FACULTE DE
DROIT
DEPARTEMENT DE DROIT INTERNATIONAL PUBLIC ET RELATIONS
INTERNATIONALES
B.P. 204 KINSHASA XI
KANINDA MUDIMA
Benjamin
Diplômé des Humanités
Scientifiques
G3/B
Travail de fin de cycle présenté en vue
de l'obtention du titre de Gradué en Droit
Option : Droit Public
Directeur: NGANZI KIRONGO Dieudonné
Professeur
Associé
Encadreur : NYOMONGOMO DANGBI
Assistant
PENSEE
« Un sage écoutera et gagnera en enseignement,
et un homme intelligent est celui qui acquiert l'art de
diriger ».
Proverbe : 1 : 5
EPIGRAPHE
Il est à proscrire de l'humanité, à mon
humble avis, une souveraineté qui servirait à martyriser son
naturel et rationnel détenteur légitime : le peuple. La
souveraineté doit être respectable en élevant sur un
piédestal la dignité humaine dans un Etat démocratique de
droit. L'attachement au pluralisme démocratique, le respect de l'Etat de
droit et la déférence profonde aux droits. L'attachement au
pluralisme démocratique, le respect de l'Etat de droit et la
déférence profonde aux droits de l'homme constituent des valeurs
démocratiques qui devront faire partie du patrimoine commun de
l'humanité.
Greg BASUE BABU KAZADI.
DEDICACE
A Jéhovah Dieu le souverain suprême pour la
grâce qu'il cesse de nous accorder le jour le jour ;
A mon très cher père MUKANDILA MPANYA
François Hilaire, pour tes conseils plein des sagesses
pratiques, ton sacrifice total pour notre cause. Puisse le bon Dieu
Jéhovah, te donner une longue vie afin que tu continues à
t'échauffer à partir des bois que tu as rassemblés pendant
ta jeunesse.
KANINDA MUDIMA Benjamin.
IN MEMORIAM
A ma défunte mère KALENGA MWAMBA
Bernadette à qui je dois ce que je suis. Toi qui assuras avec
dévouement ces études dont malheureusement tu ne goutteras pas le
gain. Ta disparition brutale nous a profondément touchés, mais
Dieu aidant, nous avons pu achever ton oeuvre. Ce triste
événement hâte à jamais nos mémoires. Nous
tes disons grand merci ;
A mes regrettées soeurs MASENGU Fifi et MUSHIYA
Nelly.
KANINDA MUDIMA Benjamin
REMERCIEMENS
Personne n'écrit jamais un travail scientifique
« tout seul », et dans mon cas c'est encore plus vrai que
d'habitude. Ce travail de fin de cycle existe, non seulement grâce
à mes idées personnelles, mais aussi parce que beaucoup d'autres
personnes y ont consacré leur temps, leur talent et leurs
idées.
C'est aussi le résultat des cours auxquels nous avons
assisté durant tout ces temps à la faculté de droit de
l'Université de Kinshasa.
C'est aussi le résultat de nos recherches dans une
multitude des livres écrits par des professionnelles. Mais
également des recherches effectuées à l'internet.
Comme le dit un adage « l'expérience
acquise est la panoplie de ses propres erreurs ». Si tel est le cas,
nous avons accumulé beaucoup d'expériences pendant
l'élaboration de ce travail de fin de cycle de graduat en droit.
Toutefois avant de mettre un point final à ce travail et de
réfléchir à l'art de mener à bien un travail de fin
de cycle, nous voudrions nous acquitter de plusieurs dettes.
Nous pensons principalement à toutes les
autorités académiques ainsi qu'à tous les professeurs,
chefs de travaux et assistants de l'université de Kinshasa en
général et en particulier ceux de la faculté de droit pour
leur encadrement durant ces trois années passées à
l'université de Kinshasa.
En particulier, nous devons beaucoup à Monsieur NGANZI
KIRONGO Dieudonné, Professeur Associé et Directeur de ce travail
de fin de cycle. C'est lui qui nous a offert l'opportunité
d'élaborer ce travail de fin de cycle en nous faisant profiter de ses
observations critiques et de son avis professionnel. Qu'il soit
sincèrement remercier.
A Monsieur NYOMONGOMO DANGBI Norbert, qui a voulu
assuré dans des conditions parfois échevelées, le suivi et
ses vues sur certains aspects du manuscrit. Qu'il soit également
remercier.
Mes sincères remerciement à Papa OSSEMBE
Jérôme pour son aide combien important durant mes trois
année d'études à la faculté de droit de
l'université de Kinshasa.
Je pense également aux membres de ma famille qui de
loin ou de près ont contribué à ma formation. Il s'agit
plus particulièrement de mon père MUKANDILA MPANYA
François Hilaire, de ma défunte mère KALENGA MWAMBA
Bernadette et de mon oncle Jean TSHIBANGU KOLAMOYI. Je leur avoue ma
reconnaissance et leur remercie sincèrement. Ma gratitude s'adresse
à mes oncles et tantes, MASENGU MWAMBA Elisabeth, MBUYI KAMUANYA,
KALENGA Cléophase, KABEDI Bernadette Rose Betty, KABENA Francine, MUKADI
Jean Pierre, Jean Baptiste MWAMBA, KANYINDA Jokaf, TSHILENGI George dont l'aide
morale et matérielle nous a été d'un grand secours.
Un sincère et cordial merci à mes frères
et soeurs, NSUMBA Julien, MUKANDILA Francis, TSHIBANGU Guylain, KASSANDA
Serge, MWAMBA Chilino, ILUNGA Eddy, MAKANDA Annie, KALENGA Eveline, TSHIBAKA
Léon Jonathan, KALENGA Nisan et ma belle soeur ILONGE Belly qui, nous
soutenant dans notre vie courante et estudiantine, ont fait montre d'un
dévouement sans précédent en nous accordant leur
assistance tant matérielle et financière.
Nous sommes également reconnaissants à mes
cousins et cousines, NTUMBA Rufin, NDELELA Junny, KAMUANYA Sarah, Marceline,
KANYINDA Danny, TSHIALA Aline, pour leur soutien tant moral, matériel
que financier durant toutes nos trois années d'études.
A nos compagnons de lutte avec qui nous avons combattu pour
l'obtention de ce titre, KABUTA Baruch, NGOYI Minord, TAMBWE Christian, MALABA
Matthieu, MILOLO Mireille, MUYAYA Martin, MBAYA Yannick. Qu'ils trouvent ici,
l'expression de notre profonde gratitude.
Notre gratitude s'adresse aussi à nos amis et
connaissances pour leur soutien à la réalisation de ce travail,
YEMOMENI Yan, BWASHI Gloddy, PANGASUDI Elias, NGALU Freddy, KUNGA Aurel,
MULUMBA Dodo, ONATSHUNGU Henry, KABONGO Mardochée, WANZA Franchard,
MPINDA Fabrice, LOKALE Francis, MUKENGE Jim, MANOKA Urbain, LENDO Jethro, BINDA
Michel, KABASELE MULUMBA Belain, MUKALAYI Henry et tant d'autres.
Qu'il nous soit permis de conclure par une pensée
particulière pour nos familles ; car personne ne peut
évaluer la gratitude qui est due aux membres de famille d'un autre. La
compréhension et le flegme dont elles ont fait preuve pendant plusieurs
années nous ont permis de mener à bien un travail qu'elles ont
à juste titre, trouvées trop exclusif.
Il est impossible d'énumérer tous à
travers ces pages. Tout autres personnes qui mérite notre
reconnaissance, se sente vraiment remercié, et trouve ici, l'expression
de notre profonde gratitude.
INTRODUCTION
L'actualité abonde de là où un individu,
lésé dans ses droits par les autorités d'un autre Etat
étranger, sur le territoire duquel il réside ou tout simplement
séjourne, fait appel à son Etat national pour défendre ses
droits qui ont été bafoués. La place de l'individu en
droit international est flouée et mal définie.
En partant de ce constant, comment peut - il se
protéger efficacement sur la scène international ? Par le
biais de son Etat. Combien de fois assiste - t - on à une intervention
étatique en faveur d'un national, dans le but premier de le
protéger et sauvegarder l'intégrité des droits dont il est
titulaire ou bénéficiaire. Les appels au secours d'un national
à son gouvernement, s'ils ne restent pas lettre morte, ont alors pour
conséquence que l'Etat mettra tout en oeuvre, au plan international et
dans la mesure du possible, pour prendre fait et cause pour son ressortissant
lésé. L'intervention de l'Etat en faveur de son ressortissant a
pour but de rétablir la situation, de la rendre identique ou similaire
à ce qu'elle était précédemment à l'outrage
subi ou bien de permettre la réparation éventuelle du dommage.
L'Etat peut être considéré comme la forme
la plus aboutie d'organisation humaine et sociale. En droit international, tant
la doctrine que la jurisprudence, s'accorde à reconnaitre que l'Etat,
en tant qu'entité souveraine, se caractérise par la
réunion de trois éléments constitutifs et cumulatifs que
sont la population, le territoire et l'autorité politique. Parmi ces
trois éléments, deux vont, de par leur nature, se rattacher
directement au caractère international de l'Etat, le territoire et la
population.
Dans le cadre de cette étude, nous allons nous
intéresser plus particulièrement à la protection
diplomatique internationale des organes extérieurs de l'Etat.
En effet, l'Etat doit avant tout être
considéré comme un groupement d'individus. Or qui dit population,
dit devoirs obligatoires étatiques envers celle-ci. Dès lors,
l'Etat n'existera qu'en vue de missions précises, dont celle de
protéger les individus qui le composent, où qu'ils se trouvent,
pourvu qu'ils soient ses nationaux.
Il existe donc, à la charge de l'Etat une obligation
générale de protéger ses nationaux. Cette obligation de
protection de ses ressortissants est perçues alors comme une de ses
missions sacrées et fondamentales. Ça sera sur cette
considération première que va se fonder et se justifier
l'institution de la protection diplomatique. La protection diplomatique se
justifie également par ce lien de souveraineté que chaque Etat
exerce sur ses ressortissants, la compétence personnelle.
En effet, un Etat a la possibilité d'invoquer pour
justifier l'emprise qu'il exerce sur des individus « un lien
d'allégeance particulière qui lui subordonne une personne
donnée1(*) ». Ce lien d'allégeance c'est le lien
de nationalité, qui sera récurrente dans l'étude de
l'institution de la protection diplomatique.
L'emploi du terme « institution » n'est
pas fortuit. En effet, dans le cadre des relations internationales, la pratique
de la protection diplomatique a, au fil des siècles, et de par l'action
des Etats, acquis une importance telle que l'on peut aisément avancer
l'idée d'une véritable institutionnalisation de la
matière, du moins de sa reconnaissance générale et
universellement un caractère coutumier. L'institution de la protection
diplomatique trouve son origine dans une
« nationalisation » de la pratique des représailles
privées2(*). En
effet, au moyen âge, un individu lésé dans ses droits, en
pays étranger, pouvait se dédommager, en nature, sur les biens
des étrangers établis dans son propre pays, pourvu que justice ne
lui ait pas été rendue dans l'Etat concerné. L'individu,
en la matière, était alors titulaire d'un véritable droit
subjectif, celui de faire valoir ses droits et de réparer son
préjudice en faisant justice lui - même.
Cependant, ce droit n'était aucunement absolu puisque
l'Etat de la victime devrait délivrer à celle-ci des lettres des
représailles l'autorisant à agir, s'assurant ainsi de la
réalité et l'illégalité du dommage, de
l'épuisement de voies de recours interne ou encore de caractère
proportionnel entre dommages et représailles. Avec le
développement et l'affermissement des Etats au détriment des
souverains, le système de la lettre représailles disparait
progressivement.
En effet, avec l'affirmation de la souveraineté des
Etats sur les hommes, les biens territoires, au droit subjectif de l'individu
succède un droit subjectif de l'Etat. Au système des lettres des
représailles succède celui de la protection diplomatique un droit
propre de l'Etat3(*).
La formation des règles classiques relatives à
la protection diplomatique est donc relativement récente. Outre le
premier débat doctrinal né à la fin du 18eme
siècle, elle provient pour l'essentiel de la pratique ainsi que
jurisprudence internationale des 19eme et 20eme
siècles. La protection diplomatique a longtemps été
perçue comme l'expression de la supériorité des Etats les
plus puissants sur des nations faibles, tant politiquement
qu'économiquement, et de ce fait a souvent été l'objet de
vives critiques.
Cependant, la société internationale ne peut
rester figée dans des principes, fussent-ils universels et ancestraux,
hérités des siècles passés. En faisant de la
protection diplomatique un droit coutumier, legs des théories de Vattel,
les Etats risquent de verser dans une nostalgie des doctrines classiques, mais
surtout dans un immobilisme dangereux4(*).
Pour palier ce risque, l'Organisation des Nations Unies, par
le biais de la Commission du Droit International, s'ingénie à
entreprendre la codification des grands principes coutumiers issus du droit
international.
Depuis 1996, la Commission du Droit International
s'intéresse à la thématique de la protection diplomatique.
Dans le même état d'esprit que celui relatif aux règles en
matière de responsabilité internationale des Etats, la
codification des règles coutumières de la protection diplomatique
est ainsi fréquemment inscrite à l'ordre du jour de la
Commission5(*).
1.
PROBLEMATIQUE
Aucun pays au monde ne peut vivre en autarcie, mais les plus
puissants ont besoin des moins puissants pour devenir encore puissants. Au fil
des siècles, l'homme a trouvé divers moyens de vivre en paix et
de coopérer avec son prochain. Ils ont créé les familles,
les communautés et enfin les nations.
L'histoire de l'humanité est remplie d'alliances
politiques, économiques et des conflits entre pays poussés
à la conquête par la soif des richesses, de la puissance et
d'autres pays réduits à se défendre contre les agressions.
En 1945, l'apparition de la Charte proclamée par les
peuples des Nations Unies, annonce leur volonté de vivre ensemble en
s'assignant des buts dont deux entre eux sont :
« Développer entre les nations des relations
amicales fondées sur le rappel du principe de l'égalité
des droits des peuples et de leurs droits à disposer d'eux - mêmes
et prendre toutes les autres mesures propres à consolider la paix du
monde6(*) ».
« Réaliser la coopération
internationale sur tous les sujets, où elle peut être utile et
n'encourageant le respect des droits de l'homme7(*) ».
Mais pour édifier un tel monde, il faut compter sur le
talent, la volonté et la capacité de changer le monde, de
pensée et d'action traditionnelle et surtout le désir d'oeuvrer
pour le bien de la collectivité.
C'est une tâche ardue et complexe, mais non impossible.
Ainsi, il a été jugé opportun dans certains domaines, la
présence sur le sol des Etats membres d'une coopération
(alliance) des représentants des pays avec les quels ils entretiennent
des relations afin de pérenniser et de renforcer cette
coopération. Lesquels représentants devraient toujours dans le
cadre de cette coopération bénéficier d'un traitement qui
a fait l'objet de toute une convention dont la foi s'est reposée sur les
pensées ci - après :
«Persuadés qu'une convention internationale sur
les relations internationales, privilèges et immunités
diplomatiques contribueraient à favoriser les relations d'amitié
entre les pays, quelle que soit la diversité de leurs régimes
constitutionnels et sociaux8(*) ».
« Convaincu que le but des dits privilèges et
immunités est non pas d'avantager des individus mais d'assurer
l'accomplissement efficace des fonctions des missions diplomatiques en tant que
représentants des Etats9(*) » .
Par ailleurs, la question des immunités relativement
aux activités du chef de l'Etat a captivé la doctrine, si bien
que les privilèges et les immunités des personnels diplomatiques
et consulaires avaient fait l'objet des conventions internationales en 1961 et
en 1963, entrée en vigueur depuis lors, en revanche le statut juridique
international des hauts représentants d'Etats, particulièrement
les chefs d'Etats, les chefs des gouvernements et les ministres des affaires
étrangères dans la pratique internationale alimentait encore la
controverse.
L'institut de droit international, à sa session de
Vancouver, en août 2001, ont récemment débattu du sujet.
Des hautes juridictions, comme la chambre des Lord s'agissant de l'ancien chef
De l'Etat du Chili, M.A Pinochet10(*) ou la Cour de Cassation française, ont rendu
des décisions judiciaires en la matière.
Il a fallu attendre l'affaire du mandat du 11 avril 2000 qui a
opposé la République Démocratique du Congo, au Royaume de
Belgique, pour que la condition juridique internationale du ministre des
affaires étrangères soit nettement circonscrite en droit
international par la Cour International de Justice (CIJ). L'article 29 de la
Convention de Vienne sur la relation diplomatique du 18 avril 1961,
entrée en vigueur le 24 avril 1964 oblige d'empêcher toute forme
d'atteinte à la personne, à la liberté et à la
dignité des organes de relations extérieures qui ne peuvent
« être soumis à aucune forme d'arrestation ou de
détention ».
Cependant, l'on a vu la Belgique bien qu'ayant ratifiée
depuis le 02 mai 1968 la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques,
lancer un mandat d'arrêt international contre le ministre des affaires
étrangères de la République Démocratique du Congo,
en la personne de Monsieur Yerodia Abdoulaye Ndombasi le 11 avril 2000.
Qu'est - il en réalité de cette
procédure, au regard de l'état actuel du droit
international ? Peut-elle se concevoir ?
Comment la Cour International de Justice, saisie par la
République Démocratique du Congo a - t - elle résolue
l'affaire ?
Toutes ces questions et tant d'autres feront l'objet de ce
travail dont l'intérêt est d'une manifeste évident.
2. INTERET DU
SUJET
La tendance actuelle au plan international s'inscrit de plus
en plus en faveur de la responsabilité pénale, au mépris
de toute immunité, dans le cas de violation majeure des droits de
l'homme. Et pourtant la notion d'immunisation n'est qu'une conséquence
logique de l'indépendance de l'Etat sur le plan international, lequel
« ne peut en aucune manière être soumis, sans son
consentement, à la compétence d'un tribunal
étranger11(*) ».
La compréhension de la portée réelle de
cette protection, au regard de la tendance internationale, présente donc
l'intérêt évident de permettre aux juristes, techniciens de
droit, de mettre en place des mécanismes permettant d'assurer aussi bien
la paix et la coopération inter - étatique que la non
impunité et l'imputabilité des actes attentatoires aux droits de
l'homme.
Cette exigence est d'autant plus importante qu'il faudrait
à tout prix éviter que les principes de droit international en ce
domaine crucial de la protection diplomatique soient sacrifiés, au nom
du respect des droits de l'homme, sur l'autel des nécessités
politiques. Ainsi, l'étude entreprise, en analysant un cas concret,
apportera un éclairage particulier sur ce sujet d'actualité.
3. DELIMITATION DU
SUJET
L'étude entreprise se bornera à analyser les
instruments juridiques internationaux assurant la protection des organes
étatiques des relations extérieures que sont les chefs d'Etats et
autres ministres en exercice, spécialement la Convention de Vienne sur
les relations diplomatiques du 18 avril 1961 entrée en vigueur le 24
avril 1964.
S'agissant du cas du ministre des affaires
étrangères de la République Démocratique du Congo,
elle s'efforcera de dégager les implications juridiques que peuvent
avoir sur la protection internationale des organes gouvernementaux, la
résolution de cette affaire par la Cour International de Justice dans
son arrêt du 14 février 2002. Aussi, la bonne conduite d'une telle
étude nécessite le recours à une méthode telle que
nous montre le point ci - dessous.
4. METHODOLOGIE DU
TRAVAIL
La méthode suivie dans ce travail est la
méthode matérialisme dialectique historique et la méthode
exégétique qui sont des méthodes susceptibles de permettre
d'analyser complètement le thème.
