ECOLE NATIONALE D'ADMINISTRATION ET DE
MAGISTRATURE
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BURKINA FASO
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Unité-Progrès-Justice
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DEPARTEMENT ADMINISTRATION GENERALE
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LA PARTICIPATION ELECTORALE
AU
BURKINA FASO
Mémoire
pour l'obtention du
diplôme d'Administrateur civil
Présenté et soutenu publiquement par:
VOGNA Jean Pierre
Sous la direction de:
Pr Luc Marius IBRIGA, enseignant de droit public
à l?UFR/SJP, Université de Ouagadougou.
Juin 2010
ENAM 03 BP 7024 Ouagadougou 03
E-mail:
enam@cenatrin.bf Téléphone: (226)
50.31.42.64/65 Télécopie: (226) 50 30 66 11
i
Avertissement
L'Ecole Nationale d'Administration et de Magistrature n'entend
donner aucune approbation ou improbation aux idées émises dans le
présent mémoire qui doit être considéré comme
propre à son auteur.
ii
Dédicace
Mes défunts père et grand-père, VOGNA
Yétan Frédéric et VOGNA Nikièbo,
Ma mère, veuve prématurée, SAMPOE Dofinwahi
Catherine,
Mon grand-frère, VOGNA Lamoussa Honoré,
Mon épouse VOGNA/BORO Siè Florence
Je dédie ce travail.
iii
Remerciements
Aux nombreuses personnes dont les conseils, orientations et
concours ont permis la production de ce document, je voudrais ici leur
témoigner ma reconnaissance et leur adresser mes sincères
remerciements.
Je voudrais particulièrement réitérer mes
vifs remerciements à:
- Mon Directeur de mémoire, le Docteur Luc Marius
IBRIGA, Enseignant-chercheur à l'UFR/SJP de l'Université de
Ouagadougou qui, malgré ses multiples charges a bien voulu diriger le
présent travail;
- Le corps professoral de l'ENAM;
- Monsieur Salou SIDIBE, Secrétaire Général
de la CENI;
- Le Professeur Basile L. GUISSOU, Directeur
Général du CNRST;
- Monsieur Julien NATIELSE, au CGD;
- Monsieur Tuansi Bruno LOYA, enseignant vacataire à
l'ENAM;
- Mesdames et messieurs les documentalistes de
bibliothèque de l'Assemblée Nationale, du CGD, de Conseil
Constitutionnel, de la CENI, du GERDDES, de l'ENAM et de l'université de
Ouagadougou pour les faveurs exceptionnelles qui m'ont parfois
été accordées.
- Mes amis BOLY Ibrahim, Dramane, Kader, HAYORO Lamoussa et
OUROU Victor pour leur soutien inconditionnel;
- Tous les compagnons d'étude et singulièrement,
Ahmat Abdallah, BAYILI Jean Marc et TRAORE Ouo Bibata.
iv
LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS
- ADF/RDA, Alliance pour la démocratie et la
fédération/Rassemblement démocratique
africain;
-AMP, Alliance pour la Majorité
Présidentielle;
- AN, Assemblée nationale;
- CDP, Congrès pour la démocratie et le
progrès;
- CENI, Commission électorale nationale
indépendante;
- CES, Conseil économique et social;
- CGD, Centre pour la gouvernance démocratique;
- CNOE, Commission nationale d'organisation des
élections;
- CNPP/PSD, Convention nationale des patriotes progressistes /
parti social démocratie;
- CODMPP, Collectif des organisations démocratiques de
masses et de partis politiques;
- CSC, Conseil supérieur de la communication;
- CSFA, Conseil supérieur des forces armées;
- CSLP, Cadre stratégique de lutte contre la
pauvreté;
- FP, Front populaire;
- GAP, Groupe d'action populaire;
- GMP, Gouvernement militaire provisoire;
- GRN, Gouvernement du renouveau national;
- JOBF, Journal officiel du Burkina Faso;
- JORHV, Journal officiel de la république de Haute
Volta;
- MLN, Mouvement de libération nationale;
- PAI, Parti africain de l'indépendance;
- PNB, Produit national brut;
- PNBG, Politique nationale de bonne gouvernance;
- PRA, Parti pour le regroupement africain;
- OBU, Opposition burkinabè unie;
- ODP/MT, Organisation pour la démocratie populaire /
mouvement du travail;
- UDVB, Union des verts du Burkina;
- UDV/RDA, Union démocratique voltaïque /
Rassemblement démocratique africain;
- UNDD, Union nationale pour la défense de la
démocratie;
- UNI, Union nationale des indépendants;
- UPV, Union progressiste voltaïque;
1
SOMMAIRE
INTRODUCTION 2
TITRE I: ANALYSE DIAGNOSTIQUE DE LA PARTICIPATION
ELECTORALE. 6
Chapitre I: Le niveau de la participation
électorale 6
Section I: Le niveau de participation
électorale dans les scrutins majoritaires 6
Section II: Le niveau de participation
électorale dans les scrutins proportionnels 13
Chapitre II: Les déterminants de la
participation électorale 20
Section I: Les règles favorables à la
mobilisation électorale 20
Section II: Les obstacles à la participation
électorale 25
TITRE II: LA PORTEE DE LA FAIBLE PARTICIPATION
ELECTORALE 32
Chapitre I: Les implications de la faible
participation électorale 32
Section I: Les implications sur le pouvoir politique
32
Section II: Les implications sur l'ancrage de la
gouvernance démocratique 37
Chapitre II: Les conditions d'une bonne
participation électorale. 42
Section I: La création d'un environnement
électoral favorable 40
Section II: L'approfondissent de la culture
démocratique 48
CONCLUSION 54
BIBLIOGRAPHIE 56
TABLE DES MATIERES 58
2
INTRODUCTION
L'Etat moderne en Afrique est un produit importé et
imposé à la suite de la pénétration coloniale. Il
contraste avec les formes traditionnelles d'organisation politique qui
existaient sur le continent. Avec l'indépendance, le Burkina Faso,
à l'instar des autres nouveaux Etats, va assurer la continuité du
système juridique hérité de la colonisation tout en
adoptant de nouvelles politiques juridiques1 au nombre desquelles le
mode électoral. En effet, le peuple burkinabè, jadis
voltaïque, a toujours proclamé son attachement aux principes de la
démocratie et des droits de l'Homme en souscrivant, dans les
préambules des différentes Constitutions qu'il s'est
établies, à la Déclaration universelle des droits de
l'Homme de 1948. C'est ainsi que l'élection fera l'objet de
réappropriation en ce sens qu'elle est le seul moyen légal de
dévolution du pouvoir dans les Etats démocratiques. Mais, la mise
en pratique de ce mode de dévolution du pouvoir sera rapidement soumise
aux aléas de l'instabilité politique avec une succession
récurrente de coups d'Etat militaires.
Cette situation a longtemps caractérisé la Haute
Volta aujourd'hui Burkina Faso2. De son indépendance en 1960
à l'adoption de la Constitution du 02 juin 1991, le Burkina Faso a connu
plusieurs régimes d'exception3.
En effet, le régime de parti unique, de facto, de la
1ère République n'a pas résisté au
soulèvement populaire du 03 janvier 1966, en réaction à la
gabegie et la gestion personnalisée du pouvoir par le Président
Maurice YAMEOGO4.
Les régimes constitutionnels intermittents de la
2ème République (1970-1974) et de la 3ème
République (1977-1980) vont à leur tour connaître chacune
une durée éphémère.
Cette évolution démocratique en dents de scie
n'aura donc pas permis un ancrage suffisant de la pratique électorale
dans les moeurs politiques burkinabè.
Cependant, l'avènement de la 4ème
République en 1991 offre, à nouveau, l'opportunité aux
citoyens burkinabè de rompre avec une décennie de soubresauts
politiques5 pour renouer avec la démocratie.
1 LOADA (A.M.G) et IBRIGA (L.M), Droit
constitutionnel et institutions politiques, Ouagadougou, Presses
Africaines, 2007, p.16
2 Ce changement de nom est intervenu en aout 1984 sous
le régime du CNR.
3 Ce sont au total six 06 régimes d'exception,
notamment le GMP, le MNR, le CMRPN, le CSP, le CNR et le FP.
4 Il s'agit du premier président de la Haute
Volta dont le régime s'est rapidement mué en dictature.
3
La Constitution de la 4ème
République, à l'instar de celles des trois
précédentes Républiques consacrera le suffrage direct et
universel. L'objectif est de conférer au citoyen le droit de participer
aux affaires de la société et de l'Etat. Ce droit de suffrage que
lui reconnaît la constitution6 lui permet de donner son
opinion sur le choix d'un homme (élection) ou d'une décision
(référendum). C'est dans ce sens que Philippe ARDANT affirme que
«le citoyen est la clé de voûte de la
démocratie» et par conséquent, il n'y a «pas
de citoyen sans démocratie, pas de démocratie sans
citoyen»7.
Il en découle que le citoyen est la seule source de
légitimité de tout pouvoir démocratique,
c'est-à-dire que tout pouvoir politique reste fondé sur la
volonté du peuple exprimée à la faveur d'élections
libres, tenues périodiquement au suffrage universel égal et
secret.
C'est ainsi qu'avec le rétablissement de l'ordre
constitutionnel en 1991, le Burkina Faso a organisé dix (10)
élections dont sept (7) nationales8 et trois (3) locales. Ce
qui constitue une avancée significative par rapport aux régimes
constitutionnels précédents qui n'ont connu que trois (3)
consultations électorales9 de types concurrentiels.
Cette régularité des élections constitue
une dimension importante de tout processus démocratique; c'est pourquoi,
elles doivent surtout faire l'objet d'une appropriation sociale. Cette
appropriation doit se traduire par la bonne participation des citoyens aux
différents scrutins électoraux qui se déroulent dans le
pays. Dit autrement, les pouvoirs publics doivent garantir une bonne
participation des citoyens aux élections qui se succèdent.
Force est, cependant, de constater que depuis le
référendum constitutionnel de 1970 à nos jours, les
consultations électorales suscitent peu d'engouement au sein de
l'électorat burkinabè. A ce titre, certains analyses et
commentaires sur le système démocratique burkinabè
semblent indiquer un faible ancrage de la démocratie au regard des
obstacles qui l'entourent. Pourtant, la démocratie ne peut survivre que
si elle est participative. C'est pourquoi, il importe d'éclaircir, avant
tout propos, la notion de participation. En effet, cette notion est difficile
à appréhender parce qu'elle touche à toutes les dimensions
de la
5 De 1980 à 1991, le Burkina Faso a
expérimenté quatre 04 régimes d'exception à savoir
le CMRPN, le CSP, le CNR et le FP.
6 Article-12 de la constitution du 02 juin 1991.
7 ARDANT (Ph.), Institutions politiques et droit
constitutionnel, Paris, LGDJ, 1999, p.151.
8 Il s'agit de trois (3) élections
présidentielles et de quatre (4) élections
législatives.
9 Apres le référendum constitutionnel
du 14 juin 1970, il n'eut que les élections législatives car la
constitution disposait que les fonctions présidentielles sont
exercées par le plus ancien militaire dans le grade le plus
élevé, en l'occurrence le Général LAMIZANA et ce
pour une période de quatre (4) ans. Le référendum
constitutionnel du 27 novembre 1977 fut suivi d'élections
législatives et présidentielles.
4
société : l'économie, la politique, le
social et le culturel. Le plus souvent, elle se réfère au partage
du pouvoir, des revenus, de l'emploi ou de la production. Mais dans le cadre de
la présente étude, c'est la dimension politique qui sera
considérée : il s'agira donc de la participation politique.
Toutefois, cette dimension de la participation reste encore
vaste puisqu'elle renferme deux formes qui sont: la participation non
conventionnelle et la participation conventionnelle qui comprend la
participation électorale (exercice du droit de vote) et la participation
partisane. Il sera, ici, question de la participation électorale dont le
niveau varie d'une votation à l'autre et d'un pays à l'autre et
même, à l'intérieur d'un pays, d'une localité
à une autre.
C'est ce qui a justifié le choix du présent
thème intitulé : «la participation électorale
au Burkina Faso». De façon assez large, elle inclut divers
actes allant de l'inscription sur une liste électorale au vote en
passant par la participation aux campagnes électorales, meetings et
autres réunions politiques. Pour les besoins de cette étude, la
participation électorale sera appréhendée comme l'exercice
du droit de vote reconnu à tout citoyen burkinabè, remplissant
les conditions définies par la loi fondamentale et le code
électoral. C'est aussi et surtout le fait pour un citoyen de se
décider à s'inscrire sur une liste électorale et de jouir
de son droit de vote en toute liberté lors de toute consultation
électorale. La participation électorale s'entend, enfin, comme
l'opportunité offerte à tout Burkinabè, satisfaisant aux
conditions requises par la loi, de se porter librement candidat à un
poste électif.
L'objectif principal de la présente étude est
d'évaluer le niveau de participation des citoyens aux consultations
électorales. Il sera ensuite possible d'en dégager les facteurs
déterminants de la participation. Enfin, l'intérêt se
focalisera sur la portée politique de la faible participation à
travers l'analyse des risques sociopolitiques y relatifs et des conditions
d'une bonne participation.
Au regard de l'objectif ci-dessus, il semble indiqué
d'articuler la problématique de cette recherche autour des questions
suivantes :
Quel est l'état de la participation électorale
au Burkina Faso? Quel sont les risques que pourrait engendrer une faible
participation sur le système politique? Enfin comment parvenir à
une participation électorale satisfaisante du point de vue
démocratique?
5
A cet effet, la première hypothèse consiste
à dire qu'une forte participation des citoyens aux consultations
électorales est consécutive à l'existence d'un consensus
politique et à la mise en oeuvre de règles pragmatiques. La
seconde hypothèse serait qu'une faible participation de
l'électorat résulte, par contre, de facteurs
socio-économiques mais aussi d'une faiblesse caractéristique de
la classe politique. Enfin, une faible participation des citoyens aux
élections comporte des risques de fragilisation du processus
démocratique au Burkina Faso.
La présente étude se rapporte à
l'ensemble des scrutins, exception faite à ceux tenus sous la
1ère République, organisés dans le cadre des
régimes constitutionnels qu'a connus le Burkina Faso.
Le motif de ce choix s'explique par le fait que sous la
1ère République «le système
électoral reposait sur la candidature unique aux élections
présidentielles et, lors des élections législatives, sur
le système de listes nationales de candidats arrêtées par
les instances du parti...»10.
Pour la vérification des hypothèses de travail,
il a été privilégié la recherche documentaire ainsi
que quelques entretiens avec des personnes ressources qui contribueront
à enrichir ce travail. Une telle démarche impose de scruter les
différents processus électoraux qu'a connus le Burkina Faso
depuis le référendum constitutionnel du 14 juin 1970 à nos
jours. Ce qui conduit à organiser la présente étude autour
de deux axes fondamentaux.
Le premier axe consiste en une analyse diagnostique de la
participation électorale (titre I) où il sera question de rendre
compte du niveau de la participation des citoyens aux différents
scrutins organisés au Burkina Faso et d'identifier les facteurs qui
sous-tendent la participation des uns face à la désaffection des
autres.
Le second axe portera sur les conditions relatives à
une bonne participation des citoyens aux élections eu égard aux
implications d'une faible participation (titre II). Il s'agira, à cet
effet, d'examiner les risques sociopolitiques de la faible participation
électorale sur le projet de construction démocratique en cours et
de prospecter les mécanismes à mettre en oeuvre pour garantir une
bonne participation.
10 KIEMDE (P), «Réflexions sur le
référendum constitutionnel et les élections
présidentielle et législatives de 1991 et 1991 », in
Le Burkina entre révolution et démocratie (1983-1993):ordre
politique et changement social en Afrique subsaharienne, Paris, Karthala,
1996, p. 355.
6
TITRE I : ANALYSE DIAGNOSTIQUE DE LA PARTICIPATION
ELECTORALE.
Pour appréhender la participation des citoyens aux
scrutins, il paraît nécessaire d'aborder deux points importants
que sont l'examen du niveau de la participation (chapitre I) et les
déterminants qui concourent à l'explication des différents
niveaux de participation (chapitre II).
Chapitre I : Le niveau de la participation
électorale
L'étude du niveau de la participation des citoyens aux
scrutins électoraux sera organisée, ici, en deux volets.
Il s'agira notamment d'examiner ce niveau de participation
dans les scrutins majoritaires d'une part (section I) et d'autre part dans les
scrutins proportionnels (section II).
Section I : Le niveau de participation électorale
dans les scrutins
majoritaires.
L'analyse de cette rubrique sera ordonnée autour de
deux points. Avant d'examiner le niveau de participation des Burkinabè
au cours des scrutins majoritaires à deux tours (§II), il importe
de se pencher sur leur participation aux scrutins référendaires
(§I).
Paragraphe I : Au cours des scrutins
référendaires
Au Burkina Faso, le processus classique de
démocratisation est toujours intervenu «sous tutelle
militaire»11. Les référendums de 1970 et
1977 (A) furent préparés et organisés respectivement par
le Gouvernement Militaire Provisoire (GMP) et le Gouvernement du Renouveau
National (GRN) et celui de 1991 (B) par le Front Populaire (FP).
A- Les référendums de 1970 et 1977
La période de transition militaire qui a suivi la chute
de la 1ère République le 03 janvier 1966, devait
permettre à l'armée d'organiser le retour à une vie
constitutionnelle normale.
11 MUASE (C.K), Syndicalisme et
démocratie en Afrique noire: l'expérience du Burkina Faso,
Paris, Karthala, 1989, p.126
7
A cet effet, un projet de Constitution fut
élaboré par un Comité Consultatif12
composé uniquement des membres du Conseil Supérieur des Forces
Armées (CSFA).
L'opinion publique nationale prise de court par ce projet de
Constitution l'accueille favorablement, estimant qu'il améliorait le
système précédent13.
C'est ainsi que l'ensemble des acteurs politiques ont
invité leurs militants et sympathisants à voter pour le
«Oui» au référendum du 14 juin 1970, au sortir
duquel la nouvelle Constitution est adoptée à 98,41% des
suffrages exprimés. La participation du corps électoral qui
comptait 2.390.735 électeurs inscrits s'élevait à
75,92%.
Mais le blocage institutionnel né des rivalités
au sein du RDA14 allait finir par emporter la 2ème
République après quatre (4) ans de vie15.
L'avènement de la 3ème
République a été le résultat de la pression des
syndicats sur le Gouvernement du Renouveau National (GRN) qui avait mis fin
à la 2ème République16. En effet, le
GRN contraint d'écourter son règne a entrepris des consultations
avec les différentes composantes de la société afin
d'étudier le contexte politique et proposer un avant-projet de texte
constitutionnel. A ce titre, une commission spéciale de trente deux (32)
membres fut mise en place par décret N°76-133/PRES du 22 avril
1976.
L'avant-projet de Constitution élaboré par cette
commission spéciale est ensuite examiné par une Commission
Constitutionnelle de neuf (09) membres créée par décret
N°77-121/PRES du 14 avril 197717.
Toutefois, il faudra l'ordonnance N°77-38/PRES du 30
septembre 1977, abrogeant l'ordonnance N°74-35/PRES du 30 mai 1974 portant
dissolution des partis politiques en Haute Volta18, pour
libéraliser les activités politiques avec la précision que
les partis politiques devaient se constituer ou se reconstituer
légalement avant le 10 novembre 1977 pour pouvoir participer à la
campagne référendaire19. C'est ainsi qu'à la
date du 10
12 Le Comité Consultatif a été
créé par décret N°66-37/PRES du 8 décembre
1966.
