
UNIVERSITE DE YAOUNDE II
THE UNIVERSITY OF YAOUNDE II
Institut des Relations Internationales du
Cameroun B.P. : 1637 Yaoundé Tél : 22 31 03 05 Fax
N° 22 31 89 99 Site Web:
www.iricuy2.net
International Relations Institute of
Cameroon P.O Box: 1637 YaoundéTel: 22 31 03 05
E-mail: contact@iricuy2.net
MEMOIRE DE MASTER
CROISSANCE ET MUTATIONS DU
SYSTEME FINANCIER AU CAMEROUN
Rédigé et soutenu publiquement en vue
de l'obtention du
Diplôme de Master Professionnel
II
en Relations Internationales parcours
Banque-Monnaie-Finance Internationales
par
MEFO'O NGO'O Yves Lionel
Maîtrise ès Sciences
Économiques Option: Monnaie-Banque-Finance.
Sous la direction de Sous la supervision de
Monsieur KOMON Jean-Paul Monsieur AVOM
Désiré
Professeur à l'Université de Yaoundé II
Professeur à l'Université de Yaoundé II
Juillet 2014

Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ j ~
L'Institut des Relations Internationales du Cameroun (IRIC) de
l'Université de Yaoundé II-Soa n'entend donner ni approbation, ni
improbation aux opinions émises dans les mémoires. Elles doivent
être considérées comme propres à leurs auteurs.

Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ ii ~
A mes enfants bien aimés Astride Priscilla
Francine NYANGONO MENDJANA et Lionel Harry NGO'O
NKOULOU qui ont été pour moi une source de
motivation et d'inspiration durant ma formation et ont toujours su me donner le
sourire.

Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ iii ~
Au moment de rédiger ce mémoire, je tiens tout
d'abord à remercier mon Directeur de mémoire, Monsieur
KOMON Jean Paul, enseignant à la Faculté des
Sciences Économiques et de Gestion (FSEG) de l'Université de
Yaoundé II-Soa, pour ses conseils, son aide et ses encouragements.
Je tiens également à remercier Monsieur
AVOM Désiré, Professeur des Universités
à l'Université de Yaoundé II-Soa (FSEG), pour sa
supervision.
Ma gratitude va vers mes parents, Monsieur Moïse
Justin NGO'O EVE'E et Madame Célestine EYINGA
AKAME, qui me soutiennent et m'encouragent dans la lancée
intellectuelle, pour les sacrifices qu'ils ne cessent de consentir pour ma
formation ; qu'ils voient en ce travail l'accomplissement de leurs efforts.
Je manifeste ma gratitude à mes frères et soeurs
: Annie Astride NYANGONO, Jean-Brice AKOU'OU,
Éric Stéphane AVA, Inès Glwadys
Noëlle NGONO et Fustel-Franck EVE'E NGO'O qui
n'ont eu de cesse de me soutenir dans la rédaction de cette oeuvre ;
à ma bien-aimée Flocile NGAH NKOULOU ; et sa
famille Flaurent NKOULOU BELIBI, Cécile
MBANGONO OLINGA, Kiri OTITIE, Mileine Melody
EWONO, Yves Landry BELIBI NKOULOU, Marie
Trésor AFANDA NKOULOU, Cecil NKOULOU, pour
leur soutien affectif et matériel dans l'achèvement de ce travail
;
A mes amis Paulin ESSOGO ESSOGO,
Romaric Aubin AMOUGOU KYE, Michel Ledoux DJOUNGA
NYA, Maurice Parfait Christian FOUDA, Esther
Majoie Rosy NGO BALAK, Georges AWONO EBANGA,
Catherine Solange ABOMO, Francis EDINGA
MBIDA, Lionel Arthur OLLE, Joël MBARGA ONDOUA, Florence
MENGBWA, Martin YOUTOU, Amira KALLOBE SALLI
NGUIEBE, Thomas Désiré METOGO,
Octavie Rachel MALONGO, Mariatou BAKO,
Willy ANGO, Emmanuel MBE MBE, Marcelle Blandine
NYAMINE ADJA, Annette Laure ANOÏ NDANGA Epse
NDI-MEKA, je leur dis merci pour leur grande compréhension et
soutien affectif dont je leur serai à jamais redevable;
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ iv ~
Ma reconnaissance va aussi à l'ensemble des
responsables de l'IRIC. Je remercie particulièrement Monsieur
EBA EBE Gabriel avec lequel, j'ai pu bénéficier
de conversations très éclairantes à plusieurs reprises.
Une pensée particulière à l'ensemble des camarades avec
lesquels j'ai partagé ces années de formation, plus
précisément à Faridatou NANA,
Pamella EPOLE ALOBWEDE, Christian Gérard
Gaël METSAM, sans oubliés mes camarades de promotion de
l'ENAM (Section Trésor, promotion EMERGENCE).
Que soit par ailleurs remerciés tous ceux qui, à
divers niveaux, de près ou de loin, ont concouru à la
réalisation de ce travail.
Enfin, et parce que la fin de toute chose vaut mieux que son
commencement, je voudrais bénir éternellement le Seigneur, le
seul souverain et immortel, en qui j'ai la providence, de m'avoir permis
d'achever cette oeuvre.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ v ~
LISTE DES ABBREVIATIONS
AES-SONEL : Société Nationale
d'Électricité du Cameroun.
ANEMCAM : Association Nationale des
Établissements de Microfinance au Cameroun
ANIF : Agence Nationale d'Investigation
Financière
BAC : Banque Atlantique du Cameroun
BEAC : Banque des États de l'Afrique
Centrale
BICEC : Banque Internationale du Cameroun
pour l'Épargne et le Crédit
BIP : Budget d'Investissement Public
BM : Banque Mondiale
CEEAC : Communauté Économique
des États de l'Afrique Centrale
CEMAC : Communauté Économique
et Monétaire de l'Afrique Centrale
CAA : Caisse Autonome d'Amortissement
CBC : Commercial Bank - Cameroun
CEEAC : Communauté Économique
des États de l'Afrique Centrale
CENAINVEST : Central Africa Investment
CIMA : Conférence Interafricaine des
Marchés d'Assurances
CMF : Commission des Marchés
Financiers
COBAC : Commission Bancaire de l'Afrique
Centrale
DGTCFM : Direction Générale du
Trésor, de la Coopération Financière et
Monétaire
DSCE : Document de Stratégie pour la
Croissance et l'Emploi
DSX : Douala Stock Exchange
ECMR : « État du Cameroun »,
dénomination de l'emprunt
FCFA : Franc de la Coopération
Financière en Afrique Centrale
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ vi ~
EMF : Établissement de Micro
Finance
FMI : Fonds Monétaire International
HEVECAM : Société
d'Hévéa du Cameroun
IDE : Investissements Directs
Étrangers
INS : Institut National de la Statistique
OHADA : Organisation pour l'Harmonisation en
Afrique du Droit des Affaires
OMC : Organisation Mondiale du Commerce
OMD : Objectifs du Millénaire pour le
Développement
ONG : Organisation Non Gouvernementale
OPCVM : Organisme de Placement Collectif en
Valeurs Mobilières
PSI : Prestataire de Services
d'Investissement
PADMIR : Projet d'Appui au
Développement de la Microfinance Rurale
PARIF : Plan d'Action en vue du Renforcement
de l'Intermédiation Financière
PIB : Produit Intérieur Brut
PME : Petite et Moyenne Entreprise
PMI : Petite et Moyenne Industrie
PNG : Position Nette du Gouvernement
PNUD : Programme des Nations Unies pour le
Développement
PPMF : Projet d'Appui au Programme National
de Microfinance
SCB CA : Société Commerciale de
Banque - Cameroun
SGBC : Société
Générale de Banques au Cameroun
SOCAPALM : Société Camerounaise
de Palmeraies
SYGMA : Système de Gros Montants
Automatisés
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ vii ~
SYSTAC : Système de Télé
compensation en Afrique Centrale TIC : Technologies de
l'Information et de la Communication TOFE : Tableaux
d'Opérations Financières de l'État
TVA : Taxe sur la Valeur Ajoutée
UE : Union Européenne
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ viii ~
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 : Évolution du nombre de banques et
d'agences. 43
Tableau 2 : Distribution géographique des agences
bancaires au Cameroun. 44
Tableau 3: Créances transférées à
la SRC (en millions de FCFA) 49
Tableau 4 : Évolution du ratio de solvabilité
minimum des banques camerounaises (en %) 65
Tableau 5 : Évolution du ratio des couvertures des
immobilisations (en %) 66
Tableau 6 : Évolution du ratio des liquidités
minimum (en %) 67
Tableau 7 : Évolution du ratio de transformation
à long terme (en %) 68
Tableau 8 : Synthèse du compte de résultat et
des coefficients de rentabilité du système bancaire
camerounais (montants en millions de FCFA). 71
Tableau 9: Évolution du taux de croissance au Cameroun
77
Tableau 10 : Répartition du capital social des banques
en activité au Cameroun (en %) 78
Tableau 11 : Répartition du crédit selon la
durée au Cameroun (en %) 81
Tableau 12 : Part de marché des dépôts
2004 87
Tableau 13 : Part de marché de crédit 2004 88
Tableau 14 : Évolution du nombre de banques et
d'agences 89
Tableau 15 : Évolution du réseau bancaire
camerounais 90
Tableau 16 : Répartition du capital social des banques
en activité au Cameroun (en %) 93
Tableau 17 : Évolution du volume des transactions.
105
Tableau 18 : Opérations validées par la CMF.
107
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ ix ~
LISTE DES DIAGRAMMES
Diagramme 1 : Évolution de la capitalisation
boursière par titre (milliards de FCFA) 105
Diagramme 2 : Répartition entre les institutionnels et
les personnes physiques. 106
Diagramme 3 : Le secteur bancaire se taille la plus grande
part. 106
Diagramme 4 : Répartition par 11 PSI. 107
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ x ~
Résumé :
Cette étude vise à analyser les effets des
mutations financières sur la croissance économique au Cameroun.
En effet dans le cadre de plans d'ajustement structurel recommandés par
les institutions de Bretton Woods, le gouvernement camerounais a depuis le 16
octobre 1990 libéralisé le secteur financier, assoupli la
politique monétaire, restructuré les banques et adopté de
nouvelles réglementations prudentielles. Ainsi, nous analyserons l'effet
des réformes du système financier sur les performances de
l'économie camerounaise sur la période 1990-2012. Les
résultats obtenus mettent en évidence un effet mitigé de
la relation entre les réformes monétaires et la croissance
économique de long terme. Ce qui laisse penser à la
possibilité de mise en oeuvre des conditions nécessaires à
la réussite des réformes monétaires.
Mots clés : Mutations
financières, Croissance économique, Système financier.
Abstract:
This survey aims to analyze the effects of the financial
mutations on the economic growth in Cameroon. Indeed in the setting of plans of
structural adjustment recommended by the institutions of Bretton Woods, the
Cameroonian government has since October 16, 1990 liberalized the financial
sector, softened the monetary policy, restructured the banks and adopted of new
prudential regulations. Thus, we will analyze the effect of the financial
system reform's on the performances of Cameroonian economy on the period
1990-2012. The gotten results put in evidence an effect mitigated of the
relation between the monetary reforms and the economic growth of long term.
What lets think about the possibility of setting in work of the necessary
conditions to the success of the monetary reforms.
Keys words: Financial mutations, Economic
growth, Financial system.
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Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ xi ~
PREMIERE PARTIE: DEVELOPPEMENT FINANCIER ET
CROISSANCE
ECONOMIQUE 11
Chapitre 1: Les fondements
théoriques et empiriques des origines des mutations
financières 16
Section I : La globalisation financière .17
Section II : L'accélération des innovations
financières 23
Chapitre 2: Degré de
développement financier et croissance : analyses empiriques
33
Section I : La crise de l'intermédiation
financière 34
Section II : Les mesures d'ajustement financier au Cameroun
45
DEUXIEME PARTIE: EFFICIENCE DU SYSTEME
FINANCIER SUR LA
CROISSANCE ...62
Chapitre 3: La libéralisation
et la répression financières 61
Section I : Évaluation de la
compétitivité financière du système bancaire
..62
Section II : Évaluation de la politique de
crédit de 1972 à 2012 .72
Chapitre 4: Innovations
financières et croissance économique du Cameroun 83
Section I : Les caractéristiques actuelles de
l'intermédiation bancaire au Cameroun .85
Section II : Émergence de la microfinance ..96
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI

INTRODUCTION GENERALE
«L'erreur ne devient pas vérité
parce qu'elle se propage et se multiplie ; la vérité ne devient
pas erreur parce que nul ne la voit.»
GANDHI
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
Traditionnellement, lorsqu'on parle de « système
financier », on a toujours une vision trop duale de celui-ci. En effet,
une distinction est faite entre les économies de marché
de capitaux, où la plupart des transactions financières
s'effectuent directement sur le marché et les économies
d'endettement, où prédominent les banques comme
intermédiaires. Il faut souligner également que le système
financier englobe les intermédiaires financiers, les marchés et
l'ensemble des institutions et mécanismes institutionnels
(réglementations, systèmes de compensation, régime de
change, etc.)qui rendent possibles les échanges financiers et qui
participent à leur bon déroulement.
De plus, le système financier international a connu au
cours de ces trois dernières décennies de sérieuses
mutations. Celles-ci sont accélérées notamment par l'essor
des technologies de l'information et de la communication, lesquelles ont
contribué profondément au bouleversement des modalités de
formulation et de mise en oeuvre des marchés des capitaux. Ces mutations
désignent la profonde évolution des systèmes financiers
amorcée dès les années 1970 dans les pays anglo-saxons,
les années 1980 pour les pays européens et les années 1990
pour beaucoup de pays émergents (Romey, 2004). Il s'agit d'une
évolution relative à la conjoncture actuelle qui trouve son
interprétation dans le rétablissement des équilibres
macroéconomiques et l'ajustement financier. A cet effet, le passage aux
changes flottants à partir de 1973, le changement de contexte
macroéconomique (chocs et contre chocs énergétiques,
ralentissement de la croissance, gonflement de la dette publique des pays
industrialisés, abandon des politiques d'encadrement du
crédit) ont conduit à partir du début des
années 1980, la communauté internationale à modifier le
cadre institutionnel mis en place au lendemain de la seconde guerre mondiale.
C'est ainsi que les missions des banques centrales, des banques de second rang,
mais également des institutions financières internationales se
sont modifiées progressivement à travers l'adoption de nouvelles
réglementations prudentielles, la libéralisation du secteur
financier et l'assouplissement de la politique monétaire. Dès
lors, on est passé dans de nombreux pays, d'un système financier
centralisé à un système financier
décentralisé. Cette évolution s'est traduite dans les pays
en voie de développement par l'apparition des marchés
émergents et la libéralisation financière d'une part et
dans les pays développés par la désintermédiation
d'autre part.
À l'observation, deux faits majeurs vont marquer la
sphère financière. D'un côté, il y a la
globalisation financière qui s'est accompagnée d'une
libéralisation des systèmes financiers nationaux traduite,
elle-même, par le décloisonnement, la
désintermédiation et la marchéisation. D'un autre
côté, il y a l'accélération des innovations
financières dont le développement ne s'est pas effectué
partout au même rythme ; les pays anglo-saxons (États-Unis,
Canada, Angleterre) ont été
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 2 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
leaders en la matière avec notamment la création
du Nasdaq1 en 1971, celle des marchés organisés
d'options à Chicago en 1973 et à Londres en 1978
(Romey, 2004).Les autres pays européens ont
abondé dans le même sens à partir des années 1980,
puis les pays émergents dans les années 1990. Aussi, deux types
d'initiatives sont à l'origine de cette transformation : l'initiative
privée, surtout dans le cas des pays anglo-saxons, avec une
accélération sans précédent d'innovations
financières introduites le plus souvent par les institutions
financières (Silber, 1983)2 ; l'initiative
publique ayant dominé notamment dans les pays européens soucieux
de rattraper le retard de leur place boursière par rapport aux pays en
avance. Progressivement, les marchés financiers se sont
développés, les banques ont suivi le même mouvement en
formant des conglomérats financiers3
multispécialisés. La banque est ainsi devenue une industrie ne se
préoccupant pas seulement de sa fonction d'intermédiation, mais
également de la tenue de ses marges et de son taux de
profitabilité (Bekolo Ebé, 1998). Elle a grandi
et passe de la banque universelle à la banque éclatée
incluant à cet effet, la sous-traitance. Par ailleurs, le secteur
financier camerounais, jusqu'à la fin des années 70, est
caractérisé par une relative stabilité à travers le
poids des pouvoirs publics, le non-respect des normes prudentielles et une
politique monétaire laxiste. Ce qui va conduire à la
première crise bancaire qui va secouer l'ensemble du système
économique et financier au milieu des années 80, se manifestant
à travers au moins cinq facteurs : les défauts de paiement, les
créances douteuses, la suspension des découverts, les pertes
financières des agents économiques du fait de
l'illiquidité des banques, et les faillites (fermetures d'agences ou
de certaines banques).
L'Afrique centrale en général et le Cameroun en
particulier n'ont pas été épargnés par cette
évolution de la structure financière. En effet, le système
financier camerounais, dont les défaillances ont été
révélées en 1987 par la crise économique, a subi de
profondes mutations au cours des années récentes. Les
marchés financiers étant inexistants, ces mutations ont
porté essentiellement sur le système d'intermédiation
bancaire, comme susmentionnées. Les autorités publiques ont
joué un rôle essentiel dans ces changements et cela pour un
certain nombre de raisons : la crise économique qui a frappé les
pays de la CEMAC4 a eu pour conséquence entre autres, la
faillite des banques
1NASDAQ : National Association of Securities
Dealers Automated Quotation, créé en 1971, il constitue
l'inter-marché des entreprises innovantes aux États-Unis et est
divisé en trois étages (baby nasdaq, middle nasdaq, big nasdaq).
Il est le deuxième plus important, en volume traité,
marché d'actions des États-Unis et le plus grand marché
électronique d'actions du monde.
2Silber W. (1983), «The process of Financial
innovation », American Economic Review, May.
3Le terme conglomérat financier
désigne « Tout groupe de sociétés ayant un
actionnariat commun et dont les activités exclusives ou
prédominantes consistent à fournir des services significatifs
dans au moins deux secteurs financiers différents (banques, titres,
assurances) » (Scialom, 1999, p. 40).
4CEMAC : Communauté Économique et
Monétaire de l'Afrique Centrale est née en 1994 sous les cendres
de l'Union Douanière et Économique de l'Afrique Centrale (UDEAC).
Elle est composée de six (06) pays : Cameroun, Congo, Gabon,
Guinée Équatoriale, Tchad et République Centrafricaine.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 3 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
commerciales et des institutions financières
spécialisées dans le financement à long terme. Ainsi, pour
juguler cette crise, les pouvoirs publics ont mis en place un certain nombre de
réformes financières visant à stabiliser et à
assainir l'environnement macroéconomique. Ces réformes ont
consisté en une redéfinition de la politique monétaire, en
une restructuration du système bancaire par le biais des liquidations,
de fusions, ou de recapitalisation de certaines institutions bancaires. Une
autre politique générale et non la moindre mise sur pied au
début des années 1990 a consacré, à n'en point
douter, la création de la COBAC5dont l'objectif est de
contribuer à l'assainissement du système bancaire par un
contrôle régulier et une supervision des établissements de
crédit.
A la faveur des réformes structurelles
(assainissement du système bancaire, émergence des EMF),
le système financier camerounais s'est caractérisé par la
suite par une forte surliquidité, une forte concentration des
activités de crédits et de dépôts. Le marché
bancaire est en particulier légèrement développé,
avec un faible taux de bancarisation, et les opérations de prêts
ne concernent que les banques du même groupe. Les premiers
bénéficiaires des crédits accordés sont les
entreprises privées, avec environ 65 % du total des crédits. Les
entreprises publiques et les particuliers détiennent respectivement 13.2
% et 12.2 % de l'encours des crédits. La répartition des
crédits à l'économie selon la durée est
dominée par les crédits à court terme qui
représentent 64.9 %, les crédits à moyen terme et à
long terme représentant 32.9 % et 3.2 %, respectivement. Le
marché boursier, faiblement capitalisé (XAF 94 milliards en
2011), est animé par seulement trois entreprises à savoir la
SEMC6, la SAFACAM7 et la SOCAPALM8. Pour
promouvoir et dynamiser le marché financier, le gouvernement a pris
plusieurs mesures dont la création d'un cadre législatif sur les
Organismes de Placement Collectif des Valeurs Mobilières (OPCVM) et la
finalisation des réformes sur la dématérialisation des
valeurs mobilières. En outre, l'émergence de la microfinance est
à la fois une conséquence de la faillite du système
bancaire traditionnel et le produit de la restructuration bancaire. Aussi, le
secteur de la microfinance reste un complément efficace du secteur
bancaire traditionnel dans le financement à court terme des
activités en faveur des pauvres. Le Gouvernement entend améliorer
le rôle de refinancement des établissements de microfinance de la
Banque Centrale à travers: (i) la consolidation et l'extension des
services financiers de base, ainsi que l'amélioration de la
qualité des prestations des Établissements de
5COBAC : Commission Bancaire de l'Afrique Centrale,
créée le 16 octobre 1990.
6SEMC : Société des Eaux
Minérales du Cameroun, filiale de la Société Anonyme des
Brasseries du Cameroun (SABC), créée le 16 Janvier 1979 ;
première entreprise introduite à la bourse, enregistrant sa
première cotation le 30 juin 2006 au cours de 54 000 FCFA.
7SAFACAM : Société Africaine
Forestière et Agricole du Cameroun, introduite en bourse le 09 Juillet
2008. 8SOCAPALM : Société Camerounaise de Palmeraies
créée en 1968 par décret présidentiel n°
68/DF/451, introduite en bourse avant la fin du deuxième semestre 2008
au cours de 45 999 FCFA.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 4 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
microfinance (EMF) ; (ii) le renforcement du contrôle et
de la transparence au sein des EMF, (iii) le partage des rôles entre la
Commission bancaire de l'Afrique centrale et la Cellule de contrôle des
EMF ; et (iv) le renforcement de la monétisation. Il convient de relever
que le système financier s'est enrichi d'un nouvel établissement
financier public et de deux établissements spécialisés de
crédit, portant ainsi à 15 le nombre des banques en
activité. La mise en oeuvre du plan d'action de renforcement de
l'intermédiation financière s'est poursuivie avec la signature
des textes visant à renforcer le cadre juridique et réglementaire
et à diversifier les instruments financiers. Malgré
l'assainissement du système financier, les normes prudentielles ne sont
pas toujours respectées par toutes les banques. Ainsi, sept (07) banques
en activité disposent de fonds propres nets suffisants pour honorer
l'ensemble des normes prudentielles. La norme prudentielle respectée par
le plus grand nombre d'établissements est celle se rapportant au ratio
de liquidité. La norme relative au coefficient de transformation
constitue celle à l'égard de laquelle l'on observe le plus grand
nombre de banques en infraction. C'est dans ce contexte que nous nous
pencherons sur la question suivante : les mutations
financières ont-elles dynamisé la croissance de l'économie
du Cameroun ?
Sur le plan de l'économie appliquée au
développement, le lien « finance-croissance économique
» a été étudié plus en détail,
notamment avec les travaux de Goldsmith (1969) et
McKinnon (1973), à travers l'école dite de la
répression financière. Selon les auteurs, le secteur financier
joue un rôle important dans le processus de croissance économique
mais il peut être limité si les autorités publiques
agissent sur le prix ou l'allocation des crédits, c'est-à-dire
dans un contexte de répression financière. Les principales
suggestions issues de cette école ont largement été mises
en place dans plusieurs pays en développement pendant les années
soixante-dix et quatre-vingt. Elles visent essentiellement à
libéraliser le secteur financier dont l'objectif est de soutenir la
croissance des taux d'épargne et d'investissement ainsi que
d'améliorer l'efficacité du capital.
Ainsi, de l'interrogation principale susmentionnée
découlent deux préoccupations secondaires, à savoir :
Le système financier favorise-t-il la croissance
économique au Cameroun ?
Les mutations financières permettent-elles
d'améliorer la compétitivité du système financier
?
Ces interrogations revêtent un intérêt
à la fois positif et logique. Sur le plan positif, il est à noter
que les analyses des effets du système financier restent relativement
peu nombreuses.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 5 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
En outre, malgré la fécondité de la
recherche sur le lien entre le développement financier et le
développement économique dans le monde
(Goldsmith, 1955, 1969 ; Gurley et
Shaw, 1955, 1960 ; McKinnon, 1973, 1991 ;
Shaw, 1973 ; Fry, 1988, 1989 ;
Thornton, 1991, 1944 ; King et
Levine, 1992, 1993 ; Bencivenga et
Smith, 1991 ;Greenwood et
Jovanovic, 1990 ; Pagano, 1993...),
relativement peu de travaux semblent s'être intéressés aux
pays d'Afrique centrale en général et au Cameroun en particulier
en terme de contribution sur la question. L'ambition visant à combler ce
vide peut dès lors s'avérer utile. Sur le plan logique,
l'évaluation de l'impact des mutations sur la
compétitivité du système financier présente un
intérêt évident en termes d'analyses sectorielles des
questions de performance et de financement de l'économie.
En se basant sur les analyses théoriques sur
l'innovation financière qui ont été faites par
Silber9(1983), il ressort que l'innovation
financière est à l'origine des transformations du système
financier. Aussi, deux types d'initiatives peuvent être associés,
en l'occurrence l'initiative privée et l'initiative publique. Cette
innovation financière est comprise comme le produit d'une contrainte
exogène qu'il s'agit de contourner. L'idée était
déjà présente chez Gurley et Shaw
(1960) pour qui « dans toute économie, la structure
financière est continuellement remodelée par les efforts des
agents économiques pour échapper aux contraintes
déjà existantes ». Les analyses de Silber
(1975,1983) et Kane (1983,1988) confèrent
d'intéressants fondements théoriques aux innovations de
contournements, notamment celles introduites par les institutions
financières afin de relâcher la contrainte de la
réglementation.
Cette innovation se développe pour attirer la
clientèle en mettant à sa disposition des instruments
supposés correspondre à ses besoins. Pour Bourguinat
(1992), ce développement constitue une conséquence de la
mondialisation des marchés et de la globalisation financière. Il
va analyser la finance internationale en insistant sur le fait qu'il existe de
nos jours un vaste marché financier international dont les parties sont
étroitement solidaires et interdépendantes. Dans la même
pensée, Bekolo-Ebé (1998) estime que les
économies contemporaines s'engagent au renforcement des interconnexions
et à une unification du marché qui s'homogénéise
par de-là les États-nations.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 6 ~
9Silber W (1983), « The process of Financial
innovation », American Economic Review, May.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
Par la suite, les études de Sandretto
et Tiani Keou (1993), Tamba et
Tchamambe Djine (1995), et Bekolo-Ebé
(1996) relèvent les changements de la sphère
financière sur le plan global en s'interrogeant sur l'origine de la
crise et sur l'efficacité des mesures correctives. Pour
Bekolo-Ebé (2001) et Joseph A. (2001),
les reformes ont consisté en une redéfinition de la politique
monétaire, avec l'adoption de la programmation monétaire, mais
aussi en la mise en place d'un cadre prudentiel et en une restructuration du
système bancaire, et en la création du marché
monétaire. Ce qui permet aux banques secondaires de recourir à la
technique d'Open Market pour se refinancer.
Aussi, Hugon (1996) va analyser les
innovations financières de la part des institutions officielles. Ces
innovations concernent les nouveaux produits, les nouveaux circuits, les
nouvelles organisations mais également les nouvelles
réglementations, et les changements de politique économique.
Les travaux de Joseph A. (2000) montrent que
la sphère financière n'a pas d'influence sur la sphère
réelle. Les canaux de transmission entre ces deux sphères
étant la part de l'épargne collectée par les banques et
effectivement allouée aux investissements. Les banques vont donc
rationnées. Mais ces travaux ne tiennent pas compte de la finance
informelle dont l'influence sur la sphère réelle est
indéniable au Cameroun. A cet effet, certaines études ont
montré que 49% des activités sont financées par le
système informel. Aussi, Éboue (1996) estime que
c'est le rationnement bancaire de la demande privée de crédit qui
explique le dynamisme de la finance informelle.
De même que le concept de finance informelle a
émergé pendant les années 1980, le concept de microfinance
a émergé pendant la décennie suivante. Lelart
(2002) élabore les facteurs à la base de l'essor de la
microfinance et pense que l'émergence de la microfinance est une
manifestation de la vitalité de la finance informelle. Dès lors,
la finance informelle contribue certes au fonctionnement de l'économie,
en particulier au sein des familles et de micro-entreprises, et elle le fait
efficacement. Mais elle n'y contribue que faiblement, pour des montants
limités et pour des durées courtes. De nombreuses études
de Nzemen (1988), Lelart (1989) montrent que
les mécanismes informels sont de puissants instruments de mobilisation
de l'épargne et de financement d'activité tant formelle
qu'informelle. Il n'en demeure pas moins vrai qu'ils font face à des
contraintes qui en limitent l'incidence positive. Aussi, le partitionnement des
circuits financiers relève du dualisme financier dans les pays en
développement, composés d'une part, d'un système informel
plus adapté aux structures et aux besoins des populations. D'autre part,
d'un système financier formel déconnecté des structures
économiques internes.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 7 ~
C'est ainsi aussi que, Lelart (2002) va
analyser les conséquences de l'évolution de la finance informelle
sur l'évolution des systèmes financiers et trouve qu'il est
possible que le système financier ne comporte plus qu'une seule
catégorie d'institutions. On serait en présence d'un
système unifié. Romey (2004) définit les
grands traits de la mutation financière et pense que la globalisation
financière et l'accélération des innovations
financières en constituent les deux principaux piliers.
Demartini (2004) va, quant à lui, analyser les
conséquences de la mutation financière et trouve qu'en favorisant
une allocation des capitaux, la mutation financière a sans doute
contribué à rendre le fonctionnement des systèmes
bancaires plus efficient. Seulement, ce gain d'efficience s'est
opéré au prix d'une instabilité accrue.
Il faut tout de même noter que, depuis les travaux de
Goldsmith (1969), il est reconnu qu'il existe un lien entre le
taux de croissance à long terme de l'économie et le niveau
d'évolution du secteur financier. Seulement, cette hypothèse est
galvaudée dans les économies en développement lorsqu'on
tient compte des restrictions réglementaires introduites par les
politiques gouvernementales. Aussi Guillaumont et
Kpodar (2004) relèvent que l'instabilité du
développement financier croît avec le système
lui-même, tout en montrant l'effet favorable du développement
financier sur la croissance économique et l'effet antithétique
des crises financières. Pourtant à l'observation des faits
stylisés de la zone CEMAC, la libéralisation ainsi
enclenchée a permis dans un premier temps d'améliorer les
conditions de dépôts, mais dans un second temps, elle a conduit
à la baisse drastique des ratios de développement financier. Ces
conclusions que nous pouvons tirer de l'observation des faits nous
amènent à nous intéresser davantage au sens de la
causalité entre le développement du système financier et
le phénomène de croissance de l'activité
économique.
L'objectif principal de cette étude est d'analyser
l'effet des réformes du système financier sur les performances de
l'économie camerounaise.
De cet objectif général découle deux
objectifs secondaires :
? Analyser et évaluer l'effet du développement
financier sur la croissance du Cameroun,
? Analyser et évaluer l'efficience du système
financier sur la croissance de l'économie camerounaise.
L'hypothèse centrale des analyses ici
présentées est que les transformations du système
financier favorisent la croissance de l'économie du Cameroun.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 8 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 9 ~
De façon plus spécifique :
? Les mutations financières favorisent la croissance
économique au Cameroun.
? Les mutations financières permettent
d'améliorer les performances du système financier national.
Les données primaires seront collectées
auprès des banques et institutions financières non bancaires
ayant été profondément restructurées d'une part
(unités objets) et celles ayant un statut quo (unités
témoins). La méthode des quotas permet de déterminer le
nombre de banques et institutions financières bancaires et non bancaires
à enquêter.
Le constat général est que les analyses de la
croissance au Cameroun sont généralement fondées sur une
approche monétaire, or la croissance est un état
multidimensionnel relevant à la fois du culturel, de
l'économique, du social et du politique. Depuis quelques années,
dans l'analyse de la croissance, un consensus se dégage indiquant que
l'approche monétaire ne suffit plus pour caractériser ce
phénomène complexe. Pour tenir compte de cette critique,
l'intérêt scientifique de ce travail est d'utiliser une dimension
multidimensionnelle de la croissance dans l'analyse de l'impact des mutations
financières sur la compétitivité du système
financier au Cameroun.
Ainsi, nous construirons des indicateurs non monétaires
de la pauvreté, en utilisant l'analyse des correspondances. Pour finir
un indicateur composite de la croissance multidimensionnelle du système
financier sera construit.
Dans ce travail, nous allons nous intéresser à
l'efficacité du système financier à booster la croissance
économique. En effet, en sciences sociales où
l'expérimentation n'est pas possible, l'on fait face à une
alternative. La première branche de l'alternative cherche à
comparer les situations dites « d'avant » avec des situations dites
« d'après » pour chacune des unités statistiques
retenues (banques et institutions financières). Cela se fait autant que
possible en comparant les niveaux d'un ensemble d'indicateurs entre ces deux
situations. La deuxième possibilité, souvent la plus
utilisée, peut être qualifiée de
quasi-expérimentale. Elle procède par comparaison directe entre
des unités statistiques cibles ou objets et des unités
statistiques témoins ou de contrôle. C'est celle-ci qui sera
retenu dans le cadre de ce travail.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 10 ~
Ainsi, on s'intéressera aux approches théoriques
des origines des mutations financières qui nous permettront de poser le
cadre théorique. Par la suite, nous analyserons les conséquences
des mutations financières sur l'économie camerounaise et sur le
système financier dans une démarche empirique. Il s'agira d'abord
d'évaluer la solidité financière du système
bancaire, laquelle s'appréciera à travers le respect des normes
prudentielles édictées par la COBAC, les indicateurs de
rentabilité et les autres indices de performance. A cet effet, il sera
calculé les ratios de solvabilité, de liquidité et les
indicateurs de rentabilité. Ensuite, il sera évalué la
politique de crédit entre 1972 et 1990 (années qui marquent le
début des réformes). Les résultats seront donnés
sous formes de graphiques et de tableaux explicatifs des évolutions
observées. Enfin, il sera évalué la politique de
crédit élaborée entre 1990 et 2012. A cet effet, il sera
décelé l'évolution des tendances. Or, la connaissance des
tendances est essentielle à la politique économique dès
lors que celle-ci tend à s'appuyer sur des prévisions. L'objectif
de la politique économique sera dans cette optique d'inciter ou de
déjouer les tendances normalement observées dans
l'économie. C'est pourquoi nous tenterons, d'interpréter les
évolutions observées et d'en dégager quelques
implications.
