Institut Provincial de promotion sociale et de Formation
Continuée
Enseignement et Formation continuée à
Louvain-la-Neuve
"Interventions éducatives visant la
réduction de la violence dans le cadre de projets d'insertion
professionnelle destinés aux anciens détenus"
Épreuve intégrée présentée
par Régis Verhaegen en vue de l'obtention d'un
baccalauréat en éducation spécialisée.
Promoteur : Vincent Vanaubel
Année académique 2013-2014
Avant-propos
« Ce que tu gagneras par la violence, une violence
plus grande te la fera perdre. »
Mohandas Karamchand Gandhi
Remerciements :
Je remercie sincèrement Vincent Vanaubel, Xavier
Willems, Sylvie Dony, tous les professeurs de l'IPFC et du CPFB qui ont
participé à la formation, l'ASBLBravvo, Laurence Mirkes, Mohamed
El Barouzi, Fatima Achemoune et Anabela Roque Reinata pour l'aide qu'ils m'ont
apportée dans la réalisation de ce travail.
Table des matières
1 Introduction
4
1.1 Introduction générale
1
1.2 Hypothèse de départ
2
1.3 Définition de termes
3
1.4 Public étudié
5
1.4.1 Projet Kick Off
5
1.4.2 Public cible du Projet
8
1.4.3 Sujets d'étude
9
1.5 Explication du procédé
11
1.6 Choix de l'action étudiée
et questions éthiques
13
2 Acte violent
15
2.1 Types, niveaux et degrés de
l'acte
15
2.1.1 Types de violences
15
2.1.2 Niveaux de violence
16
2.1.3 Degré de violence
17
2.2 Direction et dérivation
18
3 Avant : les facteurs
19
3.1 Introduction : conceptualisation et
prévention
19
3.2 Facteurs génétiques
20
3.3 Facteurs psychobiologiques
23
3.4 Facteurs intrapsychiques
27
3.5 Facteurs de réponse
38
3.6 Facteurs relationnels
41
3.7 Facteurs situationnels et
environnementaux
48
4 Après : les
résultantes
55
4.1 Résultante
évènementielle
55
4.2 Résultante intrapsychique
62
4.3 Résultante sur la
reproductivité
67
4.4 Résultante stratégique
71
5 Piste généraliste : la
communication
74
6 Conclusion
76
7 Bibliographie
78
Introduction
Introduction
générale
Depuis le départ de ma formation en tant
qu'éducateur, un phénomène particulier me trouble :
la violence. Cela m'a d'abord inquiété car je ne pensais pas
être capable d'y faire face. Avec l'expérience offerte par les
stages, j'ai vécu des situations compliquées qui m'ont
rassuré sur mes capacités. J'ai d'abord été dans un
centre d'accueil et d'échange de matériel stérile pour
toxicomanes. Je me suis plusieurs fois retrouvé à devoir
gérer des conflits physiques entre des hommessouvent armés. J'ai
su gérer habilement ces situations. La fonction d'éducateur dans
des écoles primaires de quartiers défavorisés de Bruxelles
(deuxième et troisième stages) m'a initié au rôle de
gérant de conflits interpersonnels. J'ai particulièrement
apprécié ce rôle. Dans mon troisième stage
(enseignement spécialisé type 1 et type 81(*)), j'ai accompagné des
enfants pour qui la violence était un mode de communication quotidien.
Rassuré sur mon aptitude à faire face au phénomène,
il me restait une difficulté. Je me sentais particulièrement mal
outillé pour traiter ce problème en profondeur. J'arrivais
à réagir professionnellement sur le moment, mais j'ignorais
comment traiter ces comportements de manière durable. C'est pour cette
raison que j'ai choisi le thème de la violence pour cette
étude.
En Belgique, le nombre de condamnations au tribunal de
première instance pour coups et blessures volontaire est passé de
4390 en 1997 à 6922 en 2011 (augmentation de 57,7%), le nombre de
meurtres est passé de 138 à 210 (augmentation de 52,1%), le
nombre de condamnations pour torture, de 0 à 55, de prises d'otage de 10
à 25 (augmentation de 150%), de vols avec violence, de 2197 à
2764 (augmentation de 25,8%) et de menaces, de 1192 à 1800 (augmentation
de 51%)2(*). Ce ne sont que
quelques exemples pris parmi les crimes violents qui permettent de constater
une aggravation du phénomène sur 14 ans.Je travaille dans un
programme d'insertion professionnelle pour de jeunes adultes qui, pour la
plupart, ont déjà passé quelques années en prison.
Entre 2003 et 2011, on constate que 48.2% des personnes qui ont
été libérées ont fini par être
réincarcérées (Maes & Robert, 2012). Le taux de
récidive en Belgique est donc assez élevé. Même si
la violence n'est qu'un des aspects qui peuvent amener à une
incarcération, il est essentiel de travailler sur la réinsertion
des prisonniers. Comme le projet dans lequel je travaille est nouveau et
l'équipe réduite (4 personnes), j'ai une certaine latitude pour
apporter des idées et modifier les activités. Cela fait de ce
projet un terrain idéal pour réaliser cette étude et pour
tester des interventions pratiques sur le phénomène de la
violence.
J'ai cherché le moyen de pouvoir intégrer
efficacement les apports théoriques, les pistes pratiques et
l'expérience de terrain tout en gardant la rigueur nécessaire
à un travail d'étude dans le domaine des sciences humaines. J'ai
pris le parti pris de séparer clairement les trois aspects tout en les
gardant proches les uns des autres. Chaque aspect du phénomène
sera donc divisé en trois parties : théorie, pistes
d'intervention et expérience de terrain. Je vais essayer par
différents moyens de comprendre ce phénomène et surtout de
trouver des moyens pour agir dessus. Le questionnement principal de ce travail
est donc :
Comment aborder et traiter la
violence ?
1.1 Hypothèse de
départ
Lors des recherches effectuées et dans ma vie
professionnelle, j'ai pris connaissance de différents types
d'interventions destinées aux anciens détenus. Différents
objectifs coexistent : réinsertion, prévention de la
récidive, surveillance... Le point commun est qu'elles étaient
presque toutes pensées par des intervenants du milieu judiciaire :
juristes, criminologues et/ou personnel carcéral. Elles pouvaient aussi
être développées par des psychologues. Paul Mbanzoulou
(2000), l'un des auteurs dont nous allons étudier les écrits, a
l'avantage d'avoir les deux casquettes : docteur en droit, il dispose
également d'une maitrise de psychologie. Il est plus rare de trouver des
programmes d'intervention pour ce public réalisés par des
éducateurs. De nombreux travaux sur la violence, écrits par du
personnel éducatif, existent, mais ilssont souvent dirigés aux
plus jeunes (public scolaire ou délinquants mineurs).
L'intérêt de ce travail va résider dans le lien entre les
deux mondes : le milieu éducatif et le milieu carcéral.
L'hypothèse de travail est la suivante :
« Une approche intégrale permet de traiter
efficacement la violence chez les anciens détenus. »
Cette hypothèse nous permettra d'aborder ce sujet avec un
angle d'attaque assez large. En effet, le terme "intégral" est largement
utilisé dans le domaine de la prévention de la
criminalité. Ainsi, comme le présente la note du gouvernement
fédéral belge destinée en 2009 à tous les
bourgmestres du pays : « De manière
générale, la Note-cadre de Sécurité
intégrale définit la sécurité intégrale
comme le concept visant à aborder la criminalité et
l'insécurité3(*) sous tous leurs aspects, dans le contexte le plus
large possible. »4(*) Une approche intégrale revient donc à
étudier un phénomène en observant et en intervenant sur
tous les aspects possibles. Traube (2002) définit le
phénomène violent comme une mécanique complexe
mêlant, rien qu'à l'intérieur du sujet, sentiments,
émotions, fantasmes, préjugés, croyances, souvenirs,
éducation...Sans compter tous les paramètres extérieurs.
Il insiste sur l'idée qu'un changement sur un seul paramètre du
phénomène est inefficace : cela nécessite une
intervention multi-ciblée.C'est ce que nous allons aborder dans ce
travail.
1.2 Définition
de termes
Dans l'analyse et le traitement de la violence, Traube (2002)
constate l'usage de plusieurs termes sans considération sur les nuances
qu'ils peuvent apporter. Les mots violence, agressivité,
irritabilité, agression, colère, pulsion agressive, conflit...
sont souvent utilisés, à tort, comme des synonymes ou des
concepts ayant des significations semblables. Nous allons commencer par
définir quelques expressions afin d'en avoir une compréhension
plus claire et un usage correct.
Agressivité : toutes les espèces vivantes, y
compris l'être humain, sont mues par la nécessité de
survivre et de protéger leur intégrité. Pour
répondre à ce besoin, elles font parfois usage de leur instinct
agressif. Pour l'être humain, on parlera plutôt de pulsion
agressive. (Traube, 2002)
Agression : actualisation de la pulsion agressive. Acte
ou comportement qui porte atteinte, volontairement ou non, à un
individu. (Traube, 2002). Nous utiliserons ici les termes agression et acte
violent comme étant synonymes.
Violence : mode de communication, habituellement
utilisé en dernier recours. Réponse agressive à un
comportement perçu comme provocateur. (Traube, 2002)
Conflit : « rapports de force entre des exigences
contradictoires qui s'opposent de manière (manifeste ou latente),
directe ou indirecte. Il peut s'agir de conflits interpersonnels, dans les
groupes ou entre groupes sociaux.»5(*) Le conflit n'induit pas forcément la violence,
mais la violence est souvent utilisée comme mode de communication en cas
de conflit.
Irritabilité : variation de l'humeur, de la
santé, de la fatigue... qui augmente l'intensité d'une
réaction émotionnelle et notamment la possibilité d'une
réponse agressive. On parlera de seuil d'irritabilité. (Traube,
2002)
Impulsivité : « Caractère d'une
action spontanée, irréfléchie, induite sous l'influence
des impulsions. Tendance irrésistible à l'accomplissement d'un
acte sans réfléchir à ses conséquences ou à
sa pertinence. »6(*)
Colère : sentiment élémentaire (avec la
peur) de réaction face à un danger ou une menace. Cette
menace/danger (réelle ou supposée) peut cibler différents
éléments : intégrité physique, sentiments,
"territoire" (responsabilités, espace vital, distance
interrelationnelle...), valeurs... La colère peut être un
sentiment utile dans certains cas et inadéquat dans d'autres (si elle
devient une réponse habituelle à la moindre frustration par
exemple). (Traube, 2002)
Frustration : État d'une personne privée d'un
bien, d'un avantage escompté, promis, attendu ou qui se refuse la
satisfaction d'une demande pulsionnelle. État d'insatisfaction
induit par le fait de ne pas avoir pu réaliser un désir. (Le
Petit Robert de la langue française 2014)
Comme nous pouvons le constater, la colère,
l'agressivité, l'agression et la violence ne sont pas forcément
une question d'intention. Ces termes concernent davantage la perception et les
effets que les comportements d'autrui peuvent avoir. Sur le terrain, j'ai
pourtant l'habitude de considérer la violence comme une intention. Celui
qui est violent ne veut pas forcément l'être : il est
perçu comme cela. C'est une habitude que j'ai appris, par ce travail,
à remettre en question.
En résumé :
Sentiments : colère, frustration
Pulsion : agressivité
Humeur : irritabilité
Comportement : agression
Mode de communication : violence
Délinquance : « ensemble des infractions
commises à l'encontre de l'ordre public et appréhendées du
point de vue de leur incidence sociale. »7(*)
Insertion : « Action visant à faire
évoluer un individu isolé ou marginal vers une situation
caractérisée par des échanges satisfaisants avec son
environnement. Résultat de cette action, qui s'évalue par la
nature et la densité des échanges entre un individu et son
environnement. »8(*)
Réinsertion sociale : « processus au terme
duquel un individu qui a commis des délits dans le passé cesse
d'en commettre et mène une vie à peu près
morale. »9(*)
D'après Mbanzoulou (2000), ce terme a de nombreux synonymes ayant plus
ou moins la même signification : amendement, réadaptation
sociale, (re)socialisation, réhabilitation, reclassement social et
insertion sociale.
Il est possible d'observer dans différents ouvrages
(Mbanzoulou 2000, Traube 2002, Rey 1996, Koudou 1996, Born et Chevalier 1996),
le lien réalisé entre criminalité et violence. Ce lien va
parfois jusqu'au raccourci en assimilant l'un à l'autre. Cela est
probablement dû au nombre d'études et de statistiques fiables
disponibles sur la délinquancequi n'existent pas sur la violence en
général. En dehors des informations judiciaires, la violence
reste difficile à mesurer sur de grands groupes (surtout d'adultes). Il
est important de souligner que toute infraction n'est pas
systématiquement réalisée en faisant usage de la violence
et qu'une grande partie des actes violents ne sont pas repris dans les
statistiques et études liées à la criminalité. Bien
que, en reprenant la définition du mot agression ; un vol sans
violence (terme juridique) est un acte qui porte atteinte, volontairement ou
non, à un individu. Pour donner une idée de la proportion, au
Canada, en 1995, seuls 10% des actes criminels avaient été commis
en utilisant la violence. (Dowden, Blanchette et Serin, 1999) Dans ce travail,
nous utiliserons également ce lien entre criminalité et violence
en essayant autant que possible de ne pas verser dans le raccourci abusif.
1.3 Public
étudié
La partie pratique de ce travail sera basée sur ma
pratique professionnelle dans le cadre du projet Kick Off de l'ASBL Bravvo
où j'occupe le poste d'éducateur. Kick Off est un projet
d'insertion professionnelle10(*) destiné aux jeunes adultes en
difficulté sur le marché de l'emploi. Parmi ceux-ci, une grande
partie a eu des difficultés avec la justice et a été
incarcérée à un moment de sa vie.
1.3.1 Projet Kick Off
« Le projet Kick Off est un projet pilote dans le
secteur de l'insertion socio-professionnelle.
Il concerne les adultes entre 18 et 25 ans peu qualifiés
sans emploi habitant prioritairement le périmètre du contrat de
quartier Jardins aux Fleurs (voire la commune de Bruxelles).
Durant 4 mois, une équipe de 4 personnes (2
éducateurs, 1 animateur et 1 coordinateur) accueillent un groupe d'un
maximum de 12 personnes.
Au moyen d'ateliers, animations, chantiers et entretiens
individuels, l'équipe amènera les stagiaires à mettre en
place un projet personnalisé de détermination professionnelle.
La particularité de Kick Off réside dans
l'articulation immédiate entre expérience en situation
professionnelle et moment de réflexion et travail sur les savoirs,
savoir-être, savoir-faire adéquats dans le monde du travail.
À l'issue du projet, chaque stagiaire sera en mesure de reprendre les
études de son choix ou effectuer une recherche d'emploi
efficace. »11(*)
Ce projet a été mis en place par l'ASBLBravvo.
Bravvo est une association sans but lucratif de plus de 250 employés
appartenant à la commune de Bruxelles-Ville. Elle
centralise la politique de prévention mise en place par le pouvoir
communal. Elle regroupe en son sein plusieurs projets de prévention de
l'insécurité et de l'exclusion sociale12(*) : centres de jeunes,
centres communautaires, gardiens de la paix, médiation scolaire, projets
d'insertion professionnelle, mesures de peines alternatives,
techno-prévention, médiation scolaire, locale et sociale... Sa
politique d'intervention est celle d'une prévention
intégrée13(*) et intégrale.
Les participants viennent pour une session de 4 mois. Jusqu'ici,
le projet a vécu 3 sessions. La session 1 s'est
déroulée du 21er février 2013 au 3 juillet
2013, la session 2, du 30 septembre 2013 au 31 janvier 2014 et la session 3 a
commencé le 3 mars 2014 pour se terminer le 30 juin 2014. L'étude
présentée ici a été faite du 22 avril 2013 (date de
mon entrée en fonction) au 21 mars 2014. Cela revient à11 mois
dont 7 avec le public. Il y a eu d'importantes modifications du projet entre la
session 1 et la session 2 grâce aux évaluations de chaque
activité, à une meilleure connaissance du public cible et
à cette étude.
Le projet à 4 objectifs
principaux :
- Travailler les savoir-être liés au monde du
travail
- Réaliser une remise en ordre et un soutien
administratifs
- Faire une remise à niveau en termes de connaissances de
base
- Accompagner la détermination professionnelle et donner
des outils pour faire une recherche d'emploi
C'est surtout le premier objectif qui va nous amener à
travailler les problèmes de violence et d'agressivité avec notre
public.
Les modes d'observation et de recueil
d'information utilisés sont :
· Les paroles des participants.
· Une auto-évaluation des participants où ils
évaluent quelles compétences ils ont acquises ou
améliorées durant la session.
· Les observations et les avis des membres de
l'équipe : 2 éducateurs, 1 animateur et 1 responsable de
projet.
· Les dossiers individuels des participants (comprenant des
documents administratifs, un résumé de tous les entretiens
individuels, les démarches réalisées pour les
participants, les exercices individuels qui ont été faits et les
documents d'inscription).
· Le journal de bord quotidien (comprenant le jour, la date,
les présences, les heures d'arrivée, les demandes des stagiaires,
les évènements particuliers, les activités de la
journée, les intervenants, une évaluation de la journée et
des remarques organisationnelles).
· Les fiches réalisées pour chaque
activité (comprenant la date, le lieu, les objectifs, le
déroulement, le rôle des encadrants, les pédagogies
utilisées, le matériel nécessaire, les moyens de
vérification des objectifs, une évaluation, une liste des choses
à préparer et des remarques).
· Deux rapports d'évaluation du projet
réalisés à la fin de chaque session par la cellule
évaluation de l'asblBravvo. Cette cellule, composée de personnes
spécialisées dans l'évaluation de projets sociaux est
extérieure à notre équipe.
· Trois émissions de radio (web radio mobile quartier
Anneessens) qui ont été réalisées avec des
entrevues des participants au projet.
Le projet Kick Off a eu jusqu'ici une vie un peu
particulière. Je suis arrivé pendant la première session
du projet. Cette session avait été lancée suite à
l'arrivée de la chargée de projet qui avait constaté que
les subsides (valables pour 4 ans) avaient déjà été
reçus il y a plus d'un an et que le projet était toujours en
cours de préparation. Le projet qui avait été écrit
sur papier était par plusieurs aspects très peu adapté au
public qu'il visait. La première session a donc commencé alors
que le projet n'était pas prêt. À vrai dire, on peut
comparer cette session à un prototype qui fait pour la première
fois l'expérience du terrain. Cette expérience nous a
amenés à revoir complètement toutes les activités.
Le projet Kick Off a subi une refonte complète entre la session 1 et la
session 2. Seule une infime partie des éléments ont
été gardés. Toutes les activités et
postures éducatives présentées ici ne sont donc pas une
simple présentation du projet. Chacune d'entre elles a été
créée et pensée par M. El Barouzi (animateur), L. Mirkes
(chargée de projet), F. Achemoune (éducatrice) et moi-même,
R. Verhaegen (éducateur) pendant l'étude que nous
réalisons ici.Nous sommes en constante interaction et en
réflexion permanente pour que ce projet puisse atteindre ses objectifs
le mieux possible. Ce travail de fin d'études a grandement
alimenté la refonte du projet Kick Off.
1.3.2 Public cible du Projet
« Jeunes adultes âgés de 18 à 25
ans14(*), sans emploi en
rupture sociale ou/et errance, en échec scolaire, sans accroche sur le
plan de l'insertion socioprofessionnelle classique et présentant des
difficultés sociales et économiques (public vulnérable).
Ces jeunes adultes sont pour la plupart sans qualification ou de très
faible niveau de qualification (CEB ou CES inférieur). De plus, certains
sont dans l'incapacité d'obtenir un certificat de bonne vie et moeurs
vierge. Ce qui constitue un facteur bloquant dans la recherche d'emploi.
Dévalorisés par des échecs successifs dans
une situation économique et sociale difficile, ils doivent prendre
confiance en leurs capacités et en développer de nouvelles pour
s'intégrer dans la société et envisager un parcours
socioprofessionnel valorisant. Le projet proposé permet à chacun
de trouver sa place au coeur d'une action coopérative et valorisante
mise en place par le groupe constitué. Chacun sera un maillon du projet,
de la réflexion à la réalisation, et contribuera
pleinement à sa réussite.
Le groupe total sera composé d'un maximum de 12 personnes
par session15(*).
Une partie de ce groupe sera constituée de jeunes adultes
bénéficiant de mesures d'élargissement du régime
pénitentiaire (semi-liberté, surveillance électronique).
Cette partie du groupe ne pourra pas excéder deux personnes afin de
garder une certaine stabilité dans la dynamique et le projet constituera
le lien nécessaire à la réintégration d'un espace
de vie.
Ainsi, les facteurs de vulnérabilité
identifiés pour le recrutement du public sont :
· Infraqualifié (le public n'a pas acquis le niveau
de fin de secondaire inférieur) ;
· Situation économique faible
(bénéficiaire du CPAS, ou revenu en dessous du seuil de
pauvreté) ;
· Peu de ressources personnelles en matière de
soutien du parcours d'ISP ;
· Ne maîtrisant pas ou peu les connaissances de base
concernant les parcours de formation et de qualification ;
· Ayant déjà été en situation
d'échec dans le cadre d'un projet ou d'un parcours d'insertion
socioprofessionnel ;
· Ayant connu ou se trouvant en situation de
sans-abrisme ;
· Ayant eu des antécédents
judiciaires ;
· Nécessitant un accompagnement en matière de
remise en ordre administrative ;
· Ayant des problèmes d'assuétudes qui
handicapent leur potentiel d'insertion. »16(*)
1.3.3 Sujets d'étude
Dans cette étude, seront repris ceux ayant un
passé carcéral c'est-à-dire ceux qui ont
été détenus en maison d'arrêt (détention
préventive), en maison de peine ou en institution publique de protection
de la jeunesse (IPPJ) et ce, en Belgique ou à l'étranger.Au
total, cela concerne12 personnes sur les trois sessions (sur
un total de 22 participants). Il est a noté que nous n'avons pas
observé de comportements violents chez tous ceux ayant un passé
carcéral et inversement, nous avons travaillé les comportements
violents chez ceux qui n'avaient jamais été détenus.
Le nombre d'années qu'ils ont effectué en prison
(de même que les raisons de leur incarcération) correspond
à ce qu'ils nous ont communiqué. Nous ne demandons pas
systématiquement ces informations. En général, ils nous
les communiquent spontanément pendant la formation.
Sujet 1 (AH2) 28 ans, a passé 2 en prison, a
effectué une peine judiciaire alternative au sein du projet.17(*)
Sujet 2 (AN2) 22 ans, a passé 1 an en IPPJ.
Sujet 3 (QE2) 23 ans, a passé 3 ans en prison, a
participé au projet pendant une mesure d'élargissement de
peine.18(*)
Sujet 4 (ED2) 26 ans, a passé 4 ans en prison, a
effectué une partie d'une peine judiciaire alternative au sein du
projet. Aurait dû être mis sous surveillance électronique,
mais a disparu avant l'application de cette peine. Est actuellement en
BCS.19(*)
Sujet 5 (SD1) 27 ans, a passé 2 ans en prison.
Sujet 6 (SA1) 20 ans, a passé 3 ans en IPPJ.
Aeffectué une peine judiciaire alternative au sein du projet.
Sujet 7 (YO2) 25 ans, a passé 8 ans en prison. A
participé au projet pendant une mesure d'élargissement de
peine.
Session 3 (sujets observés sur une plus courte
période)
Sujet 8 (BI3) 25 ans, a passé 6 ans en prison. Participe
au projet pendant une mesure d'élargissement de peine.
Sujet 9 (NA3) 22 ans, a passé ?ans en prison.
Participe au projet pendant une mesure d'élargissement de peine.
Sujet 10 (YA3) 29 ans, a passé ?ans en prison.
Participe au projet pendant une mesure d'élargissement de peine.
Sujet 11 (RI3) 18 ans, a passé 1 an en prison.
Sujet 12 (FA3) 28 ans, a passé ?ans en prison.
Il s'agit d'un public composé d'adultes. Cela a pour
conséquence qu'il est moins adéquat (et efficace) d'utiliser, en
tant qu'éducateur, l'imposition comme méthode pédagogique.
C'est une technique plus facile à utiliser avec des groupes d'enfants
dans le cadre scolaire par exemple. Avec des adultes, nous nous sommes rendu
compte qu'il est nécessaire de partir de la conscience d'un besoin de la
part du sujet. Il faut faire naitre l'envie d'apprendre au lieu d'imposer des
connaissances et des savoir-être. Cela nous a amenés à
mettre une série de savoir-être de côté. Nous avons
aussi constaté qu'il était nécessaire, avec ce public, de
ne pas utiliser de procédés pouvant être perçus
comme infantilisants. Lors de la session 1, nous avons observé qu'ils
réagissaient assez mal quand ils pensaient que nous les traitions comme
des enfants. Leur seuil de tolérance à ce niveau est plus faible
que la plupart des publics adultes que j'ai pu observer qui ne se vexent pas
si, dans une formation, on leur demande de faire un exercice sous forme de
jeu.
Tous les sujets étudiés ont des objectifs de vie,
des caractéristiques et des vécus très différents.
Ils partagent cependant un objectif qui a, pour tous, une grande
importance : ne pas retourner en prison.
1.4 Explication du
procédé
Pour procéder à une étude intégrale
du thème, nous allons procéder en utilisant un schéma.
Quand il s'agit d'analyser des phénomènes complexes (tels que la
violence) aux multiples implications dans différents domaines de la
société et des sciences, il est important que la réflexion
puisse jouir d'une certaine clarté. Cela permet d'éviter un
éclatement et une fragmentation trop importante des idées. Ainsi,
plusieurs ouvrages aillant trait au sujet (Traube, 2002 ; Massé,
Desbiens et Lanaris, 2006) ont utilisé la schématisation pour
clarifier leurs propos.
Image extraite de Massé et Al. (2006) p.3
Ainsi, comme ces auteurs, nous allons utiliser un schéma.
Il a été largement inspiré de la séparation des
chapitres chez Traube (2002). Ce schéma, tout comme ce travail, sera
divisé en trois parties. Cette séparation sera volontairement
artificielle et manichéenne. Elle permet de séparer les
interventions sur le terrain : l'avant, le pendant et
l'après : la prévention, l'intervention sur le
moment (gestion de conflits) et le traitement.
Le centre du schéma est composé par un acte violent
virtuel. Il sépare l'étude entre un avant et un après
l'action violente (l'agression). C'est là qu'apparait le
côté artificiel de cette séparation puisqu'un geste violent
apparait rarement de manière unique et isolée. Il a toujours
été précédé par d'autres actes (sauf
à étudier la petite enfance, ce qui n'est pas notre cas) et sera
probablement suivi d'autres agressions à un moment ou un autre de la vie
du sujet.