13 MUASE (C.K), op. cit, p.126
14 LOADA (A.M.G) & IBRIGA (L.M), op. cit, p.332
15 Dans sa déclaration du 8 février
1974, le Général LAMIZANA en sa qualité de «Chef
de l'armée et des Forces de l'ordre» suspend les institutions
de la 4ème République et annonce la naissance d'un
Mouvement pour le Renouveau.
16 Les dysfonctionnements de la
2ème République, suite à la menace de blocage
des institutions du fait de la crise éclatée au sein du parti
majoritaire (UDV-RDA), avaient conduit le Président LAMIZANA à
mettre fin à l'expérience du multipartisme pour tenter
l'instauration d'un régime d'exception à parti unique.
17 YAMBA (D.H), Régimes constitutionnels et
Etats d'exception au Burkina Faso, ENAM, 1992, p.39
18 Cf. J.O.H.V N°45 du 10 novembre 1977
(Numéro spécial).
19 Article 1er de l'ordonnance
N°77-39/PRES du 21 octobre 1977, fixant un délai pour la
déclaration des partis politiques et portant dérogations
provisoires à certaines dispositions de la loi N°18AL/59 du 31
août 1959 qui stipule que: «pourront seuls participer à la
propagande en vue du référendum constitutionnel, les partis
politiques qui auront
8
novembre 1977, sept (07) partis politiques étaient
reconstitués et reconnus20. Il appartenait à ces
formations politiques d'expliquer aux électeurs le projet de
Constitution et les institutions qu'elle mettait en place afin que leur
participation au scrutin et leur vote soient conséquents.
A l'issue du scrutin qui est intervenu le 27 novembre 1977, le
projet de Constitution fut adopté à 98,70% des suffrages
exprimés avec une participation des inscrits égale à
71,45%. Pour ce scrutin les régions du Centre-Est, de l'Est et du
Centre-Nord ont respectivement enregistré 78,73%; 76,11% et 73,76% de
taux de participation tandis que la ville de Ouagadougou, les régions
des Hauts-Bassins et du Centre ont respectivement enregistré les plus
faibles taux de participation qui sont de 50,73%; 65,11% et
66,65%21. Il ressort donc que les régions du Centre et des
Hauts-Bassins qui abritent les plus importants centres urbains où
l'activité politique est plus développée enregistrent
paradoxalement les taux de participation les moins élevés.
Cet aperçu sur les référendums
constitutionnels de 1970 et 1977 fait ressortir une participation massive des
inscrits (plus de 70%). Si ces scrutins se sont déroulés dans des
conditions similaires, au regard des animateurs de la vie politique, il n'en a
pas été de même pour le scrutin référendaire
du 02 juin 1991 qui s'est déroulé dans un contexte de
renouvellement quasi-total de la classe politique.
B- Le référendum de 1991
Dans la perspective du référendum de 1991, une
Commission Constitutionnelle22, composée de cent quatre (104)
membres dont soixante quatre (64) relevaient des structures du Front Populaire,
a été mise en place. Ayant débuté ses travaux le 08
mai 1990, les conclusions desdits travaux ont été transmises au
Chef de l'Etat le 15 octobre 1990, avant d'être soumises aux Assises
nationales tenues les 14 et 15 décembre 1990 à Ouagadougou. Les
amendements opérés lors de ces Assises nationales23
ont surtout
souscrit à la déclaration prévue par la
loi N°18AL/59 du 31 août 1959 depuis l'entée en vigueur de
l'ordonnance 77-38/PRES du 30 septembre 1977 avant le 10 novembre.
20 Il s'agit d'une part des partis dits classiques
que sont l'UDV-RDA, le PRA, le MLN devenu UPV et de l'UNI et d'autre part des
partis de création récente que sont l'UNDD, l'IPRA et le GAP
21 Sources: rapport du Ministre de l'Intérieur
sur le déroulement du référendum (Cf. archives
nationales).
22 Cette commission a été
créée par Kiti N° AN VIII-279/FP/CFP/CE du 20 avril 1990.
23 Ces Assises ont regroupé deux mille
(2200) délégués de toutes les couches et les structures
engagées dans le processus de démocratisation
9
consisté à épurer le projet de
Constitution de ses références aux vertus révolutionnaires
et anti-impérialistes24.
Le projet issu de ces Assises sera donc soumis à
ratification populaire le 02 juin 1991. La volonté d'instaurer un Etat
de droit démocratique fut fortement ressentie dans la
quasi-totalité des organisations politiques, syndicales, sociales et
religieuses qui ont manifesté leur intérêt en appelant
à un vote favorable.
Le processus du retour au constitutionnalisme ainsi
précisé, il importe de s'intéresser au niveau de
participation enregistré lors du scrutin référendaire y
relatif.
La constitution du corps électoral a
résulté du recensement administratif qui a débuté
le 06 janvier 1991, soit cinq (5) mois avant la tenue dudit scrutin. Le corps
électoral, à l'issue de ce recensement administratif est
composé de 3.404.451 électeurs inscrits dont 1.656.519 votants
avec un total de 39.609 bulletins nuls. C'est alors 48,65% des inscrits qui ont
exercé leur droit de vote à travers 3.286 bureaux de vote.
Au sortir du scrutin, la Constitution est approuvée par
1.502.397 voix (soit 93% des suffrages exprimés) avec 114.513 voix
contre25. Le faible taux de 48,65% des inscrits l'est davantage
lorsqu'il est rapporté au potentiel électoral approximatif de
4.500.000 citoyens26 en âge de voter.
En rapprochant ces statistiques des précédents
référendums, il se dégage le constat d'un net recul de la
mobilisation à cette votation. Ce qui pourrait s'expliquer par la longue
rupture démocratique caractérisée par la méfiance
consécutive à la forte présence des officiers militaires
sur la scène politique. La campagne pour le référendum
constitutionnel a surtout été dominée par les forces
issues des structures du Font Populaire, avec une timide participation des
partis politiques non membres, contrairement aux précédents
scrutins dont la propagande a toujours été une prérogative
absolue des partis politiques légalement
constitués27.
Mais, si ces votations ont plus ou moins mobilisé
l'électorat, avec toutefois une tendance à la baisse (Voir
tableau ci-dessous, p 10), la mobilisation des citoyens-électeurs
24 KABORE (B.R), op. cit, p.247
25 YE (B.A), Burkina Faso: les fondements de la
4ème République, Ouagadougou, P.U.O, 1995,
p.133
26 Estimation obtenue à partir des
statistiques du RGPH de 1986 dont il ressort que la population burkinabè
comptait 7.964.705 habitants (Cf. Zatu N°AN VIII-/FP/PRES du 10 juin
portant adoption de la politique de population au Burkina Faso, in J.O.B.F.
N°24 du 13 juin 1991).
27 L'article 1er de l'ordonnance
N°70-21/PRES/IS/DI du 13 mai 1970, fixant conditions de déroulement
du référendum constitutionnel stipule que: «Seuls les
partis politiques ayant une existence légale peuvent se livrer à
la propagande pour ou contre l'adoption de la constitution (...)»
(cf. J.O.R.H.V, N°21 du 13 mai 1970).
10
connaîtra-t-elle une hausse dès que l'enjeu
réside dans l'élection d'un citoyen à la tête de
l'Etat? Le prochain paragraphe permettra d'y répondre.
1-Tableau récapitulatif du niveau de participation
électorale aux scrutins référendaires.
Années
|
Nbre d'inscrits
|
Nbre de votants
|
Suff. Exp.
|
Bulletins nuls
|
TP28
|
Bulletins favorables
|
1970
|
2.351.258
|
1.817.341
|
1.782.761
|
22.140
|
77,29%
|
98,41%
|
1977
|
2.759.924
|
1.955.105
|
1.923.923
|
31.182
|
70,83%
|
98,70%
|
199129
|
3.404.451
|
1.656.519
|
1.618.910
|
39.609
|
48,65%
|
93%
|
Sources: -Avis juridiques
de la Cour Suprême de 1970 au 30 mars 1980, Conseil Constitutionnel, mai
2009.
Légende: Nbre=
nombre; suff. exp.= suffrage exprimé; TP= taux de
participation.
Paragraphe II : Au cours des scrutins majoritaires
à deux tours
Les scrutins majoritaires à deux tours ont
été effectifs sous la 3ème et la
4ème république avec au total quatre élections
présidentielles dont les résultats feront successivement l'objet
d'analyse. Si la première n'a enregistré qu'un seul scrutin
présidentiel (A) à deux tours, la seconde a l'expérience
de trois (3) scrutins présidentiels (B).
A- Les élections présidentielles sous la
3ème République
L'élection présidentielle de 1978 s'est
déroulée dans un contexte de proximité électorale.
En effet, le calendrier électoral30 avait été
renfermé dans le délai de trente (30) jours. Ainsi, le premier
tour de la présidentielle aura eu lieu quinze (15) jours seulement
après les élections législatives. Quant au second tour, il
intervînt quatorze (14) jours après le premier.
Au premier tour, le corps électoral est
évalué à 2.889.31231 électeurs inscrits
sur les listes électorales. Mais, le scrutin n'enregistrera que la
participation effective de 1.029.404 électeurs. Le taux de participation
qui est de 35,62% connaîtra toutefois une hausse relativement sensible au
second tour. En effet, en l'absence d'une majorité absolue des suffrages
exprimés, le corps électoral réévalué
à 2.972.526 électeurs inscrits devait départager le
Général LAMIZANA et Monsieur Macaire OUEDRAOGO admis pour le
28 Il s'agit, ici, du rapport entre le nombre
d'inscrits sur les listes électorales et le nombre de votants qui est
à distinguer du niveau de participation.
29 KABORE (B.R), op. cit, p.249.
30 Décret N°78-23/PRES/IS/DGI/DAP du 11
janvier 1978 portant calendrier du déroulement des prochaines
élections législatives et présidentielle 1978 (J.O.R.H.V
N°05 du 02 février 1978).
31 Procès verbal de proclamation des
résultats de la Cour Suprême le 26 mai 1978, in Avis juridiques
de la Cour Suprême, Conseil Constitutionnel.
11
second tour. Il ressort des résultats de cette
élection que la réduction à deux du nombre de concurrents
aurait favorisé une participation plus élevée des citoyens
puisque, non seulement le nombre d'inscrits a augmenté, mais aussi leur
participation à l'expression du suffrage. Ainsi, 1.279.008
électeurs, contre 1.029.404 au premier tour, ont exercé leur
droit de vote donnant, de ce fait, un taux de participation en progression. Il
passe de 35,62% au premier tour à 43,55% au second.
En somme, le faible niveau de participation semble induire une
préférence des citoyens pour des consultations sans joutes.
Toutefois, le seul scrutin ne suffit pas à expliquer cet écart de
participation. Il convient donc de compléter cette analyse avec celle
des scrutins présidentiels organisés sous la
4ème république.
B- Les élections présidentielles sous la
4ème République
A la lecture des résultats des trois consultations
présidentielles organisées sous la 4ème république
(Voir tableau ci-dessous, p 13), il apparaît un niveau de participation
très faible lors de la première.
En effet, ce scrutin a fait l'objet de boycott par
l'opposition qui, par la revendication préalable d'une Conférence
Nationale Souveraine, espérait établir un équilibre de
forces entre elle et le pouvoir dans la compétition électorale,
ou bien plus, de se mettre en meilleure posture.
C'est ainsi que considérant, de facto, que
l'échec de la revendication amenuisait ses chances, elle s'est
retirée de la compétition, laissant le candidat Blaise COMPAORE
seul en lice.
Ainsi, pour un corps électoral évalué
à 3.466.54832 électeurs inscrits, seuls 870.707
citoyens exerceront leur droit de vote. Soit un taux de 25,12% de participation
des inscrits contre 74,88% d'abstention.
Ce niveau de participation a été diversement
interprété. Pour l'opposition, c'est le résultat de son
appel au boycott et conteste la légitimité du président
élu tandis que pour le pouvoir, «la candidature unique a fait
croire aux militants que le vote n'était pas nécessaire puisque,
de toute façon, l'élection de Blaise COMPAORE ne posait a priori
aucun problème»33.
32 Résultats définitifs du
référendum, présentés par YE (B.A), op. cit,
p.156.
33 YE (B.A), idem.
12
Mais, à la différence de ce scrutin, celui de
1998 ne sera pas boycotté par toute l'opposition. Le président
sortant, candidat à sa propre succession aura deux (02)
concurrents34 qui entreront en compétition sous
l'égide de la nouvelle Commission électorale nationale
indépendante (CENI) et les auspices de la nouvelle loi portant code
électoral au Burkina Faso35. Le niveau de participation des
citoyens aura plus que doublé. Le taux d'inscription passe de 77,02% en
1991 à 84,52% en 1998 comme le montre le tableau récapitulatif,
ci-dessous, sur la participation aux scrutins présidentiels.
Toutefois, cette dynamique participative des citoyens à
l'expression du suffrage aux élections ne sera pas observée
à l'élection présidentielle de 2005, et ce, malgré
une participation inédite de l'opposition. Il s'agit de
l'élection présidentielle qui a le plus mobilisé la classe
politique car treize (13) candidatures, y compris celle du président
sortant, ont été enregistrées. Mais le treizième
choisira de ne pas participer.
Le corps électoral composé de 3.924.328
électeurs inscrits36 sur un potentiel d'un peu plus de 6
millions37 régresse de 302.030 électeurs par rapport
au précédent scrutin présidentiel. Ce recul du taux
d'inscription s'explique par l'adoption du principe de la libre inscription par
la loi portant code électoral, alors que l'inscription fut
précédemment systématique.
En définitive, la participation des citoyens à
ce dernier scrutin présidentiel en date est en net recul puisqu'il passe
de 47,39% en 1998 à 37,71% en 2005. A ce faible niveau de participation,
s'ajoute l'augmentation significative du nombre de bulletins nuls qui atteint
le chiffre record de 196 629: ce qui suscite bien des interrogations, dans la
mesure où le bulletin unique avait déjà été
expérimenté lors du scrutin législatif de 2002.
En outre, cette faible participation permet d'établir
un lien de comparaison avec les résultats du premier tour de
l'élection présidentielle de 1978 pour déduire que plus le
nombre de candidats en lice est élevé, moins participent les
électeurs. Autrement dit, les électeurs burkinabè
semblent, au regard des statistiques, plus réticents à exprimer
leur suffrage dans des situations de candidatures assez diversifiées.
C'est pourquoi, il s'avère légitime d'étendre cette
analyse aux résultats de la participation aux scrutins
législatifs, en vue d'en savoir plus.
34 Il s'agit des candidats Ram OUEDRAOGO de l'UDVB et
Frédéric GUIRMA du Front de Refus/RDA.
35 Loi N°21-98/AN du 07 mai 1998 qui consacre
l'indépendance, de la structure en charge de l'organisation et de la
gestion des élections, à savoir la CENI.
36 Cf. décision N°2005-011/CC/EPF du 25
novembre 2005, portant proclamation des résultats définitifs de
l'élection du Président du Faso du 13 novembre 2005.
37 Estimation réalisée sur la base des
résultats du RGPH 1996.
13
2.Tableau récapitulatif du niveau de participation aux
scrutins présidentiels.
Années
|
Potentiel électoral
|
Nbre d'inscrits
|
TI
|
Nbre de
votants
|
Suff. Exp.
|
Bulletins nuls
|
TP
|
TPR38
|
1978 1er
Tour
|
|
2.889.312
|
|
1.029.404
|
1.000.788
|
28.616
|
35,19%
|
|
2nd Tour
|
|
2.972.526
|
|
1.279.008
|
1.255.841
|
23.167
|
43,55%
|
|
1991
|
4.500.000
|
3.466.548
|
77,02%
|
870.707
|
750.473
|
120.234
|
25,28%
|
19,28%
|
1998
|
5.000.000
|
4.210.134
|
84,52%
|
2.361.294
|
2 264 293
|
97.001
|
56,09%
|
47,39%
|
2005
|
6.000.000
|
3.924.328
|
65,40%
|
2.262.899
|
2.066.270
|
196.629
|
57,66%
|
37,71%
|
Sources :-Avis juridiques de la Cour
Suprême de 1970 au 30 mars 1984.
-Décisions de la Cour Suprême et du Conseil
Constitutionnel portant proclamation des résultats définitifs
d'élections présidentielles.
Légende: TI= taux d'inscription;
TPR= taux de participation réelle
Section II : Le niveau de participation
électorale dans les scrutins proportionnels
Il s'agira, dans cette rubrique, d'examiner les
résultats de la participation lors des élections
législatives (§I) et des élections municipales (§II) en
vue d'une analyse comparative avec le niveau de participation au cours des
scrutins majoritaires et référendaires.
Paragraphe I : Au cours des élections
législatives
Le Burkina Faso n'a fait l'expérience d'une
démocratie multipartite que sous la 2ème, la
3ème et la 4ème République. Il conviendrait
donc d'examiner le niveau de participation enregistré au cours des
élections législatives sous la 2ème et la
3ème République d'une part (A) et sous la
4ème République d'autre part (B).
A- Les élections législatives sous la
2ème et la 3ème République
Le retour au multipartisme sous la 2ème
République s'est véritablement matérialisé par la
reprise de l'activité politique avec la tenue des élections
législatives le 20 décembre 1970. Des huit (08) partis politiques
qui ont pris part à la compétition, trois (03) seulement
38 Le taux de participation réelle est
considéré comme le rapport entre le potentiel électoral et
le nombre de votants.
14
avaient une envergure nationale. Il s'agit du RDA, du PRA et
du MLN39. L'examen des résultats tels qu'ils se
présentent dans le tableau ci-dessous (Voir p 16) montre que seuls
1.156.697 électeurs sur 2.395.226 inscrits40 ont
exercé leur droit de vote. Ce qui correspond à un taux de
participation de 48,24% des inscrits. Il se dégage à
première vue un fort désintéressement de
l'électorat par comparaison au scrutin référendaire qui a
précédé. Le rejet des joutes politiques par des
populations encore marquées par les valeurs culturelles telles que le
consensus social ou la prééminence de la séniorité
peut servir d'hypothèse explicative à cette réserve de
l'électorat. Ces élections sans enjeu majeur consacrèrent
la large victoire du RDA qui obtint 37 des 57 sièges à
pourvoir.
Mais, sous la 3ème République, le
niveau de participation décroît de façon significative lors
du scrutin législatif du 30 avril 1978 qui intervint cinq (5) mois
après le référendum constitutionnel du 27 novembre
197741. Ces élections législatives
enregistrèrent la participation de sept (7) formations politiques qui
ont investi au total 312 candidats42 pour 57 sièges de
députés à pourvoir, soit au moins cinq (5) candidats pour
un poste. Cependant, si ces sept (7) formations politiques se distinguaient par
le sigle et l'emblème, leur différenciation doctrinale et
idéologique s'avérait difficile, sinon impossible, à
l'exception près de l'UPV qui prônait le
Socialisme43.
Toutefois, ces élections, à la différence
des législatives précédentes, revêtaient un enjeu
particulier dans la mesure où il ne s'agissait pas d'une simple
compétition mais surtout d'élection-concours qui devait consacrer
les trois (3) partis autorisés par la Constitution44.
Malgré cet enjeu, les électeurs ont boudé
le scrutin puisque sur un total de 2.926.023 électeurs inscrits,
1.162.314 votants, soit 37,37% des inscrits, ont été
recensés. En rapprochant ce taux de 37,37% de celui de 48,24%
enregistré au scrutin du 20 décembre 1970, il apparaît un
recul de plus de 10% du taux de participation des inscrits sur les listes
électorales. Cette désaffection de la participation des citoyens
aux élections semble s'expliquer par la forte crédibilité
des organisations de la société civile, en l'occurrence les
mouvements syndicaux dont le succès a contribué à
discréditer la classe politique
39 MUASE (C.K), op.cit, p.129
40 Voir Procès Verbal du 22 juin 1970
relatif à la proclamation des résultats définitifs par la
Cour Suprême, in Avis juridiques de la Cour Suprême de 1970 au
30 mars 1984, Conseil Constitutionnel, mai 2009.
