EPIGRAPHE
Paresseux, jusqu'à quand seras-tu couché ? Quand
te lèveras-tu de ton sommeil ? Un peu de sommeil, un peu
d'assoupissement, un peu croiser les mains pour dormir ! Et la pauvreté
te surprendra comme un rôdeur. Bible, Proverbe 6 : 9-11 (Traduction
Louis Second).
DEDICACE
A toi mon Papa Victor LUPUNGU ;
A toi ma Maman chérie Bernice KAMUELE ;
A vous mes frères et soeurs ;
A vous mes très chers amis et
collègues ;
Je vous aime de tout mon coeur !
Isaac MAYELE LUPUNGU
AVANT
PROPOS
"Chaque enfant qu'on enseigne est un homme qu'on gagne". C'est
par cette célèbre citation de Victor Hugo que nous tenons
à l'accomplissement de notre tâche, celle de remercier les
personnes qui ont tenu fort de près ou de loin en vue d'atteindre la
finalité de cette brave aventure.
Nos vifs remerciements s'adressent de prime à bord au
très Haut, qui ne cesse, malgré les vents et tempêtes de la
vie, de m'accorder gratuitement le précieux souffle de vie. Puis
à toutes les autorités des Facultés Catholiques de
Kinshasa (FCK) pour leur engagement dans le grand combat de l'encadrement et de
la formation des élites congolais. Par ricochet, nous pensons
également aux différentes autorités de la faculté
d'économie et développement, que les corps académique et
scientifique de cette faculté trouvent à travers ce paragraphe
l'expression de notre profonde gratitude.
Que notre maître de pensée, le Professeur
Télesphore CHELO DHEBBI qui, en dépit de ses lourdes et multiples
occupations a su diriger cette recherche scientifique avec beaucoup de rigueur
et de fermeté trouve à travers ces lignes nos très
sincères remerciements, à jamais vos actes seront toujours graver
dans notre esprit.
A vous monsieur Hervé NLANDU, nous vous assurons qu'en
réalité vous n'étiez pas qu'un assistant pour nous, mais
plutôt un grand frère par vos conseils, vos remarques très
pertinentes et surtout votre encadrement, recevez nos vifs remerciements et
l'expression de notre profonde reconnaissance.
A toi mon Papa Victor LUPUNGU, ma maman chérie Bernice
KAMUELE, vous êtes des super-parents que je n'ai malheureusement pas vu
au monde, ce travail est un fruit des vos efforts, témoigne des
sacrifices endurés.
A vous mes frères et soeurs Franklin KIZETI, Georgette
LUPUNGU MUTSUMBWA, Marie MBALO, Justine LUPUNGU, Auguy NYANGA, Maurice
KABATSHI et Neneth LUPUNGU NYANGE, vous êtes les meilleurs par vos
conseils, vos aides tant morales que matérielles et surtout vos
encouragements, tenez bon "Yes we can".
A vous les Wauters, il s'agit bel et bien de madame Wauters
LUPUNGU Georgette ; Wauters Vic, Wauters Bruno et Wauters
Marie-Paule ; respectivement soeur, neveux et nièce remplis de
compassion, de générosité, de gentillesse et de modestie
comme vous, jamais vu au monde. Trouvez à travers ces mots ma
sincère reconnaissance traduite par les efforts accomplis par votre
jeune oncle !
Le ciel nous en voudra et la nature nous taxera d'une
ingratitude notoire si nous bouclons ces mots sans penser à la famille
KIKONDA, il s'agit de monsieur Akim KIKONDA, madame Marie KIKONDA, Thiery
KIKONDA, Serge KIKONDA, Bénédicte KIKONDA et Bonheur KIKONDA.
Nous mourons d'envie de dire merci car les actes que vous avez toujours
posé à notre endroit nous emporte parfois dans une émotion
intrinsèque, voilà le concret résultat de vos efforts,
vous êtes un très bon modèle pour nous à suivre,
nous ne cesserons guère de vous avouez que ce qui est semé en
nous au jour le jour, est une moisson de l'avenir !
Que nos amis et connaissances, toutes les personnes qui nous
ont soutenu de près ou de loin, tous nos encadreurs, tous les lecteurs
du présent travail scientifique trouvent ici notre franche collaboration
et reçoivent des bénédictions venant d'en haut.
Isaac MAYELE LUPUNGU
Etudiant
LISTE
DES ACRONYMES
ACF : Action Contre la Faim
ASBL : Associations Sans But Lucratif
ASS : Afrique au Sud du Sahara
CNDRI : Centre National de Développement
Rural
Intégré
DAIPN : Domaine Agro-Industriel
Présidentiel de la
N'sele
DDL : Degré de Liberté
DSCRP : Document de Stratégie de
Croissance et de
Réduction de
la Pauvreté
FAO : Organisation des Nations Unies pour
l'Alimentation et
l'Agriculture
FEC : Fédération des Entreprises du Congo
FMI : Fonds Monétaire pour le Développement
HCDH : Haut Commissariat des Nations Unies
aux
Droits de l'Homme
JTLF : Journal
Télévisé en Lingala Facile
LOGEC : Logement Economique
MONUC : Missions des Nations Unies au Congo
OMD : Objectifs du Millénaire pour le
Développement
OMS : Organisation Mondiale de la
Santé
ONL : Office National de Logement
PAM : Programme Alimentaire Mondial
PME : Petites et Moyennes Entreprises
PNA : Programme National
d'Assainissement
PNUD : Programme des Nations Unies
pour le
Développement
PVD : Pays en Voie de
Développement
PRSP : Poverty Reduction Strategy
Papers
PDU : Projet de Développement
Urbain
RDC : République
Démocratique du Congo
REGIDESO : Régie de Distribution d'eau
SIDA : Syndrome
Immuno-Déficience Acquise
SMIG : Salaire Minimum Garanti
SNEL : Société National
d'Electricité
TPAT-UH : Travaux Publics, Aménagement du
Territoire, Urbanisme et Habitat
UNICEF : Fond des Nations Unies pour l'Enfance
UNOPS : Bureau des Nations Unies pour
les Services D'Appui aux Projets
VIH : Virus d'Immuno-Déficience Humaine
INTRODUCTION
1.1. PROBLEMATIQUE
Vaincre la pauvreté au milieu des hommes est devenu une
des préoccupations majeures pour l'humanité toute entière.
La lutte contre la pauvreté peut paraître à la fois comme
un slogan et un véritable but des instances internationales et des
acteurs de développement national.
En République Démocratique du Congo en
général, et dans la ville de Kinshasa en particulier, la
pauvreté n'est plus un mythe mais une réalité de masse qui
sévit tous les jours. Elle ne renvoie pas qu'au manque de revenus, elle
est un concept multidimensionnel. La multidimensionnalité du concept
pauvreté conduit à opérer une soigneuse distinction entre
"la Pauvreté" et "la Précarité". Il s'agit pour les Kinois
de deux états de vie que les auteurs ont parfois difficile à
distinguer parce que leurs conséquences convergent à long
terme.
Signalons que depuis plusieurs décennies, les rapports
entre pays colonisateurs et pays colonisés sont remplacés par un
nouveau type des relations : il s'agit des relations de coopération
ou la coopération au développement. L'objet ou la matière
de cette coopération est jalonné des stratégies, des plans
triennaux, quinquennaux et décennaux. Chacun de ces plans porte un nom
sous forme de slogan, par exemple : "Industries
Industrialisantes" ; "Développement Rural
(Intégré)" ; "Ajustement Structurel" ; "Appui
au Secteur Informel ou Economie Populaire" ;
"Education pour Tous" ; "Développement Humain" ;
"Gender et Développement"...et aujourd'hui "Lutte Contre la
Pauvreté".
Ces coopérations et discours traduisent à notre
avis, l'évolution des préoccupations pour le
phénomène de la pauvreté et constituent à chaque
fois des nouveaux paradigmes, des différents souhaits ou
différentes théories qui guident les différentes
stratégies d'actions à entreprendre1(*).
Malheureusement, cette même préoccupation ne
constitue souvent qu'un simple effet de mode pour certains acteurs de
développement qui restent au niveau des lois et décrets sans
jamais avoir la ferme résolution politique de traduire réellement
les intentions en actes ou en actions publiques concrètes.
De ce qui précède, il nous revient de nous poser
quelques questions fondamentales qui demeurent ipso facto une
préoccupation si l'on veut rendre effective la lutte contre la
pauvreté à Kinshasa. Ces questions sont les suivantes :
· Quelles sont les principales causes ou fondements de la
pauvreté à Kinshasa ?
· Pourquoi la pauvreté persiste-t-elle à
Kinshasa malgré les différentes théories et pistes misent
en place par le gouvernement congolais et les institutions
internationales ?
· Que faire pour réduire le taux de la
pauvreté à Kinshasa ?
1.2. HYPOTHESES
Considérant l'ampleur de la dégradation des
conditions de vie de la population kinoise prise dans son ensemble, il est
important en tant que scientifique d'en tenir compte et d'en déduire un
certain nombre des causes explicatives et aussi mener une analyse scientifique
importante pour la réduction du taux de la pauvreté. Deux
facteurs justifieraient la détérioration des conditions de vie
à Kinshasa, il s'agirait notamment :
v De l'explosion démographique : à ce stade
on remarque que la population kinoise a augmentée de façon
vertigineuse. En 1881 il n'y avait que 5 000 habitants à Kinshasa,
la population a augmentée à plus de 6 000 000 d'habitants en 2003
et elle s'est rapidement accrue pour atteindre plus de 9 000 000
d'habitants à ce jour. L'exode rural, l'accroissement naturel et
l'incorporation des certains villages environnants sont en principe les
principales causes de l'explosion démographique à
Kinshasa2(*).
En effet, cette explosion a permis à la population
kinoise de voir non seulement les infrastructures de base, mais aussi toutes
les conditions de vie détériorées au jour le jour et la
population ne cesse sans doute de s'exclamer chez les autorités tant
municipales que provinciales à travers des vieux adages nostalgiques
« Kin la belle ekoma Kin la poubelle » qui veut dire
littéralement « Kinshasa, qui était la ville propre sur
tous ses aspects, est devenue aujourd'hui une poubelle ».
v De la crise politique et économique, les
différentes guerres civiles qui se sont succédées depuis
1960 jusqu'à présent ont aggravé la crise
économique qui, elle-même, fut accentuée par la
nationalisation des entreprises certaines étrangères ayant leur
champ d'activités au pays.
C'est Kinshasa qui paie le lourd tribut des crises politiques
et économiques, car la paupérisation des milieux ruraux ne fait
que s'accentuer au fil du temps poussant ainsi les paysans à quitter la
campagne pour venir gonfler les effectifs de la population kinoise, contrainte
de vivre dans la précarité. D'où, les infrastructures du
secteur formel sont dépassées par le boom
démographique.
L'Etat comme garant de la nation, devrait user, à notre
avis, des mesures d'encouragement des politiques productives (ne pas s'axer
qu'aux slogans). Il doit promouvoir l'éradication des certaines failles
pour la motivation du secteur formel à produire les richesses, de
stimuler la production en vue de garantir la satisfaction des besoins minima de
la population qui ne fait que sonner l'alarme.
1.3. INTERET DU SUJET
L'intérêt de ce travail vient du constat que nous
avons aperçu dans la ville de Kinshasa, le taux de chômage
élevé (le sous emploi) créant des multiples incidences sur
la vie de la population kinoise et la crise générale que traverse
la population. Il nous servira d'un grand bagage en vue d'approfondir notre
connaissance participative dans la gestion de la chose publique tout en se
dotant d'une conviction d'assurer un minimum vital à la population
Kinoise qui ne cesse de se dégrader au jour le jour. Cependant, Une
pareille étude revêt de l'intérêt dans la mesure
où :
· Elle sera une analyse objective des principales causes
de la pauvreté à Kinshasa ;
· Elle dégagera l'incidence de la pauvreté
sur la vie de la population kinoise dans l'ensemble ;
· Elle proposera aux décideurs politiques
différentes stratégies ou perspectives de développement en
vue d'une réduction du taux de la pauvreté urbaine à
Kinshasa.
1.4. METHODES ET TECHNIQUES
Toute étude qui soit purement scientifique, pour lui
donner un caractère rationnel évident, procède par une
méthode accompagnée des techniques.
A. METHODES
Dans son sens large, on définit la méthode comme
étant une démarche ou l'ensemble des démarches que suit
l'esprit pour découvrir et démontrer une vérité.
Dans son sens philosophique la méthode se définit comme une
attitude d'esprit vis-à-vis de l'objet qu'on étudie et la logique
de l'objet scientifique qui en découle. Pour le cas qui est le notre,
nous utiliserons ainsi :
· La méthode statistique ;
· La méthode descriptive ;
· La méthode comparative
La méthode statistique interviendra lorsqu'on se
servira des chiffres pour dégager l'état de lieu,
l'évolution de la démographie et l'évolution de
l'économie dans la capitale. Tandis que les méthodes descriptive
et comparative nous seront d'une grande utilité pour appréhender
chaque donnée et elles nous aiderons à schématiser,
expliquer et comparer les données afin d'en tirer des conclusions qui en
découlent.
B. TECHNIQUES
Nous utiliserons à ce niveau deux grandes techniques,
à savoir:
· La recherche documentaire ;
· L'observation participante.
Nous allons parcourir les différents ouvrages se
référant à l'évolution de l'économie
congolaise en général et de la ville de Kinshasa en particulier.
Nous observerons ensuite sur terrain l'évolution de la vie sociale,
économique,... que traverse la population kinoise ; puis ferons
l'analyse des principaux obstacles que rencontre cette dernière.
1.5. DELIMITATION DU SUJET
Dans notre étude, nous ne saurons pas analyser toutes
les causes de la pauvreté à Kinshasa. Ainsi, nous allons plus
nous atteler à notre niveau sur les principales causes, comme l'indique
ci-haut notre intitulé. Nous nous situerons ipso facto en
République Démocratique du Congo et plus
précisément dans la ville-province de Kinshasa, de 2001 à
2008.
1.6. CANEVAS DU TRAVAIL
Pour rendre claire son contenu, notre travail sera
divisé en trois grands chapitres, dont le premier s'articulera autour de
l'approche notionnelle, où nous allons plus mettre l'accent sur la
manière dont la pauvreté est perçue à
l'échelle mondiale.
Le deuxième abordera l'état de lieu tout en
soulevant les différents problèmes que connait la ville province
de Kinshasa.
Et le troisième sera consacré à
l'étude des diverses politiques de développement que peuvent
adopter les opérateurs économiques en vue de notre implication
dans le processus de lutte contre la pauvreté urbaine à
Kinshasa.
CHAPITRE I
APPROCHE CONCEPTUELLE
INTRODUCTION
Il sied de spécifier que la pauvreté demeure un
concept multidimensionnel, du fait que ses manifestations qui en découle
se font savourer presque dans tous les domaines de la vie de l'homme. C'est de
cette façon que nous voulons, avant de l'aborder comme tel,
évoquer certains points des vues théoriques et
définitionnels soulevés par divers auteurs en vue de rendre
compréhensif le contenu de notre étude.
I.1.
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE : UNE PREOCCUPATION
MONDIALE
La lutte contre la pauvreté est devenue, l'une des
préoccupations importantes des institutions internationales et des
gouvernements. De par son importance et son impact socio-économique, ils
s'en préoccupent davantage depuis les années 1990, durant
lesquelles l'assemblée générale des Nations Unies avait
fait de l'élimination de la pauvreté l'un des ses objectifs
prioritaires de la décennie pour l'Afrique subsaharienne. En effet, lors
du sommet mondial pour le développement social à Copenhague en
mars 1995, les gouvernants s'étaient engagés à
éliminer la pauvreté.
L'assemblée Générale des Nations Unies
avait proclamé par la suite l'année 1996 « Année
internationale pour l'élimination de la pauvreté » et
la période de 1997-2006 « Premières décennies
des Nations Unies pour l'élimination de la pauvreté ».
Près de la moitié de 6 billions de la population mondiale vit
avec moins de 2$ par jour, seuil de la pauvreté3(*). C'est dans le cadre de cette
lutte que le sommet de Libreville de février 2000 avait regroupé
les institutions de « Breton Wood » et les Gouvernements
des pays en développement afin de réfléchir sur les
stratégies de réduction et/ou d'éradication de la
pauvreté.
Le sommet de millenium de septembre 2000 avait lui aussi
réfléchi sur le même sujet. Les Nations Unies ont
fixé les objectifs suivants pour le millénaire :
· Réduire l'extrême pauvreté et la
faim ;
· Assurer l'éducation pour tous ;
· Promouvoir l'égalité des sexes et
l'autonomisation des femmes ;
· Réduire la mortalité
infantile ;
· Améliorer la santé maternelle ;
· Combattre le VIH/SIDA ;
· Assurer un environnement durable et mettre en place un
partenariat mondial pour le développement.
La Banque Mondiale et les F.M.I (Fonds Monétaire
International) ont mis en oeuvre un programme dénommé "Poverty
Reduction Strategy Initiative (PRSI)" destiné à réduire la
pauvreté dans les pays pauvres. Dans le cadre de ce programme, chaque
pays concerné devra élaborer son "Poverty Reduction Strategy
Papers (PRSP)". Ainsi, la République Démocratique du Congo
s'est dotée d'un "Document de la Stratégie de croissance et de
Réduction de la Pauvreté (DSCRP)".
Le DSCRP congolais vise principalement le
rétablissement de la paix, la sécurité à
l'intérieur et à l'extérieur des frontières
nationales et le rétablissement d'un état de droit d'une part, la
relance et la consolidation de l'économie sur base saine prenant en
compte les objectifs du millénaire pour le développement (OMD),
d'autre part.
I.2.
BREFS REGARDS SUR LE CONCEPT » PAUVRETE »
La « pauvreté » ne renvoie pas
qu'au manque de revenu, elle est un concept multi dimensionnel. Pour le courant
WELFARIST, l'utilité est une fonction croissante de la consommation,
c'est-à-dire une fonction croissante du revenu d'un individu ou d'une
nation. Il fallait dès lors accroître la richesse pour
améliorer les conditions de vie. D'autres courants mettent l'accent sur
les besoins de base, soit sur les capacités. Il a fallu attendre une
période relativement récente pour voir apparaître des
théories proposant une vision plus large du développement
humain.
