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Analyse de la logique et de la portée de l'intervention de l'Agence Nationale de Conseil Agricole et Rural (ANCAR) auprès des organisations de producteurs dans la communauté rurale de Gandon:l'exemple de l'ANCAR de Saint-Louis en partenariat avec le foyer de Sanar

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par Mamadou DIAKHO
Université Gaston Berger de Saint-Louis Sénégal - Master 2 2009
  

Disponible en mode multipage

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UNIVERSITÉ GASTON BERGER DE SAINT-LOUIS

********************************

UFR DES LETTRES ET SCIENCES HUMAINES

**********************

SECTION DE SOCIOLOGIE

Mémoire de master II
Parcours Développement

THEME : Politiques agricoles et Organisations de Producteurs

Analyse de la logique et de la portée de l'intervention de l'Agence Nationale de Conseil Agricole et Rural (ANCAR) auprès des Organisations de Producteurs dans la communauté rurale de Gandon : l'exemple de l'ANCAR de Saint-Louis en partenariat avec le Foyer de Sanar

Présenté par : Mamadou DIAKHO

Sous la direction de : Pr. LALEYE

Pr. SANE

Dr. NDIAYE

Année académique 2009-2010

DEDICACES

Ce travail est dédié à la mémoire de ma Maman adorée Diénéba KOÏTA. Je sais que vous êtes déjà fière de votre unique fils,

J'aurai tant aimé que vous soyez encore à mes côtés,

Mais le seigneur en a voulu autrement,

Je ne cesserai jamais de prier pour vous,

Car c'est ce que vous avez toujours fait pour moiQue la terre de Waoundé vous soit légère Amen

Je le dédie également à mes parents, mon père Khalilou Diakho et ma mère adoptive khoumba Poulo Diakho : que ce modeste travail soit à la hauteur de tant d'efforts et de sacrifices consentis pour mon éducation.

REMERCIEMENTS

Nos remerciements vont à l'endroit de mes oncles particulièrement à ceux qui m'ont toujours encouragé dans mes études aussi bien dans les moments paisibles que difficiles. Je veux nommer Taliby Koïta, Abdoulaye Koïta et Khalifa Koïta.

Nous remercions également :

Nous remercions profondément tous les professeurs de la section de sociologie, particulièrement ceux du parcours Développement dont on ne peut taire ici les noms : nous pensons au professeur LALEYE, au professeur SANE et au docteur NDIAYE pour la grande qualité des enseignements que nous avons reçus.

Mention spéciale au professeur SANE pour son support et la grande qualité de son encadrement;

Nous témoignons notre gratitude au professeur Sidy Mohamed Seck pour sa disponibilité et ses remarques pertinentes.

Nos soeurs, Ndèye Samba, Ndèye Awa Sambakhe, Khady Cissé, Astou Khallou Tabara Khallou, Ada, Claro et Eve pour m'avoir tant soutenu

Nos frères : Mamadou Sadio, Sidy Kébé, Mamadou Diongue, Kissima Issa, Mohamed Tandjigora, Bobo Khallou, Bakary Fodé et Lassana Fodé

M. Mamadou Fadé, ARD, Chef de l'antenne départementale de Bakel pour ses conseils

Mes voisins de chambre Abdoulaye Ndiaye et Souleymane Sidibé pour leur tolérance et leur convivialité

Aux frères et soeurs de l'Association Soninkara de l'UGB : Ibrahima Diallo, Dieydi Kanouté, Abdoulaye Cissé, Mahamadou Dramé Mamadou Farota, Sikhou Sow, Mamadou Camara, Yamar Mbaye pour leurs conseils et leurs encouragements

Les amies d'enfance au village : Le Grand, Gerrard, Guidé, Bouna Sylla, Bouna Diomo, Djégui, Issa Manda, Oumar Salou, LT, Life, Kaka, Boulaye Lémé, Issa Kaba

Les agents et membres des organisations étudiées pour leur collaboration active durant la collecte de données : ANCAR, Foyer de Sanar

Les collègues et amis pour leurs remarques pertinentes tout au long de la rédaction, particulièrement : Yakhouba Samba, Madame Ndiaye, Mame Awa, Sylvie, Luci, Aly, Salma et Mayna

SOMMAIRE

INTRODUCTION~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~ 6

PREMIERE PARTIE : Contextualisation sociohistorique et cadre théorique 9

Chapitre I : Historique de la politique de développement agricole du Sénégal 10

Chapitre II : Cadre Théorique............................................................. 33

DEUXIEME PARTIE : Problématique et cadre méthodologique 53

Chapitre III : Problématique.......................................................................53

Chapitre IV : Cadre méthodologique....... ................................. ................64

TROISIEME PARTIE : Présentation des résultats de la pré-enquête .73

Chapitre V : Historique du Foyer de

Sanar............................... .................74

Chapitre VI - Les activités socioéconomiques du Foyer de Sanar....................78 Chapitre VII- Les obstacles à l'autopromotion paysanne et au développement..81 Chapitre VIII- La relation partenariale du Foyer de Sanar avec l'ANCAR......86

Chapitre IX À Le partenariat du Foyer avec l'ANCAR.......... ..................... 94

Chapitre X : La portée de l'intervention de l'ANCAR au niveau du Foyer........99
CONCLUSION..........................................................................................109

BIBLIOGRAPHIE......................................................................................113
ANNEXES...............................................................................................117

Listes des figures, tableaux et schéma

Liste des figures

Figure 1 : Localisation du cadre spécifique d'étude............................................20 Figure2 : Histogramme de corrélation entre le genre et les
spéculations................................................................................................78

Figure 3 : Fréquences de l'intervention et type d'appui de l'ANCAR auprès du Foyer de Sanar 101
Figure 4: La perception de la portée de l'intervention de l'ANCAR par les

producteurs 107

.

Liste des tableaux

Tableau 1 : Les spéculations dans la communauté rurale de Gandon............................30

Tableau 2 : Cultures hivernales et productions dans la CR de Gandon en 2007-2008 ........31

Tableau 3 : Personnes interrogées par entretiens informel interrogés............................66

Tableau 4: Répartition des effectifs des deux structures...........................................68
Tableau 5 : Répartition des individus interrogés....................................................68

Tableau 6 : Corrélation entre l'âge, le sexe et la situation matrimoniale des enquêtés.........76 Tableau 7 : Les différentes spéculations cultivées par les producteurs selon le sexe...........78 Tableau 8 : Modalités de cotisation des membres...................................................81

Tableau 9 : Niveau d'instruction des membres du Foyer de Sanar...............................85

Tableau 10 : Capacité des producteurs à formuler une demande d'appui à l'ANCAR........96 Tableau 11 : Intervention de l'ANCAR auprès du Foyer de Sanar..............................101 Tableau 12 : Appréciation de la portée de l'intervention de l'ANCAR par les producteurs.106

Liste des Schémas

Schéma 1: Rôles des organisations de producteurs................................................37

Schéma 2 : schématisation de l'évolution de la gestion de l'action dans les projets ..........51

Schéma 3 : Construction du modèle d'analyse......................................................63

Schema 4: Conception d'un programme CAR~~~~~~~~~~~~~~~~~~.90

SIGLES ET ABREVIATIONS

AG : Assemblée générale

ANCAR : Agence Nationale de Conseil Agricole et Rural CA : Conseil d'Administration

CAR : Conseil Agricole et Rural

CLCOP : Cadre Local de Concertation des Organisations de Producteurs CNCA : Caisse Nationale de Crédit Agricole

CNCAS : Caisse Nationale de Crédit Agricole du Sénégal

CNCR : Comité National de Concertation et de coopération des Ruraux CR : Communauté Rurale

CRAD : Centres Régionaux pour l'Assistance au Développement DOS : Document d'Orientation Stratégique

DSRP : Documents de Stratégie de Réduction de la Pauvreté

DSODR : Document de Stratégie Opérationnelle du Développement Rural

GIE : Groupements d'Intérêt Economique

ISRA : Institut Sénégalaise de Recherche Agronomique

LPDIA : Lettre Politique du Développement Institutionnel Agricole LPDR : Lettre de Politique de Développement Rural ou Décentralisé NPA : Nouvelle Politique Agricole

OCA : Office de Commercialisation Agricole

ONCAD : Office National de Coopération et d'Assistance au Développement

ONG : Organisation Non Gouvernementale

OPF : Organisations Fédératives Paysannes

OP : Organisations de Producteurs

PNDA : Plan National de Développement Agricole PNDE : Plan National de Développement Economique PAS : Politiques d'Ajustement Structurel

PASA ; Programme d'Ajustement Structurel du Secteur Agricole PISA : Programme d'investissement du secteur agricole

PSAOP : Programme des Services Agricoles et d'appui aux Organisations de Producteurs SAC : Stratégie de Croissance Accélérée

SAED : Société d'Aménagement et d'Exploitation des Terres du Delta

SDR : Société de Développement Rural

SIP : Sociétés Indigènes de Prévoyance

SODEFITEX : Société de Développement des Fibres Textiles SODEVA : Société de Développement et de Vulgarisation Agricole SOMIVAC : Société de Mise en Valeur de la Casamance

SRDR : Société Régionale de Développement Rural

STN : Société des Terres Neuves

UGB : Université Gaston Berger de Saint-Louis

UFR : Unité de Formation et de Recherche

INTRODUCTION

L'objet de ce travail de recherche est d'analyser la logique d'intervention des récentes structures étatiques telles que l'ANCAR, mises en place dans le cadre de l'accompagnement des producteurs agricoles. Il s'agit non seulement de déterminer si l'intervention de l'ANCAR s'inscrit dans une logique d'appui, ou bien elle se trouve, comme c'était le cas des anciens organismes, dans la logique d'encadrement, mais aussi d'apprécier la portée de cette intervention au niveau de Organisations de Producteurs (OP). Autrement dit, ce qui sous-tend ce travail, c'est de déterminer puis d'analyser les facteurs bloquant l'instauration de relations partenariales équilibrées et appropriées garantissant une implication réelle des OP dans la promotion du développement rural.

En effet, le Sénégal possède une riche expérience dans la vulgarisation et l'approche du développement agricole. Elle remonte jusqu'à la période coloniale, mais c'est avec les indépendances que le pays s'est inscrit dans unes vraie mise en oeuvre des différents politiques et programmes agricoles. Ce qui revient à dire qu'au Sénégal, la question de l'agriculture a sans doute toujours été une préoccupation dans la politique de l'État, c'est-àdire que ce dernier mise sur le secteur agricole pour bâtir son développement. C'est ainsi que de nombreuses structures étatiques ont été mises sur pied pour assurer l'encadrement des paysans. Mais la pédagogie des échecs nous enseigne que beaucoup d'efforts ont été consentis pour des résultats mitigés.

A la fin des années 70, l'échec des diverses politiques du pays, caractérisées non seulement par leurs coûts élevés, leur logique centralisée, populiste, techniciste et dirigiste, mais aussi par leurs visées productivistes, va favoriser le processus de désengagement de l'État et celui de la responsabilisation des producteurs. Dès lors, la formule de l'encadrement était remise en cause, et sous la pression des bailleurs de fonds, certaines pratiques gouvernementales comme la subvention en intrants, l'installation de plusieurs sociétés d'encadrement, le développement des coopératives agricoles étaient considérés comme des obstacles au développement.

En effet, avec la Nouvelle Politique Agricole (NPA) de 1984, des réformes furent adoptées au niveau de l'administration (la dissolution de l'Office National de Coopération et d'Assistance au Développement( ONCAD), et au niveau du monde rural (érection de certaines régions en zones à vocation agricole comme le bassin arachidier et la Vallée du fleuve Sénégal). Mais la nouvelle formule qui est adoptée dans cette ère de réforme administrative sous le sceau de la décentralisation, reste encore à l'état de définition des

projets de sociétés sans amélioration concrète de la situation de la grande masse. C'est justement pourquoi, le problème de recherche qui fonde ce travail est le fait que : les politiques de développement agricole, malgré les acquis, ont dans leur majorité produit des effets pervers. Le passage d'une logique interventionniste de l'État à une logique de désengagement n'a pas abouti à réformer structurellement la politique agricole. De méme la transition d'une logique d'encadrement vers une logique d'appui aux producteurs tarde aussi à montrer ses résultats. Néanmoins, certaines des sociétés d'Etat continuent toujours à manifester leur ancrage dans la logique d'appui.

Donc, en lieu et place des organismes étatiques qui intervenaient au niveau des organisations de producteurs par ce qu'on appelle la « logique d'encadrement », vont émerger d'autres types de structures qui interviennent non plus par la logique d'encadrement, mais plutôt par la « logique d'appui ». Autrement dit, les réalisations sont désormais plus axées sur la mise en place d'une nouvelle génération d'agence de développement que le jargon administratif actuel appel structures d'appui conseil qui se spécialisent plus dans le renforcement des capacités que dans la politique de partenariat avec les acteurs locaux. Lieu d'émergence d'une profession agricole organisée et de capitalisation d'une bonne dynamique associative, ces organismes de développement, mieux que ceux qui les avaient précédé, et à moindre coût se proposent de réaliser de grandes performances avec la participation effective des producteurs basés sur l'initiative de ces derniers.

Ce désengagement de l'État s'est donc accompagné d'une floraison de nouvelles politiques agricoles dont l'un des intéréts est le transfert aux producteurs de diverses fonctions exercées jusque là par l'État. C'est surtout le modèle de l'autopromotion où les producteurs affirment des pratiquent autonomes de développement par une maîtrise de leur propre environnement, que vont apparaître de nouvelles formes d'Organisations de Producteurs. Ainsi, vu la multiplicité des diverse types d'OP, une nouvelle structure étatique a été créée pour contourner les erreurs des anciennes sociétés d'encadrement du monde rural dans lequel les institutions et services publics, à partir de politiques productivistes et d'approches descentes, dictaient aux paysans les techniques qu'ils devaient appliquer pour atteindre les objectifs de production décidés par l'État.

En fait, la mise sur pied du Conseil Agricole et Rural (CAR) intervient dans le cadre d'approches variées dont le soubassement demeure la promotion d'une agriculture durable et diversifiée pour la sécurité alimentaire, la lutte contre la pauvreté et l'amélioration des conditions de vie des producteurs. Les besoins en appui des producteurs, ne pouvant plus être traités isolément selon les préoccupations des intervenants, il faut désormais une approche

globale qui place les producteurs au centre de décisions. L'approche CAR cherche surtout à intégrer dans sa démarche, le savoir et le savoir-faire des producteurs comme des éléments indispensables à la participation pleine et entière des populations. Ainsi, pour concilier les préoccupations actuelles du monde rural et les approches et stratégies des intervenants, le CAR se place au carrefour des activités rurales en amont et en aval de la production.

Le sociologue et en particulier celui du développement, dont l'objet d'étude se trouve être les changements induits par les opérations de transformation des milieux sociaux entreprises par les acteurs ou les institutions, doit analyser la contribution des intervenants dans la construction du développement local. En effet, l'intervention qui est de nos jours érigée en méthode standard dans la construction du développement économique, doit faire l'objet de recherche afin de déceler les promesses qu'elle véhicule et les effets pervers qu'elle peut engendrer. Ceci étant, l'objectif principal de cette étude est d'analyser les diverses actions accomplies par l'ANCAR au niveau des OP et la manière dont elles sont effectuées afin de déterminer la nature de la logique d'intervention de cette structure. En d'autres termes, il s'agit d'analyser la nature et le rôle de l'intervention de l'ANCAR dans le développement agricole des OP de la communauté rurale de Gandon. Cet objet sera analysé à partir d'une étude de terrain portant non seulement sur l'ANCAR de Saint-Louis mais aussi sur une Organisation de producteurs partenaire de l'agence et se déployant dans la communauté rurale de Gandon, le Foyer de Sanar. Enfin, la démarche méthodologique adoptée pour sa réalisation relève entièrement du qualitatif. Ainsi cette étude qui concerne l'analyse de la nature de l'intervention de l'ANCAR au niveau des OP telles que le Foyer de Sanar constitue une contribution à l'étude des stratégies de développement déployées en milieu rural. Pour cette recherche, le plan de travail adopté se décline comme suit :

La première partie correspond à ce qu'on appelle en sociologie la construction sociologique de l'objet à travers la contextualisation sociohistorique consacrée à l'historique de la politique de développement agricole du Sénégal et l'élaboration du cadre théorique qui concerne les courants théoriques sur les rapports entre l'État et les paysans.

La deuxième partie est consacrée à la problématique de recherche et au cadre méthodologique que nous avons adopté pour effectuer notre recherche.

Et enfin, la troisième et dernière partie se compose de la présentation, de l'exploitation ou de l'analyse des résultats de la pré-enquête.

PREMIERE PARTIE :

Contextualisation sociohistorique et

cadre théorique

La démarche première de tout sociologue, fut-il apprenti, est de définir son objet afin que l'on sache ce dont il est question dans son travail d'investigation. C'et dans cette maxime de Durkheim que nous situons la première partie de notre travail de recherche. Cette partie est ainsi consacrée à la contextualisation socio-historique où il sera question de faire par de la problématique d'ensemble dans laquelle s'intègre notre thème ou objet d'étude, mais aussi et surtout de décrire sa trajectoire socio-historique et ensuite, à la présentation de l'arsenal théorique que nous avons mis en oeuvre pour accéder à l'intelligibilité de notre objet.

Chapitre I : Histoire de la politique de développement agricole du Sénégal

Cette étude se propose d'analyser l'évolution des politiques agricoles du Sénégal, de passer en revue les différentes interventions des structures étatiques mises en place afin de s'interroger sur la pertinence et l'efficacité des solutions nationales adoptées par le gouvernement selon les recommandations des institutions internationales.

L'hypothèse qui sous-tend cette partie est que le développement de l'agriculture suppose un consensus politique national autour d'objectifs nationaux, un pilotage non bureaucratique pour satisfaire les besoins du marché intérieur et maîtriser l'ouverture sur le marché extérieur. Il est évident que l'histoire a montré l'échec des systèmes politiques qui concentrent la gestion des affaires publiques entre les mains d'un pouvoir central et affaiblissent les pouvoirs locaux ruraux, mais le désengagement des États qui s'en est suivi a très vite montré ses limites car il a conduit á un vide institutionnel, une stagnation de la production agricole, l'aggravation de l'insécurité alimentaire, le développement des conflits pour le contrôle des ressources de base. Il semble ainsi étonnant comme le constate Ibrahima Dia : « Avec quelle légèreté les décideurs politiques et les experts locaux acceptent que les politiques dans le domaine de l'agriculture soient uniquement basées sur les schémas économistes et simplistes prônés par les institutions financières sur la base d'une certaine doctrine, « le libéralisme du marché » (I. Dia, 2000, p111).

Certes les politiques dirigistes mises en oeuvre dans le secteur agricole depuis 1960 ont échoué, mais est- ce une raison pour accepter le « laisser faire » et la soumission au marché mondial qui condamne les pays africains á se soumettre aux normes de la compétitivité ?

Les fondements théoriques de ces institutions internationales repose sur le principal postulat qui consiste à dire que le vide que va provoquer le retrait de l'État sera naturellement comblé par le secteur privé. Cependant, ce postulat n'est basé sur aucune expérience de développement agricole dans les pays d'Asie ou d'Europe. En effet la Révolution Verte ne s'est pas produite en Asie par le dynamisme du marché (Gilbert Etienne, 1995), mais bien par une forte intervention volontariste de l'État qui a apporté un soutien à la recherche et à la vulgarisation agricole et mis en place des réseaux de distribution de semences améliorées et d'engrais. A ce titre, Bertrand Hervieu repris par I. Dia tire ainsi les principaux enseignements de la révolution verte : « Les succès de la révolution verte, liés à partir des années 1963-1964 et jusqu'en 1970 à la diffusion de nouvelles semences céréalières concernant surtout celle blé, permettent une augmentation significative de la production de céréales en Inde, En

Chine, en Indonésie, au Pakistan, au Bangladesh. Bon nombre de ces pays ont cessé d'tre des importateurs de céréales. Le Viêt-nam s'est hissé au troisième rang mondial pour les exportations de riz. Le premier enseignement de ces résultats réside dans le rôle capital joué par la recherche (~) La seconde leçon à en tirer est que le fruit de cette recherche particulièrement bien adapté aux structures sociales et aux savoir-faire locaux (~) Surtout, ces innovations n'ont nécessité ni mécanisation, ni exode paysan pour leur mise en oeuvre» (I. Dia, 2000, p 112).

L'adoption d'une politique commune au sein de l'Union européenne montre bien la volonté que manifestent les États de ce continent pour orienter le développement de leur agriculture à travers d'une part, la fixation des prix et d'autre part, l'établissement de quotas de production et l'octroi de subventions. Dans la même logique, les États- Unis d'Amérique avaient mis en oeuvre des politiques agricoles souples et évolutives.

En réalité, les expériences asiatiques, européennes et américaines montrent que les progrès de l'agriculture ont été obtenus grace à un véritable engagement de l'État et non comme on le laisse entendre par un désengagement de l'État au profit du marché. Il s'agissait dans ces pays d'obtenir l'autosuffisance alimentaire inspirée par une idéologie nationaliste selon célèbre la formule du général De Gaulle : « un pays qui ne peut pas se nourrir n'est pas un grand pays », (I. Dia, 2000, p 113). Il apparaît donc que l'agriculture des pays industriels dont les gouvernements se déclarent partisans de l'économie de marché est encore soumise à de nombreuses interventions de l'État et on imagine mal pourquoi il devrait en etre autrement dans les pays du Tiers monde. Et depuis plus d'un siècle aujourd'hui, les conceptions du développement en Afrique de l'Ouest oscille entre deux modules : le modèle du volontarisme de l'administration, c'est-à-dire que l'État se présente comme l'organisateur omnipotent qui se trouve parfois lui-même engagé dans la production, et celui de l'accompagner les dynamiques économiques existantes dans une options libérale.

Le Sénégal présente ainsi une explication et une analyse plus spécifique de sa politique agricole tout au long de son histoire. En effet Mohamed Mbodj analyse les politiques de développement agricole mises en oeuvre par l'État sénégalais autour de trois périodes majeures :

1À D'abord de 1960 à 1971 marquée par la nationalisation de l'agriculture dans un contexte socialiste et de domination des rapports État /marabouts,

2- Ensuite la période de 1971 à 1979 qui se présente comme une période des calamités naturelles produisant un « malaise paysan » sur un fond de domination des marabouts et de changement de régime politique,

3- Enfin la période de 1979 à 1990 marquée par l'ajustement structurel avec le désengagement de l'Etat dans l'activité économique et la promotion du libre échange, (Mbodj, 1992, p 96).

Mais pour les besoins de cette étude, nous avons jugé nécessaire de proposer une nouvelle périodisation en situant cette politique agricole autour de trois étapes. D'abord des années 60 jusqu'en 1979 avec l'État interventionniste. Ensuite des années 80 à 1990 marquées par le désengagement de l'État et la responsabilisation des producteurs et, enfin de 1990 à la période actuelle dominée par la politique de lutte contre la pauvreté et la politique de la stratégie de croissance accélérée.

1.1 - La période d 1960 à 1962 : Mamadou DIA et la politique d'animation rurale et le mouvement coopératif

L'animation rurale se conçoit comme une modalité de la participation des communautés dans les processus de prise de décision. Elle est considérée comme une réponse à des besoins décisionnels plus judicieux et socialement plus acceptable que les choix qui émergent de politiques non décisionnels ou de type bureaucratiques. Elle participe d'une volonté de dialogue fortement affichée par les pouvoirs publics à travers les politiques de développement mises en place au lendemain des indépendances.

Cette période concerne en principe la politique de Mamadou DIA, partisan de la doctrine du socialisme africain. En effet, quand le Sénégal accède à l'indépendance en 1960, le gouvernement de Mamadou Dia adopte un plan de socialisation et de nationalisation de son économie. Ainsi, l'orientation du nouvel État indépendant prenait source dans cette doctrine socialiste basée sur ce qui est connu sous le nom de « communautarisme négro-africain » qui est une voie médiate alliant l'efficacité de la gestion capitaliste aux valeurs du socialisme. A cette époque, les bases idéologiques du mouvement coopératif étaient, dès 1950 avancées par M. Dia à savoir que la coopérative est l'institution clef du socialisme africain, et qu'elle doit combiner les traditions africaines et les valeurs démocratiques. L'hypothèse qui sous-tendait cette politique était qu'au sein des sociétés traditionnelles, il existe des valeurs qui peuvent et

doivent etre utilisées au service du développement. C'est ainsi que dans son discours du 04 Avril 1959, le Président du Conseil d'alors pose d'emblée la problématique du développement en ces termes : « J'ai déjà dit que, politiquement, nous devions choisir un socialisme original, authentique, prolongeant ses racines profondément dans le terroir, issu de l'Afrique et non de l'Europe, de l'Asie ou de l'Amérique. Pour construire ce socialisme nouveau, nous emprunterons la grande voie de l'économie humaine, qui peut se résumer dans la belle formule de François Perroux « l'économie de tout l'homme et de tout les hommes. » (Rapport national sur le développement humain au Sénégal, 2005 : p 33).

Alors dans ce cas précis, le développement est censé être un phénomène total, c'est-àdire qu'il doit s'appliquer à toutes les régions du pays, urbaines et rurales, à toutes les classes de la société, à tous les secteurs de l'économie, à tous les niveaux de vie individuelle et collective etc.

La méthode préconisée pour atteindre cet objectif est celle d'un dialogue ouvert qui bannit toute forme de contrainte. Donc l'instrument à travers lequel les éléments de conception de cette politique agricole vont se matérialiser est la coopérative. Il fut ainsi décidé la mise en place d'un important mouvement coopératif. Ce qui traduisait dans les faits, les orientations contenues dans la circulaire n° 32 du 21 Mai 1962 du Conseil intitulé Doctrine et problème de l'évolution du mouvement coopératif au Sénégal qui va promouvoir les coopératives comme instruments de mobilisation des populations et de réalisation du développement rural. Cette circulaire était l'expression la plus clairement élaborée des objectifs du gouvernement. Dans un tel contexte, le mouvement coopératif devrait servir de pierre angulaire pour la promotion socioéconomique des paysans. A ce propos, Il était écrit dans la circulaire que : « Le mouvement coopératif, au niveau des communautés humaines réelles constitue le mode d'organisation permettant de préserver les valeurs communautaires anciennes et de promouvoir un développement moderne susceptible de prendre place dans les courants d'évolution du monde actuel » (Rapport national sur le développement humain au Sénégal, 2005 : p 34).

Fondées sur l'éthique du socialisme africain, les coopératives vont avoir pour objectifs de démanteler l'économie de traite, assainir les circuits de commercialisation hérités de la colonisation, nationaliser le commerce de l'arachide et diversifier l'économie rurale etc. Le mouvement coopératif devient donc le cadre de promotion d'une approche communautaire du développement locale. Il s'agit en fait de promouvoir un système d'encadrement rapproché des paysans tant sur le plan de l'organisation, du financement mais aussi du contrôle des

coopératives agricoles. Mais un tel système est censé s'atténuer au fur et à mesure que les coopérateurs acquièrent les compétences nécessaires à la gestion de leur organisation.

Finalement la prédominance de la version communautaire promue par Dia ne suivra pas à son érection dans la scène politique consécutive aux fameux évènements de 1962. Depuis lors, l'approche institutionnelle du développement local semble prendre le pas sur celle communautaire dans les politiques de développement au Sénégal. Avec l'élimination de M. Dia, la situation devient encore beaucoup plus grave en 1963 avec une stagnation des stocks d'arachide dans les coopératives et, la tutelle, au lieu de dépérir connaît une accentuation : c'est l'État qui fixe les prix, distribue les semences, fournit le crédit, supervise la comptabilité des coopératives et détermine les priorités locales de développement. Ainsi pour gouverner des populations intégrées, l'État du Sénégal a procédé à la mise en place d'un relais de son pouvoir dans le milieu rural à la suite de la réforme administrative territoriale de 1972. A côté de l'organisation administrative, l'État va également mettre sur pied des structures de mobilisation populaire et de participation pour faire du monde rural « le pôle du développement de la société ». Cette phase réformiste se fondait sur la référence à l'idéologie du socialisme démocratique sous-tendue par l'option d'une planification rigoureuse, exhaustive et volontariste.

Toutefois, les coopératives vont très vite être transformées en instruments de prédation. Dès le début de leur mise en oeuvre, les elles seront d'abord confrontées à des problèmes structurels et à d'autres liés à l'environnement sociopolitique du pays, notamment le clientélisme politico-économique reliant les structures et fonctionnaires de l'État, les leaders du monde rural et la masse des paysans. Autrement dit, la politisation des coopératives, notamment avec l'avènement des Centres Régionaux pour l'Assistance au Développement (GRAD), va détourner les coopératives de leurs missions. Ensuite l'hétérogénéité des villages membres d'une méme coopérative posait des problèmes de cohésion sociale et de solidarité. Enfin la mauvaise gestion et la récupération du mouvement par les élites locales vont miner les coopératives. En outre, les elles vont se réduire à la gestion arachidière et se transformer en une structure politique de différenciation sociale en milieu rural. Ainsi elles apparaissent plus comme des instruments de contrôle social et politique de l'État et des politiciens sur les masses rurales qu'un outil au service des populations. L'État tentera de remédier à cette situation, mais l'aggravation des dérapages engendrent ce qu'on a appelé « un malaise paysan ». Geci entraîne un premier train de réformes qui aboutit à la création de l'Office National de Coopération et d'Assistance au Développement (ONGAD).

1.2 - La Période de 1963 à 1979 : L'interventionnisme de l'État dans le domaine agricole

Comme nous l'avons signalé ci-dessus, la politique de l'État sénégalais nouvellement indépendant prenait source dans la doctrine du socialisme africain basée sur le «communautarisme négro-africain» avec comme cadre théorique le paradigme de la dépendance. Au plan opérationnel, on constate un modèle de gestion dirigiste et centralisée avec l'État, comme principal acteur du développement définissant et mettant en oeuvre seul les politiques de développement à travers son administration centrale. Des raisons d'ordre social, politique et économique semblaient justifier cette orientation qui a donné lieu à la mise en place de dispositifs d'encadrement, de vastes programmes de développement et enfin, de structures censées garantir la participation populaire. Ainsi, outre les coopératives agricoles, l'autre mécanisme de cette politique de développement peut être situé au niveau de l'Office National de Coopération et d'Assistance au Développement (ONCAD) créé en 1966. Les autorités sénégalaises ont amorcé une étatisation des circuits commerciaux de l'arachide par la création de cette structure, née de la fusion des Centres Régionaux d'Assistance au Développement (CRAD) et de l'Office de Commercialisation Agricole (OCA). L'ONCAD avait pour vocation de rationaliser et de coordonner les opérations d'une multitude d'organismes étatiques, concernés par la commercialisation de l'arachide.

