UNIVERSITE CHEIKH ANTA DIOP DE DAKAR ************
ECOLE INTER-ETATS DES
FST SCIENCES ET MEDECINE
VETERINAIRE DE DAKAR
Année : 2009 N° : 26
Evolution spatiale et temporelle de la
leishmaniose cutanée au Mali
MEMOIRE DE DIPLOME DE MASTER II SANTE PUBLIQUE
VETERINAIRE
Présenté et soutenu publiquement le 25
Juillet 2009 à 12 heures A l'EISMV de Dakar Par :
Claude Laurel BETENE A DOOKO
Né le 24 Juillet 1983 à Ntouessong
(Cameroun) MEMBRES DU JURY
Président: M. Louis Joseph
PANGUI
Professeur à l'EISMV de Dakar
Membres: M. Bhen Sikina TOGUEBAYE
Professeur à la FST à l'UCAD
Germain Jérôme SAWADOGO Professeur à
l'EISMV de Dakar
Rapporteur de mémoire: M. Ayayi Justin
AKAKPO
Professeur à l'EISMV de Dakar
Directeur de recherche: M. Seydou
DOUMBIA
Professeur à la FMPOS de Bamako et chercheur au
MRTC
Dédicaces et Remerciements
A toi seul Seigneur Jésus-Christ soit la gloire
! Nous tenons a exprimer notre gratitude a l'endroit de :
Monsieur le Professeur Ayayi J. AKAKPO notre Rapporteur de
mémoire Monsieur le Professeur Seydou DOU MBIA, notre Directeur de
recherche
Monsieur le Professeur Louis Joseph PANGUI, Directeur de l'EIS MV
de Dakar
Monsieur le Docteur Philippe KONE, Assistant a l'EIS MV
Tous les membres du GBEE M en particulier du point G
Mon papa et ma maman : Mr et Mme DOOKO
Ma fiancée Kate THERRIEN et sa mere
Tous ceux qui, de pres ou de loin, ont rendu ce travail
possible.
LISTE DES FIGURES
Figure 1: Stades amastigotes chez les
vertébrés Figure 2: Stades promastigotes chez l'insecte
3
Figure 3: Phlébotome Figure 4: Phlébotome
femelle suçant un végétal 4
Figure 5: Cycle parasitaire de Leishmaniose 5
Figure 6: Réparation Mondiale de la Leishmaniose
7
Figure 7: Cas cliniques de leishmaniose cutanée au
Mali par région entre 1957 et 1966 8
Figure 8: Cartographie des cas de LC entre 1957 et 1966
9
Figure 9: Carte régionale et climatique du Mali
12
Figure 10:Répartition des cas de LC par
région au Mali de 1957 à 1966 15
Figure 11: Répartition des cas de LC par
région au Mali de 1997 à 2008 15
Figure 12: Répartition des cas de LC par
région au Mali entre 1997 et 2008 16
Figure 13: Répartition par Cercles des cas de LC
au Mali de 1957 à 1966 16
Figure 14: Répartition par Cercles des cas de LC
au Mali de 2005 à 2008 17
Figure 15: Cas de LC provenant de pays frontaliers du
Mali a l'échelle régionale 17
Figure 16: Cas de LC provenant de pays frontaliers du
Mali a l'échelle des cercles 18
Figure 17: Présence de phlébotomes par
région au Mali 19
Figure 18: Répartition des cas de LC et
présence de phlébotomes au Mali entre 1997 et 2008 19
Figure 19: Répartition des genres
Phlebotomus et Sergentomyia en fonction de la zone climatique
20
Figure 20: Répartition par région des
espèces de phlébotomes du genre Phlebotomus
20
Figure 21: Répartition par cercle des cas de LC
entre 2005 et 2008 et des espèces de phlébotomes du
genre Phlebotomus 21
Figure 22: Répartition des cas de LC par la zone
climatique entre 1997 et 2008 21
Figure 23: Répartition des cas de LC par mois
22
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1: Complexes et espèces de Leishmania
retrouvés en Afrique 4
Tableau 2: Réaction positive au test cutané
à la leishmanine par région au Mali entre 1957 et
1966
8
Tableau 3: Résultat de la recherche des corps de
Leishman (1997-2008) 14
Tableau 4: Répartition des cas de LC par
année entre 1997 et 2008 14