Précédant l'acte, nous allons trouver les
facteurs. C'est l'ensemble des éléments,
internes et externes au sujet, qui ont causé cette action. Nous allons
voir que, concernant la violence, il n'y a pas de causalité simple, mais
un grand nombre de facteurs en interaction constante. Il est
fréquent de trouver des tentatives de réduction du
phénomène à des causes simples comme la violence dans les
jeux et les films, la pauvreté, le manque d'instruction ou
d'éducation. Or, s'il a été prouvé que tous ces
facteurs avaient un impact sur la tendance à utiliser la violence, aucun
n'est suffisant à lui seul. Nombreux sont ceux qui, par exemple, jouent
à des jeux violents sans utiliser excessivement, dans leurs relations,
la violence. Ainsi, nous aborderons de nombreux moyens qui permettent de
prévenir l'usage de la violence.
Suivant cet acte, nous allons trouver les
résultantes20(*). C'est l'ensemble des résultats, internes et
externe, que l'acte va avoir. L'objectif recherché a-t-il
été atteint ? L'action va-t-elle être
reproduite ? Existe-t-il des moyens pour éviter la
reproduction ? Encore une fois, chaque action violente n'a pas
systématiquement les mêmes conséquences. Ainsi, la
même manière d'intervenir après un acte violent peut
s'avérer efficace dans certains cas et inefficace dans d'autres. Il est
important, comme pour les facteurs, d'explorer les différentes
possibilités d'intervention après l'action pour choisir, au cas
par cas, les interventions les plus adaptées.
Dans cette étude, nous n'aborderons quasiment pas
l'intervention sur le moment par choix personnel et parce que la
gestion de conflit est largement étudiée
ailleurs.
Il existe des conceptualisations similaires que nous pourrions
utiliser dans ce travail. Concernant la prévention, elle est
habituellement séparée en trois parties : prévention
primaire (pour ceux qui ne peuvent pas encore être touchés par le
phénomène), secondaire (pour ceux qui risquent d'être
touchés par le phénomène) et tertiaire (pour ceux qui sont
déjà touchés par le phénomène)21(*). Le travail
réalisé ici ne concerne que la prévention tertiaire mais
pas seulement : le traitement de la violence sera également
abordé. La justice a quant à elle développé une
conceptualisation qui lui est propre entourant l'acte délinquant :
prévention (pour éviter que l'acte ne soit commis),
répression (quand l'acte est commis : emprisonnement, amende...) et
suivi (après la répression pour aider et vérifier que
l'acte ne soit plus commis). Beaucoup d'acteurs judiciaires se plaignent de la
quasi-inexistence du suivi (Mbanzoulou, 2000). Personnellement, j'y ai surtout
vu, dans la façon dont c'est pratiqué (Mbanzoulou 2000) et
perçu (d'après les dires des sujets 1, 3, 4 et 6), une
répression après la répression et le signe que l'ancien
détenu n'a jamais fini de "payer sa dette à la
société". Le projet Kick Off ne se situe pas exactement au niveau
du suivi même s'il réalise un travail de réinsertion et de
prévention de la récidive. Nous ne sommes pas des outils de
vérification pour le système judiciaire. Nous utiliserons donc
davantage la conceptualisation utilisée en médecine
séparant la prévention du traitement.
Pour chaque facteur/résultante étudié ici,
le chapitre sera divisé en trois parties
distinctes :
· La première partie comprendra une étude
théorique du facteur ou de la résultante abordés.
· La deuxième partie (intervention pratique :
revue de la littérature) fera un inventaire des différentes
interventions ou conseilsexistants concernant ce facteur ou cette
résultante en particulier.
· La troisième partie (sur le terrain :
observations et intervention personnelles) reprendra le travail de
terrain : les observations et les interventions (concernant ce facteur ou
cette résultante en particulier) vécues au sein du projet Kick
Off.
Cette organisation permet de séparer efficacement ce
travail en trois parties : théorie, pistes d'intervention et
pratique de terrain.
1.5 Choix de l'action
étudiée et questions éthiques
L'action mise au centre de ce schéma, un acte violent
patent, est un choix méthodologique qui pose des questions
éthiques. En effet, tout usage de la violence n'est pas
forcément visible. Il existe de nombreuses manières de nuire
à un individu qui peuvent difficilement être perçues par un
observateur extérieur (cf. chapitre 3.5). L'acte violent visible est ce
qui est généralement conçu par la société
comme englobant toute la violence. Ce sont les coups (avec ou sans armes), les
cris, les insultes, les menaces et d'autres actions tout aussi visibles (cf.
chapitre 2). Il arrive extrêmement souvent (cf. chapitre 3.5) que cet
acte ne soit que la réponse à d'autres actes subits. Parfois,
l'acte prend pour cible l'auteur de ces violences subies et d'autres fois, il
en change la cible (cf. chapitre 2.2 et 4.2). Alors, pourquoi choisir cet
acte-là alors qu'il n'est souvent qu'une réponse à
d'autres violences antérieures ? C'est parce que c'est ce type
d'actions qui est, avant tout autre, jugéinadéquat et puni par
l'autorité. Pour le public que nous étudions, cela revient
souvent (si l'action est perçue par l'autorité) à un
retour en prison ou à des sanctions bien plus importantes que pour la
plupart d'individus. Ainsi, ce choix n'a pas été fait pour
perpétuer une forme d'injustice (ou en tout cas
une perception tronquée de la réalité),
ni d'entériner le fait que de nombreux actes violents sont socialement
acceptés (Traube 2002), mais bien pour apporter au public dont je
m'occupe des moyens pour éviter de se retrouver à nouveau
derrière les barreaux. D'autres types de violences méritent
clairement la même attention, mais ils sont nettement plus difficiles
à percevoir et donc à traiter.
Durant la session 1 du projet Kick Off, 8 conflits violents ont
éclaté (dont 2 incluant de la violence physique)22(*). Durant la session 2 du
projet, 5 conflits violents ont éclaté (dont 2 incluant de la
violence physique)23(*).
La session 2 comprenait 60% de participants en plus et 150% d'anciens
détenus en plus que la session 1.
Déontologiquement, un autre point mérite
d'être abordé. Les études sur l'agressivité et la
violence portent aussi souvent sur les animaux que sur les êtres humains.
Nombreux sont les chercheurs qui abordent également les études
faites sur le règne animal (Traube, 2002 ;Dehasse, 1995 ;
Laborit, 1994) . Cela peut poser certaines questionséthiques, mais cela
permet également de voir les points communs et les différences
qu'il y a entre agressivité animale et humaine. L'agressivité
chez l'un et chez l'autre est, à l'origine, liée au besoin de
survie (défense, alimentation, reproduction...). Chez l'humain, cela
s'est étendu au-delà de la survie à proprement parler tout
en restant lié à ce besoin.
2 Acte violent
2.1 Types, niveaux et
degrés de l'acte
Maintenant que nous avons défini les termes importants,
établi la méthode d'étude et fait connaissance avec le
public étudié, une étude typologique de l'acte violent
s'impose. Il y a plusieurs manières de porter atteinte, volontairement
ou non, à un individu. Ainsi, Traube (2002), de même que
Massé & al. (2006) et Bayada, Boubault, Bisot et Gagnaire (2000)
apportent des nuances sur la violence en termes de types, de niveaux,
de direction, d'enjeu et de degré. Tous cependant s'accordent
sur un point essentiel de ce travail : conflit et pulsion agressive sont
des éléments naturels, constitutifs de l'humanité. Cela
n'a pas de sens de vouloir les éradiquer des sociétés
humaines. Par contre, ils peuvent être dirigés ou
gérés positivement.
2.1.1 Types de violences
· La violence peut être physique ou
psychologique. Plusieurs proverbes populaires expriment bien cette
idée : les mots peuvent blesser autant, si pas plus que les coups.
Un regard ou une expression faciale peuvent causer d'importants dommages
à l'intégrité d'un individu. La particularité de la
violence psychologique est d'être intangible : elle ne laisse pas de
traces clairement visibles.
· La pulsion violente peut être
actualisée ou non. Elle peut être
transformée en acte ou non. La particularité d'une pulsion
violente non actualisée est de ne pas disparaitre. Elle peut être
inhibée par deux moyens : soit, la personne accepte la pulsion et
refuse de l'actualiser, soit la personne refuse la pulsion et ne perçoit
pas ou n'accepte pas consciemment son agressivité. Refuser (consciemment
ou non) son expression ne neutralise pas une pulsion violente ; il faudra
d'autres mécanismes pour cela. (Traube, 2002)
2.1.2 Niveaux de violence
Le niveau de violence fait référence aux
acteurs de la violence : individus, groupes et
organisations. Ainsi, ces acteurs peuvent se combiner. Tous les anthropologues
(Traube, 2002) expliquent la vie sociale génère de la violence et
que les groupes et les individus produisent des moyens de l'exprimer afin
qu'elle ne le détruise pas en se dirigeant vers lui-même.
· Niveau intra-individuel : la violence d'un individu
envers lui même
· Niveau inter-individuel : la violence d'un individu
envers un autre individu, l'un étant victime et l'autre auteur du
préjudice. On pense généralement plus souvent à ce
type de violence.
· Niveau inter-groupal : la violence d'un groupe envers
un autre. Nous pouvons prendre, par exemple, la violence de ragots
échangés entre deux groupes au sein d'une école.
· Niveau inter-organisationnel : la violence d'une
organisation envers une autre. C'est le cas, par exemple d'un conflit
armé entre deux pays. Attention, il est fréquent qu'un conflit en
cache un autre quand, par exemple, un conflit entre deux entreprises cache en
réalité un conflit non assumé entre les dirigeants de ces
organisations.
· À l'intérieur même d'un
groupe, il arrive souvent que l'ensemble désigne un bouc
émissaire (en général l'individu le moins capable de se
défendre). Le groupe choisit l'un des siens pour diriger la violence
qu'il génère. Ainsi, une petite partie du groupe est
"sacrifiée" pour que l'ensemble ne soit pas submergé par sa
propre violence.
· Parfois, le groupe va désigner un ennemi
extérieur dont il construira une représentation menaçante
(peu importe qu'elle soit vraie ou exagérée). Cela permet de
renforcer la cohésion de groupe, de se mobiliser contre un adversaire.
C'est souvent le cas du racisme : l'étranger est la cause de nos
maux.
· La société en tant qu'organisation va aussi
exprimer différentstypes de violence : violence politique (coups
d'état, groupes extrémistes, rapport dominant-dominé),
violence économique (dualisation riches-pauvres, surenchère de la
consommation) ou violence culturelle (énonçant une norme et
rejetant ceux qui s'en démarquent).
Ainsi, nos 3 éléments (individu, groupe,
organisation) se combinent chacun 4 fois. Exemple : individu (auteur)
vs24(*) lui-même
(victime), individu vs autre individu, individu vs groupe, individu vs
organisation. Au total, cela fait 12 possibilités de combinaison
différentes.
Auteurs/victimes
|
Lui-même
|
Individu
|
Groupe
|
Organisation
|
Individu
|
1
|
2
|
3
|
4
|
Groupe
|
5
|
6
|
7
|
8
|
Organisation
|
9
|
10
|
11
|
12
|
Il est à noter qu'il est aussi possible d'exprimer de la
violence envers des objets ou des animaux.
2.1.3 Degré de violence
On peut aussi diviser les actes violents en terme de
degrés c'est-à-dire selon
l'intensité de la manifestation. Il est
extrêmement difficile de faire un classement d'actes violents par niveau
d'intensité. S'il semble évident qu'un coup est moins grave qu'un
meurtre prémédité, qui peut dire si un coup est plus
intense qu'une insulte ? Si la réponse communément admise
dirait que le coup est plus grave, nous avons tous déjà
vécu la situation d'une injure qui blesse plus profondément et
durablement qu'un coup de poing. Ainsi, notre société a tendance
à classifier les actes non pas selon l'importance du dommage qu'elle
cause, mais selon son degré de tolérance envers ces actes. Pour
illustrer ce propos, je retiendrai un scandale récent qui a eu lieu en
France : un jeune homme a été condamné par le
tribunal correctionnel à un an de prison ferme pour avoir lancé
un chat contre un mur.25(*) Ce qui choque dans cette affaire c'est que la peine
est largement supérieure à celle généralement
infligée aux auteurs de violences conjugales
répétées, aux auteurs de coups et blessure envers les
humains et même souvent aux auteurs de viols. Nous pouvons
néanmoins placer les actes violents sur une échelle virtuelle
d'intensité.
À ce moment, un autre concept intervient : la
durée et la
répétitivité de l'acte. Il est par
exemple évident que la pollution tue beaucoup plus que les accidents
d'avions et de train réunis. L'accident est intense et apparait de
manière très sporadique, la pollution est constante, multiforme
et surtout, très étendue dans la durée. Le crash est
visible, il est facile de démontrer ses effets. La pollution est plus
difficile à observer et il faut toute une batterie d'experts pour
déterminer si tel décès ou telle maladie en est la
conséquence. Il existe également des systèmes
fermés qui vont avoir tendance à refuser de rendre visible la
violence qui les anime. C'est le cas des familles, mais aussi des écoles
où les scandales et la violence cherchent souvent à être
étouffés par les différents acteurs pour ne pas nuire
à la réputation de l'établissement.
Nous avons donc, en termes de degré, trois
paramètres à prendre en compte : l'intensité, la
durée/répétitivité et la
visibilité. La société aura une
tolérance bien plus grande pour les actions d'une intensité
faible, d'une durée/répétitivité importante et
d'une visibilité minime. A contrario, elle ne tolérera pas les
actions violentes intenses et visibles. C'est celles que nous essayerons de
traiter ici. (Traube 2002)
2.2 Direction et
dérivation
D'après Traube (2002), la pulsion agressive a besoin, chez
l'être humain, de se trouver une cible. Si elle ne
s'écoule pas vers l'extérieur, elle aura tendance à se
diriger vers l'intérieur. La pulsion nécessite un objet.
L'extérioriser permet de se protéger de sa propre violence. La
violence gratuite est un concept théorique qui n'existe pas dans la
réalité. En pratique, la violence aura toujours des causes et une
ou plusieurs directions. Quand la direction ne correspond pas à la
cause, c'est que la violence a été dérivée. Cela
peut s'avérer être un mécanisme positif (l'adolescent qui
utilise son agressivité dans le sport) ou négatif (le professeur
qui pourrit la vie de ses élèves parce que sa femme est
insupportable). Nous allons étudier comment utiliser le principe de
dérivation de manière positive. Ainsi, la violence a toujours une
fonction. Pour traiter les comportements violents, il faudra trouver leurs
fonctions et leurs enjeux. Ils peuvent avoir différentes formes qui
demanderont différentstypes d'intervention. C'est ce que nous allons
voir dans cette étude.
3 Avant : les facteurs
Introduction :
conceptualisation et prévention
L'un des principaux problèmes de la violence telle que
nous l'étudions est sa partie visible. En effet, des coups, des insultes
ou des cris sont des évènements qui attirent l'attention. Dans
beaucoup de milieux, comme les écoles ou les prisons, ils vont
être le point de départ d'une intervention visant à les
stopper. Le principal problème vient du fait que l'acte en
lui-même n'est que l'arbre cachant la forêt : il est
l'aboutissement d'un processus complexe composé de nombreuses variables.
Avant d'en arriver à utiliser la violence comme mode de communication,
de nombreux facteurs entrent en jeu. L'erreur, lorsque l'un de ces facteurs est
découvert, est de focaliser toute son attention dessus. Un des meilleurs
exemples concerne la polémique concernant les jeux vidéo.
Après de nombreuses recherches (54 au procédé fiable
d'après le psychiatre Stéphane Mouchabac in Bénard, 2007),
la communauté scientifique s'est accordée sur le fait que les
jeux violents augmentaient l'agressivité. Le même constat a
été fait concernant le cinéma. Cependant, penser que la
violence dans les films ou dans les jeux est responsable d'actes violents
graves est une erreur. Les jeux s'avèrent être un des
éléments qui, isolément, n'ont qu'un impact minime sur les
passages à l'acte violent. « La violence est un
phénomène multicausal. L'invocation conjuratoire d'une cause et
d'une cause unique n'est jamais une explication pertinente de l'acte violent.
Celui-ci est toujours la résultante d'une multitude de motifs qui
agissent simultanément et conjuguent leurs effets » (Traube,
2002 p.134). « L'ensemble des facteurs de risque que nous avons
présenté montre à quel point l'étude des causes de
la violence est complexe. » (Massé & al. 2006 p. 63) Les
facteurs qui peuvent amener à un acte violent sont nombreux. Nous en
explorerons ici 6 familles : les trois premières concernent des
facteurs intra-personnels (facteurs génétiques, psychobiologique
et intrapsychiques), les deux suivantes concernent davantage la relation
(facteurs de réponse et facteurs relationnels) et le dernier
s'intéressera aux paramètres environnementaux. À chaque
fois, nous découvrirons et testerons sur le terrain, des moyens d'agir
sur ces facteurs. Vous le verrez, il arrive souvent qu'une intervention ait des
effets sur plusieurs paramètres en cause. Selon les situations, un
cocktail bien spécifique de postures et d'actions éducatives
s'avérera efficace pour éviter l'acte violent. Ainsi, les
propositions présentées dans cette partie sont de l'ordre de la
prévention.
3.1 Facteurs
génétiques
Au départ de tout individu, il y a ce que chacun
reçoit à la naissance : un corps physique avec certaines
particularités. Nous avons tous reçu de nos parents un bagage
génétique qui a déterminé la couleur de nos yeux,
de nos cheveux, de notre peau, une prédisposition à certaines
maladies... Mais les gênes ont également une influence notable sur
les comportements.
Neurologues, généticiens et psychiatre
étudient les liens entre gênes et comportements.
Ces études, donnant souvent lieu à des polémiques, n'ont
pas encore donné lieu à un consensus sur le sujet. Le Dr
JoelDehasse (1995) cite notamment le scandale de 1965 autour du dit chromosome
du crime : un chromosome Y supplémentaire qui causerait
l'agressivité. Cette anomalie génétique serait 35 fois
supérieure dans la population carcérale (3,5% contre 0,1% dans la
population générale). Plusieurs études contradictoires ont
mené à l'oubli de cette théorie. La presse à
tendance à exagérer les résultats des études qui
sont menés sur le sujet. Une étude du Dr RoopeTikkanen (2009) sur
les patients alcooliques emprisonnés a fait dire que la moitié de
la population finlandaise serait porteuse du gène de la violence. Le
gène étudié (MAOA) dans une de ses variantes (MAOA-H)
aurait une influence minime sur l'impulsivité. Une autre variante
(MAOA-L) augmenterait les comportements asociaux.
Quoi qu'il en soit, tous les généticiens
s'accordent sur le fait que la violence est un phénomène fort
complexe pour l'attribuer à l'influence des gènes. Si influence
il y a, elle est multigénique et infime par rapport à d'autres
types d'apports. De plus, les avancées constantes
réalisées dans le domaine depuis quelques décennies
empêchent toute conclusion définitive. Le Psychiatre Phillip
Geirwood s'exprime sur l'influence entre gènes et comportement dans un
documentaire de Horel S. &Lentin J. P. (2005). Il y explique les
résultats d'une vingtaine d'études menées sur des jumeaux
monozygotes. D'après lui, les facteurs génétiques ont une
grande influence sur nos comportements. Mais, ajoute-t-il, cela ne justifie
rien : ce sont des gènes de prédisposition, de
vulnérabilité. C'est-à-dire que le gène augmente la
probabilité que certains comportements ou certaines maladies se
développent (comme la schizophrénie), mais ne condamnent en aucun
cas à un développement certain. Le DrGeirwood expliquait
être lui-même porteur d'un gène favorisant le suicide et
d'un autre favorisant l'alcoolo-dépendance sans qu'aucune de ces
pathologies ne se soitdéveloppée. Nombreux sont les porteurs d'un
chromosome Y en plus ou du gène MAOA sous sa variante H ou L sans avoir
développé de comportements particulièrement violents.
DrGeirwood explique que ces tendances génétiques induisent
simplement une vigilance particulière de sa part.
Le fait que les conduites criminogènes les plus violentes
soient le fait de personnes de sexe masculin pourrait faire
penser à une origine chromosomique ou hormonale du problème (cf.
chapitre 3.3). Mais les études menées sur le sujet n'ont pas
amené à un consensus sur le sujet. Il semblerait que ce
phénomène soit davantage lié à des aspects
relationnels, culturels et sociétaux.
Patrick Traube conclut en 2002 que toutes les études
génotypiques menées sur les personnes délinquantes n'ont
pas montré de différence génétique frappante entre
eux et le reste de la population.
Interventions pratiques : revue de la littérature
Bien qu'aucune conclusion notable n'ait été faite
sur le sujet, différents types d'interventions existent. Toutes posent
d'importants problèmes éthiques. Elles sont citées ici par
rigueur scientifique, mais apportent, à l'heure actuelle en tout cas,
peu d'intérêt pour le travail d'éducateur.
Effacer Le terme suppression est
utilisé par Paul Mbanzoulou (2000) pour décrire un retrait
définitif de la société. En pratique, ce retrait
s'effectue par deux moyens : la peine de prison jusqu'au
décès ou dont la durée dépasse clairement
l'espérance de vie de la personne et la peine de mort. Cette idée
se base sur deux concepts carcéraux : celui de punition et de
réinsertion. Le premier conçoit la peine comme un châtiment
mérité et justifié suite à un acte d'une certaine
gravité. Le second concept postule que le condamné est impossible
à réinsérer. La justice estime qu'il n'est pas possible
que cette personne puisse faire partie de la société sans lui
infliger un dommage considérable. En faisant cela, elle met en avant sa
fonction de protection de la société et abandonne sa fonction
éducative de redressement des criminels. Actuellement, une vingtaine de
pays26(*) pratiquent
réellement la peine de mort et douze pays emprisonnent effectivement les
personnes jusqu'à leur décès27(*). La Belgique ne fait pas
partie de ces pays.
Prévention génétique Il est
possible d'agir préventivement en utilisant des données
génétiques. Ainsi, comme l'explique Greiwood (2005), le fait de
savoir que l'on possède une prédisposition plus grande que les
autres à développer un type de comportement ou une pathologie
permet de porter une attention plus particulière aux premiers signes de
l'apparition de la maladie ou du comportement. Pour l'instant, ce principe est
utilisé de manière anecdotique et souvent controversée,
notamment avec les enfants de schizophrènes28(*). Il n'est pas encore, à
ma connaissance, appliqué aux difficultés liées à
la violence.
Sur le terrain : observations et interventions
personnelles
Tous les sujets étudiés sont des hommes ce qui
correspond à la proportion homme-femme dans les prisons
(les femmes comptent entre 3 et 5% de la population carcérale29(*)). À part cela, il ne
m'a pas été donné d'observer l'aspect
génétique des participants au projet d'insertion professionnelle
à l'exception du sujet 2 (porteur d'un handicap mental
léger). Dans plusieurs situations, lorsque le sujet 2 ne
comprenait pas les raisons de comportements qui lui paraissaient
menaçants (regards, haussement de ton, gestes...), il a réagi en
utilisant la violence. Dans ces cas-là, s'il s'agissait d'un malentendu,
une simple explication sur les causes du comportement (exemple :
« il plaisante ») suffisait à l'apaiser. Le sujet 2
a été expulsé de chez sa mère suite à une
dispute durant laquelle il a brisé une vitre. La police est intervenue.
Quand je lui ai demandé quel était le sujet de la dispute, il a
avoué ne pas savoir.
Son comportement n'est qu'indirectement du a des facteurs
génétiques (cause potentielle de son handicap). Il se sent en
danger, il ne comprend pas pourquoi et répond agressivement. C'est avant
tout une manière de réagir et de communiquer qui a
été apprise et qui est utilisée de manière
inadéquate à cause de ses difficultés cognitives. Je l'ai
aidé à faire la corrélation entre l'usage de la violence
et ses difficultés. Une grande partie des problèmes qu'il a eus
(expulsion d'école, expulsion de son domicile, incarcération,
problèmes de santé...) font suite à un accès de
colère de sa part. Nous avons longuement discuté sur le sujet. Il
a décidé de faire des efforts pour réagir autrement dans
ces situations. Un élément me dérange dans cette
intervention. Étant donné ses difficultés cognitives, je
n'ai pas réussi à introduire de la nuance. Un individu sain
arrive à faire la différence entre les moments extrême qui
nécessite de se défendre en utilisant la force (pour sa survie
par exemple) et les situations qui peuvent être résolues
autrement. Comme sa violence lui posait énormément de
problèmes, je l'ai aidé à associer violence et
conséquences désastreuses. Je me sentirais assez mal s'il se
retrouvait dans une situation critique et ne se défende pas. J'ai
dû peser le pour et le contre. Il m'a semblé plus adéquat
de condamner chez lui tout recours à la violence que de ne pas
intervenir.
3.2 Facteurs
psychobiologiques
Depuis le début de l'histoire de l'humanité,
certains produits utilisés par l'être humain sont connus pour
modifier le comportement. La science en a maintenant découvert les
mécanismes : ils agissent sur le cerveau et le
système nerveux grâce à différentes
substances qui affectent la plupart du temps les récepteurs synaptiques.
(Horel et Lentin, 2005)
Par le même principe, chacun peut expérimenter le
fait qu'un vécu psychique intense (comme la colère) s'accompagne
de toute une série de symptômes physiologiques
facilement détectables : tremblement, hérissement
des poils, accélération du rythme cardiaque et respiratoire,
transpiration, changement de couleur au niveau du visage (qui rougit ou deviens
blême), augmentation de la tension artérielle... Certains
pensaient que le vécu psychologique était induit par des
éléments physiques (théorie de Jammes-Lange), d'autres que
les éléments physiques et psychiques n'avaient rien à voir
l'un avec l'autre (théorie de Cannon-Bard). Ces deux idées
appartiennent maintenant au passé. Le concept le plus largement
accepté et vérifié aujourd'hui est que l'un et l'autre se
nourrissent. Des particularités physiques (surtout au niveau de la
chimie intracérébrale) induisent des états
émotionnels particuliers et nos émotions modifient
considérablement le fonctionnement de notre corps grâce aux
hormones notamment. (Traube 2002)
Plusieurs hormones participent aux comportements
violents. Prenons par exemple la sérotonine, l'adrénaline et la
testostérone. On pourrait penser que l'augmentation ou la diminution de
ces hormones aurait un effet direct sur les comportements violents. On a
longtemps pensé que la violence était liée à la
testostérone puisque les comportements criminels les plus violents
étaient dans leur grande majorité perpétrés par de
jeunes individus mâles. L'expérimentation a montré qu'en
pratique, la situation était nettement plus compliquée :
l'injection d'androgène (comme la testostérone) peut avoir des
effets apaisants de même que la prise d'amphétamine (stimulant
artificiel ayant un effet similaire à l'adrénaline) est
utilisée dans le traitement des personnes ayant des problèmes
d'hyperactivité. Le système endocrinien est quelque chose
d'extrêmement complexe, en constante interaction avec lui-même et
avec l'état psychique de la personne.
