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Reverse logistics et déchets d'équipements électriques et électroniques

( Télécharger le fichier original )
par Grégoire FLORIE
ESC Bretagne Brest - dees logistique 2005
  

Disponible en mode multipage

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MEMOIRE DE RECHERCHE

REVERSE LOGISTICS ET DECHETS D'EQUIPEMENTS ELECTRIQUES ET
ELECTRONIQUES : IMPACTS D'UNE REGLEMENTATION SUR LA
STRUCTURATION D'UNE NOUVELLE FILIERE

Mastère Spécialisé/3è Cycle

Management des activités logistiques

Florie GREGOIRE
Agnes LASSERRE
Bruno LE DEVEHAT

Promotion 2006

ESC BRETAGNE BREST - 2, avenue de Provence - CS 23812 - 29238 Brest Cedex 3 - France

Tél : +33 (0)2 98 34 44 44 - Fax :+33 (0)2 98 34 44 69 www.esc-bretagne-brest.com - info@esc-bretagne-brest.com

REMERCIEMENTS

Nous tenons tout d'abord à remercier Mlle V. Fernandes, notre tuteur, pour le suivi de notre travail et pour ses conseils.

De plus, nous remercions très sincèrement tous les professionnels qui nous ont accordé les entretiens nécessaires à ce travail : Mme P. Maestracci d'Envie 2E1 Rennes 35, Mrs. V. Cuvillier et M. Le Borgne de Canon Bretagne2, Mr. A. Lestradic de la Scarmor3, Mr. D. Kaczmarek indépendant, Mr. G. Baubau de la Meito4, Mr. P. Lohezic de la Chambre de Commerce et d'Industrie d'Angers5, Mme A. Boutet et Mr. F. Deltour de l'ENSTB6, Mr. R. Le Guen de Tribord7 et Mr Y. Gaume d'Ecotri Fouesnant.

Nous remercions également les conférenciers pour leur contribution : Mlle A. Mariani de Nantes Métropole8, Mr. P. Vincent de l'ADEME9, R-B. Gallard de la Ville d'Angers et Veolia Propreté10, Mme S. Denos du Cabinet Terra et Mr X. Mace d'EBM. Toutes ces personnes nous ont aidés à comprendre la filière des DEEE, ses enjeux, les stratégies employées, les barrières actuelles, etc. Ils nous ont permis d'avoir une vue globale et de nous faire notre propre point de vue sur l'état de cette filière au premier trimestre 2006, 8 mois après la date de mise en application en France du décret de loi sur les DEEE.

1 www.envie.com

2 www.canon-bretagne.fr

3 www.e-leclerc.com

4 www.meito.com

5 www.angers.cci.fr

6 www.enst-bretagne.fr

7 www.tribord-bretagne.com

8 www.nantesmetropole.fr

9 www.ademe.fr

10 www.veolia-proprete.fr

LEXIQUE

ADEME : Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie

AMF : Association des Maires de France

ASLOG : Association française pour la Logistique B to B : Business to Business

B to C : Business to Consumer

CFC : Chlorofluorocarbones

DEEE : Déchet d'Equipement Electrique et Electronique

EDT : Echange de données Tnformatisé

EEE : Equipement Electrique et Electronique ESS : Economie Sociale et Solidaire

GEM : Gros Electroménager

GTE : Groupement d'Tntérêt Economique LCD : Liquid Crystal Display

LR : Logistique à rebours

MDD : Marque De Distributeur

MEEP : Matériel Electrique et Electronique Professionnel

PAM : Petit Appareil en Mélange

PCB : Polychlorobiphényles

PEEFV : Produit Electrique et Electronique en Fin de Vie

PME : Petites et Moyennes Entreprises PSL : Prestataire de Services Logistiques

RoHS : Restriction of the use of certain Hazardous Substances in electrical and electronic equipment

SAV : Service Après Vente

SLT : Soutien Logistique Tntégré

VA : Valeur Ajoutée

VPC : Vente Par Correspondance

WEEE : Waste of Electrical and Electronic Equipment

RESUME

La reverse logistics (retour des produits du point de consommation au point d'origine) occupe depuis quelques années une place prépondérante dans nos entreprises. Une nouvelle facette de cette discipline est le traitement des Equipements Electroniques et Electriques en fin de vie, rendu obligatoire par une Directive européenne de 2002, transcrite en droit français en juillet 2005. De nouveaux schémas logistiques se mettent ainsi en place depuis 8 mois. Actuellement peu structurée, la filière des DEEE se développe autour de trois pôles : la collecte, la logistique et le traitement. Cette organisation se basera sur les schémas logistiques décrits dans les conclusions de ce mémoire. La capacité à faire entrer les flux des DEEE dans la filière et l'optimisation des coûts constitueront les principaux défis pour transformer cette évolution réglementaire en véritable filière industrielle, source de création de valeur.

ABSTRACT

Reverse logistics (return of goods from the point of consumption to the point of origin) has taken a major place in our companies since a few years. A new facet of this subject consists in the treatment of end-of-life Electrical and Electronic Equipments, which is imposed by a new European regulation written in 2002. This regulation has been translated for France in July 2005. New logistic schemes are therefore implemented since 8 months. At the present time the WEEE's channel is poorly structured; nevertheless it develops itself around three points: collection, logistics and treatment. This organisation will be based on logistic plans described in the conclusions of this thesis. The efficiency of gate keeping and costs optimization are the major challenges faced by the participants in order to create a proper industrial structure.

SOMMAIRE

INTRODUCTION

METHODOLOGIE

PARTIE I : LA REVERSE LOGISTIQUE

1

4
8

1

INTRODUCTION

8

 

1.1

Historique de la Reverse Logistics

9

 

1.2

Un problème de vocabulaire

10

 

1.3

Importance de la rétrologistique

10

 

1.3.1

Enjeux des retours

11

 

1.3.2

Les raisons des inefficacités de la rétrologistique

12

2

LA REVERSE LOGISTIQUE

12

 

2.1

Vers une définition

12

 

2.2

Les bénéfices de la logistique à rebours

14

 

2.3

Les différentes activités de la rétrologistique

15

 

2.4

Une typologie des réseaux à rebours

19

 

2.5

La reverse logistique : une nouvelle complexité

22

3

DIVERSES STRATEGIES POUR LA REVERSE LOGISTIQUE

23

 

3.1

Réduire les flux de reverse logistique

23

 

3.1.1

La gestion du cycle de vie des produits

24

 

3.1.2

Les technologies de filtrage d'accès aux flux à rebours

24

 

3.1.3

L'échange de données informatisées

24

 

3.1.4

Conception adaptée à la reverse logistics

25

 

3.2

La gestion des flux logistiques retour

25

 

3.2.1

L'externalisation des retours

25

 

3.2.2

Les marchés secondaires

26

4 LA MISE EN OEUVRE OPERATIONNELLE DE LA REVERSE LOGISTIQUE 26

4.1 L'automobile 28

4.2 Les produits de consommation courante 28

4.3 Les produits électroniques 28

PARTIE II : LA REVERSE LOGISTIQUE ET LES DEEE 30

1 LA DIRECTIVE DEEE 30

1.1 Origine de la loi française 30

1.2 Les textes de référence : La Loi française du 20 juillet 2005 et ses décrets

d'application parus 31

1.3 Les DEEE : Déchets d'Equipements Electriques Electroniques 32

1.3.1 Définition des EEE - Equipements Electriques et Electroniques 32

1.3.2 Définition des DEEE - Déchets Equipements Electriques et Electroniques33

1.3.3 Volumétrie : Chiffres clés 34

1.3.4 Composition des DEEE 35

1.3.5 Les 5 flux principaux retenus pour classifier les DEEE 36

1.4 Synthèse : Que dit la Directive et en quoi cela impacte-t-il l'organisation

logistique de la filière ? 36

1.4.1 Dispositions à la conception des EEE 36

1.4.2 Traçabilité des DEEE 37

1.4.3 Collecte sélective des DEEE 37

1.4.4 Stockage des DEEE 38

1.4.5 Immatriculation au Registre National des producteurs 39

1.4.6 Traitement, opérations de valorisation et réutilisation 39

1.4.7 Objectifs donnés par la Directive. 41

2 LES ACTEURS CONCERNES 42

2.1 Les producteurs 42

2.2 Les distributeurs 43

2.3 Les professionnels du traitement des déchets 44

2.4 Les prestataires de services logistiques 45

2.5 Les Eco-organismes 45

2.6 L'Economie « Sociale et Solidaire » 46

2.7 Les municipalités et collectivités territoriales 47

2.8 Le citoyen consommateur 47

3 L'ARTICULATION GENERALE DE LA FILIERE 48

3.1 Les flux financiers des DEEE ménagers 48

3.2 Les flux physiques DEEE ménagers 50

3.2.1 Le niveau collecte 50

3.2.2 Le niveau logistique 51

3.2.3 Le niveau traitement 51

3.3 Positionnement des acteurs 51

PARTIE III : STRATEGIES & ORGANISATIONS LOGISTIQUES
ACTUELLES 53

1 EXEMPLE DES COLLECTIVITES TERRITORIALES 53

1.1 L'étude INTIATIVE RECYCLAGE® à Nantes 53

1.1.1 Présentation de l'étude 53

1.1.2 Intérêt de cette étude pour notre travail 54

1.1.3 Analyse des résultats de l'étude sur Nantes Métropole 54

1.1.4 La filière au niveau national : les enseignements de l'expérience et les

recommandations 56

1.2 Quels enjeux pour les collectivités territoriales 57

2 LES SCHEMAS EXISTANTS DES DISTRIBUTEURS 58

2.1 L'exemple d'une Grande Surface Spécialisée : DARTY 58

2.1.1 Présentation de DARTY 58

2.1.2 La reverse logistics mise en place 59

2.1.3 DARTY, un précurseur 61

2.2 L'exemple du mouvement E. LECLERC 61

2.2.1 Présentation de l'enseigne 61

2.2.2 Obligations des magasins E. Leclerc 62

2.2.3 Obligations des metteurs sur le marché du groupe E. Leclerc 62

2.2.4 Choix stratégiques envisagés par le groupe 63

3.2 Principaux enseignements tirés de cette opération 63

3.2.1 L'impossibilité d'anticiper les coûts de fin de vie 64

3.2.2 Le rôle capital du détenteur final 64

3.2.3 L'implication nécessaire et complémentaire du constructeur 64

3.2.4 Le positionnement des prestataires de maintenance 65

3.3 Une collecte différenciée pour les DEEE professionnels 65

4 LES INDUSTRIELS « PRODUCTEURS » : LE CAS CANON BRETAGNE 66

4.1 Présentation de CANON BRETAGNE 66

4.2 Organisation de la filière DEEE chez Canon 67

4.3 Opportunités et enjeux 69

5 LES PROFESSIONNELS DU TRAITEMENT ET DU RECYCLAGE 69

5.1 Le cas VEOLIA PROPRETE 69

5.1.1 Le projet de création d'un centre de tri de grande capacité à Angers 69

5.1.2 Schéma logistique 70

5.1.3 Opportunités et enjeux 71

5.2 L'exemple d'ECOTRI FOUESNANT 73

5.2.1 Présentation d'Ecotri 73

5.2.2 Positionnement d'Ecotri sur la filière DEEE : 73

6 LES PRESTATAIRES DE SERVICES LOGISTIQUES : LE CAS GEODIS 74

6.1 Historique de GEODIS en reverse logistics 74

6.2 L'alliance GEODIS et SITA : VALOGISTIC 74

6.3 Naissance d'un pôle majeur 75

7 L'ECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE : LA STRUCTURE ENVIE 2E 75

7.1 Présentation d'ENVIE 2E Rennes 35 75

7.2 Organisation de la filière Envie 2E 76

7.3 Opportunités et enjeux 78

8 SYNTHESE 79

8.1 Des initiatives pour l'instant individuelles 79

8.2 Présentation des coûts par appareil traité 80

PARTIE IV : QUELLE(S) STRATEGIE(S) LOGISTIQUE(S) FUTURE(S) POUR LA FILIERE ? 81

1 LA FILIERE DEEE : UN RESEAU DE REVERSE LOGISTICS 81

1.1 Caractérisation de la filière DEEE 81

1.2 Typologie et facteur de complexité logistique de la filière DEEE 82

1.3 La chaîne de valeur 83

1.3.1 La recherche du point optimum en termes de coûts de collecte et logistiques

85

1.3.2 La recherche de valeur ajoutée dans les prestations de traitement 85

2 LES DEFIS LOGISTIQUES DE LA FUTURE FILIERE DEEE 86

2.1 La capacité des « gatekeeping » à fournir un flux entrant critique de DEEE 87

2.2 L'optimisation des coûts logistiques de la filière 87

2.2.1 La spécialisation des points de collecte en zone urbaine 87

2.2.2 Le tri sur les points de collecte et l'acheminement direct en centre de

traitement 88

2.2.3 La massification des DEEE sur un nombre limité de plateformes 89

2.2.4 Schéma logistique reconfiguré 90

2.3 Le développement de capacité de traitement en France 90

2.4 Quel partage de la chaîne de valeur dans la filière ? 91

2.4.1 Une logique purement économique et industrielle 91

2.4.2 Une logique de valorisation du tissu économique local et social 91

2.4.3 Des opportunités de partenariat 92

2.5 Le pilotage de la filière par un système d'informations intégré 92

3 PROPOSITION D'UNE STRATEGIE LOGISTIQUE POUR LA FUTURE FILIERE

DEEE AU PLAN NATIONAL

93

3.1

Méthodologie

93

3.2

Hypothèses

93

3.3

La filière logistique pour le flux GEM hors froid, PAM et écrans

94

3.4

La filière logistique pour le flux GEM froid

95

3.5

Synthèse

96

CONCLUSION : TRANSFORMER UN ELDORADO ATTENDU EN UNE
VERITABLE FILIERE INDUSTRIELLE 97

INTRODUCTION

<< Ma vieille cafetière expresso ne marche plus, je ne peux plus rien en faire, est-ce que je peux vous la rapporter si j'en achète une neuve ? » Regard éberlué de la vendeuse « Mais qu'est ce que vous voulez que j'en fasse ». Cette scène réelle se situe dans une grande surface spécialisée et cela pourrait s'intituler << Appareils usagers, des accrocs dans la reprise »1. Et pourtant, depuis le 13 août 2005, les magasins de la grande distribution sont tenus de reprendre gratuitement l'ancien appareil contre l'achat d'un neuf si le client le souhaite.

Pré requis

Les premières recherches et applications sur la reverse logistics ont été publiées il y a déjà plus de 20 ans aux Etats Unis. Si en premier lieu, la logistique des retours a essentiellement répondu à des problématiques environnementales, elle s'est progressivement imposée au coeur de l'organisation des supply chains modernes et représente dans bien des secteurs industriels un enjeu stratégique primordial, associé à un impact économique significatif.

Le Council of Logistics Management a récemment proposé une définition, communément admise par les professionnels. Elle présente de manière générale la rétrologistique comme un processus efficient de planification, de mise en oeuvre et de contrôle des flux de MP, d'encours, de produits finis, du point de consommation jusqu'au point d'origine et de l'information relative aux flux. Elle inclut de ce fait de nombreuses activités opérationnelles.

Son importance semble devenir grandissante avec notamment le développement du commerce électronique. De plus, la transcription en droit français d'une Directive européenne relative à la gestion de déchets d'équipements électriques et électroniques (DEEE) impose une réorganisation de la filière, en termes technologiques, économiques et logistiques.

1 Elisabeth Chesnais (décembre 2005), << Appareils usagés - Des accros dans la reprise », Que Choisir 432.

En effet, ces appareils usagers, d'une grande diversité, connaissent une forte croissance de leurs volumes, liée à un taux d'équipement des professionnels et des particuliers de plus en plus élevé et à l'obsolescence très rapide des produits. Ce taux est également inhérent aux progrès technologiques permanents.

Problématique

La logistique est devenue, depuis une dizaine d'années, une fonction concurrentielle, pour laquelle les entreprises définissent désormais des stratégies précises et longuement réfléchies.

Une nouvelle facette de la logistique est mise en avant depuis quelques années : la reverse logistics, ou rétrologistique, logistique à rebours, logistique inversée, etc. La question que nous soulevons aujourd'hui est la suivante :

- Comment s'est développée la reverse logistique ? Quels sont aujourd'hui les schémas les plus courants utilisés par les entreprises, les enjeux, les développements futurs ?

Une nouvelle loi impose, depuis le 13 Août 2005, la collecte, le traitement et la valorisation de tous les produits en fin de vie contenant des composants électroniques et/ou électriques. La question posée ici est :

- Que sont les DEEE ? Quels acteurs sont concernés par ce décret ? Quelles sont les organisations logistiques mises en place et les stratégies employées? Quels sont les enjeux liés à cette Directive ?

Cette nouvelle réglementation oblige les acteurs du secteur à revoir entièrement leur supply chain :

- Quels sont désormais les défis logistiques pour cette filière ? Quelle organisation logistique adoptera la future filière ?

Objectifs

L'objectif principal de ce mémoire est de donner un état des lieux de la filière des DEEE au premier quadrimestre de l'année 2006, soit 8 mois après la date de mise en application du Décret de loi française et de faire des recommandations pour la future

organisation logistique. Cet état des lieux devra être justifié par une observation précise et une comparaison réaliste des éléments théoriques et pratiques.

A travers cet objectif, nous voulons également que le lecteur comprenne ce qu'est la reverse logistics et les stratégies appliquées actuellement dans ce domaine, pour pouvoir ensuite apprécier le développement des flux retours pour les produits d'équipements électriques et électroniques.

Limites

Tout d'abord, ce travail de recherche se délimite à l'observation de la filière DEEE en France uniquement.

Ensuite, concernant la partie sur les stratégies employables en reverse logistics, nous nous sommes limités aux stratégies pouvant ensuite porter à réflexion au niveau de notre problématique (la filière DEEE). Ainsi, nous n'aborderons pas les stratégies relatives aux retours de produits pour réparations, modifications, mais seulement celles liées aux retours des déchets.

De plus, nous avons globalement axé nos recherches sur la filière des DEEE ménagers. Néanmoins, nous ferons parfois référence aux DEEE professionnels.

Enfin, cette étude ne fait référence qu'à une période précise : du 13 août 2005, date de mise en application du décret sur les DEEE en France à fin avril 2006, date du rendu de ce mémoire. Il demeure à cette date plusieurs problèmes :

- Tous les aspects législatifs n'ont pas encore été publiés.

- Les différents acteurs expriment encore des interrogations sur l'interprétation des textes de loi sortis à ce jour.

METHODOLOGIE

PHASES DE NOTRE TRAVAIL

Nous avons distingué 6 phases dans notre travail de recherche :

Phase de réflexion préalable conduisant au choix d'un sujet précis

Cette phase consiste à passer progressivement d'un thème assez général (ici, la reverse logistics) à un véritable sujet menant à un projet, c'est-à-dire à une perspective opérationnelle de recherche dans un domaine délimité (la filière du traitement des DEEE).

Phase de formulation du problème de recherche et logique de la démonstration

Le travail exploratoire de la phase 1 doit conduire à l'une des étapes décisives de la recherche : le choix et la définition d'un problème centrale de recherche dans le champ préalablement délimité (les stratégies pouvant être utilisées pour le traitement des DEEE).

Phase de documentation approfondie

Il s'agit, à partir de l'analyse précédente, de procéder au travail de documentation en profondeur. Nous devons multiplier les << explorations » de sources possibles : bases de données informatiques, interviews d'entreprises, organisations spécialisées, articles de journaux, revues de presse, ouvrages, conférences... Toutes ces sources devront être ordonnées. Il est essentiel de ne pas manquer les références fondamentales sur notre sujet, celles qui font date et fournissent un bilan de départ (ici : << Going Backwards : Reverse Logistics Trends and Practices, Dale S. Rogers, Ronald S. Tibben-Lembke, 1998, Reverse Logistics Executive Council pour la partie théorique sur la reverse logistics, et le Décret français de loi du 23 juillet 2005 sur le traitement des DEEE pour la partie correspondante). Faire ensuite périodiquement un bilan de ce que l'on a acquis comme information, et de ce qui manque. Enfin, il faut savoir s'arrêter, en considérant le mémoire comme l'étape d'une recherche qui pourra éventuellement se poursuivre sous une autre forme (thèse professionnelle, mission en entreprise, etc.).

Clarification des résultats par traitement des données

Il s'agit de la phase critique de la recherche, celle de l'utilisation des données rassemblées pour procéder à la clarification des résultats. Elle implique un classement des données, une hiérarchisation par ordre d'importance et une analyse de résultat.

La démonstration permet-elle d'arriver à des résultats convaincants ? Quelles sont les lacunes, mais aussi quels sont les points forts ?

A ce stade, on a donc tous les éléments de la démonstration. On peut en principe adopter un plan (quasi définitif) qui sera utilisé pour la rédaction.

Application & mise en évidence des implications du résultat

Dans notre mémoire, il apparaît que les résultats sont convaincants, réalisables. Nous en avons donc étudié les conséquences. Quelles sont nos positions ? A ce moment, les phases de recherche peuvent être considérées comme achevées.

Phase de synthèse du travail, de rédaction et de mise au point

Nous avons consacré beaucoup de temps à cette phase, car elle est toujours plus longue qu'on ne le pense, et tout à fait fondamentale pour valoriser la recherche entreprise (songer à la soutenance et à une future candidature professionnelle).

Calendrier de l'étude

 

Octobre

Novembre

Décembre

Janvier

Février

Mars

Avril

S1

S2

S3

S4

S5

S6

S7

S8

S9

S10

S11

S12

S13

S14

S15

S16

S17

S18

S19

S20

S21

S22

S23

S24

S25

S26

S27

Phase 1

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Phase 2

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Phase 3

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Phase 4

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Phase 5

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Phase 6

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Figure 1 : Calendrier de notre étude

Perspectives philosophiques

D'après Gummesson, il existe quatre types de perspectives philosophiques quant à la rédaction d'une étude : le concept positiviste contre l'heuristique, et le concept déductif contre l'inductif.

Le concept positiviste doit décrire l'intégralité de l'étude de manière objective et l'expliquer. Le concept heuristique au contraire doit comprendre et interpréter les informations.

Le concept déductif part du général pour aller vers le spécifique, à l'inverse du concept inductif qui se base sur des observations spécifiques pour aller vers des généralisations et des théories.

Le tableau suivant décrit clairement l'utilisation des méthodes inductive et déductive lors d'un travail de recherche.

Tableau 1 : Comparaison des méthodes inductive et déductive

Nous utiliserons ici le concept positiviste, puisque notre but est de décrire et d'expliquer ce qu'est la reverse logistics et plus particulièrement celle utilisée dans la filière des DEEE. Parallèlement à ce concept positiviste, nous évoluerons du général au plus spécifique.

Le concept déductif à proprement dit sera peu utilisé, mais nous essayerons de formuler des hypothèses dans la dernière partie de ce mémoire, portant sur les possibilités stratégiques que les acteurs de la filière DEEE pourraient utiliser.

Etude qualitative ou quantitative ?

D'après M. Gay et M. Airasian, une étude qualitative est une étude qui interprète des données que l'on ne peut compter.

