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KOLOGO OUMAROU, réflexion sur les enjeux
géopolitiques des initiatives des grandes puissances pour le maintien
de la paix en Afrique. Contacts :
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Enjeux géopolitiques des Initiatives des Grandes
Puissances en matière de Renforcement des Capacités Africaines de
Maintien de la Paix
Réalisé par KOLOGO Oumarou
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Introduction
L'Afrique, on le sait, est un continent fort
déchiré. L'ONU y a sanctionné un nombre
considérable d'opérations de maintien de la paix. Comme le
soulignait en septembre 1998 Bernard MIYET, secrétaire
général adjoint des Nations Unies pour les OMP, au cours des huit
dernières années, sur les 32 opérations, 16 ont
été déployées en Afrique. À ces
activités onusiennes viennent s'ajouter les actions des organisations
régionales ou sous régionales et les initiatives de nombreux pays
en faveur d'une africanisation du maintien de la paix1.
L'incapacité de l'ONU à tenir ses promesses dans le maintien de
la paix en Afrique et la pauvreté des Etats à faire face seuls
aux cas de conflits ont conduit les l'organisation mondiale à impliquer
les organisations régionales et sous-régionales dans les
Opérations de Maintien de la Paix. En outre, vu leurs liens ancestraux
forts avec les Etats africains, certains Etats occidentaux ont
décidé d'apporter leurs soutiens divers aux Etats africains en
général et aux organisations sous-régionales africaines en
particulier pour les préparer aux opérations de paix. Si pour les
Etats africains et leurs organes régionaux, ces apports sont une aubaine
véritable pour le renforcement de leurs capacités, il n'en
demeure pas moins que ces interventions suscitent des interrogations. En effet,
comment se manifestent concrètement ces soutiens occidentaux ?quels sont
les mobiles qui sous-tendent ces actions occidentales ?
§1. DU RENFORCEMENT DES CAPACITES AFRICAINES DE
MAINTIEN DE LA PAIX
1.1 Historique d'une stratégie internationale de
renforcement des capacités africaines dans les Opérations de
Maintien de la Paix
La fin de la guerre froide suscite en Afrique de grandes
espérances: la Namibie obtient son indépendance, le conflit au
Mozambique est réglé et la politique de l'apartheid en Afrique du
Sud est à sa fin. Dans cette quasi-euphorie, l'échec de la
mission d'imposition de la paix en Somalie en 1992-93 (ONUSOM I et II),
amplifié par la tragédie rwandaise en 1994 et les crises au
Burundi et au Zaïre en 1996, remet en cause la légitimité de
l'ONU et accentue davantage sa marginalisation au sein du continent.
L'expulsion de la mission de l'ONU en Angola en 1999, n'est qu'une
manifestation de ce phénomène de dénonciation de l'action
de l'ONU. Ces échecs ont, cependant, sur un autre plan,
entraîné une transformation en profondeur de la pratique onusienne
du maintien de la paix dans ce continent. On a ainsi assisté à
une reconfiguration des rapports de partenariat au sein des pays africains
eux-mêmes, d'une part, et entre l'Afrique et le monde, d'autre part.
C'est ainsi que va être réactivée l'idée dormante de
doter le continent africain d'une capacité endogène de maintien
de la paix. En exemple, lors du 18e Sommet francobritannique à Londres
en1995, était développée cette analyse: «Nous
considérons qu'il appartient d'abord aux Africains de régler eux
mêmes leurs conflits. Notre rôle est de les y aider, de
manière pragmatique.». Une année plus tard (10/09/1996)
Kofi ANNAN reprenait dans le même sens : «We have a
responsibility to help build Africa's capacity to help itself, in peacekeeping
as in other areas. We, the international community, must not shirk
thisi.
Ces assertions seront confortées en 1995 par le premier
rapport du Secrétaire général de l'ONU portant sur
l'amélioration de l'état de préparation à la
prévention des conflits et au maintien de la paix en Afrique,
1 Manon TESSIER et Thierry GONGORA, Institut
Québécois de hautes études internationales, bulletin
n° 44, janvier 2000.