En effet, la dialectique n'étant autre chose que la
science des lois générales du mouvement et du
développement de la nature, de la société et des
pensées. Et la méthode exégétique consiste à
connaitre la volonté du législateur en la matière, le
recours à elle dans le cadre de ce travail permet une perpétuelle
remise en question des acquis afin de tendre encore et toujours vers le
meilleur.
5. PLAN
SOMMAIRE
Le présent travail est subdivisé en trois
chapitres. Le chapitre premier est consacré aux aspects
théoriques sur la protection diplomatique encore en ce qui concerne
notamment les origines et les fondements ainsi que les organes
bénéficiaires de cette protection diplomatique, le second
chapitre s'appesantira sur la protection diplomatique des chefs d'Etats et des
ministres en exercices.
La bonne compréhension des notions exposées dans
le chapitre deux permettra d'analyser le troisième chapitre, de la
protection diplomatique dont bénéficie le ministre des affaires
étrangères de la République Démocratique du Congo
à la suite du mandat d'arrêt international émis à
son encontre par le juge d'instruction belge Damien Vandermeersch en date du 11
avril 2000. La conclusion qui terminera cette étude va critiquer
certaines procédures et suggérera la prise en compte
définitive du caractère sacré des principes qui sont
renforcés dans cette affaire.
CHAPITRE 1. ASPECTS
THEORIQUES SUR LA PROTECTION DIPLOMATIQUE
La protection diplomatique prête souvent la confusion.
En effet, elle est utilisée dans les cas de / ou :
- La mise en oeuvre de la responsabilité
internationale d'un Etat dont l'acte ou l'omission a causé un dommage
quelconque à un sujet de droit interne d'un autre Etat. Dans cette
hypothèse, cet Etat endosse la réclamation de son ressortissant
en prenant fait et cause pour lui ;
- Un gouvernement qui, par ses agents diplomatique ou,
éventuellement par voie judiciaire international, s'efforce d'obtenir,
à l'égard de ses ressortissants, le respect du droit
international par un autre Etat, la réparation des dommages
causés en violation de ce droit, ou, éventuellement, un certain
avantage à leur profit12(*) ;
- Démarches par lesquels un Etat intervient
auprès d'un autre Etat, sur le territoire du quel se trouvent ses
nationaux pour faire respecter à leur égard leur traitement
dû par le droit international ;
- Un Etat décide de prendre à son compte la
réclamation d'un de se nationaux contre un autre Etat et de porter le
différent sur le plan international et plus spécialement devant
une juridiction internationale13(*) ;
- L'aide et assistance qu'apportent les agents diplomatiques
et consulaires à leurs nationaux dans l'exercice de leurs droits ou de
leurs activités légales à l'étranger, ainsi que les
démarches des dommages et intérêts que l'Etat protecteur
réclame à l'Etat qui aurait commis un manquement aux
règles de droit international préjudiciable à un ou des
nationaux de l'Etat demandeur14(*) ;
- La protection que les diplomates dans l'exercice de leurs
fonctions apportent ponctuellement à leurs compatriotes vivant dans
l'Etat accréditaire15(*) ;
- La protection par l'instrument international des diplomates
eux mêmes, auxquels on reconnait des garanties exceptionnelles
permettant ou facilitant leur mission, dans ce cas, l'expression protection
diplomatique se réfère aux privilèges et
immunités diplomatiques16(*).
C'est dans cette dernière acception que sera
utilisée tout au long de ce travail, l'expression protection
diplomatique. Il sera utile d'en étudier les origines et les fondements,
avant de donner les justifications avancées pour dresser cette liste.
Section 1 : Origine,
fondement et contenu de la protection diplomatique des organes des relations
extérieures.
Il sera question d'étudier l'origine et le fondement
de cette protection internationale (§1), le contenu qui s'attache à
cette notion (§2).
§I. Origine et
fondement
1. Origine
En tant qu'entité souveraine et indépendante,
l'Etat doit être considéré comme l'acteur premier des
relations internationales, leur élément clef, indispensable voir
même fédérateur. A ce titre, il est titulaire d'un nombre
non négligeable des droits et obligations internationales, qui peuvent
s'exercer aussi bien à l'égard des Etats eux - mêmes,
qu'à l'égard d'autres entités plus au moins souveraines
telles les organisations internationales et bien évidemment à
l'égard des individus. De ce fait, ils sont majoritairement
considérés comme les sujets primaires de cet ordre juridique
international.
« Après l'apparition du
phénomène étatique, la pratique révèle que
le critère le plus sûr de la souveraineté d'un Etat est le
lien qu'il entretient, par l'intermédiaire de ses propres agents et sur
un pied d'égalité, des relations diplomatiques et consulaire avec
d'autres Etats souverains17(*) ».
Ainsi, assurer une protection juridique à ces agents,
les règles définissant cette protection comme d'ailleurs toutes
les règles applicables aux relations diplomatiques, étaient pour
l'essentiel coutumières.
C'est ne qu'après une lente évolution dont les
étapes principales sont le règlement de Vienne de 1815
complété par le Protocole d'Aix-le Chapelle du 21 novembre 1818
et la convention sur les agents diplomatiques adoptée à la
Havane crée en 1928 par la 6e conférence des Etats
américains, qu'on aboutira à l'adoption à
l'unanimité de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques.
Cette convention consacre des nombreux articles à la définition
de la protection dont doivent bénéficier les agents
diplomatiques.
C'est dans la coutume internationale que l'on doit rechercher
l'origine des règles définissant la protection internationale des
organes des relations extérieurs des Etats, avant de le rechercher dans
la Convention de Vienne de 1961. Mais, quelles sont les justifications qui ont
été avancées à l'appui de la reconnaissance de
cette protection internationale?
2. Fondement
La protection internationale de relations extérieures
se fonde, en ce qui concerne les organes gouvernementaux sur deux
théories à savoir :
- La théorie du caractère
représentatif ;
- Et la théorie de l'intérêt de la
fonction.
1.1. Théorie du
caractère représentatif
L'agent diplomatique représente l'Etat et son
gouvernement. Les Etats ayant le devoir de respecter l'indépendance et
la souveraineté des autres Etats, conséquence du principe de
l'égalité souveraine des Etats et condition de la coexistence
pacifique, ils ont à ce titre, l'obligation de respecter la
dignité et l'indépendance des organes chargés de leur
représentation. Cette théorie implicite chez Grotius18(*) a été
formulée par Montesquieu19(*).
Le diplomate est la parole du Prince qui l'envoi et cette
parole doit être libre, aucun obstacle ne peut l'empêcher
d'agir20(*). Cette
théorie, si elle peut expliquer certaines caractéristiques entre
le cérémonial, n'éclaire que certains aspects du
régime des privilèges et immunités. Elle n'explique que
les seuls privilèges de la mission et de son chef qui, jadis avait seuls
le caractère représentatif.
Aujourd'hui, un chef de mission diplomatique ne
représente plus un souverain mais l'Etat tout entier. C'est par rapport
à cette théorie que se justifie la protection diplomatique de
tous les organes des relations extérieures de l'Etat et
précisément le chef de l'Etat et le ministre des affaires
étrangères, représentant de l'Etat.
2. Théorie de
l'intérêt de la fonction
La seconde théorie, limitant quelque peut la
portée de la première, se fonde sur l'idée que la
protection diplomatique ne se justifie qu'autour des l'exercice
indépendant de la fonction diplomatique. C'est ainsi que le
préambule de la Convention de Vienne du 18 avril 1961, souligne que les
parties signataires sont « convaincues que le but des dites
privilèges et immunités ne sont pas d'avantage des individus mais
d'assurer l'accomplissement efficace des fonctions des agents diplomatiques en
tant que représentant des Etats21(*) ».
C'est conformément à cette seconde
théorie que les actes et les propos des agents diplomatiques, dans le
cadre de leurs fonctions sont couverts par leur immunité, dont les
éléments constitutifs sont étudiés dans le
paragraphe deux.
§2. Contenu de la
protection diplomatique
La Convention de Vienne du 18 avril 1961,
énumère plusieurs privilèges et immunité dont
jouissent les organes des relations diplomatiques :
« l'inviolabilité personnelle de l'agent diplomatique,
l'immunité juridictionnelle, les exemptions fiscales et financiers,
douanières22(*) » pour les agents diplomatiques en mission
permanente dans d'autres Etats ainsi que des privilèges et
immunité pour les autres membres de la mission et les membres des
familles des diplomates.
Nous nous appesantirons sur l'inviolabilité et
immunité juridictionnelle dont jouissent les agents diplomatiques.
6. L'inviolabilité
personnelle
En vue de garantir l'exercice libre et indépendant aux
représentants de l'Etat en fonction, l'article 29 de la convention de
Vienne du 18 avril 1961 stipule que « la personne de l'agent
diplomatique est inviolable. Il ne peut être soumis à aucune forme
d'arrestation ou de détention. L'Etat accréditeur le traite avec
le respect qui lui est dû et prend toutes les mesures appropriées
pour empêcher toutes atteintes à sa personne, à sa
liberté, à sa dignité ».
Cet article dont l'énoncé est claire permet de
noter que l'inviolabilité personnelle de l'agent diplomatique le met
à l'abri de :
· Toute forme de détention ou d'arrestation :
L'arrestation d'un diplomate, pour quelque motif que ce soit est un acte
d'autorité qui contrevient gravement au principe de
l'égalité souveraine des Etats. Même lorsque celui - ci est
coupable des crimes graves, son arrestation ou sa détention ne peut
intervenir tant qu'il est couvert des immunités.
C'est là une restriction librement acceptée,
« à l'exercice de ses compétences consenties par l'Etat
(...) pour permettre aux agents diplomatiques d'exercer librement leurs
fonctions23(*) ».
· Toute atteinte à sa personne, à sa
liberté et sa dignité : Dans le même registre, les
agents diplomatiques sont mis à l'abri de toute procédure tendant
à porter atteinte à leur liberté, personne, ou
dignité, par exemple les enquêtes, perquisitions, mandat
d'arrêt, etc....
Cette restriction est imposée à tout Etat
étranger par rapport à l'agent diplomatique c'est - à -
dire « outre la personne étatique elle - même, toute
autorité devrait être considérée comme un
démembrement de l'Etat, délégataire ou dépositaire
des fonctions qu'il entend exercer24(*) » comme la fonction juridictionnelle.
Jean Salomon, souligne que « l'Etat est responsable
des acces de ses organes : policiers, gendarmes, militaires,
fonctionnaires25(*), etc.... » Et compte de nombreux
exemples ou la règles de l'inviolabilité fait obstacle à
des nombreux actes des organes étatiques.
Ainsi, du fait de l'inviolabilité de leur personne,
les agents des relations extérieures des Etats ne peuvent être en
aucune façon soumis à des actes tendant à restreindre ou
annihiler leur liberté et portant atteinte à leur personne et
à leur dignité. Tel serait le cas par exemple en cas de lancement
à leur encontre d'un mandat d'arrêt.
· Immunité juridictionnelle : D'après
Pierre Marie Dupuy, l'immunité de juridiction est une
« exception de procédure opposée à la
compétence territoriale d'après laquelle un Etat ou une
organisation internationale intergouvernementale ne peuvent être devant
les tribunaux internes de l'Etat territorial26(*).
De ce fait, parce que représentant l'Etat, les
agents diplomatiques bénéficient d'une immunité
pénale totale. « Cette immunité, précise Nguyen,
est absolue que l'agent diplomatique soit ou non dans l'exercice de ses
fonctions27(*) ».
La Convention de Vienne sur les relations diplomatiques du 18
avril 1961, son préambule et l'article 32, la Convention de Vienne sur
les relations consulaires du 24 avril 1963, la Convention de New York sur la
mission spéciale du 8 décembre 1969 §2 de l'article 21, les
règles de droit international coutumier, nature des fonctions
exercées par un ministre des affaires étrangères,
fonctions d'un ministre des affaires étrangères exigeant que,
pendant toute la durée de sa charge , celui-ci bénéficie
à l'étranger d'une immunité de juridiction pénale
et d'une inviolabilité totale. Absence de distinction dans ce contexte
entre les actes accomplis à titre « officiel » et
ceux qui l'auraient été à titre
« privé ».
Ils jouissent également d'une immunité civile et
administrative, à moins qu'il s'agisse d'affaires n'ayant pas trait
à l'exercice de leurs fonctions officielles.
Ainsi, les agents diplomatiques sont mis à l'abri de
toute procédure juridictionnelle pour violation d'une loi civile ou
pénale des Etas étrangers. Ils ne sont justiciables que de leurs
propres Etats, du fait toujours du principe de l'égalité
souveraine des Etats et ce, sauf renonciation expresse à
l'immunité28(*).
Cependant, il convient de s'interroger sur l'étendu de
l'expression « agents diplomatiques », en d'autre termes,
il convient de limiter clairement au regard de la Convention de Vienne du 18
avril 1961, les organes bénéficiaires de la protection
diplomatique (Section 2).
Section 2. Les organes
bénéficiaires de la protection diplomatique
L'expression agent diplomatique utilisée par la
Convention de Vienne du 18 avril 1961 est restrictive en ce sens qu'elle laisse
penser que cette protection diplomatique n'est stipulée qu'au profit des
Ambassadeurs accrédités auprès des différents
Etats.
§1. Les
immunités propres aux organes ou autres agents des sujets du droit
international
Point n'est besoin de souligner que tous les sujets de l'ordre
juridique international sont, à ce jour, des êtres abstraits, ce
qui ne préjuge toute fois pas de la personnification qui est
prêtée, à tort ou à raison, à des personnes
physiques lorsqu'il leur est accordée, par le traité un droit
d'accès devant une autorité juridictionnelle international. Tous
réels qu'ils soient, ces sujets abstraits ne peuvent dès lors
concrètement agir qu'à l'intermédiaire des personnes
physiques dont les actes sont imputés, aux conditions que fixe le droit,
au sujet dont ces personnes exercent les libertés, pouvoirs et autres
responsabilités. Il n'y a rien de très particuliers au droit
international, c'est le prix à payer dans tout ordre juridique pour
s'offrir des personnes morales, même s'il est vrai que le rôle de
celle - ci dans le droit national est moins essentiel.
On conçoit en pareille perspective que les
privilèges et immunités soient le cas échéant,
accordés aux organes des sujets du droit international comme ils le sont
à ceux - ci. Quant bien même ces derniers ne
bénéficieraient pas d'un traitement privilégier, ils
pourraient d'ailleurs aisément se comprendre que des immunités
soient néanmoins accordées à leurs organes en raison du
rôle décisif qu'ils jouent dans la matérialisation d'une
capacité juridique qui est condamnée à demeurer virtuelle
si elle ne trouve pas des agents pour se réaliser. Les pratiques
internationales bénéficient très largement de
privilège et immunité, de nature diverse. Il s'en faut de
beaucoup toutefois que leur régime soit parfaitement homogène et
leur portée dépourvue d'ambigüités, ce qui explique
qu'il faille se soucier des problèmes que suscitent les organes avant de
s'attacher à ceux qui accompagnent les immunités29(*).
1. Problème des organes
Il y a lieu d'entendre par « organes »
toutes les personnes (agents, fonctionnaires etc. ...), dont les actes engagent
l'Etat en droit international, ou, par extension, tout autre sujet du droit
international, sans donner à ce terme la portée restrictive qui
est la sienne dans les droits (administratifs) nationaux. Ces organes, ainsi
compris, sont très diversifiés. Cette diversité se
comprend sans peine, elle reflète tout à la fois la
multiplicité des sujets du droit international et la liberté
d'organisation interne dont ceux-ci jouissent normalement, à tout le
moins lorsqu'ils ne doivent pas leur existence et leur personnification
à un acte conventionnel. Il est vrai que cette multiplicité est
réduite et que la liberté évoquée n'est pas
totale ; il n'empêche que, l'une et l'autre se cumulant, la
variété organique peut théoriquement être
considérable. Il en résulte divers problèmes, qu'il
convient de mentionner sans prétendre les résoudre en tout
points.
Quels sujets ?
La première question sur laquelle il convient de
s'entendre concerne les sujets dont les organes sont ou seraient en droit de
bénéficier d'un traitement privilégie. Les Etats, et les
organisations internationales30(*) en relevant manifestement. Nul ne peut contester que
des privilèges et immunités soient reconnus, dans une mesure qui
n'est pas identique, à certains de leurs organes. Il ne peut être
exclu qu'ils le soient aussi à ceux d'autres sujets du droit
international.
§2. Les relations
diplomatiques et consulaires
A vrai dire, la qualité des relations diplomatiques est
relative. Elle est fonction de facteurs historiques, culturels,
idéologiques, politiques, économiques, psychologiques. Il est
certain que le passé colonial a son poids dans les relations entre une
ancienne colonie et une ancienne puissance coloniale. Comme il est
évident qu'entre pays arabes, la langue arabe et la religion musulmane
entre autres, influent sur la qualité de leurs relations mutuelles.
L'élément économique joue de manière notable dans
les relations entre le Japon et les Etats - Unis, par exemple, alors que le
facteur psychologique pèse dans les relations entre la Chine et les
Etats - Unis. Du même moment, l'antagonisme idéologique empoisonne
les relations entre les Etats - Unis et le Cuba ou entre le Royaume - Uni et la
Libye31(*).
Les relations diplomatiques sont fort anciennes mais ce n'est
qu'à partir de 1648 avec les traités de Westphalie qu'est apparue
la diplomatie permanente. Elles ont d'abord été
coutumières avant d'être codifiées. La première
codification intervint au Congrès de Vienne en 1815 par l'adoption du
règlement de Vienne sur les agents diplomatiques. Ce dernier sera
complété le 12 novembre 1818 par le protocole d'Aix - la -
Chapelle.
Il a fallu attendre les incidents de la guerre froide pour
voir enfin l'Assemblée générale des Nations Unies
s'intéresser à ce sujet. Par le vote de la résolution 685
du 5 décembre 1952, l'Assemblée générale a
demandé à la Commission du Droit International d'étudier
en priorité la codification des relations diplomatiques. Une autre
résolution votée par la suite en son sein décida de la
convocation d'une conférence de codification qui devait se réunir
à Vienne. Ainsi, la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques
fut- elle adoptée le 18 avril 1961 et entrée en vigueur le 24
avril 1964.
Quant aux relations consulaires, leur réglementation
est issue des coutumes que des décisions de juridictions nationales. La
convention sur les relations consulaires à été
adoptée à Vienne le 24 avril 1963 lors d'une conférence de
codification. Elle est entrée en vigueur en mars 1967.
§ 3. Les relations
diplomatiques
1. Les
relations diplomatiques entre Etats
Il est de bonne méthode de
présenter en premier lieu les organes de nature diverse qui
interviennent dans la définition et la mise en oeuvre des relations
diplomatiques. Comment elles s'établissent et prennent fin ?
Là, se trouvent des préoccupations qui retiendront notre
attention en second lieu.
2. Les organes chargés
des relations diplomatiques
Point n'est besoin de revenir sur des banalités.
Personne morale, l'Etat agit à travers notamment, des organes politiques
et des organes administratifs.
A. Les organes politiques
Il va sans dire que les relations entre entités
politiques par excellence que forment les Etats empruntent en ordre prioritaire
les canaux politiques. C'est à ce niveau que se lèvent les
options fondamentales qui gouvernent les relations entre membre de la
« communauté internationale32(*)». Ordinairement, l'organe
exécutif joue un rôle moteur de la politique extérieure de
l'Etat. Encore que l'organe législatif dispose de moyen, relatifs d'un
régime à l'autre, de contribuer, sinon à
l'énoncé de grandes orientations de la politique
étrangère, tout au moins, de contrôler a posteriori la
conduite de celle - ci.
