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UNIVERSITE DE LOME REPUBLIQUE TOGOLAISE
Faculté des Sciences Economique
Travail-Liberté-Patrie
et de Gestion (FASEG)
Département d'Economie
MEMOIRE
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Mémoire pour l'obtention du Master de Recherche en
Economie Internationale
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DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS DE LA ZONE
FRANC
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Présenté par : Sous la Direction du
Professeur:
Kwami Edem ABBUY Aimé Tchabouré
Gogué
Promotion 2009-2011
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DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
Dédicace
II
A celui en qui j'ai la Vie, le Mouvement et l'Etre
; mon Dieu et Seigneur Jésus-Christ soit toute la
Gloire.
III
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
REMERCIEMENTS
Nous tenons au terme de ce travail, à adresser nos
sincères remerciements au Professeur Aimé Gogué qui
malgré ses multiples préoccupations, n'a ménagé
aucun effort pour assurer un suivi et un encadrement régulier de ce
mémoire. Ses appuis, conseils et encouragements permanents ont
été la clé de l'aboutissement de ce travail.
Nous tenons aussi à adresser nos vifs remerciements et
notre gratitude à tous ceux qui nous ont soutenus durant notre formation
et dans la réalisation de ce mémoire, en l'occurrence :
s Les Professeurs Bigou-Laré, Doyen de
la FASEG ; Anani Mensah, Vice-Doyen de la FASEG ; Ega Agbodji, Chef de
département Economie à la FASEG pour leur engagement sans
réserve à la réussite de cette formation.
s Mes parents surtout ma Maman chérie,
mes frères et soeurs et toute la famille ABBUY pour leur soutien.
s Inès et Beni Johnson-Zigbé pour
leur soutien et leurs prières.
s Monsieur Prosper Dziméyor pour son
grand soutien et ses conseils inestimables durant tout mon parcours
universitaire.
s Docteur Korem pour son soutien dans la
réalisation de ce document.
s Djallo Ezéchiel pour son aide
précieuse et ses conseils dans la rédaction de ce
mémoire.
s Tous mes camarades de la Première
promotion de Master en Economie à l'Université de Lomé
surtout à Karabou Franck qui s'est montré beaucoup plus qu'un
ami.
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
SOMMAIRE
SIGLES ET ABREVIATIONS v
RESUME vi
INTRODUCTION GENERALE 1
PREMIERE PARTIE : DYNAMIQUE DE L'INTERACTION ENTRE
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET
CROISSANCE 6
CHAPITRE I : INTERACTION ENTRE DEVELOPPEMENT FINANCIER ET
CROISSANCE 7
CHAPITRE II : LES DETERMINANTS DU DEVELOPPEMNT FINANCIER
ET LA PRESENTATION DU SECTEUR
FINANCIER DE LA ZONE FRANC 25
DEUXIEME PARTIE : INTERACTION EMPIRIQUE ENTRE
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE
ECONOMIQUE 52 CHAPITRE III :
PERFORMANCES ECONOMIQUES DES PAYS DE LA ZONE
FRANC.................................................53
CHAPITRE IV : EVALUATION EMPIRIQUE DE L'IMPACT DU
DEVELOPPEMENT FINANCIER SUR LA CROISSANCE
EONOMIQUE 54
iv
CONCLUSION 74
V
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
SIGLES ET ABREVIATIONS
BCEAO : Banque Centrale des Etats de
l'Afrique de l'Ouest
BCEAEC : Banque Centrale des Etats de
l'Afrique Equatoriale et du Cameroun
BEAC : Banque des Etats de l'Afrique
Centrale
BRVM : Bourse Régionale des Valeurs
Mobilières
BVMAC : Bourse des Valeurs Mobilières
de l'Afrique Centrale
CEMAC : Communauté Economique et
Monétaire de l'Afrique Centrale
CFA : Communauté Financière
Africaine
IDH : Indice du Développement
Humain
GMM : Méthode des Moments
Généralisés
OCDE : Organisation pour la
Coopération et le Développement Economique
PAZF : Pays Africains de la Zone Franc
PIB : Produit Intérieur Brut
PMI/PME : Petites et Moyennes Industries
/Entreprises
TEN : Taux d'Escompte unique
TEP : Taux d'Escompte
Préférentiel
TPE : Très Petites Entreprises
UEMOA : Union Economique et Monétaire
Ouest-africain
UMOA : Union Monétaire
Ouest-africain
vi
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
LISTE DES TABLEAUX ET GRAPHIQUES
Tableaux
Tableau1 : Répartition des banques par pays membre de
l'UEMOA du 31 décembre 1996 au
31décembre 2007. 42
Tableau 2 : Répartition des banques et
établissements financiers par pays membre de l'UEMOA au
31décembre 2010. 42
Tableau 3 : statistiques bancaires de la CEMAC 44
Tableau 4 : évolution des crédits à
l'économie suivant le terme dans la CEMAC (en milliards de francs
CFA) 45
Tableau 5 : Analyse des garanties exigées pour l'octroi
des prêts 47
Tableau 6 : sources de financement des investissements de la zone
franc 48
Tableau 7 : Taux de croissance du PIB en volume UEMOA (en
pourcentage) 53
Tableau 8 :Taux de croissance du PIB en volume CEMAC (en
pourcentage) 55
Tableau 9 : Estimation sur panel dynamique en zone franc : One
step System GMM 67
Tableau 10 : Estimation sur panel dynamique dans l'UEMOA : One
step System GMM 69
Tableau 11 : Estimation sur panel dynamique dans la CEMAC : One
step System GMM 71
Graphiques
Graphique 1 : Evolution du nombre de banques dans l'UEMOA de
1995-2010 43
Graphique 2. Evolution de l'octroi des crédits à
l'économie selon les termes 45
Graphique 3 : Variation du taux de croissance du PIB en volume
dans l'UEMOA 54
Graphique 4 : Variation du taux de croissance en volume dans la
zone CEMAC 56
vii
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
RESUME
Dans ce mémoire, nous avons étudié la
relation entre le développement financier et la croissance
économique dans les pays africains de la zone franc en tenant compte des
spécificités et de la taille du système financier de
l'UEMOA et de la CEMAC au cours de la période 1960-2010. Les
résultats obtenus à l'aide de la méthode des Moments
Généralisés en panel dynamique (GMM) conduisent à
une influence positive et significative du développement financier sur
la croissance économique dans les pays de la zone franc.
Spécifiquement il a été démontré que l'effet
positif du développement financier sur la croissance se traduit plus par
le canal des systèmes financiers de l'UEMOA que de la CEMAC. De fait,
pour l'UEMOA une relation positive fut trouvée entre
développement financier et croissance économique à travers
les indicateurs de développement financier comme l'agrégat
monétaire M2 rapporté au PIB et le crédit accordé
au secteur privé rapporté au PIB. Dans la CEMAC, les
résultats conduisent à rejeter toute influence du secteur
financier sur la croissance. En clair le système financier de l'UEMOA
parait plus favorable à impacter positivement la croissance que celui de
la CEMAC. Toutefois il apparait un peu plus clair que le développement
financier n'agit que très modestement sur la croissance de la zone
franc.
1
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
INTRODUCTION GENERALE
Le concept de croissance économique semble de plus en
plus difficile à cerner de nos jours. Les économistes
s'interrogent encore aujourd'hui sur ce qu'ils savent de la croissance et sur
la meilleure manière de définir une politique économique.
Toutefois, il n'en demeure pas moins que l'accélération de cette
croissance économique de manière durable demeure encore
aujourd'hui une des préoccupations sinon la grande priorité des
responsables économiques et politiques dans la plupart des pays dans
l'espoir de régresser la pauvreté et de relever le niveau de vie
des populations. S'il est vrai que des politiques économiques favorisant
la croissance économique sont élaborées continuellement,
il demeure encore contraignant aujourd'hui aux décideurs
économiques de déterminer et de choisir de manière
efficiente les instruments pouvant promouvoir et assurer une croissance
économique durable. Pour l'Afrique qui n'est pas en marge du
phénomène, le problème ne se pose différemment.
Selon les théories de la croissance, une croissance économique
durable ne peut s'obtenir que par la capacité à relever les taux
d'accumulation de capital physique et humain et de la capacité à
utiliser les moyens de production plus efficacement. En effet l'accumulation du
capital physique et humain est perçu depuis fort longtemps comme le
facteur clé de la croissance économique (King et Levine 1994,
Easterly 1998). Cependant cette idée relevant du fondamentalisme de
l'accumulation du capital ne pouvait expliquer qu'une petite partie des
écarts de niveau de développement entre les pays. Pour King
(1994), favoriser une croissance économique ne peut être possible
qu'en adoptant une combinaison efficace des facteurs de production et en
prenant en compte le rôle de la combinaison de trois variables à
savoir : l'investissement, le facteur travail et le développement
financier.
Les crises financières qui ont secoué
successivement ces dernières années les différentes zones
du monde ont relancé le débat sur la place que doit occuper la
finance dans la sphère économique d'un pays et ont
renforcé la thèse du rôle prééminent du
secteur financier dans la croissance et la nécessité d'organiser
le mieux possible son fonctionnement. Schaw (1973) définissait
sommairement le développement financier comme « l'accumulation
d'actifs financiers à un rythme plus rapide que l'accumulation d'actifs
non financiers ». Levine (1997) définit le développement
financier en ces termes : « il y a développement financier lorsque
les instruments financiers, les marchés, et les intermédiaires
financiers réduisent, sans toutefois éliminer les coûts
d'obtention de l'information, les coûts d'exécution des contrats
et les coûts de transaction ».
2
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
Alors que plusieurs études ont porté sur la
relation que la finance peut entretenir avec la croissance, il semble de
manière explicite ou implicite qu'un système financier efficient
active le développement économique ou encore qu'un
développement du secteur financier est un instrument efficace de
promotion d'une croissance économique durable. Le développement
des institutions financières pour une croissance économique
rapide est récemment devenu un axiome central de la théorie
économique, renforcé par le soutien apparent des études
empiriques de la relation entre les indicateurs de développement
financier et les taux observés de la croissance. Dès lors la
structure financière est devenue même l'un des
éléments de la stratégie de développement
économique des pays. C'est ainsi que la relation entre le
développement financier et la croissance économique a connu un
renouveau particulier au début des années quatre- vingt dix. La
relation entre finance et croissance a été le sujet d'une grande
attention ces récentes années depuis les études de Bagehot
et de Schumpeter (1911). Schumpeter (1911) atteste que le crédit sert le
développement industriel et qu'il est une condition nécessaire
à la création et au développement de l'innovation et donc
à la croissance économique. Le Rapport sur le
développement dans le monde (1989), publié par la Banque mondiale
présente une étude approfondie du lien entre finance et
croissance économique en insistant sur le développement du
secteur financier dans les pays en voie de développement afin de
renforcer la croissance économique. Pour Gurley et Schaw (1960),
l'innovation financière qui accompagne le développement financier
réduit le risque attaché à l'investissement ainsi que les
coûts de l'intermédiation financière, et stimule
l'épargne. Levine (1997), soutient que les intermédiaires
financiers grâce aux services qu'ils fournissent, stimulent la croissance
économique par l'accumulation du capital et la productivité des
facteurs.
La plupart des travaux réalisés ces
dernières années mettent en relief le fait que d'une
manière générale un système financier
développé stimule le développement économique. Vu
qu'il est largement admis que le développement financier a tendance
à aller de pair avec la croissance, on comprend mieux les politiques de
modernisation du secteur financier menées depuis quelques
décennies dans les économies africaines en général
et en particulier dans les pays de la zone franc. En Afrique subsaharienne et
dans les pays de la zone franc, la poursuite de la croissance se heurte
à un obstacle fondamental : la fragilité des secteurs financiers
dominés essentiellement par les institutions bancaires. Dans un contexte
géographique où les pays africains de la zone franc (PAZF) se
répartissent en union économique et en communauté
économique à savoir l'UEMOA et la CEMAC, il
3
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
apparait selon les études de l'AFD (2007) que le
système bancaire de l'UEMOA fort d'une bourse régionale des
valeurs mobilières (BRVM), d'institutions financières à
compétences régionales et de banques plus riches se
révèle plus diversifié avec une taille globalement deux
fois supérieure à celui de la CEMAC (AFD, 2007). Ainsi donc face
à ce prétendu déséquilibre entre le secteur
financier de l'UEMOA et celui de la CEMAC, la pérennité de la
croissance économique dans les pays africains de la zone franc ne peut
se faire sans la mise en place d'une infrastructure financière sur
laquelle elle peut s'appuyer. Des secteurs financiers solides, profonds et
efficients seraient donc indispensables pour « booster » la
croissance ans la zone.
C'est ainsi qu'après les violentes crises
financières qui les ont affectées dans les années 1980 et
conscients de leur fragilité et de leur faible apport à la
croissance, les systèmes financiers des pays africains de la zone franc
(PAZF) ont subi de profondes restructurations marquées par la
liquidation de certaines institutions financières, la privatisation des
établissements financiers, la fin de la régulation directe du
crédit et des établissements financiers par les Etats, la mise en
place d'autorités de régulation monétaire
indépendantes et l'adoption de réglementations prudentielles plus
contraignantes dans les deux unions économiques et monétaires que
sont l'UEMOA et la CEMAC (Joseph,2002). Ces mesures qui faisaient partie
intégrante du noyau dur des mesures de libéralisation
préconisées par la communauté des bailleurs de fonds ont
été mises en oeuvre sous l'égide des institutions
financières internationales pour que le secteur financier active la
croissance économique dans ces pays. D'après l'Agence
Française de Développement (AFD, 2007), plus de vingt ans
après le déclenchement des crises financières dans les
pays de la zone franc, les performances des établissements financiers de
la zone franc figurent parmi les plus élevées au monde. Si tel
est le cas, le fait que les pays de la zone franc occupent six des dix
dernières places du classement de l'indice du développement
humain (IDH) du PNUD (2006) et que dix d'entre eux soient classés parmi
les PMA conduit à revoir spécifiquement pour les pays de la zone
franc la relation de causalité entre développement financier et
croissance économique. De plus selon la Banque Mondiale (2009) dans le
cadre de ses enquêtes sur le climat de l'investissement ( Investment
Climate Assessment) sur les chefs d'entreprises dans les pays africains de la
zone franc (PAZF), la contrainte financière est systématiquement
citée parmi les principaux goulets d'étranglement freinant leurs
activités économiques. La contrainte financière est
fortement ressentie par les chefs d'entreprises de la PAZF (et africains en
général) que dans les autres régions du monde. Par
ailleurs malgré que les performances des
4
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
établissements financiers de la zone franc figurent
parmi les plus élevés au monde selon l'agence française de
développement (AFD, 2007), le total des bilans des banques de l'UEMOA et
de la CEMAC est inférieur à la somme des actifs de la
première banque sud-africaine (ICA, 2006). Les systèmes
financiers des PAZF seraient-ils si peu profonds à tel point que
malgré leurs performances, ils expliqueraient les piètres
performances économiques des dernières années des pays
africains de la zone franc ?
Aussi la question principale de cette étude dans le
cadre des pays de la zone franc est de déterminer la nature de la
relation entre développement financier et croissance économique
et d'étudier l'impact du développement financier sur la
croissance des pays de la zone franc. La croissance économique dans les
pays africains de la zone franc est-elle tirée par le
développement des systèmes financiers de la zone ?
Cette étude se veut de déterminer la nature de
la relation du développement financier sur la croissance de la zone
franc. Spécifiquement il s'agira :
? De déterminer si le développement financier
stimule la croissance économique dans la zone franc.
? De faire une analyse comparative de l'apport des
systèmes financiers de l'UEMOA et de la CEMAC aux différentes
économies des deux unions et de la zone franc.
Pour atteindre ces objectifs, nous formulons les
hypothèses suivantes :
H1 : il existe une relation positive entre
développement du secteur financier et croissance économique afin
d'étudier son impact réel sur la croissance économique
dans les pays africains de la zone franc.
H2 : l'effet positif du développement financier sur la
croissance dans la zone franc se traduirait plus par le canal du système
financier ouest-africain compte-tenu de sa taille que par celui de la CEMAC.
La vérification de ces hypothèses a conduit
à adopter la méthodologie suivante : la question du rôle du
système financier dans la réalisation de la croissance
économique étant à la fois ancienne et récurrente,
une revue de la littérature s'avère légitime de même
qu'une analyse empirique basée sur les données des variables
financières et des variables macroéconomiques. En effet,
l'analyse repose sur un modèle de croissance reliant le
développement financier à travers les variables
financières à la croissance économique. Cette
représentation permettra
5
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
d'évaluer l'impact du développement financier
sur la croissance économique des pays de la zone franc.
La structure de cette étude s'organise autour de deux
parties :
Dans la première partie on abordera la revue de la
littérature, la présentation et l'historique du paysage financier
de la zone franc. Quant à la deuxième partie, elle s'appesantira
sur l'analyse empirique de l'impact du développement financier sur les
économies de la zone franc, les éventuelles recommandations de
politique de développement financier et les pistes d'amélioration
de son efficacité.
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
6
PREMIERE PARTIE
DYNAMIQUE DE L'INTERACTION ENTRE DEVELOPPEMENT
FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE
7
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
CHAPITRE I
INTERACTION DEVELOPPEMENT FINANCIER ET
CROISSANCE ECONOMIQUE
L'importance du système financier dans la croissance
économique est essentiellement analysée par deux courants
économiques opposés. Il y a d'un côté les auteurs
qui relèvent son impact sur le développement économique
(Schumpeter, 1911) et de l'autre, ceux qui réfutent l'importance de la
relation entre la finance et la croissance économique (Lucas, 1988). La
relation entre développement financier et croissance économique a
été un sujet d'analyse extensive et très débattue
dans la littérature à la suite des travaux conduits conjointement
par Bagehot (1873) et Schumpeter (1911). Depuis les travaux déterminants
de Patrick (1966), le lien développement financier et croissance
économique a été étudié en détail et
Goldsmith (1969) fut le précurseur de l'étude de ce lien.
Dès lors une grande littérature à la fois théorique
et empirique a émergé.
SECTION 1 : CADRE CONCEPTUEL ET FONDEMENTS DU LIEN
ENTRE DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE.
Paragraphe I : le cadre conceptuel
Dans ce paragraphe, il sera procédé à la
définition des concepts de développement financier, de croissance
économique comme de développement économique.
A. Le développement financier
Le développement financier se définit comme le
processus par lequel un système financier gagne en profondeur, en
accessibilité, en rentabilité, en stabilité, en
efficacité, en
8
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
ouverture internationale et en diversité. Ces termes
véhiculent chacun une explication de la notion de développement
financier.
> La profondeur : mesure le degré
de financiarisation de l'économie et l'importance des financements
apportés par le système financier à l'économie.
> L'accessibilité : mesure la
capacité des différents agents économiques, quelles que
soient leurs caractéristiques, à accéder
à l'offre de produits et services financiers.
> Rentabilité : mesure la
capacité d'un capital placé ou investi à procurer des
revenus exprimés en termes financiers.
> Stabilité : mesure la
solvabilité du système financier. Rappelons toutefois que la
stabilité macroéconomique est un facteur de stabilité
financière.
> Efficacité : mesure la
capacité du système financier à proposer une offre de
services financiers et les performances les plus élevées
possibles au moindre coût.
> Ouverture : mesure le degré
d'ouverture du système financier local aux investisseurs
étrangers.
> Diversité : mesure la
capacité du système financier à proposer une gamme
variée de produits et de services financiers.
B. La croissance économique et le
développement économique
Bien qu'étant distincts ces deux notions sont
étroitement liées et parfois interchangeables.
> La croissance économique : est
l'évolution d'ordre quantitatif ou l'accroissement de la production
globale d'une économie sur une période donnée. Elle est
généralement mesurée par l'augmentation en pourcentage du
produit intérieur brut (PIB).
> Le développement économique
: est l'évolution d'ordre qualitatif et la restructuration de
l'économie d'un pays en rapport avec le progrès technologique et
social. L'indicateur de développement est la hausse du PIB par habitant.
Le développement économique ne tenait pas
9
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
compte de certaines dimensions surtout environnementales ce
qui conduit à la notion de développement durable. Celui-ci est
alors défini comme un développement qui répond aux besoins
du présent sans toutefois compromettre la capacité des
générations futures de répondre aux leurs.
Paragraphe II : Analyse théorique et empirique de la
relation entre développement financier et croissance
économique.
A. Analyse théorique de la relation entre
développement financier et croissance économique.
La plupart des travaux mettent en relief le fait que d'une
manière générale un système financier
développé stimule le développement économique.
Toutefois si la corrélation entre ces deux termes est admise de
manière globale, le sens de la causalité reste toutefois
contesté. En 1912, Schumpeter avait mis l'accent sur le rôle
primordial des banquiers, qui par leur ciblage et le financement des
entrepreneurs, encouragent l'innovation technologique, l'accumulation de
capital et stimulent ainsi la croissance économique. Ainsi donc, le
développement financier stimule la croissance à travers
l'accroissement du taux d'investissement et à travers l'allocation du
capital aux projets les plus productifs. Pour arriver à cette fin, les
intermédiaires financiers doivent assurer cinq fonctions principales
recensées par Levine (1997) :
o Faciliter les transactions financières, la
couverture contre les risques, la diversification des actifs et la
mutualisation des risques .
En général, les ménages
préfèrent détenir des actifs liquides, alors que les
entreprises sont demandeuses de ressources à long terme pour leurs
investissements. Les intermédiaires financiers se chargent de concilier
ces deux préférences, à priori divergentes, en
transformant les actifs liquides en actifs de long terme convenables pour les
investisseurs. En offrant des dépôts liquides aux ménages,
les banques procurent une assurance contre le risque de liquidité pour
l'épargnant et, simultanément favorisent les investissements
à long terme dans des projets rentables (Levine, 1997). Le
système financier peut également favoriser la réduction
des risques individuels liés aux projets d'investissements grâce
à la diversification et au partage des risques. La réduction des
risques stimule l'accumulation de capital et améliore la
rentabilité des investissements, en retour la croissance
économique se trouve affectée
10
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
favorablement. En l'absence de marché financier, les
ménages ne peuvent investir que dans des actifs peu liquides, car les
risques idiosyncratiques les empêchent d'investir dans des actifs
rentables. Les intermédiaires financiers peuvent réduire ce
risque de liquidité en mutualisant les risques individuels des
déposants, et en investissant les fonds récoltés dans des
actifs peu liquides mais rentables. Les systèmes financiers
réduisent les risques associés aux projets individuels, aux
firmes, aux entreprises. En effet les banques et les établissements
financiers pourvoient les moyens de diversifier les risques. La diversification
du risque favorise l'augmentation des taux d'épargne et l'allocation des
ressources nécessaires à la croissance. En effet tout
investisseur rencontre deux types de risque : un risque individuel et un risque
de liquidité. Le risque de liquidité est lié à
l'incertitude portant sur la conversion d'un actif financier en moyen
d'échange. Du fait que cette transformation est plus difficile lorsqu'il
existe des asymétries d'information, l'existence d'un système
financier développé peut réduire l'ampleur de ces
imperfections, réduire le risque de liquidité et favoriser
l'investissement qui est porteur de croissance économique.