Ensuite, l'État sénégalais a procédé à un recensement des structures d'encadrement dans le monde rural en créant des sociétés d'encadrement du monde paysan comme la Société d'Aménagement et d'Exploitation des Terres du Delta (SAED en 1965), la Société de Développement et de Vulgarisation Agricole (SODEVA en 1968), la Société de Mise en Valeur de la Casamance (SOMIVAC en 1976), la Société de Développement des Fibres Textiles (SODEFITEX en 1974), la Société des Terres Neuves (STN), etc. Ces sociétés avaient pour vocation de susciter et d'encadrer les groupements de production bien définis (arachide, coton et riz). Face aux paysans, l'État est un expert au sens crozierien du terme puisque selon lui : « L'expert est le seul qui dispose du savoir-faire, de l'expérience du contexte qui lui permettent de résoudre certains problèmes cruciaux de l'organisation. Sa position est donc bien meilleurs dans la négociation aussi bien avec l'organisation qu'avec ses collègues » (Crozier et Friedberg, 1981, p72).

Cependant, ces organismes n'étaient pas à la hauteur ni des espérances, ni des moyens mobilisés parce que la logique par laquelle ils se sont comportés en milieu rural est une « logique d'encadrement » des paysans qui doivent simplement exécuter les décisions prises

par les agents de développement. Dan cette logique, on retrouve toute la pertinence de cette critique de Adrian Adams quand elle soutient que : « Dans les projets, ils n'associent jamais les paysans à leurs travail ; alors meme que souvent les paysans travaillent mieux qu'eux. (..) Ils viennent seulement ramasser l'argent et ils s'en vont. La terre reste là, elle n'est pas développée Maintenant, ils achètent les paysans pour dire aux financeurs : on a tant de paysans, donnez nous de l'argent » (A. Adams, 1985, p 194).

Ces nombreux échecs enregistrés nous poussent à nous demander si ces structures d'encadrement du monde rural n'ont pas été utilisées au service exclusif d'un système politique qui ne cherchait qu'à se maintenir et à se reproduire. En d'autres termes, il incombe de savoir si l'agriculture n'a pas servi que de prétexte pour mettre en place un appareil public dont l'ampleur, au bout du compte, n'a été plus utile à l'extension du pouvoir qu'au développement du monde paysan. A ce titre, selon le duo Momar C. Diop et Mamadou Diouf, il y a deux principales raisons qui peuvent expliquer cet échec : « La première se réfère à la nature clientéliste de l'Etat et des conflits politiques et idéologiques des différentes personnes au sein de l'Etat, du gouvernement et du parti au pouvoir. La seconde réside dans l'élimination de Mamadou Dia qui marque la fin des tentatives de mise en place d'une administration de type moderne et de participation populaire » (1990, p 63).

Aussi, le rôle joué par les marabouts au bénéfice de Léopold S. Senghor va titre capital puisqu'il renforce le principe clientéliste établi à leur profit dès le référendum de 1958. Ce mouvement coopératif sera ainsi dévié de ses objectifs pour devenir une structure au sein de laquelle divers groupes ou acteurs vont chercher à réaliser des objectifs contradictoires parmi lesquels : A) l'État cherche à contrôler l'économie arachidière, à promouvoir des programmes de modernisation agricole et à s'approprier une plus-value de l'économie rurale ; B) les politiciens s'y appuient pour construire leur clientèle politique en s'assurant un accès facile au crédit et aux autre ressources de la coopérative, C) les notables ruraux et chefs religieux, de leur côté, s'y adossent pour renforcer leur autorité et leur prestige ; D) les paysans perçoivent plus le mouvement coopératif comme un instrument étatique conçu pour centraliser la récolte d'arachide que comme une destinée à promouvoir leur développement (Diop et Diouf, 1990, p 65).

En résumé, les coopératives vont titre transformées en instruments de prédation et l'ONCAD quant à elle, se présente selon les propos de Mohamed Mbodj comme une structure tentaculaire caractérisée par une gestion gabégique et un clientélisme politique (Mbodj, 1992). C'est ainsi que sous le poids du dirigisme et de la tutelle de l'État, les populations ont fini par croire que les structures de participation ne sont en fait que de nouvelles stratégies d'une

administration omnipotente et tentaculaire caractérisée par une expansion massive et une centralisation concomitante de l'appareil d'État. Cela revient tout simplement à souligner que le problème des premières politiques de développement dans la plupart des États africains nouvellement indépendants comme le Sénégal concernait leurs résultats mitigés au travers d'investissements coüteux et irréalistes associés à des dérives financières produisant comme conséquences l'insolvabilité et la vulnérabilité des pays.

L'échec des politiques de développement post-indépendantistes qui s'est surtout manifesté par la perte de compétitivité de l'économie va ainsi amener les pouvoir publics à s'endetter pour financer le développement, accentuant ainsi la dépendance du pays aux capitaux étrangers. Mais au-delà de ce contexte explosif, ce seront surtout les exigences des bailleurs de fonds internationaux pour un redimensionnement de l'État dans l'activité économique qui vont entre autres, impulser à travers l'ajustement structurel, le processus de désengagement de l'État et de responsabilisation des populations rurales. Ainsi sous le diktat des bailleurs de fonds, les pouvoirs publics vont s'engager dès la fin des années 70 à rectifier les déséquilibres macro-économiques en mettant sur pied des réformes destinées à changer le modèle de développement post-colonial. C'est justement cette période qui coïncide avec ce qui est communément connu sous le nom de Politiques d'Ajustement Structurel.

1.3 - La période de 1980 à la fin des années 90 : Le désengagement de l'État avec les politiques d'ajustement structurel et le début de la responsabilisation des producteurs

Les années 80 resteront véritablement la phase radicale dans l'application des Politiques d'Ajustement Structurel (PAS) en Afrique et, en particulier au Sénégal avec une série de conditionnalités. En effet, suite à l'influence des bailleurs de fonds et au changement politique avec l'arrivée de Abdou Diouf à la tête du gouvernement, cette période restera marquée par les PAS. En cherchant à réaliser ce que les bailleurs appellent l'efficience de l'Etat, le Sénégal a mis en pratique le slogan « Moins d'État, mieux d'État » en mettant en exécution plusieurs réformes. Selon Mbodj, les PAS reposent sur une sorte de triangle dont les sommets sont respectivement constitués par : A) une politique monétaire de resserrement et d'aggravation des conditions d'accès au crédit ; B) un assainissement des finances publiques par la réduction de la masse salariale dans la fonction publique, des dépenses sociales et des subventions publiques ; C) la vérité des prix par la dévaluation locale. Cette phase des PAS, caractérisée par une série de réformes structurelles importantes avait pour finalité une réduction sensible de l'intervention de l'État dans l'activité économique (Mbodj,

1992). Une telle rupture est synonyme de remaniement des principes du socialisme au profit d'une approche conforme au cadrage macroéconomique et financier et à l'option d'une stratégie de développement socio-économique fondé sur le respect intégral du libéralisme. Cette nouvelle politique, comme le remarque Mbodj est marquée par trois principales phases : d'abord « dissolution de l'ONCAD (1972-1980) », ensuite « la réforme des structures d'encadrement (1980-1985) » et enfin « la mise en place d'une Nouvelle Politique Agricole (1984) », (Mbodj, 1992, p112). Cependant dans le cadre de ce travail, nous insisteront sur deux aspects majeurs concernant ces programmes d'ajustement structurel : d'abord la dissolution de l'ONCAD et ensuite la mise en oeuvre de la Nouvelle Politique Agricole.

1.3-1 - La dissolution de l'ONCAD :

L'existence des nombreuses structures, dans le fonctionnement de l'économie sénégalaise, a plutôt contribué à paralyser le secteur agricole au lieu d'y impulser un dynamisme. L'illustration peut etre donnée à travers l'ONCAD tel qu'il a été ménagé pendant deux décennies. En effet si les objectifs assignés à l'ONCAD consistaient à moderniser l'agriculture, à commercialiser des produits de rente et à stabiliser les prix d'achat aux productions pour conjurer les fluctuations des prix du marché mondial, les résultats auxquels elle a abouti n'ont pas du tout traduit ces attentes. A ce titre, Caswell a montré dans une étude que : « L'ONCAD a plutôt servi à enrichir une caste politico-affairiste que d'induire des mutations profondes dans les campagnes sénégalaises La gestion de cette société nationale a plutôt permis de transférer les revenus agricoles dans les caisses de l'État, favoriser des détournements, des malversations au détriment des producteurs, rendre confus des comptes financiers concernant l'endettement auprès de la BNDS par favoritisme, corruption et clientélisme, constituer un réseau de clientélisme au bénéfice du parti au pouvoir, avec les gros producteurs (marabouts ou responsables du parti socialiste) » (1984, p38).

C'est plutôt une situation de régression à laquelle l'ONCAD a fini par installer le secteur agricole sénégalais avec des centaines de milliards de déficit et une destruction des structures organisationnelles sur lesquelles reposait le système d'organisation et d'encadrement du monde paysan. Ainsi ces réformes ne sont pas, selon Mamadou Diouf, une volonté de l'État « .de faire participer mais de serrer le maillage administratif sur la société pour accroître l'efficacité de la politique de développement dont l'extension du domaine étatique était l'élément moteur », (M. Diouf, 1992, p253). Il fallait dès lors réduire les énormes déficits consentis par cet organisme considéré comme budgétivore et sans réelle

efficacité dans le développement du monde rural. S'en expliquant sur la liquidation de l'ONCAD, le Président Abdou Diouf affirmait « l'Office ne parvenait plus à accomplir ses missions. De plus, les coopératives ne pouvaient plus coexister avec un organisme aussi lourd et omniprésent ; sauf à se transformer en simples points de collecte d'arachide, ce qu'elle tendait effectivement à devenir Notre objectif reste la libéralisation du monde rural du carcan bureaucratique et des tutelles surabondantes qui l'entravent »1

Confronté depuis longtemps à une production agricole en déclin et un déficit persistant des finances publiques, le Sénégal a ainsi, sous la pression de bailleurs de fonds internationaux, procédé à l'application de ces PAS dans le domaine de l'agriculture aussi. L'ajustement s'est traduit au niveau de ce secteur par le désengagement, la privatisation et la restructuration des entreprises publiques chargées du développement rural et agricole, la responsabilisation des agriculteurs avec un transfert de certaines fonctions anciennement dévolues aux organismes publics, l'élimination des subventions sur les intrants et le crédit agricole, la libéralisation des prix, des marchés et du commerce des produits agricoles. En un mot, face à cette situation inconvenante, il se posait la nécessité urgente et renouvelée de la redéfinition d'une véritable politique agricole intégrant tous les aspects du secteur rural dans un cadre cohérent avec les orientations du pays.

1.3-2- La création de la NPA :

La Nouvelle Politique Agricole (NPA) a été lancée en 1984 en vue de créer les conditions de la relance de la production dans un cadre qui favorise la participation effective et la responsabilisation poussée des populations rurales à chacune des étapes du processus de développement et, en conséquence, réduit l'intervention de l'État à un rôle catalyseur et d'impulsion. A travers la NPA, l'État voulait rompre avec le jacobinisme dont il avait toujours fait part en responsabilisant désormais les paysans. La teneur de cette politique agricole selon M. Mbodj « tourne autour de l'idée que le secteur agricole doit désormais etre régi par les règles du marché en général, et par celles du profit au niveau du paysan en particulier. Cela se traduit par la nécessaire réorganisation du monde rural, marquée par le désengagement de l'État » (M. Mbodj, 1992 :117). Les buts avoués de la NPA tournent en principe essentiellement vers une meilleure réorganisation du monde rural qui favoriserait une plus grande responsabilisation du paysan. Cela suppose donc une intervention moins marquée

1 - Abdou Diouf, « Discours devant le Conseil économique et social », cité par M. Mbodj, 1990 : 115.

de l'État dans le secteur et un nouveau mode d'encadrement des sociétés de développement rural plus souple et léger. En d'autres termes, les dispositifs de la NPA tournent autour de la restructuration des sociétés d'intervention par le désengagement de l'État et l'allègement de l'encadrement, la réorganisation des producteurs autour des sections villageoises.

C'est donc dire que la NPA doit aboutir à une restructuration sociopolitique avec l'État chargé de l'animation et de la coordination, les paysans chargés des actions de développement et l'apparition de nouveaux partenaires comme les ONG, les bailleurs de fonds etc. C'est dans ce cadre que les mesures de réforme entreprises, dans le cadre de la NPA, ont porté essentiellement sur : la responsabilisation des producteurs ruraux, la redéfinition des missions des organismes d'encadrement, la promotion de nouvelles formes d'organisations paysannes, l'application d'une politique de prix incitative, la mise en place d'une politique de gestion et de distribution des facteurs de production, la poursuite de la réalisation d'un taux d'autosuffisance vivrière de 80% en l'an 2000, et enfin la mise en place de la Caisse Nationale de Crédit Agricole (CNCA).

Cependant, après plusieurs années de pratique de la NPA, on a constaté qu'il y a eu un renforcement du malaise paysan puisque le producteur tarde toujours à émerger. En plus, ce sont toujours les contraintes économiques qui déterminent non seulement les choix techniques des paysans, l'inaccessibilité de l'engrais, des semences, du matériel agricole mais aussi la baissent sensible de la productivité et le désordre institutionnel à la suite du désengagement brusque des sociétés d'encadrement qui sont insuffisamment remplacées par les Organisations de Producteurs (OP). A ce sujet, François Boye, repris par Sambou Ndiaye affirme que : « Contrairement à ses objectifs, la NPA en pratique décourage la production agricole (~), encourage la dépendance alimentaire (E) et creuse le déficit de la filière arachidière (~) », (S. Ndiaye, 1995-1996), p39).

C'est dire que certes cette alternative avait produit quelques évolutions pratiques pertinentes, mais il reste que l'absence de consensus dès le départ autour de la conception même de la NPA avait manqué pour parfaire sa réussite. M. Kassé en est bien conscient lorsqu'il note que : « La NPA n'a donc pu ~tre qu'un compromis, et comme tel, cumule des demi-mesures qui ont fini par produire beaucoup d'inconvénients et de contradictions » (M. Kassé, 1996 :119 ).

En conséquence, à la faillite presque certaine de la NPA, le Sénégal signait avec les bailleurs de fonds un nouveau programme baptisé Programme d'Ajustement Structurel du Secteur Agricole (PASA). Dans ses grandes lignes, le PASA n'est rien d'autre que la poursuite des réformes initiées avec la NPA et porte notamment sur l'accélération de l'État

des activités de production et de commercialisation, la suppression des distorsion entre les prix et les subventions, la promotion des céréales locales pour remplacer le riz, l'adoption d'une politique d'irrigation moins coateuse et plus soutenue (M. Kassé, 1996). En termes de bilan de l'exécution du PASA, Eliot Berg, cité par Kassé constate qu' « il y a un plus grand nombre de preuves de stagnation continuelle que de signes de changement » (M. Kassé, 1996 : 20). Manifestement, on était plus proche de l'échec du programme que de sa réussite espérée au regard de la situation du monde rural qui ne s'améliorait guère.

En somme, le résultat bénéfique des PAS résiderait au niveau sociopolitique, car induisant une révision des modalités de gestion publique, et ouvrant un espace ouvert à une intervention plus importante des acteurs privés et sociaux. En ce sens, les elles constituent une des composantes de la structure d'opportunité politique ayant favorisé le repositionnement des différents acteurs, à travers notamment la reconfiguration du rôle de l'État, la promotion de l'intervention du secteur privé et d'acteurs intermédiaires et enfin, le renforcement de l'implication de la «société civile» comme contre pouvoir des institutions publique.

Cependant, le repositionnement des acteurs locaux, pour reprendre Sambou Ndiaye, « semble être plus une conséquence de l'ajustement qu'un objectif préalablement défini », (S. Ndiaye, 2007, p37). En lieu et place de la responsabilisation des populations, c'était plutôt la réduction du rôle de l'Etat dans le développement économique en vue d'assurer le libre jeu du marché et la privatisation du social qui était visée. D'autres conséquences des PAS peuvent etre appréciées à travers l'abolition de la gratuité de l'accès aux soins de santé, l'enchérissement des prix des denrées de premières nécessités, la détérioration des conditions de vie des populations, la fragilisation du tissu agricole local avec la suppression des subventions accordées aux paysans. Toutefois, les effets combinés de la crise économique et des PAS conduisent à l'affirmation de nouveaux groupes stratégiques, à savoir les collectivités locales et les organisations de producteurs. En outre, les exigences en matière d'auto-promotion des acteurs sociaux, d'équité et de bonne gouvernance sont désormais mises de l'avant.

1.3.3. La dynamique des organisations des producteurs au Sénégal

L'étude de la dynamique des OP se limite ici à celle des organisations ayant des objectifs opérationnels précis sur la promotion non de valeurs, mais plutôt celle du producteur et des filières agricoles dans lesquelles il s'investit. Dans cette perspective, il s'agit d'éclairer soit les interventions de l'État, soit les efforts d'adaptation des producteurs dans les contextes

définis. Autrement dit, notre analyse s'attache à expliquer la diversité, l'influence et l'importance des OP au regard du contexte de leur émergence et des mutations qu'elles ont subies depuis la fin de la période coloniale.

En effet, l'histoire des OP au Sénégal est étroitement liée aux interventions de l'État visant à promouvoir la culture de l'arachide dans le bassin arachidier ou au développement d'autres filières de production (riziculture dans le Delta) dans les zones agro-écologiques, depuis la création des Sociétés Indigènes de Prévoyance (SIP) en 1910 jusqu'aux années 1980/1990 qui consacrent à la fois l'avènements des Groupements d'Intérêt Economique (GIE) et la multiplication des groupements d'organisation paysannes avec la naissance du CNCR et du regroupement des OP dans la Vallée, (E.S.N.Touré, 2004 :25). Donc l'historique des OP remonte aux SIP qui devaient jouer un rôle d'assurance mutualiste dans l'économie local des pays africains exposés à des crises chroniques de disettes. Ces sociétés continueront d'exister après 1960 à coté des coopératives qui finiront par les absorber. Cependant la participation paysanne dans le développement agricole varie peu, car cette participation s'exprime dans le nouveau contexte de souveraineté nationale dans les mémes conditions qui prévalaient sous l'administration coloniale.

Les coopératives se sont développées dans un contexte où l'encadrement technique fait défaut et où la faiblesse de l'épargne ne leur permet pas de fonctionner de façon autonome. Toutefois le développement de la production arachidière a bénéficié de la conjonction de plusieurs facteurs dont l'intervention de l'État par l'intermédiaire de la SODEVA et son alliance avec les forces sociales qui ont joué un certain rôle dans l'expansion de la culture arachidière. Ces coopératives restent donc le premier stade de structuration du monde paysan après les indépendances. Elles ont permis de rassembler des forces pour réaliser des actions communes menées sous la tutelle de l'ONCAD qui, néanmoins ne furent pas bénéfiques pour les paysans.

Le deuxième stade de structuration du monde paysan a été confirmé avec l'objectif d'autosuffisance alimentaire par la riziculture au niveau du Delta par la création de la SAED en 1965, en tant que société régionale de développement rural (S. Ndiaye, 1995-1996 : 41). De 1965 jusqu'en 1980, cette structure va détenir à elle seule les facteurs et moyens de production à travers un système d'encadrement dirigiste et centralisé et une approche techniciste. La SAED se proposait d'organiser les paysans autour du mouvement coopératif pour les associer au procès de production. Mais le clientélisme politico-économique de l'époque va bloquer ce mouvement (S. Ndiaye, 1995-1996 : 41). C'est à partir des dérives des Société Régionale pour le Développement Rural (SRDR) (primat du fonctionnement sur

l'investissement, personnel pléthorique et gestion gabégique) que seront élaborées des mesures de restriction de leurs tâches ainsi que le cantonnement de leurs activités dans des contrats/plans établis par l'État. Ainsi la SAED va désormais se limiter aux fonctions de pilotage, suivi-évaluation, vulgarisation, coordination etc., et laisser aux OP les activités productives autour de la gestion du crédit, du matériel agricole, de l'approvisionnement en intrants etc.

Le troisième stade de structuration est caractérisé par l'émergence d'OP plus autonomes. En effet, consacré par la réforme de la NPA en 1984, le désengagement de l'État favorise la création de GIE. Ceux-ci continuent à proliférer dans tous les villages, surtout au Nord et au Sud-est qui sont les zones d'intervention de la SAED et de le SODEFITEX, où les opportunités offertes aux producteurs sont encore plus grandes en raison des barrages et de l'importance de flux d'investissements publics et privés injectés dans cette zone par rapport au reste du Sénégal (E.S.N.Touré, 2004 :34). Ainsi la volonté de regroupement traduit la nécessité, pour celles-ci, de renforcer leur pouvoir de négociation et de prendre en charge les revendications exprimées dans le milieu paysan. C'est cela qui explique l'importance prise par le Comité National de Concertation et coopération des Ruraux (CNCR) et la fédération des producteurs de la Vallée qui regroupent beaucoup d'OP sur l'ensemble du territoire national et dans la vallée du fleuve Sénégal. C'est deux organisations ouvrent de nouvelles perspectives aux revendications paysannes, en raison de leur dimension, de leur proximité vis-à-vis de leur base et du nouvel environnement lié au désengagement de l'État et à la politique de décentralisation.

Les dispositions institutionnelles évoquées plus haut vont donc créer un cadre d'émergence particulièrement favorable aux OP privilégiés. Le GIE va être instauré par la loi n°84_37 du 11 Mai 1984, les communautés rurales vont gérer l'affectation des terres, la Caisse Nationale de Crédit Agricole du Sénégal (CNCAS) va aussi s'installer dans la région en 1987. Dans un second mouvement, ces dispositions institutionnelles largement dominées par le capital international vont favoriser le regroupement des GIE et OP autour des structures fédératives comme les Organisations Fédératives Paysannes (OPF) du Delta (ASSESCAW, AFEGIED ETC.), pour en faire des cadres privilégiés afin de faciliter l'accès au foncier et au financement agricole, (S. Ndiaye, 1995-1996 : 42).

1.4 - La fin des années 90 et le début des années 2000 : Les politiques de lutte contre la pauvreté :

Malgré son impact dans la reprise de la croissance économique et dans l'amélioration du cadre macroéconomique, les PAS ont accentué la pauvreté des populations et n'ont pas permis de positionner le secteur agricole national en moteur de l'économie qui, par ailleurs se trouve de plus en plus dépendante et extravertie. Selon Sambou Ndiaye : « L'échec des PAS a démontré d'une part, que la croissance économique n'induit pas automatiquement un meilleur accès des pauvres aux ressources stratégiques ou aux services sociaux de base et d'autre part, que les réformes structurelles visant à stabiliser et à ajuster le cadre macroéconomique se font souvent au détriment des populations démunies parce que porteuses de coûts sociaux préjudiciables mais peu pris en compte » (S. Ndiaye, 2007, p37).

1.4-1- La Stratégie de Réduction de la Pauvreté :

Dès la fin des années 90, alors que l'État du Sénégal n'avait pas encore terminé le second programme des PAS, un nouveau programme dénommé « Stratégie de Réduction de la pauvreté au Sénégal » est mis en place par le gouvernement. D'ailleurs dans la plupart des pays africains, des « Documents de Stratégie de Réduction de la Pauvreté (DSRP) » sont élaborés dont l'objectif est d'orienter de manière stratégique le développement en donnant une certaine prééminence à l'intervention des bailleurs de fonds et des organismes de développement international. Cette nouvelle politique se différencie des PAS selon ses diverses orientations dont nous pouvons ici retenir trois : d'abord elle a une orientation sociale en faveur des populations démunies, ensuite elle reconnaît la responsabilité des pays dans l'élaboration et la mise en oeuvre des politiques de développement et, enfin elle met en évidence un processus participatif en ce qui concerne son élaboration, sa mise en oeuvre et son suivi-évaluation à travers notamment l'implication des acteurs locaux.

Mais de manière précise, ce programme devrait répondre à trois principales préoccupations au Sénégal : d'abord doubler le revenu de chaque habitant d'ici l'horizon 2015, ensuite généraliser l'accès au service sociaux de base à travers la mise en place d'infrastructures de base et enfin, éradiquer toute forme d'exclusion et promouvoir l'égalité des sexes.

L'analyse du profil de pauvreté, de ses causes et manifestations a permis de retenir une stratégie axée sur quatre leviers fondamentaux que sont : la création de richesse, le

renforcement des capacités et la promotion des services sociaux de base, l'amélioration des conditions de vie des groupes vulnérables et un dispositif de mise en oeuvre et de suiviévaluation décentralisé et participatif. A cela, s'ajoute ainsi le second axe stratégique qui concerne le renforcement des capacités.

La lutte contre la pauvreté se réduit donc à une sorte de politique sociale avec comme point d'appui l'atténuation des effets néfastes des PAS fortement critiqués. Mais ces politiques de réduction de la pauvreté qui se sont substituées aux politiques de développement se placent elles aussi dans la désillusion du modèle de l'ajustement en ce sens qu'elles reproduisent également des postulats similaires à ceux des PAS, négligeant le fait que le problème réside moins dans leur application sélective par les États africains que dans leur incapacité intrinsèque à promouvoir un développement autoentretenu et équitable, comme le souligne ce passage du CNUCED : «La nouvelle approche mettant l'accent sur la réduction de la pauvreté semble donc être fondée elle aussi sur le postulat selon lequel la libéralisation et l'intégration rapide et poussée à l'économie mondiale sont la clef d'une croissance rapide et soutenue. La croissance ne profitant pas automatiquement aux pauvres, on peut se demander comment concilier des politiques mettant l'accent sur la primauté des mécanismes du marché, notamment dans les secteurs commercial, financier et agricole, et un meilleur accès des pauvres aux actifs productifs» ( S. Ndiaye, 2007, p40).

C'est dire que justement, les apparences trompeuses des politiques de lutte ou de réduction de la pauvreté se trouvent dans le fait qu'elles ne se sont pas réellement démarquées des fondements économistes de PAS, ni n'ont questionné la prédominance du marché avec ses mécanismes d'inégalités et d'exclusion. Bref, elles se présentent pour reprendre les propos de S. Ndiaye, plus comme une politique sociale des PAS que comme une opportunité de renouveler les modalités de régulation de l'économie ainsi que comme le mode d'insertion du Sénégal dans le marché mondial (S. Ndiaye, 2007, p41).

1.4.2- La stratégie de croissance accélérée (SAC)

Concernant la politique agricole, la nouvelle vision du Président de la République s'articule autour de trois axes fondamentaux selon S.M. Seck : la mise en place d'un réseau hydrographique national, l'aménagement des bassins de rétention, la promotion de l'agriculture d'entreprise grace notamment à l'installation des jeunes diplômés dans les fermes modernes, (S.M Seck, 2001 : 233).

En effet, l'adoption de cette stratégie trouve son explication dans le fait que la totalité des diverses réformes devait inscrire l'agriculture dans une perspective de croissance avec comme effet recherché une augmentation de son produit intérieur brut. C'est d'ailleurs sous ce rapport que selon son initiateur le Président Abdoulaye Wade, la SAC repose sur deux piliers fondamentaux : « d'abord rendre le Sénégal attractif et compétitif dans un environnement mondial concurrentiel et de plus en plus exigeant en poursuivant les réformes nécessaires pour un environnement des affaires de classe international ; ensuite, renforcer les investissements publics et accompagner le secteur privé dans ces initiatives d'investissements dans les domaines porteurs de croissance, de potentiel d'exportation et pourvoyeurs d'emplois : agriculture et agro-industrie, produit de la mer et aquaculture, textile et habillement, tourisme, industrie, culture et artisanat d'art, technologies de l'information et de la télécommunication et téléservices »2. La logique qui sous-tendait la SAC était de créer les conditions de nouveaux gains de productivité afin d'atteindre un taux de croissance de 7 à 8%. Elle devait reposer essentiellement sur une large démarche d'accroissement du taux d'investissement afin de développer le secteur privé pour placer au centre de la création de richesses et d'emplois durables et ensuite une politique de promotion et de diversification des exportations.

C'est également dans la recherche de solutions palliatives aux problèmes causés par les PAS que le Sénégal a adopté dans les années 90, la Lettre de Politique de Développement Rural ou Décentralisé (LPDR).

1.4-3- Lettre de Politique de Développement Rural Décentralisé (LPDR) :

Au nombre des nouvelles orientations stratégiques dans les différents secteurs, la mise en place et l'évolution du cadre légal et réglementaire de la décentralisation traduit un changement plus général dans l'approche du gouvernement vis à vis des questions de développement. De nouveaux principes de responsabilisation et participation locales, de désengagement de l'Etat, de transparence dans les mécanismes de prise de décision, et de redevabilité des structures et des prestataires de services devant les populations, guident la conception et la mise en oeuvre des actions de développement dans les secteurs.

En fait, la décentralisation au Sénégal remonte en 1972 avec la réforme administrative territoriale, et en 1994, une nouvelle collectivité locale à savoir la région est créée. Mais ce

2 - Abdoulaye Wade, le Sopi en marche, ficher électronique en format PDF

n'est qu'en 1996 que la politique de décentralisation sera consacrée au Sénégal à travers l'adoption de textes fondamentaux de la décentralisation et de la régionalisation par l'Assemblée Nationale. Le développement rural décentralisé a ainsi pour ambition de contribuer à améliorer la qualité de la vie et l'accès aux services essentiels de base en milieu rural, en permettant aux communautés rurales de prendre en charge les affaires locales et en créant un cadre permanent aux divers acteurs d'utiliser aux mieux leurs compétences respectives.

En effet, après une description des dimensions de la pauvreté, la présente Lettre de Politique de Développement Rural Décentralisé s'articule autour de trois axes : la présentation des stratégies de développement actuellement mises en oeuvre, la prise en compte des insuffisances rencontrées dans la mise en oeuvre des stratégies notamment en milieu rural et la détermination des images finales de la vision à l'horizon 2015. La LPDR affirme que l'accès à l'éducation de base et professionnelle, à l'alphabétisation fonctionnelle, et aux services de santé essentiels (préventifs et soins de santé primaires) est une condition nécessaire pour que les populations rurales contribuent pleinement au développement socio-économique du pays, et en profitent équitablement. Par ailleurs, la disponibilité d'infrastructures économiques de base constitue un préalable à l'implantation d'investissements productifs en milieu rural et à l'intégration des populations rurales dans l'économie de marché.

Le développement rural décentralisé a ainsi pour ambition de contribuer à améliorer la qualité de la vie et l'accès aux services essentiels de base en milieu rural, en permettant aux communautés de prendre en charge les affaires locales et en créant un cadre permettant aux divers acteurs que sont les populations, les collectivités locales, l'Etat et ses services déconcentrées, les ONG, le secteur privé et les partenaires au développement d'utiliser au mieux leurs compétences respectives.

Malgré cette volonté politique de développement local, les collectivités locales semblent avoir beaucoup de mal à s'approprier les compétences issues de la décentralisation, du fait des déficits techniques et financiers au moment où se posent des contraintes multiples. Ceci peut s'expliquer par la faible maîtrise de la fiscalité locale, les difficultés de la majorité des élus locaux à s'approprier des modalités et les outils de la décentralisation.

