Décentralisation et mise en Å“uvre des stratégies de développement local: analyse du système de gouvernance territoriale du cas de Croix-des-Bouquets( Télécharger le fichier original )par Edy FILS-AIME Université d'état d'Haà¯ti département des sciences du développement - Maitrise en sciences du développement 2012 |
Source : Tiré et adapté de `'La Décentralisation Dans Les Pays En Développement», Mohamed MOINDZE, p.56 Les premiers régimes de gouvernement humains sont en grande partie dominés par la centralisation comme méthode d'organisation unique qui attribue l'ensemble de pouvoirs de décision et des tâches administratives sur tout le territoire national à l'État qui agit à partir des commandes hiérarchiques et unifiées. Par la centralisation, l'État s'impose- à la population et sur tout le territoire national- comme le garant du centre unique d'impulsion politique qu'il soit dans une monarchie où le roi cherche à consolider l'unité de son royaume ou dans un pays communiste où le parti unique cherche à empêcher les fractions ou à combattre l'insubordination. Cependant, dès la moitié du 20ème siècle, la centralisation se porte naturellement vers son paroxysme jusqu'à succomber sous son propre poids. En accumulant, en entassant sur sa tête toutes les affaires de la nation, l'État unitaire centralisé se voit contraint de demander de l'aide en responsabilisant d'autres acteurs et échelons du territoire. III.2- THEORIES NORMATIVES DE LA DECENTRALISATIONL'incapacité du keynésianisme à résoudre la crise économique des années 50 a occasionné, notamment aux États Unies et en Grande Bretagne, la naissance du néo-libéralisme qui s'est traduit en une véhémente réaction théorique et politique contre l'interventionnisme des Etats centralistes tombés en crise. La crise économique d'alors était multidimensionnelle. L'économie tournait au ralenti. La croissance était quasiment nulle. L'État centralisé et interventionniste devenait plus qu'une structure de production de pauvreté et de misère sociale. L'injection des fonds publics- pour tenter de résorber la crise à la keynésienne- poussait l'État davantage à la faillite. Les économistes libéraux ont donc remis en cause l'appareil d'État dont la bureaucratie est accusée d'entrave à la productivité et aux entreprises privées en tuant toute initiative personnelle et en déresponsabilisant les populations et territoires du pays. Les tenants néolibéralistes ont donc sommé l'État centralisé de se décentraliser en abandonnant son interventionnisme malsain et en remplaçant ses gigantesques plans globaux et collectifs par des politiques d'ouvertures et de privatisation. Cependant, c'est vers les années 60 et 70 que les projets de reformes- dominées par la régionalisation et la décentralisation - ont été effectivement débattus et mis en application à travers différents niveaux de planification globale de territoire national. Le passage d'une organisation centralisée à une organisation libérale de l'État a consacré la décentralisation comme stratégie de sortie de crise. Comme stratégie, la décentralisation a permis de recadrer l'idéologie interventionniste et de restructurer les politiques publiques. Les néolibéralistes- dont le crédo est `'moins d'État pour plus d'autonomie''- ont non seulement invité l'État à transférer certaines de ses compétences jusqu'alors jalousement gardées, mais aussi à régionaliser les divers territoires composant le territoire national. Ainsi selon les économistes néoliberalistes, les territoires régionalisés, ayant reçu des pouvoirs et compétences de l'État, seraient mieux aptes à faire fructifier leurs propres croissances et contribuer à la croissance globale. Les explications, interprétations et recommandations venant de la tendance néolibéraliste ont permis d'élaborer un ensemble de théories dites normatives de la décentralisation dont D.A. Rondinelli53 est l'un des principaux tenants. Ces théoriciens posent la décentralisation comme un préalable à la stabilité, à la démocratie et au développement. Les vertus de la décentralisation s'expliqueraient par sa capacité à rapprocher autorités et citoyens, à institutionnaliser la participation citoyenne locale, à mobiliser les ressources locales pour des objectifs de développement économique tout en facilitant une gestion transparente et efficience des ressources. Selon les théories normatives basées elles-mêmes sur la théorie du choix public, un individu est à même de percevoir lui-même si les biens publics locaux fournis répondent à ses préférences. Elles soutiennent que dans le cas d'un choix suffisamment libre, la fourniture de certains biens publics est économiquement plus efficace lorsqu'un grand nombre d'institutions locales sont engagées que lorsqu'un gouvernement central s'impose comme unique fournisseur. Un éventail de fournisseurs locaux offre aux citoyens plus de possibilités de choix. La décentralisation, particulièrement pour Steinich,54 serait donc mieux adaptée aux besoins locaux, du fait que la proximité géographique de la population permettrait une meilleure identification des besoins. Les théoriciens normatifs avancent que la concentration des services soulèverait une kyrielle de problèmes et réduirait le degré de la satisfaction des consommateurs. Bon nombre de ces obstacles pourraient être surmontés grâce à la décentralisation qui permettrait de soulager les populations en fournissant les biens et services de manière efficace et sérieuse le fait que les autorités seraient plus engagées dans les structures décentralisées, car elles posséderaient plus de pouvoir. 53 Rondinelli, Dennis, A., Privatization and Economic Reform in Central Europe: The Changing Business Climate, Quorum Books, 1994 54 Steinich, M. 2000. Monitoring and Evaluating Support to Decentralisation: Challenges and Dilemmas. (ECDPM Discussion Paper 19). Maastricht: ECDPM. III.3- THÉORIES DESCRIPTIVES DE LA DÉCENTRALISATIONSi pour les théoriciens normatifs, la décentralisation contribuerait au développement socio-économique, un éventail d'autres théories dites descriptives soutiennent et tentent de démontrer empiriquement que dans les pays en développement la décentralisation n'a pour ainsi dire aucun effet incitatif sur le développement. Selon eux, la décentralisation a compromis la stabilité macroéconomique dans les pays où les impôts et taxes, les dépenses et les emprunts infranationaux sont excessifs et que les administrations centrales n'arrivent pas à contrôler la situation. Ces pays, comme Mali, deviennent incapables de remplir leur mission de gestion macroéconomique. Les difficultés compliquent alors l'atteinte de la réalisation des objectifs de politique publique et sociale. Une étude de l'OCDE effectuée en 2004 a montré que la décentralisation avait provoqué peu d'amélioration en termes de réduction de la pauvreté dans un tiers de pays. Les chercheurs ont constaté que dans les pays où l'État est incapable de remplir ses fonctions de base et où, au départ, les inégalités sont criantes, il existe un risque réel que la décentralisation aggrave paradoxalement la pauvreté (Jütting, et autres, 2005, p.2-3). Des recherches empiriques- dans divers pays en développement comme au Mali et au Niger55- ont démontré que les politiques de décentralisation en cours seraient réalisées sous les contraintes des donateurs internationaux. Ces derniers imposeraient la décentralisation comme stratégie pour résoudre les problèmes politiques liés à la gestion et à la redistribution des ressources nationales, ou encore pour faire accroître la participation citoyenne dans la gestion des affaires locales ou du processus de développement. Ces programmes de décentralisation ne prendraient rarement en considération le rôle traditionnel des communautés locales. Or dans le cadre du développement, il serait important de tenir compte de la capacité des communautés locales étant un complément des institutions nationales. Les décisions locales peuvent être meilleures si les pouvoirs locaux adoptent une vue d'ensemble, tout comme les décisions au niveau central peuvent être meilleures si les autorités centrales prennent en compte les spécificités des réalités locales. Au fur et à mesure que la décentralisation s'effectuerait en s'alignant à la fois sur les priorités locales et nationales, elle aurait plus de capacités à devenir un vecteur capable de servir d'impulsion vers un mode de développement qui donne aux communautés locales les responsabilités qu'il faut. Contrairement à ce que ferraient croire les puissances occidentales, la décentralisation comme instrument de redistribution des pouvoirs socio-économiques et politiques ne serait efficace que très rarement dans les pays en développement. Elle serait même de nature à causer des pertes d'économies d'échelle et d'effritement du contrôle de l'État des maigres ressources financières dans ces pays. La faible capacité administrative ou technique au niveau local des pays en développement entraînerait généralement la baisse du degré d'efficacité et de rendement dans la fourniture des services de base. Le plus souvent les responsabilités administratives sont transférées à des niveaux locaux sans les accompagnements techniques ni les ressources financières nécessaires, ce qui entrave la répartition ou la fourniture équitable des services sociaux de base. Souventes-fois la décentralisation rend même plus complexe la coordination des politiques nationales et favorise des élites locales à s'emparer du pouvoir au détriment de la majorité des citoyens et citoyennes. Dans le cadre de certains programmes de décentralisation, il est courant que les méfiances éprouvées entre les autorités locales (secteur public) et les citoyens (secteur privé, société civile) minent la coopération préexistante. De manière générale, des recherches ont prouvé que la décentralisation apporte pleins d'effets « pervers », particulièrement dans les pays en développement où les lignes de démarcation des rôles et des responsabilités des différents échelons administratifs ne sont pas clairement définies. Il y a alors risque de dilution de responsabilités faute d'un manque de clarification des compétences à chaque niveau de l'administration. La décentralisation peut aussi créer des déséquilibres au niveau national à cause de choix politiques différents ou contradictoires et des ressources réparties inégalement ou sans équité. Ces risques auraient pour conséquence un creusement des disparités entre les différents territoires. Par exemple, dans un pays caractérisé par des disparités régionales au niveau des activités et des revenus, certaines régions sont naturellement plus riches que d'autres et les bases d'imposition par habitant se différencient d'une collectivité à une autre. Si c'est un pays d'État centralisé, une telle situation n'aurait pas d'incidence majeure, même si les collectivités les plus riches contribuent davantage (par habitant) au budget national. Tandis que les incidences seraient lourdes dans un État décentralisé, puisque les collectivités décentralisées « mal dotées » auront d'énormes difficultés à boucler leur budget s'il n'y a pas un mécanisme de péréquation fonctionnel. III.4- PRINCIPES DE REPARTITION DES COMPETENCES ENTRE LES ECHELONS DE GOUVERNEMENTLe point de départ de toute politique de décentralisation est la définition claire des compétences au sein de divers niveaux de l'administration publique. Cette politique détermine qui, de l'autorité centrale ou des autorités locales, est mieux placée pour exercer telle ou telle compétence sous peine d'avoir des résultats contraires. Car toute mauvaise définition des responsabilités provoquera une mauvaise définition des ressources correspondantes ; des responsabilités vagues conduiront les autorités locales à s'investir dans des projets fantaisistes ou populistes à des résultats à court terme plutôt que dans de projets durables ayant un impact positif sur les conditions de vie des citoyens. Toute mauvaise définition des compétences provoquera immanquablement une dilution des responsabilités. Les principes pour la répartition des compétences entre l'État central et les collectivités établis par les Institutions International (dont l'ONU, l'OCDE) de manière fondamentale stipulent que : (i) doivent être décentralisées toutes les activités de proximité, celles qui visent à satisfaire des besoins locaux ou/et qui font appel à des sources d'information ou des acteurs locaux pour leur mise en oeuvre ; (ii) doivent rester au niveau central celles qui mettent en cause l'indépendance du pays, l'environnement général des personnes ou des principes fondamentaux comme l'égalité devant la justice. Tableau III: Critères de (dé)centralisation
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produites ou vendues augmentent. En présence d'externalités techniques et d'économies d'échelle, la centralisation devient nettement plus efficace que la décentralisation. 3- Le critère de débordement concerne les externalités territoriales positives s'agissant d'effets de débordement qui constituent les effets qu'une décision d'un territoire A, de fournir un service collectif, pourraient avoir sur les agents résidant en un territoire B, sans que ces derniers ne participent au processus de décision et au financement du service en question. Les effets de débordement peuvent être positifs ou négatifs. On distingue :
Par exemple, un consommateur bénéficiant 50 services collectifs, il devra effectuer 50 fois la même démarche, qui consiste à s'informer sur le fonctionnement de chaque institution délivrant un service collectif. En d'autres termes, l'utilisateur appartenant à autant de «clubs« qu'il consomme de service collectif. Il se trouve dans une position qui rend impossible une participation active aux décisions. Pour faciliter, on pourrait confier à un seul groupe les tâches qui exigent approximativement une même dimension. Le groupe, de dimension n'offrirait pas qu'un seul service, mais un panier de trois services collectifs. Le consommateur n'aurait alors à se préoccuper que d'une seule procédure de décision au lieu de plusieurs. III.5- DYNAMIQUE DU SYSTEME DE GOUVERNANCE POUR LE DEVEVELOPPEMENT LOCALEtymologiquement, les deux mots « gouvernance » et « gouvernement » sortent du latin « gubernare » et du grec « kubernân », pour signifier « pilotage des navires ». « Gouvernance » est utilisé en Europe vers le 13ème siècle dans le sens de `'art ou manière de gouverner. Aujourd'hui, les deux termes ne recouvrent plus le même sens. Gouvernance est réutilisée au 18ème siècle par les philosophes des Lumières, pour évoquer l'ambition de l'association d'un type de gouvernement éclairé qui respecte les intérêts et les valeurs du peuple. D'un autre coté, le terme anglais governance est utilisé au 14ème siècle pour évoquer le partage du pouvoir entre les différents corps constitutifs de la société anglaise. Depuis le terme governance tombe en désuétude avant d'être ressuscité par les économistes pour faire référence à l'ensemble des dispositifs mise en place par les entreprises pour mener des coordinations plus efficaces que le marché. Vers les années 80 dans le milieu anglo-saxon, corporate governance se traduit par gouvernement ou gouvernance d'entreprise, qui évoque la ferme volonté des actionnaires pour prendre part à la direction des entreprises. La notion de « gouvernance mondiale » ou global governance est employée dans le champ des relations internationales pour traduire l'ensemble des règles Communes mises en place pour parvenir à une régulation structurée de la planète. Dans la foulée de la mondialisation et devant la nouvelle complexité économique, sociale et politique créée par l'émergence de nouveaux acteurs (secteur privé, société civile) et par l'interdépendance des différents niveaux de coordination (local, national, international), les formes traditionnelles de gouvernement se sont révélées incapables à coordonner les actions collectives. Ainsi et les États centraux et les Collectivités Territoriales sont remis en cause par rapport à leur gestion de la chose publique. C'est dans ce contexte et en réponse à cette nouvelle complexité croissante, que le terme gouvernance dans son acception à la fois économique et politique a émergé dès les années 80 pour symboliser la nouvelle manière par laquelle le pouvoir est exercé dans la gestion des ressources économiques et sociales d'un pays au service du développement. La notion de gouvernance telle qu'il est comprise dans le discours des institutions internationales comprend l'État, le secteur privé et la société civile, comme nouveaux acteurs dans la conduite des actions publiques, même si d'aucuns ne distinguent pas le secteur privé de la société civile. Devant le constat de l'incapacité des États dépassés du Nord et des États affaissés ou remaniés du Sud à résoudre les problèmes de société de toutes sortes, les institutions internationales brandissent la société civile comme à la fois échappatoire et souffle de redressement aux pouvoirs publics. Dans ce cas, la société civile comme notion est généralement évoquée comme si elle référait à une réalité ou une compréhension homogène. Ainsi est t-il est courant de constater des groupes antagoniques se réclamer de la société civile. Parlent t-ils le même langage ? Partagent t-ils les mêmes valeurs? Ont-ils les mêmes intérêts? En effet, des groupes se réclamant de la société civile poursuivent des objectifs apparemment inconciliables, et utilisent mêmes des méthodes autodestructrices pour la consolidation des intérêts propres. De nos jours, les ambigüités que charrie la notion de société civile tendent à confondre sinon à décontenancer la notion de pouvoirs publics qu'on croyait pourtant précise. Les champs de responsabilité de la société civile et les pouvoirs publics ne sont plus précis ou définitivement arrêtés. Par une certaine montée ou résurgence de la société civile, celle-ci tente de concurrencer les pouvoirs publics, les édictent le comportement à suivre ou tout bonnement les remplacer. Pourtant les pouvoirs publics résistent en utilisant leurs forces et/ou leur légitimité pour consolider les acquis et/ou reconquérir leurs anciennes attributions. Ainsi la guerre est entre les deux camps est-elle froidement, mais sévèrement, lancée. Mais au-delà des rapports de tensions qu'ils connaissent, la société civile et les pouvoirs publics ont entretenu et entretiennent encore des relations inséparables qui ne datent pas d'aujourd'hui. III.6- JEU DES ACTEURS ET DES FACTEURS DE LA GOUVERNANCEHistoriquement la notion de société civile remonte à l'antiquité grecque, environs 2000 ans avant Jésus Christ. Désignée sous le thème grec koinonï politikè (société citoyenne) par Aristote, la société civile (du latin societas civis) réfère à : `' Une assemblée sans hiérarchie dominante, composée de personnes partageant les mêmes points de vue, ce qu'on appelait encore « polis », c'est -à- dire une société citoyenne ou politique.''56 Mais cette société citoyenne ne reconnait pas les femmes, les enfants et les esclaves qui jouissent aucun droit de participation. Seulement les sujets masculins propriétaires peuvent décider pour défendre ensemble et mutuellement des intérêts communs sans l'interférence de l'État. Si dès le XVI è siècle le vocable `'État» était répandu surtout par Machiavel dans le sens d'une `'organisation politique et juridique des hommes vivant sous un pouvoir commun souverain dans les limites d'un territoire déterminé», c'est au milieu du XVII è que le vocable `'société civile» a, particulièrement sous l'influence de Hobbes, pris le sens d'un `'corps créé par les hommes pour assurer leur sécurité, la paix et le bien être». Comprise par Hobbes et Pufendorf comme la `'société des citoyens», la société civile se fait l'équivalent de la société politique ou l'État. Pour sa part, Locke met en évidence l'opposition entre société civile et état de nature décrit comme `'état de parfaite liberté et d'égalité naturelle en vertu de la raison». Selon Locke, la société civile est formée et instituée pour résoudre les problèmes causés par l'état de nature. Par rapport à la construction uniquement politique de Hobbes, Locke concède à la notion de société civile d'autres dimensions: En plus d'être une société politique en charge de la sécurité 56 Cvetek Nina et Friedel Daiber, Qu'est-ce que la société civile ?, Paris, 1985, p.6 des citoyens, la société civile devient tout aussi un ordre économique garant de la propriété et un ordre juridique garant de la protection des droits des individus. D'où la tendance de Locke à établir la distinction entre État et Société civile. Mais c'est dans l'oeuvre de Rousseau que cette tendance à distinguer les deux vocables est la plus évidente. Sous l'influence de Locke, Rousseau différencie
l'État de la société civile. L'État fait
alors référence à la société politique
issue du contrat social et la société
civile devient le stade intermédiaire entre l'état de
nature `' Le premier qui ayant enclos un terrain s'avisa de dire : ceci est à moi... fut le vrai fondateur de la société».57 Avant de se transformer en État, la société civile est la société de l'homme civilisé qui développe les sciences et les arts. Si pour le philosophe l'État est le résultat du contrat social, la civilisation est l'état où règne la loi de la propriété et de l'inégalité. A ce niveau, il valorise la société politique produit des libres choix d'hommes au détriment de la société civile ou civilisée qui corrompt l'homme qui est dans la société politique un citoyen sans intérêts particuliers. Hegel, de son coté, explique la société civile à travers une trilogie : famille, société civile et État. La famille se donne comme la communauté première, entité indivise où les besoins d'échanges ne sont pas présents. Une famille n'a pas besoin d'entrer en contact avec d'autres du fait que tout y est mis en commun. Dans la famille il n'y a pas d'individus, car tout bien appartient à tous, tout le monde a accès à tout. Ce n'est que l'éclatement de cette communauté première qui fait naitre le besoin d'échanges. La famille une fois éclatée permet l'apparition des individus. Ces derniers étant des personnes privées (séparées, isolées) entrent en échange à la Union volontaire et accord mutuel d'hommes qui agissent librement dans le choix des gouvernements et des formes de gouvernements.
recherche des intérêts propres. Les individus- en développant les échanges sous la pulsion de leur égoïsme- forment la société civile. Celle-ci se caractérise par le fait que les individus ayant des rapports de travail et d'échanges se font membres d'une collectivité rien que pour satisfaire des intérêts particuliers. Cependant l'intérêt particulier n'est pas nécessairement incompatible avec l'intérêt général. L'individu en se visant lui-même pratique les échanges dont le développement- par une `'ruse de la raison» ou une `'main invisible,» pour répéter Adam Smith- lui donnerait l'opportunité de faire émerger l'éthique sociale. Sans le savoir les individus réalisent une cohésion axée sur l'intérêt général. La cohésion familiale perdue est retrouvée au sein de cette nouvelle cohésion qui marque l'apparition de l'État. Sous l'émergence de l'État, les échanges économiques et sociaux entre les individus se convertissent en une utilité Commune. D'où la différence faite par Hegel entre le bourgeois qui agit en ne visant que lui-même et le citoyen qui agit en visant l'universel (l'intérêt général). L'État se différencie de la société civile bourgeoise. Dans celle-ci les individus essayent de tirer des avantages égoïstes tandis qu'à l'État les actions individuelles sont déterminées par l'intérêt de la collectivité dans son ensemble. Cependant, tout en s'opposant à la tendance de la société civile, pour se définir l'État s'appui sur les institutions de la société civile. Au lieu de détruire la société civile, dans la vision hégélienne, l'émergence de l'État confère aux intérêts privés une certaine légitimité. Dans la conception contemporaine de la société civile, l'oeuvre du philosophe Habermas représente l'une des sources les plus consultées. Selon le philosophe, la société civile est sujet de l'opinion publique. Celle-ci n'étant pas la somme des opinions privées se forme en public et présuppose donc l'existence d'un espace public où les débats publics prennent place, où les différents arguments ou thèses sont avancés et débattus. L'opinion publique est donc une opinion formée par l'usage public de la raison. Le citoyen habermassien détenteur d'opinion publique se distingue du particulier qui s'occupe exclusivement des affaires privées. Le particulier se transforme progressivement en citoyen en contribuant à la formation d'une opinion publique et en se faisant entendre dans les affaires politiques. Habermas refuse de fusionner la société civile et le secteur privé qui est le monde de marché, d'échanges et de production. La société civile se développe en même temps que le monde du marché, mais comme instance politique, elle est une réalité différente de celle du monde d'échanges. Lorsque les particuliers entre en contact pour échanger des marchandises et services, ils échangent parallèlement des informations, des points de vue et des émotions. Ainsi se forme peu à peu un public informé (voir éduqué) qui confronte par l'usage de la raison les composantes de la chose publique. Le public bourgeois s'engage dans la politique, non parce qu'il désire y participer, mais seulement pour préserver l'autonomie de l'espace privé, pour repousser l'empiétement du secteur public dans le secteur privé. Par rapport à l'État, selon Habermas l'opinion publique constituée progressivement joue un rôle de témoin ou d'arbitre dans la gestion de la chose publique. Cette révision des pensées philosophiques et historiques a permis de mettre en évidence trois (3) principaux paradigmes pour penser les rapports entre la société civile, le secteur privé et les pouvoirs publics: a. La Société Civile cherche à contenir les actions de l'État Ici la société civile se comprend comme l'espace des échanges et des relations entre les acteurs non-étatiques. C'est la sphère des acteurs privés qui s'opposent à la sphère publique. La société civile s'autorganisant et s'autorégulant réclame la non-intervention des pouvoirs publics dans la sphère privée. Par une séparation stricte entre les citoyens et le gouvernement, la société civile pose le marché des échanges et non le contrat politique comme le principal régulateur de la vie sociale. L'intérêt général résulte de la multiplicité des intérêts privés allant dans tous les sens possibles et non d'un État superpuissant qui possède toutes les solutions. Le rôle des pouvoirs publics se confine particulièrement dans l'assurance de l'ordre public, dans la garantie des droits de propriété et de la libre concurrence. La société civile et le secteur privé revendiquent la responsabilisation de l'individu et de sa libre participation dans la construction du bien-être général. Pour faire valoir leurs pensées et défendre leurs intérêts, sans vouloir exercer directement le pouvoir politique, les membres de la société civile et du secteur privé se regroupent en associations, forums, chambres de commerce, et coalitions fortement structurés qui interviennent le plus souvent avec force auprès des pouvoirs publics pour infléchir les politiques publiques. A côté de la primauté du privé sur le public, du marché libre sur le système politique, les néo-libéralistes défendent la marchandisation de toutes les activités humaines et la globalisation des marchés.