41 L'article 113 de la Constitution de la
3ème république disposait que: «les élections
tant législatives que présidentielles ont lieu les six (06) mois
qui suivent l'adoption de la présente Constitution».
42 KABORE Bila Roger, op. cit, p.113
43 Idem, p.81
44 L'article 112 de la Constitution de la
3ème république disposait que: «la limitation
des partis politiques à trois au maximum interviendra après les
prochaines élections législatives. Ces trois partis seront ceux
qui, individuellement, auront obtenu le plus grand nombre de suffrages
exprimés»
15
préoccupée par une course effrénée
au pouvoir. C'est en cela que peut bien être saisi le sens de l'appel des
syndicats à l'endroit des forces laborieuses de se démarquer de
tous les hommes politiques sans distinction aucune; car tous ont fait la preuve
de leur incapacité à apporter des solutions aux problèmes
du peuple45.
Du reste pour une vue d'ensemble sur la participation aux
élections législatives, il convient d'accorder une attention
à celles qui se sont tenues sous la 4ème
république.
B- Les élections législatives sous la
4ème République
Toute réflexion sur le niveau de participation des
Burkinabè aux élections législatives impose de porter un
regard attentif sur celles tenues sous la 4ème
république. A la différence de la 2ème et
3ème république, la 4ème
république a l'expérience d'une démocratie
représentative qui a réussi à s'inscrire dans la
durée, avec un renouvellement régulier du mandat des
représentants du peuple à l'hémicycle.
L'analyse des statistiques à l'affiche (Voir tableau
ci-dessous, p 17 et annexe 1) montre que la participation des populations reste
relativement peu élevée. Si le taux d'inscription des populations
est toujours au dessus de la moyenne de 50%, il reste que la participation des
inscrits se révèle assez faible pour le scrutin législatif
de 1992 qui a enregistré un taux de 35,24%; après une
élection présidentielle boycottée et contestée. Au
deuxième scrutin, le taux d'inscription apparaît très
élevé (99,70%)46, avec un niveau de participation
réel de 44,40%. En effet, le nombre d'inscrits passe de 3.564.510
électeurs sur un potentiel électoral de 4.500.000 citoyens en
âge de voter en 1992 à 4.985.352 électeurs, sur un
potentiel électoral de 5.000.000 de citoyens-électeurs. Cet
intérêt de l'électorat pourrait s'expliquer par la
stabilité politique que semblent porter les institutions de la
4ème république, après une décennie de turbulence
politique.
Toutefois, cet élan participatif semble avoir
été brisé par la crise sociopolitique consécutive
à l'assassinat du journaliste Norbert ZONGO, au regard du faible niveau
d'inscription sur les listes électorales (53,03%) dans la perspective
des élections législatives de 2002. Et ce malgré les
réformes politiques47 consenties par le pouvoir en
45 MUASE (C.K), op. cit, p.145
46 L'établissement des listes
électorales relevait encore des attributions du Ministère de
l'Administration Territoriale. A ce titre le rapport de synthèse de
l'organisation des élections législatives du 11 mai 1997 fait
mention du retard dans la transmission de la situation des électeurs
inscrits. Cette situation transmise à quatre reprises diffère de
l'une à l'autre; tantôt élevée tantôt moins
élevée que les chiffres préalablement communiqué
(Cf. p.73). Ce qui montre un manque de transparence et de
sincérité dans l'établissement des listes
électorales par ledit Ministère.
47 Au nombre de ces réformes figurent
l'adoption du mode de scrutin proportionnel avec répartition
complémentaire des sièges au plus fort reste et l'adoption de la
région comme circonscription électorale au lieu de la province.
Ce qui a
16
place en vue d'une ouverture démocratique. Ainsi, le
niveau de participation enregistré à ce scrutin est de 32,19%,
malgré la diversité et la pluralité des partis et
formations politiques qui y ont pris part.
Cette tendance à la baisse se confirme davantage aux
élections législatives du 06 mai 2007, quatrièmes du
genre. En effet, à ce scrutin, si le taux d'inscription a connu une
hausse significative par rapport au scrutin précédent, la
participation des inscrits au vote accusera un recul en passant de 60,69% en
2002 à 56,73%, alors que ce sont quarante sept (47) partis et formations
politiques qui ont pris part à la compétition. Ce qui permettra
d'en déduire que la participation des citoyens à l'expression du
suffrage n'augmente pas en fonction de l'importance du nombre de partis
politiques en compétition. Un nombre peu élevé de partis
politiques à un scrutin semble, si l'on s'en tient à celui du 11
mai 199748, plus incitatif par rapport à une pléthore
de partis qui est perçue comme un élément
démobilisateur.
Par ailleurs, la constance du nombre élevé de
bulletins nuls comporte un sens politique qu'il convient d'apprécier au
delà de la simple question de maîtrise de la technique du vote.
Au stade actuel de la réflexion, il apparaît que
l'électorat participe plus aux élections présidentielles
qu'aux élections législatives. Aussi convient-il, à
présent, d'envisager la comparaison avec les élections locales
qui ont pour finalité la démocratisation du pouvoir de
décisions.
3-Tableau récapitulatif du niveau de participation
électorale aux scrutins législatifs.
Années
|
Potentiel électoral
|
Nbre d'inscrits
|
TI
|
Nbre de
votants
|
Suff. Exp.
|
Bulletins nuls
|
TP
|
TPR
|
1970
|
|
2.398.688
|
|
1.157.039
|
1.112.883
|
43.814
|
48,24%
|
|
1978
|
|
2.927.416
|
|
1.121.799
|
1.070.304
|
51.495
|
38,32%
|
|
1992
|
4.500.000
|
3.564.510
|
79,21%
|
1.256.381
|
1.215.419
|
40.962
|
35,24%
|
27,91%
|
1997
|
5.000.000
|
4.985.352
|
99,70%
|
2.220.161
|
2.045.350
|
174.811
|
44,53%
|
44,40%
|
2002
|
5.490.800
|
2.935.285
|
53,03%
|
2.223.838
|
1.743.964
|
154.581
|
60,69%
|
32,19%
|
2007
|
6.539.000
|
4.296.982
|
65,71%
|
2.437.544
|
2.259.263
|
178.279
|
56,73%
|
37,27%
|
d'ailleurs permis à l'opposition de faire une
entrée considérable à l'hémicycle avec 54
sièges contre 57 pour le CDP qui détenait sous la
précédente législature 101 sièges sur 111.
48 Ce scrutin a été
précédé par trois mouvements de regroupement autour de
l'ADF, du CDP et du PDP qui est la principale composante de l'opposition. Ces
regroupements ont eu pour conséquence un nombre peu élevé
de candidats (569 contre 957 en 1992) aux élections législatives
du 11 mai 1997 (Cf. Politique africaine N°69, 1998, p.64).
17
Paragraphe II : Au cours des élections
municipales
Considérées comme l'étape de
l'approfondissement de la démocratie à la base, les
élections municipales traduisent la mise en oeuvre du titre XI de la
Constitution49 du 02 juin 1991. Cette mise en oeuvre de la
démocratie locale a concerné d'abord les Communes dites de plein
exercice (A) avant de s'étendre sur l'intégralité du
territoire national en 2006 (B).
A- Les élections municipales de 1995 et 2000
Les élections municipales renforcent la mise en place
des institutions démocratiques prévues par la loi fondamentale
burkinabè. C'est dans cet esprit que furent organisées des
élections municipales dans trente trois (33) Communes de Plein Exercice
le 12 février 1995 avec la participation de dix huit (18) partis
politiques. Au-delà de l'importance du nombre de candidatures (5.658
candidats)50 à ces premières élections du
genre, il importe de se pencher sur la mobilisation de l'électorat qui
comptait 585.000 électeurs inscrits sur un potentiel de 750.000 citoyens
en âge de voter. Les statistiques (Voir tableau ci-dessous, p 19)
montrent que ce sont 362.876 électeurs qui ont exercé leur droit
de vote. Ce qui donne une participation effective de 48,38%. Ce niveau de
participation apparaît plus élevé qu'aux élections
législatives et présidentielles. Mais, il convient de signaler
que cette votation n'a concerné que 16,5%51 du territoire
nationale, d'où la nécessité de relativiser cette
comparaison.
La dynamique de participation à l'élection des
représentants locaux amorcée avec 18%52 de la
population nationale connaîtra toutefois une régression aux
élections suivantes qui ont eu lieu le 23 septembre 2000. Ainsi,
malgré l'augmentation du nombre de Communes concernées par ce
scrutin, le corps électoral passe de 585.000 électeurs inscrits
en 1995 à 546.614 citoyens inscrits sur un potentiel de 1.139.959
électeurs53. En effet, ces élections boycottées
par une bonne partie de l'opposition burkinabè, en raison de ses doutes
sur l'indépendance de la CENI, se sont aussi déroulées en
saison hivernale. Ce qui aurait pu contribuer à expliquer le niveau de
participation réel qui est de 31,65%. A cela, s'ajoute également
le climat de crise générale née des
événements malheureux de
49 Ce titre est relatif aux collectivités
territoriales et est composé des articles 143, 144 et 145.
50 KABORE (B.R), op.cit, p.272.
51 MFPRE, Politique Nationale de Bonne
Gouvernance, Ouagadougou, 2005, p.31.
52 Idem.
53 CNOE, Rapport final sur les élections
municipales du 23 septembre 2000, Ouagadougou, 2000, p
18
Sapouy, dont les centres urbains en ont été les
lieux de la manifestation. Néanmoins, ces élections seront
disputées par vingt cinq (25) partis politiques.
Pour compléter cette vue sur la participation aux
élections locales, il conviendrait, à présent, d'examiner
les résultats de celles qui ont revêtu une dimension nationale,
notamment en 2006, parce qu'elles auront concerné tout le territoire
national et par conséquent toute la population du Burkina Faso.
B- Les élections municipales de 2006
Troisièmes du genre sous la présente
république, ces élections municipales se sont
déroulées le 23 avril 2006 dans un contexte tout autre. C'est un
scrutin à la fois local et national qui a connu l'entrée en
compétition de plus de 60.000 candidats issus de 73 partis et formations
politiques pour se disputer les 17.786 sièges de conseillers municipaux
à pourvoir54.
Cette participation très intéressée de la
classe politique n'aura pas suscité l'engouement des
citoyens-électeurs pour les consultations électorales
annoncées.
En effet, dans la perspective de ce scrutin, la CENI avait pu
obtenir à l'issue de la révision des listes électorales
seulement 3.807.424 électeurs pour environ 6.516.000 citoyens en
âge de voter. Le niveau d'inscription qui est de 58,43% est en recul par
rapport à celui obtenu à la veille du scrutin présidentiel
de 2005 qui fut de 65,40%. Ces élections semblaient sans enjeu.
Ainsi, l'hypothèse selon laquelle des élections
locales qui se tiennent à une échéance relativement
brève après un scrutin national, mobiliseraient peu
l'électorat, semble tenir lieu d'élément explicatif. Le
taux d'inscription qui est de 58,43% se révèle sans conteste
moins élevé qu'à l'élection présidentielle
qui a eu lieu six (06) mois auparavant. Certes, ce taux apparaît plus
élevé que celui enregistré à l'occasion du scrutin
municipal de 2000 et le scrutin législatif de 2002, mais la
participation au vote présente un taux beaucoup plus faible, soit
28,69%.
En définitive, à l'analyse des statistiques sur
la participation des Burkinabè aux consultations électorales, il
apparaît que le niveau est tendanciellement à la baisse. Cette
tendance à la baisse est plus remarquable aux élections locales
(Voir tableau ci-dessous)
54 GUISSOU (L.B), op. cit, p.7
19
par rapport aux élections législatives et
présidentielles. Toutefois, ces dernières mobilisent davantage
les électeurs que les législatives.
Au vu de cette désaffection continue du niveau de
participation des citoyens aux consultations électorales censées
constituer la substance même de la démocratie, le souci majeur
serait de s'interroger sur les déterminants de la participation
électorale.
4-Tableau récapitulatif de la participation aux
élections communales.
Années
|
Potentiel électoral
|
Nbre d'inscrits
|
TI
|
Nbre de
votants
|
Suff. Exp.
|
Bulletins nuls
|
TP
|
TPR
|
1995
|
750.000
|
585.000
|
69,50%
|
362.876
|
349.998
|
12.878
|
69,61%
|
48,38%
|
2000
|
1.139.959
|
546.614
|
47,95%
|
368.517
|
360.889
|
7.628
|
66,02%
|
31,65%
|
2006
|
6.516.000
|
3.807.424
|
58,48%
|
1.870.017
|
1.755.083
|
114.934
|
49,12%
|
28,69%
|
20
Chapitre II : Les déterminants de la
participation électorale
L'étude des déterminants de la participation
électorale exige d'avoir à l'esprit deux types essentiels de
facteurs qui caractérisent la participation des citoyens aux
différents scrutins ci-dessus examinés. Il s'agira alors de
s'intéresser d'abord aux règles favorables à la
mobilisation électorale (section I) avant de se pencher sur les
obstacles à la participation (section II).
Section I : Les règles favorables à la
mobilisation électorale
Les principales règles qui concourent à la
mobilisation des acteurs politiques ainsi que des citoyens-électeurs
sont le cadre normatif (§I) qui définit les règles du jeu
d'une part et d'autre part le recours à des règles pragmatiques
(§II) qui se situent en dehors de la norme.
Paragraphe I: L'existence d'un cadre normatif et
institutionnel favorable
Le cadre normatif offre aux protagonistes de la scène
politique et aux électeurs les opportunités de participation.
Ainsi, pour mieux garantir le principe de la liberté de participation
qui est un préalable (A), ce cadre normatif doit aussi faire l'objet
d'un consensus (B).
A- Le principe de la liberté de participation
La liberté électorale est une
caractéristique fondamentale en démocratie. Au Burkina Faso,
l'article 12 de la Constitution en disposant que : «Tous les
Burkinabè sans distinction aucune, ont droit à participer
à la gestion des affaires de l'Etat et de la
société», ne fait nullement de la participation
politique, encore moins électorale, une obligation. C'est plutôt
un droit que chaque citoyen est libre d'exercer ou de ne pas exercer. Il
s'ensuit que le droit de vote apparaît comme un «pouvoir reconnu
aux citoyens de participer, par leur suffrage, c'est-à-dire par leur
voix, à la formation le plus souvent d'une décision politique
relative, soit à un représentant, par son élection ou sa
révocation, soit à un texte ou au principe d'adoption d'un texte,
par référendum (...)»55.
En outre, ce principe de la libre participation aux
élections semble davantage se préciser dans l'article 42 de la
loi N°014-2001/AN du 3 juillet 2001 portant code électoral qui
55COHENDET (A.M), Droit constitutionnel,
Paris, Monchrestien, 2ème éd, 2002, p.137,
citée par LOADA & IBRIGA, op. cit, p.222.
21
détermine les conditions pour être
électeur. Cet article ne fait aucune obligation au citoyen de s'inscrire
sur une liste électorale alors même qu'il s'agit d'une
formalité substantielle, obligatoire pour avoir la qualité
d'électeur. L'inscription traduit en réalité la
manifestation de volonté de la part du citoyen désireux
d'acquérir et d'exercer le droit de vote que lui confère la
Constitution. Pour ce faire, il lui appartient de déclarer vouloir
exercer son droit d'électeur.
L'exercice du droit de vote n'est assujetti à aucune
obligation. Les citoyens étant libres d'exercer leur droit ou non, le
vote est facultatif comme l'observe Philippe ARDANT56. Ce qui
signifie que le citoyen peut choisir d'exercer ou non son droit
d'électeur. S'il choisit de s'inscrire sur une liste électorale,
il n'est pas obligé de retirer sa carte d'électeur, s'il
procède au retrait de sa carte d'électeur, il n'est pas
obligé d'aller voter. Cette disposition très libérale de
la Constitution semble toutefois faire l'objet d'une interprétation plus
abusive. Ainsi, au lieu d'être un élément
véritablement incitatif de la participation, la majorité des
citoyens optent pour la liberté de ne pas participer comme le montrent
les différents taux de participation. Mais, comme la liberté de
participation des électeurs demeure une condition sine qua non
pour qu'une élection soit démocratique, elle constitue le
préalable à toute participation, même consensuelle.
B- Le consensus politico-institutionnel
Sous la 4ème république, le Burkina
Faso a changé de code électoral57 plus de sept (7)
fois. Cette instabilité de la loi électorale ne traduit pas
toujours la recherche d'un consensus électoral dans la définition
des règles du jeu politique. Alors que c'est le consensus qui permet
d'aboutir à une émergence de différentes
sensibilités politiques au sein des instances de
représentation.
En effet, sans être le seul élément
clé dans la participation des citoyens aux consultations
électorales, l'existence du consensus s'avère nécessaire,
surtout pour la classe politique en vue d'une compétition pluraliste,
plus équitable et crédible. Ainsi, les circonstances de consensus
politique et/ou institutionnel dans lesquelles se sont tenus les scrutins
référendaires du 14 juin 1970 et du 27 novembre 1977 ainsi que le
scrutin législatif du 05
56 ARDANT (Ph.), op. cit, p.169.
57 En effet, la loi N°014-2001/AN du 3 juillet
2001 portant code électoral au Burkina Faso a fait l'objet de plusieurs
révisions dont les motifs ont souvent été plus partisans
au lieu de traduire la recherche d'un consensus durable.
22
mai 200258 ont favorisé une participation
assez importante des inscrits. Le pourcentage moyen des votants à ces
élections atteint à peu près de 70% des inscrits.
En outre, l'existence d'un consensus est un
élément déterminant dans la participation de la classe
politique. C'est son défaut sur les règles du jeu
électoral et la question de l'indépendance de la structure en
charge de l'organisation des élections, notamment la Commission
nationale d'organisation des élections (CNOE)59 qui a
expliqué le boycott de l'élection présidentielle de 1998
par l'opposition.
Mais, à la faveur de la mise en place d'une commission
des réformes politiques et institutionnelles, recommandée par le
Collège des Sages, un consensus se manifeste à travers l'adoption
de textes sur les missions de la CENI, le financement des activités des
partis politiques et des campagnes, le statut de l'opposition, la charte des
partis politiques et la création du Conseil supérieur de
l'information (CSI), actuel Conseil supérieur de la communication
(CSC).
Ce consensus a favorisé une participation assez
significative, surtout de la classe politique, à partir des
élections législatives de 2002. A l'issue de ce scrutin,
l'opposition obtient 54 sièges de députés à
l'hémicycle contre 57 pour le parti au pouvoir (CDP).
Cependant, si les acteurs politiques, l'opposition en
particulier, réclament l'établissement d'un consensus favorable
à la mobilisation de l'électorat, il importe de remarquer avec
pertinence qu'ils recourent également et surtout à des
règles non conventionnelles dans leurs tactiques de conquête des
suffrages.
Paragraphe II: Le recours aux règles non
conventionnelles
Le dynamisme de la participation d'une partie non
négligeable des électeurs aux consultations électorales
n'est pas le seul fait du cadre normatif ou du consensus institutionnel. La
satisfaction à accomplir son devoir de citoyen et/ou
l'intérêt pour la politique (A) et la mise en branle de
réseaux de solidarité (B) expliquent le déplacement aux
urnes.
58 Il convient en effet de relativiser le taux de
participation (60,69%) obtenu aux élections législatives du 05
mai 2002 au regard du faible taux d'inscription.