Ainsi à travers une telle analyse, on peut être amené à affirmer que « l'alternance » qui constituez le premier changement de régime politique à la tête de l'Etat, à défaut de rater sa mission, a tout de même déçu les sénégalais puisque le revenu des habitants a considérablement baissé. Elle révèle si l'on peut ainsi dire, d'un changement de leaders et non un changement du mode de régulation sociale, économique et politique en ce sens qu'après sa

mise en place, elle a favorisé une certaine recomposition politique mais n'est pas encore arrivée à rompre avec la logique de régulation du pouvoir précédent. C'est tout simplement dire que l'alternance n'a pas encore favorisé l'émergence d'alternatives au Sénégal, ni dans la promotion d'un développement équitable, ni dans la transformation des modalités de régulation socio-économique et politique.

Finalement, les politiques de développement agricole, malgré les quelques réalisations notées, ont dans leur majorité abouti à ce que Boudon appelle des effets pervers. Il semble évident que le passage d'une logique d'intervention catégorique de l'État à une stratégie de désengagement de ce dernier avec les PAS sous le slogan « moins d'État, mieux d'État » n'ait pas aussi réussi à réformer structurellement la politique agricole. L'État reste toujours l'acteur déterminant du monde rural et en nous référant à sa lecture partielle voire partiale des accords signés avec les bailleurs, on constate que le régime au pouvoir s'est plus soucié de sa reproduction et de son désengagement de ses fonctions onéreuses. La politique agricole du Sénégal traduit davantage une logique d'encadrement qui consiste à s'adapter aux changements du contexte mondiale qu'à dégager une politique cohérente et porteuse. L'État continue ainsi d'être le principal bénéficiaire politique de toutes ces réformes et demeure volontairement prisonnier à la fois des réseaux clientélistes nationaux que de la pression des bailleurs de fonds extérieurs, plus soucieux d'universaliser l'économie de marché.

Par ailleurs, une analyse uniquement en termes de crise se révèle insuffisant pour comprendre et saisir les dynamiques actuelles du pays. Dans ce contexte de crise, se manifestent des processus innovants et émergents qui constituent de nouveaux acteurs cherchant à se positionner parmi les acteurs stratégiques. Ainsi ces dynamiques au Sénégal, peuvent être situées à différents niveaux. Et dans le cadre de ce travail, c'est-à-dire en rapport avec notre recherche, nous avons décidé de nous appesantir sur les stratégies d'intervention des structures ou organismes étatiques dans le développement local initié par les communautés rurales à travers la création d'Organisation de producteurs.

1.5- Présentation du cadre d'étude

1.5-1- Présentation de la CR de Gandon

Située à l'embouchure du fleuve Sénégal, la communauté rurale de Gandon regroupe 83 villages disséminés sur environ 560 km2. Elle a la particularité d'encercler la commune de

St louis qui est la capitale régionale. Sa population est estimée à 45.000 habitants3 et est en fort accroissement du fait de l'installation de nombreux Saint-Louisiens sur son territoire.

En fait, la CR de Gandon se situe dans la partie Sud-ouest du département de Dagana. Elle est limitée au Nord par la commune de Saint-Louis, au Nord-est par l'arrondissement de Ross-Béthio, à l'Ouest par le fleuve Sénégal et l'océan Atlantique, au Sud-est par les arrondissements de Sakal et de Keur Momar Sarr dans la région de Louga et à l'est par la CR de Mpal. La communauté rurale est peuplée principalement de 3 ethnies : les Wolofs (45%), les Peuhls (35%) et les Maures (15%)4.

La position stratégique de la CR de Gandon par rapport à la capitale régionale de Saint-Louis fait qu'elle entretien avec la région d'importants rapports d'échanges dans les domaines de l'agriculture, de l'élevage, de commerce mais aussi avec l'université Gaston Berger.

Figure 1 : Localisation du cadre spécifique d'étude.

Légende

Zone d'étude

Communauté rurale de Gandon

Région de Saint-Louis Source : www.au-sénégal.com

Puisque notre étude porte sur l'interventionnisme d'une structure de développement agricole (ANCAR) en rapport avec les organisations de producteurs, nous avons alors jugé nécessaire de présenter les caractéristiques de l'agriculture et du secteur de l'hydraulique dans cette localité.

La majorité de la population active est agriculteur, ce qui fait de ce secteur la principale activité socio-économique de la zone. En effet, d'après les données recueillies par la Direction régionale de l'agriculture de Saint-Louis, l'agriculture concentre 80% des actifs

3 - PLD de la communauté rurale de Gandon, 2005

4 - Direction de la prévision Statistique, 1988

qui y tient l'essentiel de leurs revenus. Elle est pratiquée sous deux formes : l'agriculture sous pluie itinérante conditionnée par un régime pluviométrique très aléatoire. Ce qui fait qu'elle donne des résultats rarement satisfaisants. Les spéculations agricoles portent principalement, pour les cultures sous pluies, sur l'arachide, le mil et le niébé ; tandis que les cultures irriguées concernent surtout les espèces maraîchères avec la tomate et l'oignon qui émergent du lot, mais aussi la patate et les pastèques. Les cultures céréalières opposent l'extrême nord du avec du riz, au sud où le mil tente difficilement à boucler son cycle. La faible pluviométrie de ces dernières années n'a donc pas favorisé les cultures dites pluviales et par conséquent, le maraîchage s'impose aujourd'hui comme système de production le plus important. En l'espace de dix (10) ans, les cultures pluviales ont connu un véritable déclin.

En une décennie, les superficies emblavées en céréales ont connu une baisse de l'ordre de 38,3% soit (777 ha de moins). De même, les productions ont connu le méme sort d'autant qu'elles sont passées de 800 tonnes au début de la décennie à 294 tonnes seulement à la fin de 2008 soit un recul de près de 63,35%5 . L'arachide constitue la deuxième spéculation pluviale. Au début des années 90, l'arrondissement de Rao faisait encore partie des principales zones de production du pays avec près de 2700 ha de terre emblavée et une production d'environ 1215 tonnes. Cependant, en une décennie la production connaît une diminution de 53,4% soit 651 tonnes de moins (Cf. tableau ci-après page).

Tableau 1 : Les spéculations dans la communauté rurale de Gandon

Localités

Mil

Arachide

Arrondissements

Superficies (ha)

Productions (t)

Superficies (ha)

Productions (t)

Rao

2024

800

2700

1215

Ross-Béthio

6759

5700

700

350

Mbane

10791

2000

380

190

Total

19377

8500

3780

1155

Source : Direction régionale de l'agriculture de Saint-Louis (2007/2008).

L'agriculture sous pluies connaît un déclin et s'est accentuée pendant la décennie 90 malgré l'augmentation des superficies emblavées qui passe de 1292,79 à 3150,09 ha soit un

5 - Direction régionale de l'agriculture de Saint-Louis, 2006/2007

accroissement de 1857,3 ha entre la campagne de 2007/2008 soit 58,98%, en l'espace d'une année tandis que les productions continuent leur déclin pour passer de 3034,72 tonnes6.

Tableau 2 : Cultures hivernales et productions dans la CR de Gandon en 2007-2008

Espèces

Campagne 2006/2007

Campagne 2007/2008

Superficies (ha)

Productions (t)

Superficies (ha)

Productions (t)

Mil

244,02

475,86

275,4

6,88

Niébé

557,77

732,06

1990,74

72,35

Arachide

177,77

549,04

267,5

26,34

Bereef

122,01

17,43

457,45

82,340

Manioc

34,86

854,07

23,85

20,87

Bissap

30,5

48,80

71,55

17,59

Riz

34,86

61,005

-

-

Divers

30,5

26,14

-

-

Source : CERP/Rao, 2007-2008

Selon le CERP de Rao, la demande en céréales qui tourne autour de 1200 tonnes par an n'est jamais satisfaite. La production totale de céréale pour la CR était de 537 tonnes et avec un déficit de quelques 615 tonnes en 2006, elle passe à 255 tonne soit une baisse tournant autour de 890 tonnes en 2007.Ce qui fait que la CR se trouve sur la liste des zones à risques du commissariat à la sécurité alimentaire qui intervient très fréquemment au secours des populations. Le maraîchage, malgré les nombreux obstacles s'impose comme la seule alternative aux producteurs de la localité. Cependant, cette activité est aujourd'hui confrontée à un problème crucial : l'inadéquation des multiples interventions des sociétés de développement avec les pratiques culturales des producteurs.

Le réseau hydraulique de la communauté rurale de Gandon quant à lui est constitué du fleuve Sénégal et d'autres cours d'eaux tels que le Ndialakhar, le Minguegne, le Khant ou le Ngalam. Il constitue un potentiel intéressant pour le développement de l'agriculture et en particulier de l'agriculture irriguée.

6 - Op. Cite,

1.5.2- Présentation du village de Sanar

Le « Foyer de Sanar » constitue effectivement l'OP sur laquelle porte notre travail de recherche. Il s'agit ainsi d'un groupement d'agriculteur qui se trouve dans le village de Sanar ou communément connu sous le non de « Sanar wolof ». Ce qualificatif lui est attribué en raison de sa cohabitation avec un autre village appelé également Sanar, mais spécifié sous le nom de « Sanar peulh ». Cependant, nos enquêtes ont révélé qu'il n'y a pas deux Sanar, mais plutôt un seul et c'est « Sanar wolof ». Le vrai nom du village de Sanar peulh est en fait Diougob et non Sanar. En effet, Sanar est un village de la communauté rurale de Gandon avec une population à majorité wolof d'où le qualificatif de « Sanar wolof » pour le différencier de l'autre Sanar à majorité peulh. En effet, le village de Sanar est situé à quelques dix huit (18) kilomètres de Gandon qui est le chef lieu de la communauté rurale. Il se trouve à l'instar de l'autre Sanar derrière l'Université Gaston Berger de Saint-Louis.

L'activité principale de la population de ce village est en fait l'agriculture. Cette activité touche à peu près toutes les couches de la population aussi bien les jeunes et les vieux que les hommes et les femmes. Dans cette perspective, le Foyer de Sanar est une organisation paysanne au sein de laquelle, sans risque de nous tromper, se trouve la presque totalité des producteurs et des productrices du village de Sanar.

Chapitre II : Cadre Théorique

Il est question dans ce chapitre de présenter les différentes approches théoriques sur lesquelles s'appuie notre étude. L'étude s'inspire d'un cadre théorique combinant deux approches principales : les théories sur l'action des organisations paysannes et leurs différentes approches d'analyses et les théories sur les rapports entre l'État et les OP.

2. 1- Les différentes analyses théoriques de l'action des organisations

Plusieurs auteurs ont étudié les mécanismes de coopération sur l'action collective au sein des organisations dont les réflexions s'articulent autour de différentes approches théoriques. Ainsi l''analyse des associations dans le cadre de cette étude s'appui sur différentes approches de l'action des organisations : l'approche de Parsons (1956), l'approche de Crozier et Friedberg (1977) et l'approche de March et Simon (1991).

2.1. 1-L'approche parsonienne des organisations

Parsons (1956)7 note au sein de la société moderne l'existence des structures formelles telles que les entreprises, les institutions scolaires et l'armée conçues en vue de la réalisation des fonctions précises: la production de biens, des services et la défense. Ces organisations sont des sous-systèmes du système social et entretiennent par conséquent des relations avec l'environnement au sein duquel elles évoluent. Parsons conclue qu'il y'a interdépendance entre ces sous-systèmes constitués d'organisations et les autres sous-systèmes de la structure sociale. Quatre fonctions communes à tous les systèmes sociaux ont ainsi été identifiées : la fonction de production, d'adaptation, d'exécution et d'intégration.

D'abord la fonction de production permet à l'organisation de déterminer les orientations qui guideront les activités des membres. Ensuite la fonction d'adéquation mobilise les ressources nécessaires à l'accomplissement des buts à atteindre. La fonction d'exécution quant à elle concourt à la gestion des ressources matérielles et humaines nécessaires à la réalisation des buts. Et enfin la fonction d'intégration assure l'harmonie des éléments constitutifs de l'organisation. Pour Parsons, les organisations formelles ne se définissent qu'à partir des buts et des fonctions qu'elles fournissent au sein de la société. Mais, la seule analyse des buts et

7 - Parsons T., 1956, Le système des sociétés modernes. Dunod, Paris.

objectifs de ces organisations sans tenir compte de l'être humain, est insuffisante pour comprendre leur fonctionnement.

2.1.2- L'approche de March et Simon

March et Simon (1991)8 révèlent que l'on ne saurait prétendre analyser les organisations sans tenir compte de l'être humain. Trois conceptions du comportement humain au sein des organisations apparaissent : la première concerne la rationalisation du travail. Les membres des organisations sont considérés comme des instruments qui reçoivent et exécutent des ordres et des directives sans toutefois prendre des initiatives ; la deuxième conception fait état des écarts qui existent entre les objectifs de l'organisation, les attitudes et les systèmes de valeurs des membres ; la troisième met l'accent sur la prise de décision des membres au sein de l'organisation et la résolution des problèmes auxquels ils font face. Par cette approche March et Simon (1991) analyse les organisations sous l'angle de l'individu.

Toutefois ces deux approches ne présentent pas le contexte organisationnel où se développe l'action collective.

2.1.3- L'approche de Crozier et de Friedberg

Crozier et Friedberg (1977)9 font de l'organisation un mobil expérimental des difficultés et des problèmes de coopération que pose toute action collective (Lafaye, 1996)10.

La théorie de l'action collective met en exergue la réalisation d'un objectif commun. Elle insiste sur les intérêts contradictoires des membres d'une organisation. Les individus qui acceptent adhérer à une organisation participent à la poursuite des objectifs de cette organisation tout en satisfaisant également leurs intérêts respectifs. Ainsi tout examen d'une action collective devrait se fonder sur une logique collective et individuelle qui caractérise toute coopération.

L'approche de Crozier et Friedberg apparaît ainsi comme une intermédiation des deux premières. Ainsi l'action d'un individu au sein d'une organisation apparaît comme une certaine autonomie de ce dernier vu comme un acteur.

8 - March J. & Simon H., 1991, Les organisations. 2e Edition. Dunod, Paris.

9 - Crozier & Friedberg, 1977, Acteur et le Système. Seuil, France

10 - Lafaye C., 1996, Sociologie des Organisations. Nathan, Paris

2.2- Approches d'analyse

L'approche stratégique et l'approche dynamique ont été utilisées dans le cadre de notre étude pour mieux cerner la logique de fonctionnement des organisations.

2.2.1- Approche stratégique

Celle-ci rend compte de la logique de fonctionnement de toute forme d'actions collectives et de coopération. Elle fait apparaître deux logiques dans l'action collective: la logique collective et la logique individuelle. Les individus d'une part orientent leurs comportements vers la réalisation d'un objectif commun et d'autre part, ils ont des intérêts respectifs qu'ils vont chercher à satisfaire par le jeu de plusieurs stratégies. Lequel permettrait d'atteindre les objectifs fixés par les membres et de découvrir les intérêts individuels que ces membres retirent ou veulent tirer de leur adhésion à ces groupes et les moyens utilisés pour y parvenir.

2.2.2- L'approche dynamique

Elle permet de façon précise de rendre compte des processus de changement et de transformation qui peuvent affecter un groupe social ou une société globale. A travers elle, les changements ressortent tant au niveau individuel que collectif de l'adhésion des membres à ces organisations.

2.3- Objectifs et rôles des organisations paysannes

Les organisations ont pour objectifs de coordonner les actions sociales des membres. Diagne et Pesche (1995)11 les présentent comme étant à la fois un lieu d'expression des intérêts des membres et un moyen qui leur permet d'atteindre les objectifs fixés. Selon Berthome et al. (1995)12, les organisations paysannes se construisent à l'interface entre la société locale et la société globale comme un moyen de régler les relations d'une part, les individus et les différents groupes sociaux qui composent la société locale et d'autre part, les

11 - Diagne D. & Pesche D., 1995, Les organisations paysannes et rurales : Des acteurs du Développement en Afrique Subsaharienne. GAO, Paris

12 - Berthome J., Sardan & Mercoiret M.R., 1995, Les organisations paysannes face au désengagement de l'Etat. Compte rendu de l'atelier international de Mèze, CIRAD, France. (20 - 25 Mars 1995)

acteurs qui constituent l'environnement. Parmi les stratégies envisagées par les paysans se trouvent les différents groupements qui pour Berthome se construisent pour améliorer les relations des paysans avec leur environnement économique et institutionnel. Ils sont une interface, un moyen d'articuler la société locale à la société globale dans les conditions qui soient plus favorables à la première.

Socialement, Lavigne (1986)13 note que les organisations paysannes constituent un cadre idéal pour la vulgarisation des innovations. Ainsi, les organisations paysannes peuvent faciliter « l'apprentissage, c'est-à-dire, la découverte, voire la création et l'acquisition par les acteurs concernés de nouveaux modèles relationnels, de nouveaux modes de raisonnement, de nouvelles capacités collectives », (Berthome et al. (1995 : 20)14.

Selon Rondot et al. (2001), les organisations paysannes sont des structures basées sur l'adhésion et créées par les agriculteurs (ou par d'autres groupes) pour fournir des services à leurs membres. Elles ont pour objectifs : 1) de mieux gérer les ressources naturelles et les biens de leurs membres; 2) d'élargir l'accès des membres aux ressources naturelles et aux moyens de production de base (Terre, forêts, pâturages et ressource en eau); 3) d'améliorer l'accès des membres aux services (économique, social), aux crédits et aux débouchés commerciaux par le biais des activités de représentation et de défense des intérêts des membres, ou par leur poids financier combiné; 4) de faire entendre leur voix dans les mécanismes de décision. Ceci détermine l'affectation de biens et les politiques ayant une incidence sur l'environnement dans lequel ils produisent et commercialisent.

Les organisations paysannes ont des impacts directs sur les revenus dans ce sens qu'elles permettent un meilleur accès aux facteurs de production et au marché tout en contribuant au renforcement des capacités de négociation et de représentation des producteurs. Pesche (2001)15 distingue trois catégories de rôles que peuvent jouer les organisations de producteurs: 1) la fourniture de services à leurs membres qui peuvent être de nature technique ou économique; 2) la représentation des intérêts de leurs membres et, plus largement, des agriculteurs ou ruraux sans forcément qu'ils en soient membres; 3) l'implication dans le développement local, sous forme d'investissements sociaux.

13 - Lavigne D., 1986, Les associations paysannes en Afrique: Organisation et dynamique. Karthala, Paris

14 -Idem.

15 - Pesche D., 2001, Classification et typologie des organisations paysannes www.agridoc.com/fichestechniques gret/organisation%20paysannes/ IR14_classification_et_typologie_des_op.pdf.

OP

Services à ses
membres

Face à des carences de l'Etat ou des collectivités locales, elles assurent ainsi des fonctions d'intérêt général qui rendent des services à l'ensemble des ruraux au delà de leurs membres.

Les trois catégories de rôles peuvent être schématisées ainsi :

Schéma 1: Rôles des organisations de producteurs.

Représentation
des intérêts

Développement
local

Intérêt général

Intérêt du
groupe

Source : Pesche, 2001

Toute organisation peut alors être située dans un triangle en fonction de l'importance relative des trois fonctions. Berthome et al. (1995) montre que l'organisation est aussi le lieu d'expression des producteurs adhérents, parce qu'elle offre un cadre codifié par l'intervenant extérieur où se rencontre l'encadreur et les encadrés, où s'articulent aussi deux types de logiques, celle de la société locale et celle de l'intervenant extérieur, et souvent «deux systèmes de sens». Selon cet auteur l'organisation paysanne est largement déterminée par la société locale et par son environnement mais elle n'est cependant le simple produit des interactions entre ces deux entités. En tant qu'organisation spécifique, elle a aussi sa dynamique.

Par son action elle contribue à accroître le potentiel de la société locale, et élargie sa marge de liberté et le choix pour le futur. Elle contribue aussi à accroître sa capacité à se construire des objectifs propres et certains des instruments dont elle a besoin pour les

atteindre.

Une autre perspective montre que l'émergence de l'organisation paysanne se produit à l'interface de la société locale et de la société globale. Berthome (1995)16, rapporte que l'analyse des organisations paysannes doit prendre en compte simultanément : 1) la société locale dans laquelle se construisent les organisations et les changements multiples qui les concernent; 2) la société globale et ses évolutions; 3) les dynamiques propres aux organisations paysannes et les effets qu'elles produisent sur la société locale et la société globale. Et ceci sans les opposer, mais en les considérant dans leurs interactions permanentes.

2-4 Organisations paysannes et diffusion de l'innovation

Les OP sont perçues comme des relais de la vulgarisation susceptibles de diffuser à moindre coût et avec une efficacité significative des propositions élaborées en dehors d'elles. Le rôle des OP consiste aussi à créer des conditions favorables à l'innovation, en particulier en contribuant à sécuriser l'environnement économique et à le rendre plus incitatif: des intrants qui arrivent à temps, un système de crédit fiable, un marché sécurisé pour les produits bruts ou transformés, un transport crédible, etc. font parfois plus pour stimuler l'innovation chez les producteurs qu'un message répété sans que son adaptation à la situation économique locale soit assurée. Dans ce domaine donc, le rôle des organisations paysannes consiste à acquérir la capacité de bâtir un partenaire avec d'autres acteurs, publics et privés (Sebillotte, 1996).

2-5- Stratégie paysanne et rôle dans l'agriculture

Selon le Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté (2003 : 41), une stratégie s'articule autour d'un certain nombre d'axes qui permettent d'atteindre un résultat ultime. A en croire ses auteurs, une stratégie suppose ou implique donc une série d'articulations (actions) à laquelle est subséquent le résultat ultime. Une stratégie s'articule à plusieurs niveaux pouvant aller de l'essentiel au particulier que sont les résultats ultimes, les buts, les objectifs et les moyens (Losch et al. 1990). L'essentiel d'une stratégie étant l'aboutissement à une finalité.

Selon Losch et al. (1990 : 121), la finalité est l'expression qualitative d'une orientation définissant à long terme la fin vers laquelle tend le système.

16 - Berthome J. et al, 1995, Les organisations paysannes face au désengagement de l'Etat. Compte rendu de l'atelier international de Mèze, CIRAD, France. (20 - 25 Mars 1995)

L'émergence de stratégies peut résulter des forces internes d'un système ou être impulsée par des forces externes au système. C'est ainsi que de l'analyse faite du profil des objectifs et des moyens mis en oeuvre par les producteurs agricoles. Losch et al. (1990 : 136) proposent en fonction de leur dominance offensive ou défensive les stratégies suivantes:

-La stratégie à dominance offensive qui a un objectif clair d'accumulation et de croissance: la stratégie d'entreprise, d'accumulation foncière et d'intensification spécialisation.

- La stratégie à dominance défensive qui est celle des producteurs en situation de fortes contraintes et essaient de défendre et d'assurer la survie de leur unité de production: double activité contrainte et revenu cible.

- La stratégie de type intermédiaire qui selon les opportunités ou les contraintes peut évoluer dans un sens offensif ou défensif: la minimisation du risque.

2-6 Classification et typologie des organisations

Selon Pesche (2001), une classification a pour principal but de décrire. Classer revient donc à construire des catégories souvent à partir d'un nombre limité de critères parmi lesquels : L'origine, la taille, la composition, la fonction, la nature des activités, la nature des membres et la nature du produit agricole dominant dans la zone (filière).

La typologie analyse, comprend en vue d'agir.

Wampfler (2000) propose une typologie qui rassemble trois groupes d'organisations paysannes : Les organisations par filière le plus souvent centrées sur un produit agricole, les organisations généralistes qui ont une combinaison d'activités diverses et les organisations syndicales axées sur la fonction de représentation des intérêts des producteurs agricoles ou une catégorie de producteurs. Ainsi il existe plusieurs types d'organisations paysannes, celles dites formelles, légalisées et les informelles qui ne sont pas légalisées.

2.6.1- Classification des organisations selon leur origine

Elle permet de distinguer les organisations selon que l'initiative de création est d'origine interne ou externe.

2.6.1.1-Organisation d'origine interne

L'initiative de création d'une organisation selon GAO (2000) provient d'un groupe

d'individus le plus souvent restreint. Ces initiateurs sont ainsi considérés comme membres fondateurs et définissent de ce fait les objectifs et les orientations de l'organisation. Dans une telle organisation l'adhésion se fait par cooptation, de gré à gré. C'est le cas des mutuelles, des tontines et la plupart des associations dites traditionnelles.

2.6.1.2- Organisation d'origine externe

Contrairement au précédent mode de création, l'initiative d'une telle organisation provient d'une instance externe telle que l'Etat, l'autorité religieuse et les ONG. Par conséquent cette dernière à une influence considérable sur l'organisation et son fonctionnement. Les objectifs et les activités de l'organisation ne sont que le reflet des aspirations de son initiateur. Dans le type d'organisation créée de l'extérieur, on retrouve les anciennes coopératives, les comités de développement, les groupes et mouvements religieux et les associations initiées par l'élite extérieure et les ONG. Ces organisations réalisent des oeuvres à caractère économique et social.

2.6.2- Classification des organisations selon leurs fonctions

Selon Berthome et al. (1995), une organisation ne choisit pas d'être multifonctionnelle ou spécialisée. Cela dépend de ses conditions de naissance et de son contexte. Ce qui nous amène à les regrouper en trois grands ensembles : les organisations unifonctionnelles, les organisations plurifonctionnelles et les organisations à fonction dominante.

2.6.2.1- Organisations unifonctionnelles

Ces organisations sont constituées pour remplir une seule fonction. Les tontines financières à enchères et de crédit en milieu urbain appartiennent à cette catégorie. Leur principale activité se limite aux cotisations financières. En milieu rural, les banques de céréales sont considérées comme des associations à fonction unique. Toutefois, il importe de noter qu'il est rare de retrouver en milieu rural des organisations unifonctionnelles car du fait de la complexité de l'environnement, des organisations remplissent plus d'une fonction à leurs membres. Selon Pesche (2002), la spécialisation d'une organisation de producteurs peut être une source de fragilité dans l'environnement instable du secteur rural.

2.6.2.2- Organisations plurifonctionnelles

Selon Balla (1995), ces organisations sont caractéristiques des sociétés africaines. Selon les besoins des membres et de l'environnement, elles assurent plusieurs fonctions qui peuvent être économique, politique, sociale ou culturelle. Les membres y trouvent un cadre propice pour faire face à la complexité de leur environnement. En zone rurale, ces organisations plurifonctionnelles résultent des perpétuelles mutations du milieu. Ainsi une organisation paysanne pourra remplir des fonctions telles que : la fonction de production (production vivrière, maraîchères et d'autres biens), la fonction de commercialisation, la fonction d'approvisionnement et la fonction de représentation.

2.6.2.3- Organisations à fonction dominante

A la fonction principale d'une organisation, peuvent se greffer d'autres fonctions qui généralement sont occasionnelles. Souvent ces fonctions concourent au renforcement des liens entre les membres du groupe. C'est le cas des organisations d'épargne, les comités villageois de santé ou de vigilance (Balla, 1995).

2.7- Classification des organisations selon la nature des membres

Blundo (1991) distingue deux types de bénéficiaires : les membres et les nonmembres. Les individus inscrits et remplissant les conditions d'adhésion exigées par une organisation sont considérés comme membres. Ils ont le droit et le devoir de participer à toutes les activités du groupe. Les non-membres sont ceux-là qui n'ont contracté aucun engagement avec une organisation. Toutefois, ils peuvent être impliqués indirectement dans les activités de l'organisation, parce que résident dans un même cadre géographique que les membres. Cette classification fait distinguer deux types d'organisations : les organisations fermées et les organisations ouvertes. Dans le premier type d'organisation, les services offerts ne concernent que les membres, tandis que dans le second cas les services peuvent être offerts à la fois aux deux catégories de membres.

2.8- Classification des organisations selon leur composition

GAO (2000) présente à cet effet deux cas de figures : soit l'organisation réunit une seule catégorie de personnes, soit elle réunit plus d'une catégorie de personnes.

Dans le premier cas, les organisations ne concernent pas l'ensemble des membres de la communauté dans laquelle elles sont localisées. L'adhésion à ce type d'organisation devient sélective. C'est le cas des regroupements d'apiculteurs, de jeunes, de femmes ou de pisciculteurs.

Dans le deuxième cas, l'adhésion se fait indifféremment des couches sociales. Elle est libre et volontaire.

Quelque soit la classification ou la typologie adoptée, en pratique les frontières entre ces différents critères restent fluides.

2.9 - Courants théoriques sur les rapports entre l'État et les paysans

2. 9.1- L'organisation bureaucratique du secteur agricole par l'État :

Cette approche part de l'hypothèse selon laquelle l'essor des initiatives autonomes est ressenti comme une menace pour les intéréts de l'État. Considérer l'organisation paysanne ou la coopérative comme l'affaire de l'État et non celle des coopérateurs, c'est supposer que l'ordre ne peut régner dans le monde rural que si les OP disparaissent ou sont placées sous le contrôle des appareils étatiques.

2. 9.1.1- Le contrôle de la paysannerie par l'État :

Les représentations que les « développeurs » se font d'eux-mêmes et de leurs pratiques sociales se réfèrent, classiquement, à l'ordre légal, rationnel et bureaucratique caractéristique de la culture occidentale (Weber, 1991) et à « l'artificialisme » découlant du système de valeurs individualiste et positiviste (Dumont, 1985). Le développement rural n'est, à ce niveau, que le transfert de la croyance en l'ingénierie sociale que la culture occidentale s'est d'abord appliquée à elle-méme et qu'elle a ensuite mise en oeuvre dans les territoires coloniaux.

L'idéal bureaucratique auquel s'identifie la culture moderne de l'Occident s'efforce de combiner les valeurs d'efficacité et d'équité, et le terrain colonial ne constitue nullement une exception. Certes l'exotisme n'est pas entièrement évacué de la culture coloniale ; il demeure important, mais davantage comme un élément distinctif valorisant que comme un élément discriminant de l'identité sociale des acteurs. Les indépendances n'apportent guère de changements en ce qui concerne les « agents expatriés » du développement.

En ce qui concerne les nouvelles structures nationales d'administration du développement, la situation est plus complexe et exigerait une analyse qui ne peut être qu'ébauchée : a) Un premier point est la continuité formelle de la légitimité bureaucratique dans ce que l'on appelle significativement le secteur ou le monde du développement, qu'il s'agisse d'agences gouvernementales, internationales ou non-gouvernementales ; b) Un deuxième point est la bureaucratisation inéluctable des organisations issues du milieu rural lui-même dès lors que, pour accéder aux ressources du « secteur du développement », elles sont tenues de répondre aux exigences organisationnelles explicites des bailleurs de fonds. Plus que jamais la conformité réelle ou apparente aux normes d'efficacité et d'équité du modèle bureaucratique est une condition d'accès au « monde du développement » ; c) Un troisième point, conséquence du précédent, est la croissance en milieu rural d'une couche sociale d'intermédiaires entre le dispositif officiel de développement et les bénéficiaires de son intervention J.P. Jacob, 1997).