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publication suivie en 1999 d'un deuxième rapport sur le
renforcement de la capacité de l'Afrique en matière de maintien
de la paix. À ces analyses vient s'ajouter en 1998 la publication d'une
étude sur les causes des conflits et la promotion d'une paix et d'un
développement durables en Afrique. L'Afrique est donc au coeur d'une
réflexion de l'ONU sur le maintien de la paix qui entraîne un
renforcement de sa coopération avec l'Organisation de l'unité
africaine (OUA) et les organisations sous-régionales oeuvrant dans le
méme domaine. Ainsi, l'ONU a ouvert un bureau de liaison politique
auprès de l'OUA à AddisAbeba, organisé trois rencontres
internationales consacrées au renforcement des capacités
africaines de maintien de la paix et créé un Fonds spécial
pour la prévention des conflits en Afrique. Elle a aussi organisé
des séminaires au Ghana, en 1997, et en Zambie, en 1998, une mission
d'aide à la formation au Swaziland en 1998 et un stage de formation
à la logistique au Kenya en 1998. L'ONU a également
participé à des exercices multinationaux au Zimbabwe, en 1997, et
au Sénégal, en 1998.
En mage de ces efforts au sein de l'ONU de renforcer les
capacités africaines en matière de maintien de la paix dans le
cadre de la gestion des conflits en Afrique, de nombreux pays occidentaux, au
premier rang desquels les Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni ont pris des
initiatives historiques allant dans ce sens. L'objectif est de préparer
l'engagement de forces africaines ou interafricaines sur le continent dans le
maintien de la paix. Des conférences politico-militaires aux exercices
multilatéraux, en passant par la formation et le soutien
opérationnel des contingents, ces initiatives tentent de s'adapter au
contexte africain marqué par une recrudescence des conflits internes aux
multiples causes.
1.2 L'«exceptionnalité>> africaine et
l'implication des organisations sous régionales dans le maintien de la
paix
Le caractère d'«exceptionnalité»
africaine, selon Achille MBEMBE, tient à plusieurs facteurs dont au
premier chef la nature complexe des conflits africains qui conditionne de
façon générale les activités de maintien de la
paix. La majorité des conflits africains comportent en effet des
dimensions identitaires, territoriales, économiques, politiques,
sociales et environnementales. Ces éléments rendent difficile la
négociation proprement dite et ne facilitent pas, non plus,
l'acceptation par tous du choix des pays qui pourraient participer à une
opération. Etant entendu que les ethnies sont souvent
transfrontalières et les frontières poreuses, les conflits ont
donc tendance à se régionaliser, ce qui complique le processus de
gestion de crise. En outre, la fin de la bipolarité a laissé le
champ libre à de nouveaux acteurs de la guerre. On constate ainsi
l'apparition de seigneurs de la guerre laquelle devient pour eux un mode de vie
naturelle, sans parler de l'existence de plusieurs compagnies privées de
sécurité qui prennent part aux conflits contre une
rémunération monétaire ou des concessions
minières.
