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Réutilisation des eaux usées

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par Jean-Laurent Bungener
Ecole polytechnique fédérale de Lausanne - Thèse 1996
  

Disponible en mode multipage

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    Première partie:

    Les composantes de la fertilité.

    Chapitre 1. Définition de la fertilité du sol.

    Nous rappelons que notre but est la détermination des principaux facteurs de fertilité qui permettent de mesurer l'impact de l'irrigation par des eaux usées sur la fertilité des sols en condition soudano-sahélienne.

    De manière préalable il s'agit de définir les termes de la fertilité d'un sol. Dans une seconde étape on décrira l'ensemble des composantes du milieu dans la zone d'étude et leur influence sur la fertilité du sol. Dans une troisième étape une description des différentes pratiques culturales facilitera l'établissement des caractéristiques propres à la pratique de la réutilisation des eaux usées. L'ensemble de ces constats permettra de définir les objectifs et les hypothèses de travail.

    "La notion de fertilité d'un sol ou d'un milieu est familière à tous comme peut l'être celle de la santé d'un individu ou d'une population. Et pourtant, dans un cas comme dans l'autre, on s'aperçoit que ces deux concepts recouvrent des acceptations bien différentes, de la plus restrictive à la plus large" (Pieri, 1989).

    Pour préciser le concept, nous commencerons par montrer ce qu'il représente d'un point de vue scientifique. Puis nous étendrons cette présentation avec la définition du terme de milieu en introduisant quelques notions d'écologie générale. Ces quelques notions sont nécessaires car elles permettent de mettre en évidence la notion de sensibilité d'un milieu.

    1.1. Les bases physiques, chimiques et biologiques de la fertilité.

    La fertilité d'un sol dans le sens agronomique du terme peut se concevoir de deux manières.

    En première approche, elle dépend de l'aptitude de l'agriculteur à gérer la fertilité du sol en fonction du type de plantes cultivées.

    En seconde approche la fertilité est la capacité d'un sol à mettre à disposition les éléments essentiels à la croissance de la plante, sans qu'aucune concentration d'un élément toxique entrave son bon développement (Foth et Boyd, 1988). Cette mise à disposition est définie pour un contexte pédoclimatique donné.

    La notion de fertilité semble ainsi, dans un cas comme dans l'autre, pouvoir être envisagée relativement aux fonctions que le milieu doit remplir dans le processus producteur (Sébillote, 1989). Ces fonctions dépendent des caractéristiques du milieu. Celles-ci appartiennent à des composantes différentes du milieu qui sont le climat, le sol, la végétation, l'activité humaine ou animale, le relief. Chacune de ces composantes peut de façon directe ou indirecte influencer la croissance végétale.

    Par la présentation rapide des éléments qui composent une plante, nous allons évaluer la nature des besoins nutritifs de la plante. Bien que la composition chimique varie d'une plante à l'autre il est possible de distinguer trois types d'éléments chimiques dans cette composition.

    Tout d'abord le carbone, l'hydrogène et l'oxygène, tirés du gaz carbonique et de l'eau qui permettent la photosynthèse.

    Dans des quantités plus faibles, mais d'égale importance pour la plante on trouve des éléments non métalliques, l'azote, le phosphore et le soufre, et des éléments métalliques, tels le magnésium, le potassium, le calcium, et le fer (Richter, 1993).

    Les oligoéléments interviennent quant à eux sur la qualité du développement de la plante. Ce sont généralement des métaux tels le zinc, le bore, le molybdène, le cuivre ou le manganèse.

    La plante absorbe ces éléments soit par l'intermédiaire de ses organes aériens (feuilles), soit par l'intermédiaire de ses organes souterrains (racines).

    Au niveau des organes aériens, les phénomènes d'échanges gazeux et d'absorbtion de la radiation lumineuse permettent à la plante de se procurer l'énergie et les éléments nécessaires à la photosynthèse. Les échanges sont régulés en partie par les stomates, et la capacité d'absorption du rayonnement lumineux dépend de la quantité de chlorophylle disponible.

    Au niveau des organes souterrains, c'est principalement l'ensemble des ions , sous forme de sels nutritifs , et l'eau qui sont absorbés.

    «Pour beaucoup de plantes, il n'est pas suffisant d'avoir à disposition dans le sol les éléments essentiels sous la forme adéquate d'ions; il faut que les quantités d'ions se trouvent dans un rapport convenable entre elles, sans que la concentration de l'ensemble dépasse une certaine valeur (potentiel osmotique trop bas). Le pH peut aussi avoir une influence durable sur l'absorption»(Richter, 1993).

    Selon les organes végétaux concernés, et leur mode d'alimentation, il est possible de définir trois groupes distincts de facteurs de croissance, le groupe des facteurs climatiques, le groupe des facteurs chimiques et le groupe des facteurs biologiques.

    Ces facteurs de croissance dépendent des sources nutritives auxquelles la plante s'approvisionne. Ces sources peuvent être divisées en deux catégories : les sources qui dépendent du climat et celles qui dépendent de la composition chimique du milieu. Selon leur origine, ces sources procurent des éléments nutritifs en quantités limitées ou illimitées. Ainsi, deux composantes de la fertilité se dégagent en tant que sources nutritives; il s'agit de la composante climatique et de la composante chimique.

    La composante climatique va intervenir en tant que facteur de croissance au niveau de l'ambiance (chaleur et humidité relative) qui va conditionner les échanges et au niveau de la nutrition (rayonnement et précipitations). Les variations climatiques à l'échelle de la planète donnent une première appréciation des possibilités physiologiques de développement végétal. On verra au cours de la description du climat de la zone soudano-sahélienne qu'il peut y avoir des facteurs microclimatiques qui modifient en partie les paramètres mesurés pour une zone climatique. Pour cette raison, la composante climatique n'est décrite que pour la zone qui nous intéresse.

    Le sol est la source en éléments chimiques et le support de la croissance végétale. La composante chimique intervient dans la nutrition minérale et hydrique de la plante. La composante physique doit posséder des propriétés qui facilitent la croissance et la respiration des racines.

    Le sol est constitué d'éléments minéraux et organiques, de gaz et de liquides. Cette composition dépend du matériau géologique (roche-mère), de l'évolution du sol au cours du temps (pédogenèse), du couvert végétal (matière organique) et du climat. C'est par l'altération de la roche-mère sous l'influence conjuguée de facteurs climatiques et biologiques qu'un sol se construit. Selon la durée et l'intensité des processus pédogénétiques, le sol évolue. Il est possible d'établir une cartographie des sols selon le principe de la zonalité des sols (Duchaufour, 1984). Cette distribution par zones suit grossièrement les zones climatiques. A ces caractères génétiques, on oppose les caractères fonctionnels (profondeur, texture, aération etc..).

    Ainsi, quelle que soit son origine, il est possible de classer un sol en fonction de sa granulométrie, ce qui donne une idée de la proportion de chaque fraction minérale selon sa taille.

    Ce renseignement permet d'apprécier globalement les caractéristiques physiques du sol (Hénin, 1977). Une étude plus approfondie de sa structure et de sa texture précise la cohérence et la nature des agents de la cohérence de ce matériel. Cette première approche par des paramètres physiques permet d'apprécier les propriétés du sol en tant que filtre. Ces propriétés, telles la porosité qui détermine le mode de circulation de l'eau et la plasticité qui précise le comportement mécanique du sol, vont exercer une grande influence sur les possibilités de croissance végétale.

    A cette première approche s'ajoute une approche par l'analyse des caractéristiques chimiques du sol. Celle-ci facilite la détermination de la nature des éléments qui composent le filtre. Ces éléments peuvent être sous trois formes, gazeuse, liquide ou solide.

    Ce sont eux qui nous renseignent sur les relations entre la roche-mère et le sol d'une part (formes minérales), et entre le sol et l'atmosphère d'autre part (formes liquides et gazeuses).

    A l'aide de ces renseignements, il est possible d'obtenir une définition pratique du sol et d'en évaluer la fertilité. Celle-ci correspond tout d'abord à l'aptitude du sol à mettre à disposition en temps utile c'est-à-dire en fonction des besoins des plantes (Anderson et Ingram, 1993) les éléments nutritifs précédemment cités. Cette intervention se fait proportionnellement à la richesse initiale du milieu associée à sa capacité de stockage et de redistribution des éléments nutritifs.

    Il faut également que le sol en tant que substrat donne à la plante des conditions environnementales favorables à son développement. Ce qui implique que le filtre doit être suffisamment poreux pour maintenir une libre circulation de l'eau et des gaz provenant de la surface tout en étant apte à retenir l'eau dans des espaces non confinés. Le maintien de cette structure doit être à la fois solide et plastique de manière à garantir la stabilité des édifices constitués.

    Il apparaît maintenant deux caractéristiques principales du sol qui le rendent apte à remplir ses fonctions dans le processus de production, des caractéristiques physiques et des caractéristiques chimiques. Pour cette raison, on parlera ici de la fertilité physique et de la fertilité chimique du sol et des indicateurs qui permettent de les évaluer.

    Du fait de sa grande complexité, le sol est le lieu de nombreuses interactions chimiques, biologiques et physiques qui vont être à l'origine de son fonctionnement.

    Des particules minérales, les argiles, et des macromolécules organiques, les substances humiques, sont réunies sous la forme d'une entité particulière, le complexe argilo-humique. Ce complexe dispose de propriétés spécifiques qui lui confèrent une importance capitale dans les mécanismes d'échanges et de mise en réserves des éléments nutritifs.

    1.1.1. Les bases de la fertilité chimique du sol.

    Un sol acquiert sa fertilité chimique par deux processus. Par un premier processus qui est l'altération des minéraux primaires issus de la roche-mère ou du complexe d'altération d'une part, et par la minéralisation de la matière organique d'autre part.

    Trois formes de mise de réserve des éléments nutritifs sont possibles. Sous forme de minéraux sains nous trouvons les réserves stables. Les réserves assimilables peuvent quant à elles être sous forme de minéraux et d'éléments chimiques solubles ou de matières organiques en voie de décomposition. Ces réserves libèrent dans la solution du sol les éléments nutritifs, ce qui constitue les réserves directement assimilables. C'est la disponibilité des ions contenus sous chacune des formes de mise en réserve qui est ainsi hiérachisée, allant des formes les moins disponibles dans les réserves stables aux formes directement assimilables (ions de la solution du sol) (Chamayou et Legros, 1989).

    Le complexe d'altération, issu de la désagrégation de la roche-mère, a une composition minéralogique spécifique. Il est lui-même soumis à des transformations qui vont le conduire à s'appauvrir au cours du temps par l'entraînement successif de ses composants. Cet appauvrissement est d'autant plus fort que le climat sera chaud et humide. Il est aussi fonction d'un gradient de profondeur qui va de la zone de contact avec la roche-mère à la surface du sol. Plus un sol sera évolué, plus sa composition minérale sera simplifiée en surface. Dans le cas de sols évolués tels les sols ferralitiques des climats tropicaux humides, l'appauvrissement en surface est compensé par le dépôt de matières organiques. Cette litière évolue progressivement sous l'action des micro-organismes pour libérer en définitive les éléments chimiques fixés par la biomasse.

    En conséquence, il existe en parallèle un cycle biologique spécifique aux éléments nutritifs et un cycle géochimique dans lequel est impliqué l'ensemble des éléments minéraux issus de la rochemère.

    L'appauvrissement en surface du sol est ainsi compensé par cet apport d'origine biologique.

    Le sol est ici considéré comme un réservoir, dont il s'agit de déterminer les paramètres de fonctionnement. Ce fonctionnement peut favoriser soit le stockage, soit la mise en solution des éléments nutritifs. Ce sont ces transferts qui déterminent la fertilité chimique du sol.

    Transferts d'éléments nutritifs du sol à la plante.

    La fertilité chimique du sol dépend principalement de la nature de la roche-mère dont il est issu, de la quantité de colloïdes présents et de son pouvoir tampon.

    La phase solide du sol (complexe adsorbant) échange de façon permanente des ions avec la phase liquide du sol (eau, ions, molécules organiques solubles). C'est par l'intermédiaire de cette solution du sol que s'effectue l'ensemble des échanges d'éléments minéraux du sol vers la plante.Ces transferts s'effectuent en trois étapes, tout d'abord l'élément nutritif est isolé du minéral primaire auquel il appartient, ce qui le libère dans la solution du sol. Il peut alors être adsorbé à la surface d'un colloïde, jusqu'à ce qu'il en soit libéré pour être absorbé par la plante.

    Il existe deux formes de réserves, une forme minérale et une forme organique. Dans les deux cas, les éléments nutritifs doivent être isolés puis solubilisés. Ils seront libérés dans le milieu sous formes d'ions soit de charge positives (K, Ca, Mg etc...), soit de charge négative ( P, S). Ces formes solubles se trouvent soit en solution, soit adsorbées sur un colloïde qui forme le complexe adsorbant (Chamayou et Legros, 1989).

    La proportion de chaque élément présent est variable. Sur roche calcique par exemple, il est évident que la proportion de calcium disponible sera plus importante que sur une roche-mère granitique. Il peut également arriver que pour des raisons hydriques (remontées de nappes salines) le sodium ou un autre élément soit dominant. Enfin dans les sols qui ont subi une longue évolution, le fer et l'aluminium sous forme de sesquioxydes sont dominants.

    Deuxième étape: fixation sur le complexe adsorbant.

    Le complexe adsorbant est constitué d'une particule colloïdale ( argiles, matières organiques, oxydes ou hydroxydes) dont la surface est chargée. La fixation des ions minéraux présents dans la solution du sol à ces colloïdes se fera en fonction de leur concentration respective, et du pH qui influence la charge globale des argiles (Chamayou et Legros, 1989) et la solubilité des ions (ex: phosphore).

    La quantité d'éléments adsorbés à la surface des colloïdes dépend de l'activité des argiles (Lozet et Mathieu, 1990) et de la nature des matières organiques. L'influence des eaux de ruissellement qui diluent la solution du sol est également un facteur dont dépend la quantité de cations fixés (lixiviation).

    La qualité dépend de la nature des cations présents qui ont des affinités plus ou moins fortes avec le complexe adsorbant. Certains cations peuvent ainsi "monopoliser" les sites d'adsorption (Na , Mg ou Al par ex.), soit en raison de leur importante concentration (Na et/ou Mg) soit en raison d'un faible pH (Al). Dans ces cas particuliers, le sol ne peut plus assurer normalement les échanges et on observe les signes d'une toxicité liée à l'excès de certains éléments (ex: toxicité aluminique). Cette rupture des échanges entre la solution du sol et les colloïdes affecte les possibiltés d'accès de la plante aux nutriments.

    Troisième étape : absorption par la plante.

    Bien que la plante assimile les éléments nutritifs sous forme soluble, leur absorption à la surface d'un colloïde ne limite pas leur disponibilité.

    Cette adsorption dépend d'une constante d'équilibre entre la concentration en éléments chimiques de la solution du sol hors de l'influence des colloïdes et celle dans la zone d'influence des forces de rétention du complexe adsorbant. Par exemple lorsqu'il y a lixiviation des éléments nutritifs par les eaux de ruissellement, la baisse de leur concentration dans la solution du sol provoque une désaturation proportionnelle du complexe adsorbant.

    La racine peut favoriser la remise en solution des éléments nutritifs en créant localement des variations du pH associées à une force de succion. L'eau ainsi chargée des nutriments remis en solution, sera absorbée par la plante.

    Ces variations sont liées à l'échange de protons (H+ et HCO3-) de la racine, avec les anions et

    cations de sels minéraux. La racine peut également par l'excrétion de composés organiques (exsudats racinaires) chélater les métaux lourds qui sont alors assimilables ( Richter, 1988).

    Les mesures de la réserve minérale du sol.

    Le dosage global des éléments qui permet de déterminer la quantité d'éléments nutritifs du milieu ne permet pas d'estimer leur disponibilité. Cette évaluation de la réserve totale est complétée par une appréciation des réserves directement assimilables présentes dans la solution du sol et à la surface des colloïdes.

    Par la mesure de la capacité d'échange cationique (CEC), il est possible d'estimer le taux de saturation du complexe adsorbant en cation. Cette CEC mesurée en me/100 g de sol sera considérée selon un point de vue agronomique comme très faible lorsqu'elle est inférieure à 10me/100 g, faible entre 10 et 15 me/100 g, moyenne entre 15 et 25 me/100 g, élevée de 20à 25 me/100 g et très élevée lorsqu'elle dépasse 25 me/ 100 g (Chamayou et Legros, 1989).

    Cette disponibilité sera d'autant plus importante pour la plante que les variations de pH seront faibles et localisées. Un sol chimiquement fertile doit en conséquence disposer d'un pouvoir tampon.

    Les argiles et la matière organique sous la forme de substances humiques participent au pouvoir tampon du sol. Un dosage de la matière organique est donc nécessaire pour estimer la forme sous laquelle les éléments minéraux sont présents. Cette mesure est d'autant plus nécessaire que l'azote et le phosphore sont stockés en grande partie dans la matière organique.

    Enfin, la détermination du type et de la quantité d'argile permet d'estimer les surfaces d'adsorption disponible. Ces surfaces dépendent de l'architecture des minéraux argileux. On pourra ainsi rapidement classer un sol comme ayant une forte ou faible activité d'échange.

    Nous avons vu jusqu'ici l'aspect chimique de la fertilité du sol pour l'ensemble des cations.

    Les formes solubles du phosphore (phosphate) ou du soufre (sulfate) sont des anions qui peuvent également se fixer sur les colloïdes (Chamayou et Legros, 1989). Mais la mesure de cette capacité d'échange anionique est difficile, car ces liaisons sont plus lâches.

    L'azote également présent sous forme d'anions ne dépend pas directement de la nature des minéraux primaires. Il provient généralement de la dégradation des résidus organiques. Sa disponibilité est dépendante de l'action des micro-organismes dont les métabolismes sont très différents en fonction du milieu et des espèces. Des dosages spécifiques sont nécessaires pour en évaluer la concentration dans les sols.

    Ainsi, nous voyons que la composition minéralogique et chimique d'un sol intervient non seulement au niveau de la richesse nutritive du milieu mais également sur la disponibilité et la capacité de mettre en réserve les éléments nutritifs.

    Ces deux caractéristiques d'un sol, richesse naturelle et capacité de stockage et de redistribution, constituent la fertilité chimique du sol.

    L'eau est le vecteur du transfert des éléments minéraux d'un compartiment à l'autre et des racines vers les parties aériennes. Selon son pH elle pourra influencer le sens des transferts chimiques.

    Cette fertilité chimique qui est la mieux connue des agronomes permet d'établir des normes de fertilité sur la base d'analyses de laboratoire. Ces normes fixent, en fonction du type de sol et du type de végétal cultivé ,les doses d'engrais minéraux et d'amendements de complément(ex: chaulage) à effectuer pour garantir une production agricole satisfaisante. Par la mesure de la CEC on obtient directement une estimation de la garniture cationique du complexe absorbant et une indication sur le type d'argiles présentes dans le sol. Les kaolinites ont par exemple une très faible capacité d'échange (Chamayou et Legros, 1989).

    1.1.2. Les bases de la fertilité physique du sol.

    «Essentiellement, le sol se présente comme un filtre complexe. La circulation des fluides à travers ce filtre va être affectée par les irrégularités qu'il présente, et réciproquement les variations d'humidité et la circulation de l'eau vont en modifier la structure»(Hénin, 1977).

    Ce filtre complexe peut, grâce à la propriété des argiles et de la matière organique, retenir l'eau captive. Une forte augmentation des surfaces de contact entre l'eau et son support favorise cette aptitude.

    Le complexe organo-minéral est capable d'adsorber l'eau à sa surface par des forces de succion résultantes des forces capillaires et des forces de liaison. Il favorise également la formation d'agrégats de taille variable, ce qui libère des espaces qui formeront la porosité du sol. Ce second mécanisme participe à l'augmentation des surfaces d'échange qui est l'une des bases de la fertilité physique du sol.

    Cette augmentation est favorisée à toutes les échelles. Elle commence au niveau des constituants minéraux par la possibilité éventuelle de mettre à disposition les espaces interfeuillets pour les échanges (argiles gonflantes). Cette augmentation se prolonge par la formation de micro-agrégats puis d'agrégats. Par une organisation spatiale de plus en plus complexe, qui est finalement visible à l'échelle d'un solum (profil pédologique), les surfaces disponibles sont multipliées.

    La conséquence de cette organisation morphologique est la formation d'une porosité optimale dont la dimension est d'un ordre de grandeur variable. A cette porosité il faut associer une modification de la densité volumique du sol qui sera le reflet de son ameublissement.

    Celui-ci est la conséquence d'une propriété mécanique acquise par la formation des agrégats qui est la plasticité du sol. Cette plasticité provient de la capacité des particules à glisser les unes par rapport aux autres lorsque l'on exerce une force de poussée (Hénin, 1978).

    L'ensemble des caractéristiques morphologiques ainsi acquises peut être entièrement détruit sous l'impact de l'eau par des processus physiques et/ou chimiques. Selon la résistance des agrégats à la destruction un sol sera plus ou moins sensible à l'érosion. La disparition de la porosité provoquée par la destruction des structures va favoriser la circulation de l'eau en surface qui entraînera alors les particules fines, c'est l'érosion.

    L'eau, le complexe organo-minéral et la composition granulométrique et chimique du sol sont les éléments moteurs de ces associations particulaires. Il est possible de définir ces propriétés soit par l'analyse de la morphologie du sol, associée à l'analyse de sa structure et de sa texture, soit par l'analyse de leurs conséquences. On évaluera par exemple la porosité du sol, sa capacité de rétention en eau ou son infiltrabilité.

    Relation entre la composition et l'organisation : structure et texture.

    La première étape dans l'analyse de la fertilité physique d'un sol va être de déterminer les différentes fractions granulométriques qu'on y rencontre. Cette analyse granulométrique permet de définir au travers de la texture du sol ses propriétés générales. Par exemple, cette évaluation permet de déterminer grossièrement la réserve en eau du sol (Hénin, 1978).

    Cette détermination de la texture ne suffit pas pour évaluer précisément le volume et la dimension des pores. Il existe d'une part de multiples possibilités d'arrangements des particules minérales et organiques, d'autre part l'eau a une influence sur la stabilité de ces arrangements. On constate en effet que l'organisation spatiale des arrangements particulaires détermine une

    forme précise aux agrégats. Des surfaces de plus faible résistance mécanique permettent de désagréger des mottes de terre en unités structurales de plus en plus petites.

    Ce phénomène permet de classer les sols en fonction de leur structure ou de leur surstructure (Lozet et Mathieu, 1990). Celle-ci peut être continue ou fragmentaire. Dans le cas d'une morphologie fragmentaire on trouvera des structures arrondies, lamellaires ou anguleuses.

    La formation de liaisons entre la matière organique et les colloïdes d'origine minérale permet d'éviter le lessivage de ces substrats. Ces liaisons dépendent de la présence de cations polyvalents qui permettent d'effectuer un pontage entre les deux particules anioniques (Hayes and Himes, 1986). Cette propriété morphologique va avoir pour conséquence d'amplifier ou de restreindre la porosité du sol. Un sol aura selon sa structure une porosité structurale définie (porosité entre les agrégats et porosité entre les mottes). Selon leur dimension, ces espaces faciliteront la diffusion des gaz, la circulation de l'eau et des racines.

    Dans un sol riche en sodium et pauvre en calcium, on observe en présence d'eau une hydrolysation des argiles qui libèrent l'ion Na en solution. Le pH dépasse 9 ce qui provoque une dispersion des argiles. Celles-ci peuvent alors être lessivées et le sol perd sa structure avec la disparition des argiles. La destructuration est alors d'origine chimique.

    Dans les cas de destructuration des sols liée à l'action de l'eau, la destruction des agrégats est provoquée par la compression des gaz contenus dans les micropores du sol au niveau de la porosité de l'agrégat (Casenave et Valentin, 1989). C'est l'effet de «splash» des gouttes de pluies. La destructuration est alors d'origine physique.

    Un sol dont la structure est altérée, ne pourra plus assurer sa fonction de milieu poreux, sauf s'il s'agit d'un sol à texture grossière. Du fait de la destruction des agrégats au contact de l'eau, ce qui a pour effet de limiter l'infiltrabilité du sol, l'érosion hydrique est rendue possible.

    L'indice d'instabilité structurale d'un sol permet de mesurer sa sensibilité à l'eau et par conséquent de définir sa capacité à préserver les espaces poraux de la destruction. Elle dépend des forces de cohésion entre les particules de sol. Ces forces doivent résister aux modifications d'équilibre provoquées par la présence de l'eau. A cette condition, le sol pourra alors exercer pleinement sa fonction de support poreux mais stable

    Fonction de stockage de l'eau: la capacité de rétention en eau.

    L'augmentation de la surface disponible pour les échanges a, comme nous l'avons vu, un effet sur la quantité et la dimension des volumes poraux. Les colloïdes qui tapissent ces espaces ont un pouvoir de succion sur l'eau qui est proportionnel à la concentration d'éléments adsorbés sur leurs surfaces. Enfin, certaines argiles (argiles gonflantes) peuvent absorber l'eau dans les espaces interfeuillets.

    Il en résulte une limitation de l'influence des forces gravifiques sur les mouvements de l'eau. Le stock qui se constitue sera disponible pour la plante dans la mesure où les forces de succion qui retiennent l'eau dans le substrat sont inférieures aux forces de succion de la racine. La capacité de rétention en eau peut être appréciée au travers du stock disponible et du stock inaccessible à la plante pour les raisons précédemment invoquées.

    On peut estimer dans une première approche la capacité de rétention en eau d'un sol directement à partir de la détermination de sa texture. On peut également par des mesures en laboratoire déterminer la quantité d'eau réellement disponible pour la plante. Ces mesures conduisent à la détermination de la quantité d'eau présente dans le sol avant le point de flétrissement.

    Fonction de capteur des précipitations: l'infiltrabilité du sol.

    La mesure de la vitesse d'infiltration au champ ou en laboratoire nous permet de déterminer quel volume d'eau pourra s'infiltrer dans le sol en fonction du temps. Cette mesure permet d'estimer le risque de ruissellement et de déterminer l'efficacité d'un arrosage naturel ou artificiel.

    Les définitions physiques et chimiques nous ont appris que pour qu'un sol soit fertile, il lui faut être poreux, riche en éléments minéraux et organiques et enfin, capable de retenir l'eau.

    Les facteurs principaux de cette fertilité sont les argiles et la matière organique qui permettent à la fois de réguler les échanges et de maintenir les structures.

    On dispose d'indicateurs qui permettent d'évaluer ces différentes propriétés du sol. La capacité d'échange cationique nous permet d'évaluer globalement les concentrations des cations présents sur le complexe adsorbant et l'activité des argiles du sol. La mesure du pH nous donne une indication sur les risques d'apparition d'une toxicité aluminique. La mesure du taux de matière organique et de substances humiques nous renseigne sur les réserves nutritives et sur la nature des échanges dans le sol. La mesure de l'infiltration permet d'évaluer la porosité du sol et le risque d'érosion. Il existe ainsi de nombreux indicateurs dont certains, tels le sodium ou le calcium, permettent de prévoir l'impact d'une technique d'irrigation sur la fertilité chimique et physique du sol.

    1.1.3. La base biologique de la fertilité d'un sol.

    L'échelle d'action de la biologie dans le sol va du moléculaire au macroscopique (formation de termitière ou de terrier). Elle permet à des sols de n'être fertiles que par son action (sols des forêts équatoriales) en renforçant leur structure et en améliorant le cycle biogéochimique des éléments nutritifs. Il y a ainsi une action physique et une action biochimique. L'action biochimique peut améliorer considérablement les rendements (fixation de l'azote). Elle peut également par l'apparition des phytopathogènes provoquer la destruction complète d'une culture.

    Le sol doit, dans ce cas, être regardé comme un écosystème complexe, qui sert à la fois de réacteur biologique pour les microorganismes aérobies et anaérobies, comme substrat nutritif (ex: organismes géophages) et comme refuge vis -à -vis des aléas climatiques. Il règne dans le sol un microclimat stable, qui diminue l'impact des variations observées en surface.