59 La CNOE, dans sa première version, a
été créée par Ordonnance N°91-63/PRES du 23
octobre 1991 avec pour mission l'organisation et la supervision de
opérations électorales et comptait 140 membres. Par la suite, la
loi N°010-97/ADP du 12 février 1997 portant création de la
CNOE, composée de 18 membres. En 1998, la CENI, première formule
est créée par la loi N°021-98/AN du 7 mai 1998 et est
composée de 27 membres. Enfin, en 2001, sur recommandations du
Collège des Sages créé par décret
N°99-158/PRES du 1er juin 1999 à la suite de la crise
consécutive à l'assassinat du journaliste Norbert ZONGO, un
nouveau code électoral instituant une CENI à composition
tripartite (majorité-société civile-opposition).
23
A- L'intérêt pour la politique
L'observation des niveaux de participation aux
élections tenues depuis le référendum d'adoption de la
2ème République, permet de déduire de
l'intérêt d'une certaine partie des citoyens pour le jeu
politique. Deux indicateurs majeurs peuvent être utilisés pour
mesurer cet intérêt pour le processus électoral ou plus
généralement pour la démocratie.
Le premier est celui de l'inscription sur les listes
électorales. Un examen du niveau d'inscription dans la perspective de
chacune des quatre (4) dernières élections permet de constater
que ce taux fut de 53,03% en 2002 ; 65,40% en 2005 ; 58,48% en 2006 et 65,71%
en 2007, soit en moyenne un taux de 60,76%. Ce qui justifie d'un certain
intérêt régulier de citoyens pour l'expression du
suffrage.
Le second indicateur est le taux d'abstention. Bien que
parfois supérieur au taux de participation effective (élections
présidentielles de 1978 et 1991, législatives de 1970, 1978, 1992
et 1997 et municipales de 2006), il correspond au nombre d'inscrits sur les
listes électorales qui ne sont pas allés voter, rapporté
au total des inscrits.
Ainsi, l'étude des différents scrutins fait
apparaître la mobilisation régulière d'une partie
importante d'électeurs qui accomplissent leur devoir électoral,
comme le témoignent les différents taux de participation aux
scrutins référendaires de 1970, 1977 et 1991 avec respectivement
75,92%, 71,42% et 48,78% des inscrits. Aux scrutins législatifs de 1997
et 2007 la participation réelle fut respectivement de 44,40% et 37,27%
tandis qu'à l'élection présidentielle de 1998 elle a
atteint 47,39%.
Il ressort de cette approche que l'engagement politique et/ou
la satisfaction qu'un électeur peut tirer de l'accomplissement du vote
constituent des facteurs explicatifs de la participation aux votations. En
fonction des considérations sociales, politiques mais aussi
économiques qui le conditionnent, varie la propension du citoyen
à participer aux élections. C'est pour cette raison que le niveau
de participation diffère de façon significative d'une votation
à une autre.
A cet engagement politique, s'ajoute le facteur moral qui peut
déterminer la participation du citoyen, en âge de voter, à
la désignation des mandataires de la Nation et/ou de sa
collectivité. La satisfaction procurée par la participation peut,
en effet, constituer un motif de participation pour certains électeurs
tel que le souligne une publication du Centre pour
24
la gouvernance démocratique (CGD)60. Par
ailleurs, les fortes attentes qui animent l'électeur dans le contexte
électoral africain contribuent aussi au déploiement de
réseaux clientélistes et de solidarité en vue de le
déterminer à exercer son droit de vote.
B- La mobilisation des réseaux communautaires et
clientélistes
Le fort degré d'attachement d'une grande
majorité des Burkinabè aux valeurs traditionnelles favorisent le
recours à des tactiques de mobilisation des électeurs conduisant
ainsi à s'écarter des normes démocratiques.
En effet les élections sous leur forme actuelle
procèdent d'une légitimation de la domination politique de
l'élite dirigeante. Elle s'appuie sur les chefs traditionnels et/ou
coutumiers ainsi que les responsables administratifs villageois, au regard de
leur statut dominant pour mobiliser le plus grand nombre de citoyens qui sont
considérés avant tout comme des sujets ou des subordonnés.
De par leur position privilégiée, les chefs traditionnels et/ou
coutumiers constituent des acteurs incontournables dans le processus
électoral. D'où la nécessité pour les candidats et
partis politiques de rechercher leur soutien en périodes
électorales. En outre, la chefferie traditionnelle qui
bénéficie de sa «position consensuelle» est en
mesure de réussir une grande mobilisation surtout lorsqu'elle exerce un
rôle partisan.
Ainsi, dans les sociétés à pouvoir
centralisé où le chef a une influence socioculturelle
considérable, les injonctions à l'inscription et au vote
répondent aux exigences d'un devoir ancestral; le chef devant guider ses
sujets, d'une part et d'autre part «aux exigences de
solidarités identitaires»61. A ce sujet, les
procès verbaux de proclamation des résultats de la Cour
Suprême mentionnent la présence de personnes influentes, notamment
les chefs coutumiers, certains opérateurs économiques ou les
responsables administratifs villageois, dans les bureaux de vote ou
l'implantation de ceux-ci dans des domiciles.
Aussi, le recours à la chefferie traditionnelle par les
partis politiques a souvent abouti à son entrée en politique avec
une représentation à l'hémicycle. Sous la
2ème république certains partis ont même
été représentés, lors des élections
législatives, par des chefs coutumiers62. Il en est
également ainsi sous la 4ème république
où l'actuel Parlement
60 CGD Info, N°0005-2009, p.3
61 BRAUD (Ph), op.cit, p.382
62 Les chefs de Manga: François BOUDA et Fada:
Yantangou THIOMBIANO pour le RDA et celui de Téma: Christophe OUEDRAOGO
pour l'UNI.
25
compte trois chefs traditionnels63 contre quatre
(4) et une vingtaine respectivement sous la 1ère et la
2ème législature64.
Cette politique de cooptation des chefs coutumiers se trouve
renforcée par le clientélisme défini par GIRAN
(J.P)65 comme la participation à un rituel qui constitue aux
yeux des électeurs, la preuve que celui qui sollicite leurs voix
s'intéresse à eux, qu'il est proche d'eux. C'est dans ce
même ordre d'idée que le Pr Laurent BADO explique que
l'électeur africain participe à une votation «lorsque le
leader charismatique de son groupe social le lui
recommande»66. Cet aspect peut être illustré
par la vassalisation de l'électorat qui s'opère à travers
l'utilisation du critère régionaliste dans le choix des
têtes de listes ou des commissaires politiques régionaux. En
effet, l'essentiel des élus burkinabè sont natifs de leur
circonscription électorale. Ce qui répond à la
nécessité de capter les voix des communautés auxquelles
ils appartiennent.
Pour ce faire, ils s'appuient sur les notables pour
intensifier leurs libéralités en utilisant toutes les
possibilités de mobilisation. Ils activent à leur profit les
réseaux de solidarité et constituent des groupes
d'obligés. Il apparaît donc évident qu'au terme d'un tel
processus d'intégration sociale, l'électeur ne votera plus en
toute âme et conscience mais par solidarité ou par reconnaissance
ou encore dans l'attente de probables rétributions. C'est ce qui
explique en bonne partie la participation des populations rurales.
Toutefois, des électeurs échappent à ces
procédés de mobilisation, soit en raison des conditions
économiques qui pèsent sur eux, soit parce qu'ils demeurent
sceptiques sur la crédibilité de la classe politique.
Section II : Les obstacles à la participation
électorale
Le souci consistera à porter l'attention sur les
obstacles qui sont d'ordre social ou économique (§I) avant
d'aborder ceux qui résultent de l'environnement politique (§II).
63 Il s'agit du Dima de Boussouma du PDP/PS, du chef
Yamdabri de Fada élu du RDA et du Larlé Naaba du CDP.
64 SAWADOGO (F.M), «La démocratie
et les élections au Burkina Faso», in La réforme du
système électoral au Burkina Faso, Ouagadougou, IDEA, 1999,
p.71.
65 GIRAN (J.P), Proximité et politique,
Paris, econmica, 2001, p.95
66 BADO (L), «Démocratie droits de
l'Homme en Afrique et au Burkina Faso», in Burkina Faso, cent ans
d'histoire, (1895-1995), Paris, Karthala, p. 320
26
Paragraphe I : Les obstacles
socio-économiques
Sont constitutifs d'obstacles à la participation
électorale, la pauvreté ambiante (A) qui pèse sur un grand
nombre d'électeurs et le manque de démocratie sociale (B).
A- La pauvreté et le coût de la
participation
L'état de pauvreté conduit l'électeur
potentiel qui en est victime à la négation de ses droits
politiques. La participation à la gestion des affaires publiques devient
le dernier souci de la majorité des électeurs qui se
préoccupent plutôt de comment satisfaire leurs besoins sociaux. La
croissance économique enregistrée ces dernières
années ne se traduit pas en termes de développement perceptible
par les populations.
De même, la mise en oeuvre du cadre stratégique
de lutte contre la pauvreté (CSLP), qui était censé
être un outil de répartition des richesses nationales, ne semble
pas produire de retombées profitables à la grande majorité
de la population burkinabè comme le confirment les résultats du
sondage réalisé en 2007 par le CGD67.
Il convient également d'ajouter que le PNB par
tête demeure extrêmement faible (à peine 500
dollars)68 et plus de la moitié de la population vit sous le
seuil de pauvreté. Dans le classement selon l'Indice de
Développement Humain, le Burkina Faso occupe le 177ème
rang sur 182 et est logé dans la catégorie des pays à
développement humain faible69. Plus de 81% de la population
vivent en dessous du seuil de pauvreté avec seulement 2 $US par jour,
sur la période 2000-2007.
Une population ainsi vulnérable accorde très peu
d'importance à l'inscription sur une liste électorale tout comme
au vote. La pauvreté ainsi que la précarité des revenus
sont des facteurs constitutifs d'obstacles à l'exercice du droit de
suffrage. Elles constituent même la négation des droits politiques
dont l'exercice suppose le préalable de la satisfaction des besoins
primaires. La lutte quotidienne contre la pauvreté rend difficile
l'effectivité de l'exercice du droit électoral dont le
coût, immatériel, s'exprime en termes de temps,
d'indisponibilité mais aussi de déplacement vers le bureau de
vote ou encore le temps d'attente à y supporter, se
révèlent comme un ensemble de contraintes qui
démobilisent.
Par ailleurs, la pauvreté, considérée
comme une privation de moyens, limite l'accès à l'information
politique nécessaire à l'exercice des droits politiques. Ainsi,
le pauvre qui n'a
67 CGD, Rapport sur l'état de la gouvernance
démocratique au Burkina Faso, avril 2007, p.16
68 Atlas éco, 2009. p.45
69 PNUD, Rapport sur le développement humain
durable, 2009, p.187
27
pas les moyens est exclu de la participation politique; car la
pauvreté conduit celui qui en est victime à la négation de
ses droits politiques; les droits sociaux constituant sa priorité.
Au regard donc de ces contraintes immatérielles qui
pèsent sur les électeurs qui souhaiteraient s'inscrire et/ou
voter, nombreux sont ceux qui choisissent de ne pas les surmonter surtout que
la succession des élections semble répondre moins au besoin d'une
véritable démocratie sociale.
B- La négation de la dimension sociale de la
démocratie
Il est évident que la démocratie ne saurait se
consolider sans une amélioration des conditions de vie du plus grand
nombre comme le souligne Jean Marc D. PALM70 car l'adhésion
aux valeurs démocratiques ne saurait s'accommoder assez longtemps de la
persistance de la misère, des problèmes de santé ou encore
de l'analphabétisme.
Pourtant, depuis le retour au constitutionnalisme en 1991,
l'indice de développement du Burkina Faso n'a sensiblement pas
varié. Les croissances économiques enregistrées chaque
année et les alléchants programmes et autres promesses
électorales annoncées ne se traduisent pas en termes de
développement partagé. S'il est vrai que les élections
constituent un moyen de réalisation de la démocratie,
«elles devraient aboutir au choix de dirigeants aptes à
promouvoir le mieux-être des citoyens»71.
En outre, la démocratisation dans sa forme actuelle
s'opère seulement sur les fronts économique et politique alors
qu'il s'agit de prouver que la démocratie est en mesure d'apporter un
mieux-être aux populations. L'engagement dans un processus
démocratique doit aboutir à une gestion saine et transparente des
affaires publiques en vue d'une émergence économique qui doit
conduire au règne de la justice sociale. L'équité et la
justice sociale auxquelles doit aboutir la mise en oeuvre de tout processus
électoral consiste à faire en sorte que les richesses nationales
soient équitablement réparties. Ce qui signifie, en
démocratie, la prise en compte du plus grand nombre pour éviter
que les richesses se polarisent entre les mains d'une minorité. La
gestion de la chose publique par les mandataires du peuple doit, en principe,
avoir pour finalité la satisfaction de l'intérêt
général, c'est-à-dire de la majorité. Cependant, la
réalité est tout autre, car la démocratie semble
contribuer à creuser le fossé entre riches et pauvres. Ce qui
contraste avec l'idéal de démocratie.
70 PALM (D.J.M) & HIEN (P.C), (sous la direction
de), Histoire de la représentation politique au Burkina Faso,
Ouagadougou, DIST-INSS/CNRST, 2009, p.131.
71 SAWADOGO (F.M), op. cit, p.70.
28
Un rapprochement avec la période révolutionnaire
permet de remarquer l'importance des performances enregistrées pendant
cette période grâce à un plan socioéconomique
articulé autour de :
-la réduction drastique du train de vie de l'Etat,
-la valorisation des prix payés aux producteurs de coton
et de céréales avec des tentatives de rationalisation des
circuits de commercialisation des produits agricoles, -la promotion des
produits locaux ou la conduite d'une politique volontariste en matière
de santé, de scolarisation et de logement.
Avec l'adhésion aux valeurs démocratiques, force
est cependant de constater que l'adoption d'une économie libérale
et la tenue périodique et régulière d'élections,
semble plutôt côtoyer de médiocres performances dans les
secteurs sociaux prioritaires que sont la santé, l'éducation et
le logement. En somme, la démocratie politique qui consiste actuellement
à la tenue régulière des élections, doit
s'accompagner de la démocratie sociale, faute de quoi, les
élections ne sauraient susciter l'intérêt des citoyens.
A coté de ces contraintes d'ordre économique et
social, il y a la conjoncture politique qui n'est pas sans influence sur la
participation électorale.
Paragraphe II: Les obstacles politiques
Parmi les obstacles politiques, l'absence d'enjeux des
scrutins (B) consécutive du manque d'alternative politique (A)
caractéristique de la quasi-totalité des scrutins
électoraux au Burkina Faso retiennent l'attention.
A- Le manque d'alternative politique
Le manque d'alternative est un facteur qui a toujours
influencé négativement la participation d'une portion non
négligeable de citoyens aux élections. Il a été
signalé plus haut l'importance des conditions socio-économiques
dans la non-participation aux élections. Mais à
l'évidence, l'absence d'un choix véritablement crédible
aboutit à la certitude que le résultat ne saurait changer au
détriment du pouvoir en place. Un tel sentiment d'impuissance à
avoir une influence réelle sur l'issue du scrutin s'explique par les
manoeuvres de déstabilisation de l'opposition et les obstacles au libre
choix électoral. En effet, l'absence d'une opposition crédible
est préjudiciable au bon fonctionnement de tout système
démocratique. Or, sous la 4ème République, le
pouvoir a tout mis en oeuvre pour démanteler toute formation politique
pouvant constituer un contre-pouvoir. Il est par
29
exemple connu que la CNPP/PSD72 a volé en
éclat par la volonté de l'ODP/MT73, parti au pouvoir.
Il en est ainsi pour l'ADF/RDA et l'OBU. De telles manoeuvres ne peuvent
qu'aboutir à la fermeture du jeu électoral autour du CDP, avec la
dispersion mais surtout la marginalisation de l'opposition. A ce titre, la
modification unilatérale de la loi N°014-2001/AN du 03 juillet 2001
portant code électoral au Burkina Faso par la loi N°013-2004/AN du
27 avril 2004 est illustrative dans la mesure où cette dernière a
consisté à revenir sur la province comme circonscription
électorale au lieu de la région. En effet, ce type de
découpage ne semble visiblement pas en faveur du parti au
pouvoir74 qui, suite à son application lors des
élections législatives de 2002, n'aura obtenu qu'une courte
majorité de 57 députés sur 111.
Cette situation a toujours caractérisé les
scrutins concurrentiels qui ont été organisés au Burkina
Faso, aussi bien sous la 4ème République que sous la
2ème et la 3ème République. Il en a
été ainsi respectivement du CDP et du RDA qui ont réussi
à marginaliser les partis d'opposition traversés par des
querelles de succession ou de leadership. Ce qui les discrédite
davantage aux yeux de l'opinion publique. A ce sujet, les résultats
d'une enquête réalisée par le CGD75 montrent que
les partis d'opposition enregistrent le plus fort taux de défiance parmi
les institutions qui n'inspirent pas du tout confiance. La pléthore des
partis politiques en est une illustration, d'autant plus que ces partis ne sont
visibles que pendant les échéances électorales grâce
auxquelles ils tirent des dividendes financières, du fait des
subventions publiques.
Il s'agit là d'une source de désenchantement et
de désillusion pour les citoyens avertis qui pensent que les hommes
politiques en faisant chaque fois étalage d'insuffisances, prouvent
qu'ils ne s'engagent pas pour défendre l'intérêt
général mais plutôt pour des intérêts
particuliers.
En outre, il convient d'ajouter avec le Pr LOADA76
que par ses divisions et ses volte-face, l'opposition accentue son effritement
et alimente le désenchantement de l'électorat à la mesure
des espoirs qu'elle avait suscités. De plus, la politique de boycott
longtemps
72 A ce propos, un coin du voile a
été levé avec l'aveu de l'ancien ministre d'Etat Salif
DIALLO, sur le rôle qu'il a joué dans la déliquescence de
l'opposition
73 Le 5 février 1996, ce parti a
fusionné avec une douzaine de formations politiques dont la plus
importante fut l'aile dissidente de la CNPP/PSD pour créer le CDP sur la
base d'une nouvelle idéologie commune: la social-démocratie.
74 C'est l'adoption de la région comme
circonscription électorales aux élections législatives de
2002 qui a permis à l'opposition d'obtenir une représentation
significative à l'Assemblée Nationale.
75 CGD, L'alternance et les règles du jeu
démocratique au Burkina Faso, Ouagadougou, p.72
76 LOADA (A.M.G), «Blaise COMPAORE ou
l'architecte d'un nouvel ordre politique», in Burkina Faso entre
révolution et démocratie (1983-1993): ordre politique et
changement social en Afrique subsaharienne, Paris, Karthala, 1996, p.292
30
adoptée par l'opposition avait, à chaque fois,
vidé les scrutins concernés de toute alternative comme ce fut le
cas à l'élection présidentielle du 1er
décembre 1991.
Cette insuffisance politique constitue un obstacle majeur
à la participation des citoyens aux élections surtout lorsque les
enjeux politiques semblent inexistants dans un contexte politique dominé
par le légitimisme électoral.
B- L'absence d'enjeux des scrutins
Les enjeux d'un scrutin tiennent aux possibilités
réelles d'un choix crédible ou aux thèmes de campagnes
électorales et des programmes de gouvernement que développent et
défendent les candidats ou partis politiques. Ainsi, la saillance des
enjeux d'un scrutin constitue un facteur incitatif dans la décision des
électeurs à se rendre aux urnes. L'élection imminente ou
non d'un candidat sérieux peut susciter l'intérêt de
l'électeur.