L'«exceptionnalité>> du maintien de la paix
en Afrique s'explique aussi par les relations existant entre l'ONU, l'OUA et
les organisations sous-régionales africaines. L'Organisation
panafricaine s'est dotée en 1993 d'un Mécanisme de
prévention, de gestion et de règlement des conflits afin de
remplacer la Commission de médiation, de conciliation et d'arbitrage peu
efficace. On y a eu recours dans les crises au Burundi, au Liberia, au
Cameroun/Nigeria, au Congo, aux Comores et au Zaïre. Le Mécanisme
reste encore limité dans son fonctionnement, l'action de l'OUA. Dans le
cadre du renforcement de ce mécanisme, un centre de gestion des conflits
a été mis en place, en 1996, au siège de l'OUA. Il est
doté d'un bureau d'alerte rapide et d'une salle d'opérations. De
plus, des réunions périodiques entre des chefs
d'État-major ont été prévues pour définir
une doctrine africaine de maintien de la paix. Cependant,
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l'action de l'OUA reste complémentaire au rôle des
organisations sous-régionales qui ne peuvent éclipser
complètement la première
D'abord préoccupées par les questions de
développement économique et d'intégration
régionale, les organisations sous régionales africaines assument
un rôle sans cesse croissant dans le domaine du maintien de la paix. Par
exemple, la Communauté de Développement de l'Afrique australe
possède un Organe sur la politique, la défense et la
sécurité qui ambitionne de développer une capacité
régionale de maintien de la paix. Quant à la Communauté
économique des États d'Afrique centrale, elle a institué
un Comité consultatif permanent sur les questions de
sécurité en Afrique centrale. Par ailleurs, ce Comité a
créé des unités spécialisées dans le
maintien de la paix et a tenu à Yaoundé, en 1996. L'exemple le
plus connu est sans nul doute celui de la Communauté économique
des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) qui a institué une
véritable capacité sous-régionale de maintien de la paix
avec son intervention militaire au Liberia et en Sierra Leone par le biais de
l'ECOMOG (Groupe d'observateurs militaires). La CEDEAO a démontré
au Liberia qu'elle pouvait avec un certain succès gérer une
situation de conflit tandis qu'en Sierra Leone, elle a défendu la
démocratie en restaurant un régime renversé par un coup
d'État militaire.
Face à des situations de plus en plus complexes, sur un
continent où les foyers de tensions sont nombreux, les pays africains
sont dépourvus de capacités de réaction rapide,
malgré un réservoir de forces significatif. L'expérience a
montré que le manque de moyens de projection est également une
contrainte majeure liée à leur insuffisance ou à la
lenteur de la mobilisation par des pays contributeurs qui n'ont, ni un
processus décisionnel commun, ni les mémes
intéréts. Or, la mise en oeuvre des programmes RECAMP
(Renforcement des capacités africaines de maintien de la paix) par la
France depuis 1998, A.C.R.I (Initiative de Réaction aux Crises en
Afrique) et actuellement ACOTA (Assistance pour la formation et
l'entraînement aux opérations d'urgence) par les Etats-Unis, ainsi
que l'intervention directe du Royaume-Uni en Sierra Leone en 2000, sont des
exemples qui soulèvent la question de la responsabilité de ces
grandes puissances dans le règlement des conflits en Afrique.
1.3 Le contexte actuel des ressources africaines pour le
Maintien de la paix
Pour des raisons historiques, culturelles et surtout celles
liées à l'attachement des Etats à leur
souveraineté, la plupart des armées africaines sont
confinées dans des missions classiques de sécurisation et de
défense de leur intégrité territoriale. Des moyens
modestes, très souvent acquis dans le cadre de la coopération
avec les anciennes puissances coloniales ou d'accords bilatéraux avec
l'ancienne Union des républiques socialistes soviétiques, ont
servi à cette fin, sans qu'un renouvellement capacitaire ne soit
effectué en cohérence avec les besoins opérationnels
d'aujourd'hui2. Du coup, à partir de 1990, année
référentielle de la recrudescence des conflits internes, toutes
les armées se sont retrouvées avec des moyens vétustes et
surtout inadaptés au maintien de la paix. En outre, le marasme
économique, la fin de la guerre froide et la disparition du bloc
soviétique constituent autant de facteurs qui justifient difficilement
l'opportunité des plans d'équipement et leur réalisation.
L'un des géants africains, le
2 Lieutenant-colonel MBOW, Armée de terre /
Sénégal, Les initiatives pour le renforcement des
capacités de Maintien de la paix en Afrique subsaharienne : enjeux et
Perspectives,
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Nigeria dispose de capacités non négligeables,
mais n'a pu participer à la mission de la CEDEAO en Côte d'Ivoire
en décembre 2002, à cause de ses engagements
précédents au Libéria et en Sierra Léone pour un
coût de l'ordre de 8 milliards de dollars. Peu d'Etats africains
disposent comme cette Nation des ressources nécessaires pour soutenir
des opérations de paix.