    Cet écosystème va fonctionner au travers d'une chaîne alimentaire diversifiée dont les sources nutritives sont la matière organique pour les hétérotrophes et la matière minérale pour les chimiolithotrophes. Selon les équilibres écologiques que le sol engendre de par sa morphologie et sa composition, une faune et une flore (fongique et bactérienne) vont s'y développer. En fonction de la disponibilité en éléments nutritifs, ces organismes pourront entrer en compétition avec la plante ou favoriser par leur activité trophique la redistribution des éléments nutritifs et la synthèse des substances humiques.

    Les éléments biologiques du sol seront impliqués dans certains des mécanismes qui accroissent la fertilité d'un sol, à savoir l'augmentation des surfaces d'échanges, la mise en réserve et la remise en solution des éléments nutritifs. Mais étant donné la variabilité de l'amplitude de son action, il est difficile d'estimer cette fertilité biologique. Son rôle dans le recyclage des nutriments, bien que connu, n'est pas attribuable à une seule espèces définie. Il est difficile d'effectuer des mesures comme celles qui permettent d'évaluer la fertilité chimique ou physique d'un sol car on restera limité dans les possibilités d'interprétation des résultats obtenus. Ainsi, les polysaccharides ou les filaments mycéliens semblent s'associer aux colloïdes minéraux et en favoriser le maintien ( Hayes et Himes, 1986; Stotzky, 1986). La mesure de ce type d'action est difficile en raison de l'absence d'une méthodologie pratique.

    Seuls quelques paramètres sont d'un usage courant tels les tests respirométriques ou le
    dénombrement des populations de lombrics. Le renforcement de l'organisation structurale des

    sols par l'intermédiaire des vers de terre étant reconnu (Bachelier, 1973), l'estimation de leur population présente un intérêt pratique.

    1.2. Les bases conceptuelles de la fertilité du sol.

    En définissant les bases de la fertilité du sol, il n'a pas été fait mention de l'influence de l'homme sur celle-ci. L'homme peut, par son action, modifier profondément la nature d'un sol. Il peut également faire changer l'ensemble du milieu. Pour atteindre notre objectif initial, il est nécessaire de revoir le concept de milieu en l'adaptant aux réalités auxquelles nous serons confrontés.

    Un milieu, qu'il soit naturel ou anthropisé, peut être caractérisé par sa stabilité. Celle-ci peut être d'ordre climatique, biologique ou pédologique. Cette stabilité est évaluée par rapport à des situations que l'on appellera climaciques. La mesure de la transformation du milieu par l'homme ou par l'introduction d'un autre facteur de variation nous en donne une évaluation. C'est l'amplitude de cette transformation que nous appellerons la sensibilité du milieu. Cette sensibilité est déterminée par l'observation de la capacité de régénération du milieu initial après perturbation. Cette évaluation réclame une bonne connaissance de l'état initial avant perturbation.

    Dans les pages qui vont suivre, nous allons voir que les milieux tropicaux secs sont des milieux extrêmement sensibles. Cette sensibilité qui est visible par l'influence de l'action de l'homme sur le sol lors de la mise en culture, s'exprime également au travers de l'impact sur la végétation des variations climatiques inter-annuelles ou intra-saisonnières. Dans ce cadre particulier, il est important de garder en mémoire que le milieu est difficile à définir autrement que par des conditions stationnelles qui dérivent des interactions entre les différentes composantes du milieu. Pour cette raison, certains auteurs se sont attachés à fournir des outils conceptuels permettant une description synthétique du paysage par la réunion au sein d'un vocabulaire unique de l'ensemble des observations effectuées dans différentes disciplines (Richard 1989). Cette description permet d'établir une typologie du milieu fort utile pour situer avec précision le contexte dans lequel une observation ou une analyse a été effectuée. Dans cette typologie ce sont le sol et la forme de la végétation qui sont les éléments de classification.

    Chapitre 2. Fertilité des milieux tropicaux en climat soudano-sahélien.

    Le climat soudano-sahélien a ceci de particulier que c'est par ses contrastes saisonniers qu'il donne au milieu la propriété d'être selon la période de l'année aussi sec que sous un climat sahélien ou aussi humide qu'en climat guinéen. Il en résulte une très forte influence sur le sol et la végétation.

    2.1. Description de la situation pédologique dans le centre du Burkina-Faso.

    Le Burkina Faso occupe une position centrale en Afrique de l'Ouest.

    Comme pour l'ensemble de la sous-région, les processus pédogénétiques s'y sont succédés selon deux phases.

    Dans une première phase, la pédogénèse de type ferrallitique s'est effectuée sur un matériau précambrien. Ce matériau d'origine granitique ou migmatique a été altéré jusqu'à un stade avancé conduisant à la formation d'une cuirasse ferrugineuse.

    Dans une deuxième étape, un changement climatique avec l'apparition d'une saison sèche importante a entraîné une érosion partielle de ces cuirasses permettant la mise à nu de la roche- mère visible sur les parties hautes du relief. Un double processus associant altération de la roche ou de la partie basse des sols ferrallitiques et sédimentation des matériaux érodés a conduit à une typologie des sols particulière. Cette typologie est conditionnée en partie par le relief.

    Celui-ci est fortement érodé. Il se compose soit de massifs rocheux d'origine volcanique (au nord et au nord-ouest), soit de collines granitiques (bande sud-ouest et nord-est), associés à des pénéplaines étendues (Kaloga, 1987). Les massifs rocheux culminent à 500 m d'altitude environ, et les pénéplaines ont une altitude comprise entre 200 m et 300 m.

    Les pénéplaines ont deux types de modelés, soit de long glacis à très faible pente, soit un modelé plus ondulé à interfluves plus courts et pentes plus fortes.

    La composition minéralogique du sol aura trois origines selon la toposéquence: - une origine ferrallitique sur les hauteurs quand il ne s'agit pas de lithosol.

    - une origine ferrugineuse dans la plaine.

    - une origine mixte liée à l'héritage et à la transformation du matériel minéral dans les zones topographiques les plus basses où affleurent les eaux de la nappe et où s'accumulent les eaux de ruissellement.

    Sur le plateau central, le faible relief permet la juxtaposition de sols peu évolués et de sols ferrugineux tropicaux lessivés. La distinction entre ces deux types de sol n'est pas toujours aisée en raison du ralentissement des processus de pédogenèse du fait de la sécheresse du climat et de la forte dominante physique de ces processus. Il y a en conséquence un mélange de matériaux d'origines différentes empruntés pour une part aux arènes et d'autre part à des niveaux plus

    altérés issus du profil ferralitique. Le passage des sols peu évolués aux sols ferrugineux tropicaux lessivés est basé sur des caractères morphologiques souvent mal définis qui se limitent à l'épaisseur du profil (Kaloga, 1987).

    «Lorsque exceptionnellement le recouvrement meuble est épais (60-70cm), le profil (de sols peu évolués) acquiert la succession d'horizons caractéristiques des sols ferrugineux tropicaux lessivés à concrétions...l'horizon le plus profond reposant en discontinuité sur la cuirasse sous-jacente. Ceci confirme la tendance évolutive des sols de cette unité vers les sols ferrugineux tropicaux» (Boulet cité par Kaloga, 1987).

    Sur un sol ferrugineux, l'action des précipitations a favorisé un lessivage des argiles. L'accumulation d'argiles dans l'horizon B favorise la formation de nappes perchées d'origine pluviale qui modifient temporairement l'état d'oxydation du milieu. Les sols acquièrent ainsi des caractères hydromorphes (pseudogley).

    Du point de vue des caractères fonctionnels des sols, on constate sur les sols aptes à la mise en culture une prédominance des argiles de type kaolinite dans les horizons supérieurs Dans les zones topographiques les plus basses il y a accumulation de produits qui ont survécu à l'ancienne altération kaolinitique. Dans ces zones, la fertilité des sols est améliorée par l'augmentation de la proportion d'argiles et par leur qualité (argiles gonflantes).

    2.1.1. Influence des conditions d'humidité sur l'évolution chimique et physique des sols.

    Evolution chimique.

    La dynamique de l'eau dans les sols tropicaux secs est fonction de l'activité végétale. En raison de la faible quantité d'eau retenue, la lixiviation des éléments minéraux est limitée. La racine des plantes donne une direction préférentielle aux mouvements de l'eau et favorise ainsi la concentration des éléments minéraux dans les horizons superficiels (Rognon, 1994). Des zones d'accumulation préférentielle des éléments non nutritifs sont ainsi créées, ce qui engendre la formation d'horizons indurés et de gravillons ou nodules de fer et d'aluminium. Cette accumulation est visible par le fait d'une coloration moins forte (beige) que celle des sols ferralitiques ( rouge), et correspond à une diminution des associations entre le fer, les argiles et les substances humiques (complexe argilo-humique). Selon l'intensité de l'aridité, des accumulations de silice soluble peuvent, par le même processus, se produire et permettre la néoformation de smectites.

    La dynamique de la matière organique est modifiée en faveur des phénomènes de minéralisation d'origine biotique ou abiotique. Le stock de substances humiques est par conséquent réduit, ce qui contribue à ralentir la pédogenèse et à favoriser une augmentation du pH des sols.

    L'oxygénation du milieu, dans ces conditions de pH élevés (à partir de pH 6), provoque une oxydation des éléments nutritifs, notamment des oligoéléments.

    Evolution physique .

    En raison de l'alternance de phases d'humectation et de dessiccation, la porosité du sol se voit occupée alternativement par l'eau puis l'air. Etant donné l'ultra-dessication qui a lieu au cours de la saison sèche, l'air occupera également la microporosité du sol. Cette situation favorise au cours des épisodes pluvieux suivants l'éclatement des agrégats sous la pression de l'air enfermé dans les pores. Cette rupture provoque une dispersion physique des argiles conduisant à leur érosion.

    Il y a ainsi une migration des particules fines en profondeur.

    2.2. Composantes de la fertilité en climat soudano-sahélien.

    2.2.1. Le sol.

    Les surfaces cultivables représentent 60% environ de la surface totale. Ce sont en majorité des sols ferrugineux. Du fait de la dégradation du couvert végétal liée à la forte densité de population, les sols sont appauvris en matières organiques. Leur faible teneur en argile et leur composition (kaolinite en majorité) ne favorisent pas la capacité d'échange cationique et la capacité de rétention en eau du sol. Leur fertilité chimique et physique qui dépend comme nous l'avons vu précédemment du complexe organo-minéral s'en trouve affectée.

    Fertilité chimique des sols.

    L'altération pratiquement complète des minéraux primaires et secondaires réduit dans ce type de sol le stock d'éléments nutritifs. Le taux de matières organiques qui est compris entre 0.65% et 1% ne permet pas non plus d'améliorer significativement cette déficience. La teneur en argile dépasse rarement 20%. Ce qui signifie qu'une première limite est posée au stockage des éléments minéraux dans le sol (Haile et al., 1985). La minéralisation rapide de la matière organique libère en plus du CO2, une grande quantité d'acides organiques qui modifient le pH de la solution du sol.

    Cela favorise la lixiviation des éléments échangeables et leur remplacement par de l'aluminium ou des protons. L'utilisation d'engrais minéraux seuls provoque une modification du pH des sols qui favorise la mise en place de la toxicité aluminique (Sedogo, 1993). Les sols présentent également des carences globales en phosphore et en azote. Des seuils de carence ont été évalués pour certains éléments nutritifs; ils sont fixés à 400 ppm pour l'azote et 30 ppm pour le phosphore.

    La matière organique apparaît comme un élément clef du stockage et de la redistribution des éléments nutritifs. Les différentes formes de matières organiques permettent également de réguler les échanges en augmentant la capacité de rétention en eau et la capacité d'échange cationique du sol (Chen et Avnimelech, 1986). On observe également suite à des apports de matières organiques une amélioration du pH des sols (Sedogo, 1993). Les substances humiques servent également de réservoir pour les composés azotés (Pallo, 1992). Lors de la mise en culture sans apports de complément on observe une diminution du stock de matière organique (Pieri, 1989).

    Il est difficile d'appréhender de façon rationnelle la fertilité chimique de ces sols sans connaître avec plus de précision sous quelle forme se trouvent les éléments nutritifs (Pieri, 1989). Cette lacune est particulièrement nette dans la maîtrise de la dynamique de l'azote dans le sol. L'absence d'argiles à forte activité ne permet pas de comparer directement les analyses de la fertilité chimique de ces sols avec celles des sols tempérés. La recherche agronomique s'est orientée en conséquence vers la mesure de bilans effectués à l'aide d'analyses complémentaires (diagnostic foliaire) afin de proposer des normes de fertilité adaptées. En conditions naturelles on observe en quelques années une régénération du stock organique et de la réserve minérale des sols, notamment en potassium des sols en friche.

    En condition cultivée, la porosité totale est faible (40%), la porosité structurale très faible, la capacité d'infiltration est limitée et la tendance à la compaction et au durcissement pendant la saison sèche (prise en masse ) diminue l'infiltrabilité durant les premiers épisodes pluvieux. A plus long terme, sous l'impact des gouttes de pluie et en l'absence de protections mécaniques, on observe la formation de micro-horizons de surfaces imperméables ou de croûtes structurales (Casenave et Valentin, 1989).

    La croissance racinaire y est difficile en raison de la structure massive des sols et des déficits hydriques accentués par des pertes par ruissellement.

    En condition naturelle sous couvert forestier, la fertilité physique du sol en terme d'infiltrabilité, de stabilité structurale ou de porosité est conservée. La présence de végétaux ligneux et herbacés et d'une pédofaune active favorise l'entretien de la porosité du sol et le maintien du stock de matière organique dans le sol.

    Gestion de la fertilité physique et chimique.

    La gestion de la fertilité des sols en zone soudano-sahélienne doit assurer le contrôle de trois facteurs principaux. Ces facteurs sont l'acidification des sols, les réserves minérales et la porosité du sol.

    Contrôle de l'acidification des sols.

    Le faible pouvoir tampon des sols favorise l'acidification rapide des sols au cours de la mise en culture sous l'effet de la libération de protons par l'activité biologique. Cette diminution du pH est amplifiée par l'utilisation des engrais minéraux sans compléments organiques.

    En conséquence un chaulage est nécessaire (1.5 t/ha). Celui-ci permet non seulement d'augmenter le pH sur un moyen terme mais également d'engendrer une amélioration des rendements culturaux (Sedogo, 1993). Une autre façon de contrôler les diminutions de pH est d'effectuer régulièrement des apports de fumures organiques (Egoumenides et Oliver, 1985).

    Amélioration des réserves minérales.

    Les apports peuvent être effectués sous deux formes organique et minérale. L'apport minéral à raison de 100 kg/ha de NPK et 50 kg/ha d'azote urée doit être accompagné d'un chaulage tous les dix ans dans les doses présentées plus haut. Ces apports doivent être complétés par des apports en fumures organiques.

    Maintien des édifices structuraux.

    Pour parvenir à éviter la dégradation de la porosité du sol et stabiliser les édifices structuraux, des apports organiques de 5 t/ha sont préconisés tous les trois ans. La pratique du labour notamment en billonnage cloisonné favorise l'infiltration de l'eau dans le sol et en améliore la porosité en profondeur (Aliou, 1993).

    Du point de vue des rendements cette gestion de la fertilité permet de passer pour le sorgho, d'une production quasi nulle après 10 ans (moins de 200 kg/ha de mil) sur des champs non fertilisés à une production constante de près de 3000 kg/ha pour des champs où une double fertilitsation minérale et organique est pratiquée (Sedogo, 1993). Dans ce dernier cas, l'apport organique était de 40 t/ha tous les 2 ans. Le mulch avec ou sans enfouissement donne des résultats intéressants, mais ce type d'apport organique ne permet pas de contrôler le pH du sol.

    Le climat de la région soudano-sahélienne est caractérisé par l'alternance entre une longue saison sèche et une courte saison des pluies. On constate que l'hygrométrie y est très faible onze mois sur douze mais que l'ensoleillement et les températures restent fortes toute l'année. L'évapotranspiration des plantes est donc forte (Aliou, 1993).

    Les précipitations.

    Les différents domaines climatiques sont d'après le régime des pluies définis de la façon suivante (Lal, 1987)

    Subdivisions climatiques

    Précipitations (mm)

    Durée de la saison des pluie (jours)

    Durée de la période de végétation (jours)

    Désert

    < 100

    0

     

    Très aride

    100-200

    0-30

    0

    Aride

    200-400

    60-90

    1-74

    Semi-aride

    400-600

    90-150

    75-119

    Sec subhumide

    600-800

    120-150

    120-179

    Subhumide

    800-1200

    150-210

    180-209

    Humide

    1200-1500

    240-300

    210-299

    Très humide

    >1500

    >300

    >300

    Le domaine soudano-sahélien est compris dans les subdivisions climatiques semi-aride et subhumide. La limite d'aridité pour l'élevage se situe aux environs d'un mois d'humidité. La limite d'aridité agronomique se situe aux environ de quatre mois d'humidité et la limite d'humidité des pâtures se situe aux environs de trois mois arides (Baldy et Stigter, 1993).

    A Ouagadougou, les valeurs extrêmes rencontrées pour la série pluviométrique de 1952 à 1987 sont de 1103 mm pour le maximum et 571 mm pour le minimum (Neuvy, 1991). Selon l'année le climat sera de type subhumide à sec subhumide et les mauvaises années la limite d'aridité ne sera pas dépassée.

    Cette pluviométrie se répartit, en principe, en quatre mois de sécheresse presque totale (de novembre à février), trois mois de faible pluviosité (octobre, mars et avril) et cinq mois de pluviosité moyenne à forte (de mai à septembre). L'intensité des précipitations et l'alternance de phases d'humectation et de dessication ont également une influence sur le sol et sa structure.

    L'intensité des pluies durant les cinq mois de saison des pluies est forte et peut atteindre voire dépasser des valeurs de 180 m/h pendant cinq minutes et 120 mm/h pendant une heure (Rodier, 1964; Mietton, 1988: cités par Baldy et Stigter, 1993). Ces intensités favorisent l'érosion des sols en l'absence de mesures de protection adaptées. Cette érosion atteint 50 à 500 kg/ha/an sous savane arborée en fonction des feux de brousse, 1000 à 15000 kg/hect/an sous culture et jusqu'à 25 à 35000 kg/ha/an sur sol nu (Roose, 1971; Roose, Birot, 1970; Roose, Piot, 1984: cités par Mainguet, 1994). Cette érosion représente respectivement 17% , 25% et 28% de perte annuelle pour l'azote, le phosphore et le potassium (Van der Pol F, 1991).

    On doit également tenir compte de l'irrégularité spatio-temporelle de ces précipitations (Alliou, 1993). Il arrive, notamment en début de saison des pluies, comme ce fut le cas en 1990, qu'après une série de pluies suffisante pour les semis, une courte période de sept à quinze jours de sécheresse suffise à détruire les plantules. Ce type de phénomène, s'il est étendu, peut s'accompagner d'un recul temporaire du front intertropical (Roose com. pers.). On enregistre alors une baisse globale de l'humidité atmosphérique, situation qui renforce le dessèchement du sol et des cultures.

    Ainsi, la seule mesure des précipitations annuelles ne suffit pas à déterminer les conditions climatiques qui ont eu lieu au cours d'une expérimentation. Pour une même subdivision climatique, la limite d'aridité agronomique pourra être atteinte par l'interruption momentanée de la saison des pluies. Cette situation peut se rencontrer à l'échelle d'un département ou être étendue à l'ensemble d'une zone climatique. Même pour les espèces végétales naturelles, on constate l'incidence de la pluviométrie sur le développement (Fournier, 1991).

    L'ensoleillement et les températures.

    La durée du jour varie entre 11 et 13 heures. La productivité primaire journalière est en principe supérieure dans la zone des savanes à celle de la zone des forêts humides. La radiation solaire annuelle y est de 30% supérieure et de 42% durant la période de végétation. La production journalière de matières sèches est, dans des conditions hydriques satisfaisantes, supérieure de 45% pour le maïs, 86% pour le coton, 63% pour le riz à ces régions plus humides (Kassam et Kowal cités dans Lal, 1987).

    Les températures mensuelles varient de façon saisonnière avec un maximum durant le mois de mai et un minimum durant le mois de décembre. L'intensité du rayonnement solaire (env. 2000 joules/cm2/jour) provoque un assèchement en profondeur des sols durant la saison sèche. Cette situation a pour conséquence de bloquer les activités biologiques dans le sol. Ce phénomène s'accompagne d'une baisse de l'hygrométrie en raison de l'apparition de l'Harmattan, vent sec provenant du désert, dont l'hygrométrie est comprise entre 10% et 20%.

    Le vent.

    Les mouvements atmosphériques sont caractérisés dans notre zone d'étude par la confrontation entre deux masses d'air, l'une étant constituée d'un air humide d'origine océanique et l'autre d'un air sec d'origine saharienne. Le passage d'une dominante à l'autre s'effectue deux fois dans l'année avec parfois un bref épisode humide dans le courant du mois de mars. Le vent, surtout durant la saison sèche, est un facteur d'érosion. Généralement les vents ne sont pas de forte intensité (3 m/sec) le maximum étant atteint aux environs de midi. Cependant il arrive en saison sèche (Harmattan) ou en saison humide (bourrasques qui précèdent les pluies) que leur intensité favorise un soulèvement de poussières important. Ces "tempêtes" de poussières, sont constituées de particules d'une taille comprise entre 0,2 et 50 microns qui peuvent créer des panaches de plus de 600 km de large sur 2500 km de long. L'entraînement de particule plus fines (0.06 à 0.08 microns) s'effectue sur de plus grandes distances (Mainguet, 1994).

    D'autre part, l'Harmattan accélère le dessèchement qui suit la saison des pluies. En une quinzaine de jours, on peut observer un assèchement complet du sol. Cette modification des conditions de vie provoque chez les plantes une fermeture journalière des stomates (D'at de St Foulc J com. pers.). Ceci provoque une augmentation importante de la température des organes foliaires en raison de l'intensité du rayonnement solaire et induit dans les cas extrêmes des dégâts importants sur les végétaux.

    2.2.3. Le facteur biologique.

    Sous les climats tropicaux, le facteur biologique revêt une importance particulière. En raison des températures élevées, le turn-over des éléments minéraux y est rapide. Mais ce turn-over dépend d'un jeu d'interactions complexes qui conduit à un transfert des éléments chimiques sous des formes variables qui ne sont pas toujours utiles à la plante (Anderson et Ingram, 1993). Les plantes qui sont les producteurs primaires de l'écosystème sol constituent la base de cette chaîne de réactions en fournissant une biomasse sous forme de racines, de feuilles, de tiges ou de fruits (secs ou charnus).

    Elles ont également une influence sur le microclimat. Ces effets de la plante sont bien connus et ont fait l'objet de mesures. Le rôle des microorganismes du sol est également largement étudié notamment dans le cadre de la fixation biologique de l'azote. Par contre, la faune des sols reste le parent pauvre de la recherche sous les tropiques. Seuls les éléments les plus évidents tels les fourmis, les termites et les annélides, ou les parasites des cultures ont été étudiés avec attention. Cet état des connaissances évolue rapidement grâce à la mise en place de programmes internationaux.

    L'action de la plante.

    Nous examinerons en premier lieu l'influence du couvert végétal sur ces équilibres. Cette action limite la dégradation de la fertilité des sols par trois facteurs:

    - Atténuation des variations climatiques. - Protection contre l'érosion.

    - Amélioration du stock organique et minéral.

    Atténuation des variations climatiques

    A l'échelle d'une parcelle cultivée, on observe des variations importantes du microclimat selon le type de culture et la densité du couvert ligneux. A cette échelle, la présence de quelques arbres par hectare suffit à réduire notablement la vitesse moyenne du vent en saison sèche ( Baldy et Stigter, 1993). La présence de végétaux limite également l'incidence du rayonnement solaire sur la température du sol (Charpentier et al., 1991). On observe une diminution de l'écart entre l'amplitude des températures maxima du jour par rapport aux maxima de la nuit. Les parcelles avec ombrage ont une variation des températures nycthémérales qui peut être inférieure de 8° C à celle d'une parcelle témoin sans plantes (Baldy et Stigter, 1993).

    Ce pouvoir tampon vis-à-vis du climat s'accompagne d'une modification des conditions d'humidité atmosphérique dans la zone sous influence. L'évaporation de l'eau du sol sera ainsi réduite.

    Ce constat a conduit à l'expérimentation de mises en culture particulières que l'on appellera les cultures multiples qui permettent d'effectuer des cultures malgré des conditions hydriques défavorables (Osseni et N'guessan, 1987). Mais cette augmentation de l'humidité atmosphérique n'a pas que des effets positifs, car elle risque également de faciliter le développement de la mouche tsé-tsé (Mainguet, 1994) ou de parasites pour les plantes cultivées.

    Protection contre l'érosion.

    L'action de la plante comme agent de lutte contre l'érosion hydrique est évidente. Elle diminue l'énergie cinétique des gouttes de pluie avant leur impact sur le sol et elle stabilise les particules solides par le biais de son réseau racinaire. La lutte contre la désertification utilise le couvert végétal (ligneux ou herbacé) comme agent de protection à long terme contre l'érosion hydrique (projet Keita de la F.A.O. au Niger, végétalisation des ouvrages anti-érosifs). Le suivi de projets de végétalisation d'ouvrages de lutte anti-érosive tels les cordons pierreux ou les diguettes montre l' intérêt pratique de cette technique (Alexandre, 1994).

    Comme nous l'avons vu, la plante permet de diminuer la vitesse du vent, ce qui limite l'érosion éolienne. Ce qui a conduit au développement de haies brise-vent dans les zones où les sols étaient les plus sensibles à ce type d'érosion. Mais ce type de protection augmente la température de la zone protégée jusqu'à une distance équivalente à 10 fois la hauteur de l'écran (Kaisin, 1994). Cette augmentation de température peut être fatale aux cultures sous influence de l'écran.

    Amélioration du stock organique et minéral.

    En zone de savane, la production de biomasse végétale est plus importante dans le sol sous forme de racines qu'en surface (Fournier, 1991).

    Cette biomasse qui est protégée de l'effet du feu permet le maintien d'un stock organique dans le sol. Il est complété par l'aptitude pour de nombreuses essences à fixer l'azote atmosphérique (Swift et al., 1994) et l'amélioration de l'accès aux nutriments par l'intermédiaire des mycorhizes. Du fait de l'amélioration des conditions micro-climatiques, la vie dans le sol pourra se développer, ce qui renforcera les mécanismes de biodégradation de la matière organique. La présence d'animaux permet une humification de la litière, ce qui facilite la constitution d'un stock organique (Kilbertus et al, 1980). La mise à disposition pour la faune des sols de débris végétaux frais (de qualité nutritive supérieure) permet un renforcement de leur population (Zaidi, 1985).

    Ce fait est à souligner car il met en évidence une différence qualitative nette entre les parties aériennes et les racines d'une part et entre le matériel végétal frais et le matériel végétal sec d'autre part. Il se crée ainsi une synergie entre la plante et la faune des sols dont chaque partie tire un bénéfice. L'exemple le plus connu de cette association se fait sous Faidherbia albida. Cet arbre perd ses feuilles durant la saison des pluies et met ainsi du matériel végétal frais à disposition des animaux du sol.

    Les plantes sont un facteur de protection de la fertilité des sols très important. Mais leur emploi dans ce but réclame des études scientifiques complémentaires. Leur utilisation dans le cadre d'un système cultivé reste sujet à controverse. Les questions de compétition dans l'alimentation hydrique par exemple ne sont pas totalement explicitées. La flore représente par sa biomasse et par sa diversité un indicateur de la régénération de la fertilité du milieu. La présence d'arbres assure une niche écologique particulière dans les milieux tropicaux secs. L'environnement racinaire offre une protection contre la dessication rapide des sols à la fin de la saison des pluies. De nombreuses espèces ont leur niche d'habitation préférentielle sous les arbres durant la saison sèche (Gillon et Gillon, 1979). C'est vers les organismes qui participent à la minéralisation des déchets organiques que nous allons maintenant porter notre attention.

    La faune du sol.

    D'une manière générale, les rôles des organismes qui vivent dans les sols sont, en l'état actuel des connaissances (Swift et al, 1994), les suivants:

    1) Ils sont à la base de la régulation du stockage et de la distribution des nutriments dans le système au travers des processus de décomposition, minéralisation et immobilisation.

    2) Ils orientent la synthèse et la distribution de la matière organique du sol (humus).

    3) Ils influencent la disponibilité de l'eau pour la plante en modifiant la structure et le régime hydrique du sol.