Habituellement, le Chef de l'Etat joue un rôle essentiel
dans les relations internationales. Toutefois, une évolution
récente s'en produite depuis le déclin des régimes
monarchiques. Dans les Etats où le Chef de l'Etat ne dispose plus
que des fonctions symboliques, c'est le Chef du gouvernement qui tend
à assumer la première place dans les relations
extérieures. Comme on peut s'en apercevoir, il s'agit là des
situations exceptionnelles par rapport à la pratique
générale des Etats.
Au sein du gouvernement, le ministre des affaires
étrangères, par définition, a un rôle
considérable. Il peut cependant s'ajuster au rôle du Chef de
l'Etat, et éventuellement, du Chef du gouvernement. D'autre part, le
développement de la coopération internationale dans des domaines
de plus en plus spécialisés permet ainsi aux autres membres du
gouvernement d'intervenir dans des relations internationales. Enfin, selon la
disposition d'ordre interne (constitutionnelle) et les traditions nationales,
les Assemblées parlementaires peuvent jouer un rôle dans la
politique étrangère de l'Etat. Le prototype est
représenté par les congres des Etats - Unis
d'Amérique33(*).
§ 4.
Enumération
L'accroissement de la technique des rapports
intergouvernementaux font qu'aujourd'hui plusieurs autorités
évoluent sur la scène internationale en prétendant toutes
au statut d'agent diplomatique. C'est ainsi que cette qualité est
reconnue aux personnes telles que; le Chef de l'Etat, le Chef du gouvernement
et le ministre des affaires étrangères.
1. Le Chef de l'Etat
Le Chef de l'Etat est le
représentant suprême de l'Etat. A ce titre, il accrédite
les agents diplomatiques nationaux et les agents diplomatiques étrangers
sont accrédités auprès de lui. L'organe éminent de
l'Etat a droit à des honneurs spéciaux et, quand il est à
l'étranger, a un régime d'immunités totales
étendues qui lui assure une protection appropriée.
Le Chef de l'Etat jouit d'une immunité de juridiction
absolue tant civile que pénale pour tout acte accompli dans l'exercice
de sa fonction ou non. Il bénéficie de l'inviolabilité
sanctionnée par les dispositions pénales34(*).
Le Chef de l'Etat engage l'Etat par la ratification des
traités solennels au delà des nombreuses fonctions symboliques,
il dirige la politique extérieure de la Nation. Il exerce un rôle
important dans la conduite de la politique étrangère par ses
initiatives, ses décisions et les grandes orientations qu'il
énonce. Son influence est considérable dans des nombreux
pays : Etats - Unis d'Amérique, France, Russie, République
Démocratique du Congo, Libye, Cuba, Coré du Nord, Egypte,
Sénégal, Zimbabwe.
2. Le Chef du gouvernement
Il s'agit à ce niveau de considérer le Chef du
gouvernement qui n'est pas également Chef de l'Etat. Le Chef du
gouvernement à une place tenue sur le plan juridique dans les relations
internationales, sauf dans les pays ou le Chef de l'Etat ne dispose plus que
des fonctions symboliques. On laisse, entendre qu'il n'inaugure plus que les
chrysanthèmes ou qu'il règne sans gouverner. C'est là un
formalisme dans les monarchies constitutionnelles. Il peut dissimuler la
réalité. Dans ces conditions, Le Chef du gouvernement tend
à assumer la responsabilité des relations extérieures.
Toutefois, cette place dépendra non seulement de sa personnalité
propre mais encore des compromis entre les partis au pouvoir dans les pays
généralement administrés par des gouvernements de
coalition. D'autre part, la pratique des conférences dits
« sommet » qui conduit les principaux responsables de la
politique étrangère de certaines puissances ou d'un groupe
d'Etats donné à se réunir épisodiquement ou
régulièrement, confère à certains premiers
ministres et à des ministres des affaires étrangères le
premier rôle dans la conduite des relations extérieures.
3. Le Ministre des affaires étrangères
Le membre du gouvernement qui dirige les ministères
ayant en charge les affaires étrangères est aussi
qualifié, communément de Chef de la diplomatie. On peut dire par
là qu'il a la responsabilité principale de mettre en oeuvre la
politique étrangère du pays. Il l'accomplit non seulement vis -
à - vis de ses services, l'un central, les autres
extérieures ; mais encore la coordination est l'harmonisation de
l'ensemble des relations extérieures du gouvernement
révèle notamment de sa compétence. Son rôle est plus
au moins grand suivant la fonction effectivement assumée par le Chef de
l'Etat et, éventuellement, le Chef du gouvernement.
C'est le membre du gouvernement chargé de
l'élaboration et de la mise en oeuvre de la politique
étrangère. Il est clair que cette politique est
arrêtée par le gouvernement après sa préparation par
le ministre. Elle n'est appliquée par ce dernier et tout le personnel
à lui subordonner, qu'à l'issue de son adoption par l'organe
exécutif de manière générale. Le ministre joue un
rôle majeur grâce aux réseaux d'informations dont il
bénéficie, en principe, de manière prioritaire et / ou
exclusive. D'autre part, il dispose de moyens humaines et de moyens financiers
qui autorisent la mise en oeuvre d'une orientation de politique
étrangère et l'adapter au jour le jour.
D'autre part encore, il centralise et coordonne toutes les
actions extérieures qui peuvent être exercées par d'autres
ministres, certifie le caractère représentatif de tous les agents
de l'Etat. Il assure la coordination des actions extérieures des
ministères et services de l'Etat. Il peut engager l'Etat par sa
signature. Bien plus, le ministre des affaires étrangères engage
parfaitement l'Etat par ses déclarations, même orales35(*).
En outre, il convient de signaler une pratique
générale à travers le monde selon laquelle les ministres
des affaires étrangères, représentant des Etats, se
rencontrent en réunions, tantôt de manière inorganique pour
des questions d'une grande importance politique, tantôt dans le cadre des
réunions périodiques ou d'organes d'une organisation telle que
prévu par le statut de cette dernière.
Il importe de noter que les immunités pénales
dont jouit le représentant éminent de l'Etat en fonction ont
été récemment précisées par la
jurisprudence36(*), suivie
de la doctrine37(*).
4. Les Ambassadeurs, Consuls, Membres des missions
diplomatiques permanentes envoyés à l'étranger
Les Ambassadeurs, Consuls, Membres des missions diplomatiques
permanentes, représentent leur Etat auprès de l'Etat
accréditaire, ils protègent les intérêts de leurs
Etats et de ses ressortissants, informent le gouvernement de la vie politique,
économique et sociale de l'Etat résidence, font connaitre et
apprécier leur Etat et ses réalisations en assurant la promotion
des ses intérêts économiques et négocient, enfin,
avec l'Etat de résidence. Leur importance dans les relations
bilatérales entre Etats est importante.
Les privilèges et immunités diplomatiques sont
des facilités accordées par l'Etat accréditaire au
personnel diplomatique et à la mission diplomatique de l'Etat
accréditant dans le cadre de leur mission diplomatique.
Pour la mission diplomatique, Il lui est
reconnu les privilèges et immunités suivant :
· La liberté des communications officielles
vécue concrètement par l'utilisation de la valise diplomatique
qui bénéficie du secret de son contenu et de son
inviolabilité. L'Etat accréditaire ne peut s'autoriser à
ouvrir ni retenir la valise diplomatique de la mission de l'Etat
accréditant, quelque soit le motif. Toutefois, cette valise ne doit
contenir que des documents officiels ou des objets à usage officiel,
reconnaissables avec leurs marques extérieures sur la valise.
· L'inviolabilité des locaux et des biens de la
mission diplomatique de l'Etat accréditaire qui doit
bénéficier des mesures de protection de l'Etat
accréditaire. Les locaux de la mission, ses documents et archives ne
peuvent faire l'objet ni de perquisition, ni même d'une
réquisition, contrôle et saisie sans autorisation du Chef de
mission diplomatique.
Pour le personnel diplomatique, Il lui est
reconnu les privilèges et immunités suivant :
· Les agents diplomatiques bénéficient de
l'inviolabilité personnelle. Ce principe oblige l'Etat
accréditaire d'assurer une protection complète aux personnels
diplomatiques de l'Etat accréditant. Ce personnel doit
bénéficier de la liberté de déplacement et de
circulation sur l'ensemble du territoire sauf dans les zones de tensions ou de
guerre ou la sécurité ne peut être garantie.
Les personnes diplomatiques bénéficient aussi
de l'immunité juridictionnelle, c'est - à - dire qu'il ne peut
être jugé par les juridictions de l'Etat accréditaire
excepté le cas où il exerce une activité libérale
ou commerciale en dehors de ses fonctions officielles. Il
bénéficie également des exemptions fiscales et franchises
douanières. Leurs membres de famille bénéficient de
mêmes privilèges et immunités.
Pour les relations consulaires, nous dirons tout d'abord
qu'un poste de Consulaire est une représentation administrative
chargée de la protection des intérêts de l'Etat d'envoi et
de ses ressortissants, de favoriser les relations commerciales,
économiques, culturelles et scientifiques, d'exercer les fonctions vis
- à - vis des nationaux liées à l'Etat civil, l'assistance
judiciaire, la délivrance des passeports, d'accorder des visa aux
étrangers qui désirent se rendre dans le pays d'envoie, de
surveiller et prêter assistance aux navires, etc....
Les relations consulaires ne doivent pas connaitre d'entraves
car elles contribuent au développement des relations amicales entre les
nations ; elles assurent protection et assistance aux étrangers
qui résident sur le territoire d'un autre Etat. De ce fait, le consulat
et les agents consulaires jouissent des privilèges et immunités
conformément au droit international, mais à un degré
moindre que les membres des missions diplomatiques.
5. Les fonctionnaires en missions ou diplomates ad
hoc
Ils sont désignés pour remplir
auprès d'un ou plusieurs Etats ou organisations internationales et avec
leur accord, des missions d'une portée limitée dans le temps et
pour leur objet, et dans toutes circonstances dont l'importance justifie
l'intervention des responsables de haut niveau ou dont le contenu exige celle
de personnels spécialisés possédant des compétences
spécifiques38(*).
Telle est le cas du Secrétaire Général des Nations Unies
et de ses nombreux représentants spéciaux, qui interviennent dans
les relations internationales dans le cadre des maintiens de la paix tendant au
règlement pacifique des différends, c'est aussi le cas des
envoyés spéciaux des Chefs d'Etats.
La mission spéciale est définit comme toute
« mission temporaire ayant un caractère représentatif
de l'Etat, envoyée par un Etat auprès d'autres Etats avec le
consentement de ce dernier pour traiter avec lui des questions
déterminées ou pour accomplir auprès de lui une
tâche déterminée39(*) ». Il précise que le statut de
ces diplomates ad hoc est très semblable à celui des
diplomates de carrière. Des immunités leurs sont reconnues dont
l'étendue varie selon la personnalité, le rang et la mission de
chacun ; et qui n'ont ; bien entendu qu'une durée
limitée ; puisse liée à l'accomplissement d'une
mission déterminée40(*).
6. Les experts
Ils sont souvent appelés par un Etat ou une
organisation internationale pour mettre à sa disposition leur
compétence technique. Ils sont inviolables et ne sauraient faire l'objet
d'arrestation et de détention puisqu'ils jouissent de l'immunité
de juridiction, étant limitée aux actes officiels41(*).
Sur quoi, se fonde la protection internationale de toutes les
autorités politiques. Elle se fonde essentiellement sur les deux
théories évoquées précédemment.
En effet, parce que ces autorités politiques
représentent l'Etat, entité souverain et indépendant
évoluant sur la scène internationale en pleine
égalité avec les autres Etats, ne peut en aucune manière
être soumis, sans son consentement, à la compétence,
juridictionnelle d'un autre Etat étranger que les autorités
énumérées, bénéficient d'une protection
internationale spéciale. C'est parce que la nature de leurs fonctions
exige une indépendance et une liberté totale que le droit
international leur assure une protection effective faite d'immunités et
des privilèges.
CHAPITRE 2. LA PROTECTION
DIPLOMATIQUE DES CHEFS D'ETAT ET MINISTRES EN DROIT INTERNATIONALE
Le Chef de l'Etat et les autres ministres en exercice
spécialement le ministre des affaires étrangères
représente l'Etat. Aussi, allons - nous approfondir l'étendue de
la protection diplomatique dont jouissent (section 1) avant d'étudier
les limites que peuvent connaitre cette protection en cas des violations par
eux des principes impératifs du droit international
désignés sous le vocable «jus cognes » (section
2).
Section 1.
L'étendue de la protection diplomatique de Chef de l'Etat et des autres
ministres en exercice
L'analyse de l'étendu de la protection diplomatique
dont bénéficient les organes extérieures fera une place
à part au Chef de l'Etat (§1), au premier ministre (§2) et aux
autres ministres en exercice (§3).
§ I. Le Chef de
l'Etat
Le Chef de l'Etat est l'organe des relations
extérieures principales de l'Etat car il est le premier
« représentant supérieur de l'Etat42(*)», selon l'expression de
Jean CHARPENTIER.
L'évolution contemporaine des relations internationales
a conduit à faire une place toujours grande aux Chefs d'Etats à
travers des contacts institutionnalisés comme les réunions
périodiques au sommet (G8, conseil de l'européen, U.A, sommet
France - Afrique, etc.), les contacts directs entre Chefs d'Etats en cas des
problèmes particuliers, on se rappellera le
« téléphone rouge » entre la Maison blanche
et le Kremlin et le rôle qu'il a pu jouer entre M.Kroutchev et Kennedy
lors de la crise de Cuba de 196243(*).
Bien plus, le rôle au premier plan joué par le
Chef de l'Etat dans les relations extérieures ne se trouve
renforcés par le fait que c'est lui qui « accrédite les
Ambassadeurs et envoyés extraordinaires auprès des puissances
étrangères », qui « reçoit les lettres
des créances des Ambassadeurs et des leurs envoyés
extraordinaires des puissances étrangères », tout en
jouant en grand dans l'engagement de l'Etat sur le plan international par la
ratification des traités.
C'est à ce titre qu'il a droit à des honneurs
spéciaux et quand il est à l'étranger, il a un
régime d'immunités complètes44(*), c'est - à - dire
l'inviolabilité de sa personne, à l'immunité de
juridiction pénal, civile, administrative d'exécution.
L'immunité de Chef d'Etat est un droit coutumier reconnu par le droit
des gens.
Bien que leurs immunités civiles et administratives
admettent quelques exceptions, dans le cas par exemple où l'affaire
porte sur les immeubles privés, ou il est lui - même demandeur,
leur « immunité pénale est sans exception; comment
pourrait on poursuivre et faire exécuter la condamnation d'un Chef
d'Etat sans soulever des difficultés qui courraient le risque de mener
directement à la guerre45(*)? ».
Bref, le Chef de l'Etat bénéficie à
l'étranger d'une protection absolue contre toute poursuite judiciaire
afin de pouvoir exercer leurs fonctions en toute liberté.
§ 2. Le Premier
ministre
En tant que Chef du gouvernement, le rôle du Premier
ministre dans la participation à la politique internationale de l'Etat
est en proportion inverse avec celui du Chef de l'Etat car dépendant de
la constitution de chaque pays.
En effet, dans le régime présidentiel où
le Chef de l'Etat dispose des pouvoirs réels, le premier ministre, s'il
existe, n'est qu'un coordonnateur de l'action gouvernementale effacé sur
la scène internationale. Par contre dans les régimes
parlementaires, nous voyons le Chef du gouvernement prendre une grande place
sur la scène internationale, le Chef de l'Etat n'y jouant qu'un
rôle honorifique.
C'est le cas en Allemagne, Belgique, Grande Bretagne
où c'est le premier ministre qui est habilité à engager
l'Etat et qui joue le principal rôle dans l'élaboration et la
conduite de la politique étrangère.
Ainsi donc, en tenant compte de la constitution du Chef de
l'Etat, on peut dire que la protection internationale du Chef du gouvernement
ressemble mutatis mutandis à celle du Chef de l'Etat, car autant que ce
dernier, il a droit à un régime d'immunité
complète.
§ 3. Le ministre en
exercice
Les autres ministres, membres du gouvernement participent
également à la définition et à l'application de la
politique étrangère et jouent de plus en plus un rôle
important dans les relations extérieures (1). Mais, il convient de noter
d'abord que c'est le ministre des affaires étrangères qui
coordonne cette politique étrangère (2).
1. Le ministre des affaires
étrangères
Le ministre des affaires étrangères est le
membre du gouvernement spécialisé dans l'élaboration et la
conduite de la politique étrangère de son pays. A l'origine, il
n'était qu'un simple porte-parole de son gouvernement. Par la suite, il
prend de plus en plus de l'importance dans les affaires de l'Etat. Et quand il
possède une personnalité marquante, il jouit d'une autonomie et
peut contribuer à déterminer la politique étrangère
du pays.
Devenu aujourd'hui un instrument privilégié des
r apports internationaux de l'Etat, le ministre des affaires
étrangères représente l'Etat, se déplace facilement
à l'étranger, participe à des nombreuses
conférences diplomatiques occasionnelles, à des conseils et
autres assemblées d'organisations internationales et mène pour
l'Etat des négociations diverses. C'est pourquoi, il doit avoir
l'autorité d'engager l'Etat par ses propos ou par sa signature.
L'article 41, alinéa 2 stipule :
« toutes les affaires officielles traitées avec l'Etat
accréditaire, confiées à la mission par l'Etat
accréditant, doivent être traité avec le ministre des
affaires étrangères de l'Etat accréditaire
convenu46(*) »,
marque de façon non équivoque la primauté du ministre des
affaires étrangères sur les autres organes gouvernementaux et
délègues des relations extérieures, car sous son
contrôle qu'est assurée la cohérence et la coordination de
politique extérieure de l'Etat.
NGUYEN souligne, « qu'il est le représentant
de l'Etat et exprime en son nom (CPJI, affaire du Groenland oriental, 1993,
série A/B no 53), le ministre bénéficie des
privilèges et immunités diplomatiques sur la base du droit
coutumier et de la courtoisie international47(*) ».
Mais également sur la base d'une interprétation
large de la Convention de Vienne de 1961 qui, en reconnaissant des
privilèges et immunités aux agents diplomatiques en mission
permanente comme les Ambassadeurs et consuls, devrait logiquement les
prévoir pour leur Chef, le ministre des affaires
étrangères.
Ainsi donc, autant que le Chef de l'Etat, le ministre des
affaires étrangères bénéficie des immunités
diplomatiques complètes lui assurant l'indépendance et la
liberté nécessaire à la bonne conduite de la politique
extérieure du pays
2. Les autres ministres
Aujourd'hui, du fait de la technicité toujours
croissante des problèmes internationaux, les autres ministres en charge
de domaines précis de l'action gouvernementale tant de plus en plus
à « entre en rapport direct avec leurs collègues
étrangers pour régler les problèmes techniques de leur
compétence48(*)». C'est dans ce cadre qu'il peut inscrire les
réunions périodiques des ministres européens, dans le
cadre de l'UE, en vue des négociations des décisions communes
relatives à la PAC (politique agricole commune), PEC (politique
étrangère commune), etc.
Lorsque NGUYEN insiste, des ministres techniques participent
à la vie politique internationale et pourraient concurrencer le ministre
des affaires étrangères, il est nécessaire
d'établir un organe ou une procédure de coordination sous le
contrôle des affaires étrangères49(*). Le statut des autres
ministres du gouvernement s'apparente dans une certaine mesure à celui
des fonctionnaires en missions car ils jouissent entant que
représentants de l'Etat des immunités réelles,
limitées pour la plupart à la durée de leur séjour
à l'étranger.