Par ailleurs, notre étude utilise les données
relevées depuis 1972, mais s'étend beaucoup plus sur la
période comprise entre 1990 à 2012. Période concentrant
à notre avis les récents bouleversements observés sur la
sphère financière camerounaise. La recherche d'un cadre
illustratif qui puisse aider à l'analyse et l'évaluation de
l'effet du développement financier sur la croissance fera l'objet d'une
première partie. Cette partie permettra d'éclairer la question
des fondements théoriques et empiriques des origines des mutations
financières et la justification des analyses empiriques qui constituera
la clé de voute dans l'évaluation du degré de
développement financier du Cameroun. Dans le premier chapitre, nous
examinerons le concept des « mutations financières ». Plus
précisément, nous étudierons la nature et les origines des
mutations financières en prenant appui sur deux points : la
globalisation financière et l'accélération des innovations
financières. Dans le second chapitre, nous nous pencherons sur la
question du degré de développement financier et croissance. En
prenant appui sur ce cadre mis en place, nous proposerons dans la seconde
partie du mémoire, deux études empiriques complémentaires
qui s'inscrivent dans la lignée des mutations du système
financier. Il nous semblera utile dans un premier temps (troisième
chapitre), de se familiariser aux techniques variées et
complémentaires du système financier nécessaires a
l'appréciation de la libéralisation et de la répression
financières. Ainsi dans un second temps (quatrième chapitre),
nous discuterons des performances des innovations financières sur la
croissance économique camerounaise.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
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DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE
ECONOMIQUE
PREMIERE PARTIE :
«Sois plus sage que les autres si tu le peux,
mais ne leur dis pas.»
Lord Chesterfield
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
rythme tend à s'accélérer et à se
propager à l'ensemble des économies. Cette évolution
résulte de plusieurs faits majeurs qui ont particulièrement
affecté le fonctionnement des systèmes bancaires et financiers
nationaux et internationaux, dont deux nous paraissent pertinents pour notre
propos.
Il y a, d'une part, le passage aux changes flottants à
partir de 1973. En effet, à partir du moment où les banques
centrales non américaines ont été conduites en
Février-Mars 1971 à ne plus intervenir aux marges de fluctuation
du Dollar Américain telles qu'elles avaient été
fixées (#177; 4,5%) par l'accord de l'Institut Smithonian de
Décembre 1971, le mouvement était engagé
(Bourguinat, 1992). On s'orientait vers l'abandon du «
Gold Exchange Standard » au profit d'un système de cours
de change déterminé au jour le jour, par le marché. Il y
a, d'autre part, le changement du contexte macroéconomique. Il s'est agi
ici des chocs et contre chocs énergétiques en l'occurrence, de
l'avènement du premier et du second choc pétrolier ; du
ralentissement de la croissance ; et du creusement des déficits
publics.
En effet, les innovations financières ne se sont pas
développées partout au même rythme et, à la
même manière. Elles ont initialement été
amorcées par le secteur privé surtout dans les pays anglo-saxons,
avec une accélération sans précédent d'innovations
financières, introduites le plus souvent par les institutions
financières (Silber, 1975)10. Elles ont
également été initiées par le secteur public
notamment dans les pays européens soucieux de rattraper le retard de
leur place financière par rapport aux autres pays en avance. Aussi,
d'importantes réformes financières ont dès lors
été entreprises par les pouvoirs publics, visant à
décloisonner les marchés nationaux de capitaux, à les
étendre et à en faciliter l'accès, ainsi qu'à
libéraliser l'activité des banques et à favoriser l'essor
de nouveaux intermédiaires financiers.
Progressivement, à l'échelle internationale, les
marchés des capitaux se sont standardisés (mêmes produits,
mêmes segments de marchés, mêmes procédés,
mêmes intervenants), et interconnectés jusqu'à créer
un vaste marché mondial des capitaux (Romey, 2004).
10 Silber W. (1975), Financial innovation, (Ed.)
Lexington Books.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 12 ~
Le rôle des marchés des capitaux s'est ainsi
considérablement accru, aussi bien au niveau des modalités du
financement des entreprises, qu'au niveau des possibilités de placements
des ménages.
A cet effet, à partir du début des années
1980, les pouvoirs publics ont modifié le cadre institutionnel mis en
place au lendemain de la seconde guerre mondiale. Les conséquences de
cette modification sont allées au-delà du cadre national et, se
sont répercutées même dans les pays ayant connu un retard
dans leur décollage.
La théorie économique a toujours
été partagée entre deux courants concernant l'importance
du système financier dans la croissance économique. D'un
coté il y a ceux qui, dans la lignée de Bagehot et Hicks, parlent
de son rôle actif dans le démarrage de l'industrialisation en
Angleterre11. Schumpeter (1911) dans son ouvrage
« La théorie de l'évolution économique »
précise que le crédit sert le développement industriel et
qu'il est une condition préalable à la création et au
développement de l'innovation et donc à la croissance
économique. A l'inverse, il y a ceux qui ne croient pas à
l'importance de la relation entre la finance et la croissance
économique. Lucas (1988) affirme que les
économistes exagèrent le rôle des facteurs financiers dans
la croissance, et les économistes du développement expriment
fréquemment leur scepticisme au sujet du rôle du système
financier en l'excluant dans leurs analyses.
Les travaux récents qui ont rapproché les
théories de la croissance endogène et de l'intermédiation
financière se placent dans cette optique. Le rapport sur le
Développement dans le Monde de 1989 publié par la Banque Mondiale
présente déjà une étude approfondie du lien entre
finance et croissance en insistant sur le développement du secteur
financier dans les pays en développement pour renforcer la croissance
économique. Un des premiers modèles financiers de croissance
endogène, celui de Bencivenga et de Smith
(1911) montre qu'une meilleure gestion du risque de liquidité
par le secteur bancaire permet d'augmenter la part de l'épargne
allouée à des placements plus productifs tout en gardant un
niveau général d'épargne constant. Ainsi, une relation
positive entre le secteur bancaire et la croissance économique est
établie de manière théorique. Les articles qui ont suivi
prennent en compte les phénomènes de répression
financière et de libéralisation monétaire et traitent du
secteur bancaire mais aussi des marchés financiers12. En
ce
11 En France, la haute banque, avec laquelle les
familles Sellières, Vernes et Rothschild ont bâti leur fortune au
début du XIXème siècle, a pris une part active dans la
révolution industrielle par ses investissements dans l'industrie et des
transports. C'est ainsi que la maison Sellière s'associe avec Antoine
Schneider, parvient à redresser l'usine métallurgique du Creusot
en 1836. Rothschild, Hottinguer et Laffitte financent, en 1845, la Compagnie du
Nord, qui reliera, par le chemin de fer, Paris à la région
lilloise.
12 Plusieurs articles proposent des revues de cette
littérature, voir par exemple Berthélémy et Varouadakis
(1996).
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 13 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
qui concerne les analyses empiriques, un certain nombre
d'études économétriques sur les déterminants de la
croissance montrent que le niveau d'intermédiation financière est
un bon indicateur des taux de croissance économique de long terme ainsi
que de l'accumulation du capital et des gains en productivité.
King et Levine (1993a et b) utilisent quatre
indicateurs pour mesurer le développement du secteur bancaire et quatre
indicateurs de développement économique. Les résultats
qu'ils obtiennent mettent en évidence une relation robuste entre les
deux familles d'indicateurs. Les crises financières qui ont
secoué successivement ces dernières années les
différentes zones du monde renforcent la thèse d'un rôle
prééminent de ce secteur et la nécessité
d'organiser le mieux possible son fonctionnement. L'étude de la relation
entre système financier et croissance sera abordée en deux
volets, théorique et empirique. Explicitement ou implicitement, dans
toutes les études, on retrouve l'idée qu'un système
financier efficient active le développement économique tout en
l'orientant. Notons cependant que la corrélation est maintenant
largement admise, le sens de causalité reste
contesté13 opposant, d'une part, le développement
financier exogène (conduit par l'offre de services financiers) et,
d'autre part, le développement financier endogène (induit par la
demande de services financiers). La principale contribution des systèmes
financiers à la croissance repose sur le fait que ces derniers
permettent d'assurer le fonctionnement d'un système de paiement efficace
et évolutif, mobilisent l'épargne et améliorent son
affectation à l'investissement. L'existence d'un moyen d'échange
fiable est une condition nécessaire de la croissance. Les
systèmes de paiement évoluent en parallèle et en
interaction avec la croissance économique. La croissance entraine des
gains de productivité, mais aussi une ouverture continue de nouveaux
marchés, une complexité croissante des échanges qui
renforcent la monétisation des économies, qui est
nécessaire à son tour pour soutenir le volume de
l'activité économique. Cette association entre le PIB et le
degré de monétisation de l'économie a été
soulignée dès la fin des années soixante par
Goldsmith (1969). Par ailleurs, le développement des
marchés financiers ou d'intermédiaires bancaires peut assurer une
meilleure mobilisation de l'épargne disponible et soutenir ainsi la
croissance économique. Il facilite notamment l'agglomération des
ressources financières de l'économie. Ceci permet aux
intermédiaires financiers de diversifier les risques associés aux
projets d'investissement individuels et de proposer aux épargnants des
placements à rendements plus élevés. Ceux-ci favorisent la
détention de l'épargne sous forme financière, plutôt
que sous forme d'actifs réels peu rentables. Cette réorientation
de l'épargne peut à son tour renforcer davantage le
développement du système financier. Des modèles
basés sur la théorie de la croissance endogène permettent
de formuler les interactions entre facteurs financiers et croissance
13 Voir R. I. St Hill (1992) et H. Patrick (1996).
On trouvera des éléments de vérification empirique et des
tests de causalité chez Jung (1986) et Thornton (1991, 1994).
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 14 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 15 ~
en réintroduisant le rôle primordial de
l'intermédiation financière dans l'amélioration de
l'allocation des ressources.
Ainsi, le système financier camerounais dont, les
défaillances ont été observées au milieu des
années quatre-vingt a subi de nombreuses mutations traduites par une
émergence de nouveaux établissements financiers, un essor
remarquable de la microfinance, un passage de l'illiquidité à la
surliquidité des banques et l'adoption des réformes
financières. Les mutations du système financier camerounais ont
été initiées par les pouvoirs publics avec l'appui des
institutions financières internationales, BEAC, FMI, Banque Mondiale qui
ont mis en place un ensemble de mesures sur le plan financier, monétaire
et juridico-institutionnel en vue de rétablir l'équilibre
financier des banques et permettre une meilleure allocation des ressources
à l'économie.
L'objectif de cette partie est d'apporter des
éclaircissements sur le développement du système
financier. Pour cela, il sera présenté au premier chapitre les
fondements théoriques et empiriques des origines des mutations
financières et le deuxième chapitre mettra en exergue le
degré de développement financier avec son incidence sur la
croissance.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
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CHAPITRE I :
LES FONDEMENTS THEORIQUES ET EMPIRIQUES DES ORIGINES
DES MUTATIONS FINANCIERES
Introduction:
Au cours de ces trois dernières décennies, le
système financier international a subi des mutations profondes. Ces
mutations ont été accélérées par l'essor de
nouvelles techniques (progrès technique en matière d'information
et de communication) et de nouvelles pratiques financières, mais aussi
par des développements théoriques qui ont permis de mieux saisir
la relation existant entre les phénomènes réels et les
phénomènes financiers.
Les mutations du système financier international ont
porté autant sur la structure de celui-ci que sur le rôle des
principaux acteurs. En ce qui concerne la structure, il convient de souligner
que l'on est passé depuis 1973 d'un système de change fixe
à un système de change flottant. De même, on est
passé dans de nombreux pays, d'un système financier
centralisé à un système financier
décentralisé. Cette dernière évolution est
consacrée par l'apparition de marchés émergents dans de
nombreuses économies en développement ou en transition.
En ce qui concerne le rôle des acteurs, les missions des
banques centrales, des banques de second rang, mais aussi des institutions
financières internationales se sont modifiées progressivement.
Ces différentes évolutions ont contribué à
définir peu à peu le champ de la macroéconomie
financière internationale.
Suite à l'apparition des besoins de plus en plus
importants des capitaux, les marchés financiers vont se
développer avec une diffusion internationale. Les économies
contemporaines vont s'engager dans un processus de mondialisation des
marchés et de globalisation financière dont, le rythme tend
à s'accélérer (Bekolo-Ebé, 1998).
Aussi, les banques vont suivre ce mouvement en diversifiant les services
financiers à la disposition des agents économiques. Ces
évolutions ont affecté tous les pays industrialisés et
vont toutes dans le sens d'un accroissement de la part des marchés dans
le financement des économies.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 16 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
L'analyse des origines des mutations financières
nécessite la compréhension du processus de globalisation
financière (section I) et celui de
l'accélération des innovations financières
(section II).
SECTION I: LA GLOBALISATION FINANCIERE.
La globalisation financière est un concept
associé à la mutation financière, et apparaît comme
le dénominateur commun à l'ensemble des transformations qui ont
affecté le fonctionnement des systèmes financiers
(Romey, 2004). Depuis les années 1980, on assiste
à ce qu'on appelle le « big-bang financier
» qui donne naissance à une explosion des
marchés dont l'ampleur, le volume et la nature des transactions sont
aujourd'hui caractéristiques de la mondialisation financière. La
globalisation financière résulte des progrès techniques en
matière de communication, mais elle procède aussi des
décisions politiques (Romey, 2004). Elle s'est ainsi
accompagnée d'une libéralisation des systèmes financiers
nationaux.
Cette section vise à montrer que la globalisation
financière est à l'origine des mutations financières. Pour
cela, il convient de présenter d'une part, les composantes de la
globalisation financière (1), et d'autre part,
la règle des « trois D »
(2).
I.1- LES COMPOSANTES DE LA GLOBALISATION FINANCIERE:
Les économies contemporaines sont aujourd'hui
engagées dans un processus de mondialisation dont le rythme tend
à s'accélérer. Cette mondialisation s'analyse en une
globalisation dans laquelle les diverses économies tendent à
s'intégrer et à former une totalité marquée par un
renforcement des interconnexions et à une unification du marché
qui s'homogénéise par-delà les États-nations
(Bekolo-Ebé, 1998). Les firmes et organisations
appréhendent ainsi le marché comme une totalité de moins
en moins contrainte par les réglementations nationales et
déterminent leurs implantations et leurs placements par rapport au
marché mondial traité comme un tout, parce que celui-ci est de
plus en plus unifié et intégré
(Bourguinat, 1997). Telle est la condition préalable de
la globalisation.
Plus précisément, du point de vue des firmes, on
admet aujourd'hui qu'il existe trois conditions, préalables à
cette évolution (Bekolo-Ebé, 1998) :
- d'abord, il faut que le produit ait un caractère
global, c'est-à-dire universel, à même d'être
identifié et demandé à l'échelle mondiale par le
consommateur. Ce caractère global n'empêche pas des
spécificités qui peuvent prendre place dans un processus de
segmentation où dans un produit-
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 17 ~
système, les éléments secondaires sont
alors, déglobalisés, permettant de donner aux produits
génériques une touche finale locale ;
- ensuite, l'activité du groupe pour être dite
globale doit impliquer, comme le relève Porter (1996)
que la « position de concurrence stratégique des concurrents
dans les zones géographiques ou sur les marchés nationaux, soit
fondamentalement affectée par leur position globale ». En
matière bancaire par exemple, la crédibilité, sur le plan
de la solvabilité dans un pays est fortement tributaire de la structure
de son bilan consolidé ;
- enfin, l'équi-traitement des moyens impliquant une
absence de préférence opérationnelle pour le pays ou la
zone géographique originelle. En d'autres termes, la firme ne se
détermine que par rapport aux conditions de coûts et de
rendements, lesquels déterminent la localisation du moment, mais aussi
les décisions éventuelles de délocalisation d'un espace
à un autre.
Le phénomène touche aussi bien la sphère
réelle de production de biens et services que la sphère
financière, et au regard des évolutions actuelles et de l'ampleur
du phénomène, on est tenté de penser que la finance est le
lieu par excellence de cette globalisation des transactions
(Bekolo-Ebé, 1998).
Le produit financier tend en effet à prendre rapidement
un caractère mobile, ubiquiste, parce qu'à même de se
déplacer avec des coûts de transferts extrêmement faibles,
d'autant qu'il prend rapidement un caractère standardisé, et du
fait que les risques y attachés tendent à s'atténuer ou
sont susceptibles d'être assurés par des procédures de plus
en plus diversifiés (Bourguinat 1997 ;
Aglietta, 1990). Ces conditions se trouvent aujourd'hui de
plus en plus souvent réunies car les interconnexions entre
économies obligent les gouvernements à adopter des mesures de
convergences juridiques et fiscales et à s'engager toujours plus avant
dans un processus d'unification des procédures et de banalisation des
techniques monétaires et financières entre les pays dont les
systèmes économiques voient leur interdépendance accrue
(Bekolo-Ebé, 1998).
Au demeurant, un haut degré d'intégration
financière repose sur la réunion de deux conditions : la
mobilité des capitaux ; car la forte mobilité des capitaux repose
sur l'absence de contrôle de change et de discrimination fiscale. Et la
substituabilité des actifs, qui recouvre deux dimensions; au sein d'une
même union monétaire, elle repose sur la capacité des
agents à passer d'un type d'actifs domestiques à un autre; sur le
plan international, elle permet de passer d'une devise à une autre.
Aussi, si la finance se globalise dès lors qu'elle est unifiée
à l'échelle du monde
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 18 ~
entier, il convient encore d'invoquer à son propos la
règle des « trois D » qui définit les
caractéristiques de cette évolution :
décloisonnement-déréglementation-désintermédiation.
I.2-LA REGLE DES « TROIS D »:
Les cycles de négociation de l'Uruguay-round
(négociations multilatérale au sein du GATT14 de 1986
à 1994, en vue d'achever la libéralisation du commerce
international et qui ont débouché sur l'instauration de l'OMC
à la suite du traité de Marrakech en avril 1994) sur les services
financiers ont contribué à polariser l'attention sur le
fonctionnement du marché, sur la différence entre libre
mobilité des capitaux et non discrimination sur les marchés, sur
l'avantage de la libre concurrence entre institutions financières
nationales et étrangères, aussi bien dans les pays
industrialisés que dans les pays en développement
(Bekolo-Ebé, 2002). L'évolution des
marchés et le processus de mondialisation financière se sont
accompagnés d'une libéralisation des systèmes financiers
(Romey, 2004). Cette libéralisation se
caractérise par ce qu'il est convenu d'appeler le
phénomène des «3D» : décloisonnement,
désintermédiation et déréglementation que nous
analyserons tour à tour.
I.2.1-Le décloisonnement des marchés:
Les conditions nécessaires de la globalisation
financière sont non seulement l'ouverture des marchés nationaux,
mais aussi, à l'intérieur de ceux-ci, l'éclatement des
compartiments préexistants (Bourguinat, 1992). La fin
des compartiments signifie que les marchés se
déspécialisent, les intermédiaires exerçant tous
types d'activités. Ainsi, des distinctions traditionnelles
séparant aux États-Unis, banques commerciales et «
Investment Banks » spécialisées dans le placement
des valeurs mobilières, s'estompent. Ce décompartimentage a
été consacré par le « big-bang »
d'Octobre 1986 qui a conduit à la confusion des fonctions de
contrepartistes et courtiers. De même s'installe une sorte de continuum
qui fait passer sans distinction de la finance indirecte à la finance
directe, avec une prédominance de plus en plus forte de cette
dernière (Bekolo-Ebé, 1998).
Les dispositions mises en place dans la plupart des pays au
début des années 1970, notamment en France, se
caractérisaient par de fortes limitations du jeu des forces du
marché, au moyen notamment de contrôles des prix ou du volume des
opérations des institutions à l'accès au marché. En
France, par exemple, le décloisonnement a consisté à
réduire le nombre de marchés
14 GATT : General Agreement of Tarif and Trade, a
été remplacé par l'Organisation Mondiale du Commerce(OMC)
en 1994 à Marrakech.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 19 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
spécifiques (circuit bancaire et du trésor,
réseaux mutualistes ou caisses d'épargne) afin de constituer un
vaste marché des capitaux permettant une régulation
monétaire plus efficace et plus conforme aux règles de la
concurrence. L'ouverture du marché monétaire en 1985 va donc
marquer la première étape du processus de
décloisonnement.
L'introduction des titres de créances
négociables (TCN) et des bons du trésor
négociables participe à la mise en place du chaînon
manquant entre le marché interbancaire et le marché obligataire.
La seconde étape du processus de décloisonnement a
été réalisée par la levée progressive de
l'encadrement du crédit entre 1985 et 1987, complété par
une plus grande égalité dans les conditions de collecte des
ressources et d'octroi de financement.
La décennie des années 1980 est aussi celle de
la réhabilitation des marchés boursiers dans le financement de
l'économie. Cette réhabilitation s'est accompagnée, en
France, d'une modernisation des structures institutionnelles et d'une
transformation des techniques de marché avec l'information des
échanges. Le décloisonnement s'est aussi accompagné d'une
internationalisation des marchés.
I.2.2-La déréglementation:
Le mouvement de déréglementation entrepris dans
l'ensemble des pays industrialisés, dès la fin des années
1970, a comporté principalement deux volets : une «
déréglementation des volumes » (suppression du
contrôle des changes, levée des mesures d'encadrement du
crédit) et une « déréglementation des prix
» (libéralisation des tarifs bancaires, des taux
créditeurs et débiteurs) (Romey, 2004).
L'évènement le plus emblématique a été le
big-bang imposé par l'Angleterre à son système financier
en Octobre 1986. Celui-ci conduisit non seulement à la confusion des
fonctions de contrepartistes et des courtiers, mais aussi permit aux
non-résidents d'être co-chefs de file dans les émissions
étrangères.
Ce mouvement de déréglementation a
accentué la concurrence entre les banques sur tous les segments du
marché du crédit. Il s'est agi d'une adaptation de la
réglementation existante conduisant à éliminer certaines
réglementations et à les remplacer par d'autres jugées
plus efficaces. Il ne s'agit donc pas de laisser le marché à
lui-même ; le mouvement va de pair avec la libéralisation. Il
s'agit de laisser plus de liberté aux différents acteurs,
d'autoriser un vaste menu de transactions avec des contrôles moins
impulsifs. C'est aux Etats unis que le mouvement s'est amorcé avec un
ensemble de mesures destinées à encourager la concurrence sur les
marchés financiers. En l'occurrence la
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 20 ~
poursuite de l'élimination des plafonds de taux
engagée au milieu des années 1970, l'élimination en 1984
de la retenue à la source de 30% sur les intérêts des
obligations souscrites aux États-Unis par des étrangers.
La reforme bouleverse les conditions de concurrence sur les
places financières et pousse les autres places financières
à engager des réformes et à s'inscrire dans le mouvement
de déréglementation. Ce mouvement a été
amplifié par l'Union Européenne avec la création du
marché unique qui portait notamment sur la libéralisation des
mouvements de capitaux, la suppression du contrôle de change, le
libre-échange, des services financiers. Il s'observe à cet effet
des marchés émergents dans nombre de pays en développement
qui ont libéralisé leur marché pour attirer les
investissements étrangers.
On retrouve là une des conséquences de
développement de l'analyse théorique qui, surtout dans les
années 1980 et 1990 s'est intéressé au rôle du
développement de la finance dans le processus de croissance, prolongeant
les travaux des théoriciens de la répression financière.
Bien plus, les restrictions concernant certaines opérations, ou le
fonctionnement des comptes ont progressivement disparu, ainsi qu'on a pu voir
aux États-Unis, où l'apparition des comptes NOW15,
Super NOW16, ATS17 a levé la distinction compte
à vue - compte à terme. Ce qui donnait l'exemple d'une
volonté poussée de déréglementation par les
autorités Américaines.
La déréglementation se traduit aussi par
l'allégement de la tutelle de l'État avec la disparition des
diverses contraintes pesant sur ces marchés, par une ouverture des
marchés aux intervenants étrangers et un élargissement du
jeu de la concurrence qui favorise le développement des innovations
financières destinées notamment à couvrir contre les
nouveaux risques (Bekolo-Ebé, 1998). Au système
compartimenté et spécialisé, s'est substitué un
modèle de « Banque Universelle18 ». Le
mouvement similaire s'observe aux États-Unis avec la remise en question
de la distinction traditionnelle séparant banques commerciales et «
Investment Banks » spécialisées dans le placement
des valeurs mobilières (Romey, 2004).
15Les comptes NOW (Negociable Order Withdrawal)
permirent aux titulaires de compte à terme de retirer des fonds à
condition de laisser un solde minimum.
16Les comptes Super NOW autoriseront sous certaines
conditions, à faire des chèques à partir des comptes
à terme. 17Les ATS : virement automatique de compte à
vue au compte à terme.
18Le principe de banque universelle se
décline de façon assez différente selon les pays. En
Allemagne, une entreprise noue facilement des relations exclusives et de long
terme avec la Hausbank (banque maison). Au Japon, tous les
keiretsu sont liés une city bank qui joue le
rôle de banque principale et n'hésite pas à exercer un
contrôle ferme des dirigeants.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 21 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 22 ~
I.2.3-La désintermédiation
(marchéisation):
La désintermédiation a été l'une
des premières conséquences visibles du décloisonnement des
marchés (Romey, 2004). Elle traduit
schématiquement le passage d'une situation qualifiée de «
finance indirecte ou intermédiée
», dans laquelle les entreprises sont essentiellement
financées par les banques au moyen de crédits bancaires
classiques, à une situation de « finance directe
», dans laquelle les entreprises se financent davantage par
apport de fonds propres, ou par émission de titres de créances
négociables sur les marchés financiers. En fait, la notion de
désintermédiation que l'on associe à l'expansion des
marchés financiers ne signifie donc pas disparition des
intermédiaires financiers, mais mutation de leur rôle,
l'intermédiation financière naît des imperfections sur les
marchés des titres primaires (Leland et Pyle, 1987).
Cette désintermédiation rend compte de ce que la finance directe
devient prépondérante au détriment de la finance indirecte
par monnaie de crédit. Les institutions financières jouent
désormais un rôle d'agence, mettant en place un système
d'information, permettant de réduire les effets d'asymétrie
informationnelle générateurs d'aléa moral
(Diamond et Dybvig, 1983). Ceci explique les
transformations que connaît la fonction d'intermédiation des
banques. S'il est vrai depuis les travaux de Gurley et
Shaw (1960) et la distinction faîte par Hicks (1974) que
la finance directe est opposée à la finance indirecte, il reste
que les préférences des portefeuilles des échangistes sont
en règle générale différentes que même dans
la finance directe, il y a toujours place pour les intermédiaires
financiers. Bien que les financements de marché tendent à
supplanter les financements bancaires traditionnels, on constate dans le
même temps, que les banques ne se désintéressent pas, loin
s'en faut, du développement du marché des capitaux. Au contraire,
elles ont tendance à accentuer leurs interventions sur ces
marchés, en émettant elles-mêmes des titres ou en
souscrivant à des actifs émis sur les marchés
monétaires et financiers. C'est cette présence accrue des banques
sur le marché des capitaux qui a entraîné une «
marchéisation » des conditions bancaires des opérations
traditionnelles (Romey, 2004).
La désintermédiation apparaît dès
lors comme une conséquence de cette évolution et la situation
s'analyse en une tendance à la modification et à la mutation du
rôle des intermédiaires, en particulier les banques, et ce, du
fait du développement de la finance directe. Les banques ont pu par ce
biais soustraire de leur bilan, le maximum de créances douteuses et sans
grand avenir, en se faisant alors intermédiaires pour les placer
auprès d'emprunteurs finals, sous forme d'effets renouvelables et de ce
fait, à taux variables.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
La marchéisation désigne l'accroissement de la
sensibilité des intermédiaires financiers au risque de
marché. D'une part, il apparait une concurrence au niveau de la
formation des prix et d'autre part, on observe un accroissement de ce qu'on
appelle la mobiliéralisation des bilans bancaires, c'est-à-dire
les financements internationaux basés davantage sur l'émission
des obligations internationaux au détriment des crédits bancaires
internationaux. Cette mobiliéralisation s'explique maintenant par deux
choses : la polarisation des déséquilibres et transactions
courants entre pays développés entrainant de nouvelles formes de
financement international fondées sur les titres ; la
nécessité pour les banques d'accroitre leurs fonds propres
consécutivement à la dégradation de leur
résultat.
Ainsi, la globalisation financière, en favorisant le
développement des marchés financiers a permis aux banques de
faire valoir leur expertise financière et proposer à leurs
clients une vaste gamme de services financiers. Dès lors, le
développement des innovations financières trouve là leur
explication.
SECTION II: L'ACCELERATION DES INNOVATIONS
FINANCIERES.
La mondialisation des marchés et la globalisation
financière, ont pour conséquence le prodigieux
développement de l'innovation financière. Libres et
mondialisés, les marchés sont en effet devenus
particulièrement concurrentiels, ce qui les a engagés dans une
course constante à l'innovation. Ces innovations ne se sont pas
développées partout au même rythme. Les pays anglo-saxons
(États-Unis, Canada, Angleterre) ont d'abord été leaders
en la matière avec notamment la création du Nasdaq en 1971, celle
des marchés organisés d'option à Chicago en 1973 et
à Londres en 1978. Ensuite ont suivi les pays Européens dans les
années 1980, puis enfin les pays émergents dans les années
1990. A mesure que les innovations se développent, leur diffusion
s'accélère. Les pays suiveurs ont de ce fait pu facilement
rattraper leur retard (Romey, 2004).
L'objet de cette section est triple. D'abord donner une
justification des innovations financières (1), ensuite
faire leur typologie (2), enfin présenter les
théories explicatives de l'innovation financière
(3).
II.1-DEFINITION ET JUSTIFICATION DES INNOVATIONS
FINANCIERES:
Dans économie sans système financier, chaque
agent ne pourrait investir son épargne que dans ses propres projets, et
dans ses projets que sa propre épargne : l'économie
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 23 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 24 ~
serait « cloisonnée ». Ainsi des
projets d'investissement pourraient ne pas voir le jour alors même qu'une
épargne existante serait inutilisée. Certains agents pourraient
accumuler une épargne « dormante » alors même
que l'exécution d'investissements rentables serait repoussée. De
plus, en l'absence de possibilité de transférer l'épargne
d'un agent à un autre, rien ne garantirait que ce soient les projets les
plus rentables qui soient financés. Enfin, l'impossibilité de
répartir l'épargne d'un agent entre plusieurs projets
diversifiés accroitrait le risque et dissuaderait donc l'investissement.
Le système financier sert à remédier à ces
problèmes. Les intermédiaires financiers peuvent
sélectionner les bons projets parmi l'ensemble ceux devant être
financés. En ce domaine, la division du travail a une influence
bénéfique : elle permet à des agents de se
spécialiser et de développer leur capacité d'expertise.
Cette expérience acquise et la taille des intermédiaires
financiers sont deux atouts essentiels dans un domaine où l'information
n'est pas accessible de manière égale entre tous les agents :
entre préteurs et emprunteurs, il existe bien souvent des
asymétries d'information. L'emprunteur connaît
généralement mieux la profitabilité et le risque d'un
projet que le préteur et il a souvent des raisons de ne pas communiquer
les informations dont il dispose. Dès lors, le système financier
permet de rendre les placements moins risqués. D'une part, les
placements sont plus liquides : un agent peut se retirer d'un projet (en
vendant directement ou indirectement ses parts) sans le compromettre (donc sans
réduire sa rentabilité). Les agents peuvent ainsi s'engager
à moindre risque dans des projets plus durables. D'autre part, le
système financier gère le risque : les agents peuvent constituer
des portes-feuilles diversifiés qui réduisent les risques
encourus. L'épargne peut ainsi s'orienter plus aisément vers des
projets dont la rentabilité est longue et risquée (par exemple,
les investissements en recherche dont le rôle dans le processus de
croissance est crucial.
Par ailleurs, l'innovation financière désigne la
nouveauté dans la production sous forme de produit nouveau, de
procédé de fabrication nouveau, de l'usage de nouveaux produits
financiers (Lexique d'économique, 2002).
Depuis les années 1980, l'innovation financière
connaît un développement fulgurant, élargissant
considérablement le menu des instruments financiers à la
disposition des acteurs, investisseurs, spéculateurs ou
trésoriers d'entreprises. Parallèlement au mouvement de
libéralisation et aux mutations des régimes de change, le
progrès des technologies de l'information et de la communication
facilite de plus en plus les montages et les transferts financiers
internationaux. La finance est en effet liée au traitement et à
la collecte de l'information.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 25 ~
L'innovation financière se développe d'abord
pour attirer la clientèle en mettant à sa disposition des
instruments supposés correspondre au plus près à ses
besoins. Ainsi sont apparus une panoplie d'instruments qui d'ailleurs ont
accéléré le décompartimentage des marchés.
La sophistication de ces instruments et produits offerts est en effet telle que
le même instrument peut revêtir des caractéristiques aussi
bien du compartiment court, que du compartiment long du marché
(Bekolo-Ebé, 1998).
L'innovation se développe ensuite pour permettre aux
clients de faire face aux risques attachés à l'incertitude
grandissante, liées à la levée des contrôles et
règlements. Il en est particulièrement ainsi de tous ces
instruments destinés à couvrir les intervenants des risques
liés à la mobilité des taux et à la
possibilité désormais offerte d'opérer dans une optique
multidevise.
Les nouveaux produits, dont la plupart doivent d'ailleurs leur
existence à des mutations souvent faites in fine, ont ainsi une triple
vocation :
- gérer l'instabilité des taux et des changes ;
- permettre le passage facile et rapide d'un compartiment
à l'autre du marché (taux variables, taux fixes, comptant, terme)
;
- permettre facilement et rapidement le passage d'une devise
à l'autre (Bourguinat, 1992).
L'innovation financière facilite ainsi l'activité
économique et l'allocation des ressources.
Si l'innovation financière joue un rôle central
dans l'analyse de la mutation financière, sa description est rendue
pénible par les nombreuses formes qu'elle peut prendre. La typologie
généralement adoptée est basée sur celle
utilisée par J.A. Schumpeter pour les innovations industrielles.
