPS et enquêtes parcellaires,
2011.
Figure 6. Evolution des superficies des
cultures
Ainsi, les cultures qui ne représentaient que 12,99 ha
avant 1998, augmentent de quelque ha entre 1988 et 2000, soit 16,55 ha. Entre
2001 et 2011, on assiste à une explosion de ce type d'occupation du sol.
Les cultures occupent 342,60 ha en 2011 (Tableau 2).
Tableau 2. Evolution des superficies des
cultures
Périodes
|
Avant 1988
|
1988 - 2000
|
2001 - 2011
|
Superficies totales en ha
|
12,99
|
16,55
|
342,60
|
Source : levés GPS et enquêtes parcellaires,
2011.
Figure 7. Evolution des cultures
39
40
1.2.3. Evolution des jachères
Les jachères dans le terroir n'ont pas connu une grande
évolution. Elles ont régressé de moins d'un hectare,
passant de 11,73 ha avant 1988 ; 10,80 ha entre 1988 et 2000 ; et à
10,90 ha entre 2001 et 2011 (Figure 8 et tableau 3). Cette situation
sous-entend tout simplement que la grande partie des terres a récemment
fait l'objet de mises en valeur agricoles.
Source : levés GPS et enquêtes parcellaires,
2011.
Figure 8. Evolution des superficies des
jachères
Tableau 3. Evolution des superficies des
jachères
Période
|
Avant 1988
|
1988 - 2000
|
2001 - 2011
|
Superficies totales en
ha
|
11,73
|
10,80
|
10,90
|
Source : levés GPS et enquêtes parcellaires,
2011.
41
Figure 9. Evolution des jachères
42
1.2.4. Evolution de la savane arbustive dense
Analysée sous la base des relevés floristiques,
la savane arbustive dense présente une évolution
régressive récente. Le tableau 4 présente la
fréquence des individus de l'ensemble des placettes
expérimentales en fonction de leur état.
Tableau 4. Fréquences des états des
individus dans la savane arbustive dense
Etats
|
Effectifs
|
Fréquences (%)
|
Normaux
|
99
|
32,04
|
Elagués
|
131
|
42,40
|
Dessouchés
|
53
|
17,15
|
Détruits par les feux de brousse
|
22
|
7,12
|
Détruits par les agents
bioclimatiques
|
4
|
1,29
|
Total
|
309,00
|
100,00
|
Source : relevés floristiques, 2011.
En effet, les individus à l'état normal
représentent un pourcentage de 32,04 ; les élagués
représentent 42,40% ; les dessouchés 17,12%. Les individus
détruits par les deux de brousse représentent 7,12%. Par
ailleurs, ceux détruits par les agents bioclimatiques ne
représentent que 1,29%.
Le constat qui se dégage de l'observation de ces
fréquences est le fort pourcentage des individus élagués
(Figure 10).
43
Source : relevés floristiques, 2011.
Figure 10. Répartition de l'état des
ligneux dans la savane arbustive dense
La fréquence élevée des individus
élagués ainsi que celles des individus dessouchés et ceux
détruits par les feux de brousse, sont révélatrices d'une
profonde dégradation de la savane arbustive dense.
Par ailleurs, cette dégradation est bien visible sur le
terrain (Photo 5).
44
Photo 7. Dégradation de la savane arbustive
dense
.
Cette photo illustre le phénomène de
transformation récente du couvert végétal. Ce terrain
marqué par la présence de souche d'arbres correspond à un
champ de culture en création. L'arrière-plan présente
l'état normal de la savane arbustive claire.
Cliché et commentaire: Pouïra Jean Bodel
1.2.5. Evolution de la galerie
forestière
L'analyse des données des relevés floristique au
niveau de la galerie forestière a permis de constater une faible
dégradation.
45
Tableau 5. Fréquences des états des
individus dans la galerie forestière
Etat des individus
|
Normaux
|
élagués
|
dessouchés
|
Détruits par les feux
de brousse
|
Détruits par les agents
bioclimatiques
|
Totaux
|
Effectifs
|
90
|
42
|
3
|
0
|
10
|
145
|
Fréquences
(%)
|
62,07
|
28,97
|
2,07
|
0,00
|
6,90
|
100,00
|
Source : relevés floristiques, 2011.
D'après le Tableau 5, les individus à
l'état normal se taillent la part du plus grand pourcentage, soit 62,07
%. Les individus élagués et dessouchés représentent
respectivement 28,97 % et 2,07 % ; soit un total de 31,04 %. Les individus
détruits par les agents bioclimatiques ne représentent que 6,90
%.
Le pourcentage élevé des individus normaux
largement au-dessus de 50 % montre évidente que la galerie
forestière dans le terroir ne fait pas face à une forte
dégradation comme la savane arbustive dense (Figure 11.).
Source : relevés floristiques, 2011.
Figure 11. Répartition de l'état des
ligneux dans la galerie forestière
46
D'un point de vue global, le couvert végétal sur
l'ensemble du terroir présente un niveau de dégradation
avancé.
|