    4) Ils modifient l'état phytosanitaire par le biais des parasites et des pathogènes.

    Nous ne développerons ici que les éléments dont la macrofaune et la mésofaune du sol sont responsables.

    Description générale.

    Les données disponibles recueillies en milieu naturel de savane montrent une diminution globale des effectifs de la pédofaune du sud vers le nord de l'Afrique de l'ouest (Luxton, 1981). Si dans le cas des milieux sahéliens, cette situation peut s'expliquer en raison de la faible productivité du milieu, cela n'est pas directement interprétable en milieu soudano-sahélien.

    Si nous observons le cycle phénologique des plantes (Fournier, 1991), nous constatons que pour les herbacées, la saison des pluies est juste assez longue pour leur permettre d'effectuer un cycle. Pour les plantes ligneuses, mis à part Faidherbia albida, précédemment cité, les résidus foliaires ne se déposent qu'un mois après la fin de la saison des pluies. Ainsi, contrairement à ce qui se passe dans des écosystèmes tempérés ou tropicaux humides, la litière qui se dépose sur le sol en savane n'est pas ou peu composée de tissus végétaux frais. Seules les graines de plantes herbacées et les racines sont disponibles durant la saison des pluies. La qualité nutritionnelle (polysaccharides et protéines) de cette litière est plus faible (cf plus haut). En raison des conditions d'humidité qui règnent à la surface des sols, l'activité animale ne peut avoir lieu avant l'année suivante. Durant cette période, les fragments végétaux seront ainsi exposés à une

    dessiccation très importante associée à une exposition aux rayonnements solaires et à de fortes températures durant environ 6 mois. A ce phénomène viennent s'ajouter de brefs épisodes d'humidité qui se produiront jusqu'à l'arrivée définitive des pluies. Cette longue période d'exposition à des facteurs abiotiques permet une dégradation physique de la matière végétale (Anderson, 1973). Dès les premières pluies, une succession d'organismes va avoir lieu dans laquelle les bactéries dominent durant les sept premiers jours. Puis apparaissent les moisissures et enfin la faune des sols (Meyer et Maldague cit. dans Bachelier, 1978). Ainsi, non seulement la faune ne bénéficie pas du substrat nutritif le plus riche, mais en plus une partie variable de ce substrat aura été minéralisée avant sa période d'activité.

    La mise en culture d'un sol renforce, comme nous l'avons vu, l'effet du climat réduisant d'autant les périodes d'activité faunique et favorisant celles des bactéries. On constate d'ailleurs une diminution rapide des effectifs et de la diversité des populations animales qui habitent ces sols (Dangerfield, 1989; Lavelle et Pashanasi, 1989). Les animaux du sol exercent trois actions principales: une action physique (influence sur la structure et le régime hydrique), une action biochimique (stockage et distribution de nutriments) et une action régulatrice (synthèse et redistribution de la matière organique).

    Action physique.

    Cette action se divise en trois types précis qui dépendent des espèces impliquées: - Amélioration de la porosité des sols.

    Les termites, les fourmis, les millipèdes, les larves d'insectes sont entre autres des agents de la modification de la porosité des sols. Les terriers qui sont creusés par ces organismes améliorent très nettement la vitesse d'infiltration des eaux de pluie car ils créent des pores de dimension importante (diamètre supérieur au mm) (Bachelier, 1978; Valentin et Casenave, 1987).

    - Transport des particules minérales.

    Les termites et les fourmis sont capables de déplacer des quantités de minéraux importantes. Afin de consolider leurs constructions, certaines espèces de termites et de fourmis ramènent en surface les minéraux argileux et les sables fins (Lal, 1987). Les vers de terre participent également à la réorganisation des sols en libérant progressivement sous forme de turricules ou de pellets des agglomérats où sont intimement mélangées particules minérales et fractions organiques

    - Fragmentation de la matière organique.

    Les animaux qui composent la faune des sols ne sont pas tous aptes à digérer la cellulose. Après ingestion des tissus végétaux une partie importante sera restituée au milieu. Les bactéries et les champignons disposent ainsi de ressources nutritives accessibles (Luxton, 1982).

    Action biochimique.

    La sécrétion de mucus par les vers de terre, le passage des aliments dans les tubes digestifs des animaux, libèrent dans le milieu des composés organiques particuliers. Ces composés vont orienter le métabolisme des bactéries et champignons (Cooke et Rayner, 1981).

    Les animaux morts, en fonction de leur composition protéinique, peuvent orienter les cycles de la dégradation de la matière organique soit vers la minéralisation soit vers l'humification. Le cycle est orienté vers l'humification si la composition protéinique des cadavres présente une proportion d'acides aminés qui inclut du soufre (Bachelier, 1972).

    Action régulatrice.

    Par la prédation et la consommation de bactéries et de champignons, ainsi que par le stockage de carbone et de protéines sous forme de biomasse, la faune du sol exerce une action régulatrice sur les activités de minéralisation des microorganismes décomposeurs (Kilbertus et al.1980). Ils contribuent également, comme le font par exemple les fourmis fourragères, à la dissémination des graines dans le sol.

    La création de niches écologiques particulières dans les terriers et les termitières permet de stabiliser les conditions physico-chimiques de l'activité bactérienne et fongique (Arshad et al, 1982). Cet ensemble de faits nous conduit à penser que la disparition de la faune des sols est le premier paramètre touché par la mise en culture. Cette forte sensibilité est intéressante à utiliser pour l'analyse de l'impact sur la fertilité de l'irrigation par des eaux usées.

    Nous avons vu que les facteurs naturels de la fertilité des sols dans la zone soudano-sahélienne ne peuvent pas réellement être dissociés. Leurs interactions modifient dans des proportions importantes la fertilité des sols. Deux problèmes majeurs sont à retenir, le problème de l'alimentation hydrique des plantes et le problème du fonctionnement des cycles biogéochimiques. Concernant les cycles biogéochimiques, il ne semble pas que dans un écosystème tropical sec, une synchronisation entre la libération des éléments minéraux dans le milieu par la minéralisation des matières organiques et la croissance des plantes soit observée (Myers et al, 1993). La satisfaction des besoins en eau semble être le besoin principal à satisfaire. La mise en culture a comme nous l'avons présenté un effet important sur la porosité du sol, ce qui nécessite des amendements et des travaux culturaux particuliers.

    Or, avec l'homme, c'est un paramètre économique qui va intervenir dans son comportement vis-à-vis de la gestion de la fertilité. Le paysan prend en considération le risque agroclimatique (Forest et al, 1991) avant d'investir dans une technique nouvelle.

    A cela, s'ajoutent des problèmes d'ordre sanitaire (Tiffen, 1993) et social selon l'aspect foncier, qui limitent également les possibilités d'innovation. Suivant les types de cultures, leur localisation topographique et leur environnement (urbain ou campagnard) différents types de gestion de la fertilité seront pratiqués.

    Chapitre 3. Les techniques culturales et la gestion de la fertilité.

    En raison de l'augmentation démographique, les techniques traditionnelles de gestion de la fertilité ne peuvent être perpétuées. Pour la même raison, la gestion foncière de l'espace rural est rendue plus difficile. L'équipement rural occupe une place importante dans les programmes de développement. La construction de barrages de dimensions variables et d'ouvrages anti-érosifs réclame une définition des projets adaptée à chaque situation. Il ne semble pas qu'il existe de solutions "miracles" mais plutôt des solutions cohérentes définies à la fois par les techniciens et les futurs usagers.

    3.1. Présentation générale des techniques culturales.

    La gestion traditionnelle de la fertilité des sols consiste à observer des temps de jachère importants (7 à 20 ans) qui permettent une régénération naturelle des sols. Le défrichement s'effectue par essartage. Les arbres fruitiers notamment le Karité sont laissés en place.

    Les cultures sont effectuées en semis direct dans des poquets et le contrôle des adventices est assuré par un sarclage qui permet également l'élimination des croûtes superficielles (Casenave et Valentin, 1989). Si le temps de jachère est respecté, la régénération du stock de matières organiques humifiées s'effectue totalement. Les rendements obtenus durant les trois premières années après la remise en culture sont élevés (Chabalier cité par Piéri, 1989). Malheureusement la densité de population empêche ce type de pratique. Le couvert végétal subit en conséquence la forte influence de l'homme en raison des pratiques culturales (défrichement, feu, élevage) ou simplement par son utilisation directe comme source de combustible (déboisement). On observe une transformation de la composition floristique des zones ainsi modifiées. Cette situation est considérée comme l'une des causes majeures de la tendance à la dégradation des sols (Mainguet, 1994) et correspond à une modification rapide de la nature des apports biochimiques dont dépend le turn-over. La dégradation des sols peut alors conduire à des surfaces stériles tels les Zippélés (Kaboré, 1994).

    Cependant, cette technique traditionnelle n'est mise en pratique que sur les champs de brousse qui occupent les surfaces les plus importantes. C'est pour cette raison qu'elle est la plus fréquemment présentée et critiquée.

    L'apparition de possibilités d'effectuer des cultures toute l'année, le développement des méthodes de gestion rationnelles de la matière organique (compostage) et les difficultés de mise en oeuvre des ouvrages anti-érosifs ont permis de mieux comprendre l'organisation d'un village.

    3.1.1. Le terroir villageois.

    Le terroir villageois se décompose en deux zones cultivées caractérisées par le degré d'intensification des cultures ( Berton, 1988). La taille moyenne des exploitations est de 3.5 ha. Selon la proximité ou la situation topographique, le mode de gestion de la fertilité des sols est différent.

    - zones de culture intensives (jardins et champs de cases). - zones de cultures extensives (champs de brousse).

    Il faut ajouter à ces zones, les zones de cheminement, de friches, les "bois sacrés". Ainsi, sur un terroir villageois tout l'espace est utilisé soit sous forme d'espaces mis en culture, soit sous forme de jachères ou de zones de parcours. Les bas-fonds ont, suivant les villages, une attribution variable comme zone de parcours, lieu d'abreuvement du bétail, champs de culture de sécurité, zone de riziculture ou de jardinage.

    Les outils de culture sont principalement des houes de type traditionnel (Daba) et des machettes.

    Le développement de la pratique du labour ou de techniques plus lourdes (billonnage cloisonné) s'observe surtout dans le sud du pays. Malgré la volonté d'établir un droit foncier d'origine étatique, les règles coutumières sont généralement les plus respectées. Elles se basent sur le principe (en pays Mossi) que la terre appartient à celui qui la travaille. Trois modes d'acquisition de la terre sont observés, soit par héritage, soit par dons temporaires ou acquisitions "de fait". Un chef de terre se charge de la distribution des terres. Ce droit foncier aux règles variables se heurte dans son application à la pression démographique. Il en résulte un morcellement parcellaire de plus en plus important qui diminue progressivement l'espace cultivable familial. Il impose également des contraintes qui touchent autant les nouveaux arrivants que les natifs du village. Ces contraintes ont une incidence sur le mode de gestion de la fertilité car elles concernent directement la responsabilité du cultivateur vis-à-vis de la terre. Les terres les plus éloignées du village seront attribuées aux nouveaux arrivants. Ils les exploiteront de façon extensive, afin d'occuper le maximum de surface. Ils y gagneront un droit d'usage sur les surfaces ainsi conquises. Car l'octroi d'un droit d'usage d'un champ de brousse est temporaire. Si l'agriculteur à qui l'on a «prêté» le champ pratique une fertilisation et améliore ainsi le rendement de sa terre, il prend le risque de se voir retirer un droit d'usage au bénéfice d'une autre personne (Faho, 1995). Il a donc intérêt à disposer du maximum de surface pour compenser l'absence de fertilisation.

    Pour les membres de la communauté, l'obligation de participer aux travaux collectifs des champs de la "grande famille", parfois dénommés les "champs du père", contribue à diminuer l'intérêt direct de celui qui cultive ces parcelles. Le bénéfice de la récolte de ce type de parcelle est géré par le chef de famille. En conséquence la motivation de ceux qui sont obligés d'effectuer les travaux culturaux sera faible et le champ mal entretenu voire abandonné.

    Ces considérations générales nous montrent la complexité de l'interprétation exacte des raisons de la baisse de fertilité d'un champ. Les techniques culturales ne sont que le reflet des inerties provoquées par les problèmes d'ordre sociologique. Les champs de case dont la propriété est clairement définie sont l'objet d'une attention particulière. Leur proximité permet une gestion de la fertilité par le biais de techniques variables (fertilisant organique d'origine animale, cendres et autres déchets liés à l'activité humaine, protection contre l'érosion par protection végétale)qui permet d'obtenir de bons rendements. Mais leur surface est limitée. Le droit de pacage est également source de conflit inter-communautaire mais également de lutte de pouvoir à l'intérieur du village.

    Un cas particulier est constitué par les itinéraires qui conduisent à l'aménagement des bas-fonds.
    Généralement les sols de bas-fonds présentent des caractéristiques minérales (présence d'argiles

    gonflantes) qui les rendent plus résistants à la mise en culture. Ils sont traditionnellement utilisés pour les cultures de sécurité qui permettent d'assurer l'alimentation de la communauté lors des sécheresses les plus fortes. L'aménagement des bas-fonds (construction d'ouvrages permettant la rétention temporaire ou permanente de l'eau) induit une modification des habitudes et change le statut foncier de la zone concernée. Les possibilités d'irriguer obligent les acteurs économiques à définir au préalable le mode de répartition des terres afin de garantir la réalisation des objectifs d'un projet à cette échelle.

    Plus le peuplement est important, plus les aménagements effectués risquent d'être abandonnés pour des raisons purement foncières (Berton, 1988). Mais dans la mesure où les questions foncières sont résolues, on observe très rapidement l'adoption de techniques de cultures" modernes".

    3.1.2. Cultures irriguées.

    Les cultures irriguées réclament généralement des investissements importants (construction de barrages etc...). Ces aménagements se sont beaucoup développés et permettent la diversification des cultures (agrumes et autres cultures fruitières, cannes à sucre, maraîchage, riziculture, horticulture).

    Contrairement aux cultures auto-consommées, ces cultures de rente bénéficient fréquemment d'un système de crédit et d'un réseau commercial. Ces mesures incitent le cultivateur à effectuer des investissements qui lui permettront "à coup sur" d'améliorer ses revenus.Ces investissements sont importants pour le paysan mais lui permettront d'obtenir de l'argent liquide.

    Ces investissements concernent l'équipement (seau et arrosoirs), l'achat de semences, l'achat de fertilisants (organiques et minéraux). Les marges du paysan sont importantes atteignant 300% (Naef, 1992). On observe dans le cas du barrage de Loumbila qui alimente la ville de Ouagadougou une augmentation préoccupante de l'eutrophisation liée semble-t-il aux fertilisants. L'irrigation et la pratique du maraîchage sont des techniques culturales qui favorisent l'assimilation des méthodes agronomiques de gestion de la fertilité. La diminution du risque climatique, la gestion rationnelle du foncier, et l'accès à l'argent liquide en sont les causes principales.

    3.1.3. Irrigation par des eaux usées.

    L'irrigation par des eaux usées est un cas particulier de culture irriguée. Aspect foncier.

    Aucun aménagement des zones d'irrigation par les eaux usées n'est effectué au préalable. Ce sont les maraîchers qui construisent individuellement des ouvrages d'amenée d'eau ou de puisards selon leurs besoins. En conséquence, le mode de distribution des terres ne semble pas contrôlé par l'état et dépend de facteurs qui nous ont échappé jusqu'à maintenant. On constate cependant que l'insécurité foncière doit toucher les exploitants. On observe simplement un changement partiel des exploitants d'une année à l'autre. Aucune culture pérenne telle que celle d'arbres fruitiers (bananes, goyaves, papayes principalement), culture à fortes marges bénéficiaires, n'a été observée sur un site de réutilisation des eaux usées. Le problème foncier tel que présenté plus haut dans le cadre du terroir garde ici la même importance.

    Le problème de la qualité de l'eau et de son incidence sur la production est un facteur différent que l'on ne rencontre pas dans les autres situations de culture. En zone urbaine, les avantages financiers qui peuvent être retirés de la pratique du maraîchage encouragent la mise à profit de toutes les ressources en eau (pour ne pas dire n'importe lesquelles!). Dans certains cas, la pollution des eaux est tellement élevée que les cultures en meurent (Haladou, 1991). Quant à l'aspect épidémiologique de la réutilisation des eaux usées, une étude est en cours qui permettra d'évaluer ce risque (Cissé G. com. pers.) Ce cas particulier est lié à la pollution par du chrome provenant d'effluents de tannerie.

    Aspect technique.

    La dimension des parcelles cultivées dépend des techniques disponibles pour l'irrigation.

    Sur la plupart des sites observés, ces parcelles sont de petites dimensions (env 8 m/2 m), car elles sont irriguées manuellement (aspersion par un arrosoir). La fertilisation (organique et minérale) y est pratiquée comme l'ensemble des techniques utilisées pour le maraîchage. A l'arrivée des pluies, les cultures maraîchères sont abandonnées au profit de cultures céréalières. En l'absence de pollutions extrêmes ( effluents d'origine industrielle), la richesse potentielle des eaux usées devrait permettre de diminuer voire de supprimer les apports de fertilisants. C'est cet aspect qui nous intéresse en premier lieu.

    3.2. Conclusion: problématique et objectifs de la recherche.

    La définition de l'impact sur la fertilité de la pratique de l'irrigation par des eaux usées va nécessiter la mesure de la sensibilité d'un sol à la mise en culture. D'autre part, les caractéristiques du milieu dans lequel s'effectue ce travail doivent conduire à une grande prudence dans la définition des objectifs.

    Enfin, étant donné qu'il s'agit d'établir l'efficience d'une pratique culturale, il est nécessaire de prendre en considération la notion de développement durable.

    " Un système de culture est durable s'il permet un niveau de production acceptable qui ne montre pas de variations importantes d'un cycle cultural à l'autre et qui est résistant, dans un régime de fluctuation normal, aux stress et aux perturbations sur un long terme "(traduit de Swift et al., 1994).

    Ces trois considérations vont avoir pour conséquences de diriger la recherche dans trois directions :

    - une direction vers l'écologie (caractéristiques du milieu).

    - une direction vers la pédologie (sensibilité du sol aux pratiques culturales). - une direction vers l'agronomie ( développement durable).

    La définition des objectifs va restreindre le champ des investigations.

    3.2.1. Définition des objectifs de la recherche.

    On posera au préalable un cadre précis à l'étude qui est celui imposé par les contraintes locales et scientifiques. Les contraintes locales sont composées du contexte économique dans lequel s'effectue le travail et du contexte écologique. Les contraintes scientifiques sont d'ordre pratique, et concernent la définition des moyens disponibles pour analyser avec précision les effets sur le sol d'une fertilisation organo-minérale particulière qui est constituée par les eaux usées. En conséquence, deux objectifs sont à atteindre, un objectif à caractère fondamental qui découle des lacunes de connaissances fondamentales dans la zone d'étude, et un objectif appliqué qui vise à mettre à disposition le plus rapidement possible une technique culturale.

    Un objectif à caractère fondamental.

    Le premier obstacle à la définition de la fertilité du milieu est l'absence d'une indication précise sur son état de stabilité. On recherchera au travers d'un indicateur d'origine biologique à évaluer la direction prise par la fertilité du milieu sous l'influence de l'irrigation par des eaux usées. Cette indication sera testée par rapport à d'autres indicateurs reconnus, à savoir le taux de matières organiques sous deux formes (carbone total et substances humiques) et la capacité d'échange cationique. Pour atteindre cet objectif, une expérimentation en conditions contrôlées est nécessaire.

    Un objectif à caractère appliqué.

    Avec le concept de développement durable, nous avons approché le problème de l'évaluation de l'efficience agronomique d'une technique culturale. Notre objectif sera dans ce cadre d'établir la faisabilité de l'irrigation par des eaux usées en terme de production végétale. Une expérimentation aux champs en conditions réelles c'est-à-dire avec les méthodes en usage localement est nécessaire. Une seule des pratiques ne sera pas respectée, c'est celle de la fertilisation minérale et organique.

    Ces deux objectifs seront atteints par la vérification des hypothèses qui suivent. Hypothèses de recherche.

    L'ensemble de la présentation a mis en évidence l'impact des pratiques culturales sur l'évolution du stock organique des sols. Il faut par une première hypothèse déterminer dans quelle mesure les eaux usées peuvent avoir une influence sur ce paramètre.

    Nous énoncerons donc la première hypothèse de la façon suivante: l'irrigation par des eaux usées permet le maintien d'un stock de matières organiques suffisant dans les sols.

    La mise en culture a un effet dépresseur sur les populations animales, nous allons en conséquence vérifier si la pratique de la réutilisation des eaux usées permet le maintien des populations animales dans les sols.

    Nous énoncerons donc la deuxième hypothèse de la façon suivante: l'irrigation par des eaux usées favorise le développement et le maintien des populations animales endogées.

    Etant donné la nature des eaux usées et leur composition chimique, l'effet fertilisant doit être mieux compris. Si les deux premières hypothèses sont vérifiées, nous pouvons raisonnablement penser qu'en favorisant l'interaction entre les eaux usées et la faune des sols quel que soit sont mécanisme, nous permettrons une amélioration des conditions qui conduisent à la régénération de la fertilité des sols.

    Nous énoncerons donc la troisième hypothèse de la façon suivante: le développement animal dans le sol peut être considéré comme une indication de la conservation des sols irrigués par des eaux usées à moyen terme et par conséquent toute technique complémentaire favorisant ce développement permet d'augmenter la résistance des sols à la mise en culture.

    Deuxième partie:
    Démarche , approche, méthodes.

    Chapitre 1. Démarche expérimentale.

    1.1. Principes.

    Nous partons du postulat que si l'irrigation par des eaux usées ne présente pas de danger pour la fertilité du sol, elle doit être recyclée dans les cycles écologiques du sol (Elliot, Stevenson, 1977). Pour respecter des conditions d'application cette pratique doit également être efficace en terme de production végétale. Nous devons par conséquent disposer d'un référentiel nous permettant d'évaluer l'impact des eaux usées sur les cycles écologiques du sol. D'autre part, un témoin pour la comparaison des résultats de la production végétale est à prévoir. En effet, comme le souligne Piery, il n'existe pas de parallelisme étroit entre l'effondrement des rendements et l'évolution des caractéristiques mesurables chimiques et physiques de la fertilité.

    « Ainsi, alors que les caractères mesurables (ou le plus souvent mesurés) des sols évoluent régulièrement, les rendements suivent une évolution qui paraît discontinue, marquée après 10 ou 15 ans de culture, par un seuil d'effodrement dont les causes ne relèvent pas uniquement du seuil d'appauvrissement organique et minéral de ces sols. » (Piéri,1989)

    Pour parvenir à effectuer ces deux vérifications dans le temps disponible, nous allons utiliser deux référentiels. Ces deux référentiels seront aménagés sur un site expérimental de type agronomique.

    Par la littérature, il nous est possible de définir le mode d'aménagement du site expérimental qui permet d'effectuer ces deux analyses.

    Le premier principe est le suivant:

    La mise en friche d'une partie du site peut être considérée comme référentiel pour la mesure d'une évolution des paramètres de la fertilité dans le sens d'une restauration de celle-ci (César et Coulibaly, 1991) dans le respect des cycles écologiques du sol.

    Ces espaces laissés en friche nous permettront d'évaluer au cours du temps l'évolution des différents paramètres choisis pour l'évolution de la fertilité des sols.

    Deuxième principe:

    La mise en culture d'un sol en climat tropical sec a une influence négative sur la fertilité du milieu. En l'absence d'amendement la productivité végétale diminue après trois cycles culturaux.

    Nous allons en conséquence utiliser comme témoin pour la mesure de la production végétale des parcelles cultivées et irriguées. La qualité des eaux qui serviront à l'irrigation sur ces témoins doit respecter le second principe. Nous utilisons pour cela des eaux de surface provenant du barrage de Loumbila dont la concentration en matière organique et minérale peut être considérée comme ne pouvant apporter d'éléments fertilisants aux sols.

    Nous déterminerons par comparaison entre les deux référentiels ainsi disponibles l'efficacité de la
    réutilisation des eaux usées en tant que technique de gestion de la fertilité du milieu (cf: schéma

    1). Cette détermination se fait par l'intermédiaire d'indicateurs que nous sélectionnons en fonction de leur sensibilité vis-à-vis des traitements effectués sur les deux référentiels.

    Pour limiter l'influence des apports organiques au sol par le biais de la biomasse végétale épigée, celle-ci est exportée après chaque cycle de végétation.

    Deux types d'analyses sont proposés. Le premier établit les tendances évolutives pour chaque paramètre entre un état initial et un état final. L'impact à moyen terme des techniques mises en place sur la fertilité du milieu est ainsi déterminé. Le second utilise une comparaison entre traitements au cours du temps. On en déduit l'influence des facteurs saisonniers, des techniques culturales employées et de la variation de la qualité des eaux pendant un cycle annuel.

    Friche

    Etat final

    Milieu naturel

    Etat initial

    Milieu cultivé

    Culture
    irriguée

    Milieu irrigué eaux usées

    Fertilité de référence

    Fertilité minimale

    ?

    Schéma 1: Principes fondamentaux.

    1.2.Démarche expérimentale.

    Le dispositif expérimental est de type agronomique (production végétale). Trois types de traitements sont testés, soit un traitement témoin, un traitement eaux usées (filière lagunage) et un second traitement eaux usées (filière lit bactérien). Le même type de cultures sur l'ensemble des parcelles est effectué. Nous quantifions les apports organiques des eaux en effectuant l'analyse de leur composition organique. Sur les espaces interparcellaires, nous laissons la végétation spontanée se développer naturellement durant la saison des pluies.

    On aborde la définition de la fertilité du milieu en procédant par étapes. Dans une première étape, on vérifie l'effet de l'irigation par des eaux usées sur la production végétale en condition cultivée. Dans une deuxième étape, on analyse la production végétale en condition non cultivée. Dans une troisième étape, on détermine l'impact des eaux usées sur la fertilité du milieu.

    Trois niveaux de perception de l'impact des eaux usées sur la fertilité se succèdent.

    Le premier est associé à l'évolution d'un milieu cultivé dont les caractéristiques sont clairement définies (cf. Première partie), on en déduit l'impact des eaux usées sur les indicateurs de la fertilité du milieu en fonction de la production végétale.

    Le second niveau permet avec les mêmes indicateurs de mesurer l'évolution d'un milieu non perturbé et de la comparer avec celle des milieux cultivés. On en déduit quels sont les indicateurs de la fertilité naturelle du milieu.

    Le troisième niveau de perception permet de déterminer l'action des eaux usées dans des conditions optimisées de mise en valeur. On en déduit l'impact des eaux usées sur la fertilité à moyen terme du milieu.

    Première étape: Analyse de la fertilité du milieu cultivé.

    L'irrigation par des eaux usées est considérée comme l'application d'une fertilisation organominérale.Après trois cycles culturaux, la production végétale sur le témoin doit s'effondrer. Sur le traitement elle doit se maintenir. Les indicateurs de fertilité doivent suivre la même progression que celle observée pour la production végétale. On en déduit l'influence de la mise en culture sur la fertilité des sols par la mise en évidence des indicateurs les plus représentatifs de chaque condition de culture. Nous opérons ainsi une première sélection des indicateurs de fertilité.

    Dans la première partie nous avons mis en évidence les composantes de la fertilité des milieux cultivés. La première de ces composantes qui peut être modifiée par la mise en culture est le taux de matière organique des sols. Celui-ci est l'objet de notre première hypothèse. Si sur les parcelles irriguées par des eaux usées, le taux de matière organique est supérieur à celui des parcelles témoins, nous aurons vérifié notre première hypothèse. L'analyse entre l'état initial et l'état final observé nous permet d'estimer à moyen terme l'effet de l'amélioration.

    Deuxième étape: Estimation de la fertilité naturelle du milieu.

    L'exportation annuelle des résidus culturaux a été effectuée pour au moins trois cycles de végétation sur les espaces interparcellaires laissés en friche. Durant la saison des pluies la végétation spontanée se développe sur les parcelles comme sur les espaces interparcellaires. La production végétale naturelle sur l'ensemble du dispositif est estimée à la fin de la saison des pluies. L'évolution des indicateurs sur les friches est comparée avec celle mesurée sur les parcelles cultivées. Nous en déduisons les différences et les similitudes entre une friche et une zone cultivée.

