V.5. Autres vices développés chez les
enfants
Au cours des enquêtes, beaucoup de femmes se sont
plaintes des comportements de leurs enfants.
En effet, elles déclarent que dès leur retour du
service, au lieu de se reposer un peu, elles se mettent à recevoir des
plaintes venant de la domestique, des voisins et parfois des
répétiteurs.
A la question de savoir ce qui est reproché aux
enfants, certaines femmes nous confient que leurs enfants font trop de pagaille
à l'école comme à la maison, et ont une mauvaise
compagnie, quand ils sortent de l'école peut-être à midi,
ils viennent à la maison à13h voir 13h30mn. Les enfants
adolescents comme petits refusent de suivre les ordres donnés par les
domestiques et même par autre personne qui ne soit leur mère ou
leur père. Ils disent « tu n'es ni ma
mère, ni mon père ». Quiconque leur ordonne de
faire quelque chose. Les enseignants et même les
répétiteurs se plaignent de la pagaille des adolescents. Une
femme disait « mon enfant sort à 7h au même moment
que moi et ne revient que lorsque sonne l'heure de mon retour à la
maison ».
Les enfants profitent de l'absence de leurs parents surtout
celui de la mère pour poser des actes indécents comme fumer,
boire comme nous l'a confié bon nombre de nos enquêtées.
Les enfants se donnent le luxe de mentir sur le compte de la domestique, ils
volent pour satisfaire leurs caprices refoulés par leurs parents.
L'absence des parents de la maison et surtout celle de la mère
constitue un vide que l'enfant ressent mais qu'il transforme en une
opportunité à saisir pour exceller dans l'interdit. Le drame est
qu'il n'est pas seul à assumer les conséquences mais aussi les
parents.
De l'analyse des points ci-dessus développés, il
ressort que l'entrée des femmes sur le marché du travail a des
implications sur la famille et surtout sur l'éducation des enfants. Le
travail rémunérateur permet à la femme de participer aux
dépenses du ménage ; mais son absence de la maison ouvre la
porte à la pagaille, à la mauvaise compagnie, à la paresse
et bien d'autres vices aux enfants. Au lieu de se mettre à
l'étude aux heures de repos, les enfants préfèrent suivre
la télévision. A ce niveau les enfants ne choisissent que souvent
les feuilletons mais ne savent tirer de bonnes leçons. Enfin, du fait du
manque de temps, les femmes s'entretiennent peu avec leurs enfants adolescents
sur la sexualité.
SYNTHESE DES ANALYSES
Dans la tradition africaine, on dit qu'une seule personne
porte la grossesse mais c'est à la société que revient
l'éducation de l'enfant. L'éducation d'un enfant n'incombe donc
pas à la femme seule, il y a d'autres acteurs comme le père qui
joue aussi sa partition.
La modernité s'impose comme une force progressive et
crée une rupture avec l'ordre familial traditionnel ancien. Les femmes
qui au départ étaient à la maison, et avaient pour
fonction l'éducation des enfants sont aujourd'hui absentes. Leur nombre
ne fait qu'accroître sur le marché de l'emploi salarial. Ceci
grâce aux nombreuses conventions et textes ratifiés visant
à améliorer le statut de la femme béninoise. Au nombre de
ceux-ci, il y a la loi n°98-004 du 27 janvier 1998 portant code du travail
en république du Bénin : elle protège la femme
enceinte en ce que son article 171 proscrit tout licenciement d'une femme en
état de grossesse apparente ou médicalement constaté,
sauf en cas de faute grave non imputable à la grossesse ; Cette
disposition tente de concilier le droit au travail de la femme à son
rôle procréateur mais la dérogation laissée
à l'employeur pour les fautes lourdes peut bien lui permettre d'user des
subterfuges pour remercier la femme enceinte. C'est cela même qui
amène bon nombre de femmes à faire un enfant avant le premier
poste de travail et celle qui doivent en faire après avoir entré
en fonction attendent deux à cinq ans.
Tout analyse faite, la femme salariée consacre
très peu de temps à ses enfants parce que ces derniers dans la
journée sont gardés soit par la domestique soit la grande
mère soit déposé dans une garderie lorsqu'ils sont en
âge préscolaire. Les domestiques, ne transmettrons que
l'éducation qu'elles ont reçue et non celle que les parents
souhaiteraient pour leurs enfants. La femme rentre toute fatiguée, se
dirige dans la cuisine où elle s'occupe des travaux ménagers en
premier et ce n'est qu'après qu'elle prend soin des enfants qui parfois
s'endorment si leur père ne leur tient pas compagnie en attendant leur
mère. Les comportements observés aujourd'hui chez certains
enfants ne sont que des conséquences directes du manque de soins dont
ils ont besoin de leur mère. Ne voyons pas tout de suite un
dysfonctionnement de la structure familiale parce que la femme n'est pas trop
présente. Il ne faudrait pas aussi voir un manque d'envie des femmes
à s'occuper personnellement de leurs enfants mais plutôt l'absence
de politique pouvant leur faciliter la tâche. La belle preuve est que les
femmes ne sont pas prêtes à abandonner leur désir d'enfants
ou à négliger leur rôle de mère même si elles
valorisent leur statut de travailleuse et désirent maintenir leur
participation au marché du travail. Parfois certaines femmes qui n'ont
pas atteint un niveau intellectuel élevé avant d'avoir des
enfants ont du mal à continuer leurs études pour pouvoir
bénéficier des postes de responsabilité. Elles ne font que
remettre à demain lorsque les opportunités de poursuivre les
études leur sont offertes parce qu'elles ont encore des jeunes enfants
et même en âge préscolaire. Seules celles qui se donnent le
courage arrive à prendre des décisions de laisser l'enfant un
temps donné afin d'étudier. En effet il n'y a que l'employeur qui
puisse aider la femme salariée à consacrer plus de temps à
ses enfants. Dans les pays occidentaux comme le canada ou Francine Descarries
et Christine Corbeil (1994), ont fait des recherches sur les femmes
salariées, ces dernières ayant la charge de petits enfants
travaillent à temps partiel pour pouvoir s'occuper de l'éducation
de leurs enfants étant donné que lorsque l'éducation est
mal orientée dès le bas âge, l'enfant ne développe
que des vices auxquels toute la société fait face. Loin de
bénéficier d'un temps partiel, les salariées
béninoises en général et celles de la ville de Cotonou en
particulier peuvent bénéficier d'un certain nombre d'avantage
leur facilitant une bonne conciliation de travail et l'éducation des
enfants mais pas au point de leur attribuer des postes inférieurs dans
les services publics comme privés. Dans la sphère domestique
pendant longtemps, il a été noté que le mari était
le seul au sein de la famille qui travaillait à l'extérieur de la
maison. Il avait pour rôle essentiel d'assurer l'existence de la famille.
Les changements sociaux telle que l'indépendance économique des
femmes, l'existence des femmes chefs de ménage renversent dans une
certaine mesure cette tendance suivant laquelle seul l'homme assure l'existence
de la famille au point où l'homme attend une contribution de la femme
pour la survie du ménage et surtout dans les dépenses
liées aux enfants.
Le salaire de la femme n'est plus un salaire d'appoint mais
un salaire complémentaire à celui de l'homme dans certains foyers
et le seul salaire qui assure le fonctionnement du ménage dans d'autres
cas. Bien qu'il y ait ce changement, l'homme résiste aux implications
telles que sa participation aux tâches domestiques. La femme est toujours
seule face aux tâches domestiques, elle est parfois aidée par la
domestique et ses enfants s'ils sont grands. En dépit des opinions et
des motivations des femmes salariées, lorsque l'on examine plus
spécifiquement leurs pratiques, il nous faut constater que les
aménagements observés camouflent une certaine asymétrie
entre le travail salarié et la famille et surtout l'éducation des
enfants: les exigences journalières de la sphère professionnelle
paraissent avoir davantage d'impact sur l'organisation de la vie familiale que
l'inverse. Ce serait donc la famille qui se plie davantage aux exigences du
travail que la structure de l'emploi qui s'adapte aux besoins ou aux situations
familiales. Et même si, en dernière instance, la plupart des
femmes salariées disent toujours finir par accorder la priorité
à la famille, dans leur pratique quotidienne, ce sont les exigences de
leur travail qui déterminent la répartition de leur temps et de
leur énergie entre les deux sphères. Lorsque la femme est au
travail à l'extérieur de la maison, dans nombre de ménage,
la domestique s'occupe des enfants et même du mari s'il est
présent. Cette domestique ne constitue qu'un élément
externe qui vient s'ajouter à la famille et peut être à la
base de malentendus. Elle peut prendre la place de femme en tant que
maîtresse de maison n'assurant temporairement que le rôle de la
femme titulaire. La femme salariée doit savoir faire son choix si elle
veut être mère, elle doit prendre ses dispositions,
développée des stratégies appropriées pour pouvoir
concilier convenablement le travail salarié et la vie familiale avec une
attention particulière sur l'éducation des enfants. La domestique
doit être vue comme une aide et non comme une substitue à soi.