En effet, après la colonisation qui a intégré les populations indigènes dans un mode de production dominant au profit du groupe d'intérêts extérieurs, les politiques nationales de développement agricole des pays africains s'adaptent à ce système en privant les paysans de leur autonomie afin de masquer la réalité de l'exploitation dans les zones rurales (Ela, 1990, Goussault, 1976, Casswell, 1984, Dumont). Les appareils de l'État ont pris le relais du système colonial en imposant des structures d'encadrement qui renferment les producteurs locaux dans les nouvelles formes de domination. Comme le remarque Goussault : « L'initiative de l'État a pour objet premier une action sur la production agricole pour assurer la formation et l'appropriation de plus-values au profit du mode de production dominant la formation sociale », (Goussault, 1976).

Ce processus s'inscrit dans une stratégie globale qui met en oeuvre non seulement des idéologies mais aussi des facteurs économiques et politiques. En effet, à travers les sociétés de développement spécialisées dans une production de rente, l'État occulte ses processus de domination en recourant à l'idéologie de modernisation qui joue le rôle d'un modèle culturel intégré au appareils de pouvoir. En ce sens, le « déguisement » est partie intégrante de

l'intervention de l'État dans le domaine agricole. Moustapha Kassé renchérit pour fustiger la pertinence de ces institutions en affirmant que : « Au plan de l'encadrement, (..) l'intervention des Société de Développement Rural (SDR) n'a pas servi les intérets des petits producteurs Tout au plus, elles ont bénéficié techniquement, économiquement et socialement à une élite paysanne Par ailleurs, par une assistance bureaucratique et pesante, elles ont

complètement empêché les paysans de se prendre véritablement en charge en développant

leur propre dynamique d'organisation, de production et de commercialisation » (M. Kassé, 1996 :24). Dans la majorité des pays africains, l'intervention de l'État dans ce secteur ne se fait pas seulement par l'intermédiaire des sociétés de développement et des services d'animation rurale, mais aussi, naturellement du parti dominant ou comme l'appelle Ela le « grand parti ou le parti unique », (Ela, 1990).

Pour « encadrer » les paysans, les pouvoirs les obligent par diverses mesures d'une part à intégrer dans le parti et d'autre part à assister à leurs réunions, donc de manière générale à s'inscrire dans l'aire de l'idéologie dominante. C'est dire que ces régimes pratiquent l'encadrement des paysans par des institutions centralisées.

Ainsi, le souci d'implanter le « grand parti national » jusqu'au fond de la brousse (A. Adams, 1985) n'obéit pas seulement à la volonté d'asseoir le régime dans toutes les couches sociales, mais aussi de protéger les intérêts des groupes qui profitent de l'État pour élargir leur base économique. Dans ces conditions, laisser les paysans se réunir, leur laisser la possibilité de s'exprimer et de discuter en toute liberté de leurs problèmes ne peut manquer de soulever des questions politiques inhérentes au développement local. Pour empêcher l'émergence de cette conscience des enjeux politiques des problèmes du territoire, il s'agit de créer des structures contrôlées par le pouvoir. C'est-à-dire qu'il est possible de neutraliser les paysans qui, en dépit de leur majorité numérique et de leur forte contribution à l'économie nationale n'ont aucun poids politique réel.

En outre, l'État impose un cadre juridique et institutionnel à tout ce qui veut exister et fonctionner à titre officiel, autrement dit, toute organisation doit titre soumise aux appareils de pouvoir. Dès lors, il faut s'attendre à toute sorte de blocage dans les systèmes où le formalisme des instances locales n'encourage pas toujours les individualités créatrices à faire preuve d'initiatives : « Il est impossible pour les paysans d'organiser un petit mouvement pour réclamer de meilleures conditions. Cela n'est pas envisageable dans les régimes où le système coopératif a été vidé de son sens en tombant sous le contrôle de l'administration, comme à l'époque des sociétés indigènes de prévoyance », (Ela, 1990). La conclusion que l'on peut enfin tirer de cette approche est que les organisations paysannes ne sont perçues

qu'à travers la problématique de « l'encadrement ». Et cette vision n'est pas fortuite puisqu'elle reflète une stratégie hostile à toute forme d'initiatives qui échappent à l'emprise de l'État. Ce dernier impose au OP marginalisées un cadre économique précis, c'est-à-dire qu'au niveau de toutes les structures d'encadrement, les rapports avec les paysans sont strictement verticaux.

Cependant, l'insuffisance de cette approche réside dans le fait que selon elle, il n'y a aucun souci, les OP suscitées par les sociétés de développement fonctionnent d'abord dans l'intérêt de l'État et reproduisent, en fait, un système de domination dans un contexte où les projets officiels s'assurent le monopole du développement local. Les partisans de cette théorie se sont mis à critiquer aveuglément l'État jusqu'à méme oublier les vrais manquements qui existent au sein des OP. L'État a certes failli à sa mission mais il importe également de signaler d'une manière explicite que les différentes OP n'ont pas elles aussi acquis une certaine culture organisationnelle et par conséquent, elles se retrouvent confrontées à des conflits internes qui les affaiblissent en grande partie.

2. 9.1.2- La subordination de la société à l'État :

A. Adams explique comment les difficultés qui s'accumulent pour bloquer l'émergence des groupes représentant les intérêts réels des paysans. Elle montre que dans les pays où la société civile commence à s'affirmer, les paysans inventent des formes d'organisation au niveau villageois. Mais lorsque celles-ci dépassent le village et risquent de poser des problèmes qui touchent à la nature de l'État, elles sont confrontées à un problème de reconnaissance juridique d'autant plus insurmontable que l'accusation de subversion reste une menace permanente.

Les pouvoirs mesurent parfaitement le poids de ce type d'organisation où peut se faire entendre la voix des paysans avec leurs problèmes réels. L'une des stratégies de l'État consiste à rentrer dans ces structures pour en neutraliser le dynamisme. Il s'agit toujours de contraindre les paysans d'entrer dans des organisations artificielles et de les empêcher de se regrouper selon leurs propres critères.

Au Sénégal, les paysans ont longtemps été « biberonnés » par l'État qui les étouffait sous sa tutelle. Adams montre les tentions entre les groupements de producteurs et la SAED, structure opposée aux initiatives qui échappent à son contrôle. Gela veut tout simplement dire qu'on se situe dans la logique de subordination de la société à l'État. Il semble en effet aujourd'hui que tout ce qui échappe à l'État et va aux organisations non étatiques puis aux

« leaders paysans » porte atteinte à l'intégrité des institutions nationales et la stabilité du régime en place. C'est en ce sens que Adams déclare : « Pour les dirigeants politiques, le développement rural se conçoit sans un véritable mouvement paysan susceptible d'entrer en conflit avec les intér~ts de l'État » (A. Adams, 1985 :113).

Donc toute tentative visant à donner aux paysans un début d'autonomie se heurte au centralisme des regimes qui trouvent insupportables les initiatives prises en dehors de leur espace de domination.

A travers le foisonnement d'expérience et la diversité des structures, on retrouve les grandes tendances qui rendent compte des rapports entre l'État et les paysans. Ceci pour dire que l'État préfère remplir de nombreuses fonctions plutôt que de les confier aux OP. En plus, les groupements paysans sont acceptes si et seulement si leurs activites correspondent aux preoccupations du pouvoir. Dans cette perspective, les structures de developpement rural se definissent en fonction de la strategie des acteurs qui contrôlent le pouvoir. Au lieu de considerer la responsabilite des paysans dans leurs communautes, les pouvoirs se fabriquent des organisations à l'image de leurs projets d'intervention dans les zones rurales. Les OP reposent sur des organismes de developpement qui definissent un certain type de rapports entre l'État et les paysans dans un système où ceux-ci sont de simples executants et non de véritables partenaires. C'est donc pour faciliter leur intervention que les operations de developpement et les projets mettent en place des structures paysannes qui leur conviennent. En ce sens, on comprend toute la pertinence de cette affirmation de H. Dupriez quand il declare que : « Généralement, l'existence et l'efficacité de telles structures (~) sont liées à la seule présence de l'institution publique qui doit exécuter le projet et souvent mme à l'existence d'une subvention extérieure. Dans ce cas, les paysans sont informés que s'ils veulent bénéficier de l'aide extérieure, ils doivent se constituer en groupement de producteurs et respectent les règles fixées par les sociétés de développement » (Dupriez, 1980 :200).

Dans cette pratique, les dirigeants et les developpeurs ont tendance à encourager les profits individuels et collectiviser les pertes. De plus, l'adhésion à ces OP devient obligatoire d'autant que dans certains aménagements hydro-agricoles, on ne peut avoir une parcelle si on n'adhère pas aux groupements officiels. Ce modèle domine dans la plupart des experiences où les organisations ne sont guère le produit des initiatives paysannes mais plutôt des instruments de l'État.

On peut alors deduire que selon cette approche, les « developpeurs » tendent à etouffer les dynamismes internes des societes rurales sans lesquelles les problèmes des villages ne peuvent trouver des reponses inventees par les paysans eux-mêmes. Sur le terrain, on retrouve

l'encadreur qui sait et le paysan ignorant. Le rôle de l'animateur se limite à être une courroie de transmission à sens unique, c'est-à-dire du sommet à la base et l'on pense que tout peut changer si le paysan s'affirme et s'attaque à certains intéréts économiques.

En outre, pour éviter les conflits potentiels, on polarise les paysans sur les sujets qui écartent toute remise en cause pouvant modifier les rapports actuels entre les paysans et le pouvoir. Il peut être difficile de gouverner avec des ruraux capables d'intervenir dans les débats agricoles où leurs intérêts sont en contradiction avec la domination des notables, l'emprise de l'État et les luttes d'influence des responsables du pouvoir ou des élites locales régionales. On s'en tient donc au statu quo en réduisant les problèmes agricoles à des problèmes techniques devant lesquels les villageois doivent reconnaître leur incompétence et leur ignorance.

A travers ces différentes approches exposées dans la littérature, nous avons considéré que c'est l'approche de la gestion de l'interaction développée par Emmanuel Seyni Dione qui correspond le mieux à notre orientation théorique. Cette perspective théorique nous semble pertinente dans la mesure où elle postule le principe selon lequel l'intervention des organismes de développement au niveau des populations locales doit être conçue de manière à ce que la relation entre intervenants et leurs cibles soit horizontale.

2. 10- Approche par la gestion de l'interaction

Cette approche théorique dont l'un des partisans est Emmanuel Seyni Dione semble être plus appropriée à notre étude. Il s'agit d'une approche qui trouve son originalité dans le relativisme de la rupture que les démarches participatives prétendent réaliser avec les démarches classiques d'intervention. Trop souvent, la méthode participative, telle que mise en pratique sur le terrain se réduit à de simples dialogues « participatifs », en des échanges ritualisés où les acteurs ne font que valider ou alimenter les analyses et les choix faits par les agents extérieurs. En ce sens, Nguinguiri. J.C considère que : « La planification participative, même si elle était à ses débuts considérée comme un processus évolutif dépourvu de toute ambition exhaustive comme c'était le cas dans les démarches précédentes, elle a toutefois perdu ses principes fondateurs qui ont été vite évacués par la plupart des intervenants avides de produits et à la recherche de diagnostics correspondants à leur propre perception des enjeux de développement. Dans la plupart des cas, déjà des choix de développement en amont de ce qui aurait dû être une concertation interne sur les options futures de développement du territoire » (J.C.Nginguiri, 2001 : 44).

Donc au niveau des interventions, ce que l'on nomme dans les projets participatifs « le pilotage par les besoins exprimés par les populations » est en réalité largement un fait de rhétorique. Certains auteurs de l'APAD comme J.P Chauveau et P.L Delville insistent sur le fait que la structure de la demande est souvent largement déterminée par l'offre. Autrement dit, le choix des usagers (les acteurs de base) est généralement surdéterminé par les propositions des intervenants : « Beaucoup d'intervenants prétendent partir des demandes tout en orientant nettement vers leur offre. Les diagnostics participatifs menés par les projets dans le but de faire émerger les vrais besoins des populations peuvent être une sophistication supplémentaire dans la manipulation des populations par le projet (il est rare qu'un diagnostic participatif mené par un projet agro-forestier ne débouche pas sur une demande de reboisement » (J.P Chauveau et P.L Delville, 1995 : 202).

En effet, dans cette approche par la gestion de l'interaction, quatre (4) dimensions sont élaborées pour saisir les rapports entre paysans et organismes étatiques d'intervention.

2.10.1- L'identification des espaces naturels de participation par les intervenants

La première dimension constitue celle qu'il nomme l'identification par les organismes d'appui, des espaces naturels de participation pour s'y inscrire. En d'autres termes, il s'agit principalement d'une approche qui se réfère à l'identification des espaces naturels de négociations et de décision, et donc des stratifications ou des découpages que les acteurs populaires opèrent dans leur environnement social et affectif.

L'intervenant selon cette approche est amené à s'inscrire dans la mouvance des différents réseaux du milieu, à y prendre une place sachant qu'elle ne sera jamais neutre puisque « travailler avec les paysans revient souvent à travailler avec certains paysans au dépens d'autres » (E. S. Dione, 1994, p 77). Alors autant reconnaître et utiliser ce fait pour déployer sa stratégie et son action avec réalisme. Par contre nier une telle réalité revient du côté de l'intervenant, à vouloir à tout prix introduire dans les structures décisionnelles, un certain dualisme qui pourrait compromettre son action.

Lorsque l'organisme d'appui s'inscrit dans les réseaux populaires, il s'y positionne comme un enjeu et peut ainsi utiliser cet avantage pour développer une stratégie au coup par coup orienté vers tel ou tel groupe d'acteurs à la base, ou vers tel ou tel objectif. Dans ce cas, il reste relativement dans le coup, en situation de complicité pour « co-agir » sur le cours des choses, du moins se donne-t-il du recul pour ne pas trop se laisser prendre au piège de ses illusions.

2.10.2- L'élargissement du champ de vision de tous les acteurs

Dans cette visée, tous les acteurs jouant sur la scène où se déroule l'action (les agents de l'ANCAR et les producteurs) sont amenés progressivement à intégrer des éléments nouveaux dans leurs systèmes de pensée, et ceci non pour renier ce qui les fonde mais plutôt pour les enrichir, les actualiser et les rendre encore plus efficaces dans la logique de leurs dynamismes. Une telle ouverture se réalise à travers la prise de conscience de la globalité du cadre de vie et du contexte de l'action qui constitue : « Le passage d'une motivation parcellaire à une sensibilité élargie qui localise chaque aspect ou chaque composante dans ces relations avec les autres » (E. S. Dione, 1994, p 78).

En fait, c'est à travers un mouvement de balancier selon cet auteur, c'est-à-dire du sectoriel au global et du global au sectoriel que chaque domaine et la mosaïque de leurs combinaisons acquièrent du sens. Ainsi, développer les compétences des producteurs signifie alors accroître leurs capacités à établir des relations entre des éléments apparemment disparates et leur permettre de réaliser une synthèse opérationnelle efficace. C'est ainsi que l'interaction paraît la plus féconde pour les acteurs et de la méme manière qu'elle peut l'être pour l'organisme d'appui.

2. 10.3- La prise de ses distances vis-à-vis de l'action :

Le postulat sur lequel s'appui cette thèse est le suivant : « ce qui importe, ce n'est pas tant ce qui se passe ou ne se passe pas, ce qui marche ou ne marche pas » (E. S. Dione, 1994, p 78). Autrement dit, ce n'est pas par rapport aux issues de l'action que l'intervenant doit se positionner ou se justifier, mais plutôt par rapport à ses effets en termes d'apprentissage. Et pour insister sur cet aspect, l'auteur utilise la métaphore du puit. Par exemple, de façon caricatural, peu importe si les puits foncés à l'aide du projet donne ou non de l'eau (méme si c'est mieux qu'ils en produisent), la question est de savoir si, à l'occasion de cette action, compte tenu des efforts consentis, les interlocuteurs ont appris quelque chose de suffisamment déterminant. Quelque chose qu'ils pourront utiliser par la suite, dans d'autres actions, entreprises par eux-mémes ou par d'autres. Quand l'intervenant identifie la réussite de son intervention à celle de l'action dans laquelle il est impliqué, c'est-à-dire à la matérialisation des résultats attendus, il devient prisonnier de la situation, la maîtrise lui en échappe et il est tenté de se substituer aux acteurs qu'il appuie pour éviter les déviations. Il est forcé alors de normaliser le déroulement de l'action et contraint les paysans à jouer au chat et à la souris. De ce fait, il se met en position de demandeur et tout ce qu'il entreprend finit par vouloir dire :

« Faites-le pour moi, sinon je serai éliminé de la scène, je perdrai mon emploi et vous, votre allié dans l'organisme d'appui qui m'utilise » (E. S. Dione, 1994, p 79).

2.10.4- La connaissance des lunettes que portent les paysans :

A ce niveau, le principal obstacle que rencontrent les intervenants lorsqu'ils veulent agir en milieu rural, réside dans le regard qu'ils portent sur les hommes et les choses. Ce qu'ils voient n'est pas ce que les paysans voient. Au contraire, ses derniers perçoivent la vie et ses formes avec une autre sensibilité. En d'autres termes, la population est organisée à sa manière, avec des valeurs, des concepts, des codes différents, parfois tellement différents qu'ils deviennent invisibles, insoupçonnables pour ce qui ne vivent pas dans la même sphère. C'est tout simplement dire que pour faire bénéficier les paysans de leurs connaissances, il faudrait que les agents des structures d'appui respectent l'expérience pratique des producteurs et discutent avec eux d'égal à égal. Ignorer cette réalité dans la vision des choses mène évidemment droit au quiproquo et ainsi, « le dialogue devient dialogue de sourds » (E. S. Dione, 1994, p 81). Donc porter les mêmes lunettes que les paysans est indispensable pour comprendre les situations et la manière dont ils les analysent.

Pour montrer la manière dont on porte les lunettes des acteurs de base, l'auteurs s'appui sur trois domaines : D'abord dans le domaine technique, porter les lunettes des paysans, c'est partir des situations, des pratiques et des compétences déjà existantes ; Ensuite en matière d'organisation, c'est s'appuyer sur les groupes naturels et se brancher sur les réseaux relationnels de la société ; en fin pour l'appui économique, c'est s'intégrer dans les circuits déjà en place et utiliser leur rationalité comme une ressource. Mais cela exige un important travail de redéfinition de la réalité qui n'est possible qu'à travers une interaction ouverte. L'action devient alors l'occasion par laquelle les agents de l'organisme d'appui ont la possibilité de confronter leur vision des choses avec celles des acteurs.

D'une manière générale, pour porter les lunettes des acteurs à la base, il faut ce qu'Emmanuelle Seyni Dione appelle : « l'effet miroir » c'est-à-dire ce que les intervenants provoquent chez les paysans, renseignent ces derniers sur la manière dont ils sont perçus et sur la pertinence de leur vision (E. S. Dione, 1994, p 81).

Cependant « l'effet miroir » doit jouer dans les deux sens : autrement dit, ce que les intervenants provoquent chez les acteurs doit aussi aider ceux-ci à s'interroger à leur sujet. Ainsi l'interaction n'est totale que si elle induit un décentrage dans les deux groupes d'acteurs, c'est-à-dire si elle permet à tous les deux de jeter un regard renouvelé sur leur monde. En cela, « l'effet miroir » est double : d'une part, il enrichit la vision de l'organisme d'appui sur son propre fonctionnement et d'autre part, il élargie le champ d'analyse des

acteurs, en particulier leur compréhension du fonctionnement de leur propre vie sociale. En définitive, « l'effet miroir », constitue le moyen par lequel les intervenants extérieurs ont la possibilité d'ouvrir une fenétre sur le référentiel de ceux avec qui ils désirent agir. Et tout devient alors affaire de communication. Mais cela n'est possible que si l'organisme d'appui construit son intervention sur ce que les populations font déjà elles-mémes et, s'ils utilisent le même langage et adopte la même analyse.

Schema 2 : schématisation de l'évolution de la gestion de l'action dans les projets

Porteur de l'action
« l'action, c'est moi »

· Animateur

Action

L'animateur s'identifie à l'action : le succès de celui-ci conditionne son propre succès en tant qu'animateur. La réussite de l'action justifie son existence vis-à-vis de luimême, vis-à-vis de son employeur, vis-à-vis des villageois (logique de promotion). Monsieur puits, monsieur crédit, monsieur reboisement etc. sont

quelques exemples de perceptions villageoises à son sujet.

L'action est son affaire. Aussi sera-t-il tentéd'imposer ses normes pour la

conduire et ses critères pour l'évaluer.

Co-gestionnaire de l'action « je mets la main à la pâte »

· Animateur

Action

L'animateur aménage les conditions de l'action. Il provoque la réflexion, soulève le problème qui est à l'origine de l'action. Mais celle-ci est portée par les villageois, il peut y avoir cogestion, l'animateur étant partie prenante dans la réussite. Mais sa réussite en tant qu'animateur n'est possible que s'il y a réussite aux yeux des villageois. En un sens, l'animateur

s'identifie et dès lors, s'évalue au succès que les villageois remportent (logique d'appui).

L'action est en même temps son affaire et celle des villageois. Elle est partagée.

Facilitateur de l'action
« j'accompagne l'action si on me le
demande »

· Animateur

Action

L'animateur se situe en dehors de l'action. Ce n'est pas par rapport à elle qu'il justifie sa présence sur le terrain villageois. Il s'y intéresse dans la mesure où on le sollicite à ce sujet (logique de consultation). Il peut éventuellement être à son origine, mais ne s'implique pas dans sa finalisation. C'est l'affaire des villageois, à eux d'en faire ce qu'ils veulent. Par contre, il veillera à ce que les villageois soient en situation et capables d'exploiter le potentiel d'apprentissage et d'innovation que l'action recèle.

L'action est l'affaire des seuls villageois.

Source : Emmanuel Seyni Dione, 1994 :83

DEUXIEME PARTIE :

Problématique et cadre

méthodologique

Il est ici question de rendre compte de l'approche théorique qu'on a adopté pour traiter le problème posé par notre objet d'étude, mais aussi d'exposer l'arsenal méthodologique mise en oeuvre pour appréhender, suivant les règles de l'art, le fait étudié.

Chapitre III : Problématique

3.1- Problème de recherche

Au Sénégal, les tentatives étatiques de promotion du développement agricole et rural tardent toujours à montrer leurs effets, ce qui a poussé l'Etat à prendre une multitude de mesures pour pallier aux nombreuses contraintes gangrènent ce domaine.

En effet, il est certain que les échecs et les réussites éphémères ou partiels dans le domaine du développement agricole sont pour la majeure partie dus à l'inadaptation des propositions faites aux organisations de producteurs. D'une part, ceux (les agents des structures de développement) qui formulent en amont les propositions faites aux producteurs ne connaissent pas en général le milieu dans lequel ils interviennent, ce qui implique que leurs propositions sont en déphasage, c'est-à-dire ne correspondent pas forcément aux attentes des producteurs, à leurs organisations sociale et ainsi elles ratent leurs missions. D'autre part, les agents peuvent même « connaître » les paysans concernés par leurs actions et leurs pratiques, mais ils les ignorent et ne tiennent pas assez compte du contexte économique dans lequel se trouvent les producteurs.

Autrement dit, les politiques de développement agricole, malgré les acquis, ont dans leur majorité produit des effets pervers. Le passage d'une logique interventionniste de l'État à une logique de désengagement n'a pas abouti à réformer structurellement la politique agricole. De méme la transition d'une logique d'encadrement vers une logique d'appui aux producteurs tarde à montrer ses résultats. Néanmoins, certaines des sociétés d'Etat continuent à manifester leur ancrage dans la logique d'appui.

A la suite de ce problème, un certain nombre de questions susceptibles de nous permettre de saisir notre objet d'étude peuvent être posées :

Pourquoi avec tous ces organismes de développement mis en oeuvre par l'État du Sénégal, le monde agricole se trouve toujours dans une situation devenue de plus en plus lamentable ? Get état de fait ne trouverait-il pas ses fondements dans la manière ou dans la logique d'intervention des structures étatiques chargées du développement agricole ?

En outre, malgré l'épanouissement de l'initiative paysanne qu'offre cette situation, il importe de se demander si les producteurs disposent réellement, sans suivi ni accompagnement, de la capacité d'assurer leurs nouvelles fonctions, mais aussi de la capacité de résoudre les problèmes auxquels ils sont confrontés ?

Dans ce cas précis, l'ANCAR peut-elle constituer une réponse au désengagement de l'État en assurant les fonctions nécessaires au développement et en impliquant de manière effective les OP dans l'élaboration, le suivi et l'évaluation des projets agricoles ?

Comment cette structure perçoit-elle la différence entre logique d'appui et logique d'encadrement ?

Les activités de l'ANCAR ou plus précisément ses interventions relèvent-elles du cadre de l'appui ou de celui de l'encadrement ?

Comment une structure telle que l'ANCAR qui n'investit pas dans les projets agricoles parviendrait-elle à travailler avec les OP dans le cadre d'un véritable partenariat ?

Ainsi, le problème qui sous-tend ce travail est de déterminer et d'analyser les facteurs bloquant l'instauration de relations partenariales équilibrées et appropriées garantissant une implication réelle des OP dans la promotion du développement rural.

3.2- Question de recherche

Les actions à travers lesquelles intervient l'ANCAR au niveau des organisations de producteurs relèvent-elles d'une logique d'appui ou d'une logique d'encadrement ou bien encore d'une logique hybride?

3.3- Objectifs de recherche

L'objectif principal de cette étude est avant tout de déterminer puis d'analyser les différentes actions de l'ANCAR afin de cerner ou plus exactement de préciser quelle est réellement la nature de la logique d'intervention de cette structure à l'égard des organisations de producteurs. En d'autres termes, il s'agit d'analyser la nature et le rôle de l'intervention de l'ANCAR dans le développement agricole des OP de Gandon.

Cet objet sera analysé à partir d'une étude de terrain portant non seulement sur l'ANCAR mais aussi sur une Organisation de producteurs qui se déploie dans la communauté rurale de Gandon. La première, c'est-à-dire l'ANCAR est réputée pour être un des leviers en matière d'accompagnement des producteurs au Sénégal du fait notamment de la rupture qu'elle a pu opérer avec l'ancien système d'encadrement du monde rural dans lequel, les institutions et services publics appliquaient des politiques productivistes à travers une approche descendante dans le but d'atteindre les objectifs de production décidés par l'Etat.

En effet, pour mieux appréhender les dimensions de notre question de recherche, trois objectifs spécifiques de recherche ont été définis :

1. Apporter notre contribution à une meilleure connaissance de la nature de l'intervention des organismes de développement notamment l'ANCAR en identifiant les différentes actions de celle-ci en direction des OP.

2. Comprendre non seulement le degré d'implication ou de participation des producteurs en amont et en aval des diverses actions menées par l'ANCAR mais aussi le degré d'appropriation par les producteurs de ces multiples actions.

3.4- Conceptualisation

3.4-1- définition des concepts

Cette étude s'articule autour des concepts suivants : organisation de producteurs, logique d'encadrement et logique d'appui.

Le concept d' « organisations de producteurs »

Le concept d'Organisation Paysanne a fait l'objet d'une littérature assez abondante dans le milieu scientifique. Pour rendre intelligible ce concept, nous nous référons à quelques auteurs comme Marie-Rose Mercoiret et Pierre-Marie Bosc, Rahmato et le Réseau GAO qui ont beaucoup écrit sur cette notion.

Mercoiret et Bosc définissent d'abord les OP comme suit : « Les OP sont des systèmes d'action collective qui ont des règles de fonctionnement internes formalisées et relativement stables et qui sont bties autour d'objectifs partagés Ces objectifs communs n'excluent pas l'existence d'objectifs et d'intérêts particuliers chez les différents membres, objectifs qui peuvent être diversement convergents ou compatibles » (1994, p8).

Dans cette définition on notera que la réalisation d' « objectifs partagés » est, à l'instar de toute organisation la finalité des OP. Seulement ici, Mercoiret et Bosc ont poussé leur analyse plus loin, car selon eux, les « objectifs » et « intérêts » des membres d'une OP ne sont pas toujours communs ; ils peuvent aussi être personnels. Ce qui laisse entrevoir de probables luttes de pouvoirs et de positionnement entre les différents membres de l'OP.

Selon Marie-Rose Mercoiret, la genèse des OP selon elle, permet de distinguer deux grandes catégories : les OP suscitées de l'extérieur et les OP d'initiatives locales.

La distinction entre les OP suscitées de l'extérieur et celles d'initiatives locales et autonomes est utile pour comprendre l'actuelle dynamique d'organisation dans les zones rurales.

1- D'abord les OP suscitées de l'extérieur, résultant soit de l'intervention directe d'appareils administratifs étatiques, soit des interventions de type « grands projets », soit enfin de l'action d'ONG. Elles sont nées de la nécessité, ressentie en premier lieu, par les intervenants extérieurs, d'«organiser les producteurs » pour qu'ils puissent adopter une technique nouvelle ou exercer une fonction.

2- Ensuite les OP qui résultent d'une initiative locale regroupées dans le mouvement associatif et autonomes par rapport à l'État, même si elles peuvent entretenir de nombreuses relations avec les services étatiques ou para-étatiques mais aussi avec les ONG. Ces OP démarrent souvent après une longue phase de réflexion sur des objectifs globaux (amélioration des conditions d'existence, autosuffisance alimentaire, etc.) qu'elles tentent ensuite de traduire dans les « plans locaux », dans les programmes plus ou moins sectoriels ou dans les réalisations parfois très spécifiques.

Rahmato quant à lui définit l'OP comme étant : « Une structure formelle ou informelle à la quelle prennent part les paysans et les paysannes et dont l'objectif majeur est la poursuite d'avantages communs qu'ils obtiennent contre des obligations communes » (1991, p44).Dans ce cas, les OP consistent donc en une participation physique et financière.

Le réseau GAO cité par Dominique Sène (2003) a également fait une analyse pertinente des OP en les assimilant à des entreprises. En effet, du fait qu'elles sont de plus en plus obsédées par l'argent. Avec l'omniprésence de la question financière, on assiste au sein des OP, à de nouveaux modes d'échange, de nouvelles manières d'établir des rapports individuels : « Au fil des financements, les OP ne deviennent-elles pas de plus en plus des entreprises et /ou seulement des entreprises? Au moment de la création des OP, les considérations sociales, l'élan de solidarité l'emportent, mais au fur et à mesure que l'OP capitalise, le financier et l'économique s'installent et finissent par contaminer les autres dimensions (k)Pendant le carrefour, les producteurs ne sont pas beaucoup exprimés en termes de « solidarité », de « foi », d' « autonomie »...demain parleront-ils en termes de « ratio », d' « efficacité », bref de tout ce qui fait le langage des entreprises »(2003- 2004,p48).