II.2-TYPOLOGIE DES INNOVATIONS FINANCIERES:
La description de l'innovation financière peut
être faite par analogie avec la théorie de l'innovation
industrielle de Schumpeter. A cet effet, on peut établir une typologie
des innovations financières en distinguant :
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
- Les innovations de procédé
qui comportent une dimension technologique : introduction de la
télématique dans les services bancaires et financières,
monnaie électronique, dématérialisation des titres
financiers ;
- Les innovations de produits qui se
caractérisent soit par l'apparition de nouveaux produits, soient par la
modification des caractéristiques de produits déjà
existants. On peut citer le titre de créances négociables
(introduits en France en 1985 avec la reforme du marché
monétaire), les produits dérivés de type contrats à
terme fermes ou option, ou encore les SICAV (Sociétés
d'Investissement à Capital Variable) ;
- Les innovations de marché qui se
traduisent par l'ouverture d'un marché ou l'exploitation d'un nouveau
segment de marché pour le cas français, on peut citer l'ouverture
du second marché en 1983, à destination des entreprises de taille
moyenne, le MATIF (Marché à Terme d'Instruments Financiers) en
1986 et le MONEP (Marché des Options Négociables de Paris) en
1987, ainsi que les compartiments Next-Tract, dédiés aux trackers
(fonds indiciels cotés), et Next-Warrants consacrés aux bons
d'options (Warrants) en 2001 ;
- Les innovations provenant de l'émergence de
nouvelles organisations. Citons les multilatérales, «
trading facilities », nouveaux types de bourses
entièrement automatisées qui concurrencent les places de
marché traditionnelles, ou encore la bancassurance qui réunit les
activités de banque et d'assurance.
Toutefois, l'analogie entre innovations financières et
innovations industrielles est imparfaite en raison des
spécificités inhérentes aux premières. Tout
d'abord, une innovation financière n'est jamais pure, et se
révèle le plus souvent de nature hybride. La plupart des nouveaux
produits financiers résultent, au moins partiellement d'innovations de
processus. Les innovations de marché induisent les innovations de
produits. Par exemple, les trackers constituent à la fois une innovation
de produits, de processus (nouvelles technologies de la communication qui
permettent l'achat ou la vente de titres en temps réel), et de
marché (création du segment Next-Tract d'Euronext).
A la différence des innovations industrielles, la
création de nouveaux produits financiers vient étendre la gamme
des produits existants sans forcément rendre ces derniers
obsolètes. Aussi, même si ses déterminants initiaux ne sont
plus d'actualité, l'innovation financière ne disparaît pas
(cela rend d'ailleurs le cycle de vie des produits financiers assez
particulier, ces derniers se caractérisent par une très longue
phase de maturité). Il existe des effets de cliquet tels que la
plupart
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 26 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 27 ~
des produits financiers, une fois entrés dans la
pratique financière n'en sortent plus. Par exemple, alors que les «
Money Market Mutual Funds » (MMMF) ou les SICAV monétaires
sont nés en période d'inflation élevée pour
diminuer le coût de détention des encaisses monétaires, ces
dispositifs associant rendement et liquidité n'ont pas disparu avec la
désinflation. Enfin, l'innovation financière ne peut pas
être protégée par un brevet, la carte à puce
étant l'une des rares exceptions. En règle
générale, une modification marginale des caractéristiques
du produit (taux d'intérêt, échéance, etc.) suffit
à se différencier du produit initial. Facilement copiable,
l'innovation financière ne procure à l'entreprise innovante qu'un
avantage compétitif de courte durée. Par ailleurs, alors que
l'innovation industrielle est inhérente au changement technique et se
produit quelles que soient les conditions économiques
générales, l'innovation financière est liée
à des changements contingents aux conditions macroéconomiques qui
provoquent une adaptation des méthodes de financement, avec un retour
ultérieur possible aux instruments précédents.
L'innovation financière ne présente donc pas de trajectoire
technologique (Aglietta, 1991).
Les innovations financières, à travers le
développement des nouvelles technologies de l'information et de la
communication (NTIC) se sont internationalisées. Elles
permettent une interconnexion des places boursières
(GLOBEX)19, une diffusion plus rapide et moins
coûteuse de l'information (systèmes Reuters,
Telerate, Fininfo) et l'automatisation des
processus de traitement de cette dernière. C'est ainsi qu'en Europe,
l'Union Économique et Monétaire et la création de l'Euro
ont conduit à l'émergence d'un vaste marché unifié
des capitaux.
En définitive, les innovations financières
revêtent un caractère spécifique, qu'il convient maintenant
de présenter les théories explicatives de leur existence.
II.3-LES THEORIES EXPLICATIVES DES INNOVATIONS
FINANCIERES:
La spécificité des innovations
financières nécessite le développement des théories
appropriées (Geoffron, 1992). Selon une approche
empruntée à la théorie des cycles, le processus
d'innovation financière se compose de phases successives d' «
accélération » et de « digestion
». Si ces phases sont largement tributaires des changements dans les
conditions économiques et
19Globex est un système électronique
international et automatisé pour l'entrée et l'exécution
centralisée d'ordres sur produits dérivés dont le
fonctionnement effectif a débuté en 1992. Simple accord de
coopération au départ entre le Chicago Mercantile exchange (CME)
et l'agence Reuters, il permet aujourd'hui de relier le CME, Euronext. Liffe,
les marchés de produits dérivés de Montréal, Sao
Paolo, Madrid et Singapour.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
financières, il n'existe pas de théorie
expliquant formellement l'incidence de la conjoncture sur l'incitation à
innover. L'histoire financière nous renseigne peu sur les raisons du
passage d'une phase à une autre. En revanche, les théories
dédiées plus spécifiquement aux innovations
financières ont permis d'appréhender certains facteurs
généralement reconnus comme ayant encouragé le processus
de l'innovation financière.
Les analyses de Silber (1975, 1983)
et Kane (1983, 1988) confèrent d'intéressants
fondements théoriques aux innovations de contournement, notamment celles
introduites par les institutions financières afin de relâcher la
contrainte de la réglementation. A côté de ces analyses
orientées du côté de l'offre, d'autres analyses comme celle
de Desai et Low (1987) mettent davantage en
avant le rôle de la demande, expliquant bien la recherche d'instruments
de placement et de financement destinés à satisfaire une demande
de combinaisons nouvelles des caractéristiques existantes en termes de
rendement, risque et liquidité (Romey, 2004).
II.3.1-La théorie de la contrainte et de la
dialectique réglementaire:
Innovation financière et réglementation
entretiennent une dynamique et des relations complexes. Leur dialectique
apparaît ainsi comme une conséquence de l'évolution des
marchés et, rend difficile de savoir si les mouvements observés
sont dus aux décisions des gouvernements ou à la dynamique des
marchés. Silber (1975) est le premier à avoir
élaboré un schéma interprétatif original, en
mettant l'accent sur trois types de contraintes qui ont joué un
rôle central dans l'accélération de l'innovation
financière. Il s'agit :
- Des contraintes réglementaires ;
- De l'intensification de la concurrence ;
- De la montée des risques liés à la
volonté accrue des taux d'intérêts et des taux de change
depuis les années 1970.
Ce modèle convient plus particulièrement
à l'étude des stratégies des intermédiaires
bancaires. Les contraintes subies par les institutions engendrent des
innovations destinées à gagner des degrés de
liberté. L'innovation financière est donc
considérée comme le produit d'une contrainte exogène qu'il
s'agit de contourner (Romey, 2004).
Cette idée était déjà
présente chez Gurley et Shaw (1960),
« dans toute économie, la structure financière est
continuellement remodelée par les efforts des agents économiques
pour
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 28 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
échapper aux contraintes déjà existantes
». Mais la paternité de la dynamique
innovation-réglementation revient véritablement à Kane.
Autour de cette dynamique, il élabore le concept de dialectique
réglementaire réductible à deux enchaînements :
1) Réglementation Contournement par
l'innovation Adaptation de la réglementation.
2) Innovation Adaptation de la réglementation
Contournement par l'innovation.
Selon ce schéma, les agents sont incités
à contourner la réglementation dès lors que le solde
coût/avantage de l'adhésion de l'agent à la contrainte
réglementaire devient négatif. (Romey, 2004).
Cette dialectique met en lumière l'interaction entre deux types d'agents
: les agents privés assujettis à la réglementation et les
pouvoirs publics qui la mettent en oeuvre. Chacun modifiant son comportement en
fonction des actions constatées ou anticipées de la part de
l'autre. Les rapports de force sont toutefois inégaux. D'une part, il
faut moins de temps pour contourner la réglementation qu'il n'en faut
pour réglementer. Et d'autre part, plus la réglementation est
efficace, moins vite elle sera contournée.
Ce type d'analyse est particulièrement bien
adapté au cas des pays anglo-saxons où l'initiative des
innovations financières a surtout appartenu aux agents privés de
la sphère financière, lesquels ont trouvé par l'innovation
les moyens de desserrer certaines contraintes pesant sur eux. Des contraintes
d'ordre réglementaire ont amené les banques à
développer des formules leur permettant de contourner par exemple les
interdictions ou les plafonnements de taux créditeurs ou bien encore de
créer de nouveaux produits échappant à l'assiette des
réserves obligatoires. Dans le cas des États-Unis par exemple,
l'écart croissant entre les taux d'intérêt
administrés (réglementation Q) et le taux de marché a
été le principal déterminant de l'innovation
financière au début des années 1970. La titrisation est
une autre illustration du contournement de la réglementation. Elle
consiste à transformer des actifs ou des créances peu ou pas
négociables (crédits bancaires) en titre aisément
négociable sur des marchés secondaires. Par
l'intermédiaire d'une entité juridique (ou véhicule) ad
hoc (Romey 2004) les établissements de crédit
peuvent alors améliorer la liquidité de leur bilan et
réduire leurs besoins en capitaux propres.
La concurrence entre institutions constitue un autre type de
contrainte. Même si on ne peut breveter un produit financier,
l'innovation assure à son créateur un bénéfice en
termes d'image de
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Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
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marque. Éventuellement, le temps d'adaptation des
concurrents peut procurer à l'entreprise innovante un monopole de courte
durée et stimuler l'investissement en recherche et développement.
Cette concurrence amène également les établissements
bancaires à compresser au maximum les coûts subis par leurs
clients, notamment grâce au retour à Internet, donnant lieu au
développement de la banque directe. Cette dernière permet
d'effectuer toutes les opérations bancaires courantes (gestion de moyens
de paiement, crédits, épargne) en remplaçant la relation
bancaire en agence par une relation avec une plate-forme
téléphonique associée à un système
d'information performant.
Un troisième type de contrainte, est la montée
des risques et la nécessité d'y parer. Ceux-ci expliquent par
ailleurs le développement par les banques de produits
dérivés (contrats à termes fermes, optionnels SWAPS)
négociés dans un premier temps de gré à gré
sur des marchés organisés.
L'initiative de l'innovation n'appartient pas toujours
à la sphère privée (Artus et de
Boissieu, 1995 ; de Boissieu, 1998). Ainsi
dans les pays Européens, en situation de rattrapage par rapport aux pays
anglo-saxons, l'initiative a plutôt appartenu aux pouvoirs publics qui,
aux moyens d'importantes réformes financières, ont
d'eux-mêmes créé de nouveaux marchés ou introduit de
nouveaux produits. Les contraintes à l'origine de ces innovations
d'origine publique étaient essentiellement de deux ordres : le
financement des déficits aux entreprises nationales ; la
compétitivité externe des places financières.
L'innovation financière française par exemple, a
ainsi été conduite par l'initiative des pouvoirs publics,
soucieux de moderniser la gestion des déficits publics et de rattraper
le retard notable du pays en matière de développement
financier.
On peut également retenir dans le cas français
l'importance de l'incitation fiscale comme déclencheur d'innovations
financières au cours des années 1980. Les produits issus de ces
innovations ont permis de répondre aux contraintes de financement
spécifiques des entreprises françaises, encore largement
dominées dans les années 1980 par de nombreuses PME à
caractère familiale et par de grandes entreprises nationalisées,
et à qui, il fallait donner un accès aux capitaux tout en
garantissant le maintien de la structure du pouvoir dans l'entreprise.
En définitive, l'innovation financière n'est pas
seulement orientée du côté de l'offre. Elle peut
également être appréhendé vers la recherche
d'instruments de placement et de financement destinés
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
à satisfaire une demande de combinaisons nouvelles des
caractéristiques existantes en termes de rendement, risque et
liquidité, qu'il convient maintenant d'analyser.
II.3.2-La demande de nouvelles combinaisons de
caractéristique:
Contrairement aux analyses de Silber et de Kane qui
caractérisent l'innovation comme une réponse de l'organisation
(essentiellement les institutions financières) aux contraintes qui
pèsent sur elle, et dont les coûts deviennent exorbitants,
l'approche par la demande (Desai et Low,
1987), inspirée par les travaux de Lancaster (1966, 1971) portant sur la
demande de caractéristiques, met en avant la volonté de la part
de l'agent qui innove de répondre à une demande latente des
consommateurs.
Pour Lancaster (1971)20, les biens sont
dotés de caractéristiques dans les proportions fixes et, c'est
sur ces caractéristiques, et non sur les biens eux-mêmes, que le
consommateur exerce ses préférences. Le consommateur a une
variété idéale et choisit sur le marché le produit
qui s'en rapproche le plus. Plus grande est la distance entre la
variété de marché qui est proposée et la
variété idéale du consommateur, plus grand est le
potentiel d'innovation, car il existe une demande latente non «
assouvie ». Desai et Low
(1987)21 ont transposé ce schéma à l'innovation
financière. Plus les consommateurs seront nombreux à souhaiter
des titres présentant des caractéristiques intermédiaires
en terme par exemple de rendement et de liquidité, qui puissent
maximiser leur utilité, plus l'innovation sera profitable. Autoriser des
transferts d'un compte à vue vers un compte d'épargne (et
inversement) sans délai ni coût, permet aux clients d'optimiser la
gestion de leur trésorerie et répond ainsi à leur demande
latente de solidarisation des comptes. Les banques Américaines ont donc
rivalisé d'imagination pour offrir à leurs clients ce type de
service. Complémentaire de celle développée par Silber,
cette théorie se révèle néanmoins plus
étroite. Elle s'applique en effet facilement aux innovations de
produits, mais reste difficilement transposable aux innovations de
processus.
Conclusion
Le présent chapitre avait pour objet d'analyser les
origines des mutations financières. Pour ce faire, il a fallu non
seulement présenter les faits précurseurs de ces changements,
mais aussi,
20 Lancaster (1971), « Consumer demand: A new
approach », Columbia University Press.
21 Desai M. et Low W, (1987), « Measuring the
opportunity for product innovation», dans Changing Money: Financial
Innovation in developed countries, de Cecco (Ed.), Basil Blackwell.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 31 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 32 ~
étudier les origines proprement dites des mutations
financières à l'échelle internationale. Au terme de ce
chapitre, il apparaît que les mutations financières trouvent leurs
origines dans la prise en compte de deux processus qui constituent les deux
piliers majeurs.
Il y a, d'une part, la globalisation financière qui
apparaît comme le dénominateur commun à l'ensemble des
transformations qui ont affecté le fonctionnement des systèmes
financiers. Cette globalisation a résulté non seulement des
progrès techniques en matière de communication, mais aussi des
décisions politiques. Elle s'est accompagnée de la
libéralisation des systèmes financiers nationaux se
caractérisant par la règle des « trois D ».
Il y a, d'autre part, l'accélération des
innovations financières, dont, l'initiative relève aussi bien du
secteur privé surtout dans les pays anglo-saxons, que des pouvoirs
publics, en particulier dans les pays européens. La mondialisation des
marchés a aussi favorisé l'accélération des
innovations financières.
Aussi, les caractéristiques structurelles des
systèmes financiers vont continuer de varier selon les pays de
façon notables, particulièrement en ce qui concerne l'importance
relative des marchés de titres, des banques et des autres institutions
financières comme source de financement. Toutefois, avec
l'assouplissement des contraintes imposées aux différentes formes
de financement, les structures financières semblent se rapprocher. Ces
mutations ont eu une diffusion internationale et ont par-là même
affecté le système financier camerounais. Mais avant, il est
crucial pour nous d'établir le cadre théorique d'une telle
relation en situant notre travail dans un paradigme. Ainsi, la question
à laquelle nous essaierons de répondre dans notre deuxième
chapitre porte sur l'intensification des innovations financières.
Dès lors, il convient à ce niveau d'analyser le degré de
développement financier impulsé par les mutations
financières au Cameroun.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
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DEGRE DE DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE : Analyses
empiriques
CHAPITRE II :
Introduction:
Le système financier des pays de la zone CEMAC est
placé sous l'autorité et le contrôle des principaux organes
de l'UMAC22, à savoir la BEAC23 et la
COBAC24. La BEAC est chargée principalement de
l'émission monétaire et depuis le 16 Octobre 1990, elle a pour
mission prioritaire la stabilisation monétaire, celle-ci passant par le
maintien de la parité de change par rapport à la zone Euro et un
contrôle rigoureux du taux d'inflation à l'intérieur de la
zone. La COBAC quant à elle a pour tâche principale
l'harmonisation des réglementations et le contrôle de
l'activité bancaire de la zone. Pour cela, elle censure les banques qui
évoluent en marge du système réglementé et est
garante des règles prudentielles mises en oeuvre depuis la
libéralisation financière des années 1970.
Le Cameroun est le pôle économique de cette zone
économique et bénéficie en conséquence de
près de la moitié de la masse monétaire qui y est en
circulation. Il bénéficie en outre du système financier le
plus étoffé. Celui-ci a beaucoup évolué depuis les
indépendances (Eze-Eze, 2001). En
réalité, le système financier camerounais est un vestige
de la colonisation. Il a subi de nombreuses modifications s'accordant avec les
exigences économiques et les objectifs de politique monétaire.
Le système financier Camerounais dont les
défaillances ont été observées au milieu des
années quatre-vingt est sujet à de nombreuses mutations. Ces
mutations désignent les changements observables sur la sphère
financière, et se sont traduites par une émergence de nouveaux
établissements financiers, un essor remarquable de la microfinance, un
passage de l'illiquidité à la surliquidité des banques et
la mise en place des mesures d'ajustement financier. L'explication de ces
changements réside dans un certain nombre de faits criants, dont deux
paraissent pertinents pour être évoqués pour notre propos.
Il s'agit d'abord de la crise économique qui a profondément
affecté les banques, limitant ainsi leur rôle
d'intermédiation financière. Ensuite le rétablissement des
équilibres macroéconomiques, et enfin, l'apparition des besoins
de plus en plus importants des
22 UMAC : Union Monétaire de l'Afrique
Centrale.
23 BEAC : Banque des États de l'Afrique
Centrale.
24 COBAC : Commission Bancaire de l'Afrique
Centrale.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 33 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
ressources pour le financement des activités de
production. Contrairement aux évolutions observées dans les
systèmes financiers anglo-saxons, pour lesquelles l'initiative relevait
du secteur privé, celles du système financier Camerounais se sont
réalisées par l'initiative des pouvoirs publics, qui
étaient soucieux de rétablir l'équilibre financier
détérioré par la crise. Ils ont ainsi mis en place
d'importantes réformes. L'objectif de ces réformes était
de donner au système bancaire une solidité financière et
une capacité à mobiliser les ressources financières, et
à les affecter dans les secteurs productifs de l'économie.
A cet effet, à partir de la fin des années 1980
et le début des années 1990, les pouvoirs publics camerounais,
avec l'appui des bailleurs de fonds internationaux : Banque Mondial, Fonds
Monétaire International et Banque des États de l'Afrique Centrale
; vont dans le cadre des plans d'ajustement structurel enrichir leur
thérapie habituelle par des restructurations bancaires. Ainsi, une
nouvelle organisation va être donnée au système bancaire
sur le plan technique se traduisant par le désengagement de
l'État du capital des banques au profit des intérêts
privés.
L'objet de ce chapitre est double. Il apporte une explication
aux origines internes des mutations financières et relèvera le
degré de développement du système financier du Cameroun
via d'une part, la crise de l'intermédiation financière et,
d'autre part, les mesures d'ajustement financier et de stabilisation. Il
importe dès lors de revenir sur la crise de l'intermédiation
financière (section I), qui nous permettra d'aborder
les mesures d'ajustement financier qui soulignent la corrélation entre
le développement financier et la croissance économique au
Cameroun (section II).
SECTION I: LA CRISE DE L'INTERMEDIATION FINANCIERE.
La crise économique du milieu des années
quatre-vingt a révélé les difficultés de
l'intermédiation financière au Cameroun. Ces difficultés
étaient liées aux causes multiples, notamment
l'omniprésence de l'État qui permit aux entreprises publiques de
bénéficier des concours bancaires pour assurer leurs
équilibres (Pelletier, 1993), les erreurs de gestion
(Mathis, 1992), les difficultés conjoncturelles, le
faible degré d'approfondissement financier, l'inadéquation des
structures bancaires aux habitudes des populations, et à l'orientation
des financements vers les secteurs d'exploitation. Il s'agit d'une carence
quasi congénitale que l'évolution n'a pu malheureusement lever
(Bekolo-Ebé, 1996)
Dans cette situation asphyxiante, les banques ne pouvaient
plus assurer leur rôle d'intermédiation financière,
compromettant ainsi le processus de croissance et développement
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 34 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
économique. L'objet de cette section est de montrer en
quoi est-ce que la crise de l'intermédiation a contribué aux
mutations financières. Pour cela, il sera présenté dans un
premier temps les explications théoriques des causes de la crise
(1), et dans un second temps, les caractéristiques de
la crise de l'intermédiation financière (2).
I.1- LES EXPLICATIONS THEORIQUES DES CAUSES DE LA CRISE
DE
L'INTERMEDIATION FINANCIERE:
Parlant des causes25 de la crise de
l'intermédiation financière, nous pouvons distinguer les causes
nées de l'absence de relations structurelles entre la banque et
l'économie, des causes introduites par les politiques
économiques. Ces causes seront successivement présentées
à la suite de ce travail.
I.1.1- DE LA FAIBLESSE DES RELATIONS STRUCTURELLES ENTRE LA
BANQUE ET
L'ECONOMIE:
La faiblesse des relations structurelles entre la banque et
l'économie peut s'apprécier à travers deux critères
principaux. Il y a d'une part, la logique de l'implantation bancaire au
Cameroun et, d'autre part, l'existence de l'asymétrie d'information.
a) La logique de l'implantation bancaire au
Cameroun:
L'appréciation de l'influence des intermédiaires
bancaires sur l'évolution de l'économie camerounaise, ne peut se
faire sans une analyse historique des origines et des motivations qui ont
sous-tendu leur mise en place.
L'installation des banques au Cameroun est très
ancienne et, obéit à une logique coloniale. Toutes les relations
seront dès l'origine dominées par la prééminence de
la métropole sur les colonies. Ainsi, les banques sont apparues
largement tributaires de celles de la métropole qui avaient
déjà des structures bien organisées. Ces institutions
apparaissent en conséquence en avance par rapport aux structures
économiques et, ont été imposées sans tenir compte
des réalités économiques culturelles et sociales. Leur
rôle était de prendre en main le développement des
25Les analyses sur les causes de la crise
financière recensent trois séries de causes explicatives de
l'occurrence des crises : l'absence d'information pertinente ainsi que le
caractère asymétrique de leur répartition entre les
différents acteurs ; L'existence d'influences extérieures pouvant
entraîner des conséquences indésirables et involontaires
sur les marchés. La difficulté de trouver une infrastructure
appropriée. D'autres analyses distinguent : Les causes
macroéconomiques, les causes sectorielles, et les causes
institutionnelles.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 35 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 36 ~
échanges commerciaux au profit de la métropole.
Et c'est du développement de ces échanges que dépendra le
rythme d'installation des guichets de banque.
Au moment où le Cameroun accède à la
reconnaissance internationale, on s'attendait à ce que cette logique
soit infléchie ou alors totalement inversée. Mais il n'en ait
rien été parce que, la structure de l'économie des
colonies n'avait pas elle-même fondamentalement changé. Elle est
restée pour l'essentielle basée sur la production et
l'exportation des matières premières.
Dans la période d'euphorie qui a suivi les
indépendances, les banques se sont développées de
façon désordonnée et imprudente avec l'aide des banques
étrangères dont elles étaient généralement
des filiales. N'ayant pas d'expertise nécessaire et n'ayant guère
été incitées à l'acquérir, les banques ont
préféré prospérer dans les activités peu
risquées de financement des importations et exportations, et des
entreprises publiques détenant les monopoles dans l'exploitation des
produits primaires.
L `environnement a continué à être
caractérisé par de fortes asymétries d'information.
b) Les asymétries d'information et l'environnement juridico-
institutionnel:
Les développements de la théorie de
l'intermédiation financière appuyés par ceux de la
théorie des contrats et de la théorie de l'agence, ont
montré l'importance de la maîtrise de l'information par les
banques.
En effet, Gurley et Shaw
(1960), définissent les intermédiaires financiers comme
des agents transmettant les excédents des agents à
capacité de financement vers les agents à besoin de financement.
Ceci serait vrai si l'information était disponible pour tous dans la
réalité. Or, sur les marchés en général
(Akerlof, 1970), et sur le marché du crédit en
particulier, les emprunteurs ont une meilleure appréciation de leur
capacité de risque que les prêteurs. D'où l'identification
de deux types d'asymétries d'information. La sélection adverse ou
aléa caché, où le marché pur aboutit à
consentir des prêts aux mauvais emprunteurs et, le hasard moral ou
comportement caché lorsqu'il est impossible pour le prêteur de
vérifier les conditions d'utilisation du crédit.
Ainsi, (Leland et Pyle,
1987) aboutissent à la conclusion que, la banque comme
intermédiaire financier, gère mieux les asymétries
d'information en réduisant de façon institutionnelle les
coûts d'acquisition et de gestion de l'information. Dans le même
sens, Diamond
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 37 ~
et Dybvig (1983) perçoivent la banque
comme « l'institution déléguée » qui gère
les risques liés aux relations de crédit avec l'entreprise.
Cependant, après l'indépendance, l'État a
participé au capital des principales banques, et a cherché
à orienter les ressources vers les activités qu'il jugeait
prioritaires, tout en rendant le crédit bon marché par un
contrôle administratif des taux d'intérêt. Dans un
environnement juridique peu porteur et un contrôle bancaire peu strict,
les crédits improductifs aux secteurs désignés par le
gouvernement étaient reconduits puisqu'en cas de défaut, les
banques avaient en principe le recours de la garantie de l'État.
Garantie dont, la couverture n'était d'ailleurs pas clairement
définie. Cette situation a contribué à dégager les
banques de toute préoccupation quant au contrôle de la bonne
utilisation des crédits et à la bonne connaissance de leurs
contreparties dans la relation de crédit.
De la même manière, fournie en abondance de
l'épargne publique, les banques ne se sont pas préoccupées
de la collecte de l'épargne et notamment de l'épargne longue. Ces
erreurs de gestion ont rendu les banques incapables de faire face au
retournement de tendance qui a entraîné les retraits massifs des
dépôts étatiques.
Après les indépendances, la gestion des banques
qui avait été pour la plupart nationalisées, a
éloigné les banques plutôt que de les rapprocher des
structures économiques nationales.
En définitive, les relations entre les banques et
l'économie sont restées très superficielles ; les banques
se contentant de fournir les financements sans se soucier de leur utilisation
et, ne s'intéressant pas aux informations comptables et
financières sur l'activité passée et future de
l'entreprise.
Cette habitude a entraîné la défaillance
dans la mesure du risque du côté de la banque, tandis que du
côté des emprunteurs, s'est installé une habitude de
falsification des documents comptables favorisée par la faiblesse de
l'appareil judiciaire.
La politique monétaire pour sa part, a introduit d'autres
distorsions.
I.1.2- LES DISTORSIONS INTRODUITES PAR LA POLITIQUE
GOUVERNEMENTALE:
Selon cette catégorie de justification, la politique
gouvernementale a un effet sur le comportement bancaire, dans la fonction
d'intermédiation financière. Cette politique, bien que
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
menant pour des raisons politiques à une gestion
hasardeuse des établissements bancaires, peut aussi introduire une
répression financière, ou introduire un dualisme financier.
a) La théorie de la répression
financière:
La répression financière désigne les
obstructions réglementaires de toute nature qui contrarient les
activités des intermédiaires financiers et entravent le
développement de l'épargne (McKinnon, 1970 ;
Shaw, 1973). Elle consiste à fixer des taux
d'intérêt en dessous de leur valeur d'équilibre, à
orienter administrativement le crédit, à fixer les
réserves obligatoires à un niveau élevé, et
à limiter la concurrence au sein du système bancaire.
Cette théorie découle de l'approche
néo-classique du financement du développement qui suppose
l'épargne préalable à l'investissement. Celle-ci est une
fonction croissante au taux d'intérêt réel. Selon les
conclusions de McKinnon, la répression
financière empêche l'économie d'atteindre son taux de
croissance optimal.
A la suite de McKinnon, des travaux plus
récents, réalisés par Éboue C.
(1990) intègrent le taux d'intérêt informel comme variable
déterminante de la répartition du portefeuille des agents
économiques en économie réprimée. Dans un tel
contexte, la politique monétaire a un effet sur le comportement des
banques en les obligeant à revoir leur fonction d'intermédiation
financière.
Ainsi, pour stimuler l'investissement, il faut
décourager la détention de la monnaie. De cette mécanique,
découle une politique monétaire qui conduit à un certain
nombre de restrictions que McKinnon (1991)26
appelle « instruments de répression financière
».Ces instruments sont :
? La rétention importante des réserves obligatoire
sur les dépôts pour lutter contre l'inflation ; ? Les restrictions
sur les taux d'intérêt : administration des taux (plafonnement,
pratique des taux préférentiels ou de faveur pour certains
secteurs).
Pour des taux fixés à des niveaux faibles, le
plafonnement a conduit à des taux d'intérêts réels
négatifs sur les dépôts, si l'on tient compte du niveau du
taux d'inflation et des taux d'intérêt rémunérateurs
sur les crédits27.
26 McKinnon (1991) cité par Isaac Tamba et
al(1994).
27 Déjà en 1985, (BEAC, Études
et statistiques n° 122 Avril 1985 p122) Andely relève parmi les
contraintes s'opposant à l'exercice de l'activité bancaire, le
bas niveau des taux d'intérêt servis aux banques à la
souscription des bons d'équipement (4.5%) alors que le coût moyen
des ressources des banques était de 9.5%.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 38 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 39 ~
En définitive, l'utilisation des instruments de la
répression financière conduit à réduire
l'attraction de détenir des créances sur le système
bancaire.
Par ailleurs, les institutions financières sont
obligées de pratiquer une politique de rationnement de crédit, ce
qui prive l'accès d'une bonne partie de la population au marché
des fonds prêtables et se traduit par la segmentation des marchés
des capitaux domestiques. Ainsi, il résulte de la répression
financière, une réduction du flux des fonds prêtables dans
le système financier, obligeant d'une part, les banques à
rationner le crédit et d'autre part, les emprunteurs potentiels à
s'appuyer davantage sur l'autofinancement ou sur les circuits financiers
parallèles.
En cela la répression financière
génère un dualisme financier dans l'économie.
b) Le dualisme financier
Les économies africaines sont
caractérisées par l'existence d'un dualisme financier qui
constitue théoriquement un obstacle au développement financier
(Hugon, 2001). Dans l'optique néoclassique, le
développement financier est préalable à l'investissement,
puisque le dualisme financier contribue à évincer le
système financier formel des circuits de collecte d'épargne. Dans
l'optique de Shaw (1973), le circuit formel de financement est
le meilleur. Les intermédiaires financiers permettent en effet de mieux
orienter l'épargne car, recevant plusieurs demandes de financement, ils
peuvent opérer un choix sur une gamme de projets assez large. Cette
possibilité est réduite pour «
l'épargnant-investisseur » qui n'a
généralement qu'une opération unique et propre à
financer.
Deux théories s'opposent sur l'origine du dualisme
financier. La première considère que la présence du
dualisme financier s'explique par les carences du système financier
formel, lesquelles résulte de la répression financière. A
ce propos, Éboue C (1990) recense trois propositions
permettant de formuler la répression financière comme cause du
dualisme financier.
- Insuffisante intermédiation du côté des
marchés de capitaux officiels et inexistence des marchés de fonds
prêtables. Désarticulation et segmentation du processus de
collecte de l'épargne du côté des «marchés
souterrains ».
- Bas niveau des taux d'intérêt sur le
marché officiel qui entraîne la baisse de l'incitation au
placement bancaire en causant le renforcement du rationnement de l'offre de
crédit.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
- Niveau élevé des taux d'intérêt sur
le plan informel.
En définitive, les agents dont le niveau d'accumulation
est contraint sur le plan formel se reportent sur le marché informel.
La seconde thèse considère que le dualisme
financier s'explique par l'hétérogénéité
intrinsèque des structures économiques et sociales des pays en
développement et par l'attachement des individus à leurs valeurs
et coutumes traditionnelles. Cette approche structurelle intègre des
normes sociales et complémentaires justifiant par exemple l'existence du
financement informel au sein des groupes immigrés dans les pays
développés. Il peut dès lors être
présenté les caractéristiques de la crise de
l'intermédiation financière.
I.2- LES CARACTERISTIQUES DE LA CRISE DE L'INTERMEDIATION
FINANCIERE:
La crise de l'intermédiation financière
présente un certain nombre de caractéristiques. D'abord, une
dégradation des dépôts, ensuite un rationnement bancaire du
crédit, et enfin une mutation de la carte bancaire se traduisant par une
concentration géographique des guichets dans les zones urbaines.
I.2.1- LA DEGRADATION DES DEPOTS:
Les dépôts ont progressé
régulièrement jusqu'en 1985.Cette progression des
dépôts jusqu'au milieu des années quatre-vingt n'est pas
liée au taux d'intérêt réel
négatifs28 durant toute cette période, elle s'explique
par des effets d'offre avec la multiplication des agences bancaires dans un
climat de croissance économique.
Entre 1985 et 1987, les dépôts à terme et
les dépôts à vue ont chuté de plus de 32% (soit 45%
en volume) et 22% (soit 36%en volume) ; cette baisse aurait été
beaucoup plus importante si les banques n'avaient pas limité le montant
des retraits (Joseph A, 2000).