Tableau 5: Répartition des cas de LC par saison au
Mali entre 1997 et 2008 22
Tableau 6: Evolution de l'incidence annuelle nationale
entre 1997 et 2008 23
Tableau 7: Incidence par région entre 1997 et 2008
23
SIGLES ET ABREVIATIONS
CDC: Centers for Disease Control and Prevention CIA:
Central Intelligence Agency
CNAM: Centre National d'Appui à lutte contre la
Maladie
DNSI: Direction Nationale de la Statistique EQDSM:
Enquête Démographique de Sante au Mali FMI: Fond Monétaire
International
GIS: Geographic Information System GPS: Global
Positioning System
LC: Leishmaniose Cutanée
LV: Leishmaniose Viscérale
MRTC: Malaria Research and Training Center OMS:
Organisation Mondiale de la Santé
SIG: Système d'Information Géographique
TDR: Tropical Diseases Research
VIH: Virus de l'Immunodéficience
Humaine
SOMMAIRE
INTRODUCTION 1
PREMIERE PARTIE : REVUE BIBLIOGRAPHIQUE SUR LA
LEISHMANIOSE 3
Chapitre 1: Généralité sur la
Leishmaniose 3
1.1. Définition 3
1.2. Étiologie 3
1.3. Vecteur : Le Phlébotome 4
1.4. Cycle parasitaire de leishmaniose 5
1.5. Symptomatologie 5
Chapitre 2 : Répartition géographique de la
leishmaniose 7
2.1. Situation dans le monde 7
2.2. Situation au Mali 7
2.3. Problématique/Hypothèse 9
DEUXIEME PARTIE: EVOLUTION SPATIALE ET TEMPORELLE DE LA
LEISHMANIOSE CUTANEE AU
MALI 11
Chapitre 1 : Matériel et Méthodes
11
1.1. Milieu d'étude 11
1.2. Matériel 12
1.2.1. Population étudiée 12
1.2.2. Collecte des données 12
1.2.3. Matériel d'étude 13
1.2.3.1. Logiciels utilisés pour l'analyse
statistique 13
1.2.3.2. Matériel de SIG 13
1.3. Méthodes 13
1.3.1. Analyses statiques et traitement des
données 13
1.3.1.1. Détermination de l'incidence
13
1.3.1.2. Analyse spatiale 13
Chapitre 2 : Résultats 14
2.1. Recherche positive des corps de Leishman par
période d'étude 14
2.1.1. Nombre de cas de LC entre 1997 et 2008
14
2.1.2. Cartographie de la LC au Mali entre 1957 et 1966
14
2.1.3. Cartographie de la LC au Mali entre 1997 et 2008
15
2.1.4. Cas provenant des pays voisins 17
2.2. Répartition nationale des phlébotomes
18
2.2.1. Répartition des phlébotomes par
genre 18
2.2.2. Répartition des espèces du genre
Phlebotomus 20
2.3. Répartition des cas de LC par saison et par
zone climatique de 1997 à 2008 21
2.4. Répartition des cas de LC par saison entre
1997 et 2008 22
2.5. Evolution de l'incidence annuelle entre 1997 et 2008
22
2.5.1. Incidence nationale 22
2.5.2. Incidence par région 23
Chapitre 3 : Discussion et Recommandations 24
3.1. Discussion 24
3.1.1. Méthodologie 24
3.1.1.1. Collecte des données 24
3.1.1.2. Méthode diagnostique 24
3.1.1.3. Méthode de cartographie 25
3.1.2. Résultats 25
3.1.2.1. Répartition des cas par année
25
3.1.2.2. Répartition des cas par région
25
3.1.2.3. Répartition des cas par zone climatique
25
3.1.2.4. Répartition des cas par saison
26
3.2. Recommandations 26
3.2.1. Au Ministère de la Santé Publique du
Mali 26
3.2.2. Aux chercheurs 26
CONCLUSION 27
BIBLIOGRAPHIE ET WEBOGRAPHIE 28
Bibliographie 28
Webographie 30
INTRODUCTION
La leishmaniose est une zoonose parasitaire, transmise
à l'homme par la piqûre de la femelle hématophage d'un
insecte diptère dénommé Phlébotome. Le parasite est
un protozoaire flagellé du genre Leishmania (OMS, 2007). Le
phlébotome s'infeste en piquant un homme ou un animal malade, absorbant
ainsi des monocytes sanguins ou des histiocytes dermiques parasités.