A l'opposé, l'issue plus ou moins certaine des
élections a tendance à faire croire aux électeurs
l'inutilité de leur participation. C'est ce qui a, en partie,
expliqué le faible taux de participation de 25,12% enregistré
à l'élection présidentielle du 1er
décembre 1991 où, comme le note le Dr Bongnessan Arsène
YE, «la candidature unique a fait croire à certains militants
que le vote n'était pas nécessaire puisque de toute façon
l'élection de Blaise COMPAORE ne posait aucun
problème»77. En outre, le
référendum du 02 juin 1991 n'a également pas connu une
participation conséquente compte tenu du manque d'enjeu qui l'a
caractérisé, car tous les partis politiques, ajoute-t-il, avaient
appelé à voter «oui».
Il faut que l'enjeu soit nettement perçu par le citoyen
pour qu'il s'efforce d'écarter les barrières susceptibles
d'entraver sa participation. Cependant à l'analyse des niveaux de
participation aux élections législatives de la
2ème et de la 3ème République, il
apparaît que ces scrutins n'ont pas été marqués par
de véritables enjeux. La classe politique était
préoccupée par des enjeux individuels qui ont fini par
décourager l'électorat dont la participation aux
référendums d'adoption de la constitution de chacune de ces
Républiques fut au dessus de la barre de 70%.
Sous la 4ème République, cette
absence d'enjeux aux scrutins qui se succèdent vient conforter le
scepticisme de ceux qui pensent que les élections, telles qu'elles
s'organisent au Burkina Faso, servent seulement à légitimer le
pouvoir des élus qui s'accrochent aux fonctions électives. Ce qui
prive les élections de tout enjeu dans la mesure où le statut
de
77 YE (B.A), op cit, p.156
31
candidat sortant confère plus ou moins certains
avantages à celui qui sollicite sa réélection.
C'est pourquoi l'absence d'une opposition capable de nouer des
alliances durables et de développer des stratégies à
même d'établir un équilibre de forces entre elle et le
parti au pouvoir débouche sur une réélection
mécanique du ou des candidat(s) sortant(s). Ce qui se traduit par le
long règne de la classe dirigeante dont la majorité constitue
encore le fruit de la reconversion aux valeurs démocratiques des
élites révolutionnaires propulsées au pouvoir à la
faveur du coup de force du 4 août 1983. Cette situation semble traduire
une tendance de la classe dirigeante à superposer le modèle
démocratique au mode habituel de dévolution du pouvoir
traditionnel.
Du reste, l'impossibilité de tenir les promesses de
campagnes électorales doublées de l'insuffisance programmatique
des partis politiques ont pour conséquence le
désintérêt de l'électorat dont il importe d'examiner
la portée.
32
TITRE II : LA PORTEE DE LA FAIBLE PARTICIPATION
ELECTORALE
A la suite de l'analyse diagnostique qui a consisté
à découvrir le niveau réel de la participation
électorale au Burkina Faso ainsi que les facteurs qui la
déterminent, il convient d'examiner dans le présent titre la
portée de la faible participation autour de deux centres
d'intérêt.
L'un consiste à analyser les éventuelles
implications de la faible participation aux consultations électorales
sur le processus démocratique (chapitre I) tandis que l'autre permettra
d'énoncer les conditions pour une bonne participation (chapitre II).
Chapitre I : Les implications de la faible
participation électorale
Les élections servent à légitimer le
pouvoir des gouvernants. Cette légitimité est d'autant plus
grande que l'importance de la participation est considérable. A
contrario, peuvent surgir des velléités de contestations
politiques et sociales.
Il sera respectivement évoqué dans ce chapitre,
les implications que pourrait engendrer la faible participation aux
élections sur le pouvoir politique et institutionnel (Section I) ainsi
que sur le processus d'ancrage de la gouvernance démocratique (section
II).
Section I : Les implications sur le pouvoir
politique
Tout processus démocratique caractérisé
par une faible participation électorale implique une fragilisation du
pouvoir politique qui peut se traduire par un affaiblissement de la
légitimité politico-institutionnelle (§ I) dont pourrait
résulter une instabilité sociale (§ II)
Paragraphe I : L'affaiblissement de la
légitimité politique et institutionnelle.
La faible participation des citoyens aux scrutins
électoraux confère une faible légitimité aux
élus (A), ce qui peut engendrer le non respect de l'autorité
politique (B).
A- La faible légitimité des élus
Depuis la déclaration d'indépendance des Etats
Unis d'Amérique de 1776 et la Révolution française de
1789, le consentement et la volonté du peuple sont devenus la seule
source de l'autorité légitime. Au Burkina Faso, la Constitution
du 11 juin 1991 s'inscrit dans cette logique en posant la démocratie
comme principe d'organisation de l'Etat (article 31) et en
33
posant également le principe de la souveraineté
nationale (article 32) qui relève du peuple.
Dès lors, l'élection s'impose comme le seul mode
acceptable de sélection des dirigeants, mais aussi et surtout comme le
seul moyen d'asseoir l'autorité des dirigeants. Ainsi, le régime
démocratique repose fondamentalement sur la légitimité
qui, du reste, est inséparable du principe de
l'imputabilité78. Etant donné que le principe
d'imputabilité implique le renouvellement de confiance en cas de
satisfaction et la sanction le cas échéant, il y a lieu de
s'inquiéter face à l'importance de la désaffection du
corps électoral.
En effet, lorsque la majorité du peuple se comporte en
citoyens passifs lors des élections, il va sans dire que la
légitimité des élus qui en sont issus se trouve
effritée. Tel fut surtout le cas du premier mandat du Président
du Faso, issu de l'élection du 1er décembre
199179. Cela s'explique notamment par le fait qu'en
démocratie, la stabilité politique requiert que les citoyens
croient en la légitimité de leurs gouvernants. Car cette croyance
en la légitimité du système politique permet à ce
dernier d'escompter un minimum de loyauté ou de soutien de la part des
citoyens, même lorsqu'il prend des décisions impopulaires justes
ou nécessaires.
Par contre, la faiblesse de la légitimité peut
faire que toutes tentatives de réformes entreprises par
l'autorité légale soient vivement contestées par
l'opposition qui peut recourir incessamment aux critiques non réalistes
afin de la discréditer.
Pis, une forte abstention permanente traduit une
inefficacité du système partisan qui ne semble pas
répondre aux attentes sociales des populations. Somme toute,
l'autorité investie par une minorité de citoyens est
implicitement rejetée par la majorité qui peut observer une
attitude de défiance en son égard.
B- Le non respect de l'autorité politique
La souveraineté appartenant au peuple80,
toute autorité doit être une émanation de la volonté
populaire. Une telle autorité est alors respectée, obéie
et ses actions bénéficient de l'adhésion et de la
participation des citoyens. Par contre, lorsque cette autorité repose
sur la volonté et le consentement d'une minorité du corps
électoral, elle devient source de contestation de la part des citoyens.
En effet, une autorité mal élue peut être perçue
78 LOADA (A.M.G) & IBRIGA (L.M), op. cit, p 453
79 Lors de ce scrutin, le taux de participation du de
25,12 %, avec en définitive 19 % du corps électoral qui ont
crédité le mandat du chef de l'Etat. Ce qui a d'ailleurs permis
à l'opposition de contester cette élection et réclamer son
annulation sans succès.
80Art. 32 de la Constitution du 11 juin 1991.
34
comme un usurpateur81 du pouvoir du peuple qui peut
avoir deux attitudes. L'une consiste à rester indifférent
vis-à-vis du pouvoir en place et l'autre peut consister au recours
à la contestation.
Ainsi, le refus de se soumettre à l'autorité
peut se traduire par le désintéressement des citoyens de l'action
de l'autorité légale, certes, mais illégitime. A ce titre,
la grève du syndicat des travailleurs de la santé animale sous la
2ème législature82, malgré que le
gouvernement l'ait déclarée illégale avec un avis
consultatif de la Cour suprême à l'appui de sa décision,
est assez évocateur. La défiance de l'autorité publique ne
manque pas d'entraver la mise en oeuvre des politiques de développement
participatif et notamment le processus de décentralisation en cours.
Par ailleurs, cette situation entraînerait
également un développement de la corruption et de l'incivisme,
toutes choses qui risquent d'ébranler la stabilité des
institutions politiques.
En effet, la majorité des citoyens qui ne se
sentiraient pas concernés par le pouvoir, peuvent se déclarer non
liés par les décisions prises par celui- ci. Dès lors, ils
refuseraient d'honorer leurs obligations. L'ampleur de la défiance
conduit à l'instabilité sociale et les partis politiques cessent
de servir d'interface entre les citoyens et les institutions.
Paragraphe II : L'accroissement de l'instabilité
sociale
Deux aspects seront examinés sous cette rubrique. Il
s'agit d'analyser la faible participation comme facteur d'émergence de
la contestation sociale (A) et le risque d'émergence d'une opposition
informelle qui en découle (B).
A- L'émergence de la contestation sociale
Les élections visent à légitimer le
pouvoir des gouvernants afin de disqualifier à l'avance la violence ou
les affrontements. Une participation soutenue des populations aux consultations
électorales pourrait contribuer à éviter le recours
à la contestation. A contrario, une faible participation peut
lériger en mode d'expression politique dans la mesure
où la majorité des citoyens ne croiraient pas en
l'efficacité du bulletin de vote. Le manque de confiance aux
mécanismes électoraux qui se manifeste par le refus de participer
aux élections influence fortement la croyance en l'efficacité de
la contestation
81 L'exemple le plus illustratif à ce titre
reste l'élection présidentielle ivoirienne de 2000 qui a vu
l'arrivée au pouvoir du candidat du FPI, Laurent GBAGBO, dont
l'autorité a longtemps été contestée et le reste
encore.
82 Les élections législatives qui ont
permis la mise en place de la 2ème législature ont
été caractérisées par un quasi unanimisme au vu de
la large victoire du parti majoritaire.
35
pour obtenir du pouvoir la prise en compte des attentes
sociales. A ce titre, un citoyen a déclaré lors d'une
enquête sur la participation électorale au Burkina Faso que :
«si on n'avait pas brûlé et cassé, beaucoup de
choses n'auraient pas changé dans ce pays»83.
Ces mouvements de contestation sociale, tels que le Burkina
Faso les a souvent vécus sous la 4ème
république ont le plus souvent échappé aux canaux
légaux qui sont censés canaliser toute manifestation.
Cela laisse donc entrevoir une faible intégration,
surtout de la jeunesse dans le processus électoral avec pour corollaire
les tentatives récurrentes de contourner les organisations politiques et
sociales pour se faire entendre. La rue est alors utilisée comme cadre
d'expression protestataire. A ce propos, le Pr LOADA remarque que les jeunes ne
participent pas aux élections mais privilégient d'autres formes
de participation comme la grève, les marches, les casses, les
débrayages, etc. qu'ils croient plus efficaces que le vote ou le
militantisme84. Ce qui fragilise la paix sociale et remet en cause
certains acquis. Ces contestations sociales traduisent moins le rejet radical
de la démocratie comme idéal que son échec à
l'épreuve des faits.
Toutefois, ces contestations peuvent aussi être l'oeuvre
de partis politiques exclus de la représentation politique ou des
organisations de la société civile. Dès lors un front
d'opposition informelle peut se constituer pour revendiquer, le plus souvent
par la violence, plus de démocratie.
B- L'émergence d'une opposition informelle
La récurrence et l'ampleur de la contestation sociale
aboutissent à la constitution d'une coalition des organisations de la
société civile afin d'encadrer les mouvements sociaux. Il peut
émerger une opposition de type informel qui est, en
réalité, un regroupement de toutes les opinions non
représentées ou très faiblement dans les institutions
républicaines. Elles se coalisent pour constituer, en l'absence d'une
opposition significative, un contrepoids social. Toutes leurs revendications
sont traduites comme les préoccupations de la société. Tel
fut notamment le cas au lendemain de l'assassinat du journaliste Norbert ZONGO,
avec la naissance du Collectif des organisations démocratiques de masses
et de partis politiques (CODMPP).
83 LOADA (A.M.G), le droit de suffrage en Afrique
francophone: sens et usager sociaux, p. 34; cité par SAWADOGO (A), La
participation citoyenne non conventionnelle, Université de
Ouagadougou, UFR/SJP, 2004, p. 36
84 In Sidwaya N°6550 du 13 au 15 novembre 2009,
p.23
36
Cette alliance société civile/partis politiques
est, en effet, la résultante de la marginalisation des partis
d'opposition qui, par le biais de cette alliance, espèrent revendiquer
plus de démocratie, de justice sociale et une représentation
politique plus équitable85. Une telle interférence des
organisations de la société civile avec les acteurs politiques a
d'ailleurs suscité de vives critiques de la part du pouvoir en place qui
les a accusées de faire de la politique86 et de vouloir
renverser le régime. Cette organisation fut, sans conteste, la plus
illustrative.
Lorsque le jeu politique se révèle inefficace
face aux attentes des populations, celles-ci le rejettent au profit d'une forme
non conventionnelle de participation. Des séries de manifestations
organisées par une telle opposition ont bien souvent conduit à
l'enclenchement de réformes politiques favorables à un apaisement
social.
A ce titre, la succession des manifestations
déclenchées en désapprobation des évènements
du 13 décembre 199887 constitue un exemple illustratif. Ces
dernières ont fragilisé la stabilité sociopolitique et
poussé le régime en place à opérer une série
de réformes politiques qui ont permis à l'opposition d'avoir une
représentation significative à
l'hémicycle88.
En plus de ces manifestations dans un cadre plus ou moins
structuré, sont survenues d'autres de façon spontanée,
avec toutefois une ampleur significative. Sont de celles-là, les
mouvements de contestations contre l'application de la loi relative au port
obligatoire de casque en 2005, et les émeutes de la vie chère en
février-mars 2008. Ces mouvements de contestations ont, en effet,
été conduits, en dehors des partis politiques et organisations de
la société civile. Ceux-ci venaient, au regard de la
spontanéité et de l'ampleur de ces mouvements, de se rendre
compte de leur faible efficacité. C'est ainsi que le mouvement de
coalition contre la vie chère n'a pas, jusque là, connu un
succès aussi éclatant en terme de manifestations.
Cette mobilisation spontanée, ponctuelle et plus
efficace contre une mobilisation moribonde lors des consultations
électorales dénote, en filigrane, une crise structurelle de
85 Sous la 3ème ce furent les
syndicats qui suppléaient les partis politiques marginalisés et
incapables de jouer leurs fonctions d'opposition
86 SAWADOGO (A), op. cit, p.27.
87 Le 13décembre 1998, au lendemain de
l'investiture du Président du Faso réélu à plus de
87%, a été assassiné le journaliste Norbert ZONGO et
l'opposition a tout de suite indexé le pouvoir d'en être
l'instigateur parce que celui-là enquêtait sur une affaire de
meurtre dans laquelle serait impliqué le frère cadet du
Président.
88 Réforme du code électoral par
l'adoption, entre autres, de la loi N°14-2001/AN du 03 juillet 2001 qui a
introduit la proportionnelle au plus fort reste, la région comme
circonscription électorale, le bulletin unique, etc.
37
la représentation politique telle que pratiquée.
Déjà, quel avenir politique le Burkina Faso peut-il envisager
lorsqu'à la veille d'une élection présidentielle, le
recensement électoral, à cet effet, recueille moins de 20
%89 de la population électorale? Il est certain qu'avec un
corps électoral inférieur au tiers (1/3) de la population
électorale, l'ancrage de la gouvernance démocratique reste
hypothétique.
Section II : Les implications sur l'ancrage de la
gouvernance
démocratique
Dans le contexte actuel d'exigence de la bonne gouvernance qui
implique une gestion participative des affaires publiques, une participation
minoritaire des citoyens à la désignation de leurs mandataires
pose deux problèmes majeurs au processus démocratique. L'un
renvoie à la problématique de l'alternance politique qui est un
élément essentiel en démocratie (§I). L'autre
consiste en la non-effectivité du principe de la majorité
démocratique (§II).
Paragraphe I : L'hypothèque de l'alternance
démocratique
Considérée comme une conséquence de la
faible participation, l'hypothèque de l'alternance démocratique
pourrait se traduire par l'hégémonie de la classe dirigeante (A)
et sa volonté persistante de clôturer le jeu électoral
(B).
A- L'hégémonie de la classe dirigeante
Il s'avère utile de préciser que
l'hégémonie ici évoquée renvoie à la logique
d'accaparement de la vie démocratique nationale, du point de vue de
l'expression des suffrages des citoyens. Le refus de l'alternance
démocratique aboutit alors à la transformation de la
démocratie en une élitocratie dans la mesure où la classe
dirigeante, du fait du désintérêt des citoyens, finirait
par se croire inamovible.
En effet, les leviers de tout le processus démocratique
se trouvent abandonnés à une minorité élitiste au
comportement majoritaire comme le remarque le Pr Laurent BADO90. Une
analyse de l'appartenance politique des élus à la
représentation nationale, permet de constater aisément que la
majorité relève toujours du parti au pouvoir qui dispose
d'ailleurs d'une majorité confortable. Ainsi, l'application d'un mode de
scrutin proportionnel
89 Indépendant n° 864 du 30 /03/2010 ; p.
4
90 BADO L. op. cit, p. 322.
38
a donné les mêmes effets qu'un scrutin
majoritaire sous la 2ème législature où le CDP
s'en est sorti avec 101 des 111 sièges de députés à
l'Assemblée Nationale.
Cette confirmation continue et durable de
l'hégémonie du parti au pouvoir, le Congrès pour la
Démocratie et le Progrès (CDP) s'explique selon le Pr
LOADA91, par trois facteurs. Il s'agit notamment de l'organisation
du parti, de ses ressources humaines et matérielles et de sa
capacité d'innovation auxquelles il convient d'ajouter sa forte
implantation sur toute l'étendue du territoire et sa grande
capacité de redistribution. A ces facteurs, s'ajoutent surtout le mode
de découpage électoral qui a consisté à abandonner
la région au profit de la province comme ressort principal pour les
élections des députés et le mode de répartition des
sièges qui n'est pas toujours équitable. En outre, la
volonté d'hégémonie du CDP se traduit par les
révisions opportunistes des règles du jeu électoral. Ce
qui aboutit à l'instauration d'une démocratie factice.
La mainmise du CDP sur le système électoral lui
permet davantage de réussir la clôture du jeu électoral.
B- La clôture du jeu électoral
L'analyse précédente a permis de mettre en
exergue un aspect lié à la faible participation. Ainsi, il
apparait qu'une participation minoritaire semble favoriser la mainmise
politique du parti au pouvoir sur le processus électoral, au
détriment de l'opposition qui est de plus en plus marginalisée.
En effet, le désenchantement électoral d'une majorité des
citoyens contribue à restreindre la compétition
électorale, dans un système partisan caractérisé
par l'incapacité de l'opposition à nouer des alliances.
Dépourvue de stratégies qui puissent lui permettre de
concurrencer le CDP, l'opposition sort toujours laminée des
différents scrutins et donne plutôt l'impression d'animer la
galerie politique92. C'est ainsi qu'à l'élection
présidentielle du 13 novembre 2005, elle ne réunira pas, avec
onze (11) candidats, 20% des suffrages exprimés face au candidat du
parti au pouvoir (CDP).
En outre, elle ne semble pas se préoccuper de
l'alternance, mais cherche à s'intégrer, à court terme,
dans le système hégémonique en place. Le soutien à
la candidature du Président sortant par la plus importante force
politique de l'opposition à savoir l'ADF/RDA et un ensemble d'autres
partis dont l'UPR et la CFD regroupés sous l'Alliance pour la
majorité présidentielle (AMP) est assez significatif en la
matière.
91 LOADA (A.M.G), «Des élections comme les
autres», in politique africaine, N°69, 1998, p.63.