Les tenants de ce courant de la société civile sont reconnus pour être des farouches opposants à la globalisation néolibéraliste. Ils jugent nécessaire de contrebalancer les appétits démesurés des acteurs néolibéralistes en instaurant un nouvel ordre mondial, un autre monde. La société civile devient une sphère d'équité et de solidarité où un ensemble d'acteurs (ou institutions) non publics s'activent dans la lutte contre la domination des puissantes institutions internationales telles que FMI, BM, OIT qui oeuvrent pour un assujettissement des États faibles du monde aux idéologies néolibéliralistes. Celles-ci auraient pour visée une déconstruction de l'ordre globalitaire. A cet effet, les altermondialistes appellent a une résistance citoyenne tant au niveau local qu'au niveau international a l'affaiblissement des État-nations, a la déresponsabilisation des citoyens face a leur avenir. Des citoyens libres sont appelés a défendre l'appropriation du monde par quelques oligopoles et politiciens qui trafiquent les aliments, qui transforment l'eau et l'air en marchandises, etc. Des femmes et des hommes libres doivent renforcer les pouvoirs publics en aidant a résister a la privatisation et la marchandisation des biens publics vitaux. La société civile dans ses fonctions aide a comprendre, a critiquer, a résister et surtout a construire un ordre alternatif a la globalisation néolibéraliste. Tout compte fait, la décentralisation telle que pratiquée dans divers pays participe au renouvellement de la problématique sur la séparation des pouvoirs au sein de différents types d'État et sur le mode de gouvernance pour le développement. Dans les pays développés la décentralisation a aidé plusieurs États a ne pas s'effondrer. La dérégulation ou privatisation notamment a permis a certains États de respirer mieux en dépensant moins et en gagnant plus de recettes. Elle a permis aux secteurs autres que l'État d'exploiter leurs ressources a fonds, a entreprendre de manière autonome sans compter sur l'État providence pour faire accroitre les richesses. Même si les crises économiques ont été résolues sans égards a la justice ou a l'équité sociale, la décentralisation a prouvé que le centralisme d'État ne pouvait que mener le développement socioéconomique dans l'impasse. Cependant, dans les pays en développement, la décentralisation comme contrainte de bonne gouvernance, devient donc source de conflits, de déstructuration ou de désolidarisation sociale. Au lieu de devenir un vecteur de développement a l'instar de ce qu'elle est dans certains pays développés, la décentralisation se conçoit comme un véritablement goulot d'étranglement du fait qu'elle cherche davantage à répondre à des standards internationaux que de chercher à résoudre les problèmes internes rencontrés. Les États faibles - se trouvant dans l'obligation de transférer certaines de leurs compétences sous les conditionnalités des grands bailleurs- se font réticents à transférer les fonds et l'appui technique nécessaires dans le cadre de la décentralisation effective. PARTIE DEUXIEME
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Contrôle de tutelle ou de légalité des Collectivité Territoriale |
Selon le décret du 17 Mai 1990, la mission du Ministère de l'Intérieur et des Collectivités Territoriales (MICTDN) est de définir et de concrétiser la politique du pouvoir exécutif en ce qui concerne l'Immigration et l'émigration, la protection civile et la tutelle des Collectivités Territoriales. Le MICTDN, à travers sa Direction des Collectivités Territoriales (DCT), constitue le lien administratif et technique privilégié entre l'État et les Collectivités Territoriales. Ainsi le MICTDN pilote la politique de l'Exécutif dans le domaine de la décentralisation, de la déconcentration des services administratifs de l'État et du développement local.
La DCT défini les règles de fonctionnement et l'organisation des Collectivités Territoriales, veille à la répartition des compétences entre l'État et les CT et celles transférées à celles-ci. La DCT organise et élabore conjointement avec les autorités concernées le programme de renforcement technico-administratif des CT, participe à l'exécution dudit programme, à la préparation des budgets, à la réforme de la fiscalité locale, et collabore étroitement avec toutes les autres institutions impliquées dans le processus de décentralisation et du développement local.
Les deux organes de Délégation placés sous la tutelle du MICTDN sont définis par la Constitution de 1987 dans ses Articles 85 et 86 :
Article 85 : » Dans chaque Chef-lieu de département, le Pouvoir Exécutif nomme un Représentant qui porte le titre de Délégué. Un Vice-Délégué est également nommé dans chaque Chef Lieu d'arrondissement».
Article 86: `'Les Délégués et Vice-Délégués assurent la coordination et le contrôle des Services publics et n'exercent aucune fonction de police répressive».
Les Délégations et Vice-délégations participent au contrôle de tutelle sur les CT. Représentation du pouvoir exécutif et délégataire de ministère, et donc du MICTDN, la Délégation (et vice-délégation) est une structure de proximité qui permet d'encadrer les CT. Le Délégué constitue l'interlocuteur privilégié des élus locaux et du MICTDN. La Délégation assure le contrôle de légalité a priori et/ou à posteriori des actes financiers des Communes à travers les Contrôleurs Financiers Territoriaux (CFT).
Système de planification du développement local |
Le Ministère de la Planification et de la Coopération Externe (MPCE) a pour mission d'élaborer des plans de développement national, d'améliorer les systèmes de planification afin de permettre l'utilisation maximale et optimale des ressources disponibles pour un développement économique et social harmonieux (décret du 6 avril 1989). Ses principaux champs d'intervention sont entre autres:
· La planification globale,
· La planification sectorielle,
· La planification régionale,
· La planification spatiale (regroupant l'aménagement du territoire et le développement local).
Conformément à l'esprit de la Constitution de 1987 et au décret du 6 avril 1989 fixant l'organisation et le fonctionnement du Ministère, le MPCE, par son cadre d'intervention territoriale, est appelé à mettre en oeuvre une approche de la planification décentralisée. Par cette approche, le MPCE entend promouvoir une stratégie de planification visant à diagnostiquer les problèmes de manière localisée et dispersée afin de répondre aux besoins des populations des CT en proie à des difficultés structurelles. Par la planification décentralisée, le Ministère peut
identifier les problèmes, les moyens, les stratégies, les buts et objectifs à la base pour une meilleure harmonisation du Système de Planification Nationale (SPN).
La démarche à suivre en vue de la réalisation de la planification décentralisée passe par le l'élaboration des programmes départementaux qui regroupent plusieurs sous-programmes :
o Le sous-programme de développement local
Pour améliorer le niveau socio-économique des collectivités locales, le MPCE construit- à partir d'un processus de planification locale participative incluant les élus locaux et la société civile- une banque de microprojets générateurs de revenus et porteurs de croissance. Le Ministère vise, en ce sens, la consolidation et l'extension des infrastructures de base, l'établissement de filets de sécurité particulièrement dans les bassins de poche de pauvreté extrême.
o Le sous-programme municipal
Le cap est mis sur le renforcement de la capacité des municipalités à transformer leurs collectivités en des milieux incubateur d'entreprises. Il s'agit d'aider les municipalités à étendre la couverture et à améliorer la qualité de la fourniture des services publics locaux, notamment dans le domaine de l'eau et assainissement, d'infrastructures sanitaires, d'infrastructures éducatives, etc.
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o Le sous-programme d'interventions spécifiques
A ce niveau, le Ministère met en oeuvre des microprojets susceptibles de renforcer les actions structurantes en faveur de la protection des démunis et des populations locales des plus
vulnérables comme les vieillards, les enfants orphelins, les personnes déplacées, les sans-logis, etc.
La première étape de la démarche pour la planification décentralisée part des Sections Communales comme CT de base. Tel est le niveau d'identification des besoins, d'évaluation des moyens, et de priorisation. Les idées de projets sont formulées, et les projets sont élaborés sous la demande et la direction des CASECS qui bénéficient l'appui technique des Directions départementales sectoriels (de tous les ministères), des ONG, des OI, etc. Pour finir, les projets sont soumis à l'assemblée des Sections Communales pour validation et approbation.
Pour la deuxième étape de la démarche se poursuit au niveau des municipalités avec le même processus d'identification et d'élaboration pour des projets d'envergure communale. A ce tournant, est évalué le niveau de cohérence et d'interpénétration des deux catégories de projets (section communale et communale). La consolidation et la priorisation des projets s'effectuent au regard des moyens disponibles avec l'appui technique des Directions départementales sectoriels (de tous les ministères), des ONG, des OI, etc. Pour boucler cette étape, comme pour les Sections Communales, les projets retenus sont soumis à l'AM pour validation et approbation.
L'ensemble des projets des Sections Communales et des Communes sont analysés, évalués, consolidés et priorisés au niveau départemental et soumis à l'Assemblée Départementale (AD) pour validation et approbation. Au cours de cette troisième étape, le processus d'élaboration conduit aux sous programmes sectoriels contribuant à l'élaboration des programmes départementaux.
Comme quatrième et dernière étape, les programmes départementaux de développement constitue le document stratégique du Conseiller départemental siégeant au Conseil Indépartemental qui est l'organe chargé de présenter et défendre les projets au Conseil des Ministres. Le MPCE, comme organe central de planification, assure la consolidation et
l'harmonisation de l'ensemble des programmes départementaux dans le cadre du programme national de développement économique et social.
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Le Ministère de l'Économie et des Finances (MEF) a pour mission de formuler et de mettre en application la politique économique et financière de l'état, et exerce entre autres les attributions suivantes :
· Déterminer la politique fiscale de l'état, assurer la perception des impôts et taxes, gérer les biens de l'état ;
· Coordonner les travaux d'élaboration du budget général de la république et en assurer l'exécution ;
· Fixer les normes de la comptabilité publique et veiller à leur application;
· Exercer le contrôle financier des Collectivités Territoriales des entreprises et établissements publics ou mixtes ;
En plus de sa Direction Générale, assistées par une Direction Administration et des Directions techniques, le MEF a des Directions déconcentrées dont la Direction Générale des Impôts (DGI), l'Administration Générale des Douanes (AGD), et le Fonds d'Assistance Économique et Sociale (FAES) qui entretiennent des relations directes avec les CT.
É La Direction Générale des Impôts (DGI) :
Les attributions de la DGI sont essentiellement l'application des lois fiscales et la collecte de droits, de taxes, impôts, redevances, et autres revenus de l'État et des Collectivités Territoriales. La DGI est pratiquement déployée sur tout le territoire national. Elle établit en principe dans
chaque Commune une Agence Locale des Impôts (ALI) coiffée par une Direction Départementale des Impôts (DDI) située dans le chef lieu de Département. Les DDI sont au moins au nombre de dix. Les DDI sont coordonnées par l'Unité de Coordination des Directions Départementales (UCDD) qui assure la liaison entre le pouvoir central et le reste du pays.
A partir de Juillet 1996, l'État créé un Fonds de Gestion et de Développement des Collectivités Territoriales (FGDCT) qui est alimenté par :
I Les dotations et allocations de l'Administration Centrale;
I Les dotations prévues aux programmes de coopération, d'aide, de dons et accords financiers impliquant les Collectivités Territoriales;
I Un régime fiscal particulier déterminé par la loi;
I Les revenus, impôts, centimes additionnels ou toutes autres contributions au profit des Collectivités Territoriales.
Les articles 4 et 6 du FGDCT précisent respectivement que :
`' Les revenus du Fonds sont destinés exclusivement à financer les activités des Collectivités Territoriales (Départements, Communes et Sections Communales) suivant les modalités fixées par la Loi.»
`'Chaque Département, chaque Commune et chaque Section Communale est gestionnaire exclusif des valeurs qui lui sont allouées par le Fonds.»
En septembre 1996, l'État haïtien a créé des droits internes nommés "Contributions au Fonds de Gestion et de Développement des Collectivités Territoriales" (CFGDCT) qui est alimentée, suivant son article 3 par :
9 5% sur les primes d'assurance;
9 Vingt (20) gourdes sur les plaques ou vignettes d'immatriculation de véhicules à percevoir en même temps que la taxe d'immatriculation;
9 Huit (8) gourdes par appel téléphonique international placé en Haïti à percevoir au moment du règlement de la facture;
9 2% de majoration des bordereaux de douane, excepté les bordereaux de produits pétroliers, de produits pharmaceutiques, de colis postaux, de produits alimentaires. des intrants agricoles et de papier à percevoir par l'Administration Générale des Douanes en même temps que la TCA ou d'autres droits internes;
9 Vingt-cinq gourdes (Gdes 25.00) par billet d'avion à destination de l'étranger à percevoir à l'émission du billet;
9 1% de retenue sur tout salaire à partir de cinq mille gourdes (Gdes 5,000.00) par mois, à percevoir à la source;
9 1% du revenu net imposable de tout contribuable (personne physique et morale), calculé en tenant compte des impôts déjà acquittés suivant l'alinéa 3 (g);
9 5% des montants gagnés à la loterie ou tous autres jeux et paris assimilés.
La CFGDCT couvre, suivant son article 4, les charges de :
· Tenue des Assemblées des Collectivités Territoriales;
· Fonctionnement des CASEC de la République;
· Fonctionnement des Mairies;
· Fonctionnement des Conseils Départementaux;
· Fonctionnement du Conseil Interdépartemental.
Le CFGDCT couvre en priorité les salaires du personnel des services administratifs et les indemnités des élus locaux. Les autres charges et activités des CT sont couvertes par des crédits en proportion de leurs recettes respectives. Il est prévu des subventions spéciales, suivant les
disponibilités, pour les activités sociales (activités scolaires et sanitaires) des Communes aux plus faibles revenus (article 5).
- Fonds d'Assistance Économique et Sociale (FAES)
Le Fonds d'Assistance Économique et Sociale (FAES), créé en 1990 est un organisme public autonome à caractère financier placé sous la tutelle du MEF. Il a pour mission d'accompagner les communautés défavorisées dans le développement de leurs capacités et la valorisation de leurs potentialités en vue de dégager une vision commune de leur avenir en apportant l'appui nécessaire à leur renforcement et en finançant des projets prioritaires identifiés par ces communautés. De ce fait, il constitue un des instruments utilisés par le gouvernement dans le cadre de sa lutte contre la pauvreté.
Le FAES intervient dans les secteurs de l'Éducation, la Santé, l'Assistance Sociale, la Nutrition, l'Assainissement, l'Eau Potable, l'Agriculture l'Artisanat, la Micro finance, l'Environnement et le Transport, en s'assurant du respect des normes établies par les ministères sectoriels concernés.
Les projets financés par le FAES sont répartis sur l'ensemble du territoire national et une attention particulière est accordée aux régions les plus défavorisées, aux zones rurales et aux régions marginales urbaines généralement démunies. Les projets financés par le FAES dans le cadre de ces programmes sont de courte durée, leur période de mise en oeuvre varie généralement entre six à dix mois et dépasse rarement une année.
Ont été diagnostiquées les tendances de la décentralisation et du développement local suivant un rapport trimestriel juillet-septembre 2010 des Nations Unies sur la gouvernance locale en Haïti. Ce rapport traite de la Gestion administrative et du fonctionnement du Conseil Municipal, de la gestion financière, des services d'urbanisme, et du développement local avant de dresser une classification générale des Communes et de refléter les caractéristiques par Département.
Gestion administrative et fonctionnement du Conseil Municipal
Au niveau de la gestion administrative des municipalités, l'un des problèmes des plus récurrents est l'absentéisme. 77% Communes 138 fonctionnent soit sans aucun un système d'enregistrement des présences, ou avec un système d'enregistrement des présences jamais appliqué. Ces 106 Mairies fonctionnent avec environs 50% de leurs ressources humaines. Parmi les 138 Communes étudiées, environs 15% souffrent de l'absence chronique des maires. Le reste des Communes peut compter sur la présence d'au moins un des maires au cours de la semaine. Le niveau de dysfonctionnement des administrations municipales se manifeste par le fait que seulement 41 sur 138 des Conseils Municipaux, soit 29%, se réunissent au moins une fois par mois et produisent un procès verbal de réunion. Généralement se sont des dysfonctionnements internes aux cartels qui expliquent cette situation, car souvent les maires titulaires ne se sentent pas obligés d'agir de concert avec ses assesseurs et prennent donc des décisions de manière informelle et unilatérale. En vertu de la corrélation directe entre le bon fonctionnement des Conseils Municipaux et la performance des Mairies : 10 sur 11 mairies les mieux gérés sont les mieux performantes.
Le rapport concerne seulement 138 communes sur 140 vue l'impossibilité de collecter des données pour les mairies de Cornillon et Delmas dans l'Ouest.
La tendance à gérer la chose publique dans l'informel est confirmée, car seulement 31 sur 138, soit 22% des Mairies, adoptent des arrêtés selon les normes prévues par la loi. Une corrélation positive entre les maires qui adoptent des arrêtés municipaux et leur performance semblerait aussi être établie en positif. 21 sur 31 mairies adoptant des arrêtés figurent parmi celles qui performent le mieux.
Gestion financière et les finances locales
Des importantes remarques ont été enregistrées au niveau de la tenue des livres et des documents comptables, et dans la soumission des rapports financiers: 76 mairies (soit 55%) maintiennent leur documentation comptable en ordre, pendant que 82 mairies (59%) présentent leurs rapports financiers à temps au MICTDN ou avec un délai ne dépassant pas un mois.
Un manque de dynamisme émerge des indicateurs sur le recensement des propriétés bâties et le recouvrement de la CFPB avec des conséquences entrainant d'affaiblissement des recettes locales et donc de la capacité des mairies à gérer un budget au delà des simples allocations du MICTDN.
La majorité des mairies attend une initiative du MICTDN pour procéder au recensement et à la réévaluation des propriétés bâties. Seulement 35 mairies ont pris l'initiative avec leurs propres moyens, ou ceux de partenaires externes, de recenser et de réévaluer les propriétés bâties dans les centres urbains. La corrélation positive entre ces activités et la performance des mairies est confirmée par l'amélioration dans le recouvrement de la CFPB et donc par l'augmentation des recettes locales. Cependant, la majorité des mairies ne sont ni en mesure, ni intéressés, à faire un suivi sur les listes des contribuables et des redevances attendues. En effet, 23 mairies ne disposent même pas d'agents fiscaux, et 47 autres embauchent des agents fiscaux qui ne sont pas opérationnel. Seulement dans 5 mairies sur le 138, les agents fiscaux travaillent avec la DGI pour assurer le suivi du paiement de la CFPB et des contribuables récalcitrants.
Les services liés au génie municipal et l'urbanisme
Au niveau de la gestion des marchés, le rapport a révélé 41% des mairies n'ont aucun contrôle des marchés et 38% es mairies qui contrôlent entièrement les recettes de leurs marchés et qui, dans plusieurs cas, fournissent des services pour l'assainissement des marchés.
L'analyse des services fournis par les mairies à travers leurs services de génie municipale ou d'urbanisme est tout à fait négative. Selon les données collectées 84 mairies ( soit 60%) ne disposent pas d'un service de génie municipal opérationnel et seulement 2 sur 138 maries (Cabaret et Kenskoff) disposeraient d'un service actif dans la gestion des cimetières, des terrains communaux, et dans la livraison des permis de construire. Selon le rapport, ce type de dysfonctionnement relativement uniforme à travers le pays, est particulièrement marqué dans la Grand Anse, l'Artibonite et le Nord Est.
La situation de l'entretien des routes, faisant partie des responsabilités de la mairie, est mieux dans le cas de 34% mairies qui arrivent à entretenir les routes (au moins dans les centres urbains) contre 42% autres qui n'ont pas la capacité de le faire. C'est surtout dans les Nippes et la Grand Anse que l'entretien des routes serait le plus efficace pendant que la situation serait tout à fait catastrophique dans l'Artibonite et encore pire dans le Sud.