Chez l'homme la maladie existe sous trois (3) formes principales : la forme
cutanée, la forme muco-cutanée et la forme viscérale
létale (PRADINAUD et coll., 1987 ; AUBRY, 2006). Les réservoirs
sont les rongeurs sauvages et le chien (MAZALET, 2004 ; DENGUEZLI, 2006). La
transmission de la forme viscérale (LV) peut être également
interhumaine par l'utilisation de la même aiguille, comme cela arrive
souvent entre les toxicomanes (OMS, 1999). Par ailleurs, selon une étude
récente, les modifications du contexte épidémiologique et
de mutations génétiques vers des souches plus pathogènes
sont désormais des scenarii envisageables (PIN-DIOP et coll., 2008). Sur
le plan clinique, la leishmaniose cutanée (LC) entraînerait une
déformation du faciès et une invalidité dans la population
productrice car les zones corporelles les plus touchées sont surtout les
jambes et les bras (NDIAYE, 1983 ; OUMEISH, 1999). Elle se caractérise
par le caractère indélébile de la cicatrice de la plaie
consécutive à la piqûre des phlébotomes.
La leishmaniose est endémique dans 88 pays du
monde (OMS, 2007). La forme cutanée est la plus courante avec 50
à 75% des cas de leishmaniose et reste à ce jour la seule
à avoir été signalée au Sud du Sahara. La maladie
est un facteur qui contribue au sous-développement pour les pays
d'Afrique (OMS, 2006). La maladie a été identifiée au Mali
depuis le début du 20e siècle (GUARIN et coll., 1914 ; LEFROU,
1948), cependant elle reste très mal connue. Pourtant des structures
hospitalières ne cessent depuis quelques années de tirer la
sonnette d'alarme sur la recrudescence des cas observées au début
des années 2000 (KEITA et coll., 2003). L'incidence nationale est mal
connue mais a été estimée en 2005 à 8 pour mille
(KEITA, 2004). La cartographie des cas de LC, quant à elle, date de 1970
et l'étude vectorielle est restée à un stade superficiel.
Plusieurs questions restent donc sans réponses à ce jour. Quelle
serait à l'heure actuelle la distribution nationale des cas de
leishmaniose cutanée connus selon des données existantes au Mali
? Comment a évolué la répartition de la maladie au Mali
depuis sa découverte ? Existerait-il une concordance entre l'origine des
cas signalés et les zones déjà connues comme abritant les
phlébotomes? Quelles sont les zones climatiques du Mali les plus
favorables à la maladie? Quelle est la saison la plus propice à
la maladie au Mali ?
La présente étude a pour objectif
général d'étudier la distribution spatiale et temporelle
de la leishmaniose cutanée au Mali sur 22 ans en deux (2)
périodes : de 1957 à 1966 (soit 10 ans), puis 1997 à 2008
(soit 12 ans). Les objectifs spécifiques de l'étude sont
:
> Actualiser la cartographie des cas entre 1957 et
1966 puis, la comparer avec celles issues des données les plus
récentes (1997 à 2008);
> Cartographier la provenance des malades de la
leishmaniose cutanée venant en consultation au CNAM pendant la
période allant de 1997 à 2008;
> Cartographier la distribution nationale des
Phlébotomes au Mali selon les genres et les espèces jusque
là identifiée grâce aux résultats des études
sur les phlébotomes au Mali en cours ou déjà
publiées ;
> Déterminer la saison et la zone climatique
les plus favorables à la maladie ; Déterminer l'incidence de la
LC au Mali au niveau National, Régional et Départemental
(Cercles) sur 12 ans (1997-2008).
Ce travail comporte deux parties : la première
partie est une revue bibliographique sur la LC dans le monde et au Mali en
particulier. La deuxième partie présente l'évolution de la
LC au Mali sur une période de 22 ans.