Au vu de ce qui vient d'être énumérer, on peut dire que les OP et les entreprises sont, par bien des aspects, analogues. Cependant, dans le présent travail, nous définissons l'OP comme étant une association autonome de paysans ou de paysannes bien structurée, régie par

un statut juridique et dont les membres sont unis autour d'objectifs apparemment communs mais stratégiquement individuels ; objectifs dont la réalisation nécessite l'appui des intervenants extérieurs. En plus, leur base sociale et leur efficacité technique et économique leur permettent en effet de se positionner comme des interlocuteurs à part entière, prêts à négocier des collaborations des contrats, à condition que soient pris en compte leurs objectifs et leurs priorités, que leur soit reconnu le droit de participer à la prise de décision dans des domaines où le transfert de responsabilité n'était pas initialement prévu.

Le concept de « logique d'appui »

L' « appui », est un concept dérivé du verbe « appuyer »qui signifie soutenir, protéger, aider ou fournir un moyen d'action à quelqu'un. Donc un appui est un soutien matériel ou immatériel une assistance ou une protection. Appuyer quelqu'un, c'est l'aider, le soutenir dans ce qu'il fait. Dans ce cas la logique d'appui est une démarche adoptée par les agents des sociétés d'intervention et s'adressant aux OP ou aux communautés rurales prises dans leur ensemble avec l'espace qu'elles occupent. Il s'agit de les accompagner dans leurs décisions en leur fournissant une assistance matérielle ou immatérielle et un cadre institutionnel nécessaire pour qu'elles puisent effectivement analyser leurs prises de décisions innovatrices.

La logique d'appui pose le postulat selon lequel, les intervenants doivent accompagner les initiatives, les décisions locales émanant des producteurs eux-mêmes. Donc, l'initiative émane des acteurs qui mobilisent des partenaires en vue de les appuyer à réaliser leurs projets : l'identification de l'idée de projet, la conduite, l'évaluation et les ajustements sont co-construits par les acteurs locaux en rapport avec leurs différents partenaires. Autrement dit, les acteurs locaux sont les co-porteurs ou les porteurs du projet, c'est dire que leur participation couvre tout le processus d'intervention à la fois en amont et en avale du processus de mise en oeuvre du projet. Les paysans sont donc partie intégrante dans le processus du développement, depuis l'identification de l'idée jusqu'à l'évaluation finale.

En outre, le milieu ne doit pas être considéré comme étant un simple point d'application et d'orientation des initiatives de développement décidées par des partenaires extérieurs à partir d'analyse externes, d'objectifs uniquement macro-économiques définis aux échelons nationaux et régionaux. Le milieu local doit être reconnu à la société et aux acteurs qui le composent pour définir les orientations et les modalités de leur propre développement socio-économique et culturel en relation négociée avec les acteurs extérieurs. Aussi, dans une logique d'appui, l'intervention est participative et les critères d'évaluation ne restent pas

soumis aux seuls indicateurs administratifs, technicistes et marchands, mais ils intègrent l'action ou le projet comme fait social total. Cette logique s'oppose à une simple diffusion d'innovations et un simple transfert technologique : elle valorise un ancrage socio-territorial du processus d'innovations. Autrement dit, elle insiste sur la nécessaire appropriation locale, sur le construit social parce que soumise à un processus d'apprentissage qui opère à travers une dynamique d'essai-erreur et ne conçoit pas comme un processus linéaire et parfait. Cette logique privilégie l'approche programme en lieu et place de l'approche projet (S. Ndiaye, 2008).

En somme, la logique d'appui place les organismes de développement au second plan. Et selon M.R. Mercoiret l'appui aux OP peut se concevoir en sept étapes : 1) l'identification de fonctions qui justifient une OP ;2) l'analyse des structures existantes, de leurs forces, de leurs faiblesses ; 3) l'information sur les innovations économiques et sociales disponibles ; 4) la discussion des formes d'organisation par les producteurs et leur adaptation ;5) l'élaboration de contrats avec les autres partenaires ; 6) l'appui au fonctionnement ; 7) la formation des responsables et des gestionnaires, (Mercoiret, 1990 :52-53).

Le concept de « logique d'encadrement »

L' « encadrement » est le substantif issu du verbe « encadrer » qui signifie entourer quelque chose d'un cadre. Ce qui fait que le terme encadrement désigne l'action d'entourer à la manière d'un cadre qui orne ou limite. La logique d'encadrement, si l'on peut ainsi dire, se pose en s'opposant à la logique d'appui. Elle commence depuis la constitution de l'OP, c'està-dire qu'il y'a des OP qui sont constituées non pas par l'initiative locale des paysans mais plutôt par celle des organismes extérieur. Il s'agit des OP que Mercoiret nomme les OP suscitées par les grands appareils de développement (Etat, ONG, etc.) Les principales caractéristiques de ces OP, selon elle sont le fait que : « Les modalités d'organisation ont été définies par les intervenants extérieurs et ont rarement été négociables ; les paysans ont été obligés d'adhérer à ces organisations pour avoir accès aux intrants, au matériel agricole et au crédit, mais aussi pour écouler leurs productions car elles ont eu à ici et là le monopole de la commercialisation, les sociétés de développement ont exercées une tutelle sur les OP, une dépendance est parfois des conflits en ont résulté », (Mercoiret, 1994 :206).

Dans cette logique, le processus et la dynamique de l'action sont dominés par l'État et les partenaires extérieurs, et ce sont également ces derniers qui définissent les initiatives aux OP. Aussi, la conduite et l'évaluation ou encore les ajustements liés au projet ou à la

dynamique sont presque du ressort exclusif de l'État ou des partenaires intervenants. Alors, les paysans producteurs sont exclus de la participation et ne jouent plus que le rôle de bénéficiaires et d'exécuteurs, ils ne participent que faiblement, sinon méme pas à l'identification de l'idée de projet, à la construction des modalités de gestion, aux instances de validation ou d'évaluation du processus. A la différence de la logique d'appui, celle-ci a une courbe descendante (logique top down), c'est-à-dire que ce sont les experts du sommet qui analysent et choisissent les décisions à la place des producteurs de la base qui ne sont là que pour exécuter. Nous sommes ici dans le cadre de l'État central, dirigiste, techniciste, interventionniste et « développeur " qui opère selon la logique du transfert technologique pour plus de productivité. Et l'approche d'intervention privilégiée par cette logique est l'approche projet. Ainsi le terrain ou le territoire se présente comme un simple milieu d'application et d'expérimentation des initiatives politiques, des décisions et des techniques qui ont été transférées du sommet vers le bas. Tout ce qui est savoir et savoir-faire ou mode d'organisation locale, c'est-à-dire les techniques traditionnelles construites de l'intérieur des communautés de base sont considérées comme des contraintes, des freins à l'avancement ou à l'épanouissement et sont incapables de soutenir le progrès, (S. Ndiaye, 2008). Les agents experts sont ici comme une sorte de « repoussoir " car disant aux paysans « votre pratique est mauvaise », ce qui fait qu'elle a été peu prise en compte et encore plus rarement valorisée. Il s'agit en somme d'un schéma du type « ceux qui savent " viennent apprendre ou montrer à « ceux qui ne savent pas » et ce schéma, méme s'il est caricatural a existé et existe toujours avec ses multiples variantes.

3.4-2- Opérationnalisation des concepts

Concepts

Dimensions

Indicateurs

Organisation de producteur

Processus de constitution et d'évolution

- Situation de l'activité, du milieu et des acteurs

- Objectifs de départ d'ordre économique, social, politique,

- Caractéristique socio-économiques, les

étapes du processus constitutif et d'évolution, état actuel,

- Nature des appuis et contraintes au

démarrage, impact sur la dynamique originelle

Mode d'organisation et de fonctionnement

- Type d'organes, et fonctionnalité des

organes, périodicité et modalités de
renouvellement des instances,

- Composition et nature du leadership, modalités de prise de décisions, de circulation de l'information et de consultation des membres, de prévention et de gestion de conflits, démocratie interne

Performance socio-économique

-Evolution socio-économique, niveau d'autofinancement, efficacité dans le mode de mobilisation des ressources

- Bilan des réalisations, nature et importance des biens et services offerts

- Niveau de développement de l'organisation, impact sur la situation socio-économique des producteurs, modalités de production et de distribution de biens et services, articulation viabilité économique et rentabilité sociale,

 

Ancrage socio-territoriale : impact sur la
revitalisation socio-territoriale

- Impact socio-territorial de l'organisation et des activités, impact sur le développement et l'image sociale du secteur et de ses acteurs, capacité de réponse à la demande locale,

- Nombre de cibles touchées, ressources
locales valorisées, mobilisation territoriale des acteurs

Dynamique partenariale

- Ampleur du réseau partenarial, nature et intensité des relations avec les partenaires, positionnement par rapport aux stratégies de développement et au mode de gestion publique de la commune,

- Rapport aux autres organisations du secteur, - participation aux cardes de concertation locale,

Logique d'appui

Stratégie d'implication des acteurs locaux

- Identification de l'idée de projet, définition du processus et de la dynamique de l'action,

- Positionnement des acteurs locaux par
rapport aux intervenants,

- Nature de l'initiative, du diagnostic de la conduite, de l'exécution, de l'évaluation du projet,

Dynamique de l'action

- Place réservée aux modes d'organisation locales, le savoir et le savoir-faire local, les techniques traditionnelles

- nature de l'approche, nature et intensité des rapports avec les sociétés de développement, implication dans le processus de développement local.

 
 

- Positionnement des acteurs locaux par

rapport aux intervenants,

- Ampleur du réseau partenarial,

Logique d'encadrement

Dynamique partenariale

positionnement par rapport aux stratégies de développement et au mode de gestion des structures d'encadrement,

- Présence dans les cadres de délibération locale, rapport à l'espace public local

Nature de l'approche d'intervention

- perception du territoire d'intervention

- place réservée aux modes d'organisation locales, le savoir et le savoir-faire local, les techniques traditionnelles

- Nature de l'approche, nature et intensité des rapports avec les sociétés de développement

Intervention de l'agence

3.5- Hypothèse et modèle d'analyse

3.5.1- Hypothèse

L'approche de l'appui-conseil définie par l'ANCAR montre qu'elle a rompu avec la « logique d'encadrement » héritée de l'Etat post colonial en matière de promotion des organisations de producteurs. Cependant, l'exécution des programmes par cette approche n'est pas effective auprès des organisations des producteurs.

3.5.2- Modèle d'analyse

Schéma 3 : Construction du modèle d'analyse

Organisation de producteur : le Foyer de Sanar

Sollicitation de l'agence

ANCAR « Conseil Agricole et

Rural » (CAR)

Volonté d'autopromotion mais : contraintes naturelles, analphabétisme, faible niveau d'organisation, revenu faible, étroitesse et approvisionnement des terres à exploiter, non

maîtrise du système d'irrigation Informations, formation, conseils, intermédiation, appui conseil, appui

technique, recherche/développement,

renforcement de la capacitéorganisationnelle

Le schéma ci-dessus présente en fait les rapports qui régissent l'ANCAR et les OP avec qui, elle est partenaire notamment le Foyer de Sanar. En effet, le schéma montre que la logique de l'ANCAR repose sur le principe « sollicitation-intervention ». Autrement dit, les différentes OP qui désirant bénéficier des services de l'ANCAR doivent d'abord solliciter cette dernière pour qu'elle puisse intervenir à la suite d'une signature de contrat. Ce qui semble écarter toute idée d'encadrement. Mais le problème va au-delà de cette apparence et pour mieux le saisir, il faut une analyse profonde des actions effectuées par la structure.

Chapitre IV : Cadre méthodologique

Il s'agit dans ce chapitre d'évoquer la démarche méthodologique de notre étude. Cette phase a été réalisée en partant des principes développés par les ouvrages de méthodologie, en particulier dans le Manuel de recherches en sciences sociales inculqués en formation méthodologique. Nous y évoquerons l'histoire de la collecte, les personnes interrogées ou groupes cibles et les modalités de leur échantillonnage, les outils utilisés pour la collecte des informations, le déroulement des enquêtes, leur durée et enfin les difficultés rencontrées tout au long de la recherche.

4.1- Histoire de la collecte

Notre recherche travail de recherche a débuté en Décembre 2009 et a comporté trois (3) grande phases : la recherche documentaire, l'enquête exploratoire et l'enquête proprement dite.

4.1.1- La recherche documentaire

Comme tout travail de recherche, du moins en sciences sociales, la revue bibliographique appelée entre autre la recherche documentaire, constitue plus ou moins l'étape qui permet le démarrage du processus de recherche. C'est pourquoi, juste après le choix de notre thème et la formulation de notre question de départ, nous avons procédé à une recherche exploratoire, c'est-à-dire à une lecture continue des documents se rapportant à notre objet d'étude. Cette phase a été pour nous, l'occasion de parcourir un certain nombre d'ouvrages généraux traitant de notre thème de recherche à savoir l'autopromotion paysanne (les organisations paysannes) et l'intervention des structures de l'État auprès de ces OP. Une telle étape avait pour prétexte d'identifier le problème général de recherche. Suite à cette première, nous avons entamé la seconde étape pendant laquelle nous avons consulté des ouvrages spécifiques de notre sujet de recherche à savoir l'intervention des organismes étatiques auprès des organisations de producteurs. Pour ce faire, d'abord dans l'enceinte de l'université, nous nous sommes rendus la bibliothèque centrale de l'UGB, le centre de documentation de l'UFR Lettres et Sciences Humaines et celui de l'UFR des Sciences Juridiques et Politiques. Ensuite à Saint-Louis, nous avons eu à fréquenter la bibliothèque du Centre Culturel Français (CCF) et nous sommes

procurer des auprès des structures telles que l'ANCAR, l'Institut Sénégalaise de Recherche Agronomique (ISRA) et la Direction Régionale de l'Agriculture (DRA).

4.1.2- Les entretiens exploratoires

Cette phase a été engagée dans le but de mieux nous familiariser avec notre objet d'étude mais aussi de mieux cerner notre cadre d'étude. En effet, les lectures effectuées, ajouté aux quelques entretiens exploratoires ont permis de saisir non seulement l'état des savoirs sur ce thème, mais aussi d'avoir un petit aperçu sur la nature des interventions de l'ANCAR au niveau des OP.

Tout d'abord, cette étape nous a donné l'occasion d'avoir une vision d'ensemble non seulement sur les deux structures concernées à savoir l'ANCAR et le Foyer de Sanar, mais aussi sur les types de relation qui existent entre eux. Sous ce rapport, des entretiens libres ont été effectués sur les thèmes suivants :

- Présentation de l'ANCAR

- Réalisation des activités de l'ANCAR

- Présentation du Foyer de Sanar

- Historique de son partenariat avec l'ANCAR

Les différents entretiens ont été réalisés avec des personnes ressources à savoir des responsables et des agents de l'ANCAR et des responsables de l'OP du Foyer de Sanar. Ainsi nous avons interrogé :

- Le Directeur régional de l'ANCAR

- Le chef d'équipe

- L'agent de Gandon

- Le président du Foyer de Sanar

- Les deux vices présidents du Foyer

- Le secrétaire général du Foyer

En complément de ces informations, nous avons pu consulter diverses sources dont les mémoires de maîtrise de sociologie et de géographie, mais aussi et surtout le PDL de Gandon (2009-2014) et le PRDI de Saint-Louis (2000-2005).

Cette étape nous a surtout d'une grande importance car elle nous a facilité la mise en place des outils et techniques de recherche pour appréhender notre objet.

4.1.3- Les entretiens informels

Dans le cadre de ce travail d'investigation, nous avons également eu recours aux entretiens informels. Ils ont surtout été réalisés avec les agents des autres structures telles que l'ISRA, la DRA et certains producteurs non membres du Foyer de Sanar. L'objectif de ces entretiens était de confronter d'une part, les propos des agents de l'ANCAR et des membres du Foyer de Sanar à leurs points de vue afin de mesurer la véracité des informations recueillies auprès des concernés et en même temps obtenir leur point de vue sur le fonctionnement respectif de leur structures. Il convient, par ailleurs, de préciser que les personnes concernées par ces entretiens informels ont été choisies au hasard et pour la plupart, nous les avons trouvées dans leur lieu de travail.

Tableau 3 : Personnes interrogées par entretiens informel

ISRA

02

DRA

03

Sopi Diougob

05

4.2- La construction de l'échantillon

Concernant ce travail, la technique d'échantillonnage utilisée a été celle de l'échantillonnage aléatoire simple qui consiste d'abord à définir la taille de l'échantillon, c'est-à-dire le nombre d'individus qui doit le constituer, ensuite procéder par une sélection sur la base du hasard pour choisir les individus de l'échantillon. En effet, seuls les membres du Foyer de Sanar ont fait l'objet d'un échantillonnage parce qu'étant les seuls à être concernés par le questionnaire.

Sous ce rapport, la construction de l'échantillon nécessitait tout d'abord une bonne compréhension des réalités de notre OP à travers une maîtrise des différentes catégories d'acteurs et des sphères d'action dans lesquelles les acteurs évoluent. L'échantillon a donc été choisi de la manière suivante : nous avons d'abord recensé tous les membres de l'OP « le Foyer de Sanar » dont l'effectif total est de 118 membres avec 76 hommes et 42 femmes.

En effet en fonction de diverses raisons (la disponibilité et le statut des personnes (statut social ou statut de membre), la taille de l'échantillon a été définie pour un effectif de 30 personnes soit 35% de l'effectif total et n'a concerné que membres du Foyer de Sanar qui

sont concernés par le questionnaire. L'échantillon a été défini sur la base d'un principal critère à savoir celui de la représentativité selon le genre. Pour ce faire, nous avons tout simplement tenu à reproduire le pourcentage de chaque genre selon son effectif dans la population totale. Alors, nous avons posé l'opération suivante :

P = Population totale = 118

H = Hommes = 76 soit 65% F = Femmes = 42 soit 36%

E = Echantillonnage = 30

He = nombre d'hommes dans l'échantillon

He = H x E 65 x 30 = 19,5 soit 19 hommes

100 100

Fe = nombre de femmes dans l'échantillon

Fe = F x E 36 x 30 = 10,8 soit 11 femmes

100 100

Sur les 118 membres du Foyer de Sanar, 30 personnes (soit 35%) ont été interrogés. Le pourcentage représentatif des hommes dans l'échantillon est de 19 sur les 76 personnes et concernant les femmes, en fonction de leur effectif qui est de 42, 11 personnes ont été choisies.

Ensuite pour ce qui est des agents de l'ANCAR, l'échantillon au niveau de cette catégorie n'a pas posé de problèmes du fait de leur nombre restreint par rapport aux membres du foyer de Sanar. Nous avons interrogé tout le personnel dont l'effectif est de 10 personnes.

Les guides d'entretiens élaborés ont été soumis aux deux structures qui sont concernées par notre étude à savoir l'ANCAR et le Foyer de Sanar. Pour chaque structure, il a été mis en avant le principe de la saturation. Ainsi, nous mettions un terme aux entretiens à chaque fois qu'on remarquait une redondance dans les réponses.

Tableau 4: Répartition des effectifs des deux structures

Type d'acteurs

Hommes

Femmes

Nombre total

Membres du foyer de Sanar

76

42

118

Agents de l'ANCAR

8

2

10

Total

78

44

128

Source : Diakho 2010

Tableau 5 : Répartition des individus interrogés

Type d'acteurs

Hommes

Femmes

Total d'individus interrogés

Foyer de Sanar

19

11

30

ANCAR

08

02

10

Total

27

13

40

Source : Diakho 2010

4.3- Les outils de collecte

Dans le domaine des sciences sociales et de la sociologie en particulier, il existe une panoplie de méthodes et de techniques pour appréhender le réel. Ainsi, il n'existe pas de méthode standard qui serait applicable à l'étude de tout le phénomène social. En effet, pour chaque objet d'étude, il existe une méthode plus à même de l'appréhender ou encore de l'éclairer.

Ainsi, concernant notre étude, dans un souci de mieux appréhender et de mieux éclairer notre objet d'étude, nous avons opté pour ce qu'il convient d'appeler la combinaison pour ne pas dire la triangulation des méthodes. En fait, nous avons jugé plus judicieux d'allier méthode qualitative et quantitative. En ce sens, nous avons fait usage du questionnaire uniquement pour les membres du Foyer de Sanar, du guide d'entretien pour les deux structures à savoir le Foyer de Sanar et l'ANCAR et de l'observation désengagée. Ce choix est loin d'être fortuit puisqu'il est question d'appui et/ou d'encadrement des producteurs par une structure étatique, donc un phénomène qui, à notre avis est difficilement décomposable en variables métriques. Par conséquent, du fait de cette complexité, nous avons jugé nécessaire d'accorder la prééminence à la combinaison des diverses méthodes pour saisir la nature de

l'intervention de cette structure. Autrement dit, il s'agit de laisser aux paysans toute la liberté de s'exprimer sur la question, parce que supposés être les mieux placés ayant une explication et une compréhension plus significative de la nature de l'intervention de l'ANCAR. C'est donc en quelque sorte la technique de l'enquête participative où les acteurs (producteurs) ne constituent guère de simples sujets à enquêter, mais aussi des protagonistes dans la recherche.

4.3.1- Le questionnaire

Le questionnaire a été l'un de nos outils d'enquête dans le cadre de cette étude et a été administré uniquement aux membres du Foyer de Sanar. Il a été conçu sur des questions ouvertes et des questions à éventail. Les questions ont été regroupées en cinq parties distinctes :

- L'identification sociologique des enquêtés

- Identification, constitution et évolution de la structure

- L'organisation et le fonctionnement de la structure

- Les activités de la structure

- Les relations partenariales de la structure avec l'ANCAR

Ce questionnaire a été soumis uniquement aux membres du Foyer du Sanar dans le but d'obtenir des informations plus approfondies sur la structure et sur ses relations partenariales

avec l'ANCAR. En effet, les premiers concernés ont été les membres du bureau quiconstituent des personnes ressources susceptibles de nous fournir plus fiables. En outre, le
questionnaire a également été soumis aux membres simples pour recueillir des informations
supplémentaires afin de les confronter avec celles déjà reçues des dirigeants. Ces informations
sont d'une importance capitale en ce sens que le point de vue ou encore la perception de
l'élite sur l'organisation et sur ses relations avec l'ANCAR ne sont pas souvent les méme
avec ceux des simples membres. L'administration de ce questionnaire, comme les entretiens,
a été effectuée dans les domiciles des enquêtés mais aussi dans leurs lieux de travail, c'est-à-
dire au niveau de leurs parcelles à cultiver. La durée de chaque administration a été comprise
entre 25 à 30 minutes.

4.3.2- Les guides d'entretien

Dans le cadre de ce travail de recherche, nous avons également eu recours à l'usage du ou des guide (s) d'entretien puisqu'ils sont au nombre de deux.

Le premier a été conçu à l'intention des membres du Foyers de Sanar et a trait d'abord à l'historique, ensuite à l'organisation et au fonctionnement de la structure, aux objectifs et activités et enfin au rapport et à la dynamique partenariale avec l'ANCAR. Il porte sur les thèmes suivants :

1- Historique du Foyer de Sanar

2- Profil organisationnel et Fonctionnement du Foyer

3- Objectifs et activités de l'organisation

4- Rapport et dynamique partenariale avec l'ANCAR

5- Obstacles et contraintes

Le second guide d'entretien est adressé aux agents de l'ANCAR et comporte les thèmes suivants :

1- Contexte de création de l'ANCAR

2- Structuration et fonctionnement

3- Plan d'action (activités et/services)

4- Rapport dynamique partenariale de l'ANCAR avec les OP (le Foyer de Sanar)

5- Réalisations de l'ANCAR au niveau des OP

6- Incidences de l'appui de l'ANCAR sur les producteurs

En effet, le principal constat que l'on peut faire à ce niveau est le fait que ce sont les thèmes abordés dans l'enquête exploratoire qui ont été repris dans les deux guides d'entretien mais d'une manière beaucoup plus approfondie et avec un échantillon beaucoup plus consistant. Cela paraît être une sorte de répétition, mais à notre avis celle-ci est partie intégrante de la recherche scientifique. A noter également que ces guide d'entretien ont été administrés individuellement.

4.3.3- L'observation désengagée

Cette technique de recueil d'information a été utilisée dans le but de compléter les deux techniques précédemment évoquées. Plus précisément, l'observation désengagée nous a permis de vérifier les propos des personnes interrogées par entretien. Le principe consistait à assister à des assemblées générales, à des réunions tenues et à des séances de rencontre à la fois par et entre les deux partenaires comme c'est le cas des ateliers de formation et d'information. Le principal objectif était de saisir la manière dont se prennent les décisions pour avoir une idée non seulement le partage du pouvoir au sein des deux structures, mais

aussi sur les relations de pouvoir dans le cadre de leur partenariat. Outre cela, nous avons effectué des descentes sur le terrain avec le conseiller agricole rural de Gandon pour observer la manière dont il collabore avec les producteurs.

4.4- Le déroulement de l'enquête

L'enquête a consisté en des entretiens avec les acteurs cibles et s'est déroulée en un mois précisément du 17 Avril au 21 Juin en raison de l'indisponibilité de certains acteurs retenus dans notre échantillon.

La première étape a concerné l'administration du guide d'entretien aux agents de l'ANCAR. Ainsi nous avons pu discuter avec tous les dix (10) agents y compris le Directeur régional. Les entretiens avec ces derniers se sont déroulés sous une forme guidée, qui nous permettait de temps en temps d'approfondir certaines questions ou encore d'insister davantage sur certaines réponses fournies par nos interlocuteurs pour avoir des informations beaucoup plus complètes.

La deuxième phase concerne quant à elle les entretiens avec les producteurs membres de l'OP que nous étudions à savoir le Foyer de Sanar. L'administration du guide d'entretien au niveau des membres de l'OP ne s'est pas déroulée de manière structurée, mais a plutôt consisté à des conversations laissant une grande marge de manoeuvre aux enquêtés, meme si par endroit, on se réservait le droit de transformer momentanément l'entretien sous une forme semi-guidée dans le but d'approfondir certaines questions. Quant au questionnaire, son administration a pris plus de temps mais a été plus aisé que le guide d'entretien en raison de la différence entre la nature des questions.

Il importe également de souligner que le lieu d'enquête variait d'un producteur à un autre. Les différents entretiens se sont déroulées soit au domicile de ceux-ci soit à leur lieu de travail (au niveau de leur exploitation agricole), soit encore au coin de quelques lieux publics (marché, place de la mosquée, place publique). C'est dire que souvent l'indisponibilité fréquente de certains des acteurs de l'organisation a incité à profiter de l'occasion qu'offre leur apparition parfois inopinée. Les interviews ont été réalisées individuellement pour permettre à certains producteurs de mieux comprendre l'information que nous avons voulu obtenir. Il s'en est parfois suivi d'une prolongation du temps d'administration des outils de collecte, liée à des interruptions sporadiques. Dans ces cas et en de tels lieux publics, ne pouvant contraindre notre interlocuteur à nous isoler, nous avons dû accepter de procéder aux

entretiens dans ces conditions là, ce qui au demeurant a constitué une difficulté moindre par rapport à celles rencontrées.

4.5- Difficultés rencontrées

A l'instar de tout travail scientifique, la réalisation de ce modeste travail a également connu quelques contraintes.

- La première difficulté rencontrée est relative à la contrainte du temps .Sans trop y insister nous voulons tout simplement souligner qu'en raison des exigences du nouveau système à savoir le LMD où une date est exigée pour le dépôt des mémoires, nous avons eu d'énormes contraintes à arrimer les cours et le travail de recherche. Cependant, pour contourner ce problème, nous avons tout simplement décidé de cesser certains de nos cours pour accorder ce temps à notre étude.

- La deuxième difficulté est liée à l'histoire de la collecte : en effet, la prise de contact avec les enquêtés a été rendue particulièrement difficile par leur indisponibilité (surtout avec le directeur de l'ANCAR et quelques producteurs) du fait de leur préoccupations annexes. En effet, puisque la plupart des enquêtés sont des exploitants agricoles, alors ces derniers passent la plupart du temps dans les périmètres. Pour pallier à cette contrainte, certains producteurs ont été enquêtés au niveau de leurs parcelles d'exploitation agricole et d'autres tard dans la soirée à leur retour des champs.

- Enfin, nous avons également eu quelques problèmes pour administrer les questions aux producteurs à cause de notre faible maîtrise de la langue wolof. Nous étions parfois dans l'incapacité de traduire correctement certains termes de la langue française en wolof pour les faire comprendre aux enquêtés et leur permettre de répondre de manière adéquate. Pour cette contrainte, nous avons fait appel à un de nos camarades étudiants plus précisément un ami qui se trouve en master 2 d'anglais pour nous tirer d'affaire.

Troisième partie :

Présentation des résultats de

l'enquête

Cette partie est consacrée à l'analyse et à l'interprétation des données de l'enquête. Cependant, ce qu'il convient de préciser est que ces données ont fait l'objet d'une analyse dynamique. Autrement dit, les données quantitatives et qualitatives similaires ont été regroupées pour être analysées.

Elle comprend quatre chapitres :

Le premier décrit l'historique du Foyer de Sanar, le deuxième s'intéresse aux activités socioéconomiques du Foyer, le troisième chapitre traite des obstacles à l'autopromotion paysanne et au développement, le quatrième chapitre est consacré à la relation partenariale du Foyer de Sanar avec l'ANCAR, le cinquième est centré sur le partenariat du Foyer avec l'ANCAR et enfin le sixième chapitre parle de la portée de l'intervention de l'ANCAR au niveau du Foyer

Chapitre V : Historique du Foyer de Sanar

5.1- Contexte de création et objectifs

Le Foyer de Sanar a été mise en place en 1995 avec seulement l'engagement de huit producteurs dont le président Djiby Mbaye. Son contexte de création est indissociable de celui qui a vu naître la majorité des autres structures similaires (GIE, GPF tec.). Celles-ci sont nées dans un contexte socioéconomique assez difficile dont les origines se trouvent dans la série de sécheresses qui a frappé le pays dans les années 70 à 73. A cela s'ajoute, la dévaluation du franc CFA et la conjoncture sociopolitique qui se dessinait dans la zone. En effet, l'influence des anciens, conjuguée au poids accablant d'un encadrement en cascade des structures de l'Etat dont la SAED, exemptait les jeunes et les femmes de l'activité agricole. Ainsi, faute d'alternative crédible, ces jeunes vont se livrer en masse à l'exode rural à la recherche d'un espace d'épanouissement.

Devant un tel phénomène, quelques natifs de la localité plus avertis vont se retourner à la source pour mettre en place le « Foyer de Sanar » qui regroupera l'ensemble des producteurs de la localité. L'objectif principal qui sous-tendait cette union était en fait d'associer leurs forces et leurs moyens en vue d'assurer le renforcement de leur capacité de producteurs et leur auto-promotion socio-économique. Il s'agit de créer pour leur village un projet de développement économique et social, de créer des activités génératrices de revenus, d'assurer l'autosuffisance et l'équilibre alimentaire et enfin de promouvoir le développement de l'entraide et de la solidarité entre les populations.