92 En référence aux larges victoires du
CDP aux élections législatives de 1992, 1997 et aux
présidentielles de 1998 et 2005
39
Ce qui exclut toute possibilité d'alternance et
consacre, à chaque scrutin, un raz de marée électoral du
CDP face à la dispersion de l'opposition qui prive ainsi
l'électorat d'un choix réel portant sur une autre vision de
société différente de celle portée par le parti au
pouvoir. L'absence d'une opposition crédible et significative consacre
l'existence d'un parti ultra-dominant, ce qui démontre davantage
l'improbabilité d'une alternance politique au Burkina Faso.
A cette problématique de la crédibilité
de l'opposition, il convient d'ajouter les velléités de
manipulation du processus électoral. En effet, la persistance de
certaines manoeuvres telles que la fraude, la corruption électorale ou
l'achat de conscience sont de nature à entraver la liberté de
choix des électeurs garantie par la Constitution.
Somme toute, l'alternance ne sera jamais une
réalité tant que le pouvoir n'affichera pas une réelle
volonté de transparence dans la tenue du processus électoral.
Mais, elle demeurera un voeu pieux si l'opposition n'abandonne pas sa logique
de dispersion, organisée autour des intérêts particuliers,
pour former une véritable alliance crédible. Enfin, tout cela ne
saurait se réaliser que par une participation efficiente des citoyens
à l'expression du suffrage.
Le refus de participer ne peut que remettre en cause la loi de
la majorité démocratique, principe fondamental en
démocratie.
Paragraphe II : La non-effectivité du
principe de la majorité démocratique
Le principe de la majorité démocratique renvoie
à la légitimation du pouvoir par le plus grand nombre. Une faible
participation des citoyens aux élections induit donc la
non-effectivité de ce principe. Ce qui implique l'exclusion des citoyens
du processus décisionnel (A) et est source d'entraves à
l'enracinement de la gouvernance démocratique (B).
A- L'exclusion des citoyens du processus
décisionnel
La Politique Nationale de Bonne Gouvernance
(PNBG)93 fait de la participation des citoyens le pilier du
succès du processus démocratique. La bonne gouvernance implique
une gestion participative des affaires publiques. Cependant, force est de
constater que les Burkinabè participent peu à la
désignation de leurs représentants comme l'attestent le
93 Document adopté par décret
N°2005-459/PRES/PM/MFPRE/MFB du 31 aout 2005.
40
niveau de participation électorale qui est, en moyenne
de 33%. Ce qui traduit, de facto, une exclusion de la majorité de la
population de l'étape la plus importante, en démocratie, du
processus de prise de décisions.
Cette exclusion se manifeste d'abord au niveau du processus
décisionnel interne des partis ou formations politiques où la
démocratie à l'interne fait défaut. Il s'agit, en
réalité d'une infime partie des élites qui confisquent le
pouvoir de décision auquel elle est plus encline à s'accrocher.
Cette situation a pour effet la fragilisation du processus de
démocratisation qui s'opère seulement par le sommet à
travers une instrumentalisation de la démocratie94. Ce qui
induit sa faible appropriation sociale à la base surtout lorsque la
gestion des affaires publiques se caractérise par une certaine
opacité et un manque d'imputabilité politique.
Une élite dirigeante qui a une base sociale
singulièrement réduite est encline à la confiscation de la
fonction élective en l'absence d'une participation soutenue aux
élections et à mettre les citoyens en position
d'incapacité de peser sur ses décisions et les motifs qui les
expliquent. Cette élite peut développer des modes de gouvernance
qui reposent sur la corruption comme moyens de mobilisation et la satisfaction
d'intérêts plus partisans au détriment de
l'intérêt commun. A cet effet, aucune stratégie
d'implication des acteurs sociaux et politiques n'est entreprise en vue d'une
gestion participative. Les institutions et modes de gestion participative font
l'objet de consultations et/ou de recours sélectifs. Toute chose
d'ailleurs susceptible d'entraver l'enracinement véritable de la
gouvernance locale.
B- Les entraves à l'enracinement de la gouvernance
locale
L'examen des risques encourus du fait de la faible
participation électorale met en exergue la question de la gouvernance
locale. Dans le contexte actuel de la décentralisation, le citoyen est
le principal acteur et bénéficiaire du développement de la
collectivité95. Son refus de participer à
l'élection des représentants et à la prise des
décisions qui engagent l'avenir de sa collectivité reste sans
conteste un obstacle majeur à l'ancrage social de la gouvernance
participative. De plus, la non-participation au jeu démocratique
implique, en fait, une exclusion de ceux qui y recourent du processus de
décision politique. Toute
94 Il s'agit notamment de la création des
institutions comme l'Assemblée Nationale, le CES, le CSC, le Conseil
Constitutionnel, la CENI, Haute Cour de Justice, les Parlements de Jeunes et
des Enfants, la HACLC, etc.
95 ADEPAC/PNUD, Citoyenneté et participation
citoyenne, Ouagadougou, décembre 2008, p.66
41
chose essentielle, en démocratie, car cela
relève de la prérogative de contrôle du citoyen sur le
politique.
Par ailleurs, les électeurs demeurent encore des
figurants épisodiques dans le processus de mise en oeuvre de la
décentralisation; alors que la démocratie locale est
censée offrir aux citoyens le potentiel nécessaire pour
l'exercice de leur liberté politique et l'expression de leurs attentes
à travers le transfert du pouvoir de décision et des moyens qui
s'y rapportent.
C'est pourquoi la gouvernance locale qui est le
quatrième axe de la Politique Nationale de Bonne Gouvernance s'appuie
sur la décentralisation qui reste la meilleure forme pour associer les
citoyens à la gestion des affaires locales et d'en accroître
l'efficacité. De ce point de vue, une faible participation citoyenne
n'est pas à même de favoriser l'émergence de nouveaux
acteurs qui doivent être associés à la gestion des affaires
publiques.
Une telle apathie fragilise davantage le processus
d'enracinement de la gouvernance locale avec le risque d'un retour de
l'administration centrale d'Etat dans la gestion des collectivités. Pis,
la gouvernance locale, qui doit répondre aux besoins de la
majorité, fait plutôt l'objet d'une perversion par une
minorité qui la détournent pour satisfaire des
intérêts particuliers. D'ailleurs, le processus de
décentralisation ne se trouve-t-il pas prise en otage par une
élite qui impose, dans la réalité, les gouvernants locaux?
La décentralisation, au lieu d'être une véritable
démocratisation du pouvoir, semble plutôt un instrument de
rétribution des gains politiques entre les élites, au
détriment de la majorité.
Aussi, est-il besoin d'ajouter que: «Le
perfectionnement continu de notre système politique est aujourd'hui un
impératif qui requiert la modernisation des instruments de gouvernance
de l'Etat, en référence aux attentes légitimes des
populations»96.
En somme, pour une bonne participation des citoyens aux
consultations électorales, il s'avère impérieux d'apporter
quelques aménagements au système électoral. Du reste,
c'est le second centre d'intérêt dont il convient de
préciser le contenu.
96 Extrait du discours de nouvel an 2010 du
Président du Faso, in Indépendant N°850 & 851du 22
au 29 décembre 2009, p.8.
42
Chapitre II : Les conditions d'une bonne participation
électorale.
Pour assurer une bonne participation aux consultations
électorales, il importe d'envisager des réformes de nature
à inspirer davantage la confiance des acteurs politiques et des
citoyens. A cet effet, il apparaît nécessaire de procéder
à la création d'un environnement électoral favorable d'une
part (Section I) et d'autre part à la promotion d'une véritable
culture démocratique (section II).
Section I : La création d'un environnement
électoral favorable
Tout processus électoral doit obéir, dans sa
mise en oeuvre, à un certain nombre de principes dont la
nécessité d'une crédibilisation du jeu électoral
(§ I) mais aussi et surtout de l'établissement d'un système
véritablement compétitif (§ II).
Paragraphe I : La crédibilisation du jeu
électoral
Les institutions qui interviennent dans l'organisation des
élections doivent répondre à un certain nombre de
critères. Parmi ceux-ci, il sera évoqué la
nécessaire effectivité de leur indépendance (A) qui
constitue une garantie de la sincérité des scrutins (B).
A- La nécessaire effectivité de
l'indépendance des institutions électorales
Avec la transition démocratique, le manque de confiance
et la forte politisation du Ministère de l'Administration
territoriale97 ont conduit à exiger l'institution d'une
Commission électorale dite indépendante.
Mais la question étant politique, elle doit
requérir un consensus en vue d'un arbitrage neutre. A ce jour, la
question fondamentale qui se pose encore, est celle de l'indépendance
effective dans la mesure où c'est elle qui inspire la confiance des
acteurs politiques et sociaux.
En effet, l'indépendance reconnue aux institutions
électorales est assez relative au regard de la composition et du mode de
désignation des membres. Ceux-ci éclairent sur le degré de
soumission ou d'indépendance de l'institution.
L'analyse de la composition des institutions comme la
Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI)98 et le
Conseil Constitutionnel99 permet de comprendre que le
97 Dans la plupart des Etats d'Afrique francophone, ce
Ministère a traditionnellement en charge l'organisation des
élections, en référence au modèle
français.
43
pouvoir de désignation n'est pas suffisamment
partagé. Une manipulation du mode de désignation peut aboutir
à une politisation de ces institutions qui jouent un rôle capital
dans la tenue d'élections crédibles. La nomination des
présidents de ces institutions par le pouvoir exécutif limite
leur indépendance vis-à-vis du pouvoir.
Qu'il s'agisse de la CENI ou du Conseil constitutionnel, la
composition doit respecter le principe d'équité et surtout de
neutralité, pour éviter l'hégémonie
numérique des représentants choisis par le pouvoir
exécutif.
A ce sujet, il convient de relever avec le Pr IBRIGA que les
rapports de force au sein de la CENI font qu'on peut connaître à
l'avance le résultat de l'élection du Président de ladite
institution. Cela s'explique par le fait que les animateurs des organisations
de la société civile sont souvent des acteurs politiques
déguisés et aux appartenances partisanes plus ou moins bien
connues100.
A cette question majeure de la composition s'ajoute le manque
d'autonomie financière qui fait que la CENI reste dépendante du
pouvoir exécutif101. L'autonomie financière
étant un aspect déterminant dans l'effectivité de
l'indépendance, il est nécessaire que la CENI en soit
véritablement dotée. Cela évitera son assujettissement
budgétaire à l'exécutif102 qui pourrait ainsi
exercer un chantage sur elle en cas de velléités d'envol hors de
la cage du pouvoir.
Mieux, il importe de constitutionnaliser la CENI et ses
démembrements et renoncer à la représentation des partis
en son sein car cela semble contraire au principe du droit qui veut que
l'arbitre ne soit pas en même temps partie prenante de la
compétition.
Quant au Conseil constitutionnel qui veille sur la
régularité des scrutins103, la retouche consisterait
à la détermination de la durée du mandat de son
président. En effet, si les membres jouissent d'un statut
protecteur104, il n'en est pas de même pour le
président qui demeure dans l'incertitude. Un mandat à
durée déterminée et non renouvelable est un
98 Composition tripartite, majorité (5
membres)-société civile (5 membres)-opposition (5 membres), avec
la supériorité numérique du politique qui est à la
fois juge et partie prenante.
99 Sur un total de 10 membres, le Président
du Faso en nomme 7, ce qui laisse apparaître une institution largement
contrôlée par l'exécutif.
100 L'actuel Président de la CENI est un ancien
militant du PAI, d'où les critiques très acerbes de Monsieur
Soumane TOURE alors député sous la 3ème
législature qui, en réalité, relevaient plus d'un
règlement de compte.
101 Si les membres du Conseil Constitutionnel
bénéficient d'un traitement conséquent (art.7 de la loi
organique N°11-2000/AN du 27 avril 2000), il n'en est pas de même
pour les membres de la CENI
102 Le budget de la CENI donne lieu souvent, comme l'ont
relevé les Prs LOADA et IBRIGA (op. cit, p.461) à des arbitrages
et marchandages entre elle et le Gouvernement.
103 Art. 152 de la Constitution du 11 juin 1991.
104 Art. 153 al. 2 de la Constitution du 11 juin 1991.
44
facteur de stabilité, générateur de
sérénité et par conséquent d'indépendance.
La non-détermination de la durée du mandat du président
peut conduire celui-ci à vouloir ménager l'autorité de
nomination dans ses décisions105, dans l'espoir d'être
reconduit à son poste. Alors qu'il ne devrait pas, dans un souci
d'indépendance, répondre de l'autorité de nomination.
Il conviendrait que le président soit élu parmi
et par les membres de l'institution avec au préalable la substitution du
Garde des Sceaux, Ministre de la justice par l'opposition (à travers son
chef de file) comme autorité habilitée à la proposition
des membres).
C'est en assurant une indépendance soutenue aux
structures en charge de l'organisation et de la régularité des
élections, qu'elles pourront garantir la sincérité des
scrutins qui demeure un facteur incitatif à la participation des
citoyens.
B- La garantie de la sincérité des
scrutins
S'interroger sur les conditions pouvant garantir la
sincérité des scrutins, c'est s'intéresser aux questions
de transparence, d'égalité dans le financement des partis
politiques et du plafonnement des dépenses électorales.
Mais avant, il convient de souligner que «l'exigence
de sincérité du scrutin commande que l'honnêteté
préside au découpage des
circonscriptions»106. En effet, il faut bien mettre
l'opération de découpage à l'abri de toute manipulation
favoritiste comme la remise en cause unilatérale par la majorité
parlementaire de la région comme circonscription électorale au
profit d'un retour à la province107.
S'agissant des règles de la compétition, il
importe d'évoquer le manque de transparence et d'impartialité qui
caractérisent le financement des partis politiques et les
dépenses électorales. La législation burkinabè ne
contient pas de dispositions règlementant le financement privé.
Elle ne plafonne pas non plus les dépenses électorales des
candidats ou des partis et formations politiques. Ce qui ne manque pas de
biaiser la sincérité du scrutin dans la mesure où les
subventions publiques constituent les ressources essentielles de la plupart des
partis d'opposition alors que le parti au pouvoir n'en fait qu'une ressource
accessoire.
105 Cette intention lui a d'ailleurs été
prêtée en 2005, après qu'elle ait déclaré
valide la candidature du Président du Faso qui sollicitait un
troisième mandat consécutif contre lequel l'opposition a
introduit une requête en annulation.
106 LOADA (A.M.G) et IBRIGA (L.M), op. cit, p.234
107 Article 155 de la N°014-2001/AN du 03 juillet 2001,
modifiée par la loi N°013-2004/AN du 27 avril 2004
45
Pour réduire ces inégalités, le
législateur se doit d'intervenir pour règlementer, voire
interdire le financement privé et lever le silence sur la question du
plafonnement des dépenses électorales. La persistance de cette
large disproportion des moyens entache sérieusement la
sincérité du scrutin. La résorption de ces
inégalités matérielles de départ a pour objectif
l'organisation d'une compétition loyale entre candidats ou formations
politiques bénéficiant relativement des mêmes
potentialités de victoire108. Aussi, pour l'instauration
d'une véritable culture démocratique il faudrait se
prémunir ou lutter contre cette distorsion des règles de la
compétition électorale. D'ailleurs, sur ce point LOADA (A.M.G) et
IBRIGA (L.M) soutiennent que «le souci d'équité dans les
conditions de compétition a totalement été perdu de vue au
profit de la seule préoccupation de l'équitable
répartition des fonds publics»109.
Du reste, les critères de crédibilisation du jeu
électoral ci-dessus énoncés, ne suffisent pas à
restaurer l'enthousiasme des citoyens à la participation. Il faut aussi
asseoir les bases d'un système partisan plus compétitif en
acceptant des règles de jeu plus équitables et transparentes.
Paragraphe II : L'établissement d'un
système compétitif
Le dynamisme de la participation des citoyens aux
consultations électorales réside dans les opportunités de
choix. Ainsi, peuvent renforcer le système compétitif,
l'ouverture du jeu électoral (A) et le renouvellement régulier du
personnel politique (B).
A- L'ouverture du jeu électoral
L'ouverture du jeu électoral s'analyse sous l'angle de
la liberté de choix. L'élection étant un choix, la
liberté du vote qui présuppose la garantie d'un pluralisme doit
être une réalité. Cette liberté n'a
réellement de sens que si les candidats en compétition sont
à armes égales. Mais, elle est aussi accompagnée d'un
accès effectif aux fonctions électives par tout citoyen.
En effet, quand bien même la Constitution du 11 juin
1991 proclame le droit de tous les burkinabé à participer
à la gestion des affaires de l'Etat110, il n'en demeure pas
moins que le principe connaît une application sélective. C'est le
problème de l'application effective des règles touchant à
l'environnement de la compétition politique. En réalité,
jusqu'à nos
108 Idem, p. 238
109 Idem, P. 239
110 Art. 12 de la Constitution du 11 juin 1991
46
jours, la majorité et l'opposition sont tous unanimes
contre l'adoption d'une loi autorisant les candidatures indépendantes.
Les candidatures à toute élection sont donc parrainées par
les partis ou formations politiques qui détiennent le monopole de la
présentation des candidatures. Il s'ensuit que la désignation des
candidats aux consultations électorales ne peut qu'obéir aux
critères définis par chaque parti qui décide de celui qui
défendra ses couleurs.
Le constituant originaire ainsi que le législateur se
sont, jusque là, réservés d'établir des
règles en la matière. Le processus de désignation des
candidats aux fonctions électives reste un apanage de la direction de
chaque parti. Ce qui implique que la validation d'une candidature peut subir
les caprices ou manipulations de la direction du parti surtout lorsque la
compétition interne est inexistante111. En effet, la
sélection des candidats aux élections est le plus souvent
fondé sur des critères subjectifs notamment «les raisons
de compagnonnage, de subordination»112 plutôt que
sur le mérite et les compétences. Le jeu politique se trouve
alors restreint, peu compétitif dès l'étape de la
sélection des candidats. Ce qui réduit avant tout les
possibilités offertes aux électeurs. D'où la
nécessité d'ouvrir le jeu en vue d'une participation plus
inclusive.
En plus de cette ouverture interne aux partis politiques, il
importe d'entreprendre un assainissement du jeu électoral. Cela consiste
pour le parti au pouvoir à l'abandon de toute pratique visant à
soutenir expressément ou implicitement la fragmentation et les
dissidences internes des partis d'opposition113. Ce genre de
manoeuvres politiques empêche la construction d'une alternative
crédible en dehors de la majorité. Le «débauchage
du principal parti de l'opposition (CNPP/PSD en 1996, ADF/RDA en
2005)»114 eut pour effet de verrouiller davantage le jeu
électoral au lieu d'aménager des garanties effectives pour une
opposition forte et compétitive. Cette manoeuvre a abouti, pour le
premier cas, à une surreprésentation du CDP à
l'hémicycle avec 101 députés sur 111 contre 10 pour
l'opposition, soit quatre (4) partis politiques représentés
à l'Assemblée Nationale et, pour le second, à un raz de
marée électoral (80,30% des suffrages exprimés) pour le
Président sortant en 2005.
111 L'unique compétition à l'interne fut
l'organisation des primaires au sein du CDP, dans la perspective des
élections législatives du 11 mai 1997.
112 IBRIGA (L.M) et TOE (M.M), Rapport d'étude sur
l'exercice du libre choix électoral au Burkina Faso, Ouagadougou,
GERDDES, 2007, p.48.