Les conflits intra-étatiques qui ravagent l'Afrique
impliquent des missions de paix aux tâches multiples, effectuées
dans un contexte de violence significative et où les parties au conflit
sont nombreuses. Ce sont autant de variables qui entraînent la
création de missions à forts effectifs militaires. Or plusieurs
États africains ne disposent pas d'effectifs suffisants pour mener de
telles opérations ou même pour faire une contribution
significative de l'ordre d'un bataillon et plus à une force
multinationale. Le manque d'effectifs et d'unités
entraînées et équipées reflètent davantage la
situation réelle que les effectifs mentionnés «sur papier
». Aussi, les lacunes au niveau du matériel et de la formation sont
considérables. Peu sinon aucune armée subsaharienne dispose de
l'infrastructure de commandement, de contrôle et communication suffisante
pour mener des opérations impliquant des effectifs supérieurs
à une brigade. Les moyens logistiques permettant d'intervenir sur de
grandes distances et de soutenir une opération en temps réel sont
aussi insuffisants. De plus, on ne peut guère anticiper beaucoup de
succès d'opérations de paix menées par des sous-officiers
et des soldats qui sont parfois si mal payés ou ravitaillés
qu'ils doivent se livrer au marché noir ou au pillage pour survivre en
mission. Enfin, aux besoins en ressources humaines et en matériel
s'ajoutent la nécessité de compter sur d'importants financements
pour défrayer le coût des missions. Au-delà de ces aspects,
il y a les barrières des langues et de cultures qui jouent cruellement
dans le succès des opérations. Les questions d'expertise et de
formation restent aussi essentielles. Il faut éviter que les
capacités militaires africaines ne soient détournées
à des fins de coups d'État. En outre, la formation des officiers
doit inclure un volet portant sur le respect de l'autorité civile et
l'acquisition de techniques modernes du maintien de la paix processus de
médiation et respect des droits de la personne, sans parler de la
maîtrise des tâches de coordination qui relèvent de
l'état-major. Enfin, la formation ne peut être limitée
qu'aux seuls officiers; elle doit s'étendre au corps des sous-officiers
et aux soldats.
Depuis 1995 les activités de l'ONU en la matière
commencent cependant à créer un cadre de coopération avec
les organisations régionales afin de tirer parti des acquis. Les pays
Africains ne manquant pas d'expérience en matière de maintien de
la paix. Complétant l'appui aux actions préventives dans le cadre
de l'OUA en particulier dans le domaine de l'alerte rapide, l'ONU engage les
donateurs à verser des contributions au Fonds d'affectation
spéciale pour la prévention des conflits en Afrique, et aide
à rendre opérationnel le centre de gestion des conflits de l'OUA.
Elle aide l'OUA et les organisations sousrégionales à mettre en
place des équipes d'évaluation des besoins logistiques et
à déterminer les besoins logistiques et financiers
d'opérations de maintien de la paix autorisées par le Conseil.
L'ONU encourage également l'application de formules de partenariat entre
Etats et organisations régionales et sousrégionales pour un
partage des fournitures de matériels et de forces. Les Etats-Unis, la
Grande-Bretagne et la France, principalement se sont engagés dans
l'assistance aux capacités africaines de maintien de la paix.