5.2- Le fonctionnement interne du Foyer de Sanar

Le Foyer de Sanar comme déjà indiqué dans le cadre d'étude est une organisation composée d'un bureau assez restreint où la presque totalité des pouvoir est détenue par le président. Pour ce qui est de l'Assemblée Générale de renouvellement qui est composée de tous les producteurs membres du Foyer, elle est régulièrement tenue tous les deux ans exceptée une situation d'urgence. L'AG est l'organe supreme ; elle est souveraine et donne mandat au bureau pour l'exécution des activités administratives, techniques et financières. C'est elle qui élit le bureau, lui donne des directives et évalue ses activités. Il n'y a pas de Comité Directeur, le président est élu par tous les producteurs.

Le bureau devait convoquer, selon les principes de l'organisation, une Assemblée Générale tous les deux ans pour mettre au point les acquis et les contraintes qui peuvent être internes ou externes à l'organisation. Cependant, le bureau quant à lui, doit se réunir une fois tous les mois mais des réunions extraordinaires peuvent également être tenues à tout moment quand le besoin se fait sentir. Le bureau peut également convoquer une assemblée générale urgente en cas de problèmes majeurs ou en cas d'obtention immédiate de financement.

C'est également au bureau de définir les différents programmes et d'assurer leur exécution. Le bureau se compose de seize (16) membres. Il s'agit :

- du Président

- des deux (2) vice présidents

- du secrétaire général

- du secrétaire général adjoint

- du trésorier général

- du trésorier général adjoint

- de commission chargée des relations avec les partenaires (2 personnes)

- de la commission de contrôle pour l'irrigation (2 personnes)

- de la commission féminine (3 personnes)

- de la commission de collecte des cotisations (2 personnes)

Concernant le fonctionnement de la structure, se posent de nombreux problèmes liés à la fois à la transparence dans la gestion des ressources financières et au manque d'instruction. Certes, la périodicité du renouvellement du bureau est respectée (tous les deux ans), mais le problème se situe au niveau des prises de décisions. En effet, la tenue telle que prévue des réunions mensuelles n'est pas de rigueur et pourtant chaque mois les cotisations sont collectées. La majorité des membres du Foyer affirme que les décisions viennent du président et que parfois même ils ne sont pas au courant de la décision. Selon A. HANN, « depuis que j'ai adhéré à cette structure il y a huit (8) ans, chaque moi je cotise pour une somme de 500 FCFA, mais on a jamais connu le montant de la caisse. Et pourtant, je sais qu'il doit y avoir beaucoup d'argent maintenant ». Et elle continue « c'est un problème de parenté et d'ancienneté, sinon tout le monde sait que l'argent est utilisé par les membres du bureau parce que depuis trois ans maintenant, le président s'est payé une voiture personnelle et a ouvert un restaurant pour sa femme et sa fille à l'université (tu ne les connais pas, pourtant elles sont let-bas chaque jour. En plus il et côté des deux motopompes du Foyer, il a sa petite

motopompe qui lui permet d'irriguer ses parcelles sans problème. Maiis peEIonnIIIne pLeuITen
auv17sifil n di
I
hypocriteImêm e tr= ».

La manière dont les membres du bureau exécutif sont accolés à leurs postes révèle que ces dernier on généralement des objectifs jamais explicitement avoués et Chauveau (1995) l'avait longtemps remarqué quand il sied qu'il y a toujours chez les ruraux une articulation des intérêts économiques aux postures politiques. Le système d'action explicite des leaders paysans met en exergue la stratégie d'instrumentalisation pour la réalisation des fins personnelles ou un mai ntien du système procurant des intérêts crypto personnel plutôt qu'une volonté de développer le sixteur agricole.

5.3 - Identification sociologique des membres du Foyer des Sanar

Si la connaissance du milieu constitue pour l'intervenant un préalable, elle se présente par contre dans la recherche comme un aboutissement. C'est-à-dire que l'intervenant s'appui sur sa connaissance du milieu afin de développer une action efficace au moment où le chercheur use d'un ensemble de procédés pour arriver à son but ultime qui est de produire une connaissance du milieu. Quelques indicateurs sociologiques obtenus à partir de données fournies à travers le guide d'entretien ont été isolés. Ce tableau présente en effet l'identification sociologique des producteurs membres du Foyer de Sanar.

Tableau 6 : Corrélation entre l'âge, le sexe et la situation matrimoniale des enquêtés

1

Age

Sexe

Situation matrimoniale

[20 à 30 ans]

[30 à 40 ans]

[40 à 50 ans]

[50 ans et plus [

 

Homme

Femme

Homme

Femme

Homme

Femme

Homme

Femme

Total

Célibataires

5

 

0

0

 

0

0

 

0

0

 

0

5

Mariés (es)

0

 

0

3

 

2

5

 

2

2

 

0

14

Divorcés(es)

0

 

0

1

 

3

0

 

4

0

 

0

8

Veufs (ves)

0

 

0

0

 

0

0

 

0

2

 
 

3

Total

 

5

 

9

 

11

 

5

30

Soit en %

 

16,67

 

30

 

36,67

 

16,66

100

Source : données de l'enquête, Diakho, 2010.

Ce tableau croisé ci-dessus représente la répartition des membres du Foyer constituant notre échantillon, c'est-à-dire l'ensemble des producteurs enquêtés. La répartition est faite en fonction non seulement de l'âge et du sexe, mais aussi de la situation matrimoniale. En fait, comme nous l'avons déjà signalé, le Foyer de Sanar est une organisation de producteurs qui peut également être plus ou moins représentée comme une association villageoise d'autant que l'on retrouve la quasi-totalité des producteurs de toutes les classes d'age du village. Par conséquent, sans vouloir affirmer que le Foyer de Sanar reflète parfaitement la nature de la population de l'ensemble du village, on peut tout de méme avoir un aperçu approximatif de la population du village de Sanar à travers notamment cette organisation.

La population du Foyer de Sanar se caractérise en fait par une dispersion relativement hétérogène entre les jeunes, les adultes et le troisième âge. L'importance des classes d'age [40-50] et [30-40] représentant respectivement 36,67% et 30% montrent réellement que le Foyer de Sanar dispose d'importantes ressources humaines malgré une faible représentation des jeunes 16,67%. Mais ce qui est ici déterminant, c'est qu'outre la différence des de représentativité entre jeunes et adultes, il y a du point de vue de la situation matrimoniale, un écart sans précédent entre les mariés et les autres statuts matrimoniaux. Cette représentation majoritaire des mariés s'explique en grande partie par le souci de la prise en charge de la famille (conjoints (es), enfants, parents etc.) surtout en matière de nourriture. Cependant, certes le pourcentage des mariés domine au niveau de la population totale avec 46,67%, mais suivant la répartition selon le sexe, les personnes qui vivent en couple n'occupent que le sommet de l'échelle masculin. Chez les femmes par contre, ce sont les divorcées qui sont plus présentes dans le foyer avec un effectif de 8 divorcées sur les l1 femmes. En effet, la massive adhésion des femmes veuves dans la structure trouve sa raison dans leur situation matrimoniale, c'est-à-dire qu'en raison d'un manque de bras pour apporter de la nourriture, elles sont obligées de travailler elles-mêmes pour subvenir à leurs besoins et assurer leur survie. C'est ainsi que D. DIAW affirme que « bo guissé nit so nékké ci keer gui, dafa am kou la nekel ci nadj ». Ce qui veut dire « s'il tu vois une tte sous l'ombre, c'est parce qu'il y'a une autre sous le soleil pour lui ». Au niveau du genre aussi, Il y a une prédominance des hommes avec un total de 76 soit 65% contre seulement 42 soit 36% pour les femmes. Cette tendance, malgré la domination des hommes, renseigne sur l'importante évolution de l'implication de la gente féminine dans le domaine de l'agriculture surtout dans sa forme moderne. Mais cette domination masculine comme le dirait Bourdieu relève de la division traditionnelle du travail en milieu africain qui accorde à l'homme la responsabilité d'exercer les activités externes à la maison comme l'exploitation agricole et à la femme les activités

domestiques. Cependant, il faut reconnaître que cette norme traditionnelle, même si elle persiste encore dans certaines sociétés n'est plus reconnue comme étant une obligation, car elle connaît une reconfiguration qui a changé les modalités de travail.

Chapitre VI - Les activités socioéconomiques du Foyer de Sanar

Au regard des différends champs d'action du Foyer de Sanar, il convient de signaler que l'essentiel des activités de cette structure est concentré dans l'agriculture. Ce fait trouve son explication dans la place qu'occupe l'activité agricole dans le village. En effet, selon le président D. MBAYE, « dans ce village, à part quelques métiers comme la maçonnerie, la culture, toutes le personnes s'activent dans le travail de la terre. Si tu sillonne tout le village, tu te rendras compte par toi-même que tout le monde est cultivateur, jeunes et vieux, hommes et femmes Il ya quelques éleveurs mais qui sont aussi les plus grands cultivateurs C'est une activité qui est indispensable à notre survie ». Une telle spécialisation n'est guère étonnante, plus encore elle ne constitue un facteur bloquant dans la promotion de leur propre promotion. Au contraire, elle semble même être un catalyseur dans la recherche ou encore dans la promotion du développement local. Cependant, les activités culturales sont très diverses et varient selon le sexe. Elles tournent autour de la riziculture, du maraîchage, de la culture du mil, de l'arachide et du maïs.

La diversité des membres de l'OP se manifeste également au niveau de la production agricole. Autrement dit, les producteurs du Foyer de Sanar ne produisent pas ensembles les mémes produits agricoles méme s'ils s'activent tous dans le domaine du travail de la terre. Tableau 7 : Les différentes spéculations cultivées par les producteurs selon le sexe

Sexe

Spéculations

Masculin

Féminin

Total

Pourcentage

Riz

4

7

11

19,3

Mil

6

0

6

10,52

Maïs

15

0

15

26,32

Arachide

2

5

7

12,28

Maraîchage

10

8

18

31,58

Autres

0

0

0

0

Total

37

20

57

 

Pourcentage

64,91

35,09

 

100

Source : Données de l'enquête, Diakho, 2010.

Figure 2 : Histogramme de corrélation entre le genre et les spéculations

Source : Données de l'enquête, Diakho, 2010

Dans le tableau ci-dessus, le nombre de réponses (57) est supérieur au nombre de personnes qui composent notre échantillon (30). Ceci est dû à la nature de la question qui est fermée mais à choix multiples, donc les réponses sont parfois multiples pour cette question. Autrement dit, à la question de savoir le type de spéculation que cultive un producteur, il peut

p

donner des réponses multiples. Par exemple, un producteur peut cultiver à la fois du riz et du

maïs ou de l'arachide et du maraîchage. Alors dans ce cas, sa réponse portera sur les deux spéculations. Ce qui fait qu'on a parfois deux réponses ou plus au lieu d'une seule.

Les spéculations cultivées par les producteurs du Foyer de Sanar sont diverses mais la

8

prééminence est donnée à la culture des légumes avec 31,58% suivie de celle du maïs 26,32%

7 et du mil 19,3%. En effet, dans la culture des légumes, nous avons une proportion quasi-égale 15

pour les hommes et les femmes alors que le mil et le maïs ne sont pratiqués que par les

10

5

4 hommes. L'autre spéculation cultivée par les femmes concerne le riz. L'attachement des 2

Riz

femmes à la culture des légumes et du riz trouve son explication dans le fait que ces

M il M aïs Arachid Cultures m Autres

spéculations sont destinées le plus souvent à la vente dans le but d'augmenter leur revenu.

culn

Puisque la majorté des femmes qui sont dans la structure sont soit divorcées soit veuves,

Féminin

alors ces cultures permettent de leur apporter un peu de ressource afin de pouvoir subvenir à
leurs besoins. Comme l'a affirmé M. DIOUF, une productrice, « ce sont ces légumes qui

nous permettent de régler plus ou moins nos problèmes. Puisque la dépense journalière donnée par nos maris est généralement insuffisante, l'argent qu'on gagne à travers la vente des légumes nous permet d'acheter nous-mêmes le nécessaire pour préparer un bon repas. Parfois, on paye également des chaussures et des fournitures scolaires pour les enfants». Selon une autre productrice du nom de F. DIAO « maintenant ma vie dépend en grande partie de ce que je produis comme légumes. J'ai perdu mon marie depuis onze (11) ans et j'ai eu trois (3) filles et un garçon qui est d'ailleurs le cadet Pour ma vie et la vie de mes enfants, je ne sais pas faire autre si ce n'est l'agriculture. Au moins avec ça, je parviens à assurer leur éducation et leur habillement ». De la même manière, le maraîchage constitue pur les hommes aussi, une activité génératrice de revenu leur permettant d'assurer la dépense quotidienne de la famille et l'éducation des enfants. Cependant, Quant au maïs, il relève plus de la responsabilité des hommes 26,32% qui sont soucieux de la nourriture de la famille. Cette spéculation constitue une culture vivrière et est destinée à la consommation familiale. Mais le problème qui se pose est la disponibilité des facteurs de production comme la terre. En effet, l'ensemble des superficies de terre arable est de 133 hectares soit 1,12 ha par personne. C'est une ressource largement insuffisante pour une population majoritairement mariée et ayant des responsabilités familiales. En outre, les raisons qui ont poussé les producteurs du village de Sanar à s'unir sont certes d'ordre économique, mais il importe aussi de noter que les relations qui lient les uns avec les autres dépassent largement l'économie. L'un de nos enquetés a tenu à préciser cela à travers ces propos : « si réellement on s'était réuni pour des raisons uniquement économiques, il y a longtemps que notre organisation allait s'effondrer puisque depuis que certains ont adhérer à l'association, ils ont perdu plus d'argent qu'ils n'en ont gagné Ce qui compte aujourd'hui, c'est que l'organisation représente pour nous une seconde famille qui peut venir au secours de ses membres quand ils le désirent. ». Cela revient à dire qu'en plus des objectifs économiques qui ont engendré la mise sur pied de l'OP, il y a également les motifs d'entraide, de solidarité, de cohésion sociale qu'on ne peut pas totalement occulter dans la mise en place d'une telle structure.

Chapitre VII - Les obstacles à l'autopromotion paysanne et au développement

7.1 - L'insuffisance de moyens

7.1.1 - L'insuffisance de moyens financiers

Le Foyer de Sanar en tant que structure de producteurs est confrontés à un problème crucial de mobilisation des ressources financières au niveau aussi bien interne qu'externe.

En effet, pour mobiliser des fonds au niveau local, c'est-à-dire interne, le Foyer s'appuie sur une participation individuelle et mensuelle (cotisation) de ses membres fixée à cinq cents (500) FCFA par personne, ce qui donne respectivement une somme totale de 59.000 FCFA par mois et de 708000 FCFA par an. Ce qui, certainement paraît insuffisant pour assurer un financement conséquent aux activités agricoles de ses membres. Pour D. MBAYE « avec la somme récoltée à travers cette cotisation, le Foyer ne peut pas couvrir les besoins de financement de ses membres. Même à votre niveau, vous conviendrez avec moi qu'une telle somme est très insuffisante pour assurer les besoins de 118 membres qui ont tous comme principales activités l'agriculture. Cette activité, avec tous les moyens techniques qu'elle requiert, demande des ressources financières assez consistantes ».

Un tel manque de ressources financières se présente également comme une réalité au niveau des membres. Puisque tous les membres n'ont pas le même niveau de revenu, certains peuvent rester jusqu'à trois (3) mois sans donner leur cotisation. Suite à cette différence de niveau de vie des membres, le Foyer a défini quatre (4) modalités de cotisation selon les possibilités de chacun de ses membres.

Tableau 8 : Modalités de cotisation des membres

Modalités de cotisation

Montants en FCFA

Mensuelle

500

Trimestrielle

1500

Semestrielle

3000

Annuelle

6000

Source : Donnée de l'enquête, Diakho, 2010.

7.1.2 -- Le manque de moyens matériels et techniques

La structure du Foyer de Sanar souffre également d'une absence criarde de moyens matériels et techniques. Occupés dans leur totalité dans les activités agricoles, les membres de cette structure ne disposent pas de matériels agricoles. Comme déjà signalé, ce fait constitue une conséquence de l'insuffisance de ressources financières mobilisées et mobilisables fois au niveau interne parce que les fonds mobilisés par le Foyer à travers les cotisations ne lui permettent pas de mettre à la disposition de ses membres le matériel agricole nécessaire. A cela, s'ajoute l'exclusion des services et prestations des organismes de l'Etat chargés de l'encadrement, de l'appui ou encore de l'accompagnement de l'agriculture au niveau de milieux ruraux. Autrement dit, les diverses OP ne bénéficient pas du moins rarement du soutien à la fois financier et matériel des structures de développement. Ainsi, les membres du Foyer sont contraints à la location de matériels agricoles dont les coûts sont quasi insupportables à leur niveau. De ce fait N. SALL, un membre du Foyer nous révèle « Pour aménager et cultiver nos parcelles, nous engageons individuellement un tracteur en raison de 35.000 FCFA, l'heure. Je pense que tu comprends ce que je veux dire, cela veut tout simplement dire que ce n'est pas tout le monde qui peut engager un tracteur. D'ailleurs la majorité fait appel à la traction animale qui est moins cher mais qui ne fait pas grand-chose comparée au travail du tracteur. Depuis sa création, le Foyer n'a engagé un tracteur pour tout le monde que deux fois et la dernière remonte en 2006, mais depuis lors on a rien vu. Alors de tels coûts limitent nos capacités d'exploitation et mme nos gains Finalement, nous ne gagnons pas grand-chose dans notre travail, mais nous nous trouvons dans l'obligation de le faire mrme avec nos modestes moyens parce que nous n'avons pas d'autres alternatives et nous n'avons que l'agriculture pour subvenir à nos besoins quotidiens de nos familles. »

En outre, on constate également l'état défectueux des motopompes et quelques autres équipements souvent indisponibles en raison des pannes fréquentes. Ce qui entraîne souvent des conflits dans les tours d'arrosage, mais aussi dans le démarrage de saisons de culture.

A cette lourdeur des coûts de prestation c'est-à-dire de location et cette défectuosité du matériel agricole, s'ajoute la cherté des semences agricoles. Sur ce point, S. MBAYE nous précise « pour acheter un seul kilogramme de tomate, nous sommes contraints de nous regrouper en groupe de cinq personnes ou plus et cotiser au minimum 50.000 FCFA chacun. Mrme le kilogramme de semence d'oignon est situé maintenant entre 40.000 et 50.000 FCFA. On croyait que le Foyer allait au moins subventionner, avec son budget chaque membre pour obtenir des semences, mais il n'a rien fait. Vous voyez comme c'est difficile pour nous de

faire face à ses sommes exorbitantes. De toute façon, grace à Dieu, on s'en sort chaque saison car les vendeurs de semences nous connaissent maintenant et acceptent de nous offrir les semences à crédit».

Le domaine du maraîchage souffre également d'une absence d'infrastructures de stockage et de conservation de produits agricoles. Ainsi, les produits comme l'oignon et la tomate qui ne peuvent pas supporter un certain degré de chaleur pourrissent le plus souvent ou sont vendus à des prix méprisables.

7.2 - Les contraintes fonctionnelles du Foyer

La structure du Foyer de Sanar est confrontée depuis quelques temps à une véritable crise fonctionnelle. Nos observations et nos entretiens à travers le village nous ont laissé apprécier une quasi non fonctionnalité du bureau. En effet, l'absence de résultats concrets, surtout en termes de financement est particulièrement démobilisatrice pour les OP comme le Foyer de Sanar. Comme le note F. SECK : « Un certain relachement a été noté surtout au niveau de la base, par suite de la non satisfaction des attentes des membres ».

En plus, le bureau ne tenait des réunions que lorsqu'un projet est en vue. Et mesme dans un tel cas, tous les membres ne participent pas au même degré à son fonctionnement. C'est pourquoi la contrainte principale de l'organisation est d'ordre organisationnel. En effet, La reconduction permanente des mesmes personnes aux postes de responsabilité de l'OP apparaît comme une contrainte majeure dans le développement de l'organisation. Il est non seulement source de frustration et de conflit préjudiciables à la cohésion nécessaire à leur renforcement et renforce les forces d'inertie au sein de l'organisation. Un de nos enquestés affirme que « le bureau de notre foyer peut parfois être reconduit plus de cinq (5) fois. Même si, lors d'une élection, il y a un changement de certains membres du bureau, d'autres par contre n'ont jamais quitté Par exemple, depuis que le Foyer est créé, il n'y a qu'un seul et V f mrme président. Il n'a jamais quitté son poste depuis presque quinze (15) ans. C'est le cas du trésorier également qui a monopolisé ce poste. Je sais pertinemment que beaucoup de gens veulent leur changement mais il y a des choses dont je ne peux pas t'en parler maintenant parce que (comme disent les wolofs kham lep, wakh lep bakhoul). En plus toute parole à un moment pour être dite et ce n'est pas bon de l'évoquer si ce moment n'est pas venu». Sur le plan financier aussi, il s'en est suivie un découragement voire un arrest de la participation de la plupart des membres. Certains vont se mettre en situation irrégulière par le non respect du versement de leur cotisation mensuelle.

En somme, la majeure partie des chercheurs qui s'adonnent à l'étude des OP pense le plus souvent que le seul et unique obstacle auquel les paysans sont confrontés est le problème d'argent. Dans le cadre de cette étude, les données recueillies montrent qu'il y a certes la question financière, mais la grande difficulté organisationnelle occupe également une importance capitale. Ceci est dü à l'inaptitude des membres à assurer certains postes dans le bureau parce que n'ayant pas un certain niveau d'instruction. Le tableau suivant montre effectivement la situation du niveau d'instruction des membres du Foyer de Sanar.

7.3- Le manque de professionnalisme des producteurs du foyer

On observe un manque de performances aussi bien dans le fonctionnement du Foyer mais aussi dans l'activité agricole. Ce défaut est certainement occasionné par le manque de professionnalisme qui s'explique à son tour par un faible niveau d'instruction noté chez la plupart des producteurs. Il est noté une absence de la formation technique et de l'information des producteurs qui a pour effet une faiblesse de la capacité d'initiatives des membres et une insuffisance de l'effort de travail qui réduit ainsi le revenu.

Il ressort de ces constats que les OP comme le Foyer de Sanar ne constituent pas encore des organisations professionnelles comme le souhaitaient les bailleurs de fonds. Au niveau interne, leurs organes de fonctionnement sont presque dans le vide sans lien organique non seulement entre eux, mais aussi avec la base pouvant entretenir une dynamique d'organisation. Au niveau externe, leur modèle organisationnel vise à se conformer aux exigences des bailleurs pour capter les financements, mais ne répond pas aux normes définies et maîtrisées par les producteurs membres. Ainsi, le Foyer de se réduit davantage à une organisation de producteurs traduisant un des multiples instruments de stratégies pour capter les ressources stratégiques qu'offre l'environnement institutionnel. Cette situation peut constituer une limite à sa capacité d'organisme gérant des activités de développement et devenir ainsi une source de blocage au processus de responsabilisation des producteurs.

Selon nos observations, l'absence d'éducation constitue une difficulté majeure pour le fonctionnement du Foyer de Sanar. Un seul membre en la personne du président de la structure parmi les 30 enquêtés a atteint le niveau secondaire alors que 23,3% et 6,7 se sont arrétés successivement à l'école primaire et le collège. La catégorie des non instruits est plus significative avec une proportion de 60%. Les différente raisons données par les enquêtés se situent au niveau du retard accusé pour l'acquisition d'une école mais également à la prédominance de l'école coranique qui constituait une étape obligatoire à franchir. Les

quelques membres qui ont eu à fréquenter l'école française se rendaient en ville et n'y restaient pas généralement. Ainsi, ce manque et/ou ce faible niveau d'instruction constitue un sérieux obstacle auquel les membres du Foyer sont confrontés. Selon B. DIOP qui était le premier secrétaire de l'OP : « lorsqu'on m'a désigné comme secrétaire, je ne savais même pas ce que cela veut dire. Je savais que je fais partie du bureau mais réellement je ne savais pas ce que je devais faire parce que je n'étais pas instruit. Alors j'ai fini par démissionner du bureau et un autre m'a remplacé, mais je sais que celui là est comme moi parce qu'il n'a pas aussi appris ». En fait, plusieurs membres du bureau ne savent pas réellement le but et le rôle du poste qu'on leur a confié et ils évoquent eux-mêmes que la raison principale raison de ceci est le manque d'instruction et de formation, le retard de la scolarisation. Refusant une proposition de construction d'école, le village paie actuellement les largesses de son chef de village de l'époque. Savoir lire et écrire est important pour toute action de développement interne ou externe. Rien que pour la participation de la population à son développement encadré par des organismes extérieurs, il est indispensable qu'elle sache s'approprier les outils de planification, de suivi- évaluation qui structurent l'efficience même de l'intervention. Cependant, ce problème ne trouve pas son explication dans la seule absence d'instruction, il réside en grande partie dans le manque d'une « culture d'organisation ».

Tableau 9 : Niveau d'instruction des membres du Foyer de Sanar

Niveau d'instruction

Effectifs

Pourcentages

Primaire

7

23,3

Moyen

2

6,7

Secondaire

1

3,3

Supérieur

0

0

Alphabétisation

2

6,7

Non instruit

18

60

Total

30

100

Source : Données de l'enquête, Diakho, 2010.

Chapitre VIII : La relation partenariale du Foyer de Sanar avec l'ANCAR

8.1 - Historique de l'ANCAR

Les faiblesses des différentes expériences de vulgarisation et d'encadrement du monde rural ont amené les autorités sénégalaises à réorienter la politique d'appui aux producteurs ruraux. Un système de concertation, de partage des décisions dans la conception, l'élaboration et la mise en oeuvre des politiques de développement agricole durable s'imposent. Selon le Directeur « les projets et les programmes seront réalisés principalement avec une pleine participation des collectivités locales et des organisations paysannes C'est pourquoi la réflexion a été engagée pour créer un nouveau cadre chargé du conseil agricole et rural (notion plus complète et ne se limitant pas seulement au transfert de technologie) ». D'une manière plus précise, l'approche de l'ANCAR constitue une réponse ou une rupture avec l'ancien système d'encadrement du monde rural dans lequel, les institutions et services publics appliquaient des politiques productivistes à travers une approche descendante dans le but d'atteindre les objectifs de production décidés par l'Etat. Ce système d'encadrement avait le quasi-monopole des services, en amont et en aval, nécessaires aux producteurs, et organisait ceux-ci en coopératives dans lesquelles ils disposaient d'une très faible autonomie de décision. Selon M. Mbaye, un agent de l'ANCAR, « l'encadrement suppose une transmission ou un transfert des connaissances, des technologies, des façons de faire etc., aux paysans sans tenir en compte ni des savoirs et des savoir-faire ni des besoins et aspirations de ces dernier. Pour cette stratégie d'intervention, il y a une position hégémonique de la structure d'intervention qui a pour unique but de « développer le producteur. Par contre dans le système de l'encadrement, l'approche est btie sur la reconnaissance des savoirs et savoir-faire des paysans qui sont indispensables au processus de développement agricole et rural. Elle repose sur la reconnaissance des producteurs comme les principaux acteurs de la transformation de leurs systèmes de production, de l'aménagement de leurs terroirs et de la gestion de leurs ressources naturelles ». On peut résumer cette approche du développement rural en parlant de « pilotage à la demande » par opposition aux théories et aux pratiques antérieures qui privilégient l'initiative des agences de développement et le recours au capital et impliquent par conséquent la passivité des populations.

Sous ce rapport, l'Etat du Sénégal a engagé une réorientation profonde de ses politiques et stratégies pour le développement du secteur agricole et la réduction de la pauvreté des ménages. De ce fait, des orientations stratégiques et une nouvelle politique institutionnelle sont définies par le Gouvernement avec l'appui des partenaires au développement. Ces options sont traduites par un important Programme d'investissement du secteur agricole (PISA) en 1998, dont une des composantes essentielles est le Programme des Services Agricoles et Organisations de Producteurs (PSAOP). En effet, le PSAOP, signé en 1999 avec la Banque Mondiale a été un des projets du PISA. Son objectif principal est de mettre en place un nouveau système d'appui au monde rural à la place de l'ancien système d'encadrement. Ce programme qui regroupe cinq composantes (Recherche agricole et agroalimentaire, le CNCR/ASPRODEB, le Conseil agricole et rural, le Fonds national de Recherche agricole et agroalimentaire, le Ministère de l'Agriculture et de l'élevage) a favorisé la création de l'Agence Nationale de Conseil Agricole et Rural (ANCAR) et la liquidation de la SODEVA en 1998 et de la SODESP en 1999. Donc il importe de signaler que l'ANCAR est une Société Anonyme à Participation Publique Majoritaire, c'est-à-dire avec une autonomie de gestion de type de droit privé. Avec ce statut, l'Etat a pu associer pleinement ses partenaires des Organisations de Producteurs (OP), des Collectivités Locales et du Secteur Privé. Le capital de l'agence est réparti entre quatre (4) actionnaires principaux : Etat du Sénégal : 51% ; Organisations Paysannes : 28% ; Secteur Privé et Industriel : 14% ; Collectivités locales : 7%. Mais ce qui est important nous révèle le Directeur, c'est que « l'ANCAR a une obligation de résultats, elle est redevable et comptable de ses résultats devant les producteurs. Par conséquent ses services sont axés sur les demandes des producteurs et sont fournis dans le cadre de contrats. Elle a été créée pour piloter le conseil agricole et rural sur toute l'étendue du territoire national, selon une nouvelle approche fondée sur la demande des producteurs et en partenariat avec les OP et les principaux acteurs du développement rural (ONG, Projets, SRDR, etc.) ».

8.2 - Situation administrative et fonctionnement de l'ANCAR

En ce qui concerne la situation administrative de l'ANCAR, depuis son installation en juin 2001, la Direction Régionale de l'ANCAR de Saint-Louis a affecté des agents au niveau des communautés rurales possédant un Cadre Local de Concertation des Organisations de Producteurs (CLCOP). En effet, les conseillers agricoles et ruraux se déploient dans les communautés rurales coiffés par les chefs d'équipe au niveau des arrondissements et appuyés

par l'équipe de la Direction Régionale à savoir (le Directeur, les assistants, les techniciens, spécialisés). En 2002, l'ANCAR de Saint-Louis intervenait dans cinq (5) CLCOP, mais actuellement elle intervient au niveau de huit (8) CLCOP.

Concernant le fonctionnement, il importe de signaler que la structuration de l'ANCAR se rapporte à deux principales instances de cette structure : d'abord une Assemblée générale (AG) composée des actionnaires dont l'Etat et ses démembrements, les organisations socioprofessionnelles (notamment les organisations de producteurs), et les privés, ensuite d'un Conseil d'Administration (CA) qui est composé des représentants des actionnaires.

Ensuite au niveau régional, le dispositif technique de la Direction Régionale est ainsi composé en fonction de du nouveau découpage administratif de la région.

- Un Directeur Régional

- Un assistant au Directeur Régional en Administration, Finances et Comptabilité - Un assistant au Directeur Régional en Recherche/Développement

- Un assistant au Directeur Régional en Suivi-Evaluation

- Un assistant au Directeur Régional en Appui Méthodologique

- Deux Techniciens spécialisés, l'un en Agro-pédologie, l'autre en Grandes Cultures (arachide, riz, et céréales)

- Un Chef d'Equipe basé qui est lié à l'arrondissement de Rao

- Deux conseillers agricoles et ruraux polyvalents basés au niveau des communautés rurales de Gandon et de Fass Ngom.

En outre, dans sa dynamique de prestation de services, l'ANCAR s'appuie sur un fonctionnement fondé sur quatre (4) programmes successifs allant de la base au sommet :

8.2-11- Le programme local de conseil agricole et rural

Les différents programmes de conseil agricole et rural élaborés pour accompagner les promoteurs individuels ou en groupe font l'objet d'une synthèse au niveau de chaque communauté rurale par le conseiller agricole. L'intérêt de la synthèse est de permettre d'évaluer les besoins en ressources matérielles, humaines et financières, d'ajuster le calendrier, de faciliter l'organisation et la répartition des moyens pour exécuter l'ensemble des programmes d'appui aux OP. Ce programme de synthèse est présenté au CLCOP qui regroupe tous les producteurs ou organisations de producteurs de la communauté rurale pour être pour validation.

8.2.2- Le programme d'arrondissement

Le programme d'arrondissement représente la synthèse des programmes locaux de conseil agricole et rural des communautés rurales de l'arrondissement en question. Il est organisé autour des activités de conseil agricole et rural telles que l'information, le conseil, la formation, les appuis et les activités de Recherche/Développement. Cette synthèse est l'oeuvre du chef d'équipe qui est rattaché à l'arrondissement. Mais d'après le directeur, à Saint-Louis, il n'y a qu'un seul chef d'équipe puisqu'on a qu'un seul arrondissement à savoir celui de Rao qui compte en son sein trois (3) communautés rurales : Gandon, Fass Ngom et Ndiébène Gandiol qui vient d'être érigé en chef lieu de la communauté rurale de Gandiol

8.2.3- Le programme régional

Il est élaboré à partir des programmes d'arrondissement de conseil agricole et rural. En plus des activités d'appui aux producteurs, le programme régional prévoit les activités d'appui aux équipes de base : les formations, les visites d'échanges, les voyages d'études inter et intra régions, dans la sous région, les ateliers et séminaires internes d'échanges, les missions d'appui et de supervision, etc. Le programme régional consolide aussi les différents programmes se situés au niveau des d'arrondissement qui proviennent des équipes de base.

8.2.4- Le programme national

Le programme national à l'instar des les programmes régionaux consolide à son tour les différents programmes de conseil agricole et rural des directions régionales et de la Direction Technique. Le programme de la Direction technique est celui qui est composé des programmes des différents volets rattachés, en termes d'appui, de coordination et de suiviévaluation.

Schema 4: Conception d'un programme CAR

Source : PTA/2003

8.3 - Les missions de l'ANCAR

L'Agence a pour principale mission d'établir un service de conseil agricole et rural comptable de ses résultats envers les producteurs et répondant à leurs besoins à travers des arrangements contractuels. Les activités de conseil agricole et de recherche développement sont identifiées et programmées conjointement avec les OP et l'ANCAR. Ces activités sont assujetties à des dispositions contractuelles entre les OP et l'ANCAR d'une part et les services de la recherche et le conseil agricole d'autre part. Les principes qui régissent l'organisation de l'ANCAR sont :

- Une direction centrale légère chargée d'impulser, de coordonner et de contrôler ; - des structures locales et régionales fortes, fonctionnelles et autonomes ;

- une disponibilité des moyens au niveau régional et local et une autonomie de gestion - des cadres de concertation associant les partenaires de l'ANCAR à la définition et à

l'évaluation de ses programmes ;

- une répartition des fonctions répondant aux réalités de l'exercice du conseil agricole et rural qui s'exerce à la base ;

- une définition des programmes par les directions régionales.

8.4 - Les activité de l'ANCAR

D'une manière générale, les activités de l'ANCAR sont étroitement lié au programme CAR. Ce programme est supposé être centré sur des problèmes à résoudre ou sur des projets (plus ou moins élaborés) à mettre en oeuvre. Le programme CAR comprend doit comprendre les différentes activités en décrivant les moyens retenus, les modalités de mise en oeuvre, les moyens financiers nécessaires. Il doit également être négocié entre les différents acteurs concernés et prévoit des périodes d'évaluation. De ce fait, les activités du programme tournent essentiellement autour du conseil, de l'information, de la formation, de la recherche/développement, et des appuis dont l'intermédiation comme action phare.

8.4.1- Le conseil

C'est une aide à la décision sur les moyens à utiliser ou les options à prendre. Les procédures de conseil sont variées : conseil ponctuel ou dans la durée, conseil individuel ou conseil de groupe. Le conseil le plus utile s'inscrit dans une démarche de réflexion/appropriation qui doit amener le producteur à construire lui même les solutions.

8.4.2- L'information

L'information constitue en effet, la première composante du programme d'appui du CAR et est de nature diverse. Nous avons par exemple l'information technique, économique, commerciale, juridique, fiscale et l'information politique. La mise à disposition de l'information aux producteurs et à leurs OP renvoie aussi aux divers moyens possibles pour la diffusion de cette information: la presse, la radio, les réunions, le Car et ses partenaires techniciens et les producteurs eux-mêmes. Pour les différentes catégories de personnes à informer, il le CAR cherche les modalités les plus opérationnelles de mise à disposition de l'information. Ces modalités concernent les supports écrits, les supports audio visuels, les personnes ressources : voisins informés, techniciens et les lieux d'informations (loumas, centres d'information, sièges des OP).

8.4.3- La formation

En ce qui concerne la formation, il s'agit d'aider les différentes OP à une maîtrise des savoirs et de savoir-faire pour que les producteurs et leurs leaders soient en mesure de mettre en oeuvre leurs activités ou projets de la façon la plus efficace possibles et la plus autonome. La formation permet ainsi d'offrir les acquisitions nécessaires qui sont de plusieurs ordres. Nous avons par exemple l'actualisation et la mise à niveau des connaissances de base à la fois techniques, économiques etc., et l'acquisition de compétences et de pratiques (apprentissages) nouvelles.

Les producteurs doivent acquérir les connaissances et les savoir-faire nécessaires pour exercer les nouvelles responsabilités qui leur reviennent. Les actions de formation devraient permettre aux producteurs d'acquérir des savoir-faire directement utilisables et de développer simultanément leurs capacités d'analyse et d'action, d'initiative et de négociation. Pour ce faire, une évaluation correcte de besoins en formation reste un véritable préalable et une bonne préparation pédagogique des formateurs.

Les différents volets de la formation des producteurs comprennent la formation technique, la formation à la gestion et l'alphabétisation. Ces divers types de formations ont chacun ses caractéristiques et ses exigences pédagogiques. En effet, les producteurs doivent être considérés comme des acteurs dans la formation afin de mettre en valeur leurs pratiques, leurs savoirs ainsi que leurs capacités à former d'autres producteurs, c'est-à-dire des échanges horizontaux entre les producteurs.

8.4.4- Les appuis divers

Les appuis divers sont intrinsèques à l'accompagnement opérationnel des acteurs. Ces appuis peuvent être un coup de main pour remplir un dossier administratif ou amorcer une négociation. Cependant, ces appuis passent par des canaux variés comme l'aide à l'obtention d'un service ou la mise en relation avec un prestataire de service (intermédiation), l'appui à la compréhension d'un contrat, l'aide à la constitution d'un dossier de crédit, l'aide à la formulation d'un dossier de projet etc. L'intermédiation entendue comme la facilitation du rapprochement entre les producteurs, leurs OP et les structures qui fournissent des biens et services (institutions de crédit, commerçants, artisans, services techniques, etc....) constitue

également un volet d'une importance capitale, c'est-à-dire une des activités phares dans les appuis divers.

8.4.5- La recherche/Développement

La Recherche/Développement part de l'idée selon laquelle des changements techniques sont toujours nécessaires pour s'adapter aux changements écologiques (sécheresse, baisse de fertilité) et aux modifications du contexte socio-économiques (diminution de l'espace disponible, baisse ou augmentation des prix des intrants, etc.).

Le producteur ne peut pas se satisfaire de messages techniques, c'est-à-dire comme un « passe-partout », il lui faut au contraire et en toutes circonstances procéder à des adaptations ou des ajustements pour que les techniques et les matériels proposés puissent s'intégrer et assumer leur fonction dans son système de production. Il doit donc réfléchir sans cesse sur les conditions et modalités à mettre en oeuvre pour que les techniques nouvelles puissent manifester pleinement leurs effets, sans contrecoup dommageable.

Ainsi pour enclencher facilement le dialogue paysan-chercheur-conseiller agricole à partir d'une démarche d'expérimentation en milieu paysan, la Recherche/Développement s'appuie sur six (6) principes :

1- Entreprendre des essais qui répondent aux préoccupations et qui s'intègrent facilement dans le calendrier du paysan ;

2- Montrer qu'on peut apporter des éléments de changement et faire mieux que ce qui existe ;

3- Avoir peu d'essais bien conduits, démonstratifs et suivis de près par les producteurs avec les conseillers et les chercheurs;

4- Préparer le paysan à affronter les risques d'échec qui entourent les essais ;

5- Faire visiter fréquemment les essais à des agriculteurs du village, des environs et d'autres chercheurs ;

6- Choisir des situations ou des thèmes faciles pour le producteur et le conseiller qui permet de démontrer les effets de la nouvelle technique et d'acquérir du savoir-faire.

Chapitre IX - Le partenariat du Foyer avec l'ANCAR

9.1 - Historique du partenariat avec l'ANCAR

Le Foyer de Sanar, à en croire le Président, a commencé à entretenir des relations avec l'ANCAR à partir de 2003, et en ce moment, l'organisation comptait à peu près une centaine de producteurs. Les surfaces à cultiver devenaient de plus en plus grandes et les motopompes étaient d'une capacité qui est telle que, toutes les parcelles ne pouvaient etre irriguées. Alors se fait sentir la nécessité de trouver de l'aide afin de pouvoir satisfaire les besoins de tous les membres du Foyer. Selon les propos de N. DOP, trésorier de l'organisation « quand on a appris qu'il y a une société de l'État nommée ANCAR qui aide les paysans, on a automatiquement convoqué une assemblée générale pour informer tous les autres. Ensuite il a été décidé lors de cette AG, qu'on aille voir cette société pour qu'elle nous aide à obtenir des motopompes d'une capacité beaucoup plus importante. Alors le président, la vice-présidente et moi-même, sommes partis à l'ANCAR et on a discuté avec le Directeur ». D'après K. SALL la vice-présidente, « c'est le président qui est venu me voir et m'a fait savoir qu'il vient d'apprendre par le biais d'un ami qu'il y a une nouvelle société qui aide les producteurs qui sont en groupement. Alors je lui ai demandé s'il ne parlait pas de la SAED parce que c'est la seule société de l'Etat qu'on connaisse ici et il m'a répondit que c'est une toute nouvelle société. Alors on a prévenu tout le monde en convoquant une assemblée générale. A l'issue de l'AG nous avons envoyé une délégation dont moi-mrme j'en faisais partie pour aller voir ce que cette société peut faire pour nous. Nous avons discuté avec le Directeur qui nous a expliqué que nous devons d'abord ~tre membre d'une autre organisation à Gandon (je ne connais même pas son nom (Il s'agit du CLCOP) et ensuite signer un contrat avec eux pour qu'on puisse travailler ensemble ».

Il ressort de ces propos que la situation précaire dans laquelle se trouvaient les membres du Foyer était la source de motivation qui a poussé ces derniers à se rapprocher de l'ANCAR et à nouer des relations partenariales avec elle. Cependant, la contractualisation entre un OP et l'ANCAR suppose a priori l'appartenance de cette OP au CLCOP de sa communauté rurale. Cela veut dire par conséquent, que la porte d'entrée de l'ANCAR n'est directement l'OP et/ou le producteur, mais plutôt le CLCOP qui est supposé regrouper et défendre toutes les OP de la communauté rurale.

9.2- Nature de l'intervention de l'ANCAR

D'après nos observations auprès des responsables de l'l'ANCAR, la démarche de leur structure apparaît comme le modèle ou la référence en matière d'intervention. Ils pensent même que c'est la solution aux multiples contraintes des producteurs. En effet, le directeur en nous expliquant la stratégie d'appui de l'ANCAR est allé jusqu'à soutenir que « le concept d'encadrement est banni de notre vocabulaire. On ne parle mrme plus de logique d'appui, mais plutôt d'appui-conseil ».

Nos observations sur ce point ont montré que ce discours élogieux des agents de l'ANCAR et plus particulièrement du directeur est à nuancer. En effet, il a été constaté lors de nos enquêtes, que la stratégie sur laquelle l'ANCAR travail avec les OP n'est pas si simple qu'il paraît l'être. Il est vrai que théoriquement, la logique d'appui place le producteur au coeur de l'action, c'est-à-dire que c'est ce dernier qui, en fonction de ses difficultés, des ses besoins ou aspirations, formule une demande d'appui à la structure d'intervention. En plus même si la demande est acceptée par l'ANCAR, la validation du programme qui lui sera proposé reste de son seul ressort. Et à partir de ce moment, la structure sollicitée est censée traiter sa demande et apporter une ou des solutions. M. CISSOKHO, agent de l'ANCAR, soutient « par exemple quand un producteur adresse à notre endroit une demande dans laquelle il manifeste la volonté de faire du maraîchage, on effectue un diagnostic complet, c'est-à-dire toutes les possibilités à la fois techniques et financières et les capacités dont dispose l'intéressé en matière de maraîchage. Après le diagnostic, on lui propose un programme qu'il devra étudier puis valider. Et ce n'est qu'en ce moment qu'on procédera à l'exécution du programme ». C'est également ce que confirme M. MBAYE, un agent de l'ANCAR qui soutient que « l'ANCAR n'intervient qu'à la demande des producteurs Seulement un agent de l'ANCAR peut aussi à travers ces propres observations susciter une demande d'intervention au niveau des producteurs s'il le juge nécessaire. Mais ce cas de figure est très rare et mrme si la demande est suscitée par un agent, il faut qu'elle soit approuvée par l'OP».

9.3- L'appui-conseil : une approche controversée dans sa pratique

Cependant, le véritable problème qui se pose à ce niveau est l'incapacité des producteurs à formuler correctement une demande d'appui parce que ne possédant pas un niveau de formation leur permettant de le faire. A ce propos un agent de l'ANCAR nous

confie « concernant la formulation des demandes d'appui, le problème est que est-ce que l'ANCAR est au courant de l'incapacité pour la majeure partie des producteurs de formuler correctement une demande. C'est là où se situe le véritable problème. Mais sur ce point, la faute n'émane pas de l'ANCAR, elle est relève plutôt du CLCOP parce qu'au moment où le PSAOP a été conclu entre l'Etat, les producteurs et la Banque mondiale, on a mis en place des fonds qui sont gérés par le CLCOP et qui sont destinés au renforcement des capacités des producteurs à restituer leurs demandes et à orienter leurs interventions. Mais là où le bât blesse et on ne le dit pas, c'est que la composante OP (le CLCOP) n'a pas joué son rôle et les

producteurs ne sont pas assez outillés pour rédiger ces demandes. Il y a même un problème

de m obilisation des groupes vulnérables pour accéder aux services de cette composante OP.

Et c'est dommage pour cette catégorie de producteurs qui ne savent pas formuler des demandes parce que l'ANCAR n'intervient qu'au niveau des OP qui l'ont sollicité ». Sur ce point, il ressort que la formulation d'une demande adressée constitue une condition sine qua non pour bénéficier de l'appui de l'ANCAR. L'appui-conseil est pertinent en lui-même c'està-dire dans sa formulation, mais le problème se pose au niveau de sa mise en oeuvre. En effet, pour être effectif, il suppose un certain nombre de préalables comme la rédaction de la demande qui doivent etre remplis. Ce n'est qu'après cette demande que le contrat entre l'ANCAR et l'OP est signé et les programmes exécutés. Ce tableau ci-dessous nous permet d'illustrer notre affirmation.

Tableau 10 : Capacité des producteurs à formuler une demande d'appui à l'ANCAR

Formulation d'une
demande d'appui

Effectifs

pourcentages

Oui

02

6,7

Non

28

93,3

Total

30

100

Source : Données de l'enquête, Diakho, 2010

Sur ce tableau, on observe que les producteurs dans leur totalité ne savent pas formuler des demandes d'appui. En effet, 28 sur un effectif de 30 producteurs, soit 93,3% manifestent leur incapacité à formuler une demande parce que n'ayant pas subi une formation qui puisse leur permettre de le faire. Ainsi, la relation entre l'ANCAR et les OP devient assez

problématique si l'on sait que ceux pour qui elles existent ne savent pas comment procéder pour bénéficier de son soutien.

En outre, en dehors de cette incapacité des producteurs, se trouve un autre grand problème concernant justement l'instrumentalisations des producteurs. En fait nos investigations ont montré une instrumentalisation de des producteurs à un double niveau. D'abord, l'Etat est le premier à vouloir voire à instrumentaliser les producteurs c'est-à-dire leur structure représentative qui est le CLCOP. On note que le CLCOP abandonné à lui seul a maille à assumer ses responsabilités. En effet, Le CLCOP a été institutionnalisé par le CNCR et l'Etat et par conséquent évolue sous leur bannière et n'a aucune marge de manoeuvre lui permettant d'orienter sa vision stratégique à partir de ses propres besoins et aspirations. Cette volonté d'institutionnalisation du CLCOP par l'Etat et le CNCR apparait donc alors un comme moyen permettant d'instrumentaliser les ruraux par l'élite paysanne et l'Etat. Selon M. NDIAYE, « (s'il vous plaît arreter l'enregistrement, je vous dis une chose parce que je suis dedans aussi), tout ceux-ci ne sont que des histoires Là ou se trouve le niveau d'instrumentalisation des OP par l'Etat et ou se situe le niveau d'instrumentalisation des producteurs par l'élite paysanne, c'est ça le vrai problème. L'Etat a instrumentalisé les ruraux et l'élite paysanne les a également a instrumentalisé, mais à l'inverse, les ruraux ont à leur tour instrumentalisé l'Etat. C'est plus compliqué que tu ne le crois et tu ne peux pas comprendre parce qu'il y a tellement de logiques derrière tout ce protocole. C'est pourquoi, certes moi je trouve que l'encadrement dans sa formulation n'est pas un système adéquat, mais au moins avec l'encadrement, on parvient à toucher les couches les plus vulnérables. Mais avec la méthode d'appui, on pense que tout est parfait alors qu'il ya meme des producteurs qui sont membres d'une OP partenaire avec l'ANCAR mais qui ne sont pas au courant de son existence. Si tu regardes bien, tu pourras toi même voir que les projets et programmes de l'ANCAR ne sont destinés qu'à une catégorie de producteurs, et c'est l'élite paysanne. Les autres n'y ont pas accès »

Ainsi, toutes les réalisations qui peuvent assurer une évaluation finale satisfaisante, contribuent à faire espérer un prolongement ou la signature d'un nouveau contrat pour l'équipe dirigeante du CNCR ou du CLCOP. C'est pourquoi Serge Latouche disait que « si le sousdéveloppement n'existait pas, il fallait l'inventer ». Le développement est devenu une entreprise qui fait vivre une certaine catégorie de personnes qui, sans la misère des campagnes, pourraient se retrouver dans la misère ; c'est une classe sociale qui naît des ruines

du sous-développement des populations réceptrices de projets de développement. Le sousdéveloppement des uns n'est-il pas le développement des autres ? Devant de telles logiques cherche-t-on à développer l'autre ou cherche-t-on à le maintenir dans une situation de dépendance existentielle en développant un domaine, en attendant d'autres financements pour en développer d'autres ? Là réside le paradoxe même du développement pris du côté des « développeurs ».

Dans l'approche de l'appui-conseil, nos enquetes ont également pu qu'en dehors de l'inégalité des producteurs devant l'accès aux services de l'Agence, il y a un autre problème qui cette fois-ci est lié au manque de personnels suffisants. En effet, dans la communauté de Gandon avec ses 560 km2 de superficie n'abrite qu'un seul conseiller agricole. Sur ce point également, nos interlocuteurs nous ont évoqué que c'est une erreur dont l'explication ne peut etre trouvée qu'en remontant à l'esprit du PSAOP. Selon un de nos enquêtés, « Il faut revisiter les stratégies Il fallait harmoniser le CAR non pas uniquement à l'ANCAR, mais plutôt à l'ensemble des structures qui font du conseil agricole. Le CLCOP est là pour représenter les OP et recenser toutes les demandes. Alors, une fois toutes les demandes mobilisées, on doit organiser une sorte de conférence d'h armonisation à laquelle doivent participer toutes les structures qui interviennent dans la zone. Et de ce fait, au moment de la programmation, chaque structure pourra voir concrètement la demande qui correspond à son champ d'action et décider de la prendre ou non. A mon avis, toutes les structures doivent adopter et partager la stratégie d'appui et harmoniser la démarche d'appui. Mais cet esprit est faussé c'est pourquoi l'ANCAR est maintenant très fortement remise en question C'est d'ailleurs ce qui a poussé l'Etat du Sénégal à se retirer de l'ANCAR parce qu'en ce moment, même si la SAED existe elle devrait avoir comme approche, celle du conseil agricole. Bref, on devrait harmoniser les approches, les méthodes de planification, les lieux de planification».

Ce manque d'harmonie entre les diverses structures intervenant dans le monde rural peut même parfois être source de conflits entre elles. C'est ce qu'on comprend à travers cette idée du directeur de l'ANCAR quand il dit que c'est l'Etat qui n'a pas tranché sinon depuis que l'ANCAR est créée, aucune autre structure ne devrait plus faire de conseil agricole et rural ou même s'il y a une structure qui veut en faire, cela devrait etre sous la bannière de l'ANCAR parce qu'étant le dépositaire institutionnel du conseil agricole et rural.

Même entre l'ANCAR et ses autres partenaires, il y a certainement des conflits, mais qui sont latents. Il n'y a pas d'adhésion de la part des autres structures aux programmes du CLCOP qui est pourtant la structure autour de laquelle tous les organismes de développement doivent élaborer leurs activités sans quoi, leur intervention n'aurait pas d'impacts. Ceci est nécessaire d'autant qu'aucune structure, dans une communauté rurale, ne peut répondre à la demande multisectorielle des ruraux. Si toutes les structures avaient partagé mais aussi harmonisé la démarche d'appui, c'est-à-dire en travaillant sur la base de la demande les conflits auraient été beaucoup moins compliqués parce que chacun va répondre à une demande selon sa spécificité, selon sa mission. Par exemple, la SAED va faire l'aménagement et l'ANCAR répond pour faire du conseil agricole et les ONG et autres partenaires répondre en y apportant leurs financements. L'ANCAR et ses partenaires doivent se mettre d'accord pour travailler ensemble avec le CLCOP qui doit à son tour être capacité pour mobiliser les groupes vulnérables afin de formuler une demande consensuelle pour toutes les OP mais pas seulement pour une élite.

Chapitre X : La portée de l'intervention de l'ANCAR au niveau du Foyer

Dans sa nouvelle démarche, l'ANCAR a mis en oeuvre un programme de Conseil Agricole et Rural (CAR) qui intervient dans le cadre d'approches variées dont le soubassement demeure la promotion d'une agriculture durable et diversifiée pour la sécurité alimentaire, la lutte contre la pauvreté et l'amélioration des conditions de vie des populations. Le nouveau conseil agricole et rural est, selon M. DIOP conseiller agricole est « global, participatif, communicatif et pluridisciplinaire et couvre les besoins d'appui, renseigne les producteurs sur toutes les activités relatives aux productions, et intervient pour une meilleure gestion des ressources naturelles ». Selon le Directeur régional « l'approche de conseil agricole et rural cherche à intégrer dans sa démarche le savoir et savoir-faire des producteurs comme élément indispensable de la participation pleine et entière des populations ».

En outre, selon le Directeur, certaines activités (comme l'élaboration des programmes CAR, la contractualisation avec les OP, l'appui technique etc.) sont communes à toutes les agences régionales du pays parce qu'étant définies depuis le sommet, c'est-à-dire au niveau de la direction nationale, mais à l'inverse chaque équipe régionale peut à son tour, en collaboration avec les producteurs de sa localité, définir son programme d'activités et ce programme peut changer d'une année à une autre. Ce qui revient à dire que les activités des

agences régionales varient non seulement en fonction des régions, mais également du temps. C'est sous ce rapport que l'agence de Saint-Louis s'est définie le programme suivant :

- l'élaboration des programmes CAR

- la contractualisation avec les OP

- l'exécution des programmes

- le suivi et l'évaluation des programmes

- l'élaboration, la mise en oeuvre et l'évaluation de programmes en Recherche/Développement

- l'élaboration de protocoles de partenariat avec les partenaires

- la redynamisation de cadres de concertation sur la Recherche/Développement

- la participation aux formations sur les approches participatives et sur la culture d'entreprise

- l'assurance des formations spécifiques pour les agents

- l'organisation des voyages d'études

- l'information sur la démarche, les programmes et les résultats.

Seulement, ce qui semble paradoxale dans la logique d'intervention de l'ANCAR, c'est le fait que si elle n'intervient qu'après être solliciter, comment va-t-elle intervenir auprès des producteurs du Foyer de Sanar qui ne savent pas formuler de demandes d'appui mais qui sont pourtant membres du CLCOP de Gandon ? En effet, le tableau suivant nous renseigne sur le nombre et les domaines dans lesquels l'ANCAR est intervenue pour appuyer les producteurs du Foyer de Sanar.

Tableau 11 : Intervention de l'ANCAR auprès du Foyer de Sanar

Fréquences Types

D'appui

Non
réponse

Une fois

Deux fois

Trois fois ou
plus

Total

Non réponse

3

0

0

0

3

Appui technique

0

20

4

0

24

Financement

0

0

0

0

0

Formation

0

4

4

0

8

Information

0

0

 

0

0

total

3

24

8

0

35

Source : Données de l'enquête, Diakho, 2010.

Figure 3 : Fréquences de l'intervention et type d'appui de l'ANCAR auprès du Foyer de Sanar

Fréquences et types d'appui de l'ANCAR auprès du Foyer de

3

4

4

Non
réponse

Appui technique
sur le terrain

Formation Autres

20

0 0

0 0
0

0

20

 

Non réponse

Une fois

Deux fois

Trois fois, Plus de trois fois

Source : Données de l'enquête, Diakho, 2010.

Les données du tableau reflètent clairement une rareté sans précédent de la présence de l'ANCAR au niveau de cette structure. Depuis plus de sept (7) années de partenariat (2003), l'ANCAR n'a rendu visite à ceux qu'elle considère comme étant ses véritables partenaires, que deux (2) fois mais la majorité n'ont bénéficié de son appui qu'une seule fois. D'après les observations, sur les 30 producteurs, 24 ont confirmé n'avoir profité des services de l'ANCAR qu'une seule fois et cela a consisté en une séance de renforcement des capacités par la démonstration sur le terrain. Seul 8 membres ont témoigné que l'ANCAR était venu à leur secours à deux reprises. La première fois remonte à 2004 et la seconde en 2007. Selon la viceprésidente «si nous avons réussi à contracter un programme avec l'ANCAR pour la première fois, c'est grace à un ami de notre président, il n'est plus là d'ailleurs, il passe la majeure partie de son temps à l'étranger. Lorsqu'il a écrit la demande, l'ANCAR l'a accepté et ils sont venus nous voir. Nous avons subi une formation de quinze(15) jours sur les techniques de production et de conservation d'oignon. Mais le problème, c'est qu'ils (les agents de l'ANCAR) ont passé toute la période de la formation sur trois parcelles seulement. Tous les autres membres viennent suivre la formation au niveau de ces parcelles et ceux ci a créé une sorte de mécontentement de la part de certains membres. Cette formation nous a tout de même permis de distinguer les différentes semences d'oignon et de pouvoir produire des

oignons de qualité. Avant même cet atelier, nous avions suivi, dans le cadre du CLCOP, une

autre formation sur la technique du « goûte à goûte » qui a été animée par un exploitant

agricole venant du village de Gandon et on a quand même un peu compris. Peut etre qu'un jour, moi aussi je serai capable d'animer un atelier de formation ». Cependant, une évaluation correcte de besoins en formation reste un préalable et une bonne préparation pédagogique des formateurs. C'est pourquoi, à la différence de vice-présidente, N. SOW quant à elle soutient : « j'ai portant assisté pourtant aux séances de formation qu'avait organisé l'ANCAR pour notre organisation, mais le problème est que c'était trop difficile pour moi de comprendre ce qu'ils faisaient. C'était très rapide et les gens n'ont pas le même niveau de compréhension. Meme si je le comprenais, c'était pour deux à trois jours et j'oubliais tout par la suite. Au moment de la formation, je voyais certains amener leurs enfants qui sont à l'école et leurs cahiers pour qu'ils leur écrivent les différentes étapes mais moi, je ne sais ni écrire ni lire et je n'ai pas d'enfant qui a eu ce niveau là. Et je sais que je ne suis pas la seule dans cette situation, mais quand même il y en a qui comprennent et c'est ceux- là qui nous aident parfois. En fait, ceci est certainement du d'une part, à l'usage de la langue française au cours de la formation, et d'autre part, à la vieillesse car plus on vieillit,

plus la mémoire devient vulnérable et par conséquent, on ne peut pas retenir beaucoup de choses et en plus on oublie très vite ».

Donc, à travers ces affirmations, on constate qu'en ce qui concerne la formation, les producteurs n'ont pas le même niveau de compréhension par rapport au message véhiculé par les agents de l'agence. Certes, pour ce qui est de l'incompréhension du message transmis au cours des séances de formation, les producteurs se culpabilisent d'être non instruits, mais nos observations nous ont montré l'absence de formation pédagogique de bon nombre de techniciens qui s'improvisent en formateurs avec pour tout bagage pédagogique, leur expérience d'anciens élèves ou étudiants. En effet, lors d'un atelier de formation sur les techniques du maraîchage, cette fois non pas avec le Foyer de Sanar, mais avec un Groupement de Promotion Féminine de Gandon où nous avons assisté, la remarque était que parfois, les agents qui donnent la formation se comportent comme les seuls porteurs de savoir et de savoir-faire en minimisant en faisant abstraction des savoirs et les savoir-faire des producteurs. Cette attitude des agents de l'ANCAR place, de ce point de vue, la structure dans la même dynamique que les organismes étatiques de développement qui l'ont précédé, c'est-àdire dans la logique d'encadrement puisque la relation entre les formateurs et les producteurs au moment de la formation est de nature horizontale. C'est précisément en faisant référence à cette forme d'intervention qu'E.S. Dione déclare ceci : « les choses ne sont plus vraie ou fausses parce qu'on les a expérimentées soi-même ou parce que ses proches les ont vécues ou acceptées comme telles, mais parce qu'elles coïncident avec une explication légitimée par des instances lointaines : la Science, la Religion, la Raison~Lorsque les acteurs sont dépossédés de leur capacité d'expliquer le pourquoi des choses, ils deviennent culturellement dominés et près à accepter leur exclusion ».