Bencivenga et Smith (1991) ont montré que les
intermédiaires financiers, par l'allocation de l'épargne
améliorent la productivité du capital, et stimulent donc la
croissance économique.
o Acquérir des informations sur les projets et
favoriser l'allocation optimale des ressources
Le système financier, par son efficacité,
stimule également la croissance en réduisant les coûts de
transaction, et en s'assurant que le capital soit alloué aux projets les
plus rentables. Grâce aux économies d'échelle,
l'intermédiation financière réduit les coûts
d'information du financement externe et, ce faisant accroît le rendement
implicite des placements. En effet, les épargnants pris individuellement
n'ont ni la capacité, ni les moyens d'évaluer les entreprises
dans lesquelles ils désirent investir. Ils seront réticents
à investir dans une entreprise dans laquelle ils ne disposent d'aucune
information. L'intermédiaire financier se substitue à chacun des
épargnants pour évaluer les opportunités d'investissement,
réduisant ainsi le coût d'acquisition de l'information. Dans le
long terme, la relation de confiance qui pourrait s'établir entre la
banque et l'entreprise pourra améliorer la qualité de
l'information mise à la disposition des épargnants. La
réduction des coûts de l'information contribue à convertir
une plus grande part de l'épargne en investissement, à allouer
plus efficacement le capital, et à réduire les risques
associés à l'investissement.
11
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
Les intermédiaires financiers entreprennent le
processus de recherche des investissements possibles en faveur des agents
économiques en raison du coût élevé de la recherche
de l'information ; ce qui réduit le coût de l'information pour les
agents économiques, accroît l'allocation des ressources et
accélère la croissance. Plus les intermédiaires financiers
auront des informations précises et exactes sur les entreprises, plus
elles pourront financer les meilleurs projets, ce qui améliorera
l'allocation des ressources et réduira les risques de
défaillance. La réduction des coûts de transaction a
également un impact sur le volume de l'investissement, en ce sens
qu'elle permet de transformer une grande part de l'épargne en
investissements productifs.
o Assurer la surveillance des entrepreneurs et le
contrôle des entreprises
Une fois l'investissement financé, les banques doivent
surveiller les entrepreneurs pour les contraindre à gérer
l'entreprise dans l'intérêt des créanciers et des
actionnaires. Cette fonction est d'autant plus importante qu'en raison de
l'asymétrie d'information, l'entrepreneur est plus tenté de
gérer sa carrière personnelle et, de favoriser ses propres
intérêts au détriment de ceux des créanciers et
actionnaires.
L'entrepreneur peut être tenté également
de dissimuler des informations sur le rendement réel de
l'investissement. Par conséquent, il est important pour la banque
d'assurer la surveillance des dirigeants d'entreprises. Au fur et à
mesure que la firme et la banque développent une relation de long terme,
cela contribue à diminuer le coût d'acquisition de l'information
pour une meilleure allocation des ressources.
o Mobilisation de l'épargne intérieure
et allocation optimale des ressources
Les intermédiaires financiers collectent
l'épargne des ménages en leur offrant des possibilités de
dépôts, de diversification de leurs portefeuilles et
d'investissements rentables, tout en assurant la liquidité de leur
placement (Levine, 1997). La mobilisation de l'épargne a un impact
positif sur le volume de l'accumulation du capital, elle améliore
également l'allocation des ressources. Les systèmes financiers
les plus efficaces dans la mobilisation de l'épargne affectent
favorablement la croissance économique. Le développement
financier favorise la croissance en allouant plus de ressources à plus
de secteurs productifs. Par leur fonction de mobilisation de l'épargne,
les intermédiaires financiers favorisent l'accès des
épargnants aux financements des grands projets. Les épargnants
pris individuellement ne peuvent pas acquérir un actif émis par
une entreprise surtout si cet actif n'est pas divisible en petites
unités. En mettant en commun les épargnes de chaque individu, les
intermédiaires
12
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
financiers peuvent surmonter l'indivisibilité de
l'actif émis par cette entreprise. Ainsi donc, les intermédiaires
financiers améliorent l'efficacité de l'économie et active
la croissance économique en permettant aux individus d'investir dans des
grands projets et en permettant à ces projets de se réaliser.
o Faciliter l'échange des biens et services
:
Par cette fonction, les intermédiaires financiers
facilitent la spécialisation, l'innovation technologique et la
croissance. La spécialisation accroît la productivité du
travail et requiert plus de transactions. Ces transactions étant
coûteuses, les contrats financiers susceptibles de réduire ces
coûts favorisent une plus grande spécialisation, une augmentation
de la productivité et de la croissance économique (Levine, 1997).
Les intermédiaires financiers favorisent également le commerce
extérieur grâce aux crédits à l'exportation et aux
mécanismes de couverture contre les risques.
Ces fonctions des intermédiaires financiers à
savoir faciliter l'échange des biens et services, mobiliser
l'épargne, faciliter les transactions et la diversification des risques
stimulent la croissance à travers le taux d'investissement, la
productivité du capital et les échanges commerciaux. Des
modèles théoriques sur chacune des fonctions des
intermédiaires financiers ont pu exister et ce grâce à des
études de plusieurs économistes. S'agissant de la gestion des
risques et de la diversification des portefeuilles des épargnants, un
modèle fut développé par Saint-Paul (1992) qui suppose une
économie à deux secteurs où les consommateurs peuvent
arbitrer entre détenir des actifs risqués et rentables et des
actifs peu risqués et peu rentables. Ces deux types d'actifs sont
émis par deux secteurs de l'économie considérée. Si
le secteur financier de l'économie est peu développé, les
agents économiques à l'instar des consommateurs seront
incités à choisir les actifs peu risqués et donc peu
rentables du fait de leur incapacité à diversifier leurs risques.
De ce fait un secteur financier développé accroit les
opportunités de diversification, et réduit la taille des actifs
peu risqués et peu rentables au profit des actifs risqués et
très rentables. La croissance économique
générée par le développement financier est le
résultat de la substitution de ces actifs.
S'agissant de la fonction de l'apport de liquidité par
le système bancaire ou financier, un modèle théorique de
base a été développé par Bencivenga et Smith
(1991). S'inspirant des travaux de Diamond et de Dybvig (1983), ces auteurs ont
intégré le rôle de l'apport de liquidité des
intermédiaires financiers pour évaluer son impact sur la
croissance économique. Dans une économie sans
intermédiaires financiers, l'incertitude amène les
épargnants à
13
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
constituer une épargne liquide et improductive
c'est-à-dire une épargne de précaution qui n'est pas
favorable à la croissance. Le secteur bancaire réduit le risque
et favorise les investissements rentables. L'intermédiation
financière accroit le ratio de capital par tête de
l'économie et par conséquent active la croissance
économique.
Pour ce qui est de la collecte des informations et
l'allocation optimale des ressources, un modèle théorique fut
développé par Jovanovic et Greenwood (1990). Il s'agit
essentiellement dans ce modèle de collecter les informations sur les
entreprises et de pouvoir allouer l'épargne collectée aux projets
les plus productifs. Dans leur modèle le capital peut se voir investir
soit dans des projets peu risqués et peu rentables ou dans des projets
risqués et rentables. Le risque est provoqué par les chocs
agrégés et les chocs spécifiques au projet. Ils supposent
que les agents économiques sont incapables de différencier les
chocs. Par contre les intermédiaires financiers par le biais d'un
échantillon de projets rentables peuvent déterminer la nature du
risque. Avec leur capacité à collecter et à analyser des
informations, les intermédiaires financiers profilent leurs
stratégies d'investissement sur la base de leur connaissance des chocs
agrégés de la période courante. Si à cause d'un
choc négatif les investissements à risque deviennent moins
profitables que les investissements moins risqués, alors les
intermédiaires investiront seulement dans des projets peu
risqués.
Enfin le modèle théorique de King et de
Lévine (1993b) étudie le rôle du secteur financier dans la
mobilisation de l'épargne et le financement des projets innovants. Ce
modèle considère une économie dans laquelle les
entrepreneurs potentiels ont la capacité de mener à bien un
projet innovant qui va aboutir à une augmentation de la
productivité. Les intermédiaires financiers vont engager des
ressources pour évaluer chaque entrepreneur potentiel et seuls les plus
prometteurs seront financés. Les intermédiaires financiers
évaluent les entrepreneurs potentiels, mobilisent l'épargne pour
financer les projets les plus productifs. Patrick (1966) explique l'apport du
secteur financier à travers le mécanisme de mobilisation des
ressources comme suit : transformer les ressources du secteur traditionnel,
secteur à faible croissance au secteur moderne, secteur à
croissance élevée et stimuler une attitude entrepreneuriale chez
les agents économiques.
En effet s'agissant de la relation entre développement
financier et croissance,
Schumpeter (1911), Gurley et Schaw (1955) ont montré un
impact positif du développement financier sur la croissance
économique. Les travaux de Hicks (1969) et Miller (1988) ont
démontré que la finance joue un rôle très important
dans la croissance et le développement d'un pays. Les services
financiers sont donc essentiels à la croissance en exerçant un
rôle substantiel sur le développement économique. Selon
Bagehot (1873), les intermédiaires
14
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
financiers facilitent les transactions ; améliorent
l'efficacité dans l'allocation des ressources et la croissance
économique se trouve alors amorcée. Dans une économie
fermée ou l'investissement est favorisé et réalisé
grâce à l'épargne, ce dernier est perçu comme un
moyen important pour favoriser la croissance. Les entreprises dans les pays en
développement citent les contraintes de financement comme l'un des
obstacles majeurs à l'investissement et à la croissance car des
systèmes financiers développés réduisent les
contraintes de financement qui entravent l'activité des firmes et les
industries dans leur expansion. Le développement financier implique donc
la création et l'expansion des institutions financières, des
instruments financiers et marchés financiers qui soutiennent la
croissance et le processus d'investissement dans l'économie. Dans les
économies en développement, la plus grande part du financement
externe des entreprises est le fait des intermédiaires financiers. C'est
seulement lorsqu'elles ont atteint un certain niveau de développement
qu'apparaissent les marchés financiers sur lesquels les entreprises
peuvent vendre des titres, certes aux intermédiaires financiers, mais
aussi directement aux épargnants. La création de marchés
financiers a l'avantage d'offrir aux investisseurs et aux épargnants une
panoplie plus riche d'actifs financiers permettant une meilleure mutualisation
des risques. Ainsi les pays dotés de systèmes bancaires et de
marchés financiers développés se développeraient
plus rapidement que les moins dotés.
L'intermédiation financière agit favorablement
sur l'épargne et sur l'investissement, de plusieurs manières.
D'une part, les intermédiaires financiers réduisent les
coûts d'information du financement. D'autre part, ils adaptent les actifs
financiers aux préférences, souvent divergentes, des
épargnants et des investisseurs. Ils remplissent cette fonction soit en
s'interposant entre épargnants et investisseurs, soit en leur apportant
assistance pour leurs interventions sur les marchés financiers. Ainsi
les intermédiaires financiers ajustent-ils l'offre et la demande de
financement à un niveau supérieur, autrement dit, ils augmentent
le volume de l'épargne investie. Le développement financier
aurait un double effet sur la croissance économique : d'une part le
développement des marchés financiers peut accroitre
l'efficacité de l'accumulation du capital et d'autre part les
intermédiaires financiers peuvent contribuer à élever le
taux d'intérêt et par conséquent le taux d'épargne.
Le premier effet a été analysé par Goldsmith (1969) qui a
trouvé une relation positive entre le développement financier et
le niveau du PIB réel par tête. McKinnon (1973) et Schaw (1973),
ont développé le premier effet en montrant que le
développement financier entraine non seulement une grande
productivité du capital mais aussi un fort taux d'épargne et par
conséquent un volume élevé d'investissement qui favorise
donc la croissance. D'après McKinnon et Schaw, les politiques
15
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
qui conduisent à la répression financière
par exemple les contrôles financiers, résultent des taux
d'intérêt réels négatifs et réduisent les
incitations à l'épargne. Il en résulte donc moins
d'investissement donc moins de croissance. En effet la principale implication
de McKinnon et de Shaw concerne les restrictions gouvernementales sur le
système bancaire comme plafonner les taux d'intérêt ou
élever les réserves obligatoires. Ces mesures entravent le
développement financier ce qui réduit la croissance. Des
conclusions similaires ont été apportées par certains
travaux sur la théorie de la croissance endogène dans laquelle
les services fournis par les intermédiaires financiers tels que la
collecte et l'analyse des informations, la diversification du risque sont
explicitement modélisées.
Al Yousif (2002), soutient en effet que l'existence des
marchés financiers peut favoriser l'allocation des fonds
d'investissement vers les secteurs rentables. Les marchés financiers non
réprimés contribuent à la croissance par le canal de
l'accumulation du capital. L'accumulation du capital résulte de la
centralisation de l'épargne dans les entreprises et de la
création de richesse par la détention d'actifs financiers tels
les actions et les obligations. Ses travaux ont montré avec conviction
que la croissance économique à long terme dépend du
développement financier. Alejandro (1985) soutient que la contribution
du développement financier à la croissance doit être
perçue dans l'optique d'une augmentation de la productivité du
capital plutôt que dans l'augmentation de l'épargne et de
l'investissement. King et Levine (1993a, 1993b), Levine et Al (2000) et Khan et
Senhadji (2000) ont trouvé des effets positifs du développement
financier sur la croissance économique. Levine, Loayza et Beck (2000),
montrent qu'un système financier performant agit de façon
efficiente et positive sur la croissance d'un pays. Ils trouvent que la
relation de court terme entre les indicateurs de développement financier
est possible avec le taux de croissance économique, le taux
d'accumulation du capital et la productivité globale des facteurs. Selon
Ramakrishnan et Thakor (1984), Boyd et Prescott (1986), Allen (1990), les
marchés financiers peuvent stimuler la production des informations sur
les firmes en donnant les possibilités d'investissement et en
accélérant le processus de croissance. Aussi, Rioja et Valen
(2002), concluent que le développement financier affecte la croissance
économique dans les pays à faible revenu par le biais de
l'accumulation du capital tandis que dans les pays à revenu
élevé c'est l'accroissement de la productivité qui sert de
courroie de transmission. Selon Rajan, Zingalès, Maksimovic (1998), les
entreprises et les firmes qui dépendent fortement de la finance
extérieure croissent rapidement dans les pays à système
financier performant. Bencivenga et Smith (1991) montrent que la
présence des intermédiaires financiers favorise la
16
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
croissance économique en canalisant l'épargne
vers les secteurs d'activité à haute productivité et en
permettant aux individus de réduire le risque associé à
leurs besoins de liquidité. Selon Bencivenga et Smith (1991), les
banques font face à des demandes prévisibles et peuvent allouer
des fonds d'investissement de plus grande efficacité. Bencivenga et
Smith montrent dans leur modèle que la croissance augmente même si
l'épargne dans l'ensemble diminue comme conséquence du
développement financier à cause de l'effet dominant du
développement financier sur l'efficacité de l'investissement. Ils
proposent un modèle à générations imbriquées
d'agents à 3 périodes incluant des banques en concurrence
parfaite et attestent que l'intermédiation financière assure la
promotion de la croissance économique. D'après Jao (1976), le
rôle de la monnaie et de la finance sont importants dans le
développement économique d'un pays ; de même Gurley (1955)
et Shaw (1956) ont mis l'accent sur le rôle de l'intermédiation
financière à la fois bancaire et non bancaire dans le processus
épargne - investissement pour illustrer la manière dont la
croissance économique dans un pays peut largement dépendre du
développement du secteur financier. L'étude de King et de Levine
(1997) l'une des études les plus influentes sur le sujet montre une
forte relation positive entre développement financier et croissance
économique et soutient que le développement financier a un
pouvoir prophétique sur la croissance future et interprète ce
résultat comme une évidence pour une relation de causalité
du développement financier vers la croissance. Khan et Senhadji (2000),
ont montré que l'effet du développement financier sur la
croissance est positif et que l'intensité de l'effet varie selon les
différentes mesures du développement financier, selon la
méthode d'estimation et la fréquence des données.
Jovanovic et Greenwood (1990) pensent que l'intermédiation
financière peut promouvoir la croissance car elle permet de disposer
d'un taux élevé de rendement du capital. De plus le
développement financier a l'aptitude d'induire dans une économie
qui utilise intensivement le capital et la technologie un remplacement partiel
du facteur capital utilisé intensivement par une utilisation intensive
du travail en dotant le pays de potentiel à pouvoir
générer de l'emploi, d'accroitre la productivité du
travail et d'améliorer la croissance. D'autres travaux sur ce
thème ont été réalisés et montrent qu'une
intermédiation financière concurrentielle augmente le taux de
croissance de long terme (Greenwood et Jovanovic, 1990 ; Bencivenga et Smith,
1991 ; Levine, 1991). Tadesse (2002) montre que les systèmes financiers
dominés par les banques sont plus favorables à la croissance dans
les pays sous-développés financièrement, alors que dans
les pays développés financièrement, les systèmes
orientés vers les marchés financiers seraient plus porteurs de
croissance. Les travaux de Levine et Zervos (1998) et Beck et Levine (2001)
fournissent l'évidence selon laquelle le développement des
17
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
marchés boursiers est un indicateur qui permet de
prévoir de bonnes perspectives de croissance économique. Dans le
même courant de littérature, Bekaert, Harvey et Lundblad (2005)
montrent que les économies qui ont libéralisé leurs
marchés boursiers enregistrent des taux de croissance économique
élevés. En effet la plupart des études qui se sont
penchées sur la nature du lien entre développement financier et
croissance économique utilisent souvent des ratios mesurant
l'état du système bancaire ; ces indicateurs occultent ou cachent
une partie du développement financier enregistré au cours de ces
dernières années dans de nombreux pays en développement
qui s'est traduit par une ascension des marchés financiers en
l'occurrence des bourses de valeur surtout dans les pays émergents. En
effet si la bourse des valeurs fonctionne de façon efficiente,
c'est-à-dire si les prix reflètent l'espérance de profit
des entreprises, les ressources financières peuvent être
allouées aux entreprises performantes pour la réalisation de
projets d'investissement rentables.
Contrairement à la place importante qu'occupe la
finance dans le développement économique, certains
économistes considèrent la finance comme un facteur relativement
non important dans le processus de croissance. Ces économistes voient le
rôle du développement financier comme mineur ou négligeable
sur la croissance économique. Le développement financier est une
conséquence de la croissance économique due à une plus
grande demande des services financiers par les entreprises pour des
financements extérieurs. Le manque de demande de services financiers est
une manifestation du manque de financement des investissements porteurs de
croissance. Selon Friedman et Schwartz (1963), Jung(1986) et Ireland (1994), la
finance répond en fait à un changement réel. La croissance
économique crée une demande pour les services et les institutions
financières développées. Après l'assertion de
Schumpeter (1911), documentée et popularisée par King et Levine
(1993a ; 1993b ; 1993c), de nombreux auteurs ont réagi à «
Schumpeter might be right » de King et Levine (1993a) au nombre
desquels on peut citer Arestis et Demetriades (1998), qui se sont
penchés sur la portée de la relation entre développement
financier et croissance économique en se demandant une fois encore si
Schumpeter avait réellement raison « Is Schumpeter right ?
» . En effet, ces auteurs estiment que le développement financier
n'est pas antérieur à la croissance économique mais le
contraire. C'est dans ce courant de pensée que s'inscrit la contribution
de Robinson (1952) qui pense que le développement financier suit la
croissance. Aussi, Keynes (1936) argumente que, bien que la croissance puisse
être contrainte par le crédit dans les systèmes financiers
peu développés, dans les systèmes financiers
avancés, le développement de la finance ou du crédit n'est
qu'une réponse endogène aux exigences en matière de
18
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
demande pour la croissance. Ces développements
théoriques ont galvanisé la conviction d'Arestis et Demetriades
(1998) face à King et Levine (1993a). Dans cette optique Arestis et
Demetriades (1998) montrent que l'analyse menée par King et Levine
(1993a) est fondée sur des bases de causalité très
fragiles. Ils démontrent qu'une fois la corrélation entre
l'indicateur de développement financier pris à la moyenne et son
niveau initial est très forte, le développement financier ne peut
plus prédire la croissance économique. Pour Robinson (1952),
lorsque l'entreprise est en marche la finance suit ; le développement
financier n'est rien d'autre que le résultat ou le produit de la
croissance économique. En effet cette observation fut faite par beaucoup
d'économistes : lorsque le revenu par capital d'un pays augmente, ce
pays connait ou expérimente une croissance plus rapide de ces avoirs
financiers que de sa production nationale. Meier (1984) atteste qu'un pays qui
connait une croissance de son revenu ou de sa richesse nationale connait une
richesse de ses structures financières en actifs financiers, en
institutions et en marchés. Le développement financier apparait
ainsi comme la résultante de la croissance économique.
D'après Levine (1992), il existe une causalité
bidirectionnelle entre développement financier et croissance
économique et la causalité bidirectionnelle suppose que la
croissance puisse permettre au système financier d'accomplir sa propre
évolution et son développement dans la mesure où
l'augmentation de revenu réel offre les moyens de mise en place d'une
intermédiation financière coûteuse et de plus en plus
sophistiquée. En d'autres termes la croissance économique rend
les systèmes financiers profitables ; et en même temps la mise en
place de ces derniers permet d'accélérer la croissance
économique et la transformation structurelle de l'économie. Ainsi
ce n'est qu'après avoir franchi certains seuils de revenu par habitant
que l'économie choisira de développer les différents types
d'intermédiation financière et qu'elle pourra
bénéficier de leurs effets positifs sur le processus de
croissance. La contribution du secteur financier à la croissance
s'exerce donc à travers des discontinuités et des effets de seuil
(Barthélémy et Varoudakis ; 1998). La croissance entraine une
ouverture continue de nouveaux marchés, une complexité croissante
des échanges qui renforcent la monétisation des économies,
qui est nécessaire à son tour pour soutenir le volume de
l'activité économique.