La chute des dépôts s'explique par le
déclenchement de la crise économique. Le manque de confiance dans
le système bancaire pourrait être à l'origine de ce
phénomène. C'est ainsi que Joseph A. (2000), a montré en
effectuant le test de Chow qu'il existe une rupture de tendance dans la
relation entre les dépôts et le PIB avant et après 1986.
À partir de cette année, les dépôts
observés
28Malgré le fait que l'inflation soit
passée de 16% en 1983à 8% en 1985.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 40 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 41 ~
évoluent plus irrégulièrement que les
dépôts prévus, et sont inférieurs à ceux-ci.
Ce retrait des dépôts illustre un phénomène de
désintermédiation bancaire et de fuite des capitaux. Les banques
quant à elles ont adopté le rationnement du crédit.
I.2.2- LE RATIONNEMENT DU CREDIT:
La relation entre banque et emprunteur est empreinte
d'asymétries d'information. En raison de ces asymétries, et de
l'univers incertain dans lequel s'exerce son activité, la banque est
soumise à un risque de retrait et de non-remboursement des
crédits. L'asymétrie d'information supportée par la banque
dans son activité d'octroi de crédits explique le
phénomène de rationnement de crédit de cette
dernière. Le rationnement du crédit se définit comme le
refus par une banque de prêter aux conditions de quantité et de
taux demandées (Joseph. A, 2000).
Le fait stylisé à expliquer est le suivant :
Lorsque le niveau de risque du débiteur augmente, les banques
n'augmentent pas le taux d'intérêt qu'elles exigent, mais
préfèrent rationner le crédit, c'est-à-dire refuser
le prêt (Stiglitz et Weiss, 1981). Ce
concept de rationnement de crédit est en contradiction avec la
théorie néoclassique d'équilibre des marchés des
prix.
Certains auteurs, en l'occurrence Cukierman
(1978), Keeton (1979), Jaffee et
Modigliani (1969) ont élaboré des modèles
de rationnement de crédit en tenant également compte des
imperfections du marché. Aussi, la carte bancaire a connu une profonde
mutation.
I.2.3- MUTATION DE LA CARTE BANCAIRE:
La mutation de la carte bancaire se rapporte à
l'ensemble des changements survenus dans la répartition
géographique des établissements bancaires sur le territoire
national. Cette mutation s'est traduite au Cameroun par deux mouvements. En
premier lieu, une mutation de la structure des établissements bancaires,
marquée par le retrait de certains établissements bancaires et la
restructuration d'autres. En second lieu, une concentration géographique
des banques dans les agglomérations urbaines telles que Yaoundé,
Douala, Bafoussam.
a) Mutation de la structure des établissements
bancaires:
Suite aux difficultés économiques du pays,
certaines banques ont été retirées du paysage bancaire.
C'est ainsi que les banques telles que la Banque Camerounaise de
développement (BCD),
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
la Cameroon Bank, la Banque Paribas Cameroun, la Bank of
America, la Boston Bank, ont été fermées.
Sous un autre aspect, les banques viables ont subi des
restructurations et des privatisations. A cet effet, le Crédit Agricole
du Cameroun (CAC) a connu une restructuration qui a abouti à la
privatisation après assainissement de son bilan.
C'est ainsi que la Société Camerounaise de
Banque (SCB) est devenue Société Commerciale de
Banque-Crédit Lyonnais Cameroun (SCB-CLC) après scission,
dissolution et acquisition des actifs saints par le Crédit Lyonnais
(1989).La BICIC est devenue la BICEC le 14 mars 1997 à la suite d'une
restructuration interne. La Commercial Bank of Cameroon (CBC), a pris les
intérêts du Crédit Agricole du Cameroun et de la BMBC.
Ces changements constituent les résultats des mesures
financières adoptées dans le cadre du programme d'ajustement
financier. Aux disparitions de certaines banques, émergent d'autres
nouvelles banques dont leur structure sera évoquée plus tard.
b) Modification géographique des guichets
bancaires:
La crise bancaire avait été attribuée en
partie aux erreurs de gestion des banques liées aux effectifs
pléthoriques et aux charges excessives. Leur retour à
l'exploitation bénéficiaire impliquait dans la
quasi-totalité des banques, une forte réduction des charges qui
passait notamment par la fermeture des points de vente déficitaires. Il
s'agissait beaucoup plus des guichets de campagne qui subissaient les effets de
la baisse des prix des produits de base.
Aussi a-t-on assisté à un redimensionnement du
réseau bancaire en faveur de la réduction du nombre de guichets
permanents d'une part, et de la concentration des guichets dans les zones
urbaines d'autre part. A cet effet, la plupart des banques sont
installées dans les grandes villes, notamment Douala, Yaoundé, et
Bafoussam, et quelques chefs-lieux de province. C'est ainsi que, des 186
guichets29 que comptait le système bancaire en 1987, 96 se
trouvaient dans les seules villes de Douala, Yaoundé et Bafoussam et 90
seulement pour l'ensemble des autres villes.
29Rapport annuel du Conseil National du Crédit,
1999
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 42 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
Cette situation a affecté les marges
bénéficiaires dans les grandes villes, et a également
conduit à soulever le débat sur la surbancarisation au Cameroun.
Cette surbancarisation se traduit par la concentration des guichets dans les
zones urbaines.
Pareil débat met en lumière, l'incapacité
des banques à recevoir de bonnes informations sur l'état de
l'économie nationale. Il faut tout de même noter que la
disparition des guichets des zones rurales soulève des interrogations
sur le lien entre l'efficacité des banques et leur éloignement de
leurs champs d'activité. Ce qui a nécessité la mise en
place des mesures d'ajustement financier. Tout comme l'activité
financière s'est développée depuis les années 1970,
le réseau des banques camerounaises a connu de nombreuses modifications
qui sont en relation avec les différentes périodes de
propriété économique et de crise systémique. Un
examen sommaire du réseau bancaire nous renseigne sur
l'amélioration de la collecte de l'activité économique.
Aussi, dans cette sous-section nous envisagerons le processus de
développement financier à travers l'étude de
l'étendu du réseau bancaire sur la période allant de 1975
à 2004. Ainsi, le tableau 1 nous donne l'évolution du nombre de
banques et d'agences sur les périodes significatives depuis les
réformes du système en 1973.
Tableau 1 : Évolution du nombre
|
de banques et d'agences.
|
|
|
Années
|
Nombre de banques
|
Pourcentage (%)
|
Nombre d'agences
|
Pourcentage
(%)
|
1975
|
4
|
-
|
88
|
-
|
1980
|
11
|
17.5
|
143
|
62.5
|
1987
|
7
|
-36
|
116
|
-23
|
1992
|
11
|
57
|
84
|
-26
|
1996
|
8
|
-27
|
74
|
-12
|
1999
|
8
|
0
|
64
|
-13.5
|
2004
|
10
|
25
|
85
|
33
|
Source: Rapport du Conseil National du
Crédit.
Du tableau 1, il ressort une progression de 17.5% du nombre de
banques et de 62.5% du nombre d'agences entre 1975 et 1980. Cette progression
corrobore bien les résultats de notre première sous-section.
Ainsi, dans la décennie 1970, le système financier camerounais
s'est enrichi. Seulement à partir de 1982, le secteur bancaire subit la
conjoncture économique de telle sorte qu'en
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 43 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 44 ~
1987, on observe une chute drastique du nombre de banques et
d'agences qui passent respectivement de 11 à 7 et de 143 à 116. A
l'issu de la restructuration bancaire enclenchée dès le
début des années 1990, le nombre total des banques est
porté à 8 et le nombre d'agences à 64 en 1999.
L'assainissement du système financier camerounais a
conduit en 2004 à une expansion de réseau des banques et à
la naissance d'un tout nouveau type d'intermédiaires financiers qui sont
les établissements de microfinance. Elles occupent désormais une
place non moins importante dans le système en ce sens qu'elles offrent
des conditions de crédit moins rudes et offrent des opportunités
de placement à la hauteur de l'épargne des petits
ménages.
Tableau 2 : Distribution
géographique des agences bancaires au Cameroun.
Villes
|
1975
|
1983
|
1987
|
1994
|
1999
|
2004
|
Douala
|
17
|
27
|
47
|
9
|
8
|
15
|
Yaoundé
|
13
|
20
|
39
|
7
|
7
|
13
|
Bafoussam
|
5
|
7
|
10
|
6
|
6
|
8
|
Sous-total
|
35
|
54
|
96
|
22
|
21
|
36
|
Autres
|
43
|
113
|
90
|
56
|
43
|
49
|
Total
|
88
|
167
|
186
|
78
|
64
|
85
|
Source: Rapport du Conseil National du
Crédit.
Le tableau 2 nous montre comment le réseau des
principales banques a évolué sur le plan géographique
depuis la création de la BEAC. L'analyse de ce tableau nous permet de
dire que depuis sa mise en route, le système financier camerounais a
connu une certaine dichotomie spatiale. On observe dans les principales villes
de Douala, Yaoundé et Bafoussam une concentration et une densification
du réseau bancaire. La capitale économique
bénéficie toujours du plus grand nombre d'agences bancaires.
Cette concentration a une raison d'être
économique : les banques cherchent à se rapprocher de sa
clientèle. Les grandes villes étant réputées pour
leur surpopulation et leurs pôles industriels, les fonds prêtables
y sont par conséquent facilement mobilisables et les placements
financiers comparativement plus rentables.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
SECTION II : LES MESURES D'AJUSTEMENT FINANCIER AU
CAMEROUN
La crise financière ayant considérablement
endommagé la situation des banques, il est apparu important pour les
autorités de remettre en cause l'orientation donnée
jusque-là, à l'activité bancaire. Cette intervention des
autorités se justifie théoriquement par le fait que le
marché seul ne pouvait parvenir à corriger les
déséquilibres constatés.
Pour ces raisons, des autorités ont été
obligées d'intervenir dans le cadre de l'ajustement financier pour
restructurer les établissements en détresse. L'ajustement
financier ne peut être défini uniquement comme un ensemble de
changements dans la politique financière.
Toutefois, les objectifs fondamentaux d'un programme
d'ajustement sont claires : augmenter l'efficacité avec laquelle le
système financier doit assurer ses fonctions essentielles de
mobilisation et d'allocation des ressources, permettre aux institutions de
réagir avec davantage de souplesse et par là même,
promouvoir la stabilité du secteur financier.
Généralement, l'augmentation de
l'efficacité de l'intermédiation s'effectue par des mesures de
décentralisation, de libéralisation et de levée des
contrôles. La politique mise en place consiste par exemple à
ouvrir le système à une grande concurrence grâce à
la réduction des barrières à l'entrée, à la
suppression des contrôles sur les taux d'intérêt ou à
l'élimination progressive des restrictions de crédit.
Pour le cas du Cameroun, l'amélioration des
performances du système financier au niveau de l'allocation des
ressources a été particulièrement importante et difficile
puisqu'il était entrepris en même temps d'autres ajustements
visant à rendre le système plus sensible aux signaux
donnés par les prix et aux forces du marché.
Dans le cadre du programme de stabilisation, un ensemble de
mesures monétaires et fiscales étaient destinées à
réduire la demande globale afin de lutter contre l'inflation ou contre
le déséquilibre de la balance des paiements. Certains de ces
changements touchent aux instruments et à leur utilisation, d'autres
concernent les mécanismes et règles de contrôles, une
troisième catégorie concerne la détermination de la masse
monétaire et donc la définition des agrégats
(Bekolo-Ebé, 2001)
Le programme de stabilisation lancé devait s'attaquer
aux déséquilibres budgétaires par la réduction de
la taille du domaine public ou par l'élimination des distorsions de prix
qui constituent
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 45 ~
des obstacles au commerce international en particulier et
à une répartition efficace des ressources en
général. Ces mesures devaient parvenir à obliger le
système financier à redistribuer les ressources de manière
efficace et souple, en fonction des signaux toujours fluctuant que renvoie le
marché.
Cependant, l'ajustement financier a impliqué
également en contre partie des mesures de décentralisation et de
déréglementation : La mise en place d'une nouvelle
réglementation et l'amélioration du dispositif de surveillance
des institutions. Des politiques d'ajustement30 ont
été mises en place à partir de 1987.Elles ont
été adoptées de manière autonome par le
gouvernement, puis par l'appui des institutions internationales à partir
de 1988. De ces mesures découlent les reformes qui ont comporté
en leur sein des restructurations bancaires, des réformes
juridico-institutionnelles, et les changements de politique
monétaire.
L'objectif de cette section est double. Il présente les
objectifs des mesures mises en place au Cameroun, puis les différentes
réformes engagées à partir de la fin des années
80.
II.1- LES OBJECTIFS DES MESURES D'AJUSTEMENT MISES EN
OEUVRE AU
CAMEROUN
Au lendemain de la crise, le Cameroun se trouvait dans une
impasse financière, économique, et budgétaire. Cette
situation a été aggravée par l'apparition d'importants
déséquilibres des finances publiques, qui augmentaient
d'année en année, une dégradation consécutive des
taux de croissance, et par un tarissement des flux des bailleurs de fonds et
par une moindre compétitivité des produits en raison de leur
surévaluation. Les mesures d'ajustement à travers la mise en
place des réformes, sont clairement apparues comme l'une des meilleures
thérapies du système bancaire visant à créer un
environnement macro-économique sain, nécessaire pour un
fonctionnement efficient du système financier.
Ainsi, les mesures mises en oeuvre par le programme
d'ajustement financier peuvent être regroupées en deux principaux
groupes d'objectifs : Un objectif sectoriel et un objectif global.
30De manière générale, les
objectifs des politiques d'ajustement structurel sont la stabilisation
macro-économique, la correction des prix relatifs et
l'amélioration de la productivité. Les instruments sont la
réduction de la demande intérieure, le rétablissement des
équilibres, budgétaires et de la
compétitivité-prix.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 46 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 47 ~
II.1.1- L'objectif sectoriel
Il était question à ce niveau d'assainir le
système bancaire et surtout financier de manière à le
rendre plus performant. Il s'agissait de rendre le système plus souple
dans l'allocation des ressources, de donner au système bancaire une
nouvelle organisation sur le plan technique se traduisant par le
désengagement des pouvoirs publics du capital des banques au profit des
intérêts privés, de permettre une adéquation du
système financier au financement de l'économie.
En effet, la politique monétaire deviendra un
instrument central de régulation et d'ajustement, contraignant
d'ailleurs l'utilisation des autres instruments tels que la politique
budgétaire et de répartition dont l'utilisation désormais
est fortement tributaire de leur capacité à faciliter la
manipulation de la variable monétaire. Il sera donc assigné
à la politique monétaire un objectif d'ajustement interne, avant
qu'elle ne soit utilisée pour l'ajustement externe, avec le changement
de la parité intervenu en 1994.
La mise en place effective du marché monétaire
à partir de juillet 1994, a achevé de compléter le
processus de refonte de la politique monétaire. Un des objectifs
visés par la création du marché monétaire, est de
modifier les conditions de refinancement, en mettant la banque centrale plus en
retrait.
C'est dans ce dessein que toute la caravane des
réformes aussi bien sur le plan monétaire, financier et
institutionnel a été mise sur pied. Il a également
été entrepris des politiques de libéralisation
financière et de réglementation. Cette dernière
s'inscrivant dans l'optique de ce qu'il est convenu d'appeler « filet
de sécurité ».
D'autre part, le redressement du système bancaire doit
aider à renverser la tendance régressive de l'économie
nationale : c'est la préoccupation de l'objectif global.
II.1.2- L'objectif global
De manière explicite, l'objectif global vise le
rétablissement à moyen terme d'un taux de croissance positif de
l'économie nationale. Les perspectives de développement interne
ayant été hypothéquées par la crise
économique du milieu des années quatre-vingt. Sur cet objectif,
les mesures entreprises rentrent dans le cadre plus global des programmes
d'ajustement structurels adoptés depuis l'exercice budgétaire
1988-1989.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 48 ~
En conséquence, l'effet recherché sur le secteur
bancaire par les mesures d'assainissement, est la remise en meilleur
état des capacités d'intermédiation du système
bancaire, afin de lui permettre de répondre de façon optimale aux
multiples besoins engendrés par la mise en oeuvre du processus de
transformation économique.
Aussi, les programmes d'ajustement financier adoptés
comportaient un ensemble de réformes, qu'il convient maintenant
d'évoquer.
II.2-LES REFORMES FINANCIERES AU CAMEROUN
Les banques de la sous-région en général,
et celles du Cameroun en particulier ont été profondément
touchées par la crise économique qui a frappé les
états au milieu des années quatre-vingt. A cet effet, même
les banques de développement créées pour assurer la
gestion des fonds venant de l'extérieur destinés au financement
des projets nécessaires au développement économique n'ont
pas résisté au désastre et se sont trouvées dans
une situation de totale illiquidité (A. Lenoir,
1989).
Dans cette situation asphyxiante, les banques ne pouvaient
plus assurer leur rôle d'intermédiation financière,
compromettant ainsi le processus de croissance et de développement
économique. Pour éradiquer cette crise financière, les
pouvoirs publics en collaboration avec les bailleurs de fonds internationaux ;
Banque Mondiale (BM), Fonds monétaire international (FMI) et la Banque
des États de l'Afrique Centrale (BEAC) ont mis en place des
réformes financières. Elles peuvent être regroupées
en trois catégories. D'abord la restructuration du système
bancaire, ensuite la mise en oeuvre des mesures monétaires, et enfin les
mesures juridico-institutionnelles.
II.2.1- Ra restructuration bancaire
Afin d'éviter l'effondrement du système bancaire
camerounais, un plan de restructuration fut élaboré en 1989.
Théoriquement, l'objectif de ces mesures financières était
de résoudre les problèmes d'illiquidité et
d'insolvabilité. La première tâche des experts fut de
réécrire les bilans bancaires. Les créances douteuses
égalant 253 milliards de FCFA au 30 juin 1988, selon les documents
comptables produits par les banques, ont été
réévaluées à 489 milliards. Par conséquent
les 104 milliards de provision pour dépréciation ont dû
être multipliés par trois. De ce fait, les créances saines
à l'économie furent réduites de 823 à 588
milliards. La totalité des actifs bancaires
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
diminua passant de 1400 à 1150 milliards de
FCFA31. Quant aux capitaux propres qui valent -26 milliards de FCFA
selon les états fournis par les banques, représentaient en fait
-282 milliards de FCFA. Le résultat net, déjà
négatif selon les résultats fournis par les banques (-150
milliards de FCFA), a été revu à la baisse (-14.5
milliards de FCFA). Car les provisions ont augmenté et les
intérêts fictifs n'ont plus été
comptabilisés. En fonction de leur situation, les banques ont
été recapitalisées, liquidées ou fusionnées.
Pour récupérer les créances, le gouvernement créa
en août 1989 la Société de Recouvrement des Créances
(SRC) dont l'objet principal est la reprise de l'actif et du passif de la
partie obérée de la Société Camerounaise de
Banque32. Elle est également en charge du recouvrement des
créances douteuses des banques liquidées et d'une partie des
créances des banques restant en activité. Elle est aussi
chargée d'indemniser les déposants. Pour ce, la SRC
bénéficie du privilège du trésor. La nouvelle
composition du bilan doit permettre d'assurer la stabilité
financière de la banque. Pour cet objectif, les actions ont porté
sur le passif et sur l'actif du bilan des banques ; toutefois, ces actions
diffèrent selon que les banques sont dissoutes ou liquidées, ou
que les banques sont réhabilitées.
Tableau 3: Créances
transférées à la SRC (en millions de FCFA)
Banques Montants Dates
BCCC 8 145 Juin 1992
CAMBANK 31 030 Juin 1992
FONADER 16 400 Décembre 1992
|
PARIBAS 18 000 Juin 1992
SCB 164 000 Juin 1990
|
Transfert d'actifs compromis des banques en activité
(SGBC, BICIC)
|
76 900 Date non précisée
|
Total 443 175 Date non précisée
|
Source: Rapport d'activité
1993/1994 de la COBAC.
31Ces chiffres, issus des réévaluations
des bilans, diffèrent des chiffres de la BEAC présentés en
annexe. 32Cette banque a été scindée en deux et
la partie saine a été reprise par le Crédit Lyonnais.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 49 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
a) Action sur le passif
Dans le cas des banques dissoutes, il était question
d'épurer les engagements desdites institutions par l'indemnisation
progressive des déposants. Cette indemnisation a été
financée par trois mécanismes :
- L'abandon des dépôts et des créances du
gouvernement et de certaines entreprises publiques33 ;
- De nouveaux prêts à l'image du
prêt-relais du Crédit Lyonnais au gouvernement : 16 milliards de
FCFA ;
- Le rééchelonnement de tous les engagements des
banques dissoutes vis-à-vis de l'institut d'émission et des
prêts garantis par l'État en faveur de la Société
Camerounaise de Banque (SCB) et de la Banque de Paris et des Pays-Bas
(Paribas).
Dans le cas des banques à réhabiliter, il a
été question d'accroître des fonds propres, de stimuler les
dépôts et de refinancer les dettes existantes. L'augmentation des
fonds propres s'effectue suivant trois modalités :
- La capitalisation des bénéfices normaux
pendant une période donnée (cas de la BICIC en 1988) ;
- L'accroissement du capital par souscription à
l'émission obligatoire des nouvelles actions ;
- L'abandon des fonds propres et des créances publiques
dont le montant est aujourd'hui estimé à 186 milliards de
FCFA.
Pour stimuler les dépôts, les autorités
monétaires ont opté pour une libéralisation des taux
d'intérêt créditeurs à partir d'un certain seuil de
3 millions de FCFA. Il fallait également éviter les retraits
massifs. L'État a contraint certains organismes parapublics à
stabiliser leurs dépôts dans les établissements de
crédit (Joseph A., 2000).
Concernant le refinancement des dettes existantes, il a
été conseillé de procéder à leur
allègement au moyen des concessions sur le taux d'intérêt
ou de l'allongement des échéances. C'est en ce sens que la BEAC a
rééchelonné ses créances sur une période de
quinze ans avec un différé de
33Selon Tamba et al. Art .cit p825, 76 milliards de
FCFA de dépôts divers aux banques liquides ont été
abandonnés par la Société Nationale des Hydrocarbures
(SNH) et la Société Nationale de Raffinage (SONARA).
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 50 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 51 ~
trois ans au taux de 3%. De même les créances en
souffrance essentiellement des crédits de campagne de la BEAC ont
été consolidées sur l'État à 3% sur quinze
ans.
b) Action sur l'actif
Une banque en difficulté peut améliorer son
portefeuille d'actif soit directement en échangeant ou en passant par
pertes et profits des créances douteuses ou recouvrables, soit
indirectement en aidant par exemple les entreprises débitrices à
restructurer. Au Cameroun, l'amélioration du portefeuille d'actifs n'a
pas été laissée à la seule initiative de la banque.
En fait, l'État à travers la Société de
Recouvrement des Créances (SRC) a repris le portefeuille non productif
des banques sinistrées.
Les créances douteuses contentieuses et impayées
(CDCI), reprises ainsi par la SRC sur l'ensemble des établissements
financiers ont été importantes à tel point qu'en
Décembre 1996, la SRC était devenue le premier
établissement de crédit du pays avec 700 milliards de
créances douteuses à recouvrir.
Vu l'ampleur de la crise financière observée au
Cameroun, la restructuration des banques n'a été qu'un des
éléments du programme de redressement qui devait comprendre
également des mesures visant une mobilisation et une allocation efficace
des ressources ; d'où les mesures sur les plans monétaire et
juridico-institutionnel.
II.2.2- Le changement de politique monétaire
Les restructurations bancaires de la fin des années
quatre-vingt ont été accompagnées d'une modification de la
politique monétaire régionale. Les mesures monétaires
entreprises devaient permettre de combattre les distorsions structurelles de
l'économie. Ces mesures s'inscrivent dans le cadre d'une
libéralisation financière, aspect fondamental des programmes
d'ajustement structurel du FMI. La politique monétaire d'inspiration
keynésienne appliquée avant 1990 a été
remplacée par une politique fondée sur les théories
de McKinnon et Shaw (1973). Il ne s'agit plus
d'impulser la collecte de l'épargne, étape préalable
à l'investissement.
Ces mesures constituent l'ossature de la nouvelle politique
monétaire de la BEAC et peuvent être regroupées en trois
groupes. D'abord la programmation monétaire, ensuite la
libéralisation des taux d'intérêt et, enfin la mise en
place du marché monétaire.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
a) Adoption de la programmation monétaire et
suppression du plafond de refinancement
des crédits
L'adoption de la programmation monétaire aligne en
effet la nouvelle politique sur la politique des normes de progression de la
monnaie en fonction du taux de croissance de l'économie
(Bekolo-Ebé, 2001, p.16). Depuis Septembre 1991, la
détermination des plafonds de réescompte n'est plus uniquement
fondée sur les besoins prévisionnels des banques : elle
procède de la programmation monétaire. Lors de la première
phase de cette programmation, les autorités monétaires
prévoient l'évolution du PIB, des finances publiques et de la
balance des paiements. Dans une deuxième phase, elles établissent
en fonction des agrégats précédents, les objectifs
monétaires : masse monétaire, avoirs extérieurs,
crédit intérieur et refinancement de la Banque Centrale. Les
plafonds de réescompte des banques auprès de la BEAC ont
été maintenus jusqu'à la création du marché
monétaire en juillet 1994. Cependant, leurs seuils ont été
abaissés pour qu'ils puissent jouer véritablement leur
rôle. Le plafond de réescompte à court terme est
passé de 258 milliards de FCFA en 1990 à 276 en 1991. Il a
ensuite été abaissé à 71 milliards de FCFA en 1992
et 1993. Depuis 1994, le plafond de réescompte maximum a
été remplacé par un objectif de refinancement. Ce dernier
ne devient impératif que lorsque le taux de couverture extérieur
des engagements à vue de la Banque Centrale est inférieur au
minimum statutaire de 20%. Par ailleurs, un nouveau système d'accord de
classement a été mis en place. Il ne fait plus l'objet de limites
individuelles et permet à la BEAC de sélectionner les signatures
sur la base d'un système de cotation.
b) La libéralisation des taux
Depuis 1990, la politique des taux bas et
différentiés a été abandonnée au profit
d'une gestion plus souple et plus rationnelle. Le niveau des taux
d'intérêt est désormais fixé de manière
à maintenir un différentiel de taux favorable avec la France,
afin d'éviter les sorties de capitaux. Le taux d'escompte
préférentiel a été supprimé et le taux des
avances au trésor a été relevé progressivement pour
égaliser le TEN en 1993. Le gouverneur de la BEAC a désormais les
compétences pour modifier les taux d'escompte. De ce fait, il n'y a pas
unicité des taux d'intérêt dans la zone BEAC.
Au niveau des banques, les taux ont été
libéralisés, seuls restent fixés un taux débiteur
maximum et un taux créditeur minimum. Le taux créditeur minimum
ne concerne que les petits épargnants : il s'applique uniquement aux
dépôts d'épargne ou aux livrets dont le montant est
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 52 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 53 ~
inférieur à 5 millions de FCFA. Quant au taux
débiteur maximum, depuis novembre 1995, il est égal au taux de
pénalité des banques majoré d'une marge de 7%.
c) La mise en place du marché
monétaire
L'instauration du marché monétaire en juillet
1994 constitue l'aboutissement des réformes de la politique
monétaire. Les opérations sur ce marché sont les demandes
de refinancement des crédits à court et à moyen terme. Ce
marché est composé de deux compartiments ; le premier est un
marché interbancaire, le second permet à la BEAC de ponctionner
ou d'injecter les liquidités.
Les banques interviennent sur le premier compartiment pour
échanger des liquidités à des conditions de montant, de
taux et de durée librement définies. A partir des interventions
sur le marché monétaire, la BEAC calcule quotidiennement le taux
d'intervention moyen pondéré (TIMP). En raison du manque de
confiance entre les banques, en1997, les montants échangés sur ce
marché sont pratiquement nuls. Les banques possédant des
liquidités excédentaires préfèrent les placer
à la BEAC (en 1997, les dépôts spéciaux
représentent en moyenne 45 milliards de FCFA par mois).
Le guichet A est le canal principal du deuxième
compartiment du marché monétaire. Il est constitué
d'appels d'offres à l'instigation de la BEAC et de prise en pension
à la demande des banques. Pour les appels d'offres, la BEAC sert
à la limite du volume de monnaie centrale tout une partie des demandes
à un taux unique. Celui-ci est arrêté par le gouverneur de
la Banque Centrale en fonction de la conjoncture interne et externe. Les prises
en pension à l'instigation des banques concernent une période de
deux à sept jours. Le taux d'intérêt des prises en pension
(TIPP) est égal au TIAO majoré de 1.5 à 2 points. Le TIMP
fluctue entre le TIAO et le TIPP. Aux appels d'offres et aux prises en pension,
il convient d'ajouter les interventions ponctuelles de la BEAC. Celle-ci peut
effectuer des avances lorsque les montants injectés sur le guichet A
excédent l'objectif de refinancement maximum de ce guichet. Si une
banque a des difficultés à rembourser les échéances
sur le guichet A, si elle a enfreint la législation, la BEAC lui consent
des avances au taux de pénalité.
Le guichet B se situe hors marché. Il a
été maintenu pour le refinancement des anciens crédits
à moyen terme (dits irrévocables), et pour les nouveaux
crédits d'investissement du secteur productif, suivant la
procédure de mobilisation en compte courant.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 54 ~
Afin de ponctionner la liquidité excédentaire
des banques, des dépôts spéciaux avaient été
instaurés en 1994. Ils étaient rémunérés et
ouverts à la demande des banques. Ils ont été
supprimés le 08/02/01996 et remplacés par les appels d'offres
négatifs prenant la forme de placement à 7 ; 28 et 84 jours. Les
trésors nationaux sont autorisés à soumissionner aux
appels d'offres négatifs. Tout comme les établissements de
crédit, ils, ne peuvent soumissionner que s'ils sont au préalable
désendettés vis-à-vis de la BEAC. Les placements sont
effectués sous la forme d'acquisition de certificats de placements qui
sont négociables librement sur le marché interbancaire, mais
uniquement entre les banques titulaires d'un compte à la BEAC. Le taux
servi cherche à fixer les liquidités dans la zone BEAC sans
gêner les placements sur le marché interbancaire.
Cependant, même dans le cas où les deux
premières mesures parvenaient au redressement du système
bancaire, il convient de se demander pourquoi les organismes de contrôle
bancaire n'ont pas détecté les signes de détresse plus
tôt. D'où les mesures juridico-institutionnelles qu'il convient
d'étudier maintenant.
II.2.3- Les mesures juridico-institutionnelles
Une fonction essentielle des banques est de contrôler le
comportement des emprunteurs. Mais qui contrôle le contrôleur ? Les
déposants n'en ont pas la compétence. C'est pourquoi la fonction
de contrôle doit être déléguée à un
organisme supra national.
La réglementation et la supervision des banques sont
considérées comme les deux instruments fondamentaux pour
prévenir ou tout au moins limiter les dommages qu'entraîne une
mauvaise gestion de ces instruments. La réglementation bancaire
définit les « règles du jeu » tandis que la
supervision permet de s'assurer du respect de ces règles.
Ces réformes ont à ce niveau, consisté
à faire le toilettage des textes de base, en particulier, les divers
textes qui, dans les pays de la CEMAC, fixent les conditions d'exercice de la
profession bancaire et le fonctionnement des établissements de
crédits (Bekolo-Ebé, 2001, P12). De nouveaux
seuils minima ont été fixés, s'agissant du capital minimum
requis pour la création d'une banque. Dans la réglementation
bancaire, le capital social des banques au Cameroun a été
relevé à un minimum de 1 milliard contre 300 millions par le
passé, pour permettre aux banques de posséder un niveau de fonds
propres appréciables.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
Concernant la supervision bancaire, sa nécessité
tient au fait qu'elle commande l'efficacité de la réglementation
bancaire. La supervision des banques a pour objectif de faire en sorte que les
institutions financières gèrent leurs prêts et leurs bilans
de manière prudente. Cette volonté de supervision a
consacré la création le 16 Octobre 1990 de la Commission bancaire
d'Afrique Centrale (COBAC) dont les attributions sont de quatre sortes :
- Attribution administrative : elle délivre les
agréments aux établissements de crédit ;
- Attribution normative : elle définit les
procédures comptables et les règles prudentielles ;
- Attribution de contrôle : elle contrôle les
établissements assujettis ;
- Attributions juridictionnelle : elle peut retirer les
agréments aux établissements de crédit et prendre des
sanctions contre les dirigeants des banques et les commissaires aux comptes.
La COBAC est opérationnelle depuis 1992, et elle s'est
dotée en Mars 1993 de deux instruments ; des normes de
solvabilité et des normes de liquidité34. La
solvabilité s'entendant comme l'aptitude d'un établissement de
crédit à faire face en toutes circonstances à ses
engagements au moyen de ses ressources propres. Tandis que la liquidité
d'un établissement de crédit est sa capacité à
honorer ses engagements à vue ou à très court terme. Ainsi
une banque doit être en mesure de restituer à la première
demande les dépôts de la clientèle (rapport
d'activité 1992/1993 de la COBAC).
La plupart des études théoriques menées
sur le développement financier depuis Goldsmith (1969)
portent à croire que celui-ci constitue une variable déterminante
dans l'explication de la croissance économique. Dans le cadre du
Cameroun, très peu d'études ont essayé de valider ou
d'invalider cette assertion. Une analyse graphique conjointe des deux
phénomènes dans ce pays nous permettra probablement
d'émettre quelques hypothèses quant à l'existence d'un
lien de corrélation entre les deux types de variables.
A la suite des deux chocs pétroliers, les pays en
développement lourdement endettés voient leur service de la dette
extérieure augmenter de façon exponentielle en raison de la mise
en oeuvre
34Ces normes remplacent les ratios suivants : -le
coefficient de liquidité, c'est-à-dire le rapport des actifs
mobilisables aux exigibilités à court terme (fixé à
un minimum de 70%) ;
-le ratio des fonds propres c'est-à-dire le rapport
entre le montant minimum des fonds propres et l'encours des crédits
réescomptables (tous les deux fixés à 5%).
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 55 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
de la nouvelle politique anti-inflationniste
américaine. La chute des cours des produits de base vient s'ajouter
à cette situation déjà déplorable pour un pays
comme le Cameroun. Le début des années 1980 est marqué par
une allocation totale des fruits de la croissance au remboursement du service
de la dette. A partir de 1983, l'État réduit ses avoirs bancaires
et augmente son endettement intérieur et ceci jusqu'en 1987, date
à laquelle le gouvernement camerounais décrète de
façon officielle la crise économique. A cette date, l'État
est asphyxié et n'arrive plus à honorer ses engagements.