Après l'abandon de l'idée de création d'une force
interafricaine permanente de maintien de la paix, évoquée
notamment lors du Sommet de Biarritz en novembre 1994, ces trois Etats ont
présenté aux Nations Unies, le 22 mai 1997, les principes guidant
leur action. La recherche d'une complémentarité entre le projet
européen et celui des américains se manifeste par la
volonté d'appuyer des modules de forces en attente, ouvertes en principe
à tous les Etats africains, dans un cadre transparent, avec un
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dispositif chargé de superviser la mise en oeuvre des
différents programmes sous l'égide des Nations Unies et en
liaison avec l'OUA. Mais ces programmes visent à instruire,
entraîner, équiper en partie des troupes africaines pour mieux
leur permettre de participer au système de forces en attente des Nations
Unies. Il donne lieu notamment au prépositionnement de matériel
nécessaire à l'équipement d'un bataillon africain ou
à des exercices multinationaux de maintien de la paix. Le programme ACRI
des Etats-Unis est un programme de formation, d'entraînement des cadres
de bataillons issus de plusieurs Etats africains dont certains francophones. A
l'exception d'une utilisation dans le cadre de missions de paix classiques,
pouvant être décidées au niveau régional, ces
capacités africaines ne présentent aucune garantie contre un
éventuel nouveau refus d'intervention de la part du Conseil de
Sécurité. Les initiatives individuelles de soutien des grandes
puissances aux capacités africaines révèlent ainsi
à la fois un désengagement et une volonté de sauvegarde de
leurs intérêts nationaux en Afrique. Le vieux paradigme des
puissances dominantes reprend ainsi du service à travers le prisme de la
sous-traitance. Les réflexions entourant la régionalisation
demeurent, malgré leurs difficultés, exemplaires pour les projets
de réformes des opérations de maintien de la paix de l'ONU.
régionales, les interventions militaires humanitaires
ad hoc telles que l'Opération turquoise menée par l
§2. ENJEUX DES PRINCIPAUX PROGRAMMES D'APPUI A UNE
CAPACITE AFRICAINE DE MAINTIEN DE LA PAIX
2.1 Présentation des principaux programmes
Il existe en réalité plusieurs programmes issus
de nombreux Etats occidentaux. Les principaux sont créés par les
Etats-Unis (ACRI), la France (RECAMP) et la Grande Bretagne.
· États-Unis: L'African Crisis Response
Initiative (ACRI) a été proposée par le Département
d'État en 1996 et vise à la formation de bataillons rapidement
déployables et inter opérationnels en mission de paix ou
d'assistance humanitaire (budget annuel de vingt millions de dollars US).
Depuis 1997, le programme a facilité l'entraînement de bataillons
au Bénin, en Côte d'Ivoire, au Ghana, au Malawi, au Mali, en
Ouganda et au Sénégal. Les formateurs proviennent principalement
des forces spéciales américaines. Le programme comprend aussi un
volet de transfert d'équipement (télécommunications,
purification d'eau, détecteurs de mines, etc.).
· France: Le programme de renforcement des
capacités africaines de maintien de la paix (RECAMP) a été
établi en 1997 et comprend trois piliers: formation, entraînement
et équipement. Doté d'un budget annuel de 200 millions de francs
(trente-deux millions de dollars US), le RECAMP est surtout connu pour son
centre de formation en Côte d'Ivoire et son volet de dépôts
de matériel prépositionné (camions, véhicules
blindés) pour des contingents africains. Le programme encadre aussi des
exercices militaires multinationaux tels que Guidimakha qui a
impliqué 3 000 militaires de huit pays africains et 500 militaires
occidentaux.
· Grande-Bretagne: Les initiatives britanniques sont
multiples et vont des programmes de formation bilatéraux avec des pays
tels que le Ghana et le Zimbabwe, à une aide logistique et
financière à l'ECOMOG lors de son intervention en Sierra Leone.
Une petite équipe basée au Ghana donne aussi un cours de
formation sur la planification et la conduite des opérations de paix
pour les officiers supérieurs africains.
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En vertu de l'«Initiative tripartite» signée
en mai 1997, les États-Unis, la France et la Grande-Bretagne se sont
engagés à coordonner leurs programmes nationaux afin
d'éviter des dédoublements ou des programmes à effets
contradictoires. Depuis la mise en oeuvre de cette initiative, des rencontres
régulières du groupe ont lieu sous les auspices du
Département des opérations de maintien de la paix de l'ONU.
Équipement, entraînement, formation militaire et financement sont
au coeur de tous ces efforts nationaux. Ceci dit, ces tentatives seraient
incomplètes sans une plus grande sensibilisation des militaires aux
questions d'éthique. Plusieurs programmes nationaux prévoient
donc, dans le cadre de la formation offerte, des cours sur la démocratie
et le respect des droits de la personne. Les Nations Unies sont
impliquées dans une multitude d'opérations dans le monde. Ceci
crée des difficultés financières et empêche de
prendre des initiatives plus vigoureuses vis-à-vis de l'imbroglio
africain. De 70.000 en 1995, le nombre des casques bleus est tombé
à moins de 15.000. Plus des deux tiers sont déployés dans
certains Etats issus de l'ex URSS, au Liban, etc. ce qui laisse peu de moyens
pour les missions sur le sol africain.
Dans leur quête d'une capacité endogène de
maintien de la paix, l'Afrique peut compter sur l'appui de nombreux pays :
Belgique, Canada, États-Unis, France, Grande-Bretagne, Italie, Japon,
Portugal et pays scandinaves, pour n'en citer que les principaux. Plusieurs de
ces pays ont des liens traditionnels avec l'Afrique, mais la coopération
dépend moins des liens tissés dans le passé ou sur des
aires géographiques linguistiques (pays anglophones, francophones, ou
lusophones). En effet, une véritable capacité africaine
multinationale de maintien de la paix doit se développer au-delà
des langues officielles et des dialectes locaux. En réalité,
l'anglais est de plus en plus privilégié comme langue
opérationnelle.
2.2 Enjeux des différents programmes pour les
acteurs
2.2.1 Pour les acteurs africains
Le niveau d'engagement financier et politique qui les
sous-tend et les aspects qu'ils privilégient sont très variables.
Il faudrait d'abord souligner que la France et le Royaume-Uni s'appuient sur
les forces et les équipes prépositionnées dans les
anciennes colonies pour mettre en oeuvre respectivement les programmes RECAMP
et APTSP (African Peacekeeping Training Support Program) ou le CPIA
(Conflict Prevention Initiative for Africa). Ces programmes
privilégient la formation et l'entraînement des militaires
africains qui, pourtant, ont déjà acquis pour la plupart une
formidable expérience du maintien de la paix sur différents
théâtres. Depuis 1998, le programme RECAMP organise tous les deux
ans des cycles majeurs d'entraînement, mais les équipements
servant à cet exercice sont devenus vétustes. Par ailleurs, les
Etats-Unis ont développé leurs programmes ACRI, ACOTA et WASP
(West Africa Stabilisation Program), comprenant plusieurs volets :
formation, entraînement, prévention des conflits, renforcement des
capacités de lutte contre le terrorisme et renforcement des relations
entre civils et militaires. Ainsi, les programmes américains ont
évolué dans le temps et dans l'espace, mais on peut constater
qu'ils sont essentiellement destinés à des pays qui semblent
satisfaire aux critères de démocratie, de respect des droits de
l'homme, avec un engagement formel aux côtés des Etats-Unis pour
la lutte contre le terrorisme. A titre d'exemple, le plan de lutte contre le
terrorisme en Afrique orientale a bénéficié de 100
millions de dollars en 2003, contre 10 millions pour le nouveau programme ACOTA
qui est de moindre envergure que sa défunte soeur ACRI, arrivée
à terme en 2006. A l'analyse, il s'avère que les programmes
privilégient la formation et l'entraînement, domaine essentiel
mais pas suffisamment exhaustif pour conférer aux contingents une bonne
aptitude opérationnelle. Il importe que les contingents
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soient entraînés sur les équipements et
ensuite projetés sur les théâtres, dans toute la mesure du
possible, avec ces mêmes matériels3. Toutes ces
initiatives sont cependant à considérer avec réserve. Les
pays occidentaux ayant des intérêts particuliers sur le continent
africain s'associent avec des états africains bien précis, pour
mettre sur pied diverses formes de coopération militaire. Cette
diversité engendre une certaine confusion. Elle entraîne le
déclin de la responsabilité assumée par les Nations Unies
dans les opérations de maintien de la paix. Une tentative de
coordination a vu le jour en septembre '96 sous la forme de 'l'Initiative de
Réponse à la Crise Africaine' (ACRI). Il demeure cependant que le
retrait progressif de l'ONU au profit des acteurs régionaux
appuyés par les Etats occidentaux inquiète plus d'un. Comment
l'avenir du maintien de la paix se présentera t-il ? Les secours
seront-ils continus ?