Les mairies performent un peu mieux dans le service d'assainissement (souvent dans les limites du centre ville). 54% des mairies sont en mesure de ramasser et disposer des ordures et de faire le curage des caniveaux, contre 21% restent passive et incapables de fournir même le service minimal. Encore une fois, certaines différentiations géographiques sembleraient émerger avec 91% des Communes dans la Grand Anse qui fournissent un service d'assainissement de base, 84% dans le Nord-est et 83% dans le Sud. Sur le versant négatif se distingueraient le Nord, avec 57% des mairies incapables de fournir un service d'assainissement, et le Plateau Central, avec 46%.
Dans l'ensemble, il ressort clairement la difficulté systématique de la majorité des mairies de fournir des services de base à la population. Il est à remarquer le manque de moyens (matériels et financiers), mais la question demeure sur la volonté des mairies à publier des arrêtés qui leur permettraient de collecter des redevances pour le ramassage des ordures. Cette passivité semble caractériser un bon nombre d'administrations municipales qui pourraient être bien plus efficaces si seulement elles oseraient utiliser les pouvoirs que la loi met à leur disposition.
La Mairie, institution maitre d'ouvrage de la gouvernance locale et de la coordination des activités de protection civile, est appelée à jouer des rôles de médiation et de coordination pour lesquels elle n'est pas préparée et équipée. Moins de 50% des mairies organisent des réunions avec leurs partenaires institutionnels afin de renforcer la coordination et de discuter des sujets d'intérêt commun. Cette faiblesse ne semble pas occulter une situation de conflits institutionnels et politiques, et d'un manque d'engagement des autorités locales. En effet, environs 15% des mairies s'abstiennent d'entretenir des relations formelles avec les autres institutions présentes dans la Commune.
Le développement local
Les indicateurs sur le développement local et l'approche participative traduisent les plus grandes faiblesses. En effet, seulement 15 sur 138 (soit 11%) des Communes ont adopté un Plan de Développement Communale (PDC), souvent sur impulsion des partenaires externes comme le FENU, le PDLH, et seulement 21 sur 138 des Communes (soit 15%) ont défini les priorités de la Commune à travers une approche participative. Sur le 15 PDC qui existeraient, 5 ont été développés dans le Nord-est, 3 dans le Nord-ouest et 3 autres dans le Nord. La majorité des Communes (soit 56%) ne disposent d'aucun instrument de planification.
forces vives de la Commune. Seulement 40 mairies (soit 29%) ont travaillé avec la société civile, et d'autres acteurs locaux, à fin de développer une stratégie pour le développement local. Il faut aussi noter que la plupart des ces rencontres ont été facilité par des partenaires externes dans le cadre de la validation du PDC, même si cette approche n'est pas généralisée à Mirebalais et à l'Azile les PDC ont été adoptés sans presqu'aucune consultation.
Pourtant, la nécessité d'adopter une approche participative serait confirmée par la corrélation positive entre cet indicateur et la performance de la mairie : En effet, sur les 17 mairies qui ont adopté une approche participative, 13 rentrent dans la catégorie des mairies à performance moyenne ou élevé, pendant que sur les 22 mairies qui n'ont entretenu aucun dialogue avec leurs communautés se sont retrouvés 18 mairies entre `' non opérationnel et à performance minime»
La classification générale
Sur les 138 Communes considérées seulement celle de Jean Rabel dans le Nord-ouest, démontrerait un bon niveau de performance, suivi par 56 Communes (donc le 40.5%) qui auraient une performance moyenne. Ce dernier groupe représente la majorité relative de l'ensemble des Communes. Mais en sachant que 35.5% des mairies sont classifiés comme à peine opérationnelles 18% des mairies comme dysfonctionnelles et (5%) comme virtuellement non opérationnelles. La majorité des mairies sont donc dans une situation d'extrême difficulté. Pour mieux apprécier certaines des caractéristiques des Communes, une classification par département s'avère nécessaire:
Principales tendances par département Les Nippes
non opérationnelles et 2 autres seraient dysfonctionnelles. Seulement 3, soit 27% des mairies, performeraient à un niveau acceptable. Dans l'ensemble les Nippes se placent en dessous de la moyenne nationale et en dessous de la moyenne arithmétique avec de rares exceptions positives comme pour la ponctualité dans la soumission des rapports financiers ou le respect de l'équilibre des opérations budgétaires. Les Nippes se distingueraient aussi dans le domaine du développement local avec 3 mairies ayant adopté un PDC à travers une approche participative.
C'est surtout dans la gestion administrative que les Nippes accusent des difficultés. Ce département enregistre le taux moyen plus bas en termes de fonctionnement des Conseils Municipaux ainsi que dans la tenue des documents et archives. C'est le seul département où la tenue des documents et archives, les livres comptables se révèle aussi problématique avec environs 8 Communes ne tiennent aucune documentation selon des principes de bonne administration.
Au niveau des finances locales, le département des Nippes enregistrent le taux de recensement de CFPB le plus bas avec, bien évidement, un impact négatif sur le taux de recouvrement des recettes locales qui est parmi les plus bas du pays.
Face à cette sombre image il est surprenant de constater que le département des Nippes offrirait en moyenne un niveau de service supérieur ou proche à la moyenne nationale pour l'entretien des routes et l'assainissement.
Le Sud-est
Tout en restant un des départements avec des taux de performance parmi les moins élevés du pays, aucune des mairies du Sud-est ne serait non-opérationnelle. Cependant, 4 mairies sont catégorisées comme dysfonctionnelles, 4 autres comme des mairies à performance minimale et seulement 2 autres comme des mairies à performance acceptable.
Les principales faiblesses du département se situent au niveau du développement local. En plus de l'absence d'un PDC, il n'y a aucune structure participative. Très peu de mairies du Sud-est ont un service de génie municipal et d'urbanisme capables de desservir la population. La présence des maires et le fonctionnement des Conseils Municipaux est au dessous de la moyenne nationale, sont aussi au dessous de la moyenne nationale le taux de recouvrement de la CFPB, et le taux des recettes locales en générale. Par Contre, la tenue des documents et des archives, comme celle des documents comptables, rentrent dans la moyenne et contribuent aux bons indicateurs en matière de soumission des rapports financiers. Les constats ont révélé des problèmes fréquents entre les mairies et la DGI comme un des éléments qui affectent négativement les finances locales dans le Sud-est.
Le Sud
Dans le Département du Sud, les indicateurs sont particulièrement positifs dans le domaine de la gestion administrative. Le niveau de gestion des finances locales est acceptable. Les Communes du Sud cumulent parmi les résultats les plus décourageants dans le domaine du développement local et des services rendus par le génie et l'urbanisme.
Dans le Sud, 44% des mairies rentrent dans la catégorie à performance moyenne et 8 autres dans la catégorie à performance minimale, et seulement 2 (Port Salut et Tiburon) sont classifiés comme dysfonctionnelles. Paradoxalement, le Sud compte la moyenne la plus élevé du pays en termes de bon fonctionnement des Conseils Municipaux, mais cela ne semble pas aboutir à des décisions qui se traduiraient en arrêtés municipaux, car le Sud enregistre à ce niveau la moyenne la plus basse.
La Grand Anse
moyenne, 4 autres dans la catégorie à performance minimale, seulement 2 mairies sont classées comme dysfonctionnelles.
Ce succès serait basé plutôt sur une bonne gestion financière, et non administrative. Car les défaillances administratives sont nombreuses surtout en termes de mauvaise répartition des taches et d'absentéisme chronique des maires. Ceci résulte en un mauvais fonctionnement des Conseils Municipaux et en un faible nombre d'arrêtés publiés.
Mais au niveau du taux de recouvrement de la CFPB et des recettes locales en générale, la Grand Anse se place parmi les départements les plus performants, même si cela ne se traduit pas dans une production précise et ponctuelle des rapports financiers.
Si d'un coté le génie municipal et l'urbanisme seraient parmi les services les plus dysfonctionnels du pays, cela n'empêcherait pas que la Grand Anse de faire partie des plus performants dans le domaine de l'entretien des rues et d'assainissement. Les faiblesses enregistrées au niveau des relations interinstitutionnelles, surtout de nature politique, se reflètent d'une faiblesse de l'approche participative aux questions du développement local où la Grand Anse enregistre l'indicateur moyen le plus bas du pays.
L'Ouest
Les indicateurs moyens pour le Département de l'Ouest se situent dans la moyenne nationale, chose qui est assez surprenante en considérant la destruction et les pertes subies par plusieurs de ses mairies lors du tremblement du 12 janvier 2010. A l'exception des mairies de Cornillons et de Delmas, pour lesquelles il n'a pas été possible d'obtenir les informations, aucune mairie est rentrée dans la catégorie des municipalités non-opérationnelles et seulement 5 sur 20 seraient dysfonctionnelles. Ce n'est pas surprenant de trouver parmi celles-ci les mairies de Gressier, Petite Goave et Grande Goave dans la région des Palmes ainsi que Cité Soleil et
Anse à Galets sur l'Ile de la Gonâve. Neuf sur 20 mairies rentrent dans la catégorie de celles à performance moyenne et sont retrouvés ici presque toutes les mairies de la zone métropolitaine à l'exception de la mairie de Port-au-Prince qui est classifié comme mairie à performance minimale.
Les mairies de l'Ouest enregistrent des problèmes dans la gestion administrative particulièrement au niveau du Payroll, de l'absentéisme des employés ainsi que dans la sous performance des Conseils Municipaux. Ce qui ne corresponde pas pourtant à un absentéisme des maires, au moins un maire est présent au cours de la semaine dans 13 sur 19 mairies.
Au niveau de la gestion financière et comptable, les résultats sont moins positifs surtout en termes d'exécution des opérations budgétaires où les mairies de l'Ouest cumulent les indicateurs les plus bas du pays. Le recouvrement de la CFPB, et donc les revenus locaux, est aussi faible dans l`ensemble des mairies, mais cela s'explique en large partie à partir des conséquences du tremblement de terre. La plupart des indicateurs liés aux services fournis par le génie et l'urbanisme se classent dans la moyenne nationale, à l'exception de l'assainissement qui serait en dessous. Situation similaire au niveau du développement local où les indicateurs se conforment à la moyenne nationale.
Centre
Le Centre, sur la base des indicateurs, présente un niveau moyen dans la gestion administrative, avec des valeurs qui se situent au-dessous de la moyenne nationale sauf dans le cas de la tenue des archives. La situation est essentiellement positive dans le cadre de la gestion financière même si des faiblesses sont manifestes au niveau du recouvrement de la CFPB et des recettes en générale.
Si le niveau des services fournis par le génie municipal et l'urbanisme se classent dans les moyennes nationales, au niveau de l'assainissement la majorité des mairies accusent une défaillance : 6 mairies ne disposent d'aucun service d'assainissement opérationnel et 3 sur 12 mairies fournissent seulement un service sporadique et dysfonctionnel. Dans l'ensemble, le Centre compte 4 mairies dans la catégorie à performance moyenne et 7 à performance minime et seulement la mairie de Cerca-la-Source est classifiée comme dysfonctionnelle.
L'Artibonite
La performance moyenne des administrations municipales dans l'Artibonite est pénalisée par la situation d'une mairie classée comme non-opérationnelles (Grande Saline) et 3 classées comme dysfonctionnelles. Cinq (5) mairies sont classées à performance moyenne. Dans le cadre de la situation générale de l'Artibonite, le dysfonctionnement des Conseils Municipaux et l'absentéisme des employés émergent comme des caractéristiques dominantes. La situation est compensée partiellement par une présence plus ou moins assidue des maires et une bonne tenue des documents et des archives.
Le recouvrement des recettes locales, et de la CFPB représentent le point faible dans la gestion financière. Le département est en-dessous de la moyenne nationale, même si la tenue des livres comptables et la soumission des rapports financières serait au-dessous des moyens nationales. Comme d'autres départements, l'Artibonite semble fournir seulement des services minimes dans le champ de l'urbanisme et du génie. Pour l'assainissement, l'indicateur de mesure rentre dans la moyenne nationale, avec 6 mairies en mesure d'assainir le centre ville et 8 autres offrant un service sporadique. Malgré l'indicateur négatif pour ce qui concerne les PDC, et des résultats médiocres dans l'approche participative, l'Artibonite se distingue positivement pour avoir des TCC établies dans toutes les Communes, même si seulement 6 sont considérés comme opérationnelles.
Le Nord
Sur la base des indicateurs collectés le Nord se classifie comme le moins performant juste après les Nippes : 1 Commune non opérationnelle (Plaine du Nord), 7 autres qui sont dysfonctionnelles et une majorité (9 sur 19), qui rentrent dans la catégorie des performances minimes. Seulement deux mairies, Acul du Nord et Limbe, se classifient comme mairies à performance moyenne.
Les valeurs moyennes des indicateurs du département du Nord sont entre les plus faibles du pays pour ce qui est de la présence des employés dans les mairies et du fonctionnement des Conseils Municipaux et de la publication des arrêtés. Paradoxalement l'indicateur moyen relatif à la présence des maires est parmi le plus élevés de tout le pays, mais cette présence ne semble apporter aucun bénéfice à leurs administrations.
La majorité des administrations municipales dans le Nord n'ont aucun contrôle sur la gestion des marchés et semblent être encore moins efficace dans la provision du service d'assainissement. 7 sur 19 mairies ne disposent aucun service pour le ramassage des ordures et 4 autres ne disposent d'un service seulement de nom. Seulement 3 mairies (Borgne, Limbe, Quartier Morin et Pilate) fournissent un service de ce type. L'absence de plans de développement où d'une approche participative s'ajoute aux difficultés des mairies du Nord (avec l'exception notables d'Acul du Nord, Limbe et Bas-Limbe qui ont toutes adopté un PDC).
Le Nord-ouest
Le Nord-Ouest est le seul département à compter une municipalité, Jean Rabel, classée à performance élevée. A l'opposé, la mairie de Baie de Henne se classifie comme nonopérationnelle. A coté des deux, il y a 5 mairies à performance moyenne et 3 à performance minime.
Au niveau de la gestion administrative, le Nord-ouest ne présente pas de problèmes particuliers si ce n'est pas pour le Payroll et l'absentéisme des employés. Mais c'est au niveau de la gestion financière et comptable que les mairies du Nord-ouest semblent particulièrement briller. Elles enregistrent des indicateurs moyens les plus élevés du pays en termes de soumission de rapports financiers, de recensement et de recouvrement de la CFPB. Les indicateurs relatifs aux services fournis par le génie et l'urbanisme sont aussi très positifs dans leur ensemble.
Le Nord-est
Le département du Nord-est se présente comme celui qui compte le nombre le plus élevé de municipalités performantes. A la différence du Nord-ouest, ces données ne cachent pas de différences radicales, mais se basent plutôt sur une réalité apparemment extrêmement homogène, avec 12 sur 13 mairies qui se classifient à une performance moyenne et seulement (1) une, Caracol, qui est à une performance minime. Il y a dans le département de bon niveau des indicateurs de gestion administrative, particulièrement pour ce qui concerne la présence des maires et le fonctionnement des Conseils Municipaux, ainsi que le bon niveau des services fournis par le génie municipal et l'urbanisme. Ce qui par contre soulève quelques appréhensions concerne la gestion financière des mairies qui totalisent ici les moyennes les plus basses du pays pour les indicateurs qui concernent le recouvrement de la CFPB et les recettes locales.
Dans les parties précédentes, premièrement, nous avons présenté les grandes théories classiques des notions sous études. Les principales stratégies du développement ont été revues dans leurs différences et complémentarité, dans leurs filiations et ruptures. La notion de décentralisation est étudiée à la fois comme instrument de développement local et composante de tout système de gouvernance territoriale. Deuxièmement, sont reconsidérées dans le contexte haïtien les notions sous études en tenant compte de la culture particulièrement sociopolitique et institutionnelle du pays.
Dans cette dernière partie, consacrée à l'objectivation empirique de la recherche, sera présentée toute une sociographie de la Commune de Croix-des-Bouquets qui mettra en évidence les potentialités et contraintes de celle-ci par rapport au développement et à la décentralisation. Dans cette partie, seront notamment présentés et discutés les résultats conduisant à la conclusion de la recherche, et sera particulièrement traitée la congruence des hypothèses et de la réalité empirique. Des réflexions à visées pratiques seront aussi ébauchées.
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Étant dans l'impossibilité de conduire la recherche de manière systématique sur toute l'étendue de la Commune de Croix-des-Bouquets, il a été décidé de privilégier et de retenir l'espace urbain pour mener les enquêtes proprement dites, bien que les observations participantes nous aient amené à parcourir les dix (10) sections communales de la dite Commune. A ce tournant, il importe de dresser une sociographie et de préciser les niveaux de territorialité de la Commune en générale et de l'espace urbain en particulier.
Histoire et idéologies
Selon Moreau de St Méry, pendant la période coloniale et après l'indépendance de 1804, Croix-des-Bouquets possédait de nombreuses guildiveries, de manufactures, des indigoteries et de vastes plantations de vivres alimentaires. La Commune de Croix-des-Bouquets a été le théâtre de beaucoup d'évènements historiques. L'armée des Mulâtres et des Libres de couleur commandée par Beauvais et Rigaud , chassée de Port-au-Prince, se reforma à Croix-desBouquets. L'arrivée de cette troupe provoqua un soulèvement brutal des esclaves de la plaine du Cul-de-Sac. Ceux-ci avaient pris pour chef Yacinthe et se joignirent à l'armée de Beauvais et
En principe, la sociographie fait référence aux études des réalités et faits sociaux, sans nécessairement traduire les effets et les transformations qu'opèrerait le travail humain sur l'espace géographique qui se transformerait en territoire. En ce sens que la territorialité- regroupant tout ce qui a trait à l'espace comme facteur des comportements humains- ressort à la fois de ce qui a été (de l'espace précédent le territoire), de ce qui est (le territoire tel qu'il se présente) et de ce qui aurait pu être. Sociographie et études de territorialité paraissent donc inextricablement complémentaires s'il faut dégager une compréhension globale et profonde du milieu sous étude.
Rigaud. Les Blancs et leurs alliés
décidèrent d'attaquer ce rassemblement. Le 22 mars 1792,
le
grand combat s'engagea à Croix-des-Bouquets pour occasionner 1 200
morts parmi les insurgés
er
et 100 morts dans le camp adverse. Le 1janvier 1807, Croix-des Bouquets aussi a connu la grande bataille qui eut lieu à Sibert entre forces armées du général Alexandre Pétion et celles du général Henri Christophe. Ce dernier assiégea Port-au-Prince pendant une semaine avant de repartir pour le Nord où résida son gouvernement.
Élevée au rang de Commune en 1959, dans sa vie contemporaine, la Commune de Croix-des-Bouquets est reconnue pour être un milieu conservateur et pro-duvaliériste. Le vaudou, le catholicisme et le protestantisme sont les religions les plus pratiquées dans la Commune.
Espace, géographie et démographie
La Commune de Croix-des-Bouquets est géographiquement bornée à l'est par Thomazeau, Ganthier et Saut-d'eau; au sud par Belle-Anse ; à l'ouest par Cité Soleil, au nord par Tabarre, Pétion-Ville, Kenscoff, de Cabaret et le Golfe de la Gonâve. La Croix-des-Bouquets est la première Commune de l'arrondissement du même nom, elle est subdivisée en dix (10) sections communales: 1re Section des Vareux, 2e Section des Varreux, 3e Section Petit-Bois, 4e Section Petit-Bois, 5e Section Petit-Bois, 6e Section Belle Fontaine, 7e Section Belle Fontaine, 8e Section Belle Fontaine, 9e Section des Crochus, 10e Section des Orangers.
Tableau IV: Carte géographique de la Commune de Croix-des-Bouquets
Source : IHSI-2005 / Inventaire des Ressources et des Potentialités des Communes
Croix de Bouquets est une Commune intérieure dont la moitié des sections communales ont pour relief dominant le morne et l'autre moitié leur relief dominant est la plaine. Ont été inventoriés dans la Commune, cinquante sept (57) sources, dix huit (18) rivières et cinq (5) lagons ont été inventoriés dans la Commune. De plus, près de mille cinq cent cinquante sept (1 557) puits ordinaires et huit cent soixante dix sept (877) forages ou puits artésiens ont été également répertoriés.
En 2005, la population de la Commune de la Croix-des-Bouquets était estimée à 205 410 habitants. La population féminine était en supériorité numérique, 107 501 femmes contre 97 909 hommes. Au cours de la période intercensitaire 1982-2003, la population de la Commune a
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connu un taux moyen d'accroissement annuel de 3,3%. Pour une superficie de 634,62 km , la
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densité était de 324 habitants/km . La répartition de la population par grand groupe d'âges de la Commune présente la structure suivante : 34,5% de la population de la Commune ont moins de 15 ans, 61,5% sont âgés de 15-64 ans et ceux de 65 ans et plus représentent 4,0%.
Ruralité et urbanité
En 2007, selon IHSI la population urbaine s'estime à 12,4%, et donc la population rurale s'estime à 87,65. De nos jours, beaucoup de gens des sections communales reculées s'installent en affluence à la ville de Croix-des-Bouquets. Ils sont à la recherche d'emplois, de meilleures écoles pour leurs enfants. L'exode des sections communales vers la ville de la Commune entraine un déséquilibre majeur dans la répartition spatiale et la composition de la population (dépeuplement accru de certaines sections communales). A coté de ce surpeuplement stable, la ville de la Commune est victime d'un surpeuplement passagère, mais régulier, le vendredi (le principal jour de marché) où notamment les Communes limitrophes (Ganthier, Thomazeau, cornillon, etc.) viennent s'approvisionner ou régler d'autres transactions. Sans compter, des cadres techniciens de Port-au-Prince, de Tabarre, de Carrefour ou autres qui viennent travailler chaque matin à Croix-des-Bouquets, ce qui donne `'un effet d'usine» au fonctionnement de la Commune.