Le retrait des fonds publics et l'accumulation des
créances compromises déstabilisent le système financier
déjà très fragilisé par la fermeture de quelques
grandes banques commerciales et des petites banques financièrement peu
structurées qui survient quelques années avant la crise
systémique de 1989. Cette crise est caractérisée par une
généralisation dans le système d'une mauvaise position
bilancielle bancaire. Ainsi, sur les 7 banques encore en activité en
1989, seules les grandes multinationales à savoir SGBC, BIAO, BICIC et
SCB Crédit Lyonnais subissent des restructurations, toutes les autres
sont liquidées. La crise du système bancaire est à
l'origine de la création de la SCR (Société Camerounaise
de Recouvrement) dont la mission principale est le recouvrement des
créances douteuses et dans une moindre mesure la liquidation des banques
en difficulté.
La crise du système bancaire qui survient au lendemain
de la récession économique démontre bien combien le
système financier camerounais est fragile et instable. Cette
instabilité se perçoit aussi bien à travers les effets
positifs et négatifs que peuvent avoir les chocs extérieurs sur
l'évolution des agrégats du développement financier.
Tout comme la crise économique influence le
système financier, les politiques libérales mises en oeuvre
à la suite de la dépression survenue dans le système
affectent son évolution. Au lendemain de la libéralisation et
surtout à l'issue de la restructuration, le système financier
camerounais s'est enrichi. Les dépôts et les placements bancaires
ont tous augmenté ; et ceci conformément à une
évolution positive du PIB. Au total, l'évaluation du
développement financier mesuré par le ratio, crédit au
secteur privé sur PIB, n'est pas corrélée à la
croissance économique. Ce résultat empirique souffre quelque peu
de robustesse. Pour cette raison, cette analyse doit être
complétée par une étude plus approfondie sur la
causalité entre l'amélioration du système financier et le
développement de l'activité réelle dans notre
troisième chapitre. Cette étude nous permettra de vérifier
de façon statistique et empirique les résultats de nos
observations.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 56 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
A l'inverse, le développement financier mesuré
par le taux de liquidité de l'économie est négativement
corrélé avec la croissance du produit par tête. Il faut
néanmoins noter que ce résultat est donné « ceteris
paribus ». En effet, l'analyse de la corrélation n'intègre
pas la simultanéité de l'évolution des variables
considérées. Tout se passe comme si seul le PIB à
l'instant « t » se modifie. Son incidence est par la suite
mesurée sur le taux de liquidité et vice-versa.
Conclusion
L'objet de ce chapitre était d'étudier les
origines internes des mutations financière au Cameroun. L'issue de cette
analyse conduit à révéler que les origines internes des
mutations financières trouvent leur explication à travers deux
éléments majeurs. D'une part, la crise de l'intermédiation
financière et, d'autre part, les mesures d'ajustement financier. La
crise de l'intermédiation financière a été
marquée par la dégradation des dépôts, le
rationnement bancaire du crédit et, la mutation de la carte bancaire.
Ses causes peuvent être approchées théoriquement en
distinguant pour ce qui est de leurs effets sur la sphère Camerounaise,
les causes nées de l'absence de relations structurelles entre banques et
l'économie, des causes introduites par la politique économique.
Les mesures d'ajustement financier ont été mises en place par les
pouvoirs publics, à la suite des problèmes causés par la
crise financière sur l'économie et, à cause de
l'inefficacité du marché à résorber les
déséquilibres constatés. Le gouvernement a
été obligé d'intervenir avec l'aide des bailleurs de fonds
pour mettre en place un programme d'ajustement financier. De ce programme, a
résulté des mesures monétaires, des mesures
financières et des mesures juridico-institutionnelles.
Cet ensemble de mesures a probablement eu un impact sur les
circuits de financement qu'il convient d'évaluer dans la seconde partie
de cette étude. Le coefficient d'emploi des dépôts en
crédits non mobilisables(ne devant pas dépasser 25% pour les
dépôts à vue et 50% pour les dépôts à
terme), a été supprimé en 1990 car il n'était pas
respecté. L'économie de l'intermédiation financière
de manière générale a beaucoup évolué au
cours du temps. A la suite de multiples chocs, on est progressivement
passé des systèmes répressifs aux systèmes
libéralisés. Ces chocs ont été à l'origine
de la remise en cause du paradigme fondamental keynésien sur le
contrôle et la surveillance étatique. Dans les pays africains et
en particulier au Cameroun, la mise en oeuvre d'un tel paradigme a conduit
à une forme plus exacerbée de l'interventionnisme étatique
qui a entrainé un ralentissement du processus de développement
financier enclenché dans la décennie 1970. La
colinéarité des phénomènes d'approfondissement
financier et de croissance de l'activité
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 57 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 58 ~
économique a donné une orientation
précise à notre analyse. L'existence d'une corrélation
possible entre les variables financières et les variables réelles
nous suggère de nous intéresser désormais au sens de la
causalité entre les deux phénomènes. Bien plus, elle nous
exige d'identifier la nature de la relation causale ainsi que sa
durée.
Mais, avant il est crucial pour nous d'établir le cadre
théorique d'une telle relation en situant notre travail dans un
paradigme. L'analyse néoclassique de la croissance nous semble la plus
pertinente même si elle reste très normative. Ainsi, la question
à laquelle nous essaierons de répondre dans notre deuxième
partie porte sur la dualité de la dynamique finance-croissance.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
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DEUXIEME PARTIE :
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE
ECONOMIQUE
«La modestie est au mérite ce que les
ombres sont aux figures dans un tableau : elle lui donne de la force et du
relief. »
Jean de La Bruyère
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 60 ~
Concept étroitement associé aux processus de
globalisation financière et d'accélération d'innovations
financières, les mutations financières sont à l'origine
des profondes transformations qu'ont connues les systèmes bancaires et
financiers depuis les années 1970. L'abaissement de barrières
réglementaires et techniques a en particulier favorisé
l'émergence de nouveaux acteurs et, durci les conditions de la
concurrence au sein de la sphère bancaire et financière.
Parallèlement, l'accélération du processus d'innovations
financières a largement contribué à améliorer la
complétude des marchés et l'adéquation entre les besoins
et capacités de financement des agents économiques
(Demartini, 2004). Ainsi, la mutation financière a dans
une certaine mesure contribuée à rendre le fonctionnement des
systèmes bancaires et financiers plus efficient. Pour autant, l'analyse
du phénomène par Demartini (2004)
révèle très rapidement que ses conséquences sur la
sphère financières sont loin d'être univoques, les gains
d'efficience ainsi obtenus ayant eu pour contrepartie une instabilité
accrue. Demartini (2004) va élaborer des
éléments susceptibles d'étayer cette thèse. En
particulier, si de nombreuses innovations financières ont répondu
à une demande latente de couverture des agents économiques contre
les risques, force est de constater qu'en pratique, loin d'avoir disparu, ces
derniers se sont simplement déplacés.
Par ailleurs, dans un contexte de mobilité croissante
des capitaux, l'augmentation du degré de concurrence entre les
institutions financières au niveau international, induite par le
mouvement de libéralisation et de déréglementation, a
parfois pu conduire à des prises de risques excessives, notamment de la
part des banques, alimentant l'instabilité financières
(Demartini, 2004). Ainsi, les changements intervenus dans la
sphère financière camerounaise à la suite de la crise
économique ont un certain nombre de composantes principales : un essor
de la micro finance, une crise de l'intermédiation bancaire et une
tendance à l'innovation financière quoi que peu
diversifiée et de qualité médiocre. Ces principales
composantes traduisent globalement un recul de la banque dans son rôle
d'intermédiaire financier et une émergence d'adaptations
inspirées des habitudes sociales des populations. Les mutations ayant
dès lors affectées le fonctionnement du système financier
camerounais, il sera question dans cette partie de savoir si le financement de
l'économie s'est amélioré. Pour cela, avant d'analyser
l'évolution du financement de l'économie ainsi que les
implications de politique économique (chapitre IV), il
sera évalué l'impact de la libéralisation et de la
répression financières sur le secteur bancaire (chapitre
III).
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
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CHAPITRE III :
LA LIBERALISATION ET LA REPRESSION
FINANCIERES
Introduction
L'étude de la croissance des pays industriels a permis
de prendre conscience de la relation étroite, on pourrait dire du lien
causal fort existant entre le trend ascendant de l'économie et, le
développement de l'intermédiation financière. Comme le
relève Bekolo-Ebé (2002), tout au long du
XXème siècle, l'expansion des entreprises s'accompagne
d'une forte expansion des marchés financiers et d'un
développement particulièrement rapide des institutions
financières, notamment s'agissant de la multinationalisation des
entreprises, l'internationalisation du capital productif et marchant allant de
pair avec l'internationalisation du capital financier. Ainsi, en favorisant une
allocation plus efficace des capitaux, les mutations financières ont
sans conteste contribué à rendre le fonctionnement des
systèmes bancaires et financiers internationaux plus efficients
(Demartini, 2004). Comme un "effet de caillou dans l'eau", les
mutations financières internationales ont affecté les circuits de
financement de l'économie camerounaise, à l'initiative des
pouvoirs publics soucieux de rendre leur économie plus dynamique. La
plupart des études, théoriques comme empiriques, qui montrent le
rôle primordial du secteur financier dans la croissance, concluent que le
développement inadéquat du système financier peut
constituer un obstacle à la croissance et que sa réforme,
consistant à développer des mécanismes de marché,
doit être considérée comme prioritaire. Ces travaux ont
été à la base de la vague de la libéralisation
financière en Amérique latine et dans d'autres pays en
développement dans les années soixante-dix. Les chocs
extérieurs auxquels ont été soumis les pays de la Cemac au
début des années quatre-vingt (bouleversement des conditions
financières internationales et des termes de l'échange) ont
donné une certaine impulsion à des réformes de leurs
structures financières.
L'ensemble des mesures ainsi adoptées par les
autorités, a eu une incidence sur le système financier. Il
convient dès lors de mesurer cet impact par une évaluation de la
compétitivité financière du système bancaire
(section I), ainsi que celle de la politique de crédit
entre 1972 et 1990 puis de 1990 à 2012 (section II).
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 61 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
SECTION I : EVALUATION DE LA COMPETITIVITE FINANCIERE
DU SYSTEME
BANCAIRE.
Le lien entre finance et croissance économique renvoie
à la question de la répression financière. Selon ces
analyses, le maintien de taux d'intérêt bas et plus
généralement de l'ensemble des interventions publiques visant
à réprimer l'activité bancaire ne permettent pas
d'atteindre le taux de croissance optimal de l'économie. La thèse
de la libéralisation financière35 s'oppose à
celle de la répression financière. Elle a été
introduite en économie par des auteurs tels que McKinnon
(1973) et Shaw (1973) ; puis elle a été
prolongée notamment par Fry (1982, 1988). Selon les
défenseurs de la libéralisation financière, la
répression financière renvoie à une économie dont
l'activité est profondément lésée par des
interventions strictes et stérilisantes du gouvernement sur les flux
nationaux et internationaux de capitaux. C'est alors que la notion d' «
économies financièrement réprimées » a
été introduite par McKinnon et Shaw pour caractériser des
pays en développement, en l'occurrence, dans lesquels le gouvernement
contrôle le système bancaire et joue un rôle important dans
l'allocation du crédit, par l'intermédiaire du maintien de taux
d'intérêt négatifs en termes réels, de taux
bonifiés pour les secteurs prioritaires, et de réserves
obligatoires élevées. A travers l'utilisation de ces instruments,
les autorités monétaires perturbent les prix relatifs et
l'allocation des ressources. C'est ce qui fera dire à King
et Levine (1993) que « la répression
financière réduit les services fournis par le système
financier aux épargnants, entrepreneurs et producteurs : elle
étouffe, de ce fait l'activité novatrice et ralentit la
croissance économique ».
Considérée comme un instrument de réforme
structurelle, la libéralisation financière a trouvé ses
principaux soutiens auprès des institutions financières
internationales. Aussi bien le FMI que la Banque Mondiale, qui souhaitent
favoriser la réduction de l'intervention des autorités publiques
dans le financement, ont trouvé dans cette thèse une
justification de leurs actions. La libéralisation financière
améliorerait les incitations des banques, des actionnaires, et des
créditeurs et conduirait à développer un comportement
concurrentiel de recherche de profit. Les banques, soumises aux contraintes du
marché, émettraient des titres sur le marché financier
international, ce qui permettrait d'accroître directement les fonds
alloués aux promoteurs de projets favorables au développement.
Dans cette approche orthodoxe de la libéralisation financière,
cet
35Deux thèses concurrentes s'affrontent sur
le concept de libéralisation. D'un côté, les
défenseurs de la libéralisation financière (McKinnon et
Shaw) qui estiment que la libéralisation financière est un moyen
efficace pour accélérer la croissance économique des pays
en développement ; de l'autre, les néo-structuralistes (Taylor et
Winjbergen), qui contestent le bien-fondé de cette politique.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 62 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 63 ~
ensemble de mécanismes est supposé favoriser une
plus grande efficience économique en termes de concurrence des services
financiers, de réduction de leurs coûts, d'amélioration de
leur qualité et d'innovations. Ces services financiers
amélioreront le bien-être des ménages, la
productivité et la compétitivité des entreprises en
favorisant le crédit, qui lui-même permettra permettant
l'investissement. Ils permettront de transformer les actifs liquides en
illiquides avec mutualisation et transformation des risques. Cependant, dans le
contexte d'une zone ou d'un pays en régime de répression
monétaire, il y a de fortes chances que ce soit le résultat
inverse qui soit observé. Tel est actuellement le cas des pays de la
zone CEMAC. Développée par Tchundjang Pouemi
(1980) dans une excellente contribution à la pensée
économique contemporaine, « Monnaie, Servitude et
Liberté », la théorie de la répression
monétaire trouve dans la monnaie la principale source des
difficultés économiques et sociales des pays africains. Ainsi,
selon Tchundjang Pouemi, « les problèmes
économiques et sociaux sont, à l'heure actuelle, en Afrique,
d'abord monétaires (p. 15) ». Il élabore les fondations
théoriques de la critique des institutions et des normes
monétaires et bancaires dominées par l'étranger. Partant
de la distinction entre monnaie vide et monnaie pleine, il montre pourquoi la
création de monnaie par une banque étrangère ne doit pas
être présentée comme un apport nouveau de crédits ;
le rappel des liaisons entre ouverture de crédits et création
monétaire permet de comprendre l'ampleur de la dépendance d'un
développement dont le financement reste dominé par les
institutions, les normes et les pratiques professionnelles
étrangères. La distinction entre monnaie, bien vide et monnaie
pleine permet en outre à l'auteur de montrer en quoi «la monnaie
précède la production qui la remplit, et non l'inverse ».
Publié au tout début des années
quatre-vingt, bien avant le vent de la libéralisation financière
sur l'Afrique, les enseignements de « Monnaie, Servitude et
Liberté » constituent à l'heure actuelle une
référence absolue pour comprendre le paradoxe de
surliquidité actuelle de la zone CEMAC. Ceci est particulièrement
vrai surtout lorsqu'on lit les propos suivants tenus par un banquier
camerounais, qui de plus est professeur d'économie à
l'université, « ...lorsque nous regardons le montage d'un
dossier, nous partons des résultats des entreprises. On fait un
traitement qui nous permet de savoir s'il y a une pérennité de la
société sur les concours qu'elle sollicite. Nous tenons compte
aussi de nos relations avec la clientèle. Dans tous les cas, nous
prenons toutes nos dispositions pour éviter de retomber dans la
situation d'il y a une dizaine d'années. En somme, tant que les
garanties proposées pour le recouvrement du crédit ne sont pas
bien identifiées, on ne peut pas octroyer le crédit. La banque ne
fabrique pas de l'argent ; elle n'est qu'un intermédiaire, elle
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
collecte l'épargne des Camerounais et la place dans
des mains sures »36. Ces propos sont
particulièrement intéressants. Ils permettent de comprendre la
place qu'occupent les banques dans le financement de l'économie
camerounaise : celle de simples intermédiaires financiers. Cette
affirmation est d'autant plus intéressante qu'elle vient d'un
universitaire.
La compétitivité financière du
système bancaire camerounais s'apprécie à travers le
respect des normes prudentielles édictées par la COBAC
(1) et les indicateurs de rentabilité
(2).
I.1-REFORMES FINANCIERES ET RESPECT DES NORMES
PRUDENTIELLES:
Le dispositif prudentiel mis en place par la COBAC depuis 1993
sert d'instrument privilégié de la surveillance des banques de
l'ensemble de la sous-région Afrique centrale, en matière des
garanties de solvabilité et de liquidité. L'objectif visé
étant de sécuriser les dépôts et de veiller à
une gestion optimale des crédits. Les banques sur lesquelles portera
cette évaluation sont celles qui ont été en
activité au Cameroun entre l'exercice 1995/1996 (période de mise
en place de la deuxième génération des réformes) et
l'exercice 1998/199937. Elles seront appréciées d'une
part par rapport au respect des normes de solvabilité et d'autre part
par rapport au respect des normes de liquidité.
I.1.1- Le respect des normes de solvabilité:
Deux principaux ratios retiendront notre attention : le ratio
de couverture des risques et le ratio de couverture des immobilisations
I.1.1.1-Le ratio de couverture des risques:
A travers ce ratio encore appelé ratio de
solvabilité minimum, la COBAC oblige les établissements de
crédit à justifier en permanence que leurs fonds propres nets
couvrent au moins 5% de leurs concours financiers, y compris ceux
accordés à l'État. L'intérêt de ce ratio est
d'obliger les banques à disposer d'un volume des fonds propres assez
important par rapport à leurs concours et engagements. Les
données du tableau 4 permettent de relever qu'au 30 Juin 1995, seules la
CCEI Bank et Amity Bank disposaient des ratios satisfaisants de 8.63% et de
7.65% respectivement. Toutes les autres banques affichaient des ratios
inférieurs aux normes. Cette contre-performance est
particulièrement imputable à l'accumulation des besoins en fonds
propres. Les banques qui
36 Voir Interview de Louis Banga Ntolo
«Surliquidité bancaire ne veut pas dire refus de financer
l'économie» http:\\www.camerounlink.net.
37En raison de la disponibilité des
données au cours de cette période.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 64 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
présentent des situations plus critiques sont la BICEC et
la SCB-CL avec des besoins en fonds propres de 24.8 milliards et de 15.11
milliards respectivement.
Tableau 4 : Évolution du ratio de
solvabilité minimum des banques camerounaises (en %)
|
30/06/95
|
30/12/95
|
30/06/96
|
30/12/96
|
30/06/97
|
30/12/97
|
30/06/98
|
30/12/98
|
30/06/99
|
Std bank
|
4.40
|
13.60
|
10.50
|
-5.8
|
-5.3
|
-0.73
|
4.26
|
7.26
|
-10
|
Amity bank
|
7.65
|
-1.30
|
-7.31
|
-11.31
|
-6.34
|
-6.01
|
-0.44
|
-5.01
|
-4.11
|
Sgbc
|
2.63
|
2.74
|
-3.56
|
8.32
|
7.33
|
12.06
|
10.00
|
18.48
|
13.92
|
Ccei
|
8.63
|
5.57
|
4.39
|
5.71
|
5.76
|
4.04
|
4.74
|
8.18
|
5.66
|
Bicec
|
-15.14
|
-18.13
|
-18.94
|
-6.05
|
-5.4
|
5.2
|
6.04
|
7.45
|
7.17
|
Scb-Cl
|
-15.43
|
-25.86
|
-34.90
|
-45.9
|
7.3
|
10.72
|
10.43
|
6.44
|
7.28
|
Source: Commission Bancaire de
l'Afrique centrale : Secrétariat Général
L'évolution de ce ratio sur la période
d'étude permet de noter au 30 Juin 1999, que la Standard Chartered Bank
et Amity Bank qui disposaient de meilleurs ratios au 30 Juin 1995 ont
enregistré d'importants besoins en capitaux permanents qui se chiffrent
respectivement à 2.26 milliards et à 4 milliards. Ce qui justifie
des ratios respectifs de -10% et de -4.11%. En revanche, le comportement de la
BICEC et de la SCB-CL reste satisfaisant. Ces deux banques ont pu, au regard
des réformes, améliorer leurs ratios qui sont respectivement de
7.17% et de 7.28%. En ce qui concerne la SGBC et la BICEC, elles ont maintenu
une certaine stabilité tout au long de la période d'analyse avec
des ratios oscillant autour de 5%.
I.1.1.2- Le ratio de couverture des immobilisations :
L'intérêt de ce ratio est de contraindre les
établissements de crédits à n'utiliser que les capitaux
permanents pour le financement de l'actif immobilisé. C'est pourquoi la
COBAC exige que celui-ci soit financé au moins à 100% par les
fonds permanents. Les données du tableau 3 qui donnent
l'évolution de ce ratio pour les six banques de notre échantillon
permettent de noter que la CCEI et la BICEC sont les seules à avoir
respecté ce ratio au cours de la période d'analyse. Les ratios de
la Standard et Amity se sont dégradés considérablement du
30 Juin 1996 au 30 Juin 1999. Ils sont passés respectivement de 88%
à -188% et de 75.71% à -46.65%. Cette évolution est
liée à l'accumulation des besoins en capitaux permanents. Ceux de
la Standard qui étaient de 30 millions au 30 Juin 1995 sont
chiffrés à 2.3 milliards au 30 Juin 1999, et ceux d'Amity sont
passés de 818 millions à 4.6 milliards au cours de la même
période.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 65 ~
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 66 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
En revanche, on note un redressement impressionnant du ratio
de la BICEC et de la SCB-CL. Ils sont respectivement à 132.23% et
à 67% au 30 Juin 1999, au lieu de -215.23% pour la BICEC et -90.9% pour
la SCB-CL quatre ans plus tôt. Les besoins en ressources permanentes qui
se chiffraient à 27.3 milliards pour la BICEC et à 15.88
milliards pour la SCB-CL se sont progressivement comblés.
Tableau 5 : Évolution du ratio
des couvertures des immobilisations (en %)
|
30/06/95
|
30/12/95
|
30/06/96
|
30/12/96
|
30/06/97
|
30/12/97
|
30/06/98
|
30/12/98
|
30/06/99
|
Std bank
|
88
|
241
|
311.56
|
-209.60
|
-122.80
|
-22.36
|
-5.18
|
108
|
-188.60
|
Amity bank
|
75.71
|
23.12
|
-60
|
-66.50
|
-26.82
|
-35.14
|
14.57
|
-49.25
|
-46.66
|
Sgbc
|
635.32
|
811.67
|
240
|
12.96
|
871.15
|
347
|
349.26
|
342.22
|
256.24
|
Ccei
|
161.60
|
109.29
|
82.57
|
9.18
|
69
|
92.77
|
212
|
140.52
|
128.56
|
Bicec
|
-215.20
|
-304
|
-282.5
|
-16.88
|
-13.9
|
133
|
166.50
|
136.82
|
132.25
|
Scb- Cl
|
-90.90
|
-189.90
|
-274.70
|
-47.56
|
39.82
|
66.60
|
73.68
|
53.50
|
67
|
Source : Commission Bancaire de
l'Afrique Centrale : Secrétariat
Général. I.1.2- Appréciation des Banques par
rapport au respect des normes de liquidité :
Dans le souci de protéger les dépôts de la
clientèle et de favoriser une saine gestion des ressources
financières, la COBAC a contraint les établissements de
crédit au respect des ratios visant à limiter à des
proportions raisonnables, l'affectation des ressources à court terme
à des emplois à long terme. Ces deux normes sont les ratios de
liquidité générale et le ratio de transformation à
long terme.
I.1.2.1-Le ratio de liquidité générale
:
A travers ce ratio encore appelé rapport de
liquidité, la COBAC oblige les banques au respect permanent d'une
couverture minimum de 100% de leurs dettes à échoir dans un
délai d'un mois au plus par les ressources immédiatement
disponibles. A travers le tableau 6, nous pouvons noter que toutes les banques
de l'échantillon présentent des ratios satisfaisants au 30 Juin
1999. On
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
peut remarquer que la SCB-CL et la BICEC qui éprouvaient
de sérieuses difficultés au 31 Décembre 199538,
ont réalisé des progrès remarquables dans la
stabilité de leur trésorerie.
Tableau 6 : Évolution du ratio
des liquidités minimum (en %)
|
30/06/95
|
30/12/95
|
30/06/96
|
31/12/96
|
30/06/97
|
31/12/97
|
30/06/98
|
31/12/98
|
30/06/99
|
Std bank
|
239.56
|
257.6
|
272.83
|
264.46
|
319.35
|
220.23
|
166.6
|
150.6
|
118.5
|
Amity bank
|
214.8
|
358.53
|
298.35
|
200.7
|
332.7
|
290.17
|
271.48
|
199.63
|
160.6
|
Sgbc
|
162.85
|
137.8
|
100.74
|
225.5
|
381.87
|
280.14
|
155.35
|
99.84
|
137.7
|
Ccei
|
223.44
|
152.25
|
217
|
105.66
|
196.32
|
157.78
|
141.34
|
110.11
|
173.6
|
Bicec
|
27.83
|
26.02
|
54.27
|
62.17
|
89.14
|
87.27
|
105
|
84
|
144
|
Scb-cl
|
85
|
45.9
|
86.9
|
77.43
|
109.48
|
55.36
|
84.55
|
40.4
|
104.75
|
Source : Commission bancaire de
l'Afrique Centrale : Secrétariat
Général I.1.2.2-Le ratio de transformation à
long terme :
Ce ratio qui se détermine par le rapport entre les
ressources de plus de 5 ans et les emplois et engagements de même terme a
pour but de dissuader les établissements de crédit d'utiliser
trop de ressources de court terme pour des emplois longs. La COBAC exige pour
ce ratio un minimum de 50%.
38A cette date, les deux banques éprouvaient un besoin
de liquidité respectif de 2.2 milliards et de 24.3 milliards.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 67 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
Tableau 7 : Évolution du ratio
de transformation à long terme (en %)
|
30/06/
|
30/12/
|
30/06/
|
31/12/
|
30/06/
|
31/12/
|
30/06/
|
31/12/
|
30/06/
|
|
95
|
95
|
96
|
96
|
97
|
97
|
98
|
98
|
99
|
Std Bank
|
189.5
|
224.4
|
142.4
|
-69.5
|
-45.9
|
-7.72
|
-001
|
37.78
|
-83.76
|
|
7
|
8
|
8
|
|
|
|
|
|
|
Amity
|
78.85
|
-9.6
|
-20.46
|
-39
|
-59.56
|
-13.18
|
-1.58
|
6.7
|
20.32
|
Bank
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Sgbc
|
7.13%
|
17.78
|
2.56
|
151.47
|
12.18
|
185.8
|
178.2
|
21.17
|
196.2
|
|
|
|
|
|
|
|
6
|
|
6
|
Ccei
|
31.28
|
20.85
|
17
|
8.57
|
9
|
12.6
|
11.6
|
20.74
|
19
|
Bicec
|
-50.36
|
-24.75
|
-50.32
|
-9
|
-2
|
18.03
|
22.32
|
25.3
|
27.98
|
Scb-Cl
|
-21.5
|
-62.5
|
-71.7
|
-115
|
13.76
|
27.28
|
28.6
|
30
|
8.26
|
Source : Commission Bancaire de
l'Afrique Centrale : Secrétariat Général
Il peut être relevé à partir du tableau 7
que seule la SGBC parvient à respecter ce ratio au 30 juin 1999. Pour
les autres banques, d'importantes proportions de ressources courtes sont
utilisées pour des placements longs. Pour la SCB-CL par exemple, 8.26%
seulement des emplois et engagements à plus de 5 ans sont
constitués des ressources de même terme. Ce qui signifie que
près de 92% sont puisés des ressources de moins de 5 ans. Cette
proportion est de 81% pour la CCEI et de 80% pour Amity Bank. Cette utilisation
d'importantes proportions des ressources courtes pour des emplois longs expose
les banques camerounaises à un risque permanent d'illiquidité.
I.2-REFORMES FINANCIERES ET ANALYSE DE LA RENTABILITE
DU SYSTEME BANCAIRE CAMEROUNAIS :
Les différents soldes de gestion qui s'en
déduisent permettent de déterminer les principaux coefficients
d'exploitation et de rentabilité. Toutes ces données sont
récapitulées par le tableau 8. Il peut donc être
relevé que les produits et charges d'exploitation ont enregistré
un repli entre Juin 1995 et Juin 1997. Les produits d'exploitation sont
passés de 75.4 milliards à 56.7 milliards et les charges
d'exploitation de 36.6 milliards à 14.9 milliards. Ce repli se justifie
par la liquidation de la BIAO MERIDIEN BANK et le Crédit Agricole au
cours de l'exercice 1996/1997. Au cours de deux derniers exercices de la
période d'analyse, on note un accroissement sensible de ces deux
encours
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 68 ~
qui ont augmenté de 30 milliards pour les produits
d'exploitation et de 8 milliards pour les charges d'exploitation. Cela peut
s'expliquer par la création de nouvelles banques telles que la C.B.C. et
la CITI BANK. Les frais généraux ont connu la même
évolution en passant de 37.7 milliards à 21.4 milliards entre
Juin 1995 et Juin 1997 avant de se porter à 40.4 milliards en Juin 1999.
En revanche, les produits accessoires ont enregistré une
évolution en dents de scie, avec un niveau impressionnant de 14.5
milliards en juin 1997 contre 4.6 milliards seulement un an plus
tôt39.
L'évolution de tous ces encours influence celle des
différents soldes de gestion. C'est ainsi que le Produit Net Bancaire
(P.N.B)40 qu'on assimile à la valeur ajoutée, a
enregistré un repli entre Juin 1996 et Juin 1997 en passant de 46
à 41 milliards avant de se porter à 73.6 milliards deux ans plus
tard. Il est important de souligner que la CCEI Bank, LA BICEC et la SCB-CL ont
plus contribué à sa formation avec des proportions respectives de
22.222%, 30.24% et 18.8% au 30 Juin 1999.
L'analyse du Produit Net Bancaire par rapport aux
différents types d'opérations permet de noter que la marge sur
opérations avec la clientèle contribue pour plus de 60% à
sa formation. Cela signifie que les activités des banques camerounaises
sont plus concentrées sur les opérations de mobilisation de
l'épargne et de distribution des crédits à la
clientèle. La BICEC et la CCEI présentent les marges les plus
impressionnantes avec des proportions respectives de 37.8% et de 33.25% par
rapport à celle de l'ensemble du système bancaire.
Quant à la marge sur opérations diverses, elle
représente environ 30% du Produit Net Bancaire au cours de toute la
période d'analyse. La SGBC a réalisé la marge la plus
importante au cours des trois derniers exercices avec une proportion de 29.66%
au 30 Juin 1999 par rapport à celle de l'ensemble du système
bancaire.
La marge sur opérations financières s'est
considérablement améliorée ces dernières
années. Elle est passée de 918 millions en Juin 1996 à
5.17 milliards 3 ans après. Cette embellie est tributaire à la
hausse des intérêts et dividendes produits par les placements
financiers des banques. Cependant, sa proportion dans la formation du Produit
Net Bancaire reste encore très faible. Elle est
39Ce relèvement est particulièrement
imputable à la SGBC dont les produits accessoires se sont portés
à 14 milliards contre 3.6 milliards un an plus tôt.
40Le PNB est la différence entre les
produits d'exploitation et les charges d'exploitation. Il peut encore se
déterminer par la somme des marges de différents types
d'opérations réalisées par les banques
réalisées par les banques : opérations de
trésorerie, opérations avec la clientèle,
opérations financières, opérations diverses, etc.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 69 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
de 6.8% au 30 Juin 1999. Il en est de même de la marge
sur opérations de trésorerie qui contribue pour environ 3%
seulement à la formation du Produit Net Bancaire.
L'amélioration du Produit Net Bancaire se fait
simultanément avec la maîtrise de frais généraux.
C'est ainsi que le coefficient net d'exploitation est passé de 97.4%
à 54.8% entre juin 1995 et Juin 1999. La BICEC dont le coefficient est
passé de 122.53% à 29.67% est plus concernée par cette
amélioration. Alors que pour la CCEI et la SGBC dont, les coefficients
respectifs sont de 73% et de 65.2%, de nombreux efforts restent encore à
faire.
Le résultat net qui était déficitaire de
50 milliards au 30 Juin 1995 s'est considérablement
amélioré en se portant à 17.5 milliards au 30 Juin 1999.
Cela est imputable non seulement à la maîtrise des frais
généraux mais aussi à la faible dotation aux comptes de
prévoyance41. C'est ainsi que le ratio comptes de
prévoyance / résultat brut d'exploitation est passé de
810.17% à 50% entre Juin 1995 et Juin 1999. La Standard et Amity Bank
disposent encore des ratios très élevés qui sont
respectivement de 106.8% et de 143.15% au 30 Juin 1999. Ce qui signifierait que
les concours et engagements de ces institutions sont orientés vers les
secteurs les plus risqués.