113 L'exemple qui a le plus défrayé la chronique
judicaire est sans contexte le cas du PAI auquel il faut ajouter
l'éclatement de l'OBU. Interrogé à ce sujet, Mr Salif
DIALLO n'a pas éludé son rôle en disant «(...) donc de
temps en temps si on peut accélérer leur décomposition
interne, on le fait, c'est tout à fait logique (...) » in CGD, op
cit, p 56
114 CGD, op. cit, p.37.
47
En effet, une compétition ouverte requiert à la
fois des challengers sérieux et disposant de ressources
financières pour leur campagne. Ce d'autant plus que l'apathie du corps
électoral, en général, renforce le statu quo.
En somme, pour des élections plus compétitives
et une participation soutenue des électeurs, le parti au pouvoir doit
renoncer aux pratiques monopolistiques et accepter la construction d'une
opposition, afin de crédibiliser le système démocratique
à l'intérieur du pays. Mieux, il convient d'instituer la pratique
de renouvellement du personnel politique afin de poser les bases d'une
alternance pacifique au pouvoir.
B- Le renouvellement du personnel politique
La responsabilisation des citoyens dans le processus
électoral passe par la mise en oeuvre d'un mécanisme transparent
d'accession aux fonctions électives. C'est ce qui pourra provoquer un
afflux d'individus citoyens nouveaux aux responsabilités politiques.
La solution consiste essentiellement à la limitation du
nombre de mandats successifs115 et consécutivement la
circulation ou la rotation des élites politiques. La mise en application
de ce procédé ne peut qu'entraîner un regain de
participation et éviter la constitution de carrières politiques
sclérosantes qui s'étalent sur des
décennies116. En effet, la scène politique
burkinabé reste encore dominée par ceux-là même qui
ont conduit le processus de transition démocratique. Un tel ancrage
immodéré des dirigeants politiques donne l'impression qu'ils
s'attachent à un «métier»; ce qui interdit, de
facto, aux autres citoyens de prendre leur part de responsabilité dans
la gestion de la République. La politique ne doit, cependant, pas
être considérée comme un métier, parce que cela
reviendrait à dire que l'on fait la politique pour obtenir une situation
rémunératrice. L'engagement politique doit plutôt
résulter d'une conviction politique et idéologique; et cela doit
se faire indépendamment du métier de subsistance. Ceci, afin
d'éviter que ceux qui parviennent à accéder aux fonctions
électives ne verrouillent pas le système pour assurer mieux leur
carrière. D'où le bien-fondé de la limitation du nombre de
mandats consécutifs qui permet de promouvoir des élections plus
compétitives. Cela est d'autant plus nécessaire que la culture
démocratique des élites et des populations est fragile. L'absence
de clause limitative conduit à une réélection presque
mécanique du ou des candidat(s) sortant(s) du fait des avantages
énormes qu'ils possèdent par rapport à leurs challengers.
Ces
115 Cette limitation, pour revêtir une importance
significative, doit concerner à la fois le mandat présidentiel,
celui de député mais aussi de maire.
116 L'élite politique actuelle est composée
essentiellement des acteurs de la Révolution d'Août, totalisant
ainsi plus de deux (2) décennies de pouvoir.
48
avantages consistent au développement de diverses
pratiques clientélistes qui renforcent l'exclusion et l'échec des
autres candidats ou formations politiques. A cela, s'ajoutent également
les conceptions traditionnelles du pouvoir qui ne prévoient pas le
remplacement du chef encore vivant.
Pour donc assainir la vie démocratique, il importe
d'éviter qu'une même personne puisse rester à un poste ou
une fonction élective pendant vingt (20) ans. Il faut, au contraire,
permettre à des femmes et à des hommes nouveaux de partager les
responsabilités locales et nationales. En outre, les multiples
candidatures d'un homme politique n'ont en réalité rien à
voir avec un engagement profond et sincère. C'est pourquoi, il est plus
que nécessaire de renforcer la culture démocratique des citoyens
pour faire barrage à toute dérive vers une
pseudo-démocratie plébiscitaire117.
Section II : L'approfondissent de la culture
démocratique
Le succès d'un ancrage démocratique,
c'est-à-dire un niveau de participation acceptable, requiert la
satisfaction de quelques conditions minimales parmi lesquelles figurent la
promotion d'une citoyenneté active (§I) et la culture de la
responsabilité politique (§II) qui feront l'objet de la
présente rubrique.
Paragraphe I : La promotion d'une citoyenneté
active
Dans le présent paragraphe, seront examinés deux
types de moyens qui puissent permettre aux électeurs d'accéder
à une citoyenneté active. Ce sont : la vulgarisation de
l'information politique (A) et l'éducation au mode compétitif de
dévolution du pouvoir (B).
A- La vulgarisation de l'information politique
Cette question renvoie à l'application des principes de
l'égal accès de tous les citoyens à l'information, de
l'impartialité et de la neutralité qui doivent encadrer son
traitement. De ce point de vue, les instances de régulation de
l'information doivent garantir l'indépendance des médias à
l'égard des pouvoirs politiques. Sans une véritable
liberté de presse qui est une composante essentielle de l'édifice
démocratique, le citoyen ne disposera d'aucun repère qui puisse
lui permettre de jouer pleinement sa partition dans la construction d'un
véritable Etat de droit. C'est à ce titre qu'aucune
discrimination ne doit être tolérée entre les partis
politiques ou candidats dans l'accès aux médias publics qui
devraient obéir à un
117 LOADA (A.M.G), La limitation des mandats
présidentiel en Afrique, Revue électronique, afrilex n°
03/2003, p.32
49
cahier de charges, en vue d'en garantir l'accès
équitable des partis politiques. Leurs activités doivent faire
l'objet d'une couverture et nécessairement d'une rediffusion au moins.
Une couverture équitable des activités des différentes
sensibilités politiques permet au citoyen de bénéficier
d'une pluralité d'information nécessaire à la
réalisation de ses droits et devoirs politiques.
Mais, au-delà du respect du pluralisme de
l'information, il convient de veiller à ce que cette information
politique soit également équitable. C'est-à-dire qu'il ne
doit pas avoir une grande disproportion dans le temps d'antenne et/ou de parole
accordés aux acteurs politiques, aussi bien en période de
campagne électorale qu'en dehors des échéances
électorales.
Le législateur doit prévoir des dispositions
faisant obligation aux partis politiques de concevoir et faire publier leur
programme. L'élaboration d'un programme comporte des effets symboliques
majeurs comme le soutiennent LOADA (A.M.G) et IBRIGA (L.M) «elle
permet d'attester de la crédibilité ou du sérieux du parti
qui estime avoir vocation à gouverner ; ensuite elle permet, d'un point
de vue pédagogique, de «socialiser» les militants ou le grand
public c'est-à-dire de les amener à intérioriser,
assimiler les normes, valeurs et dispositions essentielles du projet de
société auxquelles le parti est
attaché»118
Ainsi, c'est à travers un effort continu d'assurer
l'équilibre des différentes opinions qui rythment la vie
socio-politique nationale que les citoyens pourront accéder à
l'information nécessaire pour leur épanouissement politique.
B- L'éducation au mode compétitif de
dévolution du pouvoir
L'éducation à la citoyenneté
démocratique pourrait se définir comme toute action
éducative (formelle, non formelle ou informelle) permettant à un
individu d'agir en tant que citoyen actif et responsable. Une telle
éducation permettrait aux citoyens de participer à la
construction d'un véritable Etat démocratique dont l'un des
piliers est l'alternance au pouvoir.
Pour ce faire, il importe de donner aux citoyens les moyens de
s'affranchir des pratiques obstructives à la démocratie tel que
le culte du chef qui constitue un blocage à l'alternance et un motif
suffisant à la non-participation d'une frange de la population.
118 LOADA (A.M.G) et IBRIGA (L.M), op. cit, p.286.
50
Aussi, conviendrait-il de mettre en oeuvre une
éducation civique des populations, des campagnes de sensibilisation et
d'alphabétisation à travers des programmes d'éducation non
formelle. A cet effet, il est question d'expliquer les valeurs fondamentales,
l'importance et les vertus que recouvre la notion de citoyen notamment ses
droits et devoirs électoraux et la liberté dont il dispose quant
au choix politique qu'il peut opérer.
La réussite d'une telle oeuvre incombe à tous
les acteurs de la vie politique et sociale. Ainsi, si les partis et formations
politiques ont pour rôle de contribuer à l'encadrement politique
et idéologique de leurs militants, les organisations de la
société civile ainsi que tous les leaders d'opinion doivent les
appuyer quotidiennement. Les organisations de la société civile
doivent aussi sensibiliser l'opinion publique sur l'importance de l'existence
d'une opposition et de son acceptation. C'est, d'ailleurs, ce à quoi
s'attèle le CGD dont il convient de soutenir l'action.
En outre, l'éducation citoyenne vise à faire
comprendre au citoyen qu'il est libre et peut librement choisir telle ou telle
idéologie défendue par un parti politique et voter pour son
candidat ou parti de choix, sans aucune répercussion fâcheuse
ultérieure. Ainsi, qu'il s'agisse des sociétés à
pouvoir centralisé ou non, l'autorité du chef traditionnel et/ou
de la famille ne doit pas continuer à influencer le choix politique, ni
la participation du citoyen. Les citoyens doivent être également
à mesure de distinguer le pouvoir traditionnel détenu des
ancêtres qui ne peut être soumis à compétition
ouverte du pouvoir politique moderne qui est conquis à l'issue
d'élections démocratiques, pluralistes et concurrentielles. Les
élections ne doivent en aucun cas consister en une simple
légitimation extérieure du pouvoir.
En définitive, l'ensemble des acteurs ont pour mission
essentielle de travailler à rassurer le citoyen afin qu'il ait une
participation utile et efficace. Il y va de la réussite du
système démocratique qu'il importe de renforcer par la culture de
la responsabilité politique.
Paragraphe II : La culture de la responsabilité
politique
Le système politique doit reposer sur des
mécanismes qui encouragent une bonne participation du public aux
consultations électorales et à la formation de la
représentation politique. Pour cela, il convient de mettre un accent
particulier sur l'encadrement politique des populations d'une part (A) et
d'autre part, de rapprocher l'élu du citoyen (B).
51
A- L'encadrement politique des populations
L'encadrement politique des citoyens est une fonction
consacrée par la Constitution du 11 juin 1991 qui dispose en son
article-13 que les partis et formations politiques
«concourent à l'animation et à l'éducation du
peuple ainsi qu'à l'expression du suffrage». Cette
consécration suprême place les partis et formations politiques au
centre de l'activité et de la représentation politiques. Ils ont
la mission de concourir toujours à la formation de la volonté
générale en ce sens qu'ils influencent, orientent ou guident
l'opinion grâce aux débats qu'ils provoquent. Ces débats
permettent à leurs militants de base de se prononcer sur la ligne
politique et idéologique du parti. Les débats sont censés
prendre en compte les attentes réputées émaner de la
société, qu'il s'agisse d'exigences formulées ou
«d'insatisfactions et d'espérances polymorphes,
informulées, fluides, auxquelles les partis vont donner un contenu
explicite»119. Ainsi, la prise en compte des attentes
sociales des populations participe à l'émergence d'une
responsabilité politique chez les citoyens.
Cependant, force est de constater que la quasi-totalité
des partis et formations politiques au Burkina Faso résument leur
rôle à l'expression du suffrage. A titre illustratif, seuls 47
partis politiques des 126 que comptait le pays, à la veille des
élections législatives de 2007, ont présenté des
listes120. Ce qui dénote une quasi-inexistence de ces partis
sur la scène politique. C'est seulement lors des échéances
électorales qu'ils font leur apparition et demeurent, à
l'exception de quelques uns, méconnus du grand public; alors que ce sont
les partis politiques qui doivent susciter et maintenir l'intérêt
des populations pour le processus électoral.
Pour l'instauration d'une démocratie véritable,
les partis politiques doivent assumer pleinement la mission qui leur est
dévolue par la Constitution (art.13). Ils doivent développer et
mener des activités de sensibilisation et de formation sur le
militantisme en direction du public et plus particulièrement de la
jeunesse.
Les partis politiques, en tant qu'organisations, doivent
également être des vecteurs de l'intégration sociale en
favorisant, par le biais de leur doctrine, programmes ou thèmes de
campagne, la prise de conscience collective et le vote comme l'expression d'une
appartenance sociale.
119 BRAUD (Ph.) Sociologie politique,
6ème éd, Paris, LGDJ, 2002, p.429
120 CGD Info, N°008/2009, p.02.
52
Par ailleurs, il importe d'envisager la rationalisation du
paysage partisan. Ceci, à l'effet de favoriser la constitution de
grandes formations politiques solidement implantées, à vocation
majoritaire et ayant un poids politique et une image publique beaucoup plus
forte en raison du nombre de leurs électeurs et de l'importance des
mandats qu'ils détiendraient. Le système partisan doit donc
être bâti autour de grandes formations qui alternent au pouvoir
à l'issue d'un processus électoral transparent. Il s'agira ainsi
de faire en sorte que les élections soient pourvues d'enjeux
véritables avec des stratégies politiques de séduction des
électeurs, axées non pas sur des promesses électoralistes
mais sur des projets de société et des programmes de gouvernement
à la fois crédibles et durables.
Du reste, si les partis et formations politiques doivent
s'attacher à faire du citoyen, libre et responsable, la base de
l'édifice démocratique, il leur faut également savoir
créer une proximité entre leurs élus et les citoyens;
question d'établir une confiance entre ces deux maillons essentiels de
la démocratie.
B- La proximité entre citoyens et élus
La compétence politique, nécessaire à une
participation démocratique efficiente, ne peut produire ses pleins
effets que dans le cadre d'un espace public d'échanges entre gouvernants
et gouvernés.
En effet, la pleine citoyenneté nécessite,
au-delà des formes traditionnelles de participation politique propres
à la démocratie représentative, la création et le
développement d'un espace public d'échanges entre citoyens et
élus. Pourtant, à l'observation, le paysage politique et
institutionnel burkinabè paraît dépourvu d'un tel espace.
L'une des rares occasions qui est offerte aux citoyens et aux élus
d'échanger sur les affaires de la république fut le sporadique
forum Assemblée Nationale/Société civile. Alors que, comme
l'a si bien remarqué Philippe BRAUD121, «il ne
suffit pas, en démocratie, que les gouvernés soient
représentés, il faut encore qu'ils le ressentent. C'est là
un élément important de la légitimité du
régime politique, voire de son efficacité sociale».
A cet égard, il apparaît que la
représentation proportionnelle ne semble pas favoriser de rapports
étroits entre l'élu ou le candidat et les citoyens. En effet,
elle distend les liens des élus avec leurs circonscriptions dans la
mesure où ils savent qu'ils ont davantage intérêt
à
121 BRAUD Ph, op, cit, p 355
53
développer leur loyalisme plus envers la direction de
leur parti qu'envers leurs électeurs122.
Les élus issus d'un mode de scrutin plurinominal ont
peu d'attaches avec les citoyens, surtout si la circonscription
électorale est particulièrement étendue. Tel est le cas
des élus issus de la liste nationale aux élections
législatives burkinabè123.
La sélection des candidats qui dépend des
états-majors des partis et formations politiques est parfois plus
importante que l'élection elle-même124. Les élus
dans ce cas n'ont pas de raisons décisives de se mettre
intensément à l'écoute des électeurs. L'important
est surtout de conserver des titres de mérite ou faire preuve de
subordination à la direction du parti qui les a fait
élire125.
Pour renouer avec le citoyen, il importe, d'abord, d'accorder
une place de choix aux militants de base dans le processus de sélection
des candidats à toute élection. Les partis et formations
politiques devraient recourir à des assemblées primaires ouvertes
à des non-adhérents qui participent au processus de
sélection. La direction du parti n'aurait pour prérogative que la
confirmation des investitures localement effectuées.
Ensuite, le citoyen doit avoir l'opportunité d'entamer
un véritable débat démocratique face au candidat ou
à l'élu. Cela peut se faire par le canal des médias et
dans une moindre mesure par les conférences et/ou
causeries-débats organisées par les directions de partis. Ce qui
permettrait d'établir une communication fluide entre la direction du
parti et sa base sociale.
Enfin, la mise en place de mécanismes
d'imputabilité politique permettra de mettre en avance la
responsabilité des gouvernants et, partant, d'entraîner une large
participation des citoyens. C'est seulement à ce prix que peuvent
être préservés les acquis démocratiques
enregistrés depuis l'adoption de la 4ème
république, en 1991 et le processus de consolidation de la
démocratie.
122 LOADA A.M.G, «Le mode de scrutin », in
La réforme du système électoral au Burkina Faso,
Ouagadougou, IDEA, 1999, p.81.
123 Vingt et un (21) des cent onze (111) sièges de
députés à l'Assemblée Nationale sous la
3ème législature puis quinze (15) sous l'actuelle,
sont pourvus sur la liste nationale.
124 En réalité, dans la plupart des cas les
questions d'investitures sont réglées à l'exclusion des
adhérents.
125 A ce propos, les motifs d'invalidation de listes du PAI pour
les législatives de mai 2007 par la CENI, sont illustratifs.
54
CONCLUSION
Après deux expériences
éphémères de multipartisme, le Burkina Faso, à la
faveur de la restauration démocratique en 1991, a organisé sans
discontinuité plusieurs élections concurrentielles. L'analyse de
cette série d'élections laisse apparaître un taux de
participation peu élevé. Les taux de participation officiellement
présentés deviennent insignifiants dès qu'ils sont
rapportés au potentiel électoral existant. Ces taux de
participation varient d'un scrutin à un autre et d'un type de scrutin
à un autre.
Ainsi, il ressort des résultats de la participation que
l'électorat burkinabè se mobilise un peu plus aux scrutins
référendaires avec, toutefois une baisse tendancielle (75,92% en
1970 ; 71,45% en 1977 et 48,78% en 1991).
Cette mobilisation fléchit davantage au cours des
scrutins concurrentiels. La mobilisation aux scrutins présidentiels
paraît plus conséquente par rapport à celle
enregistrée au cours des scrutins de types proportionnels.
Sous la 4ème république, le niveau de
participation aux scrutins législatifs et présidentiels a
régressé après le premier renouvellement de mandats des
Députés en 1997 et du Président du Faso en 1998.
Avec la communalisation intégrale, le niveau de
participation aux consultations locales continue de décroître
puisqu'il passe de 48,38% en 1995 à 28,69% en 2006.
Le constat de la faible participation des citoyens aux
consultations électorales s'explique par deux types de facteurs
complémentaires. Ainsi, sont constitutifs d'obstacles à la
participation, la pauvreté et le manque de démocratie sociale
d'une part et d'autre part, le manque d'alternative politique et d'enjeux aux
scrutins électoraux.
Cette forte réserve de l'électorat dont les
causes sont connues n'est pas sans danger pour la consolidation du
système démocratique burkinabè car elle pose le
problème de la légitimité que doit conférer une
élection à une l'autorité politique, d'autant plus que la
démocratie repose sur l'expression de la volonté populaire. S'il
est vrai que le constituant burkinabè ne conditionne pas la validation
d'un scrutin par l'atteinte d'un seuil minimum de taux de participation, la
participation d'une minorité de citoyens peut constituer une menace
à la stabilité sociale.
L'expérience a montré, de manière
éloquente, qu'une dégradation profonde et durable d'un
système politique aboutit à toutes les aventures, surtout
militaires qui marquent
55
d'ailleurs leur retour en Afrique occidentale. En
témoignent les exemples guinéens, mauritanien, nigérien ou
ceux caractérisés par les crises prolongées au Togo ou en
Côte d'Ivoire.
D'où la nécessité de renforcer le
processus électoral par la création d'un environnement
électoral favorable, la rationalisation du paysage partisan afin de
susciter une meilleure participation des citoyens. A cet effet, partis
politiques, organisations de la société civile, acteurs de
l'éducation mais aussi citoyens ont tous une responsabilité dans
la conquête d'une participation citoyenne.
