II. PRESENTATION DU SYSTEME DE PROTECTION SOCIALE EN
TUNISIE
1. L'assurance sociale
2. L'assistance sociale
3. Les transferts sociaux
4. Impacts de la protection sociale sur le développement
économique et social
III. CONTRIBUTION DE LA PROTECTION SOCIALE A LA
REALISATION DES OBJECTIFS DU MILLENAIRE DU DEVELOPPEMENT (OMD)
1. Présentation des objectifs du millénaire de
développement (OMD)
2. Protection sociale et recul de la pauvreté
2.1 Mesure de la pauvreté
2.2. Etat des lieux
2.3. Les effets des programmes de protection sociale sur la
pauvreté
3. La protection sociale et la lutte contre
l'analphabétisme
4. La protection sociale et l'égalité des sexes
5. La protection sociale et la mortalité des enfants en
bas âge
6. La protection sociale et la santé maternelle
7. La protection sociale et la lutte contre le SIDA et les autres
maladies graves
8. La protection sociale et l'environnement durable
9. La protection sociale et le développement
partagé
10. Les progrès accomplis dans la réalisation des
OMD en Tunisie
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES
Abréviations et acronymes
Liste des tableaux
Liste des graphiques
INTRODUCTION GENERALE
La protection sociale englobe un ensemble de mesures prises par
les pouvoirs publics d'un pays donné et les organismes privés
de la société civile afin de faire face aux différents
risques de maladies, de décès, de vieillissement et
d'invalidité ou encore du chômage, de la
vulnérabilité et de la pauvreté temporaire ou chronique
que la population pourrait en souffrir à un moment donné.
Les différentes mesures en question cherchent à
fournir à la population cible les moyens nécessaires pour pouvoir
sortir du fléau de la misère, de la pauvreté extrême
et des conditions de vie inhumaines et de pouvoir participer de nouveau dans la
sphère économique et sociale et tirer pleinement profit.
La protection sociale se décompose en trois grandes
catégories d'instruments à savoir l'assurance sociale,
l'assistance sociale et les transferts sociaux alors que l'aide internationale
peut aussi s'interférer.
L'assurance sociale s'occupe de la gestion des risques de
maladies, de vieillesse, de décès, d'invalidité et
éventuellement du chômage moyennant de la contribution
financière des salariés et de leurs employeurs en vue d'obtenir
plus tard des prestations.
La gestion de ces risques contributifs incombe le plus souvent
à des caisses sociales autonomes comme le cas de la Tunisie.
L'assistance sociale est constituée par l'ensemble des
programmes crées par l'Etat et la société civile en
matière de soutien de l'emploi, de création de nouvelles sources
de revenus et l'amélioration des conditions de vie en vue de
réduire la pauvreté et d'atténuer les
inégalités entre les régions du pays.
Les transferts sociaux constituent une part importante du budget
de l'Etat consacrée aux secteurs vitaux de l'économie nationale
comme la santé, l'éducation et la formation professionnelle.
Le filet de la protection ne vise pas uniquement la
pauvreté au sens strict du terme à savoir sa dimension
monétaire qui consiste à prendre en compte seulement les
personnes qui vivent en dessous d'un seuil que ce soit absolu ou relatif de
pauvreté qui fait référence à l'insuffisance des
ressources financières nécessaires pour pouvoir subvenir aux
besoins essentiels de la vie humaine.
Cette définition de la pauvreté dit classique et
primaire ne tient pas compte d'autres besoins devenus au fil des années
aussi essentiels que nécessaires vu les changements intervenus quant
aux droits fondamentaux du bien être social en général et
des droits de l'homme en particulier qui englobent entre autres l'emploi
permanent, l'éducation de qualité, le logement, l'environnement
sain, le droit de participation dans la vie politique, économique et
sociale, etc.
Il est alors reconnu que la pauvreté est plutôt
pluridimensionnel et complexe dépassant la notion de revenu
décessent et nécessaire au maintien juste en vie (revenu de
subsistance).
Selon le conseil européen de décembre 1984
(cité par LOISY C., 2000), `' sont considérés comme
pauvres les personnes dont les ressources (matérielles, culturelles et
sociales) sont si faibles qu'elles sont exclues des modes de vie minimaux
acceptables dans la société `'.
D'autre part pour A. Sen, `' la pauvreté n'est pas qu'une
question du revenu. C'est aussi être exclu des grandes décisions
qui touchent à sa propre vie et ne plus être
représenté auprès des instances politiques locales ou
nationales `'(cité par LOISY C., 2000).