Après le séisme du 12 janvier 2010, la Commune de Croix-des-Bouquets a reçu plus de 300 000 personnes déplacées. Se sont donc terriblement aggravées, les difficultés de la Commune dont la population s'est plus que doublée en moins d'une année. La désertification des Sections Communales et l'hypertrophie de la ville mettent rudement à l'épreuve la capacité de la Mairie à exercer ses compétences propres ni celles partagées avec l'État. Les déchets ne sont ni collectés ni ramassés, par exemple.
L'invasion des ONG, des OI et des déplacés fortunés contribuent fortement aux opérations des spoliateurs des terrains étatiques ou municipaux. Devant l'incapacité des autorités locales, des spoliateurs ont profité de l'arrivée désordonnée pour vendre des biens fonciers privés de l'État ou de la Mairie. L'insécurité est au paroxysme, vols et viols se font beaucoup plus courants. A l'image de la République, les institutions déjà faibles de la Commune deviennent comme effondrées ou affaissées.
Education et santé
L'éducation de la population crucienne est assurée par cinq cent soixante seize (576) institutions scolaires dont cinquante deux (52) établissement de niveau préscolaire, trois cent dix huit (318) écoles primaires et deux cent six (206) établissements secondaires. Plus de quatre vingt pourcent (81,8%) des institutions scolaires sont localisés en milieu rural. Plus de 4/5 des établissements scolaires de Croix-des-Bouquets sont privés. La Commune dispose de quinze (15) écoles supérieures et de quatre vingt douze (92) institutions techniques et professionnelles.
La Commune possède soixante quinze (75) établissements sanitaires. L'effectif du personnel des établissements sanitaires répertoriés s'élève à cinq cent cinquante cinq (555). Ce personnel est constitué de médecins (144) et d'auxiliaires (141). Les institutions sanitaires avec 85,3% d'établissements privés sont plus nombreuses en milieu rural (59) qu'en milieu urbain (16).
Economie et commerce
Les mangues, la canne à sucre, le café, le coton, le sisal, le tabac, les haricots et les huiles essentielles constituent les produits forts de l'économie de la Commune de Croix-desBouquets. Pour les infrastructures économiques, on a dénombré dans la Commune vingt (20) hôtels, sept (7) pensions et quatre (4) auberges. Croix-des-Bouquets détient également sept cent
Le nombre de spoliateurs s'estime à près de 600 par jour.
quarante deux (742) autres établissements financiers parmi lesquels on trouve trois cent quarante et un (341) banques de borlette et trois cent dix sept (317) guérites.
Le commerce, l'agriculture et l'élevage des animaux représentent les principales activités économiques de Croix-des-Bouquets. Mille quatre cent dix (1 410) établissements commerciaux parmi lesquels cinq cent vingt neuf (529) boutiques dont trois cent dix huit (318) petites boutiques et deux cent onze (211) grandes et moyennes boutiques, cent soixante et un (161) dépôts de boissons gazeuses, de ciment, matériaux de construction, friperie (pèpè), de charbon, de clairin, cent cinquante deux (152) magasins de provisions alimentaires et cent quarante et un (141) matériaux de constructions ont été inventoriés dans la Commune.
Culture et loisirs
Du coté des loisirs, neuf (9) bibliothèques privées, un musée, deux (2) salles de théâtre et huit (8) salles de cinéma ont été inventoriés dans la Commune. Quatre vingt (80) espaces aménagés de manière circonstancielle pour pratiquer le sport dont 53 terrains de football, quarante huit (48) gaguères et trois (3) places publiques constituent également des lieux de loisirs et de divertissement des cruciens. Environ onze (11) sites coloniaux, quatre (4) sites naturels et deux cent soixante treize (273) lieux ou temples vaudou ont été trouvés dans la Commune.
Gestion de services publics locaux
Dans la Commune de Croix-des-Bouquets, les services publics sont fournis ou gérés essentiellement par deux (2) catégories d'institutions :
un tribunal de première instance, un tribunal de paix, un commissariat de police et deux sous-commissariats de police, un bureau de la DGI, un bureau d'État civil, un bureau de l'EDH, et un bureau de Natcom.
(ii) Les institutions locales décentralisées : La Mairie et les dix (10) Casecs. Ni
l'Assemblée Municipale ni les Assemblées de Section Communales ne sont fonctionnels.
Conformément à la Loi, la Mairie et les Casecs exercent respectivement leurs attributions locales à travers une gestion autonome usant leurs moyens propres et les subventions régulières de l'État. En plus, les institutions locales de Croix-des-Bouquets, comme toutes les autres CT, bénéficient de l'expertise technique des institutions déconcentrées qui sont présentes à la fois pour encadrer les institutions locales dans le cadre des compétences partagées et pour exercer les compétences non-partagées.
Dans le domaine du développement, il a été constaté que la Commune de Croix-desBouquets ne possède ni un PDC ni programme communal. L'Administration de la Commune existe, mais gravement dysfonctionnels. La Mairie de Croix-des-Bouquets n'a aucun contrôle des associations et des ONG oeuvrant dans la Commune. Les forêts restant non-protégés constituent une source de revenu abusé par les coupeurs de bois. La perception des recettes de la Commune très faible. La Police administrative municipale n'existe pas. Aucun plan de l'aménagement de la Commune n'est officiellement communiqué. Des lois, des décrets, des arrêtés, promulgués par le pouvoir central et qui concernent la Commune ne sont que circonstanciellement respectés.
La voierie communale ne fonctionne pas. Dans la période post séisme, les déchets urbains sont gérés par quelques ONG et OI à travers des programmes de Cash for work qui n'atteignent que le Centre-Ville de la Commune. Les Sections Communales éloignées du Centre
ville sont des laissées-pour-compte, car elles ne sont pas en mesure de fournir la visibilité exigée des ONG et OI. Les ménages des ces Sections Communales éloignées (formant 80% du territoire) sont contraints de traverser toute la Commune de Croix-des-Bouquets avec leurs déchets afin de les déposer dans une poubelle d'une Commune limitrophe, Tabarre ou Petion Ville, par exemple.
La majorité des routes étant en terre battue sont péniblement trouées. Les lots des immondices et les eaux usées non canalisées freinent piteusement la circulation publique aux moments des pluies. Les marchands sont entassés dans l'espace du marché public (deuxième marché du pays après celui de Croix-des-Bossales), aux moments des pluies, ils sont contraints d'étaler leurs produits sur de boues contenant ordures et excréments animaux et humains. Aux moments de sécheresse, ils sont constamment exposés aux poussières contaminant et malodorant. Il n'y a pas de toilettes publiques, les marchands s'arrangent pour faire leurs besoins là où ils sont. La santé de la collectivité est constamment menacée sans jamais interpeller la conscience des responsables. Au niveau sécuritaire, les marchands sont constamment rançonnés en plein jour où ils trouvent leurs dépôts grand ouverts le matin et leurs marchandises emportés. La police et la justice paraissant indifférentes n'engagent aucune action préventive ou punitive.
La population crucienne évolue dans une méfiance collective par rapport aux autorités publiques en générale, et des autorités municipales en particulier qui sont accusées de n'être que promptes à faire payer des taxes, à confisquer des biens sans fournir des services en retour. Il a été constaté que les citoyens de Croix-des-Bouquets font tout pour éviter d'être en contact avec les autorités publiques en général et des autorités municipales en particulier. Cet évitement constant s'explique par toute une multitude de causes qu'on élucidera plus loin.
Les données sur la Commune ont révélé de grandes faiblesses de sécurité alimentaire, et sanitaire, d'infrastructures éducatives de qualité, de logement, etc. Seulement une minorité de la
population crucienne jouit d'un niveau de vie pour ainsi dire
acceptable. C'est une Commune oüla pauvreté frappe tout
le monde, à l'exception de cette minorité. Le rythme de la
croissance de
la population va en s'accroissant pendant que la Commune entre
dans un processus de décapitalisation et de dévitalisation
sévère depuis la chute des Duvalier en 1986.
Cette minorité dont le niveau de vie est estimé
élevé par rapport à la moyenne réside dans la
Commune sans y vit à proprement parler. Car pour elle, la Commune ne
joue que la fonction de dortoir. Les gens participant de la minorité
privilégiée ne font que dormir dans la Commune pour la laisser
très tôt le matin avec leur famille pour aller travailler ou
à l'école à Port-au-Prince, à Pétion
ville... Ce faisant, ils ne développent peu de sentiment d'appartenance
à la Commune. Souvent, ils parlent de `' moun
Kwadèboukè» (les originaires de Croix-desBouquets) pour
marquer leur distance par rapport aux cruciens pour ainsi dire originaires.
Cette distanciation est encore renforcée par les originaires de
Croix-des-Bouquets qui traitent ces gens de `'moun vini» (les gens
fraichement venus). Ces derniers font tout pour se tenir hors de la gouverne de
choses de la Commune. Les empreintes sur l'espace communale ne relèvent
que de consommation. Ils achètent des terres spoliées qu'ils
acceptent de payer plusieurs fois, ils utilisent la main d'oeuvre à bon
marché, ils profitent des négligences ou des incapacités
des institutions pour ne pas payer le fisc et les
services
·. Pour cette catégorie, la Commune reste et
demeure un simple espace pour lequel ils ne déploient aucun effort de
territorialisation. D'autre
Quand ils achètent des terres d'un héritier sans le reste des héritiers, un autre héritier peut appeler en justice pour faire repayer les terres sous peine de les faire confisquer. Dans la majorité des cas, les terres vendues sont du domaine privé de l'État ou d'un propriétaire résidant à l'étranger qui entame généralement un procès au retour. Le plus souvent, l'acheteur qui a eu le temps de construire sur les terres est contraint de se racheter les terres soi - disant du bon vendeur .
· Ils peuvent construire sans verser à la Mairie
les frais du permis de construire, du droit d'alignement, etc. Car personne
n'apporte de bordeaux pour l'électricité, le
téléphone, etc.
en plus, les cruciens soit disant originaires se distinguent en `'moun nan bouk» (les gens habitant la ville) et `'moun deyò bouk» (les gens venant hors de la ville), c'est pour dire la population crucienne est fondamentalement différenciée.
La pauvreté de masse qui sévit à Croix-des-Bouquets est donc accentuée par les fortes inégalités entre hommes et femmes, entre les urbains et ruraux... la masse de la population crucienne n'a pas accès aux services publics de base qui sont dominés par le secteur privé. Cette façon de faire renforce l'exclusion des citoyens ou citoyennes à faible revenu ou sans revenus, et qui ont donc toutes les peines du monde pour couvrir leurs besoins fondamentaux. La population de la Commune de Croix-des-Bouquets vit donc dans toutes les formes d'insécurité (sanitaire, alimentaire, environnemental, politique, etc.). Les contraintes du développement communal deviennent nombreuses et épineuses. Elles partent pour ainsi dire de la défaillance des institutions étatiques (déconcentrées ou décentralisées), du manque d'action collective organisée et réflexive de ses agents civils, à la départicipation des citoyens et citoyennes de la Commune.
Pour clarifier ces constats et contraintes soulevés, il importe de préciser l'hypothèse selon laquelle : la décentralisation- étant fondée sur le partage des responsabilités et des ressources, et la participation citoyenne- ne favorise le développement local que dans la mesure oil elle est pratiquée dans un système de gouvernance territoriale cohérent.
Sont ainsi précisés, délimités et clarifiés dans le tableau ci-dessous les principaux concepts: décentralisation, développement local, système de gouvernance territoriale- participant de la formulation de l'hypothèse de travail.
Cet aspect est largement développé par Fritz Dorvilier dans son ouvragre `' Gouvernance associative et développement local en Haïti, Éditions de l'UEH, 2011». Cette recherche part d'ailleurs de Belle-Fontaine, espace de la Commune de Croix-des-Bouquets.
Variable(s) Décentralisation Développement local Système de Gouvernance
territoriale
Définition (s) opératoire (s)
Transfert de certains pouvoirs, de certaines compétences et de certaines attributions de l'Etat vers
des Collectivités Territoriales (CT) pour qu'elles disposent d'une personnalité morale et juridique, d'une autonomie administrative et financière.
Capacités mentales d'une collectivité qui lui permet de participer au façonnement de son territoire immédiat dans le but d'améliorer de manière continue et soutenable ses conditions et qualités de vie.
Mise en réseau des différents acteurs institutionnels, politiques, économiques et sociaux dans la perspective d'un programme de développement soutenable de leur territoire.
Dimension(s)
- Valorisation des potentialités locales; -Existence d'une vision
stratégique partagée;
- Garantie Constitutionnelle du transfert des pouvoirs, des compétences et des attributions de l'Etat vers des CT ;
- Mise sur les acteurs locaux et la dynamique qui les anime ; |
-Concertation et coordination des niveaux d'acteurs ; |
-Election au suffrage universel direct
des autorités locales ;
- Non-existence de contrôle hiérarchique des CT par l'État ;
- Pouvoirs et compétences à imposer des taxes, et à relever des taxes propres selon la loi ;
- Transfert régulier et non- conditionné d'une portion de taxes de l'État vers les CT selon la loi ;
- Transparence de la gestion publique territoriale ;
- Alignement des priorités sur les grands axes de développement régionaux et nationaux ;
- Primauté du droit dans la gestion des conflits;
- Mise en place des stratégies inscrites dans une démarche partenariale tripartite entre société civile, secteur privé et les institutions publiques municipales ;
- Appropriation locale du développement
- Les institutions publiques municipales jouent le rôle de maitre d'oeuvre du développement;
- Responsabilité dans le domaine de l'éducation, santé, infrastructures, police et fournitures de certains services publiques de base, et la planification et gestion du développement.
Indicateur (s) -Cadre législatif et réglementaire disponible ;
- Intégration harmonieuse des composantes économique, sociale, culturelle, politique et environnementale.
- Les potentialités locales sont valorisées;
- Autonomisation des citoyens et citoyennes
- Existence d'un Plan local de développement traduisant la vision stratégique ;
-Les transferts de pouvoirs et des ressources aux CT sont effectués dans le cadre de la loi ;
- Les autorités locales sont élus au suffrage universel direct ;
- Les acteurs locaux et leur dynamique sont pris en compte ;
- Les priorités sont alignées sur les grands axes de développement régionaux et nationaux
- les acteurs sont concertés et leurs actions sont coordonnées ;
- La gestion publique territoriale est transparente ;
municipales ; -La dynamique du
développement vient du milieu et est supportée les citoyen (nes) locaux ;
-Fonctionnement autonome des CT jouissant de personnalité morale et juridique ;
-Relevée de revenu propres à partir de taxes imposées par les CT de concert avec l'État
- Les CT partagent des responsabilités dans le domaine de l'éducation, santé, infrastructures, police et fournitures de certains services publiques de base, et
- Sont mise en place des stratégies inscrites dans une démarche partenariale tripartite entre société civile, secteur privé et les institutions publiques
-Le rôle de maitre d'oeuvre du développement est rempli par la Municipalité
- Le droit prime dans la gestion des conflits;
- Les citoyen (nes) sont responsabilisés et détiennent les capacités pour participer.
la planification et gestion du développement.
- Les composantes économique, sociale, culturelle, politique et environnementale sont
harmonieusement intégrées.
L'organisation politique de l'État est régie par la Constitution dont la supériorité sur la loi ordinaire tient de la consécration des droits et libertés fondamentales des citoyens. La garantie fondamentale de tout processus de décentralisation doit être Constitutionnelle. Ceci constitue l'un des indices majeurs qui aident à identifier si la volonté de décentraliser est réelle. Un État dont le principe de la décentralisation ne s'inscrit que dans les lois ordinaires et non dans la loi suprême de la nation (la Constitution) souffre de la menace constante du centralisme. La tendance centraliste en soi est tellement vigoureuse qu'elle peut, sous de simples prétextes, sauter les arrêtés, décrets, les décrets-lois, etc. constituant de très faible verrou, surtout dans le contexte d'instabilité politique des pays récemment dirigés par des dictateurs.
Dans le contexte haïtien, on l'a vu précédemment, le processus de la décentralisation charrie tout un ensemble d'arguments revendicatifs qui ont abouti à la refondation de l'État par une nouvelle Constitution en 1987 qui consacre la décentralisation effective comme mode de concertation et de participation de toute la population aux décisions majeures de la vie nationale.
.
Cependant, l'analyse du contenu des 298 articles de la Constitution de 1987 a permis de relever des ambigüités dans le principe de l'égalité66 de la décentralisation en Haïti. Dans un État unitaire décentralisé, les Collectivités Territoriales (CT) sont en principe des entités administratives jouissant de la personnalité morale et juridique, et elles sont égales au niveau statutaire. Par contre, la Constitution haïtienne établit implicitement des différences statutaires au niveau des CT. L'article 66 consacre l'autonomie administrative et financière aux Communes de
66 L'égalité est le principe qui fait que les hommes doivent être traités de la même manière, avec la même dignité, qu'ils disposent des mêmes droits et sont soumis aux mêmes devoirs
la république, sans leur accorder la personnalité morale à l'instar des Départements. L'autonomie administrative et financière n'implique pas forcement la reconnaissance de la personnalité morale et juridique. Au regard de la Constitution, les Communes haïtiennes ne sont pas explicitement titulaires de droits et d'obligations. La situation des Sections Communales (SC), étant des CT, est encore plus alarmante. Les SC ne jouissent explicitement d'aucune autonomie administrative et financière, encore moins de personnalité morale et juridique.
Cet état de chose crée un véritable flou juridique. Les CM et Casecs peuvent-ils entrer en litige avec l'État central ? A quelle limite peuvent-ils disposer d'eux mêmes ? Par contre la situation des Départements est sans ambigüités par rapport à ces interrogations. L'Analyse du statu des trois (3) Collectivités Territoriales reconnues (article 61) a permis de signaler ceci:
Tableau V: Problématique des statuts des CT
Collectivité Territoriale |
Statut Constitutionnel |
Degré de décentralisation |
Section Communale |
Entité territoriale administrative (art. 62). |
Très faible |
Commune |
Autonomie administrative et |
Moyen |
Département |
Personne morale. Autonome. (art. 77) |
Forte |
Source : Auteur
Pourquoi cette discrimination statutaire ? Y aurait-il donc en Haïti des CT supérieures à d'autres CT existantes ? Les Sections Communales et Communes sont dirigées des élus au suffrage universel tout comme le président de la république, tout comme les parlementaires,
mais sans la personnalité morale et juridique. S'agit-il d'une confusion conceptuelle ou d'un fait calculé sur mesure ? L'histoire de `'jeu de balancier» de l'autonomie des Communes, comme démontré dans les différentes Constitutions haïtiennes, peut laisser croire qu'il s'agit non d'une confusion conceptuelle, mais plutôt d'une fenêtre laissée entrouverte sur le statut incertain des Communes, question de précariser particulièrement la décentralisation effective des Communes et le processus de la décentralisation en générale.
Cette compréhension de `'fait calculé sur mesure `' est d'autres en plus renforcée, car, après environ un quart de siècle depuis l'adoption de la Constitution de 1987, les organes Constitutionnellement prévus dans le processus de la décentralisation ne sont qu'infirmement mis en place et ceci dans une logique pour ainsi très déconcertante. Les Conseils Municipaux fonctionnent sans les Assemblées Municipales, organes de contrôle, de délibération et de participation. Aucun conseil départemental ne fonctionne, ce qui entraine automatiquement le non-fonctionnement du Conseil Interdépartemental. La configuration- des institutions fonctionnelles et non fonctionnelles de la décentralisation- soulève un paradoxe dans le processus. Les conseils exécutifs des Communes dont le statu est mitigé existent. Les conseils exécutifs des Départements dont le statu est sans ambigüité n'existent point. Les Communes fonctionnent dans une précarité juridique. Les Départements qui auraient la latitude légale nécessaire pour fonctionner pleinement comme entité décentralisée n'ont ni conseils exécutifs, ni Conseils délibératifs ou participatifs (Assemblées Départementales) dans la réalité. Tel est aussi le cas du Conseil Interdépartemental (CI) qui travaillerait directement avec l'Exécutif, et participerait au Conseils de ministres dans le cadre l'étude et de la planification des projets de décentralisation et de développement du pays (article 87-87.5 de la constitution de 1987).
Pourquoi des entités ont été mises en place et d'autres non ? Pourtant toutes les Délégations et Vice-Délégations sont fonctionnelles. Les entités délégataires même de l'exécutif et de chaque ministre du gouvernement ont vue ces dernières années leur situation en parfaite amélioration. On a assisté à un plus grand déploiement territorial de l'État centrale par le biais
des Directions départementales dont les conditions matérielles ont sensiblement amélioré. L'État semble se renforcer sans accompagner les entités décentralisées à se renforcer. Assiste t-on à un retour du centralisme d'autrefois?
En 2006, soit 19 ans après, est publié le parquet de cinq (5) décrets qui viennent régler le mode d'organisation et de fonctionnement des Collectivités Territoriales. Cependant ces décrets sont frappés d'interdit politique. L'État n'a pas une position arrêtée des décrets. Ils ont été publiés dans le journal officiel du pays par l'exécutif. Il n'y a jamais eu d'arrêté ni de décrets contraires aux cinq décrets, cependant ils ont été politiquement mis en veilleuse. Puisqu'en dehors de ces décrets c'est le vide au niveau du mode de fonctionnement et d'organisation des CT, le MICTDN, exerçant le contrôle de tutelle sur les CT, en fait un usage mitigé. Les décrets constituant la `'Charte des Collectivités Territoriales» sont mis en ligne sur le dite du MICTDN, mais aucun officiel ne les assume publiquement. Le MICTDN a publié en Avril 2011 le Recueil de textes normatifs entourant l'action locale (648 pages) où ces cinq décrets ont été largement cités et exploités dans la régulation du mode de fonctionnement et d'organisation des CT, cependant contrairement à tous les autres textes cités, les décrets ne figurent dans l'annexe. Ces décrets à la fois utilisés et mis sous suspicion créent une confusion monstre sur l'organisation et le fonctionnement des CT. On est donc devant un État marron qui n'assume pas ses actes, qui ne tranche pas et qui joue sur les confusions pour se déresponsabiliser.