    C'est à ce second niveau de perception que nous évaluons la valeur indicatrice des populations animales. L'indication obtenue avec cet indicateur est-elle la même quel que soit le mode de gestion de la fertilité ? Si cette similitude n'est pas observée, l'indicateur faune des sols ne peut être utilisé pour généraliser les résultats. Il nous faudra rechercher parmi les autres indicateurs choisis ceux qui sont les plus représentatifs de la fertilité naturelle. Dans le cas contraire, la faune des sols est un indicateur de leur fertilité naturelle. La seconde hypothèse de travail est vérifiée. Une évaluation de l'impact des eaux usées sur les cycles écologiques du sol par l'intermédiaire de cet indicateur est possible.

    Troisième étape: Impact des eaux usées sur la pédofaune.

    Sachant que la mise en culture a une influence négative sur la faune des sols, nous limitons les travaux culturaux. Nous observons l'évolution des indicateurs sélectionnés en utilisant cette fois la faune des sols comme indicateur principal. On en déduit l'influence des eaux usées sur la faune des sols. Si les eaux usées diminuent les effectifs des populations édaphiques, elles sont considérées comme ayant une action négative sur les cycles écologiques du sol, quelle que soit la production végétale observée. Dans le cas contraire, l'irrigation par des eaux usées est une pratique culturale qui respecte les mécanismes naturelles de régénération de la fertilité des sols en climat tropical sec.

    Cette démarche expérimentale est représentée sur le schéma 2.

    Schéma 2: Démarche expérimentale.

    Référence milieu naturel

     

    milieu cult ivé irrigué

    Evolution t em porelle de la fert ilité chimique

    Evolution t em porelle

    de la fertilité biologique

    Fertilit é milieu Fertilité milieu

    eaux usées eau barrage

    Fertilit é témoin f riche

    Niveau 3

    Niveau 1

    Niveau 2

    Comparaisons

    Témoin friche

    Expériment at ion

    Trait é eaux usées

    Témoin

    eau barrage

    En complément de notre travail, le C.R.E.P.A.1 effectue des estimations de la composition minérale des eaux usées et des eaux de barrage. Il assure également un suivi de la migration de ces éléments minéraux dans le sol par prélèvement de la solution du sol. Le projet assure ainsi du point de vue environnemental la surveillance des risques de dégradation des sols et de pollution des nappes par les eaux usées. La surveillance des risques sanitaires est effectuée au travers de l'analyse et de la détermination de la composition planctonique des eaux usées. Les risques épidémiologiques de transmisssion de maladies sont contrôlés par M. Cissé dans le cadre d'un autre travail de doctorat.

    1CREPA: centre régional pour l'eau potable et l'assainissement à faible coût.

    1.3. Conditions expérimentales particulières.

    La définition du concept de milieu dans le cadre de ce travail a été précisée dans la première partie. Le site expérimental est considéré comme une station dont nous allons renforcer les particularités.

    Cette station doit être représentative des techniques culturales en usage du point de vue des travaux du sol et de la végétation cultivée. Elle doit également disposer de caractéristiques écologiques qui lui permettent de remplir sa double fonction (milieu naturel et milieu cultivé) pour la vérification de la troisième hypothèse. Nous avons ainsi à prévoir les conditions de réalisation les plus adaptées pour vérifier nos hypothèses. Voici les aménagements prévus dans le protocole expérimental.

    Les agriculteurs qui pratiqueront la réutilisation des eaux usées sur le site devront respecter deux impératifs qui garantissent la qualité des analyses. Ces impératifs sont l'interdiction d'utiliser des fertilisants de complément et le respect de la mise en défens des friches.

    La capacité de régénération du milieu dépend de la possibilité de développement spontané du couvert végétal. La présence d'animaux dans le sol dépend non seulement de ce couvert végétal (ligneux ou herbacé) mais également des travaux culturaux effectués avant l'expérimentation. La présence d'arbres qui servent de refuge aux populations animales est l'un des facteurs de variation des mesures . Nous ne connaissons pas en détail le passé cultural du dispositif expérimental. Pour nous assurer la présence de la faune des sols sur le site, nous préservons le couvert ligneux existant. Ce couvert constitue une niche écologique qui permet à certaines espèces de la faune de résister à la période sèche (Gillon et Gillon, 1979). D'autre part, le maintien d'espaces interparcellaires en friche va permettre la colonisation des parcelles cultivées par la faune des sols (Dangerfield, 1990).

    1.4. Avantages et limites de la démarche expérimentale retenue.

    En utilisant un dispositif expérimental de type agronomique, il nous est possible de comparer l'évolution de la fertilité du milieu avec celle enregistrée dans d'autres sites. Nous pouvons en conséquence nous permettre d'appliquer les principes proposés. Cependant, l'utilisation des espaces interparcellaires comme référentiel naturel comporte des avantages et des inconvénients. Les avantages ont été présentés plus haut. Les inconvénients sont les risques d'effets de bordure, associés à une colonisation du milieu dont la cause serait l'amélioration des conditions hydriques. L'utilisation de la faune comme indicateur de la fertilité risque de nous amener à confondre les causes et les effets (Dunger et Fiedler, 1989). Admettons que les eaux usées aient une valeur fertilisante basée uniquement sur leur composition minérale. Dans ce cas, la croissance végétale s'effectue normalement comme dans des conditions de cultures hors sol et le développement de la faune suit celui de la production végétale. Cette dépendance de la faune vis-à-vis de la production végétale limite la portée de l'expérimentation. Par la comparaison des résultats obtenus sur les

    parcelles cultivées avec ceux obtenus dans les espaces interparcellaires, le problème de l'interprétation des résultats se réduit. Sans connaître le mécanisme qui permet la conservation de la fertilité du milieu naturel, il nous est possible de discriminer les mécanismes responsables de chacune des situations. Ce mode d'expérimentation qui utilise des principes généraux risque de nous conduire à des situations imprévisibles et ininterprétables. L'avantage qu'il y a dans les milieux tropicaux secs est la rapidité de leur réaction à la mise en culture. Une expérimentation du type de celle que nous proposons est difficilement envisageable en climat tempéré, les temps de réaction des systèmes étant infiniment plus longs. Il existe toutefois un risque de ne pouvoir obtenir de réponse dans les délais imposés.

    L'étude des mécanismes qui orientent le cycle de la matière organique dans le sol n'a pas été envisagé pour cette étude. En utilisant le mode de régénération de la fertilité d'un sol en conditions naturelles comme critère de référence nous obtenons une vision globale de l'impact des eaux usées sur le milieu. Cette perception permet de concilier les besoins de rigueur de l'analyse scientifique aux réalités locales. A cette fin nous organisons de façon définitive l'ensemble du site expérimental. Nous préparons ainsi le site pour qu'après trois saisons des pluies, nous puissions effectuer un inventaire général de l'évolution des paramètres. Sur le site, d'autres phénomènes peuvent être observés.

    D'un point de vue sanitaire, par exemple, on s'assure, dans des conditions d'observations rigoureuses, de la façon dont est manipulé l'effluent par les agriculteurs. L'eau, même propre, fait courir de nombreux risques à son utilisateur en climat tropical, ce dont tout projet d'irrigation doit tenir compte (Birley, 1993). En reproduisant les conditions réelles, il est possible d'observer les conséquences de l'aménagement sur des points qui ne sont pas nécessairement perceptibles lors de l'élaboration d'un projet.

    Les options choisies nécessitent un suivi régulier et quasi permanent, que ce soit pour s'assurer du respect des conditions imposées ou de la qualité des données recueillies. Le chercheur se trouve confronté à une situation dans laquelle il doit maîtriser au mieux les événements aléatoires puisque ceux-ci sont considérés comme partie intégrante de l'expérimentation. Ces événements aléatoires peuvent être d'origine humaine ou naturelle. Le risque de multiplier les analyses et les paramètres de mesures sans pouvoir en tirer une interprétation valable existe dans ce type de démarche. Le choix de paramètres de mesures et de techniques d'échantillonnages adaptés est l'une des garanties disponibles pour pallier à ce risque. Le fait de disposer de travaux de synthèse récents qui traitent de la fertilité des sols tropicaux en zone semiaride est une autre garantie.

    Chapitre 2. Méthodes.

    Pour comparer les résultats obtenus dans ce travail avec les résultats présentés dans d'autres travaux, nous avons sélectionné des méthodes adaptées. Comme il n'est pas question ici d'analyser les mécanismes précis auxquels participent les eaux usées, il n'est pas utile de procéder à des essais en laboratoire. Le mode d'organisation du personnel chargé de l'exploitation des parcelles cultivées et le matériel disponible pour effectuer les analyses sont les autres facteurs qui ont conditionné ces orientations méthodologiques. Les analyses chimiques sont ainsi effectuées au laboratoire de l'institut de pédologie de l'E.P.F.L. à Lausanne selon des protocoles standards. Le choix des cultures est effectué en partie en fonction des besoins des agriculteurs. Les méthodes qui permettent de mesurer les paramètres biologiques sont mises en pratique sur place. Bien que classiques, elles sont parfois modifiées en raison des caractéristiques du milieu et des conditions expérimentales. La variation spatiale des mesures est considérée comme un facteur inhérent au milieu qui ne doit pas être masqué. Il en découle un mode d'échantillonnage adapté.

    2.1. Choix des paramètres.

    Pour le sol, les facteurs de fertilité seront étudiés dans la zone où les variations sont les plus fortes et les plus rapides lors d'une mise en culture. Cette zone se trouve dans les 20 premiers centimètres de sol (Piéri, 1989). La profondeur optimale pour observer plus spécifiquement la variation du stock organique se situe dans les 10 premiers centimètres (Feller, 1994). C'est à cette profondeur que nous effectuerons la majorité des prélèvements.

    On définit la sensibilité du sol (Fedoroff, 1986) à la pratique de l'irrigation par des eaux usées sous ses trois aspects, chimique, biologique et physique. Les paramètres chimiques mesurés sont le taux de matières organiques (carbone total et substances humiques), la capacité d'échange cationique et la réserve totale en azote et phosphore. Les paramètres biologiques mesurés sont le nombre total d'animaux et la diversité biologique. Le paramètre physique mesuré est le temps d'infiltration de l'eau dans le sol. Il est complété par des observations sur les états de surface des sols.

    2.1.1. Paramètres physico-chimiques.

    Réserve totale.

    L'azote et le phosphore total ont été retenus pour ce type d'analyse. Dans le cadre de cette étude, on doit tenir compte des apports qui sont effectués. Les eaux usées sont riches en phosphore et en azote assimilable (Tounkara et al., 1994). Le risque d'observer des carences sur les cultures est minime. Nous obtenons ainsi un pourcentage d'azote total et de phosphore total, mesure qui est la plus utilisée dans la littérature.

    Réserve mobilisable.

    Bien que la composition minérale des eaux usées satisfasse les besoins nutritifs des plantes (Tounkara et al., 1994), la mesure de la capacité d'échange cationique est nécessaire. Elle permet d'une part de contrôler par la mesure de l'acidité d'échange le risque de mise en place d'une toxicité aluminique, et d'autre part, en mesurant la concentration en sodium et en calcium échangeable on évalue le risque d'une alcalinisation des sols.

    Les matières organiques que l'eau usée véhicule peuvent être à l'origine d'une dégradation des cycles écologiques dans le sol (Elliot et Stevenson, 1977). Ce risque de pollution est pris en compte dans ce travail. En mesurant l'évolution du taux de matières organiques (carbone total) on obtient une première information sur les processus de minéralisation de la matière organique. En complétant cette analyse par une évaluation du taux de substances humiques dans les sols, on obtient une indication complémentaire sur l'orientation des cycles biologiques dans le sol (humification). Les substances humiques jouent d'autre part un rôle important dans la constitution du complexe adsorbant et dans la formation des microagrégats du sol. Leur mesure permet de compléter l'interprétation des résultats d'analyse de la capacité d'échange cationique (Chen et Avnimelech, 1988).

    2.1.2. Paramètres biologiques.

    La sensibilité biologique du sol est évaluée par la détermination grossière (au niveau de l'ordre) des populations animales du sol. La faune des sols est utilisée ici comme un indicateur pour le diagnostic de la fertilité. En limitant le niveau des déterminations à l'ordre, on cherche à obtenir un compromis entre le niveau d'information et l'applicabilité de la méthode. La détermination au niveau de l'ordre ne réclame pas de compétences étendues. Le classement par groupes fonctionnels réclame par contre des travaux de détermination importants. Ces travaux ne seraient nécessaires que dans la mesure où la détermination des mécanismes précis qui se mettent en place au cours de l'expérimentation voudraient être mis à jour.

    Le couvert végétal est également un paramètre que nous mesurons en raison de sa relation avec l'indicateur testé et le stock de matières organiques (cf: première partie). Nous mesurerons également le poids de racines présent dans les horizons de surface. L'importance du système racinaire dans le maintien du stock organique des sols est ainsi prise en compte (Piéri, 1989).

    Généralement on mesure indirectement la quantité de carbone dans les eaux usées par l'évaluation de la Demande Biochimique en Oxygène (DBO). Cette mesure ne permet pas la quantification des apports organiques. Pour vérifier nos hypothèses, nous procédons à une évaluation de la quantité et de la qualité de matière organique présente dans les eaux usées. La qualité de la matière organique est évaluée en pourcentage de matière organique d'origine planctonique. Le plancton représente une fraction plus grossière qui est généralement comprise dans la mesure du taux de Matières En Suspension (MES) des effluents. Le mode d'épuration des eaux usées avec un séjour prolongé dans des bassins de maturation, quelle que soit la filière, favorise le développement des animaux et des algues. Nous évaluons ainsi le risque de colmatage des sols par cette fraction particulière des eaux usées. Nous complétons ces analyses par la détermination des organismes présents dans les eaux usées. Ce qui permet de situer avec une plus grande précision la nature des effluents (Tittizer et Kothé, 1992) et le niveau d'épuration obtenu par la station pilote de l'E.I.E.R..

    Au cours des déterminations, il est possible d'évaluer le risque de développement de vecteurs de parasitoses.

    2.1.3. Paramètres physiques.

    La fertilité physique du sol est évaluée dans ce travail par la mesure du temps d'infiltration. Cette mesure présente l'intérêt de mettre en évidence les problèmes de destructuration des sols en surface. L'évaluation de l'infiltrabilité du sol est une autre mesure qui permet de déterminer l'incidence de la destructuration des sols sur la circulation de l'eau. Ne pouvant disposer d'un appareillage permettant des essais par des pluies simulées (Casenave et Valentin, 1989), nous avons recherché une méthode rapide qui permette de mettre en évidence l'effet de l'arrosage. La mesure au double anneau de munz présente le désavantage d'être une technique qui réclame beaucoup de temps et qui modifie les équilibres hydriques du sol pendant une durée indéterminée. La mesure au perméamètre à charge constante utilise des échantillons de faible diamètre non remaniés et réclame de nombreuses répétitions. La méthode que nous avons adoptée (mesure du temps d'infiltration) permet d'effectuer rapidement les mesures sur les parcelles sans provoquer de perturbations majeures. Elle a une valeur indicatrice sur les états de surface. Elle est complétée par des observations générales sur les sols.

    2.2. Choix du site d'étude.

    Le choix du site a été effectué tout d'abord en raison de sa situation topographique. Situé en contrebas de la station d'épuration il permettait un écoulement gravitaire des eaux usées. D'autre part, en raison de la situation de l'E.I.E.R., la localisation en zone urbaine permettait de reproduire au mieux les conditions théoriques de la réutilisation des eaux usées. Une partie du site avait déjà servi à la réutilisation des eaux usées provenant du marigot adjacent.

    De ce fait, le site peut être considéré comme représentatif des conditions de réutilisation des eaux usées en milieu urbain. L'E.I.E.R. étant propriétaire du site, les aspects fonciers de la réutilisation des eaux usées ne peuvent être étudiés.

    2.3. Description du dispositif expérimental.

    Le site (cf: photo) est constitué par un rectangle de 70 m de long (du nord au sud) sur environ 40 m de large (d'est en ouest). Sur cette surface, on met en place, après relevé topographique, un dispositif agronomique de type split splot. 30 parcelles sont disposées en long sur 3 rangs de 10 parcelles chacun. Les parcelles sont de 2 m x 10 m de long orientées est/ouest. La station d'épuration se trouve à 10 m à l'est du dispositif. Chaque rangée est désignée par une lettre et chaque parcelle par un numéro. L'ensemble de la surface d'une rangée (espaces interparcellaires compris) est appellée zone. Nous avons ainsi d'est en ouest les zones A, B et C sur lesquelles se trouvent les parcelles numérotées de 1 à 10 du sud au nord. Pour désigner précisément une parcelle, on indique son numéro précédé de la lettre désignant la zone sur laquelle elle se trouve ( ex: A10). Les espaces interparcellaires sont désignés par les deux parcelles qui leur sont adjacentes (ex: A4/A5).

    Un marigot qui draine en saison sèche les eaux usées de l'Université de Ouagadougou borde le dispositif dans sa partie est. La partie la plus basse du site est la partie centrale (zone B). Les crues du marigot qui borde le site peuvent provoquer des inondations temporaires avec une accumulation préférentielle des eaux dans la partie la plus basse. Les arbres présents sur le site sont en majorité des Neem (Azadirachta indica), dont les diamètres varient entre 10 et 40 cm. La zone C la plus proche du marigot est celle sur laquelle se pratiquait la réutilisation des eaux

    usées. C'est également une zone d'implantation préférentielle pour les cultures pluviales, notamment le maïs.

    Les eaux usées sont drainées par des canalisations souterraines jusqu'à des puisards situés entre les parcelles B2 et B3 et les parcelles B6 et B7. Un puisard complémentaire chargé de recueillir les eaux provenant d'une station de potabilisation des eaux de barrages a été construit au niveau des parcelles B9 et B10. L'eau de barrage est amenée à partir d'une prise située au pied de la station de potabilisation et conduite au milieu du site par un tuyau de 60 m.

    La dimension des parcelles est inférieure aux normes usuelles et ne répond pas tout à fait aux protocoles expérimentaux classiques. Cette situation risque d'avoir une incidence sur les rendements des cultures, mais comme nous l'avons vu, elle reproduit des conditions réelles. Le contrôle de qualité des eaux en termes sanitaires a été effectué au préalable (Guène, 1988) et la mesure de la concentration en éléments minéraux dans l'eau a été effectuée par le C.R.E.P.A.2 et l'EIER3 durant l'expérimentation. Le caractère pluridisciplinaire est ainsi développé et assure à la recherche des possibilités d'application immédiate en toute sécurité.

    2.4. Calendrier expérimental.

    Le déroulement de la recherche s'est effectué en quatre étapes. Chaque étape correspond à une progression dans les connaissances qui permet le passage à l'étape suivante.

    Première étape: Description et mise en place du dispositif expérimental.

    De la saison des pluies 1990 à celle de 1991, nous avons cherché à obtenir le plus d'informations possible sur le milieu où se pratiquerait l'expérimentation.

    Durant la saison des pluies 1990 nous avons effectué un inventaire floristique et entomologique du futur site expérimental. Durant la saison sèche 1990/1991 nous avons effectué nos prélèvements de sol et procédé à la pose de l'enceinte grillagée délimitant la zone d'expérimentation. Cette protection contre l'extérieur est nécessaire pour éviter les dégradations. Elle assure également la mise en défens des zones de friches. Puis nous avons procédé au relevé topographique du site et à la détermination de l'emplacement des parcelles. La première expérimentation a débuté en mars 1991 durant la construction des ouvrages de collecte des eaux. La zone centrale du dispositif n'a pas été mise en culture (zone B) pour cette raison. Aucun obstacle majeur à la croissance des plantes n'est apparu au cours de cette expérimentation. En raison de l'hétérogénéité des résultats culturaux, nous avons redistribué les parcelles témoins sur l'ensemble du dispositif alors qu'elles étaient regroupées au niveau des numéros 9 et 10 .

    Deuxième étape: Mise au point des méthodes.

    2CREPA: Centre régional pour l'eau potable et l'assainissement à faible coût. Ouagadougou

    3 E.I.E.R: Ecole Inter-etats d'ingénieur de l'équipement rural.

    De juin 1991 à janvier 1992, nous avons procédé à la mise au point des méthodes d'échantillonnage de la faune des sols et de l'eau. La méthode d'extraction des résidus racinaires a également été améliorée durant cette période.

    Troisième étape: Mise en évidence de l'impact des eaux usées sur la fertilité.

    De mars 1992 à mars 1993, nous avons procédé à la mesure sur les parcelles des populations animales. En mars 1993, la production végétale sur les parcelles témoins est extrêmement faible et nous considérons avoir atteint le seuil de dégradation de la fertilité signalé dans la littérature. Nous mesurons les paramètres chimiques et biologiques du sol et nous redéfinissons le protocole de culture.

    Quatrième étape: mise en évidence de l'impact des travaux culturaux sur la fertilité.

    De septembre 1993 à février 1994 nous avons limité au maximum les travaux culturaux. Aucun travail de sarclage durant les périodes de végétation n'a été effectué. Le désherbage a été manuel. Parallèlement une expérience d'infiltration est menée pour mettre en évidence l'interaction entre l'infiltrabilité du sol et la qualité des eaux.

    Graphique 1: Calendrier cultural.

     
     

    Saison sèche

    Saison des pluies

     
     

    A NNEE SCOLAIR E

    1991

    NOV DEC JAN FEV MAR AVR MA I JUN JUL AOU S EP OCT

    MARAÎCHA GE

    MAR A ÎC H AGE

    M AÏS

    AR A C HID E

    1992

    1993

    H ORTIC ULTU R E

    Arrêt du sarclage

    MAÏS

    1994

    Période

    froide Période chaude

    M A R AIC H AGE

    MIL

    2.5. Description des méthodes employées.

    2.5.1. Protocole général de mise en culture.

    Les agriculteurs sont propriétaires des récoltes. Ils ne reçoivent aucun dédommagement pour leur travail. L'engagement financier se fait pour notre part au travers de l'aménagement du site, de l'achat du matériel pour les travaux culturaux et de l'achat de semences.

    La mise en culture s'effectue en fin de saison des pluies (novembre). L'ensemble du couvert végétal herbacé est coupé et exporté à l'écart du dispositif. Cette opération terminée, les parcelles sont "labourées" à la daba sur une profondeur de 20 cm. Lorsque le sol est trop dur, un arrosage est effectué pour l'ameublir. Les semis sont effectués en fonction du type végétal. Dans certains cas une pépinière est aménagée à l'écart du dispositif pour obtenir les plantons (tomates etc...). Cette pépinière est enrichie avec du fumier.

    L'arrosage est effectué deux fois par jour par aspersion à l'arrosoir. Les doses d'irrigation sont calculées selon les normes admises pour la région. La récolte aux environs du mois de mars peut être effectuée en une fois (maïs, arachide, choux) ou s'étaler sur plusieurs jours (tomates, gombo etc..). Les acheteurs se rendent directement sur le site pour se procurer les produits. Il s'agit soit de professionnels soit de particuliers (personnel de l'E.I.E.R.). La production est pesée, les résidus végétaux sont exportés. Les parcelles sont de nouveau labourées et un cycle cultural est accompli durant la période chaude de la saison sèche jusqu'à la saison des pluies. L'arrosage du matin s'effectue entre 7 h et 9 h du matin. L'après-midi, il commence aux environs de 15 h jusqu'à 17 h. Le sarclage est effectué environ trois fois pendant un cycle cultural. L'observation de zones d'écoulements préférentiels a conduit, notamment pour les parcelles de la zone A, à faire de petites levées de terre pour ralentir le flux et améliorer l'infiltration dans les parties supérieures des parcelles. Les prélèvements de sol sont effectués soit aux environs de 9 h soit aux environs de 17 h.

    2.5.2. Techniques d'échantillonnage.

    Echantillonnage du sol.

    Deux types d'échantillons sont prélevés, des échantillons pour la détermination de la composition chimique et de l'humidité pondérale dans un profil de sol et des échantillons pour la détermination de la faune du sol prélevés en surface..

    Echantillons prélevés dans un profil de sol.

    Les échantillons sont extraits à l'aide d'une sonde pédologique (Grouzis, 1987). Le solum obtenu est non remanié sur 60 cm. Ce qui permet d'effectuer également des observations générales sur la porosité du sol. Ces carottages sont effectués au début et à la fin de l'expérimentation pour mesurer l'évolution de la réserve minérale dans le profil. Des mesures de l'humidité pondérale sont effectuées à titre indicatif durant les phases de culture pour vérifier l'efficacité de l'irrigation. Le choix des lieux de prélèvement s'est fait au départ, selon la composition du couvert végétal. La

    meilleure connaissance du site et son aménagement nous ont conduit par la suite à effectuer l'échantillonnage selon la texture des sols et le type de travail cultural.

    Echantillons prélevés en surface.

    Ces échantillons vont être utilisés pour déterminer 4 paramètres différents.

    Des échantillons de sols sont prélevés à l'aide d'un cube de 10 cm de côté. On les utilise pour effectuer aussi bien les mesures physico-chimiques que les mesures de la faune des sols.

    Les prélèvements pour la détermination et la quantification de la faune des sols sont effectués soit au mois de septembre en saison des pluies, soit durant la saison sèche en fonction du calendrier cultural. La répartition spatiale des organismes en climat tropical à saisons contrastées se fait généralement en agrégats autour des racines des plantes (Lavelle, 1983). En conséquence, les prélèvements seront effectués sur les espaces dépourvus de végétation en surface, afin de limiter l'influence des systèmes racinaires sur les populations animales. Dans le cas des zones cultivées notamment sous maïs, les échantillons sont prélevés entre deux rangs à équidistance entre les tiges des plantes.

    Echantillonnage de l'eau.

    Les échantillons d'eau sont prélevés à l'aide d'un seau dans les puisards. L'eau du puisard est préalablement mélangée en reversant deux à trois seaux avant d'effectuer le prélèvement définitif.

    Un litre est versé dans un flacon de prélèvement en matière plastique à bouchon hermétique. Dans la dernière phase de l'expérimentation (nov. 1993 à fév. 1994) 5 ml de formol sont versés dans le flacon afin de préserver l'échantillon de la dégradation. L'échantillon a été dans ce cas stocké au réfrigérateur.

    Echantillonnage de la biomasse végétale.

    Végétation naturelle.

    Pour mesurer la production végétale dans les zones de friches, on utilise un cadre en bois de 1 m de côté (Matthey, Della Santa et Wannenmacher. 1984). L'ensemble des végétaux sont coupés à la base. Le choix de l'échantillon s'est effectué tout d'abord en fonction des espèces rencontrées (1990) puis en fonction de la zone (1993).

    Végétation cultivée.

    10 tiges de maïs sont coupées à la base, ce qui correspond pour des rangs écartés de 60 cm et des plants espacés de 20 cm à une surface d'un mètre carré. Les épis sont récoltés et pesés séparément.

    Pour les autres plantes de cultures c'est l'ensemble de la production d'une parcelle qui a été mesuré.

    Lorsque les mesures permettent une estimation directe d'un résultat, les statistiques ne sont pas nécessaires (Webster com. pers.). C'est le cas de la différence de rendement selon les traitements puisque après trois ans, aucune production n'est enregistrée sur les parcelles témoins. C'est également le cas de la carence en azote puisque les symptômes de celle-ci n'apparaissent que sur les parcelles témoins.

    Pour effectuer une première sélection des indicateurs de fertilité, on compare les résultats des mesures de croissance végétale avec chacun des indicateurs. D'autre part, on analyse l'influence des eaux usées sur ces indicateurs. Nous obtenons ainsi deux types d'indicateurs, ceux qui correspondent à la variation des mesures de production végétale et ceux qui sont sensibles à l'irrigation par des eaux usées. Enfin, on compare les valeurs des mesures effectuées sur les parcelles expérimentales avec celles obtenues sur les espaces interparcellaires.

    Protocoles.

    Protocoles pour l'analyse des sols.

    Echantillons non remaniés.

    La sonde pédologique est enfoncée à la masse. elle permet d'obtenir un échantillon non remanié sur une profondeur de 50 cm. Les échantillons plus profonds sont obtenus avec une tarière jusqu'à une profondeur de 1.20 m.

    Les carottes sont mises à sécher à l'air libre (cf. photo) lorsque le sol doit être analysé chimiquement. Elles seront ensuite observées à la loupe binoculaire par tranche de 5 cm. Les observations terminées, les sols seront tamisés à 2mm et stockés dans des sachets plastiques individuels et expédiés en Suisse.