Les chercheursKuo et Sullivan (2001) de l'université
d'Illinois ont également mis en avant les liens existants entre fatigue
et agressivité. La fatigue, parce qu'elle diminue l'efficacité
des processus cognitif, amoindri notre capacité à gérer
des situations complexes. Ils montrent également les nombreuses
recherches qui ont mis en avant les liens entre fatigue et irritabilité
(Thackray, Bailey, &Touchstone, 1979 ; Warm &Dember, 1986 ;
Caprara &Renzi, 1981 ;Coccaro, Bergeman, Kavoussi,
&Seroczynski, 1997 ; Kant, Smith-Seemiller, &Zeiler,
1998 ;Kavoussi&Coccaro, 1998 ; Stanford, Greve, & Dickens,
1995 in Kuo et Sullivan, 2001). La fatigue diminue également la
capacité d'inhibition des comportements impulsifs (Brady, Myrick,
&McElroy, 1998 ;Markovitz, 1995 ;Tuinier, Verhoeven, & Van
Praag, 1996 in Kuo et Sullivan 2001). Ils démontrent ainsi que les
individus fatigués, mentalement ou physiquement, ont davantage tendance
à utiliser la violence comme mode de communication.
Interventions pratiques : revue de la littérature
Comme lors du chapitre précédent, les interventions
pratiques de ce chapitre posent des problèmes éthiques et ont peu
d'intérêt pour le travail d'éducateur.
Médication L'usage de
médicament psychoactif« permet
d'atténuer ou de faire disparaître une souffrance psychique
(anxiété, dépression, troubles délirants...). On
distingue principalement 4 grandes classes de médicaments : les
hypnotiques (somnifères et sédatifs), les anxiolytiques
(tranquillisants), les antidépresseurs et les neuroleptiques (notamment
les antipsychotiques). »30(*) Ces médicaments sont normalement
utilisés pour éviter ou calmer les comportements violents dans
les cas suivants : en cas de maladie psychique associée (l'exemple
le plus courant pour les éducateurs est l'utilisation de
méthylphénidate (rilatine) pour traiter letrouble de
déficit de l'attention/hyperactivité), en milieu hospitalier ou
dans les lieux ou les comportements agressifs peuvent induire d'importants
risques pour les autres (dans les avions par exemple). On utilise
également des médicaments pour les traitements inhibiteurs de la
libido. Ces traitements visent à réduire le désir sexuel
pour éviter la récidive chez les délinquants sexuels. La
violence est donc traitée par médicament quand celle-ci est
associée d'autres troubles. Il est nécessaire de passer par un
diagnostic médical (psychiatrique) avant de bénéficier de
ces traitements.
Automédication Plusieurs
théories existent (Tréposu 2003, Haxaire 2002, Briefer 2002,
Lecours 2012) selon lesquelles la consommation de produits psychotropes
(drogues, médicaments, alcool...) serait une forme
d'automédication pour faire face aux symptômes de
maladies psychiques, à différents types de souffrances (comme
l'insomnie, la timidité, l'énervement, le stress) ou à des
comportements difficiles à contrôler (comme les accès de
colère qui peuvent mener à des agressions). Il est bien sûr
évident que la consommation de produits psychoactifs (surtout quand elle
est associée d'une dépendance et de syndromes de manque) peut
aussi amener à des comportements violents.
Bien dormir Bien que Kuo et Sullivan
(2001) ont davantage axé leur étude sur les bienfaits de la
nature sur le comportement agressif des citadins, les constatations qu'ils ont
réalisées entre agressivité et fatigue nous amènent
à penser qu'il pourrait être efficace de travailler sur l'un des
éléments prépondérants concernant la fatigue :
le sommeil.
Sur le terrain : observations et interventions
personnelles
Médication Il n'est pas du recours des
éducateurs d'utiliser des médicaments pour les
problèmes de violence. Pourtant, dans la période d'observation,
il m'a été donné d'observer ce type d'intervention.
En décembre, nous cherchions un logement pour le sujet 3
qui s'était fait exclure de l'endroit où il vivait. Nous avions
fait le tour des centres d'accueil de nuit pour personne sans domicile et
avions entendu parler d'un foyer qui étrangement n'était pas
repris sur les listes de foyers bruxellois. Nous avons réussi à
avoir un rendez-vous pour éventuellement inscrire le sujet 3. Nous y
sommes allés et avons rencontré un des éducateurs du
foyer. Celui-ci nous a expliqué sans détour que le travail
éducatif réalisé avec les bénéficiaires
incluait la prise de médicaments psychoactifs (pour tous les
bénéficiaires quelle que soit leur problématique). Nous
avons abandonné l'idée d'y faire loger le sujet 3. Après
avoir fait quelques recherches, nous nous sommes rendu compte que plusieurs
associations avaient déjà essayé de faire fermer cette
institution par des moyens judiciaires. Je ne pensais pas que ce type
d'institution pouvait exister en Belgique.
Dans la même période, le sujet 3 a eu une infection
au niveau de la bouche. Après avoir été à
l'hôpital, nous avons été chercher les médicaments
prescrits. Le sujet 3 a pris en un coup le quadruple de la dose d'antidouleurs
et le triple de la dose d'antiinflammatoire qui avaient été
prescrits. Face à notre étonnement, il nous a expliqué
que, en prison, il en prenait beaucoup plus. Nous avons demandé au sujet
7 qui nous a expliqué qu'en prison, ils donnaient beaucoup de
médicaments. Recherches prises (Stanescu 2007, Mbanzoulou 2000,
Observatoire international des prisons 2013), il s'avère que c'est le
cas en Belgique. Cela a différents objectifs : diminuer les risques
de contagions (puisque la prison est un espace fermé
particulièrement sensible à ce risque), contrôler le
comportement des personnes atteintes de maladies mentales (qui, fautes de
moyens, ne sontpas traités adéquatement) et accessoirement
éviter les comportements violents des prisonniers. J'ai personnellement
été choqué par cela. C'est malheureux d'observer que les
prisons utilisent toutes sortes de moyens discutables et mettent de
côté ceux qui peuvent avoir un impact durable : les moyens
éducatifs.
Automédication Sur les 7 sujets
observés dans les sessions 1 et 2 (d'après leurs dires et nos
observations), 3 (sujets 1, 3 et 6) avaient une consommation
régulière31(*) de cannabis, d'alcool et d'autres drogues, 1 (sujet
7) avait une consommation régulière de cannabis et d'alcool, 1
(sujet 2) avait une consommation d'alcool occasionnelle et 2 (sujets 4 et 5) ne
consommaient ni drogues ni alcool, mais avaient eu par le passé une
consommation qu'ils jugeaient problématique. Cela nous amène
à constater que 85% des participants ont ou ont eu une consommation
régulière.
Nous ne sommes intervenus que lorsque la consommation intervenait
sur le lieu de formation, quand ils arrivaient dans un état de
consommation visible et handicapant pour le travail32(*) ou s'ils nous en faisaient la
demande (ce qui n'est pas encore arrivé). Cela s'est fait par des
recadrages oraux sur le moment ou par des discussions en privé quand le
comportement était récurrent. J'ai personnellement recadré
plusieurs fois le sujet 3 qui arrivait le matin en fumant du cannabis. Ma
relation avec lui n'a jamais été très bonne et il a
très mal pris ces recadrages. C'est un élément que je vais
personnellement travailler dans ma pratique professionnelle : apprendre
à mieux cadrer et à communiquer plus aisément avec les
participants. Je suis actuellement à la recherche d'une formation sur le
sujet.
Il est arrivé une fois qu'une dispute violente
éclate entre le sujet 2 et le sujet 3. Il nous a semblé que les
sujets 1 et 3 avaient, ce jour-là, consommé quelque chose pendant
la pause de midi. Leurs comportements avaient été
particulièrement irritants pour les autres participants. Après
cet évènement et les discussions qui ont suivi, le sujet 1 n'est
plus revenu dans le même état. Nous sommes intervenus
auprès des sujets 1 et 3 parce qu'ils arrivaient en consommant du
cannabis. Ces interventions ce sont avérées efficaces. Je ne
pense pas qu'ils consommaient moins, mais ils le faisaient plus
discrètement. C'est pour nous une réussite parce que, dans un
contexte professionnel, ce sont des comportements qui ne pardonnent pas. Pour
que notre intervention ait du sens pour eux, elle doit concerner directement le
milieu professionnel. En dehors de cela, nous considérons qu'ils ne sont
pas des enfants et qu'ils font ce que bon leur semble. C'est une attitude
professionnelle que nous avons mise en place à la session 2. Je suis
personnellement satisfait de ce changement parce que cela me permet de mettre
une limite claire à mes interventions. Une limite qui a du sens pour le
public.
Intervention sur la qualité du sommeil Sur les
7 sujets observés, 4 (sujets 1,2, 3 et 7) présentaient
régulièrement une fatigue importante33(*) à cause de
comportements volontaires (aller volontairement dormir très tard ou
passer une nuit blanche) et 3 (sujets 4, 5 et 3) du a des
éléments involontaires (difficultés à trouver le
sommeil). Cela revient à dire que 85% des sujets observés avaient
des problèmes de sommeil.
Nous avons essayé d'intervenir sur la qualité des
nuits de 3 sujets (1, 3 et 7) étudiés (et d'un participant qui
n'est pas repris dans cette étude). Cela s'est fait de manière
spontanée, en leur en parlant tout simplement. D'après leur dire
et nos observations, cela s'est avéré efficace pour le sujet 7
(parce que c'est arrivé avec une prise de conscience
générale d'un comportement qui dérivait doucement vers un
retour à la criminalité) et pour le participant qui n'est pas
repris dans cette étude (pour n'avoir jamais été en
prison).
Lors de l'intervalle entre les sessions 3 et 4, nous allons
probablement réfléchir à une manière d'intervenir
de manière plus structurée sur la qualité de sommeil de
ceux à qui cela pose problème.
3.3 Facteurs
intrapsychiques
Des six familles de facteurs de cette étude, celle-ci est
la plus variée. Les facteurs intrapsychiques comprennent tout ce qui est
interne au fonctionnement psychologique de l'individu. On y retrouve son
éducation, les éléments de son histoire,
l'instruction34(*) qu'il a
reçue, ses croyances, ses souvenirs, ses sentiments, ses
émotions, ses enjeux, ses objectifs, ses mécanismes cognitifs,
ses perceptions... Ces
éléments sont pour la plupart interconnectés
et interdépendants.
Traube (2002) essaye de schématiser ce mélange
complexe sans parvenir à y intégrer tous les
éléments.
Images extraites de Traube (2002) pp.58-59
Émotions et sentiments Commençons par
étudier certaines émotions et sentiments qui
peuvent avoir une influence sur les comportements violents. Parmi celles qui
favorisent l'expression agressive,nous aborderons le sentiment de
dévalorisation, d'impuissance, l'anxiété, la frustration,
la colère, l'orgueil et la fierté. Parmi celles qui permettent
d'éviter l'agressivité, nous étudierons la tristesse,
l'empathie et la compassion. Nous essayerons surtout de bien distinguer le
ressenti intérieur et l'expression, l'actualisation de ce ressenti. La
colère (sentiment élémentaire de
réaction face à un danger ou une menace) est une réponse.
Elle n'apparait qu'après l'apparition d'une menace (qui peut aussi venir
de la personne elle-même) et est liée à l'instinct de
survie. Chez l'être humain cependant, son accumulation, les
mécanismes de dérivation et son utilisation pour des
éléments symboliques vont la détourner de son but
premier (la survie). Ce sentiment est généralement celui qui
précède le plus directement l'agression. Sa gestion va être
un point décisif dans la diminution de la violence. Souvent confondue
avec la première, la frustration amène souvent
à la colère. Elle est définie comme un état
d'insatisfaction induit par le fait de ne pas avoir pu réaliser un
désir. Dès 1939, Dollard et Miller (in Traube 2002) sont
arrivés, après expériences, à la conclusion que la
violence naissait de la frustration. Sans vouloir tomber dans une
causalité simpliste, on ne peut nier l'importance de ce sentiment. Une
quantité considérable de frustration peut naitre d'agressions
subies ou d'autres facteurs externes (cf. chapitres 3.5 et 3.7). En se basant
sur leurs recherches, Berkowitz introduit en 1962 (in Traube 2002),
l'anxiété dans l'équation. Selon lui,
toutes les frustrations ne génèrent pas de pulsions agressives.
Seules celles qui provoquent de l'anxiété vont amener, dans
certains cas, à la violence. Ce « trouble émotionnel se
traduisant par un sentiment indéfinissable
d'insécurité »35(*) pourra provoquer la violence selon l'amplitude de
cette anxiété, selon l'importance de l'évènement
dans l'histoire de l'individu, selon son incapacité à trouver des
stratégies satisfaisantes pour modifier la situation frustrante, selon
le sentiment de danger provoqué par cette insécurité. Le
désir36(*) a aussi une part importante. L'envie de satisfaire un
désir et surtout l'incapacité de pouvoir différer cette
satisfaction va promouvoir l'usage de la violence. C'est ici qu'intervient le
sentiment d'impuissance37(*) à modifier une situation frustrante. Le
désir est là, mais la possibilité de modification absente.
Si on arrive à trouver de l'espoir, à trouver des
stratégies de résolution, la frustration peut se transformer en
énergie positive capable de mobiliser l'individu. Si ce n'est pas le
cas, elle se transforme en énergie destructrice ou en facteur
d'inhibition de l'action et d'apathie généralisée.
L'orgueil38(*) et la fierté39(*) arrivent parfois en
réaction à ce sentiment d'impuissance. Le sujet percevant sont
incapacité fantasme une surpuissance capable d'affronter toutes les
situations. La particularité de ces sentiments est de modifier la
perception du réel. C'est une croyance qui va rendre l'individu
incapable d'évaluer correctement ses capacités et
possibilités. Elle vient masquer le sentiment d'impuissance, mais ne
diminue pas la probabilité d'avoir recours à la violence, bien au
contraire. L'individu n'arrivera pas à penser aux désavantages
que peut avoir son comportement. Le sentiment de
dévalorisation40(*) pourra lui aussi intervenir quand l'individu n'est
pas reconnu, que ses sentiments sont niés ou qu'il pense être
impuissant. Si l'individu ne se considère pas, il aura davantage
tendance à penser qu'il ne vaut pas la peine et à ne pas prendre
en compte les conséquences négatives que peuvent avoir ses actes
sur lui-même (blessure, sanction, emprisonnement...). Ainsi, la violence
semblera plus souvent être une solution adéquate. Il est
impossible de définir précisément quel cocktail de
sentiment peut mener à la violence. Tous ceux cités ici ont un
impact certain, mais ils ne justifient pas à eux seuls le recours
à la violence. (Traube, 2002) La gestion des sentiments a
néanmoins un impact considérable sur la diminution des
comportements agressifs. Tous créent une prédisposition, mais le
recours à la violence n'est jamais systématique. Il existe de
nombreux sentiments qui vont diminuer la probabilité de l'usage de la
violence. Parmi ceux-ci, la tristessepeut être
utilisée comme alternative à la colère. Face à une
frustration, un choix souvent inconscient s'opère entre colère et
tristesse. En termes d'action, cela reviendra à lutter ou à
abandonner. Hahusseau (2006) et d'autres (Goleman, 1999 ; Niel,
1960 ; Dowden et al. 1999) insistent sur l'importance d'accepter ses
sentiments. La colère peut naitre d'un refus d'accepter sa tristesse.
Même si la colère peut amener à l'usage de la violence, la
tristesse n'est pas systématiquement une alternative positive. Elle peut
mener à une inhibition de l'action et à une apathie face aux
difficultés. La colère quant à elle est loin d'être
exclusivement destructrice. Elle peut dans de nombreux cas amener à une
lutte justifiée et une révolte assez saine face à des
injustices par exemple. L'empathie41(*) quant à elle va
s'avérer être un outil formidable pour développer des
interventions. En apprenant à se mettre à la place des autres,
l'individu évalue également l'impact émotionnel de ses
actions chez les autres (Desbiens et Demers in Massé et al., 2006). La
souffrance causée à autrui peut ainsi devenir quelque chose
à éviter. La compassion42(*) viendra donc en
complément pour aider à faire ce choix et ne pas désirer
voir l'autre souffrir. (Traube 2002)
Éducation, représentations et
croyances La violence a une part d'inné, d'inhérent
à l'espèce humaine et à son appartenance au règne
des animaux (homo sapiens : mammifère de l'ordre des primates).
Selon Laborit (1994), l'instinct animal de survie, de prédation, de
compétition et d'angoissedétermine l'agressivité.
Malgré cela, et au-delà des sentiments, l'individu se construit
un système de croyances et une façon de
percevoir le monde fortement liés aux éléments
qu'il a reçu à travers son éducation.
L'usage de la violence est quelque chose qui s'apprend (Traube, 2002 ;
Massé et al. 2006). La famille, les professeurs, les amis,
l'environnement social et les médias vont construire des
représentations chez le sujet. Selon les discours, mais
surtout selon les exemples qu'il observera, la personne va considérer
l'usage de la violence. Chez certains, l'éducation va réellement
façonner une propension à l'agressivité. Si l'individu a
appris qu'être violent ne posait pas de problèmes moraux ou
sociaux, s'il a appris que c'était une stratégie efficace pour
satisfaire ses désirs, s'il a appris qu'il n'était pas
nécessaire d'attendre entre le désir et sa satisfaction, rien ne
l'empêchera d'utiliser la violence sans modération. Cela peut se
faire d'une manière anodine quand, par exemple, des parents
réagissent aux crises de colère d'un enfant en satisfaisant son
désir. L'usage de la violence que la personne va observer ou subir, va
renforcer la croyance qu'être violent fait partie de la normalité.
Le sujet va ainsi reproduire ce comportement. De plus, si les
éléments moraux de son environnement approuvent la violence,
celle-ci aura toutes les chances de faire partie de sa vie. Il est à
noter que les exemples réels auront beaucoup plus d'impact que les
exemples fictifs. Voir des proches se battre ou même voir des
scènes de violence dans un journal parlé aura plus d'impact que
les scènes de guerre d'un film de fiction (Traube 2002).
Chez les enfants comme chez les adultes, les différentes
expériences vécues et l'éducation (sous toutes ses formes)
vont façonner la perception du monde. L'individu pourra
percevoir le monde et les personnes qui l'entourent comme menaçants ou
sécurisants. Les évènements de la petite enfance et la
relation avec la mère auront un impact important (Traube 2002). Si, pour
une raison ou une autre, le sujet considère (à tort ou à
raison) les autres individus ou un groupe d'individus comme menaçant, il
interprètera leurs attitudes, leurs gestes et leurs paroles à
travers un prisme déformant. Il s'attend à ce que les autres
soient hostiles, il interprétera leurs actions comme étant de
nature à lui nuire et pourra réagir agressivement (Vanaubel,
2010). D'un point de vue extérieur, le sujet sera l'agresseur. De son
point de vue et à cause de sa perception déformée, il sera
en train de se défendre. L'orgueil et la fierté, comme nous
l'avons vu, vont également agir comme des prismes déformant la
réalité et amenant plus facilement l'individu à recourir
à la violence.
Instruction et capacités intellectuelles Des
mécanismes cognitifs entrent aussi en jeu. Des
études menées à Philadelphie et à Copenhague ont
mis en avant le lien entre faible QI et usage de la violence. (Krug, Dahlberg,
Mercy,Zwi et Lozano-Ascencio, 2002) D'autres facteurs concordants intervenaient
dans l'étude comme un faible niveau socio-économique. Ross et
Fabiano (1985 in Vanaubel, 2010) ont émis l'hypothèse que les
jeunes étaient agressifs à cause de leur impulsivité. Ils
pensent qu'ils ont de réelles difficultés à mettre un
espace de réflexion entre un stimulus et la réaction à ce
stimulus.
Dans le même registre, de très nombreuses
études ont démontré le lien existant entre
criminalité et niveau d'étude. Les institutions
internationales les plus sérieuses en font une priorité (UNESCO,
OCDE). Même si les mécanismes de cet état de fait sont,
à ma connaissance, encore mal étudiés, le constat est sans
appel : plus un individu à un haut niveau d'étude, moins il
commettra d'actes criminels. (National Office of Literacy and Learning, Human
Resources and Social Development Canada, 2007; UNESCO, 1994; OCDE, 2007; Puech,
2006). Sans vouloir faire le raccourci entre criminalité et violence,
d'autres études (Tardif, 2005) font le même constat entre niveau
d'études et usage de la violence. Je peux émettre plusieurs
hypothèses plausibles. La première étant que l'individu
instruit à généralement une meilleure situation
socio-économique. Cet aspect peut avoir un impact (cf. chapitre 3.7). La
deuxième étant que l'instruction améliore les
capacités cognitives. L'instruction pourrait permettre d'installer un
espace de réflexion entre le stimulus et l'action. Elle pourrait aussi
rendre la personne plus apte à évaluer les situations et à
réfléchir à d'autres façons moins destructrices de
réagir.Mbanzoulou (2000) explique que le fait de réussir une
formation qualifiante est le meilleur moyen d'éviter la
récidive.
Interventions pratiques : revue de la littérature
Il existe plusieurs types d'intervention qui peuvent servir tant
à prévenir la violence qu'à la traiter chez des personnes
qui y ont recours habituellement. Certaines des actions éducatives
présentées ici auraient pu trouver leur place dans le chapitre
4.2 : résultantes intrapsychiques. Et inversement, pour
éviter les répétitions, nous aborderons les pistes
suivantes dans le chapitre 4.2 : apprentissage à différer la
satisfaction, développement moral, dérivation et gestion des
émotions.
Verbalisation Plusieurs types d'intervention (cf.
chapitre 5) vont baser leur action sur une amélioration des
capacités de communication. Parmi celles-ci, l'une des plus
fréquentes est l'amélioration de la capacité à
utiliser la parole pour exprimer ses émotions et ses difficultés
avant que celles-ci n'explosent en action violente. Il est nettement moins
violent de dire « je veux te tuer » que d'essayer de le
faire. Cela permet dans de nombreux cas de faire l'économie de l'action
et de diminuer considérablement la tension intrapsychique. Il y a donc,
selon Dhaene (2012) et Traube (2002), un grand intérêt à
apprendre aux personnes à verbaliser43(*), surtout dans les moments de
tension. C'est un élément de base de plusieurs méthodes
d'apprentissage de gestion des émotions (cf. chapitre 4.2) et la part
fondamentale de presque tous les travaux d'analyse en psychologie. De plus, on
a observé chez les détenus auteurs de crimes violents (Traube,
2002 ;Mbanzoulou, 2000) une pauvreté dans l'utilisation du langage
verbal.
Empathie Nadia Desbiens et Sarah Demers (in
Massé et al., 2006) proposent une intervention permettant de
développer l'empathie. Elles identifient trois
composantes à cette habilité sociale (Feshbach et Feshbach, 1982
in Massé et al., 2006) la reconnaissance du sentiment, l'adoption de la
perspective d'autrui et la réponse émotive. Elles vont travailler
l'écoute active, la capacité d'imagination, des stratégies
d'observation, de compréhension et d'identification des émotions.
La part de leur programme (destiné à l'origine aux enfants)
adaptable pour un public adulte utilise des jeux de rôles dont le but est
d'obtenir une rétroaction. Par exemple, un participant met en
scène une situation où il ressent quelque chose (tristesse,
colère, gène...) et son partenaire, en utilisant l'écoute
active, lui fait part de ce qu'il perçoit en lui (« tu es en
colère ? »). Avec l'habitude, les participants
s'entrainent à reconnaitre et à prêter attention aux
sentiments des autres.
Imagination L'imagination, le
fantasme44(*), permet de
ne pas avoir besoin d'un recours à l'action violente (Traube, 2002).
Tout comme la verbalisation, s'imaginer en train de violenter quelqu'un qui
nous énerve peut permettre de faire l'économie de l'action et de
diminuer considérablement la tension intrapsychique. On a aussi
constaté une pauvreté imaginative chez les personnes
incarcérées (Mbanzoulou 2000). Il est possible de
développer l'imagination en utilisant des activités culturelles
et artistiques. La visualisation, utilisée dans différentes
pratiques de relaxation (Lesouple, 2014), permet également de travailler
l'imagination.
Vécu émotionnel Parmi les interventions
les plus adaptées pour les éducateurs, surtout pour travailler
l'intrapsychique, il est conseillé de traiter et de reconnaitre
le vécu émotionnel du public avec lequel on travaille.
Cela se fait simplement en discutant, en écoutant les
bénéficiaires, mais surtout en acceptant leurs émotions
quelles qu'elles soient. Il est parfaitement humain de ressentir des sentiments
comme la rage, la haine, le dégout, la colère ou la frustration.
Le problème arrive quand ces sentiments sont actualisés de
manière à nuire aux autres (Traube, 2002). L'écoute
active45(*), mais aussi
une observation des bénéficiaires (afin de déceler
d'éventuelles difficultés non verbalisées) permet de
mettre cela en pratique efficacement.
Réflexion Born et Chevalier (in Lepot Froment,
1996) proposent une technique pour apprendre à mettre un temps
entre stimuli et action et améliorer le traitement de
l'information. Elle s'articule en trois attitudes : accepter que
les problèmes fassent partie de l'existence, reconnaitre une situation
problématique quand elle se produit et se rendre compte qu'il est
possible de ne pas réagir immédiatement. Pour cela, 4
étapes d'apprentissage : définir et analyser le
problème rationnellement, produire des pistes de solution, en choisir
une et évaluer son impact. Ils utilisèrent cette méthode
auprès d'adolescents délinquants. J'ai trouvé leur
intervention très pertinente, mais il manquait, selon moi, un
élément faisant défaut dans beaucoup d'interventions
pensées et testées par des universitaires. En voyant la
façon dont ils intervenaient sur le terrain, j'ai remarqué qu'ils
avaient fait peu d'efforts pour adapter leur message au public ciblé.
C'est un élément qui parait anodin, mais qui peut ruiner une
intervention. Si nous n'adaptons pas notre vocabulaire et notre manière
de communiquer, on risque tout simplement de ne pas réussir à
passer notre message. Personnellement, j'essaye de toujours faire cet effort
pour améliorer la réception du message que je tente de faire
passer.