Dans cette confusion ou flou juridique grave, l'État qui est censé être un organe unifié de décisions est déchiré par ses propres contradictions. Le MPCE et le MICTDN sont bien connus pour leurs guerres intestines dans le cadre de leurs interventions dans les Collectivités Territoriales. Le MICTDN armé de sa mission de définir et concrétiser la politique du pouvoir exécutif en ce qui concerne la tutelle des CT, et le MPCE conscient de sa mission d'élaborer des plans de développement national, ces deux entités étatiques s'affrontent incessamment afin de déterminer celui qui agit sur et contrôle les actions des CT.
Selon la stratégie du MPCE, les Communes et les Sections Communales ne que des niveaux territoriaux opérationnels dont les politiques de développement doivent s'aligner sur les priorités définies au niveau de l'arrondissement qui n'est selon la Constitution n'est qu'un découpage administratif. D'ailleurs, le Plan national de relèvement et de développement du pays se fonde essentiellement sur les arrondissements et les Vice-Délégués pour promouvoir l'aménagement du territoire et le développement local. Le MPCE, privilégiant la déconcentration, soutient que la mise en place de services administratifs locaux serait plus fonctionnelle à l'échelle de l'arrondissement qu'à ceux des Communes et des Sections communales. Alors que le MICTDN veut que la décentralisation- comme mode de responsabilisation et de capacitation des Maires et des Casecs- soit au centre des décisions stratégiques. Ainsi deux (2) visions d'organisation territoriale s'affirment et s'affrontent. Des activités du MPCE sont parfois paralysées, car il n'a pas la capacité de mobiliser les Maires et Casecs qui sont pour ainsi dire contrôlés pour le MICTDN. Ce dernier, à son tour, s'enlise dans un certain renforcement de l'administration locale sans pouvoir effectivement accompagner le processus du développement territorial des Communes et des Sections Communales. Car pour cela, l'expertise en planification et aménagement du territoire du MPCE serait nécessaire.
La stratégie de l'organisation et du développement territorial est d'autre en plus ambiguë que d'autres acteurs comme les députés, les sénateurs, et même le président outrepassent leurs prérogatives Constitutionnelles pour piétiner les attributions des Délégués, des Maires, des Casecs. Bien que le Maire soit le premier responsable de développement de la Commune, Souventefois c'est le député et/ou le sénateur qui reçoivent du gouvernement central les fonds pour faire opérer des projets de développement, et ceci à l'insu même du premier citoyen de la Commune qui est le Maire. Quand les Casecs ne sont pas directement convoqués au Palais national pour recevoir les dons et les instructions de l'exécutif, ils sont recrutés sur terrain via le MICTDN pour devenir des agents locaux du pouvoir exécutif. N'ont-ils récemment reçu des cellulaires et des motocyclettes pour mieux faire les campagnes électorales du pouvoir en place ? Les délégués départementaux ont été mis en poste pour des fins uniquement politiques. On a observé récemment des délégués démissionnaires qui s'enorgueillissent d'avoir fait leur job en contribuant à la victoire des sénateurs du président de la république qui l'a nommé. Les
représentants de l'État central feignent une mécompréhension totale des organisations et attributions des institutions locales. Ils les domestiquent par l'abus du pouvoir et les corrompre avec les ressources mêmes qu'ils devraient mettre à leur disposition.
Toutefois, cette pratique déroute l'idéal explicite de la Constitution de 1987. L'absence des CI laisse le champ libre à l'exécutif et au gouvernement de faire les grandes décisions de la nation sans la concertation et la participation des populations locales. Les Conseils Municipaux et Casecs en poste se trouvent dans des conditions vulnérables qui ne leur permettent point d'exercer les pouvoirs et compétences octroyés. Les observations directes ont révélé que les élus locaux (Maires, Casecs) sont peu conscients des compétences qui leur sont octroyés. Ceux qui en sont plus ou moins conscients par moments n'ont pas nécessairement la faculté, la capacité ou la possibilité matérielle d'en exercer. C'est ainsi qu'il a été aussi observé que de manière pratique les Casecs fonctionnent sous le contrôle des Maires, qui se jettent à leur tour dans les mains du pouvoir centrale, notamment le MICTDN dont le contrôle de tutelle devient en réalité un véritable contrôle hiérarchique. Au lieu d'encourager la mise en place des Assemblées Constitutionnelles, le pouvoir centrale, par le biais du MPCE fait tout pour établir des structures non-constitutionnelles parallèles : les Tables Départementales de Concertation (TDC), les Tables Communales de Concertaion (TCC) et des Tables Sectoriels (éducation, santé, environnement, justice, agriculture, etc.). Les TDC, TCC et TS bénéficient- depuis le passage du cyclone Jane en Haïti (2004) notamment à Gonaïves- d'une attention particulière de l'État et des bailleurs de fonds internationaux. Présidés respectivement par le délégué départemental, le Maire et le directeur départemental sectoriel, ces structures sont financièrement appuyées par l'ONU, les ONG, les OI qui les utilisent comme espace de concertation et de participation entre le secteur public, la société civile et le secteur privé.
A la moitié des années 80, sont engagées
à travers les mouvances pro-démocratiques en Haïti des
luttes contre le centralisme d'État et pour une appropriation des
espaces politiques tant locale que nationale. Cette ferme volonté
d'occuper l'espace politique et de réorganiser les rapports
sociopolitiques projette une refondation inclusive de l'État par le bas.
Ces luttes des années 80 étaient supposées renforcer la
symbiose entre la participation et la décentralisation. Les
administrations locales étant plus près des citoyens
administrés, elles devraient mieux répondre aux besoins de la
population. Cependant il n'existe pas d'un flux d'informations efficace entre
les citoyens et les administrations locales. Les habitants ne sont ni
informés des décisions du Conseil Municipal ni n'ont t-ils
été consultés dans le cadre de l'élaboration des
documents vitaux, comme le budget de la Commune. Du coté du Conseil
n'est mise en place aucune instance de concertation et de participation afin de
faciliter la participation effective de la société civile. Le
mode de gouvernance territoriale instauré demeure concentré et
centralisé
·.
Contrairement aux attentes populaires, la décentralisation n'a pas permis les interactions régulières entre les citoyens et l'Etat. La situation actuelle ne traduit que de très peu les ambitions populaires des années 80. Toutefois, la demande de la décentralisation se fait de plus en plus exigeante. A la différence, ce nouveau souffle de décentralisation vient carrément de l'extérieur. Cela s'expliquera à partir des théories normatives qui posent la décentralisation comme préalable à la stabilité, à la participation démocratique et au développement. Aujourd'hui, ce sont davantage et surtout les bailleurs de fonds internationaux (ACDI, PNUD, MINUSTAH, CF, UE, etc.) qui sont au poste de commande de la décentralisation en Haïti. Ces bailleurs sont
L'article 82 du décret cadre sur la décentralisation (2006) garantie le droit à l'information et de consultation des habitants.
· L' article 84 du même décret exige le
mise en place des instances de participation au profit de la
société civile.~
unanimes à croire que la décentralisation constitue la meilleure stratégie pour reformer la gouvernance en Haïti. Agissant ainsi, ils font de la décentralisation une partie substantielle de leurs recettes qui sont censées remédier à tous les malheurs qui pourrissent la vie des haïtiens.
En incarnant une version minimaliste par rapport au rôle de l'État, les bailleurs internationaux tentent de transformer la décentralisation haïtienne en un véritable instrument de régulation devant faciliter l'expansion et l'accumulation du capital international. D'ailleurs ils n'entendent rien engager avec une Collectivité Territoriale sans l'approbation de l'État central, même si la CT jouit de la personnalité morale et juridique. Ils claironnent appuyer la décentralisation, mais seulement ils le font à travers des démarches très centralistes et internationalistes. C'est le cas de la Commune de la Croix-des-Bouquets où 75% des ONG et OI interrogées affirment avoir l'autorisation de l'État central, et 15% déclarent être en pourparlers avec l'État central. Aucune de ces entités ne juge nécessaire d'aller voir la Mairie de la Commune.
Par conséquent, comme les théories descriptives le soutiennent, les ONG et OI à la Commune de Croix-des-Bouquets mettent en oeuvre des projets non conformes à la réalité du milieu. Par exemple, n'ayant aucune idée de la tracée territoriale de la Commune, un bailleur a construit une école communautaire au beau milieu d'une route secondaire. Malheureusement, peu de temps après, cette école a dû être démolie pour faciliter le passage public. Pertes de ressources, pertes d'énergie, et pourtant le besoin de l'école demeure au sein de cette communauté. Les autorités locales, étant enquête de subventions, se plient docilement sous les contraintes des donateurs qui cherchent plus à se justifier par-devant son quartier général sis à l'étranger que de répondre pertinemment aux besoins locaux. Par la force des subventions
financières et d'influence politique, les donateurs arrivent à vider la décentralisation haïtienne de ses substances originaires et l'oriente vers un paradigme internationaliste uniforme.
Les dirigeants ne manifestent aucune volonté pour mettre en place de manière pratique l'arsenal de la décentralisation prévue par la Constitution. Quand Ils n'encouragent pas la duplication, le court-circuitage, ils violent carrément la Constitution. Ainsi donc, le vide laissé par l'absence des Assemblées, du CI, et du statut explicite des SC et des Communes font l'affaire les dirigeants qui n'entendent ni rendre compte, ni être contrôlés, encore moins exercer démocratiquement le pouvoir. La rêve démocratique du peuple haïtien se trouve estropié par le manque de volonté politique et d'une culture centraliste qui entrave subtilement et substantiellement le grand le projet de décentralisation nécessaire pour l'instauration d'un État basé entre autres sur les libertés fondamentales, le droit, l'inclusion, la justice sociale, la participation.
Synthétisé dans le préambule de la Constitution haïtienne de 1987
Par définition, le fait de gouverner incombe à l'État. Les dernières réformes de l'État en Haïti ont opté pour une stratégie qui appuie la décentralisation des activités gouvernementales et des prestations de services publics. Cela transforme les Collectivités Territoriales en de véritables maîtresses et animatrices de la gouvernance au niveau local. Par ces reformes de la fonction publique, l'État central crée des autorités intermédiaires ou locales autonomes ou jouissant de la personnalité morale et juridique. Mais la décentralisation elle seule ne suffit ni pour provoquer la desserte efficace de services, ni pour amorcer le processus de développement soutenable escompté. Car ceci nécessite un mode d'interaction entre les autorités, le secteur privé et la fonction publique qui serait plus apte à encourager la participation citoyenne, le partenariat, la concertation et la coordination entre les acteurs-clés du territoire. Ce mode de d'interaction, décrit sous le vocable de gouvernance, favoriserait entre autres la mutualisation des ressources, l'émergence de la compétence transdisciplinaire des acteurs locaux, l'optimisation des flux d'information, la transparence, la reddition des comptes, la primauté du droit en faveur du développement intégré du territoire.
L'enquête et les observations ont révélé que les principales composantes du système de gouvernance de la Commune connaissent un niveau de désarticulation extrêmement poussé, il parait logique de se demander s'il n'y a jamais eu un système de gouvernance pratiquement mis en place. Cette désintégration du système de gouvernance se manifeste sur plusieurs formes dont les plus remarquables sont les suivantes :
processus de la décentralisation- maillon stratégique de la gouvernance territoriale- n'aboutit pas. Plusieurs visions stratégiques contradictoires traversent le même État dans le cadre du projet de la décentralisation dans le pays. Les flous juridiques, le marronnage étatique, la vassalisation des autorités élus ne laissent ni de possibilité, ni de capacité au Conseil Municipal de la Commune pour exercer son leadership dans la gouvernance de la Commune. Envahis par les ONG et les OI, asservis par le pouvoir central, le contrôle de la Commune échappe de plus de plus à ces autorités locales.
Le Conseil Municipal ne dégage aucune vision à long terme de la Commune. Sous l'égide des ONG et des OI, les projets se distribuent à qui le veut et s'exécute en dehors de toute planification cohérente du développement de la Commune. Des entretiens avec des autorités municipales ont permis de comprendre que les élus à Croix-des-Bouquets ne disposent pas toutes les informations nécessaires pour prendre des décisions solides et pour transmettre aux citoyen (ne)s des informations précises. A l'image du pays, ni l'AM ni le Conseil de développement ne fonctionne dans la Commune, même une TCC n'y est pas trouvée. Il n'existe pratiquement aucune structure de partage d'information, de concertation et de participation des acteurs intervenant dans la Commune. Ni la capacité ni la volonté de coordonner la vie collective n'existe chez les autorités de la Commune.
Des observations les plus minutieuses n'ont pas permis d'arriver à la compréhension d'une stratégie homogène du développement de la Commune. En termes de construction de territoire, la Commune de Croix-des-Bouquets constitue effectivement un cadre de vie intime pour la 85% des personnes interrogées. Cependant, c'est une appropriation passive du territoire qui ne déclenche aucune velléité pour le revitaliser et le reconstruire.
J'habite la Commune de Croix-des-Bouquets. C'est la que j'ai ma demeure, je m'y sens donc bien. Je ne suis pas très prête à laisser la Commune. Je ne participe à aucune gestion de la Commune.
La Commune souffre du processus collectif d'innovation territoriale. Des citoyen(ne)s y vivent. Ils se sentent attachés à la Commune, mais ce n'est que dans une vision individuelle. Par l'absence de régulation politique, de planification économique, et d'intervention sociologique efficace, la population crucienne est incapable de générer un processus de développement local propre et singulier dans un temps défini.
Pour le moment, surtout après le séisme du 12 janvier 2011, le territoire de Croix-desBouquets jouit d'une sérieuse attractivité par rapport à sa localisation géographique, proche de Port-au-Prince, la Capital. Elle représente l'espace de relocalisation idéale pour des entreprises, des organisations, des centres éducatifs victimes du grand séisme. Ils s'y réinstallent à peu de frais tout en restant accessibles à leurs clients. Cependant, la Commune n'a pas su profiter de cette opportunité, car le faible dynamisme socio-économique, la précarité des conditions institutionnelles et sociales n'ont pas permis de rentabiliser ces investissements. Les revenus ne font que passer dans la Commune. Sa capacité de rétention de revenus est quasiment nulle, qu'il s'agit de taxes à prélever, de services ou produits à offrir.
Les ONG et OI assiègeraient la Commune pour y sauver des vies (assistance humanitaire) et pour accélérer son décollage en termes de développement économique. Selon leurs communications dans le cadre de leurs forums de discussions internes, Croix-des-Bouquets serait une communauté traditionnelle à majorité rural où la terre représenterait encore la plus grande source de richesse. La tendance désormais dominante dans la Commune renvoi au paradigme moderniste et évolutionniste qui représente le développement comme un processus naturel susceptible d'être accéléré par l'introduction de la technologie de pointe. Toutefois, la population crucienne ne connait pas encore l'introduction de grandes technologies promises.
Il a été observé, à la Commune de Croix-des-Bouquets, la coexistence ou la collusion des deux (2) principales stratégies de développement local : stratégie à tendance néolibéraliste et stratégie à tendance de résistance. Des entrepreneurs et autres organisations cherchent à y installer à cause de son attractivité territoriale. Des gens de la Commune affichent une certaine méfiance et craignent de ne plus pouvoir contrôler les ressources par rapport à l'invasion des étrangers. Ainsi les remarques de Solange sont très explicites :
Avec l'arrivée en masse de ces étrangers
dans la Commune, nous, des fils originaires de la Croix-des-Bouquets, sommes
exposés aux grands dangers. Ces étrangers sont bourrés de
fric, ils vont acheter toute la Commune hectare par hectare et nous mettre
à la porte comme des chiens. C'est à nous de faire quelque chose
pour résister à ces menaces, sinon ils viendront nous dire
comment manger, comment éduquer notre enfants, etc. C'est vrai, je vous
dis, la dernière fois, j'ai entendu un de ces parvenus dire « les
gens de Croix-des-Bouquets sont des congos
·». Ils ont
raison, on n'est pas unis nous autres et ils profitent de ce vide.
Le besoin de résister à la sorte de modernisation des autres se fait ressentir parmi une bonne franche de la population crucienne. Des citoyen(nes) de la Commune exigeraient le respect de leur identité culturelle et la valorisation de leur mode de vie et de leurs techniques existantes, mais les velléités pour concrétiser ou organiser cette résistance sont complètement absentes.
La Commune de Croix-des-Bouquets a des voies faciles sur Port-au-Prince, sur le Nord, le Centre et Malpasse (la frontière principale entre la Dominicanie et Haïti).
Les étrangers ici sont tous ceux qui sont non-originaires de la Commune (haïtiens ou des gens d'une autre nationalité)
· `'Congo»se dit des gens non civilisés, peu
intégrés dans la vie moderne (ignorance des technologies et des
normes sociétales dites modernes).
Dans tout processus de développement, il faut considérer la capacité des citoyen (nes), surtout des plus vulnérables, à influencer les décisions qui ont une incidence sur leurs vies, et à maitriser les ressources de leur communauté. Un des enjeux majeurs du développement, est de permettre les citoyen (nes) de mieux s'impliquer dans le processus. Pour cela, ils ont besoin d'accroitre continuellement leurs avoirs et capacités afin d'améliorer leurs rapports avec l'État et les autres institutions.
Il a été démontré que là où les citoyen (nes) n'ont pas les capacités à prendre des décisions sur leurs vies et à gérer leurs ressources, se sont développées progressivement, entre les citoyen (nes) et l'État, et entre les groupes de citoyen (nes) eux-mêmes, des relations institutionnelles inadéquates qui atrophient davantage les velléités et capacités des gens à se retirer du sous-développement. Dans le combat contre le sous-développement, il est donc nécessaire que les gens sortent de l'impuissance en développant des capacités leur rendant aptes à négocier, participer, influencer, maitriser et responsabiliser les institutions en présence. Le développement de ces capacités exige une série de conditions minimales : Accès à l'information, participation démarginalisée, mécanismes de responsabilisation, etc.
Manque d'accès à l'information |
Le flux d'information entre les citoyen (nes) de la Commune et les autorités municipales est peu efficace. En témoignent les résultats de l'enquête :
Les `'avoirs»constituent des biens physiques ou financiers (épargnes, voitures, la terre, maisons, moyens de productions, etc.). Les `'capacités»sont les facultés ou les conditions (santé, éducation, intelligence financière, etc.) permettant aux citoyen (nes) d'exploiter leurs avoirs de façon optimale.
Tableau VI: Extrait de questionnaire I
Questions adressées à 150 personnes (96 hommes et 54 femmes) |
Taux de réponses en pourcentage (%) |
|
Oui |
Non |
|
Avez-vous déjà essayé sur un sujet ou un autre de vous informer auprès de la Mairie? |
25% |
75% |
Etes-vous informé des grands projets communaux pour les 2 ou 5 ans à venir ? |
5% |
95% |
Avez-vous une idée du montant et de la planification du budget municipal? |
0% |
100% |
Savez-vous la durée du mandat des Maires ? |
20% |
80% |
Source : Auteur
Les citoyens et citoyennes n'ont presque aucun contact avec la Mairie. La minorité soit 25% de ceux qui entretiennent des relations avec l'Institution Municipale sont des gens qui y vont afin de régler quelques trucs personnels comme régler leurs documents de titre propriétaire ou un permis de construire qu'ils ont besoin pour aller voir un consul ou aller prêter de l'argent d'un organisme de crédit. Les 25% concernés ne sont point motivés par la participation ni leur responsabilisation dans la vie de la Commune. Les 75% n'ayant aucun contact avec la Mairie sont en grande partie des gens qui ne travaillent ou n'entreprennent pas d'activités nécessitant des transactions avec les autorités locales. L'institution municipale comme institution moteur du développement communal n'est consultée que par nécessité par ses citoyens et citoyennes.
Contrairement à l'esprit et la lettre de la
Constitution de 1987 et de la Charte de la
décentralisation
· en Haïti, la majorité
(soit 95% dans le cadre de notre étude) des cruciens et cruciennes
ignorent les grands projets de leur Commune. Ils se trouvent donc
marginalisés dans
· Formé du parquet des cinq décrets de
2006 dont le décret cadre sur la décentralisation.
la prise des décisions qui auront de grandes incidences
sur leur avenir. Ces derniers ne sont pas non plus trop motivés à
s'informer. Ils ne verraient aucune utilité à prendre une partie
active dans l'implémentation des projets de développement, car
ils ne pensent pas pouvoir influencer quoique ce soit en termes de
décisions. Les 5 % des informés des grands projets communaux sont
en majorité des gens qui sont directement impliqués dans la
gestion municipale
·, d'autres travaillent pour un service
déconcentré impliqué dans des projets de la Mairie. C'est
encore plus inquiétant quand aucune (0%) de nos interviewés a une
idée de la planification et du montant du budget communal. Et cela se
comprend car l'idée de budget communal n'était pas une
réalité deux (2) avant dans la vie de la mairie. Ce n'est que la
troisième budgétaire depuis que le MICTDN et ses partenaires
appuient et obligent les Mairies à se doter d'un budget allant de 1
octobre au 30 septembre de chaque année conformément aux lois des
finances du pays. La Commune de Croix-des -Bouquets est le lieu de non
communication et de la non participation par excellence, en témoignent
les 80% des enquêtés qui affirment n'être pas informé
même de la durée du mandat des maires. Ils sont allés
élire des autorités et c'est fini. Ceux-ci évolueraient
tranquillement sans obligation de résultats ni de compte à rendre
à personne.