    Dans le cas de l'estimation de l'humidité pondérale, le sol est fractionné 10 cm par 10 cm et mis à l'étuve à 105°C pendant 24 heures. On en déduira l'humidité pondérale par le calcul de la différence entre son poids initial et son poids sec.

    Echantillons remaniés: Mesures de la quantité de racines et du nombre d'animaux.

    Les échantillons de 1000 cm3 de volume sont prélevés à l'aide d'un cadre cubique de 10 cm de coté, il est enfoncé à l'aide d'un maillet en disposant au préalable une planche de petite taille sur le cadre.

    Les échantillons sont transportés directement du champ au laboratoire dans une boîte en plastique. Ils sont disposés sur l'extracteur Berlèse (Dunger et Fiedler, 1989 ). L'échantillon de sol est récupéré, une fraction de 120 g est tamisée à 2 mm et expédiée en Suisse pour les analyses chimiques, et une fraction de 500 g est utilisée pour l'extraction de racines.

    Les sols sont analysés au laboratoire de pédologie de l'E.P.F.L.. Trois types d'analyses sont effectuées.

    Le taux de carbone et celui des substances humiques sont obtenus par combustion sous oxygène et mesurés soit par conductimétrie (Casumat) soit par infra-rouge (TOC).

    L'évaluation de la réserve totale en azote et en phosphore se fait par la méthode Kjeldahl et la
    mesure de la CEC se fait par extraction au BaCl2 puis mesure de la concentration des éléments

    au spectromètre d'émission plasma.

    Protocole pour l'analyse de la végétation.

    Détermination du couvert végétal.

    Méthode d'échantillonnage pour un mètre carré. Extraction des racines.

    L'échantillon de 500 g de sol est mis à tremper, après 10 minutes on agite l'échantillon et on le passe au tamis à 200 microns. On rince le tamis par une aspersion d'eau (pommeau de douche) pour éliminer les fines. L'échantillon est reversé dans le récipient et on procède à un second rinçage. On superpose un tamis à mailles de 1 mm au tamis à mailles de 0.2 mm. Les résidus organiques sont obtenus par séparation gravitaire dans le récipient de rinçage et tamisés. On les met à sécher à l'étuve (105° C/48heure) ou on les lyophilise.

    Après séchage, on pèse le matériel. Il est ensuite observé à la loupe binoculaire et sa contenance en azote et carbone est mesurée par la méthode Dumas automatisée (Carlo erba) au laboratoire de l'E.P.F.L..

    Mesure de la croissance végétale.

    Pour chaque parcelle, la taille de 10 plants est mesurée au double mètre. La fréquence des mesures est de une fois toutes les deux semaines.

    Mesure de biomasse végétale épigée.

    Les plantes sont pesées fraîches puis on les sèche soit à l'étuve (saison des pluies) après les avoir hachées, soit à l'air libre en saison sèche. On mesure le poids sec.

    Les animaux tombent de l'extracteur dans des flacons remplis d'alcool à 70%. En trois jours l'extraction est considérée comme terminée durant la saison sèche. On compte une semaine d'extraction durant la saison des pluies. Les animaux seront triés manuellement dans une boîte de Pétri, à l'aide d'une pipette pasteur.

    Lombrics.

    Un cadre cubique de 25x25x20cm est enfoncé dans le sol. L'échantillon est trié à la main pour en extraire les annélides et les compter. Trois classes de taille sont différenciées au cours des comptages, les petits (<3 cm) les moyens (entre 3 et 5 cm) et les gros (>5 cm).

    Protocole pour la mesure du temps d'infiltration.

    Mesure à l'aide d'un cadre de 50 cm de côté du temps d'infiltration d'un seau de 10 litre d'eau. Le cadre est enfoncé de 5 cm dans le sol. On verse l'eau en une fois, on déclenche le chronomètre et on vérifie qu'il n'y ait pas de perte latérale. La mesure est terminée lorsque la surface du sol est totalement ressuyée. On signale la présence/absence de couvert végétal dans la zone de mesure.

    Mesure de l'humidité atmosphérique et température.

    Utilisation d'un thermo-hygromètre portatif EBRO. L'humidité et la température sont mesurées à un mètre du sol., puis à 5 cm de la surface. La nature du couvert végétal est relevée.

    Mesure du taux de matières organiques dans l'eau.

    Utilisation d'un fractionnement avec des tamis de tailles différentes.

    On prélève 100 ml d'eau dans le flacon de 1 l qui sont directement mis à l'étuve. C'est le taux de matière organique total qui sera estimé de la sorte.

    On passe le reste au travers de tamis à mailles de 100 et 50 et 20 ou 10 microns

    Les fractions récoltées sont observées à la loupe binoculaire et au microscope, on détermine les algues et on compte le zooplancton (dans 1ml). Puis les fractions sont mises à l'étuve dans des creusets à 105°C pendant 12 heures. On pèse les creusets ce qui donne le poids de matières sèches. On passe ensuite les échantillons pendant deux heures au four à 550°C pour déterminer la fraction organique obtenue par la différence de poids.

    Troisième partie: Résultats.

    Chapitre 1. Etat initial du milieu et quantifications des apports.

    Les résultats seront présentés en trois chapitres. Dans ce premier chapitre nous avons regroupé les résultats concernant l'état initial du milieu d'étude et la quantification des apports. Nous en déduisons les facteurs de variation qui peuvent influencer les résultats. Ces facteurs de variations seront pris en compte dans l'analyse statistique.

    1.1. Description générale du site expérimental.

    En climat tropical sec, l'activité humaine (mise en culture des sols), le couvert végétal et la texture du sol ont une influence sur les caractéristiques des sols. Pour tenir compte de cette influence nous décrivons l'état initial du milieu expérimental en tenant compte de ces trois facteurs. Cette description est accompagnée d'un plan topographique du site sur lequel sont reportées les différentes situations rencontrées. Cette définition complète la cartographie des sols effectuée au préalable par le laboratoire d'analyse des sols (BUNASOL) de Ouagadougou. Nous analysons les paramètres chimiques du sol dans les 10 premiers cm ainsi que cela a été prévu initialement.

    1.1.1. Topographie du site et caractéristiques texturales des sols.

    Lors de la saison des pluies une inondation temporaire de la zone centrale (zone B), la plus basse avec un écoulement préférentiel des eaux du sud au nord ( cf. plan topographique) est observée. La partie est (zone C) est une zone de transition pour les eaux. La partie ouest (zone A) n'est pas submergée. La différence d'altitude entre ces zones est de 10 cm (zone C) à 20 cm (zone A). Le site se présente en coupe comme une cuvette dont la bordure est est sensiblement plus basse que la bordure ouest. La pente n'est pas visible à l'oeil nu mais uniquement lors des crues.

    Tableau 1: texture des sols dans les horizons de surface (0-10 cm).

    Zone

    Graviers

    Sables grossiers %

    Sables moyens fins %

    Sables fins %

    Limons %

    Argiles %

    Zone C
    Zone B
    Zone A

    0

    10

    11

    36

    21

    21

    0

    9

    5

    26

    27

    32

    5

    32

    11

    23

    16

    15

    Les zones B et C sont composées de sols peu évolués d'apport alluvial hydromorphes, la zone A d'un sol ferrugineux tropical lessivé à concrétions et tâches d'hydromorphie (Bunasol 1989). Les inondations temporaires n'ont pas d'influence sur la texture de surface du sol ferrugineux tropical de la zone A. La comparaison des résultats d'analyses de cette zone avec ceux effectués par Rudig pour des lieux de prélèvement différents mais un même type de sol (ferrugineux) en 1991 donne une texture similaire. Les prélèvements de Rudig ont été fait au sud de la STEP, en dehors de l'influence du marigot. Pour la zone C, il semble que ce sont principalement les sables fins qui s'y sont déposés. La zone B a une composition en argile et en limon plus importante, ce qui s'explique par la stagnation temporaire des eaux. Une nappe perchée occupe la partie centrale du dispositif. Son toit oscille de 40 cm à 120 cm de profondeur de la saison des pluies au milieu de la saison sèche. Elle persiste jusqu'aux environs du mois de mars. La disparition de toute végétation herbacée non adaptée à la saison sèche autorise à penser que cette nappe n'a pas d'influence en surface durant cette saison.

    1.1.2. Le couvert végétal.

    En juin 1990, le site expérimental n'est pas encore aménagé. Il présente une hétérogénéité dans le couvert végétal qui peut être attribuée dans une première approche à sa topographie et à l'influence de l'homme. Le sol a subi des travaux culturaux récents à certains endroits alors que d'autres parties sont restées incultes. Ces différentes couvertures sont répertoriées sur le plan topographique ci-joint. Une liste détaillée des espèces est donnée en annexe 1.

    Tableau 2: Groupement végétaux observés sur le site expériemental en septembre 1990.

    Groupe des surfaces cultivées en 1990

    (symbole sur carte topographique)

    Groupe des surfaces non cultivées en 1990 désignées par les espèces dominantes (symbole sur carte topographique)

    Culture d'arachide (Ara)

    Culture de pois (Vigna sinensis)(H) Culture de patate douce (P)

    Zone labourée non semée (FL)

    Sesbania rostrata (S)

    Setaria pallidifusca et Indigofera (F)

    Crotalaria mucronata(Cr) Crotalaria et Sorghum (FM) Sesbania et Pennisetum (SG) Pennisetum pedicellatum (G)

    Les prélèvements de sol sont effectués sur chacune des surfaces mise à part celle sur laquelle des patates douces (P) ont été cultivées en raison des très grandes modifications provoquées par les billons.

    Le développement de la végétation naturelle se fait en deux périodes. Avec les premières pluies se développent des plantes à cycles courts. Pendant cette première période, le site apparaît comme homogène avec un couvert végétal composé en majorité par Setaria pallidifusca. Ces plantes de petite taille (50 cm env.) arrivent rapidement (en un mois et demi) à maturité. Une deuxième période commence vers la fin du mois de juillet. Le couvert végétal se transforme rapidement avec l'apparition de plantes de taille beaucoup plus importante (2 à 2.5 m au max.). Ces plantes à cycles plus longs (deux mois env.) fleurissent à partir du mois d'août jusqu'à la fin du mois d'octobre. On procède à un relevé floristique dans le courant du mois d'octobre afin

    d'obtenir un inventaire précis de la végétation (cf. Annexe 1) et d'en mesurer la biomasse aérienne. La production sur les zones cultivées n'a pu être mesurée. Nous mesurons la production végétale épigée afin de pouvoir comparer la productivité du dispositif expérimental avec les chiffres disponibles dans la littérature.

    Tableau 3 : Production de biomasse végétale épigée, septembre 1990 (végétation naturelle).

    Surface non cultivée

    Poids frais

    (g/m2)

    Poids frais

    (t/ha)

    Poids sec

    (g/m2)

    Poids sec

    (t/ha)

    G (Pennisetum)

    949

    9

    368

    3,7

    Cr (Crotalaria)

    3319

    33

    804

    8

    SG (Sesbania et Pennisetum)

    1358

    13

    468

    4.6

    S (Sesbania)

    1865

    18

    725

    7,2

    La production moyenne de phytomasse aérienne est de 5,9 t/ha ce qui est dans la moyenne régionale, les chiffres de production aérienne se situant entre 4 et 13 t/ha (Fournier, 1991) .

    1.1.3. Composition chimique de l'horizon de surface (0-10 cm).

    Les sols sont légèrement acides, avec des concentrations en azote suffisantes (>400 ppm). Les concentrations en carbone total et en phosphore (Piéri, 1989) sont également suffisantes. Quelle que soit la zone de prélèvement, les valeurs sont identiques. On observe une variation spatiale des mesures entre la zone A et les zones B et C.

    Tableau 4: Composition chimiques de l'horizon de surface.

    Paramètres

    Unités et

    proportions

    Zone A

    Zone B

    Zone C

    pH (KCl)

     

    5.6

    6

    6.4

    Carbone organique

    %

    0.40

    0.52

    0.50

    Substances humiques

    mgC/ g de sol

    0.8

    1.3

    1.2

    Acides fulviques

    mgC/g de sol

    0.7

    0.8

    0.7

    Azote total

    °/00

    0.6

    0.7

    0.6

    Phosphore total

    °/00

    0.3

    0.4

    0.4

    Acidité d'échange

    Meq/100g

    0.14

    0.14

    0.15

    Tableau 5: Mesures des cations échangeables (pH 7).

    Paramètre

    Unité

    Zone A

    Zone B

    Zone C

    K

    meq/100 g

    0.11

    0.11

    0.1

    Na

    meq/100 g

    0.46

    0.45

    0.32

    Mg

    meq/100 g

    0.84

    0.93

    0.85

    Ca

    meq/100 g

    3.74

    4.26

    4.15

    Mn

    meq/100 g

    0.33

    0.27

    0.14

    S

    meq/100 g

    5.15

    5.65

    5.4

    S/T

     

    0.92

    0.93

    0.95

    T

    meq/100 g

    5.62

    5.65

    5.4

    Al

    meq/100 g

    0.02

    0.01

    0.02

    Commentaires.

    A première vue, une variation spatiale est observée et correspond à la nature des sols. Les sols peu évolués ont des compositions chimiques semblables et se distinguent sensiblement du sol ferrugineux tropical. La composition chimique du sol dans l'horizon de surface est tout à fait dans les ordres de grandeur régionaux (Sedogo, 1993). La CEC qui est très faible malgré les variations de texture indique la présence d'argiles de faible capacité d'échange (kaolinites). Le pH est plutôt bas cependant la faible acidité d'échange mesurée écarte la mise en place d'une toxicité aluminique.

    La valeur la plus fréquente dans la zone d'étude est de 0.4% de carbone organique (Piéri, 1989). Le taux de carbone organique sur le site est donc relativement élevé.

    Le site d'étude présente des caractéristiques physico-chimiques et biologiques (production épigée) qui montrent une fertilité correspondant aux moyennes locales. Sa mise en culture ne devrait pas poser de problème. Des variations spatiales de faible amplitude sont enregistrées. Si nous tenons compte des remarques effectuées au préalable (cf. Première partie) il est possible que ces variations spatiales n'aient pas d'incidence sur la production végétale. Nous sommes en présence de sols peu évolués et d'un sol ferrugineux tropical, ce qui représente exactement la situation décrite par Boulet.

    C'est un milieu qui ne présente pas de symptôme de dégradation (ex: zippellés), ou une composition chimique impropre à la culture. Il bénéficie d'une alimentation hydrique importante en saison des pluies, ce qui favorise la production végétale naturelle. Son exploitation est importante, mais elle a été limitée en 1990 à cause de notre intervention. La présence de Pennisetum pedicellatum et de Striga hermontheca atteste une dégradation des sols liée à la mise en culture. Le site d'étude présente des caractéristiques propres aux milieux tropicaux tels qu'ils ont été présentés dans la première partie, à savoir des sols dans lesquels les argiles présentent une faible capacité d'échange cationique. Le taux de carbone est faible (<1%) en comparaison

    avec des sols sous couvert forestier, mais il est représentatif des sols cultivés. La présence d'un couvert végétal ligneux dominé par une essence importée (Azadirachta indica) montre une forte influence de l'homme.

    1.2. La station pilote de l'E.I.E.R..

    Cette station est alimentée avec les effluents provenant du réseau d'eaux usées de l'E.I.E.R. et du C.I.E.H.. Ce réseau lui permet de fonctionner avec un volume d'eaux usées de type ménager de 40 m3/j. Le départ des étudiants à la fin de l'année scolaire provoque un arrêt temporaire de l'alimentation en eau des bassins. Cet arrêt dure pendant pratiquement toute la saison des pluies. Il n'y a pas d'irrigation possible durant cette période.

    Les eaux de l'ensemble des bâtiments sont canalisées vers une bâche de pompage qui dispose d'un dispositif de régulation de la distribution des eaux en direction de la STEP (cf. schéma de la S.T.E.P ci-joint.). De ce collecteur, les effluents sont pompés en direction d'un décanteur primaire qui permet la sédimentation des boues. A partir de ce décanteur, l'eau est distribuée soit en direction de la filière lit bactérien soit en direction de la filière lagunage. La filière lagunage est divisée en deux séries de lagunes. Ces séries diffèrent selon le matériau de construction des bassins et le mode de revêtement des berges. Les eaux de lagunage sont réunies en sortie du dernier bassin de maturation dans un même bassin de stockage. Ce bassin est divisé en deux compartiments séparés par une paroi étanche en béton. L'eau issue du bassin de maturation de la filière lit bactérien y est également collectée dans le second compartiment. De ce collecteur les eaux sont dirigées vers leurs puisards respectifs.

    Deux principes sont utilisés pour l'épuration, la minéralisation biologique par les bactéries en voie aérobie ou anaérobie et l'utilisation du rayonnement ultra-violet pour l'élimination complète des germes pathogènes.

    1.2.1. La filière lit bactérien.

    Cette filière utilise des cailloux de latérite ou de quartz comme support des films bactériens (Touré, 1986). Les effluents sont déversés par un auget basculant sur ces supports et les traversent sur une hauteur de trois mètres. Au cours de ce trajet, les processus de minéralisation biologique de la matière organique en conditions aérobies permettent un abattement de la DBO et de la DCO des effluents. Les eaux sont récoltées en sortie de ces lits bactériens dans un décanteur secondaire. De ce décanteur, elles sont drainées en direction d'un bassin de maturation de faible profondeur qui permet une élimination des germes pathogènes par irradiation aux rayons UV naturels. Le temps de séjour des eaux dans ce bassin est d'environ une semaine (Randin, 1991). Dans le bassin de maturation, la composition des effluents permet le développement d'une flore et d'une faune planctonique. Des silures de 30 à 50 cm de longueur brassent continuellement les eaux. Ils entretiennent ainsi un taux d'oxygène important dans les couches inférieures du bassin.

    Populations planctoniques

    La diversité de ces populations dépend du débit d'entrée au niveau du bassin, du taux d'oxygène de l'eau et de paramètres climatiques. On peut distinguer quatre phases de fonctionnement de ce bassin durant l'année scolaire. La première phase que l'on désignera par phase A débute avec l'arrivée du personnel et des étudiants après les congés annuels. Cette phase se caractérise par

    une remise en charge progressive des bassins. La phase suivante ou phase B apparaît après le complet remplacement des eaux «propres» de la saison des pluies par les eaux «sales» provenant de l'école. Durant cette phase les Euglénophycées sont dominantes. Elle est généralement caractéristique à partir de la fin du mois de janvier et dure jusqu'au mois d'avril. Les fortes chaleurs favorisent le développement des cyanophycées qui apparraissent alors. En juin ou plutôt avec les premières pluies une dilution plus ou moins forte des effluents par les précipitations favorise une modification des populations planctoniques en relation avec l'amélioration relative de la qualité des eaux , c'est la phase C. Durant cette phase on observe une explosion d'algues bleues (Oscillatoria sp.et Spirulina sp.) qui est suivie du développement des populations de cladocères (Moina sp.). C'est durant cette période que des larves de moustiques et des cyclops sont observés. Enfin, pour terminer le cycle, c'est la période des congés scolaires de juillet à octobre ou phase D qui permet par une dilution importante et des temps de séjours prolongés d'améliorer la qualité des eaux. Durant cette période, c'est plus particulièrement la faune d'insectes aquatiques qui se diversifie.

    Tableau 1: Composition générale des eaux de la filière lit bactérien.

    Paramètres

    unité et proportions

    Mesure

    Matières minérales

    mg/l

    260

    Matières organiques

    mg/l

    172

    %age de matière organique d'origine planctonique

    %

    20

    DBO*

    mg/l

    120

    DCO*

    mg/l

    200

    * Moyennes des données établies par l'E.I.E.R. , le C.R.E.P.A. et les diplômants E.P.F.L. et E.I.E.R. travaillant sur le site.

    1.2.2. La filière lagunage.

    Cette filière suit globalement les phases de fonctionnement présentés pour le lit bactérien. Les populations planctonique notamment de rotifères y sont moins nombreuses que dans le bassin de la filière lit bactérien. Pour une raison indéterminée, nous avons pu observer une différence dans la composition algale entre les deux séries de cette filière durant la phase C. La série avec des berges en béton est colonisée par Microcystis sp. et la série avec des berges recouvertes de plastique est colonisée par Oscillatoria sp.

    L'épuration se fait par minéralisation bactérienne dans deux bassins successifs. Le premier bassin permet une minéralisation de la matière organique en condition d'aérobiose ou d'anaérobiose. Ce bassin facultatif est de petite taille et réagit rapidement à une augmentation de charge. Après un temps de séjour de trois jours, les effluents se déversent dans le second bassin où ils subissent une seconde forme d'épuration en condition aérobie grâce à la production d'oxygène par les algues (Pietrasanta et Bondon, 1994). Il n'y a pas de poissons dans ce bassin.

    Des essais d'implantation ont été faits avec des Tilapia, mais ils se sont soldés par un échec. Cette échec peut avoir deux causes, soit un déficit en oxygène dissous, soit une modification de la composition chimique des eaux ( ammoniac).

    Tableau 2: Composition générale des eaux de la filière lagunage.

    Paramètre

    unité

    Mesure

    Matières minérales

    mg/l

    211

    Matières organiques

    mg/l

    182

    %age de matière organique d'origine planctonique

    %

    16

    DBO*

    mg/l

    120

    DCO*

    mg/l

    200

    * Moyennes des données établies par l'E.I.E.R. (Guene, 1989), le C.R.E.P.A. et les diplômants E.P.F.L. et E.I.E.R. travaillant sur le site.

    Nous avons constaté que malgré la dilution par les pluies et l'allongement des temps de séjour des teneurs en carbone importantes étaient mesurées durant la phase D dans les deux filières. La présence d'ostracodes, les fluctuations de populations algales avec alternance de cyanophycées et de chlorophycées nous indiquent la présence de matières organiques dans le fond des bassins qui évoluent au cours du temps (Belbahri, 1991).

    1.2.3. Quantification des apports organiques et minéraux.

    Le calcul des apports est effectué de la façon suivante:

    - on détermine la concentration en matière organique pour chaque fraction et pour 1 litre d'eau - on multiplie cette concentration par le nombre de litres contenus dans un seau.

    Selon les doses d'irrigation utilisées qui sont comptées en nombre de seaux par parcelle, on obtient la dose journalière reçue par une parcelle. On multiplie ce chiffre par le nombre de jours d'irrigation qui dépend du nombre de cycles culturaux effectués durant l'année scolaire. Sachant qu'une parcelle a une surface de 20 m2, on multiplie le chiffre de la dose annuelle par parcelle par 500 et on obtient la dose annuelle reçue par hectare.

    Des fluctuations interannuelles sont enregistrées soit dans les débits d'entrée de chaque filière, ce qui modifie la charge organique à la sortie, soit dans les doses d'irrigation. Le tableau suivant présente les variations des débits d'entrée en pourcentage du débit total. Le dimensionnement des bassins a été calculé sur la base de la répartition de 20 % pour la filière du lit bactérien et 40% du débit total pour chaque bassin de la filière lagunage. Ce qui représente pour un volume d'entrée de 40 m3 une répartition en 16 m3 pour chaque filière de lagunage et 8 m3 pour la filière du lit bactérien.

    Tableau 3: Variations interannuelles des débits.

    Type d'eau

    Phase A 1992

    Phase B et C

    1993

    1994

     
     

    1992

     
     

    Lit bactérien

    0%

    20%

    37%

    20%

    Lagunage 1

    100%

    40%

    63%

    40%

    Lagunage 2

    0%

    40%

    0

    40%

    Variations de la dose d'irrigation.

    Les doses d'irrigation ont changé entre les années 1992 et 1993/1994. Ces variations proviennent de l'ajustement des doses aux besoins des cultures. En 1992 la dose est de 300 litres/jour/20 m2 (20 seaux par jour) et en 1993/1994 elle est réduite à 240 litres/jour/20 m2 (16 seaux par jour). Ces ajustements ont été décidés par M. Tran Minh Duc de L'E.I.E.R., agronome.

    Tableau 4: Dose d'apport de matières organiques.

    Moyennes annuelles

    Lagunage

    Lit bactérien

    1992

    7711 kg/ha pour 240 jours

    8214 kg/ha pour 240 jours

    1993

    6011 kg/ha pour 240 jours

    5554 kg/ha pour 240 jours

    1994

    3852 kg/ha pour 120 jours

    3420 kg/ha pour 120 jours

    Ces doses annuelles correspondent aux doses minimales (5 t/ha et par an) conseillées pour maintenir le statut organique des sols cultivés en irrigation (Tranh Min Duc com. pers.). La dose journalière est à prendre en compte pour donner une idée de l'apport réel de matières organiques au sol.

    Tableau 5: Doses journalières.

    Moyennes journalières

    Lagunage

    Lit bactérien

    1992

    34.5 kg/ha

    33.6kg/ha

    1993

    27.7 kg/ha

    21.2 kg/ha

    1994

    22.2 kg/ha

    20.8 kg/ha

    On reprendra le tableau présenté par le C.R.E.P.A. pour l'évaluation des apports minéraux. Dans ce tableau, les auteurs comparent les doses d'azote, de phosphore et de potassium qu'apportent les eaux usées avec les doses d'engrais supersimples habituellement appliquées dans le maraîchage.

    Tableau 6: Doses d'apport annuel en fertilisants minéraux comparées à la dose conseillée en supersimple (Tounkara et al, 1994).

    Fertilisants

    Azote (kg/ha)

    Pentoxyde de

    phosphore

    (kg/ha)

    Potassium (kg/ha)

    Supersimple (teneur en kg/ha

    14

    23 à 24

    15

    Barrage

    161.5

    291

    126.6

    Lagunage

    753.2

    774.6

    479.5

    Lit bactérien

    293.2

    1134.1

    518.4

    Commentaires

    D'après cette étude, les eaux usées fournissent largement les éléments minéraux nécessaires aux cultures sans risquer de provoquer une alcalinisation des sols (Tounkara et al, 1994). Les résultats statistiques obtenus par comparaison entre les données obtenues pour chaque filière en ce qui concerne les concentrations en matières organiques et le poids sec de plancton ne permettent pas de distinguer les deux filières. Les analyses minérales des eaux présentent des différences, mais il n'est pas précisé par les auteurs si ces différences sont significatives. La biomasse des organismes planctoniques et leur détermination met en évidence une différence relative de la composition planctonique des eaux durant l'année scolaire 1993. Les euglénophycées dominent dans la filière lit bactérien alors que des chlorophycées (Errerella sp.) ont colonisé le bassin de lagunage à partir de fèvrier 1993. L'année 1993 sera considérée comme différente. D'autre nous avons pu observer en septembre 1993 un très fort dépôt de matières dans

    les canalisations qui drainent les eaux du lit bactérien. Ces dépôts on conduit à un colmatage important du système de drainage des eaux vers le puisard. Nous en concluons, que les eaux provenant du lit bactérien sont plus fortement chargées en matières décantables. Cette charge plus importante est sans doute causée par le mouvement des poissons. Celui-ci favorise la remise en suspension des dépôts du fond du bassin de maturation et leur entrainement dans les canalisations.

    Il existe une différence qualitative observée, d'origine planctonique, entre les eaux des deux filières. Il existe également une différence quantitative observée, d'origine minérale (matières décantables) entre les deux filières.

    1.3. Détermination des facteurs de variation.

    La présentation de l'état initial du milieu expérimental montre une variation spatiale du type de sol et de la topographie. Une variation spatiale de la répartition des eaux au cours des épisodes d'inondation temporaire du site pendant la saison des pluies est observée. Les caractéristiques des effluents et les doses d'apports fluctuent d'une année à l'autre. On doit envisager de comparer les résultats obtenus par la mesure des caractéristiques chimiques, biologiques et physiques du milieu selon deux facteurs complémentaires du facteur principal (origine des eaux d'irrigation):

    - La variation spatiale (comparaison des données entre zones).

    - La variation quantitative des apports (comparaison interannuelle).

    La qualité de l'indicateur sera déterminée en fonction de sa sensibilité à ces différents facteurs de variations. L'indicateur idéal pour mettre en évidence l'effet de l'irrigation par différents types d'eaux doit être sensible à la fois au type d'eau ( barrage, lagunage, lit bactérien) et à la variation quantitative des apports.