PREMIERE PARTIE : REVUE BIBLIOGRAPHIQUE SUR LA
LEISHMANIOSE
Chapitre 1: Généralité sur la
Leishmaniose 1.1. Définition
La leishmaniose est une
réticulo-endothéliose parasitaire dont l'agent pathogène
est un protozoaire appartenant au genre Leishmania transmis par la
piqûre d'un insecte appartenant au genre Phlebotomus. Cet agent
pathogène infecte les macrophages des mammifères dont l'humain.
Il existe trois formes de leishmaniose : la leishmaniose cutanée, la
leishmaniose muco-cutanée et la leishmaniose
viscérale.
La leishmaniose est devenue dans certains pays un
problème sanitaire d'urgence : c'est le cas notamment en Ethiopie, en
Erythrée et au Soudan où la maladie est endémique depuis
quelques années. Le taux de létalité de la maladie est
d'ailleurs très élevé en raison de l'absence de moyens
diagnostiques et de médicaments. La leishmaniose non-traitée a un
taux de létalité de 100%, alors que sous traitement, ce taux
passe à 10%.
1.2. Étiologie
Les parasites Leishmania dont il existe environ 17
espèces pathogènes chez l'homme sont des protozoaires
flagellés lesquels envahissent des cellules appelées macrophages
(DEDET, 2001). Les Leishmania sont des parasites dimorphiques avec deux stades
:
> Stades amastigotes : intracellulaires dans les
cellules macro-phagiques du
système des phagocytes mononuclées chez les
vertébrés (Figure 1).
> Stades promastigotes: libres et mobiles dans le
tube digestif de l'insecte
et en culture (Figure 2).phj
Figure 1: Stades amastigotes chez les
vertébrés Figure 2: Stades promastigotes chez
l'insecte
(Source : DEDET, 2001)
On regroupe habituellement les espèces de
Leishmania en complexes selon la similarité biochimique de leurs iso
enzymes. Ceux existants en Afrique sont nommés dans le tableau ci
après (ROBERTS et coll., 2000):
Tableau 1: Complexes et espèces de
Leishmania retrouvés en Afrique
Complexe
|
Nombre d'espèces
|
Espèce par pays en Afrique
|
L. donovani
|
2
|
L. archibaldi
|
Soudan, Éthiopie
|
L. infantum
|
2
|
L. infantum
|
Nord-ouest d'Afrique
|
L. tropica
|
2
|
L. killicki
|
Tunisie
|
L. major
|
1
|
L. major
|
Afrique
|
L. aethiopica
|
1
|
L. aethiopica
|
Éthiopie, Kenya
|
1.3. Vecteur : Le Phlébotome
Le phlébotome (Figure 3) est un petit insecte
ayant l'aspect d'un très petit moustique velu, de couleur
jaunâtre, à gros yeux noirs dont les ailes
lancéolées, frangées de longs poils qui sont
relevées au repos. Il existe environ 800 espèces de
phlébotomes dans le monde parmi lesquelles environ 40 sont vectrices de
Leishmanioses et d'autres Arboviroses. Les males et les femelles des
phlébotomes se nourrissent des sucs végétaux. Seules les
femelles sont hématophages (Figure 4). Ces insectes volent en silence et
ont un mode de vie nocturne : ils sont particulièrement actifs au
crépuscule et la nuit. On les rencontre dans les zones rurales ou les
aires boisées des villes (jardins et parcs). La saison classique des
phlébotomes s'étend d'Avril-Mai à Septembre-Octobre mais
cette saison peut varier en fonction des conditions climatiques (SCALIBOR,
2008). Depuis quelques années les phlébotomes apparaissent de
plus en plus tôt dans la saison (dès le mois de Mars) (SCALIBOR,
2008 ; SAMAKE, 2006).
Figure 3: Phlébotome Figure 4: Phlébotome
femelle suçant un végétal
(Source : DEDET, 2001)
Environ huit cents espèces de
phlébotomes ont été décrites dans le monde parmi
lesquelles quarante assurent la transmission de la leishmaniose et des
arboviroses (BALDET, 2004). Dix neuf espèces appartenant à deux
genres ont été confirmées comme vecteurs des
différentes espèces de Leishmania (HAUSMANN et coll.,
1996) le genre Phlebotomus prédominant dans l'Ancien Monde (sud
de l'Europe, Afrique, Proche-Orient et Asie) et Lutzomyia dans le
Nouveau Monde (Amériques du Nord, du Sud et Centrale). Quatre autres
genres existent et ne transmettent pas la maladie chez l'homme. Il s'agit de
Sergentomyia spp, Werileya spp, Hertigia spp et Brumptomyia
spp (BALDET, 2004).