Même les données tirées des observations abordent dans le même sens que les citoyen (nes) ne sont pas suffisamment outillé(e)s pour exploiter les opportunités qui se présentent. Ils ne sont donc pas en situation pour exiger de l'État les services auxquels ils ont droit. Ils ont montré une infime capacité à négocier et à tenir les institutions de la Commune responsables de leurs actions :
...Qui sommes nous pour leur demander de compte ? Ils sont tous des autorités. Ils font comme bon leur semble. ...Si nous posons des questions, on pensera que nous voulons faire de la politique.»
· Ces gens ou leurs très proches font des petits
jobs avec la Mairie.
Tels sont les propos recueillis d'une citoyenne qui refusait de participer à un de nos focus group. Elle a été donc interviewée hors du groupe en compagnie de son époux Josias encore plus sceptique.
La diffusion de l'information dans cette Commune est tout un pari. Il n'y a ni station de radio ni de télévision communautaire qui informerait sur la vie spécifique de la Commune. La population est bombardée par un ensemble d'informations (venant des stations de radio ou de télévisions à caractère national) qui ne traitent que des intérêts nationaux. Ainsi les cruciens et cruciennes sont peu informés sur ce qui les intéresserait directement. Sous l'effet de ces informations traitant des intérêts macros, la population crucienne se voit même détournée de ses intérêts directs. Elle est plus informée des enjeux nationaux que de ceux qui ont une incidence directe et immédiate sur sa vie. La Commune n'a pas une culture de discussion et de débats. Les informations restent concentrées et monopolisées. D'ailleurs, le fait de n'être pas curieux de s'informer passe une qualité et une marque de sagesse dans la culture des cruciens.
Aucun effort n'a été observé de la part des institutions oeuvrant de la Commune en vue de mettre en place des mécanismes et des moyens pour informer les gens. Elles semblent ignorer les bénéfices des rétroactions sociales dans le processus du développement. La non communication et la non participation participent des obstacles majeurs du processus de développement de la Commune.
Faible degré de responsabiisation des citoyen et des citoyennes |
A l'instar du niveau du faible niveau de communication et de participation, le niveau de responsabilisation s'est révélé extrêmement faible, à partir de l'enquête effectué :
Tableau VII: Extrait de questionnaire II
Questions adressées à 150 personnes (96 hommes et 54 femmes) |
Taux de réponses en pourcentage (%) |
|
Oui |
Non |
|
Etes-vous prêt à collaborer (avec les autorités locales) pour l'amélioration de la gestion de la chose publique de la Commune? |
20% |
80% |
Sentez- vous responsable de l'état des choses (mauvaises conditions de vie, mauvaise gestion, extrême pauvreté etc.) de la Commune ? |
2% |
98% |
Estimez-vous que les autorités locales respectent vos droits (santé, éducation, sécurité, loisir, etc.) ? |
5% |
95% |
Estimez-vous que vous remplissiez bien vos devoirs de citoyen? |
20% |
80% |
Source : Auteur
La plus grande partie des enquêtés soit 80% d'entre eux se disent n'être pas prêts à collaborer (avec les autorités locales) pour l'amélioration de la gestion de la chose publique de la Commune. Ils avancent que leur volonté de collaborer peut être interprétée comme une intention politique visant à remplacer les autorités locales. Pour éviter des éventuels ennuis, ils se disent prudents par rapport aux gens impliqués dans la gouverne publique de la Commune. Cela révèle entre autres comment le poids de culture de la politique centraliste et machiavélique a marqué l'histoire du peuple haïtien. Une sorte de psychose de peur, le plus souvent infondé,
habite constamment l'imaginaire des citoyens et citoyennes de la Commune. Cette perception citoyenne du politique est souventefois renforcé par les conflits relativement ouverts entre les instituions du même État. Pour exemplifier, citons le cas de la vice-délégation de l'Arrondissement de Croix-des-Bouquets qui n'arrive pas exercer le contrôle de tutelle ou de légalité sur l'institution municipale. Celle-ci ne reconnait à peine les compétences octroyées de l'État central à la vice-délégation. Ces institutions ne ratent jamais l'occasion pour s'affronter publiquement. Des aspirants candidats à la magistrature communale et à la députation sont trouvés morts dans des conditions mitigées. Les batailles hégémoniques et les incidents insolites traduiraient une dangerosité extrême à laquelle seraient exposés ceux qui se seraient immiscé dans la gestion de la chose publique.
Même si la plus grande partie de la population ne serait pas volontiers pour jouer un rôle actif pour le changement communal, la population quasi entière (soit 95% selon l'enquête) estime que les autorités locales ne respectent pas les droits collectifs, c'est-à-dire les droits que possède la population à la santé, éducation, sécurité, loisir, etc. Leur comportement semble confirmer l'hypothèse de Gerald Chéry selon laquelle tout est exigé de l'État et rien des civils. C'est sans surprise quand 80% des enquêtés admettent ne rien fait pour faciliter la tache des autorités locales, en termes de la tenue d'un comportement digne d'un citoyen ou d'une citoyenne (respecter des principes établis, l'entraide, etc.). De part leur comportement, ils semblent être des citoyens et des citoyennes qui rentrent en rébellion contre les institutions locales ou du moins ils n'y croient même pas :
... quand ils ont besoin de nos votes ou de notre appui ils se font dociles et attentifs comme des chiens bien apprivoisés, après c'est la merde, ils font leur affaire avec leurs proches copains on devrait incendier ces boites de mairie, de tribunal, de DGI et tout...ils sont bon à rien...
Tels sont les propos d'un jeune homme de 30 environs qui nous faisait rencontrer son groupe afin de préparer une rencontre d'entretien.
Comment amorcer le développement de la Commune si les citoyens et citoyennes ne se responsabilisent pas ? Surtout s'ils rentrent en rébellion contre les institutions ou les autorités ? Les cruciens et cruciennes semblent perdre (s'ils l'ont eu) toute aptitude à s'adresser aux autorités, aux fonctionnaires, aux fournisseurs de services publics pour que ces derniers justifient et ajustent leurs actions dans l'intérêt collectif. Cette anémie de responsabilisation se manifeste tant sur plan politique que social et à la fois de manière horizontale et verticale. Personne n'est tenu pratiquement responsable de quoi que ce soit, quand la collectivité crucienne ne s'enlise dans un je-m'en-foutisme, elle se console dans bondieurisme lamentable qui ne fait freiner davantage le processus de développement local.
Marginalisation des citoyen et citoyennes dans la prise des décisions |
Dans la pratique de la politique de décentralisation à la Commune de Croix-desBouquets, la participation citoyenne n'est pas encouragée. Bien que les dispositions pour la participation soient théoriquement prises au niveau des lois haïtiennes, les citoyen (nes) sont pratiquement mis hors de la gouvernance de la vie publique communale. Les autorités locales au niveau communal ne se préoccupent pas de la participation. Le plus souvent, les autorités locales passent sous silence le devoir de communiquer avec les citoyen (ne)s. Si jamais, un groupe de citoyen (nes) revendique une certaine participation, elles font alors appel à diverses formes de boycott.
`'Les autorités dans cette Commune ne font nullement
cas de la démocratie locale.
D'ailleurs elles ne savent pas ce que
c'est, comment peuvent t-ils en faire une priorité ?
Elles ont peur
de la solidarité des citoyens à Croix-des-Bouquets. Elles savent
qu'elles
Conception de certains haïtiens qui consisterait à tout laisser sur le dos du Bon Dieu qui fera tout à leur place.
ne sont pas compétentes. Elles barrent la route
partout et tout le temps, même avec le président de la
république... `'
·
Les autorités semblent ignorer que la participation citoyenne constitue un élément fondamental dans le cadre du développement qu'elles promettent à la population cruccienne. Elles devraient appliquer de manière efficace et efficiente les dispositions participatives prévues par la loi ou mettre en place les mécanismes qui garantissent le modèle de participation que requiert la Constitution du pays.
`' Le maire qui est là n'incite pas les citoyens à participer à la vie communale. Ils sont gardés en dehors de tout. Le budget, on n'en sait pas, les personnels, on n'en sait pas, et on ne cherche pas non plus à savoir, on veut rester en vie»
Les citoyen (ne)s de la Commune de Croix-des-Bouquets sont pour ainsi dire marginalisé(e)s. Ils plus intéressés à voter pour designer le président de la république ou le sénateur dans leur département que de s'informer sur le profil de ceux qui seront maires dans la Commune. La participation électorale pour les postes municipaux est faible. Les maires sont élus généralement par une minorité d'activistes qui leur sont proches. Le processus de démocratisation à la base est tout à fait compromis à la Commune de Croix-des-Bouquets.
Corruption et manque d'accès aux services sociaux de base |
L'accès de la population crucienne aux services sociaux de base ne constitue pas une préoccupation majeure des autorités municipales, quoique l'État l'aie situé au coeur de ses politiques de décentralisation et de développement. En effet, la fourniture des services sociaux de base à la population locale est l'un des trois (3) objectifs visés par le cadre général de la
· Propos recueillis d'un monsieur qui avait raté
notre séance defocus groupe au centre ville et à qui on a eu une
conversation sur les thèmes débattus lors du focus groupe. Ce
monsieur dirige une organisation émergeant dans le centre ville de
Croix-des-Bouquets.
Propos recueilli d'un jeune de 27 ans qui vit dans la Commune depuis dix (10) ans.
décentralisation en Haïti. De surcroit, cette préoccupation figure en bonne place dans le Plan d'Action National de Relèvement et de Développement d'Haïti dont elle constitue un des axes prioritaires. Toutefois, la mise en oeuvre de cette politique de fourniture de services sociaux de base n'a pas produit à date les résultats escomptés et tant attendus par la population crucienne. Désormais, la corruption est perçue dans la Commune comme un phénomène qui ne cesse de répandre ses effets malsains sur tous les secteurs sociaux de base du milieu. Dans un tel contexte de pénurie en services sociaux de base, des citoyen (nes) voient la seule façon d'accéder à certains services nécessaires est de passer par la corruption (pots de vin, passe droits, etc.) comme voie rapide. Des agents de l'administration publique, de leur point vue, voient la corruption comme l'unique voie pour satisfaire ses besoins et se procurer le minimum de bienêtre et de confort social nécessaire. Qui pis est, la corruption se répand à un niveau scandaleux dans tous les secteurs sociaux de base (santé, éducation, environnement, infrastructures, eau, électricité, propriété foncière, etc.). Le constat est d'autre en plus amer qu'elle n'appelle aucune action vigoureuse ni des autorités locales ni de l'État central pour lutter contre ce fléau.
Santé
La corruption dans le secteur de santé s'est particulièrement accentuée à cause de la croissance démographique et l'étroitesse de l'offre de service. Ce déséquilibre entre l'offre et la demande crée les possibilités au personnel de santé de s'enrichir au moyen de la corruption. Des professionnels dans ce secteur, au travers de multiples formes, abandonnent progressivement les valeurs déontologiques du métier pour se livrer à pratiques illicites par lesquelles ils banalisent la souffrance humaine et la mort au profit de l'appât du gain rapide :
`' Si tu n'as pas d'argent, tu es plus qu'un chien, car un chien dont le maitre est riche a son vétérinaire. On nous prend ici pour des laissés pour compte. Quand nous demandons au personnel de prendre soin de nous ou de nos parents, il nous conseille d'aller vers les centres privés si on est pressé. Là-bas, ils sont sûrs de pouvoir nous rançonner tranquillement. On fait la queue depuis des heures, mais ceux qui ont payé de pot de vin
passent avant nous. Nous sommes des humains, même si nous sommes pauvres, ce n'est pas une façon de nous traiter. `'
Cette jeune dame, qui exprimait ses colères lors d'une de nos séances d'observation, résume toute la corruption dans le secteur. La fixation des rendez-vous est le plus souvent fonction de la capacité du patient à payer. Pour une consultation de deux cents clinquantes gourdes (250 gdes), le patient voit un médecin dans environs dix (10) minutes, par contre pour une consultation de 50 gourdes, le patient doit attendre plus d'une heure. Souvent cela se passe dans le même centre hospitalier, sous le fameux prétexte que le centre a une partie communautaire et une partie privée. Généralement, les patients dont la capacité financière répond sont délocalisés dans des cliniques privés pour toute petite chirurgie. Qui pis est, ces chirurgies mineures sont pratiquées avec les mêmes instruments du centre dit communautaire. Cela vaut pour les examens de laboratoires.
Par voie de conséquence, la corruption renforce et entretient l'inégalité d'accès aux soins. L'appât du gain facile tente à déshumaniser la pratique de la médecine. Des professionnels corrompus dérégulent le fonctionnement des services de santé en utilisant les services publics à des fins privées, ils contribuent donc à détériorer progressivement la qualité des services rendus. Les autorités municipales semblent n'avoir aucun contrôle de ce jeu pervers.
Education
Encore dans le secteur de l'éducation, le déséquilibre entre l'offre et la demande renforce les possibilités de corruption. En principe, les écoles privées, mêmes celles dites semi-lycée, sont les plus couteux. Pour éviter les coûts trop élevés des écoles privées, beaucoup de parents sont prêts à s'acheter une place au lycée public de la Commune. Les dirigeants qui sont donc très
Des types d'écoles où l'on paie soi-disant la moitie des frais régulières. Cette stratégie n'est utilisée en réalité que pour bâtir la clientèle scolaire au tout début. Le plus souvent la qualité de l'enseignement de ces écoles laisse à désirer.
sollicités sont enclins à la corruption. De fait, la corruption se pratique sous forme de recrutement parallèle des élèves, de favoritisme (des enseignants qui présentent des clients comme des proches parents, etc.), et de magouilles (falsification des résultats des concours, etc.). C'est un constat malheureux que d'entendre Yves Joël, jeune de 13 ans, exprimer sa joie pour avoir réussi aux concours d'entrée du lycée communal:
`' Au premier affichage des résultats du concours, j'étais à la troisième place. Au nouveau affichage je suis le treizième, ca ne fait rien je suis quand même admis au lycée. Je n'avais pas payé ils ont le droit de protéger leurs clients pourvu que je sois encore parmi eux, ce qu'on veut c'est être admis au lycée, non ! `'
La corruption se manifeste également dans le mode d'expulsion des élèves du lycée. En principe, la répétition des classes (le redoublement) n'est pas acceptée au lycée. Cependant, il y a un réseau, selon l'avis des parents, qui reçoit de l'argent afin de permettre aux élèves qui n'ont réussi de reprendre les classes ou même d'aller en classe supérieurs certaines fois.
En fin de compte, l'impact de la corruption sur le secteur éducation à Croix-des Bouquets devient de plus en plus dévastateur, la corruption a occasionné une baisse progressive et tendancielle de la qualité de l'enseignement. Les effectifs pléthoriques dans les classes entravent sévèrement la qualité de la formation. Le recrutement des enseignants- tout comme celui des élèves- se fait sous la base de favoritisme. Des parents se plaignent du comportement de certains enseignants qui abusent des jeunes filles sous prétexte de leur souffler les questions d'examens ou des concours. En plus de l'iniquité sociale dans l'accès à l'éducation au niveau de la Commune, celle-ci risque de fournir au pays entier des citoyen (nes) sans aucun repère civique et moral.
Eau et électricité
Il n'existe pas un système de distribution d'eau dans la Commune de Croix-desBouquets. La population se sert davantage de puits artésiens. Sans les moyens pour s'acheter de l'eau traitée vendue à des points fixes dans la Commune, la majorité des citoyen (ne)s boivent
de l'eau des puits artésiens sans pouvoir la potabiliser. Qui pis est, certains des points fixes oüon l'on vend d'eau, subissent les méfaits de la corruption. Il a été constaté des faux documents de
laboratoires sur la porte de ces entreprises. Des inspecteurs des Travaux Publiques et de Santé publique ont livré de faux documents d'autorisation. Sous peine de voir leurs entreprises fermées pour cause d'hygiène ou de non potabilisation de l'eau, certains entrepreneurs- refusant de soumettre un spécimen de leur produit aux testes de laboratoire comme exigé- s'achètent de faux documents d'autorisation par ci par là. Même si tous les documents exigés sont sur la porte de l'entreprise, la corruption ne recule pas, car les inspecteurs voient les entrepreneurs comme des richards dont on doit enlever une partie de biens. Si l'on se réfère au propos d'un petit entrepreneur anonyme du centre ville, on ne manquera pas de comprendre les menaces que ces pratiques placent sur l'économie communale.
`'L'inspecteur d'hygiène, celui de la DGI et de la Mairie sont comme des actionnaires dans mon petit business. Chaque deux ou trois mois, ils viennent comme pour balancer les comptes et arracher leur part des gains. C'est un calvaire avec ces gens. Les bénéfices sont déjà très maigres, en plus on doit partager avec l'État. Nous ne pourrons pas tenir longtemps dans cette situation. ?
La situation de distribution d'électricité ne se différencie très peu de celle de l'eau. Il y a un bureau d'EDH dans la Commune sans la capacité de satisfaction des besoins de la population. 80% des équipements électriques (transformateurs, cables, poteaux, etc.) sont achetés par des
particuliers voulant électrifier leurs demeures. La population peut passer deux à cinq jours sans électricité au moment où il' n'y pas de problèmes techniques graves. Il peut arriver qu'il n'y a pas d'essence, ou l'employé qui gère l'essence est à Port-au-Prince pour quelques jours à cause des problèmes familiales, ou parce qu'il est malade, ou autres. A son absence, personne d'autre ne voudra bosser à sa place :
`'Elle (une employée absente) gagne tout son argent ce n'est pas moi qui vais bourriquer à sa place. J'ai fait mon propre job, donc personne n'a le droit de me dire quoi que ce soit. Je ne suis pas le mari de cette dame, ni la personne qui la baise».
L'employé s'exprimait ainsi devant une vingtaine de clients (dont l'auteur de cette recherche) parce qu'un lui a suggéré ceci :
`'Je sais que d'habitude c'est la dame qui reçoit sur la caisse, nous sommes là à attendre depuis ce matin, si elle ne viendra pas aujourd'hui, tu pourrais nous recevoir à sa place pour aujourd'hui, tu ne sembles pas trop occupée d'ailleurs».
Non seulement le souci du client et le respect des clients sont absents dans le comportement de cet employé de l'EDH, mais aussi son propos dévoile la discrimination contre les femmes qui existe dans les rapports au niveau de l'entreprise. Les hommes jouissent d'un traitement largement plus favorable au détriment des femmes qui remplissent le même niveau de fonction. Cette inégalité se décline à différents niveaux : inégalité en droit, inégalité de traitement, mais aussi inégalité des chances et égalité.
La corruption dans le secteur de l'électricité se manifeste également au niveau des travaux de branchement. Généralement, l'EDH invoque les raisons de manque de personnel pour effectuer les travaux, manque d'équipements nécessaires ou tas de travaux en attente
depuis longtemps et qu'on devrait urgemment réaliser. Mais ces subterfuges ne visent qu'àdécourager le client qui devient impatient et finit par conclure un marché avec un agent pour
accélérer le processus. En passant par ce chemin pour avoir le branchement, les clients qui ont satisfait les négociations sont servis sans attendre. Cette situation favorise le nombre de branchements illégaux qui ne semblent pas déranger trop les agents de l'EDH. Quand ils découvrent un branchement illégal, ils préfèrent le plus souvent passer un "deal" avec le client fautif. Ce que l'État perd quotidiennement est gagné comme une rente mensuelle par des agents malhonnêtes qui gardent le silence.
En dépit des vides, des dérives et contraintes constatées, la question de la décentralisation et du développement local en Haïti ne devrait être pas mise de coté. Au contraire, les constats interpellent des actions pressantes et efficaces afin de consolider et de maximiser les acquis de la décentralisation dans le pays et de permettre au processus de la décentralisation de jouer son rôle catalyseur dans la desserte des services publics, dans la démocratisation à la base, et dans l'impulsion de la prise en main des territoires de la fabrication de leur propre développement. Pour ce faire, il importe que les autorités et citoyens, citoyennes prennent conscience et s'attellent à neutraliser, sinon à résoudre, certains problèmes structurels qui ont déjoué et déjouent encore la mise en oeuvre des meilleures stratégies de développement dans les Communes. Pour briser les plus coriaces de ces goulots d'étranglement, il faudra décider de prendre une série de mesures dont les plus pertinentes sont ci-dessous mentionnées :
Comme indiqué dans la première partie de l'étude, la définition claire des compétences entre les Collectivités Territoriales et l'État central constitue la première chance de réussite de tout processus de décentralisation. Dans le cas d'Haïti, à cause de l'absence des lois et des règlements internes et de la volonté politique existe un certain chevauchement des compétences entre les divers paliers de gouvernement en présence. Par conséquent, il y a une mauvaise définition des ressources correspondantes; ces responsabilités vagues ont laissé la possibilité d'engager des fonds à des projets fantaisistes des ambiances populaires, des campagnes électorales au profit du gouvernement central, par exemple. Il arrive des cas où des élus locaux sont transformés carrément en propagandistes ou en ouvriers de campagne du parti au pouvoir. Des fonds- que les élus devraient normalement recevoir pour investir dans le développement de
leur territoire- ne sont reçus que sur la base des conditionnalités politiques en dehors de toute transparence. Par conséquent, les risques de corruption abondent.
S'il faut contribuer effectivement au développement des Communes, suivant le voeu de la Constitution de 1987, le budget de la république devra être effectivement décentralisé avec les ressources financières qui vont clairement en faveur de chacune des 140 Communes du pays. A quoi servent des pouvoirs techniques et politiques sans les moyens matériels et financiers ? Les subventions reçues de l'État central ne tenant nullement compte des besoins de financement réels des Communes ne sert qu'à rendre ces dernières économiquement et politiquement plus dépendantes.
Au plan technique, contrairement au voeu de la Constitution de la république, les Communes, la Commune de croix-des-bouquets en exemple, n'arrivent pas bénéficier l'appui des services techniques déconcentrés de l'État. Ceci, à la fois à cause du degré avancé de la défaillance de ceux-ci et de l'ambigüité au niveau de la répartition des responsabilités respectives.