    Chapitre 2. Vérification de l'impact des eaux usées sur la fertilité chimique des sols cultivés.

    Dans ce chapitre, l'ensemble des résultats de la première étape de la démarche expérimentale sont présentés. Ils permettent de déterminer les indicateurs de la fertilité chimique du sol qui suivent la même évolution que les mesures de croissance végétale. Au cours de cette seconde étape on vérifie la première hypothèse de travail.

    2.1. Effet de l'intrant sur la fertilité chimique des sols.

    2.1.1. Etat des cultures.

    En mars 1993, on observe une différence nette entre les parcelles irriguées par les eaux usées et les parcelles témoins. Le maïs (sélection INERA) présente sur les parcelles témoins des signes de carence en azote (cf. photo).

    Les différences de taille sont également importantes. Un gradient de hauteur est visible entre les maïs de la zone A vers ceux de la zone C sur ces parcelles (cf. photo).

    Tableau 1: Hauteur des tiges de maïs (campagne de nov. 1992 à mars 1993).

    Zone

    Barrage
    (hauteur en cm)

    Lagunage
    (hauteur en cm)

    Lit bactérien
    (hauteur en cm)

    A

    90

    145

    142

    B

    77

    135

    152

    C

    54

    102

    95

    Sur les parcelles témoins, les épis sont de petite taille, quand il y en a, et les grains très faiblement colorés. Les résultats statistiques obtenus pour la comparaison entre les zones A et B montre une différence significative entre les parcelles témoins et les parcelles traitées pour ce qui est de la hauteur des plants. Les résultats obtenus dans la zone C ne sont pas inclus dans les calculs statistiques.

    Durant cette campagne de novembre à mars il a été nécessaire d'effectuer des sarclages à des fréquences rapprochées pour améliorer l'alimentation hydrique des plantes. Un enroulement caractéristique des feuilles de maïs est constaté. C'est un symptôme d'une mauvaise alimentation hydrique des plantes. On observe sur les parcelles témoins la formation de zones d'écoulement préférentielles et de flaques temporaires. Pour la zone A on constate une variation de la taille des tiges selon la position de la plante sur la parcelle. Les plantes situées dans la partie haute sont de taille inférieure à celles de la partie basse. Le problème d'alimentation hydrique des plantes est à associer à une mauvaise infiltration de l'eau dans le sol. Ce phénomène est plus marqué sur les parcelles témoins. D'autre part la végétation d'adventices composée en majorité de Portulaca sp. est présente uniquement sur les parcelles traitées.

    Le poids frais moyen de tiges de maïs permet d'apprécier les différences entre témoins et traités.

    Tableau 2: Poids frais moyen des épis de maïs (campagne de nov. 1992 à mars 1993).

    Type d'eau

    Barrage

    Lagunage

    Lit bactérien

    Poids frais parties aériennes (10 Tiges)

    694 g

    1488 g

    1496 g

    A l'observation, une différence apparaît entre les parcelles témoins. Sur les parcelles A10 et C10 qui sont utilisées comme témoins depuis la première mise en culture aucun épi n'a été récolté. Sur les parcelles C1, C5 et B1, B5 quelques épis de faible taille sont venus à maturité. Les parcelles A1 et A5 sont à classer à part. Pour la parcelle A1, en raison de la présence d'une fourmilière, les possibilités d'exploitation ont été limitées jusqu'en novembre 1992. Cette parcelle a été sous exploitée et n'a subit que 2 cycles culturaux. La parcelle A5, dont les plantes donnent les signes évidents d'une carence en azote (cf. photo 2), se trouve pour sa part en bordure du chemin qui permettait lors de la première

    campagne de 1991 d'acheminer les eaux sur le dispositif. Il est possible qu'elle ait reçu à cette occasion un amendement complémentaire ce qui expliquerait la croissance relativement bonne du maïs. Nous considérons qu'il y a un effondrement des rendements culturaux sur les parcelles témoins. L'amplitude de cette baisse est fonction du nombre de cycles culturaux effectués sauf dans le cas de la parcelle A5.

    Tableau 3: Synthèse des résultats sur la croissance végétale.

    Résultats

    Observations

    Différence entre

    témoins et traités

    Commentaires

    Fertilité

    Carences en azote et

    Différences générales de

    Les parcelles qui sont

     

    problème d'infiltration

    la coloration du feuillage

    utilisées depuis le début

     

    sur les parcelles témoins.

    (vert clair sur les

    témoins et vert foncé sur les traités)

    (1991) comme témoin (A10 et C10) ont une fertilité fortement

    réduite (absence d'adventice et aucun épi produit)

    Croissance

    Croissance témoins

    significative pour les

    Les parcelles de la zone

     

    A>B>C

    zones A et B (cf. Annexe1)

    C numérotées de 1 à 4 ont un comportement particulier, et présentent une très faible

    croissance.

    Ces résultats montrent l'influence favorable de la fertilisation par les eaux usées sur la croissance et la production des cultures. Les différences de taille entre les trois zones suggèrent une variation de la fertilité entre le groupe formé par les relevés sur les zones A et B et ceux de la zone C.

    Il existe un problème relatif a l'alimentation en eau des cultures. Ce problème bien que de faible ampleur fera l'objet d'une analyse détaillée dans le troisième chapitre.

    Les indicateurs doivent suivre les résultats culturaux. En conséquence, tous les indicateurs qui mettent en évidence une différence entre les zones A et B seront considérés comme non représentatifs de la fertilité du milieu.

    2.1.2. Richesse minérale des sols.

    Tableau 4 : Capacité d'échanges cationique (pH 7) mars 1993.

    Zone

    Eléments
    minéraux

    Barrage

    Lagune

    Lit bactérien

    A

    Mg meq/100 g Ca meq/100 g K meq/100 g Na meq/100 g S meq/100 g

    0.65 3.77 0.17 0.27 4.85

    0.73 4.67 0.37 0.64 6.41

    0.83 4.36 0.29 1.02 6.5

     

    Mg meq/100 g

    1.06

    0.86

    1.06

    B

    Ca meq/100 g

    6.13

    5.48

    7.74

     

    K meq/100 g

    0.3

    0.31

    0.42

     

    Na meq/100 g

    0.23

    0.74

    0.86

     

    S meq/100 g

    7.72

    7.39

    10.1

     

    Mg meq/100 g

    0.84

    0.81

    1

    C

    Ca meq/100 g

    5.16

    4.56

    5.37

     

    K meq/100 g

    0.2

    0.38

    0.54

     

    Na meq/100 g

    0.3

    0.73

    1.19

     

    S meq/100 g

    6.5

    6.48

    8.1

    Les distributions statistiques sont normales pour la somme des cations échangeables, le calcium, le potassium et le magnésium. Le pH KCL est neutre pour l'ensemble des parcelles mesurées. L'acidité d'échange n'a pas été évaluée. Pour le magnésium, le calcium et la somme des cations échangeables, les différences sont significatives entre témoins et traités et entre zones. La zone B est la zone où la capacité d'échange est la plus forte, viennent ensuite dans l'ordre décroissant les zones C et A.

    Les apports en calcium et magnésium sont les plus forts pour les effluents du lit bactérien suivis par ceux du lagunage.

    Tableau 5: Proportions d'azote dans les sols, mars 1993.

    Azote

    Barrage

    Lagunage

    Lit bactérien

    Zone A

    0.3°/00

    0.3°/00

    0.3°/00

    Zone B

    0.5°/00

    0.5°/00

    0.5°/00

    Zone C

    0.3°/00

    0.5°/00

    0.5°/00

    Tableau 6: Proportions de phosphore dans les sols, mars 1993.

    Phosphore

    Barrage

    Lagunage

    Lit bactérien

    Zone A

    0.08°/00

    0.07°/00

    0.1°/00

    Zone B

    0.2°/00

    0.2°/00

    0.2°/00

    Zone C

    0.1°/00

    0.2°/00

    0.2°/00

    La différence des mesures entre témoins et traités n'apparaît pas. Par contre nous retrouvons nettemnt l'influence de la texture du sol sur les mesures. En conséquence, les données des zones B et C peuvent parfois être regroupées pour l'évaluation des différences statistiques entre témoins et traités. Un premier test est effectué pour mesurer la variation entre zones.

    Tableau 7: Résultats statistiques.

    Résultats

    Différences
    entre zones

    Différences Te/TR

    Commentaires

    Observations

    Somme des

    cations

    (Annexe 5)

    Significatives B>A

    Non significatives

    L'indication obtenue pour la différence entre zones ne correspond pas à la différence de croissance

    Indication manquant de précision en raison de l'influence du sodium et du calcium

    Phosphore (Annexe 2)

    B et C>A Significatives

    Non significatives

    Indicateur ne permet pas de distinguer les traitements..

    Méthode choisie (phosphore total) sans doute inappropriée Regroupement zone B et C possible.

    Azote total (Annexe 2)

    B>C>A Significatives

    Non significatives

    Malgré les signes de carences observés, pas de différence témoins/traités

    Méthode choisie sans doute inappropriée

    Cations (Annexe 5)

    Significatives pour Ca (B>C>A)

    Significatives pour le potassium

    entre le lit bactérien et le témoin

    Apport du lit bactérien supérieur. Amélioration du bilan en potassium

    Na n'a pas une distribution normale permettant le calcul statistique

    Ces premiers résultats ne permettent pas de détailler la différence effective obtenue par l'analyse statistique des mesures de croissance. Il faut cependant souligner que le nombre d'échantillons (40) est relativement faible. Les indicateurs chimiques ne sont pas représentatifs, sauf dans le cas du potassium, des résultats obtenus par les mesures de croissance végétale. Ils semblent par contre être dépendants des caractéristiques pédologiques.

    2.1.3. Composition organique des sols.

    Tableau 8: Proportion de carbone organique dans les sols, mars 1993.

    Carbone total

    Barrage

    Lagunage

    Lit bactérien

    Zone A

    0.35%

    0.51%

    0.45%

    Zone B

    0.65%

    0.59%

    0.7%

    Zone C

    0.47%

    0.55%

    0.62%

    Tableau 9: Proportion de substances humiques dans les sols, mars 1993.

    Substances humiques

    Barrage
    (mgC/g de sol)

    Lagunage
    (mgC/g de sol)

    Lit bactérien (mgC/g de sol)

    Zone A

    0.6

    0.9

    0.8

    Zone B

    0.9

    0.8

    1

    Zone C

    0.5

    0.8

    0.8

    Tableau 10: Synthèse des résultats statistiques.

    Résultats

    Comparaison entre

    zones

    Comparaison entre

    traitements

    Taux de carbone (Annexe 4)

    Significative B>C>A

    Significative Tr>Te

    Taux de substances

    humiques

    (Annexe 4)

    Significative B> C ou A

    Regroupement entre

    zones A et C possible

    Significative Tr>Te

    La première hypothèse du travail est vérifiée.

    Dans les trois cas, les indications permettent de distinguer l'effet positif des eaux usées sur le bilan organique.

    Les apports d'eaux usées améliorent le taux de potassium, de carbone et de substances humiques des sols. Dans le cas des mesures du potassium on observe une différence entre les eaux du lit bactérien et celles du lagunage.

    2.2. Evolution de la fertilité biologique des sols.

    Les populations animales qui ont été observées dans les sols ont été déterminées grossièrement. 22 groupes sont ainsi distingués.

    Tableau 1: Présentation des groupes d'animaux du sol sélectionnés.

    Insectes

    Myriapodes

    Crustacés

    Arachnide

    Annélides

    Acariens

    Diploures

    Pauropodes

    Isopodes

    Araignées

    Lombriciens

    Oribates

    Collemboles

    Scolopendres

     
     

    Enchytreides

    Gamasides

    Diptères

    Diplopodes

     
     
     
     

    Coléoptères

     
     
     
     
     

    Hétéroptères

     
     
     
     
     

    Thysanoptères

     
     
     
     
     

    Insectes indéterminés

     
     
     
     
     

    Fourmis

     
     
     
     
     

    Termites

     
     
     
     
     

    Hyménoptères

     
     
     
     
     

    Thysanoures

     
     
     
     
     

    Orthoptères

     
     
     
     
     

    Etat des populations animales en 1993:

    On présente ici les effectifs des populations animales les plus représentées dans les prélèvements. Le nombre total d'animaux inclut les autres groupes.

    Tableau 2: Effectifs des populations animales les plus représentées dans les échantillons.

    Type d'eau

    Nombre total
    d'animaux
    (indv/m2)

    Collemboles
    (indv/m2)

    Gamasides
    (indv/m2)

    Oribates
    (indv/m2)

    Barrage

    6087

    675

    2513

    1262

    Lagunage

    13516

    3700

    5405

    3557

    Lit bactérien

    13566

    3460

    5042

    3752

    Les effectifs sont plus importants dans les parcelles irriguées par des eaux usées.

    En utilisant les relevés effectués pour les années 1992 et 1993, on observe une sensible diminution des effectifs et de la diversité des populations animales.

    Graphique 1: Comparaisons interannuelles des dénombrements des populations édaphiques.

    25000

    Nombre total d'animaux (indv/ m2)

    20000

    15000

    10000

    5000

    0

    1992 1993 1992 1993 1992 1993

    Barrage Lagunage Lit bactérien

    Evolution du nombre total d'animaux (moyennes)

    Les effectifs sont plus importants dans les parcelles irriguées par des eaux usées. On observe une évolution parallèle de la diversité des populations. La diversité biologique pour les 22 groupes d'animaux choisis est établie à partir de la moyenne observée pour les parcelles témoins pour les groupes sélectionnés. Pour les autres groupes elle est établie par un indice de présence/absence.

    Tableau 3: Tableau de l'évolution de la diversité des populations animales entre 1992 et 1993.

    Type d'eau

    1992

    1993

    Barrage

    9

    7

    Lit bactérien

    8

    8

    Lagunage

    11

    7

    La diminution observée entre les années 1992 et 1993 peut être associée soit à une modification des conditions microclimatiques ( changement de couvert végétal : arachide puis maïs) soit à une modification de la qualité des eaux (modification des débits d'entrée). Malgré une croissance végétale satisfaisante, il semble que l'on observe une modification des équilibres écologiques du sol avec une diminution du nombre de groupes observés.

    Population de lombrics., mesures effectuées en septembre 1993:

    Les populations de lombrics semblent plus importantes sur les parcelles traitées. Les prélèvements sont effectués en septembre 1993, date à laquelle ces animaux sont le plus actifs. On constate que les individus de petite taille (forme juvénile) sont les plus nombreux dans les échantillons. Ces mesures réclament un volume de sol important. On a limité le nombre de prélèvements à la saison des pluies 1993 et à la saison sèche 1994.

    Graphique 2: Effectifs de population des lombrics, septembre 1993.

    40

    Nombre moyen de lombrics

    30

    20

    10

    0

    Barrage Lagunage Lit bactérien Pluie

    Effectif des population de lombrics (septembre 1993)

    On utilise le même principe pour effectuer les calculs statistiques, soit une comparaison entre zones A, B, C et une comparaison entre types d'eau.

    Tableau 4: Synthèse des résultats statistiques.

    Paramètres

    Différence entre traitements

    Différence entre zones

    Observations

    Diversité (Annexe 7)

    Non mesurée

    Non mesurée

    Distribution ne suit pas une loi normale

    Nombretotal d'animaux

    (Annexe 7)

    Lit bactérien > lagunage> barrage

    Non significative

    Distribution log normale

    Collemboles (Annexe 7)

    Non mesurée

    Non mesurée

    Distribution ne suit pas une loi normale

    Oribates (Annexe 7)

    Lit bactérien > lagunage> barrage

    Non significative

    Distribution log normale

    Gamasides (Annexe 7)

    Lit bactérien > lagunage> barrage

    Non significative

    Distribution log normale

    Lombrics
    (Annexe 7)

    Non significative

    Non significative

    Distribution log normale

     
     

    La deuxième hypothèse du travail est vérifiée.

    Nous considérerons que la faune des sols est un indicateur de la fertilité car ses effectifs permettent d'enregistrer des différences significatives déja observées dans la présentation des résultats concernant la production végétale. Il existe une relation entre la faune des sols et la qualité des eaux utilisées pour l'irrigation. Cette relation permet le maintien d'effectifs de population animale deux fois supérieurs sur les parcelles traitées par rapport aux parcelles témoins.

    La variation observée entre les années 1992 et 1993 met en évidence une diminution progressive de la fertilité biologique du milieu.

    2.3. Evolution de la fertilité physique des sols.

    On vérifie ici si les observations effectuées sur les plantes (enroulement des feuilles) et sur les sols (écoulements préférentiels) correspondent à des problèmes d'infiltration d'eau dans le sol. La première cause possible peut être les modifications des débits d'entrée de la STEP. Ceux-ci ont provoqué une modification observée de la qualité biologique des eaux (plancton). Cette modification de qualité peut provoquer une diminution de l'infiltration par le colmatage du sol.

    On décide en conséquence d'effectuer des mesures du temps d'infiltration sur un système contrôlé, sans
    végétation. D'autre part, pour déterminer si les variations de croissance mesurées sur la végétation

    dans la zone C sont dues à des problèmes d'alimentation hydriques des plantes, on effectue des mesures du temps d'infiltration sur le site expérimental en septembre 1993. Deux réponses sont attendues. La première devrait permettre de connaître l'influence de la qualité des eaux sur le temps d'infiltration. La seconde doit faciliter la compréhension de la relation entre la typologie des sols et le temps d'infiltration.

    Expérimentation sur un milieu contrôlé.

    Les caractéristiques de ce milieu ont fait l'objet d'un travail de diplôme E.P.F.L. (Rudig, 1992). Dans ce travail l'infiltrabilité moyenne mesurée est de 1x10-5 m/s. Rudig note l'influence de la mise en eau initiale du dispositif. Ce phénomène est à prendre en compte pour l'analyse des mesures qui suivent. L'influence des pluies dans cette expérience provoque une modification brutale des temps d'infiltration mesurés.

    On procède à des mesures du temps d'infiltration de quatre types d'eaux différents.

    Il s'agit des eaux provenant des bassins de maturation du lagunage et du lit bactérien d'une part, d'eaux du réseau de la ville et du premier bassin de maturation de la filière lagunage d'autre part.

    Les caractéristiques générales des deux premières sont connues. Les deux autres sont utilisées à titre de référentiel. Dans ce cas, c'est le taux de matières en suspension qui fait référence. Les eaux provenant du réseau d'eau potable sont considérées comme très faiblement chargées en matières en suspension, alors qu'à l'opposé, les eaux du premier bassin de la filière lagunage en sont fortement pourvues (MES >10 mg/l, Roduit, 1993).

    L'expérience débute en mars 1993. Un seau de 15 litres est versé chaque jour dans un carré de 50 cm de côté. On mesure le temps d'infiltration.

    Tableau 1: Résultats des mesures du temps d'infiltration sur milieu contrôlé.

    Mois

    Lagunage
    (1er bassin)

    Lit bactérien

    Lagunage
    (2ème bassin)

    Eaux du réseau

    Mars

    28 mn

     

    14 mn

    36 mn

    Avril

    55mn

    53 mn

    39 mn

    98 mn

    Mai

    111 mn

    35 mn

    94 mn

    178 mn

    Juillet

    93 mn

    166 mn

    313 mn

    962 mn

    Août

    103 mn

    149 mn

    214 mn

    959 mn

    Septembre

    50 mn

    101 mn

    190 mn

    772 mn

    Octobre

    45 mn

    75 mn

    408 mn

    474 mn

    Novembre

    40 mn

    86 mn

    471 mn

    563 mn

    Décembre

    38 mn

    88 mn

    407 mn

    444 mn

    Janvier

    35 mn

    101 mn

    340 mn

    439 mn

    Février

    35 mn

    87 mn

    314 mn

    443 mn

    A partir du mois de mai commence la saison des pluies. Au mois de juin, on observe sur le carré de l'essai lit bactérien la formation d'une croûte de surface composée d'algues (cf. photo). Sur le carré de l'essai eau du réseau la surface du sol ressemble à de la terre cuite. En saison des pluies le carré des eaux de lagunage est le seul fréquenté par des chilopodes de couleur orange (cf. photo).

    Graphique 1: Mesures du temps d'infiltration (mn) sur le système contrôlé (Sud STEP).

    1000

    900

    800

    700

    600

    500

    400

    300

    200

    100

    0

    1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 1 2 lagunage lit bactérien premier bassin

    Temps d'infiltration (mn) moyennes mensuelles

    du premier mois d'expérimentation (mars 93) au 11eme (février 94)

    Les écarts types diminuent progressivement pour les eaux du lit bactérien et celles du premier bassin de lagunage alors qu'ils restent importants pour les deux autres types d'eaux. L'expérience a duré 11 mois, de mars 1993 à février 1994. Il apparaît une différenciation entre les différents types d'eau.

    On notera qu'en fin d'expérimentation les analyses chimiques du sol donnent les résultats suivants:

    Tableau 2 : Analyses chimiques (cations échangeables) effectuées en fin d'expérimentation.

    Type d'eau

    Mg (meq/100g)

    Ca
    (meq/100g)

    K
    (meq/100g)

    Na
    (meq/100g)

    S
    (meq/100g)

    Lit bactérien

    1.24

    4.19

    0.28

    0.31

    6

    Lagunage

    1.33

    4.59

    0.34

    0.28

    6.55

    Réseau

    1.26

    3.99

    0.25

    0.16

    5.7

    Premier bassin

    1.2

    3.41

    0.29

    0.3

    5.2

    Tableau 3: Proportion de carbone et d'azote dans les sols. Teneur en substances humiques (essai en milieu contrôlé).

    Type d'eau

    Azote
    %o

    Carbone

    %

    Substances humiques
    (mgC/g de sol)

    Lagunage

    0.08

    0.76

    1,5

    Lit bactérien

    0.08

    0.81

    1.80

    Réseau

    0.07

    0.69

    1

    Premier bassin

    0.05

    0.46

    0.6

    Tableau 4: Dénombrements d'animaux pour chaque essai.

    Type d'eau

    Nombre d'animaux Nombre de lombrics

    Lagunage

    1700

    13

    Lit bactérien

    échantillon d'animaux
    renversé

    27

    Réseau

    800

    1

    Premier bassin

    700

    0

    Il y a une influence de la qualité des eaux sur l'infiltration.

    L'observation de la surface des carrés sur lesquels cette expérimentation s'est effectuée montre que les eaux potables du réseau provoquent une destructuration rapide de la surface du sol.

    Malgré la perte de données pour le lit bactérien, on a constaté sur la surface du sol la formation d'une croûte d'algues. L'observation de la présence d'animaux y est attestée en surface par les chilopodes et en profondeur par les lombrics. On considère que la croûte d'algues permet le maintien de la structure du sol.

    L'eau du premier bassin est fortement chargée en matières en suspension. Il n'y a pas de colmatage des sols par ces matières en suspension. Aucune structure particulière n'est visible à la surface du sol

    Dans le cas du lagunage, on constate que malgré des effectifs de lombrics supérieurs à ceux observés pour les eaux du réseau, le temps d'infiltration reste important. On suppose que ce phénomène est dû à un colmatage du sol par des algues spécifiques (Errerella sp.) trouvées dans ce type d'effluent.

    Mesures du temps d'infiltration sur le site de R.E.U..

    Sur le terrain, en septembre 1993, on enregistre les données suivantes en procédant au même type de mesures.

    Tableau 5: Mesures du temps d'infiltration sur le site expérimental.

    Type d'eau

    Temps d'infiltration (en minutes)

    Barrage

    76 mn écart type 39 mn

    Lagunage

    40 mn écart type 39 mn

    Lit bactérien

    25 mn écart type 20 mn

    Pluie

    10 mn écart type 6 mn

    Tableau 6: Synthèse des résultats statistiques.

    Lieu de mesure

    Différence entre types d'eau

    Observations

    Nord de la STEP

    Temps d'infiltration 1er bassin et lit bactérien < réseau et lagunage. Les différences entre traitements sont de plus de 100%

    L'arrivée des pluies modifie fortement les distributions qui sont Log normale pendant les deux premiers mois.

    Site expérimental

    Significative Pluie<traités<

    barrage

    Distribution Log normales 36 échantillons

    L'ensemble de ces mesures indique une influence de la qualité des eaux sur les temps d'infiltration.

    La mesure sur le site expérimental montre la forte influence des différents modes de gestion de la fertilité. Le système naturel est caractérisé par des temps d'infiltration extrêmement bas comparé aux systèmes cultivés.

    Les eaux usées permettent seulement de ralentir les processus qui conduisent à une augmentation des temps d'infiltrations.

    2.4. Evolution comparée des indicateurs.

    Les résultats qui ont été présentés permettent de distinguer trois groupes d'indicateurs de fertilité.

    Les indicateurs sensibles aux variations spatiales, les indicateurs sensibles aux traitements et les indicateurs dont la sensibilité est indépendante des facteurs de variation prévus. Les observations complémentaires effectuées sur le matériel végétal cultivé de novembre 1992 à mars 1993 permettent de mettre en évidence deux facteurs principaux d'altération de la croissance végétale, soit l'azote (coloration du feuillage) et le manque d'eau dans le sol (enroulement des feuilles). On présentera ici les évolutions entre l'état initial et l'état constaté en mars 1993 après quatre cycles culturaux.

    Graphique 1: Comparaison entre les mesures initiales de 1990 et les mesures de mars 1993 des composés organiques du sol.

    Evolution du taux de substances humiques (mg de C/g de sol)

    2

    1.5

    1

    0

    0.5

    A

    C

    B

    Barrage Lagunage

    1990 1992 1993 1990 1992 1993 1990 1992 1993

    Tableau 1: Evolution du taux de carbone des sols entre 1990 et 1993.

    Zone

    Type d'eau

    Evolution du taux de carbone organique en % de différence par rapport à 1990

    Zone A

    Barrage

    -17%

     

    Lit bactérien

    6%

     

    Lagunage

    15%

    Zone B

    Barrage

    13%

     

    Lit bactérien

    36%

     

    Lagunage

    6%

    Zone C

    Barrage

    -17%

     

    Lit bactérien

    7%

     

    Lagunage

    -2%

    On constate une baisse globale du stock de substances humiques dans le sol et cette baisse s'est accompagnée d'une baisse en azote et phosphore total.

    Tableau 2: Evolution de la teneur en azote et en phosphore des sols entre 1990 et 1993.

    Zone

    Type d'eau

    Phosphore

    Evolution en % par
    rapport à 1990

    Azote

    Evolution en % par
    rapport à 1990

    Zone A

    Barrage

    -74%

    -38%

     

    Lit bactérien

    -71%

    -47%

     

    Lagunage

    -73%

    -43%

    Zone B

    Barrage

    -54%

    -23%

     

    Lit bactérien

    -60%

    -32%

     

    Lagunage

    -56%

    -24%

    Zone C

    Barrage

    -66%

    -45%

     

    Lit bactérien

    -38%

    -38%

     

    Lagunage

    -48%

    -45%

    Tableau 3: Evolution de la teneur en cations du sol.

    Zone

    Type d'eau

    Potassium

    Evolution
    en % par
    rapport à

    Sodium

    Evolution
    en % par
    rapport à

    Calcium

    Evolution
    en % par
    rapport à

    Magnesium

    Evolution en
    % par rapport
    à 1990

    Somme des
    cations
    échangeables

     
     

    1990

    1990

    1990

     
     

    Zone A

    Barrage

    113%

    -49%

    30%

    -15%

    16%

     

    Lit bactérien

    186%

    141%

    17%

    -0.4%

    17%

     

    Lagunage

    191%

    34%

    19%

    -8%

    18%

    Zone B

    Barrage

    184%

    -29%

    52%

    19%

    43%

     

    Lit bactérien

    327%

    205%

    84%

    20%

    84%

     

    Lagunage

    198%

    126%

    36%

    -3%

    37%

    Zone C

    Barrage

    125%

    8%

    17%

    -2%

    14%

     

    Lit bactérien

    510%

    324%

    22%

    16%

    43%

     

    Lagunage

    326%

    159%

    4%

     

    14%

    Les eaux usées permettent de maintenir une production végétale sur les parcelles cultivées. On observe cependant une diminution du taux des composés organiques du sol ( animaux et substances humiques), de l'azote et du phosphore. La baisse en azote et en phosphore des sols est à mettre en relation avec l'exportation des résidus de culture. Les diminution du stock de substances humiques du sol est à mettre en relation avec la diminution du nombre d'animaux et les mesures du temps d'infiltration.