L'étude qualitative part du concept déductif, l'étude quantitative part du concept inductif.

Partant sur le concept déductif, nous utiliserons très majoritairement le concept qualitatif pour réaliser cette étude. La méthode quantitative sera donc très peu utilisée, uniquement pour nous permettre de vérifier nos résultats avec ceux trouvés précédemment par d'autres chercheurs. Les informations qualitatives nous ont permis d'expliquer notre sujet de manière plus détaillée et spécifique. Les résultats sont uniquement qualitatifs.

Valeur, intérêt du mémoire

Avec ce travail, nous voulons mettre en évidence l'état de la filière DEEE en Avril 2006, 8 mois après la date de mise en application du décret sur le traitement des DEEE. Nous montrerons ainsi les avancées des différents acteurs concernés par la loi et les stratégies qu'ils tendent à employer. Nous pensons que notre travail pourra intéresser certaines des entreprises impliquées, puisqu'il se présente sous la forme d'une synthèse à jour de l'état de la filière DEEE, filière aux très nombreux enjeux et pour laquelle tous les acteurs doivent mûrement réfléchir. Elle aura en effet des conséquences essentielles sur les coûts supportés par l'entreprise ainsi que sur son image auprès des consommateurs finaux mais aussi auprès des professionnels.

PARTIE I : LA REVERSE LOGISTIQUE

Nous présenterons ici, dans un premier temps, la reverse logistics : historique, définition, acteurs, enjeux...

Ensuite, nous détaillerons les différentes stratégies de reverse logistics s'adaptant à notre problématique.

Enfin, nous décrirons la mise en oeuvre opérationnelle de la reverse logistics.

1 INTRODUCTION

Les pressions pour la récupération des matières, la réduction de l'enfouissement comme mode de gestion des déchets, la prise de conscience des consommateurs ainsi que les économies potentielles provenant d'une réutilisation des matières amènent les organisations à accorder une attention accrue à la logistique des retours. Ce concept introduit une nouvelle perspective dans la gestion de la chaîne d'approvisionnement, car les schémas traditionnels décrivant la circulation des matières sont généralement conçus dans une optique unidirectionnelle : des fournisseurs vers les utilisateurs. En fait, la reverse logistics souligne que la matière peut emprunter le chemin inverse et remonter la chaîne d'approvisionnement.

Initialement, l'intérêt de la logistique à rebours était associé à la problématique environnementale (récupération, réutilisation et recyclage des produits). Cependant, elle dépasse ce seul champ d'activité pour inclure le retour des produits défectueux et non désirés par les clients. Dans certains secteurs d'activités, entre autres celui de la vente par catalogue, le retour de produits peut être équivalent à 35% des ventes. La maîtrise du flux inversé peut donc être un facteur de survie pour ces secteurs. La logistique à rebours n'équivaut en moyenne qu'à moins de 5% des coûts logistiques d'une entreprise bien que son potentiel d'économies demeure appréciable (en 1997, aux Etats-Unis, la reverse logistics représentait 862 milliards de dollars1). Elle recèle un haut degré de complexité ce qui expliquerait les difficultés associées à son implantation.

1 Rapport B. Delauney «Ninth annual state of logistics report»

1.1 Historique de la Reverse Logistics

La reverse logistics, devenue aujourd'hui un thème majeur de la problématique logistique, est un concept déjà ancien. Depuis son élaboration, le Soutien Logistique Intégré (SLI), l'approche la plus complète du management logistique, inclut dans un même processus l'ensemble des flux, allers et retours, en suivant le cycle de vie du produit et de ses composantes.

Pour la logistique dite de flux, le concept de reverse logistics est apparu au tout début des années 90, à peu près simultanément en Amérique du Nord et en Europe.

Aux USA, le Council of Logistics Management publiait dès 1991 un document intitulé « Reverse Logistics » suivi en 1993 du livre « Reuse and Recycling - Reverse Logistics opportunities ».

En Europe, c'est en Allemagne que la préoccupation de la défense de l'environnement favorisa le développement du concept : au Congrès International de la Logistique de La Haye, en 1991, R. Frerich-Sagurna proposait de dupliquer le schéma classique de la chaîne logistique, en y incluant les flux retours et en imaginant une consuming enterprise, miroir de l'entreprise productrice classique.

Figure 2 : Schéma de R. Frerich-Sagurna1

1 Laurent Grégoire (1999), « Bienvenue à la Reverse Logistics », Logistique & Management, vol.7 n°2, `Reverse Logistics', Publications Groupe Ecole Supérieure de Commerce de Bordeaux.

En France, c'est l'ASLOG, Association française pour la logistique, qui introduisit le concept en organisant en avril 1992 le << 1er forum de la logistique et de l'environnement >>. Logistique verte ou Eco-logistique firent ensuite l'objet de quelques journées d'études, notamment au CERELOG de Metz.

Une dizaine d'années plus tard, le développement de la Reverse Logistics reste encore limité. Un certain nombre d'initiatives a été pris, la plus importante en flux traités étant sans doute la récupération et le recyclage des emballages, en particulier pour les produits grand public par l'organisme Eco-Emballages. Mais la part de flux retours dans l'ensemble des flux physiques reste faible, du moins en France. La mise en application de la nouvelle Directive européenne sur les DEEE devrait accélérer l'essor de la reverse logistics.

1.2 Un problème de vocabulaire

Si la logistique prend des formes significativement différentes selon la nature des produits considérés, il en est de même pour la Reverse logistics. Reverse logistics est l'expression américaine pour désigner un flux qui ne << descend >> pas la supply chain mais la << remonte >> depuis le consommateur vers le producteur : produits invendus, envoi en réparations, retours des produits promotionnels ou retours dus aux défaillances des systèmes de pilotage de type push... En effet, la prévision de la demande étant par nature soumise à des erreurs, beaucoup de produits sont repris et << recyclés >> vers d'autres zones de consommation. Le pourcentage de flux << recyclés >> pour cette raison atteindrait près de 20% au niveau mondial. Mais l'expression recouvre aussi les déchets dont on doit se débarrasser le plus écologiquement possible sans qu'ils reviennent au producteur.

On ne sait donc trop comment traduire reverse logistics en français : logistique des retours, logistique à rebours, logistique inverse ou rétrologistique sont autant de termes rencontrés pour désigner une même réalité : comment organiser la gestion des retours.

1.3 Importance de la rétrologistique

L'importance de la rétrologistique comme outil stratégique ayant un impact sur la rentabilité à long terme d'un secteur n'est pas encore totalement établie. En effet, si initialement certaines fonctions de gestion telles que la finance et le marketing ont connu leur

prééminence, les années 90 ont placé les capacités logistiques au centre des préoccupations des entreprises. Dans ce contexte, la majorité des entreprises n'a pas encore décidé de donner une place déterminante à la rétrologistique. Un nombre croissant de secteurs a néanmoins compris que la gestion de la logistique du point de consommation vers l'amont est plus complexe et demande d'autres arbitrages du mix logistique (stockage, entreposage, transport, informatisation) pour un taux de retour et de satisfaction clientèle donné.

1.3.1 Enjeux des retours

Dans un projet de recherche du Reverse Logistics Executive Council qui interrogeait les entreprises pratiquant la rétrologistique, différents rôles stratégiques ont été mis en évidence, tel présenté dans le Tableau 2.

Raisons invoquées

% de réponse

Pression concurrentielle

La libéralisation des procédures de retour en vertu de laquelle si un article ne satisfait pas il peut être retourné, défectueux ou non, exerce une pression concurrentielle dans la recherche de la fidélisation/satisfaction des clients. Le courant entreprise citoyenne oblige les entreprises qui acceptent les retours à les traiter dans le respect de l'environnement et selon des pratiques socialement responsables.

65

Supply chain propre

En acceptant de reprendre des articles, pièces ou composants ; auprès de leurs clients, les fabricants peuvent à la fois refabriquer et recapter la valeur des produits mais aussi permettre au client d'acheter et de stocker de nouvelles marchandises. Ce désengorgement des stockages associé à une extension des lignes de crédit et une augmentation du taux de satisfaction clientèle permet de faire d'une pierre deux coups : vendre le nouveau et recycler l'ancien pour le revendre.

33

Réglementation

Elle force la reconfiguration des systèmes de production et de distribution pour s'assurer de ce que sur le cycle de vie de l'article à des phases différentes, l'ensemble de la supply chain de retour soit géré effectivement.

25

Recapter la valeur et recouvrer les actifs

Les entreprises qui ont effectivement pris en charge des programmes de recouvrement des actifs ont pu revaloriser et améliorer la rentabilité à partir de matières qui sinon auraient été éliminées ou gaspillées.

20

Protéger les marges d'exploitation

Les raisons invoquées ci-dessus permettent de mieux protéger à long terme la rentabilité en créant de nouvelles sources de revenus et de profits.

18

Tableau 2 : Rôle stratégique des retours1

1 Alexandre Samii (2004), Stratégie Logistique, Supply Chain Management, 3ème Edition, Dunod. p359.

1.3.2 Les raisons des inefficacités de la rétrologistique

Six symptômes d'une gestion inefficace des retours ont été identifiés. Le fait qu'ils soient tellement fréquents démontre l'importance de la gestion efficiente et rapide de la rétrologistique.

- Les retours arrivent plus vite qu'il n'est possible de les traiter (stocker, transformer..) ; le symptôme est un manque de capacité face à la demande.

- De grandes quantités de stocks de retour qui restent entreposés dans les entrepôts. - Des retours non autorisés ou non identifiés.

- Lenteurs des cycles de traitement des retours.

- Méconnaissance du coût logistique total des processus de retours.

- Manque de confiance du client dans le processus de réparation.

Il découle de ses symptômes qu'il est essentiel d'identifier les obstacles à une logistique correcte des retours. Si leur classement par ordre d'importance devait être réalisé, il se présenterait comme suit :

- la logistique de retour est sous-estimée car son coût logistique total n'est pas évalué ; il peut s'agir d'une politique délibérée de l'entreprise et/ou d'un manque d'attention de sa haute direction.

- le manque d'investissement informatique, de ressources financières et de personnel, engagés dans la gestion.

- l'analyse juridique des retours est déconnectée de la gestion managériale.

- il est étonnant de constater que, contrairement à ce que l'on pourrait croire, la

réglementation et la pression des agences gouvernementales de protection de

l'environnement n'ont pas suscité une reconfiguration active de la chaîne des retours.

2 LA REVERSE LOGISTIQUE

2.1 Vers une définition

Le Council of Logistics Management définit la rétrologistique comme suit :

`Partant du point de consommation jusqu'au point d'origine, la rétrologistique est un processus efficient de planification, de mise en oeuvre et de contrôle des flux de matières premières, d'encours, de produit finis, et de l'information relative à ces flux, dont le but est de

recapter la valeur des matières en les remettant à disposition dans une supply chain de retour.'

Il en découle que la rétrologistique inclut des activités telles que la retransformation, le reconditionnement, la réutilisation des contenants, composants et emballages, tout comme la conception de produits et emballages destinés à réduire la pression environnementale (énergie, transport..).

La rétrologistique traite aussi du retour de marchandises dû à des méventes, des excès de stocks saisonniers, des rappels pour défectuosités, aussi bien que des programmes de recyclage d'équipements obsolètes et de matériaux dangereux et/ou dérangeants. Son importance économique fluctue selon les secteurs considérés. A titre d'exemple, le Tableau 3 présente les taux de retour de quelques secteurs.

Secteur

%

Journaux et magazines

20-30

Distributeurs de livres

10-20

Ventes par correspondance

18-35

Distributeurs de composants électroniques

10-12

Ordinateurs

10-20

Grande distribution

4-15

Pièces de rechange automobiles

4-6

Electronique grand public

4-5

Produits chimiques ménagers

2-3

Tableau 3 : Exemples de taux de retour1

Pour Martin Beaulieu2, une définition de la logistique à rebours (LR) doit tenir compte de 4 paramètres :

- La LR est associée autant à un produit qu'à un déchet possédant une valeur de récupération ou de réutilisation. Ainsi, les papiers récupérés, les produits défectueux ou les retours suite à un achat par catalogue peuvent être considérés comme des intrants d'un réseau à rebours.

1 Adapté de Rogers & Tibben-Lembke (1998), Going backwards : Reverse Logistics Trends and Practices, University of Nevada.

2 Martin Beaulieu (2000), Définir et maîtriser la complexité des réseaux de logistique à rebours. Groupe de recherche CHAINE, HEC Montréal.

- Le destinataire final de ces produits retournés ou de ces déchets peut être le producteur initial, un intervenant différent de la même industrie ou un intervenant d'un autre secteur d'activités. Par exemple, un produit défectueux sera réacheminé vers son producteur, le papier récupéré sera retourné dans l'industrie papetière alors que les pneus seront valorisés par des producteurs de tapis en caoutchouc.

- La LR implique davantage que la seule décision du choix du réseau de distribution. - Elle comprend également un ensemble d'activités de gestion.

Par conséquent, il en formule la définition suivante :

`La logistique à rebours est un ensemble d'activités de gestion visant la réintroduction d'actifs secondaires dans des filières à valeur ajoutée.'

Le terme <<actif» est le pivot de la définition car il précise la nature de l'intrant qui se déplace dans les réseaux de logistique à rebours. Le choix de ce terme peut sembler surprenant mais il offre suffisamment de neutralité pour englober tous les aspects de la logistique à rebours.

Pour Davis1, la reverse logistics est la gestion des actifs qui ne remplissent plus leur fonction première. La notion d'actif désigne un bien appartenant en propre à une personne ou à une personne morale (Sylvain2, 1986). Un déchet ou un produit hors d'usage a un propriétaire même si ce dernier est implicite. Par ailleurs, le terme <<actif» offre plus de neutralité car celui-ci permet d'inclure également les produits qui sont retournés ou rappelés par les entreprises. Le qualificatif secondaire est ajouté au terme << actif » pour préciser qu'il a déjà subi une dégradation (suite à son utilisation ou à une défectuosité).

2.2 Les bénéfices de la logistique à rebours

Si les bénéfices pour l'environnement sont connus et tangibles, il faut aussi y associer de nombreux avantages financiers et stratégiques. La logistique à rebours n'est pas une pratique récente mais elle acquiert de plus en plus un caractère stratégique. En effet, l'engouement des consommateurs pour des produits faits de matières recyclées oblige en quelque sorte les manufacturiers à concevoir de nouveaux produits et procédés, mais surtout à mettre en place des réseaux capables de récupérer cette nouvelle matière première. La

1 Davis, Shear, Lawrence, Rector (1995), << Reverse Logistics Pipeline » in Annual Conference Proceedings, California, Council of Logistics Management.

2 Sylvain (1986), << Dictionnaire de la comptabilité et des disciplines connues », Montréal, Institut Canadien des Comptables agréés.

nécessité de tels réseaux peut aussi provenir d'obligations législatives, comme dans le cas de la nouvelle Directive DEEE.

D'autre part, la concurrence de plus en plus intense amène les entreprises à accroître leurs services à la clientèle, dont le retour de produits endommagés ou défectueux, ou encore pour reprendre les quantités non écoulées après une vente saisonnière.

Rogers et Tibben-Lembke (1998) précisent que le retour de produits représente en moyenne de 3 à 5% des ventes d'une entreprise et qu'il génère de 5 à 6% des coûts totaux logistiques. L'essor du commerce électronique participera d'ailleurs à l'augmentation des volumes des flux retours. Les entreprises qui développent un flux intégré de prise en charge du produit utilisé et de son retour au consommateur, bénéficient de délais plus courts.

A partir de ces faits, des économies substantielles peuvent être réalisées par une gestion efficiente des réseaux de logistique à rebours. Soulignons que les organisations peuvent aussi retirer un avantage indirect d'une gestion des retours de produits, en acquérant une meilleure connaissance du produit et des causes de défectuosité. L'entreprise peut alors effectuer des améliorations pour corriger ces problèmes.

2.3 Les différentes activités de la rétrologistique

Tout comme les réseaux traditionnels de distribution, les réseaux à rebours peuvent être composés de plus ou moins d'intermédiaires. Mais quelle que soit la taille de ces réseaux, les intermédiaires devront se partager un certain nombre d'activités présentées dans le Tableau 4.

Tableau 4 : Les activités des réseaux de logistique à rebours (M. Beaulieu, 2000)

La collecte

La collecte est une opération essentielle à la performance d'un réseau de logistique à rebours. Le point d'entrée dans le pipe-line de rétrologistique mérite une attention accrue. Le gatekeeping (contrôle de l'accès des flux retours) est stratégique ; ce filtrage permet de rendre les flux retour gérables et rentables dans leur globalité. La forte participation des utilisateurs assurera une masse critique d'actifs récupérés, une condition sine qua non au succès de réseau.

Cette situation met en lumière une première action critique : l'instauration d'incitatifs pour que l'utilisateur modifie ses comportements. Ces incitatifs peuvent être économiques ou prendre la forme d'aménagements favorisant la participation des utilisateurs.

Le triage

Le triage est l'étape opérationnelle la plus importante. S'il est effectué à la source, il réduit la complexité et le coût de l'activité. Mais ce n'est pas toujours possible à cause, entre autres, de la complexité des produits. En effet, certains produits ne sont pas conçus pour le désassemblage ; des spécialistes sont requis pour effectuer cette opération. Le triage permet également d'aiguillonner les actifs vers les bonnes filières de revalorisation et de séparer les produits qui peuvent être revendus, ceux qui doivent être réparés, ceux dont certaines pièces peuvent être réutilisées, ceux qui peuvent être donnés à des organismes de charité et ceux qui seront finalement envoyés sur des sites d'enfouissement.

L'entreposage

L'entreposage peut être nécessaire pour combler l'écart entre l'offre et la demande. Par ailleurs, l'entreposage peut être une activité critique pour certains intervenants des réseaux de logistique à rebours. En effet, le processus de retour de produits peut créer un dédoublement des stocks (produits à vendre et produits retournés) à certains points du réseau, par exemple chez le détaillant.

Le transport

Le transport est une activité qui peut constituer une contrainte importante sur la performance du réseau de logistique à rebours. Dans le cas du recyclage des produits, le transport accapare 25% des coûts logistiques. Lambert et Stock1 (1993) ont même estimé que les coûts de déplacement d'un produit du consommateur vers le producteur peuvent être neuf fois supérieurs à ceux du flux traditionnel. Davis et al. (1995) identifient trois causes qui empêchent d'optimiser les activités de transport :

- Le produit est rarement retourné dans son emballage original.

- Il peut y avoir une grande diversité de produits retournés.

- L'expéditeur est incapable de déterminer le poids du chargement.

Une seconde action critique consisterait à palettiser les produits à retourner ce qui faciliterait l'évaluation des quantités et des coûts de transport. Dans le cas des produits recyclés, la compaction peut être un moyen de comprimer les coûts de transport en réduisant le volume des ressources. D'une façon plus globale, Shear2 recommande de lier le plus possible les activités du réseau logistique à rebours avec ceux du réseau traditionnel.

1 Lambert, Stock (1993), « Strategic Logistics Management », Irwin Publishing Company, 3rd Edition.

2 Shear (1997), « Reverse Logistics: An issue of Bottom-line performance », Chain Store Age, vol.73 n°1.

Précisons que les réseaux de logistique à rebours détournent des actifs qui auraient terminé leur existence dans les filières d'enfouissement ou d'incinération. Cependant, le taux de récupération de ces réseaux n'est pas de 100%. De plus, le taux de récupération peut être limité par des contraintes technologiques qui restreignent la réutilisation de certains actifs secondaires.

Si l'on compare le coût de rétrologistique au coût logistique classique, il sera aussi la somme de plusieurs coûts : + Coût d'entreposage

+ Coût de transport

+ Coût de traitement

+ Coût de gestion des processus de retour

+ Coût associé aux réseaux de rétrologistique utilisés et au

niveau de service requis dans ce réseau.

= Coût de rétrologistique

Vu sous un autre angle, pour un niveau de service et une configuration centralisée ou non des centres de traitement de la chaîne de retour, le coût de rétrologistique est la somme des coûts d'entreposage, de transport, et de traitement (triage et mise à disposition).

La logistique inverse concerne donc des flux multiples qui ont tous la caractéristique de ne pas être des flux massifs de produits :

- emballages de toutes sortes : palettes, cartons, bouteilles, containers...

- déchets de production, eaux usées, huiles usées...

- invendus : journaux, livres, articles démodés, restants de promotion, produits périmés ou en limite de péremption...

- produits défectueux rappelés par le producteur.

- produits refusés par le consommateur en VPC ou e-commerce.

- produits en fin de vie, soit jetables, soit usés : automobiles, toners d'imprimantes, microordinateurs, appareils ménagers, literie... qu'ils soient repris ou non par le vendeur.

- produits à réparer.

Tous ces produits ne reviennent pas nécessairement vers le producteur mais peuvent emprunter des voies très différentes avec l'intervention de nombreuses « tierces parties » : en effet la supply chain, bien plus qu'une chaîne, est un réseau souvent très complexe.

2.4 Une typologie des réseaux à rebours

Tout comme les réseaux traditionnels de distribution, les réseaux à rebours peuvent être composés d'un nombre plus ou moins grand d'intermédiaires. Ainsi, ces réseaux peuvent prendre des formes multiples. Bien qu'il existe quelques typologies des réseaux de logistique à rebours, la plupart des travaux traitant cet aspect les a décrits selon le nombre d'intervenants potentiels, par exemple, la présence ou non de recycleurs, de firmes de traitement, etc. Cette première classification a l'inconvénient de décrire a posteriori les réseaux de logistique à rebours, c'est-à-dire une fois que les réseaux sont organisés et que les acteurs se sont structurés. Pour les gestionnaires, cette typologie est peu utile pour la mise sur pied d'un réseau de logistique à rebours à moins de copier ceux déjà existants.

On peut également traiter les réseaux en deux catégories : à boucle fermée ou à boucle ouverte. Dans le premier cas, les actifs secondaires reviennent dans leur secteur d'origine. Dans l'industrie automobile, on constate que les broyeurs retournent les métaux chez les sidérurgistes et les affineurs ce qui permettra de produire de nouvelles pièces pour les constructeurs automobiles. D'autre part, les actifs peuvent être dirigés vers d'autres industries et c'est ce qu'on appelle une boucle ouverte. Par exemple, les «casseurs» envoient une partie des pièces automobiles dans d'autres réseaux de récupération qui ne sont pas apparentés à l'industrie automobile. Cette typologie peut encore une fois être utile pour classifier la nature des réseaux à rebours mais elle offre peu d'indications aux gestionnaires quant aux implications d'un réseau à boucle fermée ou ouverte.