Sport L'utilisation du sport comme
moyen d'évacuer les tensions intrapsychiques n'est plus à prouver
(Pichot, 2005 ; Sempé, Gendron, Bodin, 2007 ; Mbanzoulou,
2000). Il n'est pas indispensable d'utiliser les sports de combat à cet
effet. Ils peuvent en effet avoir un double aspect contradictoire :
apaisant et renforçant la violence. Par contre, tous les sports dits de
frappe (football, tennis, squash...) où un objet est frappé sans
que ce cela exprime une forme de violence interpersonnelle, sont très
efficaces (Traube 2002). Ils permettent de diminuer la tension intrapsychique
et d'exprimer colère et frustration sans nuire à autrui.
Sur le terrain : observations et interventions
personnelles
Vécu émotionnel Une des parties
importantes de notre travail à Kick Off est de traiter et
reconnaitre les émotions ainsi que le vécu de nos
participants. Nous avons, pour pouvoir réaliser cela,
dégagé du temps et de l'espace. Il y a presque toujours un espace
(bureau, terrasse ou cave aménagée avec des canapés) et un
travailleur qui peut se rendre disponible pour avoir une discussion en
privé. Après avoir fait un relevé du journal de bord de la
session 2, j'ai constaté que nous avons relevé une moyenne de 1,2
entretiens spontanés par jour (malheureusement, le journal de bord ne
reprend pas systématiquement ces conversations). Et c'est sans compter
les entretiens individuels prévus dans le planning (un par mois
minimum). Les pauses sont aussi des moments privilégiés pour ces
conversations. La moitié de l'équipe et 72% des sujets
étudiés fument, ce qui ouvre un espace supplémentaire pour
les discussions informelles. Nous sommes également très attentifs
à l'attitude et au non verbal des participants. Nous proposons,
dès que nous observons des contrariétés, un mal-être
ou un énervement, la possibilité d'en parler. Dans ces moments,
nous pratiquons l'écoute active, ne portons aucun jugement sur les
sentiments et les aidons à verbaliser, autant que possible, ces
sentiments. De notre observation, de leurs avis (évaluation du projet
par les participants, avis des sujets 1, 2 et 7 et d'autres participants du
projet), ces discussions leur ont permis de se calmer et d'éviter de
s'énerver. Les sujets abordés parlaient beaucoup de frustration
(vis-à-vis de difficultés personnelles) ou d'énervements
(dans les relations entre participants ou avec l'équipe). Nous avons
considérablement augmenté cet aspect du projet dans la session 2
et espérons pouvoir continuer ainsi dans la session 3.
Réflexion Parmi les difficultés
abordées dans les discussions en privé, de nombreuses
s'associaient d'une recherche de solution. Dans de nombreux cas, l'idée
privilégiée était assez peu réfléchie.
À part chez le sujet 6, nous avons observé chez tous les sujets
des difficultés à mettre un moment de réflexion
entre le stimulus et la réaction. Voici, simplement pour donner
une idée, quelques paroles de participants.
· Sujet 2 « Ou alors, je peux commettre un
vol ». « Si je le revois, je vais le tuer. »
· Sujet 3 « Ah, moi je vais me remettre à
déconner, de toute façon c'est ça qu'ils [justice]
veulent ».
· Sujet 1 « De toute façon je ne sais pas
payer alors à quoi ça sert que j'ouvre la
lettre ? »
· Membre de l'équipe « Je peux t'aider pour
quelque chose ? » Sujet 5 (sérieusement) « Peut
être bien. Trouve-moi une kalach46(*), moi je vais tuer tout le monde ici. »
Nous n'avions pas, à ce moment, connaissance du travail de
Born et Chevalier (in Lepot-Froment, 1996) et pourtant, la méthode que
nous utilisions était similaire. Nous leur apprenions à installer
une analyse du problème et une réflexion pour la
solution. Nous procédions tout d'abord (après avoir fait
la reconnaissance des émotions) en les aidant à rationaliser et
à analyser le problème : qu'est-ce qu'il s'est passé
(faits) ? Qu'est-ce qui t'a posé problème ? Ensuite,
nous leur demandions de penser aux conséquences de la réaction
qu'ils avaient imaginée ou qu'ils utilisaient : que va-t-il
t'arriver quoi si tu fais ça ? Et, troisièmement, nous leur
demandions s'ils pouvaient penser à des solutions plus productives et
efficaces. Ce n'est qu'à ce moment et si le participant n'avait pas
trouvé de solution satisfaisante, que nous apportions des idées.
Progressivement, une partie des participants se sont mis à faire
spontanément cette gymnastique intellectuelle. Selon l'avis et
l'observation de l'équipe, les sujets 1, 2, 3 et 7 ont
démontré une amélioration de la capacité de penser
avant de réagir. Toujours selon l'avis et l'observation de
l'équipe, ce sera durable pour le sujet 7 qui avait déjà
commencé à acquérir cette compétence avant de
participer au projet.
Sport L'utilisation du sport a
été prévue dès la genèse du projet Kick Off.
De toutes les activités qui avaient été prévues au
départ, c'est la seule (avec l'embellissement du quartier cf. chapitre
3.7) qui a été gardée. Les participants font un
après-midi de sport toutes les deux semaines (une fois par semaine en
session 1). Nous pratiquons essentiellement la boxe, mais aussi le football, le
fitness et d'autres sports. Le but de cette activité est double :
d'une part, elle vise à évacuer les tensions et d'autre part
à remettre les participants en bonne condition physique. Aucun des
sujets n'a mentionné dans l'évaluation l'effet apaisant de
l'activité sportive (seul un autre participant l'a fait). Ils ont par
contre parlé de l'effet revigorant qu'avait cette activité. Nous
ne sommes pas en mesure d'évaluer l'effet de cette activité sur
les comportements violents. Nous faisons confiance aux différentes
études menées sur le sujet. Par contre, nous avons disposé
dans la cave de nos locaux un sac de boxe accessible par les
participants quand ils le désirent. Ils peuvent l'utiliser (et
l'utilisent) afin de se calmer s'ils sont énervés. Ce sac a
été utilisé au moins une fois par tous les sujets sauf le
sujet 4 (à l'exception du sujet 6 qui est parti avant son installation).
Nous avons pu donc constater l'efficacité de ce procédé.
Lors de la session 1, nous avons remarqué que les participants se
moquaient de celui qui allait utiliser le sac quand il était
énervé. Ce type d'attitude était vraiment
inadéquat. Se moquer de quelqu'un au bord de l'explosion est une
attitude très risquée. Aux sessions 2 et 3, j'ai donc
insisté (en leur expliquant pourquoi) auprès des participants
pour qu'ils ne fassent pas cela. Ils ont respecté cette injonction. De
plus, comme la cave était souvent utilisée en session 2, le fait
que quelqu'un descende ne paraissait pas inhabituel. Quand nous percevions
qu'une personne était en train d'utiliser le sac, nous attendions un peu
et puis l'un de nous allait parler avec lui. Seul un point nous a
questionnés quant à l'utilisation de ce sac. Deux des
participants se sont blessés les mains à force de frapper dans ce
sac tellement leur colère était importante. Une fois, un membre
de l'équipe a dû arrêter l'un deux. Ils ont cela fait
malgré la disponibilité de gants et de bandages faits pour la
boxe. L'hypothèse que j'émets est que, d'une certaine
manière, ils désiraient souffrir ou se blesser.
Instruction En tant que responsable de la remise
à niveau de la session 2, j'ai pu observer que les participants avaient
un faible niveau d'instruction. D'après les tests
réalisés avec eux, ils avaient un niveau de français et de
mathématique équivalent (sujets 4, 5 et 6) ou inférieur
(sujets 1, 2, 3 et 7) à celui un enfant de 6ème
primaire. Ils possédaient tous leur CEB47(*) et certains avaient leur CESI48(*). Les sujets 1, 2, 4, 6 et 7
n'avaient pas d'adresse email et ne savaient pas comment utiliser ce moyen de
communication indispensable aujourd'hui à une recherche d'emploi. Dans
le projet Kick Off, il est prévu de faire de la remise à
niveau en utilisant une pédagogie différente de celle
utilisée dans les écoles classiques. En effet, ils ont tous eu
une relation plus ou moins compliquée avec les institutions scolaires et
peuvent facilement se bloquer quand nous utilisons des pédagogies
classiques. Nous utilisons donc des pédagogies actives.
Le but de la remise à niveau que nous faisons avec eux est de les
réhabituer à utiliser l'écrit, les ordinateurs et à
calculer afin que leurs lacunes dans ces domaines ne soient pas un obstacle
pour pouvoir commencer une formation. L'un des buts du projet est de pouvoir
ramener les participants vers le circuit classique de formation. Il est
prévu dans le projet Kick Off de pouvoir accompagner ceux qui le
désirent pour passer leur CESS49(*) via le Jury Central. « Les jurys, une
filière alternative d'épreuves, vous permettent d'obtenir un
diplôme en dehors des voies traditionnelles. Chaque année, les
communautés organisent des sessions d'examens pour l'enseignement
fondamental, l'enseignement secondaire (général, technique,
artistique et professionnel) et pour certaines filières de
l'enseignement supérieur non-universitaire. »50(*)Aucun des participants n'a,
jusqu'à aujourd'hui, désiré y avoir recours. Pour faire
cette remise à niveau, nous utilisons quatre moyens différents.
Il y a d'abord un projet d'écriture. Les participants
écrivent ensemble un petit livre sur des sujets décidés
démocratiquement. Dans ce livre, chaque participant écrit une
partie du texte. Ils commencent par choisir un sujet, ensuite ils font des
recherches. Ils se mettent à écrire le texte sur papier puis avec
un ordinateur.Ils choisissent des illustrations sur internet et l'équipe
les aide à corriger le texte. Tous ont été très
impressionnés par le résultat obtenu, mais certains ont eu du mal
à trouver un intérêt à cette démarche.
Imagesextraites du livre produit par le projet de remise
à niveau de la session 2
Deuxièmement, nous profitons des chantiers que nous
réalisons avec eux pour faire des exercices de calcul ancrés dans
la pratique de terrain. Il faut par exemple mesurer et calculer la surface d'un
mur pour connaitre la quantité de peinture à acheter. Il faut
faire un calcul de proportion afin d'adapter une recette de cookies pour
pouvoir en produire une centaine.
Troisièmement, en faisant leur CV et leurs lettres de
motivations, ils travaillent leurs compétences en informatique et en
français.
Pour finir, selon leurs demandes, nous réalisons des cours
particuliers dans certains domaines. Durant la session deux, plusieurs
participants (4 dont le sujet 1 et 2) ont fait des demandes pour travailler
l'écriture, les pourcentages, la formulation de phrases, le calcul
écrit... Nous avons pu répondre à leur demande en
utilisant les pauses et le moment de l'arrivée le matin pour entrainer
ces compétences. Cela s'est avéré efficace, mais fatiguant
pour le membre de l'équipe qui s'en occupait. Il n'était pas
possible, quand l'activité était plus intense, de s'en occuper.
Pour la session 3, nous avons donc décidé d'utiliser le temps
consacré aux entretiens individuels pour faire cela. En effet, ce temps
(un après-midi par semaine) était plus que suffisant pour que les
référents puissent s'entretenir avec les participants dont ils
étaient responsables. Ainsi, nous pourrons pour la remise à
niveau, réaliser des accompagnements plus individualisés.
Valeurs Pour clôturer ce chapitre, je parlerai
de ce que nous avons perçu de leur éducation et de leur
système de valeurs. C'est bien évidemment un
élément individuel qui est différent chez chaque sujet
étudié et pour chaque comportement. J'ai eu l'impression de
pouvoir quand même dégager trois types de fonctionnement par
comportement. Pour la plupart, un apprentissage des règles
légales et des habitudes sociales positives avait été fait
à un moment de leur vie. Ils avaient plus tard décidé
d'agir à l'encontre de cet apprentissage. Cela avait pour
résultat qu'ils se trouvaient à plusieurs moments dans un dilemme
à devoir faire un choix entre une attitude ou l'autre (sujets 7, 4, 2 et
3). Pour d'autres, l'apprentissage n'avait pas été fait ou ils
avaient appris, dès leur plus jeune âge, que le comportement
asocial (comme l'usage de la violence) était positif. Cela se marquait
assez fort chez le sujet 2, qui ne considérait pas l'usage de la
violence comme problématique jusqu'à ce qu'on lui montre les
conséquences de ses actes. Chez le sujet 1, le non-respect des
règles financières ou administratives paraissait normal. Il
expliquait, par exemple, dans un entretien d'embauche qu'il avait
falsifié son certificat de bonne vie et moeurs, et ce, sans que cela lui
paraisse inadéquat. Quand nous leur posions des questions, il
apparaissait que cela avait fait partie de leur éducation. Le
troisième type de fonctionnement (sujets 3 et 6) se repère chez
des sujets qui ont des valeurs morales clairement définies (en
opposition avec les valeurs acceptées par la société) et
qui, dès que c'est nécessaire, savent feinter avec adresse les
valeurs morales socialement acceptées. Pourquoi faire cette distinction
en 3 modes de fonctionnement ? Parce qu'une intervention peut avoir un
excellent effet sur l'un et pas sur l'autre. À un moment de la session
2, nous avons observé que le sujet 7 (fonctionnement 1)
commençait à dériver à nouveau vers des
comportements criminels. Dans un entretien individuel, son
référent lui a fait part de cette observation et des
conséquences qui pouvaient en découler. Le sujet 7 a
été immédiatement d'accord avec ce rappel à l'ordre
et a retrouvé un comportement dans la légalité. Le sujet 7
était en train d'hésiter entre des valeurs opposées, il
fallait juste pousser un petit peu pour que la balance penche du
côté des valeurs socialement acceptées. Pour le sujet 2
(fonctionnement 2), nous avons dû lui faire "découvrir" ce que ces
comportements violents pouvaient causer comme dommage (surtout à
lui-même). Avec le sujet 1 (fonctionnement 2), nous avons essayé
un recadrage classique (comme avec le sujet 7). Nous nous sommes heurtés
à une totale incompréhension de sa part. Ce qui nous semblait
logique (ne pas mentionner des actes illégaux dans un entretien
d'embauche) ne l'était pas pour lui. Il s'est mis en colère. Avec
les sujets 3 et 6 (fonctionnement 3), les interventions se sont
avérées beaucoup plus compliquées à mettre en
place, car il nous était difficile de savoir si le sujet feintait ou
était sincère. Personnellement, j'étais très
heureux quand j'arrivais à avoir avec eux une conversation que je
percevais comme sincère. C'est quelque chose que mes trois
collègues sont arrivés à faire beaucoup mieux que moi
(avec les sujets 3 et 6entre autres). Peut-être s'agit-il simplement
d'affinités ou d'aversions interpersonnelles. Malgré cela, je
suis actuellement à la recherche de techniques qui pourraient me
permettre d'avoir des relations plus aisées avec les participants. Je me
demande si, personnellement, je ne fonctionne pas un peu comme eux avec des
comportements qui manquent de sincérité. C'est un
élément auquel je prête maintenant une attention toute
particulière. J'espère pouvoir l'améliorer.
3.4 Facteurs de
réponse
Subir Comme nous l'avons vu
précédemment, l'utilisation de la violence n'est jamais gratuite
et, à côté de la violence visible que nous étudions
ici, il existe encore de nombreuses autres formes d'agressions. La violence
visible et explosive est la plupart du temps une réaction. C'est de la
violence réactionnelle à une ou plusieurs
agressions qui ont été perçues par celui qui réagit
(Traube 2002). La violence gratuite n'existe pas. Il n'existe que des violences
dont nous ignorons les causes. La pulsion violente, qui résulte souvent
de violences subies, a besoin d'être extériorisée sinon
elle créer des dégâts intérieurs. Quand le sujet ne
peut exprimer sa pulsion envers celui qui l'a fait souffrir, il pourra
l'exprimer envers quelqu'un ou quelque chose d'autre. Cela donne l'impression
d'une violence imméritée ou gratuite, mais il s'agit d'un
mécanisme de dérivation qui a des causes.Dollard et Miller ont
réalisé les premières recherches systématiques sur
le sujet en 1939 (in Traube 2002). Ils sont arrivés à la
conclusion que la violence naissait de la frustration. Le sujet subissait une
agression. Cet acte produisait un sentiment de frustration qui
générait à son tour de l'agressivité. Cette vision,
trop simpliste et linéaire, a le mérite de démontrer que
toute forme de violence à tendance à générer de la
violence chez ceux qui la subissent. Cela permet d'invalider les
méthodes et les interventions basées sur la violence comme
méthode pédagogique (émotionalshock training cf. chapitre
4.2).
Envahir La notion de territoire
(symbolique ou réel) et d'espace vital (cf. chapitre 3.7) intervient
aussi puisque l'envahissement de celui peut provoquer une réponse
agressive. Or, les limites de ce territoire et l'importance de certains de ces
aspects pour l'individu dépendent de chaque personne. Ainsi, un individu
pourra être très attaché à une tâche
spécifique qu'il réalise dans son travail. Le fait qu'un autre
réalise cette tâche sera vécu comme l'envahissement d'un
territoire symbolique. Pour un autre individu, cet aspect pourra avoir beaucoup
moins d'importance.
Cacher Un conflit apparent cache souvent une
violence beaucoup plus importante, mais
cachée. Ainsi, l'explosion de violence d'un
élève qui se met à frapper ses camarades sera souvent
punie sur-le-champ par l'intervenant (surveillant, professeur,
éducateur...). Un observateur plus attentif aurait pu voir les moqueries
répétées des camarades et les tentatives de
l'élève pour résoudre le problème autrement. Mais
l'intervenant (qui surveillait plus de 100 personnes dans la cour de
récréation) n'avait pas la possibilité de percevoir tout
cela.
Percevoir Il faut aussi prendre conscience, comme
nous l'avons vu au chapitre 1.3, que la violence est plus une affaire de
perception et d'effet que d'intention. Il arrive constamment que quelqu'un se
sente agressé par une personne qui n'a aucune attention belliqueuse. La
violence perçue, surtout si elle n'est pas
exprimée, peut constituer une bulle qui explose avec une grande
agressivité en étonnant tout le monde. Si elle ne communique pas,
il est fort possible que la victime soit la seule à percevoir la
violence qu'elle subit. Ainsi, sa réaction face à cette violence
sera incomprise d'un point de vue extérieur et la victime sera
considérée comme étant l'auteur.
C'est à ce moment qu'intervient un élément
interne : la susceptibilité. La personne
susceptible va se vexer ou s'offenser plus facilement que d'autres. Son seuil
de tolérance face aux agressions est bien plus faible que chez les
autres. Cela peut être provisoire (on parlera alors davantage
d'irritabilité) ou durable.
Interventions pratiques : revue de la littérature
Marquer Mbanzoulou (2000) aborde bien les
différents freins à la réinsertion des
détenus qui sont perçus comme de véritables agressions de
leur part. Le fait, par exemple, qu'une période d'incarcération
rende la recherche d'un emploi si compliquée peut être
comparé à un marquage définitif au fer rouge. C'est
surtout le cas en Belgique où les condamnations sont inscrites sur un
document (extrait du casier judiciaire) presque systématiquement
demandé pour être engagé quelque part. Le traitement
reçu de la part de la justice, des forces de l'ordre et du personnel de
prison contient lui aussi sa part de violence. Sans prendre les cas
extrêmes (et pourtant fréquents) de violence physique de la part
des policiers et des gardiens, l'utilisation abusive de la sanction ainsi que
des formes de dédain, de catégorisation négative ou
d'insultes peuvent être considérées comme de
véritables agressions. Mbanzoulou (2000) propose une meilleure
conscientisation des différents acteurs (surtout les gardiens
de prison) quant au rôle positif qu'ils peuvent jouer dans la
réinsertion des délinquants. Il prône un changement en
profondeur des éléments qui peuvent faire ressentir à
l'ancien détenu qu'il est condamné à vie pour les actes
qu'il a commis. Son point de vue (plutôt du côté de la
structure pénitentiaire et de la justice) ne lui permet malheureusement
pas de voir que les propositions de suivi après peine qu'il aborde sont
souvent mal vécues par les anciens détenus qui voient cela comme
une condamnation après la condamnation. Dans l'ensemble, ses
propositions restent cependant très utiles et vont vers une humanisation
du système judiciaire et carcéral.
Sur le terrain : observations et interventions
personnelles
Frustrer De notre côté, nous sommes
postés en tant qu'observateurspartiels (puisque
situé du seul côté des anciens détenus) des actions
du monde policier, judiciaire et carcéral envers les participants du
projet. Nous pouvons constater l'importance des frustrations
que différents éléments du système font
vivre aux anciens détenus. Le peu de chances sur le marché de
l'emploi est un élément déterminant. Ils savent qu'ils
pourraient facilement se faire de l'argent, mais luttent pour rester dans la
légalité tout en se retrouvant dans des situations
économiques parfois critiques (les sujets 2, 3 et 4 se sont
retrouvés sans domicile cet hiver durant la session 2). Si à ce
moment, arrive un quelconque évènement frustrant de la part d'une
institution, ils peuvent avoir l'impression que tout est fait pour qu'ils
replongent dans la criminalité. Parmi tous ces évènements,
j'en citerai quelques-uns. Les sujets 1 et 3 ont reçu par erreur, durant
la session, l'ordre de rentrer en prison. Ils ont contacté leurs avocats
qui leur ont dit d'aller jusqu'à la prison se présenter. Ils y
ont été, sans être sûrs de pouvoir en ressortir. Ce
n'est que sur place qu'on leur a confirmé que c'était bien une
erreur. Un autre évènement : des policiers nous ont
contactés parce qu'ils enquêtaient sur le sujet 7
(déjà victime avant son incarcération de
harcèlement policier) simplement parce qu'il n'était plus en
prison. Un troisième : quand nous avons demandé un soutien
à l'assistante sociale (CPAS) du sujet 2 parce qu'il s'est
retrouvé à la rue, sa réaction a été de dire
qu'il n'était peut-être plus sous sa juridiction (et donc qu'ils
allaient le priver de revenus). Ce sont de petits exemples qui, pris
isolément sont gérables, mais qui, en s'accumulant,peuvent
vraiment donner aux sujets une impression de persécution. J'arrive
à comprendre quand, parfois, je les vois énervés,
révoltés ou désespérés. C'est loin
d'être facile pour eux.
Assister Nous intervenons de différentes
manières. Nous offrons une aide administrative et
stratégique efficace face à ces évènements.
Même si cette intervention peut ne pas donner les résultats
escomptés, le fait qu'on essaye de les aider les rassure sur nos
intentions. Dans leurs relations avec les institutions, nous sommes
perçus comme étant là pour les aider.
Cela peut avoir beaucoup d'importance surtout si leurs relations
précédentes n'ont pas été positives. (cf. chapitre
3.6). Pour nous, c'est essentiel de bien traiter les participants et
d'être perçus, autant que possible, comme des
éléments bienveillants. Cela nous permet, quand c'est
nécessaire, de les secouer ou nous fâcher sur eux sans que cela
soit trop mal perçu.
Au-delà du soutien administratif, nous donnons une grande
importance à leurs difficultés émotionnelles
(comme expliqué au chapitre précédent). Quand
nous observons que quelque chose ne va pas, qu'ils semblent de mauvaise humeur
ou préoccupés, nous parlons systématiquement avec eux (en
privé si possible). Nous les aidons à gérer leurs
frustrations. Cela a, selon nous, un impact important en termes de
prévention étant donné que les relations entre eux sont
toujours assez tendues. D'après le journal de bord du projet (qui ne
reprend qu'une partie de ces discussions), dans le courant de la session 2,
nous avons effectué 66 interventions de ce type. Nous intervenons ainsi
avant que la situation ne dégénère et permettons aux
participants d'exprimer la violence dont ils pensent être la cible.
3.5 Facteurs
relationnels
Comme expliqué dans l'introduction, la violence est un
mode de communication. En tant que tel, elle intervient la plupart du temps
dans une relation. Nous allons donc étudier les
différents facteurs relationnels qui peuvent amener à être
agressif.
Selon Traube (2002), le simple fait de vivre en
société, le fait qu'homo sapiens est une espèce sociale,
produit certaines formes de violence. Bien que vivre avec autrui titille
souvent nos pulsions agressives, les passages à l'acte se font
proportionnellement assez rarement. C'est grâce à toute une
série de mécanismes de dérivation, mais aussi parce que
les sociétés et les groupes humains vont mettre en place
différents mécanismes pour se protéger de cette violence
générée par les relations sociales. Les groupes vont,
parmi d'autres moyens, utiliser le bouc émissaire ou l'ennemi
extérieur (cf. chapitre 2.1.2).
Coupable et victime On voit souvent la
victime comme un élément passif qui subit la
violence de l'agresseur. Le chapitre précédent montre
déjà que c'est loin d'être le cas. Essayons
néanmoins de postuler que la victime n'a pas été l'auteur
de violences non perçues. En général, les conflits sont
mis en scène par deux protagonistes (auteur et victime), mais l'analyse
transactionnelle y ajoute une tierce partie : le sauveur. Ce qui est
intéressant dans cette analyse c'est que les trois protagonistes peuvent
retirer une forme de bénéfice psychologique de leur position.
Même s'il s'agit d'une réflexion qui peut choquer, des
études (selon Traube, 2002) ont montré deux traits presque
toujours présents chez les victimes systématiques de
violences : faible estime de soi et aptitude très limitée
à s'affirmer. Cela montre bien que la violence n'est pas simplement
l'affaire d'un auteur coupable à traiter, mais bien d'une relation
complexe ou toutes les parts jouent un rôle actif. La violence est un
agencement relationnel qui se joue en termes de distance.
Distance et existence Pensons un peu la
distance relationnelle à ses extrémités.
D'un côté la distance maximale : absence totale de relation,
de communication et de considération. Le sujet est totalement
ignoré. Pour l'autre, il n'existe pas. De l'autre côté, la
proximité extrême : il n'y a plus de toi ou de moi, il y a
nous, une entité en symbiose totale. Dans les deux cas, le
résultat est le même. Psychologiquement, le sujet disparait. Il
est symboliquement anéanti. Dans ces relations
extrêmes, le sujet aura recours à la violence comme un
mécanisme nécessaire de survie. (Traube 2002) D'un
côté, le sujet est violent pour qu'on reconnaisse son existence et
de l'autre, il sera agressif pour empêcher l'autre de le faire
disparaitre. C'est ainsi qu'apparaissent souvent des formes de violence
extrême. Tous les êtres humains ont besoin de
considération. Ils ont besoin d'être reconnus par les
autres. Si aucune considération positive n'est accordée
(sympathie, intérêt, affection), le sujet préférera
une reconnaissance négative (antipathie, haine, colère) à
l'absence totale de considération. Si les autres ne nous reconnaissent
pas, nous n'existons pas. Il est fréquent d'entendre chez les auteurs
d'actes extrêmement violents (tueurs en série par exemple) qu'ils
voulaient qu'on parle d'eux.
