Sous-paragraphe 2 : Du parchemin au papier
Une vaste production de manuscrits se développe en France,
en Germanie et en Angleterre. Celle-ci dépasse le cadre des
monastères et des abbayes ; le livre n'étant plus uniquement un
objet de vénération religieuse, mais aussi vecteur
d'érudition et d'affirmation du statut social. La création des
premières universités suscite une demande importante de la part
des étudiants et, par conséquent, de la société
civile. Dans les ateliers, les copistes travaillent alors à la
chaîne dans les librairies. Le premier mouvement de
démocratisation du livre s'affirmera dès le XVe siècle.
Très vite donc, la nécessité se fait jour
de trouver un support moins coûteux et moins long à fabriquer que
le parchemin ; c'est ainsi que le papier, inventé en Chine, s'introduit
en Europe, mais son usage ne se généralisera qu'à compter
de l'invention de l'imprimerie.
Paragraphe 2. La seconde révolution du livre
Sous-paragraphe 1 : L'impression
Jusqu'à la moitié du XVe siècle, des
scribes, essentiellement des moines, recopient les textes pour en faire des
livres. Outre les copistes, d'autres métiers gravitent pour enrichir ce
support : les miniaturistes, les enlumineurs et les calligraphes.
À la fin du moyen âge, le public de plus en plus
avide de connaissances accroît la demande de livres. Les libraires des
Pays-Bas et d'Allemagne sont amenés à mettre au point un
procédé d'impression tabellaire : le texte est sculpté de
manière inversée dans une plaque de bois. Une fois encré,
il est transféré sur une feuille de papier ou de parchemin.
Pratiquée en
6 Etymologiquement, parchemin signifie peau de
Pergame.
7 L'indexation ne se développera qu'au XIIe
siècle.
Asie depuis plusieurs siècles, cette technique
xylographique8 est par la suite supplantée par l'impression
typographique9 à caractères mobiles fondus dans le
plomb. Cette invention permettra la diffusion de la pensée en
reproduisant les livres en nombre. Le premier livre imprimé en
typographie par Gutenberg est une bible latine, la célèbre bible
à 42 lignes10.
À compter de 1450 donc, date de l'invention de
l'imprimerie par Gutenberg, le livre passe du manuscrit à
l'imprimé. Plusieurs facteurs favoriseront l'expansion de cette
technique :
Il s'agit d'abord de l'époque des découvertes, et
par conséquent des voyages, qui vont favoriser la commercialisation des
livres et l'extension de l'imprimerie.
L'apport massif d'or et d'argent ensuite, en provenance
d'Amérique, permettra l'essor du commerce et l'émergence d'une
nouvelle classe sociale, celle des bourgeois. Cette dernière,
fortunée et avide de reconnaissance, satisfera son appétit de
connaissance par la lecture.
Enfin, l'apparition au XVIe siècle du protestantisme, et
l'opposition de Luther et Calvin au catholicisme en s'appuyant sur les textes
sacrés, sont des courants qui stimuleront les besoins en matière
de livres. Ainsi, le pamphlet de Luther intitulé <<A la
noblesse de la nation allemande>>, publié en 1520, sera vendu
à 4000 exemplaires en quelques jours. Certains historiens ont
écrit que <<la Réforme fut la fille de
l'imprimerie>>, cette invention permit quoiqu'il en soit la diffusion
rapide des idées de Luther et des réformateurs.
Sous-paragraphe 2 : La démocratisation du livre
L'imprimerie a été une invention remarquable qui a
permis de diminuer les coûts de fabrication, et par conséquent de
permettre à un plus grand nombre de lecteurs potentiels d'acheter des
livres. Cette révolution a été l'instrument d'une
évolution importante. Ainsi, l'imprimeur-éditeur Alde
Manuce11, qui publiera dans son imprimerie de Venise 150 ouvrages
entre 1494 et 1515, invente le livre à petit format
(in-octavo)12 et à grand tirage de 1000 à 1500
exemplaires.
Au XVIIIe siècle, la littérature populaire
apparaît et avec elle, la collection bleue. Ces livres de petits formats
étaient faciles à lire et accessibles à des personnes de
peu d'instruction (livres pratiques, romans, contes...). Toutefois, les
ouvrages restant chers, des lieux de lecture collective apparurent alors : les
cabinets de lecture. Ces endroits, ouverts par les libraires euxmêmes,
constituaient des bibliothèques privées au sein desquelles les
livres étaient achetés en commun.
8 Du grec Xylo : bois
9 Du grec Typo : empreinte
10 Ce livre est appelé la B42, car il se
divisait en deux colonnes de 42 lignes chacune.
11 Alde Manuce est aussi le concepteur de la lettre
italique.
12 In-folio : feuille pliée une fois (4 pages);
in-quarto : feuille pliée deux fois (8 pages); in-octavo : feuille
pliée trois fois (16 pages).
Avec le XIXe siècle, le livre se démocratisera
réellement grâce à la production industrielle et à
l'alphabétisation. Deux textes auront un impact important : la loi
Guizot d'abord, parue en 1833, qui impose aux villages de plus de 500 habitants
d'avoir une école et la loi Jules Ferry ensuite, publiée en 1882,
qui prône l'école laïque et obligatoire. Si en 1832,
près de 50 % des hommes savent lire, ce chiffre passera à 96 % en
1914.
En outre, grâce au mode de production, les prix chutent et
les tirages augmentent.
Cette démocratisation s'accélèrera en 1838
quand, en riposte à la concurrence des éditeurs belges, Gervais
Charpentier confiera à un imprimeur le soin de créer un nouveau
format permettant de contenir plusieurs volumes en un seul afin de diminuer le
prix du livre. Avec le format in-18 (18,3 x 11,5 cm), l'ancêtre du livre
de poche était né et avec lui l'emblématique collection
qui prendra le nom de <<Bibliothèque Chapelier>. Sur la base
d'un volume in-octavo, le prix passa de 7 francs à 3,50 francs. D'autres
éditeurs se positionnèrent également sur ce marché
: en 1846 Michel Lévy et sa <<Bibliothèque
contemporaine>, puis Louis Hachette en 1853 et sa
<<Bibliothèque des chemins de fer>. En 1855, les livres de la
<<Collection Michel Lévy> seront tous vendus à 1
franc.
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