Les élections étant essentielles en
démocratie, il apparaît nécessaire d'éviter qu'elles
servent seulement à légitimer le pouvoir des élites
gouvernementales pour les besoins de respectabilité internationale.
En effet, les élections doivent rester un moyen par
lequel le peuple confère le pouvoir. Ce faisant, convient-il de
redoubler d'efforts et surtout d'engagement pour parvenir à inculquer
les réflexes démocratiques à la majorité des
citoyens. Lorsqu'il s'agit de la plus grande majorité de la population
qui s'illustre par son désintérêt au processus
électoral, cela doit préoccuper aussi bien la classe politique
que la société civile. Déjà, dans la perspective de
la prochaine élection présidentielle, la CENI n'aura obtenu,
à l'issue de l'opération de recensement électoral, que
l'inscription de 3.330.792 citoyens sur les listes électorales, sur
environ sept millions de Burkinabè en âge de voter, soit un taux
d'inscription de 47,58%. N'est-ce pas là un signal de
désapprobation aux intentions plus ou moins affichées du parti au
pouvoir de lever la clause limitant le nombre de mandats présidentiels
consécutifs à deux? Il s'agit du plus faible taux d'inscription
dans l'histoire constitutionnelle du Burkina Faso et les partisans de la
non-limitation du nombre de mandats doivent en tenir compte, dans le
débat autour de l'article 37 de la Constitution.
Au delà de la faible représentativité des
élus, ne se trouve-t-il pas posée la question de
l'efficacité de la démocratie représentative dans un pays
où la majorité de la population reste encore attachée aux
valeurs culturelles et traditionnelles qui véhiculent des logiques de
dévolution du pouvoir en inadéquation avec le principe du
suffrage universel?
Pour rendre le processus démocratique
irréversible, il convient de veiller à ce qu'aucune fracture ne
s'établisse entre le peuple et les institutions qui doivent
répondre à ses attentes. Dans cette perspective est-il permis
d'espérer que l'institution d'un chef de file de l'opposition
contribuera à relever le niveau de participation électorale au
Burkina Faso ?
56
Bibliographie
Ouvrages
- ARDANT (Ph.), Institutions politiques et droit
constitutionnel, 11ème éd, Paris, LGDJ, 1999, 606
p.
- BADO (L), Quel modèle de démocratie pour
l'Afrique ? Ouagadougou, FDSP, 1998, 232p.
- BRAUD (Ph.), La sociologie politique, Paris, LGDJ,
6ème édition, 2002, 680p.
- COULIBALY (A.L), La démocratie prise en otage par les
élites, Paris, L'Harmattan, 2006, 278p.
- HAMON (F) & TROPER (M), Droit constitutionnel,
28ème éd, Paris, Dalloz, 2003.
- IBRIGA (L.M) GARANE (A), Constitutions burkinabé:
textes et commentaires, Namur, Bollard,
2001, 174 p.
- LAMIZANA (S), Sur la brèche trente années
durant (Mémoires T2), Paris, Jaguar, 1999, 537p.
- LOADA (A.M.G) & IBRIGA (L.M), Droit constitutionnel et
institutions politiques, Ouagadougou,
Presses Africaines, 2007, 655 p.
- MADIEGA (G) & NAO (O) (sous la direction), Burkina Faso:
cent ans d'histoire (1895-1995), T1,
Paris, Karthala, 2003, 2169 p.
- MUASE (C.K), Syndicalisme et démocratie en Afrique:
l'expérience du Burkina Faso (1936-
1988), Paris, Karthala, 1990, 252p.
- OTAYEK (R) & Als, Le Burkina Faso entre
révolution et démocratie (1983-1993) : ordre politique
et changement social en Afrique subsaharienne, Paris,
Karthala, 1996, 383 p.
- PALM (D.J.M) et HIEN (P.C) (sous la direction), La
représentation politique au Burkina Faso,
Ouagadougou, DIST-INSS/CNRST, 2009, 271 p.
- YE (B.A), Burkina Faso: les fondements politiques de la
4ème République, Ouagadougou,
Presses Universitaires de Ouagadougou, 1995, 266p.
Mémoires
- BAGORO (B.R), Démocratie et processus
électoral au Burkina Faso, Ouagadougou, FDSP, 1999,
87p.
- BORE (G), Le corps électoral voltaïque sous les
régimes constitutionnels de la 1ère, 2ème et
3ème république, Ouagadougou, ESD, 1983, 54p.
- DA (D), Essai d'analyse de la portée des
élections dans un Etat d'Afrique noire: cas de la Haute
Volta, LOME, 1981, 107p.
- KABORE (R), Réflexion sur la multiplication des
partis et formations politiques au Burkina Faso, Ouagadougou, ENAM, 2007,
50 p.
- KABORE (S.A), La participation électorale,
Ouagadougou, UO, UFR/ SJP, 2003, 50p
- SAWADOGO (A), La participation citoyenne non
conventionnelle, Ouagadougou, UO, UFR/ SJP, 2004, 49p.
- YAMBA (D.H), Régimes constitutionnels et Etats
d'exception au Burkina Faso, ENAM, 1992, 112p.
57
RAPPORTS
- IBRIGA (L.M) & TOE (M.C), Rapport d'étude sur les
obstacles au libre choix électoral au Burkina Faso, Ouagadougou,
GERDDES, septembre 2007, 58p.
- International, IDEA, La réforme du système
électoral au Burkina Faso : Rapport de séminaire sur le
dialogue pour le développement démocratique, Ouagadougou,
1999, 148p.
- LOADA (A.M.G) (sous la direction), Etat de la gouvernance au
Burkina Faso: description des résultats d'une enquête par
sondage, Ouagadougou, CGD, 2007, 140p.
- ADEPAC/PNUD, Citoyenneté et participation
citoyenne, Ouagadougou, décembre 2008.
- CGD, L'alternance et les règles du jeu
démocratique au Burkina Faso, Ouagadougou, 2009, 86p. - CNOE,
Rapport de synthèse de l'organisation des élections
législatives du 11mai 1997, Ouagadougou, 1997.
- CENI, Rapport général de l'élection du
Président du Faso du 13 novembre 2005, Ouagadougou, 2005, 19 p.
- CENI, Rapport législatives du 06 mai 2007,
Ouagadougou, 2007, 84 p.
Articles de revues et de journaux
- LOADA (A.M.G), La limitation des mandats présidentiel
en Afrique, Revue électronique, afrilex n°
03/2003, 45p.
-LOADA (A.M.G), Réflexion sur la société
civile en Afrique: le Burkina de l'après ZONGO, in
«politique africaine», N°76, Paris,
Karthala, 1999, p 136-152.
- OTAYEK (R), Des élections «comme les
autres», in «politique africaine»,
N°69, Paris, Karthala,
1998, p 62-74.
- GUISSOU (L.B), La troisième présidentielle au
Burkina Faso (13 Novembre 2005) sous la 4ème
République: est-ce la bonne démocratie pour
l'Afrique? Ouagadougou, CNRST, 2006, 10p.
- CGD Info, Partis politiques et système de parties au
Burkina Faso, N°008/2009.
- CGD Info, La participation électorale au Burkina
Faso, N°005/2009.
- Sidwaya N°6550 du 13 au 15 novembre 2009.
- Indépendant N°850 & 851du 22 au 29
décembre 2009.
- Indépendant n°864 du 30 /03/2010.
Documents et textes officiels
- Constitution du 11 juin 1991.
- J.O.R.H.V: 1970, 1977, 1978.
- J.O.B.F: 1991, 1992.
- La loi N°14-2001/AN du 03 juillet 2001, portant code
électoral au Burkina Faso, ensembles ses
modificatives.
58
Table des matières
AVERTISSEMENT I
DEDICACE II
REMERCIEMENTS III
INTRODUCTION 2
TITRE I: ANALYSE DIAGNOSTIQUE DE LA PARTICIPATION
ELECTORALE. 6
Chapitre I: Le niveau de la participation
électorale 6
Section I: Le niveau de participation électorale
dans les scrutins majoritaires 6
Paragraphe I: Au cours des scrutins référendaires
6
A- Les référendums de 1970 et 1977 6
B- Le référendum de 1991 8
Paragraphe II: Au cours des scrutins majoritaires
à deux tours 10
A- Les élections présidentielles sous la
3ème République 10
B- Les élections présidentielles sous la
4ème République 11
Section II: Le niveau de participation
électorale dans les scrutins proportionnels 13
Paragraphe I: Au cours des élections
législatives 13
A- Les élections législatives sous la
2ème et la 3ème République
13
B- Les élections législatives sous la
4ème République 15
Paragraphe II: Au cours des élections
municipales 17
A- Les élections municipales de 1995 et 2000
17
B- Les élections municipales de 2006
18
Chapitre II: Les déterminants de la
participation électorale 20
Section I: Les règles favorables à la
mobilisation électorale 20
Paragraphe I: L'existence d'un cadre normatif et
institutionnel favorable 20
A- Le principe de la liberté de participation
20
B- Le consensus politico-institutionnel 21
Paragraphe II: Le recours aux règles non
conventionnelles 22
A- L'intérêt pour la politique
23
B- La mobilisation des réseaux communautaires et
clientélistes 24
Section II: Les obstacles à la participation
électorale 25
Paragraphe I: Les obstacles socio-économiques
26
A- La pauvreté et le coût de la
participation 26
B- La négation de la dimension sociale de la
démocratie 27
Paragraphe II: Les obstacles politiques
28
A- Le manque d'alternative politique 28
B- L'absence d'enjeux des scrutins 30
TITRE II: LA PORTEE DE LA FAIBLE PARTICIPATION ELECTORALE
32
Chapitre I: Les implications de la faible
participation électorale 32
Section I: Les implications sur le pouvoir politique
32
Paragraphe I: L'affaiblissement de la
légitimité politique et institutionnelle. 32
A- La faible légitimité des élus
32
B- Le non respect de l'autorité politique
33
Paragraphe II: L'accroissement de
l'instabilité sociale 34
A- L'émergence de la contestation sociale
34
B- L'émergence d'une opposition informelle
35
59
Section II: Les implications sur l'ancrage de la
gouvernance démocratique 37
Paragraphe I: L'hypothèque de l'alternance
démocratique 37
A- L'hégémonie de la classe dirigeante
37
B- La clôture du jeu électoral
38
Paragraphe II: La non-effectivité du principe
de la majorité démocratique 39
A- L'exclusion des citoyens du processus
décisionnel 39
B- Les entraves à l'enracinement de la
gouvernance locale 40
Chapitre II: Les conditions d'une bonne participation
électorale. 42
Section I: La création d'un environnement
électoral favorable 42
Paragraphe I: La crédibilisation du jeu
électoral 42
A- La nécessaire effectivité de
l'indépendance des institutions électorales 42
B- La garantie de la sincérité des
scrutins 44
Paragraphe II: L'établissement d'un
système compétitif 45
A- L'ouverture du jeu électoral 45
B- Le renouvellement du personnel politique
47
Section II: L'approfondissent de la culture
démocratique 48
Paragraphe I: La promotion d'une citoyenneté
active 48
A- La vulgarisation de l'information politique
48
B- L'éducation au mode compétitif de
dévolution du pouvoir 49
Paragraphe II: La culture de la responsabilité
politique 50
A- L'encadrement politique des populations
51
B- La proximité entre citoyens et élus
52
CONCLUSION 54
BIBLIOGRAPHIE 56
OUVRAGES 56
MEMOIRES 56
RAPPORTS 57
TABLE DES MATIERES 58
ANNEXE 1: TABLEAUX RECAPITULATIFS DE LA
PARTICIPATION AUX SCRUTINS. V
ANNEXE 2: REPRESENTATIONS GRAPHIQUES DES NIVEAUX
DE PARTICIPATION VII
V
Annexe 1: Tableaux récapitulatifs de la
participation aux scrutins.
1-Tableau récapitulatif de la participation aux
scrutins référendaires
Années
|
Potentiel électoral
|
Nbre d'inscrits
|
TI
|
Nbre de votants
|
Suff. Exp.
|
Bulletins nuls
|
TP
|
TPR
|
Bulletins favorables
|
1970
|
|
2.351.258
|
|
1.815.271
|
1.782.761
|
22.140
|
75,92%
|
|
98,41%
|
1977
|
|
2.759.924
|
|
1.955.105
|
1.923.923
|
31.182
|
71,45%
|
|
98,70%
|
1991
|
4.500.000
|
3.403.451
|
75,63%
|
1.656.519
|
1.618.910
|
39.529
|
48,65%
|
36,89%
|
93%
|
2-Tableau récapitulatif du niveau de participation aux
scrutins présidentiels.
Années
|
Potentiel électoral
|
Nbre d'inscrits
|
TI
|
Nbre de votants
|
Suff. Exp.
|
Bulletins nuls
|
TP
|
TPR
|
1978 1er Tour
|
|
2.889.312
|
|
1.029.404
|
1.000.788
|
28.616
|
35,19%
|
|
2nd
Tour
|
|
2.972.526
|
|
1.279.008
|
1.255.841
|
23.167
|
43,55%
|
|
1991
|
4.500.000
|
3.466.548
|
77,02%
|
870.707
|
750.473
|
120.234
|
25,28%
|
19,28%
|
1998
|
5.000.000
|
4.210.134
|
84,52%
|
2.361.294
|
2.264.293
|
97.001
|
56,09%
|
47,39%
|
2005
|
6.000.000
|
3.924.328
|
65,40%
|
2.262.899
|
2.066.270
|
196.629
|
57,66%
|
37,71%
|
3-Tableau récapitulatif du niveau de participation
électorale aux scrutins législatifs.
Années
|
Potentiel électoral
|
Nbre d'inscrits
|
TI
|
Nbre de votants
|
Suff. Exp.
|
Bulletins nuls
|
TP
|
TPR
|
Nbre de partis en compétition
|
1970
|
|
2.398.688
|
|
1.157.039
|
1.112.883
|
43.814
|
48,24%
|
|
08
|
1978
|
|
2.927.416
|
|
1.121.799
|
1.070.304
|
51.495
|
38,32%
|
|
07
|
1992
|
4.500.000
|
3.564.510
|
79,21%
|
1.256.381
|
1.215.419
|
40.962
|
35,24%
|
27,91%
|
27
|
1997
|
5.000.000
|
4.985.352
|
99,70%
|
2.220.161
|
2.045.350
|
174.811
|
44,53%
|
44,40%
|
13
|
2002
|
5.490.800
|
2.935.285
|
53,03%
|
2.223.838
|
1.743.964
|
154.581
|
60,69%
|
32,19%
|
30
|
2007
|
6.539.000
|
4.296.982
|
65,71%
|
2.437.544
|
2.259.263
|
178.279
|
56,73%
|
37,27%
|
47
|
vi
4-Tableau récapitulatif de la participation aux
élections communales.
Années
|
Potentiel électoral
|
Nbre d'inscrits
|
TI
|
Nbre de votants
|
Suff. Exp.
|
Bulletins nuls
|
TP
|
TPR
|
Nbre de partis en compétition
|
1995
|
750.000
|
585.000
|
69,50%
|
362.876
|
349.998
|
12.878
|
69,61%
|
48,38%
|
18
|
2000
|
1.139.959
|
546.614
|
47,95%
|
368.517
|
360.889
|
7.628
|
66,02%
|
31,65%
|
25
|
2006
|
6.516.000
|
3.807.424
|
58,48%
|
1.870.017
|
1.755.083
|
114.934
|
49,12%
|
28,69%
|
73
|
5-Tableau récapitulatif de la participation
électorale sous la 4ème république.
Années
|
Potentiel électoral
|
Nbre d'inscrits
|
TI
|
Nbre de votants
|
Suffrages exprimés.
|
Bulletins nulls
|
TP
|
TPR
|
1991-Réf
|
4.500.000
|
3.404.451
|
75,63%
|
1.656.519
|
1.618.910
|
39.529
|
48,65%
|
36,89%
|
1991-Prés
|
4.500.000
|
3.466.548
|
77,02%
|
870.707
|
750.473
|
120.234
|
25,12%
|
19,28%
|
1992-Lég
|
4.500.000
|
3.564.510
|
79,21%
|
1.256.381
|
1.215.419
|
40.962
|
35,24%
|
27,91%
|
1995- Muni
|
750.000
|
585.000
|
69,50%
|
362.876
|
349.998
|
12.878
|
69,61%
|
48,38%
|
1997-Lég
|
5.000.000
|
4.985.352
|
99,70%
|
2.220.161
|
2.045.350
|
174.811
|
44,53%
|
44,40%
|
1998-Prés
|
5.000.000
|
4.210.134
|
84,52%
|
2.361.294
|
2.264.293
|
97.001
|
56,09%
|
47,39%
|
2000-Muni
|
1.139.959
|
546.614
|
47,95%
|
368.517
|
360.889
|
7.628
|
66,02%
|
31,65%
|
2002-Lég
|
5.490.800
|
2.935.285
|
53,03%
|
2.223.838
|
1.743.964
|
154.581
|
60,69%
|
32,19%
|
2005-Prés
|
6.000.000
|
3.924.328
|
65,40%
|
2.262.899
|
2.066.270
|
196.629
|
57,66%
|
37,71%
|
2006-Muni
|
6.516.000
|
3.807.424
|
58,48%
|
1.870.017
|
1.755.083
|
114.934
|
49,12%
|
28,69%
|
2007-Lég
|
6.539.000
|
4.296.982
|
65,71%
|
2.437.544
|
2.259.263
|
178.279
|
56,73%
|
37,27%
|
Légende:
lég= législatives; muni= municipales;
prés= présidentielle; réf=
référendum
6-Evolution du nombre de candidats et de partis politiques aux
élections législatives
Années
|
1978
|
1992
|
1997
|
2002
|
2007
|
|
Nombre de candidats
|
312
|
957
|
569
|
3540
|
3748
|
Nombre de partis en compétition
|
7
|
27
|
13
|
30
|
47
|
Nombre de partis siégeant à
l'AN
|
5
|
10
|
4
|
15
|
13
|
vii
Annexe 2: Représentations graphiques des niveaux
de participation
1-Graphique des inscriptions sur les listes
électorales
2-Graphique de la participation des inscrits
100 90 80 70
60 50 40 30 20
10 0
%
|
|
|
|
|
69,61 66,02
|
|
TP
56,09 56,73
|
|
44,53
|
|
35,24
|
25,12
|
|
48,65
|
60,69 57,66
49,12
|
1991-
Réf
1991-
Prés
1992-
Lég
1995-
Muni
1997-
Lég
1998-
Prés
2000-
Muni
2002-
Lég
2005-
Prés
2006-
Muni
2007-
Lég
viii
3-Graphique de la participation réelle au Burkina Faso.
% TPR
1 0 0
9 0
7 0
6 0
3 1 ,6 5 3 2 ,1 9
3 7 ,7 1
3 7 ,2 7
3 6 ,8 9
1 9 9 1 -
Ré f
1991-
Prés
1 9 9 2 -
L é g
1 9 9 5 -
M uni
1 9 9 7 -
L é g
1998-
Prés
2 0 0 0 -
M uni
2 0 0 2 -
L é g
2005-
Prés
2006-
Muni
2 0 0 7 -
L é g
4 0
3 0
2 0
1 0
0
1 9 ,3 0
2 7 ,9 1
2 8 ,6 9
8 0
1991-
1992-
1995-
1997-
2000-
2002-
2006-
2007-
Réf
Lég
Lég
Lég
Lég
Muni
Muni
Muni
1991-
Prés
1998-
Prés
2005-
Prés
5 0
4 8 ,3 8 4 4 ,4 0 4 7 ,3 9
TI TP TPR
%
100
90
80
70
60
50
40
30
20
10
0
4-Synthèse des graphiques de la participation
électorale sous la quatrième république
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