Obstacle et présence Dans la relation, l'autre
peut être perçu comme un obstacle au "je" (Traube
2002). L'autre m'empêche de faire ce que je veux, d'obtenir ce que je
veux, sa volonté fait obstacle à la mienne. Ainsi, le principe
basique de la liberté (« La liberté des uns s'arrête
là où commence celle des autres » John Stuart Mill51(*)) peut être vu de cette
manière : l'autre m'empêche d'être totalement libre.
Ainsi, selon Vincent Rodriguez (La violence dans la citadelle et l'auto-renvoi
in Traube 2002) beaucoup de personnes établissent leurs relations sur le
mode de la destruction mutuelle ou du moins sur le contrôle. Il faut
vaincre et dominer l'autre. Elles y trouvent une forme d'équilibre, de
sens. On peut donc trouver des personnes (par exemple dans des conflits de
voisinage) pour qui le conflit est une manière d'exister. Il apporte un
sens, un but, des sensations... Il remplit l'espace, il donne de la vie
là où, sans lui, il n'y aurait qu'ennui.
Imitation et influence La présence de
modèles dans l'environnement de la personne va jouer un
rôle prépondérant. Nous sommes tous influencés par
les autres, par leur exemple. Certaines personnes, parce que nous les aimons ou
que nous les admirons, vont jouer le rôle de modèle et ce, qu'ils
soient présents dans nos vies réelles (amis, proches,
connaissances) ou de manière plus virtuelle (jeux, films, histoires,
célébrités...). Si ces modèles ont des
comportements violents, la violence sera considérée comme un
élément positif. Si, au contraire ces modèles ont des
comportements prosociaux, ils seront imités positivement.
Comme nous allons le voir au chapitre 3.7, la
présence d'autres personnes va influencer les
comportements violents. Les foules ou le fait d'être en groupe vont avoir
un effet proche de celui de l'huile sur le feu. Elles ne causent pas les
flammes, mais les amplifient. Dans d'autres cas, la présence d'autrui
peut servir de contrôle social et empêcher l'auteur de se sentir
libre de ses actes.
Interventions pratiques : revue de la littérature
Il est parfaitement logique de penser que pour avoir des
relations qui fonctionnent bien, une bonne communication est
l'élément le plus important. Cet aspect sera abordé dans
le chapitre 5. La verbalisation (cf. Chapitre 3.4) va
permettre d'éviter le recours à la violence et les
différentes formes de considération
(félicitations, reconnaissance du vécu, attention, sympathie...)
(cf. chapitre 5 et 3.4) vont pouvoir faire diminuer considérablement
l'usage de la violence pour être reconnu.
Pour les autres Un autre facteur relationnel
important est le facteur de protection sociale. Le fait
d'avoir des relations sociales positives, des personnes au sein de la famille
et en dehors (Vanaubel, 2013), qui nous considèrent et auxquelles ont
tient va agir comme élément freinant à la violence. La
violence est un élément assez destructeur des relations (cf.
chapitre 4.1).Si on arrive à y penser, on sait qu'en agissant violemment
on risque de perdre ou de détruire l'objet de son affection. Celui qui
n'a pas dans son entourage de liens sociaux positifs peut penser ne rien avoir
à perdre. Ainsi des amis, une famille, un(e) compagnon (compagne), mais
aussi des intervenants sociaux peuvent aider le sujet à se
contrôler. Pour Mbanzoulou (2000), il est essentiel que les travailleurs
sociaux aident les prisonniers à maintenir leurs relations sociales
pendant qu'ils sont incarcérés. C'est un élément
indispensable à la réinsertion. Les peines d'emprisonnement
(surtout si elles sont longues) ont un effet désocialisant très
négatif pour les individus. Cyrulnik (in Lecompte 2005) explique
l'importance du lien émotionnel pour aider le sujet à surpasser
et affronter de grandes difficultés. Ainsi, en tant que travailleur
social, le lien émotionnel positif, la relation de confiance, avec les
bénéficiaires peut s'avérer indispensable. Il est
également possible de favoriser l'apparition et l'utilisation de
modèles positifs en plaçant dans l'environnement des sujets des
personnes à cet effet. On peut, par exemple, présenter des
individus ayant eu un vécu semblable et s'étant sorti très
positivement.
En lien avec le facteur de protection sociale, Rousseau, Dionne
et Deslandes (in Massé &al., 2006) parlent de l'importance de ne pas
séparer les personnes problématiques de leur groupe social :
l'inclusion. Elles démontrent les effets positifs tant
pour la personne que pour le groupe qui l'accueille. En effet, cela aide les
uns et les autres à développer positivement leurs
compétences et leurs habiletés sociales.
Vivre ensemble Bowen, Desbiens, Gendron et
Bélanger (in Massé &al., 2006) consacrent un chapitre entier
à l'acquisition et le développement des habiletés
sociales. Bien que le texte vise les enfants et les adolescents,
plusieurs principes sont utilisables avec le public visé dans cette
étude. Notamment le fait que les pairs, la vie en groupe, constitue en
elle-même une forme d'intervention efficace pour aider à
développer les habiletés sociales. Ils utilisent beaucoup de jeux
de rôles et de jeux coopératifs pour que les sujets
acquièrent ces habiletés. Parmi celles-ci : savoir
écouter, s'exprimer à la première personne, s'exprimer ne
respectant les autres, savoir se calmer, contrôler son
impulsivité, différencier émotions de perceptions,
travailler en équipe, reconnaitre les besoins des autres, demander de
l'aide, affirmer ses droits, évaluer ses capacités sociales et
refuser l'influence négative des autres.
Changer de place J'ai expliqué dans
l'introduction que je n'aborderai pas dans ce travail la gestion des conflits.
Je ferai une petite exception pour amener ici un élément
important. Dans la gestion de conflit sans personne tierce, une des techniques
efficaces est de modifier la façon dont les intervenants
conçoivent le problème. En général, dans un
conflit, on perçoit le problème comme étant un
élément au milieu de la relation qui nuit à celle-ci. Il y
a toi, il y a moi et entre nous deux, un problème. Ce problème
nous oppose, nous sépare. Pour résoudre le conflit, Traube (2002)
propose de changer cette logique relationnelle. Il y a toi, il y a moi et il y
a un problème qui nous dérange tous les deux. Pouvons-nous unir
nos forces pour le résoudre ? De cette manière, en
extériorisant le problème, on transforme complètement la
situation. D'un obstacle à la relation entre deux intervenants, on passe
à une difficulté à résoudre ensemble.
Faire souffrir Le dernier point que j'aborderai est
davantage un mécanisme social automatique (et assez négatif)
qu'une intervention éducative. Il n'empêche que les travailleurs
sociaux (éducateurs et autres) doivent en avoir conscience parce
qu'intervenir sur ce point peut avoir des risques. Comme expliqué dans
l'introduction, les groupes utilisent parfois des boucs
émissaires, des souffre-douleurs, pour canaliser leur violence.
Pour éviter que la violence interne au groupe ne le détruise,
tous les individus vont focaliser leur agressivité sur un des leurs.
Supprimer une logique de souffre-douleur peut donc avoir des
conséquences complexes sur le groupe. Le philosophe Lévinas (1974
in Traube, 2002) propose une porte de sortie à cette logique en
modifiant notre rapport à l'autre, en le basant plus sur le don que sur
la possessivité. L'idée semble intéressante, mais il lui
manque, selon moi,une méthode d'application pratique.
Sur le terrain : observations et interventions
personnelles
Vivre ensemble Pour le projet Kick Off, la
vie en commun, en groupe, reste le meilleur outil
éducatif que nous possédions. Le fait de faire partie d'un groupe
restreint, hétéroclite et en constante interaction apporte de
nombreuses difficultés qui sont riches d'enseignements. Nous faisons
presque exclusivement des activités en groupe (à l'exception des
stages en entreprise et des entretiens individuels). Qu'ils aient des
difficultés relationnelles ou pas, les participants travaillent par la
vie en commun, leurs habiletés sociales. Quand nous percevons des
difficultés plus importantes chez un participant, nous l'aidons à
travailler ce point. Au fil de la session, nous avons pu observer que la
capacité de chaque participant à travailler en
équipe, à faire avec les particularités et les
difficultés des autres, avait grandement évolué. Lors de
leur propre auto-évaluation, les participants ont fait le même
constat. Le conseil des participants a été un
outil précieux pour travailler tout ça. Les participants y ont
abordé beaucoup plus de difficultés interpersonnelles que nous
pensions. Les entretiens individuels et les discussions informelles nous ont
aussi donné l'occasion d'aborder ces points difficiles.
Cible privilégiée Dans les deux
premières sessions, nous avons observé que le mécanisme du
bouc émissaire s'installait. Le groupe a à
chaque fois canalisé sa violence sur un des participants (qui ne font
pas partie des sujets étudiés). La particularité de ces
individus était d'avoir des comportements relationnels très
particuliers : ils avaient tendance à prendre beaucoup de place et
à irriter tous les autres (y compris les membres de l'équipe).
Ils semblaient vraiment chercher à provoquer l'irritation des autres
comme s'ils étaient assez à l'aise dans le rôle que le
groupe leur avait donné. Nous n'avons pas essayé de supprimer ce
type de fonctionnement surtout à cause du fait que la réaction du
groupe nous paraissait justifiée. Nous faisions bien sur attention
à ce que la violence exprimée restait dans les limites de
l'acceptable (surtout de l'avis de la personne visée). Si l'individu
"bouc émissaire" se plaignait, nous intervenions auprès des
autres. Avec le recul que ce travail m'apporte, je me demande si c'est une
position correcte du point de vue éthique. J'observerai avec attention
ce qui se passera dans la session 3 pour voir si ce schéma se
répète.
Différences Quand nous recrutons le public,
nous essayons d'avoir le plus possible de mixité
(origines, sexe et passé). Le nombre de participants portant un
bracelet électronique est normalement limité à deux par
session. Avoir un groupe mixte est pour nous un point important avec
d'éviter la ghettoïsation des participants. Avoir
différentes cultures, différents modes de fonctionnement,
différentes problématiques permet de pratiquer une forme
d'inclusion : c'est une excellente manière de favoriser
l'apprentissage de compétences sociales positives. Nous avons des
participants qui ont des problématiques de maladie mentale, de handicap
mental, de justice, de sans-abrisme... Le groupe de participants de la session
3 nous semble moins hétéroclite que celui des sessions 1 et 2.
Cela m'inquiète un peu. Comme nous avons observé la formation de
sous-groupes dans les autres sessions, nous essayons cette fois-ci de limiter
le phénomène en ayant systématiquement recours au tirage
au sort pour établir les équipes. Les stages en entreprise sont
également un excellent moyen de pratiquer une forme d'inclusion.
Lien de confiance Un point extrêmement
important de notre travail est d'établir une solide relation de
confiance avec les participants. Il est essentiel qu'ils se rendent
compte que tous les actes que nous posons avec eux sont empreints d'une
sincère bienveillance. Ils le perçoivent assez rapidement par
différents moyens. Le soutien administratif que nous leur donnons, en
résolvant parfois des problèmes avec eux qui leur posent
d'énormes difficultés (comme une domiciliation (sujet 2),
l'obtention d'un revenu (sujet 2 et 3), l'étalement d'une dette (sujet 1
et 6)...) les rassure. Le fait que nous respections scrupuleusement le secret
professionnel leur permet de nous faire confiance. Nous leur demandons
systématiquement leur avis avant de transmettre quelque information que
ce soit. Pour donner un exemple, la police nous a contactés pour obtenir
des informations sur le sujet 7. Nous avons refusé de les leur donner et
avons prévenu le sujet 7 qui a arrangé ce problème avec
son avocat. Ce sont de petites choses qui font penser à notre public que
nous sommes là pour eux, dans leur intérêt. Nous respectons
aussi leur libre arbitre. Nous ne prenons pas, dans la mesure du possible, de
décisions pour eux. Pour ceux qui ont vécu en prison, où
presque tout est décidé à leur place, c'est un grand
changement. Nous leur portons une attention particulière parles
entretiens individuels, les apprentissages en privé et les discussions
informelles. Ils savent que nous sommes disponibles pour eux. Nous les
considérons en les félicitant et en signalant chaque
progrès réalisé, en acceptant leurs difficultés
quelle qu'elles soient, en écoutant leurs demandes, en ne les jugeant
pas... Toutes ces attitudes me permettent aussi d'avoir confiance en eux. Je
sais, à partir de quelques semaines avec eux, que je peux laisser mon
portefeuille ou mon téléphone portable trainer sans prendre de
risques. Ce sont des choses qui montrent que nous sommes réellement
bienveillants avec chacune de personnes participant au projet. Il
s'établit donc une relation assez profonde avec eux. Cela peut avoir de
nombreuses conséquences positives, mais cette relation est d'assez
courte durée : les sessions durent 4 mois. Les sujets 1 et 2 (ainsi
que d'autres participants) auraient vraiment voulu continuer dans le projet. Le
sujet 3 a expliqué au sujet 7 qu'il n'osait plus revenir nous voir parce
qu'il nous avait manqué de respect et qu'il en avait honte. Nous avons
un peu peur de créer un lien trop fort en sachant que nous allons le
rompre d'une certaine façon, mais c'est aussi grâce à la
courte durée des sessions que nous pouvons nous investir autant dans la
relation. En tant que référent du sujet 2, j'ai été
amené à réaliser avec lui des démarches
administratives qui ont été couronnées de succès.
Il m'a confié, à un moment qu'il ne faisait plus confiance
à personne à part à moi. Cela m'a choqué
étant donné que la relation professionnelle que j'avais avec lui
allait s'arrêter rapidement. C'est un peu difficile aussi pour eux
d'observer qu'ils ne sont pas traités de la même manière
par d'autres intervenants sociaux. La responsable du projet a demandé
que nous ayons un contact mensuel avec chaque participant pendant les 6 mois
suivant la session afin de ne pas les laisser brusquement et afin de mesurer
les effets du projet à moyen terme. J'ai personnellement peur qu'ils
refassent des demandes de soutien que nous ne serons pas en mesure de
satisfaire. J'ai peur de créer une relation de dépendance qui
pourrait leur nuire.
Cibler le comportement Quand nous observons une
difficulté ou un conflit interpersonnel, nous essayons, autant que
possible, de focaliser l'attention sur le problème, sur
les comportements et non sur les acteurs. De cette manière, on a une
difficulté factuelle que nous pouvons résoudre au lieu d'avoir
une difficulté interpersonnelle, un conflit. Cela s'avère assez
difficile. Lorsque nous faisons cela, celui qui a quelque chose à
reprocher préfère focaliser son attention sur la personne et la
condamner dans son ensemble. Par contre, celui à qui on reproche quelque
chose est beaucoup plus enclin à travailler sur le problème.
C'est arriver avec les sujets 2 (problème de paresse), 6
(problème de moqueries) et 3 (problème de manque de respect
envers un participant). Après que le sujet s'était engagé
à faire des efforts, il était important de communiquer cela
au "plaignant". Sans cela, il continuait à faire des reproches sans
percevoir les efforts.
S'inspirer Nous avons voulu, pour la session 2 du
projet, faire appel à Patrick Henderickx. C'est un ancien criminel
repenti qui est devenu écrivain et qui lutte actuellement contre la
maltraitance des enfants. Il lui arrive de faire des interventions dans des
écoles ou dans les prisons. Nous pensions que son vécu pouvait
servir d'exemple, de modèle positif, pour les
participants. Il n'était malheureusement pas disponible durant la
période de la session 2. Nous n'y avons pas repensé en
préparant la session 352(*). En réalisant ce travail, j'ai pensé
à un type d'intervention que je proposerai à l'équipe
quand l'occasion se présentera (probablement entre les sessions 3 et 4
du projet). Les participants réalisent chaque session des stages en
entreprise. Nous choisissons les lieux de stages en fonction de leur projet
professionnel. J'ai pensé que nous pourrions également rechercher
des maitres de stages qui ont eu des parcours difficiles (qui sont
passés par la criminalité et/ou la prison) et qui s'en sont
complètement sortis. Même s'il est probable que ce soit difficile
à mettre en oeuvre, cela pourrait favoriser une identification, une
projection positive. De cette manière, nous placerions des
modèles positifs dans l'environnement du sujet.
3.6 Facteurs
situationnels et environnementaux
Après avoir exploré les facteurs internes à
l'individu et ses relations, nous allons étudier les
paramètres de l'environnement qui peuvent favoriser
l'apparition de la violence. Ce sont les facteurs liés à
l'espace, au moment et aux particularités de la situation
dans laquelle l'acte violent apparait. Certains quartiers de toutes
les grandes villes sont connus pour être moins sûrs, plus violents.
Il est possible d'imputer une part de responsabilité à des
facteurs intra-individuels des habitants (comme l'éducation), mais le
fait que ce type de difficulté existe dans les villes du monde entier
pointe du doigt un problème bien différent.
Qui est responsable ? Pour commettre des actes
violents, il faut un individu disposé (pour différentes raisons
que nous avons vues) et un environnement propice à l'expression de la
violence. Les expériences menées dans les locaux de
l'université de Yales par Stanley Milgram (1974
cité parGregorio Billikopf Encina, 2003) ont bien démontré
ce principe. Dans cette expérience, des individus se voyaient intimer
l'ordre d'infliger des décharges électriques (pouvant être
mortelles) à un complice de l'expérience (qui simulait la
douleur). L'ordre était donné par une personne portant blouse
blanche similaire à celle des médecins. L'expérience a
montré à quel point la présence d'une figure
d'autorité reconnue pouvait influencer les individus à commettre
certains actes. 65% des personnes ont été jusqu'à infliger
des décharges mortelles. L'élément interne aux personnes
qui a eu le plus joué a été le sentiment de
déresponsabilisation. La personne ne se sentait pas responsable
puisqu'une autorité supérieure (le scientifique) lui a
ordonné de poser cet acte. Le résultat est passé à
2,5% quand la personne pouvait choisir l'intensité du choc.
Dans la famille des facteurs déresponsabilisants, Traube
(2002) cite tout ce qui permet de se sentir anonyme, non
reconnu : obscurité, masque, faire partie d'une foule, s'exprimer
anonymement sur internet... Se sentir anonyme renforce l'idée de
non-responsabilité et le sentiment d'impunité. La prison est l'un
des milieux où l'on déresponsabilise le plus les personnes. Les
prisonniers vivent dans un environnement où tout est pensé et
organisé, où le moindre geste de la vie quotidienne est soumis
à des règles et des décisions extérieures et
où la moindre démarche nécessite une demande
d'autorisation. Mbanzoulou (2000) montre bien l'effet que cela a sur les
prisonniers, surtout s'ils ont de longues peines. Ils perdent progressivement
leurs aptitudes liées au sentiment de responsabilité et de libre
arbitre. Or ces aptitudes vont s'avérer indispensables lors de leur
sortie. Ces facteurs vont accroitre la possibilité d'expression de la
violence.
Favoriser, déclencher et renforcer Cela nous
amène à classifier les facteurs environnementaux en trois
types (Traube 2002). Les facteurs favorisants vont
augmenter la probabilité de l'apparition d'un acte violent. Les
facteurs déclenchants sont ceux qui, sur le moment,
vont déclencher l'acte. On pense, souvent à tort, qu'ils
s'avèrent être une cause suffisante à l'apparition de
l'acte. Le troisième type, les facteurs
renforçants vont quant à eux augmenter l'amplitude de
l'acte violent. Ils vont faire en sorte que l'action soit plus violente. Je
vais prendre un exemple : X se moque d'Y devant les autres et Y
réagit en le frappant. Dans cette situation, le facteur
déclenchant est la moquerie. Un climat de méfiance présent
dans le groupe depuis quelques jours est un facteur favorisant. Sans cela, la
moquerie aurait pu tomber à plat. La présence des autres va
être un facteur favorisant. Y est affecté par leur présence
et a plus à "prouver" que s'il était seul avec Y. Il
réagit donc de manière plus violente.
Sans loi Le sentiment
d'impunité est un autre facteur favorisant. Savoir que
l'acte qui est posé ne va être puni d'aucune manière
augmente les probabilités que cet acte soit commis. Ainsi, les milieux
où règne une absence de règles ou de figures
d'autorité et où les personnes n'ont pas été
responsabilisées sont plus propices à la violence.
Espace La notion de territoire apparait aussi chez
Traube (2002). Chez l'animal comme chez l'homme, on peut retrouver ce
comportement : l'individu ou le groupe dispose d'un espace (réel ou
imaginaire) qui est le sien. L'envahissement de cet espace provoquera
anxiété puis agressivité. C'est le cas de la maison d'une
famille, de la chambre de l'adolescent, du quartier d'une bande urbaine... Mais
c'est aussi et surtout notre espace vital personnel : un
espace dans lequel chaque individu se sent à l'aise. L'espace vital
comprend la distance interpersonnelle et aussi la possibilité d'avoir
des moments de solitude, d'intimité : c'est un peu notre bulle. Si
la bulle est envahie ou constamment réduite, la personne peut
développer de l'anxiété et de l'agressivité. Cela
peut agir comme facteur favorisant, mais aussi comme facteur déclenchant
(un envahissement, une approche ou un contact physique déclenchant
l'agressivité). Ce territoire peut aussi prendre une forme symbolique
comme celle d'une compétence dans un milieu professionnel. Quand un
collègue fait ce qui devrait être de mon ressort, je me sens
envahi.
Que faire ? Dans les autres facteurs
favorisants, nous pouvons retrouver l'inactivité.
Être inoccupé, ne rien avoir à faire, va augmenter la
probabilité d'avoir recours à la violence. (Traube, 2002 ;
Mbanzoulou 2000) C'est très facile à observer chez des enfants
qui s'ennuient. Ils se cherchent rapidement les uns les autres et on observe
souvent une escalade qui finit par mener à des actes violents. Ce n'est
pas un hasard si les quartiers les plus violents des grands centres urbains
sont aussi ceux qui ont les taux de chômage les plus importants.
Pauvreté Dans le même registre, nous
pouvons trouver les ressources économiques. Les personnes qui sont dans
une situation socio-économique faible et surtout qui
n'ont pas d'espoir de voir cette situation s'améliorer utiliseront plus
facilement la violence. Cela met en jeu le manque d'espoir, la morosité
et la jalousie. L'idée qu'on n'a rien à perdre ou que cela ne
peut pas être pire fonctionne comme renforçant et favorisant
Météo Observons maintenant quelques
caractéristiques physiques du milieu qui ont un effet
sur le comportement : certaines matières comme le béton,
certaines couleurs comme le rouge, une température élevée,
un niveau d'humidité élevé, l'absence d'éclairage
naturel, un temps orageux... Tous ces éléments ont d'après
Traube (2002) citant des études du centre de recherche en
médecine routière en Suisse, un impact favorisant et
renforçant sur l'agressivité et la perte de self-control.
Haut les mains D'après les expériences
de Berkowitz et Lepage (1967), la présence visible
d'armes a également un impact renforçant et favorisant.
Il est à noter ici l'effet que peut avoir un geste en geste en
particulier : l'index pointé vers le haut ou vers la personne. Il
existe des psychologues (Lesouple 2014) qui démontrent que l'on associe
inconsciemment ce geste avec une arme et que l'on se sente ainsi menacé.
Quand on perçoit sur soi l'effet que ce geste peut avoir dans une
discussion, on ne peut qu'agréer avec cette affirmation.
Foule en colère Tout individu plongé
dans un groupe perd un peu de son autonomie
émotionnelle et de son sentiment de responsabilité (Van Waas
2011). Les foules peuvent donc présenter un facteur de risque important.
La combinaison du facteur "foule" avec d'autres facteurs s'avère
particulièrement explosive. Le groupe fonctionne surtout comme facteur
renforçant.
Cocktail La particularité de certains milieux
réputés violent, comme les prisons ou les quartiers
défavorisés des villes, est de rassembler plusieurs de ces
facteurs : surpopulation donc manque d'espace et groupes,
inactivité, situation économique faible, peu de nature, sentiment
d'impunité, absence d'autorité, présence d'armes... Cela
en fait un cocktail potentiellement explosif.
Interventions pratiques : revue de la
littérature
Interventions politiques Les interventions existantes
sur le milieu sont légion et elles ne feront pas toutes l'objet d'une
étude approfondie dans ce travail. Chacun des facteurs cités
ci-dessus peut donner lieu à une modification de l'environnement de la
part des autorités compétentes. Je citerai l'adaptation de
l'éclairage public qui a également un grand impact sur le
sentiment d'insécurité. Les mesures de surveillance et de
présence accrue ont un impact : présence policière,
caméras de sécurité ou gardiens de la paix. Un logement
décent, une instruction publique efficace et une amélioration de
la situation économique des habitants font parties des mesures
classiques. Des mesures pour l'emploi, mais aussi pour l'occupation des jeunes
(comme les centres de jeunes) s'avèrent aussi efficaces. Il n'y a
finalement que sur l'humidité et le temps orageux que le pouvoir
politique n'a aucune prise. Rappelons que les facteurs
environnementaux ne sont pas suffisants pour expliquer le recours à la
violence. Ces mesures peuvent réduire le phénomène, mais
elles auront peu d'efficacité si elles ne sont pas accompagnées
par d'autres actions. Je m'attarderai davantage sur l'étude de 3 types
d'interventions.
Responsabilisation Comme nous l'avons vu, tous les
facteurs qui induisent un sentiment de déresponsabilisation peuvent
être travaillés. En tant qu'éducateur, on peut soit
travailler sur les mécanismes externes comme la surveillance soit faire
évoluer les dynamiques internes. En développant des
comportements, on peut faire en sorte que ce sentiment de
responsabilité fasse partie intégrante du groupe ou de
la personne. Il ne dépendra donc plus d'éléments comme la
présence de caméras de surveillance. Il existe aujourd'hui de
nombreuses manières d'enseigner la responsabilité (Massé
et al., 2006). Elles passent presque toutes par une augmentation de l'autonomie
des individus. C'est le cas d'une grande partie des pédagogies actives
telles celles développées par Célestin Freinet (Pain,
2007) ou Alexander Neill (1960). Elles postulent qu'en donnant de
manière spécifique plus de libertés et de
responsabilité, on favorise un développement de l'utilisation
responsable de la liberté, de l'intériorisation des règles
et de la vie en commun. Elles utilisent avec efficacité des techniques
de concertation démocratique pour mettre en place les règlements
et résoudre les problèmes de la vie en communauté. Lemire
(in Mbanzoulou, 2000) propose de développer des établissements
pénitenciers éducatifs pour certains détenus. Ils seraient
plus démocratiques et axés sur la réinsertion. Mbanzoulou
(2000) explique aussi la frilosité des prisons à laisser se
développer des éléments du droit du travail comme les
syndicats. Il propose aussi plusieurs idées pour éviter l'aspect
déresponsabilisant des prisons comme la création d'espaces
autogérés destinés au cantinage53(*) et à la
résolution de difficultés administratives.