41Au 30 juin 1995, la dotation aux comptes de
prévoyance se portait à 54.5 milliards compte tenu de la forte
dégradation des créances de la BMBC et du CAC. Au 30 Juin 1999,
l'assainissement de l'ensemble du système bancaire s'est traduit par une
réduction à 1/3 de ces dotations qui se chiffrent à 17.5
milliards.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 70 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
Tableau 8 : Synthèse du compte
de résultat et des coefficients de rentabilité du système
bancaire camerounais (montants en millions de FCFA).
|
30/06/95
|
30/06/96
|
30/06/97
|
30/06/98
|
30/06/99
|
A- Produits d'exploitation
|
75 458
|
70 930
|
56 779
|
82 151
|
96 668
|
B- Charges d'exploitation
|
36 681
|
24 744
|
14 991
|
17 829
|
22 998
|
C- Frais Généraux
|
37 785
|
30 506
|
21 411
|
32 779
|
40 432
|
D- Produits accessoires
|
5 716
|
4 642
|
14 501
|
686
|
1 811
|
E- Dotations comptes de prévoyance
|
55 508
|
19 600
|
20 845
|
17 228
|
17 535
|
F- Impôts sur les
sociétés
|
910
|
1 870
|
1 828
|
347
|
846
|
G- Fonds propres nets (F.P.N.)
|
24 295
|
-501
|
28 139
|
48 830
|
55 841
|
H- Total du bilan
|
809 708
|
751 530
|
516 635
|
778 020
|
880 740
|
I- Frais et pertes nets
|
-1 322
|
-1 191
|
233
|
5 514
|
-773
|
1- PNB = A-B
|
38 777
|
46 186
|
41 788
|
64 322
|
73 670
|
2- RBE = PNB + D - C
|
6 728
|
20 322
|
34 878
|
32 229
|
35 049
|
3- RNE = RBE - E
|
-47 780
|
3 422
|
14 033
|
15 001
|
17514
|
4- Résultat Net = RNE+I-F
|
50 012
|
361
|
12 436
|
17 368
|
15 891
|
5- Coefficient brut d'exploitation A + D = B +
C
|
91.70%
|
73.10%
|
51.0%
|
61.0%
|
64.40%
|
6- Coefficient d'exploitation PNB = C
|
91.39%
|
66.0%
|
51.2%
|
50.9%
|
54.8%
|
7- Comptes de prévoyance / RBE
|
81.17%
|
83.1%
|
59.7%
|
53.4%
|
50.0%
|
8- Coefficient de rentabilité R, N F, P,
N
|
-205.85%
|
-72.0%
|
44.2%
|
35.5%
|
28.4%
|
9- Coefficient de rendement Total bilan = RN
|
-6.18%
|
0.05%
|
1.74%
|
2.23%
|
1.80%
|
Source : Commission Bancaire d'Afrique
Centrale : Secrétariat Générale
En ce qui concerne le coefficient de rentabilité, il
est autant influencé par les fonds propres nets que par le
résultat net de fin d'exercice. Son niveau le plus élevé
de 44.2% au 30 Juin 1997 correspond à un résultat net de 12.4
milliards pour 28 milliards des fonds propres nets. Le meilleur ratio est celui
de la BICEC. Il est de 168.4%, correspondant à un résultat net de
5 milliards. Ce qui représente un motif de satisfaction et de motivation
pour les actionnaires de cette banque. Au 30 Juin 1998, ce coefficient
enregistre un repli en se portant à 35.5%. Il est essentiellement
imputable à un accroissement de 20 milliards des fonds propres. Puisque
le résultat net s'est accru de 4 milliards,
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 71 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
suite au bon comportement de la SGBC, la BICEC, la CCEI et la
SCB-CL qui ont enregistré un résultat net de 5.193 milliards,
5.081 milliards, 4.4477 milliards et 3.16 milliards42
respectivement. Au 30 Juin 1999, le coefficient de rentabilité
enregistre un repli en se portant à 28,46% à la suite d'une
contraction du résultat net. Ce repli est particulièrement
imputable à la SGBC dont le résultat net a chuté de 2
milliards et à Amity Bank qui a enregistré un déficit de
1.228 milliards43.
SECTION II : EVALUATION DE LA POLITIQUE DE CREDIT DE
1972 A 2012
L'objectif déclaré de la politique camerounaise
de crédit de 1972 à 1990 était le financement du
développement Touna Mama (2002). En effet, l'un des quatre objectifs des
conventions de coopération monétaire signées à
Brazzaville les 22 et 23 Novembre 1972 respectivement entre les États
membres de la BEAC et entre ces États et la République
Française, était précisément de renforcer le
rôle de la Banque Centrale dans le financement du développement.
Pour chercher à atteindre cet objectif, les pouvoirs publics camerounais
s'étaient donné un ensemble de moyens (1) que
nous allons d'abord rappeler avant de présenter les résultats
(2).
II.1- LES MOYENS DE LA POLITIQUE DE CREDIT APPLIQUEE DE
1972 A 1990 :
Il sera présenté ici les moyens dans le cadre
institutionnel, les acteurs et les instruments de cette politique.
II.1.1- Le cadre institutionnel :
Le cadre institutionnel est constitué d'organes ayant
chacun des compétences spécifiques dans la définition et
la mise en oeuvre de la politique monétaire en général et
de la politique du crédit en particulier. Ces organes sont :
- Le comité d'administration de la BEAC ;
- Le comité monétaire national ;
- Le conseil national de crédit ;
- Le ministère chargé de la monnaie et du
crédit.
42La situation de la SCB-CL reste la plus
impressionnante. Elle est partie d'un déficit de 25 milliards au 30 juin
1995 pour un excédent de 66 millions au 30 juin 1997 et de 3.16
milliards un an après. Avec un coefficient de rentabilité de
99.25%. Le principal objectif de la restructuration de cette banque se trouve
ainsi atteint.
43Ce déficit qui reste le plus important de
cette banque depuis sa création est imputable à l'importance des
frais généraux et des dotations aux comptes de prévoyance
qui ont subi une hausse de 413 millions et de 1.59 milliards respectivement par
rapport à la situation de juin 1998.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 72 ~
Le conseil d'administration de la BEAC arrête les
plafonds globaux de réescompte, des avances et autres facilités
à court terme pouvant être accordé par la BEAC à
l'économie de chaque État membre.
Le comité monétaire national procède,
selon les directives du conseil d'administration de la BEAC, à l'examen
des besoins généraux de financement de l'économie
nationale et détermine les moyens propres à les satisfaire
(plafond de réescompte, avances et autres facilités susceptibles
d'être octroyées aux entreprises).
Le conseil national du crédit participe, à titre
consultatif, à l'élaboration des conditions de banques qui
doivent être arrêtées par le Ministre chargé de la
monnaie et du crédit, qui en est du reste le président.
Le Ministre des finances, puisqu'il s'agit de lui, est
l'autorité qui est en charge de l'élaboration et de la conduite
de la politique monétaire et du crédit.
II.1.2- Les acteurs :
Le système financier Camerounais jusqu'en 1990
était composé d'après la BEAC de :
- Douze banques commerciales, à savoir : Cameroun Bank,
Paribas, BCCC, BIAOC, BICIC,
CCEI, IBAC, SCB, Standard Chartered Bank, SGBC, Chase MANATHAN
Bank, BOSTON BANK ;
- Deux banques de développement dont la Banque
Camerounaise de Développement (BCD) et le Fond National de
Développement Rural (FONADER) ;
- Trois établissements publics à caractère
bancaire à savoir: le Crédit Foncier du Cameroun (CFC), le Centre
des Chèques Postaux (CCP) et la Caisse d'Épargne Postale, le Fond
de Garantie aux Petites et Moyennes Entreprises (FOGAPE) ;
- Quatre établissements financiers
spécialisés (SOCCA, SCCA Bail, SCE, National Financial
Crédit) ;
- Une société d'État, chargée du
financement du haut de bilan : la Société Nationale
d'Investissement (SNI).
L'ensemble du système comptait alors 180 guichets. L'un
des traits caractéristiques du système bancaire en cette
période était la très forte présence de
l'État dans les multiples aspects de son organisation. En effet,
l'État était omniprésent à tous les niveaux.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 73 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
Une ordonnance de 1973 fixait sa participation à 35%
dans le capital des banques. Lors des premières restructurations en
1989, il possédait au moins 60% du capital des quatre banques
liquidées. (Joseph A., 2000). L'État assumait
à la fois les rôles d'acteur, de régulateur et de
contrôleur de tout le système (Touna Mama,
2002).
II.1.3- Les instruments de la politique de crédit
:
Les instruments proprement dits de cette politique
étaient de deux ordres ; les instruments d'ordre quantitatif qui
devaient influencer le volume des crédits et les instruments d'ordre
qualitatif qui devaient influencer l'orientation des crédits.
a) Les instruments quantitatifs: Ils sont pour
simplement les nommer :
- Les taux d'intérêt (différenciés et
sélectifs) ;
- Les avances au trésor public (limitées à
20% des recettes budgétaires de l'exercice
précédent) ;
- Les plafonds globaux de réescompte aux banques ;
- Le système de réserve obligatoire (certaines
rémunérations d'autre nom)
b) Les instruments qualitatifs:
Quant aux instruments qualitatifs, ils devaient jouer pour
favoriser les secteurs ou les opérations jugés prioritaires pour
le développement par les pouvoirs publics (PME, agriculture, habitat
social, coopératives). Ainsi, les taux d'intérêt
préférentiel devaient leur être appliqués, ainsi que
des plafonds de compte flexibles.
II.2- LES RESULTATS DE LA POLITIQUE DE CREDIT :
Il convient de présenter d'abord les résultats
de cette politique de crédit avant d'en donner une
appréciation.
II.2.1- Présentation des résultats :
Compte tenu de l'objectif de cette politique de crédit
qui était le financement du développement, les résultats
doivent concerner :
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 74 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
- L'évolution des crédits à
l'économie ; - L'évolution des prix ;
- La croissance.
Années
|
Crédits
|
Avoirs extérieurs
|
1990
|
753819
|
-152317
|
1991
|
588911
|
-137800
|
1992
|
480145
|
-170227
|
1993
|
424537
|
-223702
|
1994
|
413423
|
-293777
|
1995
|
422433
|
-326602
|
1996
|
432560
|
-278505
|
1997
|
400807
|
-181965
|
1998
|
564823
|
-172622
|
1999
|
603891
|
-154839
|
2000
|
700515
|
48442
|
2001
|
761702
|
126109
|
2002
|
834441
|
298325
|
Source : Statistiques In BEAC, Études et
Statistiques, n° 253 Novembre - Décembre 1999, P. 307 &
n° 278, Décembre 2003.
a) Évolution des crédits à
l'économie
Ils sont passés de 333 milliards de francs CFA en 1973
à 1297 milliards en 1983, soit un taux de croissance moyen de 15% l'an,
en francs constants. Les crédits s'élevaient à 1100
milliards de francs CFA au 31 Décembre 1988. Alors que les
dépôts bancaires étaient de 790 milliards, la
différence étant financée par la BEAC. Mais plus de la
moitié de ces crédits ont été distribués aux
secteurs de transport, transit, commerce et services, les activités
agricoles et assimilées ayant eu autours de 5% seulement (Touna
Mama, 2002)
Ces crédits constituent l'une des opérations au
cours desquelles le système bancaire et la banque centrale créent
la monnaie. A la lecture du graphique 1 ci-dessous, les crédits
intérieurs ont crû jusqu'en 1990 année de la réforme
de la politique monétaire, en raison de l'objectif du
développement économique.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 75 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
Les crédits intérieurs ont connu une
augmentation relativement faible jusqu'en 1987 où ils atteignent environ
400 milliards de francs CFA. En suite du fait de la crise économique,
ces crédits vont décroître.
b) Évolution des prix:
Le taux d'inflation moyen a été environ de
l'ordre de 10%. Le tableau ci-dessous permet d'observer une hausse plus
importante de l'indice des prix entre 1973-1975 et 1880-1985 à cause
respectivement du renchérissement des produits pétroliers et
l'entrée du Cameroun dans la crise économique.
Il faut noter globalement que le taux d'inflation va
connaître une évolution en dents de scie tout au long de la
période.
Années
|
CPI
|
Inflation
|
M1
|
M2
|
PIB
|
M2/PIB
|
Crédits int
|
1970
|
18,6
|
|
39476
|
46570
|
7,502E+11
|
0,06207665
|
31900
|
1971
|
18,6
|
0
|
44144
|
52489
|
7,7631E+11
|
0,06761376
|
41000
|
1972
|
18,9
|
0,3
|
47348
|
57699
|
7,9706E+11
|
0,07238945
|
57200
|
1973
|
20,8
|
1,9
|
55571
|
70699
|
8,3975E+11
|
0,08419035
|
64800
|
1974
|
24,4
|
3,6
|
73660
|
95300
|
9,2989E+11
|
0,10248491
|
93200
|
1975
|
27,7
|
3,3
|
77190
|
107200
|
1,0345E+12
|
0,10362895
|
126000
|
1976
|
30,5
|
2,8
|
96189
|
134200
|
9,7761E+11
|
0,13727285
|
147999
|
1977
|
35
|
4,5
|
140100
|
156000
|
1,1119E+12
|
0,14029559
|
202000
|
1978
|
39,9
|
4,9
|
146949
|
212314
|
1,3566E+12
|
0,15650475
|
259000
|
1979
|
41,9
|
2
|
184252
|
260088
|
1,4385E+12
|
0,18080876
|
297000
|
1980
|
45,9
|
4
|
208234
|
315416
|
1,4102E+12
|
0,22366757
|
379000
|
1981
|
51,38
|
|
258923
|
405609
|
1,6511E+12
|
0,24565987
|
444000
|
1982
|
58,19
|
6,81
|
298481
|
483405
|
1,7752E+12
|
0,27231017
|
579000
|
1983
|
67
|
8,81
|
377065
|
612419
|
1,8971E+12
|
0,32281852
|
718000
|
1984
|
75,58
|
8,58
|
4107
|
736228
|
2,0389E+12
|
0,36109077
|
753000
|
1985
|
82,01
|
6,43
|
426684
|
864522
|
2,2033E+12
|
0,392376
|
854000
|
1986
|
88,39
|
6,38
|
447711
|
830780
|
2,3525E+12
|
0,35314773
|
996670
|
1987
|
100
|
11,61
|
387014
|
677720
|
2,302E+12
|
0,29440487
|
938944
|
1988
|
101,6
|
1,6
|
388101
|
696391
|
2,1219E+12
|
0,32819219
|
872168
|
1989
|
99,99
|
-1,61
|
455837
|
772817
|
2,0833E+12
|
0,37095809
|
1061696
|
1990
|
101,9
|
1,91
|
388665
|
640863
|
1,9561E+12
|
0,32762281
|
816209
|
1991
|
101,1
|
-0,8
|
348363
|
642347
|
1,8816E+12
|
0,34138339
|
870804
|
1992
|
101,3
|
|
31176
|
592727
|
1,8233E+12
|
0,32509002
|
831908
|
1993
|
97,89
|
-3,41
|
266855
|
535905
|
1,7649E+12
|
0,30364167
|
805190
|
1994
|
132,4
|
34,51
|
361016
|
679708
|
1,7208E+12
|
0,39499475
|
797824
|
1995
|
150,5
|
18,1
|
186220
|
637244
|
1,7776E+12
|
0,35848781
|
797711
|
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 76 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 77 ~
1996
|
157,9
|
7,4
|
313456
|
576138
|
1,8665E+12
|
0,30867812
|
844621
|
1997
|
162,8
|
4,9
|
422902
|
682638
|
1,9617E+12
|
0,34799025
|
806060
|
1998
|
105,9
|
-56,9
|
4852
|
742798
|
2,0605E+12
|
0,36049207
|
966350
|
1999
|
111,5
|
5,6
|
53773
|
840050
|
2,151E+12
|
0,39053088
|
1039983
|
2000
|
109,8
|
-1,7
|
63106
|
997476
|
2,2414E+12
|
0,4450256
|
1032511
|
2001
|
149,379384
|
39,57938424
|
-
|
1126355
|
2,3804E+12
|
0,47317992
|
1108892
|
2002
|
153,953803
|
4,574418719
|
-
|
1324983
|
2,4262E+12
|
0,54610557
|
1160103
|
Source : Calculs effectués
à partir des Statistiques, in BEAC, Études et
Statistiques, n°220, Octobre1995 p. 619, n°278,
Décembre 2003 et Statistiques financières et internationale.
a) La croissance:
Le taux de croissance moyen a été de 9.6% en
francs constants jusqu'en 1988 (Touna Mama, 2002).
Après avoir connu une croissance de 20,4% en 1985, le Cameroun va entrer
dans un cycle d'évolution à la baisse du taux de croissance,
jusqu'à atteindre son plus bas niveau de 2.2% en 1987.Le tableau 9
ci-dessous permet de visualiser ces évolutions de croissance au
Cameroun.
Tableau 9: Évolution du taux de
croissance au Cameroun
1985
|
1986
|
1987
|
1988
|
1990
|
1991
|
1992
|
20,4
|
6,8
|
2,2
|
7,9
|
6,7
|
3,9
|
3,0
|
Source : BEAC (1997,2000),
Études et statistiques, N° 233 et 256. Commission
Économique d'Afrique (2003, p.198)
Aussi, l'investissement privé pour sa part a
évolué en dents de scie. Tandis que l'investissement public a
connu un accroissement régulier, passant de 105 à 351 milliards
de FCFA entre 1973 et 1983 (Touna Mama, 2002). Mais
l'investissement privé et l'investissement public n'ont
été financés qu'à 30% par le crédit bancaire
malgré son important accroissement dans la période. Le taux
d'investissement intérieur brut moyen a été de 1973
à 1987 de 26.50%.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
A partir de 1998 déjà, la politique de
crédit du Cameroun va connaître un changement radical. Avec la
crise économique qui est officiellement déclarée en
198744, et la signature en 1988 d'un programme d'ajustement
structurel avec le FMI, la politique camerounaise de crédit aura
désormais comme objectif explicite la stabilisation des finances
publiques et de façon générale la recherche des grands
équilibres macroéconomiques et macro financiers, et comme
objectif implicite la défense de la position extérieure de la
monnaie.
II.2.2- Les caractéristiques du système
bancaire:
Après la restructuration bancaire, le système
bancaire camerounais comptait au 31 Décembre 2002, dix (10) banques
commerciales (contre 12 précédemment) et huit (08)
établissements de crédit. Comme le relève Avom
(2004), le système bancaire et financier camerounais
présente trois caractéristiques importantes. Il s'agit d'abord de
la très forte présence du capital privé dans le capital
social des banques dont une part importante est d'origine
étrangère, ensuite de l'absence de profondeur et d'innovations
financières, et enfin sa trop forte concentration.
Les données du tableau 10 ci-après permettent
d'apprécier l'important recul de l'État dans le capital social
des banques et, la forte présence du capital privé national et
étranger. Tous ces établissements obéissent
dorénavant à des stratégies et à des logiques
d'opérateurs privés, et se doivent de respecter les règles
de l'orthodoxie bancaire, c'est-à-dire faire des crédits sains,
des crédits bancaires en principe basés sur des critères
objectifs de rentabilité et non des critères politiques ou
sociaux. Il apparaît donc que l'État présente
désormais en moyenne 20.31% contre 31.20% pour les privés
nationaux et 46.49% pour les privés étrangers.
Tableau 10 : Répartition du
capital social des banques en activité au Cameroun (en %)
Banques
|
Amity
|
Bicec
|
Cbc
|
Citi B
|
Cl
|
Eco B
|
Sgbc
|
Hcb
|
Std bk
|
Afb
|
Etat
|
0
|
80
|
0
|
0
|
35
|
0
|
25.6
|
0
|
0
|
0
|
Privé N*
|
53.28
|
20
|
100
|
0
|
0
|
0
|
16.1
|
100
|
0
|
75
|
Privé E*
|
46.72
|
0
|
0
|
100
|
65
|
100
|
58.3
|
0
|
100
|
25
|
Source: Rapport d'activité
COBAC, 1998-1999, p.73
44 Le Président de la République,
S.E.M. Paul BIYA, au cours d'un discours historique à l'Assemblée
Nationale, a annoncé l'entrée du Cameroun dans la crise
économique, ainsi qu'une série de mesures allant dans le sens de
la réduction du train de vie de l'État, pour conclure
solennellement : « Nous n'irons pas au FMI ».
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 78 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 79 ~
N* = Nationaux, E* = Étrangers
Le système financier au cours de cette période
présente un autre visage avec notamment le mouvement de restructuration
qui a été engagé.
II.3- PRESENTATION DES RESULTATS
Les résultats de cette politique peuvent
s'apprécier par rapport aux objectifs recherchés. Il s'agissait
de rechercher le retour aux grands équilibres macroéconomiques et
si possible, de permettre la relance de l'économie nationale. Pour cela,
on devrait procéder à la défense de la position
extérieure de la monnaie et à la maîtrise de
l'inflation.
S'agissant de la défense de la position
extérieure de la monnaie qui s'apprécie à travers le taux
de couverture de l'émission monétaire, il faut dire que ce taux
s'est dégradé et resté largement en deçà de
la norme de 20% exigée par les statuts de la BEAC. Cela traduit
l'inefficacité de cette politique à améliorer les avoirs
extérieurs nets du pays qui ont évolué de façon
significative.
On observe une évolution nette à partir de fin
1999. Cette évolution positive traduit les progrès
réalisés dans la maîtrise des grands équilibres
macroéconomiques dans le cadre du programme d'ajustement, appuyé
par les institutions de Bretton Woods, le rapatriement plus important des
recettes d'exportation pétrolière, ainsi que la mobilisation d'un
volume croissant de ressources extérieures tant publiques que
privées. Mais il faut tout de même remarquer que la période
d'avant 1999 révèle une évolution relativement faible,
avec une baisse entre 1994 et 1996, suite à la dévaluation
intervenue le 12 Janvier 1994.
II.3.1- Évolution des prix
La lutte contre l'inflation est plus que jamais
considérée comme un objectif de politique des autorités
monétaires. En effet, la maîtrise des tensions inflationniste
permet de relancer l'investissement et donc de favoriser la croissance
économique. A cet effet, après le taux record de 33% de
l'immédiat post dévaluation en 1994, le taux d'inflation a
progressivement diminué. Contrairement à la période
1972-1990, où le taux d'inflation se situait autour de 10%, cette
période correspond à un taux moyen qui tourne autour de 4%, ce
qui traduit une maîtrise du phénomène au Cameroun.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
II.3.2- Évolution des crédits à
l'économie de 1990 à 2003
La liquidation des banques et le transfert des créances
douteuses des banques en activité à la SRC, ont
entraîné une chute des crédits jusqu'en 1997, comme le
montre le graphique ci-après.
Il s'observe que les crédits d'une part diminuent
progressivement jusqu'en 1994, d'autre part évoluent en dents de scie
au-delà, mais se situent dans tous les cas loin du niveau de 1100
milliards de francs CFA atteint en 1988. Quoi qu'il en soit, malgré les
reformes et la dévaluation, les banques s'engagent peu dans le
financement de l'économie. Le ratio dépôts totaux /
crédits à l'économie et à l'État atteint
103% en 1997 contre 84% en 1984, avant le déclenchement de la crise
économique. La dévaluation n'a pas eu les effets
escomptés, les crédits à l'économie ayant
diminué de 43% en terme réels entre le 31 Décembre 1993 et
le 31 décembre 199745 (Joseph A., 2000).
Cette baisse des crédits illustre aussi le fait que
suite à la dévaluation, l'État a apuré une bonne
partie de ses arriérés de paiement auprès des entreprises
qui ont donc moins sollicité les banques. Alors que les crédits
à l'économie représentaient 32% du PIB en 1990, ce
pourcentage n'est que de 8,2% en 1997. Si une partie de cette diminution
s'explique par l'apurement des bilans bancaires entre 1990 et 1992 (en 1992,
les crédits à l'économie représentaient 15% du
PIB), elle illustre également le manque de dynamisme du secteur bancaire
dans le financement de l'économie.
Aussi, durant cette période, les banques s'engagent
essentiellement à court terme pour financer des activités de
commerce et de service. De 1997, période d'exploitation du
pétrole à 1986 celle de la crise économique, la part des
crédits à moyen et long terme était supérieure
à 20% et elle a même atteint plus de 30% en 1980 et 1981
(Joseph A., 2000). Au contraire, à partir du
déclenchement de la crise, la part des crédits à moyen et
long terme est devenue inférieure à 20%. Devant l'augmentation
des difficultés économiques, les banques sont sollicitées
pour les besoins de liquidité à court terme. En revanche, elles
sont plus "frileuses" pour prendre des positions sur le long terme. En raison
de l'insolvabilité des banques de développement, leur suppression
était nécessaire. Cependant, désormais, le financement du
long terme pose problème, car ce rôle n'est pas dévolu aux
banques commerciales. Jusqu'à ce jour, le Cameroun manque d'institutions
spécialisées dans le financement du long terme.
45En 1998, la tendance s'est inversée : les
banques ont connu les tensions de liquidité suite à une
stagnation des dépôts et à une augmentation de la demande
de crédit, ce double mouvement s'explique par la crainte d'une nouvelle
dévaluation du FCFA lors du passage à l'Euro en janvier 1999 et
par un rattrapage de la demande de crédit, renforcée par
l'amélioration des performances économiques depuis1995.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 80 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 81 ~
Le tableau 11 ci-après permet de visualiser la
répartition des crédits selon la durée. Il ressort de
cette répartition que ces crédits sont en moyenne de 80,25%,
19,15%, 0,6% respectivement pour le court, le moyen et le long terme. Il peut
être entendu que le système financier est loin de se
préoccuper du financement des opérations de développement
qui sont davantage de long ou tout au moins de moyen terme. Ni les
restructurations qui ne sont pas achevées, ni le changement de politique
monétaire, ni la dévaluation n'auront permis d'accroître de
manière significative la part des crédits à long terme.
Tableau 11 : Répartition du
crédit selon la durée au Cameroun (en %)
Année
|
Court terme
|
Moyen terme
|
Long terme
|
1990
|
86.86
|
13.0
|
0.14
|
1991
|
81.66
|
16.96
|
1.38
|
1992
|
79.65
|
20.29
|
0.06
|
1993
|
80.52
|
19.41
|
0.07
|
1994
|
93.13
|
16.64
|
0.23
|
1995
|
85.55
|
14.25
|
0.20
|
1996
|
77.00
|
22.80
|
0.20
|
1997
|
74.53
|
25.30
|
0.17
|
1998
|
71.33
|
23.69
|
4.98
|
1999
|
73.59
|
21.28
|
5.13
|
2000
|
75.36
|
19.63
|
5.01
|
2001
|
76.72
|
19.32
|
3.96
|
2002
|
74.39
|
21.95
|
3.66
|
Source : Calculs effectués
à partir des statistiques, in BEAC Études et statistiques,
n° 253, Novembre - Décembre 1999, p. 307 et N° 267 janvier
2003.
II.3.3- Évolution des taux d'intérêt
:
La politique des taux d'intérêt devrait permettre
d'après les statuts de la BEAC, de soutenir financièrement la
relance économique, plus particulièrement les initiatives du
trésor, des entrepreneurs et des particuliers nationaux.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
La politique des taux d'intérêt fondée sur
la conception Keynésienne, relance par les investissements, à
savoir qu'un taux faible ou élevé les stimule ou les
décourage. L'on comprend dès lors que la Banque Centrale ait
opté pendant cette période pour une stratégie des taux
d'intérêts bas et stables avec quelques aménagements pour
tenir compte de l'environnement financier international. Aussi, l'écart
entre les taux débiteurs et créditeurs au Cameroun a tendance
à s'accroître, ce qui montre que malgré les mesures de
libéralisation financière, la concurrence entre les
établissements bancaires est limitée. Pour (Joseph
A., 2000) entre 1989 dernière année avant la mise en
place de la nouvelle politique monétaire et 1997, la différence
entre le taux débiteur maximum pour les opérations à moyen
terme de la clientèle ordinaire et le taux créditeur minimum sur
les dépôts de 12 à 24 mois est passé de 8,9%
à 17%. Alors, d'un point de vue théorique, la
libéralisation financière est sensée accroître la
concurrence entre les banques, et entraîner une diminution des marges
d'intermédiation, tel n'a pas été le cas.
Il ressort que le taux débiteur et le taux
créditeur évoluent au même rythme ce qui est contraire au
résultat attendu compte tenu de la libéralisation
financière.
Conclusion
L'objet de ce chapitre était d'apprécier la
libéralisation et la répression financières sur le
financement de l'économie. Pour cela, il a fallu d'abord mesurer la
solidité du système bancaire, ensuite évaluer la politique
de crédit mise en oeuvre avant et après les reformes.
Au terme de notre analyse, il apparaît un paradoxe.
Celui d'un système bancaire liquide et d'une économie non
financée. En effet, les réformes financières au Cameroun
ont permis au système bancaire de présenter un degré de
solidité financière satisfaisant. Les normes de
solvabilité et de liquidité sont de plus en plus
respectées. Les banques parviennent à maîtriser leurs
charges d'exploitation, leurs frais généraux et à
présenter de meilleurs soldes de gestion et des coefficients de
rentabilité plus encourageants. Seulement les banques ne se sont pas
impliquées activement dans le financement de l'économie. Elles se
caractérisent à ce niveau, par une défaillance et, ne
s'adaptent pas au besoin des investisseurs et des populations. Cette
défaillance se traduit par une réticence des banques en
matière d'octroi des crédits et s'explique entre autre par la
volatilité de l'épargne, mais aussi par l'aversion aux risques
des banques.
Cette situation permet de vérifier l'importance
relative des mutations financières sur l'évolution des circuits
de financements.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 82 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
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CHAPITRE IV :
INNOVATIONS FINANCIERES ET CROISSANCE ECONOMIQUE
DU CAMEROUN
Introduction
L'appréciation de l'influence de l'évolution des
intermédiaires financiers sur les économies camerounaises, a
conduit à un paradoxe au chapitre précédent. Celui d'un
système bancaire liquide et quasi assaini et l'absence de financement de
l'économie. Il est à noter que, le système financier
camerounais, à la suite des mesures d'ajustements financiers, s'est
révélé assaini. Mais cet assainissement ne permet
cependant pas de conclure à la capacité des banques à
relever les défis de la mondialisation et de la globalisation
financière, et des problèmes auxquels elles restent
confrontées. La diversité d'évolution ainsi
observée n'a pas entraîné une déconnexion des
banques de leurs activités traditionnelles et, à l'aptitude
à soutenir une véritable concurrence. Il s'agit d'une
inadéquation du système financier aux impératifs de
développement.
La période précédant la crise se
caractérise par des institutions bancaires et, financières
tributaires de celles de la métropole qui, avaient des structures
déjà bien organisées. Ces institutions sont donc apparues
en avance par rapport aux structures économiques et à leur niveau
de développement ; et ont été imposées sans tenir
compte des réalités culturelles et sociales. En effet, l'objectif
déclaré de la politique de crédit en cette période
était le financement du développement. C'est pourquoi, des
niveaux plus élevés de crédits ont été
observés. Seulement, ces crédits étaient octroyés
par « clientélisme46» et parfois même sans
garanties et, destinés plus aux secteurs de transport, transit, commerce
et services, activités agricoles. La crise ayant profondément
touché les banques, l'objectif prioritaire pour les autorités est
devenu l'assainissement de l'environnement financier. Il s'est donc
développé à côté du système financier
formel, d'autres circuits de financement plus adaptés aux besoins des
populations analphabètes et faisant concurrence aux banques, les
incitant même à diversifier les instruments financiers. Aussi, la
création de la bourse de valeurs dont les activités
démarrent encore timidement a reçu une grande adhésion,
l'alternative des banques de développement ayant été
écartée. Le système financier camerounais, malgré
les
46Se sont des crédits de faveur octroyés
sans garanties et dont on sait que le remboursement ne sera pas
effectué.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 83 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
mutations ne s'est pas adapté aux grands défis
de la mondialisation. Il est resté peu dynamique et en déphase
avec les besoins de l'économie.
Après avoir présenté les
caractéristiques actuelles du système financier (section
I), une analyse des institutions concurrentes aux banques sera faite
(section II).
SECTION I : LES CARACTERISTIQUES ACTUELLES
DEL'INTERMEDIATION BANCAIRE AU CAMEROUN.
A la suite des réformes, il devait s'opérer des
regroupements, des fusions et alliances stratégiques importants,
permettant non seulement de renforcer la fonction d'intermédiation, mais
aussi d'accroître les marges et taux de profitabilité. Aussi le
nombre de banques du système bancaire est passé à 10 au 31
Décembre 2003 contre 12 dans les années précédant
immédiatement la dévaluation. Ainsi que le relève
Avom (2004), le système bancaire compte
également huit établissements de crédit auxquels il
convient d'ajouter les sociétés d'assurance dont le rôle
dans le financement de l'économie va considérablement se
développer dans les prochaines années, car elles se
présenteront comme des concurrentes sérieuses des
établissements de crédit, notamment dans la collecte de
l'épargne. A côté de ce secteur officiel, il se
développe la microfinance, dont la progression a été
remarquable au cours de la dernière décennie malgré sa
disparité (Lelart M., 2002).
A cet effet, le système bancaire et financier
camerounais présente actuellement plusieurs caractéristiques
dont, trois paraissent pertinentes pour qu'elles soient évoquées
pour notre propos. Il s'agit d'abord de sa trop forte concentration qui
débouche sur sa surliquidité (1), ensuite de la
très forte présence du capital privé dans le capital
social des banques, dont une part importante est d'origine
étrangère (internationalisation) (2), et enfin
de la faiblesse de profondeur et d'innovations financières
(3).
I.1- UN SYSTEME BANCAIRE CONCENTRE ET LE PARADOXE DE
LA SURLIQUIDITE BANCAIRE :
Le paradoxe de la surliquidité se manifeste par une
concomitance entre une surliquidité persistante et une insuffisance de
financement du secteur réel. C'est le cas actuellement de la zone CEMAC.
En effet, l'économie réelle de la zone CEMAC est en manque de
moyens de financement externe, alors que le secteur bancaire dispose de
liquidités excédentaires qu'il ne parvient pas à
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 84 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
employer. Par sa persistance, le paradoxe de la
surliquidité bancaire de la zone CEMAC dépasse un simple
phénomène conjoncturel, laissant à penser que le
problème de financement est celui de l'intermédiation
financière et qu'il puise sa source dans l'histoire institutionnelle de
la zone FCFA. Les tentatives d'explications de ce paradoxe avancées
jusqu'à présent ne tiennent pas compte de cet aspect fondamental.
Elles sont principalement de trois ordres. La première tiendrait
à la non-coïncidence dans les temporalités de l'offre et de
la demande. En effet, les banques de la zone CEMAC disposent essentiellement de
ressources à court terme, alors que le secteur non-financier recherche
principalement le financement à plus long terme. Traumatisé par
une très forte incertitude inhérente à la crise de la fin
de la décennie quatre-vingt, le système financier de la zone
CEMAC s'avère actuellement incapable d'assurer une transformation
effective des ressources.
Dans la deuxième explication, ce paradoxe serait
lié à la conjoncture économique. Ainsi, lorsque la
conjoncture économique est favorable, les perspectives de
rentabilité des entreprises s'améliorent. Ceci se traduit d'une
part par une plus forte bancabilité des projets et une augmentation de
la rémunération des ménages. La capacité
d'épargne de l'économie augmente et vient augmenter les
dépôts bancaires. Ce mécanisme peut durer jusqu'au
tarissement des projets bancables. Si par ailleurs les ménages ne
sollicitent pas de crédit, les dépôts bancaires se
transforment en surliquidité. A cet instant, la banque a le choix entre
un placement rémunéré auprès de la banque centrale
ou une constitution de réserves obligatoires.
