III.2. Ebauche d'une logique cognitiviste
Notre logique cognitiviste comprend deux dimensions : la
première, comme toute logique formelle est démonstrative et la
seconde se veut agentive.
III.2.1. La dimension démonstrative de la logique
cognitiviste
Cette première dimension est démonstrative.
Même dans ce cas, nous avons voulu qu'elle soit plus riche que les autres
systèmes. C'est pour cette raison et en accord avec le principe
d'interprétation radicale de Donald Davidson que nous faisons de la
sincérité et de la performativité deux modalités
à côtés des modalités traditionnelles telles que la
nécessité, la possibilité, etc.
a.
Modalité de sincérité
La sincérité, pour peu qu'elle dépende
du sujet, est une modalité relative. Aussi, grâce à
l'héritage de la philosophie du langage, nous pouvons définir
les conditions ci-dessous comme base de son succès :
1°) le consensus minimal
En effet, pour qu'il y ait sincérité, il
faudrait qu'il y ait aussi consensus minimal, c'est-à-dire qu'il y ait
a priori un accord de principe entre le locuteur et la communauté
illimitée des allocuteurs possibles. Il faudrait que le locuteur,
même en cas de monologue, soit en mesure de dire des choses
sensées qu'il peut comprendre lui-même et que d'autres peuvent
comprendre aussi ;
2°) la qualité du
locuteur
Le locuteur doit avoir qualité d'accomplir des actes
illocutoires qu'il se propose d'accomplir. Par exemple, il serait inadmissible
de voir qu'un marchand d'épices, en tant que marchand, entre dans une
paroisse et bénisse un mariage solennellement. Il n'a pas cette
qualité ;
3°) les circonstances
appropriées
L'énonciation des actes illocutoires doit se faire
dans des circonstances appropriées, sinon ces actes seraient
voués à l'échec ;
4°) La compétence
linguistique
La notion de compétence linguistique est d'une grande
utilité en logique cognitiviste, car les comportements langagiers du
locuteur déterminent d'un certaines manière la
sincérité de celui-ci ainsi que le sens des
énoncés.
En effet, pour qu'un locuteur soit sincère, il
faudrait aussi qu'il s'exprime par une langue qu'il comprend et qu'il
maîtrise. Ce qui implique, par exemple, que le « parler en
langue », en logique cognitiviste, pèche contre la condition
de compétence linguistique.
Les quatre conditions évoquées ci-haut sont
contrefactuelles, c'est-à-dire nécessaires, mais pas suffisantes.
Toutefois, la sincérité est réussie lorsqu'elle satisfait
de façon optimale à ces quatre conditions et est
symbolisée par Sp. S étant la modalité de
sincérité et p, le contenu propositionnel qu'elle affecte.
Lorsqu'au moins l'une de ces quatre conditions n'est pas
respectée, la sincérité devient problématique et
est symbolisée par Sp.
Lorsqu'aucune condition n'est remplie, il n'y a pas de
sincérité et l'énoncé prend la forme
suivante :~Sp.
Essayons d'illustrer ce que nous venons de dire. Soit
l'expression suivante :
« Si l'univers a un centre, alors il
doit avoir une circonférence. Or, l'univers n'a pas
circonférence (elle est en perpétuelle expansion). Donc,
l'univers n'a pas de centre. »
La première de chose à faire, c'est de
vérifier si cette expression satisfait aux quatre conditions de
sincérité :
1°) A supposer que celui qui le dit n'est pas
fou, mais qu'il sait pertinemment bien de quoi il parle, alors nous
pouvons dire que la première condition est remplie ;
2°) A supposer que ces propos soient tenus par
un astrophysicien, alors nous pouvons dire que la deuxième condition
est remplie ;
3°) A supposer que cet astrophysicien soit un
francophone, alors la quatrième condition est remplir ;
4°) A supposer que ces propos ont
été tenus lors d'une conférence sur l'astrophysique,
alors nous pouvons dire que la troisième condition est remplie.
Deuxièmement, il faudra formaliser notre expression
(dans le présent travail, nous utiliserons les propositions
inanalysées). Ainsi, nous obtiendrons l'Ebf
suivante :
S{[(p?q)^~q]?~p}
Le S majuscule montre que l'expression satisfait de
façon optimale aux conditions de sincérité.
En troisième lieu, il faudra tester la validité
de cette expression par la méthode des tableaux sémantiques,
méthode qui doit être accommodée à la
modalité de sincérité.
D'emblée, nous notons que la sincérité
est interprétée comme vérité dans tous les modes
possibles. Elle se comporte exactement comme la nécessité. Ceci
dit, nous pouvons maintenant évaluer notre Ebf :
Mo M'
V
|
F
|
?
R.A.R
(relations d'accessibilité réflexive)
|
V
|
F
|
|
1. S{[(p>q)Ë~q]?~p}(x)
|
(3-2) (p>q) Ë ~q (x)
(5-4) p
(6-3) p?q (x)
(7-3) ~q (x)
|
(2-1)[(p>q)Ë~q]?~p}(x)
(4-2) ~ p
(8-7) q
|
1
|
2
|
1
|
2
|
(5-4) p
(5 et 9) p
|
(10-6)q (5-4) p
(10 et 8) q
|
(9-6) p
(8-7) q
(5 et 9) p
|
(8-7) q
(10 et 8) q
|
Notre Ebf satisfait non seulement aux conditions de
sincérité, mais elle est aussi tautologique. En effet, nous
pouvons également la démonter par la méthode axiomatique.
Pour ce, nous utiliserons le système C1 (système cognitiviste
un), lequel est un prolongement du système T.
Le système C1 comprend les éléments
suivants :
|