Rogers et Tibben-Lembke (1998) apportent une nuance importante. Ils précisent que la variété des activités du réseau de logistique à rebours est influencée par deux grandes variables. D'abord, l'origine de l'actif secondaire qui peut provenir de l'utilisateur final ou d'un autre membre du réseau de distribution. Ensuite, la nature de l'actif qui peut être un produit ou un emballage. Pour ces derniers, il existe quatre grandes options (utilisateur final ou membre du réseau de distribution / produit ou emballage) qui mettront en évidence certaines activités de gestion et de traitement des actifs secondaires. Cette typologie est intéressante car elle aide le gestionnaire à identifier les activités prédominantes du réseau de logistique à rebours. Cependant, Martin Beaulieu (2000) considère la dichotomie produit ou emballage trop stricte. De plus, Rogers et Tibben-Lembke (1998) indiquent que les produits

réintroduits dans le réseau à rebours peuvent arriver ou non à la fin de leur vie utile. Cependant, leur typologie exploite peu cette nuance.

Ainsi, pour pallier aux lacunes identifiées dans les modèles précédents, la typologie des réseaux à rebours que Martin Beaulieu propose s'appuie sur deux paramètres :

le choix de la filière à valeur ajoutée où est dirigé l'actif secondaire.

le degré de traitement de l'actif secondaire (traitement intermédiaire ou retraitement) avant sa réintroduction dans la filière.

Ce dernier paramètre influencera le nombre d'intervenants contenus dans le réseau. L'association de ces deux variables permet de construire la figure 3. Par exemple, le retour de produits (achats par catalogue, commerce électronique) constitue un exemple d'actifs secondaires qui ne nécessitent aucune transformation et qui retournent dans leur industrie d'origine puisqu'ils seront réutilisés par les distributeurs et détaillants (figure 3, coin supérieur gauche). Pour sa part, bien que retournant dans sa filière d'origine, le papier récupéré doit subir un retraitement important qui le ramènera sous forme d'une pâte qui pourra être utilisée pour la production de nouveaux produits (carton ou papier) (figure 3, coin inférieur gauche).

Figure 3 : Classification des réseaux de logistique à rebours (Beaulieu, 1999)

Les produits ou les matières (actifs secondaires) situés du côté droit de la matrice peuvent être plus difficilement réintroduits dans leur filière d'origine. Cette situation est explicable à deux niveaux : le retraitement de ces actifs ne permet pas de retrouver les normes de qualité des matières vierges ou encore l'actif secondaire n'a plus aucune valeur pour le

producteur initial. C'est le cas des pneus d'automobile dont les activités de déchiquetage ne permettent pas d'obtenir une matière qui serait réutilisable dans la production de nouveaux pneus (figure 3, coin inférieur droit). Une autre situation est vécue dans le secteur du commerce de détail. Malgré des rabais, les détaillants peuvent se retrouver avec des vêtements qui n'ont plus d'intérêt pour eux, car ceux-ci ne rencontrent plus les critères de la mode. Ils sont donc offerts à des organismes de charité. Il s'agit d'un exemple où l'article ne revient pas dans la filière d'origine mais ne subit pas de traitement majeur (figure 3, coin supérieur gauche).

Cette typologie permet d'introduire une notion importante : la complexité dans la gestion des réseaux logistiques. Un actif secondaire qui revient dans sa filière d'origine sans subir de traitement important (cadran supérieur gauche de la matrice) emprunte un réseau de logistique peu complexe à gérer (facilité de synchronisation des activités de livraison et de récupération car on utilise la même infrastructure pour les 2 flux). Par exemple, la palette peut être réutilisée telle quelle. Les bouteilles de bière devront être nettoyées, mais son maillage avec le réseau logistique conventionnel est simple.

A l'opposé, plus l'actif secondaire tend à être localisé dans le coin inférieur droit, plus le réseau risque d'être complexe à gérer compte tenu, entre autres, de l'incertitude technologique quant au retraitement, de l'incertitude commerciale quant à l'existence d'un marché pour cette matière, des difficultés de substitution de la matière originale pour celle recyclée... Dans certains cas, ces produits ne sont pas conçus afin de faciliter le désassemblage. D'où l'importance du retraitement dans le cas des écrans d'ordinateurs par exemple. Cette notion de complexité se situe à 2 niveaux dans la gestion des réseaux de logistique à rebours :

- la difficulté à mettre en place le réseau en question.

- la difficulté à gérer les différentes interactions entre les acteurs de ce réseau.

Figure 4 : Complexité et réseaux de logistique à rebours (Beaulieu et al., 1999)

2.5 La reverse logistique : une nouvelle complexité

La reverse logistics ajoute à la logistique classique plusieurs facteurs de complexité :

- Elle n'est pas à proprement parler tirée mais en général poussée : c'est la disponibilité d'un produit ou d'un emballage à recycler qui déclenche le processus, et non la demande d'un futur utilisateur de matières recyclées.

- La reverse logistics génère en général des flux entre des entreprises très différentes et de secteurs économiques variés ; il y a rarement des flux retours vers l'entreprise productrice à l'origine des matières et produits traités. Toute optimisation nécessite donc une prise en compte des intérêts et contraintes de plusieurs entreprises : qui prendra en charge cette optimisation ? Qui sera à même d'assurer une approche sérieuse du coût global, alors que le seul coût logistique interne d'une entreprise est encore à ce jour si mal appréhendé ?

- Cet accroissement et cette diversification des flux et des partenaires renforcent encore le souci et la complexité de la traçabilité des produits et des matières. Les systèmes d'informations actuels des entreprises sont-ils adaptés ?

- La nécessaire prise en compte des opérations de soutien, recyclage, récupération en fin de vie, dès la conception du produit, suivant l'approche du SLI, rend indispensable la présence de logisticiens dans toutes les phases du cycle de vie du produit. La plupart des entreprises doivent encore en prendre conscience et l'accepter ; il faut aussi que les logisticiens le comprennent et qu'ils en aient la compétence.

3 DIVERSES STRATEGIES POUR LA REVERSE LOGISTIQUE

Depuis quelques années, la reverse logistics occupe une place de plus en plus importante au sein des services logistiques des entreprises européennes, notamment dans les secteurs ou les flux de retour sont les plus importants, tels que la vente par correspondance et le commerce électronique, mais aussi l'électroménager et l'électronique. Dans cette partie, nous décrirons de manière synthétique les stratégies utilisées actuellement afin d'améliorer les flux de retour de marchandises. Nous ne parlerons que des éléments stratégiques associés à la problématique du mémoire (les DEEE).

Pour certaines entreprises, les coûts liés aux flux de retour peuvent réduire de manière considérable les bénéfices réalisés, parfois jusqu'à rendre la transaction initiale non rentable. Ces entreprises doivent désormais comprendre l'importance et le rôle stratégique de la reverse logistique. Les gestionnaires doivent s'atteler à la réduction de ces coûts, en améliorant certains aspects de leur logistique des retours :

- Rendre plus efficientes les technologies de filtrage, ou « gatekeeping technologies ». - Accélérer les prises de décisions quant à l'élimination des déchets.

- Accélérer les temps de cycle.

- Améliorer la gestion des données.

La manière la plus efficace de diminuer les coûts liés aux retours de marchandises consiste tout simplement à réduire le volume des produits à retourner. Pour ce faire, l'entreprise doit empêcher les produits non qualifiés d'entrer dans ces flux. De plus, une fois les bons produits intégrés dans les flux, elle doit les lui faire traverser le plus vite possible.

3.1 Réduire les flux de reverse logistique

De nouvelles techniques ont été développées afin d'être certain que tous les produits qui entrent dans les flux de reverse logistics remplissent les conditions requises pour être dans le système. On en cite quelques unes :

- Les technologies de filtrage d'accès aux flux à rebours.

- La gestion du cycle de vie des produits.

- Les systèmes d'information.

- Les échanges de données informatisées.

- Une conception adaptée à la reverse logistique.

3.1.1 La gestion du cycle de vie des produits

La gestion du cycle de vie des produits implique pour l'entreprise la mise en place de l'appui logistique et du marketing approprié aux différents stades du cycle de vie du produit (lancement, croissance, maturité, déclin). Selon le stade où se trouve le produit, l'entreprise doit effectuer une gestion et un appui différent. En fin de vie du produit notamment, les coûts de détention de stocks associés vont très fortement augmenter. Les coûts d'obsolescence et d'entreposage vont être majoritairement responsables de la forte augmentation de ces coûts.

Les entreprises doivent donc anticiper la fin de vie de leurs produits dès qu'il a dépassé le stade de croissance, afin qu'un moindre volume devienne obsolescent et entre dans les flux à rebours.

3.1.2 Les technologies de filtrage d'accès aux flux à rebours

Le filtrage d'accès, ou « gatekeeping », correspond au processus de décision quant aux produits à admettre ou non dans le système de retour. L'amélioration de ce filtrage va permettre la réduction du volume de marchandises retournées et, par là même, la diminution des coûts globaux liés aux flux retours. Cette amélioration passera également par une formation adéquate des employés concernés.

Une des techniques utilisée par exemple aujourd'hui pour améliorer le filtrage d'accès consiste à la mise en place d'un réseau internet ou intranet guidant l'employé dans la procédure de retour de chaque produit.

3.1.3 L'échange de données informatisées

Même si de très nombreuses entreprises utilisent aujourd'hui l'échange de données informatisé (EDT), elles ne considèrent pas toujours comme primordial un investissement pour fonctionner également en EDT quant à la gestion des flux retours. Pourtant, l'EDT peut être aussi utilisé pour automatiser le traitement des retours.

3.1.4 Conception adaptée à la reverse logistics

Les entreprises, aujourd'hui, adaptent souvent leurs produits pour rendre certaines opérations plus faciles et donc moins coûteuses. On parle ainsi de conception adaptée à la fabrication (« Design For Manufacture ») ou encore de conception adaptée à la gestion de la chaîne logistique (« Design For Supply Chain Management »). Depuis peu, on commence à voir apparaître la conception adaptée à la reverse logistics (« Design For Reverse Logistics »).

Par exemple, l'entreprise adapte l'emballage du produit pour faciliter son retour. Elle peut aussi encourager le consommateur à rendre le produit avec son emballage d'origine ou à ramener un produit en fin de vie lorsqu'il désire en acheter un neuf.

La conception adaptée à la reverse logistics consiste donc à tenir compte des besoins en reverse logistics dans la conception et l'emballage du produit, autrement dit à intégrer besoins de reverse logistics et besoins de protection de l'environnement d'une part, et produit et chaîne de reverse logistics d'autre part.

On voit s'accentuer très fortement depuis un an les discussions dans les entreprises sur une telle conception, suite à l'adoption de la loi sur les DEEE (Déchets d'Equipements Electriques et Electroniques ; cf. Partie II) obligeant les entreprises à intégrer dans un cycle de retour (valorisation, recyclage, etc.) tous les produits concernés.

3.2 La gestion des flux logistiques retour

Afin de gérer de manière efficace les flux retours des produits, les entreprises doivent notamment diriger leurs réflexions vers l'externalisation des retours et les marchés secondaires.

3.2.1 L'externalisation des retours

L'externalisation de la gestion des retours reste avantageuse pour les PME et pour les grandes entreprises n'ayant pas acquis les moyens, les compétences et l'expérience requise pour effectuer une gestion des retours aux meilleurs coûts. En effet pour ces entreprises, il est moins cher de faire appel à des partenaires que de gérer elles-mêmes leurs retours.

Les entreprises qui se sont intéressées aux processus de reverse logistics ne décentralisent pas toujours physiquement leurs centres de gestion des retours ; elles décentralisent son contrôle.

3.2.2 Les marchés secondaires

On appelle marchés secondaires tous les intermédiaires, distributeurs et détaillants spécialisés dans les produits qui ont déjà été vendus ou proposés à la vente au détail. Dans le premier cas, les produits sont généralement réparés, reconditionnés avant d'être revendus. Dans le second cas, plutôt que de faire entrer ces produits dans le cycle coûteux des retours, certains gestionnaires optent aujourd'hui pour leur vente à l'une des nombreuses entreprises présentes sur le marché secondaire. Cette opération est désignée sous le terme de recouvrement d'investissement ou d'actifs. Pour ces entreprises qui écoulent de manière organisée et efficace leurs produits sur le marché secondaire, le recouvrement d'actifs est devenu une source importante de ressources : il peut représenter jusqu'à 20 à 25% des bénéfices nets.

En France, les consommateurs sont de moins à moins réticents à réaliser des achats dans ces magasins secondaires. L'augmentation de 13% en 2005 des parts de marché de ce segment en témoigne clairement.

Enfin, une dernière solution consiste à proposer ces produits sur des sites web de ventes aux enchères (le site phare Ebay a d'ailleurs réalisé un CA de 5,8 milliards d'euros en 2005). Ces ventes sur internet présentent néanmoins deux inconvénients majeurs : les clients sont exclusivement des ménages d'une part et d'autre part l'image de l'entreprise peut se trouver diminuée.

4 LA MISE EN OEUVRE OPERATIONNELLE DE LA REVERSE LOGISTIQUE

Les solutions de reverse logistics mises en oeuvre par les entreprises aujourd'hui sont souvent très hétérogènes. On observe cependant plusieurs grandes familles d'activités qui mettent en place des solutions homogènes.

Activités et exemple
de sociétés.

Coûts relatifs

Solutions de reverse
logistique

R&D

Production

Logistique

Produit à forte VA et
de haute technologies
(Canon, HP, Samsung)

Elevés

Faibles

Faibles

Recherche d'une diminution
des coûts au niveau des
matières et composants.
Réduction de la génération
de déchets.

Produits de haute
technologie à
obsolescence très
rapide (Macintosh,
Dell, Sony)

Modérés

Elevés

Elevés

Réseaux de distribution
organisés pour traiter les
retours

Distribution directe
(VPC)

Quasi-
inexistants

Quasi-
inexistants

Très
élevés

Système de traitement des
retours dédies

Consommables à
durée de vie courte
(fabricants de
batteries)

Modères

Elevés

Modérés

Intégration du facteur
reverse logistique des la
phase de conception du
produit.

Industrie de la peinture

Faibles

Faibles

Faibles

Pas de prise en compte mais
pression environnementale

Tableau 5 : Approche comparative des logistiques de retours par familles de produits

On observe grâce à ce tableau que les organisations mises en place pour traiter les flux retours peuvent être très différentes d'une famille d'activités à l'autre ou d'un produit à un autre.

Trois exemples de secteurs qui ont très vite été obligés de mettre en place des solutions de reverse logistique sont présentés par la suite.

1 Philippe-Pierre Dornier, Michel Fender (2001), La Logistique Globale - Enjeux, Principes, Exemples, Edition d'Organisation.

4.1 L'automobile

Depuis plusieurs années, l'industrie automobile s'est attelée à mettre en place une organisation efficace des retours pour tous ses produits. Lorsqu'une voiture est retirée du marché, toute la chaîne logistique retour se met en marche : déconstruction et désassemblage, tri, réparation, remise dans le cycle direct, recyclage ou rejet des déchets ultimes.

Certains constructeurs automobiles ont d'ores et déjà créé des centres uniques de démontage, distribution et service de pièces et véhicules usagés. C'est le cas de Mercedes-Benz à Obertürkheim, près de Stuttgart en Allemagne.

4.2 Les produits de consommation courante

La grande distribution et ses fournisseurs sont très régulièrement confrontés aux problèmes des flux retours : marchandises invendues, marchandises défectueuses, produits d'emballage destinés au recyclage, etc. Ils ont donc créé des centres logistiques en charge de la gestion de ces flux et des procédures pour en diminuer le volume. La plus grande attention est portée au traitement des emballages, car ils peuvent représenter jusqu'à 1,5% du CA. Une entreprise suisse, Migros, est vue comme la référence européenne de la réduction et de retour des emballages : elle a remplacé en 1964 la grande majorité de ses cartons par des bacs en plastique, ce qui lui fait économiser 60 000 tonnes de cartons par an. Rien de tel n'a encore été mis en place en France, mais les initiatives se multiplient. Ecovalor par exemple, un GIE, s'est doté d'une usine pour traiter les déchets de cartons et de plastique de plus de 40 magasins de l'Ouest de la France. Cet investissement a permis de diviser par 4 les coûts de retraitement. Les déchets sont triés par les magasins et collectés plusieurs fois par mois. Ils sont ensuite retriés à l'usine puis passent dans une presse. Ecovalor peut ainsi produire 500 tonnes de cartons et 75 tonnes de plastique par mois. Ces matières sont ensuite revendues à des sociétés spécialisées.

4.3 Les produits électroniques

Depuis août 2005, les fabricants de produits électroniques sont obligés par la loi sur les DEEE (cf. Partie II) de mettre en place ou de financer des circuits de traitement des produits électroniques en retour (récupération, revalorisation, recyclage, etc.).

Certaines grandes entreprises du secteur n'avaient pas attendu la loi pour s'organiser. Hewlett Packard, par exemple, a mis en place un grand programme visant à réduire ses déchets et à limiter les coûts induits par leur traitement. Ainsi, près de 2 000 tonnes de matériels sont traités tous les mois dans les sites de Grenoble en France et de Tübingen en Allemagne. Cela représente 99% du poids de tous les produits retournés.

Dans les télécommunications, certaines entreprises ont confié leur logistique à des prestataires logistiques, qui s'occupent alors aussi des flux retours. C'est le cas de France Telecom par exemple. Un entrepôt unique a été créé pour stocker les retours et organiser un transport adapté à ce flux. Cet entrepôt va permettre, depuis les agences commerciales, de prendre en charge les terminaux destinés à la réparation, au service après-vente ou à la destruction. France Telecom traite ainsi jusqu'à 20 000 terminaux par jour.

Pour un produit consommable tel que les cartouches d'encre, les fabricants ont progressé non seulement sur l'impulsion des contraintes écologiques et légales, mais aussi du fait de l'intérêt financier présenté par le reconditionnement des cartouches usagées. En effet, une cartouche recyclée peut être revendue à hauteur de 50% de son prix initial avec un coût de retraitement intermédiaire relativement faible. Canon a été le premier fabricant de cartouches d'encre à mettre en place un schéma logistique dédié au retraitement de ses cartouches.

PARTIE II : LA REVERSE LOGISTIQUE ET LES DEEE

Nos objectifs dans cette partie II sont :

- de présenter les éléments réglementaires de la Directive et des arrêtés correspondants sur les DEEE.

- de préciser en quoi cette nouvelle réglementation va impacter les stratégies et organisations logistiques actuelles de cette filière.

- de définir les acteurs concernés (distributeurs, industriels, prestataires de services logistiques, institutionnels,...).

- Et enfin, de présenter l'articulation générale de la filière en termes de flux financiers et de flux physiques et de positionner les acteurs.

1 LA DIRECTIVE DEEE

Dans un premier temps, il est nécessaire de préciser les textes législatifs de référence connus à la date du mémoire, de définir le périmètre des DEEE concernés (définitions, volumétrie, champs et dates d'application), et de faire une lecture de la Directive en relation avec nos problématiques logistiques (obligations à la charge des acteurs, recensement des activités de traitement, recyclage et logistique nécessaires, etc.).

1.1 Origine de la loi française

Après les emballages ménagers, les pneus, les piles et les batteries, c'est aujourd'hui le tour des Produits Electroniques et Electriques en Fin de Vie (PEEFV). D'une part, il est estimé que chaque Français produit chaque année 13 kg de déchets de type DEEE ménagers (réfrigérateurs, machines à laver, téléviseurs, ordinateurs, grilles pain, perceuses...). Cette quantité produite augmente de 4% chaque année, soit un rythme de croissance beaucoup plus élevé que celui de l'ensemble des déchets ménagers. D'autre part, les DEEE professionnels sont estimés à un équivalent 13 kg/hab./an. Le potentiel total de DEEE à traiter s'élève à 26 kg/hab./an. Pourtant, les modes d'élimination actuels ne sont pas toujours adaptés à ces déchets, dont beaucoup contiennent des substances dangereuses. De ce fait, il devenait nécessaire de mettre en place un système plus adéquat.

Le Décret français transpose deux Directives européennes 2002/96/CE en date du 27 janvier 2003, modifiée par la directive 2003/108/CE, et 2002/95/CE (harmonisant les législations nationales des Etats Membres en matière de limitation de l'utilisation de substances dangereuses), et fixe le cadre de la mise en place de collectes sélectives et d'un traitement adapté.

1.2 Les textes de référence : La Loi française du 20 juillet 2005 et ses décrets d'application parus

Le décret relatif à la composition des équipements électriques et électroniques et à l'élimination des déchets issus de ces équipements, a été publié au journal officiel du 22 Juillet 2005 (Décret n° 2005-829 du 20 juillet 2005 relatif à la composition des équipements électriques et électroniques et à l'élimination des déchets issus de ces équipements). Le texte complet est présenté en Annexe 1.

Directive 2002-95
ROHS

Directive 2002-96
WEEE

Arrêté du 25/11/05 (substances)

Arrêté du 6/12/05 (agréments ménagers)

Transposées par

Arrêté du 23/11/05 (agréments pro)

Arrêté du 23/11/05(modalités traitement)

Arrêté du 13/03/06 (registre)

 
 

Décret
2005-829
DEEE

 

Complété
par

Art- L541-10-2 Code Envt (LRF 2005)

 
 

Avis du 26/10/05 (Annexe 2)

Décret 2005-1472 (Plans départementaux)

 
 
 

Figure 5 : Articulation des Directives et Arrêtés (Source ADEME)

Les arrêtés accompagnants sont les suivants :

- Arrêté du 23 novembre 2005, relatif à l'agrément prévu à l'article 19 du décret n° 2005-829 du 20 juillet 2005.

- Arrêté du 23 novembre 2005, relatif aux modalités de traitement des déchets d'équipements électriques et électroniques prévues à l'article 21 du décret n° 2005- 829 du 20 juillet 2005.

- Arrêté du 25 novembre 2005, fixant les cas et conditions dans lesquels l'utilisation

dans les équipements électriques et électroniques substances dangereuses est autorisée. - Arrêté du 6 décembre 2005, relatif aux agréments et approbations prévus aux articles

9, 10, 14 et 15 du décret n° 2005-829 du 20 juillet 2005.

- Arrêté du 13 mars 2006, relatif au registre des producteurs.

En Annexe 3, sont précisé les liens Internet qui font référence à l'intégralité des textes législatifs.

1.3 Les DEEE : Déchets d'Equipements Electriques Electroniques

1.3.1 Définition des EEE - Equipements Electriques et Electroniques

On entend par équipements électriques et électroniques, les équipements finis fonctionnant grâce à des courants électriques ou à des champs électromagnétiques, ainsi que les équipements de production, de transfert et de mesure de ces courants et champs. Ces équipements sont conçus pour être utilisés à une tension ne dépassant pas 1000 volts en courant alternatif et 1500 volts en courant continu. Ils relèvent en outre des 10 catégories mentionnées ci-dessous :

1. Gros appareils ménagers

2. Petits appareils ménagers

3. Équipements informatiques et de télécommunications

4. Matériel grand public

5. Matériel d'éclairage (à l'exception des appareils d'éclairage pour tubes fluorescents domestiques et des ampoules à filament)

6. Outils électriques et électroniques (à l'exception des gros outils industriels fixes)

7. Jouets, équipements de loisir et de sport

8. Dispositifs médicaux (à l'exception de tous les produits implantés ou infectés)

9. Instruments de surveillance et de contrôle

10. Distributeurs automatiques

Une liste des produits EEE concernés par la Directive est jointe en Annexe 2 (<< Avis et communications du 26 octobre 2005 »).