Enfin ce paradoxe découlerait à la fois de la
dimension spatiale des déséquilibres de financement et de
l'absence d'un véritable marché interbancaire dans la zone CEMAC.
Jusqu'à présent, le marché financier dans la zone CEMAC
est encore embryonnaire avec l'existence de deux places boursières
(BVMAC et DSX dont nous en parlerons plus loin). Les prêts entre les
banques se font en blanc. L'absence de support (garantie) ne permet pas la
couverture des risques supportés par les banques sur le marché
interbancaire.
D'autres explications plus anecdotiques ont été
proposées: le faible taux de bancarisation de la
population47, la prédominance de la monnaie fiduciaire,
l'inadaptation de l'environnement juridique, l'importance du secteur informel,
...Même si ces faisceaux d'explications semblent fondés en ce qui
concerne les banques commerciales, il convient de constater qu'ils n'abordent
pas la cause profonde du paradoxe de surliquidité dans la zone CEMAC. En
effet, la surliquidité touche non seulement les banques commerciales de
la zone CEMAC, mais aussi
47 Le taux de bancarisation moyen est de 4% en
Afrique centrale. Au Cameroun, moins de 10% de la population est
bancarisée.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 85 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 86 ~
la BEAC. Par conséquent, une analyse de ce paradoxe qui
ne prend pas en compte la situation de surliquidité de la BEAC demeure
partielle. Pour saisir l'intégralité de ce
phénomène, il est nécessaire de revenir sur le concept la
libéralisation financière de la décennie quatre-vingt-dix
et son inscription dans un régime de répression
monétaire.
L'analyse de la concentration dans l'industrie bancaire permet
de mettre en évidence les inégalités de taille entre
établissements de crédit, mais également les tendances
oligopolistiques qui se manifestent au sein de ce secteur. Au Cameroun, la
concentration s'est traduite par deux mesures :
? Une concentration géographique: celle-ci se
caractérise par la réduction du nombre de banques (fusion et
acquisition et liquidation) ;
? Une concentration économique: il s'agit à ce
niveau d'une concentration de l'activité bancaire en termes de
dépôts / crédits et de part de marché.
I.1.1- Évaluation de la concentration
économique:
La diversité des produits ne permettant pas la
définition d'une incidence composite de concentration dans le cas des
banques, la concentration sera évaluée d'une part par les parts
de marché, puis par le nombre de banques et d'agences.
a) La concentration par les parts de
marché:
Il sera évalué ici la concentration des
dépôts et la concentration des crédits. A chaque fois, il
sera dressé un tableau des parts de marché pour faire le calcul
du taux de concentration pour l'année 2004. Il existe de nombreux
indicateurs de concentration. Pour notre étude, il sera utilisé,
l'indice de Hirchman-Herfindhal. Il est égal à la somme des
carrés des parts de marché de toutes les firmes de la branche ou
de l'industrie. Formellement, cet indice s'écrit comme suit : H
= (qi/Q) 2 = i2 Où qi
représente la production de la firme i et
Q la production totale de l'industrie. Il peut dès lors
être évalué ces différentes concentrations.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 87 ~
a1) La concentration des dépôts
bancaires: Tableau 12 : Part de marché des
dépôts 2004
Banques
|
Montant en millions de FCFA
|
Part en % simple
|
Part en % cumulé
|
SGBC
|
250780
|
22.92
|
22.92
|
BICEC
|
220301
|
20.14
|
43.06
|
SCBCL
|
161757
|
14.80
|
57.85
|
AFB
|
136257
|
12.46
|
70.31
|
SCBK
|
107814
|
9.86
|
80.16
|
CBC
|
95390
|
8.72
|
88.88
|
CITI BANK
|
45270
|
4.14
|
93.02
|
AMITY BK
|
25440
|
2.33
|
95.35
|
ECO BANK
|
36221
|
3.31
|
98.66
|
UNION BK
|
14674
|
1.34
|
100
|
TOTAL
|
1093301
|
100
|
/
|
Source : Fichiers Garbis Iradian, FMI,
2004
Le tableau souligne une forte concentration des
dépôts. En effet, sur les dix banques en activité, deux
à savoir, la SGBC et la BICEC contrôlent 43.06% des
dépôts, alors que La moitié du système bancaire,
constituée des cinq premières banques à savoir, la SGBC,
la SCB-CL, la BICEC, la CCEI et la Standard, contrôle à elle seule
80.16% des dépôts. A partir de ces résultats, il peut
être calculé l'indice H de concentration. Soit :
H = (0.22922 + 0.20142 +
0.14802 + 0.12462 + 0.09862 +
0.08722 + 0.04142 + 0.02332 +
0.03312 +
0.01342) = 0.15.
En comparant cet indice à celui qui traduit
l'égalité de tailles, qui est égal ici à, soit 0.1,
il est claire que ces deux indices sont différents ; ce qui traduit
alors les inégalités de tailles dans cette industrie. Puisque
lorsque les firmes sont de tailles identiques, ces deux indices devraient
être égaux. Cette inégalité de tailles traduit bien
la concentration de cette industrie.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 88 ~
a2) La concentration des crédits:
La concentration des établissements des crédits
peut être également évaluée à partir de
l'activité de prêt. Le tableau ci-après permet de calculer
le degré de concentration en 2004.
Tableau 13 : Part de marché de
crédit 2004
Banques
|
Montant en millions de FCFA
|
Part en % simple
|
Part en % cumulé
|
SGBC
|
186575
|
22.00
|
22.00
|
BICEC
|
175177
|
20.67
|
42.67
|
SCBCL
|
116007
|
13.68
|
56.35
|
SCBK
|
102093
|
12.04
|
68.39
|
CBC
|
87265
|
10.29
|
78.68
|
AFB
|
79788
|
9.4
|
88.08
|
CITI
|
34042
|
4.01
|
92.09
|
ECO BANK
|
30698
|
3.62
|
95.71
|
AMITY
|
25998
|
3.07
|
98.78
|
UNION BANK
|
10244
|
1.21
|
100
|
TOTAL
|
847887
|
100
|
/
|
Source : Fichiers Garbis Iradian, FMI,
2004
Ce tableau souligne une forte concentration des
établissements de crédit. Les deux premières banques
à savoir la SGBC et la BICEC, contrôlent à elles seules
42.67%. Bien plus, en ajoutant la SCB-CL, la Standard Chartered Bank et la CBC,
la moitié du système bancaire distribue 78.68% de crédit.
Il convient de remarquer que la Société Générale et
la BICEC contrôlent le marché du crédit à hauteur de
42.67%. Il peut donc être calculé l'indice H.
H = (0.222 + 0.20672 +
0.13682 + 0.12042 + 0.10292 +
0.0942 + 0.04012 + 0.03622
+0.03072+0.01212) =
0.14.
En comparant cet indice à celui qui traduit
l'égalité de tailles, qui est égal ici approximativement
à 0.1; il y a bien inégalité de tailles, puisque ces deux
indices sont différents.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
b) La concentration par le nombre de banques et
d'agences:
Le degré de concentration bancaire peut
également être mesuré par le nombre de banques et
d'agences. Plus ce nombre sera réduit, plus la concentration sera
élevée. Cet aspect peut être apprécié
à partir du tableau ci-après.
Tableau 14 : Évolution du
nombre de banques et d'agences
Années
|
Nombre de banques
|
Nombres d'agences
|
1975
|
4
|
88
|
1980
|
11
|
143
|
1987
|
7
|
186
|
1992
|
11
|
84
|
1996
|
8
|
74
|
1999
|
8
|
74
|
2002
|
10
|
85
|
Source : Rapport annuel du Conseil
National du Crédit
La lecture de ce tableau montre bien la concentration du
système bancaire. En effet, sur l'ensemble de la période
étudiée, on observe non seulement qu'il y a un petit nombre de
banques en activité, ce nombre qui tourne autour de 8 banques avec une
augmentation plus importante en 1980, mais également, de période
en période, on constate aussi une réduction des agences ; la
réduction ainsi constatée commence après 1987, à
cause peut être de la crise économique qui a affecté le
système bancaire. Une reprise sera observée après 1999
avec l'entrée de deux nouvelles banques à savoir ECOBANK et Union
Bank dans le système bancaire.
I.1.2- Évaluation de la concentration
géographique :
Les pays en développement sont
caractérisés par un dualisme économique qui ne cesse d
`influencer les niveaux de structure tant industrielles que sociale. Au
Cameroun, à côté d'un secteur moderne qui, regorge les
activités commerciales et industrielles modernes, il existe un vaste
secteur traditionnel. Ces deux secteurs d'activité sont localisés
dans les zones bien spécifiques. Alors que le secteur moderne se
localise dans les agglomérations urbaines, telles que Yaoundé,
Douala, Bafoussam, le secteur traditionnel, pour sa part, se situe dans des
zones rurales. Cette
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 89 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 90 ~
structuration de l'économie camerounaise, expliquerait
alors la concentration géographique du réseau bancaire. En effet,
le secteur traditionnel manifeste une certaine aversion vis-à-vis des
structures bancaires, et la structure des dépôts en subit donc les
effets. Seul le secteur moderne influence de façon significative
l'importance des dépôts et la structure des banques. Ce
différentiel d'aversion de ces différents secteurs vis à
vis des banques influence l'implantation des banques qui choisissent les
grandes agglomérations au détriment des campagnes. Ainsi, la
plupart des banques sont installées dans les grandes villes, notamment
Douala, Yaoundé, Bafoussam, et quelques chefs lieux de région. Ce
phénomène peut être visualisé à travers le
tableau ci-après qui retrace le réseau bancaire camerounais.
Tableau 15 : Évolution du
réseau bancaire camerounais
Ville
|
1975
|
1983
|
1987
|
1994
|
1999
|
2002
|
Douala
|
17
|
27
|
47
|
9
|
8
|
16
|
Yaoundé
|
13
|
20
|
39
|
7
|
6
|
12
|
Bafoussam
|
5
|
7
|
10
|
6
|
5
|
9
|
Total
|
35
|
54
|
96
|
22
|
19
|
37
|
Autres
|
42
|
113
|
90
|
56
|
40
|
48
|
Total
|
87
|
167
|
186
|
78
|
59
|
85
|
Source : Rapports annuels du conseil
national du crédit
La lecture de ce tableau souligne bien l'importance du
phénomène de concentration géographique du réseau
bancaire autour des grandes agglomérations urbaines au Cameroun. En
effet, il est à remarquer que sur l'ensemble de la période, les
trois métropoles que sont Douala, Yaoundé et Bafoussam, ont la
plus grande part des agences par rapport aux autres régions. Sur
l'ensemble de le période étudiée, ces trois villes ont
à elles seules, d'année en année, en moyenne 35% du nombre
total d'agences. Ce phénomène s'est surtout accentué en
1987 où ces trois villes ont à elles seules plus de 51% des
agences existantes. Il peut être attribué à cette situation
la multiplication des guichets périodiques du milieu des années
1980.
Cette concentration géographique se traduit par le
développement des comportements d'épargne informelle dans les
zones rurales.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
Aussi, des 85 agences bancaires que compte le système
bancaire en 2002, un peu plus 80% sont regroupées dans les villes de
Douala et Yaoundé. Ainsi, des 16 agences que compte la
société générale de Banques au Cameroun (SGBC), dix
sont situées dans les villes de Yaoundé (trois) et Douala (sept),
et six dans le reste du Cameroun.
En somme, l'industrie bancaire est fortement
concentrée, sur l'ensemble de la période. Sur le plan
géographique, les agences des banques sont plus installées dans
trois villes. Sur le plan économique, l'activité bancaire est
contrôlée par cinq banques à raison de 85% pour les
dépôts et 72% pour les crédits.
I.2- UN SYSTÈME BANCAIRE
INTERNATIONALISÉ:
Une des conséquences de la globalisation des
marchés est l'intégration financière. Cette globalisation
a entraîné un vaste marché financier mondial dont les
parties sont solidaires et interdépendantes. La finance s'étant
globalisée, le mouvement va se répercuter dans les
systèmes bancaires. C'est dans cette optique que le système
bancaire camerounais s'est également internationalisé. Cette
internationalisation peut s'apprécier à travers deux
critères principaux. Il y a, d'une part, l'implantation bancaire
étrangère au Cameroun, et d'autre part, le développement
de l'activité bancaire à l'étranger.
I.2.1- L'implantation bancaire étrangère au
Cameroun:
La présence des banques étrangères au
Cameroun est très ancienne et remonte à la période
coloniale. Les premières banques à s'installer étaient la
Banque d'Afrique Occidentale (BAO) et la Banque Commerciale Africaine (BCA).
Les banques étaient pour la plupart françaises, et leur
rôle était de prendre en main le développement des
échanges commerciaux avec la métropole. C'est du
développement de ces échanges que dépendra le rythme
d'installation des banques qui n'étaient que des filiales des banques
étrangères. Au moment où le Cameroun accède
à la reconnaissance internationale, on s'attendait à ce que cette
logique soit infléchie ou alors totalement renversée ; mais il
n'en ait rien été parce que, la structure de l'économie
des colonies n'avait pas elle-même changé. Dans la période
d'euphorie qui a suivie les indépendances, notamment à partir du
milieu des années 1970, avec le boom des prix des matières
premières (pétrole, cacao, café), les banques
américaines, italiennes, espagnoles, vont également s'implanter.
Une majorité se retirera progressivement par la suite au moment
où, le Cameroun rentre dans une phase de récession à
partir du milieu des années 1980.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 91 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
Aujourd'hui, après les restructurations et les
mutations qu'il a connu depuis le début des années 1990 et le
retour à la croissance qui a suivi, on observe un léger mouvement
de retour des banques étrangères vers le Cameroun à
travers une prise de participation dans le capital social de plusieurs banques
en activités.
I.2.2- L'implantation des banques camerounaises à
l'étranger:
Pour ce qui concerne l'implantation des banques camerounaises
à l'étranger, deux banques en effet sont concernées par ce
mouvement. Il s'agit d'Afriland First Bank48 et de la Commercial
Bank of Cameroon. La première est la plus dynamique dans cette
stratégie. Elle a en effet ouvert à la fin des années 1990
deux agences bancaires en Guinée-équatoriale et en France, puis
en 2002, une succursale dans le port Congolais de Pointe Noire, ainsi
qu'à Sao Tomé et Principe. Cette stratégie s'est
poursuivie en 2003, par une prise de participation dans le capital de la banque
omnifinance en Côte d'Ivoire. Bien plus, des nouveaux partenariats ont
été mis en place dans trois pays d'Afrique. Il s'agit de la
Banque de Développement du Tchad, de la Société Marocaine
de Dépôts et de Crédit et enfin de la First Bank of South
Africa. Ainsi, après la France, puis la Chine plusieurs autres
partenariats lui assurent une représentation en Amérique et en
Europe Occidentale (Avom, 2004).
La deuxième est beaucoup plus timide, et n'est
présente qu'en République Centrafricaine à travers
l'ouverture d'une agence.
Au total, l'internationalisation se traduit par une
présence moins importante de l'Etat dans le capital social des banques
(contrairement à la période précédant la crise
où sa participation excédait 35%).
Dans l'ensemble du système bancaire, l'État
n'est présent que dans trois banques, dont la BICEC où
l'État est représenté à hauteur de 80% dans le
capital ; c'est la participation la plus importante.
Les données du tableau 14 ci-après
amènent deux observations importantes. Elles permettent
d'apprécier l'important recul de l'État dans le capital social
des banques et la forte présence du
48Ancienne caisse commune d'épargne et
d'investissement (CCEI) qui devient Afriland First Bank en 2002.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 92 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
capital privé national et étranger. Il
apparaît que l'État49 représente
désormais en moyenne 20.31% contre 31.20% pour les privés
nationaux et 46.49% pour les privés étrangers.
Tableau 16 : Répartition du
capital social des banques en activité au Cameroun (en %)
Banques
|
Amity B
|
Bicec
|
Cbc
|
Citi Ba
|
Cl
|
Ecobk
|
Sgbc
|
Hcb
|
Std bk
|
Afbk
|
État
|
0
|
80
|
0
|
0
|
35
|
0
|
25.6
|
0
|
0
|
0
|
Privé N*
|
53.28
|
20
|
100
|
0
|
0
|
0
|
16.1
|
100
|
0
|
75
|
Privé E*
|
46.72
|
0
|
0
|
10
|
65
|
100
|
58.3
|
0
|
100
|
25
|
Source : Rapport d'activité
COBAC, 1998/1999, P. 73 N* = Nationaux, E* = Étrangers.
I.3- INSUFFISANCE DE PROFONDEUR ET D'INNOVATIONS
FINANCIÈRES : I.3.1- La faible profondeur financière
:
Le terme profondeur financière renvoie
généralement à la taille du secteur financier. Ainsi,
l'appréciation de la taille du secteur bancaire dans une économie
se fait à travers le ratio M2 / PIB en raison de sa
simplicité, et sans qu'il soit l'indicateur le plus
approprié50. Ce ratio mesure le pourcentage de la masse
monétaire dans la richesse totale dans l'économie.
L'interprétation de ce ratio est cependant biaisée par
l'importance de la thésaurisation. En effet, dans la plupart des pays
sous-développés, une partie non négligeable de la
quantité de monnaie en circulation échappe au circuit
bancaire.
Le système bancaire camerounais malgré la
restructuration est demeuré « frileux » et très peu
développé du fait notamment de la répression
financière, et du renforcement du dualisme financier. Cette faiblesse de
la taille, peut être appréciée en observant
l'évolution du ratio M2/PIB. Il ressort que le ratio M2/PIB est
resté relativement stable et faible entre 1970 et 1975. Il a ensuite
connu une évolution progressive jusqu'en 1985, consécutive au
rythme de croissance de l'économie qui s'emballait pour atteindre les
24%, avant de connaître une baisse progressive,
accélérée par la
49Il important de signaler que cette
présence demeure importante dans les autres pays de la CEMAC en raison
du retard, pris dans le processus de libéralisation et de privatisation.
Par exemple, au Congo, l'État est présent dan trois banques sur
quatre en activité, avec une part moyenne de 84.30% (COBAC, 1999)
50D'autres indicateurs sont aussi utilisés
pour mesurer la profondeur financière. On peut citer M1 / PIB, (M2 - M1)
/ PIB, M3 / / PIB.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 93 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
crise économique pour se situer en dessous de 20% en
1987 année officielle d'entrée du Cameroun dans la crise. Il y a,
cependant, une reprise entre 1987 et 1989 portant le ratio au-dessus de
20%,suite à un léger choc d'une hausse défavorable des
prix des matières premières qui est resté très peu
perceptible, à cause de l'ampleur de la crise dans laquelle se trouvait
l'économie camerounaise. Après cette période, le ratio va
connaître une évolution en dents de scie et relativement faible
jusqu'en 1996. Une reprise relativement plus importante s'observera
l'année d'après, pour atteindre le niveau jamais
égalé en 2002. Cela peut s'expliquer par l'émergence de la
microfinance qui s'est institutionnalisée et réduisant par
là même la thésaurisation.
Mais paradoxalement le Cameroun reste encore un peu en marge
de l'évolution des systèmes financiers internationaux, car
l'intermédiation financière donne l'impression au Cameroun de
ramer à contre-courant, pour rechercher la petite taille et limiter le
développement des opérations (Bekolo-Ebé,
1998).
I.3.2- Le manque des innovations financières:
Une autre caractéristique actuelle du système
bancaire camerounais est le manque d'innovations financières.
Il se traduit par une quasi-absence des services financiers.
Alors que partout ailleurs et notamment dans les pays occidentaux et
Européens, se développe l'innovation financière, dont le
rythme tend à s'accélérer avec comme corollaire,
l'expansion et la densification des marchés et pour conséquence,
une plus grande capacité à répondre aux besoins et
à offrir des opportunités d'investissement,
(Bekolo-Ebé, 2002). L'intermédiation
financière au Cameroun se caractérise par une pauvreté des
instruments, souvent d'ailleurs inadaptés aux besoins, tant pour
l'épargnant que pour l'emprunteur. Et lorsque ces instruments existent,
ils sont très peu diversifiés et de qualité
médiocre. Les conditions pour y accéder sont extrêmement
malthusiennes et l'assurance de financement du fait de la
fidélité des relations est pratiquement nulle
(Bekolo-Ebé, 1998). La faiblesse de l'innovation
explique ainsi pour une large part les difficultés des entreprises
à trouver les financements adaptés au cycle de production, et la
tendance des agents à agir en marge du système. C'est pourquoi
les marchés y sont aussi peu développés, et
l'intermédiation informelle y prend une telle ampleur, posant ainsi
à l'intermédiation financière un problème
d'adaptation.
Le système bancaire demeure fragmenté et
élitiste, avec une exclusion du financement bancaire, d'une frange
importante de la population, qui, pour résoudre ses besoins, recourt
à la
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 94 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 95 ~
microfinance. En plus, il manque de souplesse, les
démarches administratives sont toujours longues et fastidieuses pour
l'ouverture des comptes, la réalisation des opérations de
dépôts et de demandes de crédits (compte tenu des
conditions exigées) (Avom, 2004). Bien plus, les rares
services disponibles ne sont pas accessibles à tous les clients. Par
exemple, l'existence des cartes bancaires et des guichets de distribution
automatique de billet devenu depuis de nombreuses années des services
ordinaires dans les pays développés et certains pays au Sud du
Sahara comme l'Afrique du Sud et les pays d'Afrique du Nord demeure
paradoxalement un grand luxe. Ainsi que l'a relevé Avom
(2004), la SGBC et la BICEC ont été les premières
à expérimenter le service de paiement par carte bancaire. Plus
récemment, Afriland First Bank vient de mettre à la disposition
du public un porte-monnaie électronique (i-card) qui permet de
réaliser les paiements sur l'ensemble du territoire, dans les surfaces
disposant d'un terminal agréé. Elles ont mis à la
disposition de leurs clients des cartes de retrait. Cependant, les
distributeurs associés à ce service n'ont pas un fonctionnement
permanent. Ils sont régulièrement en panne et de nombreux
désagréments sont régulièrement signalés La
monnaie demeure le seul actif financier le plus utilisé. Le
chèque dont l'obtention nécessite une procédure longue
(plus d'un mois) n'est pas totalement accepté comme moyen de
mobilisation de la monnaie et de paiement. Au total, la banque apparaît
depuis plusieurs décennies après l'indépendance et ce
malgré les nombreuses restructurations et mutations, culturellement en
déphase avec les réalités économiques et sociales.
Les taux d'intermédiation bancaire c'est-à-dire le rapport entre
le nombre de population pour un guichet de banque reste faible et se situe
à environ un guichet pour 200000 habitants (COBAC, 2000) c'est ce qui
explique par ailleurs sa très forte concentration. Aussi
l'émergence de la micro finance qui est plus adaptée aux besoins
des populations en majorité pauvre, trouve là son explication.
SECTION II : EMERGENCE DE LA MICROFINANCE
Le système financier formel du Cameroun présente
dans les années 1990 des limites dans son fonctionnement. Ces limites
sont dues au fait qu'il s'est développé culturellement en
déphase avec les réalités économiques et sociales
et ce, malgré les nombreuses restructurations et mutations. Certaines de
ses caractéristiques actuelles, analysées dans les sections
précédentes en l'occurrence, le manque de profondeur et
d'innovations financières, sa trop forte concentration ont
contribué à le rendre moins dynamique et inadapté aux
besoins des populations. Aussi, à ces dysfonctionnements, se sont
accompagnés les développements des circuits de financement
parallèles, moins contraignants et, plus adaptés aux besoins des
populations analphabètes. Il s'est agi de la finance
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
informelle qui en se développant s'est
institutionnalisée et a favorisé l'essor de ce qu'il convient
d'appeler aujourd'hui la microfinance.
De nombreux facteurs se trouvent à l'origine de l'essor
de la micro finance, et des innovations qui en résultent relèvent
de sa capacité d'adaptation. Il convient dès lors de revenir sur
les facteurs de développement, avant d'analyser les institutions de
micro finance dans le paysage financier camerounais.
II.1- LES FACTEURS DE DEVELOPPEMENT DE LA MICROFINANCE:
La microfinance constitue depuis la dernière
décennie une composante importante du système financier
camerounais. Son rôle dans la collecte de l'épargne, la
distribution des crédits aux populations urbaines et rurales à
faible et à hauts revenus, est indéniable. La micro finance s'est
développée à la suite de la finance informelle, et ses
pratiques se sont diversifiées. Ces pratiques, quoique parfois
différentes de celles dont nous avons l'habitude, caractérisent
néanmoins une forme originale et parfois sophistiquée de la
finance. On peut donc considérer qu'il s'agit d'une véritable
intermédiation financière, dans laquelle les coûts de
transaction sont réduits, les risques moins grands, l'information plus
symétrique. Contrairement au système bancaire qui est très
concentré notamment sur le plan géographique, la micro finance
quant à elle, est quasi présente sur l'étendue du
territoire national. C'est ainsi qu'un rapport de la Banque Mondiale de 2003
dénombre plus de 650 agences de micro finance dans le territoire
camerounais. Certains facteurs sont à l'origine de ce
développement. Il s'agit des facteurs induits d'une part, et les
facteurs autonomes d'autre part.
II.1.1- Les facteurs structurels
Ces facteurs résultent non seulement de l'inadaptation
du système bancaire formel aux réalités sociales,
culturelles et économiques, mais aussi de la faiblesse de celui-ci.
Cette faiblesse se caractérise par : le manque d'innovations
financières, la faible diversification spatiale et la faible profondeur
financière. De plus, après les restructurations, les banques sont
apparues encore plus fragiles. Elles sont restées de petite taille,
alors que la globalisation financière conduit à la formation des
conglomérats financiers multispécialisés. Cette recherche
de la petite dimension les amène d'ailleurs à restreindre la
nature de leurs opérations qui sont faiblement diversifiées.
Les produits offerts sont pratiquement toujours les
mêmes que ceux d'il y a vingt ans comme si aucune évolution ne
s'était produite, et comme si la fonction d'intermédiation
était restée
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 96 ~
immuable (Bekolo-Ebé, 1998). Les
banques sont restées étrangères à leur
clientèle, et ont adopté des comportements de rationnement de
crédit, expliquant ainsi le paradoxe d'une forte liquidité
bancaire et, une croissante lente voire une diminution régulière
du volume de crédits. Ce qui a entraîné l'exclusion du
financement, d'une frange importante de la population qui, pour résoudre
ses besoins recourt à la micro finance.
Dès lors, l'expansion de la microfinance trouve
là son explication. D'autres facteurs peuvent également justifier
leur émergence.
II.1.2- Les facteurs autonomes
Les facteurs autonomes sont liés aux
caractéristiques intrinsèques des microfinances, qui
intègrent l'individu dans une dynamique sociale, mais également
présentent des caractéristiques techniques répondant aux
habitudes des populations et à leurs besoins spécifiques.
La microfinance est considérée comme un moyen de
lutter contre la pauvreté c'est pourquoi elle intéresse les
bailleurs de fonds internationaux, en l'occurrence, la Banque Mondiale, le
Fonds Monétaire International et les banques régionales de
développement. Elle repose sur des relations de proximité,
l'allocation des ressources l'est toujours à court terme. Au total la
microfinance contribue au financement de l'activité économique
pour des durées et des montants courts. D'où son expansion.
II.2- LES INSTITUTIONS DE MICROFINANCE DANS LE PAYSAGE
FINANCIER CAMEROUNAIS
L'émergence de la microfinance est une manifestation de
la vitalité et du développement de la finance informelle, et elle
s'est enracinée dans trois évolutions. Le financement local, le
secteur privé, et le crédit (Lelart, 2002).
Même si la microfinance fait très souvent référence
au micro crédit, sa contribution au financement des petites
activités économiques est indéniable. C'est ainsi qu'un
certain nombre de caractéristiques peuvent être admises, dont,
l'une d'elle est une question de taille comme son nom l'indique.
Il s'agit d'un petit crédit, d'un montant peu
élevé, sensiblement inférieur au crédit qu'une
entreprise ou un ménage peut solliciter d'une banque. La Banque Mondiale
retient un plafond de 30% du PNB par habitant, ce qui représente pour le
cas du Cameroun à près de 100.000 FCFA ou 150 euros. Ce
crédit est donc sollicité par des personnes dont le revenu est
sinon moyen du moins
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 97 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 98 ~
bas. Ce sont souvent les fonctionnaires, des associations de
personnes. Les chiffres ci-dessus étant déterminés par
rapport à un PIB moyen au niveau du pays, le montant peut être
inférieur au niveau d'un débiteur donné. C'est bien
pourquoi le micro-crédit est considéré comme un
crédit pour les pauvres. Ce micro-crédit peut être
demandé pour plusieurs mobiles ; mais il l'est principalement pour
développer une activité génératrice de revenu,
qu'il s'agit d'une ancienne ou d'une nouvelle activité. C'est pourquoi
le micro-crédit est souvent considéré comme un moyen de
lutter contre la pauvreté et qu'il intéresse la banque mondiale
et les banques régionales de développement. Enfin, les
emprunteurs n'ont guère de garantie personnelle à offrir. Mais
comme les candidats sont nombreux dans chaque quartier ou chaque ville, ils se
connaissent et la solidarité africaine agissant, ils se constituent en
groupes restreints au sein desquels chacun s'engage pour les autres. C'est
ainsi que les taux de remboursement sont prohibitifs.
Cependant, la différence reste grande entre les
banques, et les institutions de microfinance. Les banques accordent des
crédits en créditant des comptes, elles créent la monnaie
qu'elles prêtent, elles n'ont pas besoin d'en disposer au
préalable, elles ne « perdent » rien jusqu'à ce qu'il y
ait retrait et qu'elles soient obligées de rembourser le
dépôt en billets. Les flux monétaires sont
déconnectés de leur activité de crédit. Ils
dépendent de l'usage que font leurs clients du crédit
accordé, en chèque ou en billet, et le rythme de leurs
dépenses et de leurs recettes. Au niveau d'une grande banque, et plus
encore au niveau d'un pays de l'ensemble des banques. Ces flux sont
relativement stables. Il en est tout autrement pour les institutions de
microfinance. D'une part, elles accordent du crédit en donnant de
l'argent, en billets ou en chèque, elles ne créent pas de la
monnaie, elles doivent en avoir avant d'en prêter. D'autre part, elles
doivent être remboursées si elles ne veulent pas être
contraintes de cesser leurs opérations rapidement.
Ces flux monétaires sont donc pour elles directement
liés à leurs opérations de crédit, ils
dépendent du rythme des nouveaux crédits qu'elles accordent et
des anciens qui leur sont remboursés. Leur encaisse soit toujours
susceptible de fluctuer fortement, que ce soit l'ensemble des institutions ou
pour chacune (Lelart, 2002).
Depuis les travaux de Gurley et Shaw
(1960), il est reconnu que le niveau d'évolution du secteur
financier influence positivement le taux de croissance à long terme de
l'économie. A cet effet, afin que le système financier
camerounais puisse jouer son rôle dans le processus de financement de
l'économie via une allocation efficiente des crédits, cette
étude suscite un certain
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 99 ~
nombre de recommandations. Celles-ci vont du
parachèvement de la restructuration du système financier,
à l'assainissement complet de l'environnement macroéconomique.
II.3- L'ACHEVEMENT DE LA RESTRUCTURATION DU SYSTEME
FINANCIER :
La restructuration bancaire comme le relève
Touna Mama (2002) doit déboucher sur une politique plus
agressive de collecte de l'épargne et une politique plus audacieuse de
distribution de crédit. Il ne saurait y avoir de politique de
crédit fiable sans système bancaire sain et jouissant de la
confiance du public. Or, il est étonnant que les banques
restructurées comme la BMBC soient peu après, obligées de
fermer malgré la surveillance de la COBAC. Si les banques commerciales
persistent dans la politique de distribution des crédits qui consiste
à privilégier essentiellement le court terme au détriment
des moyen et long terme, alors, il faut absolument créer les banques
spécialisées dans le financement du développement.
En fait, le système financier actuel doit être
réorganisé et élargi afin de couvrir un certain nombre de
secteurs que les banques commerciales ne veulent assumer. Il s'agit notamment
du financement de l'agriculture, des PME et des financements longs.
L'impulsion devra alors venir de l'autorité
monétaire pour donner à la politique de crédit des
orientations plus conformes à "l'esprit de développement". La
forme à donner au système financier devrait alors s'inscrire dans
cette logique pour qu'enfin les techniques et les instruments à donner
à ce système contribuent à remodeler le canal du
crédit bancaire. Aussi, les banques commerciales classiques sont encore
réticentes à intervenir dans les secteurs précités,
puisqu'elles travaillent avec des capitaux à courts termes
déposés par leurs clients sur lesquels, elles ne veulent prendre
des risques inconsidérés. Il faut donc imaginer de nouveaux
mécanismes, notamment des mécanismes d'atténuation du
risque qui permettront aux banques commerciales de s'engager davantage. Le
développement du crédit-bail, la création de fonds de
garanties, la création des sociétés de cautions mutuelles
professionnelles et de sociétés de capital-risque, pourraient en
plus d'une banque spécialisée dans le financement des PME
permettre de résoudre le problème. Il doit également
être envisagé, la création d'autres institutions plus
spécialisées.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
II.3.1- La création d'institutions
financières spécialisées :
L'architecture actuelle du système bancaire camerounais
suite à la liquidation d'institutions spécialisées telles
que la Banque Camerounaise de Développement (BCD) en 1989,
révèle un vide de financement qui se doit d'être
comblé.
Il s'agit donc de créer des banques de
développement dont, la gestion serait plus rigoureuse et qui
utiliseraient outre l'épargne nationale, les fonds alloués par
les institutions financières internationales pour le financement du
développement. Elles devraient, en outre, à travers plusieurs
guichets, créer de la monnaie destinée exclusivement au
financement du développement. A côté de ces banques, on
peut envisager d'autres institutions telles que des crédits
d'équipement aux PME, les banques de développement
régionales au niveau provincial ou départemental, et les fonds de
garantie des investissements. La nécessité
d'accélérer le processus de la mise en place des premières
cotations au niveau de la bourse des valeurs mobilières de Douala
demeure pressante. Du reste, il est essentiel, dans les structures
financières à recréer au Cameroun, de se rappeler que la
priorité est le développement. Aussi, la Banque Centrale devra
recentrer ses objectifs vers les besoins de financement de l'économie
réelle. Car, au-delà des objectifs traditionnels de
stabilité des prix, d'équilibre extérieur, de croissance
du PIB et de réduction du chômage, le développement
économique est bien l'objectif ultime de la politique monétaire.