Quoiqu'il soit on doit noter que les organes gouvernementaux
des relations extérieures que sont le Chef de l'Etat, le premier
ministre, le ministre des affaires étrangères et les autres
ministres techniques bénéficient d'une protection diplomatique
total qui les placent pour l'intérêt de leurs fonction, à
l'abri de toute atteinte à leur personne, liberté ou
dignité, c'est -à - dire à l'abri de toute forme de
détention ou d'arrestation et qui soutirent à la
compétence notamment juridictionnelle des Etats étrangers. Mais,
ce régime protecteur connait quelques limitations. Tel que nous allons
nous en rendre compte dans la partie suivante.
Section 2. Les limites de
la protection diplomatique
Les agents diplomatiques jouissent, nous l'avons dit d'une
protection internationale faites d'immunités et des privilèges
divers. Mais comme toute règle, la protection diplomatique connait des
limitations dans le cas de violation de certaines normes impératives du
droit international.
Il convient donc d'analyser ces principes (§1) avant
d'étudier comment est mis en oeuvre sur le plan international la
sanction de la violation de ces principes (§2).
§ 1. Les principes de
« jus cogens »
Le jus cogens est défini par la Convention de Vienne
de 1969 dans son article 53 comme « une norme acceptée et
reconnue par la communauté internationale des Etats dans son ensemble en
tant que norme à laquelle aucune dérogation n'est permise et qui
ne peut être modifiée que par une nouvelle norme du droit
international général ayant le même
caractère50(*) ».
A travers cette définition la Convention de Vienne
introduit une hiérarchie des normes internationales. Des lors il
s'opère une distinction entre les normes internationales
impératives, sorte de super - normes, (jus cogens), c'est - à -
dire aux quelles il est impossible de déroger, et les autres normes
internationales qui demeurent cependant obligatoires.
La Convention de Vienne ajoute encore dans son article 64 que
« si une nouvelle norme impérative du droit international
général survient, tout traité existant qui est en conflit
avec cette norme devient nul et prend fin ».
La notion de jus cogens bien qu'existant déjà
dans les faits été reprise par la Commission de droit
international qui a proposé de sanctionner par la nullité les
traités conclus en violation de ces normes impératives. Le
travail de la Commission du Droit International a été accueilli
et accepté par la majorité des membres de la Conférence de
Vienne (qui a donné naissance à la Convention de Vienne de
1961).
La notion de jus cogens se rapproche étroitement de
la notion de droit naturel.... Au fil de sa jurisprudence la Cour International
de Justice va faire référence au jus cogens sans jamais la
sanctionner. En effet elle s'est prononcée pour la première fois
sur la notion dans un avis consultatif du 28 mai 1951 concernant les
réserves à la Convention pour la prévention et la
répression du crime de génocide en affirmant l'existence de
principe de morale élémentaire obligeant les Etats en dehors de
tout lien Conventionnel. Dans sa décision du 5 février 1970 au
sujet de l'affaire « Barcelona traction » dans un
orbiter dictum la Cour International Justice affirme qu' « une
distinction doit être établie entre les obligations des Etats
envers la communauté internationale dans son ensemble » (jus
cogens) « et celles qui naissent vis-à-vis d'un autre Etat
dans le cadre de la protection diplomatique ». A aucun moment elle ne
va mentionner l'expression de « jus cogens » mais elle se
fait comprendre notamment en utilisant le terme « obligations erga
omnes » c'est-à-dire, l'obligation à l'égard de
tous.
La Cour International de Justice se prononcera encore dans
une ordonnance du 15 décembre 1979 en déclarant
qu' « aucun Etat n'à l'obligation d'entretenir des
relations diplomatiques ou consulaire avec un autre mais il ne saurait marquer
de reconnaitre les obligations impératives qu'elles comportent et qui
sont maintenant codifiées dans les Conventions de Vienne de 1961 et 1963
».
En 1986 dans l'affaire des activités militaires et
paramilitaires la Cour souligne le principe de non emploi de la force
relève du jus cogens. Dix ans plus tard en 1996 la Cour esquive
l'expression en se référant au caractère intransgressible
de certaines obligations .On peut dire que malgré une affirmation
ferme dans les textes le jus cogens n'a fait l'objet que de
références discrètes (bien qu'explicites) dans la
jurisprudence de la Cour International de Justice.
Quoi que le problème du processus de formation de ces
normes de jus cogens n'est pas aujourd'hui réglé de façon
satisfaisante et définitive51(*) ; on peut dire les valeurs d'humanités et
des droits de l'homme fort partie intégrante des normes de jus
cogens.
Comme l'a révélé Read Brody, avocat
américain et conseiller juridique de Humann Right Watch, « la
tendance internationale en faveur de la responsabilité pénale
dans les cas des violations majeures de droits de l'homme, valeurs
sacrées de l'humanité toute entière52(*).
Ainsi donc, comme l'affirme SIANGANU DIMBUNGU,
« les violations des valeurs d'humanités entant que ces
valeurs constituent, une infraction du droit international humanitaire,
lui-même partie intégrante du jus cogens sont incompatibles
à la notion d'immunité diplomatique. Les immunités
diplomatiques tombent de façons tout à fait automatique devant
les normes de jus cogens parce que l'insusceptibles de toute dérogation.
Ce qui implique que même couverts par la raison d'Etat, les auteurs des
crimes contre l'humanité où des crimes de guerres doivent
toujours en répondre53(*).
S'il est vrai que la notion d'immunité s'efface devant
les principes de jus cogens, il faudrait examiner plus en détail la
procédure de mise en oeuvre de cette responsabilité pénale
que nous allons approfondir dans le point suivant.
§2. La mise en oeuvre
de la protection diplomatique
A qui revient la compétence de réprimer la
violation du principe de jus cogens ? Cette question simple en apparence,
est d'une importance capital.
En effet, à l'anarchie qui aurait prévalu sur
la scène internationale, si tous les Etats se réclamaient
compétente pour réprimer ces violations, les Etats ont
préféré l'institution d'un ordre juridique que tout en
reconnaissant le principe de la compétence universelle (ubi te
invertero, ubi te juridicate), donne prééminence au juge du lieu
où le délit a été commis.
Ainsi donc, c'est avant tout la compétence
territoriale de l'Etat qui s'affirme ici, sauf dispositions expresses
contraires. Cependant, parce que certains Etats recouvraient les auteurs de ces
violations graves des principes de jus cogens d'une immunité
pénal de droit interne, certains Etats invoquaient la compétence
universelle pour prétendre à la répression de ces crimes.
Tel est le cas de la Belgique, qui a promulgué en 1993 une loi, par la
suite modifiée en 1999, qui retient la compétence universelle des
Cours et Tribunaux belge pour les crimes de droit international, quelque soient
les lieux du crime, la nationalité ou le lieu de résidence des
suspects ou des victimes, cela au mépris de toute immunité. Et
pourtant, la pratique internationale se prononce pour la désignation
des tribunaux spéciaux appelés à connaitre des crimes
commis par les auteurs des violations graves des principes de jus cogens comme
les droits de l'homme.
C'est dans ce sens qu'ont été crées les
tribunaux de Nuremberg et de Tokyo pour connaitre des crimes contre
l'humanité et crimes de guerre commis après la deuxième
guerre mondiale, le Tribunal Pénal International pour l'ex-Yougoslavie
à la Haye, celui pour le Rwanda à Arusha.
C'est dans le même registre qu'il faut aussi
insérer la Cour Pénale Internationale qui aura à connaitre
des crimes de droit international, sans aucune distinction fondée sur la
qualité officielle54(*). Ce qui entraine que « les immunités
ou règles de procédure spéciale qui, peuvent s'attacher
à la qualité officielle d'une personne, en vertu du droit
international ou du droit interne n'interdisent pas à la Cour d'exercer
sa compétence à l'égard de cette personne55(*).
De ce qui précède, on peut retenir que la mise
en oeuvre de la violation des principes de jus cogens spécialement des
normes du droit international humanitaire, appartient concurremment à
l'Etat dans lequel le délit a été commis et à la
Cour Pénal International dans le respect du principe « non bis
in idem ». Les autres Etats ne peuvent intervenir qu'à titre
secondaire en respectant les immunités dont pourraient jouir certaines
personnes, lesquelles doivent préalablement être levées
pour permettre les poursuites judiciaires56(*).
C'est à la lumière de ces conclusions que nous
allons maintenant aborder le chapitre troisième consacré au cas
particulier de la protection diplomatique du ministre des affaires
étrangères de la République Démocratique du Congo.
CHAPITRE 3 : LA
PROTECTION DIPLOMATIQUE DU MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES DE LA R.D
CONGO
Les immunités du ministre des affaires
étrangères de la République Démocratique du
Congo ; Mr Yerodia Abdoulaye Ndombasi a vu sa protection
diplomatique mise en doute par le juge d'instruction Belge Damien Vandermeersch
qui, au nom de la loi belge de compétence universelle belge a
lancé contre lui un mandat d'arrêt international alors qu'en tant
le représentant de la République Démocratique du Congo
dans les relations internationales, il était couvert des
immunités diplomatiques étendues.
La Belgique ne conteste pas que le ministre des affaires
étrangères en fonction jouit des immunités de juridiction
devant les juridictions nationales des Etats étrangers. Cependant, elle
est d'avis que cette immunité connait des limitations ratione materiae
pour les actes accomplies dans le cadre de l'exercice des fonctions
officielles à l'exclusion des « actes
privés » ou d'autres comportements étrangers à
l'accomplissement desdites fonctions57(*).
Nous examineront dans cette affaire dont l'exposé
(section 1) et la résolution de l'affaire par la Cour international de
justice (section 2) feront l'objet des développements clairs sur les
mécanismes de mise en oeuvre de la responsabilité pénale
des agents diplomatiques couverts par l'immunité juridictionnelle en cas
de violation par eux de certains principes de droit international
érigés en normes de jus cogens.
§1. Principe
Les vues des parties en litige convergents sur un point
capital le ministre des affaires étrangères en exercice
jouissent, en principe, en vertu du droit international coutumier de
l'immunité de juridiction pénale devant les tribunaux
étrangers.
Section 1 :
Exposé de l'affaire
Nous allons tout d'abord aborder les faits, avant de
déterminer le problème juridique posé dans cette
affaire.
§ 1. Les faits
L'affaire trouve son origine dans des propos prononcés
en août 1998 par Mr. Yerodia Abdoulaye Ndombasi, alors directeur du
cabinet du Président Laurent Désiré Kabila, à
l'encontre des milices Rwandaises qui envahissaient l'Est de la
République Démocratique du Congo.
Mr. Yerodia Abdoulaye Ndombasi avait demandé aux
forces armées Congolaises de procéder à
l'éradication de la « Vermine » des envahisseurs
rwandais. Suite à ces propos, des soulèvements avaient
éclaté, faisant un certain nombre de victimes parmi les tutsie au
Congo. En novembre 1998, plusieurs plaintes avaient été
déposées auprès de Mr. Damien Vandermeersch, juge
d'instruction prés le tribunal de première instance de Bruxelles,
au titre de la loi du 16 juin 1993 relative à la répression des
violations graves du droit international humanitaire58(*).
Cette loi donnait alors compétence aux juridictions
belges pour connaitre de la répression de ces violations nonobstant tout
lieu de rattachement territorial avec la Belgique. L'article 7 de la loi
stipulait en effet que « Les juridictions belges sont
compétentes pour connaitre des infractions prévues à la
présente loi, indépendamment du lieu où celles - ci
auront été commises ».
Le 11 avril 2000, Mr. Vandermeersch délivre un mandat
d'arrêt international à l'encontre de Mr. Yerodia Abdoulaye
Ndombasi « en tant qu'auteur ou Co - auteur de crimes constituant
des infractions graves aux Conventions de Genève de 1949 et aux
protocoles additionnels à ses Conventions, et de crimes contre
l'humanité ». Ce mandat d'arrêt est transmis le 7 juin
2000 au Congo et à Interpol, afin d'assurer sa diffusion internationale.
Ce faisant, il empêche Mr Yerodia Abdoulaye Ndombasi de quitter le
territoire de la République Démocratique du Congo, sous peine
d'une arrestation immédiate sur le territoire de l'Etat où il se
déplacerait. Or Mr Yerodia a été nommé entre temps
ministre des affaires étrangères de la République
Démocratique du Congo, fonction impliquant de nombreux
déplacements internationaux. L'exercice de ces fonctions est par
conséquent compromis. Le 17 octobre 2000, la République
Démocratique du Congo saisit la Cour International de Justice de
l'affaire l'opposant à la Belgique. Dans sa requete, il demande à
la Cour « de dire que le Royaume de Belgique devra annuler le mandat
d'arrêt international décerné le 11 avril 2000 contre le
ministre des affaires étrangères en exercice de la
République Démocratique du Congo ».
Le même jour, la République Démocratique
du Congo présente à la Cour, en application de l'article 41 du
statut de celle - ci, une demande en indication de mesures conservatoires, afin
de retirer le mandat d'arrêt. Les plaidoiries commencent le 20 novembre
2000. Ce jour là, Mr. Yerodia est demis de ses fonctions de ministre des
affaires étrangères et est nommé ministre de
l'éducation national de la République Démocratique du
Congo. Suite à ce remaniement ministériel, la Belgique demande
à la Cour de rayer l'affaire du rôle. En janvier 2001, suite
à un nouveau remaniement ministériel, Mr. Yerodia n'exerce plus
aucune responsabilité ministérielle au sein du gouvernement
congolais59(*).
1. La procédure
devant la Cour
A. L'ordonnance du 8 décembre 2000
Le 8 décembre 2000, la Cour décide dans une
ordonnance de rejeter la demande en indication de mesures conservatoires
déposées par la R.D Congo. Selon la Cour, le changement de
portefeuille de Mr. Yerodia rendait moins urgente une mesure de protection. Un
ministre de l'éducation nationale est en effet « moins
exposé à des déplacements fréquents à
l'étranger » qu'un ministre des affaires
étrangères. De ce fait, Mr. Yerodia courait moins de risque de se
faire arrêter.
Dans la même ordonnance, la Cour rejeta la demande de
la Belgique visant à rayer l'affaire du rôle. Pour la Cour, les
nouvelles fonctions de Mr. Yerodia ne privent pas la requête du Congo de
son objet. En effet, le mandat n'a pas été rapporté et
vise toujours la même personne, « nonobstant les nouvelles
fonctions ministérielle qu'elle exerce ». De plus, les deux
parties ont souscrit à la clause facultative de juridiction
obligatoire60(*).
La Cour dit enfin dans l'ordonnance qu'elle souhaite que
l'affaire soit tranchée « le plus rapidement
possible ». Cela explique la célérité de
l'affaire, puisque l'arrêt fut rendu le 14 février 2002, soit
seulement 156 mois après le dépôt de la requête'
introductive.
§2. Problème
juridique posé
La question se pose de savoir dans cette affaire si un organe
des relations extérieures et spécialement un ministre des
affaires étrangères, bénéficiaire sur le plan
international des privilèges et immunités, pourrait être
arrêté ou poursuivi parce qu'il a violé les normes
impératives du droit international (jus cogen).
Il s'agit de savoir si un Etat donné pouvait, en vertu
de son droit positif interne, étendre sa compétence
juridictionnelle sur un sujet étranger, protégé par le
droit international dans le but d'assurer la sanction de la violation d'une
norme de droit international.
§3. Les
positions des parties
Nul doute pour l'Etat requérant que « le
ministre des affaires étrangères en fonction
bénéficie, en vertu du droit international coutumier et devant
les fors étrangers, de la même inviolabilité et de la
même immunité pénale absolues que celles dont jouissent les
Chefs d'Etats en exercice61(*).
En conséquence, le Congo n'a consacré à
ce point que des développements brefs. D' autre part, il est
empressé, des l'ouverture des plaidoiries, à montrer que la
partie adverse communiait avec lui à ce sujet : « il
n'est pas contesté par la Belgique », avance Pierre d'Argent,
que « le ministre des affaires étrangères en exercice
jouissent en principe, en vertu de la coutume internationale, d'une
immunité de juridiction pénale dans les fors
étrangers62(*) ». Il importe de préciser que seule
la question de l'existence d'une norme coutumière reconnaissant auxdits
ministres l'immunité de juridiction pénale est actuellement en
jeu.
Il est vrai que la partie adverse affirme dans son contre
mémoire que « le ministre des affaires
étrangères en exercice bénéficie d'une
immunité générale de juridiction devant les tribunaux d'un
autre Etat étranger63(*) ». La règle est donc sauvée.
L a Belgique précise également que le droit dont relèvent
les immunités des ministres des affaires étrangères trouve
son origine principalement dans la coutume, bien que, selon les circonstances,
et les parties en causes, il peut avoir également une base
conventionnelle64(*).
S'appuyant sur la doctrine, la partie défenderesse déclare que
« la discussion des immunités dont bénéficient
le ministre des affaires étrangères s'inscrit dans l'examen plus
large des immunités qui s'attachent aux fonctions de Chef du
gouvernement et de ministre des affaires étrangères65(*). Les conseils de la Belgique
ont aussi confirmé ce point de vue. Si cette tâche a
été confiée particulièrement au professeur Eric
David, Me Daniel Bethlehem a aussi admis implicitement le principe de
l'immunité pénale au profit du ministre des affaires
étrangères. Toute fois il a tenté de montrer que le
mandant du 11 avril 2000 n'a pas visé Mr. Yerodia Abdoulaye Ndombasi.
Eric David affirma plus explicitement quoique de manière apparemment
furtive : « la Belgique est d'accord sur le point
d'immunité devant une juridiction interne ». Il serait donc
superflu d'aller plus loin. La tâche du juge international s'en trouvait
facilitée.
1. Principe
Les deux parties en litige convergent sur un point capital. Le
ministre des affaires étrangères en exercice jouit, en principe,
en vertu du droit international coutumier, de l'immunité de
juridiction pénale devant les tribunaux étrangers. L'affirmation
est nette dans l'écriture du Congo. Elle ne l'est pas moins dans le
texte de la Belgique. Cette heureuse convergence de vues entre plaideurs s'est
exprimée aussi en plein prétoire. Semblable accords permet de
présenter ensemble la conception des deux Etats.
A. La position de la République
Démocratique du Congo
L'affirmation est bien résolue et nette dans le texte
de la R.D Congo : « l'inviolabilité et immunité
sont en effet fonctionnelles, en ce sens qu'elles sont accordées
automatiquement par le droit international général à la
personne qui en bénéficie en conséquence des fonctions
officielles que celle-ci exerce et afin de permettre leur bon accomplissement
par leur protection contre toute ingérence étrangère non
autorisé par l'Etat que cette personne représente66(*) ».
Passant au peigne fin la conception adverse, la R.D Congo
reproche à la Belgique de mettre en avance une mauvaise
compréhension de ce qu'est l'inviolabilité et l'immunité
pénale absolue des hauts représentants des Etats
étrangers. L'argument donne à penser que ce serait la Belgique
qui, en quelque sorte, distribuerai, accorderait ces privilèges
d'inviolabilité et d'immunité aux hauts dignitaires
étrangers.
L'inviolabilité et immunité pénale
absolue que le droit international coutumier reconnait aux Chefs d'Etat,
Premiers ministres, ministres des affaires étrangères et autres
représentants éminents d'Etats découle automatiquement de
leur entrée et de leur maintien en fonction, qu'elles ont pour
finalité de protéger. L'existence de ces privilèges ne
dépend nullement du consentement qui serait donné par une
autorité étrangère à leur déplacement dans
cet Etat, à l'inverse de ce qui est le cas lors de l'accord donné
par l'Etat accréditaire à l'envoi de diplomates par l'Etat
accréditant. Cette obligation de respecter les immunités ne nait
pas avec l'invitation qui leur est adressée elle n'est pas
créée par celle - ci, elle existe en droit international
général67(*).