C'est dans ce contexte qu'intervient l'approche par les
capacités d'ARMATYA SEN4(*). Il remet en question le lien direct entre les
ressources dont dispose un agent et son niveau de bien-être.
D'après lui, il existe quelques points qui ne garantissent pas
l'équivalence entre les ressources d'une personne et son niveau de
bien-être. Il part ainsi de deux faits, à savoir :
· Le niveau de vie d'une personne ne dépend pas de
ses ressources (Commodities) mais aussi de sa capacité à les
transformer en paniers de biens dont il peut disposer (Entitlement).
· L'usage qu'une personne peut faire des ressources dont
il dispose et qui dépend d'un certain ensemble de
caractéristiques personnelles et sociales.
Ces différents faits déterminent en soi l'espace
de choix possible d'une personne. Plus l'espace des capacités est
réduit, plus l'individu sera pauvre en termes de choix de vie. SEN note
l'existence d'un lien étroit entre les dénis de libertés
qui conduisent à l'impossibilité de développer ses
facultés individuelles et le maintien des revenus à un niveau
bas. Il considère dès lors la pauvreté comme une privation
des capacités de base et non pas comme simplement un revenu faible. Les
différents dénis de libertés qui ne font qu'accentuer la
pauvreté des ménages sont principalement : la famine, la
sous alimentation, la malnutrition, les conditions de logement
précaires, l'accès à l'éducation et aux soins de
santé, les conditions d'existence précaires, le bas niveau
d'éducation et d'instruction, l'exclusion du monde de travail, les
discriminations sexuelles et la réduction des libertés civiles et
politiques. L'auteur ajoute que, la pauvreté est un monde complexe,
multiforme, qui exige une analyse précise de toutes ses nombreuses
dimensions car les êtres humains sont extrêmement divers de par
leur mode de vie.
La définition de la pauvreté varie
généralement selon deux types d'approches, l'une plus
globalisante et l'autre basée sur les trois dimensions de la
pauvreté suivante : l'alimentation, les revenus et les besoins
fondamentaux. Cette dernière approche est celle qui est souvent la plus
utilisée. Elle englobe dès lors trois types de
pauvreté :
· La pauvreté alimentaire ;
· La pauvreté monétaire et ;
· La pauvreté humaine.
Il sied à ce stade de spécifier que les auteurs
distinguent généralement la pauvreté en l'opposant
à la richesse. Les indicateurs qu'ils utilisent pour appréhender
peuvent être différents. Suivants les pays et /ou les contextes,
l'idée qu'on se fait de la pauvreté change. Si l'opposition entre
la pauvreté et la richesse reste permanente, elle prend néanmoins
des sens très différents. A chaque contexte correspond une
conception de la pauvreté. La plupart des auteurs ont essayé de
donner une définition de la pauvreté. Mais un parcours cursif des
définitions proposées montrent combien chaque auteur se sent
« limité » pour donner une définition
précise.
Certains auteurs évoquent seulement l'aspect argent
pour distinguer le pauvre du riche, mais cela ne suffit pas, il faut y ajouter
quelque chose de plus pour faire cette distinction. Parmi ces auteurs, nous
pouvons évoquer le cas de WRESINSKI (1987) qui définit la
pauvreté en la distinguant de la précarité. Pour lui, la
pauvreté est l'absence d'une ou de plusieurs sécurités
notamment celle de l'emploi qui permet à la personne d'assurer ses
obligations professionnelles, familiales et sociales et de jouir de ses droits
fondamentaux. Tandis que GILLIS (1990) définit la pauvreté en
parlant de l'individu qui s'estime pauvre parce que privé des avantages
dont jouit autrui dans la société. L'auteur, dans ce sens, a mis
l'accent sur le caractère relatif et subjectif de la pauvreté.
VANDERSCHUEREN (1996), quant à lui, définit la pauvreté
comme l'incapacité pour un individu, une famille ou une
communauté de satisfaire certains besoins minima. L'accent est mis chez
lui sur le caractère absolu et objectif de la pauvreté. CAMARA
(2001) désigne par la pauvreté comme un certain niveau de manque
ou d'insuffisance dans l'existence ou le bien être de l'homme. Pendant
que KALONJI NTALAJA (2001) catégorise trois sortes de pauvreté,
à savoir : la pauvreté primaire, secondaire et tertiaire.
Selon lui, la pauvreté primaire est un manque intrinsèque de
capacités d'actions nécessaires à une existence humaine
alimentaire, dont la responsabilité n'incombe pas à la personne
concernée (un handicapé physique ou un retraité par
exemple).
L'existence d'un système de sécurité
sociale efficace permet de pallier cette catégorie de pauvreté.
La pauvreté secondaire, selon le même auteur, est une
pénurie intrinsèque des capacités d'actions
nécessaires à la satisfaction des besoins de base surtout
l'alimentation, la santé, et l'instruction par une personne physique ou
morale apte. La pauvreté tertiaire ou de performance, d'après
lui, est une pénurie des capacités d'actions instrumentales ou
fonctionnelles indispensables pour obtenir et/ou soutenir certaines
performances, nécessaires à un fonctionnement viable5(*).
En dehors des auteurs chercheurs, il y a aussi de grandes
institutions qui s'intéressent au concept de pauvreté. Par
exemple, le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD),
distingue trois types de pauvreté : la pauvreté
monétaire, alimentaire et humaine.
Le PNUD parle de la pauvreté monétaire lorsqu'on
est dans une situation où le revenu du citoyen est insuffisant pour
satisfaire ses besoins de subsistance. Il parle de la pauvreté
alimentaire en prenant en compte les besoins minima en termes alimentaires.
D'habitude, les Institutions des Nations Unies utilisent deux
méthodes de la prise en compte de la pauvreté :
· La méthode de l'équilibre
calorico-protéine de la FAO ;
· La méthode anthropométrique de l'OMS.
Selon la FAO, toute personne adulte qui consomme moins de
2 300 calories/jour est considérée comme pauvre. L'OMS,
quant à elle, utilise le rapport anthropométrique chez les
enfants. Cette méthode met l'accent sur le rapport poids/âge, le
rapport poids/taille et le rapport taille/âge qu'elle compare aux
indicateurs retenus pour une population d'enfants normaux.
Le PNUD définit la pauvreté humaine comme
étant le manque de capacités humaines essentielles. La
pauvreté humaine touche les aspects économiques de la
pauvreté à travers les conditions de vie mesurables, par des
indicateurs composites comme : accès à l'assainissement, au
logement, à l'eau potable, aux soins de santé, à
l'éducation, à l'espérance de vie, etc.
La Banque Mondiale mesure la pauvreté monétaire
en fixant le niveau de revenu à 1 $ /personne/jour. Il est
généralement mesuré en termes de parité de change
pour pouvoir saisir le pouvoir d'achat.
Ces différentes définitions témoignent
des difficultés et des divergences au sein parfois d'une même
école ou discipline scientifique ou encore d'une même institution.
C'est ainsi qu'il est incertain que les individus ressentent identiquement leur
situation de pauvreté. Le relativisme de la situation de pauvreté
émane des différences que l'on observe entre les
différents groupes de référence des individus, entre les
communautés, entre les pays. Ceci rend inévitablement difficile
et hardeuse une définition univoque de la pauvreté.
Néanmoins, la littérature autour du concept de pauvreté
nous donne quatre éléments importants.
Le premier élément propose de faire la
distinction entre le concept pauvreté et celui de la
précarité comme un état de vulnérabilité.
Elle est une insécurité qui devient "indicateur de
pauvreté" quand elle affecte plusieurs domaines de l'existence, quand
elle devient persistante et qu'elle compromet, pour un individu, les chances de
réassumer ses responsabilités et de conquérir ses droits
par lui-même, dans un avenir prévisible6(*).
Cette situation conduit les individus à perdre le sens
de la perspective ou l'espoir de changement. Dans ce sens, on peut
distinguer :
v Les pauvres chroniques touchés dans leur capital des
dotations (en anglais "endowment") en termes physiques ;
v Les pauvres temporaires, qui nécessitent
essentiellement une « aide- passerelle » pour traverser une
période difficile, celui que les Kinois nomment en général
Mpiaker, Mpiaka en français qui signifie dénuement
temporaire ;
v Les personnes invalides ou très âgées
qui peuvent glisser vers l'état de pauvreté. Cette distinction
met l'accent tant sur le caractère chronique que sur l'aspect
multidimensionnel de la pauvreté.
Le deuxième élément explique que les
définitions de la pauvreté sont souvent moins strictes. Cette
tendance définit les pauvres comme ceux qui s'estiment privés des
avantages dont jouit autrui dans la société où ils se
jugent partie intégrante selon leur groupe de référence en
termes psychologiques. Les définitions moins strictes mettent l'accent
sur le caractère relatif et subjectif de l'individu (l'individu compare
sa situation à celles de ses concitoyens).
Dans la troisième tendance, nous pouvons compter les
organismes comme la Banque Mondiale qui définissent la pauvreté
à partir d'un critère absolu. Ils décrivent la
pauvreté comme l'incapacité pour un individu, pour une famille ou
une communauté de satisfaire certains besoins minimums. Il s'agit
notamment de l'avoir, du revenu, du niveau de consommation dont l'indicateur le
plus usité est le seuil de pauvreté absolu d'1$ par jour et par
personne.
Le quatrième élément est d'une importance
capitale par son innovation de la définition de la pauvreté qui
n'est plus décrite uniquement en terme instrumental du niveau de revenu
et de capital humain. La pauvreté est alors défini comme un
état des privations des capacités élémentaires qui
permettent aux individus de réaliser un certain nombre de choses et de
jouir de la liberté de mener la vie qu'ils ont raison de souhaiter et
non une simple faiblesse des revenus même si l'absence de ceux-ci
constitue la principale source de privation de capacités d'un individu.
C'est d'ailleurs ce que développe ARMATYA SEN en identifiant la
pauvreté en termes de privations des capacités, privations qui
ont une importance intrinsèque (à la différence des
revenus dont la signification est instrumentale).
En effet, d'autres facteurs influencent la privation des
capacités ou la pauvreté réelle, hormis la faiblesse des
revenus (le revenu n'est pas le seul instrument qui produise des
capacités). La relation instrumentale entre pénurie des revenus
et pénurie des capacités varie d'un pays à l'autre, d'une
famille à l'autre, d'un individu à l'autre (l'impact du revenu
sur les capacités est contingent et conditionnel).
Ces sont souvent des variations sur lesquelles le
contrôle des individus est inexistant ou limité. En d'autres
termes, il peut y avoir un couplage des avantages associant pénurie des
revenus et difficultés à convertir ceux-ci en fonctionnements
(capacités). Certains groupes n'ont pas de revenus, d'autres sont
affectés par des difficultés de conversion qui se surajoutent
à de faibles revenus. Enfin, l'approche de la pauvreté par le
revenu peut être limitée par la nature de la répartition
familiale du revenu. Si une part disproportionnée de revenu est
affectée aux besoins de certains membres au détriment des autres,
dans ce cas la prise en compte du revenu familial comme critère
d'évaluation des politiques publiques d'aide ne va pas refléter
nécessairement les privations auxquelles certains de ses membres sont
confrontés.
En d'autres termes, ARMATYA SEN fait une distinction entre la
pauvreté comme faiblesse des revenus et la pauvreté comme
inadéquation ou privations des capacités (santé,
éducation, alimentation, etc.). Il souligne également la relation
étroite qui existe entre les deux réalités : pour un
individu, le revenu est un moyen essentiel pour développer ses
capacités et, le fait d'améliorer les capacités dont il
dispose pour conduire sa vie, tend à faciliter ses possibilités
d'accroître sa productivité et ses revenus. Non seulement
l'accès à l'éducation et aux soins a des
conséquences positives sur la qualité de la vie, mais il
accroît la faculté d'une personne de gagner sa vie et
d'échapper à la pauvreté par le revenu ou la
pauvreté monétaire. L'approche de SEN en termes des
capacités humaines de fonctionnement a fait évoluer le concept de
développement vers celui de développement humain. Ce dernier
permet de définir aujourd'hui la pauvreté non plus uniquement
comme un état de pénurie matérielle et de détresse
mais aussi en prenant compte de la dimension complexe et pluridimensionnelle de
l'existence des individus par laquelle le phénomène de la
pauvreté ou de la misère se manifeste. Les deux concepts
« Développement humain » et
« Pauvreté » ont donc un caractère complexe.
Dans ce sens, la notion de
capacités-potentialités "endowments" de SEN couvre cette
dimension complexe et multidimensionnelle de l'existence d'un individu en se
définissant comme l'ensemble des opportunités dont il dispose
mais aussi en fonction de ses souhaits et de ses volontés (un
développement humain intégral prendrait donc en compte la
spécificité de l'homme en favorisant l'épanouissement de
toutes ses capacités). De cette façon la pauvreté est
comprise comme l'impossibilité pour un individu ou une personne
d'utiliser ses capacités ou les opportunités dont il est
privé au cours de son existence.
Notre choix pour l'approche de SEN se justifie donc par sa
vision plus globale du phénomène de la pauvreté (en termes
de revenus et capacités) et par le fait qu'elle nous paraît
être la plus adéquate pour analyser la situation de
pauvreté que traverse notre pays, la République
Démocratique du Congo. Comme la pauvreté est définie par
SEN comme l'impossibilité pour un individu d'utiliser
ses capacités, le déni de libertés (choix) et la privation
des opportunités pour améliorer son existence, elle nous aidera
de chercher à percevoir la situation de la pauvreté kinoise sous
l'angle ci-haut présenté par ARMATYA SEN.
Toutefois, l'élément
« manque » se retrouve dans presque toutes les
définitions. Mais cet élément
« manque » est difficile à établir et n'est
pas toujours défini suivant les mêmes normes. Il reste cependant
que, si on superpose tous ces essais de définitions, il se dégage
quelques traits communs qui sont considérés comme indicateurs de
pauvreté.
I.3.
LES INDICATEURS DE LA PAUVRETE
Un indicateur de pauvreté diffère de la mesure
de pauvreté ou de l'indice de pauvreté du fait qu'il est un
nombre synthétique qui renseigne sur l'état de manifestation ou
de manque de capacités. Il n'a guère de contenu éthique ou
de considération normative. L'indicateur de pauvreté identifie
les pauvres en étudiant les variables mesurables qui permettent de
palper approximativement la réalité de cette pauvreté.
Tandis que les mesures et les indices de pauvreté,
quant à eux, donnent un sens précis au niveau critique
appelé seuil de pauvreté. Ces deux concepts sont plus
fréquemment utilisés lorsque l'indicateur est une variable
numérique. L'étude sur les indicateurs de pauvreté
s'intéresse au domaine, au niveau, à la fréquence, au
groupe d'âge et sexe. Une classification par domaine est
étroitement liée aux dimensions de la pauvreté.
Il en existe vingt : nutrition et sécurité
alimentaire, santé et hygiène, revenu, contrôle de
naissances, actifs, éducation et information, habitat,
propriété terrienne et agriculture, sécurité
civile, dignité personnelle, services et dépenses publiques,
crédit, implication sociale, vulnérabilité aux crises,
travaux ménagers, infrastructures économiques, travail, droit et
liberté, perception de la pauvreté et habillement.
Les différents niveaux sont l'individu, les
ménages, la communauté, la région et le pays. La
fréquence d'un indicateur de pauvreté est la
périodicité attendue de sa mesure, en tenant compte de sa
variation dans le temps (sensibilité) : court-terme (un an au
moins), moyen terme (un an à moins de 5 ans), long terme (5 ans et
plus). Le sexe et le groupe d'âge sont un indicateur spécifique
aux femmes, aux enfants, aux aînés, etc. Selon la fixation des
grandes institutions citées ci-haut, il convient de noter que
l'état d'une personne face à la pauvreté est
déterminé à partir du seuil de la pauvreté.
I.4.
LE SEUIL DE LA PAUVRETE, DE QUOI S'AGIT-IL ?
Le seuil de la pauvreté est une ligne de
démarcation à partir de la quelle un individu peut être
considéré comme pauvre ou non. La définition du seuil de
la pauvreté se fait selon trois approches :
· La première approche est nutritionnelle,
c'est-à-dire le seuil de pauvreté est établi par l'apport
minimal en calories pour assurer la survie à terme. L'OMS fixe un seuil
absolu sur la consommation journalière d'énergie nutritive
à 2 133 calories et selon les normes de FAO, à 2 400
calories pour la pauvreté et à 1800 calories pour l'extrême
pauvreté.
· La deuxième approche élargit le concept
de pauvreté à l'ensemble des besoins qui doivent être
satisfaits en vue de mener une digne vie en société. A ce stade,
la banque mondiale a fixé le seuil de la pauvreté absolue
à une consommation journalière des biens et services aux
États-Unis en 1985 d'un volume de 1$.
· La dernière approche postule que le seuil de
pauvreté peut être mesuré par la part des déciles
inférieurs dans la distribution des revenus et qu'il doit
refléter une certaine stratification sociale.
I.5
LA SPECIFICITE DE LA PAUVRETE URBAINE
D'une façon générale, la
spécificité de la pauvreté urbaine est due à la
croissance de la population, sous la pression de l'exode rural et de la
croissance naturelle de la population urbaine, elle représente le double
de la moyenne de l'ensemble des villes dans le monde. Cela risque d'aggraver le
phénomène déjà plus fort par rapport à
d'autres régions. On assiste donc à une urbanisation de la
pauvreté.
En effet, les préoccupations actuelles des instances
internationales (voire nationales) autour de la pauvreté urbaine
constituent une évolution dans les stratégies de
développement. Par le passé, le choix s'opérait entre deux
orientations : soit vers les zones rurales et peu d'intérêt
pour le phénomène de la pauvreté urbaine, soit vers les
mécanismes économiques et sociaux débouchant sur la
recherche d'un développement industriel et urbain.
Aujourd'hui, la Banque Mondiale tire la sonnette d'alarme en
estimant que la pauvreté urbaine ou l'urbanisation de la pauvreté
se présentera comme l'un des problèmes les plus graves de la
planète, et cela surtout en Afrique7(*). La population urbaine vivant en deça du seuil
de pauvreté s'estimerait à 28% pour l'ensemble des pays en
développement, à 42% pour l'Afrique subsaharienne, à 23%
pour l'Asie sans la Chine, à 27% pour l'Amérique Latine, à
34% pour l'ensemble Europe-Moyen-Orient-Afrique du Nord.
Les mouvements démographiques entre les zones rurales
et urbaines conduisent donc à l'augmentation de l'urbanisation de la
pauvreté. Il conviendrait d'ajouter le fait que le taux de croissance
annuel de la population urbaine en Afrique se maintiendrait donc au niveau du
double du taux mondial dans les 20 prochaines années8(*), soit 4%.
Pour la République Démocratique du Congo, les
prévisions indiquent le passage du taux de 3,8 entre 1960-1963 à
4,4 entre 1993-2000. A ce rythme, la population dans les villes congolaises
doublera dans seize ou vingt ans. Ainsi par exemple, d'ici 2020, Kinshasa
abritera toute la population actuelle de la Belgique, soit 10 millions
d'habitants.
Dès lors, l'exode rural et une telle croissance
naturelle de la population urbaine auront une incidence certaine sur le nombre
des pauvres dans les villes africaines en général et celles de la
RDC en particulier. Cette incidence est plus forte par rapport à
d'autres régions et a atteint 42% de la population urbaine. Nous pouvons
visualiser notre propos sur le tableau ci-après :
TABLEAU 1 : POPULATION URBAINE VIVANT EN
DEÇA DU SEUIL DE LA PAUVRETE ET INCIDENCE GENERALE DE PAUVRETE PAR
REGIONS (EN %).
REGIONS
|
POP.URB.PAUVRE*
|
INDICE GENERALE DE PAUVRETE**
|
|
|
1985
|
1990
|
2000
|
PVD
|
28
|
30,5
|
29,7
|
29,7
|
ASS
|
42
|
47,6
|
47,8
|
49,7
|
ASIE (-CHINE)
|
23
|
|
|
|
ASIE EST
|
|
3,2
|
11,3
|
4,2
|
ASIE SUD
|
|
51,8
|
49
|
36,9
|
EUROPE EST
|
|
7,1
|
7,1
|
|
AM. LAT. & CAR.
|
27
|
22,4
|
25,2
|
24,9
|
EUR-M.O+AFR. DU NORD
|
34
|
30,6
|
33,1
|
30,6
|
Sources : * Vanderschueren (1996), **
Staes (1995), PVD : Pays en Voie de Développement, ASS :
Afrique au Sud du Sahara.
Avec l'urbanisation croissante de la pauvreté, les
questions et les caractéristiques associées à la situation
des villes de l'Afrique subsaharienne conduisent à mettre l'accent sur
les contraintes liées à l'accès des personnes ou des
ménages aux réseaux de services urbains. Dans le cadre des
relations espace urbain/espace rural, nous nous trouvons aujourd'hui en
présence d'un problème de choc que provoque l'aspiration des flux
ruraux par les villes. Ce choc produit un déficit en termes
d'infrastructures, il s'agit là de la première forme de
l'incapacité d'absorption des changements expliquée par une
croissance économique (revenus) qui ne réduit pas la
pauvreté. La croissance économique, si elle est stimulée
en ville, doit améliorer le niveau ou la qualité de vie des
habitants.
En d'autres termes, il faut que les politiques publiques
encouragent la croissance économique en ville en améliorant en
même temps le cadre ou la qualité de vie des habitants en
développant dans l'espace urbain des capacités comme
écoles, logement décent, services d'alimentation en eau,
d'assainissement, de drainage (contre les inondations) et de collecte des
ordures des services sanitaires de base, des garderies (des garderies qui
peuvent permettre aux parents de s'occuper davantage d'autres tâches et
aux enfants d'être suivis pour leur état nutritionnel et leur
développement physique et mental), organisation des transports publics
économiques et efficaces allégeant les coûts de transport
surtout pour les familles pauvres vivant dans les zones
périphériques. Par ailleurs, ces cadres ne sont toujours pas
montés dans nos pays sous-développés. Ainsi, les
bidonvilles comme système d'extension des villes et la
détérioration des infrastructures sanitaires publiques des villes
congolaises ont par exemple pour conséquence l'expansion des maladies
comme la typhoïde, la malaria, etc. Le Tableau 2 nous renseigne sur les
disparités entre les zones urbaines et rurales par rapport à la
population ayant accès à certains services publics en RDC et dans
les pays voisins.
TABLEAU 2 : DISPARITES ENTRE LES ZONES RURALES ET LES
ZONES URBAINES DEVANT L'ACCES DE LA POPULATION AUX SERVICES PUBLICS (EN % DE LA
POPULATION URBAINE ET RURALE TOTALE).
PAYS
|
SANTE
|
EAU POTABLE
|
ASSAINISSEMENT
|
|
RURALE
|
URBAINE
|
RURALE
|
URBAINE
|
RURALE
|
URBAINE
|
RDC
|
17
|
40
|
23
|
37
|
11
|
46
|
CONGO
|
70
|
97
|
2
|
92
|
|
|
RCA
|
|
|
18
|
18
|
|
|
SOUDAN
|
40
|
90
|
41
|
84
|
4
|
79
|
OUGANDA
|
42
|
99
|
32
|
47
|
52
|
94
|
RWANDA
|
|
|
62
|
75
|
56
|
77
|
BURUNDI
|
79
|
100
|
69
|
100
|
51
|
60
|
TANZANIE
|
73
|
94
|
46
|
67
|
62
|
74
|
ZAMBIE
|
50
|
100
|
11
|
91
|
12
|
75
|
ANGOLA
|
|
|
15
|
69
|
8
|
34
|
Source : PNUD, rapport mondial sur le
développement humain, 1996
En plus des disparités observées entre l'espace
rural et l'espace urbain, nous pouvons constater que dans le domaine de
santé, seule la RDC n'en offre pas l'accès à plus de 50%
de la population urbaine et elle se situe à l'avant dernière
place. Cette situation semble être loin de s'améliorer9(*). L'approche en termes d'espace
rural-urbain doit permettre aux politiques de penser à résoudre
l'ensemble de ces problèmes urbains en concomitance avec des
stratégies adéquates de développement rural pour que les
populations rurales se fixent et se sentent mieux là où elles
habitent sinon, il sera difficile d'inverser les tendances.
CONCLUSION PARTIELLE
En définitive, de cette approche conceptuelle nous
avons compris que la lutte contre la pauvreté préoccupe
l'humanité entière, qu'il est difficile d'évoquer une
définition de la pauvreté qui soit profondément parfaite,
du fait que lorsque celle-ci se manifeste elle touche divers domaines de la vie
humaine. Elle est donc un concept multidimensionnel.
Mais cela ne peut nous empêcher de l'expliquer de
manière claire, en vue de rendre compréhensif son contenu. C'est
de cette façon que la "pauvreté est donc comprise comme
l'impossibilité pour un individu d'utiliser ses capacités ou les
opportunités dont il est privé au cours de son existence".
CHAPITRE II
L'ENVIRONNEMENT SOCIO-ECONOMIQUE DE KINSHASA ET SON
VECU QUOTIDIEN
INTRODUCTION
Le présent chapitre décrit brièvement la
croissance démographique et spatiale de Kinshasa, de ses origines
à ce jour. Il passe en revue les problèmes majeurs qui se posent
dans la ville : de la crise du logement à celle de l'emploi, en
passant par la crise de l'environnement urbain.
II.1.
UN SITE PARTICULIER
II.1.1. L'AMPHITHEATRE NATUREL
Kinshasa est une ville de plus de 6 000 000
d'habitants répartis en 24 communes et 310 quartiers. Elle porte
plusieurs noms effectifs : Kin-la-belle, Kin-lipopo, Kin-malebo10(*). Elle est construite sur un
sol argilo-sableux et un site particulier ressemblant à un
amphithéâtre : la plaine au nord et à l'Est et les
collines au sud et à l'Ouest.
La plaine est un site urbanisable en forme de croissant parce
qu'elle suit la courbe du fleuve. C'est le secteur le mieux cadastré,
urbanisé et industrialisé. Cette plaine abrite près de 18
communes avec environ 4 375 000 habitants. L'administration urbaine
l'appelle communément la ville basse. Elle souffre des divers
problèmes d'inondations et de marécages non seulement par ce que
ses pentes sont trop faibles et le système de drainage
défectueux, mais aussi parce qu'elle est traversée par plusieurs
rivières qui se jettent dans le fleuve et qui prennent leur source sur
les collines du sud et de l'ouest. C'est sur cette plaine que se situe la
commune de Lingwala.
Les collines sont des sites non aedificandi sur plusieurs
endroits. Elles ont été occupées après
l'indépendance par les Kinois qui ignoraient les normes urbanistiques.
Des petites bicoques dans certains endroits et de somptueuses villas dans
d'autres ont investi les collines du Mont-amba (417m), Djelo-mbinza (545m au
pied de l'antenne tv), Mont-Ngafula (548m) et le contre-bas du pic meuse
(675m). Elles abritent six communes avec plus de 1 625 000 habitants.
L'administration urbaine l'appelle communément ville
haute. Elle est aux prises aujourd'hui avec les problèmes
d'érosions, d'éboulements, de glissements de terrains et
d'effondrement dû au mauvais drainage des eaux. C'est sur quelques unes
de ces collines que se situe la commune de Ngaliema.
PLAN DE LA VILLE DE KINSHASA
II.1.2. DES CHALEURS SUFFOCANTES AUX VIOLENTES TORNADES
Selon la classification de Koppen AW4, la ville de Kinshasa a
un type climatique, caractérisé par un climat tropical chaud et
humide avec quatre mois de saison sèche. Il fait une chaleur torride au
mois de mars et la température monte jusqu'à 26,5°C. Cette
poussée de température précède bien les violentes
averses du mois d'avril et de mai. Ce sont les mois de tous les dangers :
inondations, effondrements, éboulements, morts d'hommes, arbres
déracinés, maisons détruites etc. Pourtant, ce ne sont pas
les mois les plus pluvieux. Le mois annuel le plus arrosé est le mois de
novembre avec 268,1mm de pluies douces. Elles ne contraignent pas les
rivières Ndjili, N'sele (Rivières allogènes) et Kalamu,
Gombe, Makelele, Tshwenge, Basoko, Yolo, Funa, Mbinza etc. (Rivières
locales) à quitter leur lit.
Pendant la saison pluvieuse, ces rivières
reçoivent beaucoup d'eaux qui coulent et qui se serpentent au creux des
larges vallées : sites d'intenses activités
maraîchères de la ville (Funa, pépinière de
Bandalungwa, Ndjili Cecomaf, Mayimbi, etc.). Ces vallées sont riches en
humus alors que le sol kinois est du groupe des sols tropicaux sableux riches
en fer et en alumine soumise à l'action d'un climat chaud et humide.
II.2. UNE VILLE DES JEUNES » KIN YA BA N'KA !
»
En 1910, Kinshasa n'est encore qu'une petite bourgade de
10 000 habitants. La période de croissance économique
intervient entre 1923 et 1929, elle est marquée par l'augmentation des
investissements suite à l'élévation de Kinshasa au rang de
capitale nationale en 1922, aux dépens de Boma située sur la
côte atlantique. La population augmente et double en cinq ans, avec en
moyenne une augmentation annuelle de 4 700 personnes. L'industrie
naissante attire une main d'oeuvre abondante. Cependant, le tableau ci-dessous
nous décrit l'évolution et le taux de croissance de la population
Kinoise de 1881 à 2000.
TABLEAU 3 : POPULATION ET TAUX DE CROISSANCE A KINSHASA
(1881-2000)
Année
|
Population
|
Taux annuel de croissance
|
Année
|
Population
|
Taux annuel de croissance
|
1910
|
10 000
|
2,3 %
|
1959
|
442 422
|
2,5 %
|
1924
|
23 730
|
8,1 %
|
1967
|
901 520
|
10,6 %
|
1929
|
46 088
|
14,0 %
|
1976
|
1 748 000
|
8,0 %
|
1934
|
27 510
|
-10,0 %
|
1980
|
2 400 000
|
8,0 %
|
1940
|
49 972
|
10,0 %
|
1984
|
2 664 200
|
2,6 %
|
1950
|
201 905
|
15,0 %
|
1991
|
3 119 869
|
2,0 %
|
1955
|
365 905
|
13,0 %
|
2000
|
6 062 000
|
3,6 %
|
Source : Compilation de Mbumba, Joseph
Boute et Léon de saint moulin, service des archives du Congo-Belge,
rapport aux chambres sur la situation du Congo-belge et du Rwanda-Burundi, marc
pain, Institut National de Statistique, division urbaine de l'intérieur,
etc.
La période de la récession mondiale dure quatre
ans, soit de 1930 à 1934. Elle est marquée par une stagnation de
la population. La plupart des hommes retournent dans leurs villages d'origine
par manque d'emplois. La population de Kinshasa chute à 39 530
habitants en 1930 contre 46 088 habitants en 1929, soit un déficit
de 14,3% (Mbumba, 1982). A partir de 1935, la population recommence à
croître. Le taux de croissance annuel qui est de 1,1% par an
s'accélère de 1940 à 1945 pour atteindre 1,5% par an. La
politique de « l'effort de guerre » marque la
première moitié de cette période. Les alliés sont
ravitaillés à leur demande en matières premières
d'intérêt stratégique (caoutchouc, étain).
La reprise des activités économiques
nécessite une abondante main-d'oeuvre. La population augmente environ de
7 400 personnes par an. Durant la deuxième guerre mondiale, la
population kinoise double. Cette tendance à la forte croissance se
poursuit jusqu'en 1955. La population Kinoise augmente de 163 263
personnes avec le solde migratoire, soit une augmentation moyenne de presque
33 000 personnes/an de 1950 à 1955. La ville est à son stade
de ville « d'hommes » avec un faible effectif d'enfants de
moins de 15 ans et à forte population adulte
« célibataire », surtout de sexe masculin entre 20
et 35 ans.
De 1955 à 1960, la croissance démographique
rapide de 1940 à 1950 se ralentit. Malgré le refoulement des
chômeurs et des sans emplois dans leurs villages d'origine, la population
totale augmente du fait de l'arrivée des épouses venues du milieu
rural ainsi que des naissances, mais la population masculine marque un recul.
L'augmentation de la population reprend après l'indépendance,
c'est-à-dire de 1960 à 1970. Kinshasa est aux prises avec l'exode
rural dû au laxisme de certaines administrations et à la
rébellion. En effet, la décennie 60 est marquée par la
guerre civile qui éclate au Congo quelques mois après
l'indépendance et contraint Kinshasa à accueillir des nombreux
"réfugiés".
Ils ne se cantonnent pas dans des camps, mais plutôt
dans la ville ou à la périphérie, là où les
conditions de vie et de sécurité leur paraissent plus favorables
qu'en provinces, dévasté par la guerre civile. De plus, les
enjeux politiques après l'indépendance, suite à la
création des multiples partis politiques à tendance tribale,
poussent les leaders politiques à favoriser l'exode rural pour gonfler
leur électorat kinois. Malgré les timides tentatives de renvoi
des ruraux désoeuvrés vers les villages d'origine et
malgré les programmes d'acheminement des sans emplois vers des camps de
travailleurs dans la région de l'équateur, le flux vers Kinshasa
augmente entre 1970 et 1980.
Aussi, la décennie 70 est une période
très troublé sur le plan économique. La nationalisation
« zaïrianisation » des entreprises, plantations et
commerces des étrangers précipite l'économie nationale
dans le gouffre11(*). Les
provinces sont les plus touchées par cette crise économique. La
paupérisation des campagnes provoque la migration vers les villes
secondaires d'abord, puis vers Kinshasa en définitive.
Entre 1980-1990, les entreprises agro-pastorales qui encadrent
les paysans font totalement faillite après la zaïrianisation. La
dégradation des conditions de vie en milieu rural, le manque d'entretien
des routes de desserte agricole accentuent l'exode rural vers Kinshasa. Le
programme d'ajustement structurel imposé par le FMI et le club de Paris
dans les années 80 aggrave encore la crise dans laquelle le Congo
s'était engouffré depuis la politique de la zaïrianisation.
Les ruraux, confrontés à la nécessité de rechercher
des revenus complémentaires, migrent vers Kinshasa où les
opportunités d'un emploi rémunérateur leur paraissent plus
grandes qu'en province. Malheureusement, ces espoirs et opportunités
s'estompent pendant la décennie 90.
En effet, en 1991et 1992, les scènes de pillage
à Kinshasa et en provinces parachèvent le délabrement du
tissu économique national déjà précaire depuis les
années 80. Et Kinshasa perd du coup 100 000 emplois, selon l'agence
nationale des entrepreneurs du zaïre (ANEZA).
Les tensions ethniques dans les provinces du Katanga et du
Kivu dans la première moitié des années 90, suivies des
rébellions de l'AFDL, du RCD et de la guerre civile de Brazzaville
à la fin de la même décennie poussent les gens à
migrer vers les lieux plus sécurisés comme Kinshasa. Des camps
existent encore jusqu'aujourd'hui avec des milliers de réfugiés.
D'autres réfugiés ont quitté les camps et se font
héberger auprès des membres de famille et d'amis.
TABLEAU 4 : EVOLUTION DES FACTEURS DE CROISSANCE DE LA
POPULATION KINOISE
Période
|
Taux de natalité en %
|
Taux de mortalité en %
|
Taux de croissance en %
|
Taux de migration en %
|
Taux de croissance en %
|
Taux de croissance de la RDC en %
|
1985-1990
|
58,3
|
12,6
|
45,7
|
10,1
|
5,6
|
3,3
|
1990-1995
|
56,0
|
11,9
|
44,1
|
7,7
|
5,2
|
3,3
|
1995-2000
|
51,8
|
11,0
|
40,8
|
6,0
|
4,7
|
3,4
|
Source : Delbart, V 2000.
Les chiffres donnent une structure par âge
caractéristique des villes des pays en développement. La pyramide
est marquée par une majorité de jeunes. Selon les projections de
l'INS (1993), il y avait en 2000, près de 6 062 000 habitants à
Kinshasa, dont 3 637 000 de moins de 19 ans, soit 60 % de la
population. On constate une concordance des données avec celles de 1984
(pain, 1984).
TABLEAU 5 : POPULATION KINOISE PAR TRANCHE D'AGE
Tranche d'âge
|
Hommes
|
Pourcentage Hommes/Population Totale
|
Femmes
|
Pourcentage Femmes/Population Totale
|
1- 4 ans
|
637
|
10,5
|
632
|
10,4
|
5- 9 ans
|
521
|
8,6
|
520
|
8,6
|
10-14 ans
|
413
|
6,8
|
413
|
6,8
|
15-19 ans
|
252
|
4,2
|
249
|
4,1
|
20-24 ans
|
220
|
3,6
|
224
|
3,7
|
25-29 ans
|
199
|
3,3
|
210
|
3,5
|
30-34 ans
|
177
|
2,9
|
193
|
3,2
|
35-39 ans
|
174
|
2,9
|
181
|
2,9
|
40-44 ans
|
147
|
2,4
|
137
|
2,3
|
45-49 ans
|
104
|
1,7
|
89
|
1,5
|
50-54 ans
|
82
|
1,4
|
66
|
1,1
|
55-59 ans
|
46
|
0,8
|
34
|
0,6
|
60-64 ans
|
37
|
0,6
|
29
|
0,5
|
65-69 ans
|
24
|
0,4
|
17
|
0,3
|
70-74 ans
|
12
|
0,2
|
10
|
0,2
|
75-79 ans
|
7
|
0,1
|
6
|
0,1
|
TOTAL
|
3 052
|
50,3
|
3 010
|
49,7
|
Source : Institut National des
Statistiques (INS), 1993.
II.3.
UNE VILLE TENTACULAIRE
L'explorateur Henri Morton Stanley crée le 3
décembre 1881 la station de Léopoldville sur la baie de Ngaliema
au bord du fleuve Congo à l'endroit dénommé actuellement
Léopoldville 2, à une distance de 7m du village autochtone
appelé Kinshasa. La construction des installations portuaires dans le
pool du fleuve, l'implantation des industries fluviales de Kintambo et
l'arrivée du rail Kinshasa-Matadi transforment la physionomie de la
bourgade entre 1890 et 1911. Elle prend l'allure d'un centre urbain et vers
1910, elle couvre 5 000 Ha. Trois cités africaines
d'auto-construction se développent en ce moment là :
Kintambo (la plus ancienne à l'Ouest), Kinshasa et Barumbu (au centre
ville). Le centre urbain commence à devenir important avec sa fonction
de ville de transbordement. En 1914, il est élevé au rang de
chef-lieu d'un des 6 territoires qui forment le district du Moyen Congo.
Signalons ici que l'ascension de la ville ne s'arrête pas là.
Sa situation géographique de porte d'entrée et
de sortie du pays ainsi que son rôle économique font qu'en 1923,
Kinshasa devienne la capitale du Congo-Belge aux dépens de Boma,
jugée trop excentrée et difficilement urbanisable.
L'administration coloniale crée la commune de la Gombe pour accueillir
le siège des institutions de la nouvelle capitale. Le tracé de la
ville présente déjà un plan urbain
ségrégatif. La ville apparait nettement scindée en deux
secteurs dès 1931. D'un côté, les quartiers africains dont
les plus anciens sont les cités de Kintambo située à
l'ouest. Kinshasa et Barumbu localisées au centre. De l'autre
côté, le quartier européen, au nord de la ville,
au-delà de la voie ferrée et le boulevard du 30 juin. Entre les
deux quartiers il y a la zone tampon qui se trouve être l'hôpital
général de Kinshasa, le jardin botanique, le jardin zoologique,
le chemin de fer, etc.
A l'Est, les installations industrielles s'installent au bord
du fleuve, au-delà des avenues du flambeau, du rail et des poids lourds.
La ville européenne se structure, elle aussi, autour d'un axe principal
(le boulevard du 30 juin). Après la seconde guerre mondiale, la ville
explose sur le plan démographique. L'administration coloniale, par le
biais de l'office des cités africaines (OCA, décret du 5 mars
1952) crée les cités planifiées, notamment : Kalamu,
Yolo-Nord, Yolo-Sud, Matonge, Bandalungwa, Matete, Lemba, Kintambo/Camp
Bayllon. A l'Est dans la plaine, au-delà de la rivière Ndjili,
l'OCA crée la commune de Ndjili comme ville satellite et il l'organise
en 7 quartiers.
TABLEAU 6 : PROGRESSION ANNUELLE DE L'HABITAT
Année
|
Population
|
Superficie
|
Densité
|
1884
|
5 000
|
115 ha
|
43,5 h/ha
|
1930
|
39 950
|
1 500 ha
|
26,6 h/ha
|
1950
|
201 905
|
2 331 ha
|
86,6 h/ha
|
1957
|
378 628
|
378 628 ha
|
68,7 h/ha
|
Sources : BEAU (1975) et Mbumba (1982).
L'OCA est le maître d'oeuvre de ces cités
planifiées conformément au plan d'aménagement de 1950. Il
a pour objectifs de construire à meilleur marché, des logements
sociaux et équipements collectifs pour la population africaine. De 1952
à 1960, l'OCA construit 32 224 maisons (19 689 à
Kinshasa, 5 832 à Kisangani, 4 082 à Bukavu et
2 621 à Lubumbashi), 2 000 salles de classe, 170
bâtiments communautaires, 393 km de voirie, 241 km de pistes cyclables et
piétonnières, 626 km de drains en profondeur et 15 km
d'égouts.
La même époque correspond au début de la
conquête des collines par les somptueuses villas de joli parc, de Djelo
Mbinza. Les novelles cités (Kasa-Vubu, Ngiri-Ngiri), quant à
elles, sont financées par les fonds du Roi et les fonds d'avance vers
1955. L'indépendance en 1960 marque la fin d'une politique
d'aménagement du territoire. L'autorité administrative
« congolaise » s'effondre et assiste impuissant à la
naissance d'une urbanisation spontanée. La ville s'étend en
tâches d'huile dans toutes les directions. Les établissements
spontanés donnent naissance aux zones d'extension.
Ce sont alors des communes entières qui naissent comme
Selembao, Makala, Bumbu, Ngaba, Kisenso, Ndjili (en partie), Kimbanseke,
Masina. Elles naissent dans de vastes concessions que l'administration
coloniale avait attribuées jadis à des églises ou à
des particuliers comme Wery, Imaf, Profrigo, les frères des
écoles chrétiennes, Alhadeff, Foncobel, Herman, Groupe Rodeby,
Dufour, De Bonhomme, de Malingrau, etc.
L'office national de logement (ONL) qui remplace l'OCA en 1965
ne produit que 817 logements, 5 km de voirie, 11 km des drains superficiels,
1,4 km de drain en profondeur et 8,9 km d'égouts pendant sa source
existence, avant d'être mis en liquidation.
En 1967, l'administration élabore le plan
régional et définit une structure urbaine et ses grandes lignes
de fonctionnement. Mais, ce plan est vite débordé par la rapide
croissance urbaine : 12 000 ha de superficie urbanisable retenue par
le plan régional et 19 000 ha de superficie urbanisée au 31
décembre 1975 (BEAU, 1996).
Le gouvernement crée la caisse nationale
d'épargne et des crédits immobiliers (CNECI) en 1971 et construit
800 logements (la cité Salongo) à Kinshasa, 30 à Kisangani
et 15 à Likasi. La CNECI fait faillite cinq années plus tard et
le programme de « congolais, un toit » tombe à
l'eau.
Le gouvernement, par manque de moyens, change de politique de
gestion urbaine et adopte la promotion foncière en lieu et place de la
production de l'habitat. Voilà pourquoi en 1975, le gouvernement, par le
truchement du bureau d'études d'aménagement et d'urbanisme,
établit un nouveau plan de la ville qui aboutit au schéma
directeur d'aménagement et d'urbanisme (SDAU) dont les grandes lignes
orientent l'urbanisation vers l'Est (ville Est).
En matière de production de l'habitat social, les
promoteurs immobiliers privés hésitent d'intervenir là
où l'Etat a échoué. Le Logec (Logement économique)
produit timidement à Kinshasa au début des années 80 la
cité verte (442 logements) et la cité Mama Mobutu (674
logements). Il en est de même des ASBL qui hésitent à s'y
impliquer. Seule l'ONG « habitat pour l'humanité »,
appuyée par les églises protestantes américaines,
construit de 1974 à 1994 près de 142 logements à
Kinshasa. Comme on le voit, l'intervention des privés dans le secteur
est négligeable. C'est ainsi que la ville continue spontanément
à étendre ses tentacules dans toutes les directions.
Sous l'impulsion de la banque mondiale, le projet de
développement urbain (PDU) voit le jour en 1985. Il a des objectifs
précis : développer, maintenir les infrastructures de la
voirie et des réseaux divers, réhabiliter les services pour
l'assainissement des marchés, l'évacuation des ordures
ménagères, la circulation des biens et des personnes, la
modernisation des procédures foncières, l'aménagement des
terrains, la construction des voies de désenclavement, la
réhabilitation et l'aménagement de la voirie, le drainage des
anciennes cités et l'étude du plan de circulation au centre
ville. Retenons que depuis 1960, aucun plan n'est concrétisé sur
terrain. Tous sont restés lettre morte !
TABLEAU 7 : PROGRESSION ANNUELLE DE L'HABITAT APRES
1960
Année
|
Population
|
Sup. urbaine
|
Densité
|
1960
|
476 819
|
4 100 ha
|
116,0 h/ha
|
1967
|
864 284
|
9 400 ha
|
91,9 h/ha
|
1968
|
939 317
|
12 863 ha
|
73,0 h/ha
|
1975
|
1 679 091
|
17 922 ha
|
93,6 h/ha
|
1981
|
2 567 166
|
20 160 ha
|
127,3 h/ha
|
1998
|
4 131 845
|
59 000 ha
|
70,0 h/ha
|
Sources : Boute, J. (1980), Boute, J. et
de saint moulin, L. (1978), PNUD/Habitat, 2000. NB. Hormis les populations des
camps militaires et policiers.
II.3.1 LA PHYSIONOMIE DE L'HABITAT
Les quartiers de Kinshasa sont souvent stratifiés et
classifiés en cinq groupes selon le type d'habitat, le niveau
socio-économique, les infrastructures, les équipements existants
et la chronologie de leur création.
a) Les quartiers
résidentiels
Ces quartiers se trouvent dans les communes de Lemba
(Righini), de la Gombe, de Limete (résidentiel et industriel), de
Ngaliema (Mbinza ma campagne et Mbinza UPN)12(*). Ce sont donc des quartiers résidentiels de
haut standing avec des routes bitumées et des parcelles spacieuses
souvent supérieures à 1 000 m². Les eaux usées et les
eaux de ruissellement sont évacuées grâce à un
système de canalisation généralement fonctionnel en
majorité à « la bourgeoisie nationale ».
Les activités informelles sont faibles dans les rues.
L'accessibilité automobile et pédestre est bonne et
aménagée. Les infrastructures sont présentes en bon
état mais sous-utilisées. Il n'y a pas de forte demande de
transport en commun car les déplacements se font en véhicules
individuels. Les densités sont faibles : moins de 20 habitants
à l'hectare. A présent, ces quartiers de Ngaliema, Limete et
Lemba (Righini), principalement ces derniers commencent à perdre leurs
valeurs immobilières à cause de l'insécurité
à certains endroits causés par les habitants des quartiers
populaires environnants et de la présence des ravins destructeurs. Le
quartier Righini est occupé en partie par les professeurs de
l'université de Kinshasa. Seule la commune de la Gombe qui est
sécurisée, souffre à présent de la
spéculation immobilière hormis les quartiers résidentiels
de Gombe et Limete, tous les autres sont situés sur les collines. A ma
campagne (Ngaliema) et à Gombe, les spacieuses villas rangées en
chapelet le long des grandes avenues ornées d'arbres côtoient le
golf, le cercle hippique, le tennis, les piscines, les
hôtels-bars-restaurants, etc.
b) Les quartiers des anciennes
cités
Ce sont des quartiers qui se trouvent dans les communes de
Kinshasa, Lingwala, Barumbu, Kintambo. Les habitations sont vétustes et
taudifiées. Ce sont des très vieux quartiers. Les rues sont
parfois bitumées, les canalisations d'eau sont complètement
bouchées là où elles existent. La population est de niveau
moyen, la densité de la population est très forte, Les emplois
informels sont très présents, la marche à pied comme mode
de transport est très importante. Les infrastructures sont insuffisantes
et dégradées et les densités sont fortes :
près de 400 habitants/ha.
Les chaussées piétonnières ne sont pas
aménagées, les communes de Kinshasa, Lingwala et Barumbu
souffrent des sérieux problèmes d'assainissement.
L'administration de la santé publique y recense souvent des cas de
choléra. Les parcelles sont spacieuses mais suroccupées. Une
parcelle peut contenir dix (10) ménages dans certains cas. Kintambo
comprend deux (2) types d'habitat : vieux et auto-construction d'un
côté, récent et planifié (Camp Bayllon) de l'autre,
construit par l'OCA en 1954.
c) Les quartiers des cités
planifiées
Ils se trouvent dans les communes de Lemba, Matete, Ndjili
(quartiers 1 à 7), Kalamu, Bandalungwa. Ce sont des quartiers
cadastrés, planifiés, dotés des commodités
urbaines. Les canalisations sont vieilles et sous-dimensionnées. La
population a un niveau de vie moyen, la densité de la population est
très forte : 350 habitants/ha, les emplois informels sont
très importants. La circulation piétonne est très
importante. Les maisons construites par l'OCA, il y a 50 ans, sont
vétustes et superpeuplées.
Elles étaient conçues pour un couple avec deux
enfants, aujourd'hui elles en logent 7 en moyenne dans des parcelles qui ne
dépassent pas 300 m². Les infrastructures sont saturées et
dégradées. Le système de canalisation des eaux
ménagères est inexistant. Là où il en existe, il
est défectueux et hors usage. Ce sont des quartiers très
animés tant le jour que la nuit. C'est ici que se trouve le quartier
Matonge (dans la commune de Kalamu), la célèbre cité
d'ambiance !
d) Les quartiers excentriques et
d'extension
Ils se trouvent dans les communes de Masina, Kisenso,
Selembao, Makala, Ndjili extension, Bumbu, Kimbanseke, Ngaba. Ce sont les
quartiers d'auto-construction. Ils sont souvent isolés, non
cadastrés, en majorité habités par des gens à
faibles revenus. Certains de leurs quartiers sont nés sur des sites non
aedificandi : inondables et érodables. L'accessibilité est
aléatoire et à certains endroits impraticables. L'occupation du
sol est faible mais en densification. La marche à pied est importante,
les infrastructures publiques sont quasi-inexistantes à certains
endroits. Les transports en commun sont aléatoires,
l'accessibilité piétonne est difficile et non
aménagée. Certains auteurs les qualifient de banlieues
abandonnées. Selembao, Bumbu et Kisenso se sont développés
sur des collines érodables tout comme une partie de Makala. Les communes
de Kimbanseke, Masina, Ngaba se trouvent en grande partie dans la plaine. Leurs
rivières les inondent à certains endroits.
e) Les quartiers semi-ruraux
Ce sont les communes de Maluku, N'sele, Mont-Ngafula. Elles
sont faiblement occupées. Les emplois informels sont faibles et
dépendent de l'ancienneté du quartier. Les deux communes (N'sele
et Maluku) situées dans la partie Est occupent plus de 50% de la
superficie de la ville.
TABLEAU 8 : OCCUPATION DU SOL DANS LE DISTRICT URBAIN
Affection
|
Surface
en km²
|
Aires agglomérées
|
% sur surface totale et aires urbanorurales
|
Aire métropolitaine
|
Habitat planifié
|
70,0
|
11,9
|
|
|
Habitat non planifié
|
150,0
|
25,4
|
|
|
Zones industrielles et commerciales
|
18,0
|
3,1
|
|
|
Equipement
|
26,0
|
4,4
|
|
|
Infrastructures de transport
|
35,1
|
5,9
|
|
|
Espaces agricoles
|
191,5
|
32,4
|
|
|
Autres
|
100,0
|
16,9
|
|
|
Total zone agglomérée
|
590,6
|
100,0
|
|
5,9
|
Espaces agricoles
|
850,0
|
|
9,1
|
|
Espace d'élevage
|
360,0
|
|
3,8
|
|
Réserves terres cultivables
|
7 112,8
|
|
25,9
|
|
Autres zones non aedificandi+surfaces d'eau
|
1 051,7
|
|
11,2
|
|
Total zones
|
|
|
|
|
Urbano-rurales
|
9 374,6
|
|
100,0
|
94,1
|
Total aire métropolitaine
|
9 965,6
|
|
|
100,0
|
Source : Service national des
statistiques agricoles (1991), centre national de développement rural
intégré CNDRI (1993).
Il s'agit d'un secteur autrefois essentiellement agricole. Le
schéma directeur d'aménagement et d'urbanisme de 1975 les a
incorporés dans l'agglomération urbaine. Elles sont quasiment
vides et se situent à plus de 60 km du centre-ville. Leurs quartiers
sont multifonctionnels, ils remplissent à la fois les fonctions de
banlieue agricole avec la présence des vastes espaces agricoles
intensifs et extensifs (DAIPN13(*)), de banlieue industrielle (la sidérurgie de
Maluku), de banlieue de récréation (la cité des
pécheurs de Kinkole), de banlieue dortoir (Mpasa), etc.
Le tableau ci-dessus montre que la superficie
agglomérée de Kinshasa n'occupe pas plus de 6% de la superficie
totale de district urbain, soit 590,6 km². Cette superficie totale
agglomérée abrite l'habitat planifié et non
planifié, les zones industrielles et commerciales, les
équipements publics et de transport.
A cela, il faut ajouter les espaces agricoles et autres usages
du sol. Au fait, les 94% des limites administratives de Kinshasa, soit
9 375 km² sont occupées par des zones urbano-rurales :
les domaines agro-pastoraux, les terrains non aedificandi et les eaux.
II.3.2 DE LA MEGACITE AUX MEGAPROBLEMES
Kinshasa vit de grandes mutations depuis 196014(*). Elle est de plus en plus
peuplée et spacieuse. Avec un taux de fécondité d'environ
sept enfants par femme, avec un taux de croissance de sa population
estimé à environ 6% et avec un nombre moyen de 6,7 membres par
ménage (MICS)15(*),
la ville de Kinshasa compte aujourd'hui plus de 8 millions d'habitants.
En 1960, elle n'avait que 400 000 habitants, sa
population a plus que décuplé, car elle est plus de 6 fois
millionnaire. Les projections du FNUAP16(*) (1996) montrent que Kinshasa va continuer à se
développer avec un taux supérieur à 3% par an entre 2000
et 2015 pour abriter un effectif de plus de 10 millions d'habitants. Ces
chiffres montrent que l'explosion urbaine de Kinshasa ne va pas s'estomper de
sitôt, bien que le taux de sa croissance démographique aille
baisser par rapport aux années 90.
Entre 2000 et 2015, les villes de Dhaka, Heyderabad, Kerachi,
Lagos, Lahore et Kinshasa vont continuer à se développer à
ce taux supérieur à 3% l'an. En Afrique, seules Lagos et Le Caire
seront plus peuplées que Kinshasa. Avec ses 10 millions d'habitants en
2015, Kinshasa fera partie du club très réduit des 30 plus
grandes villes au monde. Plus précisément, elle occupera le
28ème rang avant Paris et Madrid. L'explosion de Kinshasa
n'est pas seulement démographique mais aussi spatiale. Sa superficie
urbanisée avait atteint déjà 60 000 hectares en 2 000
contre 18 000 en 1975, 13 000 en 1968, 4000 en 1960 et 2 300 en
1950. Kinshasa consomme beaucoup d'espace et la demande en logement croît
rapidement. On estime à 500 000 le nombre de parcelles actuellement
à Kinshasa.
Selon les experts de l'archidiocèse de Kinshasa (1990),
Kinshasa s'établit sur 375 540 ha en 1989, 187 770 ha en 1975,
106 297 ha en 1967. L'accroissement naturel, l'exode rural et
l'incorporation dans la ville des périphéries rurales sont les
causes de l'explosion urbaine. Selon les experts de l'archidiocèse de
Kinshasa, la ville s'étalait « sur plus de 30 km d'Est en
Ouest et sur plus de 15 km du nord au sud ».
Les conséquences de cette explosion urbaine ne se font
pas attendre : étirement des distances ;
« squattérisassions » des espaces, construction sur
des terrains non aedificandi, chômage, pollution urbaine,
criminalité, déperdition scolaire, VIH/SIDA. En effet, Kinshasa
est devenue une ville mastodonte très étalée. Se
déplacer à Kinshasa pour le travail, pour se rendre à
l'école ou au centre-ville est un besoin primordial de plus en plus
difficile à satisfaire. Les distances à parcourir sont
très longues. La marche à pied devient le mode le plus simple de
déplacement à cause de l'insuffisance des transports publics. Les
emplois urbains sont rares même pour les diplômés. Seul le
secteur informel reste le gros pourvoyeur d'emplois. Kinshasa abrite de plus en
plus d'agro-citadins qui font de l'agriculture intra et interurbaine. A titre
d'exemple, la foire agricole organisée du 17 au 31 août 1996
à Mont-Ngafula (148 000 habitants) avait rassemblé les
représentants des 15 000 exploitants agropastoraux de la commune
répartis en quatre catégories : les concessionnaires et les
fermiers, les maraîchers flottants et les pisciculteurs. Selon
l'enquête du BIT, le secteur informel offre des emplois à plus de
deux millions de travailleurs à Kinshasa (PNUD, 2000).
Parmi ces millions de travailleurs informels, il y avait en
1997 près de 7 255 agriculteurs urbains qui pratiquaient du
maraîchage dans un espace total de 720 ha dans les vallées
aménagées de Ndjili, Kimbanseke, Funa, Manzanza, Kinsenso, Tadi,
Bandalungwa, Lemba-Umbu, Masina Pool, Bono, Mokali, Lukaya, Tshangu, Mangu et
Dingidingi. Ils produisent par an 30 000 Tonnes de fruits et
légumes. Plus ou moins 8 000 kinois font du jardinage parcellaire
ou le long des artères principales. Malheureusement, le volume de leur
production n'a jamais été étudié ou
quantifié. Les femmes, quant à elles, subissent la ville. En
effet, la pauvreté urbaine se féminise. Ce sont elles qui
subissent de plein fouet les insuffisances des services urbains : non
autonomisation, corvée d'eau, portage du bois de chauffe,
impossibilité de soigner et de scolariser les enfants, femmes chef de
ménage, discrimination sur le marché de l'emploi, violence faite
aux femmes, VIH/SIDA, etc. La prise en considération des besoins des
femmes et de leur association à la gestion de la ville est
ignorée par les hommes.
Se loger à Kinshasa est un casse-tête à
cause de la spéculation foncière et immobilière.
Après les années fastes du boom du cuivre et confronté
aujourd'hui à un lourd endettement, le gouvernement s'est engagé
de la politique d'habitat qu'il avait pourtant très amorcé avec
la création de la caisse d'épargne et crédit immobilier
(CNECI) dans les années 70. Les graves conséquences se font
aujourd'hui sentir. La bidonvilisation de Kinshasa est en marche. Des millions
des kinois sont mal logés et des vastes bidonvilles (Pakajuma, grand
mode, Bribano dans la commune de Limete) se sont développés au
coeur de Kinshasa.
Or, la croissance rapide d'une ville impose non seulement de
créer des nouveaux quartiers mais aussi de structurer en profondeur les
établissements humains et les infrastructures publiques existantes.
Hélas ! Rien de concret n'est fait. Les témoignages sur la
crise du logement abondent. Ici, le Kinois ne ferme pas la porte de la chambre
par ce que les jambes dépassent le seuil. Là, ce sont les
voitures en panne dans les garages qui servent des couchettes. Plus loin sur le
fleuve, le Kinois dort dans des épaves des bateaux en ruine. Sur le
rail, ce sont des vieux wagons abandonnés qui sont transformés en
logis. Il arrive que certains sans abris transforment les égouts ou
encore les buses abandonnées en logis. C'est le cas dans les communes de
Lingwala et de Kinshasa.
Kinshasa a perdu son éclat de Kin-la-belle des
années 50 à cause de son insalubrité croissante. En haut
sur les collines, les 1 625 000 Kinois produisent quotidiennement
1 500 m3 de déchets qu'ils éliminent en les
jetant carrément dans les ravins destructeurs du site. En bas dans la
plaine, l'état de l'environnement est tout autre. La crasse est partout.
Ici, il n'y a pas des ravins où 4 375 000 kinois vont jeter
les 3 500 m3 qu'ils produisent par jour. Par conséquent,
les dépotoirs anarchiques s'implantent n'importe où et n'importe
comment : dans les ronds-points, dans les marchés, dans les cours
des édifices publics, dans les emprises ferroviaires et
routières, sur les berges et cours d'eau et même dans les
hôpitaux.
L'hôtel de ville s'en charge pour l'évacuation
des ordures par l'entremise de PNA, mais nous remarquons que les
résultats sur terrains ne représentent qu'une gouttelette dans la
mer, faute de moyens. Faire face à cette insalubrité, la
municipalité de Kinshasa lance presque toutes les années, les
opérations « Kin propre », mais qui échouent
par manque des moyens et de planification : la collecte, le transport, le
traitement/élimination et la valorisation des ordures pas bien
organisés. Il existe des asbl qui organisent à leur
manière les opérations "Kin propre", mais celles-ci
échouent également par manque des matériels efficaces.
En 1992, l'UNICEF a tenté la même
opération, soit 400 000 USD utilisés pour protéger
les enfants contre l'insalubrité et leurs conséquences. Cette
fois-là encore les résultats furent mitigés. Cette
insalubrité est à la base de la recrudescence dans la ville de
certaines maladies comme la fièvre et la typhoïde. A Kinshasa, la
structure argilo-sableuse du sol, les fortes pentes, la
détérioration du système d'égout, l'urbanisation
anarchique, le déboisement, la pluviométrie, etc. sont les
facteurs à la base des ravinements des quartiers. Des grands
ravins17(*), par des
glissements de terrain, des éboulements, des affouillements causent
beaucoup de dégâts à l'habitat, l'environnement et aux
infrastructures socio-économiques au sud et à l'ouest de la
ville.
Les études de NZUZI avaient inventorié 723
logements détruits par ces érosions cités ci-haut alors
que 403 autres étaient menacés de destruction aux prochaines
pluies, plus de 7 230 personnes sinistrées étaient sans
logement et près de 5 000 autres étaient en instance de les
perdre, des centaines d'élèves n'avaient plus d'écoles
pendant que des milliers étaient menacés car leurs
établissements risquaient d'être emportés lors des
prochaines averses. Les pluies diluviennes de mai 2000 avaient tué 54
personnes sur les collines de l'Ouest de la ville. Malgré les forts
dégâts, en matériel et en vies humaines, les travaux de
génie civil de lutte antiérosive démarrent difficilement
par manque de bailleurs. Du haut des collines, les érosions ravagent,
alors que, dans la plaine, le relief est moins élevé et le site
Est, à certains endroits marécageux et généralement
inondé en saison pluvieuse. La boue et le sable des érosions, en
amont, transportés par les eaux pluviales, se déposent en aval
dans la plaine et bouchent les collecteurs et ensablent les lits des
rivières. Ces masses de sable qui sont emportées par les
érosions des versants et qui sont venus s'accumuler dans le fond de la
plaine et des vallées modifient le tracé et la morphologie des
rivières.
Ces cours d'eau deviennent incapables de charrier le sable et
les ordures que la population y jette et leur profondeur se réduit
progressivement. Les faibles valeurs des pentes empêchent aussi un
écoulement rapide. Par conséquent, les eaux divaguent et leurs
lits deviennent irréguliers. Elles débordent et inondent les
vastes quartiers riverains sur une profondeur variant entre 0,5 et 1,5 m. Ces
inondations s'aggravent parfois avec les crues du fleuve Congo, occasionnant
ainsi des contre-courants dans les rivières.
Ce phénomène s'observe surtout sur les
rivières Kalamu (Funa), Ndjili, Basoko, Lubudi, Lukunga, Mbinza, Ikusu
qui sont des véritables collecteurs naturels de la ville. En 1997, le
gouvernement avait financé le curage de la rivière Gombe (1,5
millions de $) pour assainir les quartiers environnants qui étaient
souvent sous eaux, après les crues de ce cours d'eau. En 1999, le PNUD a
financé le curage de la rivière Kalamu (400 000 $) pour les
mêmes objectifs. Malheureusement, quelques années après,
toutes ces rivières se sont de nouveau ensablées et
bouchées par les ordures ménagères, et par
conséquent, les inondations des quartiers environnants ont repris depuis
belle lurette18(*).
II.3.3. LES POUVOIRS PUBLICS INTERVIENNENT EN
RETARD !
La croissance rapide de Kinshasa est un cauchemar pour les
autorités publiques. Jour après jour, les problèmes de
gestion de la ville s'accumulent. Les pouvoirs publics ne savent plus par
où commencer. Entre temps, la ville « pousse » et
les Kinois se débrouillent, le temps passe et le puzzle urbain se
complique davantage. L'Etat, déjà affaibli par la crise politique
et économique de plus d'une décennie, semble être
débordé par l'ampleur du phénomène urbain.
Il essaye tant bien que mal de résoudre les
problèmes qui se posent dans la ville avec les moyens du bord :
achat des bus et voitures pour transports publics, réhabilitation de
quelques infrastructures routières et socio-communautaires, campagne de
vaccination des enfants, construction des marchés, campagne de la
salubrité, réhabilitation des universités, etc. Mais, cela
est loin de répondre à tous les besoins immédiats de la
population qui se voit obligée de se prendre en charge pour sa survie.
Le dynamisme communautaire des Kinois se traduit par l'essor des
micro-activités et très souvent par la création d'Asbl
pour encadrer cette population débrouillarde (les cireurs, les vendeurs
d'eau pire, les démarcheurs ou Kwatas, les cambistes, etc.).
II.3.4. LA DYNAMIQUE COMMUNAUTAIRE A LA BASE
Jusqu'à la fin des années 80, l'Etat assurait la
quasi-totalité des services publics. Les Kinois étaient
convaincus que l'Etat était le seul habilité à les
gérer. Ils voient maintenant leurs problèmes exacerbés par
la crise économico-politique et par l'essoufflement de l'Etat.
Le désengagement des pouvoirs publics n'a pas seulement
consisté au renoncement par rapport aux politiques de l'habitat social
mais, fait plus grave encore, il s'est matérialisé par le
désinvestissement même dans le domaine de l'assainissement urbain.
Partant de l'idée simple que le futur de la cité ne peut se
façonner sans ses habitants, les associations s'organisent à la
base. Partout dans divers quartiers, les jeunes Kinois au chômage forment
des groupements communément appelés « les jeunes du
quartier » pour exécuter les travaux collectifs appelés
« Salongo, en lingala ». Les Kinois ne baissent pas les
bras devant les multiples problèmes qu'ils rencontrent dans la vie
quotidienne. Dépourvus de tous moyens élémentaires, ils
essayent de se mobiliser à la base pour améliorer leurs
conditions de vie. Les Kinois s'organisent en Associations Sans But Lucratif
(ASBL) pour participer d'une manière ou d'une autre au
développement urbain. Les compétences humaines, intellectuelles,
techniques et organisationnelles font parfois défaut au sein de ces
associations pour répondre et satisfaire à une telle demande.
Néanmoins, il existe une volonté des Kinois, ils essayent de
pallier ces insuffisances en apportant des réponses à certains
problèmes urbains, mais parfois d'une façon
« artisanale ». Toutefois, une partie de la solution aux
problèmes urbains réside sans doute dans cette volonté et
cette capacité des Kinois à réagir et à s'adapter
au contexte.
Concernant la manière dont la pauvreté est
perçue par les confessions religieuses de la place, l'église
catholique est l'une des plus actives sur le terrain. En effet, l'ouverture
d'une paroisse catholique en périphérie urbaine draine la
population et la fixe parce que l'église, à côté de
l'encadrement spirituel des chrétiens, finit par appuyer les paroissiens
sur le plan socio-économique. Les équipements communautaires que
l'église construit, créent de l'emploi, contribuent à
organiser et à développer le quartier. Les Kinois tirent profit
des commodités comme l'eau, l'électricité, les
véhicules, les équipements collectifs (éducation,
santé, loisirs, etc.) offertes par les 95 paroisses catholiques
disséminées à travers Kinshasa. A présent, Kinshasa
est synonyme de pauvreté citadine et de précarité des
instruments de gestion urbaine. Le décalage est énorme entre la
croissance urbaine et le rythme des investissements en équipement et en
infrastructures de base. A titre d'exemple, le secteur privé a pris de
l'ampleur. On a observé au cours de la dernière décennie,
une augmentation annuelle rapide d'établissements scolaires
privés par rapport au public. Le ministère de l'éducation
nationale a recensé 877 écoles primaires privées contre
656 pour le public et 412 écoles secondaires privées contre 334
pour le secteur public19(*).
Le tableau suivant montrent l'existence des plusieurs Asbl
intervenant dans divers secteurs, tels que le travail et la prévoyance
sociale (990), la culture et art (956), l'agriculture, la pêche et
l'élevage (815), pour ne citer que ceux-là. En effet, un effectif
de 4 587 ASBL a été répertorié à
Kinshasa en 2002 par le ministère du plan et de la reconstruction
nationale. Les interventions de ces Asbl sont majoritairement à
caractère purement social.
TABLEAU 9 : LA MOBILISATION POPULAIRE AVEC LA
CREATION DES ASBL A KINSHASA
Nombre Rangs
|
Domaines d'interventions
|
Nombre D'ASBL
|
1
|
Travail et prévoyance sociale
|
990
|
2
|
Culture et art
|
956
|
3
|
Agriculture, pêche et élevage
|
815
|
4
|
Santé publique
|
434
|
5
|
Education nationale
|
232
|
6
|
Droits humains
|
224
|
7
|
Jeunesse
|
140
|
8
|
Plan
|
121
|
9
|
Intérieur
|
88
|
10
|
Foncières
|
87
|
11
|
Justice
|
70
|
12
|
Affaires étrangères
|
53
|
13
|
Coopération internationale
|
53
|
14
|
Sports
|
46
|
15
|
Fonction publique
|
45
|
16
|
Economie, finances et budget
|
38
|
17
|
Communications et presse
|
33
|
18
|
Environnement
|
31
|
19
|
Energie
|
29
|
20
|
Travaux publics, aménagement du territoire, urbanisme et
habitat (TPAT-UH)
|
27
|
21
|
Reformes institutionnelles
|
24
|
22
|
Industrie, commerce et PME
|
22
|
23
|
Transport et communication
|
21
|
24
|
Postes et télécommunications
|
7
|
25
|
Mines et hydrocarbures
|
4
|
26
|
Relations avec le parlement
|
3
|
27
|
Défense et anciens combattants
|
2
|
|
TOTAL
|
4 587
|
Source : République
Démocratique du Congo, ministère du plan, 2000
Certaines Asbl mènent des actions visibles sur terrain
tandis que d'autres passent inaperçues, les premiers
bénéficiaires potentiels ne sont même pas au courant de
leur existence, leur impact est moins visible. Les ONG naissent comme des
champignons parmi elles, certaines disparaissent brusquement quelques mois
seulement après leur création suite au manque de financement,
à une mauvaise gestion, à une mauvaise analyse du
problème, etc. D'autres par contre perdurent et ont un impact
réel sur la communauté cible.
A côté des associations locales, il existe
plusieurs ONG internationales et projets de coopération
bilatérale qui manifestent un intérêt particulier dans la
lutte contre la pauvreté, notamment le GRET (France) basé dans la
commune de Kimbanseke, l'IFESH (USA) basé dans la commune de Masina, les
fonds social urbain (Belgique) à Kisenso, Concocern (Irlande) à
Kisenso, Save the Children (Grande Bretagne) à Kimbanseke, etc.
CONCLUSION PARTIELLE
Kinshasa s'urbanise de plus en plus et cette urbanisation
rapide influe directement sur la qualité de la vie et surtout sur celle
des populations pauvres de la ville. Malgré les maigres budgets
alloués par le gouvernement au développement de la ville, la
capitale congolaise continue de croître.
Devant la lenteur du gouvernement pour intervenir, les ONG
locales et internationales ainsi que les confessions religieuses s'emploient
à promouvoir l'amélioration de la qualité de vie des
populations kinoises pauvres.
CHAPITRE III
LES CAUSES DE LA PAUVRETE A KINSHASA ET
PERSPECTIVES DE DEVELOPPEMENT
INTRODUCTION
Ce chapitre constitue en quelque sorte une grande
réponse pour notre question de départ, il met l'accent sur le
grand problème qui ronge la société kinoise, celui de
"l'urbanisation de la pauvreté". Tout en analysant les principales
causes de celle-ci.
Il propose, en même temps au gouvernement provincial de
Kinshasa et aux opérateurs économiques, un certain nombre des
perspectives de développement en vue d'une intégration
participative dans le processus de lutte contre la pauvreté à
Kinshasa, qui parait aux Kinois comme un rêve qui se réalisera
tôt ou tard.
III.1. TENDANCES DE LA PAUVRETE EN RDC (2006-2022)
De manière générale, la ville de Kinshasa
y compris et à partir de l'incidence de pauvreté, de l'indice de
Gini et du Pib/tête en 2005, des stimulations ont été
faites sur la période 2006-2022 avec des hypothèses de croissance
du Pib/tête (5%, 8%, 10% et 12%) et d'une diminution progressive de
l'indice de Gini pour les pauvres (1%, 5%, 10%) et l'indice de Gini pour
l'ensemble à partir de 2009 (5%). Le premier scénario utilise
l'indice de Gini de l'année 2005 pour toute la période et trace
l'évolution des taux de croissance correspondants (Graphique 1).
Voyons à la page suivante le Tableau qui indique d'une
manière générale le profil de la pauvreté en milieu
urbain en République Démocratique du Congo (DSCRP de la
République).
Graphique 1 : Tendance de la pauvreté en
RDC
0,80
0,70
0,60
0,50
0,40
0,30
0,20
0,10
1960 1970 1980 1990 2000 2010 2020
2030
PO 0,05
0,08 0,010
Source : République
Démocratique du Congo, DSCRP, Juillet 2006, p23.
La lecture du graphique 1 s'ensuit d'un certain nombre des
commentaires ci-après :
· Avec un taux de croissance de 5% l'an, la RDC ne pourra
pas réduire la pauvreté de moitié d'ici l'an 2015,
l'incidence de la pauvreté passerait de 71% à près de
45% ;
· Avec un taux de croissance de 8% l'an, la RDC pourra
atteindre le premier des OMD vers l'an 2015-2016 ;
· Avec un taux de croissance de l'ordre de 10% l'an, la
RDC pourrait atteindre cet objectif vers l'an 2011-2013 ;
· Avec un taux de croissance de l'ordre de 12% l'an, cet
objectif pourrait être atteint vers l'an 2011.
Le deuxième scénario (graphique 2) utilise quant
à lui un taux de croissance de 5% l'an, accompagné d'une
politique de redistribution du revenu, avec le changement de l'indice de Gini.
Ce scénario aboutit aux résultats ci-après :
L'incidence de la pauvreté reste stable de l'indépendance
jusqu'au choc pétrolier de 1978 ; à partir des années
80, l'incidence de la pauvreté amorce une lente progression pour
atteindre des taux de plus de 80% au début des années 2000, la
tendance à la baisse observée à partir de 2004 pourrait se
poursuivre et atteindre le niveau de 60% en 2022.
Graphique 2 : Simulation de la pauvreté et
de l'inégalité en RDC
0,80
0,70
0,60
0,50
0,40
0,30
0,20
0,10
Pauvreté
Réduction Gini Réduction
Prédite Total de
5% Gini 10%
Source : Republique Démocratique
du Congo, DSCRP, Juillet 2006, p24.
L'évolution tendancielle présentée dans
les deux graphiques tend à suggérer qu'en RDC, il est possible de
réduire de moitié l'incidence de pauvreté d'ici 2015 en
adoptant une stratégie macroéconomique axée sur des taux
de croissance à deux chiffres si cette croissance est accompagnée
d'une stratégie de justice distributive20(*).
Kinshasa est aujourd'hui une métropole de plus de 8
millions d'habitants. Elle sera dans les jours à avenir la
deuxième en ASS (Afrique Subsaharienne) après Lagos (Nigeria) qui
comptera plus de 24 millions d'habitants21(*). Le taux de croissance de sa population est
estimé à 6% avec une fécondité de 7 enfants par
femme. La dernière enquête effectuée à Kinshasa par
le CEPLAUNUT indique que la taille moyenne des ménages est comprise
entre 8 et 9 membres. Il y a eu un effet migratoire important couplé
d'une fécondité active et d'une mobilité sociale poussant
plusieurs familles à habiter ensemble. Selon le critère
distinctif établi à partir de leur période de formation et
de leur configuration sociale, les zones administratives de Kinshasa sont
généralement subdivisées en 6 types ou strates.
TABLEAU 11 : LES ZONES ADMINISTRATIVES ET CRITERES DE
DISTINCTION
STRATE
|
NOM
|
ZONES ADMINISTRATIVES
|
CRITERE DE DISTINCTION
|
1
|
Zones résidentielles
|
Gombe, Ngaliema, Limete
|
Avant 1960 uniquement habité par les blancs
|
2
|
Anciennes cités
|
Barumbu, Kinshasa, Kintambo
|
Anciennes communautés africaines (avant 1945)
|
3
|
Nouvelles cités
|
Ndjili, Kasa-Vubu, Ngiri-Ngiri
|
Nouvelles communautés africaines (après 1945)
|
4
|
Cités planifiées
|
Bandalungwa, Lemba, Matete, Kalamu
|
Logements planifiés depuis 1950 (pour les
fonctionnaires)
|
5
|
Extension sud
|
Ngaba, Makala, Bumbu, Selembao
|
Extensions des zones existantes, depuis 1959
|
6
|
Excentriques
|
Kisenso, Tshangu, Masina
|
Autres extensions, plus éloignées du centre, depuis
1960
|
Source : Houyoux 1973, pp.14-16.
Le tableau suivant montre la subdivision administrative
actuelle de la ville province de Kinshasa.
TABLEAU 12 : SUBDIVISION ADMINISTRATIVE DE LA PROVINCE DE
KINSHASA
Commune
|
Quartier
|
Commune
|
Quartier
|
Kinshasa
|
7
|
Kintambo
|
8
|
Kalamu
|
18
|
Kisenso
|
14
|
Ngiri-Ngiri
|
8
|
Lemba
|
15
|
Ngaba
|
6
|
Selembao
|
18
|
Bumbu
|
13
|
Limete
|
14
|
Matete
|
13
|
Kimbanseke
|
30
|
Makala
|
14
|
Ngaliema
|
21
|
Lingwala
|
9
|
Masina
|
21
|
Kasa-vubu
|
7
|
Mont Ngafula
|
16
|
Barumbu
|
9
|
Gombe
|
10
|
Bandalungwa
|
7
|
N'sele
|
16
|
Ndjili
|
13
|
Maluku
|
19
|
Nombre total des Quartiers
|
326
|
Source : Ministère de
l'intérieur, monographie de la province de Kinshasa.
III.2. LA PERCEPTION DE LA PAUVRETE A KINSHASA
Le Kinois considère le qualificatif pauvre comme une
injure. Pourtant Kinshasa, compte aujourd'hui beaucoup des pauvres, si l'on
tient compte du critère de seuil de pauvreté. Celui-ci
tolère encore facilement le qualificatif
« précarité ». Pour un Kinois, il existe une
grande dichotomie entre « être pauvre » et
« être en manque ». Un pauvre pour lui, c'est celui
qui se retrouve par terre, qui n'a ni capacité ni l'espoir de se
relever, c'est donc un malheureux, un misérable, un raté de la
société, un irrécupérable, etc. C'est pourquoi dans
son langage, le « pauvre » est souvent accompagné
par l'adjectif malheureux (Yo, pauvre malheureux... littéralement qui
veut dire tu es pauvre malheureux). Pour lui, le pauvre, c'est l'autre.
Pour un Kinois, est pauvre, celui qui a perdu de l'espoir. Or,
une personne adulte valide vit d'espoir, aspire à un lendemain meilleur.
Le Kinois se considère donc à tort comme à raison, comme
un démuni momentané. Il peut du jour au lendemain changer de
statut et de situation pour passer d'un état de précarité
à celui de nanti. La précarité est donc pour le kinois une
situation passagère, un état temporaire. D'ailleurs un adage
kinois en lingala dit "Mwana mobali basekaka ye te", qui signifie "on ne se
moque jamais d'un homme". Pourquoi cet adage ? Parce qu'il peut du jour au
lendemain, et contre toute attente, surprendre les gens et réussir sa
vie. Le Kinois est habitué à vivre ce genre de retournement des
situations : de la pauvreté à la richesse et vice-versa.
Cette perception positive dans son sens plus large de la
précarité tire son origine de la société
traditionnelle africaine. Avec la solidarité, l'hospitalité, la
vie communautaire, la vie en société, il était rare de
voir un villageois vivre dans la précarité, c'est-à-dire
dans un manque total. Toutes les activités quotidiennes du village
s'effectuaient en collectivité. Le partage des butins, des
bénéfices, des gains, des récoltes etc., se faisait en
communauté. Il n'y avait ni riche ni pauvre à moins d'être
un exclu de la communauté. Ce genre de vie sécurisait tout un
chacun dans la société tant qu'il vivait en communauté, ce
mode de vie ne marginalisait personne22(*).
Ce mode de vie communautaire et social a connu une certaine
transposition en ville permettant aux individus d'espérer en un avenir
plus radieux aussi longtemps qu'ils sont en relation avec la communauté
(famille ou ami), car ils peuvent grâce à un membre de la famille
ou un ami, acquérir une information importante ou accéder
à une fonction intéressante permettant ainsi un renversement de
situation dans leur vie. Ainsi donc, grâce à cette culture de la
solidarité, les gens, même les plus démunis, ne
désespèrent point. Dans la société urbaine,
néanmoins, ils vivent une certaine ségrégation sociale
avec distinction "riche pauvre". En aucun cas, le Kinois n'accepte d'être
appelé pauvre, sauf s'il tombe à un moment donné dans une
position de faiblesse et de quémandeur. Dans ce cas, il s'accepte et
s'assume pauvre. Et tant qu'il vit en communauté, le Kinois vit
d'espoir. Le fait d'être déjà en bonne santé suffit
pour lui de développer une sensation de bien-être. De plus, les
églises de réveil inculquent maintenant aux Kinois l'idée
selon laquelle la pauvreté est démoniaque et qu'il faut la
combattre par la prière. Voilà pourquoi le Kinois aspire, tant
qu'il vit, à la prospérité.
III.3. LES PRINCIPALES CAUSES DE LA PAUVRETE A KINSHASA
La problématique de la pauvreté à
Kinshasa ne doit pas être séparée du comportement et du
contexte du fonctionnement de l'économie générale ou
nationale d'autant que la pauvreté n'est qu'une composante d'effets
dévastateurs causés suite à la désarticulation de
l'économie de la République Démocratique du Congo. Sous ce
rapport, la question de la pauvreté est intimement liée à
la structuration mécanique et erronée du cadre
macroéconomique conçu intentionnellement par le pouvoir colonial
pour servir les intérêts stratégiques et les entités
industrielles occidentales.
Au lieu que notre économie soit conçue et
structurée pour dégager et économiser les ressources
nécessaires à la réalisation des grands objectifs
socio-économiques, nous avons une économie extravertie à
l'importation tout comme à l'exportation. Pour vivre, nous devons soit
tout exporter, soit tout importer et cela profite en grande partie aux firmes
multinationales grâce à leur technologie de pointe. Il s'en suit
toujours un déséquilibre de la balance des paiements en faveur de
l'Occident, d'où des revenus nationaux. A cela s'ajoute donc la
manipulation internationale des prix de la plupart de nos matières
premières toujours en baisse (diamant, cobalt, cuivre, zinc, etc.)
entrainant la détérioration des termes de l'échange. Tout
compte fait, une économie en déséquilibre permanent ne
peut qu'amenuiser et même estomper les ressources de l'Etat,
compromettant ainsi tout programme économique. D'où le pilotage
à vue de notre économie.
L'exploitation brute de nos ressources pour l'exportation
exclusivement sans maîtrise rationnelle de la technologie est un
désavantage considérable pour notre économie. D'où
l'échec de tous les programmes socio-économiques misent en place
soit par les bailleurs des fonds extérieurs, soit par les dirigeants
nationaux.
Les causes de la pauvreté étant multiples,
Kinshasa n'est pas éloignée par ce fléau qui ronge presque
l'humanité toute entière. Les principales causes de la
pauvreté sont :
· Une mauvaise politique de l'Etat en matière
d'emploi ;
· L'économie congolaise est extravertie ;
· Une super inflation monétaire ;
· Une crise politique socio-économique ;
· L'explosion démographique ;
· Les initiatives de la population non
encouragées ;
· Absence des politiques d'éducation ;
· Absence des politiques salariales
responsables ;
· Absence des politiques de la nutrition
1. UNE MAUVAISE POLITIQUE DE L'ETAT EN MATIERE
D'EMPLOI
Lorsque l'Etat n'a pas une bonne politique en matière
d'emploi, les universités qui poussent à travers la ville comme
les champignons mettent à la disposition du pays, chaque année
qui passe, une masse incontrôlée des intellectuels qui demeurent
sans emploi et deviennent en cas de force majeur Salomons23(*), contrainte de vivre dans la
précarité.
La réduction de la pauvreté est donc tributaire
du plein emploi et d'un travail décent pour tous. La proportion de la
population active figure ainsi parmi les indicateurs de suivi de la
pauvreté. Le taux d'activité à Kinshasa (42,3%) est faible
par rapport à la moyenne nationale (60,2%). Ceci s'explique entre autres
par une plus faible insertion des enfants sur le marché du travail. En
effet, le taux d'activité des enfants de 10 à 14 ans y est de
1,8% à Kinshasa, contre 9% pour la RDC. Le travail des enfants est moins
problématique à Kinshasa que dans d'autres provinces de la
RDC.
A l'image des grandes capitales africaines, le chômage
est nettement plus élevé à Kinshasa (15,0%) qu'au niveau
national (3,7%). Il touche plus particulièrement les jeunes de 15
à 24 ans (29,5%).Parmi les actifs occupés, près d'un tiers
gagnent moins du SMIG (1 USD par jour) en 2005 et près du quart
travaillent involontairement moins de 35h par semaine. Ainsi, le
phénomène de sous-emploi est répandu à Kinshasa
puisqu'il touche 53,1% des actifs occupés24(*). Le tableau suivant nous donne
plus des précisions sur la conjoncture que traverse Kinshasa en
matière d'emploi, le taux de chômage, pour ne parler que de cela
est remarquable par rapport au pourcentage national ou aux statistiques
générales du pays.
TABLEAU 13 : LES CHIFFRES DE L'EMPLOI A KINSHASA
|
KINSHASA
|
RDC
|
Taux d'activité
|
42,3 %
|
60,2 %
|
Taux de chômage au sens du BIT
|
15,0 %
|
3,7 %
|
Taux de sous emploi visible
|
24,0 %
|
49,0 %
|
Taux de sous emploi invisible
|
33,7 %
|
38,2 %
|
Taux de sous emploi global
|
53,1 %
|
72,7 %
|
Structure de l'emploi
· Administration publique
· Parapublique
· Privé informel
· Informel non agricole
· Informel agricole
· Associations
|
11,9 %
5,0 %
8,8 %
65,6 %
5,2 %
3,5 %
|
4,5 %
1,8 %
1,7 %
19,2 %
71,4 %
1,4 %
|
Taux de salarisation
|
35,5 %
|
11,2 %
|
Sources : PNUD, profil
résumé : pauvreté et conditions de vie des
ménages, province de Kinshasa, mars 2009, p7.
Les chômeurs au sens du
BIT : sont les personnes à la fois sans emploi,
disponibles à travailler et recherchaient activement du travail, du
moins durant la période de référence de l'enquête.
Taux de sous-emploi visible : rapport
du nombre d'actifs occupés travaillant involontairement moins de 35
heures par semaine, à la population active occupée.
2. L'ECONOMIE CONGOLAISE EST
EXTRAVERTIE
La plupart des biens qui constituent le marché
congolais, provient de l'étranger. Pour vivre on doit soit tout exporter
ou tout importer, ce qui implique un caractère de dépendance de
notre économie dans son ensemble.
3. UNE SUPER INFLATION MONETAIRE
L'économie congolaise connaît de manière
chronique et régulière des braves moments de stagnation (baisse
de la production) et une inflation (élévation du niveau
général des prix), situation qualifiée de stagflation.
Cette situation engendre plus d'anomalies, car la population sera toujours
confronter à un déficit répétitif et brusque, son
pouvoir d'achat sera toujours en baisse compte tenue de la diminution des
ressources. La situation peut se présenter graphiquement de la
manière suivante :
Graphique 3 : Le déplacement de la courbe
d'offre
Offre globale
Hausse de long
terme
des prix
AS2
B
P2
Offre
Globale à
P1
A CT, AS1
Demande globale
0
Y1 Y2
Le graphique stipule que si un événement
provoque une brusque élévation des coûts de production des
entreprises, la courbe d'offre globale de court terme se déplace vers la
gauche (AS1 à AS2). L'économie passe du
point A au point B. Il en résulte donc une stagflation : production
en baisse (de Y1 à Y2) et prix en hausse (de
P1 à P2).
La production demeurera déprimée, en Y2, pendant
un certain temps, avant que la récession ne disparaisse
d'elle-même. En effet, avec le temps, les perceptions subjectives du
public, les salaires et les prix finiront par s'adapter aux nouvelles
conditions économiques25(*). Signalons aussi par cette même illustration
graphique qu'à long terme, les prix retomberont et l'économie
retournera au point A, à l'intersection des courbes de demande globale
et d'offre globale de long terme.
4. LA CRISE POLITIQUE ET
SOCIO-ECONOMIQUE
Les différentes guerres civiles qui se sont
succédées depuis 1960 jusqu'à présent ont
aggravé la crise économique qui, elle-même, fut
accentuée par la nationalisation des entreprises
étrangères. C'est Kinshasa qui paie le lourd tribut de crises
politiques et économiques, car la paupérisation des milieux
ruraux ne fait que s'accentuer au fil du temps poussant ainsi les paysans
à quitter la campagne pour venir gonfler les effectifs de la population
kinoise, contrainte de vivre dans la précarité. D'où les
infrastructures du secteur formel sont dépassées par le boom
démographique.
