Le rôle de la Cour Internationale de Justice dans la détermination et le respect des normes de Jus Cogens( Télécharger le fichier original )par Joseph SEHORANA Université libre de Kigali - Licence 2011 |
II.2 La CIJ face au respect des normes de Jus CogensDans les paragraphes précédents, nous avons montré que la zone d'ombre qui entoure le Jus Cogens hante son respect et son acceptation par les Etats. On l'a aussi signalé que la détermination et le respect de ces normes ont été confiés à la Cour Internationale de Justice et à elle seule. Le présent titre tente alors d'évaluer en long et en large le pas que cette Cour aurait franchi vers la réalisation de cette noble mission. 98 THI HUONG HUYNH, « Mise en oeuvre du droit international humanitaire », disponible sur : http://books.google.com, consulté le 07/06/2011. 99 Article 38 du Statut de la Cour Internationale de Justice.
II.2.1 Le Jus Cogens dans la jurisprudence de la Cour Internationale de JusticeAu fil de sa jurisprudence, la Cour Internationale de Justice a fait référence au Jus Cogens sans jamais le sanctionner. 100 Elle s'est prononcée pour la première fois sur la notion dans un avis consultatif du 28 mai 1951 concernant les réserves à la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide en affirmant l'existence de principes de morale élémentaire obligeant les Etats en dehors de tout lien conventionnel.101 Dans sa décision du 5 Février 1970 au sujet de l'affaire Barcelona Traction, la Cour Internationale de Justice affirme qu'« une distinction doit être établie entre les obligations des Etats envers la communauté internationale dans son ensemble (Jus Cogens) et celles qui naissent vis-à-vis d'un autre Etat dans le cadre de la protection diplomatique ».102 A aucun moment elle ne va mentionner l'expression de « Jus Cogens » mais elle se fait comprendre notamment en utilisant le terme « d'obligations erga omnes » c'est-à-dire, d'obligations à l'égard de tous. La Cour Internationale de Justice se prononcera encore dans une ordonnance du 15 Décembre 1979 en déclarant qu'« aucun Etat n'a l'obligation d'entretenir des relations diplomatiques ou consulaires avec un autre mais il ne saurait manquer de reconnaître les obligations impératives qu'elles comportent et qui sont maintenant codifiées dans les conventions de Vienne de 1961 et 1963 ».103 En 1986, dans l'affaire des activités militaires et paramilitaires, la Cour souligne que « le principe de non-emploi de la force relève du Jus Cogens ».104 Dix ans plus tard, en 1996 la Cour 100 ANONYME, « Le Jus Cogens à travers la jurisprudence internationale », disponible sur : http://www.google.com, consulté le 23/08/2011. 101 Cour Internationale de Justice, Avis consultatif concernant les réserves à la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, Rec., 28 mai 1951, p. 18. 102 L'affaire Barcelona Traction. 103 Cour Internationale de Justice, Affaire du personnel diplomatique et consulaire des Etats-Unis à Téhéran (EtatsUnis d'Amérique contre Iran), mesures conservatoires, ordonnance du 15 décembre 1979, Rec., 1979, p. 20. 104 Affaire des Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci portée devant la Cour par le Nicaragua contre les Etats-Unis d'Amérique, Arrêt du 27 juin 1986. 40 esquive l'expression en se référant au « caractère intransgressible » de certaines obligations. V. BAHATI parle de cette réticence en ces termes : « Dans son avis consultatif sur la licéité de la menace ou de l'emploi des armes nucléaires, la Cour a pris soin d'éviter de se prononcer sur la reconnaissance du caractère de Jus Cogens, alors même qu'elle insistait sur des principes fondamentaux, cardinaux et intransgressibles. La Cour avait constaté qu'il avait été soutenu que ces principes et règles de droit humanitaire faisaient partie du Jus Cogens, mais elle affirma qu'elle n'avait pas à se prononcer sur ce point».105 En général, on peut dire que malgré une affirmation ferme dans les textes, le Jus Cogens n'a fait l'objet que de références discrètes (bien qu'explicites) dans la jurisprudence de la Cour Internationale de Justice.106 Références explicites, car la Cour à fini en 2006 (Affaire RDC c. Rwanda) par reconnaitre expressément la notion de Jus Cogens même si là aussi elle n'a pas pu en définir le contenu et la portée. Permettez que nous examinions cet arrêt dans la partie suivante. |
|