B. La position du Royaume de Belgique
La proposition relative au caractère des
immunités n'est plus aussi ferme et claire dans les écritures de
la Belgique qui rappelle ses déclarations antérieures selon les
quelles :
« Ce mandat tenait compte de l'immunité du
gouvernant étranger car il ne pouvait pas être
exécuté au cas où Mr. Yerodia Abdoulaye Ndombasi serait
invité officiellement à venir en Belgique par le gouvernement
belge ou par une organisation internationale dont la Belgique serait
membre68(*) ».
Face à l'assertion du demandeur, d'après
laquelle le défendeur ne serait subordonner l'immunité
pénal d'un gouvernant étranger à son appréciation
au motif qu'elle constituerait une règle objectif, la Belgique riposte
par une série de trois arguments69(*). Elle repousse le point de vue de la
République Démocratique de Congo qui serait fondé sur le
présupposé d'une immunité absolue exempte d'aucune
exception. L'Etat défendeur invoque le large pouvoir
d'appréciation dévolu au juge d'instruction qui autoriserait ce
dernier à tenir compte de l'invitation officielle adressé
éventuellement au ministre des affaires étrangères Yerodia
Abdoulaye Ndombasi. En définitive, il soutient que l'immunité
d'un gouvernant étranger ne constitue pas un droit objectif valable erga
omnes70(*).
Section 2.
Résolution de l'affaire par la Cour Internationale de Justice
Le problème juridique ayant été
porté devant la justice internationale par la République
Démocratique du Congo, il s'est déroulé, à la
résolution de l'affaire par la Cour International de Justice à
travers l'arrêt du 14 février 2002. Une bataille
procédurale préliminaire faite des exceptions soulevées
par la Belgique tendant à ce que l'affaire soit rayée du
rôle.
§ 1. Les exceptions
soulevées par le Royaume de Belgique
La Belgique avait soulevé quatre exceptions visant
à faire constater l'incompétence de la Cour et
l'irrecevabilité de la requête. Toutes furent rejetées par
la Cour.
1. L'absence de
différend juridique entre les parties
La Belgique souhaitait que la Cour constate que, Mr. Yerodia
n'exerçant plus aucune fonction au sein du gouvernement de la R.D Congo,
il n'y avait plus de différend juridique entre les deux parties, et que
la Cour n'était, en conséquence, pas compétente en
l'instance. La Belgique ne niait pas qu'un différend ait pu exister
entre les parties au moment de l'introduction de l'instance. Elle soutenait
toutefois que la Cour devait constater si le différend existait toujours
au moment où elle se prononçait sur l'affaire. La fonction de
ministre des affaires étrangères exercées par Mr. Yerodia
était, pour la Belgique, au centre de la requête introductive de
la R.D Congo. L'absence de fonction ministérielle dans son chef depuis
avril 2001 avait supprimé la réalité du litige, la R.D
Congo cherchant simplement à obtenir un avis consultatif de la Cour.
Celle-ci était dès lors incompétente pour connaître
de l'affaire71(*).
Pour la R.D Congo, le mandat d'arrêt était
illégal ab initio, et le préjudice subi par le Congo n'avait pas
été affecté par le changement de statut de Mr.
Yerodia72(*).
La Cour rappela sa jurisprudence constante selon laquelle sa
compétence devait être appréciée au moment de l'acte
introductif d'instance. Chacune des deux parties était liée le 17
octobre 2000 par une déclaration d'acceptation de la juridiction
obligatoire de la Cour. Aucune d'entre elles ne contestait qu'un
différend les opposait à cette date quant à la
licéité au regard du droit international du mandat d'arrêt
du 11 avril 2000.Par conséquent, la Cour en conclut qu'elle était
compétente pour connaître du différend au moment où
elle avait été saisie de l'affaire, et qu'elle était
restée compétente pour ce faire. Elle rejeta donc la
première exception de la Belgique73(*).
Il est à remarquer que le juge Oda vota contre ce
rejet. Il exprima dans son opinion dissidente74(*) que, selon lui, il n'existait aucun différend
juridique entre le Congo et la Belgique. Ni le Congo ni Mr. Yerodia n'avait
souffert du moindre préjudice sinon moral du mandat d'arrêt
délivré par Mr. Vandermeersch. Le seul objectif du Congo aurait
été d'obtenir de la Cour la condamnation de la loi de
compétence universelle de 1993.
On pourrait répondre à cet argument en
rappelant qu'en droit international public, il n'est pas nécessaire
qu'un Etat éprouve un préjudice actuel pour entamer une action
internationale à l'encontre d'un autre Etat. L'article 3 du projet
d'articles de la Commission du droit international sur la responsabilité
internationale précise en effet qu'il y a fait internationalement
illicite de l'Etat lorsque :
a. un comportement consistant en une action ou une inaction
est attribuable, d'après le droit international, à l'Etat,
b. et que ce comportement constitue une violation d'une
obligation internationale.
Deux éléments, à savoir l'existence d'un
fait internationalement illicite, et l'imputabilité de ce fait à
un Etat, semblent donc suffisants pour que la responsabilité de celui-ci
puisse être engagée, et une procédure de règlement
des différends intentée contre lui.
2. L'absence d'objet
La Belgique soutenait également que, Mr. Yerodia
n'exerçant plus aucune fonction au sein du gouvernement du Congo, la
demande de ce dernier était devenue sans objet. La procédure
n'avait plus aucune utilité, puisque même si la Cour reconnaissait
que Mr. Yerodia jouissait d'une immunité au moment de l'émission
du mandat d'arrêt, il n'en bénéficierait plus au moment du
prononcé de l'arrêt de la Cour. La Cour devait, par
conséquent, refuser de juger sur le fond Le Congo estimait quant
à lui que le préjudice qu'il avait subi n'avait pas encore
été réparé75(*).
La Cour estima que le changement dans la situation de Mr.
Yerodia n'avait pas privé la requête d'objet. Le Congo continuait
à demander à la Cour de réparer le préjudice moral
causé par le mandat d'arrêt. La Belgique, de son
côté, maintenait que ses actions n'étaient pas contraires
au droit international. La requête du Congo n'était dès
lors pas dépourvue d'objet, et la Cour devait statuer sur
celle-ci76(*).
3. La modification des faits
sur lesquels reposait la requête du Congo
En troisième lieu, la Belgique insistait sur les
différences existant entre l'affaire telle qu'elle était soumise
à la Cour et le contenu de la requête introductive du Congo. Les
modifications de la situation de Mr. Yerodia plongeaient la Belgique dans
l'incertitude quant à la teneur des demandes dirigées contre
elle. Il aurait fallu que le Congo présente une nouvelle requête,
ou demande à la Cour l'autorisation de modifier sa requête
initiale77(*). Le Congo
précisa quant à lui qu'il s'était contenté de
resserrer et préciser ses demandes au fur et à mesure de
l'évolution de la procédure78(*).
La Cour constata que la question qui lui avait
été soumise, à savoir la légalité au regard
du droit international du mandat d'arrêt décerné par Mr.
Vandermeersch à l'encontre de Mr. Yerodia, n'avait pas été
modifiée par le changement de statut de Mr. Yerodia79(*).
4. Le non-épuisement
des voies de recours internes
La Belgique soutient enfin que certaines des questions
soulevées par le Congo, à savoir la protection des
intérêts d'une personne privée ayant la nationalité
congolaise, relevaient d'une action en protection diplomatique. Mr. Yerodia
aurait dès lors dû épuiser toutes les voies de recours
ouvertes en droit belge avant que le Congo ne puisse prendre fait et cause en
sa faveur dans une procédure internationale. Pour le Congo, il ne
s'agissait pas d'une action en protection diplomatique. L'action avait en effet
été présentée au nom du gouvernement congolais,
à raison de la violation de l'immunité de son ministre des
affaires étrangères.
La Cour constata que le différend concernait la
licéité du mandat d'arrêt délivré le 11 avril
2000 par Mr. Vandermeersch, et non pas les droits individuels de Mr. Yerodia.
De plus, la Belgique reconnaissait qu'au moment du dépôt de la
requête, le Congo avait un intérêt juridique propre dans
l'action. Elle rejeta par conséquent l'exception.
A. La règle non ultra petita
La Belgique rappela également, à la suite de
ses exceptions préliminaires, que la requête du Congo avait
été modifiée au cours de la procédure. A l'origine,
celui-ci contestait à la fois la compétence universelle
accordée aux tribunaux belges par la loi de 1993, et la
légalité du mandat d'arrêt au regard de l'immunité
de juridiction dont bénéficiait M. Yerodia. Dans ses conclusions
finales, le Congo ne contestait plus la compétence universelle. Il se
bornait à soutenir que le mandat d'arrêt du 11 avril 2000
était illicite parce qu'il violait l'immunité de juridiction de
son ministre des affaires étrangères. Dès lors, en vertu
de la règle non ultra petita, la Cour devait se limiter à
trancher cette question. Elle ne pouvait se prononcer sur la question de la
compétence universelle.
La Cour accepta ce raisonnement. Elle se réserva
toutefois le droit d'aborder, si elle l'estime nécessaire ou
souhaitable, tel ou tel aspect de cette question dans les motifs de son
arrêt.
L'arrêt Yerodia n'allait par conséquent pas
être le procès de la loi belge de compétence universelle.
Il allait se contenter de se pencher sur l'étendue de l'immunité
reconnue à un ministre des affaires étrangères, et
seulement à celui-ci. L'arrêt s'abstient en effet également
de se prononcer sur les immunités dont pourraient
bénéficier d'autres personnalités, notamment les chefs
d'Etat et les autres membres du gouvernement.
§ 2. Le fond de
l'affaire: la question de l'immunité de Mr. Yerodia
La question au centre du débat était de savoir
si l'immunité de juridiction reconnue aux ministres des affaires
étrangères devant les tribunaux d'un Etat étranger pouvait
être appliquée in casu à M. Yerodia. Pour la Belgique, la
réponse était négative, pour trois raisons.
1. La limitation ratione materiae de
l'immunité
En premier lieu, selon la Belgique, l'immunité ne
pouvait s'appliquer « qu'aux actes accomplis (par les ministres des
affaires étrangères en exercice) dans le cadre de leurs fonctions
officielles », et « l'immunité ne saurait
protéger ces personnes dans leurs actions privées ou lorsqu'elles
agissent en-dehors de leurs fonctions officielles ».
Pour répondre à cet argument, la Cour
commença par se pencher sur la question de l'immunité de
juridiction pénale dont un ministre des affaires
étrangères peut bénéficier. Un certain nombre de
textes internationaux reconnaissent l'existence de cette immunité. Il
s'agit notamment de la convention de Vienne du 18 avril 1961 sur les relations
diplomatiques, et de la convention de New York du 8 décembre 1969 sur
les missions spéciales. Celle-ci stipule en effet dans son article 21
par 2 que « le chef de gouvernement, le ministre des affaires
étrangères et les autres personnalités de rang
élevé, quand ils prennent part à une mission
spéciale de l'Etat d'envoi, jouissent dans l'Etat de réception ou
dans un Etat tiers, en plus de ce qui est accordé par la présente
convention, des facilités, privilèges et immunités
reconnus par le droit international ». Le caractère vague de
ce paragraphe et le fait que ni la Belgique ni le Congo ne sont parties
à cette convention (alors qu'ils l'invoquent tous les deux) autorise la
Cour à placer le problème dans le droit international coutumier,
et à chercher à trancher l'affaire sur base de celui-ci80(*).
La Cour analyse la nature des fonctions exercées par
un ministre des affaires étrangères. « Il est
fréquemment amené à se déplacer à
l'étranger, et doit dès lors être en mesure de le faire
librement dès que la nécessité s'en fait
sentir ». « Il se voit (également) reconnaître
par le droit international la qualité de représenter son Etat du
seul fait de l'exercice de sa fonction ». La Cour en conclut que ses
fonctions sont telles qu'elles exigent qu'il bénéficie, pour
toute la durée de sa charge, d'une immunité de juridiction
pénale et d'une inviolabilité totale à l'étranger
afin d'éviter qu'un Etat étranger ne fasse obstacle à
l'exercice de ses fonctions.
La Cour reconnaît donc qu'un ministre des affaires
étrangères bénéficie d'une immunité de
juridiction pénale et d'une inviolabilité totale à
l'étranger. Continuant son raisonnement, elle conclut qu'il est
dès lors impossible d'opérer une distinction entre les actes
accomplis par un ministre des affaires étrangères à titre
officiel et ceux qui l'auraient été à titre
privé81(*). La Cour
rejette dès lors l'argumentation de la Belgique sur ce point.
Cette conclusion de la Cour a été
contestée par Mme Van den Wijngaert, juge ad hoc de la Belgique dans
cette affaire, dans son opinion dissidente82(*). Pour elle, la Cour arrive rapidement à la
conclusion de l'existence, en droit international coutumier, d'une
immunité en faveur des ministres des affaires étrangères.
Le manque de précédents83(*) aurait dû rendre la Cour plus circonspecte.
La doctrine francophone84(*), de même que le juge Al-Khasawneh, lui aussi
auteur d'une opinion dissidente85(*), adoptent une position proche de celle de la
Belgique. Ils reconnaissent au ministre des affaires étrangères
une inviolabilité et une immunité de juridiction civile et
pénale uniquement lors de son séjour officiel dans le pays
hôte. L'immunité de juridiction serait réduite aux actes de
sa fonction s'il n'est pas présent sur le territoire de l'Etat du for.
Un ministre des affaires étrangères devrait par conséquent
pouvoir être jugé sur le territoire d'un autre Etat pour des actes
étrangers à sa fonction commis en-dehors d'une mission officielle
sur le territoire de celui-ci.
La Cour internationale de Justice adopte par conséquent
une solution prétorienne. Il n'existe pas à l'heure actuelle en
droit international une base juridique unanimement acceptée impliquant
la reconnaissance d'une immunité totale en faveur des ministres des
affaires étrangères. On peut retirer de l'article 21 § 2 de
la convention de New York du 8 décembre 1969 sur les missions
spéciales qu'une immunité doit exister pendant celles-ci. En
l'absence de cette immunité, il est évident que la tâche
des ministres des affaires étrangères serait
singulièrement compliquée. En-dehors de ces missions, la Cour
assimile le ministre des affaires étrangères à un
véritable chef d'Etat. Dans l'état actuel du droit international,
cette assimilation semble aller un peu vite en besogne.
2. L'absence d'immunité au moment
des faits
Selon la Belgique, Mr. Yerodia ne bénéficiait
d'aucune immunité au moment où les actes qui lui étaient
reprochés avaient été commis, puisqu'il n'était
à cette époque directeur du cabinet du Président L.D
Kabila.
La Cour se contenta de répondre qu'il était
impossible d'opérer une distinction entre les actes accomplis par
l'intéressé avant qu'il n'occupe les fonctions de ministre des
affaires étrangères et ceux accomplis durant l'exercice de ces
fonctions. Le fait d'arrêter celui-ci dans un autre Etat pour des actes
commis avant son entrée en fonction ne peut que l'empêcher de
s'acquitter des tâches inhérentes à sa fonction.
L'immunité doit donc jouer à plein pendant l'exercice de
celle-ci. Cela ne signifie d'ailleurs pas qu'il ne pourra pas être
poursuivi une fois qu'il aura cessé d'exercer la fonction pour laquelle
il dispose d'immunités.
Ce raisonnement n'est nié par personne. Il existe une
jurisprudence abondante selon laquelle une action intentée contre une
personne bénéficiant d'une immunité acquise
postérieurement aux faits pour lesquels elle est poursuivie devra
être suspendue pendant la durée de cette immunité. Pour
déterminer si une personne bénéficie d'une
immunité, il faut se placer au moment de l'instance, et non au moment
des faits. Rien n'empêchera l'action de reprendre son cours une fois
l'immunité terminée. L'immunité ne survivra que pour les
actes accomplis durant celle-ci et qui se rattachaient à l'exercice des
fonctions diplomatiques86(*). A partir du moment où la Cour reconnaît
une immunité aux ministres des affaires étrangères,
ceux-ci pourront dès lors s'en prévaloir même s'ils ont
revêtu cette fonction après avoir commis des actes litigieux. Elle
se terminera au moment où le ministre sera déchargé de sa
qualité officielle (ou lorsque son Etat aura renoncé à
l'immunité).
3. L'absence d'immunité en cas de
crimes de guerre ou de crimes contre l'humanité
Le coeur de l'arrêt se trouve dans l'argumentation de la
Belgique selon laquelle « les immunités reconnues aux
ministres des affaires étrangères en exercice ne peuvent en aucun
cas protéger ceux-ci lorsqu'ils sont soupçonnés d'avoir
commis des crimes de guerre ou des crimes contre l'humanité87(*) ». La Belgique
citait deux éléments à l'appui de sa thèse.
En premier lieu, elle invoquait la décision rendue le
24 mars 1999 par la Chambre des Lords dans l'affaire Pinochet88(*), ainsi que l'arrêt
Kadhafi de la Cour de cassation française89(*). Dans l'arrêt de la
Chambre des Lords, Lord Millet avait dit qu'on ne peut supposer que le droit
international ait institué un crime relevant du jus cognes tout en
prévoyant une immunité ayant la même portée que
l'obligation qu'il cherche à imposer. Lord Phillips of Worth Matravers
avait d'autre part exposé qu'aucune règle établie de droit
international n'exige que l'immunité d'un Etat ratione materiae soit
accordée dans le cadre de poursuites pour crime
international ». La Cour de cassation française, de son
côté, avait laissé entendre qu'il pourrait exister
des exceptions au principe de l'immunité de juridiction des chefs
d'Etat étranger en service.
L'arrêt de la Chambre des Lords est toutefois trop peu
unanime90(*) pour que de
véritables conclusions puissent en être retirées. Lord
Browne-Wilkinson, cité par le Congo, avait en effet exposé que
l'immunité dont jouit un chef d'Etat en fonction ou un Ambassadeur en
exercice est une immunité totale liée à la personne du
chef d'Etat ou de l'Ambassadeur, et qui exclut toute action et poursuite
judiciaire à son encontre. La Cour Internationale de Justice passe
d'ailleurs très rapidement sur l'argument. Elle se contente de dire
qu'elle n'est pas parvenue à déduire de (la pratique des Etats)
l'existence, en droit international coutumier, d'une exception quelconque
à la règle consacrant l'immunité de juridiction
pénale et l'inviolabilité des ministres des affaires
étrangères en exercice, lorsqu'ils sont soupçonnés
d'avoir commis des crimes de guerre ou des crimes contre
l'humanité91(*). Il
n'était évidemment pas difficile à la Cour d'aboutir
à cette conclusion, dans la mesure où aucune jurisprudence
n'existe sur le sujet particulier des ministres des affaires
étrangères92(*).
La Belgique invoquait également les statuts des
différentes juridictions pénales internationales mises en place
depuis 194593(*). Le plus
récent d'entre eux, l'article 27 al. 2 du Statut de la Cour
pénale internationale, prévoit que « les
immunités ou règles de procédure spéciales qui
peuvent s'attacher à la qualité officielle d'une personne, en
vertu du droit interne ou du droit international n'empêchent pas la Cour
d'exercer sa compétence à l'égard de cette
personne ».
La Cour répond à cet argument en constatant
qu'aucun des instruments invoqués ne laisse entendre qu'une exception
à l'immunité dont bénéficient les ministres des
affaires étrangères pourrait exister lorsqu'ils sont poursuivis
devant des juridictions nationales94(*). La Cour précise elle-même qu'un
ministre des affaires étrangères ou un ancien ministre des
affaires étrangères peut faire l'objet de poursuites
pénales devant certaines juridictions pénales
internationales95(*)
dès lors que celles-ci sont compétentes. En revanche, toute
poursuite devant des juridictions nationales est impossible tant que dure
l'immunité.
Aucun des arguments avancés par la Belgique n'ayant
été accueilli par la Cour, celle-ci dit par treize voix contre
trois96(*) que
l'émission, à l'encontre de M. Yerodia Abdoulaye Ndombasi, du
mandat d'arrêt du 11 avril 2000, et sa diffusion sur le plan
international, ont constitué des violations d'une obligation juridique
du Royaume de Belgique à l'égard de la république
démocratique du Congo, en ce qu'elles ont méconnu
l'immunité de juridiction pénale et l'inviolabilité dont
le ministre des affaires étrangères en exercice de la
République démocratique du Congo jouissait en vertu du droit
international.
§3. Les orbiter dictum de
l'arrêt
Afin de tempérer un peu le caractère abrupt de
son arrêt, qui risquait de heurter les défenseurs des droits de
l'homme qui s'étaient réjouis de l'adoption par la Belgique de la
loi de compétence universelle, la Cour ajoute deux précisions
dans son arrêt.
1. la
question de la légalité des lois de compétence
universelle
La Cour avait accepté l'argument de la Belgique selon
lequel elle statuerait ultra petita si elle se prononçait sur la
question de la compétence universelle. Elle va cependant le faire par la
bande. Elle précise en effet que les « conventions
internationales tendant à la prévention et à la
répression de certains crimes graves ont mis à la charge des
Etats des obligations de poursuite ou d'extradition, et leur ont fait par suite
obligation d'étendre leur compétence juridictionnelle97(*). L'adoption d'une loi
prévoyant les jugements de ressortissants étrangers
soupçonnés de violations graves du droit international
humanitaire n'est par conséquent pas illégale au point de vue du
droit international. Au contraire, une certaine lecture de l'arrêt
pourrait impliquer que tous les Etats liés par ces conventions sont dans
l'obligation de prévoir une telle compétence dans leur
législation.
Une chose est de reconnaître qu'il est légal de
juger des ressortissants d'Etats tiers. Une autre chose est de
reconnaître la légalité de la compétence universelle
entendue comme la possibilité de juger des ressortissants d'Etats tiers
ne se trouvant pas sur le territoire de l'Etat ayant adopté une telle
loi. La Cour elle-même laisse la question ouverte, puisqu'elle se
contente de dire qu'à condition d'être compétent selon le
droit international, un tribunal d'un autre Etat peut juger un ancien ministre
des affaires étrangères d'un autre Etat. Aucune précision
n'est donnée sur le titre de compétence dont il pourrait
être question. Cette interrogation continue de provoquer de nombreuses
controverses. Cela saute particulièrement aux yeux lorsque l'on consulte
les opinions individuelles que les juges de la Cour joignirent à
l'arrêt. Si celle du juge Koroma98(*) semble favorable à la reconnaissance du
principe, il est à noter que dans leur opinion individuelle99(*), les juges Higgins, Kooijmans
et Buergenthal nièrent le fait qu'une telle compétence
universelle puisse être retirée des statuts des conventions
internationales tendant à la prévention et à la
répression de certains crimes graves. Selon eux, ceux-ci ne
prévoient que les compétences territoriale et personnelle (active
et passive). Le terme « compétence universelle »
désignerait en fait la compétence reconnue en vertu de l'adage
aut dedere, aut judicare à l'Etat sur le territoire duquel le coupable a
été arrêté. Il s'agirait par conséquent
simplement d'une « compétence territoriale pour des faits
commis ailleurs ». Les trois auteurs, citant le traité
d'Oppenheim reconnaissent toutefois que l'on assiste à l'heure actuelle
à une évolution du droit international pénal en vertu
duquel les Etats seraient compétents pour juger des ressortissants
étrangers pour des crimes contre l'humanité, même commis
en-dehors de leur territoire.
Le Président de la Cour, Gilbert Guillaume, alla plus
loin en précisant dans son opinion individuelle que, selon lui, le juge
d'instruction belge était incompétent pour émettre un
mandat d'arrêt à l'encontre de M. Yerodia100(*). L'opinion individuelle du
juge Rezek et la déclaration du juge Ranjeva101(*) ont un contenu similaire. Si
la question de la légalité de la compétence universelle se
trouve un jour posée en tant que telle devant la Cour internationale de
Justice, les plaideurs ne manqueront pas d'arguments dans les deux sens.
L'arrêt lui-même continue en précisant que
« cette extension de compétence ne porte en rien atteinte aux
immunités résultant du droit international coutumier, et
notamment aux immunités des ministres des affaires
étrangères. Celles-ci demeurent opposables devant les tribunaux
d'un Etat étranger, même lorsque ces tribunaux exercent une telle
compétence sur la base de ces conventions ».
Le point 59 de l'arrêt peut être
considéré comme un signal positif par les partisans de la
compétence universelle, qui craignaient que son principe même soit
remis en cause par la Cour. La question de l'immunité vient cependant
restreindre quelque peu le champ d'application de celle-ci. La Cour va donc
continuer son raisonnement en précisant que l'immunité dont
bénéficie un ministre des affaires étrangères
n'implique pas qu'il ne devra jamais répondre des actes qu'il a commis
dans l'exercice de ses fonctions ou avant d'avoir revêtu celle-ci.
2. la distinction entre
immunité et impunité
La Cour rappelle la distinction fondamentale entre
immunité et impunité. L'immunité de juridiction
« fait obstacle aux poursuites pendant un certain temps »,
celui où son titulaire peut s'en prévaloir. « Elle ne
saurait exonérer la personne qui en bénéficie de toute
responsabilité pénale102(*) »L'immunité de juridiction
pénale nie la compétence de certains tribunaux. Elle ne nie pas
l'existence de l'infraction commise, qui pourra par conséquent
être poursuivie devant d'autres juridictions, ou à un autre
moment103(*).
La Cour énumère ensuite les quatre
hypothèses où une personne bénéficiant d'une
immunité pourra malgré tout être traduite devant une
juridiction :
- Elle ne bénéficie d'aucune immunité de
juridiction pénale dans son propre pays. Elle pourra dès lors
être traduite devant les juridictions de celui-ci conformément aux
règles fixées en droit interne104(*);
- Etat qu'elle représente ou a représenté
peut toujours décider de lever cette immunité ;
- A partir du moment où l'immunité cesse de
sortir ses effets, les poursuites contre leur ancien bénéficiaire
pourront reprendre là où elles avaient été
temporairement suspendues, à condition qu'elle concerne des actes commis
avant ou après la période d'immunité s'il s'agit d'actes
officiels. Les actes accomplis à titre privé, quant à eux,
peuvent avoir été commis pendant la période
d'immunité105(*);
- Enfin, les juridictions pénales internationales
seront compétentes pour juger toute personne, quelle que soit la
qualité dont elle était recouverte au moment des faits106(*).
Les trois premières restrictions sont les exceptions
classiques à l'immunité dont peuvent bénéficier les
diplomates. La quatrième entérine les dispositions des statuts
des tribunaux pénaux internationaux qui font fi de la qualité
officielle des personnes jugées devant elle.
La combinaison des deux dernières exceptions
permet-elle de conclure que des violations graves du droit international
humanitaire commises par un ministre des affaires étrangères
pendant l'exercice de ses fonctions ne pourront être poursuivies que
devant les juridictions pénales internationales ou les tribunaux de son
propre Etat ? La Cour semble accorder l'immunité pour tous les actes
« officiels ». Il semble difficile d'assimiler les crimes
graves à des actes officiels. La doctrine semble d'ailleurs unanime en
faveur de la possibilité des poursuites pour des crimes graves commis
pendant que leur auteur bénéficiait d'une immunité, en
raison de la nature impérative des règles sur la
répression de ces crimes107(*). Il semblerait à tout le moins normal que
l'Etat sur le territoire duquel les crimes ont été commis soit
également compétent pour juger leur auteur108(*).
3. La question de la
réparation à accorder au Congo par la Belgique
La Cour étant parvenue à la conclusion que le
mandat d'arrêt lancé par la Belgique contre M. Yerodia est
contraire au droit international, la Cour doit se pencher sur la question de la
réparation à accorder au Congo.
Le Congo considère que le mandat est nul ab initio, en
raison du vice dont il est entaché. Il demande à la Cour d'exiger
de la Belgique que celle-ci mette le mandat à néant par les
moyens de son choix109(*).
La Belgique estime quant à elle qu'il n'y avait pas
lieu de mettre le mandat à néant. Si celui-ci avait porté
atteinte à l'immunité dont bénéficiait M. Yerodia
lorsqu'il était ministre des affaires étrangères, il ne le
fait plus au moment du prononcé de l'arrêt, puisque M. Yerodia
n'exerce plus cette fonction. N'étant plus couvert par une
immunité, les juridictions belges sont à nouveau
compétentes pour le juger. De plus, la Belgique estime que la Cour n'a
pas à lui dicter la façon dont elle doit exécuter l'un de
ses arrêts110(*).
La Cour rappelle sa jurisprudence selon laquelle
« la réparation doit, autant que possible, effacer toutes les
conséquences de l'acte illicite et rétablir l'état qui
aurait vraisemblablement existé si ledit acte n'avait pas
été commis111(*) ». Dans le cas d'espèce, la simple
constatation par la cour du caractère illicite du mandat d'arrêt
serait insuffisante. Le mandat subsiste. La Cour dit, par conséquent
« que le Royaume de Belgique doit, par les moyens de son choix,
mettre à néant le mandat d'arrêt du 11avril 2000 et en
informer les autorités auprès desquelles ce mandat a
été diffusé ».
Ce dernier point n'a été adopté que par
dix voix contre six112(*). Dans leur opinion individuelle commune, les juges
Higgins, Kooijmans et Buergenthal énoncèrent que, de leur point
de vue, le mandat d'arrêt n'était illégal que tant que M.
Yerodia était ministre des affaires étrangères. A partir
du moment où il avait cessé de revêtir cette fonction,
l'illégalité attachée au mandat avait pris fin. Il
n'était par conséquent pas nécessaire d'exiger de la
Belgique qu'elle le mette à néant.
§ 4.
Appréciation de l'arrêt
L'arrêt de la Cour International de Justice du 11 avril
2000 opposant la République Démocratique du Congo et le Royaume
de Belgique peut être appréciée par rapport d'une part aux
prétentions de la République Démocratique du Congo, et
d'autre part, à la loi belge de compétence universelle.
1. Par rapport aux
conséquences de la loi belge de compétence universelle
Une modification de la loi belge de compétence
universelle était-elle indispensable pour se conformer à
l'arrêt Yerodia ? La réponse est négative. Depuis
l'arrêt Le Ski du 27 mai 1971, les normes de droit international public
ayant effet direct bénéficient d'une primauté sur les
normes législatives belges. Une incertitude subsistait sur la solution
du conflit entre une norme internationale coutumière et une loi.
L'arrêt Le Ski parlait en effet uniquement des normes conventionnelles.
La doctrine belge ne semblait toutefois pas s'arrêter à ce
terme113(*).
Peu après le prononcé de l'arrêt Yerodia,
les juridictions belges eurent à traiter des poursuites engagées
contre Mr. Yerodia et Sharon. La chambre des mises en accusation de Bruxelles
déclara, respectivement le 16 avril 2002114(*) et le 26 juin 2002115(*), que les plaintes
déposées contre Mr. Yerodia et Sharon étaient
irrecevables. Paradoxalement, le motif invoqué n'était pas
l'immunité dont ils bénéficiaient116(*), mais leur non
présence sur le territoire belge. Cette motivation reflétait la
conception d'une compétence universelle entendue comme une simple
application de l'adage « aut dedere aut judicare ». Selon
cette jurisprudence, les autorités belges n'auraient pu poursuivre et
juger sur leur territoire les auteurs d'infractions graves commises à
l'étranger qu'à condition que ceux-ci se trouvent sur leur
territoire.
Cette jurisprudence fut infirmée par la cour de
cassation. Dans son arrêt du 12 février 2003117(*), elle a rappelé que
l'article 7 al. 1er de la loi du 16 juin 1993 portait que les
juridictions belges sont compétentes pour connaître des violations
graves du droit international humanitaire, indépendamment du lieu
où elles auront été commises, et que l'inculpé se
trouve ou non sur le territoire belge. Elle a toutefois reconnu que M. Sharon
disposait, en vertu du droit international coutumier, d'une immunité de
juridiction en tant que chef de gouvernement en exercice. Deux enseignements
pouvaient par conséquent être retirés de cet arrêt:
il confirmait l'interprétation extensive de l'immunité reconnue
par la Cour internationale de Justice, ainsi que la primauté du droit
international coutumier sur la loi belge.
L'interprétation de la chambre des mises en accusation
avait permis à la Belgique de se tirer temporairement du mauvais pas
diplomatique dans lequel la plainte dirigée contre le premier ministre
israélien l'avait placée. A la lecture des travaux
préparatoires de la loi de 1993, il apparaît toutefois que telle
n'était pas la volonté de ses rédacteurs118(*). La cour de cassation a par
conséquent remis les pendules à l'heure en rappelant la
compétence des tribunaux belges quel que soit le lieu où les
violations graves du droit humanitaire ont été commises, et
l'endroit où les inculpés se trouvent.
Suite aux nombreuses plaintes déposées devant
ses tribunaux contre des chefs d'Etat ou de gouvernement
étrangers119(*),
la Belgique décida de modifier fondamentalement le texte de la loi. Le
principe du maintien de la loi belge de compétence universelle n'a
jamais semblé en question. Deux lois modifiant la loi de
compétence universelle furent adoptées, respectivement le 23
avril 2003120(*) et le 5
août 2003. Cette seconde loi modifie fondamentalement le paysage
législatif belge, puisqu'elle abroge la loi de 1993 pour l'incorporer
dans le code pénal et le code d'instruction criminelle. Les deux lois
ont modifié la compétence des tribunaux belges et ont
apporté des précisions quant aux immunités dont
bénéficient certaines personnes en Belgique. Etudions-les
brièvement121(*).
2. Par rapport aux
prétentions de la République Démocratique du Congo
La République Démocratique du Congo a poursuivi
en justice l'illégalité du mandat d'arrêt du 11 avril 2000
en guise de cause. Cependant, le dommage moral qu'il a subi à la suite
de ce mandat ne semble pas totalement réparé du fait de
l'arrêt de la Cour International de Justice du 14 février 2002.
En effet, comme l'a justement souligné le professeur
BULA-BULA Sayemane de la faculté de droit de
l'université de Kinshasa dans son opinion dissident à
l'arrêt du 17 octobre relative à la demande de la
République Démocratique du Congo en indication des mesures
conservatoires, « la République Démocratique du Congo a
subi un préjudice irréparable, directement sur le plan moral, et
indirectement sur le plan matériel et humain, du fait de l'acte
unilatéral de la Belgique à l'encontre du ministre des affaires
étrangères 122(*).
4. La question des immunités
La première loi actait en premier lieu les
enseignements de l'arrêt Yerodia en prévoyant que
« l'immunité internationale attachée à la
qualité officielle d'une personne n'empêche l'application de la
présente loi que dans les limites établies par le droit
international » (nouvel article 5 § 3 de la loi). Cette
formulation était floue, puisque ni les conventions de Vienne sur les
relations diplomatiques et consulaires ni l'arrêt Yerodia ne traitent
spécifiquement des immunités reconnues aux chefs d'Etat et de
gouvernement.
La loi du 5 août 2003 règle par conséquent
ces questions, en modifiant le titre préliminaire du code de
procédure pénale. Le nouvel article 1er bis §
1er du code exclut toute poursuite à l'encontre des chefs
d'Etat, de gouvernement ou ministres des affaires étrangères,
ainsi que les autres personnes dont l'immunité est reconnue par le droit
international123(*) ou
fondée sur un traité qui lie la Belgique124(*) pendant la durée de
leur fonction125(*). De
même, il est prévu que nul acte de contrainte relatif à
l'exercice de l'action publique ne pourra être posé contre les
personnes ayant été officiellement invitées à
séjourner sur le territoire national par les autorités
belges126(*) (ou par une
organisation internationale établie en Belgique avec laquelle la
Belgique a conclu un accord de siège) pendant la durée de leur
séjour en Belgique. Cet article vise à éviter que des
personnalités politiques étrangères n'hésitent
à se rendre en visite officielle sur le territoire belge par crainte des
poursuites qui pourraient être exercées à leur encontre
(nouvel article 1er bis § 2 du titre préliminaire). Ces
immunités, il faut le souligner, vont bien au-delà de ce qui
était exigé de la Belgique pour satisfaire à ses
obligations découlant du droit international. Les pressions
extérieures et la volonté de maintenir sur le sol belge le
siège d'organisations internationales ont amené le
législateur à une extension assez considérable des
immunités.
5. La question de la compétence des
juridictions belges
La loi du 22 avril 2003 modifiait l'article 7 §
1er de la loi de 1993. La nouvelle version précisait que
« les juridictions belges sont compétentes pour
connaître des infractions prévues à la présente loi,
indépendamment du lieu où celles-ci auront été
commises et même si l'auteur présumé ne se trouve pas en
Belgique ». Ce qui paraissait être un triomphe pour les
partisans de la compétence universelle des juridictions belges
était cependant fortement atténué dans les paragraphes
suivants, un équilibre subtil ayant été atteint entre
partisans et adversaires de cette compétence.
Des exceptions importantes à cette dernière
avaient en effet été prévues. En premier lieu, l'action
publique ne pouvait être engagée que sur réquisition du
procureur fédéral lorsque l'infraction n'avait pas
été commise sur le territoire belge, ou si l'auteur
présumé n'était pas belge, ou s'il ne se trouvait pas sur
le territoire belge, ou si la victime n'était pas belge ou ne
résidait pas en Belgique depuis au moins trois ans (nouvel article 7 par
1er al. 2). Bien plus, le procureur fédéral pouvait
refuser de donner suite à une plainte déposée par un
particulier s'il estimait que, des circonstances de l'affaire, il ressortait
qu'il était préférable que l'affaire soit portée
devant les juridictions internationales, ou celles de l'Etat où le crime
avait été commis, ou celles de l'Etat dont l'auteur
présumé était le ressortissant, pour autant que cette
juridiction soit compétente, indépendante, impartiale et
équitable (nouvel article 7 par 1er al. 3). Enfin, la loi du
23 avril 2003 prévoyait que le Ministre belge de la Justice pouvait
porter un crime de droit international à la connaissance de la Cour
pénale internationale (nouvel article 7 par 2) ou de l'Etat sur le
territoire duquel l'infraction avait été commise ou de l'Etat de
la nationalité de l'auteur présumé ou de celui sur le
territoire duquel l'auteur présumé se trouvait (nouvel article 7
par 3). Si les juridictions de l'un de ces Etats décidaient de se saisir
de l'affaire, le dessaisissement de la juridiction belge saisie devait
être prononcé par la cour de cassation, sauf s'il apparaissait que
ce procès ne serait pas équitable (nouvel article 7 par 3 al. 2).
Si la législation de l'Etat dont l'auteur présumé a la
nationalité incrimine les crimes internationaux, le dessaisissement de
la juridiction belge saisie devait même être prononcé
automatiquement par la cour de cassation (nouvel article 7 par 4). Cette
disposition était applicable même pour les plaintes
déposées avant la publication de la loi, l'avis de la chambre des
mises en accusation étant demandé (nouvel article 7 par 4 al.
3).
La philosophie de cette loi était claire. La Belgique
souhaitait limiter au maximum les cas où ses juridictions seraient
compétentes pour juger de violations graves du droit international
humanitaire. Les mécanismes de dessaisissement prévus en faveur
de la Cour Pénale Internationale ou de tribunaux étrangers
posaient toutefois de graves problèmes de constitutionnalité,
ainsi que l'avait relevé le Conseil d'Etat dans ses avis127(*). De plus, des plaintes de
citoyens étrangers contre des chefs d'Etat étrangers continuaient
d'affluer en Belgique. Une nouvelle modification de la loi était
nécessaire. La loi du 5 août 2003 s'en est chargée.
La première caractéristique de cette loi est
d'intégrer les violations graves du droit international humanitaire dans
le code pénal (nouveaux articles 136bis à 136octies du code
pénal). La loi du 16 juin 1993 est par conséquent abrogée.
Le contenu des différentes violations connaît une adaptation. La
liste des infractions reprises par le statut de la cour pénale
internationale est recopiée dans la loi.
La deuxième modification concerne la compétence
des juridictions belges. Celles-ci seront compétentes non seulement pour
juger les Belges responsables de violations graves du droit international
humanitaire, mais également toute personne ayant sa résidence
principale sur le territoire belge, que celle-ci soit régulière
ou non (nouvel article 6, 1° bis du titre préliminaire du code de
procédure pénale belge).
La modification principale concerne cependant, bien entendu,
l'hypothèse où la personne soupçonnée de violations
graves du droit international humanitaire ne se trouve pas sur le territoire
national. Telle était en effet l'origine des difficultés
diplomatiques que la Belgique avait rencontrée avec certains Etats avec
lesquels elle entretenait par ailleurs des relations amicales. La nouvelle loi
est particulièrement restrictive de ce point de vue. L'étranger
non domicilié en Belgique peut désormais être poursuivi
devant les juridictions belges pour violations graves du droit international
humanitaire lorsque son crime a été commis à l'encontre
d'une personne de nationalité belge ou séjournant depuis au moins
trois ans effectivement, habituellement et légalement en Belgique
(nouvel article 10, 1° bis du titre préliminaire). Dans cette
hypothèse, il n'est pas nécessaire que l'étranger se
trouve sur le territoire belge pour pouvoir être poursuivi (nouvel
article 12 du titre préliminaire). Même dans cette
hypothèse, les poursuites, en ce compris l'instruction, ne peuvent
être engagées qu'à la requête du procureur
fédéral. Celui-ci doit requérir le juge d'instruction
d'instruire la plainte, sauf dans quatre hypothèses:
- Si la plainte apparaît manifestement mal
fondée;
- Si les faits mentionnés dans la plainte ne
constituent pas des violations graves du droit international
humanitaire;
- si une action publique recevable ne peut pas résulter
de la plainte;
- si, des circonstances concrètes de l'affaire, il
ressort que, dans l'intérêt d'une bonne administration de la
justice et dans le respect des obligations internationales de la Belgique,
cette affaire devrait être portée soit devant les juridictions
internationales, soit devant les juridictions du lieu où les faits ont
été commis, soit devant la juridiction de l'Etat dont l'auteur
est ressortissant ou celle du lieu où il peut être trouvé,
et pour autant que cette juridiction présente les qualités
d'indépendance, d'impartialité et d'équité, tel que
cela peut notamment ressortir des engagements internationaux relevant liant la
Belgique et cet Etat.
Il n'y a pas de recours possible contre cette décision
(nouvel article 10, 1° bis du titre préliminaire).
Cette disposition visait à assurer que des plaintes
n'ayant aucun lien de rattachement avec la Belgique ne continuent à
affluer auprès des parquets belges.
§5. La portée de
l'arrêt
S'il n'est pas contestable en dernière analyse,
particulièrement pour le défendeur, que le ministre des affaires
étrangères en exercice jouit de l'immunité pénale
et de l'inviolabilité nécessaires à l'exercice de ses
fonctions de représentant d'un Etat. Il demeure que l'étendu
desdits avantages reste à préciser. On a vu
précédemment que l'Etat demandeur l'envisage de la manière
la plus large tant que dure la charge publique. Cette conception n'est pas
partagée par l'Etat défendeur. La Cour a, enfin de compte, fait
prévaloir un point de vue identique à celui du demandeur. Des
voix dissonantes issues de l'organe judiciaire paraissent infirmes. Il en est
de même au sein de la doctrine.
1.1. La conception de la
République Démocratique du Congo
La République Démocratique du Congo a
affirmé dans ces écritures que l'inviolabilité du ministre
des affaires étrangères en poste interdit à toute
autorité publique étrangère de l'arrêter ou de
porter atteinte à sa personne, ou, par quelque mesure de contrainte que
ce soit, de limiter sa liberté de déplacement dans le territoire
de l'Etat étranger dont l'accès lui a été
autorisé128(*),
en revanche, l'immunité pénale absolue empêche qu'une
action publique soit dirigée contre lui ou qu'une instruction
pénale soit ouverte à son encontre à l'étranger, ou
qu'il soit poursuivi ou jugé par une juridiction répressive
nationale129(*). Comme
on peut s'en apercevoir, le Congo fait prévaloir une conception
particulièrement large des restrictions imposées par le droit
international au droit interne relativement au statut international dudit
ministre.
Appliquant sa vision au cas d'espèce, le gouvernement
Congolais avance que « la simple émission du mandat
d'arrêt alors même qu'il n'a pas été
exécuté « constitue « un acte de
contrainte » portant atteinte aussi bien à
l'inviolabilité du ministre qu'a son immunité pénale
absolue130(*). A l'appui
de ses affirmations, l'Etat demandeur se livre à l'analyse de la teneur
de cet acte de procédure pénale belge qui enjoint aux agents de
la force publique d'apporter leur concours pour son exécution.
Aux cours des plaidoiries, le Professeur Monique
Chemillier-Gendreau, conseil du Congo, a d'abord souligné que
« les immunités des responsables politiques le plus importants
s'opposent en droit international à ce que des poursuites soient
affectées à leur encontre131(*) ». Critiquant l'attitude des
« représentants de la Belgique », le conseil du
Congo constate qu'ils peinent à concilier ce point avec l'argument selon
lequel l'inculpé aurait agi à titre privé et en dehors de
ses fonctions officielles. Ils ne peuvent éviter qu'au centre se trouve
la question des immunités de juridiction de certains
représentants de l'Etat en exercice132(*). Mme Monique Chemillier-Gerdeau reprocha à la
Belgique de s'abstenir à soutenir que les immunités ne
protègent pas les personnes auxquelles elles s'appliquent lorsqu'elles
agissent à titre privé ou en dehors de leurs fonctions
officielles133(*).
D'après Me Pierre d'Argent, l'immunité du
représentant en exercice ne tient pas à la distinction que l'on
pourrait faire entre les actes de la fonction et les actes qui ne
relèveraient pas de leur exercice. En réalité, si l'acte
passé ne peut pas être reproché au représentant de
l'Etat durant l'exercice de ses fonctions ; ce n'est pas tant parce qu'il
serait effectivement un acte de ses fonctions que parce que ce reproche lui
serait adressé durant l'exercice de ses fonctions, ce que
l'immunité ne peut tolérer. En d'autres termes, le Congo soutient
que cette immunité de juridiction pénale couvre pendant la
durée d fonctions tous les actes du représentant étranger.
Il importe peu que ces actes aient été commis avant son
entrée en fonction ou après celle-ci. Il importe peu
également que les actes commis durant l'exercice des fonctions ne
puissent pas être qualifiés d'actes de la fonction134(*).
Réagissant à l'argument avancé dans le
contre mémoire belge relative d'une prétendue exception aux
immunités pour les actes accomplis pendant l'exercice des fonctions
à titre privé en dehors des fonctions officielles, le conseil du
Congo confirma son point de vue en ces termes : « durant
l'exercice des fonctions, l'immunité de juridiction en matière
pénale existe, même lorsque le crime a été commis
à titre privé ou lorsqu'il a été commis avant la
prise de fonctions135(*) ». Cela aurait pour conséquence
poursuivit l'orateur, « qu'après l'exercice des fonctions,
l'immunité n'existe plus que pour les actes accomplis dans l'exercice
des fonctions »136(*). Il étaya son argument sur les vies
exprimées par l'institut de droit international en sa session d'aout
2001 à Vancouver.
Tout au long de l'accomplissement de la charge publique,
soutient le Congo, « cette immunité était plus large et
couvrait également les actes antérieurs à l'exercice des
fonctions, les actes privés et tous les autres actes ne pouvant
être qualifiés d'actes de la fonction137(*) ». Quand bien
même le ministre des affaires étrangères en exercice en
serait en « visite privée », il n'en continuerait
pas moins « d'exercer quotidiennement ses fonctions »,
à l'aide des moyens modernes de communication qui le « mettent
à tout instant et ou qu'il se trouve à la disposition de son
Etat138(*) ».
Le Congo a tenu à marquer nettement que « le
différend soumis à la cour n'est pas relatif à
l'immunité de juridiction de l'ancien gouvernant étranger, mais
bien à l'immunité de juridiction qui le protège durant
l'exercice de ses fonctions139(*) » parce que Mr. Yerodia Abdoulaye
Ndombasi était ministre des affaires étrangères au moment
de l'inculpation. Mais la vision de l'Etat défendeur est bien
différente.
1.2. La conception de la
Belgique
On lit dans le contre-mémoire que « la
Belgique ne conteste évidemment pas le fait que les membres d'un
gouvernement étranger en exercice bénéficient de
l'immunité ». Mais là où la RDC affirme que
cette immunité est absolue, la Belgique répond qu'il existe des
exceptions en cas de crimes de droit international humanitaire140(*). En clair, l'Etat
défendeur partage l'opinion selon laquelle le ministre des affaires
étrangères en exercice jouit de l'immunité de juridiction.
Mais sa portée serait limitée par deux exceptions : la
première a trait à la responsabilité pénale en cas
de « crimes de droit international » ; la seconde est
relative aux actes accomplis durant l'exercice des fonctions à titre
privé ou en dehors des fonctions officielles.
L'un des conseils de la Belgique a admis que
« l'immunité se fonde d'abord sur la règle par in parem
et que celle-ci n'a de sens que devant une juridiction interne, non devant une
juridiction internationale. La Belgique est d'accord sur ce point avec la
RDC141(*) ».
Mais il a ajouté que « les statuts des juridictions
pénales internationales peuvent, à bon droit, être
considérées comme un des fondements de l'exclusion de
l'immunité d'un gouvernement étranger devant les juridictions
internes142(*)».
Au terme des plaidoiries, Me D. Bethlehem a une fois de plus,
réaffirmé à la suite des questions posées par le
conseil de juridiction et immunité d'exécution. Non seulement
a-t-il affirmé que cette distinction est bien établie en droit,
notamment au sujet des immunités d'Etats, mais encore
« the whole trend towards retsrictive immunity, of which
circumstances involving serious violations of international humanitarian Law is
a most important part is That immunity in all sorts of areas is no longer
absoute. This applies too in the case of ministers for foreign affairs in
office143(*) ».
1.3. L'analyse de la Cour
Internationale de Justice
C'est à la suite d'une analyse fouillée des
fonctions du ministre des affaires étrangères, à la
manière de la doctrine144(*) qui s'y est intéressée, que la plus
haute instance internationale énonce la solution sur ce point :
« La cour en conclut que les fonctions d'un
ministre des affaires étrangères sont telles que, pour toute la
durée de sa charge, il bénéficie d'une immunité de
juridiction pénale et d'une inviolabilité totale à
l'étranger. Cette immunité et cette inviolabilité
protègent tout acte d'autorité de la part d'un autre Etat qui
ferait obstacle à l'exercice de ses fonctions145(*) ».
Le premier étalon de l'immunité pénale et
de l'inviolabilité dudit haut responsable de l'Etat repose sur le temps.
Là encore, le juge international semble avoir quelque chose peu rejoint
le demandeur en soulignât le rôle centrale de ce facteur dans
l'affaire. La cour paraît avoir partagé les vues du Congo sur
l'étendue « absolue », pour ce
dernier, « totale » pour celle-là, de
l'immunité pénale et de son corollaire l'inviolabilité.
Les parties en litige, spécialement l'Etat
défendeur, ont longuement débattu dans leurs écritures et
dans leurs plaidoiries de la distinction entre actes que le ministre des
affaires étrangères poserait à titre
« officiel » et ceux qu'il accomplirait à titre
« privé ». Elles sont ainsi soumis à la
censure de la cour certaines décisions nationales qui ont
opéré cette différenciation146(*). Quelque séduisante
qu'elle puisse éventuellement apparaitre davantage au plan didactique
que pratique cette distinction a été promptement
écartée par le juge international en ces termes :
« il n'est pas possible d'opérer la distinction entre les
actes accomplis par un ministre des affaires étrangères à
titre officiel et ceux qui l'auraient été à titre
privé, pas plus qu'entre les actes accomplis par
l'intéressé avant qu'il n'occupe les fonctions de ministre des
affaires étrangères et ceux accomplis durant l'exercice de ses
fonctions147(*) ».
CONCLUSION
Quelles sont les conclusions que l'on peut tirer de
l'arrêt Yerodia de la Cour Internationale de Justice ? A
première vue, elles semblent limitées. Un ministre des affaires
étrangères bénéficie d'une immunité
pénale pendant la durée de ses fonctions. Cette immunité
est absolue puisqu'elle couvre les crimes graves de droit international
humanitaire.
La Cour a réglé de manière
définitive le litige qui opposait le Congo à la Belgique à
la suite de l'émission et de la diffusion internationale d'un mandat
d'arrêt le 11 avril 2000 contre le ministre des affaires
étrangères de la République Démocratique du Congo
en exercice pour les allégations de crimes de guerre et de crimes contre
l'humanité au nom d'une compétence universelle.
L'injonction donnée par la cour à la Belgique de
réduire à néant le mandat alors que Mr Yerodia
n'était plus ministre des affaires étrangères, a aussi un
autre avantage juridique implicite. Elle interpelle nécessairement
l'Etat défendeur à mettre un terme à sa politique
d'ingérence y compris d'ingérence judiciaire dans son ancienne
colonie, décolonisée formellement depuis 1960. Bien que cette
demande instante du Congo, omniprésente dans les conclusions
écrites et orales tout au long de la procédure, de la phase
conservatoire à la phase du fond, n'ait pas été
expressément rencontrée par la Cour.
L'arrêt condamne de manière définitive et
sans appel une initiative aussi bien insolite qu'injustifiée. A juste
titre, le juge Francisco REZEK a estimé dans la phase de l'examen des
mesures conservatoires en cette affaire : « c'est la
première fois qu'un Etat s'adresse à la cour pour dire qu'un
membre de son gouvernement fait l'objet d'un mandat d'arrêt
délivré par une juridiction d'un autre Etat et que le
gouvernement de ce dernier apporte un soutien à ce mandat d'arrêt
en le faisant parvenir à l'ensemble de la communauté
internationale. Prima facie, je considère comme valable la thèse
qu'il y a atteinte à la règle fondamentale de
l'égalité souveraine des Etats »148(*).
Comme le montre le texte, le centre de gravité de la
recherche repose sur les immunités du ministre des affaires
étrangères en fonction. Il me semble en avoir rappelé
à la suite de la Cour, le principe, décrit les caractères,
indiqué la portée, montré les limites et approuvé
la sanction édictée par la décision judiciaire
internationale. Nulle part, une quelconque exception à la règle
coutumière n'a été décelée. En
conséquence, le propos admet la responsabilité internationale de
la Belgique. Au motif qu'elle a violé l'obligation coutumière
imposant l'observatrice des immunités pénales et de
l'inviolabilité du ministre des affaires étrangères en
poste. Il en a résulté au minimum un dommage moral causé
au Congo que la Belgique devait et a effectivement réparé.
La Cour semble considérer comme un fait acquis que le
ministre des affaires étrangères doit bénéficier
d'une immunité totale pendant la durée de leurs fonctions.
Pourtant, les éléments lui permettent d'arriver à cette
conclusion étaient minces. La pratique judiciaire était
limitée à un arrêt américain. Quant à la
doctrine, si elle s'accordait à reconnaitre au ministre des affaires
estrangères une immunité aux actes commis dans l'exercice des
fonctions dans les autres cas.
Cet arrêt était extrêmement attendu. Les
poursuites engagées contre l'ex dictateur chilien Augusto Pinochet
venaient à peine de connaitre leur épilogue. La
recevabilité de la plainte déposée devant la justice belge
contre le premier ministre Ariel Sharon, application spectaculaire de la loi
belge quelque semaine après le prononcé de l'arrêt Yerodia.
Celui-ci avait par conséquent un double impact potentiel.
En premier lieu, il intervenait à un moment où
la question de l'immunité dont peuvent bénéficier les
chefs d'Etat(en exercice) et les chefs de gouvernement étaient à
l'actualité. En second lieu , beaucoup s'attendraient à ce
que la Cour Internationale de Justice fasse le procès de la loi belge de
compétence universelle et qu'elle déclare si oui ou non cette loi
était conforme au droit international en vigueur. A première vue,
l'arrêt ne tranche aucune de ces questions. En y regardant de plus
près, il semble toutefois possible de trouver des éléments
susceptibles d'y répondre.
En ce qui concerne les bénéficiaires de
l'immunité, la Cour se limite scrupuleusement à traiter le cas du
ministre des affaires étrangères. A aucun moment elle ne laisse
entendre que le même régime devrait être appliqué aux
chefs d'Etat ou de gouvernement. Un examen de sa motivation laisse toutefois
suppose que l'immunité reconnue s'étende également
à ces deux catégories de personnes. Elle est fonctionnelle
puisqu'elle découle de la nécessité pour un ministre des
affaires étrangères de s'acquitter correctement de ses fonctions
qui impliquent de nombreux déplacements à l'étranger. Les
chefs d'Etat et de gouvernement sont eux aussi amenés à se rendre
fréquemment en dehors du territoire national. Ils semblent des lors
devoir bénéficier de la même immunité que le
ministre des affaires étrangères. Cela implique que pendant
l'exercice de leur fonction, ils ne puissent être inquiétés
par la justice d'un Etat tiers, que les actes incriminés aient
été commis avant leur entrée en fonction ou pendant
celle-ci. Le raisonnement ne semble par contre pas devoir s'étendre aux
autres membres des gouvernements nationaux. Même si une partie de leur
fonction se découle à l'étranger, l'essentiel de leur
tache prend place sur le territoire national.
Il ne semble dès lors y avoir aucune raison pour leur
reconnaitre une immunité aussi large, sous réserve de l'article
21§2 de la convention du 8 décembre 1969 sur les missions
spéciales.
Le fait que les chefs d'Etat ou de gouvernement jouissent
d'une immunité totale ne signifie toutefois pas qu'ils
bénéficieront d'une impunité. Ils pourront toujours
être jugés dans les quatre hypothèses relevées par
la Cour Internationale de Justice. Dans le cas de M. Yerodia, par exemple, la
Belgique serait dans son droit d'émettre un nouveau mandat d'arrêt
à son encontre des lors où il avait cessé de remplir la
fonction de ministre des affaires étrangères de la RDC. De
même, M. Sharon aurait pu être jugé en Belgique si
après l'expiration de son mandat, il se rendait sur le territoire de cet
Etat. Cette possibilité allait faire couler beaucoup d'encre et aboutir
enfin de compte à une révision fondamentale de la loi belge de
compétence universelle.
En ce qui concerne la légalité de la loi belge
de compétence universelle, la Cour n'aborde la question que par la
bande, puisqu'elle ne pouvait la trancher. Elle reconnait que les conventions
internationales tendant à la prévention et à la
répression de certains crimes graves ont mis à la charge des
Etats des obligations de poursuite ou d'extradition et leur ont fait par suite
obligation d'étendre leur compétence juridictionnelle. Il est
toutefois difficile de conclure à la reconnaissance et opinions
individuelles des juges de la Cour, si cette reconnaissance implique
l'autorisation pour les Etats de poursuivre uniquement les inculpés
trouvés sur leur territoire ou toute personne soupçonnée
d'avoir commis des crimes graves de droit international n'importe où
dans le monde.
La mise en place de la Cour Pénale Internationale va
évidemment soulager en grande partie les Etats de la poursuite des
individus soupçonnés de violations graves du droit humanitaire.
Il importe toutefois de rappeler que certains Etats n'ont pas ratifié le
statut de Rome prévoit que les Etats peuvent refuser pendant une
période de sept ans à partir de l'entrée en vigueur du
statut à leur égard, la compétence de la cour en ce qui
concerne les crimes de guerre lorsqu'il est allégué qu'ils ont
été commis sur leur territoire ou par leurs ressortissants. Un
certain nombre de violations graves du droit international humanitaire
continueront par conséquent à échapper à la
compétence de la Cour. Les Etats devront dès lors les juger. Il
est difficile à l'heure actuelle de dire s'ils seront compétents
pour le faire en l'absence de lien classique de rattachement. La Belgique avait
donné l'exemple mais y a renoncé sous la pression internationale.
Il est dès lors peu probable qu'un autre Etat tentera de l'imiter avant
longtemps.
BIBLIOGRAPHIE
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avril 1961 entrée en vigueur le 24 avril 1964,
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développement sur la protection diplomatique p.154 et s.
* 3 _ Vattel. Le droit des
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* 4 _ Car ces doctrines sont
à priori toujours d'actualité.
* 5 _ Rapport
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diplomatique juillet-août 1998.
* 6 _ Article 1.al 2 de la
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* 7 _ Idem Article 3.
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* 9 _ Idem.
* 10 _ Jugement rendu le 25
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3eme Graduat , Unikin 2008-2009
* 19 _ MONTESQUIEU.
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* 20 _ Esprit des lois, livre
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sans nom d'auteur à Genève en 1748 et mis à l'index par le
pape (dès sa parution) et la Sorbonne, 1748.
* 21 _ Préambule de la
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entrée en vigueur le 24 avril 1964
* 22 _ Articles 28, 29, 30,31
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* 23 _ CHARPENTIER (J).
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* 25 _ SALOMON Jean ULB,
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* 26 _ DUPUY (PM). Op.
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* 27 _ NGUYEN (QD). Op.
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* 28 _ Salomon Jean. Op.
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* 29 _ Outre les ouvrages
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agent légal action. ICLG 1998, p 950 et s,
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2003.
* 30 _ Lorsqu'est en cause une
organisation n'est due que si celle-ci est une organisation au sens du droit
international public et pour autant qu'elle puisse se prévaloir d'une
personnalité propre devant les autorités du for (comp. à
propos d'une ONG bénéficiaire par, assimilation d'un statut
comparable à celui d'une institution spécialisée des
Nations Unies. ICNC V. Calleja, 28 septembre 1990, Philippines op.cit, ILR, vol
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* 31 _ BULA - BULA(S).
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faculté de droit 3emeGraduat. p. 222,
* 32 _ BULA - BULA (S). Op.
Cit. p. 223
* 33 _ Idem. Op. Cit.,
p. 223
* 34 _ Voir la pratique des
Etats : OL. No 301 du 16 décembre 1963 relative à
la répression des offensés en vers les Chef d'Etat
étrangers et des outrages dirigés contre des agents
diplomatiques, M.C. du 2 janvier 1964, pp. 7 - 8 ; la loi
Américaine de 1976 et celle du Royaume - Uni de 1978, sur l'affaire du
Général Pinochet. Commentaire de Dupuy Pierre Marie, crimes et
immunités ou dans quelle mesure la nature de premières
empêche l'exercice des seconds, R.C.D.I.P, 1999, pp. 286 - 296
* 35 _ Cour International de
Justice. Affaire relative au mandat d'arrêt du 11 avril 2000. Arrêt
du 14 février 2002, CIJ, Rec. 2002, par 53
* 36 _ Cour International de
Justice. Affaire relative au mandat d'arrêt. Op. Cit. p 51.
* 37 _ BULA - BULA(S), les
immunités pénales et inviolabilité du ministre des
affaires étrangères en droit international. Principe.
Caractères. Portée. Exceptions. Limites. Sanctions. Affaire
du mandat d'arrêt du 11 avril 2000. R.D.Congo c. Royaume de Belgique,
CIJ, arrêt du 14 février 2002 Kinshasa, PUK, 2004, pp.186
* 38 _ Convention sur les
relations consulaires, du 24 avril 1863 entrée en vigueur en 1967
* 39 _ La Convention des
Nations Unies sur les misions spéciales adoptée le 16
décembre 1969 dans son résolution 2530, entrée en vigueur
le 21 juin 1995 dans son article 1er.
* 40 _ DREYFUS (S), Op.
Cit., p 179.
* 41 _ KIRONGOZI LIMBAYA.
Cours de Droit International Public, notes de cour, 3eme
Graduat SPA, UNIKIN 2008-2009
* 42 _ CHARPENTIER(J) Op.
Cit. , p.32
* 43 _ DREYFUS(S). Op.
Cit., p.180
* 44 _ CHARPENTIER(J), Op.
Cit., p.32
* 45 _ LOUIS LEFUR.
Précis de droit international public, 4eme
édition, Dalloz, paris, 1939, p.252
* 46 _ Convention de Vienne
sur les relations diplomatiques du 18 avril 1961 entrée en vigueur le 24
avril 1964
* 47 _ NGUYEN. Op.
Cit., p. 713
* 48 _ CHARPENTIER(J). Op.
Cit., p.33
* 49 _ NGUYEN. Op.
Cit., p.712
* 50 _ Convention Vienne du 23
mai 1969 sur le droit des traités
* 51 _ MAMPUYA,(NT). Droit
International Public, Unikin, 3eme Graduat, 1999-2000, note
polycopiées, p.142
* 52 _ COLETTE BRACKMAN, la
loi de compétence universelle censurée, in libre Belgique
du 16 juin 2002, p. 8.
* 53 _ SIANGANU DIMBUNGU,
l'immunité diplomatique en cas de poursuite pour crime contre
l'humanité : affaire Yerodia Abdoulaye Ndombasi, TFC sous la
direction du professeur E.J LUZOLO BAMBI LESSA, faculté de droit,
Unikin, 1999-2000, p.41.
* 54 _ Article 27 du Statut de
Rome de la Cour Pénal International.
* 55 _ AKELE ADAU (P) et SITA
AKELE MWILA (A), le crime contre l'humanité en droit congolais,
CEPAS, Kinshasa 1999, p. 30.
* 56 _ Convention de Vienne
sur les relations diplomatique de 1961.
* 57 _ Cour internationale de
Justice. Affaire du mandat d'arrêt du 11 avril 2002, Contre
mémoire de la Belgique,
p. 8.
* 58 _ Moniteurs belge du 5
aout 1993, p. 17751. Pour un commentaire, voir A. Adrien, E. David, C. Van
Den Wijngaert et J. Verhaegen, « commentaire de la loi du 16 juin
1993 », revue de droit pénal et criminologie 1994, pp.
1114 - 1184. Sur la première modification de la loi, en 1999.
* 59 _ Depuis lors Mr. Yerodia
à été désigné le 23 avril 2003 comme l'un
des quatre vices - président de la République Démocratique
du Congo.
* 60 _ Cette clause de statut
de la Cour international de justice, à laquelle les Etats sont libres de
souscrire ou non, prévoit que tout litige s'élevant entre deux
Etats liés par la clause sera automatiquement soumis à la Cour
international de justice.
* 61 _ Cour International de
Justice. Mémoire du Congo. Op. Cit., p. 29 par 46. Les soulignés
sont du demandeur. Les Congo s'appuis sur une doctrine abondante.
* 62 _ Plaidoirie de Me Pierre
d'Argent, CR 2001/5, p. 41
* 63 _ Cour Internationale de
Justice. Contre mémoire de la Belgique, Op. Cit. , p. 110, par 3,4. 4
* 64 _ Idem. P. 111, par 3.
4. 6. Le défendeur signale les conventions de 1969 sur les missions
spéciales qui, quoique RES inter alios acta n'est constitue pas moins
une référence utile pour certaines question de principe dont les
bases se trouvent dans le droit international coutumier.
* 65 _ Ibidem, p. 112, par.
3. 4. 7
* 66 _ Cour Internationale de
Justice. Mémoire du Congo, Op. Cit. , p. 30, par 47.
* 67 _ Idem, p. 34 - 35.
* 68 _ Cour Internationale de
Justice. Mémoire de la Belgique. Op, Cit. , p.177, par, 154.
* 69 _ Idem. Pp. 178-180.
* 70 _ Ibidem. P. 179.
* 71 _ Cour Internationale de
Justice. Affaire relative au mandat d'arrêt du 11 avril 2000, arrêt
rendu le 14 février 2002, point 23 et 24.
* 72 _ Idem, point 25.
* 73 _ Ibidem. Point 26
à 28.
* 74 _ Voire le site internet
de la Cour Internationale de Justice à l'adresse suivant :
Www.
Icj-cij.org/cijwww/cdocket/cCOBE/ccobejudgment/ccobe_cjudgment_20020214_oda_english.PDF
* 75 _ Cour Internationale de
Justice. Affaire relative au mandat d'arrêt du 11 avril 2000.Op, Cit.,
point 29, 30 et 31
* 76 _ Idem. Point 32.
* 77 _ Ibidem, point 33 et
34.
* 78 _ Ibidem. Point 35.
* 79 _ Ibidem. Point 36.
* 80 _ Cour internationale de
Justice. Affaire relative au mandat d'arrêt du 11 avril 2000. Op, Cit.,
point 52.
* 81 _ Idem. Point 54 et
55.
* 82 _ Voir le site internet
de la Cour à l'adresse suivant :
http/www.icj-cij.org/cijwww/cdocket/cCOBE/ccobejudgment/ccobe_cjudment_20020214_vdwyngaert.PDF
* 83 _ Un seul, cas
d'immunité reconnue à un ministre des affaires
étrangères à pu être trouvé dans les
jurisprudences nationales des Etats : Chong Boom Kim V. Kim Yong Shiki and
David Kim, Circuit court (first circuit, state of Hawaï), 9 septembre 1963
AJIL 1964.
* 84 _ CAHIER (P), le droit
diplomatique contemporain, Genève, Droz, 1962, p. 360, et SALOMON
(J) Op, Cit., p. 539.
* 85 _ Voir le site internet
de la Court à l'adresse suivant :
http/www.icj-cij.org/cijwww/cdocket/cCOBE/ccobjudgment/ccobe_cjudgement_20020214_al-khasaweh_english.PDF
* 86 _ Institut de Droit
Internationale. Article 14 de la résolution du 13 août 1895
* 87 _ Cour internationale de
Justice. Affaire relative au mandat d'arrêt du 11 avril 2000. Op, Cit.,
point 56.
* 88 _ House of Lords, Regina
v. Bartle and the commissioner of police for the metropolis and others exported
Pinochet, 24 mars 1999, ILM 1999 p. 592.
* 89 _ Cour de cassation
française. 13 mars 2001, R.G.D.I.P, 2001, p.474.
* 90 _ En raison du
caractère sin particulier de la rédaction de ses arrêts,
où chaque juge est amené à faire de ses propres
conclusions.
* 91 _ Cour Internationale de
Justice. Affaire relative au mandat d'arrêt du 11 avril 2000. Op, Cit.,
point 58.
* 92 _ Pour une analyse des
rapports entre l'arrêt Yerodia et Kadhafi de la cour de cassation
française, voir CORTEN (O) et WEYEMBERGH (A), « que penser
de l'arrêt de la Cour de cassation française dans l'affaire
Kadhafi après l'arrêt Yerodia rendu par la Cour International de
Justice ? », journal des tribunaux 2002, pp. 4309-434.
* 93 _ Voir l'article 7 du
statut du tribunal militaire international de Nuremberg, Article 6 du statut du
tribunal militaire de Tokyo, Article 7 par 2 du statut du tribunal pénal
international pour l'ex-Yougoslavie, Article 6 par 2 du statut du tribunal
pénal international pour lez Rwanda.
* 94 _ Cour Internationale de
Justice. Affaire relative au mandat d'arrêt du 11 avril 2000. Op, Cit.,
point 58-61.
* 95 _ La Cour cite comme
exemple le Tribunal Pénal pour l'ex-Yougoslavie, le Tribunal
Pénal International pour le Rwanda et la Cour Pénal
International.
* 96 _ Ont voté contre
les juges Oda et Al- Khasawneh, ainsi que Mme Van den Wijngaert, juge ad hoc de
la Belgique. Chacun d'entre eux à rédigé une opinion
dissidente, dont les références ont «été
données supra.
* 97 _ Cour Internationale de
Justice. Affaire relative au mandat d'arrêt du 11 avril 2000. Op, Cit.,
point 59.
* 98 _ Voir le site internet
de la Cour à l'adresse suivant :
http/www.icj-cij.org/cijwww/cdocket/cCOBE/ccobejudgement/ccobe_cjudgement_20020214_koroma_english.PDF
* 99 _
http/www.icj-cij.org/cijwww/cdocket/cCOBE/ccobejudgement/ccobe_cjudgement_20020214_higgins-kooijmans-buergenthal_english.PDF
* 100 _ «White no general
rule of positive international law car as yet be asserted which gives to states
the right to punish foreign nationals for crimes against humanity in the same
way as they are, for instance, entitled to punish acts of piracy, there are
clear inclinations pointing to the gradual evolution of a significant principle
of international law to that effect»(Oppenheim's international law,
Pearson's higher education, 1996, 9eme edition, p. 998.
* 101 _
www.icj-cij.org/cijwww/cdocket/cCOBE/ccobejudgement/ccobe-cjudgement_20020214_guillaume.PDF
* 102 _ Cour Internationale
de Justice. Affaire relative au mandat d'arrêt du 11 avril 2000. Op,
Cit., point 60.
* 103 _ Salomon(J). Op,
Cit., p.300.
* 104 _ Article 31 par 4 de
la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques du 18 avril 1961.
* 105 _ Institut de Droit
Internationale. Article 14 de la résolution du 13 aout 1895.
* 106 _ Cour Internationale
de Justice. Affaire du mandat d'arrêt. Op, Cit., point 61.
* 107 _ SALOMON (J). Op,
Cit., pp. 304-305, VERHOEVEN, « les décisions Pinochet
au Royaume » Uni, journal des tribunaux 2000, p. 227.
* 108 _ HENZELIN (M). Le
principe de l'universalité en droit pénal international.
Droit et obligation pour les Etats de poursuivre et juger selon le principe
d'universalité. Bruxelles, Bruyant, 200, pp. 354-356, ainsi que les
arrêt in ré best and éthers de la Cour provincial de
Copenhague du 18 juillet 1949, et Otto Abetz de la Cour de cassation
française du 28 juillet 1950 (cités par SALOMON (J). manuel de
droit diplomatique. Op, Cit., p. 305), de même que l'article 6 de la
Convention du 9 décembre 1948 sur la prévention et la punition
des crimes de génocide.
* 109 _ Cour Internationale
de Justice. Affaire relative au mandat. Op, Cit., point 73.
* 110 _ Idem. Point 74.
* 111 _ CPJI. 13 septembre
1928, Usine de Chorzów, série A, no 17, p. 47.
* 112 _ Ont voté
contre le juge Oda, Higgins, Kooijmans, Al-Khasawneh et Buergenthal, ainsi que
Mme Van den Wijngaert, juge ad hoc de la Belgique.
* 113 _ VERHOEVEN (J),
Droit International Public, Bruxelles, lancier, 2000, p.455
* 114 _ Jurisprudence de
Liège, Mons, Bruxelles 2002, p.918
* 115 _ Journal des Tribunaux
belge 2002, pp.539-544.
* 116 _ Seul M. Sharon
bénéficiait d'une immunité au moment de ces
arrêts.
* 117 _ Cour de cassation
belge, 12 février 2003, ministère public c. S.A et Y.A, Journal
des Tribunaux 2003, p. 247. Et le note de Pierre d'Argent, « Monsieur
Sharon et ses juges belge », pp.247-252.
* 118 _ Document du Parlement
et Senat belge. Session 1990-1991, 1317-1, p.16.
* 119 _ On rappellera
notamment la plainte déposée le 13 mars 2003 contre l'ancien
président George Bush et d'autres hauts responsables américains
pour leur rôle dans la guerre du Golf de 1991.
* 120 _ Moniteur belge du 7
mai 2003, p.24. 846. Pour un commentaire de Pierre d'Argent et J. d'Aspre mont
Lyndon, « la loi de compétence universelle revu mais pas
corrigée ». Journal des Tribunaux 2003, pp.480-481
* 121 _ Pour une analyse
approfondie lire Pierre d'Argent, « l'expérience belge de
la compétence universelle : Much ado about nothing ?, et
Jacob (coorg), actualités de droit pénal et de
procédure pénal, Bruxelles, lancier, 2003, pp. 403-456.
* 122 _ BULA-BULA (S).
Opinion individuelle jointe à l'arrêt du 14 février 2002,
p. 48.
* 123 _ Ce point concerne les
diplomates.
* 124 _ Ce point concerne les
responsable des organisations internationales avec les quelles la Belgique a
conclu un accord de siège.
* 125 _ Ceci implique que,
conformément au droit international, des poursuites pourraient
être intentées à l'encontre de ces personnes une fois leur
fonction achevée.
* 126 _ Aux quelles il parait
logique d'assimiler les autorités des entités
fédérées.
* 127 _ Avis du conseil
d'Etat belge. Document du Parlement et Senat belge. Session 2002-2003, 2-125/3
du 16 janvier 2003 et 2-1256/13 du 4 avril 2003.
* 128 _ Cour Internationale
de Justice. Mémoire du Congo. Op, Cit., p.31.
* 129 _ Idem. P.31, par
50.
* 130 _ Cour Internationale
de Justice. Mémoire du Congo. Op, Cit., p.31, par 51.
* 131 _ Plaidoirie de Mme M.
Chemillier-Gendreau, CR 2001/5, p.26.
* 132 _ Idem
* 133 _ Ibidem
* 134 _ Voir plaidoirie de Me
Pierre d'Argent, CR2001/5, p.44
* 135 _ Idem, p.45
* 136 _ Ibidem
* 137 _ Voir plaidoirie de Me
Pierre d'Argent, op.cit, le conseil du Congo cite sir Arthur Watts
également cité dans le contre mémoire belge, p.110
* 138 _ Idem, p.113
* 139 _ Ibidem
* 140 _ Cour internationale
de justice, le contre mémoire du royaume de Belgique, op.cit,
p.121
* 141 _ Voir plaidoirie du
professeur E. David, CR 2001/11, p.15
* 142 _ Idem, p.20 il
confirme plus loin que ces statuts étaient des éléments de
pratique applicables aux juridictions nationales
* 143 _ Ibidem, p.11
* 144 _ On consultera
à ce sujet, sir Arthur Watts, the légal position international
Law pf Head of states, Head of gouvernement and forgien ministres, recueil des
cours de l'académie de droit international de la Haye tome 247, vol III,
1994, pp. 100-101, Joe Verhaeren, l'immunité de juridiction et
d'exécution des chefs d'Etats et anciens chefs d'Etats, op.cit,
pp 66-67, §42-43
* 145 _ Cour internationale
de justice, affaire relative au mandat d'arrêt, op.cit, p.54
* 146 _ Les décisions
rendues par la chambre des lords du Royaume-Uni en date du 24 mars 1999 dans
l'affaire Pinochet
* 147 _ Cour Internationale
de Justice. Affaire relative au mandat d'arrêt, Op, Cit.,
§55.
* 148 _ V. Francisco REZEK,
opinion dissidente jointe à l'ordonnance du 8 décembre 2000, CIJ,
rec., 2000, p.216
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