En deux ans, ACRI a considérablement
évolué. L'objectif visé d'accroître la
capacité de réponse des pays africains en matière de
maintien de la paix et face aux crises humanitaires. L'ACRI contribue à
la mise sur pied de bataillons spécialisés, rapidement
déployables et pouvant travailler de concert, mais sans créer une
armée internationale permanente. Pour les Etats africains ces programmes
occidentaux constituent des opportunités pour leurs armées
nationales mais aussi des sources de devises énormes pour leurs caisses.
Tout en offrant l'occasion aux Etats de participer aux opérations de
paix, ils peuvent de se doter de ressources financières par la location
du matériel de sécurité, et le placement des soldats dans
les zones en conflit. Pour des Etats pauvres, en proie aux conflits et
marqués par des armées encore classiques, les différentes
expériences acquises par les Etats africains sont importantes pour leur
permettre de prévenir et de participer aux opérations de maintien
de la paix, en d'autres termes, de gérer leurs propres conflits sur les
terrains qui sont les leurs.
2.2.2 Pour les acteurs occidentaux
L'occasion paraît inouïe pour ces occidentaux de
maintenir leur position stratégique de domination. Les Etats qui
prennent par à ces opérations, surtout les principaux (les
Etats-Unis, la France et la Grande Bretagne) défendent des
intérêts personnels sur le continent. En effet, seul les
Etats-Unis n'ont participé à la colonisation mais sa position de
gendarme dans le monde et la quête permanente de ressources
(pétrole, autres minerais) justifie ses multiples interventions. En
outre, les Etats-Unis et la Grande Bretagne ont toujours eu des
intérêts liés, rien d'étonnant donc que les deux
interviennent ensemble sur le continent aux ressources énormes. Il faut
aussi signaler les avantages linguistiques à défendre par les
différents principaux acteurs occidentaux. La France avec la
Francophonie non seulement défend des positions issues de la
colonisation mais aussi accompagne les Etats et les soutient pour la promotion
de la langue française.
En plus de ces intérêts évidents, il faut
reconnaitre que les conflits sont le plus souvent instrumentalisés par
ces mêmes Etats et émergent d'ailleurs dans des endroits riches en
ressources indispensables aux entreprises et industries occidentales. Qu'elles
aient des bases identitaires (tribales) ou politiques, nombre de conflits en
Afrique ont été le fruit d'un montage sournois par des acteurs
invisibles sur le terrain (les puissances occidentales). Ces derniers sont
capables de donner le pouvoir et de le retirer à quiconque. Le refus
d'abdiquer le pouvoir par certains dirigeants et surtout leur refus de
répondre aux exigences
3 Lieutenant-colonel Mbow, armée de terre /
Sénégal, les initiatives pour le renforcement des
capacités de Maintien de la paix en Afrique subsaharienne : enjeux et
Perspectives.
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occidentales en matière d'exploitation des ressources,
conduisent à l'alimentation des conflits. Le cas récent du Tchad
est révélateur. Soutenus par les français, les rebelles
tchadiens qui étaient à un micron près de
récupérer le pouvoir ont été
chassés/repoussés par l'armée française
lorsqu'Idriss Déby a souhaité enfin réviser le contrat. Le
président Tchadien à été amené de force
à réviser ses positions concernant le contrat signé avec
l'Etat Français qu'il remettant cependant en cause.
Hors mis ces intérêts divers défendus par
les occidentaux, il faut souligner que certaines opérations de maintien
de la paix sur le terrain africain menés par ces puissances ont
été perçues comme de véritables échecs.
L'opération Turquoise et Restore Hope menées respectivement par
le France au Congo et les Etats-Unis au Soudan ont été sans nul
doute des catastrophes humanitaires. Nombre de soldats occidentaux y ont perdu
la vie et les vives critiques de leur opinion publique ne se sont pas fait
attendre. Ces cas d'échecs ont déclenché les initiatives
des grandes puissances de soutenir l'Afrique à avoir sa propre force de
maintien de la paix. L'objectif étant avant tout de réduire
dorénavant les pertes en vies humaines dans le rang de leurs
armées tout en restant pourtant maître des lieux. Il
apparaît sans ambages que les avantages géopolitiques et
géostratégiques sont énormes pour les occidentaux. La
concurrence qui s'observe par la multiplicité des intervenants en est un
moyen de mesure. Le repositionnement stratégique des grandes puissances
en Afrique exige de leur part des sacrifices dont la formation et le soutien
matériel et financier sont des éléments
caractéristiques. Tout en permettant de combler les besoins africains
par le financement des opérations de formation, d'entrainement et
d'équipement de leurs armées, les occidentaux s'invitent à
nouveau au coeur des Etats et se ruent sur les rares ressources qu'ils
n'avaient pas pu extirper. En outre, leur présence dans ce continent
constitue une source d'extension de pouvoir à ne pas négliger.
Conclusion.
La pauvreté des Etats africains et l'absence de
logistiques adaptées aux opérations de paix sont assez criardes
en Afrique alors que les conflits ne cessent d'éclater. Les grandes
puissances y voient dès lors une aubaine à exploiter pour se
repositionner sans y être directement impliquées. Ainsi, les
appuis divers à travers leurs initiatives ne sont pas de simples «
dons » au sens strict du terme. Il faudra y lire une logique
anthropologique du don qui impose le contre don. En d'autres termes, il n'ya
pas d'initiative occidentale sans retrait de compensation en ressource. Cette
logique s'explique très bien dans les relations internationales
où chaque entité (Etat, ONG, firme, etc.) ne vise que des
intérêts spécifiques et serait prête à nuire
aux intéréts de l'autre partie pour juste réaliser les
siennes. Il n' ya pas donc pas de sentiment en la matière. Les Etats
africains conscients de cette situation, s'investissent à leur tour pour
tirer le maximum de profits possible (formation, encadrement/stages,
équipements, etc.). Mais ces acquis ne sauraient se comparer aux gains
que tirent les puissances occidentales. Pouvait-il d'ailleurs en être
autrement ? La division des Etats africain, l'absence de solidarité et
la quête des intérêts personnels de certains chefs d'Etats
sont autant de biais qui empéchent les africains de lutter ensemble pour
faire face aux stratégies et soubresauts occidentaux.
Références
bibliographies
KOLOGO OUMAROU, réflexion sur les enjeux
géopolitiques des initiatives des grandes puissances pour le maintien
de la paix en Afrique. Contacts :
kologo_jean@yahoo.fr; +226
70224179
Pascal Boniface, «Afrique, de
l'ingérence à l'indifférence», le Figaro, 16 mai
2000. Rapport du groupe d'étude sur les opérations de
paix de l'ONU, A/55/306-S/2000/809.
Rapport du Secrétaire
général sur la mise en oeuvre du Rapport du groupe
d'études sur les opérations de paix de l'ONU, A/55/502
Manon TESSIER et Thierry Gongora, Institut
Québécois de hautes études internationales, bulletin
n°
44, janvier 2000.
Lieutenant-colonel Mbow, Armée de terre /
Sénégal, Les initiatives pour le renforcement des
capacités de Maintien de la paix en Afrique subsaharienne :
enjeux et Perspectives, 5p.
Jean-Sylvestre Mongrenier,
Géopolitiques africaines : les révisions stratégiques
occidentales, Institut
Thomas More, 2007, 3p.
Emeric Rogier, Diplomatie préventive et
maintien de la paix, Studies and working papers, Institut Universitaire des
Hautes études internationales, Genève, 1997.
CEDEAO, le cycle RECAMP 4, 2004
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