Il est également nécessaire que le système financier
camerounais s'intègre véritablement dans le mouvement actuel de
globalisation financière.
II.3.2- Adapter le système financier à la
mondialisation :
L'une des conséquences de la mondialisation constitue
en n'en point douter la formation des banques de grande taille via des fusions,
absorption, acquisition, alliance stratégique ; afin de
bénéficier des économies d'échelles et de
dimension. En même temps se développe dans les banques le
comportement de firme bancaire, où la banque est
préoccupée non seulement par sa fonction d'intermédiation,
mais encore par la tenue de ses marges et son taux de profitabilité. Il
s'agira donc de favoriser le regroupement des institutions bancaires, afin de
leur donner une taille critique pour le financement des grands projets de
développement. Dans cette optique, des syndications bancaires ou des
fusions seraient souhaitables.
Il faudrait par ailleurs inciter les banques à innover,
à diversifier leurs produits à la lumière de ceux qui
circulent dans les marchés de capitaux internationaux, et à
prendre des risques sur les
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 100 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 101 ~
projets de développement sous réserve de la
création par l'autorité publique, des organismes de garantie du
risque. L'adaptation à la mondialisation suppose aussi que les
politiques monétaires régionales soient mieux coordonnées
par exemple au sein de la BEAC.
Une autre alternative peut être la mise sur pied
effectif d'un marché boursier qui pourra palier au déficit de
financement. Il importe de savoir quelles seront les parts respectives du
financement bancaire et du financement de marché au sein de
l'économie camerounaise. Il s'agit de parvenir à ce que nous
avons appelé une architecture optimale du système financier. La
création d'une bourse des valeurs pourrait néanmoins
élargir le canal du crédit au Cameroun, en diversifiant les
sources de financement des agents.
Ce faisant, il faudrait se rendre compte de ce que les PME et
PMI, qui constituent l'essentiel du tissu économique du pays,
éprouvent très souvent des difficultés à
accéder à une bourse de valeurs pour leur financement externe. Ce
qui n'est pas le cas des grandes entreprises dont la surface financière
est assez large. L'épargne nationale risque encore d'être
drainée vers les firmes multinationales dont les actions seraient
cotées dans la bourse en création dans la sous-région.
Il serait alors judicieux d'intégrer le secteur
informel au circuit formel de financement des entreprises, son rôle dans
la mobilisation de l'épargne étant non négligeable au
Cameroun comme dans la plupart des économies en développement.
Aussi, la promotion de la microfinance doit être à envisager comme
moyen de lutte contre la pauvreté.
La nouvelle politique de crédit à mettre en oeuvre
devrait se faire dans deux directions :
D'une part, dans la restructuration des crédits : un
renversement de la tendance devrait se faire en faveur des crédits de
moyen et long terme ;
D'autre part, dans l'orientation même de ces
crédits : les crédits de campagne et d'import-export qui se
taillent la part du lion devraient voir cette part diminuée au
bénéfice des secteurs moteurs du développement que sont
l'agriculture (à moderniser) et les PME (à redynamiser).
C'est à ce prix que le système financier
pourrait financer véritablement l'économie au Cameroun comme dans
les autres pays de la CEMAC. Il doit également être
envisagé la poursuite de l'assainissement de l'environnement
financier.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 102 ~
II.4- L'ASSAINISSEMENT DE L'ENVIRONNEMENT MACRO-ECONOMIQUE
:
L'assainissement de l'environnement macroéconomique
revient en dernière analyse à purifier non seulement
l'environnement institutionnel, en réglant le problème des
lenteurs judiciaires, du chèque sans provision, du secret bancaire, de
la corruption ; mais aussi l'environnement sociopolitique. C'est ainsi que
l'État doit orienter son action vers l'amélioration du cadre
juridique en rendant plus efficace les recours en justice. D'autre part, la
reconnaissance légale des structures informelles non encore
institutionnalisées pourrait permettre leur développement
harmonieux, avec la mise en place des moyens de réalisations qui
s'imposent avec l'accroissement des asymétries d'information
causées par un accroissement du nombre de membres. Ces mesures devraient
permettre le glissement des réseaux informels en établissements
formels à l'image de la CCEI Bank, structure tontinale
transformée en banque de dépôts.
En outre, les missions de la COBAC, à savoir assurer la
supervision et le contrôle des banques et des établissements de
crédits doivent être renforcées. Aussi, la COBAC devrait
jouir d'un pouvoir coercitif de manière à ne plus se
référer en dernier ressort aux autorités nationales pour
exercer son pouvoir disciplinaire.
Le présent chapitre avait pour objet
d'appréhender les implications analytiques de l'évolution des
circuits de financement. Pour ce faire, il a fallu d'abord donner les
caractéristiques actuelles de l'intermédiation bancaire au
Cameroun, ensuite l'évolution de la micro finance et enfin donner les
implications en terme de recommandations de politique économique. Au
terme de l'analyse, deux aspects sont à relever.
D'une part, les mutations financières ont
entraîné une évolution paradoxale de
l'intermédiation financière au point où, malgré les
restructurations, le système financier est resté très peu
compétitif, et incompatible aux besoins des agents économiques.
Car il n'a pas été très innovant, manque de profondeur
financière et est resté très concentré. Cette
concentration s'est observée aussi bien au niveau de la
répartition des guichets de banques sur le territoire national, qu'au
niveau des crédits et des dépôts. Il a été
établi que les crédits et les dépôts sont
contrôlés par une minorité des banques (moins de la
moitié) de l'ensemble du système bancaire.
D'autre part, l'évolution observée dans la
sphère financière Camerounaise révèle une
émergence de nouvelles institutions financières faisant
concurrence aux banques, les obligeant à
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 103 ~
diversifier les services financiers à la disposition de
la clientèle. Il s'est agit de la microfinance dont, la contribution au
financement des projets de petite taille est indéniable.
II.5- LE NOUVEAU PAYSAGE FINANCIER DU CAMEROUN:
Pour mieux appréhender le nouveau paysage financier, il
est nécessaire de passer en revue la définition des
établissements de crédit, le cadre réglementaire et les
institutions financières. Aussi, un décret présidentiel
signé en 1990 définit les établissements de crédit
comme étant des personnes qui, dans le cadre de leur profession
habituelle, effectuent à titre principal une ou plusieurs
opérations de banque. Les établissements de crédit
comprennent : les banques, les établissements financiers, les caisses
d'épargne postale, les sociétés financières
d'investissements et de participations. Quant au cadre réglementaire, il
vise à sécuriser et à stabiliser le système
financier. Le gouvernement a mis en place une réglementation
particulièrement rigoureuse, en vue de responsabiliser les
établissements et leurs dirigeants. Par ailleurs, le Cameroun compte en
ce moment dix (11) banques commerciales en activité et éligibles
au refinancement de la BEAC ; deux (2) institutions publiques qui effectuent
des opérations de banque ; quatorze (14) établissements
financiers en activité ; une dizaine d'institutions bancaires en
liquidation dans le portefeuille de la Société de Recouvrement
des Créances (SRC).
II.5.1- Les banques au Cameroun :
Le secteur bancaire au Cameroun est placé sous
l'autorité du Ministre des Finances, du Conseil National du
Crédit, de la Banque des États de l'Afrique Centrale (BEAC) et de
la Commission Bancaire de l'Afrique Centrale (COBAC). Cette dernière
institution joue le rôle de contrôle auprès des
établissements bancaires : octroi et retrait des agréments,
contrôle des normes de solvabilité, de liquidité, niveau
d'endettement. A ce jour, les banques camerounaises sont surliquidées.
Mais malgré cela, à cause des risques, les banques restent
réticentes à financer des crédits à long terme. Les
opérations de banque se limitent donc à : la réception de
fonds du public, aux opérations de crédit ainsi qu'à la
mise à la disposition de la clientèle des moyens de paiement ou
leur gestion. Les banques peuvent également effectuer des
opérations comme :
- le change ;
- le placement, la souscription, l'achat, la gestion, la garde
et la vente de valeurs immobilières et de tout produit financier ;
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
- le conseil et l'assistance en matière de gestion du
patrimoine et financière, l'ingénierie financière, tous
les services destinés à faciliter la création et le
développement des entreprises ;
- la banque-assurance: il y a trois types
d'établissements bancaires : les banques de dépôt, les
banques spécialisées et les banques off-shore.
On note une évolution significative au niveau du
service, grâce à l'apparition de nouveaux produits et services
comme :
- les transferts électroniques ; - la monétique
;
- les autorisations de découverts ; - les services
vocaux.
II.5.2- Les compagnies d'assurances :
Les assurances sont régies par le Ministère des
Finances et la Conférence Interafricaine des Marchés d'Assurances
(CIMA). Cette institution joue le même rôle que la COBAC pour les
banques. A ce jour, le marché d'assurance au Cameroun compte vingt-cinq
(25) compagnies dont deux (02) réassureurs. Un marché qui
connaît une évolution régulière avec une croissance
soutenue. En 2004, la masse financière de ce marché a atteint 90
milliards de FCFA. Le marché des « dommages » compte quatorze
(14) sociétés qui ont réalisé dans la même
période des émissions de 75 milliards de FCFA. Les branches
« automobiles, accidents corporels et maladies » sont les plus
importantes, avec 34,3% et 29% des émissions. Les sociétés
« vie », huit (08) au total réalisent 14,7 milliards de FCFA
de primes. Au titre de la réassurance, le résultat brut
était favorable aux réassureurs et s'établissait à
16,7 milliards de FCFA.
II.5.3- Évolution de la capitalisation de la DSX
:
L'activité de la DSX s'est inscrite en hausse sur la
période Janvier-Mai 2012 par rapport à la même
période en 2011. La capitalisation totale est de 327 123 milliards en
Mars 2012 contre 301 287 milliards un an plutôt ; soit une augmentation
de 8,6% en glissement annuel et de 7,67% en glissement trimestriel. Le volume
des transactions au 31 Mars se chiffre à 30 692 868 444 FCFA,
constitué à 95,8% des transactions sur les obligations (ECMR de
l'État du Cameroun) et 4,2% des transactions sur les actions.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 104 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
Diagramme 1 : Évolution de la
capitalisation boursière par titre (milliards de FCFA)
250 200 150 100 50
0
|
|
|
|
|
Evolution de la capitalisation boursière mars-11
Evolution de la capitalisation boursière mars-12
|
Source : MINFI/DGTCFM
Tableau 17 : Évolution du
volume des transactions.
Actions / obligations
|
Janvier-mai
2011 (1)
|
Année 2012 (2)
|
Janvier-mai
2012 (3)
|
Variation en glissement annuel (3)/(1) en %
|
SEMC
|
20 789 923
|
33 998 007
|
583 535
|
-97%
|
SAFACAM
|
20 030 021
|
35 511 403
|
55 867 433
|
179%
|
SOCAPALM
|
324 492 803
|
440 786 633
|
1 221 682 250
|
276%
|
Total action
|
365 312 747
|
510 296 043
|
1 278 133 218
|
250%
|
BDEAC
|
50 550
|
50 550
|
0
|
-100%
|
ECMR
|
4 059 495 235
|
16 174 643 809
|
29 404 427 765
|
624%
|
IFC
|
4 018 904
|
7 002 959
|
10 307 461
|
156%
|
Total obligation
|
4 063 564 689
|
16 181 697 318
|
29 414 735 226
|
624%
|
Total
|
4 428 877 436
|
16 691 993 361
|
30 692 868 444
|
593%
|
Source : MINFI/DGTCFM
Aucune émission obligataire nouvelle par appel public
à l'épargne n'a été lancée au cours du
premier semestre 2012. Le nombre de lignes obligataires inscrites à la
cote de Douala Stock Exchange est resté à 03 (trois). S'agissant
de l'emprunt obligataire de 2010, la part des
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 105 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
institutionnels ou des personnes morales dans l'emprunt de
l'État du Cameroun avait été de 188 763 010 000 FCFA soi
94,38% contre 11 236 990 000 FCFA, soit 5,62% pour les personnes physiques,
d'où le diagramme suivant :
Diagramme 2 : Répartition entre
les institutionnels et les personnes physiques.
200
|
000
|
000
|
|
|
180
|
000
|
000
|
|
|
|
|
|
160
|
000
|
000
|
|
|
|
|
|
140
|
000
|
000
|
|
|
|
|
|
120
|
000
|
000
|
|
|
|
|
|
100
|
000
|
000
|
|
188 763 010
|
|
|
|
80
|
000
|
000
|
|
|
|
|
|
60
|
000
|
000
|
|
|
|
|
|
40
|
000
|
000
|
|
|
|
|
|
20
|
000
|
000
|
|
|
|
|
|
|
|
0
|
|
|
11 236 990
|
|
|
|
Personnes morales Personnes physiques
|
Source : MINFI/DGTCFM
S'agissant des institutionnels, le secteur bancaire s'est
taillé la plus grande part pour un montant de 152 667 910 000FCFA, soit
près de 80,90%, suivi des non bancaires pour un montant de 36 095 100
000 FCFA.
Diagramme 3 : Le secteur bancaire se
taille la plus grande part.
Le secteur bancaire
Le secteur non bancaire

80,90%
19,10%
Source : MINFI/DGTCFM
Quatre PSI se sont distingués, il s'agit d'EDC, CA-SCB,
Afriland et SGBC.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 106 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 107 ~
Diagramme 4 : Répartition par 11
PSI.
4 000 000 3 500 000 3 000 000 2 500 000 2 000 000 1 500 000 1 000
000 500 000
0
|
|
|
Source : MINFI/DGTCFM
Par ailleurs, les activités de la Commission des
marchés financiers ont consisté à la régulation, la
surveillance du marché, les visas et les autorisations. En 2011, la
commission a validé les opérations suivantes :
Tableau 18 : Opérations
validées par la CMF.
Nature d'autorisation Nature d'opération Nombre
de
décisions
|
|
Note d'information Émission d'action
Société Générale réservée aux
|
01
|
salariés SGBC
|
|
Enregistrement de la note d'information
|
Placement privé d'obligations CENAINVEST 01
|
Total des décisions 02
Source : MINFI/DGTCFM
Les perspectives du marché financier camerounais sont
étroitement liées à la mise en oeuvre concrète de
l'ensemble des dispositions déterminantes ci-dessous
évoquées, lesquelles demeurent d'actualité comme
conditions préalables au décalage effectif de notre
marché. Il s'agit notamment de :
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 108 ~
- la concrétisation par l'État de son option de
cession à travers la DSX des actions des entreprises de tous les
secteurs dans lesquelles il détient une participation, surtout celles
à forte rentabilité (Télécom, banques) ;
- le dénouement à travers la bourse des
éventuelles conventions de portage d'actions signées par les
acquéreurs et même l'État lors des privatisations
antérieures ;
- l'incitation des entreprises du secteur privé
à faire coter sur le marché financier local,
particulièrement les filiales des sociétés multinationales
déjà cotées sur d'autres bourses du continent ;
- la refonte de la réglementation du marché
financier camerounais.
Conclusion
Contrairement aux modèles de croissance traditionnels,
les modèles de croissance endogène étudiés dans ce
chapitre nous donnent des arguments pour discuter de l'importance de
l'intermédiation financière et nous expliquent comment les
banques et les autres intermédiaires finance le développement
socio-économique. Les systèmes financiers, quels qu'ils soient,
remplissent la fonction principale de transformation de l'épargne des
ménages en actifs illiquides conformément au modèle de
Diamond et Dybvig.
Ils peuvent accroître le volume de fonds prêtables
de plusieurs manières : en assurant la liquidité des actifs
détenus par les déposants, en réduisant les risques
liés à l'asymétrie de l'information et les risques
idiosyncrasiques.
Ils détiennent ainsi un volume important fonds qu'ils
peuvent mettre à la disposition des investisseurs rigoureux. Un
contrôle régulier des dirigeants et une participation dans les
investissements obligent les intermédiaires à allouer de
façon efficiente les ressources disponibles. Les cas de gaspillage des
ressources sont par conséquent évités et il s'en suit
à long terme un accroissement de la production globale
subséquente à l'augmentation des investissements rentables. Toute
cette dynamique est rendue possible avec l'innovation technologique qui remet
en question l'hypothèse des rendements décroissants qui fonde
toute l'analyse traditionnelle de la croissance.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI

CONCLUSION GENERALE
«La véritable intelligence est la
capacité à savoir tirer le meilleur parti de son
environnement.»
Hervé Ratel
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
En définitive, cette étude avait pour objectif
général d'évaluer la contribution des mutations
financières à la croissance de l'économie camerounaise.
Plus spécifiquement, il s'agissait de savoir si les mutations
financières se sont accompagnées d'une meilleure allocation des
ressources financières dans l'économie. Pour cela, il a fallu
dans un premier temps, analyser les fondements théoriques des origines
des mutations financières. Ces fondements ont trouvé leur
explication en distinguant les origines internationales des origines internes
des mutations financières. Dans un second temps, il a été
évalué les conséquences des mutations financières
sur les circuits de financement.
Les analyses effectuées ont montré que les
mutations financières sont à l'origine des profondes
transformations des systèmes bancaires, des gains d'efficience, mais aux
prix d'une instabilité accrue, comme semble le suggérer la
multiplication des crises bancaires et financières de grande ampleur
observées dans le monde depuis les années 1970, concomitamment au
phénomène de mutations financières.
La vérification dans le cas du Cameroun a conduit
à évaluer dans un premier temps la solidité
financière du système bancaire. Celle-ci s'est
appréciée à travers le respect des normes prudentielles
édictées par la COBAC, les indicateurs de rentabilité et
les autres indices de performance. A cet effet, il a été
calculé les ratios de solvabilité, de liquidité et les
indicateurs de rentabilité. Dans un second temps, il a été
évalué la politique de crédit entre 1972 et 1990
(année qui marque le début des réformes) ; puis celle
élaborée entre 1990 et 2003. A ce niveau, l'évolution des
tendances a été décelée. C'est pourquoi nous
tenterons, d'interpréter les évolutions observées et d'en
dégager quelques implications.
Par ailleurs, notre étude a utilisé les
données relevées depuis 1972, mais s'étendant beaucoup
plus sur la période comprise entre 1990 à 2012. Période
concentrant à notre avis les récents bouleversements
observés sur la sphère financière Camerounaise.
Les résultats de cette étude ont conduit
à un paradoxe. Car les mutations financières ont permis au
système bancaire camerounais de présenter une solidité
financière, et cela à travers le respect des normes
édictées par la COBAC. Le système bancaire est devenu plus
liquide. Cette surliquidité bancaire survenue après la
dévaluation du 12 Janvier 1994 ne s'est pas traduite par une
augmentation de l'offre de crédit, les banques ayant
préféré conserver leurs excédents sous forme de
réserves auprès de la banque centrale. Le système bancaire
ne s'implique donc pas activement dans le financement de l'économie.
Aussi, l'émergence de la microfinance n'a toujours pas permis de
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 110 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 111 ~
palier ce déficit de financement, d'autant plus que,
les crédits accordés par ces institutions sont de montants
limités et pour des durées courtes et donc ne permettent pas une
expansion du secteur productif.
A cet effet, pour que le système financier puisse jouer
activement son rôle dans le financement de l'économie, il faudrait
lui donner une nouvelle organisation marquée par l'achèvement de
la restructuration bancaire et l'assainissement complet de l'environnement
macroéconomique. Ainsi, il faut impérativement créer les
banques de développement spécialisées dans le financement
de l'économie, tout en élargissant le système financier
actuel, afin qu'il couvre désormais un grand nombre de secteurs, en
l'occurrence, l'agriculture, les PME, et des financements longs. Il faudrait
également accorder un poids plus important à la finance de
marché. Aussi, le démarrage effectif de la Douala Stock Exchange
dont les activités continuent de retarder, constitue une voie salutaire
pour palier le déficit de financement auquel l'économie
camerounaise est confrontée. Ces chantiers si ils sont
exécutés permettront au Cameroun de passer progressivement d'un
système d' «économie d'endettement », vers une
«économie de marchés financiers», plus efficace
économiquement mais aussi plus fragile, car plus vulnérable aux
chocs financiers.
Il y a environ 40 ans que Goldsmith a posé les jalons
de l'analyse de la corrélation entre le développement de
l'activité financière et la croissance économique. Il a
été en en effet le premier à démontrer de
façon empirique que le développement financier a un effet positif
sur le développement de l'activité productive. Depuis lors, de
nombreux travaux empiriques et théoriques notamment ceux de
Loayza (2005) et Levine (1997), abondent dans
le même sens. Ils essaient en outre de déterminer les
différents canaux par lesquels le développement financier affecte
- est affecté par - la croissance économique. Le sens de la
causalité de la relation a lui aussi fait l'objet d'une controverse
théorique tranchée par Patrick (1966) qui établit que
cette relation finance-croissance est biunivoque.
Néanmoins, sur le plan empirique, l'estimation de la
relation de cause à effet tend à conforter l'idée selon
laquelle à long terme c'est l'amélioration de la sphère
financière qui impulse celle de la sphère productive à
travers l'accroissement des investissements dans le domaine de la recherche et
du développement (R&D) et des innovations financières.
D'après Levine (1997), cette conclusion sur la
dynamique de long terme finance-croissance a un corollaire très
important. Bien que les paniques bancaires et financières ou même
les crises économiques aient des effets critiques,
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
le lien à long terme finance-croissance survit aux
bouleversements et fluctuations de courte période l'affectant.
Cette conclusion est d'autant plus importante dans notre
analyse que malgré la succession des crises économiques et du
système financier camerounais, celui-ci, depuis la fin de la fin de la
restructuration bancaire de 1997, s'étoffe d'un nouveau type
d'intermédiaires financiers, à savoir les établissements
de microfinance et une gamme variée de produits nouveaux impulsant ainsi
la croissance économique.
L'objet de ce mémoire est d'établir le signe, le
sens et la durée de la relation entre le développement de
l'activité financière et la croissance de l'activité
économique du Cameroun. Il ressort ainsi que le signe de notre relation
était positif. Mais l'étude de la causalité nous a
mené à conclure qu'au Cameroun, c'est plutôt la croissance
économique qui influence la qualité des services financiers et la
structure du système bancaire.
L'analyse du terme de la relation a, quant à elle,
nécessité une démarche méthodologique rigoureuse.
L'utilisation de la méthode d'estimation d'Engel et Granger nous a
permis de faire ressortir d'une part, la relation statistique de long terme qui
détermine le sentier d'expansion entre nos deux
phénomènes, et d'autre part, la relation dynamique de court terme
à travers l'estimation du modèle à correction d'erreurs.
Les conclusions auxquelles nous avons abouti sont les suivantes :
*A long terme, il existe une relation positive entre le taux
de quasi-liquidité de l'économie et la production globale. Et de
la même manière, les crédits alloués au secteur
privé sont corrélés positivement avec le niveau de
l'activité réelle.
*Par contre, la dynamique de court terme n'aboutit aux
mêmes conclusions. L'estimation des différents modèles
à correction d'erreurs établit que seules les variations
passées du PIB ont une incidence sur son taux de croissance. Les chocs
en provenance du système financier affectent très peu la
structure du comportement des agents économiques.
*A l'inverse, l'observation des faits nous amène
à inférer qu'une quelconque variation du revenu des agents
affecte leur comportement d'épargne et d'investissement. En effet, la
baisse des revenus survenus au cours de la décennie 1980 a
été suivie par la baisse des avoirs bancaires. Mais au lendemain
de la dévaluation de janvier 1994 qui a engendré un regain de
l'activité économique dès 1997, les dépôts
bancaires ont connu une nette progression.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 112 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
Il est néanmoins important de souligner que toutes les
conclusions que nous avons pu tirer jusqu'ici ont nécessité la
prise en compte dans les relations de long terme d'autres variables
explicatives pertinentes. Sans elles, les résultats de nos estimations
seraient moins robustes et ne permettraient pas d'en inférer une
quelconque analyse. Les nouvelles variables qui ont été
considérées dans nos modèles sont les parts de
l'épargne, de l'investissement et de la dépense nationale dans la
production globale. Dans ce travail, nous n'avons malheureusement pas
discuté des liens théoriques entre ces variables et les
indicateurs de croissance économique, mais d'un point de vue empirique,
leurs effets sur le niveau de l'activité économique au Cameroun
restent quelque peu ambigus.
A l'issu de tout ce travail analytique, nous avons
suggéré quelques propositions de politiques économiques
susceptibles d'améliorer la relation. Il s'agit en l'occurrence :
y' Sur le plan institutionnel,
· de la mise sur pieds dans les établissements de
crédit d'un véritable département de trésorerie
;
· de la réhabilitation de la cour d justice
communautaire ;
y' Sur le plan réglementaire,
· du renforcement de la crédibilité du
système judiciaire ;
· de la mise en application de loi contre le blanchissement
d'argent ;
y' Sur le plan purement économique,
· de la vulgarisation des moyens de paiement modernes ;
· de la diversification des produits de financement ;
· du fonctionnement effectif du marché financier
;
· de l'intégration dans le secteur formel des
associations tontinières qui sont devenues au fil du temps un
véritable lieu de financement des PME camerounaises ;
Cette dernière proposition pourrait constituer un
approfondissement de ce sujet. Les travaux ultérieurs sur la relation
entre le développement du système financier et la croissance
économique pourraient en effet prendre en compte le secteur informel
dans l'analyse. Aussi, la construction d'un nouvel type d'indicateur de
développement financier s'avère nécessaire.
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 113 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
TABLE DES MATIERES
DEDICACE ii
REMERCIEMENTS iii
LISTE DES ABBREVIATIONS v
LISTE DES TABLEAUX viii
LISTE DES DIAGRAMMES ix
RÉSUMÉ x
ABSTRACT x
SOMMAIRE xi
INTRODUCTION GENERALE 1
PREMIERE PARTIE 11
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE
11
CHAPITRE I : 16
LES FONDEMENTS THEORIQUES ET EMPIRIQUES DES ORIGINES
DES
MUTATIONS FINANCIERES 16
Introduction 16
SECTION I: LA GLOBALISATION FINANCIERE. 17
I.1- LES COMPOSANTES DE LA GLOBALISATION FINANCIERE: 17
I.2-LA REGLE DES « TROIS D »: 19
I.2.1-Le décloisonnement des marchés: 19
I.2.2-La déréglementation: 20
I.2.3-La désintermédiation
(marchéisation): 22
SECTION II: L'ACCELERATION DES INNOVATIONS FINANCIERES. 23
II.1-DEFINITION ET JUSTIFICATION DES INNOVATIONS FINANCIERES:
23
II.2-TYPOLOGIE DES INNOVATIONS FINANCIERES: 25
II.3-LES THEORIES EXPLICATIVES DES INNOVATIONS FINANCIERES:
27
II.3.1-La théorie de la contrainte et de la dialectique
réglementaire: 28
II.3.2-La demande de nouvelles combinaisons de
caractéristique: 31
Conclusion 31
CHAPITRE II : 33
DEGRE DE DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE :
Analyses empiriques
33
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 114 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 115 ~
Introduction 33
SECTION I: LA CRISE DE L'INTERMEDIATION FINANCIERE. 34
I.1- LES EXPLICATIONS THEORIQUES DES CAUSES DE LA CRISE DE
L'INTERMEDIATION FINANCIERE: 35
I.1.1- De la faiblesse des relations structurelles entre la
banque et l'economie: 35
a) La logique de l'implantation bancaire au Cameroun: 35
b) Les asymétries d'information et l'environnement
juridico- institutionnel: 36
I.1.2- LES DISTORSIONS INTRODUITES PAR LA POLITIQUE
GOUVERNEMENTALE: 37
a) La théorie de la répression
financière: 38
b) Le dualisme financier 39
I.2- LES CARACTERISTIQUES DE LA CRISE DE L'INTERMEDIATION
FINANCIERE: 40
I.2.1- La degradation des depots: 40
I.2.2- Le rationnement du credit: 41
I.2.3- Mutation de la carte bancaire: 41
a) Mutation de la structure des établissements
bancaires: 41
b) Modification géographique des guichets bancaires:
42
SECTION II : LES MESURES D'AJUSTEMENT FINANCIER AU CAMEROUN
45
II.1- LES OBJECTIFS DES MESURES D'AJUSTEMENT MISES EN OEUVRE
AU
CAMEROUN 46
II.1.1- L'objectif sectoriel 47
II.1.2- L'objectif global 47
II.2-LES REFORMES FINANCIERES AU CAMEROUN 48
II.2.1- La restructuration bancaire 48
a) Action sur le passif 50
b) Action sur l'actif 51
II.2.2- LE CHANGEMENT DE POLITIQUE MONETAIRE 51
a) Adoption de la programmation monétaire et
suppression du plafond de refinancement des
crédits 52
b) La libéralisation des taux 52
c) La mise en place du marché monétaire 53
II.2.3- LES MESURES JURIDICO-INSTITUTIONNELLES 54
Conclusion 57
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
DEUXIEME PARTIE : 59
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE
59
CHAPITRE III : 61
LA LIBERALISATION ET LA REPRESSION FINANCIERES
61
Introduction 61
SECTION I : EVALUATION DE LA COMPETITIVITE FINANCIERE DU
SYSTEME
BANCAIRE. 62
I.1-REFORMES FINANCIERES ET RESPECT DES NORMES PRUDENTIELLES:
64
I.1.1- Le respect des normes de solvabilité: 64
I.1.1.1-Le ratio de couverture des risques: 64
I.1.1.2- Le ratio de couverture des immobilisations : 65
I.1.2- Appréciation des Banques par rapport au respect
des normes de liquidité : 66
I.1.2.1-Le ratio de liquidité générale :
66
I.1.2.2-Le ratio de transformation à long terme :
67
I.2-REFORMES FINANCIERES ET ANALYSE DE LA RENTABILITE DU
SYSTEME
BANCAIRE CAMEROUNAIS : 68
SECTION II : EVALUATION DE LA POLITIQUE DE CREDIT DE 1972 A
2012 72
II.1- LES MOYENS DE LA POLITIQUE DE CREDIT APPLIQUEE DE 1972 A
1990 : 72
II.1.1- Le cadre institutionnel : 72
II.1.2- Les acteurs : 73
II.1.3- Les instruments de la politique de crédit :
74
a) Les instruments quantitatifs: 74
b) Les instruments qualitatifs: 74
II.2- LES RESULTATS DE LA POLITIQUE DE CREDIT : 74
II.2.1- PRESENTATION DES RESULTATS: 74
a) Évolution des crédits à
l'économie 75
b) Évolution des prix: 76
a) La croissance: 77
II.2.2- LES CARACTÉRISTIQUES DU SYSTÈME
BANCAIRE: 78
II.3- PRESENTATION DES RESULTATS 79
II.3.1- Évolution des prix 79
II.3.2- Évolution des crédits à
l'économie de 1990 à 2003 80
II.3.3- Évolution des taux d'intérêt :
81
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 116 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
Conclusion 82
CHAPITRE IV : 83
INNOVATIONS FINANCIERES ET CROISSANCE ECONOMIQUE DU
CAMEROUN 83
Introduction 83 SECTION I : LES CARACTERISTIQUES ACTUELLES
DEL'INTERMEDIATION
BANCAIRE AU CAMEROUN. 84
I.1- UN SYSTEME BANCAIRE CONCENTRE ET LE PARADOXE DE LA
SURLIQUIDITE
BANCAIRE : 84
I.1.1- Évaluation de la concentration économique:
86
a) La concentration par les parts de marché: 86
a1) La concentration des dépôts bancaires: 87
a2) La concentration des crédits: 88
b) La concentration par le nombre de banques et d'agences: 89
I.1.2- Évaluation de la concentration géographique
: 89
I.2- UN SYSTÈME BANCAIRE INTERNATIONALISÉ: 91
I.2.1- L'implantation bancaire étrangère au
Cameroun: 91
I.2.2- L'implantation des banques camerounaises à
l'étranger: 92
I.3- INSUFFISANCE DE PROFONDEUR ET D'INNOVATIONS
FINANCIÈRES : 93
I.3.1- La faible profondeur financière : 93
I.3.2- Le manque des innovations financières: 94
SECTION II : EMERGENCE DE LA MICROFINANCE 95
II.1- LES FACTEURS DE DEVELOPPEMENT DE LA MICROFINANCE: 96
II.1.1- Les facteurs structurels 96
II.1.2- Les facteurs autonomes 97
II.2- LES INSTITUTIONS DE MICROFINANCE DANS LE PAYSAGE
FINANCIER
CAMEROUNAIS 97
II.3- L'ACHEVEMENT DE LA RESTRUCTURATION DU SYSTEME FINANCIER :
99
II.3.1- La création d'institutions financières
spécialisées : 100
II.3.2- Adapter le système financier à la
mondialisation : 100
II.4- L'ASSAINISSEMENT DE L'ENVIRONNEMENT MACRO-ECONOMIQUE :
102
II.5- LE NOUVEAU PAYSAGE FINANCIER DU CAMEROUN: 103
II.5.1- Les banques au Cameroun : 103
II.5.2- Les compagnies d'assurances : 104
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 117 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 118 ~
II.5.3- Évolution de la capitalisation de la DSX :
104
Conclusion 108
CONCLUSION GENERALE 109
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES : 119
ANNEXES 120
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
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ANNEXES
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 125 ~
Les entreprises installées sur le territoire camerounais
et cotées sur les places boursières étrangères :
SOCIETES
|
NOM DE LA GRANDE COMPAGNIE
|
VILLES
|
BOURSES
|
SCB Cameroun
|
Attijariwafa
|
Casablanca
|
Madex
|
Standard Chartered Bank
|
Standard Chartered
|
Londres
|
FTSE 100
|
AES-SONEL
|
AES Corporation
|
New-York
|
S&P 500
|
ALUCAM
|
Rio Tinto
|
New-York
|
S&P/TSX 60
|
AXA Cameroun
|
AXA
|
Paris
|
Euronext
|
HEVECAM
|
GMG
|
Singapour
|
Shanghai Stock Exchange
|
CAMRAIL
|
Bolloré Africa logistics
|
Paris
|
Euronext
|
Brasseries du Cameroun
|
Brasseries du
Cameroun
|
Paris
|
CAC 40
|
ARIALDE SA
|
|
Abidjan
|
BRVM
|
MTN
|
Airtel
|
Johannesburg
|
FTSE All Share
|
ORANGE
|
ORANGE
|
Paris
|
Euronext
|
SFID
|
|
Milan
|
FTSE Mib/BIT
|
PT
|
|
Abidjan
|
BRVM
|
|