5. L'EXPLOSION DEMOCRAPHIQUE
La population kinoise a augmenté de façon
vertigineuse. En 1881, il y avait que 5 000 habitants à Kinshasa,
la population a augmentée à 6 000 000 d'habitants en 2003 et elle
s'est rapidement accrue pour atteindre plus de 9 000 000 d'habitants
à ce jour. L'exode rural, l'accroissement naturel et l'incorporation des
villages environnants sont les principales causes de l'explosion
démographique à Kinshasa.
En effet, cette explosion a conduit la population kinoise
à observer la détérioration non seulement des
infrastructures de base, mais surtout des conditions de vie. La population ne
cesse sans doute de s'exclamer auprès des autorités tant
municipales que provinciales à travers des vieux adages nostalligiques
"Kin la belle ekoma Kin la poubelle" qui veut dire littéralement
"Kinshasa, qui était la ville propre sur tous ses aspects est devenue
comme une poubelle".
TABLEAU 14 : EVOLUTION DE LA POPULATION DE KINSHASA
(1924- 2001)
Années
|
Pop. des cités
|
Pop. non Africaine
|
Ensemble
|
1924
|
22 506
|
1 221
|
23 730
|
1930
|
36 767
|
2 763
|
39 530
|
1935
|
26 622
|
1 654
|
28 276
|
1940
|
46 884
|
3 088
|
49 972
|
1945
|
96 116
|
5 385
|
101 501
|
1950
|
190 912
|
10 993
|
201 905
|
1955
|
332 230
|
15 740
|
347 970
|
1959
|
359 221
|
22 000
|
381 221
|
1960
|
|
|
476 219
|
1965
|
|
|
726 534
|
1970
|
|
|
1 323 009
|
1975
|
|
|
1 679 091
|
1980
|
|
|
2 410 552
|
1984
|
|
|
2 664 000
|
1985
|
|
|
2 799 000
|
1987
|
|
|
3 101 000
|
1990
|
|
|
3 695 000
|
1995
|
|
|
4 787 000
|
1999
|
|
|
5 793 000
|
2000
|
|
|
6 062 000
|
2001
|
|
|
6 400 000
|
Source : INS, étude
socio-démographique de Kinshasa 1967. Rapport général,
Kinshasa, 1969 et projections démographiques zaïre et
régions 1984-2000, Kinshasa, 1993. L. De Saint Moulin, contribution
à l'histoire de Kinshasa, in zaïre-Afrique, N° 108, octobre
1976. Mbumba Ngimbi, Kinshasa 1881-1981, CRP, Kinshasa, 1982. Voyons dans le
tableau suivant, l'évolution de la population dans les
différentes communes de la ville.
TABLEAU 15 : EVOLUTION DE LA POPULATION DES COMMUNES DE
KINSHASA
Communes
|
Km2
|
1984*
|
1994**
|
2004***
|
Bandalungwa
|
6,82
|
97 973
|
169 861
|
230 704
|
Barumbu
|
4,72
|
69 789
|
120 820
|
138 618
|
Bumbu
|
5,30
|
114 645
|
199 135
|
315 158
|
Gombe
|
29,33
|
16 735
|
30 333
|
30 961
|
Kalamu
|
6,64
|
146 300
|
280 822
|
354 210
|
Kasa vubu
|
5,04
|
76 111
|
30 581
|
159 112
|
Kimbanseke
|
237,78
|
344 246
|
617 158
|
956 221
|
Kinshasa
|
2,87
|
76 635
|
130 861
|
159 130
|
Kintambo
|
2,72
|
51 733
|
86 136
|
123 656
|
Kisenso
|
16,60
|
120 230
|
205 785
|
420 697
|
Lemba
|
23,70
|
155 262
|
279 173
|
407 386
|
Limete
|
67,60
|
130 437
|
223 947
|
360 141
|
Lingwala
|
2,88
|
53 213
|
85 919
|
100 968
|
Makala
|
5,60
|
106 875
|
190 348
|
241 780
|
Maluku
|
7 948,80
|
53 891
|
93 787
|
162 490
|
Masina
|
69,73
|
162 190
|
276 221
|
570 971
|
Matete
|
4,88
|
105 600
|
183 294
|
310 687
|
Mont Ngafula
|
358,92
|
49 604
|
92 292
|
177 040
|
Ndjili
|
11,40
|
160 010
|
274 342
|
379 065
|
Ngaba
|
4,00
|
75 260
|
130 080
|
195 930
|
Ngaliema
|
224,30
|
245 567
|
440 580
|
736 259
|
Ngiri-Ngiri
|
3,40
|
81 978
|
143 807
|
173 330
|
N'sele
|
898,79
|
29 348
|
50 607
|
108 760
|
Selembao
|
23,18
|
127 106
|
221 187
|
377 523
|
TOTAL
|
9 965,00
|
2 542 558
|
4 655 313
|
7 184 001
|
Source : *Département du plan,
Direction de planification, ville de Kinshasa, fiche technique, Kinshasa 1998.
** Ngondo-a-Pitshandenge et Ali, perspectives démographiques du
Zaïre 1984-1999 et population d'âge électoral en 1993 et
1994, Cepas, Kinshasa, 1994. *** Ministère de l'intérieur et
décentralisation, 5e édition : Population,
Juillet 2004.
Le graphique suivant démontre la forme globale de
l'évolution de la population Kinoise de 1984 à 2004.
Graphique 4 : Evolution de la population kinoise
(1984-2004)
2004
1994
1984
2 542 558
4 665 313 7 184 001 Effectif
Source : PNUD (unité de lutte
contre la pauvreté), pauvreté et conditions de vie des
ménages (profil résumé de la ville de Kinshasa), Kinshasa,
Mars 2009, p.10.
6. INITIATIVES DE LA POPULATION NON
ENCOURAGEES
Un Gouvernement qui n'encourage pas les initiatives, les
projets et les innovations de son peuple, celui-ci prépare sa
défaite, sa décadence et ne pourra pas tenir bien longtemps.
Cependant, à Kinshasa, il est rare à titre d'exemple de voir une
famille qui pratique l'élevage à domicile. La plupart des chefs
de ménages interrogés évoquent souvent un
élément clé qui expliquerait selon eux, la non
praticabilité des petites initiatives sociales. Il s'agit notamment de
l'insuffisance des moyens adéquats.
Tout compte fait, certains Kinois qui s'efforcent encore sur
terrain ne bénéficient d'aucune subvention du gouvernement. Ce
qui les décourage tout en renonçant à des bonnes
initiatives au point de se lancer dans l'informel pur (cambistes, mamans
Bipupula, etc.).
7. ABSENCE DES POLITIQUES
D'EDUCATION
Un gouvernement qui ne sait pas ajuster, actualiser ses
politiques en matière de l'éducation de sa jeunesse, celui-ci
peut être considéré comme court-termiste, car les jeunes
préparés aujourd'hui sont les élites de demain. Au Congo,
le programme des cours que suivent les enfants au niveau primaire, secondaire
et même professionnel ne reflète pas la réalité du
pays. On se demande à quoi servirait primordialement un écolier
de connaître MISSISSIPI si ce dernier habite Kinshasa et n'a jamais
entendu parler de fleuve Congo, et ne connait aucune richesse qu'héberge
celle-ci.
En effet, les causes de la non scolarisation des jeunes kinois
ne sont pas les mêmes. D'une part, il existe une catégorie des
jeunes à qui les parents ont disponibilisé leurs maigres moyens
pour leur scolarisation, mais du fait que ces jeunes sont témoins de
certaines comédies qui se passent dans leurs foyers, à titre
d'exemple "un grand frère qui sacrifie 17 ans d'études et qui
revient 3 mois après la fête de collation se disputer la
télécommande de la télévision" plusieurs renoncent
ipso facto aux études et cherchent les raccourcis de la vie (devenir
musicien, chercher les voies et moyens pour voyager en Europe où il y a
le paradis de rêve, etc.). D'autre part, il existe au moins des jeunes
qui ont la volonté d'étudier mais faute des moyens, ils sont
confrontés à des multiples exigences de la vie et ne savent
à leur niveau quoi faire pour devenir quelqu'un dans la vie.
A Kinshasa, on remarque l'absence des politiques
d'éducation plus appropriées aux réalités, de
manière à intégrer l'environnement de Kinshasa dans
l'élaboration des programmes scolaires et académiques.
Exemple : La pêche, la culture vivrière, etc.
Selon l'annuaire statistique de l'enseignement primaire,
secondaire et professionnel (2006-2007), l'éducation à Kinshasa
rencontre aussi les difficultés. D'une part, la tendance
enregistrée sur les dernières années montre une
légère baisse du taux de scolarisation (76,3% en 2001 et 74,8% en
2005). D'autre part, le niveau d'études moyen des Kinois est
relativement faible. D'ailleurs, malgré la proximité des
écoles primaires, deux tiers d'entre elles sont des écoles
privées (voir le tableau ci-après), donc relativement plus
chères.
TABLEAU 16 : LES ECOLES PAR REGIME DE GESTION
|
Kinshasa
|
RDC
|
Primaire
|
Nombre
|
%
|
Nombre
|
%
|
Non conventionnée
|
187
|
7,8 %
|
5 014
|
17,0 %
|
Conventionnée
|
658
|
27,5 %
|
20 894
|
71,0 %
|
Privée
|
1 545
|
64,7 %
|
3 542
|
12,0 %
|
Total
|
2 390
|
100,0 %
|
29 450
|
100,0%
|
Secondaire
|
Nombre
|
%
|
Nombre
|
%
|
Non conventionnée
|
133
|
9,4 %
|
2 982
|
21,0 %
|
Conventionnée
|
386
|
27,3 %
|
9 033
|
63,8 %
|
Privée
|
894
|
63,3 %
|
2 148
|
15,2 %
|
Total
|
1 413
|
100,0 %
|
14 163
|
100,0 %
|
Source : Annuaire statistique de
l'enseignement primaire, secondaire et professionnel 2006-2007.
Selon le même annuaire, le problème financier est
donc le premier motif d'arrêt de la scolarisation évoqué
par les ménages : 30,7% à Kinshasa contre 41,3 en RDC. Trois
quarts des ménages kinois ayant des enfants à l'école
déclarent avoir connu au moins une exclusion de leurs enfants pour non
paiement des frais scolaires.
8. ABSENCE DES POLITIQUES SALARIALES
RESPONSABLES
Lorsqu'un gouvernement ne prévoit pas des politiques
salariales responsables orientées vers la protection de la main d'oeuvre
locale et l'élévation du pouvoir d'achat, celui-ci s'attendra
à gouverner un peuple rongé tout le temps par la
misère.
9. ABSENCE DES POLITIQUES DE LA NUTRITION
Un peuple malnutri est une nation qui ne peut aller de
l'avant, qui sera confronté à des multiples
épidémies et toutes sortes des maladies du fait de la
fragilité des anti-corps. De ce fait, ce peuple n'est pas en mesure
d'augmenter sa productivité par le travail. En réalité, le
peuple kinois est malnutri.
Cette malnutrition s'explique par la
détérioration des voies routières ne permettant pas les
commerçants d'évacuer leurs produits vers la capitale, ce qui
crée une pénurie sur le marché et souvent ce qui est rare
coûte toujours cher. Voyons ci-après les déterminants de la
malnutrition à Kinshasa.
Schéma 1 : Les déterminants de la
malnutrition à Kinshasa
Source : LUZOLELE, la pauvreté
urbaine en Afrique subsaharienne, édition CEPAS, Bruxelles, 1999,
p39.
III.3. LES STRATEGIES DE LUTTE CONTRE L'URBANISATION DE LA PAUVRETE A
KINSHASA
Vu l'ampleur de la manière dont le niveau de la
pauvreté s'accroît à Kinshasa, ni les Kinois, ni les
gouvernements national et provincial, ni les institutions internationales n'y
sont restés indifférents. Ils ont mis sur pied des
stratégies de lutte contre la pauvreté au niveau des
ménages, de l'Etat ainsi qu'au niveau des grandes institutions des
nations unies qui ont leur champ d'activités dans notre pays.
III.3.1. LES STRATEGIES DE LUTTE AU NIVEAU DES MENAGES
Au niveau des ménages ; toute personne vivant dans
un lieu quelconque est appelée à connaître les exigences du
milieu dans lequel elle est censée vivre, hommage à ce grand
biologiste qui insistait sur l'importance pour un individu de bien
connaître le milieu dans lequel il vit ou l'adaptation du milieu
(Lamarck).
A Kinshasa, lorsque vous sillonnez le long de la ville, vous
entendrez une personne dire à l'autre "débrouillez-vous26(*)". Ce langage est souvent
utilisé par le Kinois pour traduire les stratégies de lutte
contre la pauvreté mises en place. En connaissance des conditions que
traverse notre pays, le kinois s'adapte à la conjoncture et monte
à son niveau plusieurs stratégies de lutte contre l'urbanisation
dans son milieu. Parmi ces stratégies, nous pouvons citer les vendeurs
d'eau en sachets, les cambistes, les démarcheurs, les cireurs, les
chargeurs des taxis et taxis bus, les receveurs, les vidangeurs des fosses
septiques, les anti-gangs, les mamans Bipupula, etc. sont là les types
de métiers qui pullulent à Kinshasa et qui font vivre les Kinois
à Kinshasa, métiers qualifiés « d'article
15 ».
Les vendeurs d'eau en sachet ; sont ceux qui vendent de
l'eau en sachet. Cette eau est souvent non traitée, contient beaucoup de
microbes et est souvent vendue dans les grands lieux publics comme le long des
grands marchés de la ville (Gambela, Zando, Matete, etc.).
Les cambistes sont les jeunes qui exercent le métier de
change des devises, ils intègrent souvent les ventes des cartes de
communication, des papiers mouchoirs et tant d'autres marchandises, dans le but
d'élargir leur niveau de rentabilité. Ils sont très
remarquables et très fréquents dans presque tous les coins de la
ville.
Les cireurs, comme indique le nom, ils ont une
expérience innée en matière des souliers et jouent souvent
deux rôles en même temps. D'une part, ils sont cordonniers (lorsque
les souliers, les babouches des passants sont endommagés, ils sont les
mieux placé pour répondre à cette
préoccupation) ; d'autre part, ils sont cireurs et nettoyeurs des
chaussures, ils sont pour la majorité mobiles, c'est-à-dire ils
n'ont pas des lieux fixes et circulent dans presque toute la ville à la
recherche des clients.
Les chargeurs des taxis et taxis bus sont les jeunes vifs qui
sont aux arrêts et indiquent aux passagers les lieux de destination de
ces taxis et taxis bus, ce travail équivaut à une
récompense de la part du chauffeur.
Les receveurs sont en quelque sorte les aides-chauffeurs des
taxis bus, ils perçoivent l'argent auprès des clients en vue de
réduire certaines fraudes et tant d'autres anomalies qui peuvent
subvenir vu le nombre important des passagers « cinq cinq na
banc », qui veut dire que les clients doivent s'arranger de
manière à s'asseoir cinq personnes sur un même banc de plus
ou moins 1m).
Les vidangeurs des fosses septiques vident manuellement les
fosses septiques dans les quartiers inaccessibles par les services
d'assainissement de la ville. C'est un métier à haut risque et
par conséquent bien rémunéré, tout est fonction de
la profondeur et de la largeur de la fosse septique. Ce genre des
métiers confirment l'adage « l'argent n'a pas
d'odeur ».
Les anti-gangs sont des jeunes sportifs remarquables par leurs
biceps qu'on peut engager momentanément pour assurer la
sécurité dans des lieux de fêtes, dans les bistrots
(Nganda), marchés, etc. ils sont rémunérés à
la fin de l'exercice de leur tâche.
Les mamans Bipupula27(*) sont des femmes qui aident à partager
équitablement les sacs de maïs et de manioc achetés en gros
par deux ou plusieurs femmes qui ne peuvent l'acquérir seules en
entièreté étant donné la modicité de leur
bourse.
En contre partie, les mamans Bipupula sont payées pour
le service rendu avec des rebuts de graines de maïs ou de cossettes de
maniocs, haricots. De leur paie, il s'ensuit que ces mamans procèdent
à tamiser les rebuts et à tirer les bons grains des mauvais.
Elles accumulent ces gains dans toutes les opérations effectuées.
Le soir, elles les revendent au marché appelé Bitula28(*) pour se faire un peu d'argent,
soit elles les apportent à la maison pour l'unique repas du jour.
Ces métiers informels appuient la célèbre
réflexion "kolia na Kin ekoma kalayi ngangu, kalayi technique29(*)" qui signifie "manger,
survivre à Kinshasa présuppose une stratégie ou une
technique". Ils constituent les grandes stratégies que s'offrent les
Kinois pour surmonter le grand combat de lutte contre l'urbanisation de la
pauvreté qui s'accentue à une vitesse de croisière.
Mais cela ne se limite pas là, car malgré la
période difficile que traverse la République Démocratique
du Congo, les stratégies de lutte que se fixe le Gouvernement congolais
et certaines institutions des Nations Unies ne peuvent à notre avis
passer inaperçues.
III.3.2. LES STRATEGIES DE LUTTE CONTRE LA PAUVRETE AU NIVEAU
DE L'ETAT
Pour bien mener sa mission d'éradication de la
pauvreté, le gouvernement congolais a élaboré "le Document
de la Stratégie de Croissance et de Réduction de la
Pauvreté (DSCRP). Ce document contient les actions prioritaires de lutte
contre la pauvreté par la restauration de la paix et de la
réconciliation nationale, par la restauration de la bonne gouvernance,
la restauration de l'éducation, la lutte contre le VIH/SIDA, la
tuberculose et le paludisme, la résolution pacifique des conflits, la
rupture de la dynamique de renforcement mutuel entre la mauvaise gouvernance et
les conflits, la lutte contre les inégalités et l'exclusion, la
prise en compte de la dimension du genre et le défi de
disponibilité des données statistiques fiables.
Le DSCRP a pour objectif d'améliorer et de consolider
le cadre institutionnel et de gouvernance à la base, de créer un
cadre institutionnel national d'appui à la dynamique communautaire,
d'améliorer la situation de la femme et des autres groupes
vulnérables dans les communautés de base, d'améliorer les
conditions de vie des populations de base.
Avec l'aide des partenaires internationaux comme la Banque
Mondiale et le Fonds monétaire international, la RDC a mis sur pied un
Programme Intérimaire Renforcé (PIR) avec pour objectif
d'assainir le cadre macroéconomique et de réduire l'inflation.
Pour consolider et pérenniser les acquis de ce programme et aussi
préparer la relance économique par la réhabilitation et la
reconstruction des infrastructures, elle a, par la suite, élaboré
le programme multisectoriel d'urgence de reconstruction et de
réhabilitation (PMURR), dont les secteurs prioritaires sont le
renforcement des capacités, les infrastructures, le développement
communautaire, l'agriculture, l'éducation, la santé, la
protection sociale, etc. Et aujourd'hui, l'actualité est dominée
par l'actuel carnet de l'explosion du développement de la
République ou encore les cinq chantiers de la République
(Emploi, Logement, Eau et Electricité, Santé et
Education, Infrastructures)30(*).
Tout compte fait, le Kinois n'y reste pas indifférent,
il croit en l'avenir et surtout comme tout Congolais, ce dernier reste encore
dynamique à tout projet favorisant le progrès de son milieu et
veut voir la capitale se métamorphoser tout en changeant sa mappe qui ne
reste jusqu'à présent que sous son aspect colonialiste.
III.3.3. STRATEGIES DE LUTTE CONTRE LA PAUVRETE AU NIVEAU DES
INSTITUTIONS DES
NATIONS UNIES
A travers ses diverses agences oeuvrant en République
Démocratique du Congo, l'Organisation des Nations Unies (ONU) est l'une
des institutions importantes dans le suivi direct et analytique de la
pauvreté.
L'Organisation Internationale du Travail (OIT), à
travers le BIT, a pour objectif principal en RD Congo d'aider à
accroître les investissements en matière de création
d'emploi et de distribution de revenu ainsi que de lutte contre les pires
formes de travail des enfants. Il a lancé un programme de
prévention et de réinsertion des enfants engagés dans les
conflits armés.
L'ONU/SIDA accorde un appui financier substantiel au programme
national de lutte contre le SIDA (PNLS), aux ONG du forum SIDA (FOSI) et bureau
national de promotion de la santé du ministère de la santé
publique.
Le PAM apporte un soutien direct à ceux qui sont
atteints du SIDA ainsi qu'à leurs familles. Cependant, l'action du PAM
est principalement centrée à Kinshasa, où près de
10 463 personnes s'approvisionnent quotidiennement à travers les
ONG partenaires en rations alimentaires pour éviter la
détérioration de leur état nutritionnel et sanitaire. Ces
personnes sont les grabataires, les orphelins, les veuves infectées ou
affectées par la pandémie.
Le Fonds des Nations Unies pour la Population (FNUAP) assiste
la République Démocratique du Congo dans le traitement des
questions relatives à la santé de la reproduction et à la
population. La FAO fournit en urgence des intrants agricoles et des
matériels de pêche aux familles démunies. En 2002, ce
programme a touché 516 400 ménages. Il a renforcé la
réhabilitation et le développement du secteur agricole,
appuyé le programme spécial de sécurité alimentaire
(PSSA), le programme manioc, le lancement d'une radio rurale locale
communautaire implantée à Mbanza-Ngungu, l'élaboration du
nouveau code forestier, le lancement de « Champs Ecoles
Paysannes », le « Programme Tele Food », etc.
Le Haut Commissariat des Nations Unies aux Droits de l'Homme
(HCDH), dont l'objectif est le renforcement du « mainstreaming des
droits de l'homme », entend s'assurer du respect des droits humains,
l'un des indicateurs du développement durable en République
Démocratique du Congo.
L'UNOPS est un bureau des Nations Unies pour le service
d'appui au projet portant sur des domaines variés tels que la
réhabilitation des infrastructures de base, le renforcement des
capacités communautaires, la réhabilitation et l'entretien des
routes rurales et l'assistance pour l'action contre les mines en RD Congo.
L'UNICEF (les Fonds des Nations Unies pour l'Enfance) a des
actions aussi variées : la prévention des maladies
infantiles, le respect des droits des enfants, l'éducation et
l'alimentation.
Le PNUD, qui appuie la RD Congo, a élaboré le
DRSP qui est le document-cadre des politiques macro-économiques et
sectorielles qui va permettre au pays d'avoir accès aux ressources du
FMI et de la Banque Mondiale.
Les bailleurs de fonds sont constitués des pays
développés comme les USA, la Chine, l'Italie, la Belgique, la
France, la Suède, la Suisse, la Norvège, etc., ainsi que des
institutions telles que l'Union Européenne, la Banque Mondiale, la BAD,
l'USAID, la MONUC, le FIDA qui financent directement les programmes de lutte
contre la pauvreté dans des programmes bilatéraux ou par le biais
des agences du système des Nations Unies. L'Union Européenne
intervient en RD Congo par le truchement de ses branches
spécialisées comme le programme d'appui à la
réhabilitation (PAR), le programme d'appui transitoire au secteur de la
santé (PATS), etc.
En dehors des stratégies citées ci-haut, l'on
remarque que la plupart des programmes de lutte contre la pauvreté
attaquent souvent les causes opportunistes, ce qui revient tout simplement
à mettre du baume au dos d'un vieux rongé par le cancer des
os c'est-à-dire au lieu que ceux-ci attaquent les causes
principales ou la source, c'est-à-dire commencer par le renversement de
la structure erronée et extravertie de notre économie.
III.4. LA PAUVRETE URBAINE A KINSHASA ET DIVERSES STRATEGIES DE LUTTE
Nous allons le souligner ci-dessous, les stratégies de
lutte contre la pauvreté urbaine à Kinshasa consistent donc
à tabler sur les principales utilités dont les Kinois sont
privés aujourd'hui : le revenu, l'éducation, les soins, la
facilité de mobilité et le désir de participer à la
prise des décisions qui concernent leur devenir. Tout ceci rencontre sur
plusieurs points la stratégie de la lutte contre la pauvreté
basée sur des actions de paupérisation définies par les
Nations Unies :
· La simplification au possible des circuits de transport
et la réduction sensible des circuits intermédiaires à
Kinshasa ;
· L'imposition du SMIG pour toutes les activités
rémunérées et de service (personnel de l'Etat, entreprises
privées et publiques ainsi que les activités de service et de
vente entraînant les commissions) ;
· Réduire l'exode rural par une politique visant
à stabiliser les populations de l'arrière pays ;
· Déconcentrer la ville de Kinshasa en
créant autour d'elle d'une ceinture d'activités et
d'intérêts ;
· L'encouragement tous azimuts des petites
activités agricoles et d'élevage familial ;
· Tenir les statistiques démographiques de toutes
les couches vulnérables.
NB. Autrement dit les causes analysées
ci-haut (à la Page 56) constituent les forces qui peuvent être
insérer aux politiques proposées si on veut réellement
réduire le taux de la pauvreté urbaine à Kinshasa.
CONCLUSION PARTIELLE
En somme, comme on vient de le voir, le Kinois a sa
façon de percevoir la pauvreté, perception qui diffère de
celle des acteurs qui étudient le phénomène.
Néanmoins, la prolifération des petits métiers informels
est un signe qui montre bien que le Kinois vit dans la pauvreté. C'est
la raison pour laquelle le gouvernement vient de se doter du document de la
stratégie de croissance et de réduction de la pauvreté
(DSCRP) dont certaines actions seront appuyées par les agences de l'ONU
ainsi que par d'autres bailleurs des fonds internationaux.
CONCLUSION GENERALE
Au delà de toute pensée que l'on peut se faire
de la pauvreté, nous avons compris qu'il est difficile d'évoquer
une définition de la pauvreté qui soit profondément
parfaite, du fait que lorsque celle-ci se manifeste, elle touche divers
domaines de la vie humaine, elle est donc un concept multidimensionnel.
Mais cela ne peut pas nous empêcher de l'expliquer de
manière claire en vue de rendre compréhensif son contenu. C'est
de cette façon que la "pauvreté est donc comprise comme
l'impossibilité pour un individu d'utiliser ses capacités ou les
opportunités dont il est privé au cours de son existence".
Au jour le jour, Kinshasa s'urbanise de plus en plus et cette
urbanisation rapide influe directement sur la qualité de la vie et
surtout sur celle des populations pauvres de la ville. Malgré les
maigres budgets alloués par le Gouvernement au développement de
la ville, la capitale congolaise continue de croître.
Devant la lenteur du gouvernement pour intervenir, les ONG
locales et internationales ainsi que les confessions religieuses s'emploient
à promouvoir l'amélioration de la qualité de vie des
populations kinoises pauvres.
Le Kinois, comme tout Congolais a sa façon de percevoir
la pauvreté, perception qui diffère de celle des acteurs qui
étudient le phénomène. Néanmoins, la
prolifération des petits métiers informels est un signe qui
montre bien que le Kinois vit dans la pauvreté. C'est la raison pour
laquelle le gouvernement s'est doté du Document de la Stratégie
de Croissance et de Réduction de la Pauvreté (DSCRP) dont
certaines actions seront appuyées par les agences de l'ONU ainsi que par
d'autres bailleurs de fonds internationaux.
Bref, la problématique de la pauvreté à
Kinshasa ne doit pas être séparée du comportement et du
contexte de fonctionnement de l'économie nationale d'autant que la
pauvreté n'est qu'une composante d'effets dévastateurs
causés suite à la désarticulation de l'économie de
la République Démocratique du Congo.
Sous ce rapport, la question de la pauvreté est
intimement liée à la structuration mécanique et
erronée du cadre macro-économique conçu intentionnellement
par le pouvoir colonial pour servir les intérêts
stratégiques et les entités industrielles occidentales.
Au lieu que notre économie soit conçue et
structurée de manière à dégager et à
économiser nos ressources nécessaires à la
réalisation des grands objectifs socio-économiques, nous avons
donc une économie totalement extravertie à l'importation tout
comme à l'exportation. Et la descente aux enfers de notre
économie ne date pas du Gouvernement KASA-VUBU31(*) mais bien au-delà de
l'époque coloniale. Depuis ce temps, l'économie congolaise vit au
rythme d'une super-inflation évoluant de manière constante et
soutenue jusqu'à ce jour. Une inflation qui a considérablement
fait dégrader non seulement le tissu économique mais
également le vécu quotidien des Congolais en
général et celui de Kinois en particulier.
C'est pourquoi tout programme de lutte contre la
pauvreté doit commencer par la source, c'est-à-dire par le
renversement de la structure pervertie, erronée et extravertie de notre
économie. S'attaquer aux causes opportunistes revient tout simplement
à mettre du baume au dos d'un vieux rongé par le cancer des os.
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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dans le monde 2000-2001, combattre la pauvreté, Washington,
Banque Mondiale, 2001.
CHELO DHEBBI, Notes de cours d'économie
politique, Deuxième graduat, Faculté d'économie
et développement, Facultés Catholiques de Kinshasa, Kinshasa,
2007-2008.
F.L. NZUZI, C.T. MBUYI, Pauvreté urbaine
à Kinshasa, édition Cordaid, la Haye, Juin 2004.
Gouvernement de la République, Programme de
stabilisation et de relance de l'économie, communication du
gouvernement à la réunion des amis de la République
Démocratique du Congo, 12 Novembre 1997.
Jean marc FONTAINE, Mécanismes et politiques de
développement économique (Du big push à
l'ajustement structurel), éditions CUJAS, paris, septembre, 1994.
Laurent LUZOLELE LOLA NKAKALA : -
Congo-Kinshasa : combattre la pauvreté en situation de post
conflit (synergie entre l'Etat et le capital social), édition
l'harmattan, Paris, 2002.
- La pauvreté urbaine en Afrique
Subsaharienne, cas de Kinshasa, CEPAS (centre
tiers-monde-facultés universitaires saint-Ignace université
d'Anvers), Bruxelles, 1999.
MPASIA TEZO, conseil national des ONG de
développement du Congo : les stratégies paysannes
de lutte contre la pauvreté, rapport du colloque organisé par
CNONGD du 16 au 19 août 2000.
NZUZI, L., L'impact des érosions de Kinshasa
sur l'Habitat et l'Environnement, Kinshasa, PNUD-Habitat, 1999.
NZUZI, TSHIMANGA, Problématique urbaine
à Kinshasa. Cas des communes de Lingwala et de Ngaliema,
Kinshasa, Cordaid, Avril 2003.
PNUD : - Monographie de la province de
Kinshasa, PNUD Kinshasa, Kinshasa, 2000.
- Province de Kinshasa, Pauvreté et conditions
de vie des ménages (profil résumé), PNUD-RDC,
Mars 2009.
- Rapport du PNUD sur la
pauvreté 1998, vaincre la pauvreté humaine, New
York, 1998.
République Démocratique du Congo,
Document de la Stratégie de Croissance et de Réduction de
la Pauvreté (DSCRP), Kinshasa, Juillet 2006.
VANDERSCHUEREN, F. et Alii, Les options politiques
pour la réduction de la pauvreté, cadre d'action au niveau
municipal, le programme de gestion urbaine et pauvreté, banque
mondiale, Washington, 1996.
WRELINKI, Grande pauvreté et
précarité économique et sociale (rapport
présenté au conseil économique et social), In :
Journal Officiel de la République Française, 23 Février
1987.
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TABLE DES MATIERES
* 1 _ Laurent LUZOLELE LOLA
NKAKALA, Congo-Kinshasa : combattre la pauvreté en
situation de post conflit (synergie entre l'Etat et le capital
social), édition l'harmattan, Paris, 2002, pp.1-2.
* 2 _ F.L. NZUZI, C.T. MBUYI,
Pauvreté urbaine à Kinshasa, édition
Cordaid, la Haye, Juin 2004, p.17.
* 3 _ Banque Mondiale,
Rapport sur le développement dans le monde 2000-2001,
combattre la pauvreté, Washington, Banque mondiale, 2001, p.20.
* 4 _ F.L. NZUZI, C.T. MBUYI,
Op. Cit., p.26.
* 5 _ F.L. NZUZI, C.T. MBUYI,
Op. Cit., p.28.
* 6 _ WRELINKI,
Grande pauvreté et précarité économique et
sociale (Rapport présenté au conseil économique
et social), In : Journal Officiel de la République
Française, 23 Février 1987, pp.1-4.
* 7 _ VANDERSCHUEREN, F. et
Alii, les options politiques pour la réduction de la
pauvreté, cadre d'action au niveau municipal, le programme de
gestion urbaine et pauvreté, banque mondiale, Washington, 1996, p.20.
* 8 _ PNUD, Rapport mondial
sur la pauvreté, vaincre la pauvreté humaine, PNUD, New York,
1998, p.45.
* 9 _ Gouvernement de la
République, programme de stabilisation et de relance de
l'économie, communication du gouvernement à la réunion des
amis de la République Démocratique du Congo, 12 Novembre 1997.
* 10 _ Belle ville avant
1960 ; Lipopo : africanisation de Léopoldville ;
Malebo : borassus, plante très présente sur la plaine de
Kinshasa.
* 11 10 F.L. NZUZI, C.T. MBUYI,
Op. Cit, p.35.
* 12 _ UPN : le quartier a
pris le nom de l'université pédagogique national, parce qu'il est
né à proximité.
* 13 _ DAIPN : Domaine
Agro-Industriel Présidentiel de la N'sele.
* 14 _ Le 30 juin 1960, date de
l'indépendance de la RDC ;
* 15 _ MICS :
enquête nationale sur la situation des enfants et des femmes au Congo en
2001 ;
* 16 _ FNUAP signifie Fonds des
Nations Unies pour la Population.
* 17 _ Des grands
ravins ; sur les sites suivants : Masikita, Mataba I, Mataba II et
III, Kisenso, Ndjili, Drève de Selembao, Kinsuka, Livulu, Ngafani,
Unikin, Nguma, Maluku, Ngomba-Kinkusa, UPN, Ngaliema, Bolikango, Matadi mayo,
etc.
* 18 _ F.L. NZUZI, C.T. MBUYI, Op.
Cit, p48.
* 19 _ PNUD, Rapport sur la
Pauvreté, vaincre la Pauvreté humaine, New York,
2000, p.31.
* 20 _ République
Démocratique du Congo, Document de la Stratégie de
Croissance et de Réduction de la Pauvreté (DSCRP),
Kinshasa, Juillet 2006.
* 21 _ PNUD, Op. Cit., p.22.
* 22 _ Laurent LUZOLELE LOLA
NKAKALA, la pauvreté urbaine en Afrique subsaharienne,
cas de Kinshasa, CEPAS (centre tiers-monde-facultés universitaires
saint-Ignace université d'Anvers), Bruxelles, 1999, p.17.
* 23 _ Les Salomon : c'est
une appellation courante à Kinshasa qui fait allusion à des
jeunes matures capables d'être indépendants, mais fautes des
moyens ces derniers continuent à passer leurs nuits au salon.
* 24 _ PNUD, Profil
résumé : Pauvreté et conditions de vie des
ménages, province de Kinshasa, mars 2009, p.7.
* 25 _ CHELO DHEBBI,
Notes de cours d'économie politique, Deuxième
graduat, Faculté d'économie et développement,
Facultés Catholiques de Kinshasa, Kinshasa, 2007-2008.
* 26 _
Débrouillez-vous : c'est l'article 15 de la constitution de la
province sécessionniste et éphémère du Sud
Kasaï en juillet 1960. Cet article invitait les sud Kasaïens à
se prendre en charge, à se prendre à main, à travailler
dans la débrouillardise, même s'il fallait exploiter
artisanalement du Diamant ; type d'activités interdite à
l'époque. Depuis ce temps là, l'article est passé dans le
langage populaire congolais.
* 27 _ Ce sont les femmes
tamiseuses de rebuts des produits vivriers ;
* 28 _ C'est un
marché constitué par des produits invendus ou les produits
retardataires.
* 29 _ L'adage est plus
extrapoler par le Journal Télévisé en Lingala Facile
(JTLF), diffusé dans certaines chaines du Pays.
* 30 _ République
Démocratique du Congo, site officiel :
www.cinqchantiers-rdc.com.
* 31 _ KASA-VUBU Joseph,
Premier Président du Congo Indépendant (C.I), actuel
République Démocratique du Congo, fut au pouvoir de 1960 à
1965.