Le travail fait la santé Dans beaucoup de
prisons du monde, le travail est utilisé comme moyen de
pacifier la vie quotidienne. Outre son important aspect occupationnel, le
travail permet d'éviter que le prisonnier ne se laisse aller
psychologiquement. Il a une valeur éducative. Il apprend à
travailler et à garder un rythme de vie. Il a aussi une grande valeur
pour la réinsertion de la personne puisqu'il permet d'apprendre un
métier et de se constituer un petit capital pour la sortie.
D'après Mbanzoulou (2000), sa valeur est incontestable, mais ses
modalités doivent encore être améliorées.
Nature Kuo et Sullivan (2001) insistent sur l'apport
que peuvent avoir les environnements naturels sur le
comportement humain. Ils proposent avec d'excellents arguments, d'augmenter la
présence d'éléments naturels dans la ville et prouvent
également l'impact positif de visites régulières jusque
dans les forêts, les montagnes et les campagnes.
Sur le terrain : observations et interventions
personnelles
Insertion professionnelle La fonction principale du
projet Kick Off est d'amener ces jeunes adultes vers l'emploi.
Nous sommes donc une mesure mise en place par le pouvoir politique pour
prévenir l'insécurité et l'exclusion sociale donc par
conséquent, la violence. Notre fonction va être d'intervenir sur
plusieurs des facteurs et résultantes abordées dans ce travail.
En termes de résultats, il est encore très tôt pour
évaluer cet aspect de la session 2 (deux mois après la fin de la
session). Le sujet 1 travaille, les sujets 6 et 7 sont en formation, le sujet 2
vit actuellement dans la rue, le sujet 3 est retourné en prison, le
sujet 4 est recherché par les forces de police et nous n'avons pas de
nouvelles du sujet 5. Donc, à ce stade-ci, nous avons 14% de mise
à l'emploi directe, 28% de mise en formation (donc 43% de
résultats positifs), 14% de situation socio-économique critique
et 28% d'échec. Nous préférons attendre 6 mois
après la fin de la session avant de parler de véritables
résultats. Durant l'évaluation de la session 1, nous avons
compris la nécessité de suivre les participants après la
session pour mesurer plus efficacement les résultats de notre action. En
effet, en sortant de la formation, 100% des participants avaient un travail ou
une formation. Un mois plus tard, ce chiffre est retombé à 20% et
est remonté à 60% deux mois après. Nous allons donc
essayer de maintenir, pendant 6 mois, un contact mensuel avec les participants
ayant fini la session.
Responsabiliser Entre la session 1 et la session 2 du
projet, nous avons compris la nécessité de mettre en place de
nombreux processus de responsabilisation, car nous observions
(et peut-être, favorisions) une certaine immaturité de la part des
participants. Nous avons installé un conseil des
participants. Cette assemblée a été mise en place
pour pouvoir prendre toute une série de décisions de
manière démocratique et pour régler différents
problèmes du groupe. Chaque participant et membre de l'équipe
possédait une voie. Ce conseil s'est réuni cinq fois et a
abordé quatre situations de conflit pour les résoudre.54(*) Durant les chantiers, nous
avons mis plusieurs fois des participants en tant que chefs
d'équipe. Ils devenaient, à tour de rôle,
responsables de petites équipes de deux à quatre personnes.
Chacun a vécu différemment cette responsabilisation et nous
allons essayer de mieux structurer cet aspect pour les sessions 3 et 4. En
effet, certains (comme le sujet 2) organisaient assez bien le travail tandis
que d'autres (comme le sujet 7) n'arrivaient pas à diriger leur
équipe et voulaient faire tout le travail. C'est assez normal
étant donné que nous ne les avions absolument pas
préparés à assumer ce rôle.À partir du milieu
de la session 2, nous avons responsabilisé le groupe pour
l'entretien du matériel.Le mécanisme
était assez simple : à la fin de la journée, le local
devait être rangé et le matériel convenablement
nettoyé pour que les participants puissent partir. Ce
procédé a fait naitre beaucoup de frustration et de petits
conflits (dont l'un des deux conflits physiques de la session 2), mais a
forcé le groupe à s'organiser. Les participants
réclamaient beaucoup de devoir laver ce que d'autres salissaient, mais
nous pensions que ça leur faisait du bien. En effet, en situation
professionnelle, peu de responsables ou de patrons supportent longtemps des
comportements comme ceux-là. À la fin de la session, cette
tâche était réalisée spontanément, en
équipe et de manière très efficace. L'équipe du
projet utilise la non-directivité comme posture
pédagogique. Pour tout ce qui a trait aux choix des participants, nous
n'intervenons pas de manière directive afin de les responsabiliser.
À la fin de la session 2, tous les participants ont évalué
avoir fait des progrès dans la
compétence responsabilité55(*).
Occuper Durant la session 1, trois conflits violents
(37% des conflits violents) ont éclaté dans des moments
d'inactivité. Plusieurs intervenants externes nous
avaient laissés tomber au dernier moment et certaines des
activités étaient plus courtes que ce que nous avions
prévu. Pour la session 2, nous avons prévu plusieurs
activités (plans B) pour pallier à d'éventuels
imprévus afin de ne plus avoir de longs moments d'inactivité. Il
n'y en a plus eu dans la session 2 et donc, aucun conflit n'est né de ce
paramètre.
Moins nombreux Une autre pratique que nous avons mise
en place a été de pouvoir prendre les personnes à part en
cas de difficulté. Nous sommes 4 dans l'équipe (2
éducateurs spécialisés, un animateur et une
coordinatrice). Cela permet d'être en général à deux
avec les participants. L'un prend en charge l'activité et l'autre est
disponible en cas de problème (ce qui arrive la plupart du temps deux ou
trois fois par jour)56(*).
Nous pouvons ainsi prendre à part ceux qui ont des difficultés
relationnelles, émotionnelles ou des difficultés de comportement.
Cette disposition s'avère très efficace et est utilisée
fréquemment. Nous avons fait un autre constat : si le groupe
était au complet sur un chantier, des tensions apparaissaient (un des
deux conflits physiques de la session 2 a été fait en
présence du groupe entier sur un chantier. Je sentais la tension monter
depuis quelques heures déjà et j'avais décidé de
terminer la journée plus tôt. Le conflit est intervenu pendant le
rangement). Nous avons donc décidé de séparer le groupe en
deux parties pour pouvoir faire plusieurs chantiers à la fois. Ces deux
interventions ont permis de diminuer l'impact de l'effet de
groupe.
Manger Durant la session 1, trois conflits violents
(37% des conflits violents) ont éclaté en lien avec de la
nourriture. La cuisine a été l'une des
activités principales de la session 1 (contrairement à la session
2). Les participants se disputaient pour de la nourriture (surtout de la
viande). Aucun des ouvrages que j'ai lus n'a abordé ce facteur. Pour
nous, il nous a semblé clair que la nourriture pouvait servir de facteur
déclenchant pour ce public-là. Je peux supposer que c'est
à cause du lien qu'a l'alimentation avec la survie et donc avec
l'agressivité.
Ballades J'ai proposé à l'équipe
d'aller visiter avec le groupe les espaces de nature qui
entourent Bruxelles. L'objectif était d'offrir aux participants l'aspect
apaisant de la balade, mais aussi de leur donner une ressource qu'ils
pourraient utiliser quand bon leur semble. Faute de temps et parce que cette
activité n'avait pas forcément de sens pour eux, cette
idée n'a pas été mise en pratique. Je ne l'abandonne pas
et la ressortirai si l'occasion se présente.
Décoration Dans le projet papier de Kick Off,
qui a déterminé l'obtention des subsides, un
élément est mis particulièrement en avant. Les
participants étaient censés participer à des projets
d'embellissement du quartier. Ils ont donc, en session 1,
participé à la journée de la propreté
(organisée le 27 avril par la Ville de Bruxelles) et créé
un mobilier urbain (appelé Mobico) qui n'a jamais pu être
installé. Même si cet élément d'embellissement fait
toujours, en théorie, partie du projet ; nous n'y prêtons
plus beaucoup d'attention, et ce, malgré l'insistance de nos
supérieurs hiérarchiques et de l'autorité subsidiante.
Embellir un quartier urbain affecté par la criminalité et la
violence peut clairement avoir un impact positif. Pourtant pour le public cible
du projet, cela n'a pas de sens. Pour eux, cela ne leur apporte rien de
positif. Ils ne comprennent pas pourquoi ils devraient faire des efforts pour
cela. Pour la construction du mobilier urbain Mobico, les participants ont
passé une grande partie du chantier à râler et à
refuser de travailler. Il y a eu un taux d'absentéisme très
élevé. Nous avons donc, en réfléchissant en
équipe, décidé de mettre (officieusement du moins) ce
point de côté. Quand on nous propose un chantier qui permet
d'embellir, d'une façon ou d'une autre le quartier, nous le
réalisons en priorité. Mais nous ne cherchons pas
spécifiquement ce type de chantier. Nous avons
préféré que les activités que nous réalisons
aient du sens pour les participants sans quoi ils ont beaucoup de mal à
s'y investir.
4 Après : les résultantes
Dans la première partie, nous avons étudié
le fonctionnement d'un acte violent et une grande partie des facteurs qui
influencent son apparition. Dans cette partie, nous allons donc aborder ce qui
se passe après l'agression. Qu'arrive-t-il au sujet ? Que
ressent-il ? Va-t-il à nouveau utiliser la violence ? Va-t-il
trouver d'autres façons d'agir ? Chacune de ces questions va
correspondre à un point du chapitre : résultante
évènementielle, résultante intrapsychique,
résultante sur la reproductivité et résultante
stratégique. Nous allons également voir quelles
possibilités d'intervention la littérature propose et observer
celles qui sont mises en pratique dans le projet Kick Off. Pour les
résultantes, les parties seront davantage interconnectées entre
elles. Par exemple, les résultats émotionnels de l'acte vont en
partie dépendre des résultats factuels. Les deux vont guider la
reproduction du comportement ou la recherche d'une alternative.
Comme expliqué précédemment, si les
interventions de cette partie appartiennent à la famille des traitements
et que celle de la précédente, à la famille de la
prévention, dans le cas de la violence, il y en a beaucoup
d'interventions qui peuvent servir dans les deux cas.
4.1
Résultante évènementielle
Les premières (et souvent les seules) conséquences
d'un acte violent qui viennent à l'esprit sont les conséquences
évènementielles. Quels évènements a-t-il
provoqués ? Le but de l'acte a été atteint ?
Comment les relations du sujet se portent-elles après l'agression ?
Va-t-il être puni ? Ou récompensé ?
Fonction et objectif Rogers et Maslow (in Traube,
2002) étudient la fonction57(*) de la violence. La violence apporte et rapporte des
choses. Même si on peut la critiquer sur le plan éthique, la
violence est souvent payante. C'est un moyen efficace d'arriver à ses
moyens. Souvent, il demande moins d'efforts que d'autres stratégies
comme le travail ou la négociation. Du point de vue de la psychologie
humaniste, la violence peut combler de manière très facile
certains besoins essentiels du sujet : stimulation58(*), considération et
maitrise59(*). Le besoin
de stimulation sera comblé, et ce, quelles que soient les
conséquences de l'acte. L'individu a besoin d'être stimulé
et la violence est très effective pour briser la monotonie. Le besoin de
considération, à part si le sujet est totalement ignoré,
sera également comblé. Ce sera une reconnaissance
négative, mais cela reste une forme de considération.
Une chose sur laquelle s'accorde la psychologie humaniste est que
tout acte à une fonction. Cette fonction peut être liée
à des besoins intrapsychiques (cf. chapitre 4.2),mais aussi à
assouvir des désirs (de possession d'objets par exemple), à
repousser un danger, à se valoriser, à s'affirmer, à
mettre de la distance dans une relation, à se faire remarquer, à
se venger, à établir une forme de justice, à
résoudre, des problèmes, à se faire du mal, à se
prouver quelque chose... Les objectifs d'un acte violent peuvent être
extrêmement variés. Ils peuvent être conscients ou
inconscients. Les conséquences factuelles de l'acte vont
déterminer si l'objectif a été atteint.
Ainsi, un même acte aux conséquences semblables sera pour l'un,
une réussite et pour l'autre, un échec total. Prenons un
exemple : deux hommes braquent chacun un magasin. Le premier désire
des biens matériels et le second recherche la reconnaissance. Ils
réussissent leur coup sans attirer trop d'attention. Pour le premier, il
s'agit d'une brillante réussite tandis que pour l'autre, c'est un
échec. La violence s'avère souvent payante pour atteindre les
objectifs cités plus haut (Traube, 2002). Elle s'avère, dans un
premier temps en tout cas, être une stratégie efficace, rapide et
demandant peu d'efforts. Malgré ce constat, la violence va avoir un
effet très destructeur sur les relations à cause de l'acte ou de
ses conséquences. En effet, l'usage de la violence, même s'il
s'avère pratique, aura tendanceà être rejeté par une
grande partie de la société (Traube, 2002), à amener
à une désocialisation et à des sanctions parfois
très lourdes (Mbanzoulou, 2000). La réussite ou l'échec de
l'objectif va déterminer la reproductibilité du comportement (cf.
Chapitre 4.3).
Interventions pratiques : revue de la littérature
Punition Parmi les conséquences possibles d'un
acte violent, l'une d'elles est une intervention : la
punition. C'est l'une des conséquences les plus
fréquentes et probablement les plus utilisées (dans les milieux
scolaires, familiaux et judiciaires) faisant suite à une action
violente. Elle peut prendre des formes extrêmement variées qui
dépendent beaucoup des autorités qui les édictent. Le
recopiage, la retenue ou le renvoi provisoire se retrouve dans le domaine
scolaire. La privation d'argent de poche, de jeux, de sorties, de repas et
autres est pratiquée dans le domaine familial avec dans certains cas les
coups et autres formes de violence. Dans le domaine judiciaire, on retrouvera
les amendes, les peines d'emprisonnement et les peines de travail. La liste est
loin d'être exhaustive. Nous nous attarderons davantage sur les peines
d'emprisonnement. La psychologie comportementaliste va placer la punition dans
la famille des renforcements négatifs. Les renforcements positifs visent
à favoriser l'apparition d'un comportement. Ils s'avèrent
être bien plus efficaces que les renforcements négatifs (Vanaubel
2013). Rivière Vinca (2006 in Vanaubel 2013) définit la
punition comme étant tous les évènements qui diminuent les
chances d'apparition d'un comportement par l'application d'un stimulus aversif
ou le retrait d'un stimulus renforçant (comme la liberté par
exemple). Le défaut d'une intervention punitive utilisée
isolément est de ne pas apporter d'alternative au comportement
problème. Elle ne fait qu'essayer de le faire disparaitre. Pour
être efficace, la punition a besoin de quelques caractéristiques
rarement prises en compte. Premièrement, le temps entre l'acte et sa
conséquence punitive doit être le plus court possible (Vanaubel
2013). Elle doit être proportionnelle à l'acte, responsabilisante
et si possible réparatrice, en rapport avec le comportement. Elle doit
aussi viser le comportement problème et pas la personne. Au contraire,
pour qu'une punition soit inefficace et/ou accompagnée d'effets
négatifs, elle doit être infantilisante, humiliante,
irrespectueuse, énoncée sous le coup de la colère et sans
rapport avec l'acte commis. (Traube 2002) Les problèmes de cette
méthode sont : le risque d'escalade, le risque de provoquer une
aversion et un évitement envers celui qui punit. L'intervention seule ne
propose pas de comportement pour remplacer celui qui est proscrit (Vanaubel
2013). L'avantage le plus frappant est que la punition met une limite claire et
offre une information efficace quant aux comportements à ne pas avoir.
En tant que conséquence négative suivant un acte violent, elle va
favoriser sa disparition.
Incarcération Le cas de la peine
d'emprisonnement est particulier dans ce travail puisqu'il concerne
directement le public étudié. C'est un type de punition largement
appliqué dans le monde entier. Elle a trois objectifs selon
Mbanzoulou (2000) : une fonction sécuritaire/protectrice
(protéger la société des personnes pouvant
représenter un danger), une fonction coercitive/vindicative (punir les
auteurs d'infractions envers la loi) et une fonction normative/éducative
(apprendre le respect des lois aux auteurs d'infractions). La troisième
fonction, celle qui nous intéresse le plus, est mise en pratique par
différents moyens : la privation de liberté en
elle-même, le cadre disciplinaire de la prison, le soutien
médico-social, les activités culturelles, les formations et le
travail dans l'établissement pénitentiaire. D'après
l'auteur, l'objectif éducatif est celui qui reçoit le moins
d'attention et de moyens dans les prisons. Dans l'arrondissement de Bruxelles,
le tribunal correctionnel constate un taux de récidive de 23,4% et la
cour d'appel de 20,4%60(*). Or, les règles pour définir la
récidive sont très spécifiques. Elles ne prennent pas en
compte la globalité du phénomène. En
réalité, le taux réel de retour en prison en Belgique
dépasse très probablement les 50% (Maes & Robert, 2012). Pour
Mbanzoulou, la peine d'emprisonnement à un objectif de
réinsertion dans la société, mais il constate qu'elle
échoue en partie à y arriver. La fonction coercitive rentre en
conflit avec la rééducation du prisonnier. Cette fonction
nécessite d'assurer ordre et sécurité au sein de la prison
ce qui ne permet pas de développer une personnalité responsable
et épanouie. Les actions des acteurs qui servent à la
réinsertion sont vues comme parasites et dangereuses puisqu'elles
peuvent nuire ou compliquer le travail de sécurisation de l'institution.
On fait une exception pour les actions qui ont démontré leur
efficacité pour améliorer les conditions de
sécurité. Ainsi, beaucoup d'activités culturelles,
sportives et de travail ont perdu leur aspect éducatif pour devenir
simplement occupationnelles (être occupé a tendance à
pacifier les prisonniers cf. chapitre 3.7). Les désavantages des peines
de prison sont : la contamination (de la criminalité) par d'autres
détenus, une désocialisation (à cause de la coupure avec
la société) et une déresponsabilisation (le prisonnier
doit demander l'autorisation pour les moindres petites choses et a une vie
réglée par les autorités de l'établissement). De
plus, la façon dont les peines de prison sont appliquées peut
empirer ces aspects. Mbanzoulou préconise donc un investissement et une
meilleure coordination de tous les acteurs (y compris les surveillants) pour la
réinsertion des prisonniers. L'avantage principal de la peine
d'emprisonnement reste qu'il s'agit d'un stimulus extrêmement aversif.
Reconnaissance Si l'objectif de l'action est
d'attirer l'attention, ignorer l'auteur peut s'avérer
être l'intervention la plus payante. Il faut pour cela être certain
que c'est bien le but de l'agresseur parce que d'autres types d'objectifs
s'accordent plutôt bien avec la discrétion. De plus, c'est une
position qui demande des efforts particuliers puisque la tendance habituelle
des intervenants est d'agir quand il y a des actes de ce genre. L'intervenant
peut rarement se permettre de sacrifier la sécurité ou le
bien-être d'une ou plusieurs victimes afin d'aider l'auteur dans ses
comportements asociaux. Pour finir, l'absence de reconnaissance des actions
violente doit être remplacée par de la considération pour
les actions prosociales et positives de l'auteur. Il apprend ainsi à
rechercher la reconnaissance par d'autres moyens. (Vanaubel 2013)
Signature La pédagogie du contrat
est également utilisée pour obtenir de la personne un
engagement et une participation active à son évolution
comportementale. D'après Born et Chevalier (in Lepot-Froment, 1996), il
faut y mettre le comportement désiré, les critères de
réussite, le renforcement obtenu en cas de réussite, le temps
imparti, les renforcements en cas de réussite dépassant les
espérances et les moyens d'évaluation. Avec un public d'adultes,
il n'est pas nécessaire, selon moi, de passer par toutes ces
étapes. L'engagement de la personne, les moyens de parvenir à cet
engagement et, après coup, l'évaluation des résultats sont
les trois étapes essentielles.
Sur le terrain : observations et interventions
personnelles
Punitions Le projet Kick Off possède une liste
de punitions énoncée de la plus
légère à la plus grave.
· « Remarque orale
· Réparation du dommage causé
· Décision du conseil
· Tâche à effectuer en plus ou à la
place des autres
· Diminution ou retrait du défraiement
· Exclusion d'un jour défrayé
· Exclusion de trois jours
· Exclusion définitive»61(*)
Selon les actes commis, nous essayons d'apporter une
réponse correspondante. Nous voulons, dans les cas où nous
utilisons des renforcements négatifs, qu'ils aient toujours un rapport
direct avec l'action commise. En définitive, dans la plupart des cas de
conflits ou de violence, les punitions (à l'exception de la remarque
orale) ne sont pas nécessaires. Et, quand je parle de remarque orale, il
s'agit davantage d'une discussion amenant à la reconnaissance des
troubles causés et à un engagement ou à des propositions
pour adopter des comportements différents. La diminution ou le retrait
du défraiement qu'ils reçoivent pour les chantiers et stages est
utilisée quotidiennement quand ils arrivent en retard et quand ils sont
absents. L'idée du projet est d'offrir le terrain propice au traitement
de toute une série de problèmes qui, en milieu professionnel,
donnent lieu à des sanctions importantes (comme le renvoi). Parmi
celles-ci, la violence. Nous avons eu, durant la session 2, deux conflits
physiques ont éclatés. Aucun n'a donné lieu à des
punitions. Ils ont malgré tout été suivis d'un important
travail sur les comportements problèmes. Nous avons eu de longues
discussions avec tous ceux qui avaient pris part au conflit. Dans ces
discussions, nous sommes partis de la reconnaissance par les sujets des
désavantages du comportement adopté. Ensuite, ils prenaient
l'engagement de changer de comportement. Et pour finir, nous leur apportions
les moyens, l'observation, les recadrages et l'attention nécessaires
à l'adoption de nouveaux comportements. Du point de vue de
l'équipe, cela s'est avéré efficace. Il avait
été prévu de donner un jour de renvoi au sujet 3, suite
à un conflit physique, mais, au vu de sa reconnaissance et de sa bonne
volonté à changer de comportement, nous avons renoncé
à appliquer cette décision. Je me pose personnellement la
question de savoir si nous sommes trop laxistes. Le fait que nous n'utilisons
presque pas les sanctions qui ont été prévues ne vient pas
de l'absence de comportements inadéquats : ils sont nombreux. Il
vient plutôt du fait qu'avec huit participants, nous avons le temps de
faire un travail en profondeur. Personnellement, je préfère de
loin cette façon de faire. J'ai toujours, dans mon métier
d'éducateur, détesté punir. Je trouve cette intervention
trop facile et empreinte d'une certaine malveillance. Je crois que c'est une
faille dans ma posture éducative parce que je désire avoir un
rôle de "gentil". Néanmoins, cette aversion pour la punition m'a
forcé à développer d'autres méthodes d'intervention
plus efficaces à long terme. Je vais cependant réaliser un effort
personnel pour améliorer ma posture éducative.
De l'avis des sujets 1, 2, 3 et 7 (et d'autres participants), les
membres de l'équipe sont toujours sur leur dos : ils ne les
lâchent pas. Cela a été dit, de manière assez
positive, lors des évaluations. Ils apprécient après coup
cette attitude. En effet, quand nous observons un comportement problème
et que le sujet s'engage à le travailler, toute l'équipe y
apporte une attention particulière pour l'aider à évoluer.
Pour reprendre les termes que les participants ont utilisés, nous ne les
lâchons pas pendant quatre mois, au sens propre (de ne pas les
abandonner) comme au figuré (de ne pas les laisser tranquilles).
Signatures L'une des méthodes que nous
utilisons est le contrat d'évolution. Une fois par
mois, nous utilisons en entretien individuel un contrat d'évolution. Ces
contrats, signés par l'éducateur référent et par le
participant reprennent une série d'objectifs que le participant se fixe
pour le mois. Il peut s'agir d'objectifs comportementaux, de démarches
administratives (ou autre) à réaliser, de savoirs à
acquérir... Le document reprend les méthodes à utiliser et
une évaluation des objectifs du mois précédent. Le tout
est fait de manière participative dans une conversation entre le
participant et son référent. Le référent prend lui
aussi des engagements pour aider le participant à atteindre ses
objectifs. Ce que nous avons constaté, c'est que le
procédé permettait de traiter efficacement les problèmes
de comportement et de violence. Les sujets s'engagent eux-mêmes à
changer de comportement, ils réfléchissent eux-mêmes
à une méthode et ils peuvent compter sur le soutien du
référent et de l'équipe. Des 18 engagements que les
participants dont j'étais référent ont pris, 16 (89%) ont
été couronnés de succès. C'est une méthode
d'intervention que j'apprécie particulièrement.
Ils me veulent du mal Tous les sujets
étudiés et la majorité des participants se sont fait
renvoyer d'établissements scolaires. Tous les sujets
étudiés ont été condamnés à des
peines d'emprisonnement. Ce que nous avons observé est qu'ils ont
souvent une perception aversive des acteurs du système
judiciaire et scolaire. Comme expliqué plus haut dans le
chapitre, ils perçoivent ces personnes comme représentant un
danger. Cela retire l'aspect éducatif des punitions qu'ils peuvent
donner. L'impression que cela donne, c'est qu'ils punissent par essence et non
suite à un comportement. En tête de liste, ils citent les forces
de police, ensuite viennent les juges et les procureurs et finalement les
directeurs d'écoles et les professeurs. Les assistants de justice sont
généralement assez bien perçus. Le sujet 3 m'a
perçu comme cela (menaçant et malveillant). Je n'ai pas encore
bien compris quels mécanismes avaient amené à cela. J'ai
l'impression que ça s'est amélioré avant que le sujet 3 ne
parte de la formation. Cette perception du monde judiciaire et scolaire nous
demande d'avoir une posture éducative différente de celles qu'ils
ont subies par le passé. Ainsi, tout en sachant être fermes, nous
respectons leurs avis, leurs décisions, nous avons une posture
d'autorité différente, nous sommes (et cherchons à
être perçus comme) bienveillantset nous utilisons des
pédagogies participatives. Sans que nous en ayons conscience, le fait de
ne pas utiliser systématiquement de punition pourrait s'avérer
positif. L'un de nos objectifs est de leur redonner confiance et de travailler
certains comportements pour qu'ils puissent réintégrer
sereinement le milieu classique de la formation ou du travail où une
forme d'autorité plus arbitraire est pratiquée. C'est
personnellement une posture éducative avec laquelle je suis très
à l'aise. Dans toute ma pratique professionnelle, j'ai essayé de
développer et d'apprendre les pédagogies actives et
démocratiques. C'est un réel plaisir de pouvoir les mettre en
pratique quotidiennement. Je pense que ma présence dans le projet a
grandement favorisé cette orientation pédagogique puisque mes
collègues étaient, au départ, moins friands de ce type
d'intervention.