19
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
B. Analyse empirique de la relation entre
développement financier et croissance économique
Dans l'optique d'appréhender la véritable
interaction entre développement financier et croissance
économique, plusieurs travaux empiriques ont été
réalisés. La plupart des travaux empiriques
révèlent que les pays qui disposent des taux
d'intérêt et des taux d'investissement élevés ont un
secteur financier plus développé. Ainsi dans les pays où
le taux de croissance est faible, le niveau de l'intermédiation l'est
aussi. Par contre dans les pays où le niveau du secteur financier est
développé, on assiste à une affectation efficace des
ressources réelles vers les secteurs productifs porteurs de
croissance.
Svaleryd et Vlachos (1991) pour une analyse des effets du
développement financier sur la spécialisation industrielle dans
les pays de l'OCDE montrent entre autres que le développement financier
cause fortement la spécialisation industrielle. Savides (1995) montre
que l'indicateur du développement financier M2/PIB agit positivement sur
la croissance lorsque dans l'analyse du lien développement financier et
développement économique la variable liberté politique
n'est pas prise en compte. Goldsmith, précurseur de l'étude du
lien développement financier et croissance a réalisé des
travaux sur 35 pays en utilisant la valeur des actifs des intermédiaires
financiers par rapport au PIB pour une période allant de 1860
à1963 et trouvent un lien positif entre développement financier
et croissance économique. Toutefois beaucoup d'insuffisances ont
été relevées dans l'étude de Goldsmith entre autres
le fait qu'il n'a pas tenu compte de l'ensemble des facteurs qui influencent la
croissance.
Au cours des deux dernières décennies King et
Levine (1993a ; 1993b ; 1993c) ont été les premiers auteurs
à se pencher sur l'analyse empirique de la relation entre la croissance
économique et le développement financier. King et Levine (1993a ;
1993b ; 1993c) ont tenté de remédier aux faiblesses de
l'étude de Goldsmith par une autre étude sur 80 pays couvrant la
période 1960 à 1989 en utilisant des indicateurs de
développement financier autre que ceux utilisés par Goldsmith.
Ces indicateurs sont au nombre de quatre à savoir l'agrégat
monétaire M2 rapporté au PIB, les actifs des banques commerciales
divisés par le total des actifs des banques commerciales et de la banque
centrale, la part des crédits au secteur privé dans le total des
crédits intérieurs et la part des crédits au secteur
privé dans le PIB. Ils ont examiné systématiquement
l'ensemble des facteurs financiers susceptibles d'activer la croissance. Ils
utilisent aussi quatre indicateurs de croissance économique : le taux de
croissance du PIB réel par tête, le taux de croissance du stock de
capital, le taux de croissance de la productivité globale des facteurs
et le taux d'investissement. Ils trouvent un effet significatif positif du
20
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
ratio des actifs liquides du secteur financier par rapport au
PIB et concluent une corrélation robuste du degré de
développement financier avec la croissance, l'investissement et
l'efficacité du capital. Les auteurs montrent qu'au seuil de 1% chaque
indicateur de développement financier est positivement
corrélé à chaque indicateur de développement
économique. Pour traiter la causalité inverse entre
développement financier et croissance économique les auteurs ont
régressé le taux de croissance du PIB par tête sur la part
des actifs dans le PIB. Il en découle que le développement
financier exerce un impact positif et significatif sur la croissance
économique sur la période 1960 à 1989. Par
conséquent le développement financier ne suit pas simplement la
croissance mais la prédit aussi à long terme. Ils concluent
à partir de leur étude en coupe transversale qu'au-delà du
lien positif entre les deux variables, le développement financier permet
de bien prévoir la croissance. Ils trouvent aussi qu'un niveau de
développement financier élevé est associé à
une amélioration future du taux d'accumulation et à une
efficience de l'affectation du capital. Toutefois, leur étude quoique
significative ne donne pas une idée claire sur la relation entre ces
deux entités économiques car le fait que le développement
financier initial prédise la croissance de long terme ne suffit pas pour
trancher sur la causalité. De Gregorio et Guidotti (1995) aboutissent au
même résultat en considérant comme indicateur du
développement financier le ratio du crédit au secteur
privé sur le PIB.
Le développement financier peut être
également lié au développement des marchés
financiers. Artje et Jovanovic (1993), à partir d'une étude
portant sur un échantillon de 75 pays concluent à l'influence
positive des marchés financiers sur la croissance. Ils trouvent que les
indicateurs du secteur bancaire sont moins corrélés au rendement
des investissements que ceux du marché boursier. Cependant il ressort de
l'étude que le développement du marché des titres ne
contribue fortement à la croissance économique que si l'on
contrôle la variance des cours boursiers.
Levine, Loayza et Beck (2000) pour évaluer l'impact du
développement financier sur la croissance ont étudié sur
la période 1960 à 1995, 74 pays de tous niveaux de
développement en utilisant deux méthodes
économétriques pour prendre en compte
l'endogénéité de la variable du développement
financier. Pour y parvenir ils font d'une part une analyse transversale et
d'autre part une analyse en panel dynamique pour résoudre le
problème de causalité inverse, de biais de
simultanéité. Ils trouvent un impact positif du
développement
21
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
financier sur la croissance. Il en résulte de leur
étude que l'effet du développement financier sur la croissance
passe essentiellement par l'accroissement de la productivité globale des
facteurs. L'effet à travers l'accumulation du capital est moindre. Beck
et Levine (2004), examinent l'impact du développement des
activités bancaires et celui des marchés financiers sur la
croissance en portant une étude sur 40 pays avec des données de
panel sur la période 1976 à 1998. Les résultats ont
montré que les activités bancaires et le développement des
marchés exercent de façon indépendante un effet positif
sur la croissance. Christopoulos et Tsionas (2004), sur un échantillon
réduit à dix pays en développement durant la
période 19702000, procèdent à une analyse de
Co-intégration en panel. Leurs résultats plaident en faveur d'une
causalité allant en longue période du développement
financier à la croissance et en faveur d'une absence de relation
à court terme entre les deux phénomènes. Rajan et
Zingalès (1998) ont utilisé des données industrielles pour
évaluer l'impact du développement financier sur la croissance.
Ils défendent l'idée selon laquelle le développement
financier allège les imperfections du marché qui entravent
l'accès des entreprises aux crédits. En utilisant les
données de panel sur plusieurs secteurs industriels d'un
échantillon de 41 pays la période 1980 à 1990, les
résultats montrent que le développement financier a un effet
d'autant plus fort sur le taux de croissance moyen de la valeur ajoutée
d'un secteur que le besoin de financement de ce secteur est important.
Toutefois pour certains auteurs le développement
financier est la conséquence pure de la croissance économique. Un
des grands de ce courant est Robinson (1952) qui pense que les marchés
financiers et les institutions adéquates émergent lorsque le
processus de croissance économique provoque une demande de services
financiers qui induit l'expansion du système financier. Pour Patrick
(1966), le développement financier cause la croissance dans les premiers
stades de développement, mais cet effet diminue graduellement au cours
du développement jusqu'à s'inverser. En effet si les
entrepreneurs anticipent une croissance économique future, qui
entrainera une demande accrue de services financiers, ils pourraient investir
dans la création d'activités d'intermédiation
financière en anticipation des profits futurs. Le secteur financier se
développe donc en réponse aux perspectives de croissance dans le
secteur réel. Le système financier est développé
par la croissance mais il la précède. Demetriades et Hussein
(1996) estiment dans leur étude que dans plusieurs des 16 pays de leur
échantillon la causalité semble aller de la croissance vers le
développement financier et non l'inverse.
22
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
D'autres économistes se sont penchés sur
l'impact mutuel de la finance et de la croissance et ils suggèrent que
les deux variables sont mutuellement causales et les travaux de Greenwood et
Smith (1997) ont porté sur cette étude. Démétriades
et Hussein (1996), Greenwood et Smith (1997), ont trouvé une relation
bidirectionnelle entre développement financier et croissance
économique. Goldsmith (1969) dans son étude a montré que
le développement financier et la croissance sont liés par une
endogenéité. Greenwood et Jovanovic (1990) présentent un
modèle dans lequel la croissance et l'intermédiation
financière sont endogènes et montrent une relation positive de
causalité two-way entre développement financier et croissance
économique. D'un côté le processus de croissance stimule
une forte participation des marchés financiers dans la sphère
économique ce qui facilite la création et l'expansion des
institutions financières et de l'autre les institutions
financières en collectant et en analysant les informations en provenance
de plusieurs investisseurs potentiels permettent d'entreprendre des projets
d'investissement stimulant de retour la croissance.
Une étude sur les pays de l'UEMOA à l'exception
de la Guinée-Bissau sur la période 1970 à 1995 a
été menée par Raffinot et Venet (1998) qui ont
tenté d'établir, dans une analyse en données de panel, une
relation qui expliquerait la croissance économique à partir des
déterminants traditionnels, ou de ceux suggérés par la
théorie de la croissance endogène. Ils évaluent leur
analyse en combinant les variables traditionnelles de croissance aux variables
de l'approfondissement financier pour juger du lien entre développement
financier et croissance économique. Il ressort nettement qu'aucune de
ces variables n'est positivement et significativement corrélée
avec la croissance. Les résultats de l'analyse ne sont pas satisfaisants
car ils conduisent à rejeter toute influence de l'approfondissement
financier sur les taux de croissance du PIB dans les pays francophones
d'Afrique de l'Ouest sur la période étudiée.
D'après Raffinot et Venet la conclusion de l'étude proviendrait
de l'effet d'ensemble (le regroupement des pays au sein de l'UEMOA). Car, dans
chaque pays, les variables d'approfondissement financier sont assez bien
corrélées avec la croissance. Mais entre pays, cela n'est plus
vrai. Spears (1992) a étudié la causalité entre le
développement financier et la croissance économique pour les pays
sub-saharienne y compris les pays de l'UEMOA. Il a montré ainsi que
l'intermédiation financière (mesurée par M2/PIB) cause au
sens de Granger, la croissance du PIB par tête au Kenya et au Malawi, au
Cameroun, en Côte d'Ivoire. Le Burkina Faso présente la
particularité d'avoir une causalité bidirectionnelle. Ce
résultat fut
23
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
fort contestable du fait de l'absence des variables
d'intérêt dans ces analyses, ce qui laisse croire une
surévaluation de l'effet de la finance sur la croissance Les tests de
causalité faits sur l'étude de Raffinot et de Venet ont conclu
sur une liaison causale entre approfondissement financier et croissance
réelle. Cette hypothèse se vérifie pour le Bénin,
la Côte d'Ivoire, le Mali sur la période étudiée. En
revanche, une causalité inverse apparaît dans les cas du Burkina
Faso, du Sénégal et du Togo. Enfin, dans le cas du Niger, aucune
causalité n'a pu être mise en évidence. En somme
l'étude sur l'UEMOA de Raffinot et Venet ont permis de conclure que dans
l'UEMOA, l'approfondissement financier n'explique pas la croissance
économique à partir des régressions de panel
effectuées dans le cas des pays francophones de l'UEMOA entre 1970 et
1995. Andersen et Tarp (2003) ont montré que la relation positive entre
développement financier et croissance trouvée par Levine, Laoyza
et Beck (2000) ne se vérifie plus lorsqu'on restreint
l'échantillon aux pays d'Afrique au sud du Sahara et d'Amérique
Latine. Ils soulignent aussi que les études sur données
temporelles propres à un pays ne mettent pas clairement en
lumière une causalité allant du développement financier
à la croissance.
Par exemple, Ram (1999) montre que lorsqu'on utilise des
données annuelles relatives à 95 pays sur la période
1960-1989, une relation positive et significative entre le taux de
liquidité et la croissance n'apparaît que pour neuf d'entre eux.
Luintel et Kahn (1999), trouvent une corrélation négative entre
développement financier et croissance sur sept des dix pays sur lesquels
a porté leur étude. Ils montrent ainsi que la corrélation
diminue et devient non significative pour les pays de l'OCDE. De Gregorio et
Guidotti (1992) élargissent l'échantillon de King et Levine en
subdivisant l'échantillon en trois groupes de pays selon le niveau
initial de revenu par tête. Ils montrent que la corrélation entre
développement financier et croissance augmente et devient significative
au fur et à mesure que le revenu initial par tête diminue. En
réduisant l'échantillon aux seuls pays de l'Amérique
Latine, ils trouvent un impact négatif du développement financier
sur la croissance. Loayza et Rancière (2004) suggèrent une
relation positive entre la finance et la croissance économique à
long terme contre une relation négative à court terme. Loayza et
Rancière (2004) estiment que cette variation de l'impact du
développement financier sur la croissance économique sur le court
et le long terme est fortement liée à la fragilité
financière qu'ils mesurent à travers la récurrence des
crises financières et la volatilité de l'indicateur de
développement financier.
24
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
SECTION II : THEORIE DE LA LIBERALISATION FINANCIERE
DANS LA RELATION DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE
ECONOMIQUE.
La libéralisation financière détient une
place de choix dans la relation entre développement financier et
croissance économique et parait même être indissociable de
toute politique de développement financier surtout dans les pays
africains de la zone franc où elle est apparue comme la solution au
développement du secteur financier dans les années 1980
après les graves crises bancaires qu'a connues le système
financier contrôlé à l'époque par les
autorités publiques. En effet, le système financier d'alors
connaissait au début des années 1980 un interventionnisme
poussé des autorités publiques qui recherchait sans doute une
meilleure contribution du système financier à la croissance
économique. Quelle peut être l'importance et la portée de
la libéralisation financière dans la relation entre
développement financier et croissance économique ?
Paragraphe I : Les fondements de l'interventionnisme de
l'Etat dans la sphère financière et la notion de
répression financière.
La recherche d'une forte croissance économique durable
est largement admise comme la clé pour une sortie de pauvreté
dans les pays africains. Alors qu'il est largement admis que le
développement financier active la croissance, les autorités
publiques des pays africains de la zone franc ont fait figure pendant plusieurs
années de premiers acteurs dans le développement du
système financier de leurs pays. Toutefois la performance de ces Etats
africains et en particulier des Etats actuels de la zone franc sur le
développement financier était désastreuse. Ces Etats se
sont contentés de mener des politiques qui au lieu de favoriser le
développement du système financier de leurs pays l'ont
plutôt réprimées comme par exemple contrôler
l'allocation du crédit, maintenir les taux d'intérêt
à des niveaux faibles pour faire profiter aux entreprises publiques le
bas coût des crédits et un encadrement poussé du
système financier. En effet l'encadrement poussé du
système financier par les autorités publiques prend le nom de
répression financière. La notion « d'économies
financièrement réprimées » a été
introduites par Mac Kinnon et Schaw (1973) pour caractériser des pays en
l'occurrence des pays en développement dans lesquels les
autorités publiques contrôlent le
25
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
système bancaire et disposent d'un rôle important
dans l'allocation du crédit en maintenant d'une part les taux
d'intérêt à des niveaux très faibles voire
négatifs et d'autre part en maintenant les réserves obligatoires
à un niveau élevé. Les gouvernements maintiennent le
contrôle sur les taux d'intérêt en les abaissant dans le but
de minimiser les coûts des crédits aux entreprises publiques et
à certains secteurs dits prioritaires, en croyant que les taux
d'intérêt faibles peuvent stimuler l'investissement. Au même
moment, les autres secteurs de l'économie considérés comme
non prioritaires font l'objet d'un rationnement de crédit. En Afrique
sub-saharienne et principalement dans les pays de la zone franc, la
répression financière date de plusieurs décennies. Durant
l'époque coloniale, beaucoup de banques commerciales en Afrique
étaient la propriété ou appartenaient à de grandes
banques des puissances coloniales. Par conséquent, le système
financier africain qui émergea reflétait dans une certaine mesure
les institutions mises en place au cours de la colonisation. Cependant,
après les indépendances, des changements notables interviennent.
Conscients du rôle primordial des banques dans le développement
économique, les Etats africains ont procédé à la
nationalisation des institutions financières existantes et à la
création de nouvelles banques détenues en majorité par les
pouvoirs publics. Le secteur bancaire est devenu un outil de la promotion du
développement, et va connaître à ce titre un
interventionnisme public marqué. La répression financière
prend place dans les économies africaines. D'après Collier
(1994), les Etats imposaient l'octroi de prêts aux sociétés
d'Etat et aux offices de commercialisation de produits d'exportation alors que
ces offices étaient caractérisés par une situation
déficitaire. L'environnement économique d'alors n'étant
pas favorable à cause du niveau élevé de l'inflation. Les
taux d'intérêt réels deviennent très faibles voire
négatifs en Afrique. Pour garder leur marge de profit, les banques font
peser la charge aux épargnants et aux emprunteurs des secteurs non
prioritaires en jouant sur l'écart entre les taux créditeurs et
débiteurs. Il s'en suit alors un sous-développement des
systèmes financiers africains car le secteur bancaire n'arrive plus
à remplir deux de ses rôles fondamentaux : assurer l'allocation
optimale des ressources et la surveillance des dirigeants d'entreprises. En
effet selon Jao (1976) la cause majeure de l'état embryonnaire du
secteur financier dans les pays au Sud du Sahara est l'application de
politiques inappropriées qui imposent un plafond aux taux
d'intérêt nominaux. Ces politiques pénalisent
l'épargne et surtout suppriment les signaux du marché concernant
la rareté du capital et encourage le développement irrationnel
des firmes qui utilisent intensivement le capital, ce qui exacerbe l'emploi
dans l'économie.
26
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
A travers l'utilisation de ces instruments de
répression, les autorités perturbent l'allocation des ressources.
King et Levine (1993c) diront : « la répression financière
réduit les services fournis aux épargnants, aux producteurs, aux
entrepreneurs : elle étouffe de ce fait l'action novatrice et ralentit
la croissance économique ». Une économie
financièrement réprimée se caractériserait par le
fait que les canaux d'épargne sont souvent sous-développés
et le rendement de l'épargne est négatif et instable. Les
intermédiaires financiers qui mobilisent l'épargne n'assurent
plus une allocation optimale des ressources ; les entreprises sont
découragées à investir parce que les mauvaises politiques
financières réduisent les rendements ou les rendent plus
instables. Selon Mc Kinnon (1973), dans une économie
financièrement réprimée la tendance est forte de financer
des investissements qui rapportent un rendement à peine supérieur
au plafond du taux de crédit. Le taux de plafond décourage la
prise de risque de la part des intermédiaires financiers et
élimine des investissements à fort rendement potentiel. Schaw
(1973) montre que les plafonds de taux aggravent l'aversion pour le risque et
la préférence pour la liquidité de la part des
intermédiaires financiers. Les banques privilégient les
emprunteurs non risqués, à réputation bien établie
et ne sont pas incitées à exploiter des occasions de prêts
plus risqués. Par ailleurs dans un système financier
réprimé, l'octroi de prêt de même que l'application
des taux d'intérêt se font de manière hasardeuse ou encore
arbitraire en variant d'une catégorie d'emprunteurs à une autre.
Les banques, face aux plafonds des taux, rationnent le crédit sur une
base autre que le prix du crédit. Le crédit est dès alors
alloué sur une base de motifs tels : le « nom » de
l'emprunteur, la « classe politique » de l'emprunteur ou encore ses
relations avec la banque en question et non à partir de la
productivité anticipée du projet d'investissement. Roubini et
Sala-i-Martin (1992) et De Grégorio (1993) ont utilisé
l'inflation comme la manifestation de la répression financière
car elle représente une taxe sur la détention de monnaie. De
Grégorio pour sa part estime que l'inflation est liée au
problème de financement du déficit budgétaire et qu'elle
réduit l'incitation à investir. Roubini et Sala-i-Martin (1992)
pensent que les autorités gouvernementales ont recours à la
répression financière car elles voient dans la répression
un moyen sûr pour avoir accès à des ressources bon
marché. Dans ses travaux empiriques Fischer (1993) trouve une relation
négative entre la croissance et le déficit budgétaire
lorsque l'inflation est considérée comme un indicateur de la
répression financière.
27
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
Paragraphe 2 : Politique de libéralisation
financière dans la relation développement financier et croissance
économique.
Dans ce contexte d'étranglement du système
financier Mc Kinnon et Schaw (1983) ont donc préconisé de
libérer les systèmes financiers de ses entraves. Libérer
les marchés financiers c'est donc permettre la croissance de
l'investissement et donc favoriser le développement. La
libéralisation financière est apparue comme la solution pour
développer le système financier des pays en voie de
développement et accroitre son apport à l'essor
économique.
De fait, dès le milieu des années soixante-dix
et plus encore dans les années quatre-vingt, de nombreux pays en
développement ont libéré leurs systèmes financiers
des contraintes internes et l'ont ouvert sur l'extérieur en
allégeant ou supprimant le contrôle des changes sur les mouvements
de capitaux. En effet, la libéralisation financière vise à
relâcher le contrôle de l'Etat sur les taux d'intérêt,
à la diminution des réserves obligatoires, à l'abandon
complet ou partiel de l'encadrement du crédit, à la privatisation
du secteur bancaire et financier, à une meilleure réglementation
du système financier et à la mise en place de mesures visant
à promouvoir la concurrence dans le secteur financier. Ces mesures ont
théoriquement pour effet de relancer l'épargne, l'investissement
et la consommation. La libéralisation financière doit tout
d'abord relever le niveau de l'épargne, en élargissant l'offre
d'instruments d'épargne et en augmentant son rendement anticipé
grâce à des taux d'intérêt réels
élevés. Les premières expériences, en Corée
du Sud et à Taiwan, ont été un
succès. Les mécanismes de libéralisation financière
mis en oeuvre par les économies d'Asie du Sud-Est, à travers
surtout la suppression du contrôle des mouvements de capitaux, la
déréglementation des taux d'intérêt et le
relâchement des coefficients de réserves obligatoires
imposés aux banques ont indéniablement profité à
l'activité productrice de ces pays.
En Corée par exemple, la libéralisation des taux
d'intérêt s'est faite entre 1991 et 1993 et avec elle, la
modification du taux des réserves obligatoires qui est passé
d'environ 30 % en 1990 à 7 % en 1996. De la même façon, les
pays asiatiques se sont inscrits dans le processus de mondialisation
financière en adoptant des politiques d'élargissement de la
concurrence entre les institutions financières. Ainsi,
l'Indonésie et la Malaisie ont assoupli les conditions d'entrées
dans le secteur bancaire en 1988 et 1989, tandis que la Corée et la
Thaïlande modéraient respectivement en 1991 et 1993, les
restrictions jusque-là imposées sur l'activité
28
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
des banques étrangères en leur sein (Chang,
Velasco, 1998). Les cinq pays du sud-Est asiatique que sont l'Indonésie,
la Corée du sud, la Malaisie, les Philippines et la Thaïlande ont
vu les flux de capitaux tripler dans la première moitié des
années 90, passant d'environ 25 milliards de dollars US en 1990 à
66 milliards en 1996. Pour la période 1995-96, ces pays ont
bénéficié de flux nets de capitaux privés
équivalents, en moyenne à 6,6% de leur PIB (Chang, Velasco,
1998). Les flux massifs de capitaux vers les pays du Sud-Est asiatique ont
grâce à une croissance rapide des crédits domestiques et
à une transformation efficiente de l'épargne en investissements
productifs, conduit à la croissance économique de ces pays.
Ces politiques de libéralisation financière
mises en application dans ces pays asiatiques ont entraîné une
forte augmentation des dépôts bancaires, stimulé la
croissance économique sans compromettre la stabilité
monétaire. Pour Lucas et Krugman (1989), si des gains de croissance
peuvent être attendus du développement financier, rien ne permet
de conclure que la libéralisation financière renforcera le taux
de croissance à moyen et à long terme. Les libéralisations
financières en Amérique Latine à la fin des années
soixante-dix (Argentine, Chili, Uruguay) et aux Philippines comme en Turquie
dans les années quatre-vingt peuvent être
considérées comme des échecs : elles se sont traduites par
une hausse excessive des taux d'intérêt réel, des
entrées spéculatives de capitaux et finalement par de graves
crises de la balance des paiements et du système bancaire. En Afrique
dans les années 1980, sous l'impulsion des bailleurs de fonds (Banque
Mondiale, FMI...), plusieurs pays africains en particulier les pays de la zone
franc ont entrepris des programmes d'ajustement structurels, programmes qui
comprenaient un volet sur la réforme du système financier. Ces
réformes sont focalisées sur la réduction de la
répression financière par la privatisation des banques publiques,
la restructuration des banques en difficulté et la facilitation de
l'entrée de banques étrangères dans le capital des banques
domestiques. Dans l'UEMOA par exemple, les mesures contenues dans la «
Nouvelle Politique Monétaire et de Crédit »
d'octobre 1989 et complétées par les réformes de 1993
vont clairement dans le sens de la libéralisation du secteur financier.
La BCEAO a remplacé ses deux principaux taux à savoir le taux
d'Escompte préférentiel (TEP) et le taux d'Escompte Normal (TEN)
par un taux d'escompte unique (TES), taux directeur auquel l'institut
d'émission refinance le système bancaire pour les besoins de
trésorerie qui n'ont pu être couverts. Dans le cas des conditions
applicables par les banques, la réforme d'octobre 1989 a permis aux
banques, avec la suppression des taux débiteurs planchers, de fixer
librement leurs conditions débitrices à condition toutefois de
ne
29
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
pas dépasser un taux débiteur plafond qui ne
tient compte ni de la durée, ni de la nature des crédits. En
octobre 1993, les conditions débitrices ont été totalement
libéralisées. Toutefois, les banques ne doivent pas maintenir des
taux d'intérêt excédant le taux d'usure dont le niveau,
déterminé par le Conseil des Ministres de l'Union est fixé
à deux fois le taux d'escompte. La libéralisation des conditions
créditrices répondait à deux objectifs : consolider
l'épargne et privilégier davantage les placements longs. A partir
d'août 1998, des coefficients différenciés ont
été appliqués selon les pays, de façon à
prendre en compte les évolutions divergentes des crédits à
l'économie. En outre, ils ont été sensiblement
relevés : 9,0% pour le Bénin, le Burkina, la Côte d'ivoire,
le Mali et le Togo contre 5,0% pour les autres pays. Les programmes sectoriels
de crédit dans l'Union ont été supprimés en octobre
1989. Les banques ont eu toute la latitude pour financer l'économie sur
la base de critères exclusivement financiers. Pour les États
souhaitant favoriser le financement des secteurs considérés
prioritaires, ils ont été invités à rechercher
d'autres mécanismes d'incitation fiscale ou financière. Cependant
la libéralisation financière n'a pas eu les effets
escomptés. La libéralisation financière ne s'est pas
accompagnée du développement du système financier en
Afrique. La libéralisation financière n'a pas favorisé
l'expansion des crédits au secteur privé dans les pays africains
comme cela avait été escompté. Les déconvenues de
la libéralisation financière ont conduit à tempérer
l'enthousiasme initial quant aux effets bénéfiques du
développement financier (Andersen et Tarp, 2003). La
libéralisation des systèmes financiers semble avoir induit une
rapide croissance financière mais aussi une forte instabilité
financière dans les pays en développement. D'autre part Mc Kinnon
et Schaw en proposant de libérer le système financier, fondaient
leur analyse sur l'hypothèse implicite que le marché financier
est un marché parfait. Stiglitz et Weiss (1981) ont
démontré qu'il pouvait exister un rationnement de crédit
même sur des marchés compétitifs de crédit. La
libéralisation financière pourrait dès lors être
inefficace compte tenu des imperfections du marché de crédit. La
hausse des taux d'intérêt est perçue
généralement comme la caractérisation de la
libéralisation financière et l'ouverture internationale sur le
monde financier. Toutefois les pays qui ont libéralisé de
manière progressive leurs systèmes financiers dans des conditions
de croissance et de stabilité macroéconomique ont connu une
hausse tempérée des taux d'intérêt ; par contre si
la conjoncture économique est mauvaise par exemple dans le cas d'une
inflation, la hausse des taux d'intérêt peut être brutale si
les autorités pratiquent une politique monétaire restrictive
visant à maitriser l'inflation. La libéralisation
financière peut aussi entrainer de graves
30
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
dangers dans les réformes structurelles. La hausse des
taux d'intérêt provoque une hausse des coûts que supportent
déjà les entreprises qui doivent aussi et maintenant s'ajuster
aux nouvelles conditions de prix relatifs de crédit. Un certain nombre
d'économistes trouvent aussi à la libéralisation
financière quelques insuffisances. En premier lieu l'augmentation de la
monnaie scripturale qui accompagne l'augmentation de la masse monétaire
comporte un risque de crise bancaire. L'incapacité d'une banque à
assurer la liquidité des dépôts entrainant ainsi sa
défaillance peut rapidement se transmettre à l'ensemble du
système financier en l'absence d'un système efficace de
surveillance des banques et d'assurance des dépôts. Ainsi un
développement trop rapide de la monnaie scripturale qui ne peut
s'accompagner de la mise en place d'un véritable système de
surveillance peut engendrer des défaillances bancaires en série.
L'augmentation du nombre des banques et de la concurrence tend à
réduire la longévité des relations entre les banques et
les clients ; les clients passant plus rapidement d'une banque à une
autre. D'autre part, l'intensification de la concurrence conduit les banques
à élever les taux d'intérêt créditeurs pour
non seulement conserver les dépôts mais aussi attirer de nouveaux
dépôts ce qui tend à réduire leur marge. Ceci est
considéré comme favorable au développement de
l'épargne et de l'investissement. Mais la réduction de la marge
bancaire peut conduire les banques à accroitre leur rendement en
acquérant des actifs plus risqués et ceci en adoptant un
comportement de spéculateur. Une autre explication de la prise excessive
de risques par les banques fait référence à un possible
comportement d'aléa moral. Selon l'analyse de Stiglitz et de Weiss
(1981), le comportement normal d'une banque face à l'incertitude est de
limiter volontairement son taux d'intérêt et réduire la
demande de crédit afin d'éviter dans un contexte
d'asymétrie d'information, une sélection adverse. Le comportement
d'aléa moral des banques s'exprime par le fait que les banques sont
incitées à faire des prêts très risqués
à des taux d'intérêt excessivement élevés ,
à prendre des risques de change et de transformation des
échéances pour accroitre leur activité avec l'idée
que si la conjoncture reste favorable elles feront d'importants profits, alors
que, si la conjoncture se retourne en entrainant la défaillance de
nombreux emprunteurs, les pertes massives du système bancaire seront
prises en charge par l'autorité monétaire nationale ou les
institutions financières internationales. L'idée que le
développement financier peut permettre le développement
économique n'est donc possible qu'à la réunion d'un
certain nombre de conditions. Ces conditions préalables sont en fait au
nombre de deux : un environnement macroéconomique stable et une
surveillance adéquate de système bancaire. La première
31
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
condition suppose des déficits gouvernementaux et
extérieurs raisonnables et un taux d'inflation faible. Quant à la
surveillance du système bancaire, elle vise à empêcher des
banques de succomber à la tentation d'une gestion risquée
lorsqu'elles évoluent dans un environnement moins
réglementé.
32
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
CHAPITRE II
DETERMINANTS DU DEVELOPPEMENT FINANCIER
ET PRESENTATION DU SECTEUR FINANCIER DES PAYS DE LA ZONE
FRANC
SECTION 1. LES DETERMINANTS DU DEVELOPPEMENT
FINANCIER
La recherche et l'évaluation de l'impact du
développement financier sur la croissance conduit à rechercher
d'abord les facteurs qui sous-tendent le développement financier afin de
pouvoir mettre sur pied une politique de développement du système
financier. On est alors amené à se demander quels sont les
facteurs qui conditionnent le développement financier, et quelles sont
en conséquence, les mesures ou les politiques en termes de finance
capables de favoriser la croissance économique. Une approche formelle
basée sur les règles de droit et de leur application et une autre
sur les facteurs sociaux et culturels permettront de statuer sur les facteurs
déterminants du développement financier. Ces approches mettent en
jeu l'ensemble des institutions et facteurs qui coordonnent les
activités des agents économiques. L'efficience d'un
système financier se juge à la façon dont il participe
à l'optimisation des comportements des agents économiques dans
l'économie.
Paragraphe 1 : l'approche juridique et institutionnelle
L'approche juridique et institutionnelle explique le
développement financier par la présence des institutions mais
aussi par les règles de droit et leur application. On en distingue entre
autres :
33
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
? Le cadre juridique et réglementaire
Le cadre juridique et réglementaire est perçu
dans le monde financier comme le facteur le plus important à la
réalisation des transactions financières. La qualité du
cadre juridique est donc très nécessaire pour réaliser des
opérations financières. Un système financier est avant
tout une affaire de contrats. Le cadre juridique est un facteur essentiel pour
que les apporteurs de capitaux soient en mesure de faire respecter leurs
intérêts en cas de conflits avec les utilisateurs de ces capitaux
à l'instar des entreprises par exemple. Dès lors, la
réglementation des intermédiaires et des marchés
financiers apparaissent comme des déterminants majeurs du
développement financier. La réglementation financière est
reconnue à deux niveaux lorsqu'il s'agit des opérations de
marchés. Il s'agit d'une part d'obliger les entreprises qui utilisent
les capitaux à fournir des informations aux investisseurs ou apporteurs
de capitaux comme la présentation des comptes, la communication sur
certaines opérations et la gouvernance par exemple ainsi que des
possibilités de contestation auprès de juridictions
compétentes des décisions des dirigeants ou des actionnaires
majoritaires. Il s'agit dans un second temps de prendre en compte le statut et
l'étendue des pouvoirs de l'autorité de régulation : son
indépendance, ses pouvoirs d'investigation, les sanctions qu'elle peut
imposer. Cette théorie soutient que dans les pays ou le système
judiciaire facilite les contrats entre les agents privés, et
protège les droits de propriété et les droits des
investisseurs, les épargnants sont plus enclins à investir dans
les entreprises, contribuant ainsi à l'expansion des marchés
financiers. A l'inverse, un système financier qui protège
très peu les droits de propriété et les droits des
investisseurs aura tendance à freiner le développement financier.
Les travaux de La Porta et al (2005), concluent que ce sont la qualité
des informations diffusées par les entreprises ainsi que les recours
dont disposent les investisseurs contre leur insuffisance ou leur
caractère erroné qui expliqueraient le niveau des
émissions, ou l'accessibilité du marché aux petites et
moyennes entreprises.
Par la suite, Levine et Beck (1999) montrent que les
intermédiaires financiers se développent davantage lorsque le
système juridique permet aux créanciers d'obtenir la
totalité du remboursement de leurs prêts en cas de faillite. Mais
cette théorie a été contestée par plusieurs
auteurs. Le caractère non liquide des actifs des établissements
financiers rend instables ces établissements financiers lequel fait
naître un aléa de moralité : une incitation à
prendre des risques excessifs puisque ceux-ci sont au moins partiellement pris
en charge par
34
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
l'institution d'assurance ou monétaire qu'elle soit
privée ou publique lorsqu'ils se matérialisent. Une
réglementation est donc nécessaire pour permettre la conclusion
et le respect de contrats équitables entre les banques d'une part, les
déposants et l'institution d'assurance des dépôts d'autre
part.
? La règle de « l'origine légale
»
D'après la règle de l'origine légale,
c'est l'origine historique des systèmes juridiques qui explique les
écarts de niveau de développement financier entre les pays.
L'origine légale du système juridique peut expliquer les
différences entre pays en matière de protection des droits des
investisseurs, de contrats et de niveaux de développement financier. Ce
courant connu sous l'expression « law and finance », est
initié à la suite des travaux de (LLSV)1 et explique
les facteurs déterminants du développement financier par
l'origine légale des systèmes juridiques. La mise en place d'un
cadre juridique respectueux des droits de propriété
c'est-à-dire des intérêts des investisseurs est la
condition nécessaire sinon suffisante du développement financier
et donc de la croissance.
Le système anglo-saxon de « common law »
faciliterait le recours des entreprises aux financements de marchés ;
privilégie le respect des droits de propriété
privés parce qu'il préserve mieux les intérêts des
apporteurs de capitaux et parce qu'il est plus souple et mieux adapté
aux innovations. Contrairement au système anglo-saxon, on pense que les
systèmes juridiques français à partir de leur histoire ont
été initiés pour renforcer le pouvoir de l'Etat par
rapport aux intérêts particuliers. La nature des sources du droit
est plus essentielle que le contenu des lois ; ce sont donc les fondements
mêmes des systèmes juridiques qui sont déterminants. Ceci
dit, il est impossible d'implanter un régime juridique de façon
artificielle sans égard pour la culture, les valeurs ou le
système institutionnel du pays concerné. La protection des
investisseurs et des créditeurs serait mieux expliquée par les
modèles culturels avec lesquels elle s'accorde, que par le principe de
l'origine légale.
1 La Porta, Lopez de Silanes,
Shleifer, Vishny (1997) et (1998).
35
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
Paragraphe 2. L'approche idéologique et sociale
Elle définit et explique le développement
financier par des facteurs idéologiques, sociaux, historiques. Nous
avons entre autres :
? La théorie des dotations
L'origine de cette théorie vient Acemoglu et de
Robinson (2001) dans laquelle les différences de taux de
mortalité des colons sont utilisées pour expliquer l'impact des
institutions sur les performances économiques. Pour Levine et Beck
(2003), la formation des institutions qui vont promouvoir le
développement financier dépend de l'hostilité de
l'environnement auquel ont fait face les européens durant la
période de colonisation. Donc, les pays dont le taux de mortalité
des colons était élevé ont tendance à moins
protéger les droits de propriété et à avoir un
faible niveau de développement des banques et des marchés
financiers. Les dotations initiales et le taux de mortalité des colons
expliqueraient mieux les différences des niveaux de développement
financier entre pays que l'origine légale.
? La thèse politique
Cette thèse comporte deux approches : d'une part nous
avons l'approche économique proposée par Pagano et Volpin (2001)
qui a pour objectif d'analyser l'interventionnisme politique dans le secteur
financier. Ainsi les représentants politiques peuvent mettre en
application les réformes juridiques souhaitées et
suggérées par les groupes d'intérêt. De même
le facteur politique influe sur le développement bancaire et financier.
Les réformes politiques visant à augmenter la protection
juridique des créanciers peuvent induire des efforts de sélection
des emprunteurs. Une réforme qui a pour but d'augmenter
l'efficacité du système juridique incite les banques à
réduire la fréquence de vérification des résultats
des entreprises emprunteuses. D'autre part, s'installe l'approche
idéologique proposée par Roe (1999) qui montre que les choix
politiques, déterminants de la protection des investisseurs et la
qualité d'application des lois sur la protection des investisseurs sont
induits par des facteurs idéologiques.
36
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
? Finance et développement
Cette thèse est caractéristique des pays en
développement et repose essentiellement sur deux types de secteurs
financiers : un secteur formel et un secteur informel. En effet les
déterminants du développement des systèmes financiers
prennent tout leur sens dans les pays en développement, où
précisément, ils sont souvent à l'état
embryonnaire. Le manque d'institutions fortes et de cadre légal et
propice au développement du secteur financier dans les pays en
développement fait qu'en général le financement s'organise
localement autour de pratiques et coutumes que le monde occidental
désigne sous le terme de secteur informel. Elles coexistent avec un
système formel encore en peine dans de nombreux pays pauvres et dont le
développement ne peut pas simplement consister à vouloir plaquer
des pratiques occidentales dans un contexte aussi différent. L'une des
caractéristiques des systèmes financiers des pays pauvres est
leur grande fragmentation. Dans ce contexte, les intermédiaires
financiers informels et les institutions formelles jouent souvent des
rôles complémentaires en fournissant des services financiers
différents à des groupes socioéconomiques
différents selon Nissanke et Aryeetey (2006). Les intermédiaires
informels disposent d'un avantage comparatif dans l'acquisition d'information
concernant les petits emprunteurs dont la vulnérabilité aux chocs
de revenu est difficile à observer. Par contre le secteur formel quant
à lui s'appuie sur un système légal et institutionnel qui
fait défaut aux petits emprunteurs. Das - Gupta et al (2006) dans une
étude en Inde ont trouvé que le secteur informel fournit
davantage de ressources que le secteur formel pour le fonctionnement de petites
entreprises dans le secteur manufacturier indien. Quoi qu'il en soit, une
mesure du développement financier fondé sur le seul secteur
formel ne capturerait qu'une faible partie du système financier et des
fonctions qu'il joue. De plus le terme « informel » lui-même
peut être trompeur, si on appelle ainsi tout ce qui ne correspond pas aux
« formes ou normes » occidentales d'après Guha-Khasnobis,
Kanbur et Ostrom (2005) qui pensent qu'il y a bien un secteur formel selon nos
normes. Ainsi le monde de la microfinance longtemps considéré
comme un secteur financier informel a connu ces dernières années
une avancée louable en facilitant l'accès des ménages et
ceux à revenu faible au crédit et leur proposer une assurance
contre le risque.
La relation entre finance et croissance apparaît comme
l'un des mécanismes puissants du développement économique.
La finance reste clairement l'un des points faibles et l'une des principales
contraintes dans les économies pauvres, notamment en Afrique
sub-saharienne où
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
les entreprises considèrent que l'accès aux
ressources financières et le coût de ces ressources sont des
handicaps majeurs pour leur fonctionnement et leur croissance. Selon le rapport
de la Banque mondiale (2006) les marchés financiers sont très peu
fournis, l'intermédiation faiblement développée. Les
ressources mobilisées par le secteur bancaire ne représentent que
31 % du PIB en moyenne en Afrique contre 54 % en Asie de l'Est et 100 % dans
les pays à revenu élevé. Le crédit au secteur
privé ne compte en Afrique que pour 18 % du PIB (11 % dans les pays
d'Afrique à faible revenu), contre 27 % en Asie du Sud et 109 % dans les
pays à revenu élevé2.
La Banque mondiale (2006) a souligné deux situations
à éviter pour les pays en développement. Le premier
consiste à chercher à plaquer les bonnes pratiques techniques,
réglementaires, légales et institutionnelles des pays
avancés sans prendre en compte les spécificités locales,
les carences réglementaires ni l'inadéquation de techniques des
pays industrialisés au contexte local. On peut penser à la
très pressante recommandation d'ouverture et de libéralisation
des systèmes financiers dans les pays pauvres dans les
années1990. Les crises financières très coûteuses
dont ont été victimes plusieurs pays en développement
témoignent des risques d'une politique d'ouverture mal
maîtrisée mais à l'inverse seule l'ouverture et la
concurrence des institutions financières étrangères
peuvent renforcer les institutions locales et la qualité des services
financiers fournis. La seconde consiste à l'inverse, à soutenir
les institutions et pratiques locales sans prendre suffisamment en compte les
enjeux de gouvernance. Il faut naviguer entre ces deux situations dans une
approche fondée sur une bonne connaissance des contextes sociaux selon
la Banque mondiale (2006).
37
2 Rapport de la Banque mondiale sur les finances en
Afrique (2006)
38
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
SECTION 2 : HISTORIQUE ET PRESENTATION DU SECTEUR
FINANCIER DE LA ZONE FRANC
Cette section présente la genèse de la zone
franc et l'évolution historique à travers le temps du paysage
financier des pays de la zone franc.
Paragraphe I : Evolution historique de la zone franc
La zone franc constitue un espace monétaire,
économique et culturel. Cet ensemble, formé d'Etats est issu de
l'évolution et des transformations de l'ancien Empire colonial
français. La zone franc rassemble aujourd'hui la France et quinze Etats
africains : le Benin, le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire, le Mali, le
Niger, le Sénégal et le Togo pour l'Afrique de l'Ouest ; le
Cameroun, la Centrafrique, le Congo, le Gabon, la Guinée Equatoriale et
le Tchad pour l'Afrique Centrale ; tous des anciennes colonies
françaises et les Comores ancienne colonie portugaise. La
Guinée-Bissau deviendra membre de la zone franc en 1997. Le but
principal de la création de cette zone est d'aider à la
stabilité de l'environnement macroéconomique de ces pays par
l'instauration d'une discipline monétaire (Banque de France 2010).
L'accession à l'indépendance entre 1954 et 1962 des territoires
antérieurement placés sous la tutelle de la France n'a pas
provoqué l'éclatement de la zone3. Au contraire les
Etats ayant choisi de rester dans la zone constituèrent un ensemble plus
homogène. Le système monétaire instauré à
cette époque a permis à la zone franc de demeurer un ensemble
monétaire intégré autour de la France et de sa monnaie. Le
cadre de coopération entre la France et ses partenaires a
été considérablement modifié par le fait que la
France a reconnu aux Etats d'Afrique Subsaharienne de la zone franc le droit de
disposer de leur propre monnaie et de leur propre institut d'émission.