Du point de vue de la classification commerciale, les équipements électriques et électroniques sont classés en 3 catégories :

- l'électroménager (ou produits blancs) comprend les appareils de lavage et de cuisson, les réfrigérateurs, les appareils de chauffage ainsi que les aspirateurs, machines à coudre, fers à repasser. Les appareils électroménagers constituent la part majoritaire des équipements électriques et électroniques.

- le matériel audiovisuel (ou produits bruns) recouvre les postes de radio et de télévision, les caméscopes et magnétoscopes, les chaînes hi-fi, les instruments de musique.

- l'équipement bureautique et informatique (ou produits gris) désigne les ordinateurs, les imprimantes, les scanners, les photocopieuses, les téléphones, répondeurs...

1.3.2 Définition des DEEE - Déchets Equipements Electriques et Electroniques

Selon l'article 2 du Décret, les DEEE sont définis comme << des équipements électriques et électroniques constituant des déchets au sens de l'article 1er, point A de la directive 75/422/CEE, y compris tous les composants, sous-ensembles et produits consommables faisant partie intégrante du produit au moment de la mise en rebut ».

La Directive précise aussi de manière distincte l'origine des DEEE, ménagers et professionnels :

o Sont considérés comme DEEE ménagers, les déchets issus d'équipements électriques et électroniques provenant des ménages ainsi que ceux d'origine commerciale, industrielle, agricole, institutionnelle ou autre, et qui, en raison de leur nature et de leur quantité, sont similaires à ceux des ménages.

o A contrario, sont considérés comme DEEE professionnels, ceux qui ne répondent pas à la définition de DEEE ménagers.

Enfin, les DEEE sont qualifiés d'« historiques », lorsqu'ils proviennent d'un équipement mis sur le marché avant le 13 août 2005.

Les DEEE ci-dessous sont exclus du champ d'application du décret :

- les EEE faisant partie d'un autre type d'équipement qui, lui, n'est pas un EEE au sens du décret.

- les EEE liés à la protection des intérêts essentiels de sécurité de l'Etat (les armes, les munitions et le matériel de guerre).

- Les dispositifs médicaux implantés et/ou infectés.

- Les gros outils industriels fixes.

- Les appareils d'éclairage domestiques et les ampoules à filament...

On inclut également dans les DEEE les consommables d'encre, représentés par environ 80 marques, chaque marque ayant plusieurs dizaines de références. On distingue :

- les consommables d'encre sèche (toner) : cartouches complexes ou simples de télécopieurs, copieurs, imprimantes et tambours photorécepteurs.

- les consommables d'encre liquide : cartouches simples, bidons et bouteilles pour imprimantes, tables traçantes.

On sortira de notre étude ce champ particulier de DEEE, puisque des organisations opérationnelles existent déjà (se reporter au groupement CONIBI porté par des grands industriels Xerox, Canon, etc.).

1.3.3 Volumétrie : Chiffres dlés

En 2000, les Français ont jeté environ 1,5 million de tonnes de produits électriques et électroniques. Le phénomène de stockage de ce type d'équipements et leur durée de vie très variable rendent la comptabilisation de ces déchets complexe. On estime néanmoins que le tonnage pourrait croître de 3 à 5 % par an.

Plus de 50 % de ces déchets sont issus des ménages, ce qui représente 13 kg/hab./an.

Gisement national de DEEE en 2000
Estimation en tonnes

Gros électroménager blanc

405 000

27%

Equipements électriques professionnels

345 000

23%

Câbles, batteries au plomb et autres...

300 000

20%

Equipements électroniques grand public, informatique

270 000

12%

Petit électroménager, téléphonie, luminaire

180 000

12%

Total

1 500 000

100%

Tableau 6 : Estimation du gisement national des DEEE en 2000

Le GIFAM (Groupement Interprofessionnel des Fabricants d'équipements d'Appareils Ménagers....) estime quant à lui que le parc existant (avant août 2005) est constitué de 145 millions de produits blancs et 280 millions de petits appareils ménagers.

1.3.4 Composition des DEEE

La composition des DEEE et les obligations de retraitement et de recyclage imposées par la Directive sont importantes pour la bonne compréhension du fonctionnement de la filière. En effet, la multiplicité des composants nécessite des opérations de pré tri et de tri diverses et variées, ainsi que des procédés de retraitement nombreux et complexes. Le niveau d'intégration verticale de ces activités au sein même de la filière aura un impact primordial sur la logistique (nombre de ruptures de charge et opportunités de massification de flux).

Figure 6 : Composition des DEEE (Source ADEME)

1.3.5 Les 5 flux principaux retenus pour classifier les DEEE

L'ensemble des acteurs professionnels du traitement et du recyclage semble d'accord pour segmenter les DEEE en cinq flux principaux correspondants à leur process de démantèlement et de traitement spécifique :

- le GEM Froid (gros électroménager froid), armoire congélation, réfrigérateur, ... tout équipement contenant un dispositif produisant des frigories.

- Les GEM hors froid (machine à laver, sèche linge, four, etc.), gros électroménager ne contenant pas de dispositif froid.

- Les écrans contenant des tubes cathodiques.

- Le PAM, petit appareil en mélange (unité centrale, sèche-cheveux, outillage électroportatif, friteuse, grille pain, radio, magnétoscope, etc.).

- Les Lampes.

Nous retiendrons pour la suite de ce mémoire cette classification des DEEE.

1.4 Synthèse : Que dit la Directive et en quoi cela impacte-t-il l'organisation logistique de la filière ?

1.4.1 Dispositions à la conception des EEE

La Directive précise que les EEE doivent être conçus et fabriqués de façon à faciliter leur démantèlement et leur valorisation. La réutilisation et le recyclage de ces équipements et de leurs composants et matériaux ne doivent pas être empêchés si ce n'est pour des motifs justifiés de sécurité ou d'environnement. D'ailleurs la valorisation, et plus particulièrement la réutilisation des DEEE, seront toujours préférées à leur destruction.

D'énormes progrès ont d'ores et déjà été réalisés par les industriels. L'enjeu pour ces derniers est aujourd'hui de concevoir et développer les produits EEE de manière à ce que leur taux de valorisation en fin de vie se rapproche de 100% (réutilisation, valorisation matière et énergétique) à un coût économiquement acceptable.

C'est un impact important puisqu'il permet de mieux réutiliser les actifs secondaires contenus dans les produits (intérêt pour les acteurs de se positionner sur ces activités) et de tenter de simplifier l'organisation logistique des DEEE (minimiser les opérations à non valeur ajoutée).

1.4.2 Traçabilité des DEEE

 

Chaque EEE mis sur le marché après le 13 août 2005 est revêtu du pictogramme de la « poubelle barrée » accompagné de la date ou d'un rectangle noir, permettant d'identifier son producteur et de déterminer que l'équipement a été mis sur le marché après le 13 août 2005.

Tous les DEEE (ménagers et professionnels) feront l'objet d'une traçabilité, mise en place par les acteurs, permettant de mesurer les tonnages de DEEE entrés dans la filière et ceux des matières valorisées et des déchets ultimes. Cela permettra notamment aux organismes de contrôle de déterminer les flux transitant dans la filière et de répondre aux objectifs de valorisation précisés par la Directive.

1.4.3 Collecte sélective des DEEE

Le Décret du 20 juillet 2005 reprend les éléments de la Directive européenne en précisant certains points laissés à l'appréciation des Etats Membres. Concernant les DEEE des ménages, la collecte doit s'effectuer essentiellement au travers :

- de la distribution, avec la reprise « un pour un ». Le distributeur a pour obligation, pour un produit EEE acheté par le consommateur, de reprendre un produit en fin de vie de même nature.

- des collectivités locales, qui disposent déjà de structures de collecte importantes au titre de leur obligation de collecte auprès des ménages. Lorsqu'elles mettront en place une collecte sélective des DEEE, ces dernières bénéficieront d'une compensation de coûts afférents à cette collecte, au travers d'un organisme coordonnateur.

Les producteurs pourront remplir ces obligations soit collectivement, en créant ou en adhérant à un Eco-organisme agréé par les pouvoirs publics, soit individuellement, en mettant en place un système individuel approuvé dans les mêmes conditions.

Pour les DEEE professionnels, le Décret français octroie aux producteurs une plus grande souplesse, compte tenu des durées de vie très variables des appareils et de leurs spécificités. Le principe de responsabilité du producteur s'applique pour la gestion de la fin de vie de tous les appareils mis sur le marché à partir du 13 août 2005. Les producteurs doivent donc en assurer l'organisation et le financement, en adhérant à un organisme agréé, en mettant en place un dispositif individuel (ne nécessitant cependant pas d'approbation), ou par toute autre modalité prévue dans le contrat de vente.

Pour les déchets considérés comme historiques c'est à dire des produits mis sur le marché avant le 13 août 2005 la responsabilité en incombe aux utilisateurs sauf s'ils en ont convenu autrement avec les producteurs.

Enfin, la collecte des DEEE doit être compatible avec le mode de traitement et de valorisation. Sans collecte sélective, la valorisation matière devient plus difficile. D'ailleurs, la collecte sélective en vrac ne permet pas le réemploi des appareils entiers ou de certains de leurs composants. Il parait donc indispensable d'organiser la collecte en fonction du type de traitement qui sera opéré sur les produits (et notamment dans le cas de réutilisation).

1.4.4 Stockage des DEEE

Les DEEE collectés sélectivement devront être repris et entreposés dans des conditions propres à assurer leur tri, leur traitement sélectif et leur valorisation.

Si l'on admet que la collecte sélective est primordiale pour l'efficience globale de la filière, l'organisation des stockages des DEEE est un point essentiel à traiter en termes de :

- points de collecte, organisation du ramassage et centres de regroupement.

- choix des contenants de stockage des DEEE en relation avec la nature des produits

(rapport poids/volume, protection contre la casse, contre les intempéries et lien avec

les matières dangereuses éventuellement contenues dans ces produits).

1.4.5 Immatriculation au Registre National des producteurs

Un registre national des producteurs d'EEE est établi. Il recueille notamment les informations relatives sur :

- leur identification (raison sociale, SIRET, etc.).

- les EEE mis sur le marché, qu'ils soient fabriqués et/ou vendus sous leur marque propre ou qu'ils soient importés.

- le nom de l'Eco-organisme agréé auquel ils ont adhéré ou s'ils ont mis en place un système individuel.

- La déclaration des tonnages de DEEE ménagers suivant les 4 catégories principales et celle des DEEE professionnels suivant les 10 catégories de la Directive.

L'Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie (ADEME) est chargée de la mise en place, de la tenue et de l'exploitation de ce registre à des fins d'observation et de rapport. Le registre sera ouvert à compté du 1er septembre 2006 et les producteurs ont jusqu'au 1er décembre 2006 pour s'y déclarer.

1.4.6 Traitement, opérations de valorisation et réutilisation

1.4.6.1 Définitions

Le traitement selon l'article 3 de la Directive 2002/96 est défini comme « toute opération suivant l'arrivée des DEEE dans des installations de dépollution, de démontage, de broyage, de valorisation ou de préparation à l'élimination, ainsi que toute autre opération effectuée en vue de la valorisation et/ou de l'élimination des DEEE ».

Selon l'article 21 du Décret, les opérations de valorisation des composants, matières et substances sont « leur réutilisation, leur recyclage, ou leur utilisation comme source d'énergie primaire dans l'installation ».

Enfin, la réutilisation est définie dans l'article 3 de la Directive comme « toute opération par laquelle des DEEE, ou leurs composants, sont utilisés pour le même usage que celui pour lequel ils ont été conçus, y compris la poursuite de l'utilisation des équipements ou des composants déposés aux points de collecte, chez les distributeurs, chez les recycleurs ou chez

les fabricants ». Les produits, qui ne sont plus alors des DEEE, sont remis dans des canaux de distribution spécifiques et s'adressent principalement à des marchés de seconde main.

1.4.6.2 Nature des traitements

Après regroupement sur plateforme et tri en cinq familles (GEM froid, GEM, PAM, tubes, Lampes), les DEEE vont subir deux types de traitements principaux :

- La dépollution phase 1, regroupant les opérations de retrait des câbles électriques extérieurs, des huiles de compresseur, des piles et accumulateurs, des lampes, des cartes circuits imprimés (>10 cm2), des tubes cathodiques et écrans à cristaux liquides (>100 cm2), des mercures (interrupteurs, lampes), des condensateurs au PCB et ceux contenant des substances dangereuses (25mm x 25mm), de l'amiante, des plastiques bromés, des CFC et ses dérivés, des composants contenants des fibres céramiques réfractaires (FCR) ou des produits radioactifs.

- La dépollution phase 2 : valorisation des éléments spécifiques en filières spécialisées (cartes électroniques, tubes, mousses isolantes et toutes substances dangereuses au sens de la Directive), et démantèlement final des DEEE manuel ou par broyage et tri mécanisé permettant de valoriser quatre principales familles de matières premières (les métaux, les métaux non ferreux, les plastiques, et les verres).

La configuration de la filière sera aussi fonction de la chaîne de valeur créée et dépendra : - de la valeur des prestations de traitement (de faible à fort) et de la valorisation des

matières retirées (présence ou pas de matières précieuses conférant à ces produits une

valeur marchande en fin de vie).

- du positionnement volontariste des acteurs sur tout ou partie des cinq flux de DEEE considérés.

Ces quelques exemples non exhaustifs nous montrent la diversité des traitements, des modes de valorisation et de destruction des DEEE collectés sélectivement. Ceci va sous-tendre des organisations logistiques internes et externes complexes, suivant le niveau d'intégration des activités de la filière. De plus, ces activités doivent être effectuées dans des installations

classées, répondant à des exigences techniques rigoureuses, et respectant les dispositions du titre 1er du Livre V du Code de l'Environnement.

Ces opérations peuvent également être effectuées dans toute autre installation autorisée à cet effet dans un autre Etat Membre de l'Union Européenne, ou dans un autre Etat dès lors que le transfert transfrontalier de ces déchets est conforme aux dispositions du règlement du 1er février 1993. Les opérations de traitement sélectif, de valorisation et de destruction sont effectuées conformément aux dispositions du Décret en question.

1.4.7 Objectifs donnés par la Directive.

Au plus tard le 31 décembre 2006, les producteurs d'EEE devront atteindre les objectifs de valorisation et de recyclage/réutilisation suivants :

- Un taux moyen de collecte de DEEE ménagers de 4 kg/habian ; pour les professionnels ni seuil ni limite.

- Le taux de valorisation est fixé à 80% au moins en poids moyen par appareil pour les DEEE relevant des catégories 1 et 10, à 75% pour ceux relevant des catégories 3 et 4, et à 70% pour ceux relevant des catégories 2, 5, 6, 7 et 9.

- Le taux de recyclage/réutilisation des composants, des matières et des substances est fixé à 75% au moins en poids moyen par appareil pour les DEEE relevant des catégories 1 et 10, à 65% pour ceux relevant des catégories 3 et 4, et à 50% pour ceux relevant des catégories 2, 5, 6, 7 et 9.

- Pour les lampes à décharge, le taux de recyclage/réutilisation des composants, des matières et des substances est fixé à 80% au moins en poids des lampes.

Tableau 7 : Objectifs fixés par la Directive en termes de recyclage et de valorisation

Enfin, pour chaque type de nouvel EEE mis sur le marché après le 13 août 2005, les producteurs tiennent à la disposition des exploitants les informations dont ils ont besoin pour la réalisation des opérations de traitement et de valorisation.

2 LES ACTEURS CONCERNES

Il nous parait maintenant important de définir l'ensemble des acteurs intervenants ou amenés à intervenir sur ce marché en devenir, et provenant d'origines diverses :

- les spécialistes du traitement des déchets (Veolia Propreté, Sita Suez, centres de tri

locaux,...).

- les prestataires de services logistiques (Geodis, TNT Logistics,...) en charge des opérations de collecte, regroupement ou transport.

- les industriels (au sens « producteurs d'EEE »).

- les consommateurs en tant qu'« Eco-citoyens ».

- les distributeurs (grande distribution spécialisée ou pas).

- les municipalités et collectivités territoriales.

- l' « économie sociale et solidaire ».

- les Eco-organismes comme acteurs de coordination, pilotage et financement.

- les acteurs institutionnels nationaux (ADEME, JESSICA) ou régionaux (comme la Meito sur l'Ouest de la France).

- les syndicats et fédérations professionnelles (AFEEIT, FCD, GIFAM, FEDEREC) pour les rôles d'animation, de communication voire de facilitateur.

2.1 Les producteurs

Le terme producteur (quelle que soit la technique de vente utilisée, y compris par communication à distance) comprend, selon l'article 3 du Décret français, « toute personne qui fabrique, importe ou introduit sur le marché national à titre professionnel des EEE sauf si ces équipements sont vendus sous la seule marque d'un revendeur. Dans ce cas, le revendeur est considéré comme producteur ».

Darty, par exemple, lorsqu'il commercialise des EEE de grandes marques telles que Sony, Philips ou LG, est considéré comme un distributeur (se reporter au point suivant pour la définition). Mais lorsqu'il commercialise des produits EEE sous sa marque de distributeur MDD, Darty est alors considéré comme un producteur.

Cette Directive, introduisant le principe de responsabilité du producteur, leur impose donc :

- pour les DEEE ménagers, au moins le financement de la collecte, du traitement, de la valorisation et de l'élimination des DEEE à compter du 13 août 2005.

- pour les DEEE professionnels, le financement de la collecte, du traitement, de la valorisation et de l'élimination non polluante des DEEE issus d'équipements mis sur le marché après le 13 août 2005.

L'intérêt des producteurs, à l'instar des filières de traitement de déchets existantes (piles, pneus, emballages, etc.) est de confier l'ensemble des activités à une filière spécialisée, dans le cadre réglementaire qui est établit par la Directive et ses documents liés. En clair, tout producteur a la possibilité de remplir les obligations qui lui incombent, en adhérant à un Ecoorganisme.

2.2 Les distributeurs

Au sens de l'article 3 du Décret, les distributeurs sont définis comme « toute personne qui, quelle que soit la technique de distribution utilisée, y compris par communication à distance, fournit à titre commercial des EEE à celui qui va les utiliser ». Il est à noter que la Directive ne définit pas explicitement les grossistes et les installateurs, et donc leurs obligations réglementaires respectives.

Les distributeurs sont majoritairement définis par les GM (Grands Magasins), les GSA (Grandes surfaces alimentaires : supermarchés à partir de 400m2, hypermarchés au delà de 2500 m2), les GRS (Grossistes), les GSB (Grandes surfaces de Bricolage), les GSS (Grandes surfaces spécialisées), les PSS (Petites surfaces spécialisées) et la VPC (vente par correspondance par tous canaux, y compris électronique).

Avec la règle du << un pour un >>, les distributeurs sont un acteur majeur puisqu'ils vont contrôler près de 50 % du flux d'entrée à la filière DEEE1, en autorisant ou pas les DEEE à entrer dans la filière et en réalisant un premier réseau de points de collecte sélective.

Ils sont, ou vont être confrontés à de nombreuses problématiques liées :

- à la volumétrie produite par chaque point de vente (de faible à élevée)

- à la diversité des DEEE collectés (GEM hors froid, GEM froid, PAM, écrans et lampes) et leurs caractéristiques (rapport poids/volume).

- à la nécessité d'un entreposage de DEEE pour conserver leur intégrité pour un éventuel réemploi futur et pour limiter les risques de fuites de substances dangereuses (mise à disposition de surface dans le magasin).

- à la mise en oeuvre de divers contenants adaptés.

2.3 Les professionnels du traitement des déchets

Ces professionnels sont de deux ordres : les grands groupes internationaux et les acteurs à vocation locale et régionale.

- les grands groupes internationaux : Veolia propreté ou Sita Suez. Cette typologie d'acteurs aura un rôle structurel en termes de mise en place de nouvelles capacités industrielles au plan national pour répondre à la demande de traitement de DEEE en volume et en nature de traitement non disponible en France. L'un des enjeux pour ces derniers sera de s'appuyer sur un réseau logistique optimal, pour acheminer à moindre coût, après collecte, les flux entrants de DEEE.

- les acteurs locaux et régionaux du traitement des déchets, qui bien souvent dans un rôle de proximité, auront leur positionnement à défendre dans la chaîne de valeur de la filière future.

1 Initiative Recyclage® Rapport final, Septembre 2004, Société SCRELEC http://www.screlec.fr

<< Etude pour une filière de recyclage des déchets d'équipements électriques et électroniques sur le territoire national >> Laetitia Flahaut, Bertrand Reygner, Vanessa Montagne, Eric Legrand, Sylvain Riffe.

2.4 Les prestataires de services logistiques

Deux typologies d'acteurs sont ici aussi présentes, les PSL internationaux et les transporteurs. Dans le premier cas, on va trouver des acteurs comme Geodis, DHL, Exel, Kuehne&Nagel qui ont déjà des activités propres en reverse logistics sur d'autres filières et créent pour la plupart des cellules propres aux DEEE. Ils vont se positionner :

- sur des activités purement logistiques : la collecte, le transport et le regroupement sur des plateformes en y ajoutant parfois du tri (et entrent de ce fait en concurrence avec les professionnels du traitement des déchets).

- N'étant pas (encore) compétents pour réaliser l'ensemble de la chaîne, ils doivent travailler en partenariat avec des sociétés qui assurent le tri, le recyclage ou la valorisation (objet de la joint-venture Valogistic entre Sita et Geodis).

- comme intégrateur et pilote de l'ensemble des activités d'une filière de reverse logistics de DEEE, maîtrisant les flux physiques, d'informations et financiers sur un périmètre d'activités et/ou géographique qui leur aura été confié, en utilisant leurs ressources internes et des acteurs externes. Comme le souligne P. Andrieu, « c'est un peu comme du 4PL a l'envers ».

Les logisticiens et transporteurs en propre, ou intégrés à des structures déjà existantes, auront un rôle de service « de proximité », par la mise en place de circuits de collecte avec des moyens adaptés à la zone de chalandise en termes de tonnage et de fréquence d'enlèvement. Ils seront aussi utilisés en moyens complémentaires pour des collectes ponctuelles, et seront éventuellement sollicités comme variable d'ajustement pendant les phases de montée en charge de la filière (surface de stockage, plateforme, autres prestations logistiques).

2.5 Les Eco-organismes

Bien souvent créés à l'initiative des industriels, ils prendront en charge pour le compte des producteurs qui y adhèrent, l'enlèvement et le traitement des DEEE collectés sélectivement. Quand la concertation avec les différentes parties prenantes (collectivités locales, producteurs, représentants de l'économie sociale et solidaire) sera achevée, les pouvoirs publics pourront agréer les organismes concernés et le système deviendra alors opérationnel. L'agrément des Eco-organismes est délivré pour une durée maximale de 6 ans renouvelable.

Cinq Eco-organismes sont candidats à l'agrément des pouvoirs publics concernant les DEEE ménagers :

- ECOLOGIC (Brother, Fujifilm, Kodak, Sagem, FICIME Conseil), tous DEEE hors lampes.