Cependant il faut donner à chaque activité son importance et un
moment précis, ceci pour éviter des désagréments
familiaux comme la fait remarquer Ségalen (2005), en disant
« qu'une mauvaise ménagère conduit la maisonnée
à la ruine ». Le travail salarié de la femme n'est pas
sans conséquence sur l'éducation des enfants étant
donné qu'elle sort de la maison le matin et ne revient que le soir dans
la majorité des cas. Parfois, comme son mari, elle ne voit pas ses
enfants le matin et peut être ils s'endorment avant son retour. A
l'absence des femmes de maison, les enfants s'accrochent à la
télévision avec les nombreux feuilletons qui ne leur donne pas
toujours de bonnes leçons de conduite ; aussi
dénonçons-nous le manque d'enseignement sur la santé de
reproduction qui fait que les enfants se lancent dans des aventures de risque
avec leurs semblables de sexe opposé entraînant les plus jeunes
dans les mêmes erreurs. Les impacts du travail salarié de la femme
ne sont pas que négatifs sur l'éducation des enfants,
« les femmes qui occupent un emploi représentent un
modèle à suivre pour leurs enfants qui les considèrent
comme des femmes compétentes. Il semblerait que non seulement leurs
enfants filles sont souvent douées, indépendantes et sur d'elles
mêmes, mais aussi que leurs enfants garçons endossent tout comme
les filles moins de stéréotypes fondés sur les sexes et
sont plus égalitaires » (Adékambi Edwige,
2003).
La présence de la femme sur le marché de
l'emploi n'empêche pas les enfants d'avoir une bonne éducation
puisqu'elle développe des stratégies pour y arriver. La femme
travaille pour garantir un bon fonctionnement de son foyer et surtout voir ses
enfants épanouis.
VERIFICATION DES HYPOTHESES
Hypothèse 1 : Les femmes
salariées ont des difficultés à concilier leur profession
et leur rôle de mère-éducatrice.
Cette première hypothèse est confirmée au
regard de ce tout ce qui précède. En effet, les femmes
fonctionnaires consacrent un peu plus de temps au travail qu'à leurs
enfants même s'il ne se dessine pas un patron de corrélation
entre le nombre d'heures consacré au travail salarié et celui
consacré à l'éducation des enfants. Elles ne disposent pas
d'assez de temps pour le soin des enfants dans la journée si ce n'est
d'autres personnes qui le font à leur place. Ceci ne veut pas dire
qu'elles ne sont pas soucieuses de l'éducation de leurs enfants ;
elles s'emploient à transmettre les valeurs reçues aux enfants en
assurant l'équilibre familial et en amenant les enfants à aimer
le travail bien fait. Elles n'attendent pas forcément le père
pour exiger de l'ordre dans la maison même si elles ne punissent pas
beaucoup.
Hypothèse 2 : Ce double
rôle engendre des implications positives et négatives notamment
une insuffisance de suivi dans l'éducation des enfants.
Cette seconde hypothèse est aussi confirmée. Les
femmes fonctionnaires participent financièrement aux besoins du
ménage et surtout à l'entretien des enfants. Plus ces femmes sont
seules à élever les enfants, leur apport financier est important.
Mais le travail salarié des femmes n'est pas sans implications
négatives sur l'éducation des enfants. Pour une insuffisance de
suivi dans leur éducation, les enfants s'adonnent à des pratiques
déviantes. Ils profitent de l'absence des parents et surtout de la
mère pour exprimer leur désir refoulé.
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