La mauvaise répartition des compétences et des ressources contribuent à alimenter l'inaction de certaines autorités locales qui tentent à se déresponsabiliser en s'enlisant dans un attentisme sévère des autorités centrales. Une évaluation et une redéfinition claire des compétences et des ressources s'avère donc être une nécessité afin d'une meilleure politique de décentralisation.
Les conditions désorganisées du personnel territorial public dans le pays ont montré la nécessité de structurer, de professionnaliser et de stabiliser la fonction publique territoriale qui, dans une certaine mesure, n'existe pas. Car il n'y pas un cadre légal à ce sujet, le décret de 2006 y relatif est non seulement contesté, mais aussi inapplicable du fait qu'il soit dépend d'autres
mesures préalables. Cette situation s'empire régulièrement à cause de la nomination et révocation des personnels à chaque fin de mandat des élus. Ainsi la gestion municipale continue t-elle d'être de plus en plus boiteuse. Les Mairies deviennent donc incapables d'agir en maitre d'ouvrage conformément à l'esprit de la Constitution.
A la Commune de croix-des-Bouquets, le mode de recrutement est mitigé. La population n'est pas informée s'il y a des vacances ou pas. Il faut le contact au moins d'un ami pour se faire embaucher à l'administration municipale. A la fin du mandat des élus, les agents sont en grande partie virés pour faire place aux partisans ou aux proches des nouveaux élus ou nommés. Il n'y a pas une culture de concours dans le mode du recrutement au niveau de la Commune. La Mairie est souvent remplie de petits fonctionnaires sans compétences et/ou sans taches réelles.
Le niveau de salaire pratiqué à la Mairie de Croix-des-Bouquets, comme dans le reste des Mairies, excepté peut être deux ou trois grandes Mairies de l'aire métropolitaine, est le plus bas de la fonction publique en Haïti. Les agents de la voierie oeuvrent dans des conditions pour ainsi dire infrahumaines. Ne possédant aucun statut, les agents travaillent en principe en dehors de toute sécurité sociale. Ils n'ont pas de plan de carrière. Ils sont comme de simples vendeurs de services ponctuels. Cette situation ne peut qu'influer négativement sur leur(s) motivation et performances.
Pour rendre l'administration municipale plus performante, dans la desserte des services publics, il faudra un personnel plus compétent et dévoué. Il faudra operer des changements capables de rationaliser la gestion municipale pour que celle-ci puisse offrir au moins les services publics de base. Ces changements impliqueront autres : un nouveau mode de recrutement en dehors du favoritisme et du clientélisme :
v' Un haussement du niveau de salaire :
v' Existence d'un plan de carrière
v' Une amélioration générales des conditions de travail
Les changements au niveau de la gestion municipale- en renforçant les processus et structures organisationnelles-, doit conduire à une refonte des mentalités des agents de services. D'où la nécessité de structurer la fonction publique territoriale afin de rechercher les meilleures stratégies pour distribuer les rôles, doter des fonctions, répartir les services en harmonisant les rapports latéraux et verticaux entre eux, et en fonction.
Les fonctionnaires publiques territoriaux devraient être assujettis, comme en France, à une formation statutaire obligatoire qui comprendrait à la fois une formation d'intégration et une formation de professionnalisation. La formation d'intégration se donnerait l'année de l'entrée en fonction afin de doter le nouveau ou la nouvelle des connaissances de base relatives au fonctionnement de la Mairie, à l'environnement municipal, et à la mission des municipalités. La formation de professionnalisation interviendrait après titularisation de l'agent et tout au long de sa carrière. Le fonctionnaire recevrait des formations nécessaires pour maintenir et améliorer son niveau de compétence qu'il doit adopter à chaque moment de l'environnement.
Mais, à quoi servirait des fonctionnaires bien formés s'il n'ont pas un plan carrière ? Si la structuration et la professionnalisation de la fonction publique territoriale constituent des fondamentaux de la décentralisation, leur garantie d'exploitation reste et demeure la stabilisation de l'administration territoriale. La stabilisation de la fonction publique territoriale entrainera un coût considérable, mais les effets positifs et impact de celle-ci sur la gouvernance et développement territorial resteraient nettement supérieurs.
Il a été démontré que les cruciens et cruciennes ne sont pas pratiquement intégrés du fait de leur manque de capacités et leur faible niveau de responsabilisation dans la gestion communale. L'un des obstacles majeurs de la participation citoyenne est le fait que les autorités locales ne privilégient pas le reddition des comptes ascendantes. Ils se considèrent libres et deviennent indifférents par rapport à une quelconque perception de la population de leurs performances. Les élections - étant des plus grandes manifestations de la participation citoyenne- s'organisent généralement dans un environnement de fraude massive. N'importe qui peut donc sorti vainqueur des élections suivant ses accointances politiques, ses moyens financiers, son charisme, etc.
Pourtant, il va de soi qu'un maire- qui inciterait les citoyens et citoyennes à participer à planification, au montage des budgets, à la gestion des choses publiques locales en général- aurait automatiquement plus de chance d'être réélu. Le contexte haïtien a déjà défié plein de cas similaires. Les autorités n'hésitent point à expliquer leur inaction dans le domaine de la participation par l'absence des moyens. Pourtant des moyens pour améliorer l'intégration et la responsabilisation de population sont à la portée de toutes autorités locales dans le pays. De manière simple et pratique, la Mairie peut s'informer des avis et besoins des citoyens, à travers, entre autres, des petites enquêtes et des boites de suggestions qui sont capables d'informer sur les préoccupations et préférences locales aussi valablement que des techniques et méthodes pointues et couteuses.
La formation civiques et la sensibilisation des citoyens est faisables à travers des émissions de radio, des activités culturelles. Un inventaire des associations et organisations existantes dans la Commune devrait être un bon départ pour marcher vers le renforcement la de société civile. Les compétences que la Mairie partage avec l'État central dans des domaines tel que l'éducation pourraient être utilisées pour que la Commune exerce effectivement son rôle dans la construction de la citoyenneté. Le déficit de la citoyenneté dans les Communes d'Haïti s'explique aussi du fait les autorités locales ne se soucient pas suffisamment du contenu des curricula des écoles de leurs Communes. Chaque Commune aurait l'obligation d'intégrer dans le cursus scolaire des cours capables de préparer les citoyens à vivre de manière fonctionnelle dans leur milieu immédiat. Ainsi le citoyen ou la citoyenne deviendrait un sujet valable et agissant au service de sa Commune et de son pays.
En fin de compte, tous les aspects ci-dessous analysés ont montré que la Commune de la Croix-des-Bouquets est prise dans un cercle vicieux qui pourrait être illustré par le schéma ci-dessous:
Tableau VIII : Cercle vicieux du sous-développement à Croix-au-Bouquets
SOUS-DEVELOPPEMENT
LOCAL
SYSTEME DE |
DECENTRALISATION ( SANS LES POUVOIRS |
MARGINALISATION DES CITOYEN (NE)S DANS LA PRISE DES DECISIONS LIEES A LEUR AVENIR |
MANQUE DE SERVICES |
DEFICIT DE CAPACITES DES CITOYEN(NE)S ASE RESPONSABILISER ET RESPONSABILISER LES AUTORITES PUBLIQUES
170 Source : Auteur
A cause de son sous-développement (mental et matériel), la décentralisation demeure fictive de plus en plus précaire, car elle n'est pas accompagnée de transfert de pouvoirs et de ressources nécessaires, ce qui influe négativement sur la capacité des autorités locales à fournir les services sociaux de base et à animer la dynamique de développement de la Commune comme les lois haïtiennes l'exigent.
Une population- dont la majorité de ses membres n'ont pas accès à l'éducation, l'information, la santé, l'eau potable, l'électricité, infrastructures de loisirs, etc.- accusera naturellement un déficit de capacités à se responsabiliser et à responsabiliser ses autorités, sur lesquelles il y a normalement très peu de pression pour faire participer les citoyen (ne)s dans la prise des décisions stratégiques. A ce moment, on se trouve dans un système de gouvernance dont deux (2) de ses composantes fondamentales - la Société Civile et le Secteur Privé- deviennent hyper atrophiées et dont la composante principale - le secteur public- devient hyper dominant. Les actions de gouvernance entrent automatiquement en déphasage pour provoquer la désarticulation du système de gouvernance déjà défaillant. Le système de gouvernance ne coordonne, ni n'oriente alors les actions pour le développement. Le système perd donc toute son essence démocratique, sa vertu décentralisante et ses qualités à soutenir la croissance économique, la justice sociale, la promotion et protection des droits humains, etc.
CONCLUSION
Les années 70 ont marqué le début du déferlement de la vague de démocratisation sur le monde, c'est-à-dire le passage de diverses formes de régimes autoritaires à la démocratie. Ce processus est d'autant en plus accentué avec l'écroulement du rideau de fer, du mur de Berlin en 1989. Cet événement a facilité la propagation de la démocratie un peu partout dans le monde, en Europe, en Amérique Latine, en Afrique, etc. Haïti n'a pas échappé à cette vague de démocratisation. En effet, en 1990, Haïti a organisé en grande pourpre ses premières élections dites démocratiques. Cependant, la transition démocratique en Haïti a une double explication.
Premièrement, ce passage du mode de gouvernance autoritaire à un mode de gouvernance démocratique traduit les desiderata du peuple haïtien de rompre avec la dictature et les pratiques sanguinaires dont il est victime, particulièrement sous les Duvalier. Cette volonté ferme d'y mettre fin s'explique indubitablement à partir des événements de février 1986 qui ont abouti au changement de régime politique. La dynastie duvalierienne a pris fin et fait place à un régime démocratisant. Ce moment historique propre aux haïtiens a suscité le besoin et la volonté de casser le jeu politique pour le réorganiser de manière ouverte et démocratique.
Secondement, Haïti- étant le pays le plus pauvre de son hémisphère, et vivant donc en grande partie de l'aide internationale- ne pouvait pas se soustraire de la vague de démocratisation. En effet, depuis les années 80, à l'instar des pays africains, devant les crises sociopolitiques et économiques que traversait Haïti, les principaux bailleurs du monde ont réévalué le fondement et les mécanismes de l'aide au développement en l'axant sur la démocratisation comme nouvel fondement et conditionnalité. L'injonction était faite désormais à Haïti, comme aux autres pays bénéficiaires, d'accepter l'idée selon laquelle `'la démocratie apporte le développement». Ils devaient donc s'approprier de la démocratie comme cadre politique de l'État de droit et de la protection des droits de l'Homme afin de se retirer de la misère ou mieux de s'attirer le maximum d'aides internationales possibles.
Sous l'effet conjugué de ces deux (2) forces à la fois interne et externe, Haïti a engagé à travers la Constitution de 1987 une reforme ou du moins une modernisation de l'État qui a fait de la décentralisation l'une des pièces maitresses pour amorcer le développement à la base. On a assisté donc à un changement de paradigme de développement en Haïti. Le schéma de développement de haut de l'État, pour s'optimaliser, devrait cette fois-ci intégrer la dynamique de bas qui lui donne son assise et légitimité.
Ans le cadre de la recherche, ont été revisités dans une perspective critique les grands courants en théories et stratégies de développement telles que les théories évolutionnistes, les théories marxistes et les théories historico-systémiques.
Les théories évolutionnistes posent le développement comme un processus naturel à la fois inévitable et irréversible. Le sous-développement ne serait qu'un simple retard qu'un changement culturel (au plan mental et technologique) pourrait aider à accélérer. Ce courant libéral a contribué largement à la propagation de l'idéologie de la modernisation, du pluralisme intégré, et de l'efficacité novatrice comme préalables au développement.
Les dependistas, du courant marxiste, n'ont pas dépassé la modernisation, cependant ils ont eu le mérite de mettre en évidence les contradictions, la polarisation des groupes sociopolitiques de la modernisation. Les confusions et les divergences entre les dependistas euxmêmes ont forcé de regarder vers d'autres horizons pour chercher à comprendre davantage le phénomène du développement.
C'est ainsi que l'approche historico-systémique du développement a été introduit. Si les théories évolutionnistes ont permis de saisir le contexte de l'avènement officiel du développement, si les dependistas ont attiré l'attention sur bien des faiblesses des théoriciens libéraux, c'est surtout l'approche historico-système qui a permis d'apprécier la trajectoire du
développement au développement local. Avec les historiens systémiques surtout, on a revu la genèse et la phylogenèse du capitalisme dont la globalisation constitue l'étape la plus décisive. C'est justement en réaction à cette étape charnière du capitalisme, que la pensée localiste du développement va prendre forme.
Le passage en revue des principales stratégies du développement local ont permis de faire valoir l'hétérogénéité et la complexité de la pensée localiste du développement. Dans un continuum partagé entre les politiques de droite et de gauche, le développement local se fonde respectivement sur la compétitivité économique, la notion de territoire, l'identité culturelle, etc. Les différentes stratégies du développement local, aussi contradictoires qu'elles paraissent, possèdent un dénominateur commun : La nécessité de reformer tout État centralisateur afin d'encourager la participation et la responsabilisation des citoyen (nes), des membres de la société civile ou du secteur privé. En ce sens, on est en droit d'avancer qu'aucune stratégie de développement local ne puisse se concevoir sans un certain degré de décentralisation de l'État. Étant un élément constitutif et instrumental de la gouvernance territoriale, la décentralisation a été comprise dans la perspective de ses théories normatives et de ses théories descriptives.
Transposée dans le contexte haïtien, la problématique de la décentralisation et la mise en oeuvre des stratégies de développement local ont offert l'opportunité de scruter la culture politique haïtienne, le cadre institutionnel de la décentralisation et du développement local dans le pays, et l'étude du cas précis de la Commune de Croix-des-Bouquets.
Dans le cadre de la recherche, ont été notammnet démontrés :
(i) la necessité de la responsabilisation et la participation des citoyens et citoyennes dans la fabrication et la coordination de l'action de développement : La faible capacité des cruciens et cruciennes à influencer les décisions a occasionné une non maitrise de leur part des ressources de leur communauté. Ils ne sont donc pas en mesure de s'impliquer valablement dans le processus du développement. Leurs rapports avec l'État, les
institutions locales et autres institutions sont défaillants. Étant irremplaçable dans la chaine de fabrication et de coordination de l'action de développement, l'engagement des citoyens et citoyennes laisse un vide qui contribue à perpétuer le sous-développement de la Commune de Croix-des-Bouquets.
(ii) la nécessité de la disponibilité des autorités et des cadres formés et motivés pour impulser le développement local : La Mairie de Croix-des-Bouquets, étant l'institution maitre d'ouvrage du développement de la Commune, ne possède pas une batterie de professionnels imbus de leurs fonctions et motivés à desservir la population locale. Cette institution est regorgée des agents qui y sont faute de mieux. Ce sont des agents relativement livrés à eux-mêmes sans obligation de résultats. Le rôle de leader de cette institution à impulser le développement- en incitant les acteurs, en coordonnant les actions, en mobilisant et distribuant les ressources- se trouve nettement atrophié. Ceci donne à la Commune l'air d'être navire sans capitaine et dont l'équipage est en désarroi.
(iii) l'impact éventuel de la gestion saine des services publics sur le développement local : L'incapacité des autorités locales à gérer efficacement les affaires de la Commune a renforcé le degré d'innaccessibilité des services sociaux de base. La seule façon d'accéder à certains services semble de passer par la corruption comme une voie rapide. La corruption ne cesse de répandre ses effets malsains sur tout le processus de développement de Croix- des-Bouquets. Les recettes propres de la Commune se voient volatilisées. Les petites et moyennes entreprises se trouvent découragées à la fois par la corruption (taxes surélevées, difficultés d'acquérir des documents administratifs) et l'insécurité (vols organisés, etc.). La corruption- affectant l'économie locale et se répandant essentiellement dans les secteurs sociaux- contribue à baisser continuellement la compétitivité de la Commune.
Toutes les démonstrations ci-dessous ont conduit au fait que le système de gouvernance du territoire de Croix-des-Bouquets est foncièrement désarticulé et incohérent. la Commune de Croix-des-Bouquets souffre d'un manque sévère de leadership. La Mairie n'a pas la capacité de jouer son rôle de maitre d'ouvrage qu'elle est censée jouer dans le processus du développement. La Société Civile non plus n'est organisée de manière à pousser les autorités municipales à prendre ses responsabilités. Par conséquent, il n'existe pas une vision à long terme du développement de la Commune. Des stratégies de développement de plus en plus contradictoires, ayant même des effets négatif, sont mises en oeuvre dans la Commune en dehors de tout schéma d'aménagement de territoire, d'urbanisme ou de plan de développement. Il va de soi que la pratique de la décentralisation déjà fictive et précaire dans la Commune ne peut avoir aucun impact majeur sur le développement.
Les démonstrations ont conséquemment permis d'avancer que la responsabilisation et la participation des citoyens et citoyennes, une bonne allocation et gestion des ressources, permettrons aux autorités locales d'exercer mieux leur leadership, les compétences administratives et politiques transférés de l'échelon central au niveau Communal. Ceci a permis de confirmer avec certaines réserves l'hypothèse de départ selon laquelle la décentralisation- étant fondée sur le partage des responsabiités et des ressources, et la participation citoyenne- ne favorise le développement local que dans la mesure où elle est pratiquée dans un système de gouvernance territoriale cohérent.
Car il appartient toujours aux autorités comme premier chef d'oeuvrer pour fabriquer ou faciliter la cohérence de la gouvernance du territoire. Quand les institutions locales sont défaillantes, et que les citoyens et citoyennes sont marginalisés, la décentralisation devient coquille vide sans impacts réél sur le développement local.
Théoriquement, s'est renforcé l'évidence de la relation directe décentralisation et développement local. Pour être efficace, entre décentralisation et développement local, il est démontré qu'il doit y avoir une harmonisation, une articulation, une intégration même minimale.
Notre recherche a amené à des trouvailles permettant de renforcer certaines idées déjà en circulation dans le milieu et d'autres projetant des horizons contraires. Aussi vrai que la décentralisation est foncièrement inscrite dans la loi fondamentale du pays, la décentralisation demeure dans le pays un processus précaire dans le sens fort du terme, c'est-à-dire elle n'a rien de stable, d'assuré, tout le processus en cours depuis 1987 reste incertain, provisoire, et fragile. Cette précarité s'origine dans la Constitution même du pays qui ne reconnait pas un statut égalitaire des Collectivités Territoriales. Les Départements sont reconnus comme des personnes morales, les Communes ne jouissent pas de personnalité morale, elles ne jouissent que de l'autonomie administrative et financière, et le statut des Sections Communales est tout simplement absent dans la Constitution.
Compte tenu du statut des Communes et des Sections Communales, on aurait pu nommer les autorités à la tête des Communes et des Sections Communales. Mais la confusion est à son comble quand cette Constitution exige le même mécanisme (suffrage universel) pour faire élire les dirigeants des trois (3) niveaux de CT. Même si les statuts différenciés des CT font croire que les départements sont plus importants que les autres CT, les autorités des CT sont toutes des élus au suffrage universel. Ceci crée une sacrée contradiction dont les autorités centrales peuvent à tout moment résoudre en nommant des autorités à la tête des Communes et des Sections Communales conformément à leur statut Constitutionnelle, car du point de vue statutaire seules les autorités départements devraient être élus au suffrage universel.
Cependant toute éventuelle décision pour faire nommer au lieu d'élire les Maires, les Casec, Asec, etc. serait un accroc majeur au processus de la décentralisation en Haïti. Ce serait le retour en force des temps anciens. Cette épée de Damoclès placée sur le processus de décentralisation en Haïti est d'autres en plus renforcé par l'absence de vision stratégique et le manque de volonté politique de l'État dont les tentations recentralisatrices sont omniprésentes. Le manque de velléités pour doter le pays d'un cadre légal cohérents sur la décentralisation est le signe d'une volonté manifeste de rétention de pouvoirs et de ressource au niveau central. D'ailleurs, on a vu que le vocable décentralisation est dévidé de tout son contenu d'après 1986,
il est devenu un concept valise, un mot de passe, qui ne charrie plus rien des revendications antimacoutistes, anti-autoritatrisme, et anti-impérialistes qui ont dessiné le contexte socio-historique et politique de l'adoption de la Constitution de 1987.
Des deux (2) contraintes qui ont vu l'avènement de la décentralisation en Haïti, il ne subsiste qu'une seule qui soit encore de mise, voire renforcée : la conditionnalité internationale, la poursuite de la vague de démocratisation à l'occidental. La décentralisation est devenue entre les mains de l'État haïtien un vil instrument de démagogie et de manipulation politique. L'État haïtien se transforme en une vaste ONG étatique qui amasse des sous l'étiquette de la décentralisation. Ayant été un cheval de bataille dans les années 80, la décentralisation est désormais un pot au beurre dans toute la société haïtienne. N'étant pas une valeur ancrée dans la société haïtienne, un simple changement de contexte international- par exemple, l'élimination de certaines conditionnalités par les bailleurs ou la non-disponibilité des fonds pour les projets de décentralisation- peut occasionner le retour au grand jour du centralisme exacerbé qui a toujours marqué la culture politique du pays.
En effet, environ un quart de siècle depuis l'adoption de la Constitution de 1987 qui consacre la décentralisation comme un des piliers stratégiques de l'État, le mode de gouvernance d'Haïti n'a pas permis de tenir les promesses de la modernisation de l'État, ni l'amélioration des conditions de vie de la population. Haïti s'enfonce davantage dans le processus de décapitalisation et de l'effritement des ressources. La situation de la Commune de Croix-desBouquets en est un exemple patent. Cette Commune n'a pas la capacité à planifier, budgétiser, passer des marchés de réalisation d'infrastructures et de fourniture de services, contrôler l'exécution, ni assurer la bonne gestion. Ce n'est pas le processus de décentralisation qui, tout précaire qu'il est, peut automatiquement inverser cette tendance perverse de la Commune de Croix-des-Bouquets. Car tous les structures et mécanismes, y compris les acteurs de la gestion de la chose publique de la Commune semblent entrer dans une logique contradictoire qui a pour effet la désorganisation et la déstructuration du système de gouvernance pour le développement.
Comme apports de la recherche, il faut souligner:
· Du point de vue théorique, la réaffirmation de la dépendance du développement local du processus de la décentralisation.
En Haïti, à l'instar d'autres pays en voie de développement, des institutions nationales et de la coopération internationale- impliquées dans la construction du développement local- oeuvrent indépendamment des élus locaux et du cadre normatif des actions locales. Elles érigent, par exemple, des écoles, des centres de santé partout et n'importe où sans se soucier de la stratégie d'ensemble du milieu. Leurs efforts se conjuguent davantage vers le renforcement des petites infrastructures physiques et des séances de formation à impacts quasiment nuls sur les conditions de vie de la population. Contrairement à ces idées et pratiques, même trop répandues à la Commune de Croix-des-Bouquets, qui court-circuitent l'État au niveau local, l'appui de ces institutions devrait être dirigé, entre autres priorités, vers le renforcement de la capacité des élus locaux, de la Société Civile, de rendre effective le processus de la décentralisation dont les dysfonctionnements ont pour effet automatique de freiner la dynamique de développement local.
· La confirmation d'un `'système de gouvernance cohérent» comme préalable au développement local.
En plus de la dépendance du développement local du processus de la décentralisation, la recherche à la Commune de Croix-des-Bouquets a permis de confirmer que le processus du développement local nécessite, comme avancé par les fonctionnalistes, que le secteur public, le secteur privé et la Société Civile agissent en synergie à partir d'une vision à long terme de développement. La désarticulation du mode de construire ensemble entraine la désintégration des forces et des actions sur le territoire. Les conclusions sur la situation de la Commune de Croix-de-Bouquets en reste un exemple patent.
É La mise en évidence de la précarité de la décentralisation en Haïti.
Contrairement à une idée courante selon laquelle le pays a fait des avancées considérables dans le domaine de la décentralisation, cette recherche a le mérite de démontrer que la décentralisation haïtienne est encore très fragile et que les démons du centralisme hantent encore ce processus de décentralisation dont la grande dépendance internationale accroit la vulnérabilité.
A ce tournant, il importe de signaler les faiblesses méthodologiques et théoriques que recèle la recherche. Tout d'abord, il faut mentionner le caractère non extrapolable des résultats. D'autres chercheurs devront approfondir les investigations entamées. En second lieu, on mentionnera l'absence de représentation des acteurs tels que les Maires, les Casecs, les techniciens des institutions locales et déconcentrés dont la consultation aurait probablement modifié les conclusions de la recherche.
Toutefois, cette recherche ne manquera pas de fournir des pistes pour le moins fiables à d'autres chercheurs engagés dans le même domaine ou préoccupés par des problématiques similaires. Comme réflexions sur les retombées pratiques de cette recherche, on mentionnera : (i) qu'il y a lieu de mener une réflexion plus en profondeur sur la Constitution de 1987 par rapport au cadre de la décentralisation en générale, et par rapport au statut des CT, du mode de désignation des autorités locales en particulier, et de leur pouvoir à exercer effectivement les compétences octroyées sans être à la merci d'autres autorités mieux loties. (ii) la mise en place des structures et mécanismes d'autonomisation des citoyen (ne)s afin de pallier au maximum à leur déficit de capacités. Ainsi, on facilitera la démarginalisation de leur participation, leur responsabilisation dans le système de la gouvernance de leur territoire. Tout ceci aurait pour vertu de permettre une appropriation locale du processus de développement.
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WEBOGRAPHIE
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Qu'est-ce que la décentralisation ? : http://www.vie-publique.fr/decouverteinstitutions/institutions/collectivites-territoriales/decentralisation/ (consulté le 15 Avril 2010).
La décentralisation en Haïti : http://apad.revues.org/565 (consulté entre 15 Avril et 10 Juillet 2010)
Haïti face aux défis de la decentralisation : http://haiticci.undg.org/uploads/04 (consulté entre 05 Mars et 17 Avril 2010).
Le développement local: réflexion pour une définition théorique du concept : http://www.globenet.org/archives/web/2006/www.globenet.org/horizonlocal/perso/defloc.html (consulté entre 02 Juin au 27 Juillet 2010).
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Association des centres locaux de développement du Québec : www.acldq.qc.ca (consulté le 12 Janvier 2011).
Chantier de l'économie sociale : www.chantier.qc.ca (consulté le 11Février 2011)
villes, régions, monde. le réseau interuniversitaire d'études urbaines et spatiales : www.vrm.ca / qu'est-ce que la gouvernance territoriale? (consulté entre 27 Janvier et 19 Juin 2011).
De la gouvernance à la gouvernance territoriale : http://cybergeo.revues.org/23530 (consulté entre 02 Juin au 27 Juillet 2010).
La gouvernance territoriale comme nouveau mode de coordination de territoire : www.cairn.info/load_pdf.php?id_article=ges_074_0321 (consulté entre 27 Janvier et 19 Juin 2011).
Tableau I: Continuum des systèmes de gouvernement selon Oates Tableau II: Comparaison des degrés décentralisation
Tableau III: Critères de (dé) centralisation
Tableau IV: Carte géographique de la Commune de Croix-des-Bouquets Tableau V: Problématique au niveau des statuts des CT
Tableau VI: Extrait de questionnaire I
Tableau VII : Extrait de questionnaire II
Tableau VIII: Cercle vicieux du Sous-développement à Croix-au-Bouquets
LISTE DES ACRONYMES 4
AVANT-PROPOS 6
INTRODUCTION 8
Problème de recherche 10
Hypothèse, objectifs et but de la recherche 14
Limitation et approches méthodologiques de la recherche 14
PREMIERE PARTIE:
EMERGENCE, STRATEGIES ET CONTRAINTES DU DEVELOPPEMENT LOCAL 20
CHAPITRE I: ESSOR DU DÉVELOPPEMENT AU DEVELOPPEMENT LOCAL 21
I.1.- PRINCIPAUX PARADIGMES DU DEVELOPPEMENT 22
I.2 DEVELOPPEMENT LOCAL : EMERGENCE D'UNE STRATEGIE
REACTIONAIRE
42
CHAPITRE II : PRINCIPALES STRATEGIES DU DEVELOPPEMENT LOCAL 46
II.1- REAPPROPRIATION ET RECONSTRUCTION DE TERRITOIRES 46
II.2- RESISTANCE A L'ACCULTURATION ET A LA DOMINATION TECHNOLOGIQUE 50
II.3 ATTRACTIVITE TERRITORIALE ET RECUPERATION NEOLIBERALISTE 52
II.4- SOUTENABILITE ET TERRITORIALISATION DES ACTIONS PUBLIQUES 55
CHAPITRE III : DECENTRALISATION ET CONTRAINTES DU SYSTEME DE GOUVERNANCE POUR LE DEVEVELOPPEMENT LOCAL 60
IIII.1 - DEFINITION ET TYPOLOGIE DE LA DECENTRALISATION 60
III.2- THEORIES NORMATIVES DE LA DECENTRALISATION 66
III.3- THÉORIES DESCRIPTIVES DE LA DÉCENTRALISATION 68
GOUVERNEMENT 70
III.5- DYNAMIQUE DU SYSTEME DE GOUVERNANCE POUR LE
DEVEVELOPPEMENT
LOCAL 74
II.6- JEU DES ACTEURS ET DES FACTEURS DE LA GOUVERNANCE 76
a. La Société Civile cherche à contenir les actions de l'État 79
b. La Société Civile construit des partenariats avec l'État 80
c. La Société Civile s'élève contre la subjugation de l'État 80
DEUXIEME PARTIE :
DECENTRALISATION ET DEVELOPPEMENT LOCAL DANS LE CONTEXTE HAITIE 84
CHAPITRE IV : CADRE INSTITUTIONEL DE LA DECENTRALISATION ET
DU
DEVELOPPEMENT LOCAL 85
IV.1 DECENTRALISATION DANS LA CULTURE POLITIQUE HAÏTIENNE (1804-
2010) 85
VI.2 DECENTRALISATION DANS LA LEGISLATION HAÏTIENNE A
PARTIR DE 1987 91
IV.3 DECENTRALISATION HAITIENNE AU SERVICE DU
DEVELOPPEMENT LOCAL 91
IV.3.1 Instances d'encadrement et de régulation du processus de développement local en Haïti 98
Contrôle de tutelle ou de légalité des Collectivité Territoriale 99
Système de planification du développement local 100
Mode de financement de la gestion et du développement des Collectivités Territoriales
103
CHAPITRE V : DIAGNOSTIC DES TENDANCES LOURDES DE LA DECENTRALISATION ET DU DEVELOPPEMENT LOCAL 108
TROISIEME PARTIE
CHAPITRE VI : PRATIQUES DE LA DECENTRALISATION ET DU
DEVLOPPEMENT
LOCAL A CROIX-DES-BOUQUETS 122
V.1 VUE SYNOPTIQUE DES REALITES SOCIODEMOGRAHIQUES, SOCIOECONOMIQUES, HISTORICO-POLITIQUES ET CULTURELS 122
Histoire et idéologies 122
Espace, géographie et démographie 123
Ruralité et urbanité 125
Éducation et santé 126
Économie et commerce 126
Culture et loisirs 127
Gestion de services publics locaux 127
V.II - CONSTATS ET CONTRAINTES LIES A LA DECENTRALISATION ET AU DEVELOPPEMENT DE LA COMMUNE DE CROIX-DES-BOUQUETS 130
VI.1. Ambigüité des statuts des Collectivités Territoriales haïtiennes 136
VI.2. Tentations recentralisatrices des autorités haïtiennes 138
VI.3. Absence de vision stratégique unifiée et de volonté politique de l'État haïtien 139
VI.4. Changement de paradigme et récupération internationaliste du processus de la décentralisation 142
CHAPITRE VIII: DESARTICULATION DU SYSTEME DE GOUVERNANCE TERRITORIALE 146
VIII.1 Manque de leadership et de vision à long terme de développement 146
VIII.2 Contradiction des stratégies de développement mise en oeuvre dans la Commune 147
VIII.3 Déficit de l'autonomisation des citoyens et des citoyennes 150
- Manque d'accès à l'information 150
- Faible degré de responsabilisation des citoyen et des citoyennes 153
- Marginalisation des citoyen et citoyennes dans la prise des décisions 156
- Corruption et manque d'accès aux services sociaux de base 157
Santé 158
Éducation 159
Eau et électricité 161
CHAPITRE IX : OPPORTUNITES ET POTENTIALITES D'UN SYSTEME DE GOUVERNANCE TERRITORIALE POUR LE DEVELOPPEMENT 165
IX.1. ÉVALUATION DE LA REPARTITION DES COMPETENCES ET DES RESSOURCES ENTRE LES COLLECTIVITES TERRITORIALES ET L'ÉTAT CENTRAL
165IX.2. STRUCTURATION, PROFESSIONNALISATION ET STABILISATION DE LA FONCTION PUBLIQUE TERRITORIALE 166
n haussement du niveau de salaire : .. 168
xistence dun plan de carrière ... 168
ne amélioration générales des conditions de travail ... 168
IX.3. DEMARGINALISATION PAR LA RESPONSABILISATION ET LA PARTICIPATION CITOYENNE 169
CONCLUSION 173
BIBLIOGRAPHIE 183
WEBOGRAPHIE 187
LISTE DES PRINCIPAUX TABLEAUX
199
ANNEXE
CARACTERISTIQUES DE LA POPULATION SOUS ETUDE
Identification du groupe |
Spécificité du groupe |
Sexe des membres |
||
F |
M |
|||
Groupe de chorale |
Des jeunes entre 18 à 31 ans qui chantent régulièrement à l'Église chrétienne de Séguy. |
18 |
5 |
|
Organisation de développement |
Des jeunes entre 20 à 42 ans qui se rencontrent régulièrement au sein de l'Organisation de Développement de l'Arrondissement de la Croix-desBouquets. |
25 |
8 |
|
Groupe de jeunesse |
Des jeunes entre 17 à 29 ans qui se rencontrent régulièrement au sein de la paroisse Rosaire pour discuter et planifier des affaires culturelles, civiques, religieuse et sociales. |
7 |
18 |
|
Groupe de métier |
Un club d'artisans entre 22 à 45 ans qui se rencontrent pour travailler ensemble, mutualiser les moyens et partager les techniques. |
17 |
8 |
|
Groupe de jeunes |
Regroupement régulier de jeunes chômeurs et étudiants entre 20 à 37 pour s'amuser et analyser les actualités sportives, culturels et politiques (section communale) |
7 |
5 |
|
Groupe de marchands et marchandes |
Regroupement express de marchands et marchandes entre 23 et 55 ans qui travaillent dans le secteur informel. |
21 |
10 |
|
TOTAL |
150 |
96 |
54 |
DISPOSITIONS CONSTITUTIONNELLES SUR LA DECENTRALISATION DES CT
Article 61: Les Collectivités Territoriales sont la section communale, la Commune et le département. Article 63: L'administration de chaque section communale est assurée par un conseil de trois (3) membres élu au suffrage universel pour une durée de quatre (4) ans. Ils sont indéfiniment rééligibles. Son mode d'organisation et de fonctionnement est réglé par la loi. Article 66: La Commune a l'autonomie administrative et financière. Chaque Commune de la République est administrée par un Conseil de trois (3) membres élus au suffrage universel dénommé Conseil Municipal Article 72: Le Conseil municipal ne peut-être dissous qu'en cas d'incurie, de malversation ou d'administration frauduleuse légalement prononcée par le tribunal compétent. En cas de dissolution, le Conseil départemental supplée immédiatement à la vacance et saisit le Conseil Electoral Permanent dans les soixante (60) jours à partir de la date de la dissolution en vue de l'élection d'un nouveau Conseil devant gérer les intérêts de la Commune pour le temps qui reste à courir. Cette procédure s'applique en cas de vacance pour toute autre cause. Article 73:- Le Conseil municipal administre ses ressources au profit exclusif de la municipalité et rend compte à l'Assemblée municipale qui elle-même en fait rapport au Conseil départemental. Article 83: Le conseil départemental administre ses ressources
financières au profit exclusif du département et Article 77: Le département est une personne morale. Il est autonome. |
|
Article 78: Chaque département est administré par un Conseil de trois (3) membres élus pour quatre (4) ans par l'Assemblée départementale. Article 78: Chaque département est administré par un Conseil de trois (3) membres élus pour quatre (4) ans par l'Assemblée départementale. Article 87.4: La décentralisation doit être accompagnée de la déconcentration des services publics avec délégation de pouvoir et du décloisonnement industriel au profit des départements. Article 200.1: La Cour Supérieure des Comptes du Contentieux Administratif connait des litiges mettant en cause l'Etat et les Collectivités Territoriales, l'Administration et les fonctionnaires publics, les services publics et les administrés. |
COMPETENCES PARTAGEES ENTRE ÉTAT ET C T
Article 32.1: L'éducation est une charge de l'Etat et des Collectivités Territoriales. Ils doivent mettre l'école gratuitement à la portée de tous, veiller au niveau de formation des Enseignements des secteurs public et privé. Article 32.2: La première charge de l'Etat et des Collectivités Territoriales est la scolarisation massive, seule capable de permettre le développement du pays. L'Etat encourage et facilite l'initiative privée en ce domaine. Article 32.4: L'enseignement agricole, professionnel, coopératif et technique est une responsabilité primordiale de l'Etat et des Communes. Article 32.9: L'Etat et les Collectivités Territoriales ont pour devoir de prendre toutes les dispositions nécessaires en vue d'intensifier la campagne d'alphabétisation des masses. Ils encouragent toutes les initiatives privées tendant à cette fin. Article 64: L'Etat a pour obligation d'établir au niveau de chaque section communale les structures propres à la formation sociale, économique, civique et culturelle de sa population. Article 81: Le Conseil départemental élabore en collaboration avec l'administration centrale, le plan de développement du département. Article 74: Le Conseil municipal est gestionnaire privilégié des biens fonciers du domaine privé de l'Etat situés dans les limites de sa Commune. Ils ne peuvent être l'objet d'aucune transaction sans l'avis préalable de l'Assemblée municipale. |
|
Article 90: Chaque collectivité municipale constitue une circonscription électorale et élit un (1) député. La loi fixe le nombre de députés au niveau des grandes agglomérations sans que ce nombre n'excède trois (3). En attendant l'application des alinéas précédents, le nombre de députés ne peut être inférieur à soixante-dix (70). Article 87 L'Exécutif est assisté d'un (1) Conseil interdépartemental dont les membres sont désignés par les assemblées départementales à raison d'un (1) par département. Article 87.1: Ce représentant, choisi parmi les membres des assemblées départementales sert de liaison entre le département et le pouvoir exécutif. Article 87.2: Le conseil interdépartemental, de concert avec l'Exécutif, étudie et planifie les projets de décentralisation et de développement du pays, au point de vue social, économique, commercial, agricole et industriel. article 94.2: Le sénateur de la République est élu au suffrage universel à la majorité absolue dans les assemblées primaires tenues dans les Départements géographiques, selon les conditions prescrites par la loi électorale. Article 217: Les Finances de la République sont décentralisées. La gestion est assurée par le Ministère y afférent. L'Exécutif, assisté d'un Conseil interdépartemental élabore la loi qui fixe la portion et la nature des revenus publics attribués aux Collectivités Territoriales. Article 218: Aucun impôt au profit de l'Etat ne peut être établi que par une loi. Aucune charge, aucune imposition soit départementale, soit municipale, soit de section communale, ne peut être établie qu'avec le |
|
consentement de ces Collectivités Territoriales. Article 250: Aucun monopole ne peut être établi en faveur de l'Etat et des Collectivités Territoriales que dans l'intérêt exclusif de la Société. Ce monopole ne peut être cédé à un particulier. Article 175: Les juges de la Cour de Cassation sont nommés par le Président de la République sur une liste de trois (3) personnes par siège soumise par le Sénat. Ceux des cours d'appel et des tribunaux de première instance le sont sur une liste soumise par l'Assemblée départementale concernée; les juges de paix sur une liste préparée par les Assemblées communales. Article 192: Le Conseil Electoral comprend (9) neuf membres choisis sur une liste de (3) trois noms proposés par chacune des Assemblées départementales: 3 sont choisis par le Pouvoir exécutif; 3 sont choisis par la Cour de Cassation; 3 sont choisis par l'Assemblée Nationale. Les organes sus-cités veillent, autant que possible, à ce que chacun des départements soit représenté. |
GLOSSAIRE DES TERMES CLES
Compétence : c'est l'attribution d'un ou des champs d'intervention à une instance.
Pouvoir : c'est la capacité dévolue à l'instance, d'utiliser les moyens propres à exercer la ou les compétences qui lui sont attribuées par la Loi. Il importe de distinguer le pouvoir de la compétence, mais dans la pratique cette distinction est inhabituelle, car il va de soi que sans pouvoir pour l'exercer, la compétence ne serait pas attribuée.
Autonome : jouissant de l'autonomie qui est la possibilité, pour un territoire ou une communauté, de s'administrer librement dans le cadre régie par un pouvoir central. L'autonomie est généralement limitée par la tutelle administrative ou Constitutionnelle du gouvernement central. Un pays ou un Etat fédéré peut être en situation d'autonomie partielle s'il dispose de larges compétences dans certains domaines tels que la culture, l'éducation, le développement économique, mais dépend d'une autre structure dans d'autres domaines tels que les affaires étrangères, la défense et la monnaie...
Personnalité morale : concept juridique par lequel on reconnaît à une personne morale (une société, un regroupement, une association, une circonscription etc.) des droits et des attributs. L'entité disposant de la personnalité morale peut ester en justice (exercer une action juridique), contracter en son nom ou encore acquérir des biens.
Collectivité Territoriale : on indistinctement collectivité territoriale ou collectivité locale pour définir une circonscription administrative, dotée d'une personnalité morale. C'est une partie du territoire d'un Etat qui dispose d'une certaine autonomie dans la gestion des affaires propres, même partielle.
QUESTIONNAIRE DE RECHERCHE
1- Faites- vous partie d'une organisation, d'une association ou d'une structure de la société civile communale ?
Oui |
Si non, pourquoi pas? |
2- Comment décrivez-vous les conditions de vie dans la Commune ?
3- Avez-vous déjà essayé de vous informer sur un sujet ou un autre auprès de la Mairie ?
Oui |
Si non, pourquoi pas? |
4- Etes-vous informé (e) des grands projets communaux pour les 2 ou 5 ans à venir ?
Oui |
Non |
5- Selon vous, quels sont les obstacles au développement de la Commune ?
6- Avez-vous une idée du montant et de la planification du budget municipal?
Oui |
Non |
7- Quelles sont vos opinions de la gestion municipale ?
Si oui, pourquoi ? |
Si non, pourquoi pas ? |
9- Savez-vous la durée du mandat des Maires ?
Oui |
Non |
10- Etes-vous prêt (e) à collaborer (avec les autorités locales) pour l'amélioration de la gestion de la chose publique de la Commune?
Si oui, pourquoi ? |
Si non, pourquoi pas ? |
11- Sentez- vous responsable de l'état des choses (mauvaises conditions de vie, mauvaise gestion, extrême pauvreté, etc.) de la Commune ?
Oui |
Non |
12- Sentez-vous intégré(e) dans la communauté de la croix-des-Bouquets ?
Si oui, pourquoi ? |
Si non, pourquoi pas ? |
13- Estimez-vous que l'État (y compris les institutions locales) respectent vos droits Constitutionnels (santé, éducation, sécurité, loisir, etc.) ?
Si oui, pourquoi ? |
Si non, pourquoi pas ? |
14- Estimez-vous que vous remplissiez bien vos devoirs de citoyen?
Oui |
Non |
15- Attendez-vous à une amélioration des conditions de vie de la Commune ?
Si oui, pourquoi ? |
Si non, pourquoi pas ? |