- ECO-SYSTEMES1 (FDC, GIFAM, SIMAVELEC), tous DEEE hors lampes et GEM. - EUROPEAN RECYCLING PLATEFORM ERP2 (Brau-Gillette, Electrolux, HP, Sony), tous DEEE hors lampes et GEM.

- ECOPLANETS 3, tous DEEE hors lampes.

- RECYLUM4 (GE, OSRAM, Philips Lighting, Sylvania), toutes lampes et luminaires.

Certains d'entre eux, notamment ECO-SYSTEMES, ECOLOGIC et ERP, ont lancé leurs appels d'offres pour retenir les différents prestataires.

Trois Eco-organismes se positionnent, semble-t-il aujourd'hui, plus particulièrement sur les DEEE professionnels : CONIBI 5 (cartouches d'encre), SCRELEC6 (piles et batterie) et RESYSTEMPRO7.

Enfin, un unique organisme coordonnateur sera nommé. D'origine vraisemblablement publique ou parapublique, il aura pour objectif :

- de collecter les informations fournies par les différents Eco-organismes, d'agréger les données, de les comparer aux objectifs de collecte et traitement fixés dans la Directive et de les transmettre aux instances européennes.

- de jouer un rôle de coordination entre les différents acteurs de la filière (organisation de la filière, suivi des négociations, répartition des flux financiers, plans d'actions à l'échelon national, suivi de montée en charge de la filière,...).

2.6 L'Economie « Sociale et Solidaire »

1 http://www.eco-systemes.fr

2 http://www.erp-recycling.org

3 http://www.ecoplanets.fr

4 http://www.recylum.com

5 http://www.conibi.fr

6 http://www.screlec.fr

7 http://www.recystempro.com

Sous l'appellation Economie Sociale et Solidaire se regroupent les entreprises qui tentent collectivement de concilier efficacité économique et solidarité. Les entreprises se caractérisent par :

- des objectifs : travailler autrement dans le cadre d'une démarche volontaire et collective, redonner à l'économie sa finalité première, la satisfaction des besoins des hommes, ne pas gaspiller les ressources naturelles, ne laisser personne sur le bord de la route, inscrire les actions dans une préoccupation à la fois locale et planétaire.

- des principes de fonctionnement spécifiques (le capital détenu est considéré comme une propriété collective, les objectifs de rentabilité sont limités, etc.) et des statuts juridiques de type coopératif, mutuel ou associatif.

2.7 Les municipalités et collectivités territoriales

Même si la Directive ne précise pas de caractère obligatoire à la collecte des DEEE en déchetterie, les municipalités et les collectivités territoriales sont (seront) au premier plan en termes de collecte des DEEE ménagers, et ceci pour plusieurs raisons :

- elles ont déjà des compétences fortes sur la collecte des déchets ménagers en général et représentent pour le consommateur un point de dépôt naturel des DEEE en complément des autres déchets ménagers.

- le maillage du territoire est réalisé en termes de déchetteries même si aujourd'hui les surfaces spécifiques pour les DEEE et les conditions de stockage des DEEE en déchetterie ne sont pas encore satisfaisantes.

- L'étude Initiative recyclage1 à Nantes a montré que près de la moitié des flux de DEEE ménagers est collecté en déchetterie.

2.8 Le citoyen consommateur

Le consommateur, par son geste citoyen, sera de manière indirecte un artisan du bon fonctionnement de la filière. En effet, il pourra soit remettre sans frais aux distributeurs un équipement usagé lors de l'achat d'un équipement neuf du même type, soit le déposer aux points d'apport en déchetterie.

1 Initiative Recyclage®

L'Initiative Recyclage à Nantes a ainsi permis d'atteindre le taux de 4,7 kg/hab/an sur les 12 derniers mois de l'étude (après 12 mois de période de montée en charge). La mise en oeuvre de moyens spécifiques a été un des facteurs clés du succès de cette expérience (définition et signalisation d'une zone DEEE en déchetterie, une campagne d'informations, notamment sur la réglementation et les circuits de reprise et de collecte, et de communications ciblées auprès du grand public).

3 L'ARTICULATION GENERALE DE LA FILIERE

Après avoir présenté de manière générale l'ensemble des acteurs, nous proposons de décrire l'organisation globale de la filière en termes de flux financiers et de flux physiques, telle qu'elle devrait être mise en place dans l'application actuelle des textes réglementaires.

Les schémas prennent en compte le flux DEEE ménagers dans la mesure où la Directive DEEE précise le plus d'éléments factuels permettant de décrire la future filière.

Concernant les DEEE professionnels, et bien que les obligations de collecte et de traitement à la charge des producteurs soient les mêmes, la Directive laisse beaucoup plus de latitude dans l'organisation de la collecte (sans approbation des systèmes de collecte mis en place par les pouvoirs publics) et les moyens à mettre en oeuvre pour le traitement et la valorisation. Les volumes importants de DEEE collectés et triés à la source seront dans la plupart des cas acheminés directement sur les mêmes centres de traitement.

3.1 Les flux financiers des DEEE ménagers

Pour illustrer cet enjeu, le GIFAM estime que deux questions essentielles sont au coeur de cette problématique : Combien cela va-t-il coûter ? Comment seront-ils financés ? En l'état actuel de l'interprétation des textes et au regard des modèles proches d'élimination des déchets (notamment de la filière Eco-Emballages), le modèle économique de la filière DEEE devrait être proche de celui exposé ci-après.

Nous pouvons faire les commentaires suivants :

- La contribution visible pour les historiques (qui fait débat entre les acteurs) sera vraisemblablement temporaire. A terme, les coûts de traitement des DEEE devraient être directement intégrés au coût du produit et à la charge des producteurs.

- Les producteurs, à terme, paieront une contribution directement aux Ecoorganismes s'ils y adhèrent, en fonction probablement des volumes mis sur le marché et déclarés annuellement au registre des producteurs.

- La dîme récoltée permettra de financer la collecte en déchetterie (aucun modèle à notre connaissance décrit aujourd'hui). Elle financera également les deux principaux opérateurs logistiques d'une part et de traitement d'autre part, pour les prestations réalisées.

Ménages

Achat EEE / paie la contribution visible (pour les historiques)

Distributeurs

Remontent contribution
visible à l'identique

Compense les coûts de
collecte sélective

Organisme
coordonnateur

Eco-organismes

Sélectionnent
(appels d'offres)

Paient pour les prestations réalisées (enlèvement/regroupement/traitement)

Collectivités locales

Producteurs

Versent

cotisation

Contribuent

Opérateurs logistiques

Opérateurs traitement

Figure 7 : Organisation des flux financiers dans la future filière (Source ADEME)

3.2 Les flux physiques DEEE ménagers

De manière générale, le schéma des flux physiques proposé ci-dessous comprend trois niveaux : la collecte, la logistique et le traitement.

Niveau collecte

Ménages

Déchèterie
Fixe/mobile

Collectivités locales Distributeurs

Collecte de
proximité

Réutilisation / dépollution / recyclage / valorisation

Enlèvement

Retour
magasin

/ regroupement/transport

Démantèlement?

Reprise
livraison

Association

Système
propre
producteur

Niveau
logistique

Niveau
traitement

Figure 8 : Schéma des flux physiques de la future filière (Source ADEME)

3.2.1 Le niveau collecte

Les collectivités territoriales et les distributeurs seront vraisemblablement les deux principaux points d'entrée des DEEE dans la filière. Pour les seconds, il s'agit du principe du « un pour un » qui devrait monter en régime dès lors que des actions d'informations et de formation seront entreprises auprès des vendeurs de ces réseaux spécialisés. N'oublions pas qu'à l'achat d'un EEE, le vendeur aura l'obligation de proposer de reprendre le matériel précédent.

Les collectivités territoriales semblent dans l'ensemble prêtes à jouer leur rôle en termes de collecte primaire. Mais elles ne le feront pas à n'importe quel prix. C'est d'ailleurs un des enjeux primordial des discussions à venir entre les différents acteurs de la filière.

Concernant les associations et les acteurs de l'ESS, ils sont aujourd'hui localement très actifs (depuis près de 5 ans pour Envie 2E 35 à Rennes par exemple). Ils ont notamment installé des filières de réemploi des matériels EEE quand cela est possible, en assurant la remise en état et la vente en seconde main, souvent à travers leur réseau propre.

Le dernier mode de collecte des DEEE ménagers (des systèmes propres aux producteurs) paraît peu probable. En effet, quel système mettre en place (et faire valider par les pouvoirs publics) pour assurer la traçabilité des produits depuis le client final ? De plus, à moins de maîtriser complètement le circuit retour de ces produits, le coût de collecte va devenir très rapidement prohibitif. Et enfin, que faire des DEEE si le producteur est amené à disparaître ?

3.2.2 Le niveau logistique

L'enlèvement concerne le ramassage de DEEE au centre de collecte et leur transport vers les centres de regroupement. Le regroupement comprend les opérations de tri par flux, le conditionnement et le transport vers les centres de traitement. Il s'agit d'activités logistiques généralement bien maîtrisées par les prestataires de services logistiques.

3.2.3 Le niveau traitement

Ce niveau regroupe les opérations de dépollution, de démantèlement, de valorisation matière et énergétique, et enfin de réutilisation.

3.3 Positionnement des acteurs

En synthèse, le tableau suivant présente les différents intervenants de la filière positionnés sur les différents niveaux potentiels de collecte, logistique et de traitement.

 

Eco-
organismes

Distributeurs

Collec-
tivités
locales

PSL
nationaux

Transp.
locaux

Prof. du
recyclage
national

Centres de
tri locaux

Economie
sociale et
solidaire

PILOTAGE DE LA
FILIERE

X

 
 
 
 
 
 
 

COLLECTE

 

X

X

 
 

X

 

X

LOGISTIQUE
Enlèvement
Transport

 
 
 

X
X

X
X

X
X

 

X
X

TRAITEMENT

 
 
 
 

X1

X
X
X

X
X

X
X

Dépollution 1 Dépollution 2 Valorisation Réutilisation

INTEGRATEUR2

 
 

X

 

X

 
 

Tableau 8 : Positionnement prestations / acteurs

1 Prise en charge partielle

2 Se reporter à la définition paragraphe 2.4

PARTIE III : STRATEGIES & ORGANISATIONS
LOGISTIQUES ACTUELLES

Nous proposons maintenant :

- de décrire les schémas logistiques existants, mis en place par les distributeurs, les producteurs, les industriels, les prestataires de services logistiques... en nous appuyant principalement sur une enquête terrain où nous avons rencontré un certain nombre d'acteurs de la filière.

- de préciser quels sont, pour chacun des acteurs, les problématiques et les enjeux majeurs liés à la mise à la place de la Directive.

1 EXEMPLE DES COLLECTIVITES TERRITORIALES 1.1 L'étude INTIATIVE RECYCLAGE® à Nantes

1.1.1 Présentation de l'étude

Initiative Recyclage® est l'étude pratique de la collecte et du recyclage des DEEE ménagers nantais qui s'est déroulée entre juillet 2002 et juin 2004.

Nantes Métropole a été retenue pour plusieurs raisons :

- la taille du territoire et la population (à la fois dense et dispersée) d'environ 550 000 hab. - la présence de presque toutes les grandes enseignes de la distribution nationale.

- la très bonne implantation des déchetteries : 100% de la population couverte.

- l'existence d'initiatives en terme de collecte et recyclage de DEEE (exemple de la collecte

du GEM organisée par Envie 44).

- le dynamisme d'une jeune communauté de communes.

Le principal objectif de cette étude unique dans ce domaine, est de donner une vision de la future filière de collecte et de recyclage des DEEE en France, tant en termes de volumes que de moyens logistiques et de traitement à mettre en oeuvre à court terme. Ceci devra répondre à un souci de performances économiques et environnementales. Le montant global de cette étude s'est élevé à environ 2 380 000 € couvrant les dépenses opérationnelles et les frais d'études (52% / 40,5% et 7,5% de communication).

1.1.2 Intérêt de cette étude pour notre travail

Cette étude présente un grand intérêt dans notre travail car, tout d'abord, il s'agit d'un premier cas concret d'organisation qui a permis de réunir tous les acteurs de la future filière : les producteurs, les distributeurs, les collectivités locales, les professionnels du recyclage et de la logistique, les associations de consommateurs ainsi que les pouvoirs publics. D'autre part, un premier schéma d'organisation logistique et un certain nombre de préconisations sont avancés. Il s'agit donc d'une bonne introduction pour saisir de manière globale les enjeux induits par la nouvelle Directive. Enfin, il est à noter que les objectifs de valorisation et de collecte fixés par la Directive ont été atteints et même dépassés. Il s'agit donc d'une première expérience réussie sur la base de schémas logistiques existants.

1.1.3 Analyse des résultats de l'étude sur Nantes Métropole

1.1.3.1 En terme de collecte

Origine des DEEE collectés

La moitié des tonnages des DEEE collectés provient des distributeurs, suivie de très près par les flux de déchetteries ; notons que le poids moyen des appareils collectés chez les distributeurs est plus élevé que celui collecté en déchetterie. Le flux provenant des autres apports (associations, Emmaüs...) est non négligeable, avec quasiment 8% de l'ensemble des flux.

La performance et la segmentation des points de collecte

Sur les 133 points de collecte participant à l'initiative, 91 ont mis à disposition au moins une fois des DEEE collectés par leur activité. Les 32% de points inactifs sont tous issus de la distribution, vendant peu de EEE. Ci-après le Pareto des tonnages récupérés par points de collecte. On remarque qu'un classement de type ABC peut être réalisé.

Figure 9 : Performance des points de collecte, base Nantes, 12 mois stabilisés

L'équipe projet a donc segmenté les points de collecte en 4 catégories, auxquelles il faudra adjoindre un mode de gestion particulier :

- Production de plus de 120 t/an de DEEE (fort potentiel)

- Production de 45 à 120 t/an de DEEE (potentiel moyen)

- Production de 6 à 45 t/an de DEEE (potentiel moyen)

- Production de moins de 6 t/an de DEEE (faible potentiel)

La segmentation des différents EEE utilisée est celle, unanimement admise, des 4 catégories (hors lampes) présentée dans la partie II.

1.1.3.2 En terme d'organisation logistique

Le schéma logistique est basé essentiellement sur les structures de collecte existantes. Il met ainsi en évidence les limites suivantes :

· Quantités par enlèvement insuffisantes

· Durée de stockage sur centre de regroupement trop élevée


· Quantités par expédition insuffisantes

· Complexité de pilotage

· Temps d'immobilisation des conditionnements trop important

· Regroupement et tri systématique

Un schéma logistique optimal réaliste a donc ensuite été construit. D'une manière générale, le nombre des intervenants a été limité afin de massifier plus efficacement les flux et de mieux rentabiliser les équipements industriels. Sur le schéma optimisé présenté en Annexe 4, on ne retrouve donc plus qu'un prestataire pour la collecte, un autre pour le regroupement et enfin un acteur clé par type de traitement.

1.1.4 La filière au niveau national : les enseignements de l'expérience et les recommandations

Une extrapolation au niveau national des résultats de l'étude du bassin nantais a permis de faire un certain nombre de recommandations ayant pour objet de répondre aux attentes réglementaires d'une part, et à celles des metteurs sur le marché d'autre part. Pour ces derniers, il s'agit de répondre à la réglementation au meilleur coût et conformément aux échéances.

Quelques enseignements tirés de l'étude :

Tout d'abord, une forte concentration des DEEE sur quelques points de collecte (20% des points de collecte assurent 80% des volumes) a été observée, le coût à la tonne étant conditionné par le volume de DEEE produit par point de collecte (optimisation logistique possible avec le volume). Un seuil économique minimum d'enlèvement a donc été défini soit 2t de DEEE/an.

Ensuite, l'importance de la massification des enlèvements, de la réduction du nombre de kilomètres parcourus et du nombre global d'heures de main d'oeuvre, amène à la segmentation des points de collecte en fonction de leur production de DEEE et de leur capacité d'accumulation. On adaptera le mode de fonctionnement du point de collecte à cette segmentation.

Les recommandations plus précises d'organisation des flux par types de point de collecte, production de DEEE et capacité d'accumulation sur le point de collecte sont également présentées en Annexe 5.

1.2 Quels enjeux pour les collectivités territoriales

Les collectivités locales ont aujourd'hui la compétence exclusive de la gestion des déchets ménagers sur leurs territoires. Cette gestion coûte très cher en termes de collecte sélective primaire et de traitement. Les réglementions de plus en plus contraignantes en la matière nécessitent des investissements de plus en plus lourds, soit en propre, soit en délégation auprès d'industriels du recyclage.

Elles se voient donc invitées aujourd'hui à prendre en charge la collecte primaire sélective des DEEE, pour laquelle la Directive précise qu'elles devront être financées en conséquence. Dans la pratique, nous avons rencontré des interlocuteurs pour le moins attentistes.

Un certain nombre de problématiques est avancé :

- Les surfaces de déchetterie sont pour la plupart limitées à 2500 m2. En effet, au-dessous de ce seuil, les déchetteries, installations classées, ne sont soumises qu'à une déclaration auprès de la Préfecture. Au delà, une autorisation d'exploiter est nécessaire auprès de la Préfecture et bien plus contraignante à obtenir et à maintenir. Sur les 2500 m2, il parait difficile de dégager des surfaces dédiées aux DEEE, dans la mesure où les collectes de déchets verts et de gravats, consommatrices de surfaces, sont déjà en augmentation.

- La surface estimée pour les points d'accueil de forts tonnages de DEEE en déchetterie est de l'ordre de 50 à 100 m2. Cela correspond à la mise en place de 3 à 4 contenants spécifiques à chaque flux1.

- Le financement et la gestion des contenants et d'abris éventuels fermés.

- La mise en place de nouvelles tournées spécifiques aux DEEE.

A l'instar des autres filières de traitement de déchets ménagers, les élus et responsables concernés vont donc rester très vigilants sur le mode de financement des coûts de collecte primaire, qui devra être déterminé courant 2006. Une première étude de ces coûts

1 Source Initiative Recyclage

a été réalisée par le cabinet Terra pour le compte de l'ADEME1. Elle a pour objectif, à partir de différents scénarios logistiques et modèles de calcul, de présenter des éléments de coûts relatifs aux frais techniques d'exploitation.

Le sujet est donc sensible et interviennent ici les facteurs politiques et lobbyistes. Comme nous l'ont précisé quelques interlocuteurs, l'AMF, de par son maillage territorial de déchetteries et sa capacité à collecter près de 50% des flux de DEEE ménagers, aura un poids non négligeable dans les discussions avec son interlocuteur privilégié que sera probablement le futur organisme coordonnateur.

Au-delà des discussions de fond sur la prise en charge de ces coûts de collecte primaire, l'AMF peut-elle avoir une influence sur la structuration de la filière ? Elle pourra choisir de privilégier par exemple des capacités existantes de traitement (souvent de proximité) par rapport à de grandes structures, dans le but de maintenir l'emploi local et les structures à vocation sociale.

2 LES SCHEMAS EXISTANTS DES DISTRIBUTEURS

2.1 L'exemple d'une Grande Surface Spécialisée : DARTY2

2.1.1 Présentation de DARTY

Darty est le leader français de la distribution spécialisée de produits électroniques grand public. Avec un effectif d'environ 11 000 collaborateurs et 205 magasins entre la France et le Luxembourg, Darty a réalisé un chiffre d'affaires de 2,1 milliards d'euros en 2004.

Si la nouvelle réglementation sur le recyclage des DEEE provoque une grande agitation dans le monde de la distribution, Darty aborde avec sérénité cette période : son centre de recyclage des déchets de Mitry-Mory (Seine-et-Marne, 77) est opérationnel depuis 1996. Un exemple unique dans son secteur.

1 http://www.ademe.fr/ ; rubrique DEEE /bibliographie

2 Thierry Courtois (mars 2005), « Darty centralise le recyclage des déchets », Logistiques Magazine n°195.

2.1.2 La reverse logistics mise en place

Dans le cadre du « Contrat de Confiance », Darty offre à ses clients pour tout achat d'un produit neuf la reprise de l'ancien lors de la livraison. C'est ainsi que Darty, avec 60 magasins en Ile-de-France, livre environ 600 000 clients par an et récupère du même coup 13 000 t de déchets électroménagers (11 000 t de produits en fin de vie et 2 000 t d'emballages). Tous ces déchets sont dirigés vers un point unique, le Centre Darty du Traitement des Déchets, à Mitry-Mory.

Ce site dédié et autonome dispose de 11 personnes pour assurer une première phase de traitement consistant à trier les matériaux qui arrivent en permanence. En fait, le centre distingue 2 filières : les emballages (compressés sur place et dirigés ensuite vers les filières de recyclage) et les produits en fin de vie. Ces derniers se divisent en 2 catégories : les appareils hors d'usage et voués à la destruction, et les appareils (de type machines à laver ou réfrigérateurs) ayant plus de 5 ans d'âge et encore en bon état. Ces appareils, qui représentent 3% du gisement, sont révisés, contrôlés, et revendus d'occasion par la fédération des associations Envie, dont Darty est partenaire. Au total, le centre traite annuellement près de 200 000 appareils en fin de vie. Il n'assure pas pour l'instant le démantèlement des écrans cathodiques, recédés à la tonne à des recycleurs agréés. Seuls les déchets ultimes partiront pour être enfouis.

Globalement, aucune évolution majeure n'est prévue pour le centre, exceptés des tris plus fins et bien sûr des volumes plus importants. Il restera une plate-forme de collecte, de tri et d'expédition vers d'autres centres de traitements spécialisés.

CLIENTS

LIVRAISON NEUF REPRISE ANCIEN (Tournées Darty)

84%
PFV

16%
Emballages

TRI

TRAIIT. PH1 REGROUPEMENT

Centre Darty du Traitement des Déchets (11 personnes)

- collecte

- tri

- 1ère phase de traitement

- expédition

Entrepôt DARTY

Magasin
ENVIE

3%

200 000 PFV

Déchets
ultimes

(Tournées sous-traitées)

REEMPLOI

VALORISATION

Recycleurs
spécialisés

Enfouissement

Figure 10 : Schéma de l'organisation Darty
( Prestations prises en charge par Darty)

Au niveau de la logistique et du transport, la collecte des produits et emballages est assurée par Darty lors de la livraison. Ceci a une incidence sur les tournées car les livreurs reviennent sur l'entrepôt contigu au centre de traitement. Ainsi, il n'y a pas de tournée uniquement dédiée à la collecte.

En amont, les départs du centre vers les broyeurs sont toujours effectués grâce à des contrats de sous-traitance. Le travail de compression des déchets (cartons, plastiques, bois..) est très important car il permet de réduire au maximum les volumes à transporter et donc de diminuer les coûts. Pour la gestion globale des traitements, aucun outil informatique n'intervient : le centre se contente de gérer les factures transporteurs et les recettes des déchets revendus. En pratique, c'est le destinataire qui pèse le chargement et renvoie un ticket pour la

facturation (le prix à la tonne étant fixé par des barèmes selon la nature du composant). Seul le bois n'est pas revendu et Darty doit payer les opérations de broyage.

