ANNEXE N°6
SOCIÉTÉ
Meurtre de Lodève : la violence au quotidien dans
les instituts thérapeutiques
La jeune Siham, 12 ans, aurait été tuée
et violée par un de ses camarades du centre thérapeutique de
Campestre. Ce dernier a été mis en examen dimanche soir. Dans ces
établissements, la violence est habituelle, mais elle vient ici de
monter d'un cran.
Sous le choc. Les membres de l'équipe encadrante de
l'Institut thérapeutique, éducatif et pédagogique
(ITEP) de Campestre sont habitués à la violence
inhérente à la prise en charge d'adolescents difficiles. Mais pas
à un tel degré. «Nous traversons des moments dramatiques et
douloureux», indique ainsi la présidente de l'Association pour
les personnes en situation de handicap (APSH 34), en charge de la gestion
de l'établissement en question. Les ITEP sont tous administrés
par des associations sous le contrôle des agences régionales de
santé, qui les financent. À Campestre, au coeur d'un parc de 22
hectares, une cinquantaine de jeunes à problèmes sont pris en
charge par autant d'encadrants. Il ne s'agit pas d'un centre pour
délinquants: sont envoyés en ITEP des jeunes
considérés comme handicapés en raison de troubles
psychologiques. Ils sont environ 15.000 en France. Les jeunes y poursuivent
leur scolarité en petits groupes, tout en étant suivis par des
psychologues et encadrés par des éducateurs. Ateliers VTT, tag,
cuisine, arts plastiques... Leur emploi du temps est minuté pour ne pas
les laisser livrés à eux-mêmes. La violence y est toutefois
omniprésente.
Une enquête pour agression sexuelle est déjà
en cours dans un autre ITEP
«Les éducateurs se font insulter quasiment tous
les jours», indique François Delacourt, vice-président de
l'Association nationale des ITEP, qui regroupe les professionnels du secteur.
«Ces jeunes ne savent pas exprimer ce qu'ils ressentent et leurs
réactions sont impressionnantes pour ceux qui ne connaissent pas le
milieu», poursuit le responsable associatif. Avant Sammy, le jeune
soupçonné d'avoir tué et violé Siham, d'autres
jeunes ont commis des agressions dans les ITEP. Un adolescent a ainsi
été condamné en 2009 par le tribunal pour enfants de
Saint-Nazaire pour deux agressions sexuelles commises au sein de l'institut
thérapeutique de Nantes. En 2012, un professeur a été
tabassé par un jeune de l'ITEP de Péronne, en Picardie. La
même année, les membres du personnel de l'ITEP de Langon, en
Gironde, ont dénoncé une dizaine d'agressions en quelques
mois. En janvier, une jeune fille a fugué d'un établissement
de Haute-Vienne, assurant avoir été victime d'agression sexuelle.
Une autre avait pris la fuite quelques mois avant elle, pour les mêmes
raisons. Une enquête a été ouverte par la gendarmerie de
Bellac.
Autant d'agressions sexuelles qui font se poser la question de
la mixité au sein de tels établissements. «Les internats
doivent être séparés, bien sûr. Mais le but des
instituts est d'apprendre aux jeunes à vivre ensemble. Si à la
sortie ils ne sont pas capables d'évoluer dans un monde composé
d'hommes et de femmes, notre mission n'a servi à rien», explique
François Delacourt. Du côté de l'ITEP de Campestre, pas
question pour le moment de supprimer la mixité. «Nous gérons
pour l'instant le traumatisme auprès du personnel et des enfants.
L'après viendra... après», confie un responsable. Une
cellule d'accompagnement psychologique a été mise en place, et le
centre retrouvera sa difficile routine lundi prochain.
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