    L'observation de l'évolution du témoin montre que cette diminution est une tendance globale que les eaux usées permettent simplement de ralentir. On ne peut parler d'un effet conservatoire pour la fertilité des sols des eaux usées. En analysant les paramètres choisis en saison des pluies après trois mois de jachères, on vérifiera s'il y a régénération de la fertilité des sols cultivés.

    Chapitre 3. Influence des travaux culturaux sur la fertilité du sol.

    Pour parvenir à déterminer l'influence des travaux culturaux sur la fertilité du sol, on utilise les données acquises durant la saison des pluies 1993 comme références. On dispose alors des critères qui permettent d'estimer, dans ce chapitre, la valeur de l'indicateur biologique proposé (deuxième étape) puis l'influence de l'irrigation sur la fertilité du milieu (troisième étape).

    On teste statistiquement les données acquises en février 1994 avec celles obtenues durant la saison des pluies. Pour distinguer les saisons des pluies des saisons sèches dans les graphiques, on désigne ces échantillons par un nombre décimal. (ex: 1993.5).

    3.1. Caractéristiques des zones de friches et mesure des paramètres en saison des pluies.

    Ces zones de friches constituées par les espaces intercalaires entre les parcelles ne reçoivent aucun amendement. On les désigne par le type d'eau qui les arrose c'est-à -dire la pluie. De plus pour obtenir un référentiel le plus proche possible des conditions expérimentales, on exporte chaque année la biomasse végétale produite.

    En septembre 1993 on mesure le poids de végétation produit sur l'ensemble du site expérimental qui a été laissé en friche.

    Tableau 1: Mesures de biomasse végétale épigée produites en septembre 1993.

    Zone

    Mesures

    Barrage

    Lagunage

    Lit bactérien

    Pluie

    Zone A

    Poids frais Poids sec

    13 t/ha

    4 t/ha

    25 t/ha 7.8 t/ha

    19 t/ha

    6 t/ha

    19 t/ha 6.8 t/ha

    Zone B

    Poids frais Poids sec

    11.7 t/ha 3.6 t/ha

    11 t/ha 4 t/ha

    25 t/ha 7.8 t/ha

    23 t/ha 8 t/ha

    Zone C

    Poids frais Poids sec

    16 t/ha

    5 t/ha

    15 t/ha

    4 t/ha

    15 t/ha 5.6 t/ha

    21.6 t/ha 7.6 t/ha

    Moyennes

    Poids frais Poids sec

    13 t/ha 4 t/ha

    17 t/ha

    5 t/ha

    20 t/ha 6.6 t/ha

    20 t/ha 7.7 t/ha

    On complétera ces mesures par les résultats des dénombrements d'animaux dans le sol.

    Tableau 2: Résultats des mesures sur les effectifs des populations édaphiques.

    Type d'eau

    Collemboles (ind/m2)

    Oribates
    (ind/m2)

    Gamasides (ind/m2)

    Diversité

    (nombre de

    groupes rencontrés)

    Nombre total

    d'animaux

    (ind/m2)

    Barrage

    675

    2125

    5950

    9

    10750

    Lit bactérien

    3460

    13560

    8600

    14

    31400

    Lagunage

    3700

    2150

    10500

    10

    18750

    Pluie

    2372

    7072

    4990

    14

    21463

    On constate une augmentation des effectifs des populations animales durant la saison des pluies sur les parcelles cultivées. Les résultats statistiques concernant les mesures de biomasse montrent une différence entre les poids obtenus pour le lit bactérien et ceux des zones naturelles par rapport aux deux autres catégories de mesures. La différence entre zones est inexistante. Il y a régénération de la fertilité biologique du milieu. Cette régénération a l'amplitude la plus forte pour les parcelles du lit bactérien. On considère que le sarclage est responsable de la diminution des effectifs des populations animales sur les parcelles cultivées irriguées par les eaux usées.

    3.2. Mise en culture sans sarclage d'octobre 1993 à février 1994.

    Durant cette période, nous cherchons à reproduire des conditions écologiques proches de celles observées sur la friche. Pour y parvenir nous limitons les travaux culturaux. Seul le labour avant le semis des parcelles est pratiqué.

    La première conséquence de ce type de pratiques culturales est le développement d'une population d'adventices diversifiée. Il y a une augmentation de la diversité floristique sur les parcelles cultivées Contrairement aux observations de mars et juin 1993, les plantes du genre Portulaca ne dominent pas. L'ensemble des genres observés en saison des pluies est complété par des espèces observées en saison sèche sur les zones non cultivées.

    La deuxième conséquence est un ameublissement du sol. Celui-ci est constaté lors des prélèvements d'échantillons en février 1994.

    La troisième conséquence est une amélioration de l'humidité du sol en profondeur. A 10 cm de profondeur le sol est encore humide, ce qui n'était pas le cas en mars 1993.

    La quatrième conséquence est le maintien de l'humidité à la surface du sol. Celle-ci est observée sur le feuillage des adventices.

    La modification du milieu en terme d'humidité est nette. Ces observations sont à associer aux mesures du temps d'infiltration effectuées en février 1994.

    3.2.1. Evolution de la fertilité biologique.

    Résultats des cultures.

    Tableau 1: Mesure du poids moyen des épis récoltés.

    Zone

    Barrage

    Lit bactérien

    Lagunage

    A

    80 g

    186 g

    107 g

    B

    67 g

    164 g

    210 g

    C

    72 g

    76 g

    114 g

    Dans la zone C, le poids moyen des épis est particulièrement diminué pour les parcelles du lit bactérien. On observera que ces parcelles sont entourées de ligneux (Azadirachta indica) dont les racines ont tendance à coloniser les parcelles notamment la parcelle . Ces arbres sont jeunes il est possible qu'il y ait une concurrence pour les éléments nutritifs.

    Tableau 2: Mesure du poids frais des tiges de maïs pour 1 m2.

    Zone

    Barrage

    Lit bactérien

    Lagunage

    A

    1533 g

    3026 g

    1668 g

    B

    861 g

    1153 g

    3409 g

    C

    1126 g

    1755 g

    1465 g

    Croissance du maïs en février 1994.

    On a isolé les parcelles témoins les plus âgées. Ces parcelles numérotées A10 et C10, ont eu une production faible (A10), à nulle (C10). La parcelle B10 a été cultivée pendant une moins longue durée en raison de la mise en place des puisards. On constate au niveau de la zone A que les témoins sont peu différents des traités. Dans cette zone, la présence d'une fourmilière (Témoins A1, cf. plan topo.) a limité l'exploitation de cette parcelle. Les différences de coloration du feuillage persistent, mais la marque brune au centre des feuilles qui indique une forte carence en

    azote n'est pas observée. La flore d'adventices est absente des parcelles témoins A10 et C10, elle est faiblement développée sur les autres témoins.

    Graphique1: Histogramme représentant la hauteur moyenne du maïs (10 mesures par parcelles).

    150

    125

    100

    75

    50

    25

    0

    Zone A

    Zone B

    Zone C

    Graphique des mesures de la taille du maïs en février 1994 (répartition par zones)

    Tableau 3: Synthèse des résultats (croissance végétale).

    Mesure

    Résultats statistiques

    Observations

    Taille des tiges

    Différences significatives

    entre témoins et traités.

    Pas de différences entre
    zones

    Distribution normale après élimination des témoins de la série 10 et de A1

    Poids moyen des épis

    Non testé

    Nombre d'échantillons trop faible

    Poids frais de dix

    tiges

    Non testé

    Nombre d'échantillons trop faible

    Graphique 2: Résultats statistiques des mesures de croissance du maïs: différences entre zones.

    170

    160

    150

    140

    130

    120

    110

    100

    40

    90

    80

    70

    60

    50

    30

    20

    A B C

    Zone

    All Pairs Tukey-Kramer 0.05

    Evolution des populations animales.

    On observe une activité importante à la surface des sols, notament la présence de fourmis rouges. Les lombrics sont également actifs, mais ils sont attaqués en surface par ces fourmis. Les plaquages de termites sont peu nombreux sur les parcelles et apparaissent plus particulièrement sous les Azadiracta.

    Tableau 4: Résultats des dénombrements des populations animales du sol, février 1994.

    Type d'eau

    Collemboles (ind/m2)

    Oribates (ind/m2)

    Gamasides (ind/m2)

    Diversité

    (nombre de

    groupes rencontrés)

    Nombre total

    d'animaux

    (ind/m2)

    Barrage

    722

    2322

    3300

    9

    8330

    Lit bactérien

    5440

    15620

    4360

    11

    31600

    Lagunage

    9366

    5600

    3066

    8

    20655

    Il y a une augmentation nette du nombre d'animaux présents dans les sols, ce qui peut être représenté sous forme d'un graphique. On constate une similitude entre les effectifs des populations animales en saison des pluies (1993-5) et ceux de février 1994. Dans les deux cas, les effectifs présents sur les parcelles irriguées par les eaux du lit bactérien sont les plus importants.

    Pour effectuer des prélèvements en saison des pluies, il est nécessaire de tenir compte de la période choisie. En 1991 et 1992 les prélèvement ont été effectués trop tôt. On suggère que le mois le plus favorable pour ce type de mesure est le mois de septembre. Le sol est encore suffisamment humide et la végétation en plein épanouissement, ce qui assure d'obtenir un effectif représentatif.

    Le fait d'obtenir des populations importantes en février 1994 montre que les conditions microclimatiques présentes à cette date sur le site sont proches de celles du mois de septembre. L'augmentation observée est une augmentation globale des effectifs et ne concerne pas un seul groupe. Ces augmentations ne concernent pas les parcelles témoins.

    Le problème fondamental qui limite l'interprétation de ces résultats est que l'on ne dispose pas de possibilité de comparer ces résultats avec ceux obtenus sur d'autre sites dans la même région.

    Les chiffres sur la diversité sont plus faibles que ceux de la saison des pluies. Malgré les modifications observées du microclimat, les arthropodes typiques de la saison des pluies sont toujours absents sur les parcelles en saison sèche.

    Graphique 3: Moyennes interannuelles des effectifs des populations édaphiques pour 1 m2.

    40000

    Effectifs des populations

    animales indv/m2

    30000
    20000
    10000
    0

     

    Barrage Lagunage

    Lit bactérien Pluie

    30

    20

    10

    0

    Graphique 4: Effectifs des populations de lombrics.

    40

    Effectifs (Nbr.d'indv/25cm2)

     

    Barrage

    Sept.1993 Fév.1994

    Lagunage

    Lit bactérien

    Pluie

    On a effectué deux types de tests statistiques en sélectionnant les données soit par saison, soit par couverture végétale. Dans le premier cas on compare les résultats obtenus durant les saisons des pluies avec les résultats obtenus en février 1994 (comparaison 1). Dans le second, on compare les résultats obtenus en saison sèche sous culture (comparaison 2).

    La comparaison des résultats en saison sèche montre qu'il n'y a pas de différence entre zones pour tous les groupes. Les oribates sont le seul groupe qui soit marqué par une différence spatiale dans la comparaison avec les chiffres de saison des pluies.

    Tableau 5 : Synthèse des résultats statistiques.

    Mesure

    Différence statistique (type d'eau et zone)

    Différence statistique (année scolaire)

    Observations

    Nombre total d'animaux

    Collemboles

    Gamasides

    Oribates

    Lombrics

    Pas de différence entre

    zones

    Lit bactérien >lagunage et barrage

    Saison des pluies1993>

    1994 et saison des pluies 1991 et 1992

    1994>1993 et 92

    (comparaison 2)

    Distributions log normales

    Pas de différence entre

    zones

    Lagunage et lit

    bactérien>barrage

    Pas de différence

    Comparaison 2:

    Distribution LogN+1

    normale

    Comparaison1: Distribution log normale

    Pas de différence entre

    zones, pas de différence
    entre types d'eau.

    Pas de différence

    Distribution Log normale seulement pour la comparaison 2

    Différence entre zones dans le cas de la comparaison1

    Lit bactérien> Lagunage et barrage

    1994> saison sèche 92/93

    1994< saison des pluies 1993

    Distribution log normales

    Pas de différence entre

    zones si on supprime le témoin B1

    Lit bactérien et lagunage> pluie et barrage

    Pas de différence

    Distribution log normales

    Il y a une régénération de la fertilité biologique du milieu.

    Cette régénération observée en saison des pluies 1993 est confirmée en février 1994. Ici encore, les eaux du lit bactérien semblent plus «stimulantes» pour les populations édaphiques.

    L'ensemble de ces résultats met en évidence l'impact des travaux de sarclage sur les populations animales. Ce travail du sol limite leur développement. Deux causes à cette diminution des populations: sont à envisager:

    - la diminution de la diversité botanique.

    - la destruction des niches écologiques dans les premiers cm du sol lors des saclages.

    3.2.2. Evolution de la fertilité chimique du sol.

    Tableau 6 : Capacité d'échange cationique.

    Zone

    Type d'eau

    Mg meq/100g

    Ca meq/100g

    Na meq/100g

    K meq/100g

    S meq/100g

     

    Barrage

    0.7

    2.8

    0.3

    0.1

    3.8

    Zone A

    Lagunage

    0.6

    2.8

    0.6

    0.2

    4.1

     

    Lit Bactérien

    1

    4.1

    0.6

    0.1

    6

     

    Pluie

    0.5

    2.7

    0.3

    0.1

    3.6

     

    Barrage

    1.4

    7

    0.4

    0.3

    9.1

    Zone B

    Lagunage

    0.7

    3.8

    0.5

    0.1

    5.2

     

    Lit Bactérien

    0.8

    6

    0.8

    0.2

    7.9

     

    Pluie

    0.9

    4.1

    0.3

    0.1

    5.4

     

    Barrage

    0.8

    3.7

    0.8

    0.04

    5.4

    Zone C

    Lagunage

    0.9

    4

    0.9

    0.1

    5.9

     

    Lit Bactérien

    0.7

    3.3

    0.2

    0.1

    4.3

     

    Pluie

     
     
     
     
     

    La modification la plus frappante des résultats est la diminution de la teneur en sodium des sols irrigués par les eaux du lit bactérien. La teneur en magnésium du sol est nettement améliorée par rapport à la teneur mesurée en 1993.

    Tableau 7: Azote et phosphore.

    Zone

    Type d'eau

    Phosphore %0

    Azote %0

     

    Barrage

    0.1

    0.2

    Zone A

    Lagunage

    0.1

    0.1

     

    Lit Bactérien

    0.1

    0.5

     

    Pluie

    0.1

    0.5

     

    Barrage

    0.3

    0.5

    Zone B

    Lagunage

    0.2

    0.5

     

    Lit Bactérien

    0.2

    0.6

     

    Pluie

    0.2

    0.6

     

    Barrage

    0.2

    0.2

    Zone C

    Lagunage

    0.2

    0.2

     

    Lit Bactérien

    0.2

    0.6

     

    Pluie

    0.1

    0.3

    Tableau 8: Composés organiques.

    Zone

    Type d'eau

    Carbone %

    Substances humiques

    (mgC/g de sol)

    Acides fulviques

     

    Barrage

    0.5

    1.2

    0.5

    Zone A

    Lagunage

    0.6

    1.7

    0.8

     

    Lit Bactérien

    0.5

    1

    0.8

     

    Pluie

    0.5

    1.5

    0.8

     

    Barrage

    0.7

    1.9

    1

    Zone B

    Lagunage

    0.5

    1.4

    0.6

     

    Lit Bactérien

    0.7

    1.4

    0.6

     

    Pluie

    0.7

    1.8

    0.9

     

    Barrage

    0.5

    1.

    0.5

    Zone C

    Lagunage

    0.5

    1.5

    0.6

     

    Lit Bactérien

    0.9

    1.83

    0.9

     

    Pluie

    0.6

    137

    0.6

    On observe une très nette augmentation du taux de substances humiques dans les sols qui sont proches de ceux mesurés lors de l'analyse de l'état initial.

    Les données ont été sélectionnées pour les calculs statistiques par groupes de zones. Une comparaison initiale entre toutes les données permet de séparer les résultats en deux groupes, la zone A apparaissant comme différente de la zone B et la zone C ayant des valeurs intermédiaires. On regroupe soit les données des zones A et C ,soit les données obtenues sur les parcelles C et B.

    On observe une amélioration globale de la fertilité chimique avec une stabilisation de la teneur en sodium des sols. Les variations de la teneur en cations sont dues à deux facteurs: l'amélioration de la circulation de l'eau dans le sol et leur remobilisation sous forme de biomasse animale.

    Tableau 9: Synthèse des résultats statistiques.

    Paramètres

    Différences entre

    type d'eau et entre zones

    Différences interannuelles

    Observations

    S

    (Annexe 5)

    B>A. Lit

    bactérien>lagunage et barrage

    1994>1990

    Comparaison entre zone A et C ou B et C

    Mg (Annexe 5)

    Non testé

    Non testé

    Distribution ne suit pas une loi normale pour la sélection

    Ca (Annexe 5)

    B>C

     

    Ne suit pas une loi normale pour les deux types de sélection des données

    K

    (Annexe 5)

    Lit bactérien et

    lagunage>pluie

    1993>1994 et1990

    Calculs effectués sur

    groupes A et C

    Na

    Lit bactérien et

    lagunage> barrage et pluie

    Non significatives

    Calcul effectués sur groupes A et C

    N

    (Annexe 2)

    Pas de différence

    entre zones. Pas de

    différence entre

    traités et pluie.

    Comparaison avec
    témoin non effectuée

    Non significatives

    pour la sélection

    Sélection sans témoin

    P

    (Annexe 2)

    Non mesuré

    Non mesurées

    Distribution différente de la loi normale

    C

    (Annexe 4)

    Lagunage et lit

    bactérien>témoin

    Non mesurées

    Zone A seule

    Substances humiques

    (Annexe 4)

    Pluie>témoin

    94>93

    Zone A

    Ac. Fulviques (Annexe 4)

    Pluie>témoin

    94>93 comparaison

    par paires

    Zone A

    La troisième hypothèse est vérifiée.

    0

    Ce renforcement va de pair avec une augmentation des effectifs et de la diversité de la faune des sols.

    3.2.3. Fertilité physique du sol: mesure du temps d'infiltration.

    Observations générales.

    On observe sur les parcelles témoins la formation d'une croûte structurale imperméable. Lors du creusement de fosses pédologiques, le sol est dur. Après arrosage, il y a persistance de flaques d'eau sur ces parcelles. Les marques d'humidité sont peu profondes (5 cm), contrairement aux parcelles traitées où le profil est humide sur 40 cm.

    La présence d'algues à la surface du sol est observée dans les zones C et B (cf.photo) sur les parcelles traitées..

    Les données concernant les temps d'infiltration ont été mesurées sur trois périodes. En saison des pluies 1993 (septembre), en saison sèche 1994 (février) et en fin de saison des pluies 1994 (octobre ).

    Les mesures du temps d'infiltration montrent une homogénéisation progressive des résultats (Annexe 3).

    Graphique 5: Mesures du temps d'infiltration (mn) sur le site expérimental

    40

    20

    50

    30

    10

    Zone C

    Zone A

    Zone B

    Evolution des mesures du temps d'infiltration entre sept. 93 et oct. 94

    Tableau 10: Analyse statistique des résultats des mesures du temps d'infiltration.

    Comparaisons

    Test statistique

    Comparaison entre année scolaire 1994 et 1995

    1994>1995

    Comparaison entre zones

    Significatif pour l'ensemble des mesures Non significatif entre années 1994/1995

    Comparaison interannuelle

    1993.5>1994 et 1995

    Cette mesure met en évidence une des tendances majeures observées dans cette deuxième phase de l'expérimentation, c'est-à-dire une disparition progressive des différences entre zones.

    3.2.4. Possibilité d'exploitation des parcelles en saison des pluies.

    A partir de mars 1994 toutes les parcelles ont été irriguées par des eaux usées.

    Du mil est cultivé durant la saison des pluies 1994 après avoir effectué du maraîchage entre mars et juin 1994. On mesure la croissance végétale. Les conditions de culture sont les mêmes que durant la période d'octobre 1993 à février 1994.

    Le but de cette mise en culture est d'évaluer grossièrement la capacité de régénération des parcelles témoins. Elle nous prouve que dans des conditions d'exploitation usuelles, alternance de cultures irriguées et de cultures pluviales, les eaux usées sont une technique adaptée.

    300

    200

    100

    0

    Graphique 6: Mesure de la taille des tiges de mil en octobre 1994.

    Mesure de la taille du mil: octobre 1994 400

    A B C

    Lagunage

    Lit bactérien Témoin

    Témoin A10
    Témoin C10

    L'écart type est compris entre 30 cm et 40 cm, les différences entre les anciens témoins et les parcelles traitées ne sont pas significatives. On constate cependant que les témoins 10 des zones A et C ont une croissance plus faible que les autres témoins. Le fait qu'une croissance ait eu lieu montre que ces témoins ont récupéré une partie de leur fertilité.

    La réutilisation des eaux usées permet de régénérer la fertilité des sols dans les conditions de culture qui ont été testées durant la seconde phase de l'expérimentation.

    L'élaboration des substances humiques et par ce biais le stockage de l'azote dans les sols est favorisée par la technique culturale proposée. Ce qui permet d'effectuer des cultures durant la saison des pluies en bénéficiant d'un effet fertilisant à moyen terme des eaux usées.

    Quatrième partie: Discussion et conclusion.

    Chapitre 1. Discussion.

    Les résultats présentés sont analysés de façon globale. Chaque phase de l'expérimentation est venue apporter des renseignements complémentaires. Cette vision globale permet de déterminer la nature des facteurs responsables des phénomènes observés. Nous en déduisons les indicateurs les mieux adaptés selon le type de situation rencontré.

    1.1. Choix des indicateurs de fertilité.

    Les sols de la zone d'étude présentent des caractéristiques qui limitent l'interprétation des données chimiques et physiques usuelles pour la mesure de la fertilité. L'expérimentation que nous avons effectuée nous permet d'établir un lien entre trois facteurs qui conditionnent la conservation des sols en mileiu tropical sec. Ces trois facteurs sont, l'infiltration de l'eau, le bilan organique et le développement végétal. Ce lien est établit par la faune du sol.

    1.1.1. Action de la qualité des eaux usées sur la fertilité physique des sols.

    L'évolution de la structure des sols en surface est le phénomène responsable de la baisse des rendements sur les parcelles témoins en mars 1993. Il s'accompagne d'une baisse du stock organique et minéral des sols.

    Ce constat n'a pu être corrélé avec une diminution des rendements sur les parcelles traitées ou sur les zones de friche. Cette similitude de comportement entre ces deux modes de gestion de la fertilité peut être expliquée. L'irrigation avec des eaux usées favorise les mêmes processus de conservation des sols que ceux qui permettent la régénération naturelle de la fertilité.

    L'indicateur faune des sols est sensible à la composition des eaux d'irrigation. Il évolue de façon parallèle sur les parcelles irriguées par des eaux usées et les zones de friche.

    La restauration de la fertilité du milieu constatée au cours de la deuxième phase nous permet de donner à la faune des sols un rôle prépondérant dans l'amélioration de la fertilité physique des sols sans pouvoir en détailler les mécanismes.

    L'expérimentation met en évidence trois impacts de l'eau sur la fertilité physique des sols. Ces impacts dépendent de la composition des eaux.

    Nous discuterons quels sont les indicateurs les plus représentatifs de chacune de ces situations en analysant cas par cas les mesures effectuées.

    Premier cas: Formation d'une croûte structurale avec augmentation du temps d'infiltration corrélée avec une diminution des effectifs des populations édaphiques.

    Un horizon de surface imperméable, lié à une destructuration du sol, est observé dans les sols irrigués par les eaux de barrage. La comparaison des résultats d'analyses des stocks organiques montre une différence entre les témoins et les traités. Dans le cas de l'essai en milieu contrôlé, les eaux du réseau présentent le même problème d'infiltration. Mais la baisse du taux de carbone n'est pas apparente.

    En favorisant le développement animal par des mode de culture ad hoc, nous avons permis une restauration partielle de la diversité biologique. Nous constatons une amélioration des conditions hydriques au travers des temps d'infiltration mesurés sur une année.

    Nous en concluons que la protection des sols contre la formation de microhorizon de surface fait appel à des processus dynamiques d'origine biologique. En mesurant les effectifs de la faune des sols on enregistre l'aptitude du sol à reconstituer sa structure malgré les modifications provoquées par l'eau.

    Les techniques culturales privilégient l'action physique de l'eau (mobilisation des particules et rejaillissement) sur la structure du sol (Cazenave et Valentin, 1989) en limitant le développement animal. Cette action est d'autant plus importante que l'irrigation s'effectue en saison sèche. Nous pensons qu'à moyen terme, la pratique de l'irrigation avec des eaux usées peut conduire a une réduction de l'infiltration si les pratiques culturales ne sont pas modifiées ainsi que nous l'avons proposé.

    L'indication obtenue par la mesure des paramètres de la fertilité chimique a dans ce cas une portée limitée. La mesure du temps d'infiltration et/ou des effectifs des populations animales est plus adaptée et permet d'associer l'évolution des rendements à celle d'indicateurs de fertilité précis.

    Deuxième cas: Diminution du temps d'infiltration non corrélée avec la présence d'une faune développée.

    Dans l'essai en milieu contrôlé, ce sont les effluents provenant du premier bassin de lagunage qui illustrent ce cas. L'amélioration de l'infiltration peut avoir deux causes. La première est liée à la présence de matières en suspension dans les eaux. Celles-ci en se déposant à la surface du sol limitent la réorganisation des particules minérales en surface. L'eau peut ainsi s'infiltrer dans le sol. La deuxième cause est une destructuration en profondeur du profil due à une minéralisation de la matière oragnique. Cette destructuration conduit à un lessivage des fines ce qui améliore la porosité de ces sols ferrugineux texture grossière.

    L'analyse chimique du sol qui subit ce traitement montre une rapide diminution des stocks organiques et minéraux. Nous attribuons ce phénomène à une minéralisation du stock de matières organiques des sols en condition anaérobie. Cette minéralisation est rendue possible par la présence de nutriments dans les eaux. La diminution des stocks organiques met en évidence le risque d'une destructuration du sol (Feller, 1994). La faible capacité d'échange mesurée serait liée au lessivage des fines, à la diminution du taux de substances humiques et à la migration des éléments nutritifs en profondeur. L'évolution de la fertilité chimique des sols selon un gradient de profondeur est alors une indication utile permettant de suivre cette migration.

    Dans ce cas, une analyse microstructurale associée à la mesure de l'évolution de la texture du sol
    en effectuant des prélèvement selon un gradient de profondeur à de faibles intervalles (2 à 5 cm)

    auraient été les moyens les mieux adaptés pour déterminer si les mécanismes responsables de l'amélioration de l'infiltration sont liés à des processus de destructuration du sol en profondeur (lessivage des fines).

    L'information obtenue par les indicateurs de la fertilité chimique du sol est efficace, celle obtenue par la mesure des effectifs des populations animales ou par la mesure du temps d'infiltration est de portée limitée.

    Troisième cas: Diminution du temps d'infiltration corrélée avec l'augmentation des effectifs des populations animales.

    Les eaux usées (lagunage et lit bactérien) permettent de distinguer deux phénomènes. Le premier est une modification de la structure du sol en surface par la formation (essai en milieu contrôlé) d'une pellicule d'algues qui recouvre le sol. Le second est une augmentation des effectifs des populations animales. La formation d'une croûte d'algues protectrices (Metting, 1984) conserve la structure des sols en surface en empêchant l'action physique de l'eau sur le sol. L'activité animale maintient la porosité du sol (Casenave et Valentin, 1989) par l'entretien et la formation des pores. Le sarclage a pour effet d'interrompre ces processus naturels de protection des sols. Nous avons observé en mars 1993 les signes évidents d'une mauvaise alimentation hydrique des plantes (enroulement des feuilles de maïs)

    Trois catégories de fonctionnement hydraulique des sols sont ainsi à distinguer: un écoulement limité voire nul, lié à la formation d'une surface imperméable (barrage et eaux du réseau), un écoulement homogène dont la vitesse dépend uniquement de la texture du sol (premier bassin), et un écoulement préférentiel lié à l'activité biologique (lagunage et lit bactérien). Nous distinguoons deux modes de destructuration du sol qui conduisent à deux phénomènes opposés. Une destructuration de surface qui limite l'infiltration et par conséquent empèche à court terme le lessivage et la lixiviation. Une destructuration à l'intérieur du profil qui améliore la porosité du sol mais favorise une baisse de sa fertilité chimique.