2.1.3 DARTY, un précurseur

« Cette activité n'est pas à but lucratif, car, dès le début notre objectif était de débarrasser le client d'un appareil encombrant. Nous avons donc pensé à un système de traitement de ces anciens appareils qui soit à la fois respectueux de l'environnement et économiquement viable » explique Christian Sallé, directeur logistique Darty Ile-de-France. Darty a donc anticipé les obligations légales au travers de sa démarche marketing, en proposant un nouveau service à ses clients. Véritable aide à la vente dans un premier temps, cette stratégie devrait sûrement continuer à révéler ses atouts quant à la mise en application de la nouvelle réglementation sur les DEEE.

2.2 L'exemple du mouvement E. LECLERC

2.2.1 Présentation de l'enseigne

Groupement d'indépendants, l'enseigne E. Leclerc est cogérée via des structures communes originales :

- L'ACDlec, l'Association des Centres Distributeurs E. Leclerc. Créée en 1964, c'est l'organe stratégique du mouvement.

- Le GALEC, le Groupement d'Achat des centres E. Leclerc. Créé en 1970, le GALEC est l'outil commercial des centres E.Leclerc. Subdivisé par secteurs d'activités, le GALEC négocie fournisseur par fournisseur les conditions commerciales pour l'ensemble des magasins.

- Les SCA, les centrales d'achat régionales. Au nombre de 16, ces coopératives prennent le relais du Galec en négociant les achats au niveau régional. Elles assurent aussi, entre autre, le stockage, la répartition et le transport des marchandises dans les magasins.

- Les concepts spécialisés et les sociétés coopératives d'approvisionnement.

- Les adhérents (magasins) E. Leclerc, qui sont des indépendants ; ils sont donc libres

de se fournir où ils le souhaitent. Les centrales sont une fonction support, une structure

émanant des magasins qui mutualisent ainsi leurs achats.

GALEC

 
 

SCARMOR

 
 

SCAOUEST

 
 

14 autres
SCA

 
 
 
 
 
 
 

Magasin
Gouesnou

Magasin
Quimper

36 autres
magasins

Fournisseurs Indépendants

Figure 11 : Structuration des différentes entités du mouvement Leclerc

2.2.2 Obligations des magasins E. Leclerc

Les centres E. Leclerc sont considérés comme distributeurs de produits EEE. Ils sont donc soumis depuis le 13 août 2005 à un certain nombre d'obligations dans le cadre de la loi sur le traitement des DEEE :

- La règle du « un pour un ».

- Un entreposage adapté des DEEE.

Ce dernier point sous-tend la mise à disposition d'une surface dédiée aux déchets, pouvant venir en déduction des surfaces de ventes. Cette réflexion est d'ailleurs la même pour tous les acteurs de la distribution. Une autre solution évoquée est l'externalisation du stockage, entraînant alors une manutention supplémentaire.

2.2.3 Obligations des metteurs sur le marché du groupe E. Leclerc

Les SCA s'approvisionnent en EEE notamment auprès à la SIPLEC (Société d'Importation des Produits Leclerc), qui est alors considérée comme le metteur sur le marché (importateur des produits EEE en France). La SIPLEC est donc soumise, depuis le 13 août 2005, à ses obligations de producteur dans le cadre de la loi sur le traitement des DEEE.

2.2.4 Choix stratégiques envisagés par le groupe

Au sein du mouvement E. Leclerc, les orientations nationales sont définies par le GALEC. Les différentes SCA et les magasins E. Leclerc sont ensuite libres de suivre ces orientations. Concernant la SCARMOR, elle s'oriente vers l'adhésion à un Eco-organisme. Le choix final de l'Eco-organisme sera annoncé en mai 2006.

3 UNE INITIATIVE POUR LES DECHETS PROFESSIONNELS

3.1 Présentation de l'association ELEN et du projet pilote

Créée en septembre 2000 à l'initiative de professionnels de la filière électrique et avec le soutien de l'ADEME Rhône-Alpes et du Conseil Régional Rhône-Alpes, ELEN est une association loi 1901, parrainée par le GIMELEC (Groupement des industries de l'équipement électrique, du contrôle commande et des services associés), la FGMEE (Fédération des Grossistes de Matériel Electrique et Electronique), la SERCE (Syndicat des entreprises de génie électrique) et le syndicat de l'éclairage. Elle a pour but de favoriser le développement de bonnes pratiques de gestion des DEEE.

L'opération pilote sur la gestion des matériels électriques et électroniques professionnels installés en fin de vie a été menée en région Rhône-Alpes sur une période de 24 mois à compter du 1er novembre 2000. ELEN y a alors suivi dans le détail un ensemble d'opérations d'élimination d'installations de matériels électriques d'usage professionnel. Son rôle était d'accompagner et d'assister les détenteurs de DEEE dans leur démarche d'élimination.

3.2 Principaux enseignements tirés de cette opération

L'opération pilote menée par ELEN a permis de dégager les principaux enseignements suivants.

3.2.1 L'impossibilité d'anticiper les coûts de fin de vie

La durée de vie des MEEP installés et leur évolution constante dans le cadre de leur maintenance font que l'installation en fin de vie est généralement très différente de celle qui a été installée jusqu'à 30 ans auparavant. Ces multiples transformations rendent quasiment impossible l'évaluation des coûts relatifs à la fin de vie de l'installation. De plus, l'opération ELEN a confirmé la diversité des situations de dépose et d'enlèvement des installations ou sous-ensembles. Chaque chantier ayant une configuration différente (tant en termes logistique que quantitatif, contractuel ou encore organisationnel) du fait des caractéristiques du détenteur utilisateur et de son activité, le coût d'élimination des MEEP installés en fin de vie ne peutêtre évalué qu'au cas par cas.

Enfin, ELEN a également montré que la dépose et la logistique de collecte représentent une part largement majoritaire (au moins 70%) du coût total de la fin de vie. (Cf Annexe 6). Dans la pratique, ces différentes caractéristiques empêchent le chiffrage des coûts d'élimination et de valorisation de chacun des MEEP qui constitue l'installation au moment de sa mise sur le marché.

3.2.2 Le rôle capital du détenteur final

Le détenteur final est aujourd'hui encore trop peu sensibilisé sur l'opportunité d'une véritable gestion de l'élimination de ses MEEP installés. Il joue pourtant un rôle capital puisqu'il est le seul témoin et décideur de l'évolution de l'installation et, à ce titre, peut mettre ou faire mettre en oeuvre la traçabilité de la composition d'une installation au cours de sa durée d'exploitation. Il a en particulier le pouvoir de décision et de prescription sur l'orientation de ses DEEE, sur le choix du prestataire, sur le cahier des charges d'élimination (clauses de traçabilité, extraction déchets industriels spéciaux, éventuel choix des filières, etc.) et sur l'allocation des ressources budgétaires nécessaires.

3.2.3 L'implication nécessaire et complémentaire du constructeur

Le constructeur joue un rôle primordial pour informer les utilisateurs (et/ou les autres clients) sur les substances réglementées que contiennent les produits qu'il commercialise. Même si, au cours de la durée de vie de l'installation, les réglementations sont amenées à

évoluer, le fabricant de l'équipement reste néanmoins le mieux positionné pour fournir la composition de ses équipements. Le cas échéant, il peut assurer en permanence le suivi et l'actualisation des correspondances « qualifications produits / caractéristiques filières d'élimination » (en termes de logistique, d'acteurs, de coûts ou de technologies).

3.2.4 Le positionnement des prestataires de maintenance

Les installateurs, maintenanciers spécialistes ou généralistes recueillent le plus souvent les sous-ensembles déposés et apparaissent donc comme une interface privilégiée du détenteur final. Au moment de la fin de vie des MEEP, ils en assurent la désinstallation partielle ou totale. Il semble, d'ailleurs, que cette catégorie d'acteurs réglementaires ne soit pas précisément définie dans la directive..

3.3 Une collecte différenciée pour les DEEE professionnels

Les DEEE professionnels seront issus pour la majeure partie :

- du démantèlement d'installations industrielles avec des DEEE de nature et taille extrêmement variées. La Directive précise néanmoins que les gros équipements industriels fixes ne sont pas pris en compte.

- du renouvellement du parc d'EEE (informatique, téléphonie, télécommunication..) - de consommables à usage professionnel (cartouches, lampes, etc.)

La collecte des DEEE professionnels sera donc vraisemblablement distincte de celle des ménagers. En effet, que ce soit le démantèlement d'installations industrielles de grande taille ou le renouvellement de parcs complets de matériels informatiques ou téléphoniques chez des grands comptes, les flux générés seront de fait plus importants. Ceci permet, à l'origine, de les trier et de les massifier pour en faire des unités logistiques complètes (palettes et camions). Ils rejoindront ensuite directement les mêmes filières de traitement et de valorisation que celles des DEEE ménagers.

4 LES INDUSTRIELS « PRODUCTEURS » : LE CAS CANON BRETAGNE

4.1 Présentation de CANON BRETAGNE

Canon Bretagne a été créé en 1983 à Liffré et s'est positionné sur la fabrication de petits photocopieurs. Il s'est ensuite rapidement diversifié vers la production de cartouches pour imprimantes et photocopieurs et vers l'assemblage de cartes électroniques pour différents industriels de cette filière. Ce site, employant 600 personnes, est la seule usine de fabrication de Canon en France.

Canon est producteur et metteur sur le marché de produits EEE à travers deux entités commerciales et donc pleinement concerné par la nouvelle Directive sur les DEEE :

- C.C.I. (Canon Consumer Imaging), qui distribue des matériels à destination des

marchés grand public (imprimantes, scanners, appareils photographiques et

caméras...).

- C.B.S (Canon Business Solution), qui propose aux marchés professionnels des solutions de copies, des contrats de maintenance et d'intervention à distance associés.

La logique de développement durable, un des axes fondateurs de sa stratégie, a amené Canon

à spécialiser le site de Liffré dans le recyclage des consommables depuis 10 ans et des

matériels électroniques depuis 2 ans. Les domaines d'activités du site sont aujourd'hui :

- le recyclage des cartouches toner. En effet, depuis 1997, Canon a mis en place avec d'autres acteurs une collecte européenne de cartouches toner et regroupe à Liffré l'ensemble des activités de recyclage liées. Ces cartouches sont collectées en containers (placés dans les grandes entreprises et administrations) ou par le réseau Conibi par enveloppes T (pour les particuliers et petites structures), réceptionnées sur une unique plateforme en France avant d'être acheminées à Liffré.

- la fabrication de cartouche toner. Canon favorise la réutilisation de pièces et réintroduit un maximum de composants présents dans les cartouches reçues sur le site dans la fabrication de cartouches toner neuves.

- des activités de prestations diverses, regroupées dans le centre de profit « new business ».

- des prestations de hot-line / SAV / réparations de produits Canon Grand Public pour le compte de Canon Consumer Imaging, provenant de la Grande Distribution et du réseau d'agents Canon agréés. Les produits sont soit réparés sur devis, soit retirés du marché et traités sur le site.

- le recyclage de produits EEE Canon en fin de vie, en assurant le démantèlement, la dépollution, le recyclage matière et la valorisation énergétique.

Aujourd'hui, le taux de valorisation atteint 100% puisque aucun déchet ultime n'est produit et ne génère donc pas de mise en décharge (enfouissement).

4.2 Organisation de la filière DEEE chez Canon

Les flux entrants sont de 2 natures :

- Lors de l'installation d'une nouvelle solution professionnelle, la succursale du réseau commercial Canon France (ou un logisticien local) enlève le matériel présent (Canon et autres marques) et l'achemine vers les plateformes des Canon Business Centers. Les coûts d'enlèvement vers le centre de regroupement sont ainsi optimisés. Lorsque le volume nécessaire pour compléter un camion est suffisant, un affrètement achemine les DEEE vers Canon Liffré (pour les 2/3 des flux de la partie Ouest de la France, y compris région parisienne) ou vers un autre site situé dans l'Est de la France. Les flux retours concernant le réseau indirect sont mal maîtrisés. Aujourd'hui, le réseau indirect devrait payer un prix pour le traitement des DEEE, alors que les « brokers » leur achètent les DEEE, sans précision quant à l'utilisation future de ces produits.

- Les DEEE Grand Public sont enlevés par un prestataire à la demande de Canon Consumer Imaging et acheminés sur Canon Liffré ou récupérés à travers le réseau d'agents Canon agréés.

La capacité de traitement du site est actuellement de 5 000 tonnes/an. En aval, après démantèlement, tri, réutilisation, dépollution, et valorisation, les matières et composants sont évacués vers des filières spécialisées (plastiques, métaux, métaux non ferreux, piles, cartes électroniques, incinération spécialisée). Exceptée la filière des métaux non ferreux (aluminium, cuivre, métaux précieux : enlevés sur site par les mieux disants), les autres

filières sont proches géographiquement, du fait de la part relativement importante des coûts de transport dans le coût total.

DEEE professionnels (C.B.S)

Réseau
Commercial
Direct
CANON
<< Echange
matériel >>

Réseau
Commercial

Indirect
<< Echange
matériel >>

DEEE Ménagers (C.C.I)

COLLECTE

TRI

TRAIT.PH1 REGROUPEMENT

TRAITEMENT (Démantèlement)

REEMPLOI

Grande Distribution
(Collecté par un
Eco-organisme)

Centre de regroupement
(prestataire Eco-
organisme)

20 plateformes
de regroupement
en France

Réseau de
<< brokers >>

Réseau commercial
CANON

Usine de CANON Liffré :

- tri

- reconditionnement et réemploi (pièces et produits EEE pour

Magasin

seconde utilisation) IE
- démantèlement, dépollution, valorisation

SAV
CANON
Liffré

VALORISATION

Cartes
Electro.

 

Métaux
ferreux

 

Métaux
non ferreux

 

Plastiques

 

Energétique

 
 
 
 
 
 
 
 
 

Figure 12 : Schéma de l'organisation logistique de la filière DEEE chez Canon
( Prestations prises en charge par Darty)

En parallèle, un flux d'information remonte la filière pour assurer la mise à jour des informations auprès des différents acteurs et la traçabilité des DEEE du point de départ aux différents points de valorisation.

4.3 Opportunités et enjeux

Canon a mis aujourd'hui en place une filière de collecte, traitement et recyclage des produits EEE professionnels qu'il remet ensuite sur le marché. Les produits en fin de vie sont collectés par échange des matériels sur site, regroupés sur 20 plateformes logistiques en conservant l'intégrité des produits pour des réemplois éventuels futurs, et acheminés par camions entiers sur les 2 sites de traitement, optimisant ainsi les coûts logistiques.

Concernant les solutions professionnelles distribuées à travers un canal de commercialisation indirect, le financement est aujourd'hui un obstacle majeur pour réintroduire ces produits dans la filière des DEEE professionnels Canon. Les obligations réglementaires des grossistes en la matière restent d'ailleurs floues. Quant aux produits grand public Canon, la solution envisagée est l'adhésion à un Eco-organisme pour la prise en charge de la collecte, du traitement et la valorisation de ces produits.

Le site de Liffré pourrait-il aujourd'hui se positionner comme prestataire de traitement de DEEE ? La réponse apportée par les responsables est pour le moment négative. La position pourra cependant être révisée en fonction de nouvelles opportunités.

5 LES PROFESSIONNELS DU TRAITEMENT ET DU RECYCLAGE

5.1 Le cas VEOLIA PROPRETE

5.1.1 Le projet de création d'un centre de tri de grande capacité à Angers

Veolia Propreté a annoncé fin 2005 la création à Angers « du Centre Grand Ouest » pour la valorisation des DEEE de cette région. Ce centre, d'une capacité de traitement de 26 000 tonnes/an (soit un équivalent de 2 kg/an/hab.), offrira des solutions de traitement pour 27 départements et 14 millions d'habitants.

Ce projet est monté avec l'appui d'Angers Loire Métropole (foncier), d'industriels producteurs locaux (Thomson, partenaire fondateur du projet, Anovo, NEC, Bull pour lesquels l'unité d'Angers sera amenée à traiter des flux DEEE), d'acteurs de l'économie

sociale et solidaire (Arceau Anjou, entité de tri et de démantèlement déjà présente à Angers) et le réseau Envie pour la collecte et le regroupement.

5.1.2 Schéma logistique

L'organisation logistique de la filière est présentée page suivante (figure 13). Le site ne sera opérationnel qu'au 2ème semestre 2007.

Sur cette base, nous pensons qu'il y aura deux types de flux de DEEE entrants :

- Les flux DEEE ménagers : positionnée au barycentre d'agglomérations urbaines de taille moyenne et importante (Angers, Nantes, Rennes, Le Mans, Poitiers), cette unité devrait capter et traiter une partie importante du flux des DEEE ménagers des villes précitées.

- Les flux DEEE professionnels, qui pour une part non négligeable auront notamment pour origine les partenaires industriels du projet. En effet, la plupart ont déjà des stratégies affichées concernant le développement durable et le traitement de leurs DEEE, voire déjà une organisation permettant le démantèlement de leurs propres produits.

DEEE Ménagers

DEEE professionnels

Grande
Distribution
(Enlèvement
par prestataire
logistique)

Réseau
Envie ouest
et
EMMAUS

COLLECTE

Enlèvement des DEEE
par des partenaires
logistiques sur contrat

TRI

TRAIT. PH1 REGROUPEMENT

Centres de regroupement
Tri par famille, traitement phase 1 éventuel
Transport direct au centre de traitement si unité logistique complète

TRAITEMENT (Démantèlement)

REEMPLOI

VALORISATION (AFFINAGE)

Traitement flux
GEM hors froid
par acteurs locaux
existants

Dépollution phase 1 et 2,
démantèlement et

Maga

valorisation pour les flux

ENVIE

GEM froid, PAM t écran

Rennes

Remise en état et
vente par le réseau
de magasins ENVIE

Métaux
ferreux

Métaux
non ferreux

Métaux
ferreux

Energie

Broyage des
plastiques

VENTE DIRECTE

Vente directe de
« plasturgistes »

DE MATIERES PREMIERES

Figure 13 : Schéma de la filière DEEE du site d'Angers
( Prestations prises en charge par l'unité de Veolia)

5.1.3 Opportunités et enjeux

Le projet d'installation de cette unité à Angers relève d'une véritable approche industrielle. Mais au delà de la volonté de tous les acteurs de répondre à des problématiques à la fois de développement durable et d'économie sociale, il nous apparaît important de comprendre les stratégies économiques et logistiques mises en oeuvre pour ce projet de grande capacité.

Avec quel modèle économique ? Clairement, le projet de Veolia se positionne sur les prestations à haute valeur ajoutée. Trois réflexions vont dans ce sens :

- Cette unité sera une des premières en France à pouvoir traiter la dépollution phase 2 sur le GEM froid, opération qui demande des investissements lourds. Au regard de la zone traitée (14 millions de personnes), du coût élevé de ce type de prestations, il ne devrait y avoir à moyen terme que quelques unités en France, judicieusement implantées, capables de traiter cette phase de traitement spécifique. Cela étend la zone de chalandise de ce flux de DEEE jusqu'à 250 Kms en restant économiquement acceptable en termes de coûts logistiques.

- A contrario, le flux GEM hors froid ne présentant que peu de valeur ajoutée en termes de prestations de traitement, il ne sera pas traité dans cette unité (coûts logistiques devenant alors prépondérants). En effet, Veolia souhaite que ce flux passe directement chez des acteurs locaux (« ferrailleurs »), déjà équipés de broyeurs et de systèmes de tris mécanisés.

- Enfin, ce site sera vraisemblablement équipé d'un broyeur de déchets plastiques permettant de générer plus de valeur ajoutée (spécifications de broyage suivant la demande des industriels) et de les revendre directement conditionnés aux plasturgistes. Cette étape est généralement assurée par les recycleurs de plastiques.

Avec quelle organisation logistique ? Cette implantation de la future unité de traitement à Angers offre une localisation optimale pour ce projet de taille interrégionale. Ce projet fait aussi apparaître la nécessité de partenariats, notamment logistiques, avec l'aide du réseau Envie Ouest qui possède déjà une partie du maillage du territoire en assurant la collecte, le tri et le regroupement des DEEE. En effet, acheminer de manière optimale (DEEE triés par flux) et à moindre coût (par camion complet) est un enjeu majeur pour alimenter cette usine de traitement de grande capacité.

5.2 L'exemple d'ECOTRI FOUESNANT

5.2.1 Présentation d'Ecotri1

Fondée en 1992, Ecotri est une des 3 entreprises qui composent les Ateliers Fouesnantais (association, loi 1901, à but non lucratif). Embauchant 142 salariés en CDI (80% de travailleurs handicapés), ses activités sont le tri et le recyclage, et ses clients, les collectivités locales majoritairement (25 communautés de communes et 2 communautés d'agglomération, 232 communes au total, 660 000 habitants). Ecotri fait également partie du comité SCRELEC et peut traiter 33 000 tonnes de déchets par an (130 tonnes par jour), réparties sur 4 centres de tri en Bretagne, tous certifiés ISO 9001.

Création

Lieu

Nbr de salariés
en CDI

Volume / an
2004

Mode de
fonctionnement

1er

Fouesnant (29)

55

12 000 T

Propriété de
l'association

2ème

Pouldreuzic (29)

22

5 000 T

Propriété de
l'association

3ème

Glomel (22)

20

3 500 T

En exploitation

4ème

Lorient (56)

45

12 000 T

En exploitation

Tableau 9 : Les centres ECOTRI en Bretagne (Brochure d'ECOTRI)

Un cinquième centre de tri est actuellement en projet de construction à Troyala (près de Fouesnant). Il sera dédié aux DEEE.

5.2.2 Positionnement d'Ecotri sur la filière DEEE :

Les clients DEEE d'Ecotri sont pour 50% des industriels et 50% des collectivités locales. Elle se positionne exclusivement sur le démantèlement et le traitement des DEEE (l'entreprise ne traite par exemple pas la collecte des déchets). Pour ces opérations, elle dispose actuellement d'une unité expérimentale à Fouesnant, capable de traiter 3 tonnes par jour.

1 Brochures Ecotri 2005 et Ateliers Fouesnantais 2005.

Le futur centre de tri des DEEE sera capable de traiter 55 tonnes par jour, soit 13 000 à 15 000 tonnes par an. Il pourra traiter tous les DEEE, à l'exception de la dépollution phase 2 du traitement des frigorigènes.

Ecotri est capable d'effectuer la traçabilité des DEEE, cette traçabilité étant imposée par un des ses plus gros clients : France Telecom, mais également par les Eco organismes. A ce jour, Ecotri a d'ores et déjà répondu aux appels d'offres d'Eco-systèmes et de ERP.

Le traitement final des DEEE est confié à des entreprises spécialisées, car Ecotri ne peut supporter les investissements nécessaires à ces opérations.

6 LES PRESTATAIRES DE SERVICES LOGISTIQUES : LE CAS GEODIS1

6.1 Historique de GEODIS en reverse logistics

Geodis est un opérateur logistique majeur à l'international (3,37 Md€, 22 700 collaborateurs, présent dans plus de 120 pays). Son positionnement actuel sur les DEEE est une suite logique de son activité entamée en 1994 avec Xerox, poursuivie en 1998 avec IBM au niveau européen en assurant la récupération des parcs d'ordinateurs en fin de leasing.

