De la nécessité de la renaissance de la RDC face à l'impératif de la recomposition stratégique africaine et globale post-blocs( Télécharger le fichier original )par Rossy MUKENDI TSHIMANGA Université pédagogique nationale (RDC) - Licence en relations internationales 2008 |
3.2. Les grands enjeux du monde post blocsLes changements survenus dans les relations internationales consécutifs au démantèlement du duopole américano soviétique n'ont pas résolu l'ensemble de questions qui se posaient jadis, ils en ont au contraire, créés quelques-unes en plus. Et tous ces problèmes anciens et nouveaux à résoudre constituent des enjeux et défis à relever dans l'ordre mondial en présence. Il s'agit notamment des questions d'ordre juridique (le droit international), d'ordre économique, elles portent également sur la défense et la stratégie ainsi que sur plusieurs autres enjeux qualifiés de transversaux. · Le droit international Le droit international est le droit de la société internationale. Or cette société contrairement à une société d'individus ; est largement exempte de régulations, de normes, de valeurs acceptées par tous. Elle apparaît plus comme la jungle décrite par Hobbes, Machiavel et autres que comme une communauté apaisée et policée par un hypothétique pacte social ou contrat social. Déjà à l'intérieur d'un Etat de droit, le système juridique et judiciaire n'est qu'un amortisseur, seulement en partie efficace, de la brutalité des rapports humains. L'imperfection fondamentale de toute construction juridique est encore plus flagrante s'agissant du droit international27(*). Il n'existe toujours pas d'autorité pour assurer l'ordre et le respect de normes, et pas de police qui posséderait le monopole de la violence. Les seules entités capables de faire appliquer un « droit » sont les grandes puissances qui disposent de la contrainte. Mais personne ne peut venir limiter, réglementer l'usage de la force, sinon une coalition plus puissante d'Etats menacés28(*). Le droit n'a finalement pas réussi à s'imposer comme facteur structurant des relations internationales, l'équilibre des forces demeurent le seul refuge pour le maintien ne fut-ce que minimal de la sécurité et de la paix mondiale. Mais cela n'exclut pas le fait pour les Etats de s'engager dans des traités et accords bilatéraux et multilatéraux pour tenter de réguler et de stabiliser les affaires mondiales dans nombre de ses aspects. Le principal enjeu dans ce domaine reste toujours celui d'instaurer une autorité supranationale et bienveillante qui donnerait au droit international toute sa pertinence. Un droit accepté par tous les Etats et qui se poserait en substitue au mécanisme westphalien d'équilibre des puissances dans cette quête de stabilité et de sécurité collective. · L'économie internationale Les questions économiques revêtent de une plus grande d'importance dans les relations internationales de l'après guerre froide à tel enseigne que certains tentent de l'ériger en principe d'ordre, en facteur structurant dans cet international qui ne cesse de se mondialiser et de modifier les fonctions de la puissance. Car toute politique des Etats modernes vise à maximiser l'intérêt de la nation en termes de production des richesses. La politique étrangère inclut de plus en plus des considérations économiques importantes qui deviennent parfois l'unique ressort de la diplomatie, la guerre étant devenue une menace virtuelle pour beaucoup d'Etats. Cette économicisation des rapports internationaux explique le fait que ce soient les chefs d'entreprises qui accompagnent désormais les chefs d'Etat et des gouvernements dans leur déplacement à l'étranger, alors qu'à une certaine période, seuls les politiques étaient admis dans ce cercle fermé de la diplomatie. A cette ère de la mondialisation, note le Professeur Mokili Jeannot, la compétition économique prend des allures vertigineuses. La bonne santé d'un pays se mesure désormais à l'importance de ses exportations et à la compétitivité de ses produits sur les marchés internationaux. C'est à l'intensité des mouvements des biens et des capitaux qu'on mesure aujourd'hui la prospérité du globe29(*). Cependant les pays pauvres d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine éprouvent des sérieuses difficultés à s'intégrer dans ce jeu de mondialisation des économies. Ils ne parviennent pas à assurer leurs économies et à participer aux échanges. La mondialisation fait plus l'affaire des nations industrialisées dont les produits ne cessent de générer des plus valus. Un petit nombre seulement d'Etats de ces régions ont réussi à percer économiquement. On parle de plus en plus des nouveaux pays industrialisés ou pays émergents qui tentent de s'organiser, de se regrouper pour peser considérablement dans la conduite des affaires mondiales. Ce qui pourrait à la limite et selon certaines prévision entraîner des changements considérable dans l'équilibre mondial. Le rapport publié par le Goldman Sachs en octobre 2003 prédit pour sa part le déclin économique des USA au profit du dragon et de l'éléphant asiatiques. Selon ce rapport, le XXIième siècle sera celui de la Chine et de l'Inde. Le PIB de la chine dépasserait celui des USA en 2040. Quant à l'Inde, dont la population rattrapera celle de la chine vers 2030 pour atteindre 1,9 milliards à la fin du siècle, son PIB croisserait celui de quatre grandes économies européennes en 2035. De fait, le PIB de ces deux géants calculé aux prix intérieurs, c'est-à-dire à parité de pouvoir d'achat (PPA) avoisinerait en 2004 6900 milliards de dollars pour la chine et 3100 milliards pour l'Inde. Ils se situeraient donc respectivement au deuxième rang et quatrième rang mondial, après les Etats-Unis et le Japon, et auraient contribué pour près de 40% à la croissance mondiale30(*). · Défense et stratégie Avec l'écroulement de l'URSS, des équilibres locaux ou régionaux de la guerre froide ont été rompus, le risque d'un affrontement direct entre puissances nucléaires s'est étiolé ; mais les conflits armés n'ont pas disparu pour autant ils se sont transformés. Ces transformations de la nature des conflits obligent également une évolution dans les réponses à y apporter. Il faut désormais se préoccuper des moyens de faire face aux conflits infra étatiques, aux risques de prolifération des armes de destruction massive et au développement du terrorisme international31(*). Ces conflits armés font d'énormes ravages humanitaires et sont porteurs d'instabilités politiques dans plusieurs régions du monde. C'est le cas par exemple de l'Afrique centrale où l'on assisté à la plus grande guerre d'Afrique moderne qui a mis aux prises sept nations autour de la RDC, causant des millions des morts civils et militaires et obligeants des milliers des personnes à l'errance. Cette instabilité est loin d'être jugulée malgré les efforts déployés et les risques d'embrasement reste donc permanents. · Les enjeux transversaux Les enjeux transversaux concernent une variété de question qui au fil des ans ont acquis une nette importance et nécessite de ce fait des réponses appropriées de la part de l'ensemble des sociétés parties du système international en présence. Il s'agit entre autre de : l'environnement, l'énergie, la migration, la santé et la criminalité internationale. - l'environnement Les pratiques humaines éprouvent considérablement l'écosystème. Les études menées à cet effet font état d'une dégradation à haute échelle de l'environnement qui menace la vie sur notre planète et les prévisions sont encore plus alarmistes. Le principal défi à relever est de réduire sensiblement les émissions des gaz à effet de serres qui détruisent la couche d'ozone entraînant des changements climatiques à la base des catastrophes naturelles dans plusieurs régions du monde et d'autres menaces plus sérieuses encore sont attendues. Le groupe d'experts et des responsables environnementaux, membres du Programme appelé Evaluation des Ecosystèmes pour le Millénaire (EM), a fait remarquer dans son premier rapport qu'au cours des 50 dernières années, la demande croissante en nourriture, en eau douce, en bois de construction, en fibres et en combustibles a provoqué des changements sans précédents dans les écosystèmes. Ces changements ont mis à rude épreuve la capacité de la terre à subvenir aux besoins des générations futures. On a sur exploité sa capacité à polliniser les cultures, à renouveler l'air par les plantes sauvages et à recycler les éléments nutritifs par les océans. De plus, une vague d'extinction massive d'espèces menace la planète32(*). Le quotidien canadien Globe and Mail, rapporte de son coté que, les humains dégradent la planète à un rythme qui augmente le risque de bouleversements écologiques susceptibles de causer des maladies, la déforestation ou l'apparition de zones mortes dans les océans. Les zones humides, les forêts, les savanes, les zones de pêche côtière, les estuaires et d'autres habitats qui recyclent l'air, l'eau et les éléments nutritifs nécessaires à la vie sont entrain de subir une détérioration irréversible33(*). Plusieurs initiatives ont été menées et d'autres sont attendues pour préserver la planète terre d'une éventuelle disparition. L'attention se tourne plus vers les pays industrialisés considérés comme étant des grands pollueurs dont notamment les USA, la chine, l'Allemagne, la grande Bretagne, la France, le japon, etc. ceux-ci doivent prendre des engagements pour réduire leur niveau de pollution mais aussi mettre des moyens financier pour préserver certaines réserves écologiques telles que la forêt amazonienne en Amérique latine et la forêt équatoriale en Afrique centrale dont plus de la moitié se trouve sur le territoire de la RD Congo. - L'énergie L'eau, le pétrole, l'électricité, le gaz, le charbon et autres minerais et hydrocarbures font l'objet d'une demande croissante aussi bien pour les industries que pour les ménages. Ces ressources énergétiques étant épuisables et inégalement reparties sont pourtant indispensables dans bien des cas et font l'objet d'une sur exploitation qui pourrait conduire à leur épuisement. Il y a aussi les aspects géopolitique et géostratégique liés à l'accès ou à la captation de ces ressources. Le pétrole est actuellement considéré comme le facteur fondamental des conflits à travers le monde. Plusieurs analystes soutiennent que l'eau douce se fait de plus en plus rare en surface et qu'elle pourrait très bientôt alimenter les guerres dans certaines régions du monde. Les risques de rareté ont conduit les communautés scientifiques à travers les pays à se concentrer sur la recherche des nouvelles générations d'énergies ou des énergies renouvelables moins polluantes. C'est le cas des biocarburants que l'on produirait à partir des certains végétaux en remplacement aux fuels habituels. Mais cette entreprise ne sera pas sans danger. Cette nouvelle entreprise ne sera pas sans danger, les spécialistes estiment déjà qu'elle aura des effets négatifs qu'elle pourrait éventuellement accentuer la famine à travers le monde.
- La migration Les mouvements des populations constituent l'un des plus grands défis des relations internationales en présence. Des milliers de personnes émigrent quotidiennement et pour diverses raisons vers des régions ou pays qu'ils jugent plus confortables pour leur survie et cela parfois au péril de leur vie. L'Europe, l'Amérique du Nord et certains pays émergents de l'hémisphère sud sont confrontés à l'afflue des immigrants qui arrivent par mer, air ou route. La gestion de ces mouvements migratoires clandestins dans la plupart des cas, oblige les Etats de départ généralement pauvres et les Etats de destination (occidentaux) à plus de coopération. Les pays pauvres devant, certainement avec l'appui des pays riches, travailler à créer des conditions de vie acceptables sur leur territoire pour casser le mythe migratoire d'un eldorado européen et américain. - La santé La mondialisation a accéléré les risques de propagation et de contagion à travers le monde dans la mesure où elle accroît les contacts entre les hommes et l'intensification des échanges dans tous les sens. Les humains et certains produits sont devenus des vecteurs des maladies surtout en cas de migration clandestine et de contrebande. Il faut désormais redouter des catastrophes sanitaires à l'échelle mondiale car, les épidémies et les maladies infectieuses transmissibles font régulièrement leur apparition. En dehors du Sida et de la malaria on peut citer des maladies comme : la méningite, la dingue, le choléra, le thyphus, le virus Ebola, la polyomyélite, le sras (syndrome respiratoire aigu sévère), la grippe aviaire, la vache folle ; le virus influenza (grippe) de type A et de sous type H1N1... Il y a une nécessité de mettre sur pieds des politiques ou mécanismes solides au niveau des Etats et des institutions internationales spécialisées comme l'OMS pour éradiquer ces maladies qui menacent grandement les vies humaines dans différentes régions du monde. La malaria par exemple est la plus grande cause de mortalité en Afrique et le Sida ne cesse de gagner du terrain. - La criminalité internationale La criminalité transfrontalière prend des proportions extraordinaires au fur et à mesure qu'on s'enfonce dans la mondialisation. La notion de la plus value semble ne pas profiter qu'aux Etats seuls, plusieurs entités criminelles sont décidées de jouir des bénéfices de la mondialisation pour renforcer leur capacité de nuisance ou faire prospérer leur trafic jugé pourtant illicite. En plus du phénomène de la mondialisation la montée en puissance du crime organisé pourrait bien aussi s'expliquer par la profusion des Etats en faillite ou effondrés. Le terrorisme, le narco économie ou narco business, les trafics humains, les pirateries sur terre, sur mer et dans les avions, la cyber criminalité, le blanchiment d'argent, etc ; sont autant des trafics illégaux qui mobilisent les politiques des Etats et de la communauté internationale. La coopération internationale en matière de répression et de démantèlement des réseaux criminels s'intensifie de plus en plus dans certains domaines mais dans d'autres domaines comme la cyber criminalité par exemple certains Etats sembles retissant voyant dans les « hackers » ou pirates informatiques des opportunités pour faire face à la guerre informatique qui se profile (cas de la cyber-armée Iranienne). Les Etats et la communauté internationale doivent en outre actualiser de façon permanente leurs méthodes de lutte car, ces groupuscules, tels des laboratoires, travaillent à mettre sur pieds des mécanismes plus subtils de contournement des systèmes de sécurité et de contrôle imaginés par les services officiels. Mais la tâche semble plus rude d'autant plus que, la pauvreté grandissante dans plusieurs coins de la planète et la persistance de la corruption même dans des pays développés offrent à ces cartels et groupuscules des opportunités pour perpétuer ces sales besognes. En effet, l'état actuel du monde en ce début du XXIème siècle porte à croire que les relations internationales policées et régulées ne sont pas à venir. La refonte des alliances imposée par l'implosion du système bipolaire laisse l'impression d'un désordre généralisé. Les facteurs d'instabilité se sont accrus dans la plupart des domaines, et il en résulte une difficulté de plus en plus grande, pour n'importe quels pays, n'importe quelle force ou institution, à contrôler l'évolution des affaires mondiales. Cette configuration du monde post blocs parait préoccupante d'autant plus que le nombre d'Etats africain, asiatique et latino américain pataugent dans un chaos social, économique, sécuritaire et politique dramatique qui risque de mener à l'éclatement la plupart d'entre eux, faute d'attention particulière d'une communauté internationale elle-même en mal des repères. Mais il est tout aussi possible que le démantèlement de ces Etats effondrés soit une alternative à la stabilité et à la pacification des relations internationales car, il n'est pas certain, note François Thual, qu'une planète hyper balkanisé signifierait obligatoirement une situation de guerre totale. Ce n'est pas forcément le schéma qui correspondrait à la guerre de tous contre tous La prolifération sur la scène internationale des Etats de dimension géographique réduite et moins ambitieux ; et sur lesquels dominerait un nombre limité des puissances, faciliterait peut être le contrôle et la gestion des crises de la mondialisation34(*). Ainsi, la République Démocratique du Congo qui a été diagnostiquée comme une des « Etats en faillite » le plus exemplaire de la planète a le devoir de renaître et d'échapper à la conjecture s'agissant de la conduite de son destin. Cela d'autant plus que plusieurs enquêtes attestent de l'existence des schémas ou plans de balkanisation du territoire de ce pays ; les guerres à répétition dans la partie est de la république serait en effet l'une des stratégies machiavéliques arrêtées par ces forces sans visages. Les difficultés du Congo, comme nous l'avons soutenu depuis le début de cette étude, sont de deux ordres ; existentiel et praxéologique. Ce qui en principe devrait l'obliger à recréer son indépendance et sa souveraineté en vue d'abord de quitter son stade actuel qui le réduit à un simple réservoir des matières premières autorisant toutes les ambitions même cyniques de ses prédateurs ; mais surtout et par la suite de retrouver sa place dans le concert des nations et de jouer son rôle d'ancre de stabilité et de socle d'intégration économique africaine. Dans son livre intitulé l'empire de la honte, jean Ziegler écrit : « pétri du sentiment pénible de son infériorité, de son indignité, découvrant que ni la faim ni la dette ne sont inévitables, l'homme honteux du tiers monde peut, lui aussi, prendre conscience et se lever. Souffrant de son déshonneur, l'affamé, le chômeur, l'homme humilié raval sa honte aussi longtemps qu'il croit sa situation immuable. Il se transforme en combattant, en insurgé, en révolté dès lors que la prétendue fatalité révèle ses failles. La victime devient alors acteur de son destin35(*). Le déclin de la RDC n'est donc pas une fatalité, il est un phénomène largement réversible. Son effondrement s'origine dans l'informalisation de l'appareil de l'Etat et dans une absence de politique d'anticipation et d'aggiornamento de ses décideurs. Seul un processus d'inversion global, réfléchi, méthodique et suivi des tendances actuelles lui permettrait de renaître à la puissance et à la grandeur. Cette ambition de renaissance qui relève essentiellement de la géopolitique devrait obliger la RDC à ne compter que sur ses propres facteurs, ses propres atouts, ses capacités mobilisatrices et créatrices internes. Cette approche endogène s'impose d'autant plus qu'aucun exemple contemporain n'atteste l'aptitude de la communauté internationale à reconstruire avec succès un Etat effondré et de même aucun Etat ne peut faire totalement pour l'autre ce qu'il n'est pas en mesure d'entreprendre par lui-même. L'appui des partenaires doit être minoré, revêtir un caractère supplétif. * 27 Faure. J et Prost. Y, Relations internationales, Ellipses, Paris, 2004, p393. * 28 Faure. J et Prost, Op Cit, p393. * 29 Mokili. J, Pratique du commerce international, cours inédit, L1 RI, SSAP, UPN, Kinshasa, 2006-2007, p57. * 30 Baillot Jean. J, 2004, année du dragon et de l'éléphant, in « l'Etat du monde 2005 », op. Cit. p30 * 31 Faure. J et Prost Y, Op. Cit, p427 * 32 Témoins de Jéhovah, « La terre subviendra-t-elle aux besoins des générations futures ? », in réveillez-vous, juillet 2008, p12 * 33 ibidem * 34 Thual. F, Op Cit, p31 * 35 Ziegler. J, Op Cit, p19. |
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