I.2.2.2. Distribution des mangroves en Afrique
On trouve des mangroves dans 19 pays de l'Afrique de l'Ouest,
de la Mauritanie au nord jusqu'à l'extrême sud de l'Angola. Le
Nigeria comprend les écosystèmes de mangroves les plus vastes
constituant quelque 35 % de la couverture totale de la sous-région
(Anonyme, 2006c). Les conditions régionales permettent aux mangroves de
pousser à l'intérieur des terres sur au moins 100 km, en raison
des fortes influences des marées sur les fleuves comme la Gambie, le
Sine-Saloum au Sénégal, la Casamance, Guinée-Bissau, le
fleuve Niger et les fleuves Camerounais. De la même manière,
là où il y a de fortes influences fluviales vers les mers, les
îles affectées par des afflux d'eau douce procurent un
environnement favorable à la croissance des mangroves; par exemple
l'Archipel Bijagos de la Guinée-Bissau (Anonyme, 2002c).
I.2.2.3. Distribution des mangroves au Cameroun
Selon la FAO, la mangrove du Cameroun couvrait une superficie
totale de 472 500 ha en 1980 (Mbog, 2005). Elle couvrait une superficie
d'environ 2700 km² en 1977 selon Valet (1973). Jusqu'en 2002, elle
était de 250 000 ha. Cette mangrove est très diversifiée
et on la trouve principalement organisée en trois grands ensembles (fig.
2), à savoir :
- le long de l'estuaire du Rio del Rey et à la
frontière avec le Nigéria (fleuves Akpa, Yafe, Ndian et Meme),
ci-après appelée « la mangrove de l'estuaire du Rio del Rey
» qui couvre 54 % de la surface des mangroves camerounaises;
- dans l'estuaire du Cameroun (fleuves Bimbia, Mungo, Wouri et
Dibamba) autour de la ville de Douala et Limbé, ci-après
appelée « la mangrove de l'estuaire du Cameroun » qui
représente 45 % de la surface des mangroves;
- au sud du pays, à la frontière avec la
Guinée équatoriale, constituée de petits peuplements
présents le long de la côte sud de l'embouchure des fleuves du
Sanaga, du Nyong, du Lokoundjé et du Ntem (dont autour de la ville de
Campo), ci-après appelée « la mangrove de l'estuaire du Rio
Ntem » qui couvre seulement 1 % de la surface des mangroves.
Selon Ajonina (2008), la superficie couverte par les mangroves
au Cameroun n'est pas bien connue, les estimations proviennent de sources
diverses et se présentent ainsi, 250 000 ha (Anonyme, 1995) ;
227 500 ha (Anonyme, 2002b) et plus récemment 195 700 ha par le
PNUE (Anonyme, 2007b) et cela représente un déclin de 28% par
rapport aux estimations faites dans les années 1980.
Fig. 4. Distribution des mangroves
au Cameroun (en violet). Source : Mbog (2005)
I.2.2.4. Ecologie des mangroves
L'écosystème mangrove présente des
particularités écologiques importantes qui se traduisent par une
adaptation de la végétation aux conditions très
sélectives de l'environnement. Les contraintes sont essentiellement
liées aux caractéristiques des sols constitués de
sédiments meubles et soumis à de brutales variations salines et
d'anoxie. Les mangroves sont hautement adaptées à
l'environnement côtier grâce à leurs racines respiratoires
aériennes, à support extensifs et à contreforts, leurs
feuilles excrétrices de sel et la viviparité de leurs propagules.
Ces adaptations varient entre les taxons et avec la nature physico-chimique du
milieu (Duke, 1992). Les sols de mangroves sont hydromorphes et salés
car envahis en permanence par les eaux saumâtres. La majorité des
espèces de mangrove exige des températures de l'eau et de l'air
élevées (Chapman, 1977). Pour coloniser ce type de milieu, les
espèces ont dû développer des adaptations morphologiques,
physiologiques et anatomiques (Blasco, 1982). Les plus remarquables adaptations
de ces mangroves sont celles des racines échasses de
Rhizophora, des pneumatophores de Avicennia, des racines qui
émergent du sol et qui ressemblent à des « genoux
humains» d'où leur nom de racines « genoux» de
Bruguiera, Ceriops et Xylocarpus et les racines contreforts
de Xylocarpus et Heritiera (lSME, 1995). Comme beaucoup de
mangroves ont des racines qui ne peuvent pas pénétrer très
loin dans le substrat anaérobique, elles produisent d'abondantes racines
latérales. Leur efficacité est bien illustrée par les
mangroves les plus hautes trouvées en Equateur, qui peuvent atteindre
plus de 60 m de hauteur (Emilio, 1997). Ces racines spécialisées
sont très importantes dans les échanges gazeux des mangroves
vivant dans le substrat anaérobique (Tomlinson, 1986).
Toutes ces espèces sont généralement
vivipares. En outre pour atténuer l'évapotranspiration, les
feuilles de ces espèces présentent une cuticule très
épaisse, lisse et coriace avec de petits poils leurs donnant un aspect
brillant. Les feuilles des mangroves ont des cellules
spécialisées telles que les cellules de tannin des
Rhizophoraceae, des cellules muqueuses de Rhizophora et
Sonneralia, des cellules cristaliferreuses des Rhizophoraceae, des
cellules huileuses de Osbornia (Kathiresan et Bingham, 2001) et des
laticifères de Excoecaria (Tomlinson, 1986).
Les mangroves sont physiologiquement tolérantes aux
concentrations élevées de sels grâce à des
mécanismes qui leur permettent d'obtenir de l'eau douce malgré le
fort potentiel osmotique des sédiments (Bail, 1996). Ainsi les genres
Bruguiera, Ceriops et Rhizophora possédant
des ultrafiltres dans leur système racinaire qui leur permettent de
filtrer le sel dissous dans l'eau. Par contre, le genre Avicennia
possède des cellules spécialisées «les glandes
à sel» excrétant le sel excédentaire qui se
cristallise à la surface des feuilles. Les mangroves diffèrent
également des autres écosystèmes forestiers par le fait
qu'elles reçoivent de grands apports de matières et
d'énergie en provenance du milieu terrestre comme du milieu marin. Elles
montrent un fort degré de diversité structurelle et
fonctionnelle, ce qui les situe parmi les écosystèmes les plus
complexes.
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