En 1999, la société Valenda intègre le groupe Geodis. Cette filiale assure la collecte et la valorisation des déchets issus de l'entretien et de la réparation automobile. Elle apporte au groupe des compétences de pilotage de l'ensemble des activités d'une filière de reverse logistics, compétences qui seront utilisées dans le cadre des DEEE. Cet apprentissage a amené Geodis à créer un pôle environnement et reverse logistics en 2002 et à signer en 2004 un contrat avec l'Eco-organisme ERP pour la France, le Portugal, le Royaume-Uni et l'Irlande, bien qu'en France les Eco-organismes n'aient pas encore leur agrément.

6.2 L'alliance GEODIS et SITA : VALOGISTIC

Valogistic, tel est le nom de la joint-venture créée début 2005 entre Geodis et Sita, autre acteur international des secteurs de la propreté, des déchets et de l'eau. Ses ambitions sont claires : proposer en B. to B. une prestation globale de la collecte à la valorisation, et en B. to C. se positionner sur les appels d'offres des Eco-organismes.

1 Olivier Cognasse (janvier, février 2006), « Reverse logistics, un nouvel eldorado ? », Stratégie Logistique n°83.

« Valogistic va utiliser les compétences des deux sociétés et s'engage à trouver la meilleure solution au meilleur prix », selon les mots de son actuel Directeur Général, J-L Demeulenaere. Le message commercial va d'ailleurs en ce sens : « le premier réseau européen, intégrateur de solutions pour les produits en fin de vie ».

Plus que la collecte, le transport, le traitement et la valorisation, quatre métiers maîtrisés par les deux partenaires, Valogistic a mis en place une structure centralisée à vocation européenne, qui propose des prestations qui en font un réel intégrateur. En effet, cette structure assure l'identification, l'audit, la sélection et le pilotage des différents prestataires, la coordination des équipes au niveau national, la garantie d'une parfaite conformité législative, des prestations de conseil et une traçabilité de l'ensemble des processus.

6.3 Naissance d'un pôle majeur

La constitution de pôles majeurs comme Valogistic est donc inévitable dans la filière et apporte un certain nombre d'avantages :

- Un grand pôle possède déjà un maillage du territoire national en sites de traitement et

en moyens logistiques. Il dispose en outre d'un potentiel important d'investissements.

- Il diminue les coûts d'apprentissage et augmente les économies d'échelle de la filière

par sa présence dans d'autres pays européens, mettant en oeuvre la même Directive.
- La constitution d'un pôle est facteur de concentration et de stabilité des prix de

prestations dans le temps.

- Les Eco-organismes n'ont pas intérêt à multiplier les intervenants. Ils chercheront des interlocuteurs ayant la capacité de piloter les autres prestataires.

7 L'ECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE : LA STRUCTURE ENVIE 2E

7.1 Présentation d'ENVIE 2E Rennes 35

Le réseau d'Envie (Entreprise Nouvelle vers l'Insertion Economique) est national et composé de 40 entreprises. L'entreprise est spécialisée dans la récupération et la remise en état d'appareils électroménagers en fin de vie et la revente d'appareils rénovés garantis. Le réseau Envie développe également une activité de valorisation et de mise en filière pour le

recyclage d'appareils électriques et électroniques. En termes de références, Envie a la confiance de fabricants (Elco, Brandt, Whirlpool...), de distributeurs (Darty, La Camif, Auchan, Ikéa, Carrefour...) et de collectivités (Strasbourg, Rennes, Nantes...).

Envie est susceptible de proposer tout une gamme de prestations : la collecte des DEEE, le tri entre les différentes fractions et leur orientation vers les filières de traitement ou de valorisation (réemploi ou recyclage), la dépollution et le démantèlement des appareils pour l'extraction des polluants et la valorisation des matières.

Créée en 1997, Envie 2E a été l'une des premières entreprises de la région Bretagne à consacrer son activité à la collecte et au traitement des DEEE. Elle collecte sur la moitié Est de la Bretagne, avec ses propres moyens (2 camions de 3,5t) et loue des camions d'une plus grande capacité en fonction des besoins.

Envie 2E dispose d'un site de regroupement et de prétraitement industriel (démantèlement et dépollution des froids phase 1) de 5 000 m2, classé ICPE, à Rennes.

Les prestations proposées, en termes de collecte et de traitement, sont adaptées à la demande des donneurs d'ordres, collectivités, distributeurs, administrations et entreprises. Elles respectent la réglementation et les normes environnementales. La traçabilité de tous les appareils collectés est garantie.

7.2 Organisation de la filière Envie 2E

Les appareils collectés auprès des grands distributeurs français et des collectivités sont entièrement démontés puis réparés et testés dans les ateliers d'Envie par des salariés en insertion.

DEEE Ménagers

DEEE professionnels

 
 
 

TRI

TRAIT.PH1 REGROUPEMENT

REEMPLOI

COLLECTE

TRAITEMENT PH 2

Grande Distribution

Centre de regroupement du

distributeur

Tubes
cathodique

Cartes
Electro.

Plateforme de regroupement et de tri ENVIE
Rennes

Déchetteries
(Collectivités
territoriales)

Autres
composants

Industriels
Marchés Publics

Magasin
ENVIE
Rennes

 
 
 
 
 

Plastiques

 

Energétique

VALORISATION

Métaux
ferreux

 

Métaux
non ferreux

 
 
 
 
 
 
 
 

Figure 14 : Schéma de l'organisation d'ENVIE Rennes
( Prestations prises en charge par l'unité de Veolia)

Les flux DEEE entrants sont de deux natures :

- Ceux concernant essentiellement les DEEE ménagers ; ces prestations font bien souvent l'objet de contrats avec les collectivités territoriales (en déchetterie) et la grande distribution (règle du « un pour un » en magasin) pour lesquelles un ramassage est organisé suivant la demande du client (jusqu'à une navette quotidienne de leur camion 3,5t). Ils ne mettent pas de contenants à disposition et demandent notamment à la grande distribution de conserver les DEEE sous couvert. Certains ramassages sont parfois réalisés sur les plateformes logistiques des distributeurs.

- Les enlèvements par transport propre ou affrété, ou livré en direct sur leur plateforme de regroupement. Majoritairement, ces flux entrant dans la catégorie des DEEE professionnels sont réalisés pour les industriels (contrats ponctuels), administrations (sur marchés publics), dont les coûts logistiques sont supportés, directement ou indirectement, par Envie.

Une partie des matériels récupérés (provenant essentiellement de la grande distribution) est remis en état et réintroduit dans le réseau de magasins Envie (situé sur la plateforme de tri de Rennes). Les composants et matières issus du démantèlement et du traitement phase 1 (notamment pour les GEM froid) sont envoyés après massification vers les filières de traitement et de valorisation adéquates.

7.3 Opportunités et enjeux

La force du réseau Envie est de proposer un service de proximité, doté de capacités de tri, de traitement et de logistique spécifiques. Ainsi, la flotte logistique est dotée de camions de petits tonnages, adaptés pour des ramassages de petits et moyens volumes et des fréquences variables sur une zone de chalandise urbaine, périurbaine ou au maximum départementale. Envie a recours à l'affrètement pour les tonnages plus importants.

De part le positionnement actuel du réseau Envie sur le marché des DEEE et son maillage national, la nouvelle Directive représente pour eux une possibilité importante de développement sur un marché émergent estimé important. Ainsi, pour répondre aux appels d'offres des Eco-organismes, l'association Ouest Envie Plus a été créée et regroupe plusieurs entités de l'Ouest.

Elle souhaite se positionner :

- Directement en réponse aux appels d'offres des Eco-organismes sur les 3 volets (collecte, tri/regroupement, traitement).

- En partenariat avec d'autres acteurs (de grande capacité), où son maillage géographique (en partie déjà constitué) servirait de base pour la collecte, le tri et l'acheminement des flux DEEE vers des centres de traitements spécialisés ou de grosse capacité.

L'enjeu pour Envie est de deux ordres :

- Réaliser des opérations de tri pour d'une part << retirer >> les produits pouvant être remis en état et revendus à travers le réseau Envie, d'autre part massifier les flux de DEEE après tri pour l'envoi vers les centres de traitement.

- Réaliser des opérations de démantèlement et dépollution de phase 1, pour générer des revenus supplémentaires.

8 SYNTHESE

8.1 Des initiatives pour l'instant individuelles

La filière des DEEE est aujourd'hui peu structurée et en phase de découverte. Des acteurs sont déjà positionnés sur des activités spécifiques qu'ils maîtrisent bien, d'autres cherchent à se positionner sur ce marché promoteur. Mais très peu sont aujourd'hui capables de prendre en charge l'ensemble des activités de collecte, logistiques et de traitement.

Sans attendre la réglementation, des initiatives individuelles existent et des stratégies logistiques originales ont été mises en place. L'une, Canon, intègre en partie son réseau de distribution jusqu'à l'utilisateur final. Il peut ainsi retourner à moindre coût ses produits professionnels en fin de vie vers 2 sites spécialisés de traitement en France. L'autre, Darty, par reprise chez le client final, acheminent ses DEEE vers des intervenants classiques du recyclage. Pour l'instant, ce service est assuré pour la région parisienne, zone urbaine de forte densité permettant de traiter des volumes minimums.

Néanmoins, ces deux stratégies ne pourront prétendre à traiter la problématique à l'échelle du territoire national. En effet, par définition, les DEEE sont collectés << en mélange >> (toutes familles et toutes marques). De plus, les densités de population très diverses sur le territoire ne permettront pas de garantir un volume de collecte de DEEE uniforme.

A l'instar des autres filières de déchets ménagers, le recours aux Eco-organismes, à l'origine desquels on retrouve d'ailleurs de nombreux producteurs et distributeurs, s'impose. Ils permettront la structuration de solutions collectives, notamment pour la collecte primaire sélective, qui s'appuiera sur le réseau existant de déchetteries des collectivités territoriales.

Enfin, des stratégies de partenariat entre les acteurs principaux émergent. Elles ont pour objet de proposer aux Eco-organismes une offre globale de prestations avec une couverture nationale. Ces acteurs majeurs de la filière seront alors capables de prendre en charge des marchés importants, devenant ainsi des 4PL de reverse logisitics.

8.2 Présentation des coûts par appareil traité

Les coûts suivants présentés par l'ADEME concernent les coûts métiers (logistique et traitement). Ils n'intègrent pas les coûts liés aux garanties éventuelles de fonctionnement de la filière et de participation à la collecte primaire des DEEE ménagers.

Figure 15 : Coûts du traitement par appareil (Source Initiative Recyclage)

PARTIE IV : QUELLE(S) STRATEGIE(S) LOGISTIQUE(S)
FUTURE(S) POUR LA FILIERE ?

Dans un premier temps, au regard des travaux académiques synthétisés en partie I, nous nous proposons de caractériser la filière DEEE (définition des activités, complexité de la filière, chaîne de valeur) et de préciser les défis auxquels la future filière sera vraisemblablement confrontée.

Puis, après avoir posé un certain nombre d'hypothèses, nous présenterons un scénario d'organisation logistique que nous pensons probable à court et moyen terme. Nous prendrons essentiellement en compte le schéma des DEEE ménagers pour lequel des objectifs quantitatifs et qualitatifs ont été précisés dans la Directive et oil la chaîne logistique globale est encore embryonnaire.

1 LA FILIERE DEEE : UN RESEAU DE REVERSE LOGISTICS

1.1 Caractérisation de la filière DEEE

Si pour Martin Beaulieu, « la logistique à rebours est un ensemble d'activités de gestion visant la réintroduction d'actifs secondaires dans des filières à valeur ajoutée », la filière DEEE qui sera mise en place dans le cadre de la Directive, répond à ces deux principales caractéristiques :

- « la réintroduction d'actifs secondaires » : les actifs secondaires sont les EEE en fin de vie (pouvant être réparés et réintroduits dans des réseaux secondaires) et les DEEE (l'état du produit lui confère une nature de déchet).

- « une filière à valeur ajoutée » : la valeur ajoutée de la filière est de deux ordres : d'un côté celle retirée des opérations de traitement et de la valeur marchande des matières recyclées, d'un autre côté la vente des produits dans les réseaux de vente secondaire.

Toujours d'après Martin Beaulieu, un réseau de logistique à rebours doit aussi tenir compte de 4 paramètres :

- la logistique est associée autant à un produit qu'à un déchet, respectivement un EEE en fin de vie et un DEEE dans notre cas.

- Le destinataire final des produits retournés ou des déchets n'est que rarement le producteur initial. Excepté le cas particulier de traitement de DEEE professionnels où le produit en fin de vie peut revenir à son industrie d'origine, ce modèle peut difficilement être appliqué aux DEEE ménagers. En effet, les filières de valorisation sont les réseaux de vente secondaire pour le réemploi de produits EEE, les recycleurs de matières, les affineurs ou directement les industriels consommateurs de matières recyclées.

- La logistique à rebours implique davantage que la seule décision du choix du

réseau de distribution, effectivement puisqu'il s'agit ici d'une réglementation.

- Enfin, elle comprend également un ensemble d'activités de gestion, notamment la traçabilité des DEEE transitant dans la filière, le pilotage et la répartition des flux financiers.

Deux derniers critères permettent de finir de caractériser la filière DEEE :

- Ce réseau est en boucle ouverte. En effet, la plupart des EEE en fin de vie et les DEEE vont emprunter des chemins différents à travers un réseau complexe de multiples acteurs pour être dirigés vers d'autres industries. Les activités de ce réseau ne sont donc pas liées avec celles du réseau de distribution des produits neufs correspondants (caractéristique d'une boucle fermée selon Shear (1997)).

- Enfin, un réseau de rétrologistique a pour spécificité de ne pas avoir de flux massifs de produits entrants. Ainsi, les cinq flux de DEEE ménagers concernés seront, dans la majorité des cas, réintroduits dans la filière à l'unité (en provenance de l'utilisateur final).

1.2 Typologie et facteur de complexité logistique de la filière DEEE

Une autre façon de caractériser un réseau de rétrologistique est la classification proposée par Martin Beaulieu qui s'appuie sur 2 paramètres : le choix de la filière à VA où est dirigé l'actif secondaire et le degré de traitement (nombre et complexité) avant sa réintroduction dans la filière (voir figure 16). Cette typologie permet d'introduire une notion

importante : la complexité dans les réseaux logistiques. Dans notre cas, l'actif secondaire est localisé dans le coin en bas à droite. En effet, on peut considérer que les actifs secondaires vont subir des traitements faibles (réparation et réutilisation des produits) à importants (dépollution et démantèlement du flux de GEM Froid). Les matières valorisées seront employées dans des filières autres que celles d'origines.

Gestion peu complexe

DEEE

Gestion complexe

Figure 16 : Classification et complexité et réseaux de logistique à rebours
(Beaulieu et al., 1999)

Le réseau logistique correspondant risque alors d'être complexe à gérer, compte tenu notamment de l'incertitude technologique et capacitaire quant au traitement des mousses GEM froid par exemple, de l'incertitude commerciale des marchés de reprise des matières (prix de marché ou spéculatif selon les matières) ou des difficultés de substitution de la matière originale par la matière recyclée. Cette notion de complexité se situe donc à deux niveaux : dans la difficulté à mettre en place le réseau en question d'une part et à gérer les différentes interactions entre les acteurs de ce réseau d'autre part.

1.3 La chaîne de valeur

Quelque soit le niveau de service et la configuration centralisée ou non de la chaîne de retour, le coût de rétrologistique sera la somme de plusieurs coûts : entreposage, transport, traitement, gestion des processus de retour et coûts associés au réseau de rétrologistique utilisé et au niveau de service requis dans ce réseau. La chaîne de valeur de la filière DEEE

sera donc composée d'activités que devront se partager un nombre plus ou moins grand d'intermédiaires. Elle est présentée dans le tableau ci-dessous.

Activité
Collecte

Définition Générale Reverse logistics

Démarche visant à détourner les actifs
secondaires et à les diriger vers un
réseau à valeur ajoutée.

Activité de la filière DEEE
« Gatekeeping », visant à faire entrer
dans la filière les EEE en fin de vie et les
DEEE. Pour les DEEE ménagers, les
déchetteries et le réseau de distribution
seront les principaux pourvoyeurs des
flux entrants.

Triage

Séparation des différentes matières qui
auraient été récupérées en vrac ou
démontage des produits complexes.

Séparation des flux DEEE principaux
GEM Hors froid, GEM froid, PAM,
tubes et lampes et des produits
réparables.

Entreposage

Constitution d'un volume suffisant
pour permettre un transport de façon
économique.

Regroupement par flux, massification
et conditionnement.

Transport

Déplacement des actifs secondaires
vers les activités de traitement
intermédiaire ou de retraitement.

Transport vers unités de traitement.

Traitement
intermédiaire

Série d'activités en vue de préparer les
actifs secondaires pour les activités de
retraitement.

Dépollution phase 1 (retrait câbles,
batterie, écran LCD, cartes
électroniques, huiles...).
Réparation des EEE.

Transport
(éventuel)

 

Déplacement des composants
spécifiques vers des filières certifiées
(exemple : traitement carte électronique,
batterie, huiles, etc.).

Retraitement

Activités permettant à l'actif
secondaire de retrouver un état lui
permettant d'être réutilisé (réparation,
reconditionnement ou recyclage
d'actifs).

Dépollution phase 2 (démantèlement
final, retrait de substances dangereuses),
et valorisation matière ou énergétique.
Réutilisation de EEE dans des réseaux
de vente secondaire.

Transport

 

Transport des matières recyclées pour
affinage
(exemple : sidérurgiste, déchets
ultimes ou réemploi direct : industriels
plasturgistes).

Tableau 10 : Chaîne de valeur de la filière DEEE

Si l'enjeu du développement durable est souvent à l'origine de la définition et de la mise en place des filières de traitement de déchets, la pérennité de celles-ci est bien liée à leurs capacités à trouver un modèle économique viable. Ainsi, les coûts liés aux flux de retour doivent rendre la transaction initiale (l'acte de vente) rentable et donc commercialement admissible par le consommateur. Les gestionnaires vont donc s'atteler à la réduction des coûts

en configurant la chaîne de valeur de la filière DEEE, en fonction de deux paramètres principaux développés ci-dessous.

1.3.1 La recherche du point optimum en termes de coûts de collecte et logistiques

Initiative Recyclage à Nantes a montré que les coûts logistiques représentaient en moyenne 66% des coûts métiers, décomposés en coûts de collecte primaire, de tri, de regroupement et de transport en unité logistique complète. Les trois derniers sont globalement bien maîtrisés par les professionnels de la logistique. Les coûts de collecte primaire sont aujourd'hui quant à eux mal maîtrisés car peu connus. C'est pourquoi l'étude sur les coûts de collecte primaire1 apporte un éclairage utile. On constate d'abord la forte disparité des coûts de collecte (facteur 1 à 10) en fonction du contexte urbain ou rural, et des options techniques de collecte retenues. Le rapport précise en conclusion, « qu'en milieu urbain, les coûts seront moins élevés qu'en milieu semi urbain ou rural, car plus les quantités sont importantes, plus les frais fixes d'équipements à la tonne diminuent ». Enfin, un autre enseignement important est à retirer de cette étude : si l'on double les volumes de collecte dans un même contexte, passant de 2,5 à 5 kg/hab/an, le coût à la tonne collectée évolue de 146,4 à 108,6 €/t (soit une baisse de 26%). Autrement dit, le potentiel de collecte estimé à 26 kg/an/hab devra régulièrement pousser les intervenants de la filière à se reconfigurer pour optimiser les coûts de collecte primaire.

1.3.2 La recherche de valeur ajoutée dans les prestations de traitement

Les activités de traitement seront les principales sources de création de valeur dans la filière. Les Eco-organismes seront amenés, à partir des réponses aux appels d'offres, à déterminer un barème de coûts de prestations, sur la base duquel seront rémunérés les acteurs « productifs ». Ainsi, le positionnement de certains acteurs importants des métiers des déchets sera guidé par la valeur ajoutée qu'ils vont pouvoir capter dans la nouvelle chaîne de valeur (positionnement sur un couple prestations / nature de flux). Par exemple, la mise en place de la filière peut être une opportunité pour les centres de massification de générer des revenus supplémentaires. Ainsi, la phase de dépollution phase 1 sur le flux GEM hors froid est maintenant rendue obligatoire par la Directive et concerne le retrait des matériaux et

1 Etude réalisée par le Cabinet TERRA pour le compte l'ADEME. Synthèse en Annexe 7.

substances répertoriés. Cette phase pourrait être prise en charge directement en centre de tri / massification avant l'envoi sur des installations existantes équipées de broyeurs mécanisés de grande capacité. L'arrivée de nouveaux entrants et la création de nouvelles prestations dans la filière vont donc amener une redistribution de la valeur ajoutée entre les acteurs.

2 LES DEFIS LOGISTIQUES DE LA FUTURE FILIERE DEEE

Que se passe-t-il donc aujourd'hui ? Les différents interlocuteurs que nous avons rencontrés et les conférences auxquelles nous avons participées nous montrent une phase de préparation intense :

- les producteurs décryptent la réglementation et essayent de déterminer l'étendue de leur responsabilité.

- les distributeurs se voient imposer la règle du « un pour un ». Si les directions « développement durable groupe » se disent prêtes à jouer le jeu, en pratique en magasins, tout le monde n'est semble-t-il pas encore au courant1.

- Les Eco-organismes candidats ne sont pas encore certifiés. Certains ont pourtant déjà retenus des prestataires.

- Les professionnels du déchet voient dans cette filière des opportunités de développement important et se positionnent auprès des Eco-organismes (réponses aux appels d'offres).

- Les institutionnels légifèrent (et doivent encore définir l'organisme coordonnateur), les fédérations, l'ADEME et les autres structures régionales informent, communiquent et expliquent.

- Les collectivités territoriales en charge des déchetteries tentent de négocier et de financer leurs points de collecte DEEE.

- Le citoyen est pas ou peu informé.

Nous voyons ainsi que les problématiques d'organisation logistique ne sont pas aujourd'hui les préoccupations immédiates des acteurs. Elles sont néanmoins sous-jacentes et représenteront rapidement des défis importants pour la filière. En voici quelques-uns.

1 Que Choisir 432- 2005

2.1 La capacité des « gatekeeping1 » à fournir un flux entrant critique de DEEE

Les réseaux à rebours sont confrontés au défi de générer une quantité suffisante d'actifs à faire transiter, sans quoi l'optimisation globale de la filière ne pourra se faire. La forte participation des utilisateurs finaux sera donc nécessaire pour assurer une masse critique d'actifs récupérés, condition sine qua none au succès. Elle met en lumière une première action critique : informer et expliquer afin que le consommateur modifie son comportement pour alimenter de manière quasi « naturelle » les points d'accueil en déchetterie et en magasin. Des actions de conservation et de tri préalables aux points de collecte seront aussi nécessaires pour garantir encore une meilleure efficacité de la filière en aval. Enfin, certains articles devront être entreposés dans des conditions propres à conserver leur intégrité pour leur futur réemploi.

2.2 L'optimisation des coûts logistiques de la filière

Une des raisons invoquée de l'inefficacité de la rétrologistique est la méconnaissance du coût logistique total des processus retours.