Certes la lutte contre la pauvreté et les
inégalités dépend en large mesure des moyens tant
matériels qu'humains mis en place et des circonstances
économiques, sociales et même historiques de chaque pays mais les
instances internationales onusiennes et autres ainsi que les pays
développés sont aussi impliqués dans ce processus de
grande envergure.
En effet, certains pays très pauvres et avec peu de
ressources ne peuvent pas sortir du cercle vicieux de la pauvreté en se
basant sur ses propres moyens alors que d'autres pays de revenus
intermédiaires sont piégés par un endettement excessif
avec un service très contraignant pour un développement durable
et soutenue demandent l'allègement ou le rééchelonnement
de la dette en cours et d'établir des conditions plus avantageuses
quant à l'octroi de nouveaux prêts internationaux.
Alors que la mondialisation fait toujours ses dégâts
comme une tempête tropicale ou un tsunami dans les pays les plus
démunis de la planète et les crises financières et
structurelles se succèdent rendant le développement humain une
tache difficile.
Et c'est dans ce sens que la communauté internationale
toute entière a adopté en septembre 2000 en une unanimité
sans précédent les huit Objectifs du Millénaire de
Développement (OMD) engageant tous les pays du monde de réaliser
les différents objectifs à l'horizon de 2015 dans un climat
d'entraide et de partenariat.
Peu après, le consensus de Monterrey en 2002 a
réaffirmé cet engagement en reconnaissant qu'il serait
nécessaire d'augmenter davantage l'aide publique de développement
au profit des pays pauvres et de respecter l'objectif établi auparavant
de 0.7 % du PNB à l'APD.
La Tunisie depuis son indépendance en 1956 ne cesse de
redoubler les efforts malgré ses ressources naturelles modestes en
matière du développement économique et social misant
dès les premières années de la fin de l'ère
coloniale sur les ressources humaine.
Les résultats enregistrés témoignent
aujourd'hui sans équivoque de la réussite de cette
stratégie à travers les différents indicateurs
socioéconomiques comme la réduction à un niveau
très bas de la pauvreté, une croissance soutenue du PIB par
tête, une élévation du niveau de vie de la population, un
système de protection sociale viable et performant, etc.
Néanmoins et en dépit de certaines
difficultés de parcours et l'apparition de quelques lacunes ici et
là, le pays continue inlassablement à réaliser et à
concrétiser la plupart des objectifs du millénaire de
développement avant l'horizon de 2015.
Le présent rapport étudie l'expérience
tunisienne en matière de protection sociale et ses effets sur la
réalisation des objectifs du millénaire de développement
humain en analysant les différents programmes mis en place et les
mesures prises par le gouvernement et les structures publiques ou
privées qui s'y rattachent et dont le but final est de promouvoir les
conditions de vie de la population et d'élever le bien être social
de façon à réduire au strict minimum les
inégalités et d'éliminer définitivement la
pauvreté et l'exclusion même au sens large du terme et ce dans un
avenir très proche.
Il y a en effet, comme le démontre certains auteurs et
théoriciens en la matière des liens tangibles et réels
entre les prestations fournies par le système de protection sociale
d'une part et la réduction de la pauvreté, la diminution du taux
de chômage, l'amélioration des conditions de vie,
l'émancipation et l'autonomisation de la femme et sa participation dans
la vie active, etc.
Il va sans dire que les effets des programmes et mesures mis en
oeuvre dans le cadre de la protection sociale se manifeste à travers
les indicateurs socioéconomiques comme le taux de pauvreté, le
taux de chômage, l'espérance de vie à la naissance, la
dépense par habitant, le revenu par habitant, la mortalité
infantile, l'existence de certaines maladies épidémique come le
virus VIH/Sida, le paludisme et la tuberculose, l'amélioration de la
santé maternelle, le taux de scolarisation primaire des enfants et le
degré de durabilité de l'environnement.
Le présent rapport comporte trois parties dont la
première sera consacrée à une batterie d'indicateurs
socioéconomique et démographique mesurant l'état des lieux
du pays, la deuxième partie examinera le contenu du système de
protection tunisien mis en place et ses différentes composantes et
enfin la troisième partie qui s'attarde à démontrer et
dévoiler les liens entre le système en question et la
réalisation des objectifs du millénaire de
développement.
