Problématique de la pacification des communautés du Nord Kivu à travers la justice militaire( Télécharger le fichier original )par Etienne MBUNSU BINDU - Licence 2010 |
PROBLEMATIQUE DE LA PACIFICATION DES COMMUNAUTES AU NORD KIVUI. LES CONFLITS AU NORD KIVUI.1. Contexte justificatifDes décennies durant, la République Démocratique du Congo a été le théâtre des conflits cruels et dévastateurs qui n'ont épargné personne. Des femmes ont été violées, mutilées, torturées, assassinées... des enfants ont été rendus orphelins suite à la cruauté de la guerre, certains d'entre eux ont été enrôlés de force dans les forces et groupes armés, d'autres ont été utilisés comme esclaves des membres des groupes armés avec les filles qui ont été esclaves sexuelles, d'autres encore ont payé le prix le plus fort de la guerre en perdant leur vie. Des hommes ont été la cible des attaques, les ressources naturelles ont été au centre des convoitises et le territoire de la RDC a été envié au point où certaines mauvaises langues ont prétendu que la conférence de Berlin de 1885 avait mal divisé l'Afrique en réservant des vastes étendues de terre à la RDC. Des décennies durant, la République Démocratique du Congo a connu un régime politique sui generis avec un système paternaliste qui a fait suite à une colonisation belge dont les conséquences ne cessent de se manifester jusqu'alors. Le régime politique qui devrait donner de l'impulsion au développement intégral du pays s'est plutôt concentré sur les efforts de consolidation d'un pouvoir dictatorial fondé non sur une constitution adoptée par le peuple, mais plutôt sur les idéo du MPR, Parti-Etat. Ainsi que disent les savants congolais au nombre desquels le professeur Joseph WASSO, la République Démocratique du Congo a connu tout au long de son histoire post coloniale un pouvoir unique en son genre, aux caractéristiques introuvables dans d'autres pays : il y avait d'un côté l'Etat, de l'autre le parti. Le président du parti était de droit président de la République. La liberté politique constituait un rêve et celui qui la réclamait était tel un homme prix d'illusions au point où le MPR était le seul et unique parti politique au monde où l'adhésion n'était pas volontaire ; il suffisait de naître congolais pour devenir membre : d'où le slogan Olinga olinga te, oza na kati.1(*) Qu'est ce que le peuple pouvait attendre d'un tel régime ? Pratiquement l'insouciance des problèmes majeurs qui se posent à la base. Des petits problèmes ont été négligés qu'en fin de compte ils ont connu des ramifications inestimées jusqu'à conduire à la chute du pouvoir du maréchal président Joseph Désiré MOBUTU, appelé MOBUTU SESE SEKO KUKU NGWENDO WA ZABANGA. C'est alors que le peuple constate qu'il n'y a point de pouvoir éternel. Même celui qui tire sa légitimité dans son parti politique et qui fait du monopartisme le système de gestion des ambitions peut perdre le pouvoir. A la tête d'une coalition de trois pays, l'Ouganda, le Rwanda et le Burundi, Laurent Désiré KABILA pris le pouvoir de Kinshasa le 17 mai 1997 avec une participation active des jeunes congolais. Fort malheureusement, dès le lendemain de sa prise de pouvoir, l'Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération se préoccupa des problèmes autres que ceux qui ont rongé les communautés de base : la priorité n'était pas de résoudre les problèmes locaux, mais plutôt de prendre en charge les problèmes nationaux et internationaux. Ainsi donc, les alliés d'hier qui ont pris le pouvoir de Kinshasa avec la bénédiction des nombreux pays africains se sont divisés. A ce sujet, Rigobert MINANI2(*) dit qu'après leur prise de pouvoir à Kinshasa, le 17 mai 1997, les pays engagés, en octobre 1996, dans la guerre en RDC n'étaient pas parvenus à s'accorder sur les intérêts des uns et des autres. Ils recommenceront une nouvelle guerre le 2 août 1998, les uns contre les autres. Leur coalition éclatera en deux blocs. D'une part il y a le trio Rwanda, Ouganda et Burundi ; d'autre part l'Angola, le Zimbabwe et la Namibie. Les raisons officielles qui avaient donné naissance au conflit iront de mutation en mutation et influenceront d'autres conflits dans la sous région. C'est même avec raison que certains observateurs sur la scène politique africaine ont dit que la guerre en RDC était la première guerre mondiale Africaine. Il sied alors de constater que certes l'AFDL avait des bonnes intentions pour le devenir de la République, mais elle n'a cependant pas eu le temps de les réaliser que nombreux problèmes locaux n'ont pas connu même un début de solution. Divisé par les groupes armés et les rebellions, le pays ne pouvait plus, entre 1998 et 2003, prendre des initiatives de nature à résoudre les problèmes locaux dans tel milieu précis. Des raisons sont légion mais l'on sait que la préoccupation d'un rebelle n'est pas d'aider les autochtones à résoudre leurs problèmes mais plutôt de voir comment renforcer son pouvoir sur eux et par-dessus tout comme soutenir les fronts sur lesquels il est engagé. D'où, la guerre n'est jamais une solution aux problèmes car elle fait naître d'autres que l'on ne pouvait parfois pas imaginer. A la suite des négociations politiques en Afrique du Sud, les différents belligérants ont consenti de faire la paix. Ce qui ouvrit la voie à une transition politique caractérisée par un partage équitable et équilibré du pouvoir avec comme finalité l'organisation des élections libres, démocratiques et transparentes dans l'optique de régler la question de crise de légitimité qui caractérisait le pouvoir congolais depuis l'indépendance en 1960.3(*) La priorité étant donc de régler la question de légitimité du pouvoir national, l'accent particulier n'a pas été mis sur les vrais problèmes de la population, ceux là qui font du Kivu et plus particulièrement du Nord Kivu une terre fertile pour des conflits armés. Ce qui n'a pas manqué d'entraîner des conséquences néfastes à la population qui avait pourtant massivement participé au processus électoral car elle pensait que les élections constitueront une panacée, une voie de sortie définitive de ces différents problèmes. C'est donc après les élections que l'on voit prendre finalement corps le Congrès National pour la Défense du Peuple, le CNDP du Général déchu Laurent NKUNDA. Son mouvement qui avait pris naissance bien avant les élections s'est alors agrandi et a pris du terrain qu'il a finalement constitué un problème de sécurité nationale pour qu'on s'y intéresse. D'autre part, des groupes armés sont nés tel les Maï Maï LA FONTAINE ; Maï Maï MONGOL, le PARECO FAP... Chacun de ces groupes armés, à commencer par le CNDP jusqu'au tout dernier, se réclamant prioritairement défendre une communauté bien déterminée avant de présenter toutes autres revendications. Parmi les initiatives gouvernementales qui ont été prises pour résoudre ce problème, nous trouvons la Conférence sur la paix, la sécurité et le développement dans les provinces du Nord et du Sud Kivu qui s'est tenue dans les installations de l'Université Libre des Pays des Grands Lacs à Goma en janvier 2008. De cette conférence naîtra le programme AMANI qui a fait suite à l'acte d'engagement qui a été pris par les différents belligérants à la conférence de Goma. Parmi les solutions envisagées, il a été question de l'intégration des groupes armés dans les Forces Armées de la République Démocratique du Congo. Certes qu'il s'agit là d'une des meilleures solutions à cet épineux problème, mais il semble que c'est faire exactement ce qui aurait dû être fait en dernier : il faut tout d'abord analyser les causes des conflits avant de réfléchir sur les réponses à y apporter. Nous estimons modestement que c'est l'une des raisons qui font qu'après la Conférence de Goma qui a eu lieu en janvier 2008, le CNDP et les autres groupes armés ont continué les combats se rejetant la responsabilité d'avoir attaqué en premier et par conséquent d'avoir violé l'acte d'engagement de Goma. * 1 WASSO MISONA Joseph, Cours de Droit Constitutionnel Congolais, Deuxième graduat, Droit, Université Libre des Pays des Grands Lacs, 2007-2008, p.67, Inédit. * 2 MINANI BIHUZO Rigobert s.j, Du pacte de stabilité de Naïrobi à l'acte d'engagement de Goma, Enjeux et défis du processus de paix en RDC, Kinshasa, CEPAS/RODHECIC, 2008, pp.359. * 3 WALLINE JC, Chronique d'une négociation internationale, Bruxelles-Paris, Ed Cedaf-L'Harmattan, 2002. |
|