1.4. Cycle parasitaire de leishmaniose
Comme le montre la Figure 5, la leishmaniose est
transmise par la piqûre infectante des phlébotomes femelles lors
des repas de sang (1). Ces larves au stade infectieux (promastigotes
méta cycliques) déposées au niveau du point de la
piqûre sont phagocytées par les macrophages (2) et se transforment
en amastigotes (3) chez les vertébrés. Les amastigotes se
multiplient dans les cellules infectées et atteignent différents
tissus, suivant (du moins en partie) l'espèce de Leishmania qui
est impliquée (4). Ces spécificités d'atteinte tissulaires
différentes sont la cause des manifestations cliniques qui
diffèrent dans les diverses formes de leishmaniose. Les
phlébotomes s'infectent lors d'un nouveau repas de sang sur un
hôte infecté quand ils ingèrent des macrophages porteurs
d'amastigotes (5-6). Dans l'intestin du phlébotome, les parasites se
différencient en promastigotes (7), qui se multiplient et se
différencient en promastigotes méta cycliques et migrent dans la
trompe du phlébotome (8) et le cycle reprend de nouveau.
Figure 5: Cycle parasitaire de Leishmaniose (Source
: CDC, 2009)
1.5. Symptomatologie
Les leishmanioses regroupent un large éventail
de maladies parasitaires qui ont pour caractéristiques
symptomatologiques communes : fièvre, abdomen volumineux, faiblesse
généralisée, maux de tête et vertiges, perte de
poids, transpiration abondante et diarrhée. On distingue principalement
trois types de leishmanioses.
1.5.1. La leishmaniose viscérale
Le parasite coupable est le complexe Leishmania
donovani, (ROBERTS et coll., 2000) également connue sous le nom de
Kala Azar (PAMPIGLIONE et coll., 1975). La leishmaniose viscérale
constitue la forme la plus grave de la maladie. Si elle n'est pas
traitée, le taux de létalité est de 100%. Elle se
caractérise par des poussées de fièvre
irrégulières, une perte de poids, une
hépato-splénomégalie et une anémie.
1.5.2. La leishmaniose cutanée
La forme cutanée est causée par
Leishmania tropica, Leishmania mexicana, Leishmania
major (ROBERTS et coll., 2000). C'est une papule prurigineuse rouge
sombre, généralement unique, siégeant sur une
région découverte, le plus souvent au niveau de la face, qui se
vésiculise, s'ulcère, s'infiltre en profondeur et se recouvre de
fines squames évoluant très lentement (bouton d'un an) sous forme
sèche ou sous forme humide, vers la guérison au prix d'une
cicatrice indélébile.
1.5.3. La leishmaniose
cutanéo-muqueuse
Cette forme est causée par Leishmania
braziliensis (ROBERTS et coll., 2000). Elle se distingue de la
précédente par une ulcération plus extensive, plus
profonde et d'évolution plus torpide, par une propagation cutanée
à distance, enfin et surtout par une atteinte de la peau du visage
souvent extrêmement mutilante. Les lésions peuvent en effet
conduire à une destruction étendue et défigurante des
muqueuses du nez, de la bouche et de la gorge.
Chapitre 2 : Répartition géographique de la
leishmaniose 2.1. Situation dans le monde
Selon l'Organisation Mondiale de la Santé
(OMS), la leishmaniose est endémique dans 88 pays du monde (Figure 6),
dont 13 parmi les pays les moins développés. D'après les
estimations de l'OMS, 14 millions de personnes sont atteintes. L'incidence
annuelle globale est d'environ 1,5 à 2 millions de cas pour la
leishmaniose cutanée (LC) et à 500.000 pour la leishmaniose
viscérale (LV). Selon l'OMS (2007) la leishmaniose menace 350 millions
de personnes dans le monde. La forme cutanée est la plus courante avec
50 à 75% des cas. Les leishmanioses font parti des 6 maladies
prioritaires du programme « Tropical Diseases Research » (TDR) de
l'OMS (OMS, 1990). En réalité, la maladie contribue beaucoup
à propager la pauvreté, car le traitement coûte cher et
dépasse les moyens financiers des malades ou leur impose une lourde
charge économique, y compris une perte de revenu. (OMS,
2006).