    La mesure des effectifs des populations animales apparaît comme un indicateur utile pour mesurer l'impact d'une technique d'irrigation. Cet indicateur permet de mettre en évidence l'impact de la composition des eaux sur la fertilité physique des sols.

    1.1.2. Cycle du carbone dans les sols et qualité des eaux usées.

    La matière organique joue un rôle de premier plan dans la conservation des sols tropicaux secs. Selon la composition des eaux utilisées, le bilan organique des sol peut évoluer dans des directions opposées. Cette évolution est conditionnée par les équilibres écologiques qui s'établissent dans le sol.

    Le cycle du carbone dans le sol est conditionné par les organismes qui s'y développent. L'activité bactérienne de minéralisation de la matière organique dépend de l'installation d'une chaîne alimentaire plus ou moins diversifiée qui permettra la régulation des populations bactériennes dans le sol (Kilbertius, 1980, Moore et al., 1988, Coleman et al., 1978). Les principaux prédateurs de bactéries sont les nématodes et les protozoaires. Les champignons peuvent émettre des substances antibiotiques qui leur permettent de limiter le développement des bactéries. Il ne s'agit pas là de prédation mais plutôt de compétition entre organismes. On connaît, par l'étude des systèmes épuratoires et par l'application des boues d'épuration au champ, trois orientations du cycle de la matière organique dans les sols (Ducommun, 1989).

    Lorsque la minéralisation bactérienne de la matière organique est favorisée en raison de la composition chimique du substrat, le sol fonctionne comme un milieu épurateur. Si on observe la transformation de la matière organique en biomasse et que cela s'accompagne de l'élaboration de composés organiques variés, le sol fonctionne comme un écosystème complexe dont la productivité dépend de l'énergie disponible. Enfin, le blocage des activités biologiques lié à une surcharge organique du milieu provoque une pollution du sol ce qui provoque une diminution de la diversité du milieu accompagnée d'un phénomène de putréfaction dans ce cas, les conditions de drainage et la texture du sol sont deux paramètres principaux.

    Dans le cadre de ce travail, nous avons rencontrés trois cas: Premier cas: réduction globale de l'activité biologique. Deuxième cas: rupture des équilibres écologiques.

    Troisième cas: renforcement de l'activité biologique globale.

    Premier cas: réduction globale de l'activité biologique.

    Avec les eaux de barrage le cycle du carbone est simplement réduit. Cette réduction est due à l'absence d'apport de fertilisant et à la diminution de la quantité d'eau disponible. Nous mesurons une baisse abrupte du stock organique la première année de mise en culture puis une diminution progressive mais lente jusqu'en septembre 1993. A cette date la diversité des populations animales et le stock de substances humiques augmentent.

    Cette baisse du stock organique puis son augmentation suite à la modification des pratiques culturales ne suivent pas l'évolution des rendements qui chutent brutalement en mars 1993 et stagnent par la suite. L'activité des populations édaphiques à partir de septembre 1993 reste limitée malgré les modifications des travaux culturaux, d'une part en raison de la faible croissance des adventices et d'autre part en raison de l'absence de composés organiques dans les eaux. Il n'y a pas d'augmentation spectaculaire des effectifs.

    La diminution progressive du stock organique des sols est d'autant plus rapide que celui-ci est accessible et que la disponibilité en eau est grande. Cette situation accentue les différences entre zones pour les mesures du taux de carbone et de substances humiques. Ces différences n'ont aucune incidence sur la formation des croûtes structurales et sur la production végétale puisque seul le nombre de cycles culturaux effectué est à prendre en compte.

    Dans ce cas, il n'y a pas eu atteinte aux équilibres écologiques dans le sol. Le seul facteur qui est modifié est le microclimat dans le sol et à sa surface, ce qui limite le développement biologique dans son ensemble. La régénération de la fertilité du milieu sera lente et proportionnelle à l'amélioration des conditions microclimatiques dans le sol.

    En mesurant à intervalles réguliers l'évolution du stock organique des sols nous pouvons constater la faible variabilité des mesures. Pour restaurer rapidement la fertilité de ces sols, il est nécessaire d'effectuer un apport qui favorise le développement des populations animales. La présence de zones non cultivées à proximité permettra la recolonisation naturelle du milieu. La réutilisation des eaux usées permet une régénération rapide de la fertilité (cf. Résultats de la culture de mil d'octobre 1994).

    Deuxième cas: rupture des équilibres écologiques.

    Les sols irrigués par les eaux du premier bassin sont pauvres en animaux du sol et aucun lombric n'y est présent En conditions d'anaérobiose, ce qui est le cas pour ce type d'eau, les protozoaires, les champignons et la faune des sols (Kozlovskaya cité par Bachelier, 1978) ne peuvent se développer. Nous en déduisons que dans ce sol, le cycle du carbone est conditionné uniquement par les activités bactériennes anaérobies. Dans ce cas, le sol fonctionne comme un système épurateur (Brissaud com. pers.). La forte diminution du taux de carbone des sols en est le symptôme le plus évident. Il y a eu une rupture dans les équilibres écologiques qui a favorisé le développement d'un seul type d'organismes (Dajoz R., 1985). Dans ce cas, les indicateurs sont le taux d'oxygène de l'eau et le rapport C/N et C/P de l'eau. Il y a une pollution du milieu. Cette pollution qui s'accompagne d'une amélioration de l'infiltration peut se propager en profondeur. Il apparaît dans ce cas que l'utilisation du temps d'infiltration comme seul indicateur risque de conduire à des interprétations erronées.

    Ce cas illustre l'importance à donner aux indicateurs qui permettent de mettre en évidence les modes de régulation de l'activité bactérienne dans les sols. En climat tropical, la vitesse de minéralisation de la matière organique est rapide. On constate que seuls des apports organiques de 40 t/ha/5ans permettent d'améliorer le bilan organique des sols (Sedogo, 1993). Il est nécessaire de se poser la question de savoir pourquoi nous observons une amélioration avec des apports bien plus faibles. L'augmentation des effectifs des populations animales qui va de pair avec cette amélioration est une indication valable. Cette question met en évidence l'importance de la définition de la qualité des eaux usées en vue de leur réutilisation.

    Troisième cas: renforcement de l'activité biologique globale.

    Dans ce troisième cas, qui concerne les eaux de lagunage et celles du lit bactérien, le cycle du carbone s'effectue au travers d'une chaîne alimentaire diversifiée dans laquelle les activités bactériennes sont contrôlées par les mécanismes naturels (rapport proie/prédateur et compétition). Lorsque nous avons limité les travaux culturaux nous avons favorisé le développement animal. Nous constatons que ce développement va de pair avec une diminution des différences entre zones pour l'ensemble des mesures concernant la matière organique dans les sols (cf. Annexe 4). Ce fait suggère que les eaux usées sont un mode de fertilisation organique qui est intégré au cycle du carbone par l'intermédiaire de la faune des sols. Contrairement aux eaux faiblement épurées du premier bassin de lagunage, les effluents testés présentent un taux d'oxygène dissous et une composition chimique et biologique qui respecte les cycles écologiques dans le sol. Pour déterminer les critères de qualité d'une eau en vue de sa réutilisation pour l'irrigation, les résultats que nous avons enregistrés peuvent être pris comme référence initiale.

    L'utilisation de la faune des sols présente un grand intérêt pour étudier l'impact d'une pratique agricole sur les équilibres biologiques dans le sol. La définition de la qualité des eaux à l'aide des paramètres utilisés dans ce travail est plus efficace que celle obtenue par les paramètres chimiques usuels. Ces indications ont l'avantage de ne pas nécessiter de matériel coûteux.

    1.1.3. Influence du climat et de la végétation sur les mesures.

    Le développement végétal est associé à une amélioration du bilan organique des sols irrigués par des eaux usées. Nous avons privilégié dans les analyses qui précèdent le rôle de la faune des sols dans les améliorations des paramètres de la fertilité du milieu en raison de sa valeur indicatrice.

    La végétation herbacée apparaît comme prépondérante pour le maintien d'un microclimat favorable à l'activité de surface de la faune édaphique.

    Comme cela a été présenté dans la première partie du travail, le climat sec de Ouagadougou crée une ambiance dont le pourcentage d'hygrométrie ne dépasse pas 30% en saison sèche. Sur l'expérimentation en milieu contrôlé, on a posé à partir d'octobre 1993 une protection en paille à 10 cm de hauteur afin de favoriser la création d'un microclimat à la surface du sol. Les mesures effectuées au thermohygromètre en février 1994 ont montré que ce dispositif n'avait aucune incidence sur l'hygrométrie du milieu.

    En limitant le sarclage, le développement de la végétation spontanée est favorisé. Il se crée ainsi une protection contre la circulation de l'air, tout en protégeant les sols contre l'augmentation de température (Baldy et Stigter, 1993). L'humidité relative est alors de 60% au minimum dans les dix premiers centimètres depuis la surface. Lorsqu'en 1992, des cultures d'arachides et de choux ont été effectuées, le même type de protection des sols a été observé. La conséquence de l'amélioration mesurée de l'hygrométrie permet le maintien d'une pellicule humide à la surface du sol. Les animaux du sol peuvent en conséquence se procurer en surface les éléments nutritifs dont ils ont besoin. C'est pour cette raison qu'ils perforent régulièrement la surface du sol.

    Il est possible de mettre en évidence cette modification du comportement animal en piégeant les animaux se déplaçant à la surface du sol (pièges Barber).

    La composition minérale des eaux usées permet d'associer les adventices aux cultures. L'incidence de ce type de protection de l'activité biologique du sol permet comme cela est présenté dans les résultats d'améliorer la fertilité du sol à moyen terme.

    1.1.4. Perspectives de recherches.

    En dehors de l'objectif désigné du travail il est apparu un ensemble de questions fondamentales non résolues. Certaines de ces questions peuvent être résolues grâce à la réutilisation des eaux usées. Il est possible par cet outil recherche de se dégager des contraintes climatiques saisonnières. En raison du respect de cycles écologiques dans le sol, les phénomènes observés à l'aide de cet outil peuvent conduire à des extrapolations sur le fonctionnement d'un sol en conditions naturelles.

    Recherches réalisées au moyen de la réutilisation des eaux usées.

    Mise en évidence de la relation plante/faune du sol.

    Le rôle joué par la plante dans l'établissement de microclimat à la surface du sol doit être mieux compris. La diversité botanique doit être prise en compte pour cette analyse.

    Pour améliorer l'efficacité des techniques actuellement utilisées pour régénérer la fertilité d'un milieu, une approche écologique de l'interface sol/plante doit être mise en place. L'étude des mécanismes qui favorisent l'augmentation des populations de la faune du sol dans les conditions de cultures que nous proposons permet de mettre en place ce type d'approche. Le rôle des plantes herbacées dans la régénération de la fertilité du milieu sera ainsi mis en évidence.

    Rôle du calcium dans la conservation des sol.

    Nous avons vu que le lit bactérien améliore le bilan calcique des sols. Nous avons constaté que ce type d'eau à une influence importante sur la faune des sols. Il serait utile de mieux comprendre le mode de distribution du calcium dans les sols suite à l'irrigation. Il faudrait connaître son origine dans les eaux et déterminer dans quel composant du sol il est stocké. Cette recherche permettrait de mieux comprendre pourquoi le calcium a un rôle si important dans la fertilité des sols ferrugineux tropicaux.

    Composition des eaux usées.

    La composition planctonique est apparue comme un critère valable pour estimer l'aptitude d'une eau à la réutilisation. Ce critère est également utile pour déterminer la biomasse de poissons qu'il est possible de produire en aquaculture. La stabilisation de ce type de paramètres ne peut être réalisée que par la prise en compte des phénomènes biologiques provoqués par la maturation des composés organiques dans les eaux (Belbahri,1991). Les débouchés de ce type de travail sont une amélioration de la conception des ouvrages d'assainissement naturel.

    Recherches fondamentales.

    Impact de la mise en culture sur la faune des sols.

    Pour estimer l'amélioration de la biodiversité dans les sols des critères de référence doivent être disponibles. Les travaux en cours au Burkina Faso par l'I.R.B.E.T (M. Ouédraogo com. Pers.) devraient permettre l'élaboration de ces critères. Il sera alors plus facile de déterminer les causes de la diminution des populations animales dans les sols sous culture. De notre point de vue, ces causes sont d'ordre biologique (prédation) et microclimatique.

    Etude de la synthèse des substances humiques.

    Nous privilégions dans notre travail la faune des sols en tant qu'élément moteur de la fertilité des sols en climat tropical sec. Cette position s'appuie sur le constat dressé à partir des études effectuées sur la synchronisation entre la mise à disposition des éléments nutritifs et la croissance des plantes. L'origine des composés organiques disponibles dans le sol doit être déterminée. Les observations générales que nous avons effectuées nous conduisent à penser que les cadavres des arthropodes et les déchets de leur activité sont les précurseurs de ces composés organiques.

    1.2. Aménagements sanitaires et réutilisation des eaux usées.

    Deux aspects de la réutilisation des eaux usées et de l'aménagement sanitaire seront développés. Le premier concerne l'aspect socio-économique du problème, le second son aspect technique.

    1.2.1. Influence de la mise en culture et pouvoir fertilisant des eaux usées: Bilan de la recherche.

    Quelles améliorations économiques et environnementales peut-on attendre de la pratique de la réutilisation des eaux usées dans les conditions que nous avons développées ? Nous orienterons la réponse à cette question dans deux directions, la première en tenant compte de l'aspect économique et la seconde en estimant les aspects sociaux.

    L'avantage de pouvoir réutiliser les eaux usées sans fertilisation de complément réside tout d'abord dans la diminution des investissements nécessaires à la production. Bien que les engrais et fumures ne constituent pas les frais les plus importants du maraîchage en saison sèche, une économie est ainsi réalisée (Naef, 1992). Par la présence d'un couvert végétal bien développé on assure le maintien d'équilibres favorisant la lutte biologique sur les parcelles cultivées. Le mélange d'une production horticole à la production maraîchère semble favoriser la présence d'hyménoptères et de prédateurs tels les mantes religieuses. On a pu éprouver l'efficacité de ce contrôle biologique des parasites dans certaines situations que l'on a corroborées avec la tradition orale (utilisation de fourmis). Sans disposer d'un outil expérimental de comparaison, il est apparu que les autres maraîchers pratiquant la R.E.U. sur la rive opposée du marigot rencontraient des problèmes phytosanitaires sur leur culture.

    On notera l'apparition des reptiles (serpents) sur le site expérimental. Bien que ce phénomène soit dû plus particulièrement à l'accumulation des résidus végétaux en bordure du site il ne doit pas être négligé. C'est là une des limites que l'on posera au développement de la faune sur les milieux cultivés. Des observations sont à effectuer pour déterminer s'il y a un risque potentiel de développement d'animaux dangereux.

    L'autre limite est posée par les oiseaux appelés localement mange-mil qui ont causé des dégâts aux récoltes de maïs. La destruction des épis s'élevait à environ 10% des récoltes. D'après les agriculteurs, la présence d'arbres favorise la venue de ces oiseaux sur le site.

    Le fait d'entretenir une végétation bien développée sur les parcelles cultivées en saison sèche
    comporte ainsi des avantages et des inconvénients. Bien que cela ne concerne pas la fertilité

    naturelle du système pour laquelle le développement de la végétation est un facteur positif, il faut entreprendre des études à plus long terme sur ce type de problématique.

    On doit également prendre en compte qu'il est difficile pour un agriculteur de laisser se développer des adventices au milieu des cultures. L'aspect général des cultures semble peu soigné, ce qui nuit à leur réputation. D'ailleurs, il semble bien qu'en 1994 et 1995, le sarclage ait été repris sur le site expérimental. Selon le type végétal, il est possible que cette modification n'ait pas d'influence sur les paramètres microclimatiques mis en évidence dans ce travail.

    En l'absence d'un bilan économique complet de l'évolution des revenus de M. Kaboré, on constate qu'il continue, malgré l'arrêt de ce travail de recherche, à effectuer des cultures sans rémunération autre que le bénéfice tiré des récoltes. On peut considérer que dans ce sens, l'objectif appliqué de la recherche est réalisé puisque la méthode est adoptée. La fertilisation obtenue grâce à l'irrigation par les eaux usées semble satisfaire l'utilisateur.

    L'attribution de la parcelle à M. Kaboré, pour une période qui n'a pas été définie, pose le problème foncier présenté auparavant. Il ne semble pas y avoir eu de nouvelles implantations d'espèces fruitières sur le site. Le site de réutilisation présente à l'heure actuelle l'intérêt de fournir un exemple direct de ce qu'il est possible d'effectuer comme aménagements. Les arbres sont modérément taillés et ne présentent pas les traces habituelles de coupes sommaires. Dans les conditions avantageuses proposées à l'agriculteur, il apparaît que ses intérêts sont préservés. Il est difficile d'en extrapoler la valeur de notre expérimentation. Le mode de travail de cet agriculteur peut être uniquement la conséquence de son souci de ne pas perdre cette position privilégiée. Dans cet optique il conserverait les pratiques culturales qui lui ont été imposées sans nécessairement les avoir adoptées. A ces considérations, il faut ajouter que la moyenne d'âge des agriculteurs ne dépassait pas 25 ans. En conséquence, il est difficile de savoir si en conditions réelles, face à des individus plus âgés l'adoption des techniques proposées s'effectuerait sans problème.

    Du point de vue de l'expérimentateur, on relèvera les difficultés que l'on a eues à trouver des agriculteurs puis à aménager, dans le respect des intérêts de chacun, le protocole de recherche. La première difficulté a été de trouver des maraîchers acceptant de travailler sans utiliser d'engrais minéraux et de fertilisants organiques. Après avoir essuyé le refus de quelques-uns notamment les maraîchers travaillant en bordure du site, on a trouvé grâce au personnel technique de l'E.I.E.R. des jeunes jardiniers prêts à effectuer le travail.

    En raison de l'absence de salaire, il fallait trouver des plantes qui satisfassent à la fois les besoins du marché et qui puissent également être sensibles rapidement aux variations de la fertilité du milieu. Sur l'ensemble des plantes cultivées, deux ont retenu plus particulièrement l'attention de l'expérimentateur, c'est le chou et le maïs. Le chou présentait dès 1992 des colorations distinctes selon le type de traitement. Le maïs a l'avantage d'être sensible aux problèmes hydriques et, par sa croissance, il fournit un outil de mesure. Son utilisation en 1993 et 1994 a été possible grâce à la mise en place d'un système de compensations financières très faibles. Pour les agriculteurs, la tomate, les aubergines et le gombo sont plus rentables. Leurs récoltes s'effectuent progressivement ce qui permet d'obtenir un revenu étalé sur une durée plus importante. Les jeunes agriculteurs s'épargnent ainsi de difficiles négociations familiales sur le devenir de leur revenus. Par contre, pour ce type de végétaux, la fiabilité des mesures de rendement, la vitesse de croissance et la biomasse sèche produite ne sont pas des paramètres aisément mesurables.

    En culture maraîchère, l'homogénéité des plantations dépend des choix de l'agriculteur. Dans le contexte de périmètres irrigués, les possibilités d'avoir un débouché assuré pour une culture conditionnent les choix du cultivateur (Naef, 1992). Dans ces conditions , il nous est difficile de déterminer si ce qui a été observé durant l'expérimentation correspond à une réalité. La stratégie adoptée par M. Kaboré depuis notre départ serait sans doute plus instructive.

    L'autre différence est due aux cycles naturels des insectes. Il est facile d'observer que des explosions de l'ensemble des populations d'insectes ont lieu au mois de novembre. Des cycles de développement précis font succéder les ravageurs aux prédateurs au début de la saison des pluies (Ouedraogo M. com.pers) ce qui permet d'effectuer des traitements insecticides sans nuire aux agents du contrôle biologique. Bien que nous présentons quelques considérations sur la possibilité de lutte biologique, il est à signaler que les cultures de saison sèche restent extrêmement vulnérables aux insectes et autres parasites. Une parcelle maraîchère représente une oasis de verdure et d'humidité. Nous avions interdit l'usage des pesticides sur le site expérimental afin de ne pas compromettre les mesures des effectifs des populations animales. Par chance, les cultures ont été épargnées.

    1.2.2. Aspect technique.

    Les sites de réutilisation d'eaux usées sont présents en différents endroits de la ville de Ouagadougou (A. Haladou, 1991). Leur aménagement en vue d'améliorer la qualité sanitaire des effluents, si cela est nécessaire (Cissé G., à publier), doit prendre en compte les habitudes qui ont été prises par les usagers.

    Conception des ouvrages d'assinissement.

    En prenant l'exemple du marigot bordant le site expérimental, il est facile d'imaginer l'impact sur les activités de maraîchage de la construction d'une canalisation à cet endroit. En créant des ouvrages adaptés à la fois aux conditions de saison sèche et de saison des pluies, il doit être possible de mettre en réserve une partie des eaux de pluie tout en améliorant l'auto-épuration de ces sites de traitement «naturel» des effluents. On a recherché au travers d'un travail de diplôme de l'E.I.E.R. (M. Imbith, 1992) à mettre en évidence les paramètres de l'épuration dans ce marigot. Ce type d'ouvrage se situe entre la station d'épuration et le réservoir naturel d'un point de vue sanitaire et hydrodynamique. En saison des pluies, le marigot, bien alimenté, est remonté par différentes espèces de poissons. En saison sèche, la diminution des débits et la concentration en pollution diminuent l'activité de ces populations piscicoles qui doivent retourner dans les réservoirs artificiels. On peut s'imaginer un dispositif intermédiaire permettant d'effectuer simultanément trois activités, l'épuration, la pisciculture et le maraîchage à faible coût. Les premières pluies seraient utilisées pour l'autocurage des sédiments accumulés en saison sèche.

    Dans la conception des stations d'épuration, il est intéressant de tenir compte de l'objectif final que l'on se fixe pour la qualité des eaux. Cet objectif n'est pas uniquement d'en abattre le taux de coliformes ou la DBO. Il peut également être d'obtenir l'eau la plus riche possible en insectes, plancton et substances humiques par exemple, ce qui favoriserait le développement des possibilités d'élevage des poissons tout en préservant les autres types d'utilisation( Edwards, 1992; Merritt et al, 1982.; Chan, 1988; Grobbelaar et al, 1990). L'utilisation des végétaux bordant

    le bassin du lit bactérien pour l'affouragement du bétail est également un mode de mise à profit des eaux usées qui a été observé sur le pilote de l'E.I.E.R.. Si l'on se place du point de vue de l'utilisateur, il apparaît ainsi quelques modifications à apporter aux stations d'épuration par lagunage.

    Critère de qualité des eaux usées.

    Le niveau d'épuration ne doit pas être trop bas afin d'éviter les phénomènes observés sur le fonctionnement du cycle du carbone des sols, ni trop haut afin de préserver les utilisateurs du développement de vecteurs de parasitose.

    Les eaux usées doivent en premier lieu être oxygénées de façon à ne pas créer des conditions d'anaérobiose dans le sol. La charge organique qui permet de satisfaire à la fois les critères sanitaires et agronomiques doit être comprise entre 50 et 120 mg de DBO. La présence d'un plancton diversifié doit être assurée alors que la charge en suspension n'a pas d'importance.

    Dans cette fourchette, en jouant sur la décantation, les populations piscicoles et l'aménagement des berges, il doit être possible d'obtenir un compromis qui permette de satisfaire l'ensemble des besoins de chacune des activités proposées plus haut. La diversité biologique des milieux aquatiques est en Afrique de l'Ouest largement suffisante pour que l'efficacité de ces dispositifs soit réalisée.

    Chapitre 2. Conclusion.

    L'ensemble des résultats obtenus permet de dégager les modalités d'application de cette technique. L'utilisation de la faune des sols comme indicateur de la fertilité s'avère être un outil pratique qui facilite la compréhension des phénomènes observés.

    L'objectif initial de cette recherche a été posé au travers de trois hypothèses.

    La première hypothèse qui portait sur le sens de l'évolution du bilan organique des sols a été vérifiée. On soulignera cependant que cette amélioration dépend de la qualité des eaux usées et du type de pratique culturale.

    A la deuxième hypothèse qui supposait que les eaux usées favorisent le développement animal dans le sol, on répondra également par l'affirmative en ajoutant que cette relation dépend de la nature des constituants organiques présents dans les eaux usées réutilisées.

    A la troisième hypothèse qui envisageait que la faune des sols pouvait être utilisée comme un indicateur de la fertilité des sols irrigués et que l'adaptation de techniques culturales à cet indicateur favorise l'amélioration de la fertilité des sols, la réponse est aussi affirmative. Les améliorations que l'on peut apporter aux techniques culturales sont à trouver en premier lieu soit dans le choix d'une culture, soit dans l'arrêt du sarclage des sols. De ces conditions dépend l'installation d'un microclimat humide (humidité >50%) qui favorise l'activité biologique à la surface du sol durant la saison sèche.

    A moyen terme, les eaux usées permettent d'effectuer des cultures tout au long de l'année, sans risque de destruction des équilibres biologiques et cela sans apport de fertilisants de complément. L'expérimentation a permis d'effectuer huit cycles culturaux en trois ans (de1991 à 1994). La définition à long terme de l'efficacité de cette pratique est à vérifier par l'analyse de la migration des éléments minéraux dans le profil de sol et dans l'évolution des effectifs des populations animales.

    Par la maîtrise des conditions microclimatiques on améliore les échanges entre l'atmosphère et le sol. Cette situation favorise le développement d'un cycle biogéochimique dans lequel les processus d'origine bactérienne sont contrôlés par une chaîne alimentaire complexe. Le maintien de l'intégrité de cette chaîne alimentaire dépend de la qualité biologique et de la composition chimique des eaux réutilisées.

    Le fait d'avoir travaillé en utilisant des indicateurs biologiques permet d'obtenir une vision plus globale de la fertilité des sols et de l'action des eaux usées sur l'environnement. La sensibilité de ce type d'indicateur à la qualité des apports organiques permet la mise en évidence rapide de l'effet d'un traitement. Les effectifs des populations animales et leur diversité établis de façon sommaire sont des outils de mesure pratiques qui ne nécessitent pas de technologie coûteuse.

    L'utilisation d'un référentiel naturel permet de dissocier les sols mis en culture et labourés, des sols dont l'écologie a été respectée. Il est ainsi constaté que le rôle des racines dans l'amélioration du bilan minéral, en particulier pour le phosphore, est limité.

    Le maintien du stock organique dans les sols de ce référentiel naturel a été indépendant de
    l'exportation des résidus végétaux et de la diminution de sa fertilité chimique. La prise en compte

    de de la biomasse animale dans l'analyse des bilans chimiques de ces sols devrait permettre de lever cette contradiction.

    Ce travail ouvre des perspectives nouvelles sur la gestion de la fertilité des sols tropicaux irrigués et sur les techniques de mesure et d'évaluation de la qualité des systèmes naturels d'épuration.

    L'objectif fondamental de la recherche est réalisé avec la démonstration de la validité de la faune des sols en tant qu'indicateur de la fertilité des sols irrigués avec des eaux usées en climat tropical sec. On retrouve le constat dressé par Bachelier (1978) qui attribue à ces sols la dénomination de sols fauniques en raison de la prédominance des processus biologiques d'origine animale qui permettent à ces sols d'assurer leurs fonctions vis-à-vis du processus de production végétale.

    L'objectif appliqué qui était de fournir rapidement une technique culturale respectant le concept de développement durable a été atteint dans la mesure où l'agriculteur n'a pas abandonné la pratique de l'irrigation par des eaux usées sans utilisation de fertilisant d'appoint.

    Les eaux usées respectent les cinq principes de bases de l'aménagement des sols (Greenland, 1975).

    Elles permettent de restaurer la fertilité du sol après l'exportation des résidus de culture.

    Elles favorisent le maintien des propriétés physiques du sol en stabilisant notamment le taux de substances humiques.

    Elles ne sont pas la source de problèmes d'ordre phytosanitaire. Elles permettent le contrôle de l'acidification des sols.

    Elles ne favorisent pas l'érosion des sols puisqu'elles autorisent le maintien d'un couvert végétal constant tout en assurant la pérennité d'activités agricoles.

    Ayer, le 31mars

    1996.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand