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Analyse de déterminants de la mortalité infanto juvénile au Cameroun

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par Valery Martial TANKOU KAMELA
Institut Sous régional de Statistique et d'Economie Appliqué - Ingénieur Statisticien 2009
  

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2.2 TOUR D'HORIZON DE QUELQUES ÉTUDES

Il s'agit spécifiquement de présenter les résultats des études qui ont expliqué pourquoi les enfants décèdent avant leur 5ème anniversaire. Cette section nous amènera à retenir les variables que nous pensons décisives dans l'explication de la mortalité infanto-juvénile que nous essayerons de vérifier pour le cas du Cameroun.

Une thèse présentée par Florence Jusot sur l'analyse économique des inégalités sociales de santé en France en 2003, montre l'existence d'une très forte corrélation entre le revenu et la mortalité. Les résultats indiquent une surmortalité liée à la pauvreté. Cette thèse suggère que le risque de décès dépend très fortement du niveau absolu de ressources de l'individu mais aussi plus largement de son environnement économique et social.

Selon une étude sur les déterminants culturels de la mortalité infantile en Inde, 1993 M.E. KHAN montrent que des facteurs non-médicaux tels l'extrême pauvreté, la précocité du mariage et le statut subordonné de la femme, qui fait d'elle une travailleuse familiale non payée, influence négativement la survie des enfants. Par ailleurs, l'ignorance des femmes en matière de puériculture et de vaccination, leurs pratiques traditionnelles d'allaitement et de sevrage aggravent la situation. L'auteur estime qu'aucun progrès important en matière de mortalité infantile ne sera possible sans un réel développement sur tous les fronts (alimentation, éducation, santé) et une amélioration substantielle de la condition féminine.

Un article (Factors Responsible for Childhood Mortality Variation in Rural Ethiopia) (p.p. 223-238) qui exploite l'enquête démographique nationale en milieu rural de 1981 pour décrire les variations de la mortalité des enfants dans les régions rurales de l'Éthiopie, montre que :

· l'état de santé des parents est un facteur important de la mortalité des enfants ;

· la religion, la région de résidence et l'ethnie interagissent dans leur influence sur la mortalité des enfants ;

· la mortalité des enfants est en relation inverse avec l'alphabétisation des parents, qui peut aussi refléter le statut socio-économique. Les données indiquent une différence nette de mortalité des enfants entre les régions sujettes aux famines et le reste du pays.

Une première étude réalisée par Caldwell (1986), montre un effet positif de la scolarisation de la mère sur la baisse de la mortalité des enfants. Par ailleurs, une autre étude réalisée par MASTROROCCO et Roberta PACE, Université de Bari sur les déterminants de la mortalité infantile montre que l'accès à l'instruction maternelle permet de modifier la structure hiérarchique et traditionnelle de la famille et attribue à la femme de nouvelles positions et d'autres rôles au sein de la même hiérarchie. L'instruction féminine contribue, en fait, à modifier profondément les valeurs et les rapports au sein de la famille, garantissant une position paritaire dans la phase décisionnelle et d'aménagement familial. Le processus d'aménagement familial est donc directement influencé par le niveau d'instruction en fonction d'une certaine capacité de la femme à discuter avec son propre partenaire à propos, par exemple, de l'éventualité de la conception d'un enfant. Une femme cultivée a une capacité plus grande de s'imposer dans les choix de la vie familiale en se révélant plus sensible aux problèmes de l'hygiène qui concernent l'allaitement et la façon de préparer les mets. Le processus de scolarisation contribue à considérer l'hygiène comme un facteur capable de stopper beaucoup de causes de maladies et de mort, pas seulement l'hygiène personnelle de la femme et de l'enfant, mais aussi celle du milieu familial où l'enfant vivra après sa naissance. »

Pour MASTROROCCO et Roberta PACE, « un niveau d'instruction plus élevé conduit la femme à se détacher des croyances et des traditions orales qui concernent la sauvegarde de la santé de l'enfant favorisant l'éloignement d'inopportunes et vieilles méthodes de soin. Un niveau d'instruction plus élevé permet de rompre avec la tradition, d'être moins fataliste devant la maladie, d'adopter des thérapies et d'expérimenter des alternatives nouvelles dans une communauté qui change et évolue, même d'un point de vue sanitaire. Dans une société encline aux modèles occidentaux et novateurs, en outre, une mère cultivée est sûrement enfant, ce qui renforce évidemment le dialogue et l'interaction ».

Identifiable comme un instrument de propagande culturel occidental, l'instruction maternelle peut être en même temps considérée comme un moyen d'innovation et de changement (Akoto, 1994) ; cela veut dire qu'une femme cultivée cherche à se conformer à un style de vie moderne qui tend de plus en plus vers une amélioration de la qualité de la vie.

Une étude des déterminants de la mortalité des enfants de moins de cinq ans réalisée au Sénégal par Aliou Gaye en 1999 révèle que le niveau d'instruction de la femme est, un déterminant important de la survie des enfants. C'est surtout au niveau de la mortalité juvénile que l'effet de l'instruction de la mère semble être le plus discriminant : 22 %o des décès de moins de 5 ans chez les enfants dont la mère a un niveau d'instruction secondaire ou plus, contre 39 %o chez ceux dont la mère a un niveau d'instruction primaire et 93 %o chez ceux dont la mère n'a aucune instruction. Un niveau social plus élevé, lié au niveau d'instruction, favorise une conscience de soi-même plus forte, une connaissance plus approfondie des services médicaux-sanitaires disponibles et une conscience plus grande de la nécessité de vivre dans un milieu salubre et hygiénique. En bref, la scolarisation apparaît comme un processus social, capable de garantir de nouveaux modèles et de continuelles transformations, de favoriser et accélérer les modalités d'acquisition des informations et donc de stimuler l'intérêt pour la médecine moderne et la compréhension de la prévention.

Dans les pays à mortalité très élevée, MASUY-STOOBANT19(*) montre que le sexe de l'enfant, le rang des naissances, l'intervalle inter-génésique, l'âge de la mère ainsi que son niveau d'instruction et enfin le milieu de résidence sont des facteurs déterminants de la mortalité. En s'intéressant sur les naissances multiples de douze pays Africains, Gilles PISON montre une surmortalité des jumeaux sur les singletons.

MBACKE Cheikh et Van de Wall Etienne20(*) dans une étude à Bobo Dioulasso (BURKINA FASO) montrent que :

· le revenu du ménage ;

· l'instruction de la mère ;

· le type d'habitation ;

· le poids de l'enfant à la naissance ;

· la gémellité ;

· le nombre de visites prénatales ;

· la vaccination ;

· la lutte contre les moustiques.

sont déterminants pour la survie des enfants entre 0 à 5 ans.

Plusieurs enquêtes, réalisées sur le continent africain, notamment les enquêtes EDS, montrent que l'âge de la mère à l'accouchement et le rang des naissances sont des facteurs qui expliquent la mortalité des enfants de moins de cinq ans.

Pour AKOTO (1993)21(*), « l'ethnie est une variable opérationnelle de la culture. Elle influence la mortalité des enfants par les modèles culturels (organisation sociale, environnement, etc.), les normes, les idées, les croyances et attitudes qui sont véhiculées par les membres de la société. La culture influence la mortalité à travers la perception de la maladie. »

Dans le même ordre d'idée, plusieurs études réalisées sur le continent montrent que la vaccination est un élément capital de la vie des enfants. En effet, selon les recommandations de l'OMS, un enfant est considéré comme complètement vacciné s'il a reçu le vaccin du BCG contre la tuberculose, trois doses de DTCoq contre la diphtérie, le tétanos et la coqueluche, trois doses du vaccin contre la polio et le vaccin contre la rougeole. D'après le calendrier vaccinal, toutes ces vaccinations devraient être administrées à l'enfant au cours de sa première année de vie. On se pose alors la question de savoir si cette réglementation de l'OMS est toujours respectée par les femmes enceintes, ou ayant déjà accouchées ?

* 19 _(MASUY-STOOBANT, 1997)

* 20 _ Cité par LARMARANGE Joseph (2003), « Représentativité des monographies des villages », P.48

* 21 _ Cité par Tao Vridaou (2005), « les déterminants de la mortalité infanto-juvénile au Tchad »

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