Figure 6: Réparation Mondiale de la
Leishmaniose (Source : DEDET, 2001)
2.2. Situation au Mali
Au Mali, la maladie a été
signalée bien avant les indépendances (GUARIN et coll., 1914 ;
LEFROU, 1948). Seules les formes cutanées ont été
décrites, et le pays en est endémique excepté la zone
désertique du Nord. En 1960, le règlement de Santé
Publique du Mali a exigé de rapporter des cas de leishmaniose
viscérale et cutanée (ABONNEC et coll., 1970 ; IMPERATO et coll.,
1969 ; SANKALE et coll., 1958). Les résultats trouvés n'ont
jamais rapporté le cas de la leishmaniose viscérale au Mali alors
que la leishmaniose cutanée était très bien connue dans le
temps. Deux principaux foyers d'endémies étaient
identifiés, le cercle de Niono dans la région de Kayes et le
cercle de Ségou dans la région de Ségou (Figure
7).
Figure 7: Cas cliniques de leishmaniose cutanée
au Mali par région entre 1957 et 1966
Au cours de la période de 1957 à 1966,
la leishmaniose cutanée a été rapportée dans
plusieurs autres localités du Mali grâce au test cutané
à la leishmanine (Leishmanin skin test)ND. Une récente
étude estime le taux moyen d'incidence annuelle de la forme
cutanée à 8 pour mille (KEITA et coll., 2003). L'application du
test cutané à la leishmanine a permis de mieux comprendre
l'épidémiologie de la maladie au Mali et de déterminer sa
prévalence (Tableau 2).
Tableau 2: Réaction positive au test
cutané à la leishmanine par région au Mali entre 1957 et
1966
Région
|
Nombre testé
|
Nombre positif
|
% positif
|
Bamako (Bamako, Nara, Koulikoro)
|
344
|
60
|
17,4
|
Ségou
|
112
|
34
|
30,4
|
Sikasso
|
87
|
29
|
33,3
|
Kayes
|
101
|
26
|
25,7
|
Mopti
|
64
|
25
|
39,1
|
Gao
|
56
|
10
|
17,9
|
Bamako Ville
|
705
|
90
|
12,7
|
Total
|
1469
|
274
|
18,65
|
(Source : IMPERATO et coll., 1969)
La leishmaniose est une maladie rurale qui touche
surtout les adultes jeunes (à partir de 20 ans). La maladie peut se
présenter sous plusieurs formes cliniques et tous les âges sont
concernés (IMPERATO et coll., 1969 ; KEITA et coll., 2003). Il existe
une bonne corrélation entre la prévalence de cas cliniques et
celle de la positivité au test cutané à la leishmanine
(IMPERATO et coll., 1969). Cependant, l'absence de cas cliniquement
notifié ne peut exclure l'existence de la LC dans une
localité.
Leishmania major est responsable de la
maladie au Mali (GUARIN et coll., 1914; IZRI et coll., 1989). Le vecteur
principal est Phlebotomus duboscqi (IMPERATO et coll., 1969 ; SANGARE,
1974 ; SISSOKO, 2008). Cependant, 14 espèces de phlébotomes ont
été identifiées dans les villages de Sougoula et
Kemena
dans le cercle de Baroueli (SAMAKE, 2006). Par
ailleurs, le CNAM a récemment signalé une recrudescence des cas
de LC accompagnée de complications cliniques graves. Ce centre a
également constaté l'apparition de co-infection à
Leishmania et au VIH du fait de la superposition croissante des deux maladies
(KEITA et coll., 2003) confirmant ainsi les conclusions de l'OMS (OMS, 1990)
qui en a rapporté dans 34 des 88 pays atteints tant en Europe qu'en
Afrique (DESJEUX et coll., 2001).
2.3. Problématique/Hypothèse
Sur les dix (10) dernières années, la
leishmaniose cutanée représente environ 7 consultations
dermatologiques sur 1000 au CNAM avec une moyenne de 54 cas par an (KEITA et
coll., 2003). Ces cas généralement référés
en milieu hospitalier ne permettent cependant pas de déterminer
l'étendue de la distribution de la maladie au Mali. La majorité
des malades ne se présente même pas dans un centre de
santé. Une étude récente estime d'ailleurs la
prévalence dans les villages de Kemena et Sougoula respectivement
à 45,44 % (sur 663 testés) et 19,32% (sur 827 testés)
(GUINDO, 2008) et les taux annuels d'incidence d'exposition au parasite
Leishmania entre 6 à 19%. Les individus de sexe masculin sont
les plus atteints et sont ceux qui, dans ce contexte, s'occupent des travaux
champêtres. Les femmes et même les enfants ne sont pas
épargnés, mettant ainsi toute la population active en danger. La
population la plus atteinte est surtout celle qui a une occupation rurale, donc
ayant un niveau de vie très bas (YIOUGO et coll., 2007).
Ce sombre tableau est aggravé par le manque de
connaissances approfondies sur l'épidémiologie de la maladie
consécutive au nombre réduit d'études qui ont
été faites sur cette pathologie au Mali. La distribution de la
maladie est donc assez mal connue. Ainsi, la cartographie des cas
enregistrés au niveau national (Figure 8) date de 1970 (IMPERATO et
coll., 1970), et la cartographie récente se limite à
l'échelle locale avec des échantillons assez réduits ne
couvrant que des périodes assez courtes allant de 2 à 5 ans
maximum (TALL, 2008 ; SAMAKE, 2006 ; DIARRA, 2008).
Figure 8: Cartographie des cas de LC entre 1957 et
1966 (Source : IMPERATO et coll., 1970)
Au niveau vectoriel, l'existence des
phlébotomes au Mali est avérée depuis la découverte
de la maladie en 1914 (GUARIN et coll., 1914). Mais, seules quelques captures
de phlébotomes ont été faites à l'échelle
locale (SAMAKE, 2006). La répartition vectorielle est donc, elle aussi,
mal connue à l'échelle nationale. Pourtant, la mise en oeuvre de
stratégies de lutte efficace contre cette maladie passe par une
meilleure connaissance de la répartition géographique de cas
connus, ainsi que des espèces vectorielles responsables de la
maladie.
Ainsi, la leishmaniose est donc un problème de
santé publique dans le monde et au Mali en particulier. Cette
endémie débouche sur une mini-crise humanitaire
négligée qui se vit en silence dans les zones rurales du Mali.
Cette situation épidémiologique précaire soulève
donc quelques interrogations. Quelle serait à ce jour la distribution
nationale des cas de leishmaniose cutanée connus selon des
données existantes au Mali ? Comment a évolué la
répartition de la maladie au Mali depuis sa découverte ?
Existerait-il une concordance entre l'origine des cas signalés et les
zones déjà connues comme abritant les phlébotomes? Quelles
sont les zones climatiques du Mali les plus favorables à la maladie?
Quelle est la saison la plus propice à la maladie au Mali. Nous
tenterons de répondre à toutes ces questions dans la
deuxième partie de notre travail.
DEUXIEME PARTIE: EVOLUTION SPATIALE ET TEMPORELLE DE LA
LEISHMANIOSE CUTANEE AU MALI
Chapitre 1 : Matériel et Méthodes 1.1.
Milieu d'étude
Le site de l'étude a couvert tout le territoire
du Mali. Le climat comprend deux saisons principales : une saison sèche
(Novembre - Avril) et une saison des pluies (Mai - Octobre). Excepté le
désert du Sahara, le pays est entièrement endémique pour
la leishmaniose. La population est estimée selon les Nations Unies en
2003 à environ 13.000.000 d'habitants (ENCYCLOPEDIA OF THE NATIONS,
2005). Le Mali est traversé par deux fleuves principaux (le
Sénégal et le Niger) et compte 4 zones ecoclimatiques distinctes
(Figure 9):
> La zone saharienne : de 200 mm de pluie annuelle
avec 16°C d'amplitude thermique moyenne annuelle ;
> La zone sahélienne : avec 200 à 700 mm
de précipitations annuelles réparties sur
3 mois et une amplitude thermique annuelle moyenne
d'environ de 12°C ;
> La zone nord soudanienne : elle couvre environ 18%
du territoire avec environ 700 à 1300 mm de précipitations
annuelles réparties sur 4 à 5 mois ;
> La zone sud soudanienne: environ 6 % du
territoire national, dans l'extrême sud. Les précipitations
comprises entre 1300 et 1500 mm d'eau par an, s'étendent de Mai à
Octobre avec une amplitude thermique annuelle moyenne (différence entre
le maximum moyen et la température minimum moyenne) de 5 à
6°C.
Signalons au passage l'existence du delta
intérieur du Niger qui est une véritable mer intérieure.
Cette nappe d'inondation est au coeur même du Sahel. Le delta, avec ses
300 km de long sur 100 km de large, joue un rôle de régulation
dans le climat de la région (DIRECTION NATIONALE DE LA STATISTIQUE
(DNS-I), 1998).
Figure 9: Carte régionale et climatique du
Mali (Source : MRTC/GIS-RS Réal : DIARRA)
1.2. Matériel
1.2.1. Population étudiée
Nous avons considère comme cas de leishmaniose
cutanée : tout individu enregistré comme souffrant de
leishmaniose par le CNAM ; ceci après examen clinique et ou
identification des corps de Leishman au laboratoire.
1.2.2. Collecte des données
Nous avons procédé à une
étude rétrospective descriptive des dossiers de cas de
leishmaniose cutanée colligés au CNAM à Bamako, entre 1997
et 2008 (soit 12 ans). Ainsi :
> De 1997 à 2001: nous avons utilisé
les résultats de l'étude rétrospective
portant sur 320 dossiers menée par KEITA (KEITA et
coll., 2003);
> De 2002 à 2004: nous avons utilisé
les résultats de la thèse de Médecine de
KEITA portant sur 150 échantillons
analysés au laboratoire du CNAM
(KEITA, 2004);
> De 2005 à 2008 : nous avons utilisé
les résultats issus du registre des consultations cliniques et du
laboratoire du centre.
Pour la période allant de 1957 à 1966
nous avons utilisé les données issues du rapport des cas
cliniques de leishmaniose cutanée par région et district
publié par le Ministère de la Santé et des Affaires
Sociales du Mali.
Concernant l'aspect entomologique, nous avons
également utilisé les résultats des études
publiées et non publiées ou encore en cours sur les
phlébotomes effectuées par l'unité d'Entomologie du
Malaria Research and Training Center (MRTC).
1.2.3. Matériel d'étude
1.2.3.1. Logiciels utilisés pour l'analyse
statistique
Nous avons utilisé les logiciels:
> Microsoft Excel pour la saisie des données et
pour la production des courbes ;
> SPSS pour l'analyse descriptive et la
détermination des fréquences ; > R pour
l'analyse de variance (ANOVA).
1.2.3.2. Matériel de SIG
Nous avons travaillé avec les ordinateurs du
laboratoire GIS / RS de l'unité d'entomologie du MRTC. Grace au logiciel
Arcveiw nous avons pu produire les cartes.
1.3. Méthodes
1.3.1. Analyses statiques et traitement des
données 1.3.1.1. Détermination de l'incidence
L'incidence a été
déterminée sur 12 ans (1997-2008) grâce aux données
du recensement de 1998 (DIRECTION NATIONALE DE LA STATISTIQUE (DNS-II), 1998)
et celle de CIA et du FMI (CIA, 2008). Le taux de croissance annuel a permis
d'estimer la population des régions pour lesquelles nous disposions du
nombre de cas de leishmaniose (1997-2001 et 2005-2008).
1.3.1.2. Analyse spatiale
Nous avons répertorié les villages que
nous avons classé par cercle et par régions pour les
années dont on disposait de données exactes (1997 à 2001
et 2005 à 2008) et suffisantes grâce aux cartes trouvées en
ligne sur Wikipedia (WIKIPEDIA, 2008) et Google Maps (GOOGLE MAPS, 2008). Ces 2
sites en ligne nous ont permis de situer les villages sur les cartes en
confirmant avec le découpage administratif du Mali et l'aide des cartes
disponibles au niveau du laboratoire GIS / RS de l'unité d'entomologie
du MRTC. Enfin, nous avons utilisé le logiciel Arcveiw pour la
production des cartes de distribution des cas de la leishmaniose
cutanée.
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