En Avril 1959, six Etats nouvellement indépendants d'Afrique occidentale
: Cote d'Ivoire, Burkina Faso, Bénin, Mauritanie Niger,
Sénégal auxquels se joindra le Togo en 1963 s'associèrent
pour créer de la Banque Centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest
(BCEAO) en remplacement de l'institut d'émission de l'Afrique
Occidentale Française (AOF) et du Togo pour gérer leur monnaie
commune le Franc CFA (le franc de la Communauté Financière
africaine). En Mai 1962, ces mêmes Etats fondent l'Union Monétaire
Ouest-africain (UMOA). Le Mali qui préféra créer sa
propre
3 Se sont retirés de la zone franc : le Maroc,
l'Algérie et la Tunisie (entre 1956 et 1962), la Guinée en
1958.
39
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
banque d'émission et adopter sa monnaie demanda son
adhésion à l'UMOA en 1967 à la suite de graves
difficultés financières. Son adhésion sera effective en
Juin 1984 lorsque la Banque du Mali transféra son privilège
à la BCEAO. Ces pays par la suite vont créer une union
économique et monétaire dénommée UEMOA en 1994. Ces
pays seront rejoints dans l'UEMOA et dans la zone franc par la Guinée
Bissau en 1997.
En Afrique centrale cinq Etats : le Cameroun, la Centrafrique,
le Congo, le Gabon et le Tchad ont créé en 1959 la Banque
centrale des Etats de l'Afrique équatoriale et du Cameroun (BCEAEC) qui
s'est substituée à l'institut d'émission de l'Afrique
équatoriale et du Cameroun. Elle a pour mission de gérer
l'émission du franc CFA (franc de la Coopération
financière en Afrique centrale) dont la parité avec le franc
français est identique à celle de la monnaie ouest-africaine. La
BCEAEC deviendra par la suite la BEAC (Banque des Etats de l'Afrique Centrale).
En 1994 tout comme l'UEMOA, la CEMAC sera créée par ces pays de
l'Afrique centrale. Le transfert effectif des sièges en Afrique des deux
banques centrales a eu lieu en 1977 pour la BEAC (Yaoundé) et en 1978
pour la BCEAO (Dakar).
De nos jours les systèmes financiers de l'UEMOA et de
la CEMAC sont composés respectivement de la Banque Centrale des Etats de
l'Afrique de l'Ouest (BCEAO) et de la Banque des Etas de l'Afrique Centrale
(BEAC) qui sont les instituts d'émission pour les pays de l'UEMOA et de
la CEMAC. Ces instituts d'émission disposent d'une direction nationale
dans chacun des pays selon leur appartenance aux différentes unions
monétaires. Le système financier de l'UEMOA et de la CEMAC
à part les banques centrales est complété par des banques
commerciales et d'établissements financiers. Les banques et les
établissements financiers sont les vecteurs de la politique
monétaire des différentes banques centrales dans la zone
franc.
Paragraphe 2. Description du paysage financier de la zone
franc
Le paysage financier de la zone franc peut être
décrit selon que presque tous les pays de la zone franc font partie
d'une union économique ou communauté économique. Aussi le
paysage financier de la zone franc sera analysé géographiquement
par l'appartenance des pays aux différentes unions ou communautés
économiques au sein de la zone franc. Il s'agira d'analyser le paysage
financier de l'UEMOA pour les pays de la zone franc de l'Afrique de
40
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
l'Ouest, de la CEMAC pour les pays de l'Afrique Centrale
essentiellement au cours de cette dernière décennie.
A. Paysage financier de l'UEMOA de 2000 à
2010
Le financement des économies de l'Union Economique et
Monétaire Ouest-Africain (UEMOA) constitue un des défis majeurs
auquel les Etats sont confrontés depuis quelques années. En effet
en dépit des initiatives conduites par les Etats et les institutions
communautaires dans les pays de l'union, l'analyse révèle d'une
part, que l'activité économique reste encore insuffisamment
financée et d'autre part que les financements octroyés ne sont
pas toujours alloués aux secteurs porteurs de croissance. Malgré
l'abondance apparente de liquidité et l'assainissement du système
bancaire suite à la restructuration du début des années
1990, la contribution du secteur bancaire au financement des économies
de l'union reste faible. Cette contribution mesurée
généralement par le rapport des crédits à
l'économie au PIB est passée de 14% en 2000 à 18% en 2009
contre un ratio de 34% au Nigéria, 77% au Maroc et 145% en Afrique du
sud. Ainsi les petites et moyennes entreprises (PME) et les petites et moyennes
industries (PMI) des secteurs primaire et secondaire, potentiellement
créateurs d'emplois, sont insuffisamment financées. Par ailleurs
le coût du crédit reste élevé. En effet les marges
d'intérêt des banques sur les opérations avec la
clientèle, mesurée par la différence entre les rendements
des prêts et les coûts moyens des ressources provenant de la
clientèle est de près de 9 points de pourcentage dans l'union en
2008, contre une moyenne africaine de 8 points et de 5 points à
l'échelle mondiale (AFD, 2007). Les difficultés d'accès
des populations aux services financiers surtout bancaires ont favorisé
la floraison des institutions de microfinance. Ces dernières visent la
mise à la disposition des populations généralement exclues
du système bancaire, des services financiers adaptés à
leurs besoins. Au 31décembre 2009, près de 10,7 millions de
personnes sont clientes auprès de ces institutions financières de
microfinance (BCEAO, 2010).
Depuis quelques années le secteur financier de l'Union
connait une progression louable en nombre d'établissements et en
réseau bancaire. Les pays qui ont connu une forte progression de leur
réseau sont : le Benin avec un taux de croissance de 90%, le Niger avec
41,66%, le Togo avec 39,44%. Le taux de progression le plus faible est
enregistré par le Mali avec 26,13% (Commission bancaire de l'UEMOA,
2008). Dans les Etats membres de l'UEMOA, les services financiers postaux
disposent d'une clientèle assez large. Le reversement de leurs clients
ou de leur immense majorité dans le secteur bancaire par le biais d'une
transformation
41
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
institutionnelle serait d'un gain important pour le processus
de massification de la bancarisation. L'expérience récente du
TOGO qui a enregistré en 2007, une progression de plus de 275% du nombre
total de comptes bancaires actifs dans le pays grâce à la
transformation en Banque Populaire pour l'Epargne et le Crédit (BPEC) de
la Caisse d'Epargne du TOGO est assez illustrative. Toutes ces institutions
contribuent à densifier le réseau bancaire de l'Union et
facilitent quelque peu l'accès des populations aux services bancaires.
Toutefois le taux de bancarisation reste très faible dans l'Union. Le
taux de bancarisation reste faible et se situe entre 3 et 7 % dans l'espace de
l'Union économique et monétaire ouest-africain malgré la
présence dans la zone de près de 120 établissements
financiers, a indiqué un haut cadre de la sous-région. «
Après 50 ans d'indépendance, le résultat n'est vraiment
pas satisfaisant si l'on tient compte du nombre de banques et
d'établissements financiers dans notre zone », a notamment
déclaré Abdoulaye Bio Tchané, ancien Président de
la Banque Ouest Africaine de Développement (BOAD). De plus Dans cet
espace économique, les banques françaises conservent des
positions fortes notamment la BNP, la Société
Générale, le Crédit Agricole et le Crédit Lyonnais.
Compte tenu du fait que dans l'union les dépôts de la
clientèle progressent plus vite que les crédits à la
clientèle le système bancaire comporte souvent une situation de
trésorerie nette largement excédentaire mais n'arrive pas
à se mettre en valeur pour financer le développement
économique de l'Union. La problématique du développement
du secteur financier reste toujours d'actualité. En effet, le
financement de l'activité économique dans l'Union Economique
Monétaire Ouest africaine (UEMOA) est essentiellement assuré par
le secteur bancaire qui depuis le début des années 90, a
enregistré d'importantes réformes axées sur sa
libéralisation. Cependant, le développement du marché
financier de l'union demeure faible et sa contribution au financement des
économies de l'UEMOA reste marginale. Les réformes du
système financier mises en oeuvre au cours des années 1990 ont
permis à l'UEMOA de se doter des composantes essentielles d'un
système financier moderne et diversifié. Ce système pour
tout l'espace UEMOA est composé au 31 décembre 2005 : de 112
établissements de crédit, 652 institutions de microfinance, des
services financiers postaux, une bourse régionale de valeurs
mobilières et des caisses publiques de pension. Au 31 décembre
2007, on compte en banques selon les pays de l'UEMOA :
42
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
Tableau 1 : Répartition des banques par pays
membre de l'UEMOA du 31 décembre 1996 au 31 décembre 2007.
|
1996
|
1997
|
1998
|
1999
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
2004
|
2005
|
2006
|
2007
|
Bénin
|
5
|
7
|
7
|
7
|
7
|
6
|
7
|
8
|
9
|
12
|
12
|
12
|
Burkina-Faso
|
5
|
5
|
5
|
5
|
5
|
7
|
7
|
8
|
8
|
11
|
11
|
12
|
Côte-D'ivoire
|
15
|
15
|
15
|
15
|
16
|
16
|
16
|
17
|
16
|
17
|
18
|
18
|
Guinée- Bissau
|
-
|
2
|
2
|
3
|
3
|
3
|
2
|
2
|
2
|
3
|
4
|
4
|
Mali
|
7
|
7
|
9
|
9
|
9
|
9
|
9
|
10
|
10
|
12
|
12
|
13
|
Niger
|
6
|
6
|
6
|
7
|
7
|
7
|
7
|
8
|
8
|
10
|
10
|
10
|
Sénégal
|
9
|
9
|
9
|
10
|
10
|
11
|
11
|
12
|
12
|
17
|
18
|
17
|
Togo
|
7
|
7
|
7
|
7
|
7
|
7
|
7
|
7
|
7
|
10
|
10
|
10
|
UEMOA
|
54
|
58
|
60
|
63
|
64
|
66
|
66
|
72
|
72
|
92
|
95
|
96
|
Source : BCEAO (2007)
Quatre ans après c'est-à-dire au 31 décembre
2010, elle comporte :
Tableau 2 : Répartition des banques et
établissements financiers par pays membre de l'UEMOA au
31décembre 2010.
Pays
|
Banques
|
Etablissements
|
|
|
financiers
|
|
Benin
|
12
|
2
|
Burkina Faso
|
13
|
5
|
Cote d'Ivoire
|
16
|
6
|
Guinée-Bissau
|
5
|
0
|
Mali
|
13
|
3
|
Niger
|
11
|
1
|
Sénégal
|
18
|
3
|
Togo
|
12
|
2
|
UEMOA
|
100
|
22
|
Source : Annuaires banques BCEAO (2010)
Graphique 1 : Evolution du nombre de banques dans
l'UEMOA de 1995-2010
43
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.

Source : élaboré par l'auteur à
partir des données de la BCEAO
B. Le paysage financier de la CEMAC de 2000 à
2010
Les pays de la CEMAC tout comme les autres pays en
développement font face à des besoins en ressources
financières pour financer le développemet de leurs
économies. Le système financier de la CEMAC reste dominé
par les institutions bancaires, dont le comportement se caractérise par
une gestion très prudente en matière d'octroi de crédit
due à la volatilité des ressources, le niveau élevé
des créances douteuses et l'insécurité du cadre juridique
dans la plupart des pays membres (Banque de France, 2009). On compte au 31
décembre 2005 : 33 banques et 16 établissements financiers. Les
33 banques se répartissent comme suit : 10 au Cameroun, 3 en
Centrafrique, 4 au Congo, 6 au Gabon, 3 en Guinée Equatoriale et 7 au
Tchad. Au 31 décembre 2009 on compte dans toute la zone : 43 banques en
activité, 699 établissements de microfinance et 16
établissements financiers alors que le nombre de banques
s'établissait à 29 en 2000 (Banque de France, 2009). Le total des
dépôts bancaires a atteint 4995 milliards de francs CFA fin 2009
contre 1637 milliards en 2000, soit une hausse de 205%. Les crédits
à l'économie ont suivi cette même tendance passant de
1397
44
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
milliards de francs CFA en 2000 à 3034 milliards, en
progression de 117,1%. Cependant la part des dépôts bancaires et
celle des crédits à l'économie par rapport au PIB sont
restées faibles passant respectivement de 10,9% en 2000 à 16,9%
en 2009 et 9,3% à 10,2%.
Tableau 3 : statistiques bancaires de la
CEMAC
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
2004
|
2005
|
2006
|
2007
|
2008
|
2009
|
Dépôts bancaires en milliards
|
1637,4
|
1698,5
|
2087,5
|
2099,2
|
2364,8
|
2921,3
|
3399,8
|
4416,3
|
4684,4
|
4994,9
|
crédit en milliards
|
1397,1
|
1500,2
|
1596,9
|
1673,9
|
1650,3
|
1852,9
|
2019,4
|
2268,6
|
2872,6
|
3034,2
|
Dépôt/PIB%
|
10,91
|
10,39
|
12,52
|
12,05
|
16,16
|
12,08
|
12,59
|
15,48
|
13,75
|
16,72
|
crédit/PIB%
|
9,31
|
9,52
|
9,57
|
9,6
|
8,48
|
7,67
|
7,45
|
7,95
|
8,44
|
10,19
|
Intérêts des
prêts %
|
14,34
|
13,13
|
12,46
|
11,11
|
11,04
|
10,93
|
11,48
|
10,98
|
9,18
|
9,31
|
Couts des
ressources%
|
2,75
|
2,71
|
2,65
|
2,55
|
2,53
|
2,21
|
2,24
|
1,59
|
1,11
|
1,41
|
Marge d'intérêt %
|
11,59
|
10,62
|
9,81
|
8,56
|
8,52
|
8,72
|
9,24
|
9,34
|
8,03
|
7,9
|
Population %
|
31,1
|
31,9
|
32,9
|
33,7
|
34,6
|
35,5
|
36,6
|
37,5
|
38,4
|
39,4
|
Nombre de comptes
|
139059
|
153539
|
164941
|
290555
|
373215
|
441995
|
492471
|
585338
|
665759
|
987686
|
Nombre de guichets
|
95
|
107
|
112
|
130
|
139
|
145
|
190
|
213
|
243
|
275
|
compte/pop
|
0,45
|
0,48
|
0,5
|
0,86
|
1,08
|
1,25
|
1,35
|
1,56
|
1,73
|
2,51
|
Guichet/pop
|
0,0003
|
0,0003
|
0,0003
|
0,0004
|
0,0004
|
0,0004
|
0,0005
|
0,0006
|
0,0006
|
0,0007
|
Source : BEAC (2010)
Sur la même période les intérêts
moyens des prêts ont reculé, revenant de 14,3% en 2000 à
9,3% en 2009. Cette baisse s'explique par l'augmentation du nombre
d'établissements bancaires qui accroit la concurrence. Il est de
même pour les coûts des ressources qui ont enregistré une
baisse, s'établissant à 1,4% en 2009 contre 2,8% dix ans plus
tôt. Par conséquent les marges d'intérêt se sont
contractées ressortant à 7,9% en 2009 contre 11,6% en
45
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
2000. Par ailleurs l'analyse par terme des encours de
crédits octroyés au cours de la période montre un
désengagement des banques de la CEMAC du financement des investissements
compte tenu du faible crédit sur la période
considérée.
Tableau 4 : Evolution des crédits à
l'économie suivant le terme dans la CEMAC (en milliards de francs
CFA)
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
2004
|
2005
|
2006
|
2007
|
2008
|
2009
|
Court terme
|
1030,2
|
1107,9
|
1126,5
|
1153,8
|
1115,4
|
1239,0
|
1233,4
|
1371,3
|
1800,5
|
1823,0
|
Moyen terme
|
320,2
|
348,5
|
426,3
|
474,1
|
491,9
|
556,7
|
721,6
|
834,4
|
994,8
|
1102,7
|
Long terme
|
46,7
|
43,8
|
43,5
|
45,9
|
42,9
|
57,2
|
64,4
|
62,8
|
77,2
|
108,4
|
CEMAC
|
1397,1
|
1500,2
|
1593,3
|
1673,9
|
1650,3
|
1852,9
|
2019,4
|
2268,6
|
2872,6
|
3034,2
|
Source : BEAC (2010).
Graphique 2. Evolution de l'octroi des crédits
à l'économie selon les termes

Source : élaboré par l'auteur à
partir des données de la BEAC
46
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
Pour sa part le secteur de la microfinance a connu une
évolution notable au lendemain des crises bancaires des années
1980. En effet l'accroissement du nombre d'établissements de
microfinance s'est accompagné d'une forte augmentation de plus de 282
milliards de francs de dépôts et de plus de 140 milliards de
crédits distribués par ce secteur (BEAC, 2010). S'agissant des
marchés financiers de la sous-région, la Bourse des valeurs
mobilières de l'Afrique centrale (BVMAC) a enregistré trois
valeurs à sa cote depuis son lancement en 2008 (BEAC, 2010).
En somme la faiblesse des crédits des institutions
financières à l'économie de la zone franc est frappante
(9% du PIB en CEMAC, 17% dans l'UEMOA). Les systèmes financiers des pays
de la zone franc sont peu profonds. Le total des bilans des banques de l'UEMOA
et de la CEMAC est inférieur à la somme des actifs de la
première banque sud-africaine. Les mauvaises performances en
matière de collecte de l'épargne dans la zone franc s'expliquent
généralement par des facteurs exogènes au secteur
financier tels le comportement d'épargne, la faiblesse des revenus, la
thésaurisation informelle et le manque de confiance dans le
système bancaire mais aussi par des choix propres aux acteurs financiers
comme le manque de produits innovants et la faible rémunération
de l'épargne selon l'AFD (2009). La contrainte financière est
fortement ressentie par les chefs d'entreprise dans les pays de la zone franc
que dans les autres régions du monde. Ces contraintes s'expliquent selon
la nationalité, le secteur d'activité et la taille de
l'entreprise. Les contraintes d'accès au financement sont avant tout
exacerbées pour les investisseurs locaux, les étrangers trouvant
plus facilement des solutions. La nationalité du détenteur des
capitaux est un puissant facteur de discrimination dans l'accès aux
services financiers. Selon l'AFD (2009), au Mali par exemple, 50% des
entreprises locales interrogées déclarent
bénéficier des services bancaires contre 75% des entreprises
contrôlées par des capitaux étrangers. Cet écart est
encore plus important au Benin ou 19,2% des entreprises locales ont
accès aux services bancaires contre 60% des entreprises
étrangères. Au sein de secteur manufacturier au Mali, la
moitié des TPE (très petite entreprise) ayant sollicité un
crédit se sont vues opposer un refus contre 24% des petites entreprises
et 16,67% des moyennes entreprises (PME/PMI). Cet accès
préjudiciable aux TPE est d'autant préjudiciable à
l'économie que les TPE emploient une grande partie de la population
active et produisent pour satisfaire la demande intérieure. Au final
dans les PAZF, mieux vaut être une grande entreprise détenue par
des capitaux étrangers que PME à capitaux nationaux produisant
pour satisfaire la demande intérieure. Au Benin, au Cameroun, au
47
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
Burkina Faso, les banques exigent une garantie avant
d'accorder un prêt dans plus de 90% des cas. Ce n'est pas tant le
principe de la demande de garantie qui fait problème mais le niveau de
la garantie demandée. Le tableau ci-dessous présente une
étude comparative des garanties exigées pour l'octroi de
prêts entre certains pays de la zone franc et d'autres pays en
développement.
Tableau 5 : Analyse des garanties exigées pour
l'octroi des prêts
Pays
|
Pourcentage des prêts
nécessitant une garantie
|
Valeur de la garantie
pour un prêt en % du prêt
|
Afrique du sud
|
61,11
|
123,82
|
Benin
|
90,57
|
118,68
|
Burkina Faso
|
90,24
|
124,28
|
Cameroun
|
90,16
|
130,98
|
Kenya
|
86,14
|
172,45
|
Mali
|
-
|
117,53
|
Niger
|
83,05
|
102,89
|
Ouganda
|
93,22
|
112,94
|
Sénégal
|
-
|
108,03
|
Source ; Banque Mondiale (2004)
Cette prudence des banques selon la Banque mondiale s'explique
en partie par la difficulté d'utiliser le foncier comme garantie en
raison des lacunes du système hypothécaire dans un espace
caractérisé par des niveaux de pauvreté
élevés, une forte insécurité juridique et la
prédominance de relations informelles entre agents économiques.
Plus généralement la prudence des banques comme des autres
institutions financières s'explique par le haut degré
d'incertitude qui entoure l'activité et la pérennité des
entreprises. De plus l'autofinancement constitue la première source des
investissements dans les pays de la zone franc devant le crédit bancaire
selon le tableau ci-dessous :
48
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
Tableau 6 : sources de financement des investissements
de la zone franc
Pays
|
auto-
financement
|
Financement bancaire
|
Financement informel
|
Crédit- bail
|
Financement public
|
Carte de
crédit
|
Financement par action
|
Afrique du sud
|
58,5
|
16,5
|
1,1
|
15,6
|
0,7
|
0,0
|
0,1
|
Benin
|
77,1
|
13,7
|
2,7
|
0,2
|
2,8
|
0,0
|
0,8
|
Burkina Faso
|
72,9
|
16,7
|
3,2
|
0,0
|
4,4
|
0,0
|
0,0
|
Cameroun
|
67,9
|
12,4
|
6,3
|
0,0
|
1,2
|
0,0
|
4,0
|
Kenya
|
52,7
|
32,4
|
1,5
|
0,2
|
0,4
|
0,8
|
0,4
|
Mali
|
84,7
|
11,7
|
1,8
|
0,0
|
1,5
|
0,0
|
0,0
|
Niger
|
87,0
|
9,7
|
0,1
|
0,0
|
1,9
|
0,0
|
0,0
|
Ouganda
|
71,4
|
13,5
|
3,5
|
2,4
|
2,2
|
0,0
|
0,0
|
Sénégal
|
70,5
|
18,4
|
3,8
|
1,1
|
1,0
|
0,0
|
0,0
|
Source : Banque mondiale (2004)
L'autofinancement atteint des pics au Niger et au Mali (87% et
84%) alors que le financement bancaire oscille entre 9,7% au Niger et 18,44% au
Sénégal. On voit donc que le financement de l'économie par
voie bancaire reste limité y compris dans les économies plus
réputées et diversifiées comme le Cameroun. En 2006, le
taux de bancarisation dans l'UEMOA n'était que de 6% contre 4% dans la
CEMAC. Le fonds Monétaire International estime que le taux de
bancarisation tomberait à 0,8% en Centrafrique et à 0,4% au Tchad
(IMF, 2006). Au Cameroun, première économie de la zone franc par
son PIB, le taux de bancarisation n'est que de 3,7%. A titre de comparaison ce
taux est respectivement de 10% et de 40% au Kenya et au Botswana. Cette faible
bancarisation s'explique par des facteurs spécifiques aux institutions
financières selon Beck et al (2006). Le premier obstacle est le
coût des services : le cabinet sud-africain Genesis a estimé, dans
le cadre d'une étude réalisée en 2005, qu'il
n'était économiquement pas soutenable de demander à un
ménage de consacrer plus de 2% de son revenu à une
opération financière dans un pays en développement. Si
l'on retient ce seuil, alors les tarifs pratiqués pour les
opérateurs financiers dans la zone franc apparaissent prohibitifs et
constituent un puissant facteur d'exclusion pour les ménages. Au
49
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
Cameroun, le pays ayant le PIB le plus important de la zone,
le montant minimal pour ouvrir un compte bancaire représente environ
116% du revenu annuel par habitant, tandis que les frais de gestion annuels
avoisinent le quart du revenu annuel par habitant selon Beck et al (2006).
L'émission des actions et des obligations dans la zone
franc semble connaitre une progression sensible. Les émissions
obligataires lancées depuis 1999 sur la Bourse Régionale de
Valeurs Mobilières (BRVM), seule bourse réellement active dans la
zone franc est de 5 ans. Malheureusement, leur utilisation reste
réservée à un petit nombre de grandes entreprises
satisfaisant des critères stricts et les volumes encore levés
sont encore très faibles. Le cumul des fonds levés par voie
obligataire et par émission des actions entre 1997 et 2005
s'élève à 247 milliards environ soit une moyenne de 27
milliards de franc par an. Face aux difficultés éprouvées
par les ménages pour trouver une offre qui répond à leurs
besoins, ceux-ci ont largement recours au secteur informel et depuis quelques
années aux institutions de micro-finance agréées. La mise
en oeuvre de la loi sur les institutions de microfinance dénommée
loi PARMEC dans l'UEMOA adoptée en 1993 et de la réglementation
sur la microfinance en CEMAC en 2001, ont favorisé l'essor de ces
institutions. Quelques statistiques permettent d'illustrer le caractère
prometteur de la microfinance mais. Selon la BCEAO (2005), les institutions de
microfinance comptent dans l'UEMOA 3,7 millions de clients et détiennent
280 milliards de francs de dépôts. Au sein de la CEMAC, le
Cameroun est emblématique des potentialités de la microfinance.
Le secteur y est de loin le plus développé de la zone franc avec
652 institutions soit les trois quarts des institutions de microfinance
recensées dans la zone franc. D'une manière
générale ces institutions bénéficient auprès
de leurs épargnants d'une meilleure image que celles des banques
traditionnelles malgré le fort taux d'intérêt qu'elles
pratiquent sur les crédits.
Paragraphe 3 : Politique de développement
financier dans la zone franc
La notion de sous-développement financier dans les pays
africains de la zone franc est également liée aux politiques de
développement financier mises en oeuvre par les Etats depuis les
indépendances. Nous entendons par politiques de développement
financier, l'ensemble des actions poursuivies par la puissance publique ou ses
émanations afin de satisfaire les besoins
50
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
financiers des différentes catégories d'agents
économiques dans un pays donné. Leur mise en oeuvre peut se faire
à travers des mécanismes d'intervention directe de l'Etat
(financements sectoriels ou création d'institutions sous la supervision
de l'Etat), ou par des interventions indirectes (incitations ou la mise en
place d'un cadre réglementaire). Traditionnellement les politiques dites
interventionnistes ou dirigistes mettent l'accent sur le premier type
d'instruments tandis que les politiques à tendance libérale ont
davantage recours au second type d'outils. Les politiques de
développement financier mises en oeuvre dans les pays de la zone franc
(PAZF) depuis les indépendances ont évolué entre ces deux
extrêmes : interventionnistes et expansionnistes. Elles ont
été interventionnistes entre 1960 et 1980 et ont permis
d'améliorer la profondeur, la diversité et l'accessibilité
des systèmes financiers tout en créant leur instabilité ;
libérales des années 1980 à nos jours et elles ont
restauré la rentabilité et la stabilité des institutions
financières au détriment de leur accessibilité, de leur
diversité et de leur profondeur. En effet les décennies 1960-1980
correspondent pour les pays de la zone franc à un développement
financier. Des progrès sont réalisés dans trois dimensions
: la profondeur, l'accessibilité, la diversité. Les indicateurs
de profondeur attestent pour les pays de la zone franc une collecte nette des
dépôts qui passent en moyenne de 6% à 17% du PIB et dans
l'octroi des crédits à l'économie qui entre 1960 à
1980 progressent de 11 à 17% du PIB dans l'UEMOA et de 15 à plus
de 20% dans la CEMAC selon les estimations de la Banque mondiale (2006).
Au-delà de l'approfondissement financier, les Etats ont accordé
une place importante à l'accessibilité des systèmes
financiers aux populations. Ce positionnement est d'autant plus important pour
les Etats qu'il marque une rupture avec le système financier colonial
considéré comme extérieur à la
société africaine et source d'exclusion. Les politiques publiques
ont aussi favorisé la diversité des institutions à travers
une gamme variée de services financiers. Mais les crises
financières et économiques qui ont frappé les pays de la
zone franc dans les années 1980 vont précipiter le déclin
du processus de développement financier dû à un
renversement des priorités des autorités publiques et à un
dérapage dans la gouvernance des institutions financières. Les
difficultés éprouvées par certains pays à faire
face à leurs dépenses sur la seule base de leurs recettes et le
refus de la BCEAO et de la BEAC à leur accorder des aides
budgétaires ou de leur laisser la possibilité d'émettre
des emprunts vont contraindre les pays de la zone franc à mobiliser des
ressources auprès des banques publiques, des institutions
spécialisées afin de financer leur déficit
budgétaire. Les ambitieuses stratégies de développement
financier des années 1960 se sont heurtées à la
51
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
modification progressive des priorités des Etats qui
relèguent au second plan leurs objectifs de développement de long
terme (financement des projets d'investissement) au profit de leurs besoins
immédiats (financement du déficit). Ceci explique
l'interventionnisme poussé des autorités dans le secteur bancaire
qui prendra par la suite le nom de répression financière. La mal
gouvernance dans le secteur bancaire engendrée par l'interventionnisme
poussé des Etats conduira par la suite à des restructurations
dans le paysage financier de la zone franc avec l'arrivée des politiques
d'ajustement structurel qu'ont connues ces pays et qui ont
préconisées une libéralisation du système financier
dans ces pays. Les restructurations et les liquidations des institutions
financières de même que les réformes de lois bancaires ont
conduit à l'amélioration de la réglementation et de la
supervision du secteur bancaire. La stabilité et la rentabilité
des institutions étaient privilégiées à la
diversité, à l'accessibilité et à la profondeur des
institutions financières à partir des années 1980. Au
terme de ce parcours de plus d'un demi-siècle de développement
financier depuis les indépendances, la zone franc donne l'impression de
se retrouver au point de départ. Selon Barthélemy et Varoudakis
(1996), le système financier de la zone franc serait pris au
piège de ce qu'ils appellent un équilibre bas de
sous-développement financier.
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS
LES PAYS DE LA ZONE FRANC.
52
DEUXIEME PARTIE
INTERACTION EMPIRIQUE ENTRE DEVELOPPEMENT FINANCIER ET
CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LA ZONE FRANC
53
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
CHAPITRE III
LES PERFORMMANCES ECONOMIQUES DES PAYS DE LA
ZONE FRANC
Dans ce chapitre, une description des performances
économiques de chacun des pays de la zone franc retenus dans cette
étude sera abordée essentiellement au cours de la dernière
décennie selon que chaque pays est membre soit de l'UEMOA soit de la
CEMAC.
SECTION I : PERFORMANCES ECONOMIQUES DANS L'UEMOA
Les pays de l'UEMOA ont connu au cours de cette
dernière décennie une croissance presque mitigée par des
taux de croissance très décevants et encourageants par moments.
Une analyse de la croissance donne des taux de croissance du PIB en volume dans
l'union selon les pays :
Tableau 7 : Taux de croissance du PIB en volume (en
pourcentage)
|
2004
|
2005
|
2006
|
2007
|
2008
|
2009
|
Benin
|
3,1
|
2,9
|
3,8
|
4,6
|
5,0
|
2,7
|
Burkina-Faso
|
4,6
|
7,1
|
5,5
|
3,6
|
5,2
|
3,2
|
Cote d'ivoire
|
1,6
|
1,8
|
1,2
|
1,6
|
2,3
|
3,8
|
Guinée-Bissau
|
3,2
|
3,8
|
1,8
|
3,2
|
3,2
|
2,9
|
Mali
|
2,3
|
6,1
|
5,3
|
4,3
|
5,0
|
4,4
|
Niger
|
-0,8
|
7,4
|
5,1
|
3,4
|
9,3
|
-1,2
|
Sénégal
|
5,8
|
5,7
|
2,3
|
4,9
|
2,3
|
1,5
|
Togo
|
2,5
|
1,3
|
3,9
|
2,1
|
2,4
|
3,1
|
UEMOA
|
2,8
|
4,1
|
3,1
|
3,2
|
3,8
|
2,8
|
Source : BCEAO (2010)
54
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
Graphique 3 : variation du taux de croissance du PIB
en volume des pays de l'UEMOA


Source : élaboré par l'auteur à
partir des données de la BCEAO
55
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
En 2006 et 2007, le taux de croissance des pays membres de
l'UEMOA s'est stabilisé à 3,1% contre un peu plus de 4% en 2005.
Les progrès enregistrés dans la résolution des crises
sociopolitiques en Côte d'Ivoire, au Togo et en Guinée -Bissau ont
permis à ces Etats de renouer avec les institutions de Bretton Woods
mais ne se sont pas encore traduits par une augmentation significative de leur
taux de croissance. En 2009, l'activité économique dans les pays
de l'UEMOA a été affectée par les conséquences de
la crise économique et financière internationale. Le taux de
croissance des pays a marqué un ralentissement sensible par rapport
à 2008, passant de 3,8% à 2,8%. En effet la crise internationale
s'est principalement répercutée sur les pays de l'UEMOA par le
canal du commerce extérieur et au travers de la baisse des flux de
financement extérieur. Les soldes des balances de paiement se sont
détériorées à cause de la baisse de la demande
extérieure, la baisse des cours de la plupart des produits
d'exportation. Les flux privés de financement en particulier les envois
de fonds des migrants se sont également contractés.
SECTION 2: PERFORMANCES ECONOMIQUES DE LA CEMAC
Tout comme les pays de l'UEMOA, les pays de la CEMAC se sont
illustrés ces dernières années par des taux de croissance
décevants et encourageants par moments. Le tableau suivant
présente les différents taux de croissance du PIB en volume selon
les pays de ladite la communauté.
Tableau 8 : Taux de croissance du PIB en volume (en
pourcentage)
|
2004
|
2005
|
2006
|
2007
|
2008
|
2009
|
Cameroun
|
3,7
|
2,3
|
3,2
|
4,0
|
3,7
|
2,0
|
Congo
|
3,7
|
7,8
|
6,7
|
-2,5
|
5,2
|
6,7
|
Gabon
|
1,4
|
3,0
|
1,3
|
4,9
|
1,6
|
0,2
|
Centrafrique
|
3,5
|
3,0
|
4,3
|
3,8
|
2,0
|
1,4
|
CEMAC
|
6,6
|
3,7
|
3,1
|
4,7
|
3,9
|
2,1
|
Source : BEAC (2010)
56
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
Graphique 4 : variation du taux de croissance en
volume dans la zone CEMAC

Source : élaboré par l'auteur à
partir des données de la BEAC
Après le ralentissement observé en 2005 et 2006,
l'année 2007 a été marquée par une reprise de la
croissance dans la CEMAC. Les résultats de la croissance des pays de la
CEMAC restent fortement dépendants des évolutions de la
conjoncture pétrolière. Le Gabon (+5%) a ainsi enregistré
un taux de croissance soutenue. A l'inverse, le Congo a enregistré un
taux de croissance négatif (-2,5%). Les performances
macroéconomiques du Cameroun sont demeurées stables. En 2009,
l'activité économique s'est significativement ralentie en liaison
avec la crise économique globale, la croissance s'établissant
à 2,1% en termes réels. La crise économique s'est
propagée en zone CEMAC non pas par le canal financier comme dans les
économies développées mais essentiellement par les canaux
de transmission réels notamment par le biais du commerce
(pétrole, bois, autres matières premières). En 2009,
l'impact de la crise économique combinée au déclin
tendanciel de la production de pétrole observé dans la
57
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
plupart des pays producteurs de la CEMAC s'est traduit par une
faible croissance du secteur pétrolier qui représente près
du quart du PIB de la zone.
58
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
CHAPITRE IV
EVALUATION EMPIRIQUE DE LA RELATION DEVELOPPEMENT
FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE.
La présente étude couvre la période de
1960 à 2010 et porte sur un panel de 11 pays en voie de
développement membres de la zone franc à savoir les
pays4 de l'UEMOA et les pays de la CEMAC. Les données de
cette étude proviennent de la base de données de la Banque
mondiale « Africa Development Indicators » ADI
(2010) et « Penn World Table (2010) »
SECTION I : ANALYSE EMPIRIQUE DU LIEN DEVELOPPEMENT
FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS DE LA ZONE FRANC.
Paragraphe 1 : Cadre théorique du modèle et
présentation des variables
A. cadre théorique et présentation du
modèle de croissance
La naissance de la théorie moderne de la croissance a
été inaugurée par les travaux de Harrod (1939-1948) et
Domar (1946-1947). Les deux auteurs ont visé une extension de l'analyse
keynesienne qui est de court terme où les implications du niveau
d'investissement et d'épargne sur le stock de capital peuvent être
ignorées en une analyse de long terme, qui ne peut négliger le
fait que les dépenses d'investissement augmentent le stock de capital.
Cette théorie d'Harrod-Domar approuve l'importance de l'accumulation du
capital comme source de croissance. Mais, l'introduction du modèle de
croissance néoclassique de croissance, spécialement avec la
contribution de Solow (1956) et Swan (1956), ont fourni l'antidote au droit
démesuré donné à l'accumulation du capital. Pour
cette théorie, il existe un troisième ingrédient de
croissance qui est le progrès technique. Solow (1956) distingue la
contribution du travail, capital et progrès technologique à la
croissance économique. Son étude forme en fait, la base de
l'explication de la croissance économique. Elle a été
utilisée comme tremplin
. 4 Seuls les pays africains membres de l'UEMOA et de
la CEMAC sont retenus dans cette étude. La Guinée-Bissau le
Tchad, la Guinée Equatoriale ne sont pas retenues dans cette
étude.
59
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
par les spécialistes de la croissance, afin de montrer
les différentes implications des politiques de croissance et d'expliquer
les différences à l'échelle internationale des taux de
croissance enregistrés. Une version du modèle de croissance
endogène a été développée par Romer (1986)
et (1990). Contrairement aux modèles traditionnels de croissance
où le taux de rendement de l'investissement et le taux de croissance du
revenu par tête décroissent en fonction du niveau de capital par
tête, le modèle de Romer (1990) et Lucas (1988), montre que le
revenu par tête peut croitre sans limites. Afin d'évaluer l'impact
du développement financier sur la croissance économique de la
zone franc, nous présenterons un modèle dont les estimations
seront faites sur la période 1960-2010. En effet la littérature
suggère plusieurs méthodes d'estimation de la relation entre
développement financier et croissance économique. Le
modèle retenu pour les estimations économétriques
s'inspire des travaux de plusieurs économistes qui se sont
penchés sur cette thématique à l'instar de King et de
Levine (1993b). L'objectif de cette étude n'étant pas de
rechercher les déterminants de la croissance dans leur globalité,
on a retenu d'une part des variables financières pour capter l'impact du
développement financier sur la croissance et d'autre part des variables
de croissance que l'on retrouve généralement dans la
littérature sur les modèles de croissance endogène.
L'équation de la fonction de croissance du PIB de Kiran (2009) s'inspire
de celle de King et Levine et se présente comme suit :
Modèle 1 :
LYit = á0 + á1 LYi,t-1 +
á2L( M2/PIB)i,t + á3 L(CRD/PIB)i,t + á4
LGOVi,t+ á5L OUVi,t + á6LINVi,t + pi +
pi,t
Avec pi l'effet individuel spécifique et
pi,t le terme d'erreur et. i = 1, 2,..., N et t = 1, 2,...,
T.
B. Présentation des variables
financières
Les variables financières utilisées sont celles
qu'on rencontre généralement dans la littérature sur le
sujet. En effet quatre indicateurs sont généralement
utilisés pour caractériser le développement financier :
60
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
? Le premier indicateur ou l'indicateur le plus utilisé
est le rapport de l'agrégat
monétaire M2/PIB ou du passif liquide de
l'économie au PIB soit M3/PIB. Cet indicateur M3/PIB prend en compte la
masse monétaire (M2) et le passif liquide des institutions
financières (dépôts à vue et dépôts
à terme des intermédiaires financiers bancaires et non
bancaires). Le passif liquide M3/PIB tout comme l'agrégat
monétaire M2/PIB est une mesure de la profondeur financière et de
la taille globale du système financier. Levine (1997), Gertler et Rose
(1994), Roubini et Sala-i-Martin (1992) montrent qu'il existe une forte
corrélation positive entre cet indicateur et le PIB par tête. Bien
que cet indicateur présente l'avantage d'être disponible pour bon
nombre de pays développés, il présente
l'inconvénient de ne pas être disponible pour tous les pays en
développement, de ne pas pouvoir saisir l'allocation du capital dans
l'économie, de ne pas refléter efficacement la provision de
services financiers dans l'économie ni de distinguer le secteur
privé du secteur public. Aussi l'indicateur utilisé pour la
plupart des pays en développement est le ratio M2/PIB pour tenir compte
du faible nombre d'institutions financières non bancaires dans les pays
d'étude.
? Le second est le ratio du crédit bancaire
accordé par les banques commerciales sur l'ensemble du crédit
bancaire domestique, y compris celui de la Banque centrale. l'idée
sous-jacente étant que les banques sont plus à même de
remplir les fonctions bancaires que l'institut d'émission. Il mesure le
degré dans lequel les banques commerciales allouent des crédits,
arrivent à identifier des projets profitables à financer,
à gérer le risque et à mobiliser l'épargne.
? Le troisième est la part du crédit bancaire
allouée aux entreprises privées par rapport à
l'ensemble du crédit domestique (à l'exception des crédits
aux banques).
? Le quatrième indicateur mesure
l'intermédiation financière et est égal au rapport
entre le montant de crédit accordé aux entreprises privées
(CRD) (par les banques de dépôt en général et
instituions non bancaires accessoirement) et le PIB. Cet indicateur financier
CRD/PIB mesure le degré d'intermédiation de l'économie. En
excluant le secteur public, cet indicateur illustre la manière dont les
fonds sont canalisés vers les investisseurs privés. Levine (1997)
trouve une corrélation positive statistiquement significative entre le
PIB réel par tête et la manière avec laquelle le
crédit est dirigé vers le secteur privé. Cet indicateur
isole les crédits au secteur privé des crédits
alloués au gouvernement et aux entreprises publiques. Toutefois il est
souvent influencé par des politiques de crédits dirigés ou
les programmes de subvention des gouvernements. De plus cet indicateur est
parfois partiel
61
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
puisqu'il laisse de côté le financement par le
marché financier qui commence à être important dans le
système financier dans certains pays en développement comme ceux
de la zone franc. Les indicateurs les plus utilisés car disponibles pour
de nombreux pays en développement sur une longue période de temps
sont le rapport au PIB de M2 l'agrégat monétaire ou masse
monétaire et du crédit alloué au secteur privé.
Aussi nous pensons retenir dans cette étude les indicateurs de
développement financier M2/PIB et le CRD/PIB.
C. Présentation des variables de contrôle
de la croissance
Notre modèle est complété par une
série de variables de contrôle habituellement introduites dans les
modèles de
croissance. il s'agit de :
? Yit le produit intérieur brut par
tête.
? Yi,t-1 le produit intérieur brut par
tête retardé d'une période
? Les dépenses gouvernementales ou publiques
(GOV). L'augmentation des dépenses publiques devrait se
traduire par un effet positif sur la croissance. Nous nous attendons donc
à un effet positif sur la croissance.
? L'ouverture commerciale (OUV),
mesurée par le ratio valeur des échanges commerciaux sur le PIB
c'est-à-dire la somme des exportations et des importations sur le PIB.
En effet lorsqu'un pays en très impliqué dans le commerce
international l'occasion se présentera d'exporter et d'importer des
biens et des intrants intermédiaires. L'introduction de nouvelles
technologies grâce à l'exportation ou à l'importation ne se
fait sans le système financier. Nous nous attendons à une
relation positive entre taux de croissance économique et ouverture.
? le taux d'investissement (INV), qui est le
ratio de la formation brute du capital fixe sur le PIB. La formation brute du
capital fixe représente ici un indicateur mesurant essentiellement
l'investissement matériel pour une année donnée. Elle
consiste en la formation de capital fixe représenté par les
équipements productifs, les machines, qui viennent améliorer la
productivité des entreprises. Du point de vue empirique, De Long et
Summers (1993) ont abouti à une forte liaison positive entre le taux
d'investissement en capital physique et le taux de croissance. Les variables de
contrôle qui seront utilisées dans cette étude permettront
d'évaluer l'impact de l'environnement macroéconomique sur la
croissance économique.
62
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
En effet lorsque que l'on considère de données
de panel, la toute première chose qu'il convient de vérifier est
la spécification homogène ou hétérogène des
données sur panel. Sur le plan économique, les tests de
spécification reviennent à déterminer si l'on est en droit
de supposer que le modèle théorique étudié est
parfaitement identique pour tous les pays ou au contraire s'il existe des
spécificités propres à chaque pays. A cet effet des tests
de spécification seront réalisés. Le test de Fischer
permettra de conclure sur la présence ou non d'effets fixes ; le test de
Breusch- Pagan permettra de conclure sur la présence ou non d'effets
aléatoires et enfin le test de Hausman permettra de discriminer entre le
modèle à effets fixes et le modèle à effets
aléatoires.
Paragraphe II : méthodologie d'estimation
Les estimations en données de panel de la relation
entre développement financier et croissance économique
présentent un certain nombre davantage. Elles fournissent non seulement
des éléments d'analyse de la relation entre développement
financier et croissance économique mais aussi l'évolution de
cette relation dans le temps. Deuxièmement dans les régressions
en coupes transversales, les effets inobservables spécifiques aux pays
sont automatiquement intégrés dans le terme d'erreur ; ceci peut
conduire à obtenir des coefficients biaisés en l'occurrence
lorsque qu'on étudie la relation entre finance et croissance
économique. Les estimations en panel réduisent les biais
associés à l'estimation.
Pour mieux appréhender l'impact du développement
financier sur la croissance et pour contourner les critiques essuyées
par les études en panel concernant les problèmes de biais de
simultanéité surtout la causalité inverse entre
développement financier et croissance économique, l'utilisation
de techniques économétriques plus performantes dans
l'étude du lien développement financier et croissance
économique s'est alors imposée. Au nombre de ces techniques, nous
pouvons citer la méthode des moments généralisés
GMM (Generalized Method of Moment) sur panel dynamique. Cette méthode
permet d'apporter des solutions aux problèmes de biais de
simultanéité, de causalité inverse et de variables omises.
Aussi nous avons retenu pour notre modèle une estimation GMM en
système sur panel dynamique. Un modèle dynamique est un
modèle dans lequel un ou plusieurs retards de la variable
dépendante figure comme variables explicatives. Le modèle cherche
à expliquer la
63
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
dynamique du produit intérieur brut par tête de
chaque pays par le développement financier des pays membres de la zone
franc. Dans ce cas le modèle s'écrit :
Modèle 2
LYi,t - LYi,t-1 = á0 +
(á1-1)LYi,t-1 + á2L( M2/PIB)i,t + á3
L(CRD/PIB)i,t + á4 LGOVi,t + á5L OUVi,t +
á6LINVi,t + ui + âi,t
Avec ui l'effet individuel et âi,t
le terme d'erreur et. i = 1, 2,..., N et t = 1, 2,...,T
A. Motivation et méthodes d'estimation des GMM
en panel dynamique
? Motivation d'une estimation par GMM en panel
dynamique
Les grandes lignes de la motivation de l'utilisation des GMM
se retrouvent chez Arellano et Bond (1991) et Blundell et Bond (1998). Plus
précisément Levine et Al (2000) fournissent les arguments qui
justifient l'utilisation de la méthode des GMM pour étudier la
relation entre développement financier et croissance économique.
En effet la Méthode des Moments Généralisés permet
de régler le problème d'endogénéité dans
l'étude de la relation entre développement financier et
croissance économique. Elle permet de régler
l'endogénéité non seulement au niveau de la variable de
développement financier mais aussi au niveau des autres variables
explicatives par l'utilisation d'une série de variables
instrumentées générées par les retards des
variables. Cette méthode ne permet pas de corriger
l'endogénéité au sens fort mais au sens faible. Plus
précisément il est supposé que les variables explicatives
sont faiblement exogènes c'est-à-dire qu'elles peuvent
affectées par les réalisations actuelles et passées du
taux de croissance, et doivent être non corrélées avec les
réalisations futures des termes d'erreur. Ainsi l'hypothèse
d'exogénéité des variables au sens faible implique que les
innovations futures du taux de croissance n'affectent pas le niveau actuel du
développement financier. L'exogénéité au sens
faible ne signifie pas que les agents économiques ne prennent pas en
compte les espérances futures du taux de croissance dans leur
décision de développement du système financier ; il
suppose tout simplement que les chocs futurs non anticipés du taux de
croissance n'influencent pas le niveau actuel du développement
64
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
financier .Ainsi l'innovation du taux de croissance n'affecte
pas le développement financier. Les modèles dynamiques se
caractérisent par la présence d'une ou de plusieurs valeurs
retardées de la variable dépendante parmi les variables
explicatives. Dans ce modèle, la présence de la variable
dépendante retardée ne permet pas d'utiliser les techniques
économétriques comme les moindres carrés ordinaires par
exemple. Il existe deux méthodes d'estimations alternatives : la
méthode d'Arellano et Bond (1991) et celle de Blundell et Bond
(1998).
? la méthode d'Arellano et Bond (1991) et
de Blundell et Bond (1998).
Compte tenu des biais de simultanéité et
d'endogénéité qui peuvent résulter de l'estimation
d'une équation dynamique par la méthode des moindres
carrés ordinaires, le modèle peut être estimé par la
méthode des moments généralisés sur panel
dynamique. On utilise la méthode des Moments
Généralisés en panel dynamique pour contrôler les
effets spécifiques individuels et temporels, et pallier les biais
d'endogénéité des variables. L'estimateur GMM en panel
dynamique a été développé par Holtz-Eakin, Newey et
Rosen (1990), Arellano et Bond (1991) et Arellano et Bover (1995). Il existe
deux types d'estimateurs des moments généralisés :
l'estimateur d'Arellano et Bond (1991) ou GMM en différence et
l'estimateur de Blundell et Bond (1998) ou GMM en système. Arellano et
Bond (1991) proposent une estimation en différence dont le but est
d'éliminer un éventuel biais des variables. Les
différences premières des variables explicatives du modèle
sont instrumentées par les valeurs retardées en niveau de ces
mêmes variables. Le but est de réduire les biais de
simultanéité. Blundell et Bond (1998) ont montré à
l'aide des simulations de Monte Carlo que l'estimateur des GMM système
est plus efficient que l'estimateur des GMM en différence. Ce dernier
produit des estimateurs biaisés pour les petits échantillons
Dans notre modèle à estimer, l'utilisation des
variables retardées comme instruments dépend de la nature de ces
variables explicatives :
? Plus précisément il est supposé que les
variables explicatives sont faiblement exogènes c'est-à-dire
qu'elles peuvent affectées par les réalisations actuelles et
passées du taux de croissance, et doivent être non
corrélées avec les réalisations futures des termes
d'erreur. Leurs valeurs retardées d'au moins une période peuvent
être utilisées comme instruments.
65
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
? Pour des variables endogènes, seules les valeurs
retardées d'au moins deux périodes peuvent être
utilisées comme instruments valides.
L'efficacité de l'estimation des GMM repose sur la
validité de deux tests. Le test de Sargan/Hansen qui nous permet de
tester la validité des variables retardées que nous utilisons
comme instruments. Le test d'Arellano et Bond où l'hypothèse
nulle est l'absence d'autocorrelation des erreurs au second ordre de
l'équation différence.
B. Tests économétriques sur le
modèle
Nous procéderons d'abord par les tests de racines
unitaires sur les variables du modèle pour étudier leur
stationnarité, ensuite le test de spécification de Hausman, le
test d'autocorrelation des erreurs et pour finir les estimations en panel
dynamique.
? Les tests de racines unitaires
Le traditionnel test de racine unitaire de Dickey Fuller
Augmented (ADF) souffre d'un pouvoir faible de rejet de l'hypothèse
nulle de stationnarité des séries (Okey, 2009) surtout pour des
données de panel contrairement au test de Levine, Lin et Chu (LLC) ou
encore Im, Peasaran et Shan (IPS). Du fait que notre panel est cylindré
et que le nombre de pays retenus dans notre modèle est relativement
faible par rapport à la période d'étude, le test de racine
unitaire qui convient le mieux à notre modèle est celui de LLC.
De plus en raison de la difficulté à retenir un nombre de retards
approprié au test de stationnarité, nous utilisons le retard
généré à défaut par Akaike Information
Criterion (AIC) soit un maximum de 10 retards. Les résultats du test de
stationnarité et les conditions d'utilisation du test LLC sont
conférés dans l'annexe.
? Test de spécification sur données de
panel : le test de Hausman
Ce test sert à discriminer les effets fixes et
aléatoires. Il se présente comme suit :
H0 : Présence d'effets aléatoires H1 :
présence d'effets fixes
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
Les tests de Fischer sur la présence d'effets fixes, le
test de Breusch- Pagan sur la présence d'effets aléatoires sont
préprogrammés simultanément avec le test de Hausman sur
STATA.
La probabilité du test étant inférieure
à 10%, le modèle à effets fixes est
préférable au modèle à effets aléatoires.
? Test d'autocorrélation des erreurs
Le test d'autocorrélation des erreurs d'Arrelano et
Bond permet de conclure sur la corrélation ou non des erreurs au premier
et second ordre. Le test se présente comme suit :
H0 : les erreurs ne sont pas corrélées au second
ordre.
H1 : les erreurs sont corrélées au second ordre.
L'option robust sous STATA permet de corriger
les t-student de l'hétéroscédasticité des termes
d'erreur.
? Test de suridentification de Sargan/Hansen
Le test de suridentification de Sargan/Hansen permet de tester
la validité des variables retardées comme instruments. STATA
reporte par défaut les statistiques de
Sargan/Hansen.
SECTION II : RESULTATS ET IMPLICATIONS DE POLITIQUES
ECONOMIQUES
Dans cette section nous abordons les résultats issus de
nos différentes estimations, leurs interprétations
économiques de même que des recommandations de politiques
économiques.
Paragraphe I : Résultats et
interprétations.
A. Résultats et interprétations des
estimations réalisées sur la zone franc.
66
Les résultats issus des estimations sont
conférés dans le tableau suivant :
67
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
Tableau 9 :Estimation sur panel dynamique : System
GMM
Variables
|
Coefficients
|
p-value
|
LPIB(-1)
|
0,9485
|
(0,000)*
|
LM2
|
0,4866
|
(0,097)***
|
LCRD
|
0,02907
|
(0,203)
|
LINV
|
0,06157
|
(0,012)**
|
LGOV
|
-0,8138
|
(0,038)**
|
LOUV
|
0,0027
|
(0,034)**
|
( )*, ( ) **, ( ) *** : Significativité au seuil
de 1%, 5%, 10%
Le test d'Arellano et Bond en différence seconde sur
l'autocorrelation (p = 0,12) et celui de Hansen (0,13) ne permettent pas de
rejeter l'hypothèse d'absence d'autocorrélation des erreurs et
celle de la validité des instruments.
Les résultats de l'étude pour la zone franc
entre développement financier et croissance économique
révèlent l'existence d'une relation positive entre
développement financier et croissance économique au seuil de 10%.
Ainsi pour nos variables d'intérêt au seuil de 10%, la croissance
économique dans la zone franc est expliquée significativement par
l'indicateur de développement financier LM2. Une augmentation de 1% de
l'agrégat monétaire se traduit par une augmentation significative
du PIB/tête de 0,4866%. Par ailleurs les résultats
révèlent que le second indicateur de développement
financier exprimé par le rapport du crédit accordé au
secteur privé sur le PIB (CRD) n'a guère d'influence
significative sur la croissance même au seuil de 10%. Ce résultat
de l'impact positif de l'agrégat monétaire sur la croissance
s'explique de plus en plus par le dynamisme du réseau bancaire qui
renaît dans l'espace monétaire auquel s'ajoute la volonté
manifeste de la plupart des banques et établissements
68
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
financiers de rendre aux agents économiques un
accès plus facile aux services financiers. Paradoxalement les
résultats rejettent toute influence des crédits accordés
par les banques et les établissements financiers au secteur privé
de l'espace monétaire. Ceci peut s'expliquer par le coût du
crédit qui reste élevé. En effet les marges
d'intérêt des banques sur les opérations avec la
clientèle mesurée par la différence entre les rendements
des prêts et les coûts moyens des ressources provenant de la
clientèle est de près de 8 points pour la moyenne de la zone
franc contre 5 points à l'échelle mondiale (AFD, 2009). Ce
résultat s'explique d'autre part aussi par une demande
élevée de garantie avant l'octroi des prêts par les
banques. En effet, ce n'est pas tant le principe de la garantie qui pose
problème mais le niveau des garanties jugé toujours
élevé par la plupart des agents économiques et ce
malgré les efforts des autorités monétaires de rendre plus
facile l'accès au crédit. Cette prudence des banques à
demander des garanties assez élevées s'explique par la
présence dans l'espace de la zone franc d'un niveau de pauvreté
élevé, de la vulnérabilité des agents
économiques aux chocs de revenu, de la présence d'une forte
insécurité juridique et la prédominance des relations
informelles entre les agents économiques. L'impact non significatif du
crédit accordé au secteur privé rapporté au PIB
s'explique aussi par la crainte des banques à octroyer des
crédits dans un environnement caractérisé par le haut
degré d'incertitude qui entoure l'activité des entreprises.
S'agissant des variables de contrôle les résultats conduisent
à une influence positive de l'investissement et de l'ouverture
commerciale sur la croissance sur la période d'étude. Une
augmentation de 1% de l'investissement et de degré d'ouverture
commerciale se traduit par une augmentation respective du PIB/tête de
0,012% et de 0,034%. Cette influence de l'investissement sur la croissance
s'explique en partie par les efforts réalisés par la plupart des
pays de la zone franc d'assainir le climat des affaires par une modernisation
du système judiciaire. Mais cette influence positive de l'investissement
sur la croissance semble de plus en plus se traduire par la convoitise que
suscitent les pays de la CEMAC presque tous producteurs de pétrole en
attirant de plus en plus d'investisseurs dans la zone franc. Quant à
l'ouverture commerciale, les efforts conjugués des pays à
relancer leurs exportations tant dans la zone UEMOA essentiellement
exportatrice de matières premières que dans la CEMAC productrice
de pétrole semble expliquer l'effet bénéfique de
l'ouverture commerciale sur la croissance de la zone franc. Face donc à
la présence dans une même zone monétaire de deux unions
économiques à savoir l'UEMOA et la CEMAC toutes avec des
particularités tant au niveau du secteur financier qu'au niveau des
performances économiques, il semble nous convenir à
69
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
juste titre de tenir compte de la présence de ces deux
unions économiques et de procéder à une étude
comparative de l'influence du système financier sur la croissance de
chacune de ces zones composant la zone franc.
B. Résultats et interprétations des
estimations sur la zone UEMOA
Les résultats de l'estimation de la relation entre
développement financier et croissance économique sont
illustrés dans le tableau suivant :
Tableau 10 : Estimation sur panel dynamique : System
GMM
Variables
|
Coefficients
|
p-value
|
LPIB(-1)
|
0,9291
|
(0,000)*
|
LM2
|
0,0226
|
(0,024)**
|
LCRD
|
0,05274
|
(0,020)**
|
LINV
|
0,5539
|
(0,014)*
|
LGOV
|
-0,434
|
(0,034)**
|
LOUV
|
0,0024
|
(0,023)**
|
( )*, ( ) **, ( ) *** : Significativité au seuil
de 1%, 5%, 10%
Le test de Hansen (p=0,135) et d'Arellano et Bond en
différence seconde sur l'auto corrélation des erreurs (p= 0,11)
ne permettent pas de rejeter la validité des variables retardées
et l'hypothèse d'absence d'autocorrélation des erreurs.
Dans la zone UEMOA, les résultats démontrent un
impact positif et significatif du développement financier sur la
croissance. Les coefficients des deux indicateurs de développement
financier à savoir l'agrégat monétaire M2 et le ratio du
crédit accordé au secteur privé rapporté au PIB
sont positifs et significatifs au seuil de 5% ; ce qui soutient
70
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
l'hypothèse que le développement financier
exerce un effet favorable sur la croissance économique dans la zone
UEMOA. Un accroissement du volume du crédit accordé au secteur
privé rapporté au PIB et de l'agrégat monétaire de
1% entraine une augmentation respective de 5 points et de 2 points de
pourcentage du PIB/tête. La croissance économique dans l'UEMOA est
donc corrélée au développement du système financier
de l'union. Il semble donc qu'après les décennies 1980-1990
marquées par des crises bancaires dans la zone franc que le
système financier surtout bancaire de l'UEMOA a pu se remettre sur pied.
L'impact favorable du développement financier sur la croissance des pays
de la zone UEMOA peut s'expliquer par le fait que depuis quelques années
le secteur financier de l'Union connait une progression louable en nombre
d'établissements financiers et en réseau bancaire. Les pays qui
ont connu une forte progression de leur réseau sont : le Benin avec un
taux de croissance de 90%, le Niger avec 41,66%, le Togo avec 39,44%. Le taux
de progression le plus faible est enregistré par le Mali avec 26,13%
(Commission bancaire de l'UEMOA, 2008). Ce formidable élan peut
s'expliquer par la vitalité des banques anciennement installées
comme les groupes EcoBank . Il y a également la forte poussée des
groupes plus récents tels que la Banque Atlantique, la Banque
Sahélo-saharienne (BSIC) et la Banque Régionale de
Solidarité (BRS) dont les activités prennent de plus en plus
d'ampleur dans tous les pays de la région. Une troisième
explication non moins importante est l'arrivée de nouveaux acteurs
financièrement solides comme les banques marocaines BMCE et Attijariwafa
Bank, les banques nigérianes comme Access Bank, Diamond Bank et UBA. De
plus dans les Etats membres de l'UEMOA, les services financiers postaux
disposent d'une clientèle assez large. Le reversement de leurs clients
ou de leur immense majorité dans le secteur bancaire par le biais d'une
transformation institutionnelle est apparu comme une réussite pour le
processus de massification de la bancarisation. L'expérience
récente du TOGO qui a enregistré en 2007, une progression de plus
de 275% du nombre total de comptes bancaires actifs dans le pays grâce
à la transformation en Banque Populaire pour l'Epargne et le
Crédit (BPEC) de la Caisse d'Epargne du TOGO est assez illustrative.
S'agissant des variables de contrôle, l'investissement
et l'ouverture se caractérisent par un effet positif sur la croissance.
Un accroissement de 1% de l'investissement et du degré d'ouverture
commerciale se traduit par un accroissement de 0,5539% et de 0,0024% du
PIB/tête. En effet les politiques de relance des exportations
menées depuis plusieurs années
71
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
ont permis aux pays de la zone de repositionner les flux
commerciaux comme vecteur de croissance économique.
C. Résultats et interprétations des
estimations sur la zone CEMAC
Les résultats de l'estimation de la relation entre
développement financier et croissance économique dans la zone
CEMAC sont illustrés dans le tableau suivant :
Tableau 11 : Estimation sur panel dynamique : System
GMM
Variables
|
Coefficients
|
p-value
|
LPIB(-1)
|
0,9875
|
(0,000)*
|
LM2
|
-0,1566
|
0,282
|
LCRD
|
-0,01015
|
0,518
|
LINV
|
-0,01106
|
0,749
|
LGOV
|
-0,1985
|
(0,04)**
|
LOUV
|
0,1201
|
(0,038)**
|
( )*, ( ) **, ( ) *** : Significativité au seuil
de 1%, 5%, 10%
Le test de Hansen/Sargan (p = 0,105) et d'Arellano et Bond en
différence seconde sur l'autocorrélation des erreurs (0,121) ne
permettent de rejeter la validité des variables retardées et
l'hypothèse d'absence d'autocorrélation des erreurs.
Spécifiquement dans la zone CEMAC, les résultent
conduisent à rejeter toute influence du développement financier
sur la croissance économique même au seuil de 10%. Le
développement financier n'apparait guère positivement
corrélé à la croissance. En effet le mauvais
résultat de l'impact du développement financier sur la croissance
dans la zone CEMAC peut s'expliquer par "la détresse des systèmes
financiers" du fait des périodes de crises bancaires, parfois
très graves qu'a connues la zone franc dans les années 1980-1990.
Le
72
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
système financier de la CEMAC a donc sans doute de mal
à mener des politiques de son redressement. De plus ces résultats
peuvent s'expliquer par l'existence dans ces pays de l'exclusion bancaire avec
des taux de bancarisation très faibles comme constatés en
Centrafrique 0,8% et au Tchad 0,4% (IMF, 2006). Au Cameroun, première
économie de la zone franc par son PIB, le taux de bancarisation n'est
que de 3,7%. Par ailleurs le système financier de la zone semble peu
profond. Dans des pays où les banques constituent la pièce
maitresse des systèmes financiers locaux, les systèmes bancaires
locaux de la CEMAC semblent accuser un grand retard sur l'apport réel du
secteur financier à la croissance comparativement à l'apport des
banques de l'UEMOA. L'absence de corrélation positive entre la variable
crédit au secteur privé rapporté au PIB dans la zone CEMAC
peut aussi s'expliquer par les difficultés rencontrées par les
entreprises privées à avoir accès aux crédits.
Plusieurs facteurs expliquent en l'état actuel des choses la
difficulté des entreprises du secteur privé à avoir
accès au financement. Premièrement il y a le problème
d'accessibilité géographique lié au faible nombre
d'agences notamment dans les villes secondaires des pays de la CEMAC et surtout
dans les zones rurales. Deuxièmement, les conditions de banques
pratiquées par les intermédiaires financiers ne sont pas
particulièrement favorables : les différentiels moyens
observés entre les taux d'intérêt créditeurs et
emprunteurs s'élèvent à 14,3% dans la CEMAC durant la
première moitié de la décennie des années 2000
contre 8,3% dans les pays africains anglophones (Banque mondiale, 2004). Outre
le problème d'accès difficile au prêt bancaire, le haut
degré d'incertitude qui entoure l'activité des entreprises et
leur pérennité dans une zone caractérisée par un
fort taux de corruption peut limiter encore davantage l'octroi des
crédits bancaires. De plus la zone CEMAC est par excellence une zone
productrice et exportatrice de pétrole et de bois. La croissance
économique est donc pour l'essentiel tirée des investissements
réalisés dans le secteur pétrolier et de la vente du prix
du pétrole que des prouesses et performances du système
financier.
L'investissement sur la période d'étude
n'affecte pas la croissance dans la zone. Ceci parait paradoxal du fait que
presque la totalité des pays de la CEMAC sont producteurs de
pétrole, ce qui est source de meilleurs investissements dans
l'économie. L'ouverture commerciale s'exprime par contre par un effet
positif de 0,1201% sur la croissance des pays de la CEMAC. Ceci semble
être une évidence pour les pays de la CEMAC qui sont tous ou
73
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
presque exportateurs de pétrole et qui ont ces
dernières années bénéficié de l'augmentation
substantielle de prix du baril de pétrole.
En somme d'un point de vue comparatif, le développement
financier explique largement la croissance dans l'UEMOA que dans la CEMAC. Si
le P113 de l'UEMOA a longtemps dépassé celui de la CEMAC, la
hausse du cours du pétrole et la crise ivoirienne ont inversé la
tendance : pour la première fois en 2004 le P113 de la CEMAC a
dépassé celui de l'UEMOA. Le système bancaire de la CEMAC
et plus largement son système financier n'ont pas pour l'instant suivi
cette tendance. Que ce soit en termes de bilan des établissements
financiers (3096 milliards de francs CFA pour la CEMAC contre 6746 milliards
dans l'UEMOA) ou en termes de crédits octroyés à
l'économie (1508 milliards contre 3503 milliards), le système
bancaire de l'UEMOA semble être d'une taille globalement deux fois
supérieure à celui de la CEMAC (AFD, 2007). Le système
financier ouest-africain fort d'une bourse régionale des valeurs
mobilières (BRVM) fonctionnelle, d'institutions financières
spécialisées à compétences régionales et de
banques plus riches se révèle plus diversifié que celui de
la CEMAC. Toutefois la faible corrélation entre la variable CRD et le
taux de croissance des économies de la CEMAC s'explique par les
difficultés rencontrées par les entreprises privées
à avoir accès aux crédits. L'effet bénéfique
du développement financier à la croissance dans la zone franc
s'est donc traduit par le canal du système financier de la zone UEMOA
lorsque l'on rejette toute influence du secteur financier de la CEMAC sur la
croissance des pays de cette zone.