En effet, pour les acteurs de l'ANCAR, le développement doit être impulsé localement à travers un stimulus qui consiste à réveiller les énergies innovantes des populations réceptrices. Ce mode de développement rompt avec un développement qui se construirait en dehors des logiques identitaires des populations et imposé à elles comme le produit d'une volonté extérieure noble d'améliorer leurs conditions de vie. Ce mode de développement incite à la pleine participation des populations à l'action d'innovation à travers le CAR.

Il s'agit, si l'on peut ainsi dire, d'une stratégie du Faire-Faire consistant à aider les populations à réaliser des actions de développement agricole qu'ils auraient pu faire si l'organisation et la formation étaient assurées. Pour le conseiller agricole et rural de Gandon,

la stratégie du Faire-Faire ressemble à un bébé qu'on apprend à marcher, une fois qu'il peut tenir sur ses deux pieds, on lui apprend plus comment avancer. Il peut tomber de temps en temps mais il marchera tout seul. Cependant, une telle stratégie peut être doublement condamnée :

- Faire-Faire quelque chose à quelqu'un, c'est lui imposer une vision qu'il ne maîtrise pas, ce qui rend sa participation inopérante et accessoire, c'est sous-estimer au demeurant la qualité du stock de connaissances et d'actions qui font de lui un acteur social innovateur.

- Faire-Faire quelque chose à quelqu'un c'est également considérer l'acteur comme bénéficiaire d'une initiative, ce qui tue le caractère endogène ou local du développement.

D'ailleurs, ceci est d'autant plus vrai que d'après ENDA « le concept de "bénéficiaires" renvoie à l'image de gens passifs qui attendent d'être "sauvés ". On les perçoit implicitement dépourvus d'analyse propre, dépourvus de stratégies et d'initiatives. Un concept ambigu qui positionne les intervenants comme les nouveaux "héros" et qui, à la limite, contribue à exproprier les "bénéficiaires" de leur propre histoire. Le concept de « bénéficiaires » justifie et légitime les solutions exogènes souvent ignorantes des savoir-faire et des compétences sans compter que ces solutions venues « d'ailleurs » disqualifient les ressources locales ».18

Même si avec le programme CAR, on peut assister à une participation des producteurs dans le diagnostic des contraintes et la trouvaille de solutions adéquates, la construction même des cadres logiques de l'intervention leur échappe. Car il est rare de voir que ce qui initialement prévu par le CAR soit modifié du simple fait de la participation des acteurs récepteurs. C'est avec une telle façon de développer que les experts du développement agricole doivent rompre.

Cependant cela ne veut pas dire que l'ANCAR renferme tout simplement les mémes défauts que les anciennes structures de développement. L'approche de l'ANCAR repose en fait sur la reconnaissance des producteurs comme les principaux acteurs de la transformation de leurs systèmes de production, de l'aménagement de leurs terroirs et de la gestion de leurs ressources naturelles. C'est d'ailleurs pour cette raison que l'ANCAR pour certains producteurs l'ANCAR leur est utile, seulement, il est essentiel qu'il règle la question de la formulation des demandes d'appui. Les formations reçues sur les techniques d'agriculture et

autres constituent pour certains producteurs un acquis de taille qu'ils ne peuvent pas négliger. Pour eux, l'accès à une formation sur les manières de valoriser ses propres ressources disponibles en actions rentables constitue un levier de taille pour le développement c'est S. DIAW qui nous dit en ce sens: « nous avons reçu deux formations gratuitement sur le domaine de l'agriculture et du maraîchage. Ces connaissances sont maintenant nôtres et nous devons en faire bénéficier d'autres qui n'ont pas eu la chance d'en bénéficier ou qui n'ont pas bien compris». Et A. SALL d'ajouter : « personnellement si je suis parvenues à obtenir à l'issu de chaque saison culturale 13 à 15 sacs d'oignons au moins, c'est en parti grâce à la formation dont nous avons bénéficié. C'est avec l'argent issu de la vente de cet oignon que je règle mes besoins quotidiens et ceux de mes enfants. Maintenant, je sais que ce n'est pas suffisant parce qu'ils viennent rarement Ou bien, qu'ils nous forment une bonne fois pour toute à la manière de formuler une demande, nos enfants sont là et ils ont appris, donc ils peuvent les former pour qu'on puisse nous-mêmes écrire nos demandes en cas de besoin. ».

Mais en ce qui concerne la question du financement, le Directeur nous a confié que « le rôle de l'ANCAR n'est pas de financer les OP ni de leur fournir du matériel agricole. Sa mission principale est plutôt de négocier avec les bailleurs de fonds pour leur trouver des financement mais aussi de les pousser à mieux s'organiser afin de pouvoir mieux les appuyer ensemble en leur assurant une formation et une assistance technique sur le terrain ».

Il importe de noter que l'ANCAR est une structure de conseil agricole et rurale et par conséquent elle ne finance pas. Cependant, dans la démarche de l'ANCAR, il ya ce qu'on appelle l'intermédiation. Selon un agent de l'agence, « l'ANCAR est censé répondre à la demande paysanne, soit en lui apportant son soutien technique, soit en mettant en relation les producteurs avec l'environnement institutionnel, c'est-à-dire les organismes de financement qui interviennent dans ce domaine. Donc, l'ANCAR ne finance pas, mais si au cours de l'élaboration du programme, on voit qu'il y'a une activité qui demande un financement, alors l'agence peut faire de l'intermédiation auprès des structures financières, ou au pire des cas, informer le producteur de l'existence de cette structure et de sa possibilité ou sa disponibilité à octroyer de financements. Dans ce dernier cas, l'appui de l'agence auprès du producteur se situe au niveau de l'élaboration de son projet pour qu'il puisse le soumettre cette structure de financement Mais l'ANCAR en tant que telle n'a jamais financé de projets ».

Cela revient donc à dire que l'activité principale de l'ANCAR pour les OP concerne l'appui technique, la formation et l'information des producteurs. Ceci nous a été affirmé par

les agents de l'agence puis confirmé par les producteurs eux-mêmes. Quant au rôle d'intermédiation qu'elle joue entre les OP et les bailleurs de fonds, il varie en fonction des OP. Pour ce qui du Foyer de Sanar, cette OP n'a pas encore obtenu de financement depuis qu'elle est en partenariat avec l'ANCAR. Comme le note le Président de cette organisation, « en réalité, bien que nous louons l'ANCAR, le besoin qui nous a poussé à aller à sa rencontre n'est pas encore satisfait. Nous avons bénéficié des formations et d'une assistance technique, mais nous n'avons pas encore obtenu de financement Pourtant concernant la dernière demande que j'ai formulée au nom du Foyer, j'ai bien insisté sur cette question du financement parce que toutes les deux motopompes sont dans un état défectueux. Elles ne peuvent même pas fonctionner toute une journée entière sans tomber en panne. C'est d'ailleurs pourquoi, j'ai cherché une petite motopompe personnelle comme une sorte de garante ».

La véritable question qui se pose à ce niveau, est surtout de savoir comment une structure de développement peut-elle arriver à « développer » ces cibles si elle n'octroie ni de financements, ni de matériels agricoles?

Tableau 12 : Appréciation de la portée de l'intervention de l'ANCAR par les producteurs

Appréciations

Effectifs

Pourcentages

Très satisfait (e)

0

 

Satisfait (e)

5

16,7

Insatisfait (e)

14

46,7

Déçu (e)

11

36,7

Total

30

100

Source : Données de l'enquête, Diakho, 2010.

Figure 4 : La perception de la portée de l'intervention de l'ANCAR par les producteurs

Source : Données de l'enquête, Diakho, 2010

En réalité l'approche ou l'appui de l'ANCAR ne fait pas bonne impression au niveau des producteurs du Foyer de Sanar. Le véritable problème à ce niveau est dû au fait que la porte d'entrée de l'ANCAR, c'est l'organisation, c'est-à-dire un sujet collectif mais sur le terrain l'activité se déroule sur une exploitation agricole individuelle. C'est d'ailleurs pour

63

cette raison que les membres du foyer de Sanar ont regretté le fait que la formation se soit déroulée au niveau de trois exploitations seulement alors qu'il y a plus d'une centaine 167%

d'autres parcelles qui n'ont pas été visitées. Ce qui a semblé créer une certaine frustration de

Très satisfait(e)

)

certains membres pouvant aller jusqu'à porter atteinte à la cohésion qui sévit dans le groupe.

ii

Par rapport à la satisfaction de leurs besoins et à la portée ou à l'incidence des activités de

Déçu(e)

l'ANCAR, les producteurs se sont prononcés sur leur insatisfaction. En effet, 46,7 % des personnes interrogés ne font pas abstraction de leur insatisfaction et d'autres vont encore plus loin en signalant leur déception voire leur désarroi. L'un de nos enquêtés se confie en disant « si notre partenariat avec l'ANCAR devrait ainsi continuer, moi je préfère qu'on y mette un 1=1e =1aE1711ie pewc affirmer qu'il n'y a aucune différence entrema production agricole avant le partenariat et sept année après le partenariat ». A. Sall « pour ne pas être ingrate, je ne peux pas dire que je n'ai rein obtenu avec l'ANCAR, j'acquis quand même des compétences au cours de la formation. Mais en réalité, en termes de production agricole, je ne sais pas mais je n'ai jamais dépassé la quantité de légumes que je récolais avant l'arrivée de l'ANCAR. En tout cas, on ne peut pas dire que c'est l'ANCAR qui

nous à permis de collecter les quelques sous que nous possédons parce qu'avant elle, c'est de cela qu'on vivait ».

Le Foyer de Sanar n'a pas encore bénéficié pleinement des services de l'ANCAR puisque cette dernière ne leur à rendu visite que deux fois depuis sept année de partenariat. La formation et l'appui technique semblent donc être les forces de cette structure puisqu'au moins depuis le partenariat, deux séances de formation ont été organisées pour les producteurs. Cependant, un des plus gros problèmes ressentis par les producteurs est l'absence de suivi mais aussi d'évaluation de certaines formations qui s'arrête qui sont difficilement assimilées en raison de la faiblesse du niveau d'instruction. Pourtant dans la communauté rurale de Gandon, l'ANCAR semble avoir réalisé beaucoup d'activités et méme obtenu des financements pour des OP qui sont dans la le chef lieu de la communauté rurale, à savoir Gandon avec d'autres OP.

Figure 4 : les réalisations du programme CAR dans la région de Saint-Louis

Source : Manuel des procédures techniques de l'ANCAR

ONCLUSION

Une recherche en sciences sociales, aussi nécessaire et ambitieuse soit elle, peut se résumer à trois composantes importantes : l'objet, la méthode et l'appareil conceptuel.

Dans cette présente étude, l'objet était d'analyser les actions menées par l'ANCAR au niveau des organisations de producteurs afin de déterminer la nature de la logique de son intervention et sa portée. Autrement dit, il s'agissait de voir si l'ANCAR est une structure qui s'est inscrite dans la méme perspective d'encadrement que celles qui l'ont précédé ou bien si elle a réellement opéré une rupture dans le processus d'intervention en optant pour la logique d'appui. Comme contribution, cette étude s'est limitée au cas spécifique d'une seule organisation de producteurs, le Foyer de Sanar avec comme hypothèse « L'approche de l'appui-conseil définie par l'ANCAR montrent qu'elle a rompu avec la « logique d'encadrement » héritée de l'Etat post colonial en matière de promotion des organisations de producteurs. Cependant, l'exécution des programmes par cette approche n'est pas effective auprès des organisations des producteurs».

En effet, pour honorer cette recherche, nous avons suivi une démarche qui se révèle être notre spécialité, c'est à dire la démarche sociologique. Il nous fallait d'abord faire l'inventaire des théories et des approches produites sur notre objet. Cet inventaire était axé d'une part, sur les différentes analyses théoriques de l'action des organisations et les théories traitant des rapports entre l'Etat et les paysans et d'autre part, sur l'approche par la gestion de l'interaction inspirée de la théorie de la Recherche-Action-Formation (RAF). Nous nous sommes également basés sur les réalités expérientielles à travers les entretiens menées non seulement au niveau des agents de l'agence d'intervention, c'est-à-dire de l'ANCAR, mais aussi chez les producteurs de notre OP d'étude. Cependant, notre démarche a consisté à situer d'abord l'émergence des politiques agricoles au Sénégal avant de centrer toute l'étude sur l'ANCAR et le Foyer de Sanar. Ensuite, étant donné que les informations recueillies dans cette phase exploratoire devaient être ponctuelles, nous avons inscrit notre étude dans une visée à la fois quantitative et qualitative avec comme outils de collecte le questionnaire et le guide d'entretien. Ces outils qui, à notre avis, se sont imposés à notre étude comme moyen de collecte d'informations nécessaires ont permis d'une part, d'apprécier le contexte de démarrage et le fonctionnement aussi bien de l'ANCAR que du Foyer de Sanar et d'autre part, de déterminer plus ou moins la nature de l'intervention et la portée de la première au niveau de la seconde.

Ainsi au terme de cette étude, nous avons pu constater que dans le village de Sanar, le regroupement des producteurs au sein d'une seule structure dans le but d'améliorer leurs conditions de travail n'a pas été sans difficultés majeures pour les producteurs. En dépit de l'expérience agricole des uns et des autres, ces derniers se sont vite confrontés à un bloc structuré de contraintes qui sont aussi nombreuses que diverses : risque naturels (instabilité climatique, insectes destructeurs etc.), manque d'expérience organisationnelle, étroitesse et approvisionnement des terres exploitées, cherté des coûts de production, analphabétisme des responsables paysans etc. Et face à cette situation, l'ANCAR a été ciblé par ces producteurs afin de jouer un rôle dans le sens de la levée de certaines de ces contraintes. Sont apport s'est surtout accentué non seulement sur la formation et l'appui conseil ou technique. C'est d'ailleurs à ce niveau que nous pouvons jauger l'impact de l'appui de l'ANCAR au niveau des OP. Ainsi, nous pouvons considérer que notre hypothèse de départ n'a pas totalement été confirmée par les données de l'enquête. En effet l'ANCAR n'intervient au niveau des OP qu'à la demande de ces dernières, c'et à dire lorsque cette dernière est sollicitée par les producteurs bien qu'il arrive parfois, ce qui est très rare, que ses agents suscitent une demande d'intervention. Et méme dans ce cas précis, il faut le consentement du producteur pour que les agents puissent intervenir. En d'autres termes, une nouvelle offre constitue une opportunité qui peut ainsi faire germer une demande de la part des producteurs si le terrain est favorable (demande suscitée). Dans ces cas, une contrainte de taille majeure se présente aux cibles de l'Agence. Il s'agit d'un manque de compétences nécessaires de la part des producteurs pour formuler des demandes. Si l'on peut ainsi dire, tout producteur qui ne sait pas formuler une demande d'appui ne pourra pas bénéficier des services de l'ANCAR puisqu'elle n'intervient qu'après avoir été interpellée.

Les entretiens et observations nous ont montré que d'une manière générale, l'ANCAR est censée effectuer divers appuis (intermédiation, formation, information, facilitation) au niveau des OP. Ces appuis peuvent être un coup de main pour remplir un dossier administratif, amorcer une négociation ou encore maîtriser les techniques d'exploitation. Mais dans le cas de l'OP qui nous concerne, seuls deux types d'appuis ont été opérés par l'agence alors que leur relation partenariale date maintenant de sept (7) ans. Ceci est du à l'incapacité des membres de cette structures à rédiger des demandes destinées à l'ANCAR. Mais cette attitude devient en méme temps un défaut ou un limite pour l'approche de l'ANCAR.

Il importe de signaler qu'au cours des séances de formation et d'information les relations qui existent entre les agents formateurs et les producteurs à former sont du type « maître- élève » et/ou « enseignant-enseigné ». Aussi, certaines formations dont bénéficient les producteurs sont confrontées à un problème de suivi au moment de l'expérimentation dans les parcelles d'exploitation. C'est ce qui confirme en partie notre hypothèse puisque cette attitude est spécifique à la logique d'encadrement qui consiste à sous estimer voire même ignorer les savoirs et savoir-faire des populations locales. Par ailleurs la grosse difficulté à laquelle les producteurs du Foyer de Sanar sont confrontés n'a pas encore été résolue. Il s'agit de la question financière qui, selon les producteurs est la raison principale de leur partenariat avec l'ANCAR. Etant donné que l'agence joue également un rôle d'intermédiaire entre les OP et les bailleurs de fons pour la recherche de financements, on imagine mal pourquoi le Foyer de Sanar avec qui elle est partenaire depuis sept ans n'a pas encore obtenu de financements.

Même si notre hypothèse s'est vue en partie confirmer par les résultats de terrain, il faut souligner que notre recherche révèle également certaines limites. D'abord, il y a une difficulté d'ordre méthodologique qui se rapporte à nos outils de collecte. En effet, le guide d'entretien et le questionnaire dont nous avons fait usage pour disposer des informations se sont révélés quelque peu insuffisant concernant certaines questions. Ensuite des précautions sont à prendre quant à une tentative de généralisation hâtive des résultats de cette simple étude portant sur un cas spécifique, c'est-à-dire à une OP d'un petit village. En effet, la confirmation de notre hypothèse concernant les diverses difficultés rencontrées par cette OP et la nature de l'intervention de l'ANCAR comme relevant d'une logique d'appui n'est qu'un cas isolé qu'il est d'autant plus judicieux de le prendre comme tel, que cette thèse n'est guère à l'abris des probables assouplissements ou même d'infirmation, quand elle sera soumise à l'épreuve du temps ou à un élargissement du terrain d'étude.

Aujourd'hui, au niveau de la communauté rurale de Gandon, il est faut reconnaître qu'on assiste encore à un certain blocage du processus de responsabilisation des producteurs du fait du retrait ou du recul des bailleurs de fonds. Car comme le note Sambou Ndiaye :

« Pris au piège de leur propre logique, les bailleurs de fonds ont réussi à « disqualifier »a l'État dans le domaine agricole sans pouvoir le remplacer par des acteurs locaux suffisamment préparés. Ainsi, seule une redéfinition du cadre institutionnel peut à mrme de sauver ce processus qui, lorsqu'il est négocié, peut aboutir à des résultats probants. Dans ce nouveau cadre, tous les acteurs doivent avoir leur place, y compris l'État et ses services. Des relations non point tutélaires, mais plutôt de partenariat véritable doivent y être

envisagées entre acteurs pour faciliter la pleine participation des intéressés », (S. Ndiaye, 1995-1996 :128).

En même temps, ce nouveau cadre doit statuer sur la mission dévolue à chaque acteur. Notamment, une reconfiguration et un redimensionnement des tâches des OP et des structures d'intervention devront être envisagés en fonction de leur compétence et de leur niveau d'organisation interne.

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SIDI MOHAMED SECK, 2001 « Et si les approches participatives étaient inadaptées à la gestion décentralisée de territoire ? », In Géocarrefour vol 76 3/2001, pp. 233-239

SENE D, 2003-2004, La filière hydro-agricole à l'épreuve de l'auto-gestion : rôle des intervenants extérieurs dans l'appui aux organisations paysannes du village de Pont-Gendarme

TCHUIGOUA B.F, 1989, (sous la direction), L'agriculture africaine en crise, Paris,

ANNEXES

Guide d'entretien adressé aux producteurs du Foyer de Sanar Identification sociologique

Nom de l'enquêté : Date de l'enquête :

Fonction : Marié (é)

Masculin Divorcé(e)

Sexe : Age : Situation matrimoniale : Célibataire

Féminin Veuf (ve)

Thème 1 : Historique du Foyer de Sanar

1. Le processus d'émergence : motivations de départ, projet initial, finalités

2. Conditions de démarrage, les appuis et contraintes

3. Evolution des activités, état actuel du processus de maturation

Thème 2 : Profil organisationnel de l'organisation

4. Processus décisionnel, la nature de l'autorité (bureaucratique, hiérarchique, démocratique)

5. Mode d'organisation et de fonctionnement

6. Mode d'organisation du travail

7. Plan et stratégie d'actions

8. Modalités de contrôle social de l'organisation

Thème 3 : Le membership du Foyer de Sanar

9. Liens interpersonnels, lien commun des membres

10. Relations entre leaders et membres de l'organisation

11. Rapports de pouvoir à l'interne

12. Rapport des acteurs à l'organisation

Thème 4 : Rapport de l'organisation au développement local

13. Réseautage avec les acteurs sociaux et la société civile, domaines et portée

14. Participation de l'organisation au processus de développement local

15. Vision stratégique de l'organisation, projet de société

Thème 5 : Dynamique partenariale de l'organisation avec l'ANCAR

16. Nature et intensité des rapports avec l'ANCAR

17. Types d'activités effectués par l'ANCAR pour votre OP

18. Identification de l'idée de projet, définition du processus et de la dynamique de l'action

19. Nature de l'initiative, du diagnostic, de la conduite, de l'exécution, de l'évaluation et des ajustements du projet

20. Présence des membres de l'OP dans les prises de décisions, rapport à l'espace public local

21. Nature et intensité des relations entre l'organisation et les autres partenaires

Guide d'entretien adressé aux agents de l'ANCAR Identification sociologique

Nom de l'enquêté : Date de l'enquête :

Fonction : Marié (é)

Masculin divorcé(e)

Sexe : Age : Situation matrimoniale : Célibataire

Féminin Veuf (ve)

Thème 1 : Contexte de création de l'ANCAR

1. Date de création de l'ANCAR

2. Rôle et projet initial de l'ANCAR

3. Objectifs et missions de l'ANCAR

Thème 2 : Structuration et fonctionnement de l'ANCAR

4. Organisation structurelle de l'ANCAR

5. Activités et domaines d'intervention de l'ANCAR

6. Approche optée par l'ANCAR

7. Démarche d'exécution des actions de l'ANCAR

8. Place réservée aux modes d'organisation, au savoir et savoir-faire locaux, les techniques traditionnelles

9. Implication dans le processus de développement local Thème 3 : Ancrage socio-territorial de l'ANCAR

10. Impact socio-territorial : rapports des prestations de l'ANCAR aux ressources locales, impact des activités sur la communauté locale, degré de mobilisation sociale, place de l'ANCAR dans la vie publique locale

11. Modalités de démocratisation de l'accès aux biens et services de l'ANCAR

12. Impact du milieu sur les activités de l'ANCAR Thème 4 : Rapport et dynamique partenariale de l'ANCAR avec les OP

13. Modalité d'empowerment des groupes et communautés locaux

14. Réseautage avec acteurs sociaux et société civile, domaines et portée

15. Relation entre l'ANCAR et les collectivités locales- participation au processus de développement local

16. Nature et qualité du réseau partenarial de l'ANCAR

17. Vision stratégique de la structure, projet de société

127

Image 1- Conseil Agricole et Rural en phase active Image 2 -Parcelles de multiplication de

semence d'arachide

Image 3- Campagne de maïs et d'oignon ans le village de Sanar

Image 4 -Ateliers d'information entre les agents de l'ANCAR et les producteurs

Image 5 - Un conseiller agricole de Gandon examinant les gousses d'arachide avant la récolte

Image 6 - Un producteur du Foyer cultivant sa parcelle d'arachide.

Image 7- Visite de membres d'une Association avec le Conseiller agricole et rural à Gandon dans une plantation de choux et de tomates

Image 8- Visite des membres d'une association avec le conseiller agricole et rurale dans un champ de riz à Gandon

TABLES DES MATIERES

LISTE DES TABLEAUX ET DES FIGURES III

LISTE DES FIGURES III

LISTE DES TABLEAUX III

LISTE DES SCHEMAS III

SIGLES ET ABREVIATIONS IV

INTRODUCTION.......................................................................................6 PREMIERE PARTIE : Contextualisation sociohistorique et cadre théorique...........9

Chapitre I : Historique de la politique de développement agricole du Sénégal..10

1. 1- La période de 1960-1962 : Mamadou DIA et la politique d'animation rurale....... 12

1. 2 - La Période 1963-1979 : L'interventionnisme de l'État dans le domaine agricole... ..15

1. 3- La période de 1980 à la fin des années 90 : Désengagement de l'État avec les politiques d'ajustement structurel et début de la responsabilisation des producteurs............. ...... .17

1.3.1 À La dissolution de l'ONCAD...................................................... ...18
1.3.2 - La création de la NPA............................................................ ....19

1.3.3. La dynamique des organisations de producteurs au Sénégal................ ......21

1.4 - Fin 90, début des années 2000 : Les politiques de lutte contre la pauvreté.................23 1.4.1- La Stratégie de Réduction de la Pauvreté............................................23 1.4.2- La stratégie de croissance accélérée (SAC)...........................................25

1.4.3- La Lettre de Politique de Développement Rural Décentralisé (LPDR) 26

1.5- Présentation du cadre d'étude............................................................. 28

1.5.1- Présentation de la CR de Gandon......................................................28
1.5.2- Présentation du village de Sanar........................................................32

Chapitre II : Cadre Théorique............................................................. 33

2. 1- Les différentes analyses théoriques de l'action des organisations ................ ......33

2. 1.1- L'approche parsonienne des organisations .................... .....................33

2. 1.2- L'approche de March et Simon ............................................ ....... 34

2.1.3- L'approche de Crozier et de Friedberg ....................................... ......34

2.2- Approches d'analyse ........................................................................ .... 35 2.2.1- Approche stratégique................................... ................................35 2.2.2- L'approche dynamique ..................................................................35

2.3- Objectifs et rôles des organisations paysannes 35

2.4 Organisations paysannes et diffusion de l'innovation 38

2.5- Stratégie paysanne et rôle dans l'agriculture ~~~~~~~~~~..~~~~~~.38
2.6 - Classification et typologie des organisations..................................................39

2.6.1- Classification des organisations selon leur origine.................................39

2.6.1.1-Organisation d'origine interne...............................................39

2.6.1.2- Organisation d'origine externe.............................................40

2.6.2- Classification des organisations selon leurs fonctions..............................40 2.6.2.1- Organisations unifonctionnelles............................................40 2.6.2.2- Organisations plurifonctionnelles..........................................41

2.6.2.3- Organisations à fonction dominante.......................................41

2.7- Classification des organisations selon la nature des membres................................41
2.8- Classification des organisations selon leur composition.......................................42
2.9 - Courants théoriques sur les rapports entre l'État et les paysans..............................42
2.9.1- L'organisation bureaucratique du secteur agricole par l'État......................... 42
2. 9.1.1- Le contrôle de la paysannerie par l'État................................................42
2. 9.1.2- La subordination de la société à l'État..................................................45

2. 10 - Approche par la gestion de l'interaction......................................................47

2.10.1- L'identification des espaces naturels de participation par les intervenants.....48 2.10.2- L'élargissement du champ de vision de tous les acteurs.........................49 2. 10.3- La prise de ses distances vis-à-vis de l'action.....................................49 2.10.4- La connaissance des lunettes que portent les paysans.............................50

DEUXIEME PARTIE : Problématique et cadre méthodologique....................53

Chapitre III : Problématique.......................................................................53

3.1- Problème de recherche..............................................................................53

3.2- Question de recherche..............................................................................54
3.3- Objectifs de recherche..............................................................................54
3.4- Conceptualisation...................................................................................55
3.4.1- définition des concepts..................................................................55
3.4.2- Opérationnalisation des concepts......................................................55
3.5.- Hypothèse et modèle d'analyse...................................................................63
3.51- Hypothèse..................................................................................63
3.5.2- Modèle d'analyse.........................................................................63

Chapitre IV : Cadre méthodologique....... ................................. ................64

4.1- Histoire de la collecte..............................................................................64

4.1.1- La recherche documentaire~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~.64

4.1.2- Les entretiens exploratoires 65

4.1.3- Les entretiens informels~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~ 66

4.2- La construction de l'échantillon 66

4.3- Les outils de collecte~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~ 68

4.3.1- Le questionnaire~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~ 69

4.3.2- Les guides d'entretien~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~.69 4.3.3- L'observation désengagée~~~~. ~~~~~~~~~~~~~~~~70
4.4- Le déroulement de l'enquête~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~..71

4.5- Difficultés rencontrées~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~ 72

TROISIEME PARTIE : Présentation des résultats de la pré-enquête~~~. ~73

Chapitre V : Historique du Foyer de Sanar~~~~~~~~~~. ~~~~~ 74

5.1- Contexte de création et objectifs 74

5.2- Le fonctionnement interne du Foyer de Sanar~~~~~~~~~~~~~~~~ 74

5.3 - Identification sociologique des membres du Foyer des Sanar~~. ~~~~~~~ .76

Chapitre VI -- Les activités socioéconomiques du Foyer de Sanar~~~~~~ 78

Chapitre VII- Les obstacles a l'autopromotion paysanne et au développement 81

7.1 - L'insuffisance de moyens~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~ 81

7.1.1 -- L'insuffisance de moyens financiers~~~~~~~~~~~~~~~~.81
7.1.2 -- Le manque de moyens matériels et techniques.82

7.2 -- Les contraintes fonctionnelles du Foyer~~~~~~~~~~~~~~~~~~ 83

7.3- Le manque de professionnalisme des producteurs du foyer~~~~~~~~~~~ 84

Chapitre VIII- La relation partenariale du Foyer de Sanar avec l'ANCAR 86

8.1 - Historique de l'ANCAR 86

8.2 -- Situation administrative et fonctionnement de l'ANCAR~~~~~~~~...87 8.2-1- Le programme local de conseil agricole et rural~~~~~~~~~.88 8.2.2- Le programme d'arrondissement~~~~~~~~~~~~~~...89

8.2.3- Le programme régional~ ~~~~~~~~~~~~~~~~ 89

8.2.4- Le programme national~~~~~~~~..~~~~~~~~~~89

8.3 - Les missions de l'ANCAR.................................................................. 90

8.4 -- Les activité de l'ANCAR 91

8.4.1- Le conseil 91

8.4.2- L'information 91

8.4.3- La formation 92

8.4.4- Les appuis divers 92

8.4.5- La recherche/Développement 93

Chapitre IX -- Le partenariat du Foyer avec l'ANCAR.......... ..................... 94

9.1 - Historique du partenariat avec l'ANCAR 94

9.2- Nature de l'intervention de l'ANCAR 95

9.3- L'appui-conseil : une approche controversée dans sa pratique 95

Chapitre X : La portée de l'intervention de l'ANCAR au niveau du Foyer 99

CONCLUSION..........................................................................................109

BIBLIOGRAPHIE......................................................................................113
ANNEXES...............................................................................................116






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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard