LES CAUSES DU DEVELOPPEMENT DES COMMUNAUTES DE PRIERE EN
MILIEU
PENTECOTISTE. CAS DE LA REGION DE OUAGADOUGOU
Par : Charles Joseph GUIBLA
Un Mémoire Présenté au corps enseignant
de l'Institut Biblique Supérieur Des Assemblées de Dieu En
Accomplissement Partiel Des Exigences De la Licence en
Théologie Sous la Direction du Pasteur Moïse SAWADOGO
Institut Biblique Supérieur des Assemblées de
Dieu (IBS / AD) Ouagadougou - Burkina Faso Juin 2009
INSTITUT BIBLIQUE SUPERIEUR DES ASSEMBLEES DE
DIEU OUAGADOUGOU - BURKINA FASO
Sur recommandation du Directeur de l'IBS/AD et du
Directeur de Mémoire, le projet de mémoire est accepté
comme satisfaction partielle des exigences requises pour la Licence en
Théologie
Directeur de l'IBS / AD
Maître de Mémoire
Date
DEDICACE Je dédie ce mémoire
:
A Mes Très Chères mamans Rabinda et Anne et
à Yaaba pour leur persévérance dans la
prière,
A Ma Bien-Aimée Ariane, pour une vie de
prière plus fervente,
A Rose, Emmanuel, Paul, Marc, Lydie, Nathanaël et
Lydia, je vous en supplie dans le Seigneur, restez toujours attachés
à Celui qui est le Rocher des âges,
A Bertrand, Evelyne et Steve, pour leur amour pour le
Seigneur, Et A tous ceux qui aiment prier.
REMERCIEMENTS
Gloire soit rendue à Dieu pour cette oeuvre qu'Il a
inspirée du début jusqu'à la fin et pour ma formation
biblique dans cet Institut.
Je tiens à remercier les églises suivantes et leurs
responsables qui m'ont soutenu pendant ma formation biblique : Les Pasteurs
Jean-Baptiste Sawadogo, Samuel Kaboré et Paul Bonkoungou et les Eglises
des Assemblées de Dieu de Cissin I, Gueswendé et Bread of Life de
Kumasi et leurs fidèles.
Ma reconnaissance va aussi à ceux qui ont répondu
à mes questions et qui m'ont apporté leur appui technique et des
suggestions dans ce travail : le Docteur Etienne Zongo, les pasteurs Moïse
Sawadogo, William Luj, Modeste Kouraogo, Mlle Béatrice Druart, mes
camarades de classe.
Ma gratitude à ceux qui m'ont apporté leur aide
spirituelle, matérielle et financière pendant mes études :
les familles Sauret, So et Guinko, Sarambé, Mme Boly Asséta, le
Département Enfant et la Jeunesse des Assemblées de Dieu de
Cissin I.
Je ne saurais oublier tous ceux qui m'ont soutenu dans
l'anonymat.
Que le Seigneur vous bénisse abondamment
!
TABLE DES MATIERES DEDICACE iiiREMERCIEMENTS iv
CHAPITRE I iINTRODUCTION 1
Raisons du Choix du Sujet 1
Problématique 2
Délimitation du Sujet 4
Objectif de l'Etude 4
Méthodologie 5
Hypothèse 5
Définitions 6
Prière 6
Prieur 6
Aperçu de la Thèse 7
CHAPITRE II 8
DEVELOPPEMENT 8
Les Racines du Phénomène 8
Le Montanisme 8
Les Mouvements Pentecôtistes 9
Les Spécificités du Pentecôtisme Africain
11
Un Pentecôtisme Délocalisé 11
Un Pentecôtisme Remède 12
Les Dérapages du Pentecôtisme Africain 13
Le Recours Systématique à la Délivrance
13
La Reprise de la Théologie de la Prospérité
et de la Guérison 13
La Théologie Africaine et les Religions Traditionnelles
Africaines (RTA) 15
Les Tendances Pentecôtistes au Burkina Faso 17
Les Causes Religieuses et Spirituelles 19
Les Eglises en Question 19
L'Affirmation de l'Ego Spirituel 22
Les Chrétiens en Question 24
L'Attrait du Phénomène Miraculeux 26
Les Causes Sociales et Economiques 28
La Résurgence de la Société Animiste 28
La Prière, une Entreprise 31
Examen Biblique du Phénomène 33
Le Chrétien et la Prière 33
Une Vision Déformée de la Prière 33
La Prière à la Lumière de la Parole de Dieu
35
Le Sacerdoce Universel des Croyants 38
Le Ministère Prophétique Aujourd'hui 39
Examen Biblique du Ministère de la Délivrassnce
41
Vous Avez Reçu Gratuitement, Donnez Gratuitement 46
Esquisse de Solutions au Problème 47
Le Discernement des Esprits 47
Au-delà des Dons de l'Esprit 49
La Reconnaissance des Ministères et des Dons par l'Eglise
50
Cultiver une Relation Personnelle Avec Dieu 52
CHAPITRE III 54
CONCLUSION 54
BIBLIOGRAPHIE 58
ANNEXES 61
CHAPITRE I
INTRODUCTION
La Parole de Dieu affirme l'importance de la prière :
« Faites en tout temps par l'Esprit toutes sortes de prières et de
supplications. Veillez à cela avec une entière
persévérance, et priez pour tous les saints. » (Ep 6. 18)
Cette activité spirituelle a une importance particulière aux yeux
de Dieu, et en lisant les Saintes Ecritures, il y a des prières qui
venant de toutes sortes de personnes (serviteurs, rois, prophètes,
disciples, chrétiens, le Fils de Dieu...) se sont élevées
vers le Père. Dans l'histoire de la chrétienté, la
prière va prendre plusieurs formes ou manifestations.
Raisons du Choix du Sujet
Phénomène religieux, la prière peut sans
doute être qualifiée de mouvement social. Elle est loin
d'être un fait isolé et individuel. On peut l'inscrire dans le
cadre du mouvement collectif de masse ou de mobilisation sociale. Il s'agit
d'un fait à la fois religieux et social.
L'une des plus grandes manifestations du pentecôtisme
africain est la prière. Le chrétien africain a-t-on l'habitude de
dire, prie et prie fort. Plusieurs auteurs sont revenus sur la question. On
pourrait citer entre autres : Pierre Joseph Laurent, Ludovic Lado, Bernard
Urlacher, Sandra Francello ou Albert de Surrgy. Le Burkina Faso n'est pas en
marge de cette tendance, loin s'en faut. Plusieurs indicateurs montrent qu'il
est au devant de la scène en la matière.
En effet, le milieu pentecôtiste burkinabé est de
plus en plus confronté à un mouvement dont l'ampleur n'est jamais
égalée : le développement des communautés de
prière. Ce phénomène se manifeste sous plusieurs facettes.
On a l'image du prophète prieur qui se retrouve sous son hangar. On a
aussi, celle des communautés de prière qui se transforment
parfois en des véritables «camps de prière». Quelque
que soit son modèle de manifestation, le phénomène est
d'actualité : organisation de rallye de prière, de semaine de
prière, de jeûne d'Esther...De ce fait, nous pouvons dire que le
prophétisme au Burkina Faso nous offre un véritable laboratoire
d'observation d'un fait dont les contours, les motivations, sinon les
véritables mobiles restent à définir, à explorer,
à étudier. Alors, qu'est ce qui ne va pas dans ce
phénomène et qui suscite en moi des interrogations ?
Problématique
D'abord, le constat que je fais est qu'il existe dans la
Région de Ouagadougou de nombreux prieurs et communautés de
prière. Dit autrement, le phénomène n'est pas à son
début. Il prend de plus en plus d'ampleur avec diverses formes
d'expression. Les prieurs ne se contentent plus d'exercer leur activité
au sein des communautés
religieuses ou des églises. On les retrouve parfois dans
les quartiers, dans des maisons, dans des domiciles privés, et parfois
même dans des logements collectifs. Soulignons cependant que les
communautés du Nouveau Testament se réunissaient dans les maisons
et il existe aujourd'hui des cellules de maisons. Mais ces communautés
de prière ont des caractéristiques particulières : elles
drainent parfois des foules, les consultations sont individualisées et
certaines séances de prière sont exubérantes.
L'exercice de l'activité est fait de façon
libérale. L'église a peu ou pas d'emprise sur les prieurs.
Certains prieurs exercent leur activité en faisant fi des
églises.
Le droit de regard ou de contrôle de l'église sur
ces derniers est limité. Certains prieurs se sont rebellés contre
leur église d'origine parce que cette dernière voulait les
contrôler ou les discipliner. D'autres demeurent cependant toujours sous
la coupe de l'église. Quoiqu'il en soit, il existe un conflit qui est
sous jacent à l'éclosion de cette activité : le vrai faux
conflit entre les pasteurs et les prieurs. Dit autrement, n'y a-t-il pas lieu
de se poser la question du leadership, de l'autorité, et même de
reconnaissance de ministère entre pasteurs et prieurs ? Les prieurs
considèrent leur activité comme un ministère (don) qu'ils
ont reçu de Dieu, et veulent l'exercer sans aucune restriction
ecclésiastique. Mais ce manque d'encadrement ecclésiastique,
estil vraiment en faveur de ceux qui exercent cette activité ?
Un autre problème que cette question soulève est
celui du vrai ou du faux prophète. Le phénomène ne se
limite pas à la prière seulement. Il est aussi et surtout
question de prophéties, de miracles ou de guérisons. Dans un tel
contexte, les frontières entre le vrai et le faux se côtoient
allègrement. C'est ainsi que dans le milieu chrétien, il n'est
pas rare d'entendre des témoignages de certains chrétiens qui
discréditent des meneurs de cette activité. Ces
témoignages font parfois état d'escroquerie, de fausses
prophéties, d'exigences financières. En effet, comme nous venons
de le souligner, beaucoup de ces prieurs s'érigent en
prédicateurs de l'avenir. Malheureusement ou heureusement, nombreuses de
leurs prophéties sont restées lettres mortes. On peut alors se
poser la question de l'authenticité du ministère
prophétique de certains «prieurs-prophètes».
Ces dérapages sont bien loin de porter un frein quelconque
au phénomène. Les chrétiens ont recours aux prieurs.
Déçus par les églises locales, des chrétiens
préfèrent se référer aux prieurs que de se confier
à leur pasteur.
Le comble est que très peu d'églises locales
s'investissent pour encadrer cette activité ou pour répondre aux
attentes des chrétiens. Mais on reçoit aussi des
témoignages de guérisons miraculeuses, de conversions, de
renouveau spirituel dans la vie de certains chrétiens. Bref, dans ces
communautés de prière, Dieu est à l'oeuvre malgré
les faiblesses inhérentes à la nature humaine. De ce fait, je me
pose cette question: Quelles sont les causes du développement des
communautés de prières en milieu pentecôtiste dans la
Région de Ouagadougou ?
Délimitation du Sujet
Cette recherche connaît deux délimitations. Une
délimitation géographique : la Région de Ouagadougou. Le
concept de «Région de Ouagadougou» renvoie aux églises
qui se trouvent dans la ville de Ouagadougou. Il est emprunté au
découpage géographique de l'Eglise des Assemblées de Dieu
du Burkina Faso qui est divisée en 26 régions dont la
Région de Ouagadougou. La seconde délimitation est que
l'étude concerne le milieu pentecôtiste. Nous entendons par ce
terme les églises nées des dénominations
pentecôtistes, les chrétiens qui fréquentent ces
églises et les
responsables spirituels qui dirigent ces églises.
Soulignons que la grande majorité des églises pentecôtistes
sont les églises des Assemblées de Dieu et les
dénominations issues des Assemblées de Dieu.
Objectif de l'Etude
Cette étude a pour objet de faire ressortir les
motivations spirituelles, religieuses, sociales et économiques qui sont
à l'origine du développement des communautés de
prière. Pour ce faire, je propose de les identifier au niveau des
églises (les responsables ecclésiastiques sont les premiers
responsables de la vie spirituelle des églises locales), des
chrétiens qui vont vers les prieurs, et les prieurs eux-mêmes qui
sont les exerçants de cette activité.
Je garderais tout au long de mon analyse une perspective
biblique. Par cette étude, je pourrais apporter un modeste
éclairage sur les raisons majeures du développement des
communautés de prière et proposer des solutions à ce
problème en me référant en particulier à un cas
d'école.
Méthodologie
Pour mener à bien cette étude, j'ai adopté
la démarche suivante. D'abord, j'ai effectué une recherche
documentaire en bibliothèque et à l'Internet sur ledit sujet,
suivie d'entretiens avec des responsables spirituels qui m'ont aidé
à mieux cerner le sujet. Ensuite, j'ai adressé un questionnaire
et un guide d'entretien respectivement aux chrétiens et aux prieurs.
Enfin, j'ai pu observer sur le terrain le déroulement de certaines
séances de prière. C'est la somme de la collecte de ces
différentes données qui constitue l'économie du
présent mémoire.
Hypothèse
La thèse défendue dans ce travail est que le
développement des communautés de prière en milieu
pentecôtiste est dû à des raisons religieuses et
spirituelles, sociales et économiques que je situe à trois
niveaux.
L'offre de prière : des prieurs se réclament
aujourd'hui de certains dons particuliers, particulièrement en ce qui
concerne la prière, la prophétie et la délivrance.
Certains les appellent des prophètes prieurs. Cela peut être
authentique chez certains, mais ne signifie pas qu'il n'a pas de loups dans la
bergerie. Tous n'ont pas forcement les dons dont ils se réclament.
La demande de prière : La responsabilité des
chrétiens est aussi engagée dans le développement de ce
phénomène. Il prend d'ampleur parce que beaucoup de
chrétiens ne sont pas enseignés sur les fondamentaux de la foi
chrétienne.
Ce qui fait que certains vivent une vie chrétienne
superficielle, et ne sont que « des enfants, flottants et emportés
à tout vent de doctrine » (Ep 4. 14).
L'absence de prière dans les églises : Nous
pensons que ça ne va pas parce que les églises locales ont
démissionné en matière de prière. Dans l'Eglise
primitive, la prière et l'enseignement ont été
menés de front (Ac 6. 4). La tendance aujourd'hui chez certains
responsables spirituels est à dissocier les deux activités
spirituelles.
Le schéma biblique est clair. Dans la perspective
néotestamentaire, il n' y a plus des personnes mises à part au
sein du peuple de Dieu pour le sacerdoce. Tous y ont accès (1 P 2. 9).
Toutefois, pour ce qui est des dons, Dieu est souverain (1 Co 12. 11) et les
dons sont pour l'utilité commune (1 Co 12. 7). De ce fait, Dieu peut
utiliser des hommes et des femmes, des laïcs dans les églises pour
être des instruments de bénédiction pour le peuple de Dieu
en les conférant des dons particuliers. Ces personnes qui se sont
parfois constituées en communautés de prière pourraient
apporter une contribution à un renouveau spirituel de l'église et
au niveau des chrétiens.
Définitions
Prière
La prière est une activité spirituelle qui consiste
à s'approcher de Dieu et à lui parler. C'est la communion avec
Dieu comme un enfant s'approche de son père. C'est ouvrir son coeur
devant Dieu. La prière, c'est l'expression personnelle de coeur entre
celui qui prie et celui à qui la prière est adressée.
Prieur
Dans le cadre de ce travail, le prieur est celui qui prie pour
les autres. Il reçoit des requêtes d'une tierce personne et se
charge de les transmettre à Dieu. Il apporte une aide spirituelle,
surtout en matière de prière à ceux qui lui soumettent des
sujets.
Le prieur ne se contente pas seulement de prier. Il annonce
parfois l'avenir (prophète). La plupart du temps, le prieur se
réclame de plusieurs dons : don de guérison, don de
prophétie, dons de miracles, don de langues...Il exerce son
activité en dehors du cadre conventionnel des églises, ou avec
leur accord. Il se dit parfois être détenteur de la puissance, du
feu (Saint-Esprit), de l'onction ; ce qui le particularise.
Aperçu de la Thèse
A la suite de l'introduction au chapitre premier, le chapitre
deuxième porte sur le développement. J'étudierai d'abord
les racines du développement des communautés de prière.
J'évoquerai ensuite les différentes causes : religieuses et
spirituelles, sociales et économiques. J'examinerai enfin notre question
à la lumière de l'Ecriture afin de proposer des solutions. Le
troisième chapitre est la conclusion. Je ferai une récapitulation
des idées développées et, une ouverture sur des pistes de
recherche.
CHAPITRE II
DEVELOPPEMENT
Les Racines du Phénomène
Notre sujet d'étude a des racines profondes que nous
pouvons situer dans le montanisme, au niveau du mouvement pentecôtiste et
ses interprétations en Afrique et au Burkina Faso. Examinons-les.
Le Montanisme
Le phénomène de personnes « qui se disent
inspirés n'est pas une nouveauté »1. Le
développement des communautés de prieurs pourrait trouver racines
dans un mouvement qui avait des manifestations analogues : le montanisme. Au
cours du deuxième siècle, un certain Montanus s'était
arrogé le titre de Paraclet. Les montanistes se vantaient de leurs
prophéties et visions. Le Mouvement a connu une grande ampleur et a
été surtout discrédité par ses excès.
Certaines de leurs pratiques ne sont pas loin de celles qui ont cours
aujourd'hui si on se réfère à Bénédict
Pictet qui notait :
Montanus et Priscille et Maximille, les deux femmes qui
l'accompagnaient,
tombaient dans des extases et paraissaient hors
d'eux-mêmes. Parmi leurs rêveries, ils prédisaient qu'il ne
se lèverait plus de prophète après eux. Ils
dépouillaient les êtres crédules de leur argent, de leurs
objets précieux et vêtements de qualité.2
1 Bénédict Pictet, Lettre sur ceux
qui se croient inspirés (Chalon-sur-Saône : Europresse,
1993),
26.
2 Ibid., 27.
En deuxième point, voyons les mouvements
pentecôtistes.
Les Mouvements Pentecôtistes
Le mouvement du Saint-Esprit qui a commencé à se
manifester aux débuts des années 1900 aux Etats-Unis, à
Azuza Street, est analysé par plusieurs auteurs sous forme de vagues. La
première vague est celle du mouvement de Pentecôte en 1910
à Azuza Street, avec le parler en langue comme signe initial du
baptême dans le Saint-Esprit. Il a donné naissance à des
églises pentecôtistes. La deuxième vague a eu lieu au cours
des années 1960 au sein des églises protestantes libres et des
églises catholiques. Ces églises ont fait l'expérience du
baptême dans le Saint-Esprit. Ce mouvement est connu sous l'appellation
«Mouvement charismatique» : « Le mouvement charismatique
avait pour but, non de former de nouvelles églises charismatiques, mais
de répandre les expériences charismatiques dans toutes les
églises officielles et libres existantes. »3 La
troisième vague est celle de l'évangélisation de puissance
avec Peter Wagner et John Wimber. Elle a concerné les fondamentalistes
et les évangéliques conservateurs. Les idées
théologiques développées par les tenants de cette vague
ont beaucoup influencé les africains. Examinons-en quelques unes.
Ils affirment que deux sources de révélation sont
valables : la Bible et l'expérience chrétienne. Selon John Wimber
par exemple :
Dieu utilise donc nos expériences pour mieux nous faire
comprendre ce qu'il
nous enseigne dans la Bible. Et souvent il nous amène, par
l'expérience, à rejeter par-dessus bord ou à modifier
certains aspects de notre théologie ou de notre vision du
monde.4
3 Wolfgang Bühne, La troisième
vague...le plus grand Réveil de l'Histoire de l'Eglise ? (Bielefeld
: Editions Christlische Literatur-Verbreitung, 1992), 14.
4 John Wimber et K. Springer, Die Dritte Welle
(Hochheim : Projektion J., 1998), 93, cité dans Wolfgang, Bühne,
La troisième vague...le plus grand Réveil de l'Histoire de
l'Eglise ? (Bielefeld : Editions Christlische Literatur-Verbreitung,
1992), 28.
10 Il faut selon eux communier avec Jésus pour recevoir
des révélations. Ils pratiquent des séances de
guérison et d'exorcisme au cours de leurs réunions, et
adhèrent à une évangélisation de puissance
définie comme une
évangélisation qui est
précédée et sous-tendue par des manifestations
surnaturelles de la présence de Dieu...Cela se fait le plus souvent au
travers des
paroles de connaissance...de guérisons, des
prophéties ou de délivrances d'esprits mauvais. Dans
l'évangélisation de puissance, la résistance à
l'évangile est vaincue par la démonstration de la puissance de
Dieu au travers d'événements surnaturels.5
Ils développent une certaine théologie sur le
ministère de la guérison et de la délivrance. La
guérison est perçue comme un ministère au même titre
que l'évangélisation : « Oui, les chrétiens sont
appelés à guérir les malades de la même façon
qu'ils sont appelés à évangéliser
»6. Et la guérison est un puissant outil
d'évangélisation. Pour eux, la guérison est un facteur qui
favorise l'évangélisation ; « elle est un
«promoteur de l'évangile» »7.Quant
à la délivrance, elle est perçue comme une lutte contre
les démons, chose aussi naturelle que l'opposition entre le royaume de
Dieu et celui de Satan. Wimber, tout en affirmant « son devoir de
chasser les démons qui ont élu domicile chez des chrétiens
et des non - chrétiens »8 définit trois nivaux de
délivrance : l'auto - délivrance, la délivrance
fraternelle et la délivrance pastorale.
5 John Wimber et K. Springer,
Allez...évangélisez (Rouen : Ménor, 1989), 47-48,
cité dans Wolfgang Bühne, La troisième vague...le plus
grand Réveil de l'Histoire de l'Eglise ? (Bielefeld : Editions
Christlische Literatur-Verbreitung, 1992), 31.
6 John Wimber et K. Springer,
Allez...guérissez (Rouen : Ménor, 1989), 64, cité
dans Wolfgang Bühne, La troisième vague...le plus grand
Réveil de l'Histoire de l'Eglise ? (Bielefeld : Editions
Christlische Literatur-Verbreitung, 1992), 34.
7 Ibid., 59.
8 Wolfgang Bühne, La troisième
vague...le plus grand Réveil de l'Histoire de l'Eglise ? (Bielefeld
: Editions Christlische Literatur-Verbreitung, 1992), 44.
La théologie développée par Paul Yonghi Cho
n'a pas été sans conséquence sur le pentecôtisme
africain. Elle a particulièrement insisté sur les idées
suivantes :
- La pensée, la motivation et le succès avec un
accent sur l'évangile de la prospérité; - la visualisation
(rêves et visions) et la quatrième dimension ;
- le pouvoir créateur de la parole exprimée :
« Revendiquez et parlez le langage de l'assurance car vos paroles sont
appelées à créer. Dieu a parlé, et le monde entier
a été créé. Votre parole est la matière dont
l'Esprit se sert pour créer. »9 Ces
différentes expressions du pentecôtisme bien qu'elles ne soient
pas totalement bibliques ont eu des accents particuliers en Afrique.
Les Spécificités du Pentecôtisme
Africain
Un Pentecôtisme
DélocaliséLes manifestations du pentecôtisme vont
faire l'objet d'une adaptation locale,
d'où la notion de pentecôtisme
délocalisé. Selon Mayrargue, il y a « une trajectoire
propre du pentecôtisme en Afrique, faite de processus de
réinterprétation, d'autonomisation et d'innovation
»10. Ce pentecôtisme s'intègre en qualité
de
« religion ancrée dans les sociétés
locales, portée par des acteurs locaux »11.
9 Paul Yonggi Cho, La quatrième
dimension (Floride : VIDA, 1990), 123, cité dans Wolfgang
Bühne, La troisième vague...le plus grand Réveil de
l'Histoire de l'Eglise ? (Bielefeld : Editions Christlische
Literatur-Verbreitung, 1992), 65.
10 Cédric Mayrague, Les dynamiques
paradoxales du pentecôtisme en Afrique (Paris : Ifri, 2008),
5.
Pour Moïse Sawadogo, cette adaptation locale du
pentecôtisme se traduit notamment comme « un mouvement qui
refaçonne le religieux »12 et se
caractérisant par le principe de l'expérimentalisme défini
comme « un effort commun pour restaurer l'expérience comme
dimension clef de la foi »13. En effet, « ce qui
intéresse les gens, c'est souvent la pratique et non la doctrine. Ici on
prie bien, les pasteurs prêchent bien (...). La parole du pasteur a plus
d'emprise sur les fidèles que celle de la
Bible »14. C'est donc un
pentecôtisme qui présente un visage syncrétique, et qui
tente de remédier aux problèmes des chrétiens.
Un Pentecôtisme Remède
La société africaine dans laquelle le
pentecôtisme s'intègre est une société
désintégrée socialement et économiquement. Cette
dégénérescence a pour conséquence une perte de
repère sur tous les plans. Beaucoup sont à la recherche de leur
identité : sociale et culturelle, économique, religieuse...Le
discours pentecôtiste fait parfois miroiter des lendemains qui chantent.
On se souvient que les politiciens post-indépendances avaient tenu le
même discours. Ces derniers ayant échoué, le religieux est
devenu la nouvelle attraction. Dans ce contexte, « le
pentecôtisme peut apparaître comme un recours face aux
problèmes »15. Dans les zones urbaines très
dégradées avec la paupérisation et
l'insécurité, beaucoup semblent percevoir une lueur d'espoir,
sinon d'espérance auprès de ces nouveaux prophètes.
12 Moïse Sawadogo, «Les communautés de
prière : Un chemin vers le réveil ou le retour au
sacré» (Lomé : FATAD, mai 2006), 53.
13 Ibid.
14 Daniel Bourdanné, L'Evangile de la
prospérité : Une menace pour l'Eglise africaine (Abidjan :
Presses Bibliques Africaines), 1999, 34.
15 Cédric Mayrague, Les dynamiques
paradoxales du pentecôtisme en Afrique (Paris : Ifri, 2008),
Ceux-ci font d'ailleurs office de dernier recours, comme si
après avoir tout essayé, on s'en remet à Dieu. Le danger
est que ce type de pentecôtisme n'est pas sans dérapages.
Les Dérapages du Pentecôtisme Africain
Le Recours Systématique à la
Délivrance
Le recours systématique des prieurs à la
délivrance est sans doute un moyen qui maintient beaucoup de
chrétiens en Afrique dans une certaine peur, dans une certaine
dépendance avec le prieur en question. La délivrance est un moyen
par excellence pour pérenniser le système. En effet, le recours
à la délivrance vise à établir un lien entre celui
qui l'exerce et celui qui y a recours. Ce sont « des liens très
forts, au point que des gens parcourent parfois pendant des années des
distances considérables pour rencontrer celui auquel ils doivent leur
guérison et se soumettre encore à des séances de
délivrance »16. Le discours développé
sur l'argent et la maladie mérite aussi notre attention.
La Reprise de la Théologie de la
Prospérité et de la Guérison
L'Evangile de la prospérité et de la
guérison selon Bourdanné « gravite autour de 3
éléments clés : la prospérité
matérielle, la guérison divine et la confession
positive »17. Il trouve sa source dans
le mouvement pentecôtiste, particulièrement dans les idées
développées par Kenneth Hagin. Ce dernier est perçu comme
étant à la fois le père spirituel et le prophète de
ce mouvement. Il se serait servi des idées de E. W. Kenyon.
16 Wolfgang Bühne, La troisième
vague...le plus grand Réveil de l'Histoire de l'Eglise ? (Bielefeld
: Editions Christlische Literatur-Verbreitung, 1992), 158.
17 Daniel Bourdanné, L'Evangile de la
prospérité : Une menace pour l'Eglise africaine (Abidjan :
Presses Bibliques Africaines), 1999, 16.
14 Les bases théologiques sont à identifier dans
les « courants spiritualistes, mystiques et philosophiques
»18 en vogue à l'époque. Il s'agirait d' «
une simple pentecôtisation de la Science Chrétienne de Mary
Baker Eddy »19. De ce fait, cet Evangile « est
assis dès son origine sur une base syncrétiste et
éthiquement fragile »20.
A propos de Kenneth Hagin, soulignons qu'il a
débuté comme pasteur au sein des Assemblées de Dieu
à l'âge de 20 ans où il est resté jusqu'en 1949. Il
a été perçu au sein « des
évangélistes guérisseurs indépendants
»21. Il commence un ministère prophétique en 1963
avec la diffusion à grande échelle de son journal « Word of
Faith » en 1966.
C'est cette théologie frelatée qui, aux
débuts des années 90 a gagné les pays francophones comme
le Burkina Faso, par la porte des pays anglophones. Elle s'est répandue
sur le continent à travers de brochures et de cassettes vidéo.
Elle a été reprise par de nombreux prédicateurs. Plusieurs
facteurs l'ont favorisée.
La théologie de la prospérité était
comme une réponse à l'
aspiration des pauvres à un avenir meilleur, qui ne
trouve d'autre espace pour s'exprimer que celui du religieux, sous la houlette
habile de certains « entrepreneurs en culte » ... ou comme
auto-justification morale des plus riches à le demeurer dans un contexte
politique où les inégalités se creusent.22
Il y a certes la situation socio-économique très
dégradée en Afrique. Mais aussi, l'attrait de la théologie
de la prospérité est dû à un fait historique
important : pendant longtemps, les Africains ont été
bercés par un certain discours venant du fondamentalisme
évangélique américain qui se résumait à un
évangile de la pauvreté.
18 Ibid., 45.
19 Ibid.
20 Ibid.
21 Elisabeth Dorier-Apprill, Robert E Ziavoula, 2005,
« La diffusion de la culture évangélique en Afrique centrale
: Théologie, éthique, et réseaux », in revue
Hérodote, n° 119, La Découverte, 4e trimestre 2005,
p138. pp.129-156
Il en est sorti la théologie de la malédiction de
l'Afrique. Dans un tel contexte, l'évangile de la
prospérité apparaît comme un libérateur de la
malédiction et de la pauvreté. Reconnaissons qu'un tel message ne
peut qu'avoir des adeptes.
Cette théologie a été soutenue par les
néo-pentecôtistes de la troisième vague et les tenants de
la bénédiction de Toronto. Ainsi, la théologie
développée par Yonggi Cho sur la maladie à partir de son
expérience personnelle est particulièrement saisissante. Ainsi
pour lui, elle est une manifestation de la malédiction de la loi. Et, il
est impossible d' « être complètement
libérés de la maladie tant que nous ne serons pas
libérés de la malédiction de la loi
»23 parce que la maladie en est la conséquence. Selon
lui, pour être « naturellement libéré de la
malédiction de sa maladie »24, il faut
préalablement la confession, le pardon et le salut. Et si certains
chrétiens malgré leur conversion demeurent dans les liens de la
maladie, cela est dû au fait « qu'ils ne comprennent pas
complètement cette vérité, et que le diable profite de
leur
ignorance »25. Une telle
théologie ne peut qu'aboutir à des déviations dangereuses.
Relevons aussi quelques tendances de la théologie africaine.
La Théologie Africaine et les Religions Traditionnelles
Africaines (RTA)
De nos jours, beaucoup de personnes soulignent le fait que les
religions traditionnelles africaines ont leur place dans la théologie
africaine. Ainsi, les religions africaines traditionnelles (RTA) ont des
défenseurs même dans le milieu chrétien.
23 David Yonggi Cho, Le chrétien face
à la maladie (Floride : VIDA, 1986), 20.
24 Ibid., 21.
25 Ibid.
Ils affirment que :
Dans la vision africaine du monde, Dieu est perçu comme un
être distant et inaccessible. Il semble donc raisonnable que les gens
s'adressent à des divinités ou à des esprits subalternes
pour des questions ordinaires de la vie, et n'aillent pas importuner Dieu avec
leurs problèmes. Dans certains cas, le développement
d'une théologie africaine sert simplement à
justifier les pratiques des cultes traditionnels et à les
présenter comme une préparation d'origine divine à
l'Evangile de Christ.26
Il faut souligner, une telle « conception est totalement
étrangère à la Bible »27. Ces
penseurs vont malgré tout loin. Pour eux, « toutes les
pratiques religieuses [africaines] faisaient partie de la
révélation de Dieu à l'homme »28, et
« le christianisme n'a fait qu'ajouter certains aspects à leur
culte traditionnel »29. De telles thèses ne peuvent
qu'encourager les pratiques syncrétiques.
La théologie libérale influence
énormément la théologie africaine dans sa conception.
Cette théologie « qui s'est infiltrée dans de nombreuses
dénominations ecclésiastiques en Afrique a agi sur les
mentalités »30 à telle enseigne que pour
certains, on peut tout croire, on peut tout tolérer. Il suffit seulement
d'être sincère. Ces conceptions ont été
exploitées par plusieurs théologiens libéraux africains
pour élaborer une certaine théologie africaine qui se veut plus
adaptée, c'est-à-dire plus proche des réalités
africaines. Mais malheureusement, elle a entraîné beaucoup de
chrétiens à une confusion de genre. Examinons avec
intérêt des manifestations du pentecôtisme au Burkina
Faso.
26 Elisabeth Dorier-Apprill, Robert E Ziavoula, «
La diffusion de la culture évangélique en Afrique centrale :
Théologie, éthique, et réseaux », dans revue
Hérodote, n° 119, La Découverte, 4e
trimestre 2005, 138.
27 Ibid.
28 Karl Grebe et Wilfred Fon, Religion
traditionnelle africaine et relation d'aide (Abidjan : CPE, 2000), 20.
29 Ibid.
30 Wilbur O'Donovan, Pour un christianisme
biblique en Afrique (Abidjan : CPE, 1998), 394.
Les Tendances Pentecôtistes au Burkina Faso
Ces tendances générales du pentecôtisme
africain sont confirmées par plusieurs études faites au Burkina
Faso. Les aspects de pentecôtisme remède sont clairement mis en
évidence comme le relève Pierre-Joseph Laurent :
les Eglises protestantes s'affirment aujourd'hui comme un lieu
de grande socialité et se montrent capables, à travers les
manifestations miraculeuses de l'Esprit relayées par des croyants
guérisseurs, de résoudre solitude, maladies, souffrance,
chômage et adversité31.
Pour Moïse Sawadogo, cette adaptation locale du
pentecôtisme se traduit notamment comme « un mouvement qui
refaçonne le religieux »32, et se
caractérise par le principe de l'expérimentalisme défini
comme « un effort commun pour restaurer l'expérience comme
dimension clef de la foi »33.
La situation historique d'apparition du phénomène
peut-être située autour des années 1980 dans un contexte
urbain de prolifération des lieux de culte dont la thématique
majeure est la délivrance. Ce « développement correspond
à l'émergence d'un pôle de légitimité
purement charismatique dans une Eglise qui, en dépit de ses fondements
pentecôtistes, présente un caractère fortement
institutionnalisé »34. C'est donc en marge du cadre
institutionnel de l'église - particulièrement de l'église
des Assemblées de Dieu qui constitue la grande majorité des
pentecôtistes - qui ce phénomène s'inscrit.
31 Pierre-Joseph Laurent, « En guise de
réponse : les Assemblées de Dieu du Burkina Faso et la
trans-nationalité du pentecôtisme », dans CIVILISATIONS vol.
LI n° 1-2 - Religions transnationales, 202.
32 Moïse Sawadogo, «Les communautés
de prière : Un chemin vers le réveil ou le retour au
sacré» (Mémoire de Maîtrise, FATAD, 2006), 53.
33 Ibid.
34 Joël Noret, « Les Assemblées de
Dieu du Burkina Faso en contexte. A propos de : P.-J. Laurent, Les
pentecôtistes du Burkina Faso. Mariage, pouvoir et guérison,
Paris, Karthala, 2003 », dans CIVILISATIONS vol. LI 1-2 - Religions
transnationales, 173.
Ainsi donc, l'activité des prieurs est clairement
perçue comme étant informelle, par rapport à
l'église officielle. L'exercice des dons se fait parfois «
à la lisière de l'Eglise instituée
»35.
En plus de ces données, on pourrait voir comment des
ministères de puissance ont été exercés dans
l'histoire récente du pentecôtisme burkinabé. Il ressort
selon André Brisset qu'il existe une relation étroite entre
l'exercice des dons de puissance et l'évangélisation. Des
serviteurs de Dieu tels que les pasteurs Baré Soré de Yilou,
Koudrema et Silamane Rouamba ont été des puissants outils entre
les mains du Seigneur. Les dons de puissance étaient un puissant outil
d'évangélisation. Et pour le pasteur Baré Soré,
« ces guérisons sont très souvent le moyen de la
création d'une Eglise dans un village »36. Leur
ministère de délivrance était tourné vers des
personnes non converties. Quant à leurs propos, ils étaient
emprunts d'une profonde reconnaissance à Dieu : « Nous
bénissons Dieu pour Son grand travail. Je n'arrive pas à dire
toutes les choses qui se passent. Mais Dieu est là. Il fait son
travail »37 disait le pasteur Baré. Nous pensons qu'il y a une
différence entre ces exemples et ceux qui ont cours chez les prieurs
aujourd'hui.
Il est important aussi de souligner le fait qu'il existe des
logiques locales en ce qui concerne les conversions, particulièrement
celles de ceux qui vivaient dans l'animisme.
35 Pierre-Joseph Laurent, « En guise de
réponse : les Assemblées de Dieu du Burkina Faso et la
trans-nationalité du pentecôtisme », dans CIVILISATIONS vol.
LI n° 1-2 - Religions transnationales, 210.
36 André Brisset, Trois Ministères de Puissance
en Afrique (Yverdon : AMI, 1977), 30.
37 Ibid., 35.
Selon Fancello, « la conversion vient au terme
d'épreuves successives, de périodes d'errances ou d'un
épisode de vie désordonnée (...), de maladie ou de
``folie» »38. Dans un tel contexte, la
guérison est synonyme de « l'intervention d'un pouvoir
supérieur (...) et salvateur »39. En effet,
guérison et conversion vont parfois de pairs. Ainsi, « la
demande de guérison étant souvent au centre de la démarche
de conversion, celle-ci s'exprime comme une libération de la souffrance
et du Mal, libération temporaire, car la lutte, elle, est
permanente »40. Elle souligne les deux aspects de la
conversion pentecôtiste en ces termes : « elle est à la
fois, une forme de distanciation du monde traditionnel et des contraintes
liées aux règles coutumières, et une protection contre ses
pouvoirs magiques »41.
A la lumière de ces référents historiques,
situons les causes religieuses et spirituelles du développement de
l'activité de prière.
Les Causes Religieuses et Spirituelles
Les causes religieuses et spirituelles que nous avons
identifiées peuvent être situées à trois niveaux :
les églises, les prieurs et les chrétiens. La première
dimension est la responsabilité du leadership des églises.
Les Eglises en Question
On peut tout d'abord relever que le manque d'enseignement est
crucial dans les églises. Cette situation explique en partie le non
enracinement de certains dans la foi. La maturité spirituelle faisant
défaut, les chrétiens vivent comme des bébés
spirituels. Beaucoup n'ont pas une capacité de décision.
38 Sandra Fancello, « Un ethnologue chez les
pentecôtistes du pays mossi. A propos de : P.-J. Laurent, Les
pentecôtistes du Burkina Faso. Mariage, pouvoir et guérison,
Paris, Karthala, 2003 », dans CIVILISATIONS vol. LI 1-2 - Religions
transnationales, 186.
39 Ibid., 186-187.
40 Idid., 187-188.
41 Ibid.
Face à un problème donné, il leur faut
recourir par exemple à leur pasteur pour lui demander son avis. Mais ce
dernier ne peut être à leur côté en tout temps, et
peut ne pas être aussi un bon conseiller spirituel.
Les raisons explicatives du développement des
communautés de prière sont aussi en relation avec la vie
spirituelle des églises. Il y a l'affaiblissement de la puissance
spirituelle des églises. L'expression puissance spirituelle fait
allusion à l'exercice des dons spirituels (dons de guérison, de
prophétie et de miracles...). Il est vrai que le christianisme ne se
résume pas à ce paramètre. Mais soulignons que les
manifestations de l'Esprit dans une église constituent un indicateur de
son état spirituel. En effet, comme l'a souligné l'apôtre
Paul, notre parole et notre prédication ne sauraient reposer « sur
les discours persuasifs de la sagesse, mais sur une démonstration
d'Esprit et de puissance, afin que notre foi soit fondée, non sur la
sagesse des hommes, mais sur la puissance de Dieu » (1 Co 2. 4-5). C'est
cette onction de l'Esprit qui manque dans beaucoup d'églises, et qui
fait «courir» des chrétiens.
La responsabilité des pasteurs est engagée,
à telle enseigne que certains parlent de leur démission en
matière de prière et d'exercice des dons spirituels. C'est la
responsabilité des pasteurs d'encourager, d'inciter et de faire la
promotion des dons spirituels par l'enseignement et la mise en pratique dans
les églises. Si cette responsabilité n'est pas assumée les
conséquences peuvent être graves. Beaucoup de prieurs reprochent
aux pasteurs leur intellectualisme, leur théologie, leur inaptitude en
matière de prière. Récemment au cours d'une semaine de
prière dans la ville de Ouagadougou, le pasteur prieur
dénonçait l'attitude de certains pasteurs en ces termes :
«Ils disent que c'est le Seigneur qui les a appelés.
Ils vont à l'école biblique et quand ils
reviennent, ils s'habillent en veste alors qu'ils ne peuvent même pas
faire voler une mouche par leur prière. Ils ne peuvent pas prier, et ils
refusent que ceux qui veulent prier dans leurs églises prient. Si ces
gens partent ailleurs, ils commencent à critiquer...''.
Ces reproches sont parfois sévères ; mais elles ne
sont pas sans fondement. Un fait notable est qu'en milieu urbain, certaines
grandes églises ne prient plus pour les malades en fin de culte
dominical. La puissance de Dieu dont parle l'apôtre Paul, n'a pas
été trouvée dans la sagesse humaine, mais dans une
démonstration d'Esprit et de puissance. La question qu'il faut se poser
est celle de savoir si cette puissante est chez beaucoup. Ces propos d'une
soeur en Christ, relatifs à l'attitude de son pasteur sont
symptomatiques de ce renoncement : «Lorsqu'un fidèle va le voir
pour une question spirituelle, il demande de faire vite parce qu'il n'a pas le
temps. Mais quand il s'agit d'un problème d'ordre séculier, il
est prêt à vous aider». Malheureusement, des serviteurs de
Dieu font de plus en plus preuve d'une telle inaptitude en ce qui concerne les
questions spirituelles.
De ce qui précède, il en découle que lorsque
les besoins des chrétiens en matière de relation d'aide ne sont
pas satisfaits par les églises, le recours à une aide
extérieure est probable. Les prieurs les accueillent. Ils arrivent
parfois à mettre leur «client» en confiance plus que ne peut
le faire le pasteur. Le devoir de tout pasteur est entre autre d'affermir les
croyants. A Pierre, Jésus-Christ avait dit : « affermis tes
frères » (Lc 22. 32). Lorsque des chrétiens manquent
d'affermissement, ils peuvent recourir à une aide extérieure pour
s'en sortir. Les besoins des chrétiens sont là. Peu de pasteurs
sont à la hauteur de leurs attentes. Faut-il alors que les
chrétiens restent dans les églises quand leurs responsables
spirituels ne sont même pas capables de leur consacrer cinq minutes
d'écoute ?
Faute d'avoir mieux dans leurs églises, beaucoup
préfèrent explorer ailleurs, et ce parfois à leurs risques
et périls. La deuxième dimension est la responsabilité des
prieurs dans le développement du phénomène.
L'Affirmation de l'Ego Spirituel
L'exercice de certains dons spirituels offre une plus grande
visibilité dans la sphère religieuse. De ces dons, on peut
relever les dons de puissance (dons de guérison, de miracles et de
prophétie). Par la possession ou la prétendue possession de ces
dons, certains prieurs affirment leurs compétences spirituelles. Pour
Pierre-Joseph Laurent, le croyant guérisseur se définit
comme un fidèle ayant reçu de l'Esprit Saint le don
de guérison, auquel s'ajoutent fréquemment, selon les cas, le don
de discernement, le don de parler en langues (la glossolalie), les dons de
puissance, d'interprétation et de prophétie. Il se distingue
généralement par son ardeur missionnaire42.
La volonté d'affirmation de soi sur le plan spirituel se
traduit dans les pratiques et discours. Evoquons d'abord la stratégie de
déconsidération sinon d'anéantissement de l'autre sur le
plan spirituel. Elle se traduit par le fait que le discours spirituel tenu est
fait d'attaques et de contre-attaques. Grâce à la
possibilité que la plupart a de s'adresser aux fidèles, les
prophètes - prieurs et les pasteurs s'adonnent à des attaques
ciblées entre eux.
La double position de pasteur et de prophète (prieur)
offre sans doute une facilité, sinon une liberté dans l'exercice
de l'activité de prière. Celui qui se retrouve dans une telle
position est en effet sans aucune couverture hiérarchique directe,
étant fondateur de l'église. Sinon dans certains cas, le
ministère du prophète peut être remis en cause par les
responsables spirituels. C'est le cas notamment de ce Monsieur qui était
dans la cour d'une église de la capitale. Il organisait des
séances de prière.
A plusieurs reprises, il a été interpellé
par son pasteur. Il a passé outre les remarques qui lui étaient
faites. Le pasteur lui a alors demandé de quitter la cour de
l'église. Aujourd'hui, il n'est plus membre de cette communauté.
Il a pris une maison en location dans le même quartier où il
reçoit. Sa renommée grandit dans le quartier et beaucoup de
personnes vont vers lui. Laurent cite dans son ouvrage l'exemple de cette
prophétesse qui « se méfie du pasteur qui a toujours
douté de son don »43. Celle-ci a quitté
l'église pour tenir dans son domicile un groupe de prière.
Même dans les cas où les concernés ne quittent pas leur
église, le fait d'exercer des dons de puissance les amènent ipso
facto à être mise en exergue, parfois à leur corps
défendant.
Mais il y a aussi des exemples de personnes qui exercent leur
activité tout en restant sous le couvert de leur église. C'est le
cas de cette femme qui possède des dons de prophétie, de
guérison, de langue...Sa particularité est qu'elle les a mis
à la disposition de l'église. Elle participe aux réunions
de prière et d'intercession de l'église. Les responsables
reconnaissent son activité, et elle a la possibilité de recevoir
des gens chez elle avec la bénédiction de ses responsables
spirituels. Elle met ses dons à la disposition des croyants, et exercent
son activité en collaborant avec d'autres membres de son
église.
L'affirmation de soi n'est pas seulement à
l'intérieur de la communauté. Même à
l'extérieur, le besoin de mettre en évidence ses
compétences spirituelles est réel. C'est le cas notamment du
défi lancé à l'encontre des forces du monde des
ténèbres.
C'est dans ce même ordre d'idées que Laurent
relève le cas du «croyant guérisseur» qui
défie les féticheurs qu'il identifie à de
simples sorciers et par extension au démon, au même titre, dans
une généralisation saisissante, que les tenants des cultes
ancestraux (...) il provoque de nombreuses conversions qu'il
théâtralise
par des autodafés, dans lesquels il procède
à la destruction, en public, des fétiches
déclassés44.
La responsabilité des chrétiens mérite
d'être mise en évidence en troisième lieu. Les
Chrétiens en Question
Aujourd'hui, les chrétiens sont à la recherche de
solutions «prêt-à-porter». Il s'agit d'une
génération qui veut tout, tout de suite. Peu sont prêts au
sacrifice. L'invitation de Christ à porter sa croix et à le
suivre (Mt 16. 24) ne fait plus recette. On prétend aimer le Seigneur,
mais en réalité, on aime beaucoup plus les choses que le Seigneur
donne. On a des besoins, et on veut avoir des réponses à ceux-ci,
non pas selon la volonté du Seigneur, mais selon sa propre
volonté.
Le renoncement à la vie de prière personnelle est
une illustration parfaite de la vie du chrétien du XXI ème . En
effet, le choix délibéré de certains chrétiens est
de renoncer à la prière. Pour eux, la prière est une
tâche trop exigeante. Pour ce faire, il «achètent des
prières» ; ils demandent qu'on prie pour eux. C'est un renoncement
à la piété, à une relation personnelle avec le
Seigneur. C'est une démission de ses responsabilités de
chrétien. Etre chrétien et ne pas prier, et vouloir que des gens
prient pour soi, c'est prendre Dieu comme un «pneu de secours»; c'est
vouloir une chose et ne pas accepter le sacrifice pour son obtention. Comment
alors peut-on avoir une bonne perspective des bienfaits de Dieu si ces
bienfaits ne nous ont rien coûté ?
Certains chrétiens vivent dans des inquiétudes, et
comme solution ont recours aux prophètes prieurs.
Quand bien même la Parole de Dieu invite à
marcher par la foi et non par la vue (2 Co 5. 7), beaucoup ont renoncé
à vivre par la foi. En ayant recours aux prieurs, il y a un désir
de sonder l'avenir, de savoir ce que l'avenir réserve. Pour beaucoup, le
vrai prophète prieur est celui qui est à même de faire des
prédictions.
La quête de prière des chrétiens pourrait
trouver son origine aussi dans le fait que de plus en plus, la vie spirituelle
de beaucoup est affaiblie. Cet affaiblissement de la vie spirituelle se
manifeste de plusieurs manières. Il y a le manque d'une totale
consécration au Seigneur. Beaucoup mènent une vie
chrétienne tiède, veulent aller au ciel, mais ne sont pas
prêts à vivre une vie de renoncement et de sacrifice. Ils
proclament aimer le Seigneur, mais il ne s'agit pas d'un amour réel. Ils
recherchent Dieu quand ils sont dans le besoin, un Dieu parapluie. Comme les
trois rois en campagne dans 2 Rois 3 à la recherche d'un prophète
à cause d'un manque d'eau,
ces chrétiens sont à la recherche de solutions
à leurs problèmes.
Un fait important est le caractère non authentique des
conversions. En effet, une remarque générale que l'on peut faire
aux églises africaines, particulièrement à l'église
des Assemblées de Dieu du Burkina Faso est le fait que de plus en plus
il s'agit d'une église de multitude et non de professants.
Malheureusement beaucoup ne sont pas nés de nouveau. Les tendances sont
diverses : il y a ceux qui sont des chrétiens de la deuxième ou
troisième génération, et qui vivent sur la foi de leurs
parents ou grands-parents sans avoir préalablement eu une
expérience personnelle avec le Seigneur. Il y a aussi ceux qui ont un
arrière-plan animiste mais qui n'ont pas rejeté ce qu'ils
étaient autrefois. Il y a aussi ceux qui ont réellement eu une
expérience personnelle avec le Seigneur, mais qui, au fil du temps se
sont endormis. Toutes ces catégories de personnes ne vivent pas une vie
chrétienne authentique. Elles sont sujettes à se laisser emporter
à tout vent de doctrine (Ep 4. 14).
Le caractère non authentique des conversions se conjugue
facilement avec le manque d'enracinement dans la foi chrétienne.
Certains chrétiens croient qu'il suffit de se convertir pour devenir
chrétien. Ils oublient qu'un bébé a besoin d'être
nourri pour grandir. Le chrétien africain qui n'a pas une bonne
connaissance de la Parole de Dieu et qui se contente de la prédication
du dimanche ne peut grandir dans la foi. Il viendra à l'église
par formalisme, pour faire comme Monsieur Tout le monde, et peut se laisser
entraîner facilement dans le mouvement général à
cause de l'effet de groupe.
Il y a aussi le fait que les conversions peuvent être
superficielles. En effet,
beaucoup de ceux qui s'engagent à suivre Christ le font
sans savoir
exactement qui il est et pourquoi ils le suivent (...). Ils ne
mesurent pas que Christ seul est en mesure de faire bien plus que simplement
répondre aux besoins les plus cruciaux qu'ils peuvent rencontrer un
jour, ou les aider à sortir des graves crises de
l'existence45.
Ces conversions superficielles sont à l'origine d'une vie
chrétienne superficielle, fondée sur la recherche de la
satisfaction de besoins plutôt que sur un réel enracinement dans
la foi chrétienne et la recherche de la volonté de Dieu. Relevons
en quatrième point l'attrait du phénomène miraculeux.
L'Attrait du Phénomène Miraculeux
Le phénomène miraculeux attire. L'homme a toujours
été à la recherche du sensationnel. Dans cette recherche,
il peut certes parfois connaître des désillusions. Mais quelque
soit l'époque, même dans le milieu chrétien, même
après avoir connu Christ, on est parfois à la recherche de
quelque chose de nouveau. Comme quelqu'un le disait, ce qui pousse les
chrétiens à déserter leurs églises pour les lieux
de prière, c'est qu'on leur propose quelque chose d'autre qui sort de
l'ordinaire. Chaque année, dans plusieurs lieux du Burkina Faso, a lieu
des rallyes de prière.
27 Au cours de cette année 2009, il y aura plusieurs
semaines de prière dont les rendez-
vous les plus emblématiques auront lieu à
Boulmiougou Barrage, Bourou, Ramonggho. Ces rendez-vous drainent parfois plus
de trente mille personnes avec le chiffre record de 600 pasteurs parfois.
Jamais le Lagengo n'a atteint de tels chiffres dans ses manifestations,
souligne un pasteur. On peut à juste titre s'interroger s'il s'agit
d'une recherche de Dieu ou du surnaturel ?
Fédor Dostoïevskyi souligne :
L'homme ne recherche pas Dieu, mais le surnaturel. Parce qu'il ne
supporte pas de vivre sans miracles, il se créera de nouveaux prodiges
et glorifiera les actes de puissances occultes et d'exorcisme, bien qu'à
l'égard de Dieu il soit manifestement rebelle, hérétique
et infidèle.46
Il est vrai que beaucoup ne savent pas faire la différence
entre ce qui vient de Dieu et ce qui vient du Malin. Mais, Dieu se manifeste
aussi dans le surnaturel, et on ne peut pas rejeter le miracle par un revers de
la main. En effet, comme le disait Lukasse,
Nous ne devons pas rechercher les miracles, mais sommes-nous
suffisamment offensifs vis-à-vis du royaume des ténèbres ?
Car dans ce cas, nous nous trouverons parfois dans ces situations où il
s'agira de savoir qui est le plus fort ! Les gens recherchent le
surnaturel.47
Cela veut tout simplement dire que le fait que nous ne sommes pas
appelés à rechercher les miracles ne saurait être une
raison pour manquer d'être offensifs à l'égard de l'ennemi.
La Parole de Dieu nous offre des armes défensives et une arme offensive
(l'épée de l'Esprit).
46 Fédor Dostoïevskyi, The Brothers
Karamazov, `The Grand Inquisitor' (s.l.: s.p., sd), cité dans Anthon
Campolo, It's Friday but Sunday's Coming (Waco: Word Books, 1984), 74,
cité dans Johan Lukasse, Mission possible! Implantation
d'églises dans une Europe post-chrétienne
(Bruxelles-SaintLégier: Le Bon livre-Emmaüs, 1993), 81.
47 Johan Lukasse, Mission possible! Implantation
d'églises dans une Europe post-chrétienne (Bruxelles -
Saint-Légier : Le Bon Livre - Emmaüs, 1993), 80.
Nous devons savoir que nous sommes dans un contexte africain
où beaucoup parviennent à la foi à la suite d' « une
rencontre de puissances ». Il y a des situations où les rapports de
forces s'imposent à nous qu'on le veuille ou non. Il s'agit alors de
savoir discerner ces moments afin de demander à Dieu de manifester sa
puissance. Comme au temps de Jésus où la foule « le suivait,
parce qu'elle voyait les miracles qu'il opérait sur les malades »
(Jn 6. 2), aujourd'hui encore, beaucoup sont attirés par le miracle.
Christ cependant, ne s'est pas seulement contenté de faire des
miracles.
A ces causes religieuses et spirituelles viennent se greffer des
causes sociales et économiques.
Les Causes Sociales et Economiques
Il s'agit en occurrence de certains aspects relatifs à la
société animiste et des motivations économiques des
prieurs.
La Résurgence de la Société Animiste
Le recours des chrétiens à des médiateurs
trouve son origine aussi dans les sociétés dans lesquelles le
phénomène se développe. D'une manière
générale, les sociétés traditionnelles africaines
ont leurs conceptions du monde. Même si celles-ci sont différentes
les unes des autres, on est unanime aujourd'hui à reconnaître une
certaine conception dite conception animiste du monde. Selon cette conception,
l'homme africain vit entouré par « les esprits des
ancêtres, les esprits des sorciers, les dieux de la nature et diverses
puissances mystiques »48. Ces forces exerceraient des
influences sur la vie des individus.
Le fait de croire à une telle conception a des
conséquences profondes dans la vie des adhérents. Il
résulte une vie marquée par trois phénomènes.
D'abord, la peur : « La relation que les gens
entretiennent avec ces esprits est déterminée par-dessus tout par
la PEUR. N'importe quel esprit peut provoquer le malheur dans la vie de
l'individu, de la famille ou de la tribu dans son ensemble. »49
Ensuite, l'esclavage : « Pour avoir de l'espoir dans cette conception
du monde, on se tourne vers l'intérieur du système
»50, c'est-à-dire, la divination, les sacrifices, les
offrandes...L'individu s'insère ainsi dans un cercle vicieux qui le lie
; il est pris comme un poison dans un filet sans possibilité de s'en
sortir. Enfin, il va de soi qu'un tel système offre des solutions pour
se pérenniser. Ces solutions offertes se situent au niveau des valeurs
du groupe social qu'il faut préserver à tout prix telles que
l'unité, la pureté rituelle, la paix. Il s'agit naturellement de
solutions superficielles.
La tentation est grande chez beaucoup de chrétiens de
redonner un contenu à cette conception animiste du monde par le recours
à des médiateurs pour s'approcher de Dieu. Force est de
reconnaître que ce qui se passe dans nos milieux n'est pas
foncièrement différent de ce qui se pratiquait dans la
société animiste. Beaucoup de chrétiens vivent dans la
peur. Il suffit d'un rêve pour que certains aient recours à un
prieur pour demander la signification, et sa prière afin de chasser le
prétendu mauvais sort qui le guetterait.
Comme dans le schème animiste, on assiste à une
sorte d'esclavage. Il n'est pas rare de voir des chrétiens liés
à un prieur à telle enseigne qu'ils ne peuvent rien entreprendre
sans demander son avis. Certains parcourent parfois de longues distances,
uniquement pour se rendre chez leur prieur. On n'est donc pas loin des
pratiques de la société animiste.
De la même manière que les solutions offertes dans
l'animisme ont un caractère superficiel, au niveau de certains prieurs,
nous assistons à une même logique. Les chrétiens ont
parfois leurs problèmes résolus, en tout cas
momentanément. Mais les mêmes causes produisant les mêmes
effets, ce qui les avaient emmenés chez le prieur va encore les y
emmener, lorsque les mêmes problèmes se poseront. Comme le disait
un théologien africain, l'animiste est en train de
récupérer dans le fond ce qu'il avait perdu dans la forme.
Ainsi, l'accent mis sur la délivrance par beaucoup de
pentecôtistes africains est un indicateur du fait que beaucoup sont
préoccupés par le monde des esprits. La perception de beaucoup
est que
la foi devient une puissance de résistance contre les
puissances du monde dans lequel ils vivent. Vivant sous l'autorité de
Christ, ils sont puissants sur les sorciers, résistent aux mauvais sorts
et aux empoisonnements. Ils deviennent puissants. 51
Une autre cause inhérente aux sociétés
africaines, est le fait du mythe du chef. Dans les sociétés
centralisées comme celui des Moose par exemple, le chef est
déifié. Cet aspect de la culture se reproduit dans la vie des
églises en Afrique. Ainsi, « le pasteur dirige, et les gens
suivent tout ce qu'il dit, souvent sans émettre aucune critique
»52. C'est ce que Tite Tiènou appelle le
cléricalisme évangélique. Cela est synonyme de mise au
premier plan du pasteur, prêtre ou conducteur spirituel avant Dieu et sa
Parole. Cette tendance est à l'origine du succès en Afrique des
églises indépendantes. Elle est dangereuse, parce
qu'anti-scripturaire. La primauté donnée au leader religieux peut
facilement occasionner des déviations.
51 Daniel Bourdanné, L'Evangile de la
prospérité : Une menace pour l'Eglise africaine (Abidjan :
Presses Bibliques Africaines, 1999), 49.
52 Tite Tiènou, Tâche théologique de
l'Eglise en Afrique (Abidjan : CPE, 1973), 34.
Dans de nombreuses églises, les pratiques
syncrétiques en relation avec la prière trouvent leur origine
même au niveau des responsables spirituels. Relevons en plus, la
motivation économique qui est loin d'être négligeable.
La Prière, une Entreprise
Les personnes exerçant l'activité de la
prière récusent l'idée selon laquelle leur activité
serait pour eux source de gain. Ils prétendent avoir reçu le don
de Dieu, et n'avoir rien demandé. Ils mettent ainsi en avant leur
désir de servir le Seigneur et le peuple de Dieu par les dons qu'ils ont
reçu, plutôt qu'une quelconque recherche de profit personnel. Une
telle attitude n'est pas étonnante. Pierre-Joseph Laurent souligne:
« Un bon croyant - guérisseur ne demande jamais d'argent.
L'efficacité de la guérison divine repose sur le
désintérêt : il témoigne de l'élection divine
et de son utilisation, par l'Esprit, pour le bien-être de tous.
»53
Cependant, à observer les pratiques qui sont autour de
la personne qui reçoit des gens indistinctement de leur religion,
même si certains sont sincères, on peut déceler des traces
de professionnalisation de l'activité de prière.
Plusieurs exemples peuvent soutenir cette affirmation. Il y a
d'abord de plus en plus l'organisation des semaines de prière. C'est une
occasion de rencontre spirituelle certes, mais c'est aussi et surtout une
opportunité de promotion visant à offrir une plus grande
visibilité à la personne ou à la communauté qui
l'organise.
Soulignons aussi que l'action de grâce, le fait de revenir
remercier le prieur - une expression imagée signifiant les dons en
nature ou en espèces faits au prieur - est de plus en plus
développée. C'est une norme respectée par des
chrétiens sans se faire prier. Mais beaucoup de prieurs en font une
exigence.
La professionnalisation de l'activité de prière
est aussi perceptible dans le style de ces leaders spirituels :
déplacements à l'extérieur, cartes de visite,
réception sur rendez-vous. Beaucoup « gagnent leur vie
grâce à la réputation que leur confère leur don
»54. C'est ainsi que la plupart des prieurs ne travaillent
pas ou refusent de travailler. S'en remettant à Dieu quant à leur
survie, ils disent exercer la foi. Ils se mettent de facto dans une situation
de dépendance envers leurs «patients». Et
comme l'a souligné Laurent, « le refus de
rémunération du croyant-guérisseur - iin'est
que l'instrument de Dieu et n'exerce que pour servir son oeuvre - instaure
un
lien de dépendance avec le patient
»55. Ce lien de dépendance n'est pas sans
conséquence. La dépendance, faut-il le souligner n'est pas une
dépendance spirituelle seulement. Elle se traduit en dépendance
économique. C'est à ces personnes que beaucoup de
chrétiens destinent leurs dîmes et offrandes.
On ne peut éluder le fait que l'activité de la
prière est pour beaucoup source de gain. Du néant, beaucoup ont
connu une ascension sociale fulgurante. Les intéressés
eux-mêmes ne s'en cachent pas. Certains, las d'attendre les
«bénédictions» de Dieu, les réclament. En 2008
par exemple, au cours d'une semaine de prière à Ouagadougou, une
personne du sérail s'est publiquement plaint du fait que ses autres
confrères se sont vus octroyer des «Nissan Patrol», alors que
lui, n'aurait rien reçu.
Dans un tel contexte, on peut légitimement s'interroger
sur les véritables motivations des uns et des autres. Il est vrai et
nous l'admettons, Dieu agit par l'intermédiaire de ces instruments.
Mais, on peut se demander s'il n'a pas de sérieux risques de
déviations théologiques et spirituelles chez les prieurs par des
pratiques de tout genre, notamment en relation avec l'argent.
Dit autrement, la motivation à exercer ce genre
d'activité est-elle aujourd'hui essentiellement spirituelle ou
foncièrement économique ?
Nous reconnaissons que le spirituel est certes là. Mais le
domaine économique n'est pas à négliger, surtout quand
certains prieurs sont prêts à prophétiser à leur
propre compte pour des intérêts économiques personnels s'il
vous plaît. C'est le cas notamment de cette prophétesse que
Laurent relève :
La vieille Sita, qui, à la suite d'une série de
visites que je lui avait rendues, désespérait sans doute d'en
retirer quelque avantage, se mit, durant un entretien, à parler en
langue. Elle interpréta aussitôt, elle-même, la
révélation : le Seigneur me demandait si j'avais oublié le
problème de sa cour.56
Au regard de ces différents aspects mis en
évidence, il est nécessaire de les examiner à la
lumière de la Parole de Dieu.
Examen Biblique du Phénomène
Le Chrétien et la Prière
Une Vision Déformée de la
Prière
Beaucoup de gens perçoivent la prière comme
étant un don ou un ministère. Ceux qui l'exercent sont ceux qui
ont le potentiel spirituel. Ce sont ces personnes qui doivent prier. A
l'impossible donc, nul n'est tenu, semblent dire certains. C'est le faux-fuyant
qui est habituellement employé par certains, même parmi les
serviteurs de Dieu pour ne pas mener une vie de prière efficace et y
engager leur église.
La perception de la prière comme un don ou un
ministère a pour conséquence l'idée selon laquelle elle
est «une chasse gardée», une sphère exclusivement
réservée à une certaine catégorie de personnes.
C'est ainsi que dans des églises, la prière est devenue
l'activité d'un certain groupe : les intercesseurs. Lorsqu'une
église confie la prière à un groupe de personnes, les
autres membres peuvent penser qu'il y a des gens qui sont là pour prier
et prier pour eux.
La prière est à tort vue comme un gain, un moyen
d'obtenir les bienfaits de Dieu ou d'accéder à une position
sociale élevée. C'est ainsi qu'en relation avec la
théologie de la prospérité, beaucoup s'intéressent
aujourd'hui aux bénédictions financières et
matérielles plus qu'aux bénédictions spirituelles. Comme
l'a si bien relevé Lukasse, « la prière est souvent
considérée dans l'opinion populaire comme une démarche qui
permet d'obtenir quelque chose de manière surnaturelle et surtout
à bon marché »57.
Beaucoup de prieurs ont tendance à donner des
modèles de prière, des paroles à réciter comme des
incantations. Cette manière de prier n'est pas biblique. Le drame est
que beaucoup croit que la prière du prieur vaut mieux que leur
prière, et sont ainsi prêt à répéter des
phrases ou mots dont ils ne comprennent pas le sens. Dans ce contexte, la
prière du prophète devient comme un moyen pour accéder
à l'exaucement des requêtes.
La prière constitue pour certains un moyen de pression sur
Dieu. La volonté de certains est d'essayer d'obtenir de Dieu ce qu'ils
veulent à tout prix. Beaucoup renversent ainsi les priorités,
mettent leurs désirs au premier plan. Ils se présentent à
Dieu avec un cahier de charges comme un syndicat face au patronat.
La prière n'est pas une puissance. C'est une erreur de
dire que la prière constitue une puissance. Cela conduit des
chrétiens à dire qu'ils n'ont pas la puissance, donc à
recourir à certaines personnes pour rechercher cette puissance. Ainsi,
la puissance serait chez certains, pas chez d'autres. En croyant que la
prière est une puissance, on compte ainsi sur la prière et sur
celui qui prie, sans pour autant compter sur Dieu.
57 Johan Lukasse, Mission possible! Implantation
d'églises dans une Europe post-chrétienne
(Bruxelles-Saint-Légier: Le Bon livre-Emmaüs, 1993), 21-22.
C'est croire que tout nous arrive par la prière et non par
Dieu. Bref, c'est l'idolâtrie de la prière.
La prière est perçue comme un remède. La
prière est pour beaucoup un moyen pour résoudre des
problèmes (sociaux, économiques, spirituels...). On a recours au
prieur de manière circonstancielle, quand on fait face à un
problème. Le chrétien va chez le prieur parce qu'il a un besoin.
Le besoin l'appelle vers le prieur et non autre chose. On ne prie pas parce
qu'on doit prier, mais on est forcé à prier ou demander la
prière en dehors d'autre alternative.
Le phénomène de l'action de grâce, qui est le
fait revenir auprès du prieur avec un don, est de plus en plus
développé. Cette pratique constitue une déformation de la
prière. Il se pose alors la question de l'exaucement des prières.
Souscrire à une telle idée, c'est comme si c'est le prieur qui
exauce les prières. Il est nécessaire que ces fausses conceptions
soient examinées selon les Saintes Ecritures.
La Prière à la Lumière de la Parole
de Dieu
La prière n'est pas un don encore moins un
ministère. C'est une activité spirituelle vivement
recommandée par la Parole de Dieu (1 Th 5. 17). Parler de don ou de
ministère de la prière, suppose qu'on l'a reçu de Dieu.
Or, la Parole de Dieu ne classe pas la prière dans les dons ou les
ministères. Cette erreur est à corriger. C'est une conception non
biblique. De ce fait, aucun chrétien ne peut se prévaloir de
n'avoir pas ou d'avoir un don ou un ministère de la prière, parce
que la prière n'en est pas un.
On ne peut appliquer à un groupe de personnes
l'exclusivité de la prière. Les ordonnances bibliques relatives
à la prière sont adressées à tous et à
chacun, et non pas à certains en particulier. C'est pourquoi 1
Timothée 2. 8 dit : « Je veux donc que les hommes prient en tout
lieu ».
Aucun croyant ne doit dire que Dieu ne peut pas écouter ou
exaucer sa prière, si tant est qu'il élève vers Dieu
« des mains pures, sans colère ni mauvaises pensées »
(1 Tm 2. 8). L'exemple d'Elie est là pour nous inciter à prier :
« un homme de la même nature que nous : il pria avec insistance pour
qu'il ne pleuve point, et il ne tomba point de pluie sur la terre pendant trois
ans et six mois » (Jc 5. 17). Et remarquons que dans l'Eglise primitive
l'église entière priait. Dans le cas de l'arrestation de Pierre
(Ac 12), il est dit que « beaucoup de personnes étaient
réunies et priaient » (Ac 12. 12). C'est la responsabilité
de tous, donc de chacun en particulier.
Il n'y a pas dans la Parole de Dieu de modèle type de
prière par lequel le chrétien peut avoir telle ou telle chose.
Jésus-Christ nous a laissé un modèle de prière (la
prière dominicale de Matthieu 6. 9-13) certes, mais n'en faisons pas une
prière incantatoire. Il y a beaucoup de prières dans la Parole de
Dieu, mais elles ne doivent pas non plus être transformées en
incantations. Nous pouvons nous en inspirer, mais ayons la sagesse de voir le
contexte dans lequel chaque prière s'inscrit. La vraie prière du
croyant doit être une effusion du coeur devant Dieu.
Le chrétien ne doit pas non plus prier selon un prieur ou
un prophète. Il doit prier selon la Parole de Dieu. La véritable
prière, c'est celle qui prend appui sur la Parole de Dieu. La Parole de
Dieu aide à bien prier, à prier efficacement. Il y a un danger
lorsque la prière n'est pas équilibrée par la Parole, je
dirais même, orientée selon la Parole de Dieu. Il est
préférable d'orienter les chrétiens vers des
prières fondées sur la Parole de Dieu. La Parole de Dieu et la
prière sont inséparables. Les deux vont ensemble. Il faut les
distinguer sans les séparer.
Voir la prière comme un moyen de pression sur Dieu, c'est
perdre de vue le fait que Dieu est souverain. Nous ne pouvons pas forcer la
main à Dieu.
Certes, Dieu peut nous mettre à l'épreuve pour que
notre foi en lui puisse grandir, en nous poussant à nous humilier
davantage devant sa face avant de nous répondre. Mais ce n'est pas pour
autant que nous aurions forcé la main à Dieu. Il fait ce qu'il
veut (Ps 115. 3). Il ne se pliera pas à nos désirs si ceux-ci ne
sont pas conformes à sa volonté. Le Cossec disait : « La
prière ne dicte pas d'ordre à Dieu, mais elle s'approprie ce que
Dieu promet et offre dans sa grâce en Jésus-Christ.
»58
Nous ne devons donc pas renverser les priorités de Dieu
qui veut d'abord un coeur tout entier à lui. Comme le disait le
psalmiste, « fais de l'Eternel tes délices, et il te donnera ce que
ton coeur désire » (Ps 37. 4). Et Jésus-Christ disait dans
son sermon sur la montagne : « Cherchez premièrement le royaume et
la justice de Dieu ; et toutes ces choses vous seront données
par-dessus. » (Mt 6. 33) Il est donc clair que la prière ne doit
pas être une « simple expression de besoins temporels
»59, mais une « recherche de la volonté et de
la gloire de Dieu »60. C'est là toute notre
responsabilité.
La prière n'est pas un remède, une question de
circonstance ou de besoin ; c'est une vie toute entière. En la
matière, Jésus-Christ constitue un exemple. Il a enseigné
« qu'il faut toujours prier, et ne point se relâcher » (Lc 18.
1). Il a non seulement enseigné, mais surtout il a mis en pratique son
enseignement. Dans le choix des 12, il est dit que la veille, «
Jésus se rendit sur la montagne pour prier, et il passa toute la nuit
à prier Dieu. » (Lc 6. 12) La prière était aussi son
activité quotidienne (Mt 14.
23 ; Mc 1. 35 ; Lc 5. 16). Il fut aussi un intercesseur. Il a
prié pour ses disciples, en particulier pour Pierre
réclamé par Satan pour cribler comme le froment (Lc 22. 31) :
« j'ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille point
» (Lc 22. 32b).
58 C. Le Cossec, La guérison et la
santé selon l'Evangile (Rennes : Imprimerie Générale,
s.d.), 44.
59 José Martinez, Théologie de la
Prière (Valence : Ligue pour la Lecture de la Bible, 1995), 26.
60 Ibid.
Face à l'épreuve de la croix, il a non seulement
prié (Lc 22. 41-42) mais aussi, il a voulu amener ses disciples à
la prière (Lc 22. 40, 46). Même sur la croix, Sa voix retentissait
toujours pour pardonner à ses bourreaux (Lc 23. 34).
Nous devons remercier. Mais la Parole de Dieu ne nous demande pas
de rendre grâce à des hommes. Nous devons rendre grâce
à Dieu et à Lui seul (Ep 5. 20), parce que c'est Lui, et non une
personne qui répond aux prières. Rendre grâce à des
hommes ne peut qu'aboutir à une idolâtrie de la personne. C'est
une déviation claire de la Parole de Dieu. Il est vrai que pour avoir
été source de bénédictions pour certains, on peut
être l'objet de certaines largesses. Mais, il reste que cela ne doit pas
être érigé comme une norme à respecter. Le faire,
c'est s'attribuer le droit à exaucer les prières. C'est se faire
dieu à la place de Dieu. Cela est contraire à la doctrine
biblique. Il s'avère important de relever la doctrine du «
sacerdoce universel des croyants » réaffirmée par Luther en
1520 dans son ouvrage A la noblesse allemande. Le Sacerdoce
Universel des Croyants
Nous ne devons plus revenir en arrière comme si nous
étions dans l'Ancienne Alliance où une catégorie de
personnes (prêtres et sacrificateurs) avaient accès à Dieu
et étaient des médiateurs entre Dieu et le peuple. Nous ne devons
pas non plus emprunter les pratiques de l'Eglise catholique qui met entre Dieu
et les fidèles, des médiateurs. Nous sommes « une race
élue, un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple acquis » (1
P 2. 9). Dit autrement, « nous avons, au moyen du sang de Jésus,
une libre entrée dans le sanctuaire par la route nouvelle et vivante
qu'il a inaugurée pour nous au travers du voile, c'est-à-dire de
sa chair » (Hé 10. 19-20), Christ étant notre souverain
sacrificateur « établi sur la maison de Dieu » (Hé 10.
21).
Nous sommes pour Dieu un royaume de sacrificateurs (Ap 5. 10 ;
20. 6).
Par ce biais, la Parole de Dieu affirme de manière claire
notre libre accès au Père : nous n'avons plus besoin de
médiateur sinon Christ et Christ seul : « Car il y a un seul Dieu,
et aussi un seul médiateur entre Dieu et les hommes, Jésus-Christ
homme, qui s'est donné lui-même en rançon pour tous. »
(1 Tm 2. 5-6a) Par Christ donc, nous avons un libre accès au
Père. Chaque chrétien peut en vertu de sa position en Christ
s'approcher avec assurance du trône de la grâce afin d'obtenir
miséricorde et de trouver grâce, pour être secourus dans ses
besoins (Hé 4. 16).
En tant que prêtres et sacrificateurs, Dieu exige encore de
ceux qui désirent s'approcher de lui des conditions. Celles mises en
évidence dans Hé 10. 22 sont : le coeur sincère, la
plénitude de la foi, les coeurs purifiés d'une mauvaise
conscience, et le corps lavé d'une eau pure. Ces qualités sont
essentielles pour nous approcher de Dieu, et sont soulignées à
plusieurs reprises dans l'Ecriture sainte (Ep 3. 12 ; Hé 11. 6 ; Jc 4.
8). Tout chrétien peut donc s'approcher de Dieu sans
intermédiaire ou médiateur. Ce point important de la doctrine
chrétienne a été rappelé par Martin Luther dans le
cadre de la Réforme protestante, dans un contexte où beaucoup de
croyants se confiaient à des médiateurs pour
bénéficier des grâces divines.
Dans le cadre néotestamentaire, une définition du
ministère prophétique s'impose.
Le Ministère Prophétique Aujourd'hui
Il est nécessaire d'examiner ce qu'est le
ministère prophétique aujourd'hui, parce que les prieurs ne se
contentent pas seulement d'exercer une activité de prière, ils
font également office de prophète. Le paradoxe est que la plupart
des églises dont ils sont issus ne reconnaissent pas ce
ministère. Pour ce faire, remarquons déjà que dans
l'Ecriture, le ministère prophétique n'est pas exclusivement
restreint à l'Ancien Testament.
Dans le cadre néotestamentaire, « nous pouvons
constater à partir de la Pentecôte, non seulement une continuation
des interventions de Dieu par la prophétie, mais encore un
élargissement de ce ministère »61.
Il y a une relation nette entre Pentecôte et
prophétie. Malheureusement, en lisant Joël 2. 28-29, on est plus
prompt à voir la promesse de l'Esprit que celle de la prophétie.
Or, dans la nouvelle économie néotestamentaire, l'exercice des
dons prophétiques va au-delà du cadre restrictif de l'Ancien
Testament pour se répandre sur toute chair. En principe, notre
ère est celle du développement de l'Esprit et de la
prophétie. Cela est attesté d'une part par la Parole de Dieu qui
relève la prophétie dans les Actes des Apôtres, les
épîtres, et d'autre part dans les écrits des Pères
de l'Eglise, les réveils ayant jalonnés la vie de l'Eglise, le
pentecôtisme et les réveils charismatiques. Cela veut dire qu'on
ne peut pas balayer d'un revers de la main le ministère
prophétique aujourd'hui.
Dans le Nouveau Testament, nous voyons deux moyens d'expression
du ministère prophétique dans l'Eglise. Ce sont : le don de
prophétie et le ministère de prophète. Dans 1 Corinthiens
12. 8-10, la prophétie est citée comme un don spirituel; la
prophétie est donc un charisme. Dans Ep 4. 11, elle est citée au
sein d'une liste de fonctions ; la prophétie est donc un
ministère. Comme l'a si bien souligné Gloaguen, même si
« l'exercice d'un don spirituel est un élément du
ministère, (...) le fait de prophétiser, même
fréquemment, [ne] confère [pas] automatiquement un
ministère de prophète »62. Et 1 Corinthiens
12. 28 établit clairement dans le même verset une distinction
entre ministère et don.
61Jacques Gloaguen, Apôtres et
Prophètes aujourd'hui (Le Havre et Mont-sur-Lausanne : Foi et
Victoire, 1990), 59.
62 Ibid., 66.
La différence entre don et ministère ne peut
qu'être située au niveau de l'instrument de Dieu,
c'est-à-dire, de l'homme. Particulièrement, « le
ministère de prophète a son origine dans une oeuvre
d'élection de Dieu qui se manifeste concrètement par une plus
grande réceptivité, une plus grande maîtrise de soi et une
plus grande foi »63. Il est donc opportun pour l'Eglise
comme pour les chrétiens de faire la différence entre un don et
un ministère, entre un don et un ministère en formation. Pour ce
faire, il n'y a pas d'autre alternative que l'écoute, car c'est en
écoutant qu'on peut reconnaître le bon violoniste du virtuose.
Le ministère prophétique aujourd'hui n'a rien
à apporter à la révélation qui est complète.
Mais il peut être un outil efficace entre les mains de l'Esprit pour
remettre à jour les vérités bibliques dans un contexte
d'apostasie. Il est susceptible d'intervenir dans tous les domaines de la vie
de l'Eglise sans restriction aucune. La question de la délivrance
mérite aussi une attention particulière.
Examen Biblique du Ministère de la Délivrance
Ayant été arraché par le Seigneur
Jésus-Christ du royaume des ténèbres pour accéder
au royaume de lumière, le chrétien n'est pas exempté des
attaques de l'ennemi, puisque notre adversaire, « le diable, rôde
comme un lion rugissant, cherchant qui il dévorera » (1 P 5. 8).
C'est pourquoi la Parole de Dieu nous invite à la sobriété
et à la vigilance. Ephésiens 6. 12 révèle qui sont
nos adversaires spirituels. Et il nous est invité à nous
fortifier dans le Seigneur (Ep 6. 10) et à nous revêtir de toutes
les armes de Dieu (Ep 6. 11). Cela veut dire qu'il y a un combat spirituel
auquel le chrétien est appelé.
Malheureusement, il existe de faux enseignements tendant
à faire croire que dès que l'on devient chrétien, Satan ne
peut plus nous toucher parce que nous sommes entre les mains de Dieu. Je pense
que c'est le contraire. Il n'y a pas de plus grande cible, de plus grand ennemi
de Satan que le vrai croyant.
Mais le combat spirituel auquel le chrétien est
engagé appelle l'exercice du discernement spirituel. Ce n'est pas au
chrétien de chercher comme les Don Quichotte et les matamores à
chasser les démons. Il doit avoir la plénitude de l'Esprit, la
sagesse divine et revêtir les armes spirituelles pour avancer sur le
chemin de la vie chrétienne. C'est alors qu'il pourra dans le
discernement identifier les traits enflammés du Malin, et, lorsqu'il se
présentera à lui, il se défendra. Nous ne sommes pas
appelés à voir dans toutes choses des manifestations
démoniaques, quand il ne s'agit que des problèmes médicaux
ou psychologiques.
Beaucoup soutiennent que le ministère de la
délivrance ne peut être exercé sur des croyants. Je ne veux
pas m'engager dans ce débat, mais simplement souligner quelques faits
bibliques qui méritent notre réflexion. Comme l'a si bien
relevé Henri Viaud-Murat, « le combat spirituel, ce n'est pas
de la délivrance, mais il peut y avoir de la délivrance dans un
combat spirituel »64.
D'abord, le Seigneur Jésus-Christ a exercé un
puissant ministère de délivrance. Ce ministère s'est
déroulé dans un contexte particulier où il y avait affaire
à des enfants d'Israël non à des chrétiens.
A la suite de Christ les apôtres ont emboîté
le même pas. Le nom de Jésus était le nom par lequel les
malades étaient guéris et les démons chassés. Mais
est-ce pour autant qu'on puisse prendre cela pour de la délivrance ?
43 Le Seigneur avait dit à ses disciples : « Voici
les miracles qui accompagneront ceux
qui auront cru : en mon nom, ils chasseront les démons ;
ils parleront de nouvelles langues ; ils saisiront des serpents ; s'ils boivent
quelque breuvage mortel, il ne leur fera point de mal ; ils imposeront les
mains aux malades, et les malades seront guéris. » (Mc 16. 17-18)
Les apôtres n'ont vu dans les maladies des possessions démoniaques
et ils ne s'adonnaient pas non plus à des séances d'exhibition.
Bien au contraire,
ceux-ci rassemblaient des foules non pas uniquement pour les
guérir ou pour
exhiber leur puissance de délivrance, mais ils en avaient
senti l'importance pour les malades (cf. Act 3, 6). Ils l'avaient aussi
pratiquée pour faire avancer
la cause du Royaume inauguré par Jésus lorsque la
puissance démoniaque contredisait et dénigrait celle du
Christ65.
La Parole de Dieu dit de Simon le magicien qu'il a cru au
Seigneur et a été baptisé (Ac 8. 13). Il était donc
chrétien. Cependant, il a voulu acheter la puissance de la transmission
du Saint-Esprit avec de l'argent (Ac 8. 19). La réponse de
l'apôtre Pierre montre en fait que Simon n'avait pas un coeur droit : il
était « dans un fiel amer et dans les liens de l'iniquité
» (Ac 8. 23) qui ne sont rien d'autre - je pense - que des liens
démoniaques.
Face à ce cas pratique, la méthode de Pierre pour
le faire sortir de cette situation a été la suivante : la
repentance et la prière (Ac 8. 22). Dit autrement, Simon avait besoin de
la révélation de la Parole de Dieu dans son intelligence. Il
avait besoin de la délivrance certainement. Mais cette délivrance
ne consistait pas à chasser des démons, mais à recevoir la
vérité de Dieu dans son esprit : « vous connaîtrez la
vérité, et la vérité vous affranchira » (Jn 8.
32). C'est là la plus grande délivrance, la délivrance de
l'esclavage du péché. C'est celle dont a besoin un bon nombre de
prétendus chrétiens.
65 Jean Masamba Ma Mpolo, Le Saint-Esprit
interroge les esprits (Yaoundé : Editions CLE, 2002), 129.
44 Ce ne sont pas les séances de délivrances qui
libèrent, mais c'est la vérité, la Parole
de Dieu qui libère. Si nous entrions dans cette logique
qui consiste à chasser des démons, des démons seront
effectivement chassés. Mais les problèmes de ces personnes ne
seront résolus que momentanément ou superficiellement. Tant que
la vérité de Dieu n'a pas pénétré dans les
coeurs, les démons qui ont été chassés reviendront
en plus grand nombre (Mt 12. 43-45).
La Parole de Dieu est puissante pour libérer des liens. A
Ephèse, la vérité de la Parole de Dieu a fait qu' «
un certain nombre de ceux qui avaient exercé les arts magiques, ayant
apporté leurs livres, les brûlèrent devant tout le monde
» (Ac 19. 19). Mais avant de faire cet acte public, ils ont d'abord cru,
puis ont confessé et enfin, ont déclaré ce qu'ils avaient
fait. La solution biblique est qu'
il faut un travail d'enseignement de la parole de Dieu, (...)
de prière pour que la vérité pénètre et
quand la vérité a pénétré dans un coeur qui
la reçoit et qui croit, à ce moment là, elle a une
puissance de vie et de libération qui ne permet pas à Satan de
s'accrocher66.
Ce modèle biblique de la délivrance est exigeant.
Et la délivrance telle qu'elle est conçue aujourd'hui est une
activité très facile et non exigeante, et beaucoup de prieurs
s'en donnent à coeur joie. En effet,
Il est plus facile de se soumettre à une séance de
«délivrance» de prétendus démons que de
reconnaître son propre péché, de le confesser, de le
condamner
et de le rejeter. Très souvent, on rejette la
responsabilité du péché ou d'un mauvais comportement sur
des démons immanents à soi ou sur des ancêtres, ce qui rend
plus difficile, voire impossible, la repentance spirituelle. 67
Ce que la Parole de Dieu enseigne est aux antipodes des pratiques
qui ont cours dans les séances de délivrance. Jésus-Christ
a refusé de recevoir l'attestation des démons.
66 Henri Viaud-Murat, «Comment être
délivré des oppressions démoniaques», Source de
vie, [en ligne].
http://www.sourcedevie.com/22,
15/07/2006.
67 Wolfgang Bühne, La troisième
vague...le plus grand Réveil de l'Histoire de l'Eglise ? (Bilefeld
: Editions Christlische Literatur-Verbreitung, 1992), 157-158.
En effet, dans sa pratique pastorale, « lors des
exorcismes, Jésus n'emploie pas de formules liturgiques ou magiques. Il
donne simplement un ordre péremptoire à l'esprit, le
menaçant au besoin »68. Aussi nous pouvons
remarquer que malgré la reconnaissance de Jésus par les
démons, il a refusé de s'engager dans des échanges avec
eux ou de recevoir leur attestation comme dans Marc 1. 24-25 ou Luc 4. 34-35.
Et l'apôtre Paul, face à la déclaration de la femme
animée d'un esprit de Python, a dit : « Je t'ordonne, au nom de
Jésus-Christ, de sortir d'elle. » (Ac 16. 17) Remarquons que dans
la Parole de Dieu, nous ne voyons pas de serviteurs de Dieu qui aient
passé leur temps à échanger avec des démons !
Gardons-nous de nous faire des illusions. Nous ne sommes pas tout-puissants
devant le diable. C'est le Seigneur qui l'est. La Parole de Dieu établit
clairement que « nous n'avons pas à lutter contre la chair et le
sang, mais contre les autorités, contre les princes de ce monde de
ténèbres, contre les esprits méchants dans les lieux
célestes » (Ep 6. 12). Cela ne fait pas que le diable va se
soumettre à nous. Nous ne devons pas injurier les gloires (Jude 8).
L'archange Michel en contestation avec le diable n'osa lui porter de jugement
injurieux (Jude 9).
En fait, chaque croyant doit savoir que le combat spirituel est
une réalité. Tout dépend en fait de comment la vie
spirituelle est vécue. L'ennemi cherche des portes d'entrée pour
avoir les chrétiens. Ephésiens 4. 26 nous invite à ne pas
donner accès au diable. Il appartient à tout un chacun de ne pas
prêter le flanc, et de savoir que « le Seigneur c'est l'Esprit ; et
là où est l'Esprit du Seigneur, là est la liberté
» (2 Co 3. 17). Dit autrement, la liberté que Christ nous
confère devrait nous oblige à nous offrir à Christ nos
membres comme des instruments de justice (Rm 6. 13b), ce qui est synonyme
d'obéissance et de fidélité à Christ.
68 Jean Masamba Ma Mpolo, Le Saint-Esprit
interroge les esprits (Yaoundé : Editions CLE, 2002), 128.
La question du ministère de la délivrance
soulève à mon avis une autre question, celle de
l'authenticité de la nouvelle naissance chez bon nombre de personnes qui
fréquentent nos églises. Malheureusement, la vie menée par
certains chrétiens ne témoigne pas d'une nouveauté de vie.
Dans un tel contexte, je pense qu'il n'est pas étonnant que des gens
qu'on croit être chrétiens aient des liens démoniaques.
La Parole de Dieu souligne en plus que ce qui est gratuitement
reçu doit être gratuitement donné.
Vous Avez Reçu Gratuitement, Donnez Gratuitement
Les pratiques de certains prieurs relatives à leurs
motivations économiques peuvent être assimilées à un
commerce des biens spirituels. Elles remettent en question la grâce
imméritée manifestée par Christ. En effet, nous sommes
sauvés par grâce. Par nature, la grâce ne peut faire l'objet
d'un usage commercial. En effet, c'est se livrer à un commerce
éhonté que de s'adonner à la vente des biens symboliques,
notamment, les biens spirituels.
La bénédiction de Dieu, ses miracles et ses
guérisons ne sont pas des biens spirituels monnayables à merci.
Le péché de Guéhazi appelle aujourd'hui à faire
preuve de discernement (2 R 5. 16, 26-27). L'exercice des dons spirituels est
pour l'édification du corps de Christ, et non pour satisfaire à
des intérêts personnels. Jésus-Christ en envoyant ses
disciples en mission leur avait dit : « Vous avez reçu
gratuitement, donnez gratuitement. » (Mt 10. 8b). Il est important de
relever que cette déclaration faisait suite à une invitation aux
disciples à l'exercice des dons de puissance : « Guérissez
les malades, ressuscitez les morts, purifiez les lépreux, chassez les
démons. » (Mt 10. 8b)
Soulignons que dans son essence, le mot «don» est
évocateur. Le mot grec utilisé par l'apôtre Paul est
«charisma». « Un charisma est un don fait par charis, c.-
à-d. par grâce (...). [C'est] tout ce que l'on avait reçu
gratuitement. »69 Il s'agit
donc d'une manifestation grandiloquente de la grâce de
Dieu à l'égard de son Eglise. Les dons sont en effet des
charismes, des grâces ; donc chaque manifestation est une grâce
particulière. Les dons ne sont pas des capacités que l'on peut
utiliser à volonté. Ils diffèrent donc en cela des
manifestations spirites de sorcellerie ou démoniaques, car le diable a
tout intérêt à contrefaire Dieu en faisant passer ses
miracles (ceux du diable) pour des miracles de Dieu.
Les faveurs de Dieu ne peuvent s'acheter. Simon le magicien,
voulant acquérir l'Esprit ou le pouvoir de communiquer l'Esprit à
prix d'argent, a été maudit : « Que ton argent aille
à la perdition avec toi, puisque tu as pensé acquérir le
don de Dieu à prix d'argent » (Ac 8. 20). C'est de qui a
donné naissance au mot simonie définie comme une «
volonté réfléchie d'acheter ou vendre à prix
temporel une chose spirituelle (ou assimilable à une chose spirituelle).
»70
A la lumière de ce qui précède, il convient
de proposer des solutions afin d'atténuer les effets négatifs de
ce phénomène au niveau des différents acteurs en question.
Pour ce faire, mes propositions sont les suivantes.
Esquisse de Solutions au Problème
Le Discernement des Esprits
Le Seigneur appelle son Eglise à exercer le
discernement spirituel. Cette tâche n'est pas de la responsabilité
unique des ecclésiastiques ; elle est celle de tous les
chrétiens.
69 «Charisme» dans Nouveau
Dictionnaire Biblique révisé et augmenté, Ed.
2004.
70 «Simonie» dans Le Nouveau Petit
Robert de la langue française, Ed. 2007.
C'est pourquoi, l'apôtre Paul s'adressant aux
chrétiens de Thessalonique les invita à examiner toutes choses et
de retenir ce qui est bon (1 Th 5. 21). Examiner
signifier «discerner», «éprouver»,
«sonder». C'est « le procédé qui consiste
à éprouver quelque chose afin de révéler son
authenticité »71. C'est une invitation aux
chrétiens « à examiner minutieusement tout ce qu'ils
entendent afin de déterminer si cela est authentique, de distinguer
entre le vrai et le faux, de séparer le bon du mauvais
»72. Il faut cependant faire la différence entre le
discernement recommandé par Paul et le jugement proscris par
Jésus (Mt 7. 2-5). Le discernement n'est pas en effet synonyme de
jugement.
James A. Beverley propose une méthode d'évaluation
appelée « les dix tests de la vérité
»73. Le test de Dieu : il faut se demander si le groupe ou
la personne concerné (e) reconnaît le Dieu qui s'est
révélé en trois personnes. Le test christologique porte
sur Christ : Sa personne, Son oeuvre Sa gloire, Son enseignement, Sa mort, Sa
résurrection et Son retour. Le test biblique porte sur la confession de
l'autorité de la Parole de Dieu. Le test de l'amour moral est
l'expression verticale et horizontale de l'amour selon 1 Corinthiens 13. Le
test de la spiritualité pose la question de l'aspiration à la
direction du Saint-Esprit et à la pureté. Le test de la
liberté : la liberté est-elle offerte aux individus ? Les
dirigeants acceptent-ils de se soumettre à la correction et à la
discipline ?
71 John MacArthur, Spiritualité en crise.
Comment discerner le vrai du faux (CH Préverenges : La Maison de la
Bible, 1996), 94.
72 Ibid.
73 James A. Beverley, La bénédiction
de Toronto. Enquête (Floride : VIDA, 1995), 29.
Le test de l'église pose des questions telles que : «
Le groupe religieux en question s'inscrit-il dans la continuité avec
la foi classique ? Ou bien se montre-t-il sectaire, rigide et étroit
d'esprit ? »74 Le test socio - politique : la jonction
entre l'action sociale et l'évangélisation est-elle effective ?
Le test prophétique consiste à se demander : « les
dirigeants du groupe ont-ils été de faux prophètes, dans
le sens qu'ils ont énoncé de fausses prophéties ou qu'ils
se sont rendus coupables de dogmatisme prophétique insouciant ?
»75 Le test de la raison : « Une idée ou une
pratique donnée semble-elle raisonnable, et en accord avec le sentier de
la sagesse et de la vérité ?»76. Je pense
qu'il est nécessaire de ne pas s'en tenir seulement aux dons
spirituels.
Au-delà des Dons de l'Esprit
En mettant l'accent sur les dons spirituels, les prieurs ont
tendance à négliger le fruit de l'Esprit et la sanctification.
Or, s'il est vrai que le dernier est preuve de maturité spirituelle, on
ne saurait en dire autant du premier. Il peut se trouver au niveau des
pentecôtistes un certain orgueil « fondé sur un sentiment
de supériorité à cause des révélations et de
leur expérience »77. Cela a pour conséquence
de les éloigner d'autres aspects des Saintes Ecritures qui appellent le
chrétien à la maturité spirituelle. À mon avis, il
faut aller au-delà des dons de l'Esprit.
Je pense qu'un équilibre est nécessaire entre dons
de l'Esprit et fruit de l'Esprit. Rien ne sert de mettre l'accent sur les dons
spirituels si leur exercice n'est pas accompagné du fruit de l'Esprit et
d'une sainteté de vie.
74 Ibid., 30.
75 Ibid.
76 Ibid.
77 Frank Bartleman, Azusa Street - 1906. Une autre
vague déferle (Saint-Hubert : Ministères Multilingues,
1997), 165.
L'enseignement des apôtres, particulièrement celui
de l'apôtre Paul a consisté à mettre entre deux chapitres
parlant des dons spirituels (1 Co 12 et 14), un chapitre sur l'amour (1 Co 13).
L'exercice des dons spirituels doit être effectué dans l'amour :
« Quand je parlerais les langues des hommes et des anges, si je n'ai pas
l'amour, je suis un airain qui résonne, ou une cymbale qui retentit.
» (1 Co 13. 1). On ne peut parler de 1 Corinthiens 13 sans se
référer à Galates 5. 22, parce que l'amour est la porte
par laquelle le chrétien peut vivre la sainteté et
développer tous les paramètres du fruit de l'Esprit.
Le fruit de l'Esprit est une oeuvre spirituelle de longue
haleine. Il demande de la part du chrétien une vie
éprouvée, une vie de communion avec le Seigneur, un abandon de sa
propre vie afin que se développe en lui la vie du Seigneur.
JésusChrist, le vrai cep avait dit que tout sarment qui porte du fruit
doit être émondé « afin qu'il porte encore plus de
fruit » (Jn 15. 2). C'est par cet émondage que le chrétien
peut porter le fruit de l'Esprit. Soulignons à présent la
question relative à la reconnaissance des dons et/ou ministères
par l'église.
La Reconnaissance des Ministères et des Dons par
l'Eglise
J'ai relevé le fait que la prière n'est pas un
ministère. Mais, j'ai aussi souligné le fait que les prieurs ne
s'occupent pas uniquement de la prière ; ils font parfois office de
recours en matière de relation d'aide. Ils prétendent exercer
aussi les ministères de prophète et de délivrance. Il est
vrai, la Parole de Dieu ne fait en aucun moment cas d'un certain
ministère de délivrance. Encore, faut-il que les uns et les
autres soient enseignés et en arrivent à une telle
compréhension des choses. Dans ce contexte, on ne peut passer sous
silence le rôle important qu'ils jouent auprès des
chrétiens.
C'est pourquoi, je pense qu'il est nécessaire pour les
églises de reconnaître leurs ministères dans un cadre
biblique ou si l'on veut leurs activités spirituelles, dans le cas
où l'appellation ministère peut porter à confusion. Cela
pourrait permettre un investissement de manière pratique dans leur
encadrement et leur formation afin que des erreurs soient
évitées. Selon Wolfgang Bühne, « l'église
peut avertir et reprendre un ouvrier du Seigneur, elle peut exprimer des voeux
et faire des recommandations, mais elle ne doit jamais s'interposer entre le
serviteur et son Maître »78. Elle peut et doit
discipliner quand il y a une faute doctrinale. En effet, lorsque l'Eglise
reconnaît les ministères comme les dons, elle a aussi un droit de
regard sur la manière dont ils sont exercés.
Quoiqu'il en soit, l'ouvrier ne doit en aucun cas avoir un esprit
vindicatif. La reconnaissance du ministère ou du don d'un frère
ou d'une soeur n'est pas une obligation pour une église. Elle peut le
faire comme dans Actes 13. 3 ; mais, elle peut pour des raisons
précises, soit attendre que la personne en question ait produit des
aptitudes claires accréditant son don et/ou ministère, soit ne
même pas les reconnaître79.
A cet effet, l'exemple de la Région de Koudougou est un
cas d'école. Elle a tenté de réglementer le
développement des communautés de prière sous l'impulsion
du Pasteur Zongo Etienne. Cette tentative qui s'est avérée un
succès a été motivée par plusieurs raisons. Selon
le Docteur Zongo, des plaintes avaient été exprimées de la
part des chrétiens dont les églises sont dirigées par des
pasteurs prieurs. Selon ces chrétiens, leurs églises seraient
sans berger, leur pasteur étant chaque fois en déplacement pour
des prières.
78 Wolfgang Bühne, La troisième
vague...le plus grand Réveil de l'Histoire de l'Eglise ? (Bilefeld
: Editions Christlische Literatur-Verbreitung, 1992), 125.
La deuxième raison est que les prieurs qui se
déplaçaient dans les églises ou qui recevaient les
chrétiens chez eux, se seraient adonnés à des pratiques
indécentes pour avoir de l'argent. Aussi, ils détourneraient
à leur profit les dîmes et les offrandes des églises. La
troisième motivation est qu'il y aurait en leur sein des pratiques qui
allaient à l'encontre de l'éthique chrétienne.
Pour parer à tous ces facteurs négatifs, la
Région de Koudougou a convoqué tous les prieurs. Dans un premier
temps, ceux-ci n'ont pas répondu à l'appel. Une seconde
convocation leur fut adressée avec l'obligation d'obtempérer sous
peine d'exclusion de l'Eglise des Assemblées de Dieu. Ils ont alors
répondu à l'appel. La Région, tout en reconnaissant leur
ministère, les invita à l'exercer sous le contrôle des
églises.
Les conditions étaient les suivantes. D'abord, que tous
les prieurs qui occupent la fonction de pasteur principal dans une
église acceptent recevoir à leurs côtés un pasteur
assistant qui va les aider dans le ministère pastoral au regard de leurs
fréquents déplacements. Ensuite, qu'il soit mis fin à
l'exercice de la prière à domicile pour que tout se fasse dans
les églises. Enfin, que ces derniers acceptent collaborer avec des
pasteurs qui s'occuperont du volet enseignement. Certes, tous les prieurs n'ont
pas accepté ces conditions. Mais la majorité d'entre eux exercent
aujourd'hui leur ministère avec la bénédiction de la
Région. A l'endroit des chrétiens, il convient de
réaffirmer la nécessité d'une relation personnelle avec
Dieu.
Cultiver une Relation Personnelle Avec Dieu
La prière occupe une place importante dans la Parole de
Dieu, si bien qu'on peut parler de priorité de la prière : «
je veux donc que les hommes prient en tout lieu » (1 Tm 2. 8), «
priez sans cesse » (1 Th 5. 17). Dans Matthieu 6. 6, Jésus-Christ a
dit :
« quand tu pries... ».
Cela sous entend « lorsque tu pries... », et non «
si tu pries... ». Pour le chrétien, la prière n'est pas une
option, mais une activité spirituelle qui découle de sa vie,
d'une relation personnelle avec Dieu. La prière nécessite une
régularité. Nous ne pouvons donc que l'inscrire dans le cadre
d'une relation entretenue et enrichie avec le Seigneur.
A mon avis, si chaque chrétien avait une vie de
prière et de méditation personnelle de la Parole de Dieu, le
développement de l'activité des prieurs n'aurait pas aujourd'hui
une telle ampleur. C'est justement parce que cet aspect personnel de la vie
chrétienne manque que beaucoup ont recours aux prieurs. Cela ne veut pas
dire qu'il est malséant de demander une aide dans la prière
auprès d'une personne qui jouit d'une grande proximité avec le
Seigneur ou qui connaît une plus grande maturité spirituelle. Cela
est possible. Mais cela ne doit pas devenir une règle, un modus vivendi.
En effet, lorsqu'on se promène de lieu de prière en lieu de
prière, il y a un danger à se confier plus à des hommes
qu'à Dieu.
Il n'existe aucune relation privilégiée avec le
Seigneur que la relation personnelle. C'est ce à quoi chaque
chrétien doit parvenir. Déjà dans l'Ancien Testament, le
jeune serviteur de Moïse, Josué nous donne un exemple frappant. Il
est le seul avec Moïse dans la tente d'assignation dressée hors du
camp (Ex 33. 7). Mais quand Moïse quittait la tente pour retourner au
camp, Josué cependant « ne sortait pas du milieu de la tente »
(Ex 33. 11). Par cet exemple, nous voyons un serviteur qui marche sur les pas
de son maître, en ayant cependant les yeux rivés sur Celui qui
conduit son maître, le Divin Maître. Pour lui, sa relation
personnelle avec Dieu primait sur toute autre chose. Quel bel exemple pour nous
aujourd'hui !
CHAPITRE III CONCLUSION
D'un point de vue méthodologique, cette recherche sur le
développement des communautés de prière en milieu
pentecôtiste burkinabé, plus précisément, dans la
Région de Ouagadougou a été faite de manière
théorique et pratique. Sur le plan théorique, j'ai
recherché des données documentaires en utilisant les recherches
antérieures qui expliquent dans une certaine mesure le sujet. Au niveau
pratique, les données empiriques recueillies sur le terrain
auprès des prieurs et des chrétiens qui les fréquentent
ont apporté un éclairage nouveau sur la question,
particulièrement en ce qui concerne ses tendances locales au Burkina
Faso. Les outils d'investigation ont été essentiellement :
l'observation directe, le questionnaire et l'entretien semi - directif.
L'ensemble de ces données m'a permis d'organiser mon travail en fonction
de la thèse selon laquelle le développement des
communautés de prière en milieu pentecôtiste dans la
Région de Ouagadougou peut être mis en relation avec trois
principaux facteurs : l'offre de prière, la demande de prière et
l'affaiblissement de la puissance spirituelle des églises.
Pour me résumer, j'ai identifié dans un premier
temps les racines du phénomène qui, à mon avis,
s'étendent jusque dans le montanisme et les mouvements
pentecôtistes. Les mouvements pentecôtistes en Afrique ont leurs
spécificités et ont connu des dérapages tels que le
recours systématique à la délivrance et la
théologie de la prospérité et de la guérison. J'ai
aussi mis en évidence certains aspects de la théologie
libérale africaine et les tendances du pentecôtisme au Burkina
Faso.
En sus de ces données théoriques, les
données empiriques m'ont permis de relever deux causes principales
liées au développement des communautés de prière
dans la Région de Ouagadougou : d'une part, les causes religieuses et
spirituelles qui se situent au niveau des chrétiens, des églises
et des prieurs ; d'autre part, les causes sociales et économiques, qui
sont en relation avec l'arrière-plan animiste des chrétiens et la
motivation économique des prieurs. Au regard de ces différentes
causes, il m'est paru opportun de tirer les enseignements qui s'imposent. Il y
a, de la part des acteurs en question, une vision déformée de la
prière, d'où la nécessité de retourner à la
Parole de Dieu afin de développer une théologie digne de ce nom,
qui se veut biblique sur la prière et l'exercice du ministère
prophétique et de la délivrance.
J'ai esquissé des réponses aux questions que je
m'étais posées afin de maîtriser le
phénomène. Il s'agit en occurrence du fait que chaque
chrétien né de nouveau et baptisé du Saint-Esprit est
appelé à discerner, à faire la part des choses entre ce
que vient de Dieu et ce qui est du Malin. En plus, il faut aussi cultiver une
relation personnelle avec Dieu par une vie quotidienne de prière et de
méditation de la Parole de Dieu. J'ai aussi souligné pour ce qui
est des prieurs, la nécessité pour ceux-ci d'avoir une vie
spirituelle équilibrée. Dit autrement, l'accent ne doit pas
être mis sur les dons de l'Esprit au détriment du fruit de
l'Esprit. Sans cet équilibre spirituel, leur ministère
souffrirait de bien de manquements. Pour ce qui est des églises, la
reconnaissance des ministères et des dons exercés par des
chrétiens pourrait être un moyen pour mieux contrôler cette
activité de prière et créer de facto un cadre officiel
d'expression de ces ministères et dons dans les églises en lieu
et place du caractère informel de l'activité.
Relativement à ma problématique, les données
recueillies apportent des réponses aux questions que je m'étais
posées. Ainsi, la question des vrais et des faux prophètes
nécessite une définition claire par l'église du
ministère prophétique aujourd'hui. Pour ce qui est du manque
d'encadrement spirituel de l'activité des prieurs, il serait opportun
que l'église se prononce de manière officielle vis-à-vis
de ses membres qui ont des dons et qui les exercent. Les écarts souvent
rencontrés au niveau des prieurs appellent chaque croyant à la
vigilance, au discernement et les responsables spirituels à l'exercice
du discernement (don de discernement). Ils interpellent chaque prieur à
mener une vie chrétienne sanctifiée de peur d'être
rejeté après avoir prêché aux autres ou accompli des
miracles (Mt 7. 21-23). Quant à l'ampleur que prend le
phénomène, j'ai mis en évidence l'importance de retourner
au schéma biblique de la prière où chaque chrétien
a une relation personnelle avec Dieu. Aussi, chaque pasteur est berger du
troupeau de Dieu. Il devrait en principe, accorder un intérêt
particulier aux besoins des chrétiens en matière de relation
d'aide.
En définitive, je pense que dans l'analyse causale du
développement des communautés de prière, il faut
éviter tout sectarisme ou esprit sectaire. En effet, nous ne devons pas
être prompts à empêcher les Eldad et Médad (Nb 11.
26)
d'aujourd'hui de prophétiser et d'accomplir des miracles
ou des prodiges, à la seule raison qu'ils ne sont pas des nôtres.
Au contraire, nous devons dire comme Moïse : « Puisse tout le peuple
de l'Eternel être composé de prophètes ; et veuille
l'Eternel mettre son Esprit sur eux ! » (Nb 11. 29) Dans le même
sens, Jésus disait : « il n'est personne qui, faisant un miracle en
mon nom, puisse aussitôt après parler mal de moi » (Mc 9.
39). Sachons donc raison gardée, pour ne pas se mettre à dos des
personnes que le Seigneur n'a pas rejetées.
Cette recherche m'a permis de me pencher sur un sujet dont
l'actualité n'est plus à démontrer. En effet, dans un
contexte religieux marqué en milieu urbain par la prolifération
des dénominations et des lieux de culte, s'il y a un
phénomène majeur qui y émerge, c'est sans conteste celui
des prieurs. Cette recherche se veut un début d'explication. Le regard
que j'ai porté sur la question est panoramique. Cela est dû
à des contraintes techniques, financières et de temps. De ce
fait, elle mérite d'être approfondie par des études
ultérieures. L'accent pourrait être mis en particulier sur chaque
acteur : les prieurs, les chrétiens, les leaders d'église.
Quelles sont les logiques des acteurs ? Quelles sont les conditions d'exercice
des dons spirituels dans les églises ?
Aussi, il est pertinent qu'au-delà de la perspective
biblique, une perspective sociologique du sujet soit adoptée. En effet
dans cette étude, j'ai adopté essentiellement une perspective
biblique. Or, au regard du fait qu'il s'agit d'un fait aussi bien social que
religieux, la démarche sociologique apporterait un éclairage sur
des logiques qui sont certainement religieuses, mais aussi
socio-anthropologiques. Il ressort que beaucoup d'aspects culturels sont
imbriqués dans ce phénomène. Et un oeil de sociologue ou
d'anthropologue pourrait permettre de saisir certaines données qui ne
sont pas perceptibles à première vue.
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pentecôtistes du pays mossi. A propos
de : P.-J. Laurent, Les pentecôtistes du Burkina Faso.
Mariage, pouvoir et guérison, Paris, Karthala, 2003 ». Dans
CIVILISATIONS vol. LI 1-2 - Religions transnationales.
Laurent, Pierre-Joseph. « En guise de réponse :
les Assemblées de Dieu du Burkina Faso et la trans-nationalité du
pentecôtisme ». Dans CIVILISATIONS vol. LI n° 1-2 - Religions
transnationales.
Noret, Joël. « Les Assemblées de Dieu du Burkina
Faso en contexte. A propos de : P.-J. Laurent, Les pentecôtistes du
Burkina Faso. Mariage, pouvoir et guérison, Paris, Karthala, 2003
». Dans CIVILISATIONS vol. LI 1-2 - Religions transnationales.
Ressources en Ligne
Mayrague, Cédric. Les dynamiques paradoxales du
pentecôtisme en Afrique. Paris : Ifri, 2008.
ANNEXES
Annexe
1. QUESTIONNAIRE ADRESSE AUX CHRETIENS
2. GUIDE D'ENTRETIEN ADRESSE AUX PRIEURS
QUESTIONNAIRE ADRESSE AUX CHRETIENS
Identification
1. Age : 2.Sexe : 3. Eglise
fréquentée :
4. Dénomination : 4. Date de conversion :
5. Date de baptême d'eau : 6. Date de baptême
du Saint-Esprit : Le chrétien et le
prieur
7. Etes-vous déjà allé chez un prieur ou un
groupe de prieurs ? Oui ? Non ?
8. Combien de fois ? Une fois ? Deux fois ? Plusieurs fois ?
9. A quelle fréquence partez-vous chez le (s) prieur (s)
?
Une fois le mois ? Une fois l'an ? Autre fréquence ?
Préciser
Pas de fréquence ?
10. Pour quelle (s) raison (s) y êtes-vous parti ?
· Spirituelle ? (préciser) .
· problème social ? (préciser)
· Autres ? (préciser)
11. Avez-vous été satisfait ? Oui ? Non ?
12. Si oui, quelle a été votre satisfaction ?
13. Si non, pourquoi
14. Le prieur avait-il des exigences particulières ? Oui
? Non ?
15. Si oui, lesquelles ?
16. Avez-vous un prieur préféré chez qui
vous partiez à chaque fois ? ? Ou en avezvous plusieurs ? ?
17. Pourquoi ce choix ?
18. À quelle occasion partez-vous chez le prieur ?
· Quand j'ai un problème : Economique ? Sociale ?
Scolaire Spirituel ?
Autres ? Préciser
· Lorsque je me sens menacé par des agents du monde
spirituel ? Préciser la menace
· Quand je voyage ?
· Autre occasion ? Préciser .
Le chrétien et son église
locale
19. Fréquentez-vous une église fixe ? ou plusieurs
églises ? ?
20. Sont-elles d'une même dénomination ? ou de
dénominations différentes ? ?
21. Pour quelles raisons avez-vous choisi ce type de
fréquentations ?
22. Participez-vous régulièrement aux cultes de
dimanche ? Oui ? Non ?
23. Si non pourquoi ne prenez vous pas part
régulièrement ?
24. Où êtes-vous quand vous n'êtes pas dans
votre église locale ?
25. Combien de cultes prenez-vous part dans la semaine au sein
de votre église locale ? Toutes ? Deux ? Une seule ? Aucune ?
26. Avez-vous des besoins en matière de prière ?
Oui ? Non ?
27. Avez-vous recours à la cellule d'intercession de
votre église ? Oui ? Non ?
28. Si oui, quelles sont impressions ? Bonnes ? Mauvaises ?
Mitigées ? Autres ?
29. Expliquez
30. Si non, pourquoi ne prenez-vous pas part ?
31. Avez-vous recours à votre pasteur pour vos besoins de
relation d'aide ? Oui ? Non ?
32. Si oui, à quelle fréquence ? Quelque fois ?
Souvent ? Rarement ?
Expliquez vos impressions
33. Si non, pourquoi vous n'y avez pas recours ?
34. Quelles sont vos attentes relatives à votre
église locale ?
35. Qu'attendez-vous de votre pasteur ?
Le chrétien face à
lui-même
36. Avez-vous une vie de prière personnelle ?
Tous les jours ? Une fois par semaine ? 2 ou 3 fois la semaine
?
37. Avez-vous une méditation quotidienne de la Parole de
Dieu ? Oui ? Non ?
38. Comment cela se passe t-il ?
39. Que pensez-vous du développement des
communautés de prière ?
GUIDE D'ENTRETIEN ADRESSE AUX PRIEURS
Identification
· Age : Sexe : Eglise fréquentée :
Dénomination :
· Date de conversion : Date de baptême d'eau :
Date de baptême du Saint-Esprit : Lieu exercé :
· Conditions de vie :
Le prieur et son activité
· Nature de l'activité exercée
· Dons exercés et réclamés
· Conditions de leur exercice : cadre : celibaterium,
église, cour ; individuel ou collectif ? intra muros ou extra muros ?
· Motivation de l'exercice de l'activité :
spirituel, rentabilité...
· Publicité de l'activité
· Moyens de survie
Le prieur et le chrétien
· Types de personnes reçues : chrétiens ? Non
chrétiens ? Tranche d'âge ? Niveau social
· Motivations de ces consultations
· Nombre de consultations : par jour, par semaine, par
mois...
· Ce qui est dit aux chrétiens
· Les exigences de la consultation
Le prieur et l'église
· Membre d'une église locale ou indépendant
?
· Les Indépendants : Origine ecclésiastique :
rupture avec l'autorité. Rébellion : Raisons et motivations
· Prieur étant dans une église : types de
relations avec l'autorité : soumission ou rébellion ?
· Droit de regard de l'église sur l'activité
exercée ? Jusqu'où l'église peut aller ? Sanctions
possibles : soumission ou rébellion ?
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