74
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
Paragraphe II : Implication de politiques
économiques et Conclusion
Dans le but de générer une croissance durable
dans les Etats de la zone franc, les décideurs de la zone franc doivent
rechercher des voies et moyens permettant d'agir efficacement sur le
système financier. Pour y arriver un certain nombre de recommandations
s'impose à la fois au secteur financier mais à l'environnement
macroéconomique pour un meilleur devenir de nos économies. Il
faut dans un premier :
? Créer un climat des affaires favorable à
l'investissement. En effet la faible efficacité de l'investissement
observée d'un point de vue national et régional s'explique
largement par le climat de tensions sociopolitiques qui caractérise
l'essentiel des pays de la zone franc ce qui défavorise les pays de la
zone franc comparativement aux autres pays en développement plus stables
politiquement. Il convient aussi à cet effet d'assurer aux agents
économiques une impartialité de la justice. Ceci passe donc par
la continuité de la réforme de la justice déjà
entreprise dans la plupart des pays de la zone franc.
S'agissant des réformes financières, il ressort
essentiellement de cette étude :
? Favoriser l'émergence de nouveaux acteurs comme les
institutions de
microfinance pour modifier la donne du financement dans la
zone franc. En effet les institutions de microfinance proposent de plus en plus
de financements aux très petites entreprises (TPE) mais aussi aux
petites et moyennes entreprises (PME).
? Du fait du bilan mitigé de la politique de
libéralisation financière dans les pays de la zone franc, on
peut plaider pour une réélaboration prudente de politiques de
développement financier sous impulsion publique.
? Selon le rapport de la Banque mondiale (2006), l'aide au
développement peut jouer deux rôles complémentaires. Le
premier consiste en quelque sorte à compléter le système
financier en apportant directement des ressources que ce système est
incapable de fournir. Le second qui est le plus fondamental consiste à
contribuer au développement des systèmes financiers en
renforçant les capacités des institutions financières
locales, en facilitant leur accès aux ressources de façon plus
générale et en contribuant à la construction de
capacités légales et institutionnelles.
75
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
Au terme de cette étude, il ressort essentiellement que
le développement financier ou encore le secteur financier impacte
positivement la croissance économique dans les pays de la zone franc
plus spécifiquement dans les pays de l'UEMOA bien que ces derniers
connaissent depuis quelques années des crises sociopolitiques mais aussi
de nombreuses difficultés économiques. En effet la structure
financière de la zone franc quoique propice à favoriser un
développement des pays reste confronté aux problèmes de
financement des économies par le système financier. Ceci s'est
traduit par une efficacité faible du crédit accordé au
secteur privé sur la croissance des pays de la zone franc. Les
résultats ont montré par ailleurs que le développement
financier explique la croissance dans les pays de la zone franc essentiellement
par le canal de l'UEMOA que par la CEMAC où les résultats ont
permis de rejeter toute influence du secteur financier surtout bancaire sur la
croissance de cette zone. Ces résultats viennent confirmer la
véracité des hypothèses de notre étude qui plaidait
pour un effet positif et significatif du système financier de la zone
franc sur la croissance des pays de la zone franc surtout par le canal du
système financier de l'UEMOA plus diversifié, plus dynamique et
plus riche que celui de la CEMAC. Les études ont
révélé que la croissance économique dans la zone
franc est tirée par l'agrégat monétaire M2 que par la part
du crédit accordé au secteur privé qui n'impacte pas la
croissance économique dans la zone franc. Ainsi donc de nombreuses
améliorations doivent être apportées à la fois pour
assainir davantage le système financier et le rendre plus performant et
plus favorable à agir sur la croissance de la zone franc par un meilleur
accès des entreprises du secteur privé au financement et au
crédit bancaire mais aussi pour assainir le circuit
macroéconomique pour un meilleur devenir des pays de la zone franc. A
cet effet nous avons proposé des politiques permettant d'aboutir
à une croissance économique durable entre autres : assurer une
bonne gouvernance au niveau national et régional, renforcer les
capacités institutionnelles, créer un climat des affaires propice
et favorable serait une solution probable pour une croissance économique
soutenue et un meilleur recul de la pauvreté, favoriser
l'émergence de nouveaux acteurs comme les institutions de microfinance
pour modifier la donne du financement dans la zone franc.
76
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
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79
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
ANNEXES ANNEXE 1
Table des matières
SIGLES ET ABREVIATIONS v
RESUME vi
INTRODUCTION GENERALE 1
PREMIERE PARTIE : DYNAMIQUE DE L'INTERACTION ENTRE
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE 6
CHAPITRE I : INTERACTION ENTRE DEVELOPPEMENT FINANCIER ET
CROISSANCE 7
SECTION 1 : CADRE CONCEPTUEL ET FONDEMENT DU LIEN ENTRE
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE 7
SECTION 2 : THEORIE DE LA LIBERALISATION FINANCIERE DANS LA
RELATION ENTRE DEVELOPPEMENT FINANCIER ET
CROISSANCE ECONOMIQUE 24
CHAPITRE II : LES DETERMINANTS DU DEVELOPPEMNT
FINANCIER ET LA PRESENTATION DU SECTEUR FINANCIER DE
LA ZONE FRANC 25
SECTION 1 : LES DETERMINANTS DU DEVELOPPEMENT FINANCIER 32
SECTION 2 : PRESENTATION DU SECTEUR FINANCIER DE LA ZONE FRANC
38
DEUXIEME PARTIE : INTERACTION EMPIRIQUE ENTRE
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE
ECONOMIQUE 52
CHAPITRE III : PERFORMANCES ECONOMIQUES DES PAYS DE LA
ZONE FRANC 53
SECTION 1 : LES PERFORMANCES ECONOMIQUES DE L'UEMOA 53
SECTION 2 : LES PERFORMANCES ECONOMIQUES DE LA CEMAC 55
CHAPITRE IV : EVALUATION EMPIRIQUE DE L'IMPACT DU
DEVELOPPEMENT FINANCIER SUR LA CROISSANCE
EONOMIQUE 58
SECTION 1 : METHODOLOGIE D'ESTIMATION ET PRESENTATION DES
VARIABLES 58
SECTION 2 : TESTS ECONOMETRIQUES ET RESULTATS 67
CONCLUSION 74
BIBLIOGRAPHIE 76
ANNEXE 78
80
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
ANNEXE 2 : Test de racines unitaires
VARIABLES
|
ZONE FRANC
|
UEMOA
|
CEMAC
|
LPIB
|
-0,4721
(0,3184)
|
-1,5601
(0,0594)**
|
-0,325
(0,3726)
|
|
|
|
|
L M2
|
-3,8592
(0,0001)*
|
-3,6736
(0,0001)*
|
-5,8198
(0,000)*
|
|
|
|
|
LCRD
|
-2,2951
(0,0109)*
|
-3,1711
(0,0008)*
|
-1,5743
(0,057)**
|
|
|
|
|
LINV
|
-1,31
(0,0951)***
|
-0,8219
(0,2056)
|
-2,4046
(0,0081)*
|
|
|
|
|
LOUV
|
-1,0402
(0,1491)
|
-0,8205
(0,206)
|
-0,4282
(0,3343)
|
|
|
|
|
LGOV
|
-4,8152
(0,000)*
|
-3,6593
(0,0001)*
|
-2,5747
(0,005)*
|
|
|
|
|
( )*, ( ) **, ( ) *** sont les significativités à
1%, 5%, 10%
Les valeurs reportées de ce tableau sont celles de la
statistique tg* (adjusted t*) et les valeurs entre
parenthèses sont les p-values associées.
81
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
Levin-Lin-Chu unit-root test for lpib
Ho: Panels contain unit roots Number of panels =
11
Ha: Panels are stationary Number of periods =
41
AR parameter: Common Asymptotics: root(N)/T ->
0
Panel means: Not included
Time trend: Not included Cross-sectional means
removed
ADF regressions: 1.64 lags average (chosen by
AIC)
LR variance: Bartlett kernel, 11.00 lags average (chosen
by LLC)
Statistic p-value
Unadjusted t -0.4778 0.3164
Adjusted t* -0.4721 0.3184
. xtunitroot llc lm2, demean nocons lags(aic 10)
Levin-Lin-Chu unit-root test for lm2
Ho: Panels contain unit roots Number of panels =
11
Ha: Panels are stationary Number of periods =
41
AR parameter: Common Asymptotics: root(N)/T ->
0
Panel means: Not included
Time trend: Not included Cross-sectional means
removed
ADF regressions: 2.27 lags average (chosen by
AIC)
LR variance: Bartlett kernel, 11.00 lags average (chosen
by LLC)
Statistic p-value
Unadjusted t -3.9406 0.0000
Adjusted t* -3.8592 0.0001
. xtunitroot llc lcrd, demean nocons lags(aic 10)
Levin-Lin-Chu unit-root test for lcrd
Ho: Panels contain unit roots Number of panels =
11
Ha: Panels are stationary Number of periods =
41
AR parameter: Common Asymptotics: root(N)/T ->
0
Panel means: Not included
Time trend: Not included Cross-sectional means
removed
ADF regressions: 2.73 lags average (chosen by
AIC)
LR variance: Bartlett kernel, 11.00 lags average (chosen
by LLC)
Statistic p-value
Unadjusted t -2.3408 0.0096
Adjusted t* -2.2951 0.0109
82
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
Levin-Lin-Chu unit-root test for linv
Ho: Panels contain unit roots Number of panels =
11
Ha: Panels are stationary Number of periods =
41
AR parameter: Common Asymptotics: root(N)/T ->
0
Panel means: Not included
Time trend: Not included Cross-sectional means
removed
ADF regressions: 1.45 lags average (chosen by
AIC)
LR variance: Bartlett kernel, 11.00 lags average (chosen
by LLC)
Statistic p-value
Unadjusted t -1.3365 0.0907
Adjusted t* -1.3100 0.0951
. xtunitroot llc louv, demean nocons lags(aic 10)
Levin-Lin-Chu unit-root test for louv
Ho: Panels contain unit roots Number of panels =
11
Ha: Panels are stationary Number of periods =
41
AR parameter: Common Asymptotics: root(N)/T ->
0
Panel means: Not included
Time trend: Not included Cross-sectional means
removed
ADF regressions: 5.00 lags average (chosen by
AIC)
LR variance: Bartlett kernel, 11.00 lags average (chosen
by LLC)
Statistic p-value
Unadjusted t -1.0658 0.1433
Adjusted t* -1.0402 0.1491
. xtunitroot llc lgov, demean nocons lags(aic 10)
Levin-Lin-Chu unit-root test for lgov
Ho: Panels contain unit roots Number of panels =
11
Ha: Panels are stationary Number of periods =
41
AR parameter: Common Asymptotics: root(N)/T ->
0
Panel means: Not included
Time trend: Not included Cross-sectional means
removed
ADF regressions: 0.09 lags average (chosen by
AIC)
LR variance: Bartlett kernel, 11.00 lags average (chosen
by LLC)
Statistic p-value
Unadjusted t -4.9025 0.0000
Adjusted t* -4.8152 0.0000
83
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
Levin-Lin-Chu unit-root test for linv
Ho: Panels contain unit roots Number of panels =
11
Ha: Panels are stationary Number of periods =
41
AR parameter: Common Asymptotics: root(N)/T ->
0
Panel means: Not included
Time trend: Not included Cross-sectional means
removed
ADF regressions: 1.45 lags average (chosen by
AIC)
LR variance: Bartlett kernel, 11.00 lags average (chosen
by LLC)
Statistic p-value
Unadjusted t -1.3365 0.0907
Adjusted t* -1.3100 0.0951
. xtunitroot llc louv, demean nocons lags(aic 10)
Levin-Lin-Chu unit-root test for louv
Ho: Panels contain unit roots Number of panels =
11
Ha: Panels are stationary Number of periods =
41
AR parameter: Common Asymptotics: root(N)/T ->
0
Panel means: Not included
Time trend: Not included Cross-sectional means
removed
ADF regressions: 5.00 lags average (chosen by
AIC)
LR variance: Bartlett kernel, 11.00 lags average (chosen
by LLC)
Statistic p-value
Unadjusted t -1.0658 0.1433
Adjusted t* -1.0402 0.1491
. xtunitroot llc lgov, demean nocons lags(aic 10)
Levin-Lin-Chu unit-root test for lgov
Ho: Panels contain unit roots Number of panels =
11
Ha: Panels are stationary Number of periods =
41
AR parameter: Common Asymptotics: root(N)/T ->
0
Panel means: Not included
Time trend: Not included Cross-sectional means
removed
ADF regressions: 0.09 lags average (chosen by
AIC)
LR variance: Bartlett kernel, 11.00 lags average (chosen
by LLC)
Statistic p-value
Unadjusted t -4.9025 0.0000
Adjusted t* -4.8152 0.0000
84
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
ANNEXE 3 : résultat du test de
Hausman
Fixed-effects (within) regression
Group variable: country
|
|
|
|
|
|
t
|
|
R-sq: within = 0.9211
|
between = 0.9958
.9066214
.0510725 .012985 .0648817
-.0986149 .0058007 .216987
|
.0162628
.035443 .0170063 .0180915
.0282122 .0030015 .0458935
|
55.75
1.44 0.76 3.59 -3.50
1.93 4.73
|
Number of obs =
Number of groups =
Obs per group: min =
avg =
0.000 .8746556
0.150 -.0185939
0.446 -.0204425
0.000 .0293212
0.001 -.1540685
0.054 -.000099
0.000 .1267794
|
|
corr(u_i, Xb) = 0.7091
|
overall = 0.9740
.34844947
|
max =
F(6,423) =
Prob > F =
|
|
. xtreg lpib L.lpib lm2 lcrd linv lgov louv,fe
440 11 40 40.0
40 823.51 0.0000 Coef.
Std. Err.
P>|t| [95% Conf. Interval]
lpib
L1.
lm2 lcrd linv lgov
louv _cons .9385873 .1207389
.0464124 .1004422 -.0431613
.0117004 .3071946 sigma_u sigma_e
rho
.04312707
.05897313
(fraction of variance due to u_i)
F test that all u_i=0: F(10, 423) = 4.10
Prob > F = 0.0000
lpib
. est store eq1
85
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
. xtreg lpib L.lpib lm2 lcrd linv lgov louv,re
Random-effects GLS regression
Group variable: country
|
|
|
|
|
|
|
z
|
Number of obs =
Number of groups =
|
|
R-sq: within = 0.9194
lpib
|
between = 0.9993 overall =
0.9772
Random effects u_i ~ Gaussian
corr(u_i, X) = 0 (assumed)
Coef.
.9817565
-.0376679 .0277515 .0483098
-.046003 .0024803 .0770537
|
Std. Err.
.0079387
.0247989 .0150248 .0132164
.0230972 .0008104 .0349944
|
123.67
-1.52 1.85 3.66 -1.99
3.06 2.20
|
Obs per group: min =
avg = max =
Wald chi2(6) =
Prob > chi2 =
P>|z| [95% Conf.
0.000 .966197
0.129 -.0862728
0.065 -.0016965
0.000 .022406
0.046 -.0912727
0.002 .000892
0.028 .008466
|
|
lpib
L1.
|
0
|
|
|
lm2
lcrd
linv
lgov
louv
. hausman eq1
0
.05897313
(fraction of variance due to u_i)
Coefficients
_cons
|
(b)
eq1
|
(B)
|
(b-B)
Difference
|
|
sigma_u
sigma_e
|
.9066214
|
.9817565
|
-.0751351
|
|
rho
|
.0510725
|
-.0376679
|
.0887404
|
|
|
.012985
|
.0277515
|
-.0147665
|
|
|
.0648817
|
.0483098
|
.016572
|
|
|
-.0986149
|
-.046003
|
-.0526119
|
|
|
.0058007
|
.0024803
|
.0033204
|
|
440
11
40
40.0
40
18594.83
0.0000
Interval]
.9973161
.010937 .0571994 .0742135
-.0007332
.0040686
.1456414
sqrt(diag(V_b-V_B))
S.E.
.0141935
.0253224
.007967
.0123543
.0162002
.00289
b = consistent under Ho and Ha; obtained from
xtreg .
B = inconsistent under Ha, efficient under Ho;
obtained from xtreg
L.lpib lm2 lcrd linv
lgov louv
Test: Ho: difference in coefficients not
systematic
chi2(6) = (b-B)'[(V_b-V_B)^(-1)](b-B)
= 45.42
Prob>chi2 = 0.0000
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
ANNEXE 4 : Résultats des estimations par la
méthode des GMM ? Estimation sur la zone franc
Dynamic panel-data estimation, one-step system GMM
Group variable: country
Time variable : annee
|
|
|
|
|
|
t
|
P>|t|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
.9485701
|
.0161782
|
58.63
|
0.000
|
.9125229
|
|
|
.0486601
|
.026532
|
1.83
|
0.097
|
Number of obs =
-.0104569
|
|
|
.0290729
|
.0213614
|
1.36
|
0.203
|
Number of groups =
-.0185234
|
|
Number of instruments = 289
|
.0615745
|
.0200752
|
3.07
|
0.012
|
Obs per group: min =
.0168441
|
|
F(6, 10) = 2304.60
|
-.0813891
|
.0339691
|
-2.40
|
0.038
|
avg =
-.157077
|
|
Prob > F = 0.000
|
.0027159
|
.001104
|
2.46
|
0.034
|
max =
.000256
|
|
|
.0773605
|
.0371605
|
2.08
|
0.064
|
-.0054381
|
|
lpib
Coef.
Robust
Std. Err.
lm2
lcrd
linv
lgov
louv
_cons
Instruments for first differences equation
517 11 41 47.00
49 [95% Conf. Interval] .9846174
.1077772 .0766692 .1063049
-.0057013 .0051759 .1601591 GMM-type
(missing=0, separate instruments for each period unless collapsed)
lpib
L(1/.).L.lpib collapsed
L1.
L(2/.).(linv lgov louv lm2 lcrd) collapsed
Arellano-Bond test for AR(1) in first differences: z = -3.05
Pr > z = 0.002 Arellano-Bond test for AR(2) in first differences: z = -2.39
Pr > z = 0.127
Sargan test of overid. restrictions: chi2(282) = 515.59 Prob >
chi2 = 0.130
86
Hansen test of overid. restrictions: chi2(282) = 8.48 Prob >
chi2 = 1.000
87
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
? Estimation sur la zone UEMOA
Dynamic panel-data estimation, one-step system GMM
Group variable: country
Time variable : annee
|
|
|
|
|
|
|
t
|
P>|t|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
.9291335
|
.0202369
|
45.91
|
0.000
|
.8796155
|
|
|
.0226078
|
.0074977
|
3.02
|
0.024
|
.0042617
|
|
|
.0527457
|
.0176463
|
2.99
|
0.024
|
.0095668
|
|
|
.0553913
|
.0162018
|
3.42
|
0.014
|
.0157469
|
|
|
-.0434095
|
.0158731
|
-2.73
|
0.034
|
-.0822496
|
|
|
.0024324
|
.0008021
|
3.03
|
0.023
|
.0004696
|
|
Number of instruments = 289
|
.0843157
|
.0325549
|
2.59
|
0.041
|
.0046566
|
|
F(6, 6) = 1510.29
lpib
Coef.
Robust
Std. Err.
lpib
L1.
lm2
lcrd
lgov
louv
_cons
Instruments for first differences equation
Prob > F = 0.000
Number of obs = 326
Number of groups = 7
Obs per group: min = 41
avg = 46.57
max = 49
[95% Conf. Interval] .9786514
.040954 .0959247 .0950358 -.0045694
.0043951 .1639747 GMM-type (missing=0, separate
instruments for each period unless collapsed) L(1/.).L.lpib
collapsed
L(2/.).(linv lgov louv lm2 lcrd) collapsed
Arellano-Bond test for AR(1) in first differences: z = -2.37 Pr
> z = 0.018
linv
Arellano-Bond test for AR(2) in first differences: z = -1.77 Pr
> z = 0.117
Sargan test of overid. restrictions: chi2(282) = 380.49 Prob
> chi2 = 0.137 Hansen test of overid. restrictions: chi2(282) = 0.00 Prob
> chi2 = 1.000
88
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
? Estimation sur la zone CEMAC
Dynamic panel-data estimation, one-step system GMM
Group variable: country
Time variable : annee
|
|
|
|
|
|
|
t
|
P>|t|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
.9875604
|
.006457
|
152.94
|
0.000
|
.9670112
|
|
|
-.156668
|
.1198078
|
-1.31
|
0.282
|
-.5379498
|
|
|
-.0101583
|
.0139245
|
-0.73
|
0.518
|
-.0544722
|
|
|
-.0110672
|
.0315614
|
-0.35
|
0.749
|
-.1115096
|
|
|
-.1985735
|
.0570818
|
-3.48
|
0.040
|
-.3802334
|
|
|
.120104
|
.033646
|
3.57
|
0.038
|
.0130274
|
|
Number of instruments = 191
F(6, 3) = 3.85
|
.5810444
|
.2132261
|
2.73
|
0.072
|
-.0975362
|
|
Prob > F = 0.148
lpib
Coef.
Robust
Std. Err.
lpib
L1.
lgov
louv
_cons
Instruments for first differences equation
Number of obs = 191
Number of groups = 4
Obs per group: min = 47
avg = 47.75
max = 48
[95% Conf. Interval] 1.00811
.2246138 .0341555 .0893752
-.0169136 .2271806 1.259625 GMM-type
(missing=0, separate instruments for each period unless collapsed)
L(1/.).(L.lpib linv lgov louv) collapsed
lm2
lcrd
linv
Arellano-Bond test for AR(1) in first differences: z = -1.95 Pr
> z = 0.051 Arellano-Bond test for AR(2) in first differences: z = -1.74 Pr
> z = 0.121s
Sargan test of overid. restrictions: chi2(184) = 236.71 Prob
> chi2 = 0.105 (Not robust, but not weakened by many instruments.)
Hansen test of overid. restrictions: chi2(184) = 0.00 Prob
> chi2 = 1.000
|