I. EVOLUTION DES INDICATEURS DEMOGRAPHIQUES ET
SOCIOECONOMIQUES DE LA TUNISIE
C'est à travers les indicateurs statistiques
socioéconomiques et démographiques que publient les services de
statistique et des études relevant des différents
ministères et organismes et surtout l'Institut National de la
Statistique (INS) l'organisme spécialisé en la matière
dans la pays que nous pouvons mesurer et suivre l'état de
réalisation des programmes mis en place et d'en apercevoir le
degré d'accomplissements des objectifs assignés.
Ces indicateurs émanent de plusieurs sources telles que
les rapports d'activité, les rapports d'études, les annuaires
statistiques, les budgets, les résultats d'enquêtes, les sites
d'Internet ou encore les publications internationales et les données des
instances internationales comme celles de la Banque Mondiale (BM),
l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) et le Bureau International de
Travail (BIT).
Ils se rapportent aux activités propres des
différentes structures ou le cas échéant à une
échelle nationale comme le cas de l'INS pour les statistiques
démographiques, les enquêtes spécialisées sur la
consommation des ménages, sur l'emploi et la population et les
recensements de la population et de l'habitat.
Alors, ils reflètent en toute vraisemblance une
causalité entre les actions entreprises en matière de
développement économique et social et les résultats
réalisés. Ces sont des paramètres qui nous renseignent sur
l'état de développement du pays et son évolution.
Si les indicateurs de performance dépassent certains
seuils arrêtés par les instances internationales en montrant ainsi
que les objectifs préconisés sont effectivement
réalisés dans la réalité, on pourrait alors
affirmer que la gouvernance a apporté ses fruits.
Nous présentons dans ce qui suit une série non
exhaustive des indicateurs socioéconomiques et démographiques les
plus pertinents, suivis d'une analyse de certains indices qui se rapportent
étroitement avec les Objectifs du Millénaire de
Développement (OMD).
1. Indicateurs démographiques
Tableau 1 : Indicateurs démographiques
indicateurs
|
1990
|
2000
|
2005
|
2006
|
2007
|
2008
|
1
|
Population totale en milliers
|
8154
|
9563
|
10029
|
10128
|
10225
|
10326
|
2
|
Population 65 ans et plus (en % de la population totale)
|
4,58
|
6 ,27
|
6,68
|
6,70
|
6,71
|
6,71
|
3
|
Population (15-64 ans)(en % de la population totale)
|
57,31
|
63,66
|
67,67
|
68,37
|
69,00
|
69,57
|
4
|
Population (0-14 ans)(en % de la population totale)
|
38,09
|
30,06
|
25,65
|
24,93
|
24,28
|
23,71
|
5
|
Taux brut de natalité pour 1000 habitants
|
25,2
|
17,1
|
17,1
|
17,1
|
17,4
|
17,7
|
6
|
Taux brut de mortalité pour 1000 habitants
|
5,6
|
5,6
|
5,9
|
5,6
|
5,5
|
5,8
|
7
|
Taux d'accroissement naturel de la population en %
|
1,96
|
1,14
|
1,12
|
1,15
|
1,18
|
1,19
|
8
|
Indice de fécondité (nombre de naissances par
femme)
|
3,38
|
2,08
|
2,04
|
2,03
|
2,04
|
2,06
|
9
|
Taux de mortalité infantile pour 1000 naissances
|
37,3
|
23,8
|
20,3
|
19,1
|
18,7
|
18,4
|
10
|
Part de la population masculine en %
|
50,6
|
50,4
|
50,1
|
50,0
|
50,0
|
50,0
|
11
|
Part de la population urbaine en %
|
59,6
|
62,6
|
65,2
|
65,4
|
65,6
|
65,8
|
12
|
Esperance de vie à la naissance en années (ensemble
population)
|
70,3
|
72,6
|
73,5
|
73,9
|
74,2
|
74,3
|
13
|
Esperance de vie à la naissance en années
(hommes)
|
68,6
|
70,6
|
71,6
|
71,9
|
72,3
|
72,4
|
14
|
Esperance de vie à la naissance en années
(femmes)
|
72,1
|
74,7
|
75,5
|
76,0
|
76,2
|
76,3
|
15
|
Taux de mortalité pour 1000 naissances de moins de 5
ans
|
49,6
|
27,3
|
23,1
|
22,5
|
21,7
|
21,1
|
Source : Institut National de La Statistique
|