Réinsérer De notre point de vue, une
véritable réinsertion est indispensable pour
éviter la récidive de la criminalité. L'un des
éléments qui frustraient le plus les sujets 3, 4 et 5
était leurs chances extrêmement limitées d'accéder
au milieu du travail. N'ayant pas de formation, pas d'expérience et un
passé carcéral, leurs chances de trouver un travail
étaient quasi nulles. Ils en avaient conscience. Pour eux, les actions
qu'ils posaient pour se réinsérer étaient vaines. Ils
pensent que la société ne désire pas qu'ils se
réinsèrent. En sachant qu'ils avaient des revenus assez faibles
(entre 800€ (revenu d'intégration sociale ou allocations
d'insertions) et 350€ (aide aux justiciables) par mois) et qu'ils
pouvaient, par des moyens illégaux, facilement se faire de l'argent,
cela ajoutait à leur frustration. En tant qu'observateur
extérieur, je ne peux que préconiser un encadrement plus strict
de l'utilisation de l'extrait du casier judiciaire (type I et II). Ce document
étant quasi systématiquement demandé par des employeurs,
il réduit considérablement et de manière injuste les
chances de réinsertion des anciens détenus. Une bonne partie des
sujets étudiés (1, 3 et 5) disent avoir l'impression qu'ils
n'auront jamais fini de payer leur dette envers la société.
4.2
Résultante intrapsychique
Une action violente peut avoir un grand nombre de
conséquences émotionnelles sur celui qui la réalise. Cela
va dépendre, entre autres, des conséquences factuelles de l'acte,
de l'éducation, du fonctionnement psychologique et des croyances de
l'auteur. Le panel de sentiment ressenti après avoir été
violent est relativement hétéroclite : fierté,
tristesse, dégout, peur, satisfaction, insatisfaction, nervosité,
calme, sentiment d'appartenance, joie...
Ces sentiments vont amener l'individu à évaluer son
action. Il établira ainsi, avec les conséquences factuelles, la
valeur et l'utilité de cette manière d'agir. On peut donc
utiliser le fonctionnement émotionnel pour diminuer ou augmenter l'usage
de la violence.
Interventions pratiques : revue de la littérature
Il a été expliqué au chapitre 3.4 (facteurs
intrapsychiques), que certaines interventions peuvent servir autant pour
prévenir que pour guérir. Une partie des interventions vues ici
peuvent donc être utilisées dans les deux cas.
Mettre ailleurs Le mécanisme de
dérivation62(*) est l'un est plus pratiqué pour éviter
d'avoir recours à la violence. Traube (2002) explique que la pulsion
agressive a besoin d'être exprimée d'une manière ou d'une
autre. Si elle n'est pas extériorisée, elle aura tendance
à avoir des effets internes néfastes. Le nombre de passage
à l'acte violent réel est normalement infime par rapport au
nombre de fois où l'on a envie de le faire. C'est simplement parce qu'il
y a toute sorte de façons de dériver cette pulsion, de la diriger
ailleurs. Voici quelques mécanismes de dérivation.
· L'interdit, la répression. Elle peut être
consciente et délibérée (ce qui est assez sain) ou
inconsciente (c'est une forme de conditionnement, un fonctionnement de type
névrotique).
· Le déplacement de l'objet. On déplace la
pulsion agressive de cible. Cela peut être assez sain (par exemple
quelqu'un qui déplace son agressivité sur un ring de boxe) ou
malsain (un professeur qui déplace, par exemple, sur ses
élèves l'agressivité qu'il a envers sa femme).
· Le déplacement d'affect. On remplace le sentiment
de colère par un autre. C'est plutôt un processus pathologique, un
genre de refoulement.
· Le défoulement. Peut-être utilisé
efficacement avec des sports de frappe comme le football ou le tennis.
· La verbalisation : dire au lieu d'agir.
· L'imagination. Le fantasme est une mise en scène du
désir qui peut éviter un passage à l'acte.
· La sublimation. Canaliser l'énergie agressive et
l'amener vers quelque chose de constructif comme l'expression artistique. On
part d'une émotion négative et destructrice pour l'amener dans un
domaine où elle peut être positive et constructrice.
Penser avant d'agir Born et Chevalier (in
Lepot-Froment, 1996) et Vanaubel (2010) citent l'importance de savoir
différer la satisfaction et de savoir
établir une réflexion avant l'action. Ils
associent ces apprentissages à des méthodes plus
générales de résolution de problèmes (cf. chapitre
4.4).
Moralité Certaines méthodes visent
à développer les capacités de raisonnement moral
des individus. Tout individu établit une échelle de
valeurs concernant ses actions et celle des autres. Cette échelle peut
avoir différents niveaux. Le niveau le plus bas est celui de
l'égoïsme : ce qui est bien est ce qui est dans mon
intérêt et ce qui est mal est ce qui me nuit. Plus on
évolue dans cette échelle plus on arrive à intégrer
ses intérêts avec ceux des autres. D'abord ceux qui sont le plus
proche de nous et puis, au fur et à mesure, on élargit vers des
groupes de plus en plus grands. Dionne et St-Martin (In Massé & al.
2006) établissent quant à eux 3 niveaux de jugement moral. Au
niveau 1, l'individu agit dans son intérêt ou pour ne pas
être puni. Au niveau 2, il va essayer de paraitre bien aux yeux des
autres, il va faire preuve de considération et accomplir les devoirs
qu'il a acceptés. Au niveau 3, il va agir par principe éthique
applicable à tous. Ils proposent une méthode pour faire
évoluer le niveau de raisonnement moral des personnes. Basée sur
des débats autour de dilemmes moraux hypothétiques, elle permet
de faire réfléchir au sens des règles légales et
morales de la société. Par cette technique, les participants
arrivent peu à peu à développer un raisonnement plus
élaboré sur les questions morales.
Mbanzoulou (2000) constate le rôle positif qu'ont les
différents acteurs religieux sur le niveau de raisonnement moral de
prisonniers. Ils apportent ce qu'une institution d'état n'arrive souvent
pas à donner : des valeurs morales acceptées et une notion
claire de bien et de mal. Le personnel religieux fait, par
l'assistance spirituelle qui est offerte comme un droit inaliénable, un
énorme travail d'éducation morale. Alors que les
différents intervenants sociaux sont cadrés
sévèrement et souvent mis de côté pour des
impératifs de sécurité, le personnel religieux a plus de
liberté et une relation plus proche avec les prisonniers. Ainsi,
d'après l'auteur, la religion a un impact positif sur l'évolution
morale des personnes incarcérées.
Gérer ses émotions Puisque les
émotions font partie des éléments qui amènent
à poser un acte violent et qu'une mauvaise capacité à
gérer celle-ci se retrouve souvent chez les auteurs d'agression (Dowen,
Blanchette et Serin, 1997), il semble logique d'essayer d'apprendre la
gestion des émotions tant au niveau préventif
que comme traitement. Ainsi, les programmes de maitrise de la colère
sont parmi les plus utilisés dans les prisons canadiennes. Ils y
travaillent aussi l'anxiété, la jalousie et la frustration.
Massé & al. (2006) proposent une gestion du stress, un
développement du concept de soi et un entrainement à
l'empathie.
Éducation à la dure Il existe un type
d'intervention utilisé depuis la nuit des temps. C'est ce que Born et
Chevalier (in Lepot-Froment, 1996) appellent
emotionnalshocktraining(l'entrainement par choc
émotionnel). Le principe consiste à utiliser des
renforcements négatifs très forts pour provoquer chez le sujet un
choc émotionnel intense. Cela devrait avoir pour conséquence de
l'éloigner durablement, en utilisant la peur, du comportement
visé. On y retrouve toute les formes de punition
exagérées, les maltraitances à visée
éducative, la torture, la création de milieux aux conditions
invivables, tout ce qui peut faire peur (comme les menaces)... Il y a bien
sûr plusieurs niveaux d'intensité de ces moyens
d'intervention : on ne peut, par exemple, raisonnablement pas comparer la
torture avec une menace de renvoi d'un établissement scolaire.
Au-delà des critiques d'ordre éthique que l'on peut faire
à ces méthodes, leur efficacité a été
étudiée. Elles ont efficacité certaine, mais à
courte durée et tant que la peur fonctionne. Comme elles utilisent une
forme de violence, elles vont avoir tendance à générer une
agressivité réactionnelle. Donc, ces méthodes auront
souvent l'effet inverse de celui qu'elles désirent produire. Elles sont
pourtant encore largement utilisées de par le monde.
Sur le terrain : observations et interventions
personnelles
Déplacer Le projet Kick Off a mis en place
différents moyens de dérivation
d'émotions comme la colère et la frustration. Nous avons
largement parlé de la verbalisation dans différents autres
chapitres. Le sport présent dès la session 1, a pour but d'aider
à relâcher les tensions et à canaliser la colère. Le
membre de l'équipe qui en a la charge en a bien conscience et oriente
les exercices sportifs (essentiellement de la boxe) dans ce sens. La
présence d'un sac de boxe à la cave, élément
déjà abordé précédemment, est
régulièrement utilisée par les participants pour calmer
leur colère. Le projet d'écriture de la session 2 a permis
à quelques participants d'y mettre des éléments personnels
de frustration (sujet 2 et deux autres participants). J'ai également
remarqué que plusieurs participants utilisaient le travail comme moyen
de canaliser leur colère. Quand ils étaient frustrés ou
énervés, ils travaillaient avec acharnement et refusaient de
faire des pauses. C'est arrivé avec les sujets 3, 6, 9 et 11 ainsi
qu'avec d'autres participants. Cette façon d'agir peut être
considérée comme une forme de sublimation de la colère. Je
ne m'étais pas rendu compte de l'aspect positif de ce comportement avant
de faire cette étude. Je vais en faire part à l'équipe
pour que nous puissions valoriser cela chez les participants.
Valeurs religieuses Il y a un élément
que j'aimerais pouvoir utiliser, mais que ma position de travailleur social,
d'éducateur et d'employé communal m'interdit. Pour presque tous
les sujets étudiés, la religion à une
place très importante (sujets 2, 5, 7, 8, 9, 10, 11 et 12). Les sujets
attachés à leurs croyances religieuses étaient musulmans
ou chrétiens (protestants ou catholiques). Ces deux religions
contiennent chacune des valeurs morales très positives. Elles ont des
messages de paix, de tolérance, de non-violence, d'amour, de
résignation, d'acceptation des difficultés, d'efforts dans
l'adversité... qui pourraient être d'une grande utilité
pour la vie des participants. De plus, ce sont des valeurs qui, comme elles
sont émises par la religion qu'ils pratiquent, sont facilement
acceptées par ceux-ci. J'aimerais pouvoir utiliser ces
éléments pour les aider. Les règles déontologiques
de ma position viennent malheureusement contrecarrer cette envie. En plus du
devoir de neutralité de l'éducateur, le travailleur communal que
je suis à une obligation de réserve concernant les sujets
à caractère religieux. J'ai posé la question à ma
coordinatrice qui m'a confirmé cela. Je comprends sans difficulté
les raisons qui amènent à ces règles de
déontologies. Je trouve dommage de devoir me priver d'une ressource
aussi précieuse. J'étudie, à un niveau privé, les
religions et leurs messages moraux. J'y trouve de nombreux
éléments qui pourraient, si elles sont bien utilisées,
avoir un impact réellement positif sur l'agressivité et le
recours à la violence des participants. Je dois malheureusement m'en
passer.
Gérer ses émotions Durant la session 2,
une collègue éducatrice de fonction et psychologue de formation,
est venue en tant qu'intervenant externe donner un programme de gestion
des émotions pendant deux matinées. J'ai
été assez déçu par son intervention qui n'a fait,
selon moi, que survoler le sujet. Cette collègue a depuis quitté
l'ASBLBravvo et c'est donc à moi que cette activité est revenue.
Je compte utiliser les nombreux apprentissages que j'ai pu réaliser avec
ce travail pour mettre en place une série d'exercices visant une bonne
gestion des émotions. J'ai déjà mené ce type
d'exercice avec des groupes d'enfants dans l'enseignement
spécialisé de type 1 et 8.
Projet de gestion des émotions
Lieu : locaux du projet Kick Off
Durée : un après-midi (3h) et une
matinée (2h30)
Objectifs :
· Amener un moment de réflexion entre stimulus et
réaction
· Savoir identifier ses émotions (via des signaux
d'alarme) et celles des autres
· Savoir dériver la colère
· Savoir se calmer
Écueils à éviter :
· Infantilisation des participants
· Manque de sens des activités pour les
participants
· Perte de contrôle si les sentiments
travaillés provoquent des émotions trop intenses chez les
participants
Façon d'éviter ces écueils : ne pas
utiliser trop de jeux, expliquer et discuter préalablement avec les
participants sur le sens de chaque exercice, vérifier qu'il fasse sens
pour eux, faire des pauses nombreuses, intercaler des exercices de relaxation
et avoir la possibilité de quitter le local ou d'aller en bas frapper
sur le sac.
Pédagogie : pédagogie active,
pédagogie par l'expérience, psychologie humaniste
Activités :
· Visionnage d'extraits de films avec identification
participative des émotions, de la façon de les repérer et
de leur impact sur la vie que l'on mène. Émotions :
anxiété, frustration, colère, tristesse, joie, honte,
sérénité et peur. Pendant cet exercice, on apprendra aussi
à éviter de porter des jugements de valeur sur les
émotions. On gardera ce principe pour tous les autres exercices.
· Exercice de respiration visant à la relaxation.
· Par groupe de deux, exercice pour apprendre à
mettre un moment entre stimulus et réaction. Chaque groupe à un
tas de cartes reprenant des situations problématiques de la vie
quotidienne. Dans un premier temps, les participants (l'un lit la situation et
l'autre essaye de la résoudre) devront faire un maximum de cartes en 3
minutes. Dans un second temps, ils devront attendre 10 secondes (que celui qui
pose la question mesurera) entre la question et la réponse. Ensuite, ils
évalueront quelles étaient les solutions les plus pertinentes
(avec ou sans moment de réflexion).
· Exercice de visualisation pour apprendre à se
détendre et à identifier son état d'esprit.
· Débat assez court sur la colère (et les
sentiments qui en sont proches : jalousie, anxiété,
frustration...) et sur son impact dans nos vies. Partage d'expériences
et de moyens permettant de dériver la colère.
· Jeux de rôles sur des situations professionnelles
frustrantes. Discussions après chaque mise en scène sur les
émotions ressenties chez soi et perçues chez les autres.
Recherche de piste de solution pour rendre la situation plus sereine. La
scène sera ensuite rejouée en mettant en pratique une ou
plusieurs des solutions proposées
L'évaluation sera basée sur l'intérêt
des participants pendant les activités, la richesse des échanges
et la mise en pratique, pendant la suite de la session, des
éléments appris.
|
4.3
Résultante sur la reproductivité
Les résultantes que nous avons vues
précédemment vont avoir un impact direct sur la
reproductibilité du comportement violent. Plus le
comportement aura de conséquences positives, plus il aura tendance
à être reproduit. Si l'objectif initial, quel qu'il soit, a
éteint atteint, si le désir est satisfait, si les émotions
ressenties ont provoqué une forme de plaisir, si la stratégie
s'est avérée payante... le sujet aura probablement encore recours
à la violence. (Traube, 2002) C'est quelque chose de parfaitement
logique : quand une stratégie fonctionne, on l'utilise. De plus,
lorsque le sujet observe chez les autres que cela fonctionne de manière
similaire, son opinion va se renforcer. Au fur et à mesure, cela peut
devenir une habitudeancrée dans le fonctionnement psychologique du
sujet.
Histoire sans fin À cela s'ajoute un
mécanisme de cercle vicieux fréquent dans les
situations conflictuelles amenant à la violence. Pour diverses raisons
(croyances, expériences précédentes...) quand une personne
(personne A) en percevra une autre (personne B) comme hostile ou dangereuse,
elle pourra avoir deux types de comportements instinctifs :
l'agressivité ou la fuite. Ainsi, une première perception
erronée ou tronquée peut donner lieu à une agression de la
part de la personne A. La personne B, étant réellement
agressée, se défend de la même manière. Cette
réaction agressive de B confirme l'idée qu'avait A : B lui
veut du mal. Il réagit ainsi de manière encore plus violente et
un cercle vicieux d'escalade de la violence est ainsi mis en place. Ce
fonctionnement, aux graves conséquences, peut toucher les individus, les
groupes et les sociétés. Plusieurs expériences
citées par Gagnon & al. (2006 in Vanaublel, 2010) ont mis en
évidence ce type de fonctionnement chez les enfants agressifs. Il est
également possible d'observer cela dans les rivalités entre
familles ou entre quartiers défavorisés. Peu importe si quelqu'un
a réellement commencé le conflit, on est agressif parce que
l'autre l'est et l'autre est agressif pour la même raison.
Interventions pratiques : revue de la littérature
Mis à part en plaçant une conséquence
négative comme la punition après une action violente, il existe
des méthodes qui permettent de réduire la
reproductibilité. Il est possible de traiter l'habitude qui a
été prise.
Règlements Dans tout groupe, les
différentes règles ont normalement pour fonction
de structurer et de protéger le fonctionnement social. Les individus
sont amputés d'une partie de leurs libertés, mais en
échange, ils y gagnent en sécurité et en confort de vie.
Les règles mettent de l'ordre et permettent d'avoir toute une
série de décisions à ne pas prendre. Imaginez la vie si
nous avions à nous poser des questions pour chaque aspect de notre vie.
Toutes sortes de règles déterminent ce qui est autorisé,
ce qui est interdit et ce qui est obligatoire. Les règles sont donc
conçues pour être des éléments au service des
individus et des groupes. Mais pour qu'elles fonctionnent, elles doivent
être respectées. Tout un attirail de rappels à l'ordre et
de sanctions sont prévues pour cela, mais le mécanisme le plus
efficace reste celui de l'intériorisation d'une
règle. D'après Traube (2002), c'est indispensable à la vie
sociale. Pour qu'une règle soit facilement intériorisée,
elle doit être perçue comme protectrice, légitime
(pertinente) et juste. J'insisterai sur le concept de perception. Une
règle peut être pensée et mise en place comme étant
protectrice, légitime et juste, mais perçue totalement autrement.
Il est vraiment très important de faire passer le sens et la fonction
des règles. Il arrive souvent que des règles et des principes
imposés aux personnes "pour leur bien" fassent des dégâts
parce qu'elles sont perçues différemment. Ainsi, pour qu'une
règle soit perçue comme persécutrice, elle devra avoir les
caractéristiques suivantes : inadéquate (qui ne correspond
pas à la réalité), purement formelle, arbitraire (dont
l'application varie d'une personne à l'autre ou selon l'humeur du
détenteur de l'autorité), injuste, mal comprise ou mal
expliquée et être un moyen pour l'autorité de marquer sa
domination. Des règles fonctionnant ainsi vont provoquer la violence ou
le repli (Traube 2002). Il est donc important d'avoir des règles, mais
aussi de bien réfléchir à leur énonciation,
à leur perception, à leur mise en pratique et à une forme
d'acceptation qui les rendra effectives.
Tirer un trait Pour le public concerné par
cette étude, le respect des règles est un élément
qui a fait, à un moment du moins, défaut. L'une des fonctions des
règles est de permettre la transgression : c'est une phase normale
du développement de l'être humain (Traube 2002). Pourtant, si le
comportement transgressif devient une habitude, la société, la
vie sociale se trouve menacée. Il est donc parfois nécessaire de
mettre l'un de ses membres à l'écart dans un établissement
pénitentiaire par exemple. Ainsi, selon Mbanzoulou (2000)
l'amendement du prisonnier est l'un des buts essentiels de la
prison. Pour pouvoir se réinsérer efficacement dans la
société, le prisonnier doit faire un trait sur son passé
criminel et accepter de vivre dans une certaine légalité. Selon
lui, cela se fait par deux moyens. Le premier est que la prison est un milieu
très réglé et discipliné. L'apprentissage d'une vie
réglée et stricte donnerait de bonnes habitudes que les
prisonniers intégreraient avec le temps passé dans
l'établissement. La deuxième se situe plus
particulièrement au niveau de la relation avec les gardiens et les
autres intervenants de la prison. Une attitude bienveillante, bien que stricte,
de la part de différents acteurs permettrait au prisonnier de s'amender,
de reprendre confiance en la vie sociale et dans les règles qui cadrent
celles-ci. Il prône une meilleure formation et une revalorisation du
métier d'agent pénitentiaire, leur donnant un rôle bien
plus social que leur rôle actuel similaire selon l'auteur à celui
d'un porte-clés. Selon moi, penser que vivre plusieurs années
dans un cadre strictfavoriserait le respect des lois n'est que partiellement
vrai. Cela à une valeur comportementaliste : le sujet s'habitue
à respecter des règles, mais rien n'est fait pour qu'il les
intériorise. On ne peut donc pas garantir que la personne continuera
à utiliser ces comportements en dehors de la prison.
Désapprentissage Traube (2002) cite sans les
expliquer des moyens de désapprendre des comportements
problématiques. Il prend notamment l'exemple du film de fiction
« Orange Mécanique » de Stanley Kubrick (1972) dans
lequel le héros subit une thérapie brutale qui provoque en lui un
dégout profond pour la violence. Il devient complètement
incapable de réagir à toute forme d'agression ce qui en fait
quelqu'un d'assez inadapté socialement. Les thérapies
comportementalistes utilisent parfois ce principe de manière beaucoup
plus acceptable en termes d'éthique (Massé & al. 2006).
Sur le terrain : observations et interventions
personnelles
Règlements Le projet à une série
de règles formelles (R.O.I.63(*) du projet) et informelles
(passées oralement). Personnellement, j'essaye toujours de les passer
tout en les associant avec leurs objectifs. La règle de la
ponctualité par exemple, sert au bon fonctionnement du projet certes,
mais c'est surtout un apprentissage de ce savoir-être essentiel pour une
bonne insertion professionnelle. J'ai insisté pour que la partie
sanction du R.O.I. commence par la phrase : « tout le monde a le
droit à l'erreur ». C'était pour moi un point essentiel
qui a pour effet de rassurer les participants. Les règles existent, nous
sommes là pour les appliquer, mais l'erreur, la faute, fait partie des
éléments normaux au projet. Leurs erreurs sont simplement des
éléments à travailler avec eux afin que celles-ci ne les
handicapent pas plus tard. Ils ont la possibilité de questionner les
règles, voire de les changer avec le conseil des participants. Nous
essayons de bien leur expliquer le sens de ces règles.
On est souvent aux prises avec leurs perceptions des
règles et des autorités qui les appliquent. Ils vivent certains
de ces éléments comme des injustices profondes. L'extrait du
casier judiciaire (ancien certificat de bonne vie et moeurs) est un bon
exemple. Ils ne comprennent pas pourquoi ce document existe puisqu'à
leurs yeux, il ne sert qu'à les empêcher de trouver un travail.
J'essaye donc de les écouter, d'entendre leur vécu tout en
essayant de les amener à une forme d'acceptation ou du moins de
soumission à ces règles. Souvent, je ne peux qu'être
d'accord avec leur interprétation sans avoir plus de pouvoir qu'eux pour
changer ces éléments. Comme ma collègue éducatrice
leur répète souvent : « la vie est une dure
lutte. »
Au début de la session 2, nous laissions les participants
lire le R.O.I. avant de le leur faire signer. Nous avons constaté que
beaucoup avaient lu sans retenir ou comprendre ce qui était
écrit. Donc, dans la session 3, nous leur avons expliqué tous les
points du règlement deux fois : à l'inscription et le
premier jour du projet. Nous avons perçu que cette mise en place plus
efficace du cadre a eu des effets bénéfiques sur leurs
comportements au début de la session.
C'est du passé Nous arrivons à observer
chez les participants du projet leur état d'esprit par rapport à
la criminalité en général. De mon observation, nous
n'avons pas encore amené à l'amendement d'un
seul des participants. Nous faisions parfois évoluer leur vision (comme
le sujet 2 qui a commencé à concevoir la violence physique comme
négative). Il est aussi arrivé que nous rappelions la
décision qu'ils avaient déjà prise à ce sujet
(comme avec le sujet 7 qui, à un moment, a commencé à
fréquenter à nouveau des criminels et qui s'est ravisé
dès que nous en avons parlé avec lui). Ainsi, certains des
participants n'avaient pas du tout envie de s'amender (d'après notre
perception, leurs comportements et leurs propres affirmations) : les
sujets 3, 6 et 9 semblaient fonctionner comme cela. Ils développaient
simplement des stratégies pour éviter de se faire prendre. Nous
avons l'impression d'avoir très peu de capacité d'influence sur
cette décision. Certains autres semblaient avoir tiré un trait
sur toute forme de criminalité (sujet 7 et 4). La plupart se situant
entre les deux partageants une envie sincère de s'insérer avec un
refus de mettre en pratique toute une série de lois. Le meilleur moyen,
d'après moi, que nous avons de les faire évoluer sur ce point se
situe dans notre posture éducative :
profondément bienveillante, mais aussi ferme, cadrante et critique. Nous
devons aussi nous mettre à leur niveau, réussir à
comprendre leurs valeurs et leurs modes de fonctionnement tout en les mettant
en rapport avec ceux de la société. J'ai parfois l'impression que
nous sommes comme des ponts, des intervalles entre le fonctionnement
bien-pensant de la société et leur fonctionnement à
eux.
4.4
Résultante stratégique
Après avoir vu les résultantes qui augmentaient la
probabilité de réapparition des comportements violents, observons
ce qu'il se passe quand, pour plusieurs raisons, le sujet décide
consciemment ou inconsciemment que la violence est une mauvaise
stratégie. Il aura la possibilité de refouler ou de
dériver sa violence, mais ce sont là des stratégies
intrapsychiques. S'il a une difficulté pratique, elle ne disparaitra pas
s'il gère mieux ses émotions. Il aura par contre de meilleures
chances de la résoudre adéquatement, notamment en
réfléchissant à une solution alternative à
l'agressivité. Il n'a pas vraiment d'autre choix que d'augmenter ses
moyens de résolution de problèmes. On ne peut pas dire que ce
sont deux phases distinctes l'une de l'autre : d'abord le refus de la
violence (par des expériences malheureuses) et puis l'utilisation
d'autres stratégies. Les deux phases se déroulent en même
temps et dépendent beaucoup des résultantes
évènementielles et intrapsychiques.
Résolution Le professeur Born (1996 in
Vanaubel 2010) a mis en avant, dans une série de recherches, la
difficulté à résoudre des problèmes de la
vie quotidienne chez les jeunes ayant des conduites agressives. La
personne n'étant pas très douée pour résoudre ses
problèmes tentera d'utiliser la violence en tant que stratégie
efficace de résolution. Ces jeunes présenteraient des
déficits au niveau des processus cognitifs, de la verbalisation, un
traitement particulier des informations, une incapacité à
différer la satisfaction et à mettre un moment de
réflexion avant de réagir ainsi qu'une impulsivité trop
importante.
Interventions pratiques : revue de la littérature
C'est sur base de ce constat que plusieurs chercheurs ont
développé des programmes de résolution de
problèmes (Massé & al. 2006 ; D'Zurilla et
Goldfried, 1971 in Leport-Froment 1996) relativement similaires les unes des
autres.
D'Zurilla et Goldfried proposent 5 étapes
· S'arrêter pour penser (cf. Chapitre 3.4)
· Définir le problème
· Produire des alternatives
· Prendre une décision
· Évaluer les résultats de cette
décision
Massé (2006) y ajoute une étape entre la production
d'alternatives et la prise de décision : l'évaluation de ces
alternatives.
Les deux s'accordent pour dire qu'il est plus adéquat
d'améliorer la recherche stratégique plutôt que d'offrir
une série de solutions qui, de toute façon, ne peuvent s'accorder
à toutes les situations.
Sur le terrain : observations et interventions
personnelles
D'abord, y croire Il nous a semblé
indispensable avec notre public d'ajouter à la résolution de
problèmes la confiance en ses propres capacités
(Bandura, 1977 in Vanaubel, 2013) à résoudre des
situations complexes. Nous utilisons pour cela la pédagogie de la
réussite et une directivité très limitée. Par les
chantiers et les autres activités, les participants acquièrent
rapidement des techniques ou des outils qu'ils ne connaissaient pas. Avec la
vie en groupe et les différentes difficultés qu'ils surmontent,
ils acquièrent des compétences relationnelles. Avec les contrats
d'évolutions réalisés chaque mois ainsi que les remarques
que nous leur faisons et leurs propres constats, ils se rendent compte de leurs
réussites. Peu à peu, ils développent leur confiance en
eux et en leur capacité à résoudre des situations
complexes. Des 3 sujets qui ont fait leur auto-évaluation
(évaluation qui n'était pas en place en session 1 (sujet 5 et 6)
et que les sujets 3 et 4 partis avant la fin de la session n'ont pu faire),
tous ont considéré avoir amélioré leur confiance en
eux.
Ensuite, agir Même si cela ne fait pas l'objet
d'activités spécifiques, nous pratiquons une
résolution de problèmes similaire à celle
de Born et Chevalier (in Lepot-Froment, 1996). Celle-ci est utilisée
quand cela s'avère nécessaire, c'est-à-dire quand ils
allaient utiliser une stratégie totalement inadéquate (par
exemple l'usage de la violence) (cf. Chapitre 3.4). La méthode que nous
utilisons se compose de 5 étapes :
· Rationalisation et définition du problème
(aider, si le problème est interpersonnel, à cibler un
comportement et pas un individu)
· Évaluation de la stratégie initialement
prévue (et de ses inconvénients pour le sujet)
· Recherche de pistes de solution (avec suggestions de notre
part si nécessaire)
· Choix et mise en pratique de la solution la plus efficace
(qui peut être dans certains rares cas imposée par un membre de
l'équipe)
· Évaluation de la décision (en
général, constat de réussite et auto-renforcement)
Heureusement, le projet nous offre sonlot de difficultés
et de conflits pour permettre à ces apprentissages de se faire sans
devoir utiliser des jeux de rôles ou des simulations. La pratique
réelle est toujours bien plus efficace.
5 Piste généraliste : la communication
Comme nous l'avons vu dès le départ de ce travail,
la violence se définit comme un moyen de communication. Pas n'importe
quel moyen de communication, un moyen ultime. Cela revient à dire que
l'on va avoir recours à ce moyen quand les autres auront
échoués ou s'ils n'existent pas, s'ils n'ont pas
été appris. En améliorant l'efficacité des autres
moyens de communication, on finit inévitablement par réduire le
recours à la violence. Traube (2002) explique clairement que là
où la communication passe bien, surtout la communication positive, la
violence n'est presque pas utilisée.
Interventions pratiques : revue de la littérature
Il existe de nombreuses méthodes pour améliorer la
communication en général. Cela peut passer de l'apprentissage de
la langue (vocabulaire), de la communication non-verbale à la
verbalisation des émotions, mais cela inclus aussi d'autres formes
d'expression comme l'art au sens large. Nous allons en citer quelques-unes.
Le concept de verbalisation a déjà
été abordé dans plusieurs chapitres de ce travail. Savoir
exprimer sa colère ou sa révolte par les mots permet souvent
d'éviter le recours à la violence.
L'écoute active, comme méthode de
réception et de prise en compte de l'autre, a aussi été
abordée. Elle permet d'apaiser et de reconnaitre l'autre tout en lui
offrant la possibilité de réfléchir plus sereinement
à ses difficultés.
La communication non violente (CNV),
méthode de communication théorisée par Rosenberg (1999)
est basée sur les besoins des individus et sur une expression qui scinde
bien les faits, des ressentis et des demandes. C'est une méthode
efficace pour arriver à communiquer clairement, mais elle est un peu
complexe pour le public visé et surtout, elle est trop aux antipodes des
habitudes de communication de ceux-ci. Avec les participants, nous
considérons que c'est déjà un grand succès si nous
arrivons à les faire parler en "je".
Les différentes méthodes de gestion de
conflit abordées par Traube (2002) sont avant tout
basées sur le dialogue. Il est donc indispensable de pouvoir se parler
pour réussir à résoudre efficacement le conflit.
L'intervention d'un tiers qui permet à la parole de circuler sans heurts
s'avère être souvent utilisée.
Sur le terrain : observations et interventions
personnelles
Une faille ? Un des défauts du projet
Kick Off est peut-être de ne pas avoir misé suffisamment sur le
développement des capacités de communication. Plusieurs
participants (mais aucun des sujets étudiés) nous en ont fait la
demande.
J'ignore s'il s'agit de quelque chose de positif ou de
négatif, mais les trois travailleurs de terrains de l'équipe
adaptent et simplifient leur vocabulaire pour réussir à
communiquer plus efficacement avec les participants (cf. chapitre 3.4).Nous
observons parfois avec une certaine tristesse des intervenants
extérieurs utiliser un langage trop théorique. Les participants
démontrent, sur le moment, un certain respect pour l'intervenant, mais
nous confient par la suite ne rien avoir intégré du contenu de
l'intervention. Je vais proposer à l'équipe de pouvoir
réfléchir à une manière de les aider à
développer leurs aptitudes de communication.
Un de mes défauts personnels est de ne pas être
très sociable (un comble pour un travailleur social). Quand j'observe
mes deux collègues de terrain, je leur envie leur facilité
à discuter et à obtenir, dans des discussions informelles, une
grande quantité d'information de la part des participants. J'aimerais
trouver un moyen d'améliorer cet aspect, car j'ai jusqu'ici eu des
difficultés relationnelles avec les participants chez qui la
communication verbale était réduite (sujets 3 et 5). Je vois ces
mêmes difficultés poindre avec certains participants de la session
3 et j'espère cette fois pouvoir prévenir ce problème.
Mais des actions Nous intervenons cependant de
différentes manières :
Intervention d'un tiers : en cas de conflit
interpersonnel, nous servons de tiers pour aider à résoudre la
difficulté.
Conseil : le conseil est un excellent moyen
qui permet aux participants de développer toutes sorte des
capacités de communication : parler en "je", ne pas juger, savoir
écouter, savoir attendre avant de parler, chercher une solution
ensemble... (cf. chapitres 3.6 et 3.7)
Écoute active : nous prenons, comme
je l'ai expliqué plus tôt (cf. chapitre 3.4), le temps
nécessaire pour écouter leurs difficultés et leurs
problèmes.
Verbalisation : nous les aidons (cf.
chapitre 3.4 et 4.2), à verbaliser leurs émotions, leurs
désirs et leurs sentiments.
Félicitations :Traube (2002)
considère que les milieux où les éléments de
communication positive (comme les félicitations ou les marques de
sympathie) circulent bien sont les milieux avec le moins de violence. Comme
expliqué au chapitre 4.4, nous avons le plus souvent possible recours
aux retours positifs que ce soit individuellement ou collectivement.
Conclusion
Une question se pose maintenant : est-ce que
l'hypothèse de départ a été confirmée par ce
travail ?Est-ce qu'« une approche intégrale permet de
traiter efficacement la violence chez les anciens
détenus » ? J'y répondrai en trois
étapes.
La première étape consiste à se demander si
l'approche utilisée est bien une approche intégrale pour traiter
la violence. J'ai abordé et étudié 10 aspects du
problème : 6 familles de facteurs64(*) et 4 familles de résultantes65(*). J'ai cherché dans la
littérature des pistes pratiques pour travailler avec ces aspects. Cela
m'a amené à aborder 46 façons d'intervenir66(*). Ces 46 pistes ont mené
à la mise en place 35 interventions67(*) pratiques dans le projet Kick Off, 4 interventions
qui seront potentiellement installées68(*) et 12 observations de terrain69(*) sur les impacts qu'on les
aspects sur le public cible. Si nous reprenons la définition du terme
intégral (concept visant à aborder la violence sous tous ses
aspects, dans le contexte le plus large possible), je crois que les chiffres
parlent d'eux même. Donc, oui ; l'approche utilisée est
clairement une approche intégrale.
La deuxième étape consiste à se demander si
la violence a notablement diminué. Les chiffres disponibles sont ceux de
deux sessions. L'échantillon utilisé est donc assez restreint et
il peut y avoir énormément de paramètres de
variabilités qui ne sont pas pris en compte ici. Il faudrait
idéalement refaire les observations pendant plusieurs autres sessions.
Comme expliqué au chapitre 1.6, durant la session 1 du projet Kick Off,
8 conflits violents ont éclaté (dont 2 incluant de la violence
physique). Durant la session 2 du projet, 5 conflits violents ont
éclaté (dont 2 incluant de la violence physique). La session 2
comprenait 60% de participants en plus et 150% d'anciens détenus de plus
que la session 1. Donc, malgré l'augmentation du nombre de participants
et du nombre d'anciens détenus, les conflits violents ont diminué
de 37,5%. On peut donc dire, avec certaines réserves, que la violence a
diminué significativement.
La troisième étape consiste à se demander si
l'usage violence a réellement diminué sur le public cible. Cela
n'a pas pu être mesuré clairement. Certains sujets ont
affirmé être plus calmes (sujets 1, 2, 4 et 7) ou avoir de
meilleures capacités de maitrise (sujets 1,2 et 7), mais ils n'ont fait
aucune affirmationclaire sur la violence. De plus, nos moyens d'observation
sont limités au seul projet : nous ne voyons pas ou très peu
les participants en dehors et, une fois que la préformation de 4 mois
est terminée, nous n'avons que des contacts limités dans une
période de 6 mois. On ne peut donc pas affirmer avec certitude que,
grâce à notre intervention, le public cible à moins recours
à la violence. On ne peut que le supposer.
L'hypothèse de départ tend donc à être
confirmée par ce travail. On ne peut cependant pas dire qu'il s'agit
d'une validation absolue. L'approche intégrale et ses effets restent
quelque chose de difficile à mesurer efficacement. Les observations des
comportements des participants auraient gagné à être plus
rigoureuses. C'est un des objectifs d'amélioration du projet bien
qu'à cause du nombre considérable de choses que nous
réalisons avec le public cible, nous disposons de peu d'énergie
pour pouvoir faire plus.
Personnellement, je ne peux que recommander ce type d'approche
pour traiter la violence : l'approche intégrale. Malgré ses
difficultés d'évaluation, c'est la seule apte à saisir un
sujet aussi complexe. Imputer la violence à une seule cause ou
espérer qu'un seul type d'intervention puisse l'endiguer est une
illusion. Il est nécessaire d'utiliser une approche utilisant plusieurs
aspects d'un problème qui, malgré un mode d'expression similaire
(la violence), est différent pour chaque type de public
étudié.
D'un point de vue personnel, ce travail est un véritable
succès. Je me sentais un peu dépourvu pour analyser et agir sur
les problèmes de violence. J'ai maintenant l'impression d'être
bien outillé. C'était pour moi le principal objectif de cette
étude. Je compte continuer cela tout au long de ma carrière qui,
je l'espère, restera proche du domaine carcéral. J'ai un
rêve : celui de voir se transformer les prisons en lieux
d'éducation où l'objectif principal serait d'apprendre à
bien vivre avec soi-même et avec les autres. J'aimerais
profondément que ces institutions passent du statut de punition et de
moyen de protéger la société à celui de lieu de
traitement et de moyen d'insertion sociale positive. C'est un fantasme, bien
sûr. J'ignore totalement si je pourrai participer à cette
évolution. Une chose est cependant certaine : ce travail est un
grand pas en avant vers ce rêve.
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* 1 Handicap mental léger
et troubles de l'apprentissage
* 2Service de la politique
criminelle, statistiques
* 3 « Manque de
sécurité ; situation où l'on se sent menacé,
exposé aux dangers. [...] Conditions exposant à un danger,
à des risques. » (Le Petit Robert de la langue
française 2014)
* 4 Block S., Kerkab R. et
Ceupens G. (2009) Vers une politique locale de sécurité
intégrale. Direction générale de
sécurité et de prévention, Jérôme Glorie.
Belgique.
* 5 Ophélie D. (2007)
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http://www.oboulo.com/societe-et-moeurs/psychologie/fiche/conflit-psychologie-sociale-39466.html
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* 6 Bérubé L.
(1991) Terminologie de neuropsychologie et de neurologie du comportement.
En ligne http://www.med.univ-rennes1.fr/sisrai/dico/R553.html
consulté le 21 février 2014
* 7Bouyablane T. (2006) La
délinquance juvénile : comparaison et synthèse.
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http://www.memoireonline.com/12/07/781/m_la-delinquance-juvenile-comparaison-et-synthese0.html
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* 8Service international
scientifique de réadaptation sur l'autoroute de l'information (1999).
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des Communications du Québec. Québec. En ligne
http://www.med.univ-rennes1.fr/sisrai/dico/1598.html consulté le 21
février 2014
* 9Cusson M. (1996). Fondements
empiriques de la réinsertion, in La réinsertion des
délinquants, mythe ou réalité ? Presses Université
d'Aix-Marseille. France
* 10L'insertion sociale et
professionnelle désigne le processus permettant l'intégration
d'une personne au sein du système socio-économique par
l'appropriation des normes et règles de ce système. (Wikipedia
(2013)Insertion sociale et professionnelle. En ligne
http://fr.wikipedia.org/wiki/Insertion_sociale_et_professionnelle
consulté le 19 mars 2014)
* 11Achemoune F., El Barouzi
M., Mirkes L., Verhaegen R. (2013) Kick Off : projet
pédagogique. Un projet de l'axe jeunesse de l'asblBravvo. Non
publié. Bravvoasbl. Belgique.
* 12 « L'exclusion
sociale est la marginalisation, la mise à l'écart d'une personne
ou d'un groupe en raison d'un trop grand éloignement avec le mode de vie
dominant dans la société. Ce processus peut être volontaire
ou subi. L'exclusion sociale est souvent consécutive à une perte
d'emploi, au surendettement, à la perte d'un logement... et se traduit
par une grande pauvreté, par une rupture plus ou moins brutale avec les
réseaux sociaux, avec la vie sociale en général. Elle est
vécue comme une perte d'identité. » (La toupie (s.d.)
Dictionnaire de politique. En ligne
http://www.toupie.org/Dictionnaire/Exclusion_sociale.htm consulté le 20
mars 2014)
* 13 Le terme
intégré signifie ici collaboration avec tous les acteurs
concernés (différents secteurs et niveaux de pouvoir) dans le
respect des compétences et des attributions de chacun.
* 14 En réalité,
nous acceptons des participants entre 18 et 30 ans.
* 15 Ce nombre a
été réduit à 8 à partir de la session 2
* 16Achemoune F., El Barouzi
M., Mirkes L., Verhaegen R. (2013) Kick Off : projet
pédagogique. Un projet de l'axe jeunesse de l'asblBravvo. Non
publié. Bravvoasbl. Belgique.
* 17 Appelé plus
communément heures d'intérêt général ou peine
de travail. Étant donné qu'une partie (2 jours sur 4 par semaine)
du projet Kick Off est composée de stage en entreprise ou de chantiers,
certains participants nous sont relayés par le SEMJA (service
d'accompagnement des mesures et peines alternatives). Les jours de
stage/chantier sont comptés dans leurs heures et ils doivent participer
aux deux autres jours de la semaine.
* 18 La mesure
d'élargissement de peine est une mesure qui permet d'effectuer sa peine
à l'extérieur des murs de la prison en étant placé
sous surveillance à l'aide d'un bracelet électronique. Cette
mesure est assortie de plusieurs conditions comme une formation, une
thérapie, l'interdiction de fréquenter certains lieux, quartiers
ou personnes...
* 19 Bulletin Central de
Signalement. Jargon policier qui signifie que la personne est actuellement
recherchée par les services de police.
* 20
« Conséquence, résultat de plusieurs facteurs (surtout
quand il s'agit de forces, d'actions complexes). » (Le Petit Robert
de la langue française 2014)
* 21 Van Kerckhove D. (2012)
Bachelier en éducation spécialisée en accompagnement
psychoéducatif : approches complémentaires :
éducation à la santé. CPFB-IPFC. Belgique.
* 22 Source :
récits de l'équipe (Barouzi M., Mirkes L., Goosens G. et
Verhaegen R.)
* 23 Source : journal de
bord du projet Kick Off
* 24 Diminutif du mot
versus qui en anglais signifie en face de. Expression
utilisée dans les sports de combat pour désigner 2
adversaires.
* 25 Lemonde.fr (2014) Lancer
de chat : 1 an de prison ferme pour l'accusé. En ligne
http://www.lemonde.fr/societe/article/2014/02/03/un-an-de-prison-ferme-pour-avoir-lance-un-chat-et-filme-le-geste_4359323_3224.html
consulté le 25 février 2014.
* 26 Amnesty International
(2012) Peine de mort en 2011 : le nombre d'exécutions est
alarmant dans les pays minoritaires appliquant encore ce châtiment.
Communiqué de presse. En ligne
http://www.amnesty.fr/Presse/Communiques-de-presse/Peine-de-mort-en-2011[...]-4992
consulté le 18 février 2014
* 27 Wikipédia (2014)
Emprisonnement à perpétuité. En ligne
http://fr.wikipedia.org/wiki/Emprisonnement_à_perpétuité
consulté le 18 février 2014
* 28Lafortune D. &Kiely
M.C. (1989) Prévention primaire des psychopathologies : appellation
contrôlée. Santé mentale au Québec, 14,
54-68
* 29Foucart C. & Gallet G.
(2010) Stéréotypes en prison : un prolongement de la
société. Dominique Plasman. Belgique.
* 30 Centre Hospitalier
Esquirol Limoges. Définition de produits : médicaments
psychoactifs. En ligne
http://www.centrebobillot.fr/index.php?location=_def_produits&pageId=4&id_produit=371
consulté le 23 février 2014.
* 31 Plusieurs fois par
semaine
* 32 L'un de nos principes
d'intervention sur les savoir-être est de n'intervenir que si le
savoir-être pose problème à un niveau professionnel. Ce
principe a été décidé dans l'intervalle entre la
session 1 et la session 2.
* 33 D'après les
informations du journal de bord, au moins 6 fois sur les 4 mois. Ce sont
également des informations qu'ils nous ont eux-mêmes
données.
* 34 Je vais ici séparer
l'instruction de l'éducation. L'instruction est ce qui concerne
l'apprentissage des savoirs tandis que l'éducation est ce qui concerne
l'apprentissage des comportements et des croyances.
* 35 Larousse.fr
Dictionnaire de Français : Anxiété. En ligne
http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/anxiété/4369
consulté le 2 mars 2014
* 36 « Tendance vers
un objet connu ou imaginé ; prise de conscience de cette
tendance. » (Le Petit Robert de la langue française 2014)
* 37 « Manque de
puissance, de moyens suffisants pour faire quelque chose » (Le Petit
Robert de la langue française 2014)
* 38 « Opinion
très avantageuse, le plus souvent exagérée, que quelqu'un
a de sa valeur personnelle aux dépens de la considération due
à autrui. » (Le Petit Robert de la langue française
2014)
* 39
« Caractère d'une personne qui se croit supérieure aux
autres, s'enorgueillit d'avantages réels ou supposés. Attitude
arrogante. »(Le Petit Robert de la langue française 2014)
* 40 « Diminution de
la valeur. »(Le Petit Robert de la langue française 2014)
* 41 « Faculté
de s'identifier à quelqu'un, de ressentir ce qu'il ressent. »
(Le Petit Robert de la langue française 2014)
* 42 « Sentiment qui
porte à plaindre et partager les maux d'autrui. Humanité,
sensibilité. »(Le Petit Robert de la langue française
2014)
* 43 « Exprimer,
extérioriser au moyen du langage » (Le Petit Robert de la
langue française 2014)
* 44 « Production de
l'imagination par laquelle le moi cherche à échapper à
l'emprise de la réalité. » (Le Petit Robert de la
langue française 2014)
* 45
« L'écoute active est un concept développé
à partir des travaux du psychologue américain Carl Rogers. Elle
est également nommée écoute bienveillante. Initialement
conçue pour l'accompagnement de l'expression des émotions, elle
est opérationnelle dans les situations de face-à-face où
le professionnel écoute activement l'autre. Elle consiste à
mettre en mots les émotions et sentiments exprimés de
manière tacite ou implicite par l'interlocuteur. L'écoute active
est plus fine que la reformulation en ce qu'elle ne se limite pas à dire
autrement ce qu'une personne vient d'exprimer, mais de décoder la
dimension affective généralement non
verbalisée. » (Wikipédia (2013) Écoute
active. En ligne http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89coute_active
consulté le 20 mars 2014)
* 46 Diminutif de kalachnikov,
fusil mitrailleur russe (AK47)
* 47 Certificat d'Études
de Base. Délivré à la fin des six années
d'études primaires
* 48 Certificat d'Études
Secondaires Inférieures. Délivré après 3
années d'études secondaires
* 49 Certificat d'Études
Secondaires Supérieures. Délivré à la fin des
études secondaires
* 50 Portail Belgium.be
informations et services officiels. En ligne
http://www.belgium.be/fr/formation/enseignement/jury_central/ consulté
le 6 mars 2014
* 51 Wikipédia (2014)
Liberté. En ligne http://fr.wikipedia.org/wiki/Liberté
consulté le 9 mars 2014
* 52 Le temps de
préparation pour la session 3 (1 mois) a été beaucoup plus
court que pour la session 2 (3 mois)
* 53 Le cantinage en prison est
la mise à disposition d'un magasin qui dispose de plusieurs produits de
la vie quotidienne comme des sucreries, des cigarettes, des produits de soin...
* 54 Journal de bord du projet
Kick Off et compte-rendu des conseils
* 55 À la fin de la
session, tous les participants ont été amenés à
faire une auto-évaluation des compétences pour lesquelles ils
avaient fait de réels progrès. Ces compétences figuraient
au dos de leurs attestations de fin de formation. Celles-ci étaient donc
individualisées.
* 56 Journal de bord du projet
Kick Off
* 57 « Action,
rôle caractéristique (d'un élément, d'un organe)
dans un ensemble ; objectif » (Le Petit Robert de la langue
française, 2014)
* 58 « Augmentation
de l'énergie, de l'activité de quelqu'un ; action de
redonner des forces, de l'ardeur. » (Le Petit Robert de la langue
française, 2014)
* 59
« Qualité, fonction d'une personne qui commande, exerce sa
domination. » (Le Petit Robert de la langue française,
2014)
* 60Portail du pouvoir
judiciaire en Belgique
* 61Achemoune F., Barouzi M.,
Mirkes L., Verhaegen R. (2013) Règlement d'ordre intérieur du
projet Kick Off. Bravvo ASBL. Non publié.
* 62 « Action de
dériver de son cours naturel, l'écoulement de quelque
chose. » (Le Petit Robert de la langue française, 2014)
* 63 R.O.I. :
Règlement d'Ordre Intérieur, apparu à partir de la session
2.
* 64 Facteurs
génétiques, psychobiologiques, intrapsychiques, de
réponse, relationnels et facteurs situationnels et environnementaux.
* 65 Résultantes
évènementielles, intrapsychiques, stratégiques et
résultantes sur la reproductivité
* 66Communication non violente,
écoute active, désapprendre des comportements, amendement,
règles, suppression, prévention génétique,
médication, automédication, sommeil, verbalisation,
développement de l'empathie, imagination, traiter et reconnaitre le
vécu, améliorer le traitement de l'information, mettre un temps
de réflexion, sport, freins à la réinsertion,
conscientisation des acteurs de terrain, protection sociale et tuteur de
résilience, inclusion, développement des habilités
sociales, remédiation, apprendre à différer la
satisfaction, raisonnement moral, valeurs religieuses, gestion des
émotions, choc émotionnel, bouc émissaire, modèles
positifs, interventions politiques, développement de la
responsabilité, travail, nature, punitions, peines de prison, ignorer
l'auteur, pédagogie du contrat, interdit, déplacement d'objet,
déplacement d'affect, défoulement, sublimation et
résolution de problèmes.
* 67Interventions sur le
sommeil, traiter et reconnaitre les émotions, mettre un temps de
réflexion, résolution de problèmes, sport, sac de boxe
dans les locaux, remise à niveau, pédagogies actives,
intervention dépendant des valeurs, aide administrative, posture
bienveillante, vie en commun, travail en équipe, écoute active,
tiers pour résoudre les conflits, travail sur la confiance en soi,
pédagogie de la réussite, amendement, règles, conseil des
participants, bouc émissaire, effort de mixité, relation de
confiance, focalisation sur le problème, accompagner vers l'emploi,
responsabilisation, non-directivité, absence d'inactivité,
diminution de l'effet de groupe, embellissement du quartier, punitions,
pédagogie du contrat, travail, expression écrite, gestion des
émotions, valeurs religieuses et présence de modèles
positifs.
* 68 Présence de
modèles positifs, nature, valeurs religieuses et gestion des
émotions
* 69 Perception aversive des
acteurs judiciaires, répartition hommes-femmes, handicap,
médication, automédication, faible niveau d'instruction, impact
de l'éducation, frustrations vécues, bouc émissaire,
inactivité, impact de la nourriture, chances de réinsertion.
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