Les niveaux de collecte et de logistique recèlent, à notre avis, des meilleurs gisements d'optimisation à court terme, en agissant sur trois leviers principaux : la spécialisation des points de collecte en zone urbaine, le tri à la source et acheminement direct en centre de traitement et enfin la massification des flux DEEE sur plateforme.

Un autre moyen utilisé pour optimiser les coûts logistiques est le compactage (emballages cartons, plastiques). Dans notre cas, les règles de dépollution phase 1 ne permettent pas de compacter le GEM pour diminuer le poids spécifique (rapport poids/volume).

2.2.1 La spécialisation des points de collecte en zone urbaine

L'étude Initiative Recyclage sur la métropole nantaise a montré que la loi de Pareto s'applique à la collecte des déchets, 22 % des points de collecte générant 78 % du tonnage collecté. Ce constat a amené les intervenants à distinguer de facto les points de collecte à faibles, moyens et forts potentiels. Si l'on admet que la proximité des points de collecte et des citoyens en possession de DEEE contribuera à l'augmentation des volumes collectés, ne doit-

1 Contrôle de l'accès des flux retours. Cf Partie I.

on pas envisager, en zone urbaine dense, la spécialisation de points de collecte DEEE ? Elle permettrait :

- une concentration des flux DEEE sur quelques déchetteries avec une mise à disposition de surfaces spécifiques de l'ordre de 50 à 100m2.

- un tri des principaux flux directement par le dépositaire du DEEE dans des contenants dédiés et adaptés aux produits.

- des coûts de ramassage limités pour les points de collecte à potentiel moyen voire inexistants pour ceux à faible potentiel.

La problématique est identique pour les points de collecte de la grande distribution. Au-delà de la reprise du « un pour un », on ne sait pas très bien aujourd'hui quelles seront les dispositions prises par les grands magasins en général. Mais, peut-on simplement envisager un instant ces acteurs organiser et trier les flux de DEEE sans contrepartie quand la collecte primaire en déchetterie sera vraisemblablement financée ?

2.2.2 Le tri sur les points de collecte et l'acheminement direct en centre de traitement

Une autre inefficacité constatée de la rétrologistique concerne les retours non autorisés et non identifiés. Dans notre cas, l'identification des produits est essentielle et permettra le tri des DEEE par grandes familles.

Lors de l'étude Initiative Recyclage, les DEEE ont été essentiellement collectés en mélange et stockés en benne (PAM et écrans) ou à l'unité (GEM majoritairement). En déchetterie non urbaine, les DEEE et les encombrants sont généralement stockés à part, sans conditionnement particulier. Les auteurs de l'étude recommandent ainsi le tri des DEEE aux points de collecte, selon les cinq grandes catégories prédéfinies. Il s'agit, précisent-ils, d'un facteur d'amélioration globale d'efficacité de la filière. Cela permet de limiter notamment les coûts de main d'oeuvre liés à l'opération de tri réalisée sur les plateformes de regroupement, et de livrer les centres de traitement en direct à partir des gros points de collecte. Il reste donc une réflexion globale à mener sur l'adaptation, la standardisation et l'emploi de contenants préalables à un stockage différencié des produits aux points de collecte.

Enfin, 8% en moyenne des flux GEM1 sont collectés directement par des structures de type Envie et Emmaüs et réutilisés après remise en état. La rationalisation à venir du processus de collecte devra aussi prendre en compte la réutilisation de ces produits, en les triant directement sur les points de collecte à fort potentiel ou sur la plateforme de regroupement.

2.2.3 La massification des DEEE sur un nombre limité de plateformes

L'ensemble des points de collecte en zone rurale ou urbaine de faible densité ne livrant pas en direct les centres de traitement, passera nécessairement par des plateformes de massification avec deux objectifs principaux :

- pour les flux acheminés en vrac, le regroupement des DEEE par nature de flux.

- le conditionnement en palettes ou contenants adaptés, et la constitution de lot critique pour le transport vers les centres de traitement.

D'autre part, l'Initiative Recyclage a montré qu'un nombre trop important de points de regroupement ne favorise pas la concentration des flux. Cela engendre soit une durée d'entreposage longue (incidences sur la fluidité), soit un coût de ramasse non optimisé (coût à la tonne plus élevé). Ainsi, les centres de regroupement devront être judicieusement positionnés à l'échelle d'un territoire. L'ensemble de nos rencontres nous permet de conclure qu'un centre de regroupement par département semble pertinent dans un premier temps.

1 Etude Initiative Recyclage

2.2.4 Schéma logistique reconfiguré

Figure 17 : La « reverse supply chain » des DEEE ménagers

2.3 Le développement de capacité de traitement en France

L'étude nantaise précise enfin qu'il existe globalement en France des capacités suffisantes de démantèlement et de traitement pour atteindre les premiers objectifs de valorisation fixés par la Directive. Ce constat est cependant à nuancer par nature de flux. Ainsi, il n'existe pas à ce jour d'unité opérationnelle pour le traitement des mousses isolantes (dépollution phase 2). C'est l'un des objets de la création de la future entité Veolia à Angers.

Il est aussi à noter qu'il n'existe pas aujourd'hui de broyeur spécifique PAM en France. Ces produits sont aujourd'hui incinérés ou détruits dans des broyeurs de grande capacité peu adaptés aux déchets de petite taille. Pour améliorer le taux de valorisation matière de ces déchets, on estime à terme, avec le développement de nouveaux procédés, pouvoir regrouper ce flux avec celui des écrans et des tubes sur des centres de tri multi-spécialisés PAM et

Ecrans. De manière générale, la baisse des coûts de traitement sera réellement effective avec des avancées liées à la R&D.

Enfin, certains pays de l'Union Européenne1 en avance dans la mise en oeuvre de leurs réglementations ont structuré leur filière et utilisent des techniques de traitement adaptées. Les acteurs majeurs tels Veolia ou Suez présents dans ces pays, exploitent ces technologies. Ils ont donc un avantage concurrentiel significatif et pourront être à même d'installer en France des unités de traitement de nouvelle génération.

2.4 Quel partage de la chaîne de valeur dans la filière ?

2.4.1 Une logique purement économique et industrielle

Les activités de collecte, logistiques et de traitement sont nombreuses et n'auront donc pas le même attrait2. Certaines prestations à valeur ajoutée forte ne seront d'ailleurs accessibles que pour un volume critique afin d'amortir des coûts d'investissement importants, et vraisemblablement prises en charge par des acteurs majeurs sur des zones de chalandise élargies (exemple de l'unité de Veolia). Cette logique économique et industrielle est donc liée à deux caractéristiques :

- la massification des flux pour diminuer les coûts d'approche logistique.

- un fonctionnement continu et une saturation des équipements industriels pour optimiser les coûts de traitement à la tonne.

2.4.2 Une logique de valorisation du tissu économique local et social

D'autres activités, moins rémunératrices, seront plus dépendantes des coûts logistiques et seront traitées par des acteurs locaux plus diffus. Ainsi, le démantèlement des flux GEM hors froid ayant une valeur potentielle de recyclage moindre est déjà réalisé localement sur des installations existantes.

Enfin, l'ESS, telles les organisations Envie et Emmaüs, s'est déjà spécialisée sur ces activités,
parfois avec un maillage national. Bien que non soumises à l'impératif de rentabilité, elles

1 Belgique, Danemark, Pays Bas, Finlande en 2004

2 Se reporter à la description de la chaîne de valeur

devront défendre leur position dans la nouvelle chaîne de valeur de la filière pour faire perdurer leur modèle économique.

2.4.3 Des opportunités de partenariat

La spécialisation de la filière autour de deux grands coeurs de métiers, la logistique et le traitement, permet d'envisager des alliances entre les acteurs. Elles peuvent être de deux natures :

- partenariat stratégique à l'échelle nationale qui concourre à la structuration de la filière

(exemple de Sita Suez et Geodis).

- partenariat à une échelle locale ou régionale.

Le projet d'implantation du site Veolia par exemple s'appuiera probablement sur le maillage logistique existant du réseau Envie Ouest pour l'acheminement d'une partie du flux de DEEE sur le site d'Angers.

2.5 Le pilotage de la filière par un système d'informations intégré

L'optimisation d'un réseau logistique global passe inévitablement par un flux d'information structuré remontant tout ou partie des activités de la filière. Dans les supply chains performantes, le partage des systèmes d'informations entre les acteurs est bien souvent un pré requis pour piloter les flux physiques transitant dans la filière. Un système d'informations intégré et partagé par l'ensemble des acteurs devient alors un facteur supplémentaire de performance de la filière.

La mise en oeuvre d'un système d'informations et de communication partagé par une même communauté d'acteurs est un vrai défi. Il est pourtant recommandé pour le pilotage global de la filière qui nécessitera :

- de gérer les flux transitant aux différentes étapes de la filière.

- d'assurer la traçabilité des DEEE.

- d'agréger les données et de simplifier la gestion des Eco-organismes.

- d'assurer une veille réglementaire.

- à moyen terme, de connaître les capacités et disponibilités des différents acteurs.

Un premier exemple de cette stratégie de mutualisation de systèmes d'informations est la mise en oeuvre prochaine par l'ADEME du service de déclaration au registre des producteurs1.

3 PROPOSITION D'UNE STRATEGIE LOGISTIQUE POUR LA FUTURE FILIERE DEEE AU PLAN NATIONAL

3.1 Méthodologie

S'il existe des méthodologies précises d'implantations de plateformes utilisées par la grande distribution pour positionner leurs entrepôts de massification des flux, elles pourront difficilement s'appliquer à la filière DEEE. En effet, cela nécessite la maîtrise d'un certain nombre de caractéristiques, notamment un mix produit connu et stable et une vision stratégique à long terme, paramètres aujourd'hui mal maîtrisés pour cette filière en construction. Notre proposition d'organisation logistique s'appuie donc sur une approche pragmatique, basée sur l'enquête terrain, les conclusions retirées de nos analyses et confrontées avec quelques acteurs de la filière.

3.2 Hypothèses

Nous formulons les hypothèses suivantes :

- Le périmètre est limité à la prise en charge des DEEE ménagers sur les flux GEM froid, GEM hors froid, PAM et enfin tubes et écrans.

- La nature de l'actif secondaire et des traitements à réaliser sont des variables prépondérantes dans le degré de complexité de la filière des DEEE.

- Les recommandations logistiques de l'étude Initiative Recyclage et les données

confrontées et admises par les acteurs de la filière sont intégrées dans ce scénario.

- Des centres de traitement spécialisés (GEM Froid) devront être créés. Les capacités

existantes seront utilisées pour d'autres flux.

- Un seul acteur « productif » est privilégié par zone géographique et par nature de flux.

1 Paragraphe 1.4.5 Partie II, page 39.

3.3 La filière logistique pour le flux GEM hors froid, PAM et écrans

Le schéma préconisé (et présenté ci-après) vise la massification des flux après la collecte primaire, la réduction des kilomètres parcourus jusqu'aux centres de traitement existants. Concernant les flux GEM hors froid et PAM et écrans, les broyeurs de grande capacité pourront être utilisés, lorsque la problématique de dépollution phase 1 sera gérée. Enfin, nous nous appuyons aussi sur les recommandations de l'étude Initiative Recyclage pour le schéma logistique de collecte :

- Un prestataire de ramassage par zone urbaine pour la quasi-totalité des flux.

- Les points de collecte de grande capacité (>120 tonnes/an) achemineront les DEEE

directement vers les centres de traitement, positionnés majoritairement aux abords des

métropoles dans le cas de la région Pays de la Loire.

- Les points de collecte de faible capacité passeront par un seul centre de regroupement avec une capacité d'accumulation pour composer rapidement des lots d'expédition et ainsi augmenter la rotation des contenants adaptés sur la plateforme.

Suite au point IV.2.2.3, la couverture en centres de tri unique par département sur les Pays de la Loire est présentée Carte 2. Un cercle correspond à une zone de collecte dédiée à ce centre de regroupement. Ces derniers seront dimensionnés au regard du potentiel de collecte sur leur territoire (hors flux de DEEE acheminés directement sur les centres de traitement).

Démantèlement Informatique Traitement consommables Traitement piles et accus

Autre traitement DEEE

60 Kms

Carte 1 : Cartographie des points de Carte 2 : Cartographie des centres de

collecte (Source ADEME) regroupement (Source ADEME) 94

L'extrapolation de ce schéma au plan national est soumise à certaines considérations locales (densité de population, positionnement des zones urbaines et des centres de traitement existants). Pour les intervenants rencontrés, ce découpage des zones de collecte par département paraît le plus réaliste.

3.4 La filière logistique pour le flux GEM froid

Des unités de traitement spécifiques aux flux GEM froid devront être installées sur le territoire français. Nous estimons la zone de chalandise pour ces unités à environ 250 Kms (cohérent avec l'approche de Veolia et confirmé par d'autres sources). Cela nous donne le schéma suivant.

250 Kms

Carte 1 : Unités de traitement spécifiques aux flux GEM froid

Nous constatons que l'installation, dans un premier temps, de cinq unités spécialisées pertinemment positionnées, permettrait de réaliser un premier maillage du territoire national. Ces centres de traitement seraient approvisionnés en DEEE depuis les plateformes de regroupement définies précédemment, ou en direct à partir de points de collecte importants.

3.5 Synthèse

Le premier schéma présenté ci-dessus est basé sur des considérations pragmatiques et deux principes directeurs :

- un acteur privilégié pour le niveau de collecte et logistique. Les flux de déchets non partagés arrivent plus rapidement à des tailles de lots critiques, premier facteur d'optimisation en logistique. Le maillage des Pays de La Loire fait ainsi apparaître la proximité des unités de traitement existantes et des centres de regroupement proposés, diminuant les coûts logistiques d'approche.

- l'utilisation de capacités existantes de traitement, permettant d'atteindre rapidement les objectifs de valorisation de la Directive, même si à terme le développement de nouveaux procédés adaptés aux déchets sera nécessaire pour faire baisser significativement les coûts de traitement à la tonne.

Enfin, notre scénario basé exclusivement sur le transport routier ne prend pas en compte les modes de transport alternatifs. Si l'on admet que le seuil de rentabilité du fer est de l'ordre de 500 Kms et que le fluvial est plus adapté aux pondéreux, une logique multimodale ne paraît pas adaptée aujourd'hui à cette filière.

CONCLUSION : TRANSFORMER UN ELDORADO ATTENDU
EN UNE VERITABLE FILIERE INDUSTRIELLE

<< Reverse logistics, un nouvel eldorado ? »1. En effet, la plupart des grands logisticiens en quête de diversification y cherche aujourd'hui de nouvelles opportunités de développement. Si la logistique à rebours concerne les retours d'invendus, le service après vente et le retour des produits en fin de vie, c'est bien cette dernière activité, sous l'impulsion de nouvelles réglementations, qui offre les perspectives les plus intéressantes. Effectivement, c'est dans un premier temps, un potentiel de traitement de quelques 250 000 tonnes de DEEE par an qui attend l'ensemble des acteurs de la filière, représentant 4 kg/hab./an (1er objectif fixé par la Directive), soit environ un sixième du potentiel total estimé de DEEE ménagers et professionnels.

8 mois après la date d'application de la Directive, où en est-on ? Le Décret 2005- 829 du 20 juillet 2005 oblige les producteurs à assurer le retour et le traitement des DEEE, selon le principe du pollueur payeur. A ce jour, quelques industriels précurseurs ont pris en charge le retour de leurs produits en fin de vie, dans une logique commerciale ou de développement durable. A l'instar d'autres filières de déchets (Eco-Emballages), la logique d'<< Eco-organismes » va donc s'imposer pour la gestion des DEEE ménagers. D'une part, l'organisation d'une nouvelle filière et la mutualisation de moyens à l'échelle nationale sont facteur de réduction de coûts. D'autre part, les métiers concernés par la filière sont spécifiques et souvent loin des coeurs de compétences des producteurs. La grande majorité des producteurs s'oriente donc vers une adhésion à un des Eco-organismes qui est actuellement en charge de sélectionner les prestataires et d'organiser la filière.

Présentes localement, les filières de traitement ou de déconstruction existantes ainsi que les structures de l'économie sociale et solidaire ont basé leur modèle économique sur la valorisation énergétique, la vente de matières recyclées ou de matériels réparés. Aucune n'a de vision globale de la filière et peu ont les moyens de se développer seules à grande échelle.

1 Olivier Cognasse (Janv./Fèv. 2006), Titre du dossier, Stratégie Logistique.

Et pourtant, sous l'évolution de la réglementation, la chaîne de valeur se reconfigure aujourd'hui autour de 3 métiers principaux : la collecte primaire (le ramassage de DEEE à des points de collecte diffus sur un territoire), la logistique (tri et massification) et enfin le traitement et la valorisation. De nouveaux entrants, acteurs internationaux des métiers de la logistique et de traitement des déchets, y voient une opportunité de se diversifier et de capter de nouveaux gisements de valeur. Ils constitueront seul ou en partenariat les premiers pôles majeurs, facteurs de structuration d'une filière en construction.

Que se passera-t-il d'ici le 31/12/2006 ? Il reste avant tout à finaliser les aspects réglementaires et à valider un modèle économique pour la filière (répartition des flux financiers à définir). Il sera aussi nécessaire de convaincre les collectivités locales de jouer le rôle principal de collecteur de flux de DEEE entrants avec la grande distribution. Car le premier défi logistique sera la capacité du « gatekeeping » à fournir un flux de DEEE critique, sans lequel toute optimisation des activités de la filière devient difficile. Reste enfin à « éduquer » le consommateur final pour l'amener à déposer ses appareils usagers aux points de collecte.

C'est le principal enjeu de la phase de montée en régime de la filière sur les 6 à 12 prochains mois. En aval, l'utilisation de capacités logistiques et de traitement existantes devrait permettre d'atteindre les objectifs chiffrés de collecte et de valorisation au mieux au 31/12/2006 et plus probablement au cours de l'année 2007. L'ensemble des acteurs pourra alors s'articuler autour des schémas logistiques que nous proposons. D'ici deux à trois ans, le démarrage d'unités de traitement aujourd'hui inexistantes et la mise au point de procédés nouveaux feront enfin réellement entrer la filière dans une ère industrielle.

BIBLIOGRAPHIE

Ouvrages :

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- << Reverse Logistics, Un nouvel eldorado >>, (Janvier Février 2006), Olivier Cognasse, Stratégie Logistique.

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- << Reverse Logistique >>, Aurélia Kawaishi, sous la direction de Christopher Townley.

- << Etude Initiative Recyclage, étude pour une filière de recyclage des déchets

d'équipements électriques sur le territoire national >> (Septembre 2004), étude réalisée

par la SCRELEC.

- << Etude des coûts de collecte primaire des DEEE supportés par les collectivités locales >> (3 mars 2006), étude réalisée par le cabinet TERRA pour le compte de l'ADEME.

- << Opération pilote de gestion des matériels électriques électroniques professionnels installés en fin de vie en région >> (Mars 2003), étude réalisée par l'association ELEN.

Sites Internet :

- www.ademe.fr

- www.dechetcom.com

- www.prorecyclage.com

- www.journaldelenvironnement.fr

- www.federec.org

- www.rlec.org (Reverse Logistics Executive Council : définitions, glossaire, projets...)

- www.fbk.eur.nl/OZ/REVLOG/ (groupe de travail européen sur la reverse logistique : thèmes actuels de travail, études de cas dans de nombreux secteurs et dans de nombreuses entreprises (VW, Dell, IBM, BASF, Philips, Unilever, Alcatel, Philip Morris, etc.), liste des publications, actualités, etc.)

- www.logistique.com, www.logistique.com/reverse_logistics.htm (définitions, infos diverses, etc.)

- www.insead.edu, www.insead.edu/CHER/research/ops/revlog.htm («REVLOG: an European network on reverse logistics - a short overview of its results», «Matching demand and supply to maximise profits from remanufacturing», etc.)

- www.genco.com, www.servex.com (/revlogistics.htm) (exemple de gestion de la reverse logistique au sein d'entreprises).

- www.equinox.scs.unr.edu/homepage/rtl/reverse/glossary.html (glossaire de la reverse logistique, en langue anglaise.)

- www.polygistique.polymtl.ca/projets.asp?n=28 (plan d'une thèse effectuée sur la reverse logistique).

ANNEXES

Annexe 1 : Décret n°2005-829 du 20 juillet 2005 Annexe 2 : Liens internet des arrêtés

Annexe 3 : Avis du 26/10/2005 concernant la liste des EEE par catégorie

Annexe 4 : Schéma logistique mis en place et schéma optimisé réaliste de l'étude Initiative Recyclage

Annexe 5 : Recommandations d'organisation des flux par types de point de collecte, production de DEEE et capacité d'accumulation sur le point de collecte d'Initiative Recyclage

Annexe 6 : Analyse des coûts de l'opération pilote menée par ELEN

Annexe 7 : Synthèse de l'étude réalisée par le Cabinet TERRA en 2005/2006, pour le compte de l'ADEME

Annexe 1 : Décret n°2005-829 du 20 juillet 2005

Annexe 2 : Liens internet des arrêtés

- Arrêté du 23 novembre 2005 relatif à l'agrément prévu à l'article 19 du décret n° 2005-829 du 20 juillet 2005

http://www.ecologie.gouv.fr/IMG/pdf/arreteAgrementProfess_JO041205.pdf

- Arrêté du 23 novembre 2005 relatif aux modalités de traitement des déchets d'équipements électriques et électroniques prévues à l'article 21 du décret n° 2005- 829 du 20 juillet 2005

http://www.ecologie.gouv.fr/IMG/pdf/arreteTraitement_JO41205.pdf

- Arrêté du 25 novembre 2005 fixant les cas et conditions dans lesquels l'utilisation dans les équipements électriques et électroniques de plomb, de mercure, de cadmium, de chrome hexavalent, de polybromobiphényles ou de polybromodiphényléthers est autorisée

http://www.ecologie.gouv.fr/IMG/pdf/Arrete_subst_DEEE.pdf

- Arrêté du 6 décembre 2005 relatif aux agréments et approbations prévus aux articles 9, 10, 14 et 15 du décret n° 2005-829 du 20 juillet 2005

http://www.ecologie.gouv.fr/IMG/pdf/arrete_AgrementArt9101415_20051206.pdf

- Arrêté du 13 mars 2006 relatif au registre des producteurs http://www.ecologie.gouv.fr/IMG/pdf/arrete_registre_20060313.pdf

Annexe 3 : Avis du 26/10/2005 concernant la liste des EEE par
catégorie

Annexe 4 : Schéma logistique mis en place et schéma optimisé
réaliste de l'étude Initiative Recyclage

Schéma logistique mis en place

Schéma logistique optimal réaliste

Annexe 5 : Recommandations d'organisation des flux par types de
point de collecte, production de DEEE et capacité d'accumulation sur
le point de collecte d'Initiative Recyclage.

Annexe 6 : Analyse des coûts de l'opération pilote menée par ELEN.

Annexe 7 : Synthèse de l'étude réalisée par le Cabinet TERRA en
2005/2006, pour le compte de l'ADEME.






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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore