UNIVERSITE DE DSCHANG
UNIVERSITY OF DSCHANG
FACULTE DES LETTRES
DEPARTEMENT D'HISTOIRE
ET SCIENCES HUMAINES
HISTORY DEPARTMENT
FACULTY OF LETTERS
AND SOCIAL SCIENCES
CHASSE, POUVOIR ET SOCIETE AUX ABORDS NORD DU BASSIN DU
CONGO
(XVIIE - XXE SIECLE)
Projet de thèse pour le Doctorat
/Ph.D
Présenté et soutenu en vue de
l'obtention du Diplôme d'Etudes Approfondies (D.E.A.) en Histoire
Par
Joseph Jules SINANG
Titulaire d'une Maîtrise en Histoire
Sous la direction de :
Dr. Albert François DIKOUME et Dr Jean KOUFAN
MENKENE
Chargé de cours
Chargé de cours
Année académique 2007-2008.
AVANT-PROPOS
Les problèmes relatifs à la protection de la
biodiversité et au développement durable constituent l'une des
préoccupations majeures de l'humanité en ce début de
troisième millénaire où, les menaces de plusieurs natures
mettent en péril la vie de millions d'habitants de notre planète.
Réchauffement de la terre, changements climatiques, pollution
industrielle, appauvrissement de la faune et de la flore en raison d'un
développement «naturophage» sont autant de dangers
qui aujourd'hui, interpellent la conscience universelle1(*). D'où l'urgence pour
l'humanité de se mobiliser en vue de circonscrire le drame.
L'Université s'en trouve ainsi interpellée au premier chef. La
recherche scientifique constitue à cet effet, l'un des domaines par
lesquels elle entend jouer son rôle. L'apport des sciences humaines dans
ce débat, longtemps considéré comme la seule affaire des
spécialistes des sciences de la nature et des écologistes, reste
déterminant si tant est que la question de l'environnement est d'abord
un phénomène anthropique. L'homme étant à la fois
acteur et victime de ce processus. Nous nous proposons ainsi d'y apporter
notre modeste contribution. C'est dans ce sens que nous choisissons comme
sujet de thèse, le thème dont l'intitulé suit :
Chasse, Pouvoir et Société aux abords nord du
bassin du Congo
(XVIIè - XXè
siècle)
Il vise à cerner les rapports entre l'Homme et la faune
sauvage dans le bassin du Congo. Comme il est de rigueur pour le DEA en
Histoire dans notre institution, le présent mémoire est un projet
de thèse qui comprend deux parties :
La première partie, consacrée à la
présentation du projet de recherche, s'articule autour des rubriques
suivantes : Pertinence du sujet, cadre conceptuel et théorique,
délimitation du cadre spatio-temporel, revue critique de la
littérature, problématique, méthodologie et
présentation des sources, plan provisoire, chronogramme des
activités , sources et références bibliographiques
déjà recensées .
La deuxième partie consiste à la
rédaction intégrale d'un chapitre contenu dans le plan. Le choix
a été ainsi porté sur le chapitre VI
intitulé : La chasse dans la vie quotidienne des populations du
Sud-Est cameroun. Il met en exergue le rôle social,
économique, culturel, et politique de la chasse dans les
sociétés du Sud-Est Cameroun.
Première partie :
Présentation du projet de
Thèse
I - PERTINENCE DE L'ETUDE
L'activité cynégétique est liée
au destin de l'homme sur la terre2(*). Sur tous les continents et par delà les
époques, la chasse apparaît comme l'une des activités
accompagnatrices de l'homme dans son histoire, à telle enseigne qu'il
n'existe point de peuple pour qui elle n'ait suscité un quelconque
intérêt.
Apparue dès les premières lueurs de la vie sur
notre planète, la chasse a subi de profondes mutations, en synergie avec
la trajectoire évolutive de l'homme. Aussi, du matériel
élémentaire utilisé dès ses origines, est-on
passé aux armes de chasse plus performantes, avec pour principal point
de rupture, l'émergence de la technologie du fer.
Les techniques de chasse elles mêmes se sont
diversifiées au gré des civilisations au point où, de
nos jours, il en existe un éventail assez considérable variant en
fonction du type de gibier. La chasse s'inscrit ainsi en même temps,
dans le champ culturel, économique, politique, social et technologique.
L'on peut à cet effet comprendre l'intérêt que les
chercheurs en sciences sociales lui ont accordé au fil du temps,
malgré le lourd préjugé qui fait d'elle une simple
activité de subsistance, et même une économie des peuples
primitifs. Or dans de nombreuses sociétés humaines, la chasse est
une activité valorisante ayant généré un corps de
métier, celui de chasseur.
A la fin du XVè siècle, la chasse est au coeur
des préoccupations écologiques de régulation et de gestion
rationnelle des espèces animales dans les régions fortement
anthropisées. D'où l'adoption d'une législation de plus en
plus rigide qui réglemente l'activité cynégétique.
C'est ici qu'apparaît la dialectique entre nécessité
nutritionnelle, support des mentalités collectives, enjeux
économiques d'une part, et impératif de protection de
l'environnement, d'autre part.
Cette dialectique s'inscrit dans le cadre d'un problème
de grande ampleur, celui de la véritable place de l'homme dans la
préservation du patrimoine naturel. Cette préoccupation a
été à l'origine de l'émergence du concept de
développement durable qui, d'après la commission mondiale sur
l'environnement et le développement, est « un
développement qui répond aux besoins des
générations du présent sans compromettre les
capacités des générations futures à répondre
aux leurs»3(*).
Il est ainsi question de savoir que l'on a le droit d'utiliser les ressources
de la terre, mais aussi le devoir d'en assurer la pérennité pour
les générations à venir. Autrement dit, il s'agit
d'assurer un développement économique et social respectueux de
l'environnement. Ceci passe par la prise en compte des trois aspects que les
experts appellent, « les piliers du développement
durable »4(*) ; notamment l'économie, le social et
l'écologie, auxquels s'ajoute de plus en plus, la gouvernance, qui
suppose la promotion de la démocratie et le respect de l'Etat de droit.
Toutefois, cette démarche ne tient pas compte de
l'identité culturelle des populations des régions
concernées : Tout porte à croire que le milieu passe avant
l'homme. Cependant, peut-on raisonnablement dissocier le patrimoine culturel
du patrimoine naturel ? Telle est l'interrogation majeure qui sous-tend
la présente réflexion et qui remet au goût du jour
l'épineux débat entre la nature et la culture. Toutefois, il ne
se pose pas ici en terme d'opposition ou d'antériorité de l'un
par rapport à l'autre, mais dans la perspective d'une
interpénétration entre les deux notions, tant il est vrai que la
culture est enracinée dans son milieu naturel, et son infrastructure en
dépend. Sur cette base, l'on peut se demander si le véritable
développement durable ne trouve pas son fondement dans la vie culturelle
d'un peuple en symbiose avec son milieu naturel. Autrement dit, un
développement durable « viable » n'est-il pas
lié au relativisme culturel5(*) ? Il s'agit là d'un point de vue crucial
que nous entendons mettre en exergue dans cette thèse, dans l'esprit de
l'UNESCO pour qui :
Le patrimoine culturel (immatériel), transmis de
génération en génération, est recréé
en permanence par les communautés et les groupes, en fonction de leur
milieu, de leur interaction avec la nature et leur histoire et leur procure un
sentiment d'identité et de continuité, contribuant ainsi à
promouvoir le respect de la diversité culturelle et la
créativité humaine6(*).
Un débat intéressant s'engage dès lors au
sujet de la stratégie de protection de l'environnement. Celui de
l'intégration de la culture dans tout processus de développement
durable. De ce fait, l'apport des sciences sociales et humaines est
déterminant.
L'Histoire, axe majeur des dites sciences, y a un rôle
fondamental à jouer. Science de l'Homme dans le temps et dans l'espace,
elle est susceptible de saisir la fluctuation et l'évolution de tout ce
qui est en rapport avec l'Homme. Elle est capable dans une certaine mesure de
rendre compte de la manière dont les sociétés du
passé ont géré leurs milieux, et en même temps,
comment ces milieux ont agi sur celles-ci. Il est question de
révéler la perception et la sensibilité des
sociétés passées sur leur environnement7(*). Karl Marx déjà en
son temps, l'avait fort bien compris :
L'histoire elle même, écrivait-il, est une partie
réelle de l'histoire de la nature, de la transformation de la nature en
Homme. Les sciences de la nature comprendront plus tard aussi bien que la
science de l'homme, que la science de l'homme englobera les sciences de la
nature : Il y aura une seule histoire8(*)
Un siècle plus tard, Théophile Obenga lui
emboîtait le pas en lançant le concept d'histoire
écologique dont les contours sont ainsi précisés :
...la nouvelle Histoire, dans sa profondeur
réelle et sa nouveauté vraie, peut être également
appelée : Histoire Ecologique de l'Homme. Les répertoires,
les sols et niveaux archéologiques, les foyers, les ensembles
intégrés et analysables, sont justement ceux là même
où sont accumulés par strates et équilibres fondamentaux,
les traditions humaines, depuis l'origine des temps. En d'autres mots, voulus
plus nets l'histoire humaine doit impérativement rendre compte de
l'histoire de la nature : Ces deux histoires ne constituent qu'une
histoire, celle-ci produisant celle- là, génétiquement,
dialectiquement. Cette histoire unique, faite de boue et de raison ensemble,
est l'ordre impérieux qui est rétabli, avec une force enseignante
nouvelle, la Nouvelle histoire9(*).
Cette entreprise revêt une importance cruciale au
moment où l'on parle de renouvellement des problématiques dans
l'historiographie africaine. Un continent où les problèmes
environnementaux se posent avec acuité10(*). Toutefois, l'engagement des Historiens africains
n'est pas encore à la dimension de l'ampleur du problème.
S'agissant tout particulièrement de l'aspect végétal,
Monique Chastanat fait ce triste constat :
L'histoire des plantes et des paysages d'Afrique est encore
largement à défricher, qu'il s'agisse de l'histoire de certaines
formations végétales ou des périodes et voies de
diffusion des plantes nouvelles. Malgré l'existence des travaux
novateurs dans ce domaine, des nombreuses questions restent posées ou en
discussion. Cette histoire des plantes et des paysages ne peut se concevoir
indépendamment de celle des sociétés qui les utilisent,
les cultivent ou les construisent11(*).
En outre il serait nécessaire, compte tenu des lacunes
relevées, de s'intéresser davantage aux activités
cynégétiques dans une perspective de l'anthropologie historique.
Ceci étant, cette recherche s'inscrit dans une dynamique se
préoccupant à la fois du passé, du présent, mais
aussi de l'avenir. Il s'agit donc d'une approche retro-prospective de
l'Histoire qui pourrait mieux assurer le défi de l'utilité et
l'objectivité de la science historique en Afrique12(*).
II - CADRE CONCEPTUEL ET THEORIQUE
Pour cerner l'orientation de l'étude envisagée,
il importe d'en définir les termes clés. Dépassant leur
acception étymologique, ces définitions permettront compte tenu
de la complexité des phénomènes sociaux
étudiés, de baliser et d'orienter rigoureusement le champ
d'investigation.
La Chasse
La chasse est la variable active et dynamique de notre
activité de recherche. L'encyclopédie en ligne Wikipédia
la définit comme ``la traque des animaux sauvages dans le but de les
capturer ou de les abattre.''13(*) Quand la chasse est soumise à une
réglementation, sa pratique en dehors de son cadre légal est
appelée braconnage. Le chasseur quant à lui, se définit
comme celui qui participe à l'abattage du gibier et/ou à la
saignée, à l'éviscération et à l'habillage
partiel sur le terrain des animaux abattus14(*). La cynégétique quant à elle,
est l'art de la chasse.
A l'origine, la chasse assurait à l'homme son
alimentation carnée. Elle permettait aussi de se procurer des ressources
diverses telles les peaux, les os, la fourrure, les cornes, les dents, pour ne
citer que quelques unes. Elle a également rempli une fonction
régulatrice, celle de protéger la communauté humaine des
prédateurs dangereux. De surcroît, la chasse a revêtu une
fonction rituelle et initiatique. Avec la révolution du
néolithique, elle s'est trouvée en compétition avec
l'agriculture et l'élevage15(*). Elle a même perdu de son importance dans
certaines régions ; en Europe, elle fut transformée en
activité de loisir, souvent réservée à la classe
dominante, avant de retrouver sa fonction originelle dans les périodes
de disettes.
Le pouvoir
Le pouvoir est une réalité abstraite qui brille
par une pluralité de sens. De façon courante, ce vocable
désigne les hommes qui incarnent diverses sortes
d'autorités ; en tant que verbe, il signifie avoir la
possibilité de... Substantif, il renvoie à l'action, à la
capacité d'agir, à la faculté conforme ou courante de
faire quelque chose16(*).
A cet effet, le pouvoir renferme une double considération : le
pouvoir comme essence et le pouvoir comme relation.
Comme essence, le pouvoir à travers les époques
et les cultures est diversement apprécié. Tantôt il est
encensé par ceux qui en tirent profit, tantôt
déprécié et présenté comme un instrument de
domination. Dans cette perspective, le pouvoir n'est pas un concept
désincarné. Il est ce que les hommes pensent qu'il est.
Le pouvoir peut être abstrait. Dans ce cas, sa nature
est métaphysique ou idéaliste. Il peut aussi être une
entité c'est-à-dire, une énergie localisée dans la
personne du gouvernant et qui l'utiliserait pour le bien-être du groupe.
On parle alors d'une éthique du pouvoir17(*). D'après Georges Burdeau :
Le pouvoir est une force au service d'une idée. Une
force née de la conscience sociale, destinée à conduire le
groupe dans la recherche du bien commun et capable, le cas
échéant, d'imposer aux membres l'attitude qu'elle
commande18(*).
Pour Maurice Hauriou et Talcott, ce qui est l'essence du
pouvoir, ce n'est pas surtout la faculté d'imposer une volonté,
mais l'aptitude à mobiliser toutes les ressources de la
société en vue d'une action sociale19(*). Dès lors, il
apparaît que le pouvoir est lié à la recherche du bien
commun.
La société :
Objet privilégié des sciences sociales, le terme
société se rapporte à ``l'ensemble des moeurs et coutumes
partagées par une population, au choix d'organisation des valeurs, et
des normes sociales.''20(*) Plus complexe dans la pensée de Joseph
Fichter, ``la société est un ensemble des modèles
d'organisation et d'interrelations, des individus et des groupes, des
associations, des organisations et des institutions qui concourent à la
satisfaction concertée des besoins de la collectivité.''21(*) Ainsi, une
société n'est pas figée. Elle est sujette à
plusieurs transformations. Les sociologues parlent de changement social
différent de l'événement social qui, lui, est ponctuel et
sans modification de la structure. D'après Guy Rocher,
Le changement social est toute transformation observable dans
le temps, qui affecte, d'une manière qui ne soit pas que provisoire ou
éphémère, la structure ou le fonctionnement de
l'organisation sociale d'une collectivité donnée et modifie le
cours de son histoire.22(*)
Le changement social est durable. C'est un
phénomène collectif. Il est conditionné par plusieurs
facteurs tels la démographie, le progrès technique, les
valeurs culturelles, les conflits... Lorsque le changement social se situe dans
le long terme, on parle d'évolution sociale qui elle, est
conditionnée par l'action historique23(*).
Ces définitions, loin d'être exhaustives,
suggèrent toute la pertinence de la problématique de notre sujet.
C'est en même temps une orientation susceptible de déterminer la
relation dialectique, les champs d'interférences qui lient la chasse, le
pouvoir et la société. Il suffira alors à l'aide
d'exemples, de montrer dans le cadre de notre zone d'étude que la chasse
est un phénomène de société qui, au fil du temps
est consubstantiel au pouvoir.
Une étude scientifique ne pouvant être faite
à la seule guise du chercheur, elle doit être construite,
établie, constatée grâce à une analyse
théorique. L'avènement de l'Ecole des Annales, sous l'impulsion
de Marc Bloch, de Lucien Febvre et de Fernand Braudel, marque une rupture
épistémologique majeure dans l'historiographie. L'histoire,
dépassant la dimension événementielle qui l'avait
caractérisée jusqu'alors, devint totale. Sa perspective fut
élargie avec l'introduction de la notion du temps long.
Avec la nouvelle histoire24(*), l'histoire n'est plus
seulement celle des nations ni des grands hommes, mais de tout ce qui est
humain. Dès lors, cette discipline ouvre à une pluralité
de perspectives, nécessitant l'intervention des méthodes issues
des autres sciences sociales. En nous inscrivant dans cette approche, notre
analyse pourra à cet effet s'appuyer sur le structuro-fonctionnalisme
qui, résulte d'une combinaison entre le structuralisme et le
fonctionnalisme.
L'analyse structuraliste trouve son fondement dans la notion
bien complexe de la structure. D'après Radcliffe-Brown, ``La structure
est un arrangement de personnes ayant entre elles des relations
institutionnellement contrôlées ou définies telles que les
relations du roi et de son sujet ou celles du mari et de la femme.''25(*)
La structure est alors ce qui existe concrètement dans
la société, ce qui est stable, permanent,
institutionnalisé. Une telle définition de la structure sociale
est peut être éclairante mais surtout facile. Or, pour
Lévi-Strauss, la structure de la réalité sociale n'est pas
le seul donné concret et observable. Elle est aussi et surtout son
expression latente. Celle qui est cachée dans la réalité
sociale et demande à être découverte.26(*) Nous envisageons de ce fait,
de combiner ces deux approches de la notion de structure : la structure
apparente et la structure latente : c'est ce que l'on appelle la
dialectique de l'émergé et de l'immergé.27(*) Mais il ne suffit pas de
savoir comment la société est structurée et
organisée. Encore faut-il savoir comment elle fonctionne. D'où le
recours au fonctionnalisme.
Cette notion souffre elle aussi d'une ambiguïté.
Elle implique à la fois la notion de responsabilité de celui qui
exerce une profession, mais aussi la réglementation qui organise
celle-ci. Toutefois, le sens biologique est celui qui sied le mieux à
l'analyse sociale car, il met exergue le rôle que joue un
élément dans le maintien de vie d'un organisme. Pour Guy Rocher,
la fonction est la " contribution qu'apporte un élément
à l'organisation ou à l'action de l'ensemble dont il fait
partie. "28(*) La
société formant un tout, Robert King Merton dans son
fonctionnalisme relativisé distingue les notions de fonction manifeste
et de fonctions latentes29(*). Les premières sont voulues par les
participants du système alors que les secondes ne sont ni voulues ni
comprises mais existantes tout de même. Les fonctions latentes sont
jouées par exemple par des rites qui ne sont connues que des
initiés.
L'analyse structuro-fonctionnaliste nous permet ainsi
d'analyser l'activité cynégétique telle qu'elle est
organisée et structurée et comment elle fonctionne dans le
Sud-est Cameroun. De ce fait, elle apparaît ici comme une première
étape de l'approche systémique ; le système
étant constitué de l'écosystème forestier du
Sud-est et des différents acteurs. Elle est l'expression du dialogue
entre la nature et la culture. Toutefois, la préservation de la
dimension historique nous oblige à appréhender le
phénomène dans une approche holistique et dans la longue
durée.
III - CADRE SPATIO-TEMPOREL
Tout problème humain demande à être
cerné dans le temps et l'espace, le libellé de notre sujet porte
en lui-même ses propres repères.
Le cadre géographique est le Sud-est Cameroun. Il est
situé aux confins des frontières du Cameroun, de la RCA, du
Congo et du Gabon. C'est une zone de basse altitude qui se distingue par une
uniformité et une continuité des éléments naturels.
Il s'agit d'un vaste espace de forêt dense humide à climat
équatorial guinéen. Cette forêt sert de cadre de vie
à une faune abondante et variée. Elle joue également un
rôle pluriel dans la vie des populations locales aussi bien dans les
domaines de la pharmacopée, de l'alimentation, de l'habitat, de la
cosmogonie que du ravitaillement en matières premières
destinées à l'élaboration des cultures matérielles.
En outre, elle a constitué pour les populations riveraines, un refuge
par excellence en périodes de guerres.
Du point de vue hydrographique, la région est
drainée par un ensemble de cours d'eaux dont la Ngoko, le Dja, la Boumba
et la Sangha sont les plus importants. Ces fleuves ont une incidence certaine
sur la vie des populations en tant que sources d'approvisionnement en produits
halieutiques destinés à des usages divers. Dans la
géopolitique de la région, ils sont apparus à la fois
comme voie de communication et obstacles naturels.
Quant au climat, il est propice à la pratique des
activités agricoles ; On y cultive le cacao, la banane plantain, et
les tubercules diverses.
Son extrême richesse en ressources naturelles a fait de
cette région à la fois une zone pilote de l'exploitation
forestière et très active de chasse.
Ici, ont essaimé diverses populations que l'on peut
classer en deux principaux groupes, en fonction de leurs caractères
anthropomorphiques et culturels. Il s'agit des Pygmées Baka,
qualifiés de chasseurs-collecteurs, et des Bantou,
présentés comme des agro-chasseurs. Ces adjectifs illustrent fort
bien la place capitale qu'occupe l'activité cynégétique
dans la vie de ces populations.
Bien que la plupart de nos investigations portent sur le
Cameroun, notre champ de recherche déborde les frontières
nationales, eu égard au continuum ethno-culturel et à
l'unité géographique que cet espace présente. Ce qui place
la question au coeur de la problématique de l'intégration
sous-régionale.
S'agissant de la dimension chronologique, l'étude se
situe dans la longue durée. La perspective dynamique envisagée
permet de préconiser une périodisation qui garantirait mieux
l'historicité du présent travail. Sur la base des séries
longues, l'on pourra non seulement évaluer les ruptures et les
continuités, mais aussi cerner les permanences de l'activité
cynégétique. L'analyse va ainsi se dérouler
d'après une dynamique interne et sous l'effet des forces
exogènes. L'étude couvre en grande partie, la période
précoloniale, nous plongeant d'abord dans les sources vives du
passé africain. C'est l'occasion de s'intéresser à
l'encrage de l'activité cynégétique dans les
sociétés étudiées. Elle nous introduit ensuite,
dans l'époque coloniale riche en expériences diverses .C' est le
moment du choc culturel entre l'Occident et l'Afrique traditionnelle. Enfin, on
pourra examiner la situation actuelle issue de ce double impact, à
savoir la dynamique du dedans et la dynamique du dehors, et baignant dans le
contexte ambiant.
IV - LA REVUE CRITIQUE DE LA LITTERATURE
Les questions relatives à l'histoire de l'environnement
ont depuis longtemps acquis un droit de cité dans l'historiographie. En
France, l'idée a germé depuis les années 1950. Il en est
résulté la création de l'histoire de l'environnement dont
la vigueur s'exprime à travers diverses publications et rencontres entre
spécialistes. Au delà de l'aspect heuristique, les débats
portent sur des orientations épistémologiques dans le but de
susciter l'intérêt des autres chercheurs qui, pendant longtemps,
l'ont tenue à distance.30(*)
L'Afrique dans cette mouvance, n'est pas du tout en reste.
Elle y fait ses petits pas dans le domaine. L'intérêt de la
question environnementale est manifeste dans l'historiographie camerounaise.
Elle est surtout l'oeuvre des Africanistes dont les travaux ont plutôt
privilégié l'aspect végétal.
Les travaux de Elide Mircea sont à cet effet assez
édifiants dans la perception des arbres. Dans son ouvrage,
Traité d'histoire des religions31(*), la végétation prend un aspect
symbolique et revêt une dimension métaphysique32(*). Elle est souvent confondue
avec les divinités. Différents thèmes en relation tant
avec le pouvoir, le bien, le mal, la magie, la femme que la religion, y sont
développés.
De même les travaux de René Letouzey en
ethno-botanique, sont d'un réel intérêt dans le domaine
de l'étude des plantes au Cameroun. Cet auteur tente même une
explication de la formation du couvert végétal et
présente avec beaucoup de bonheur, sa répartition
géographique. Toutefois, ces deux ouvrages n'abordent pas les
différentes relations entre l'homme et le règne
végétal.
Jean Maley quant à lui, donne une gamme d'informations
intéressantes sur les variations climatiques et l'évolution
régressive du couvert végétal à l'holocène
dans le bassin du lac Tchad32(*). Grâce aux analyses polliniques, il
reconstitue sur plusieurs millénaires le climat et partant, la
végétation de l'Extrême-nord du Cameroun. Il tient ainsi le
vent et l'eau pour responsables de l'apport du pollen dont la présence a
été décisive dans la formation des types de
végétation que l'on retrouve ici. Le mérite de Jean Maley
est de mettre en perspective le rôle qu'auraient joué les
populations locales dans ce processus.
Tout aussi remarquable est, la contribution de Jean Boutrais.
L'ouvrage collectif dont il est le Directeur, fait une étude
régionale de l'écosystème du Nord Cameroun33(*). Il met en exergue l'effet de
l'action humaine sur la végétation. En outre, il pose le
problème de l'érosion dans l'extrême Nord. Ce qui permet
d'apprécier l'impact de l'homme dans la destruction de l'environnement.
Un ouvrage particulièrement édifiant dans la
compréhension de l'action anthropique sur la nature est celui produit
sous la direction de Jean Pierre Chrétien34(*). Les auteurs de cette oeuvre
collective, dans leurs différentes contributions, ouvrent des pistes de
recherche en ethnobotanique. L'idée générale qui s'en
dégage est qu'à travers le degré d'exploitation du milieu
végétal, il est possible d'appréhender les aspects
culturels et sociaux d'une population donnée et d'en apprécier le
niveau d'adaptation à son environnement naturel.
La thèse de Beauvilain occupe une place de choix dans
cette thématique35(*). Avec beaucoup de pertinence, il relève les
différentes violences faites au milieu naturel par l'homme, avec pour
corollaire, les famines et les disettes.
Bienvenu Denis Nizezeté démontre dans sa
thèse, comment les populations des grassfields ont organisé le
choix de leur bois de manière à disposer en permanence des
essences adaptées et appropriées à des activités
précises36(*). Il
préconise un système de protection et de conservation permettant
de juguler cette crise du bois.
Monique Chastanet, dans le document dont elle est
l'éditrice scientifique, s'intéresse aux relations existant entre
l'homme et son environnement végétal37(*). Il y est
développé différents rapports entre l'homme et son cadre
écologique. En effet, les différentes contributions des auteurs
permettent d'explorer divers aspects de l'histoire écologique. On y
évoque la diffusion des plantes américaines en Afrique Centrale
et les nombreuses perceptions que développent les hommes par rapport aux
plantes cultivées38(*). Ce document permet de mettre en exergue l'apport de
la pluridisciplinarité à l'éclairage de l'histoire
écologique.
L'aspect de la faune quant à lui, a été
abordé par plusieurs autres recherches dans une perspective
ethnographique, à travers quelques ouvrages généraux et
thèses.
Ainsi, Thierno Bah établit le rapport entre la chasse
et la guerre39(*).
D'après cet auteur, le chasseur et le guerrier partagent les
mêmes sites d'action, les mêmes matériaux et ainsi que les
mêmes pratiques magico-religieuses40(*). Il démontre que les activités
cynégétiques sont susceptibles d'être à l'origine
des conflits armés41(*).
S'inscrivant dans une perspective technologique, Joseph Marie
Essomba présente dans sa thèse de Doctorat consacrée
à la civilisation du fer au Cameroun méridional , une gamme
complète d' objets fabriqués à partir du fer, et dont
l'usage s'étend aux activités de chasse42(*). De façon exhaustive,
il explique le processus même de leur fabrication. On découvre
alors, des couteaux, des machettes, des flèches, des lances...qui
accentuent et systématisent l'exploitation du milieu naturel.
Christophe Mbida s'est intéressé au mode de vie
des premières communautés sédentarisées du massif
forestier du Cameroun43(*). La riche documentation archéologique qu'il a
recueillie dans le site de Nditan permet d'affirmer que la chasse et la
cueillette constituaient les premières formes de survie de ces
populations. Dans la même perspective, Martin Elouga a abordé
l'alimentation carnée des occupants du site d'Elig-Nkono lors des temps
anciens44(*).
Tout aussi précieux, est l'ouvrage de Georges
Vennetier sur la géographie du Congo.45(*) Ce chef d'oeuvre rend compte des différentes
formes de chasse pratiquées dans cet espace.
De même, les deux tomes de l'ouvrage collectif,
consacré à l'alimentation en milieu tropical, publiés sous
la direction de Hladick, relèvent l'importance des produits de ramassage
dans l'alimentation des populations des forêts tropicales pendant la
période précoloniale46(*). Les auteurs révèlent que la viande
sauvage issue des activités de chasse se consommait avec les
ignames ; denrée qui abonde dans la région. De plus, ils
mettent en relief, le rôle joué par les animaux dans la
fertilisation et la régénération des forêts.
L'ouvrage ouvre donc une brèche sur le déséquilibre de
l'écosystème qui résulte de leur massacre.
L'aspect magico-religeux est également pris en compte.
Il apparaît sous la plume du Révérend Père
François Gastine. Dans son ouvrage consacré à la culture
Bantou47(*), cet auteur
lève le voile sur le «nagualisme» qui est la mise sous la
protection des hommes, des espèces animales susceptibles de
protéger le chasseur au cours d'une partie de chasse ou en cas de
danger. Cette pratique qui persiste de nos jours chez bien des peuples de la
région, participe de la protection de la biodiversité48(*).
Serges Bahuchet, est sans doute l'auteur qui s'est le plus
investit dans l'étude du mode de vie des populations de la
région. Il a, entre autres, commis un ouvrage intéressant dans
le domaine de l'anthropologie alimentaire des régions de
forêt.49(*) La
typologie des pièges et l'évocation des différentes
formes de chasse qu'il fait, constituent pour nous, une matière
précieuse.
Henri Koch lui emboîte le pas dans son oeuvre traitant
de la chasse dans la forêt camerounaise.50(*) Il relève, recense et
décrit des différents rites et préparatifs de chasse.
Grâce à cet ouvrage, la relation entre la formation du chasseur
et celle du guerrier est établie. L'auteur précise les noms
scientifiques des plantes et des animaux. Cependant, l'absence du lien entre la
structure sociale et la chasse reste la principale lacune de cet ouvrage.
Guy Phillipart Defoy dans une étude consacrée
aux pygmées d'Afrique centrale, reprend les thèses de Koch sur
les techniques de chasse.51(*) Il met l'accent sur le rôle joué par
les pygmées dans le troc et qualifie ces derniers de peuple
essentiellement chasseur. Il atteste qu'ils ont servi de guides aux «
grands noirs » pendant leurs migrations ; c'est au cours de ce
processus qu'il y aurait eu échange des techniques de chasse. Cependant,
il omet de souligner que les peuples africains de la forêt, dans leur
passé lointain, avaient un mode de vie identique.
Philippe Laburthe Tolra s'est également
intéressé aux techniques de chasse chez les Beti du sud
Cameroun52(*). Il affirme
que celles-ci sont identiques dans toutes les régions de forêt.
Il montre les similitudes entre les pièges que Koch a décrits
à Messangmena et ceux que l'on trouve au début du XXe
siècle dans les environs de Yaoundé. Il ajoute que d'après
la conception des peuples des ces régions, la forêt est un milieu
mystique. Elle serait habitée par l'esprit des ancêtres,
d'où le devoir pour les hommes d'observer certains interdits pendant les
parties de chasse. Aussi pertinente qu'elle puisse être, cette
étude est limitée dans l'espace. Elle prête malheureusement
le flanc à une généralisation hâtive.
La seconde moitié du 19è
siècle en Afrique, est marquée par l'avènement d'un
nouvel ordre socio-politique et économique, suite à l'intrusion
des puissances européennes. De nouvelles activités apparaissent.
La chasse s'en trouve ainsi affectée. Toute une législation en
rapport avec l'activité cynégétique voit le jour. Samuel
Martin Rondet rend compte de la politique coloniale française en
matière de cynégétique.53(*) Il aborde le problème de la protection des
animaux et de la catégorisation des permis de chasse dans les colonies
françaises et au Cameroun. A ce sujet, il ressort que les armes
étaient interdites aux indigènes qui, néanmoins pouvaient
utiliser les pièges. Il mentionne également que les permis de
chasse variaient en fonction des espèces animales à abattre.
Dans la même perspective, Samson Ango Mengue, traite de
l'économie coloniale 54(*). Son analyse révèle que les caravanes
chargées de pointes d'ivoire venaient des forêts de Yokadouma. Le
portage qui, à cette époque, constituait un fléau social,
se faisait sous la contrainte des administrateurs allemands. Il n'a
malheureusement pas signalé que les produits de chasse tout comme la
plus- part des produits de traite, étaient évacués par
le Moyen Congo, via la ville de Ouesso, zone de transit de grande
envergure à cette époque.
Toute cette littérature constitue une base fondamentale
et une source d'inspiration féconde de recherche. De celle-ci, il
ressort que seuls les travaux de Koch et de Samuel Martin Rondet sont
consacrés à l'activité cynégétique mais
restent limités dans le temps. De plus, la région du sud-est
Cameroun n' a pas fait l'objet d'une investigation systématique. Autant
de perspectives qui guident ainsi notre recherche eu égard à la
complexité du problème et à son évolution dans le
temps.
V - ORIENTATION DE LA PROBLEMATIQUE
La chasse et l'agriculture itinérante sont à la
base de l'économie domestique des populations de la zone
forestière. Tandis que l'agriculture leur fournit les féculents,
source par excellence de calories, la chasse, un peu plus que la pêche
et le ramassage, leur apporte les protéines, les lipides et une partie
des vitamines55(*). En
outre, ces deux activités constituent une source importante de revenu
monétaire pour ces populations.
Cette pratique est une réalité millénaire
dans le bassin du Congo, l'un des plus riches écosystèmes du
monde dont les forêts abritent plus de la moitié de la faune
sauvage du continent56(*).
Il existe ainsi une relation intime entre les populations de cet espace et
leur environnement. Les pygmées qui en sont les habitants les plus
anciens57(*),
reconnaissent d'ailleurs qu'ils en dépendent en tout point de vue. Le
vieux Mboti de l'actuelle République Démocratique du Congo,
affirmait à cet effet à Colin Turnbull
que : " Nous sommes le peuple de la forêt. Si la
forêt disparaît, nous sommes finis "58(*). C'est dire l'importance de la
forêt dans leur vie.
Seulement, cette abondante faune qui constitue une ressource
essentielle pour ces populations est victime d'une surexploitation qui fait
peser sur elle de sérieuses menaces de disparition du fait du
développement intensif et anarchique du commerce de la viande de
brousse, et de la recherche effrénée des trophées à
l'exemple de l'ivoire. Quelques chiffres éloquents témoignent
de l'ampleur du drame. Les experts au cours d'un séminaire
anti-braconnage organisé à Yaoundé en 1998 affirment
que :
Cinq cents tonnes de gibier sont annuellement reçus
dans les marchés de Libreville. Quatre cents tonnes de viandes de
brousse sont annuellement vendues à Bukavu (RDC). De 1990 à 1998,
1700 kg d'ivoires ont été saisi dans la ville de Douala au
Cameroun. Deux cents éléphants ont été abattus
dans les régions de la Sangha (Cameroun-Congo). Entre 1991 et 1993,
trente un mille cent trente tonnes représentant 1568 espèces
d'oiseaux ont été saisis au Gabon.59(*)
En réaction à cette situation pour le moins
alarmante, les Chefs d'Etats de la région ont initié un projet
pilote de chasse durable dans le but d'assurer une conservation de la
biodiversité dans cet espace60(*). Une écozone a ainsi été
constituée dans le cadre d'un complexe transfrontalier de conservation
et de gestion durable des ressources naturelles en Afrique centrale. Il s'agit
d'un ensemble d'aires protégées et de zones de gestion durable
à usages multiples. On distingue ainsi la tri nationale de Djah,
d'Odzala et de Minkebe en abrégé TRIDOM61(*) qui relie sept aires
protégés du Cameroun, du Congo Brazzaville et du Gabon, et
ensuite, la tri nationale de la Sangha qui est l'une des aires de conservation
les plus importantes de la sous région. Elle couvre 21000 km². la
principale zone de protection de la tri nationale de la Sangha est
constituée des aires protégées de Lobeke au cameroun, de
Ndzanga Ndoki en RCA, et de Nouabalé Ndoki en République du
Congo.
La zone périphérique comprend les forêts
de production (UFA), des concessions de chasse sportive (ZIC), des zones de
chasse communautaire (ZICGC), des aires d'agro foresterie, ou de toute autre
activité compatible.62(*) Un plan de zonage qui restreint les activités
des populations locales bouleversant ainsi leur existence. D'où, un
regain de replis identitaires développés par celles-ci. La
gestion durable de la chasse dans cet espace devient ainsi une question
complexe nécessitant une analyse minutieuse tant il est vrai que les
enjeux sont multiples.
Sur cette base les questions ci- après engagent la
réflexion de l'historien : Quelle est la dynamique de l'ancrage de
la chasse dans la vie des populations du Sud-Est Cameroun ? La chasse
telle que pratiquée depuis les millénaires ne peut-elle pas
être considérée comme un facteur, au moins indirect de
conservation de la biodiversité ? Ne peut-on pas puiser dans la
longue pratique de cette activité cynégétique, les
modèles de comportement favorables pour une gestion durable de
l'écosystème forestier ? Une tentative de réponse à
ces préoccupations s'appuie sur les trois hypothèses
suivantes :
1. En Afrique Noire, la chasse n'est pas une simple
activité de subsistance. Elle est au coeur des relations sociopolitiques
et, est d'une grande portée économique.
2. Les populations africaines ont toujours eu à coeur
le souci de protéger leur environnement par une exploitation rationnelle
des ressources naturelles à travers les pratiques traditionnelles
appropriées. La destruction de la faune à grande échelle
de nos jours tient plus à des facteurs exogènes.
3. Les initiatives de conservation de la nature et de
protection de la biodiversité ne pourront avoir un impact positif que si
les projets y relatifs tiennent compte des mentalités collectives de la
population des régions concernées.
En articulant nos recherches autour du triptyque chasse,
pouvoir et société, il s'agit d'enrichir la perspective
d'approche de l'activité cynégétique en dépassant
résolument les stades descriptifs et narratifs, pour aboutir à
une synthèse intelligible de cette pratique dans la région du
bassin du congo. Pour se faire les aspects suivants seront
examinés :
- Le thème de la guerre, des migrations et de la
chasse : sans céder à un quelconque déterminisme
écologique, il sera question d'analyser les facteurs ayant
favorisé le développement de la chasse dans la région.
- L'organisation de la chasse : on cherchera à
déterminer les mécanismes de déroulement de la chasse tout
en mettant l'accent sur la formation des chasseurs.
- La dimension culturelle de la chasse sera prise en compte
avec le souci d'identifier dans l'ethos, les facteurs psychologiques
qui tiennent une place importante dans le déroulement des
activités cynégétiques. L'étude des pratiques
magico-religieuses nous permettra d'explorer la relation entre la
sphère de l'ésotérisme et la chasse, corollaire de la
guerre. D'autres aspects du symbolisme chasse - pouvoir -
société, ainsi que les questions relatives aux rites des chasses
nécessiteront un examen.
- Les outils et les techniques de chasse y occuperont une
place imminente. Sans s'enliser dans une démarche descriptive et
énumératrice, on appréciera davantage leur
efficacité et partant, le degré de destruction de la faune.
- Les produits de chasse : il sera question de situer la
chasse dans son champ social. Ainsi, la médecine, les échanges,
l'aspect esthétique et les relations intercommunautaires seront
passés en revue.
- Le souci de gestion durable de l'écosystème
forestier dans la sous région a favorisé un rapprochement entre
Etats, dans une Afrique Centrale ou les égoïsmes nationaux
exacerbés retardent la politique d'intégration. L'étude
s'en trouve ainsi élargit dans le champ des relations internationales,
notamment celui de la coopération en matière de protection de
l'environnement.
- Dans notre territoire de recherche vivent les Pygmées
Baka, un peuple de la forêt qui y est malheureusement
marginalisé. Il sera question dans le cadre de l'exception culturelle,
d'examiner leur rapport avec la chasse.
- L'activité cynégétique
génère chaque année d'importantes ressources
financières destinées à assurer le développement
local. La gestion de ces dernières est fortement
décriée63(*), et la pauvreté continue de
caractériser la région. On pourra alors se pencher sur la
question de la gouvernance qui constitue également l'un des piliers du
développement durable.
- Le braconnage, grand fléau qui gangrène le
déroulement de la chasse dans la région a favorisé la
circulation illicite des armes de guerres et de petits calibres dans une
contrée où les problèmes de sécurité se
posent déjà du fait de la porosité de la frontière
fera l'objet d'un examen minutieux compte tenu de sa gravité.
Ces pistes de recherche et les interrogations majeures
formulées, sont d'un réel intérêt historique. Elles
permettent de circonscrire la problématique qui tend à montrer
les interrelations complexes qui existent entre la chasse, le pouvoir et la
société. Telle est notre contribution à l'effort de la
communauté scientifique d'appréhender, de maîtriser et
d'analyser les phénomènes environnementaux dans une perspective
historique globale où le passé et le présent
s'éclairent mutuellement.
VI - METHODOLOGIE ET PRESENTATION DES
SOURCES
Notre méthodologie est celle universellement
utilisée par les Historiens de métier. Collecte des
données - critique interne et externe - analyse - interprétation
- élaboration d'une synthèse obéissant aux exigences de
rigueur et d'objectivité. Ceci nécessite de recourir à des
sources variées.
a) Les sources orales
Pour notre thème de recherche, et dans le cadre
chronologique retenu, les sources orales sont de loin les plus importantes. De
par sa permanence, la chasse a toujours marqué la conscience historique
des peuples. Pour mieux la décrypter tous les genres sont mis à
contribution : récits, chants, épopées, adages et
proverbes. Les enquêtes sont menées dans les villages et
campements Baka ainsi que dans les structures de gestion de l'environnement et
d'encadrement des populations. Elles se veulent à la fois extensives et
intensives afin de ratisser large. Les interviews sont pratiquées de
façon individuelle et collective. Les sources orales étant plus
narratives que descriptives, leur limite est réelle. En ce qui concerne
l'aspect technologique de la chasse, l'apport de l'archéologie sera
indispensable.
b) l'archéologie
La formation reçue dans cette discipline proche de
l'histoire, dans le cadre de l'enseignement optionnel, nous est d'une grande
utilité. Aussi, nous procéderons à la reconnaissance,
à l'analyse et à la classification du matériel de chasse.
Des fouilles seront effectuées dans les fosses repérées
lors des investigations préliminaires64(*). La datation de l'éventuelle documentation
recueillie, donnera une idée sur l'implantation humaine. Il s'agira
à cet effet d'une contribution à la problématique des
migrations et du peuplement en Afrique. L'enjeu est d'autant important pour
cette région que les traditions orales présentent comme un
couloir migratoire.
c) Les sources écrites
Elles constituent un matériel de base. Les ouvrages
généraux traitant de l'environnement seront d'un précieux
apport. Aussi, les documents écrits par les explorateurs et les hommes
d'église qui ont parcouru l'Afrique au moment où les structures
traditionnelles étaient encore vivaces, de même que les archives
coloniales, seront-ils exploités avec minutie. Cependant, cette
catégorie de sources devra être traitée avec
précaution compte tenu de l'idéologie européo- centriste
et des préjugés qu'elle charrie.
Durant la dernière décennie, une
littérature relativement abondante a été consacrée
à l'exploitation du gibier dans le bassin du Congo. Il s'agit surtout
des rapports d'études et d'activités des structures intervenant
dans la protection de la nature (WWF, WCS, GTZ, UICN...). Leur caractère
inédit, en fait des sources primaires. Ceux-ci nous seront d'un
intérêt capital.
d) Les sources virtuelles
Le moteur de recherche Google permettra d'entrer en contact
avec plusieurs liens et ainsi d'élargir nos banques de données
bibliographiques et statistiques. Par une approche comparatiste, il sera
possible de confronter nos recherches avec les efforts déployés
ailleurs, de manière à élargir la perspective d'analyse.
La complexité du thème de recherche conduira
nécessairement à faire intervenir d'autres démarches
relevant de la sociologie, de la géographie, de la psychologie et
surtout de l'anthropologie politique et culturelle. Les sciences de la vie et
de la nature aideront entre autres à préciser notre terminologie.
Le souci constant étant d'établir un soubassement solide en
rassemblant le maximum de matériaux possibles susceptibles de fournir
des éclairages sur l'activité cynégétique.
Dans un souci de rigueur scientifique, on s'efforcera de
produire sur la base d'une démarche inducto-déductive, une
réflexion théorique visant à conceptualiser la gestion du
patrimoine faunique naturel, dans un contexte où protection de la
nature et impératif de développement s'entrechoquent au lieu de
se concilier.
VII - PLAN PROVISOIRE
INTRODUCTION GENERALE : De la
nécessité d'un débat épistémologique autour
de la question de la protection de l'environnement. Problème des
sources et méthodologie.
PREMIERE PARTIE : PRESENTATION DE
LA ZONE D'ETUDE
CHAPITRE I - DONNEES ECOLOGIQUES
INTRODUCTION
I - LE MILIEU NATUREL
1- Situation de la zone
2- Relief et structure
3- Le Climat et l'hydrographie
4- La végétation et la faune
II - RAPPORT ENTRE LA CHASSE ET LE MILIEU NATUREL
1 - La flore
2 - La faune
CONCLUSION
CHAPITRE II - DONNEES HUMAINES
INTRODUCTION
I - LES BANTOU
A- Les Mpo'oh
1 - Qui sont les Mpo'oh ?
2 - La migration du groupe Mpo'oh
3 - Les différentes branches Mpo'oh
B - Les apparentés
1 - Les Mpyemo et les Bidjouki
2 - Les Bekwel et les Essel
C - Les Ngombe
1 - L'origine des Bangando
2 - La migration des Bangando
3 - Implantation dans la région de Moloundou
II - LES PYGMEES BAKA
A - Le mythe pygmée
B - Ethnonyme et Antonyme Pygmée Baka
C - L'ancienneté des Pygmées Baka
D - Caractères anthropomorphiques des Pygmées
Baka
CONCLUSION
CHAPITRE III - ELEMENTS D'ETHNOGRAPHIE
INTRODUCTION
I - IDENTITE CULTURELLE DES PYGMEES BAKA
A - La société baka
1 - Le cadre de vie
2 - Jeux, danses et musique
3- Le campement
4 - La place de la femme
5 - Cosmogonie et mythologie
6 - Rites et thérapies
7 - Le temps et l'espace
B - LA VIE ECONOMIQUE
1 - La production
2 - Echange des biens et des services
II - DE LA CULTURE CHEZ LES BANTOU
A - La parente linguistique
B - L'organisation sociopolitique
C - Le système de défense
D - Organisation économique
CONCLUSION
DEUXIEME PARTIE : LE DEVELOPPEMENT DE LA CHASSE
AU SUD-EST CAMEROUN
CHAPITRE III - FORMATION ET EDUCATION DES
CHASSEURS
INTRODUCTION
I - JEUX ET RITES D'INITIATION
1) Le tir à l'arc
2) La balle à la sagaie
3) Le jeu à l'éléphant
II - RELATION ENTRE CHASSE ET MAGIE
1) Chez les Bangando
2) Chez les Pygmées
3) Chez les Mpo'oh et apparentés
III- LES RITES DE CHANCE, LES INTERDITS ET LES
PERIODES DE
CHASSE
1) Les rites de chance
2) Les interdits
3) Les périodes de chasse
4) Structure sociale de la chasse
CONCLUSION
CHAPITRE IV - LES TECHNIQUES DE CHASSE
INTRODUCTION
I - LES TECHNIQUES DE CAPTURE A LA MAIN ET A L'ARME
BLANCHE PROLONGEANT LA MAIN
A- Les techniques de capture à la main
1) La chasse au daman et aux oiseaux
2) La capture du pangolin et du varan
B- Les techniques de chasse à l'arme blanche prolongeant
la main
1) La chasse au gorille et à éléphant
2) La chasse à la courue et au filet
II - LES TECHNIQUES DE CAPTURE A DISTANCE ET A L'AIDE
DE PROJECTILES
A - La chasse à l'arc
B - La chasse à l'arbalète
III - LE PIEGEAGE
A - Les pièges a déclencheur horizontal
1) La fosse
2) Le piège à assommoir ou écraseur
3) Le piège à collet
B - Les pièges à déclencheur contre
lequel l'animal butte
1) Le piège à assommoir aérien et
à épieu
2) Le piège à barrière
3) Le piège aérien classique
C - Les pièges à déclencheur que
l'animal coupe
1) Le piège à rat palmiste
2) Le piège aérien en forme de cône
IV - EVALUATION DE L'EFFICACITE DES
TECHNIQUES
CONCLUSION
CHAPITRE V : LA CHASSE DANS LA VIE QUOTIDIENNE
DES
POPULATIONS
INTRODUCTION
I - DIMENSION SOCIO - CULTURELLE DE LA
CHASSE
A - L'alimentation
B - La médecine
C - L'esthétique
II - CHASSE ET POLITIQUE
A- Le pouvoir du chef
1) Les attributs du Chef
2) La justice
B - Les relations diplomatiques
1) L'amitié
2) Le conflit
III- LA CHASSE DANS LE SYSTEME ECONOMIQUE
A - Les échanges
1- Le commerce précolonial
2- Les échanges matrimoniaux
B- La coopération baka / bantou
CONCLUSION.
CHAPITRE VI : LA CHASSE PENDANT LA COLONISATION
EUROPEENNE (1884-1959)
INTRODUCTION
I - LA POLITIQUE COLONIALE AU SUD-EST
CAMEROUN
A - La création des unités administratives
B - La configuration des villages
C - Les travaux d'utilité publique
D - L'économie coloniale
II - INFLUENCE COLONIALE SUR LES ACTIVITES DE
CHASSE
A- Les nouvelles méthodes de chasse
1) L'introduction du fusil
2) Le câble
B - Les facteurs de mutation de la chasse
1) Le portage
2) La récolte caoutchouc
3) Les religions chrétiennes
III- NOUVELLE FINALITE DES PRODUITS DE
CHASSE
CONCLUSION.
CHAPITRE VII : LA CHASSE APRES LES
INDEPENDANCES
INTRODUCTION
I - LA CHASSE ET LES EXPLOITATIONS
FORESTIERES
A - Les pistes forestières et la naissance des
campements des braconniers
B - Les marchés et l'accroissement de la demande des
produits de chasse
II - LES TECHNIQUES PLUS PERFORMANTES ET
DESTRUCTIVE
A- Le « cenadefor »
B - Le « caribou »
C - La chasse sportive
III- LE PHENOMENE DU BRACONNAGE.
A- Les causes du braconnage
1- La croissance démographique
2- La chute des cours des produits de rente
3- La débrouillardise
4- L'ignorance des textes
B - Les manifestations du braconnage
1- Les acteurs du braconnage
2- Les types de braconnage
3- Les circuits d'évacuation des produits du
braconnage.
C- Braconnage et circulation des armes de guerre.
1-les armes saisies
2-les quantités saisies
3-les modes d'approvisionnement
D- Les conséquences du braconnage
1- Les conséquences économiques
2- Les conséquences écologiques
3- Les conséquences sociales
CONCLUSION.
TROISIEME PARTIE : CHASSE ET PROTECTION DE LA
BIODIVERSITE
CHAPITRE VIII : LES PROBLEMES DE LA CHASSE AU
SUD-EST
CAMEROUN
INTRODUCTION
I - LES PROBLEMES ECOLOGIQUES
II - LES PROBLEMES SOCIAUX
III- LA GESTION DES RESSOURCES FAUNIQUES.
CONCLUSION.
CHAPITRE IX : LA PROTECTION ET LA VALORISATION DE
L'ENVIRONNEMENT
INTRODUCTION
I - PROTECTION TRADITIONNELLE
A- La taxinomie et le symbolisme baka
B- Le totémisme et les interdits alimentaires.
C- La gestion rationnelle des ressources naturelles.
II - PROTECTION COLONIALE
A- Le classement des espèces
B- La réglementation de la chasse
III- LA REGLEMENTATION POST-COLONIALE
A- La création des aires protégées
1- les parcs nationaux
2- les réserves forestières
3- les sanctuaires
4- les salines
B- La chasse durable
1- le zonage
2- les COVAREF
C- La lutte contre le Braconnage
1- La sensibilisation
2- La répression
3- Les mesures alternatives
IV - LES ACTEURS NON ETATIQUES ET LA COMMUNAUTE
INTERNATIONALE
CONCLUSION.
CHAPITRE X : CHASSE ET INTEGRATION SOUS -
REGIONALE
INTRODUCTION
I - LES PROBLEMES COMMUNS : NECESSITE D'UNE
SYNERGIE
D'ACTION.
II- LA CREATION DES STRUCTURES
TRANSFRONTALIERES
III- LA DIPLOMATIE LOCALE
CONCLUSION.
CONCLUSION GENERALE : Plaidoyer pour un
développement durable solidaire.
VIII - CHRONOGRAMME
La réalisation de ce projet de recherche va
s'étaler sur une période de trois ans selon le calendrier
suivant :
Période
|
Activités
|
2007-2008
|
Enquêtes bibliographiques déterminées
à définir le thème, à baliser le terrain de la
recherche et à esquisser le cadre méthodologique, conceptuel et
théorique ainsi que la problématique
|
Exploitation d'ouvrages et articles des revues concernant le
thème.
|
Mission d'imprégnation sur le terrain
|
Rédaction d'un projet de thèse tenant lien du
mémoire de DEA.
|
2008-2009
|
Exploitation des sources écrites (ouvrages, articles et
archives)
|
Intensification des enquêtes orales
|
Fouilles archéologiques
|
Analyse et interprétation des données
|
Bilan des travaux.
|
2009-2010
|
Synthèse et mise en forme du document final
|
2010-2011
|
Dépôt de la thèse au Département
d'histoire et soutenance
|
ORIENTATION BIBLIOGRAPHIQUE
I - ARCHIVES NATIONALES DE YAOUNDE
APA, 11732
|
Moloundou 1949 - 1951
|
APA 12048
|
Moloundou circonscription Yokadouma
|
APA, 11319
|
Rapport de l'Adjudant Guachy Commandant de la Subdivision de
Moloundou 12-29 Novembre 1920
|
TA 37
|
Troubles dans le Sud-Cameroun 1904 - 1916
|
TA, 88
|
Expédition Sangha- Ngoko. M. et Mme Pleihn chef de
District Sangha-Ngoko.
|
TA, 144-145
|
La nouvelle station sur la Ngoko et rapport sur la fondation
de la station sur le parcours des fleuves Ngoko Boumba et Dja Kilonialblatt
1899.
|
2 AC, 5799
|
Rapport sur la tournée effectuée dans les
chantiers des ponts et routes de l'Est par le Médecin Capitaine des
troupes coloniales Alain 1929.
|
2 AC 4407
|
Protection de la faune et réglementations de la chasse
1935.
|
2 AC, 3638
|
Ivoire prix. Circulaire N° 191 du gouverneur aux chefs
des régions et aux receveurs du domaine relatif à l'arrêt
du 8 décembre 1937 fixant le Mercuriel de l'Ivoire.
|
2 AC, 8598
|
Cuire et peaux. Conditionnement et circulaire en 1944.
|
|
Arrêté n° 283 du 23 Septembre 1944
complétant l'Arrêt de 1941 relatifs au conditionnement et à
la circulation des cuirs et peaux.
|
1 AC, 8847
|
Forêt et protection 1955. Projet d'Arrêt tendant
à placer cette forêt sous régime de protection 1955.
|
2AC, 9752
|
conférence économique de l'Est-Cameroun.
Rôle et Activités des services des Eaux et Forêts dans la
région de l'Est.
|
1 AC, 7521
|
Animaux sauvages, capture, réglementation 1955.
|
1, AC3509
|
Moloundou (Cameroun) Administration 1957.
|
APA, 11779B
|
Yokadouma Boumba. Ngoko (1923). Doumé rattaché
temporairement à Batouri. Rapport, tournée 1932 Moloundou 1941 -
1942
|
APA, 11634J
|
Rapport de tournée 27.12.1932 de M. Henry
adressé au Commissaire de la République.
|
APA, 11865, C
|
Moloundou subdivision de Lom et Kadéï 1941.
1942
|
APA, 1186C
|
Tournée dans les régions Konambemb dite
Bangando, Mboman du 4 Août au 1er Septembre 1941 par
Rataboul.
|
II - OUVRAGES GENERAUX
Abega S.C., (1998), Pygmées Baka, le droit à
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Présence Africaine.
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équatoriale, France anthropologie alimentaire des populations des
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les modalités d'application du régime de la faune.
Lettre circulaire n° 0354/LC/MINFOF/ SG/SDAFF/SN du 05
juin 2007 relative aux procédures de délivrance et de suivi
d'exécution de petits titres d'exploitation forestières.
Accord de coopération entre les gouvernements
de :
- La République du Cameroun.
- La République Centrafricaine.
- La République du Congo.
Relative à la mise en place du tri national de la
sangha.
Arrêté N° 0648/MINFOF du 18 Décembre
2006 fixant la liste des animaux des classes de protection A B C
Deuxième partie : Chapitre
développé
CHAPITRE III :
LA CHASSE DANS LA VIE QUOTIDIENNE DES POPULATIONS DU
SUD-EST CAMEROUN
La forêt est la mamelle nourricière des
populations riveraines à travers la chasse, l'agriculture sur
brûlis et le ramassage. La chasse, particulièrement, leur est
d'une grande importance de par l'utilité de ses produits qui recouvrent
des domaines multiples et variés. Le présent chapitre se propose
d'en faire une analyse exhaustive des aspects socioculturels,
économiques et politiques.
I- DIMENSION SOCIO-CULTURELLE DE LA
CHASSE
La chasse dans le Sud-est Cameroun, reste profondément
ancrée dans les moeurs. Sa production est de tout temps est
utilisée à des fins alimentaire, esthétique et
médicinale.
A -Utilité alimentaire des produits de
chasse.
Les traditions orales des peuples de la région
forestière du Cameroun affirment de façon unanime que le but
premier de chaque expédition de chasse était de fournir la
nourriture carnée à la famille.65(*) La viande constituait la principale source des
protéines animales étant donné que la pratique de la
pêche, l'autre source d'approvisionnement est saisonnière. La
prolifération du gibier et la maîtrise de l'art
cynégétique par les populations, permettaient à chaque
ménage d'assurer sa ration journalière.
Les expéditions étaient organisées en
fonction du type d'animal que l'on désirait consommer. Les
stratégies et les combinaisons alimentaires variant d'une ethnie
à une autre. Les Mpyemo affectionnaient les viandes
graisseuses telles que le sanglier (Singularis porcus), le pangolin (
Manis pentadactyla), le singe (Saimiri sciureus) ou la
civette (Civettictis civetta).66(*) Les sauces se dégustaient de
préférence avec le couscous de maïs. Les pygmées
Baka préferaient les espèces telles le bongo
(Stragelafgus euryceros), l'éléphant ( Loxodonta
africana), ou le gorille (Gorilla gorilla). Leur viande se
consommait avec des ignames sauvages, un rhizome qui prolifère dans la
forêt.67(*) De
même, la viande sauvage était également fort prisée
chez les Bangando qui, la savouraient avec des plantains pilés
ou tapés.68(*)
Les sauces étaient généralement
préparées à base de noyau de mangue sauvage (Irvingia
gaboensis), dont l'amande oléagineuse constitue un
ingrédient très apprécié par les populations des
régions forestières. La viande pouvait aussi être cuite
avec des feuilles de légumes. Le plus prisé était les
feuilles de lianes
(Gnetum africanum)69(*) appelé « koko »en langues
locales.
Aucune tradition ne mentionne les ventes de gibier. Lorsque la
chasse était fructueuse pendant la saison de pluies, le surplus
était distribué dans le village selon les règles du
communautarisme en vigueur. Chez les Baka, les produits de chasse
étaient distribués entre les différents ménages du
campement et le reste remis à son épouse pour la
cuisson.70(*) En effet, le
Baka ne thésaurise pas. Il vit dans l'abondance avec l'espoir de se
ravitailler le lendemain dans la forêt qui constitue sa claie71(*). Tous les biens produits sont
distribués au sein de la société où le
communautarisme a eu raison de l'individualisme.
Le système roulait tellement bien que même sans
avoir chassé, chacun était sûr de manger de la viande.
Mais, comme on ne pouvait rester dans l'attente passive de la
générosité d'un membre de la communauté, chacun
faisait l'effort d'aller chasser72(*). La chasse revêtait deux formes selon le type
de gibier convoité. La chasse individuelle était la plus courante
et la chasse collective occasionnelle.
Chez les Baka la chasse collective se
déroulait sous la conduite du maître de chasse.73(*) Une séance de
bénédiction des chasseurs par les femmes et les anciens
précédait l'expédition.74(*) Le produit était partagé entre les
différents ménages. Le chasseur qui avait réussi à
abattre un éléphant était porté en triomphe. Il
était exempt du partage de ce gibier. En retour, les autres membres de
la communauté lui offraient en guise de récompense, un sanglier
ou un gorille qu'il devait tout seul consommer.75(*) C'était une grande fierté et un honneur
personnel de participer à cette vie. Il s'agit là d'une
manifestation patente de la légendaire solidarité
africaine.76(*) La chasse
permettait à cet effet de raffermir les liens familiaux et de maintenir
la cohésion sociale. Un vieillard Mpomhpo'h se souvenant
encore de la vie communautaire d'antan, fait le témoignage
suivant :
Lorsque j'avais fait une partie de chasse fructueuse, je
distribuais la viande aux différents membres de notre clan. Je
privilégiais d'abord la génération des parents, ensuite
mes congénères de telle sorte que chaque ménage puisse
recevoir ne fusse qu'un morceau du produit de ma chasse.77(*)
Des tels propos assez édifiants, se rencontrent dans
plusieurs cantons. Ils montrent à quel point, la chasse était
à la base de l'entente.
Les produits de chasse aidaient également à
recevoir les visiteurs. Certaines espèces d'animaux étaient
destinées aux personnes estimées telles, ses beaux-parents, tout
autre membre de la belle famille, un chef ou un notable d'un village voisin.
Les Mpompo'h honoraient leurs hôtes avec les gibiers tels la
tortue, la vipère heurtante (Bitis arietaus), le varan
(Varanus niloticus) ou le phacochère
( Phacochoerus actiopicus). Les Mpyemo quant
à eux, leur servaient de la volaille domestique le premier jour, et
les espèces évoquées ci-dessus leur étaient
proposées les jours suivants. Les paquets soigneusement
confectionnés, constitués des échantillons de ce qu'ils
avaient consommé durant leur séjour étaient offerts en
cadeaux au moment de la séparation. Ils pouvaient ainsi les
présenter à leur famille, en guise de témoignage du bon
accueil qu'ils avaient reçu.78(*)
Les choix alimentaires variaient en fonction du statut social
dans la communauté. Ainsi, chez les Bangando, la viande des
animaux comme la panthère (Panthera pardus), la vipère
à cornes ( Pseudocerastes persicus) ou le bongo
(Stragelafgus euryceros) était interdite aux jeunes gens et
aux femmes.79(*)
Quiconque transgressait ces interdits s'exposait à des
pathologies particulières. La tradition leur promettait des affections
terribles à l'époque. Il pouvait souffrir des abcès
ou de la varicelle80(*). Dans le cas où la transgression
était le fait d'une femme enceinte, l'enfant qu'elle mettrait au monde
n'avait aucune chance de survivre à sa naissance. De même,
l'enfant de la femme enceinte qui consommait la civette, dégageait une
fois venu au monde, de mauvaises odeurs corporelles.81(*)
Chez les Mpyemo, l'interdit concernait plutôt
les bêtes féroces à l'instar du lion ( Panthera
léo) ou de la panthère (Panthera pardus).
D'après la tradition, les contrevenants étaient frappés
de stérilité ou de nanisme lorsqu'il s'agissait des
enfants.82(*) La logique
de ces interdits reste un mystère en raison de la loi du silence que les
initiés sont tenus de respecter.
Toutefois, il était possible de remédier aux
conséquences néfastes découlant de la transgression de
ces interdits alimentaires. C'est ici qu'apparaît le côté
dialectique de la culture africaine où tout mal possède son
antidote. Autrement dit, chaque danger a son contre.
Chez les Mpompo'h, le traitement revêtait la
forme d'un rite de purification. Le même animal était tué,
préparé et assaisonné d'herbes ayant des vertus
mystérieuses. Le fautif, avant de le consommer récitait les
formules de repentance. Il s'agissait de l'aveu et de la sollicitation du
pardon. Après ce rituel, il était conduit dans un ruisseau. Un
barrage improvisé, d'un mélange de boue et de troncs d'arbres
secs, permettait de constituer une retenue d'eau dans laquelle étaient
jetées les potions et macérations apprêtées par le
guérisseur et connues de lui seul ou d'une poignée
d'initiés. Le repentant y était immergé plusieurs fois,
puis le barrage était démoli. Toute la souillure s'en allait,
emportée par le courant des eaux.83(*) Ceci ressemble au rite familial de la
réconciliation84(*)
pratiqué chez les Baveuk du Cameroun Central (Haute Sanaga et Mbam et
Kim). Seulement, chez les Baveuk l'expiation se fait sur la base de la farine
de manioc dont la couleur blanche symbolise la pureté ; une sorte
de renaissance du fautif.
Chez les Mpomam, le bain de purification durait six
jours.85(*) Dans la
tradition Mpyemo, le traitement était l'oeuvre des
spécialistes. De l'avis de plusieurs informateurs, il s'agissait des
anciennes victimes de cette mystérieuse sentence qui constituaient
désormais une caste.86(*) D'autres sources par contre parlent d'un corps de
prêtre dont l'initiation se faisait de père en fils. Toujours
est-il que les uns les autres étaient plus initiés. Ici, le bain
de purification se déroulait à l'aube naissante. Un coq
était jeté en guise d'offrande au centre de la mare en même
temps que l'incriminé. En dispersant l'eau du battement de ses ailles,
le coq était sensé dissiper l'implacable malédiction.
Celle-ci était libérée après la rupture du barrage,
emportée par les flots.
Le fautif, une fois la guérison retrouvée,
était immunisé. Il pouvait continuer à en manger s'il le
désirait. Il arrivait aussi qu'il en fasse un interdit à vie en
commémoration de l'épreuve qu'il avait endurée.87(*)
En plus de son aspect thérapeutique, cette
cérémonie était aussi un rite de passage. L'occasion
était indiquée pour autoriser la consommation de ces aliments
aux adolescents devenus adultes.88(*) Les aspirants étaient associés au
repas, mais ne subissaient pas le bain de purification. On leur mettait le
premier morceau de viande dans la bouche, ils le recrachaient en communion avec
les ancêtres. Le deuxième morceau était avalé
effectivement. Il pouvait dès lors continuer à manger cette
espèce sans danger.89(*)
B- Valeur thérapeutique des produits de la
chasse
Les produits de la chasse avaient également des vertus
thérapeutiques. Nombreuses sont à cet égard, les
espèces qui étaient chassées pour leurs
propriétés médicinales supposées.
La peau de certains animaux constituait un matériel de
base dans le domaine de la voyance. Les guérisseurs s'en servaient pour
les pratiques divinatoires. C'est le cas du chat tigre (Leopardus
wiedii) chez les Bangando dont la peau
séchée, servait à localiser les parties malades du corps
ou celles qui recèleraient les sortilèges lancés par les
forces maléfiques.90(*)
De même, la peau du singe magistrat (Folium
isatidis), outre sa valeur décorative, était
recherchée pour des fins médicinales. Taillée en lamelles,
celles-ci servaient à ligaturer des entorses ou des factures.
Brûlée et séchée, sa partie frontale
mélangée aux feuilles de raphia enfumées, permettait
d'obtenir une poudre noire efficace dans le traitement des
céphalées.91(*) Appliquées sur des incisions pratiquées
sur le front du patient, la poudre avait semble t-il, un effet bienfaisant
immédiat.92(*)
Le rat de Gambie (Gambianus) était
utilisé pour le blindage. D'après la croyance locale, la
rencontre d'un rat en pleine journée augurait d'un malheur. Une
perspective terrifiante contre laquelle une solution fut trouvée.
Ainsi, les os et la chair de cet animal moulus et mélangés
à des potions spéciales devaient être consommés.
Dès ce moment, l'on pouvait rencontrer le rat sans plus
s'inquiéter.93(*)
Les accessoires de certains animaux aidaient les
tradi-praticiens pour guérir certaines maladies. Le crâne du
singe sock était utilisé comme boîte pour
conserver et inoculer les remèdes destinés aux soins du
kwashiorkor. Ses os servaient de pompe à purge pour les enfants tandis
que sa peau attachée au bras de ces derniers, les prémunissait
contre cette maladie. La graisse du serpent boa ( Conscrictor)
était un puissant baume utilisé dans le traitement des douleurs
musculaires telle que le mal de dos. Le sexe du chat tigre quant à lui,
atténuait les mauvaises odeurs corporelles.94(*)
L'utilité des animaux s'étendait
également à la médecine de guerre. Vers la fin du
XIXè siècle, la géopolitique de la région est
marquée par la recrudescence des conflits inter-ethniques. Les peuples
en mouvements, se bousculaient à la recherche d'espace vital. Tout
était donc prétexte pour attaquer le voisin. La guerre
étant devenue endémique, nombreux étaient des guerriers
qui mourraient de leurs blessures au front. Il s'était
développé une médecine de guerre qui s'occupait des
victimes des combats. Cette médecine consistait à guérir
les blessures de façon instantanée quelque soit leur
gravité. Certaines espèces animales jouaient un rôle
important à ce sujet.
La tradition orale des Bangando rapporte
qu'un guerrier blessé dans leurs rangs était
immédiatement mis à la disposition du guérisseur.95(*) Par pratique
mystérieuse, ce dernier faisait appel à la couleuvre jaune
(Conuber flavienta) ou Tougo'o et à
loutre à joues blanches (Lutrat miculucollis) appelé en
langue locale Fima.96(*) La couleuvre léchait la blessure pour
rétrécir l'ouverture, tandis que loutre soufflait.97(*) Au bout de quelques minutes,
la plaie était complètement cicatrisée et le malade
pouvait reprendre le combat quelques jours après. Cependant, aucune
femme ne devait regarder la blessure au risque de rendre le traitement
inefficace.98(*) Les
experts, grâce aux substances extraites des parties de ces deux animaux
auraient mis au point des potions destinées à guérir les
blessures.
S'agissant toujours de l'activité guerrière, les
produits de chasse servaient aussi à la fabrication des poisons
destinés aux armes de combat. L'oryctérope (Orytoropus
afer) était particulièrement recherché pour ses
vertus toxiques99(*). Il
s'agit d'un animal terrier dont l'habitat peut se situer à des dizaines
de mètres dans les profondeurs du sol. Son site d'occupation est
divisé en plusieurs compartiments. Son abattage nécessite
beaucoup de tact. A l'approche du danger, il change de couloir et bloque
l'accès derrière lui tout en libérant un gaz toxique qui
asphyxie le chasseur. Ses excréments et ses griffes sont un poison
dangereux. Ses intestins n'entrent pas dans les habitudes alimentaires. Son
dépeçage se fait avec une extrême prudence. Les
méchants usent de ses parties réputées dangereuses pour
fabriquer des poisons mortels.
Aussi, le chasseur qui parvenait à abattre ou capturer
cet animal, devait-il présenter toutes ses parties dangereuses à
la communauté. Elles étaient comptabilisées et les
notables en toute discrétion, à défaut de les enterrer
dans un endroit secret les jetaient dans les profondeurs d'un fleuve.100(*) Celui qui ne se soumettait
pas à cette procédure, courrait le risque de devenir paria au
moment où il attirait sur lui les soupçons de la
communauté. Il était traduit devant l'assemblée du
peuple. Au cas où il n'arrivait pas à justifier ce qui
était advenu de ces parties, il se voyait publiquement tenu pour
responsable de toute mort suspecte qui allait survenir dans le village. Tout le
monde l'évitait en raison de la sinistre réputation qu'il
traînerait désormais. Personne n'osait plus partager son repas ou
son pot de vin, de peur d'être empoisonné.101(*)
En réalité, la totalité des parties que
les notables emportaient n'était pas détruite. Officiellement,
elles étaient enterrées dans la discrétion de peur que des
personnes animées de mauvaises intentions ne les déterrent plus
tard pour une utilisation non contrôlée. Mais à la
vérité, suivant une loi du silence absolu, les notables les
confiaient aux ``experts'' qui en fabriquaient des substances toxiques
destinées à empoisonner les armes de guerre102(*).
Les griffes du daman (hyrax siranus) jouaient le
même rôle. Très souvent, on s'en servait pour
éliminer les anciens ou les chefs de clan qui avaient trahi la cause de
leur peuple.103(*)
Dès que le conseil restreint avait décidé de leur mise
à mort, le bourreau en toute discrétion, grattait le siège
du condamné avec la dent du daman ou la griffe de
l'oryctérope104(*). Une fois en contact avec la substance toxique, la
mort ne se faisait pas attendre. On peut donc comprendre entre autres,
pourquoi les fauteuils des anciens étaient complètement
prohibés aux enfants. 105(*)
C - Utilité pratique des produits de
chasse.
Les produits de chasse jouaient à la fois un
rôle artistique et pratique. S'agissant de l'aspect pratique, les
accessoires issus des produits de la chasse ont permis la réalisation de
plusieurs objets usuels. Ils constituaient entre autres, la matière
première pour la réalisation de plusieurs objets artistiques. Les
peaux d'animaux aidaient entre autres à la confection des sacs, des
dossiers des fauteuils, ou des tambours106(*). La qualité du son dépendait de
l'état et de la nature de la peau utilisée. La peau des
céphalophes spécialement permettait d'avoir un bon son. Elle
pouvait être remplacée par celle du gorille ou du
chimpanzé. On s'en servait aussi pour la confection des carquois
destinés à recevoir les flèches empoisonnées de
l'arbalète107(*).
Les peaux de certains animaux tels le boa, la vipère
permettaient d'orner les sacs. Les carapaces de tortue, la tête de
gorille, du chimpanzé, les cornes de cerfs servaient à orner les
murs des cases construites avec les écorces d'arbres108(*).
Dans les cases, les peaux des grands animaux comme les
céphalophes, le zèbre ou le bongo servaient de natte à
coucher. Elles étaient tout aussi utilisées comme matelas sur des
lits en terre battue.109(*) Ces objets servaient en même temps de
trophées. Ils symbolisaient les exploits du chasseur. Les gens pouvaient
venir contempler ces animaux, lorsqu'ils ne les avaient pas encore
vus.110(*)
Les produits de chasse étaient également
utilisés pour se vêtir. L'avènement du tissu dans nos
sociétés n'étant que récent à la faveur du
commerce transsaharien d'abord et transatlantique plus tard, les populations
se sont vêtues pendant longtemps de cache-sexe fait d'écorces
d'arbres ou de peaux d'animaux. Les peaux de panthères étaient
recherchées par les pères de famille et les grands patriarches
pour la confection des tenues d'apparat qu'ils arboraient pendant les grandes
cérémonies. A ceci s'ajoutait une coiffure de toque,
surmontée de plumes d'aigle et de perroquet, symbole de noblesse et de
puissance.
Chez les Bangando, la peau du chat-tigre
( tolo) servait à habiller la jeune mariée. Elle la
portait sous forme de cache-sexe. On pouvait tout aussi en faire un foulard.
Les Mpyemo l'utilisaient comme crèche pour les nouveaux
nés.111(*)
Lors des cérémonies de circoncision à
l'instar du Beka, elle était un signe de distinction pour les
initiés. Ceux qui en étaient dépourvus s'exposaient aux
amendes.112(*)
Les produits de la chasse aidaient à confectionner
des objets usuels. Leur utilité était manifeste lors des
campagnes guerrières et dans les taches domestiques. La peau de
panthère servait de parure, un bon bouclier contre les flèches
tandis que les cornes du buffle quant à elles, servaient de sifflet.
Elles jouaient le rôle d'instrument de communication et de mobilisation
des troupes. La queue d'éléphant tenait lieu des
chasse-mouches.
Au niveau de l'art culinaire, la rutile de
l'éléphant remplissait le rôle de meule. Elle servait
à écraser les céréales tels les arachides ou le
concombre. Ses côtés jouaient le rôle de couteau ; ils
permettaient d'éplucher les plantains à la cuisine. Les femmes
s'en servaient aussi pour faire des coiffures.
II- CHASSE ET POLITIQUE
Faute d'une structure étatique
hiérarchisée, une certaine ethnographie tendancieuse empreinte de
l'idéologie colonialiste, a caractérisé d'acéphales
et apolitique, les sociétés forestières d'Afrique. Or le
pouvoir politique est ici une réalité. Il incombe à un
chef dont les prérogatives ont un lien évident avec
l'activité cynégétique.
A- Les attributs du Chef
La structure socio-politique des Bantous et des Baka du
Sud-est Cameroun, reste conforme au modèle des sociétés
lignagères. Le lignage constitue à cet effet l'unité
résidentielle, le cadre de référence de la vie sociale. La
succession est patrilinéaire. Les individus s'identifient à leur
clan d'origine dont ils portent le nom de l'ancêtre fondateur. Certains
clans sont formés au cours des situations troubles comme les migrations
et les guerres où les hommes, pour se tirer d'affaire, scellent des
alliances avec des animaux ou des plantes qui deviennent ainsi leurs
totems et leurs emblèmes. Ces animaux constituent par conséquent
leurs interdits alimentaires. Ils ne peuvent en aucun cas être
chassés. Les clans ainsi formés prennent leurs noms.
A la tête de chaque clan se trouve un chef
assisté des anciens qui font office de notables. Il appartient à
la dernière génération des parents. L'âge et
l'expérience fondent son autorité. Chez les Baka, sa
désignation tient compte de ses exploits à la chasse. En
communion avec les ancêtres et les esprits de la forêt, il veille
au bien-être de la communauté et à la cohésion
sociale, sur la base du respect de la coutume qui définit le code de
conduite.
Chez les Bangando, le chef était un homme
vénéré. Il arborait un costume digne de son statut. Il
portait la fibre de raphia (Bolele) sous une forme bouffante
appelée Poto. Sur ce Poto était
accrochée une cravate en peau de servaline. Un bonnet en peau de singe
appelé Koi surmonté d'un panache de plume d'aigle
(Nguili) était posé sur la tête en signe de
puissance113(*). Son
visage était maquillé de poudre de Padouk
(Mongouele). Une peau de panthère lui servait de veste.
Son trône (Kondji) reposait sur les pointes d'ivoire
(Matanga). Tous ces objets de valeur montraient à quel point
le chef occupait une place prépondérante en
société. Il entretenait diverses relations avec d'autres
contrées.
B - Les relations intercommunautaires
Les produits de chasse jouaient un rôle non
négligeable dans les relations entre les peuples. Ils mesuraient le
degré d'entente entre les tribus, auguraient de la dégradation
des rapports pacifiques.
1) L'amitié
Une certaine littérature hagiographique chantant les
gloires de la colonisation a envisagé les sociétés
africaines dans une perspective guerrière que seule l'arrivée du
colonisateur aurait stabilisé et pacifié.114(*) Sans nier que l'existence en
Afrique hier comme aujourd'hui est marquée par des chocs, il convient de
relever avec Eboussi Boulaga, que parmi les constantes de la pensée
négro africaine, figure la recherche de la vie dans la paix. 115(*) La civilisation africaine
est une civilisation de paix et d'harmonie. Elle est pensée en termes
de coexistence pacifique. Des rapports pacifiques qui étaient
entretenus par des échanges. Les produits de chasse y jouant un
rôle non négligeable. Les souverains échangeaient des
colis de viande. Il pouvait s'agir des paquets dont la façon d'attacher
le colis recelait des messages codés. Par exemple, les morceaux de
viande attachés avec des fibres végétales
appelées Pembeka chez les Bangando,
expédiés par un chef du Sud-est à son homologue d'une
autre ethnie signifiaient que le destinataire devait en retour envoyer à
l'expéditeur un autre article.116(*)
Les produits de haute valeur tels que l'ivoire, les plumes de
perroquet échangés entre les chefs de tribus étaient un
signe de respect et d'estime réciproques.
Il arrivait que les villages organisent des parties de chasses
communes sous forme de jeux. Les trophées revenant au village du
chasseur qui aurait abattu des espèces prestigieuses comme
l'éléphant, le Bongo ou le Gorille. L'utilisation des produits de
la chasse était aussi significative pendant les conflits.
2) Le conflit
La collaboration entre les entités politiques du
Sud-est à l'époque précoloniale s'exprimait par l'envoi
des présents et des visites entre souverains. Le contenu d'un paquet
était un message. Ainsi, un colis contenant les parties
génitales d'un animal, était un signe annonciateur de la
dégradation des rapports entre les peuples. Il ne s'agissait point d'une
déclaration de guerre mais plutôt d'une invite à la
négociation117(*). La suite des événements devait
dépendre du contenu du colis renvoyé. Un paquet contenant
l'animal totem du clan signifiait automatiquement une déclaration de
guerre. L'on pouvait aussi envoyer des armes tels le couteau, les lances
pour signifier que l'on avait opté pour l'affrontement armé. Dans
le cas contraire la volaille qui était expédiée.
La chasse pouvait être une source de conflits entre
contrées. En effet, chaque village disposait de ses propres territoires
de chasse. La limite pouvait se situer au bord d'une rivière, d'un arbre
ou d'une montagne. On s'y introduisait avec la permission d'un beau fils ou
d'un ami. Quiconque s'aventurait dans ces espaces en dehors de ce cadre
réglementaire, était considéré comme clandestin. Il
s'exposait aux conséquences très graves. A défaut
d'être dévoré par une bête féroce
représentant un esprit du clan, l'infortuné pouvait se faire
tabasser par les jeunes du village en question au cas où il avait
été surpris en flagrant délit. En retour, les siens
étaient à mesure de riposter et l'incident
dégénérait en affrontement armé.
Tel était le rôle ambivalent de la chasse dans
les relations inter-communautaires. Elle pouvait assainir ou envenimer les
relations entre les peuples. Malgré tout, son rôle
était plus déterminant dans le domaine des échanges.
III- LA CHASSE DANS LE SYSTEME ECONOMIQUE
L'importance des produits de la chasse intervient dans le
commerce précolonial et les échanges matrimoniaux.
A - Les produits de chasse dans le commerce
précolonial.
La région du Sud-est, à l'image de tout le
Cameroun méridional forestier, a connu le développement des
échanges, malgré l'absence de marchés formels, des routes
commerciales, d'une classe de marchands et surtout de la monnaie2(*)9. Le troc suppléait
à la monnaie dont le rôle est de déterminer la valeur
marchande des biens.
Les populations procédaient aux échanges en
soupesant les objets et les biens. Leur valeur était
estimée à vue d'oeil. Les opérations se déroulaient
à travers les nombreux réseaux d'amitié existant entre les
peuples ; les intermédiaires facilitaient les transactions dans le
cadre du commerce à longue distance, devenu intensif avec l'ouverture
aux commerces transatlantique et transsaharien.
Du lieu de provenance ou de destination, dépendait la
nature des produits échangés. De l'intérieur revenaient le
caoutchouc, l'huile de palme, les peaux et dents de panthère, l'ivoire
et les captifs. De la côte provenaient, des fusils, du sel, de la poudre
et de la pacotille. Du Nord, partaient les chevaux et les cotonnades qui
étaient échangés contre la kola et les captifs3(*)0.
Le Sud-est constituait un pôle commercial important en
raison de ses nombreuses richesses naturelles, de sa position
stratégique dans le bassin conventionnel du Congo, et de son ouverture
sur la côte atlantique où Français, Allemands, Portugais
et Belges avaient ouvert des factoreries.
De par la richesse de sa faune, les produits de chasse
étaient particulièrement prisés. Les échanges se
déroulaient à travers une chaîne commerciale
organisée entre les Baka, les Bantou et les
Européens. C'est par l'intermédiaire des Bantou que les
Européens entraient en possession des produits dont les Baka
étaient la source à savoir : les peaux et dents de
panthère, et l'ivoire. En effet, les Bantou envoyaient les
Baka, chasser pour leur compte. Désormais, il
s'établissait une prééminence du Bantou sur son
associé. Les objets issus de cette transaction devaient
impérativement transiter par lui avant de parvenir au Baka. Il
avait la latitude de choisir quel objet lui donner.
B - Le rôle des produits de chasse dans les
échanges matrimoniaux.
Avant la pénétration occidentale dans la
région à la fin du XIXè siècle, la dot
chez les Bantou comportait l'offre des objets métalliques tels
que les barres de fer et les pointes d'ivoire. Ces objets étaient rares,
mais indispensables. Ils entraient dans la fabrication des outils agricoles
comme l'enclume, la hache, la machette, la houe et les lances destinées
à la chasse. L'on pouvait en plus de cela, demander des animaux tels la
tortue, la vipère, le boa où d'une bête féroce qui
avait dévoré un membre de la famille118(*).
Avant le rituel, il arrivait que l'on exige du gendre la
capture ou l'abattage d'un mammifère carnivore. Le réaliser
était la preuve non seulement de son courage, mais aussi surtout
l'assurance que son épouse allait être bien nourrie. Le
prétendant mobilisait alors les siens qui organisaient les parties de
chasse à cet effet. Le mariage ne pouvait avoir lieu tant que cette
exigence n'avait pas été satisfaite. Il arrivait aussi qu'un
jeune homme réputé grand chasseur, reçoivent les
propositions de mariages de la part de plusieurs famille en rapport avec ses
talents.119(*)
Chez les pygmées, la compensation matrimoniale
représentait trois années de chasse pour le compte de la belle
famille. Le prétendant séjournait pendant cette période
dans le campement de sa femme. Il ne regagnait le sien accompagné de son
épouse qu'après avoir accompli ce temps.120(*)
C- La chasse comme fondement de la coopération
Baka - Bantou
Les traditions des peuples Bantou du Sud-est Cameroun
présentent les Baka comme un peuple pacifique dont les rapports
avec leurs voisins Bantou ont généralement
été harmonieux. En effet, l'ancienneté des ces relations
pacifiques entre les deux communautés est attestée par Bahuchet
et David pour ne citer que ces deux auteurs. Bahuchet écrit que :
``les Pygmées sont en contact avec les populations d'agriculteurs depuis
au moins cinq cents ans»121(*). David quant à lui remonte plus loin dans le
temps et nous apprend que cette coopération date de 2400-500 avant J-C,
et qu'elle a un fondement économique122(*).
1. L'interdépendance économique
En raison de leurs modes de vie respectifs, Baka et
Bantou ont été qualifiés, les uns
d'agro-chasseurs et les autres de chasseurs-collecteurs. Ce qui suppose
d'énormes lacunes et le besoin de complémentarité dans
leurs différents systèmes de production. Aussi, la demande en
ressources naturelles était-elle élevée chez le
Bantou dont la structure sociale est très large. Sa production
en viande ne pouvant rivaliser celle du Baka, véritable
maître de la forêt.123(*) A cet effet, ses espoirs ne reposaient
principalement que sur l'agriculture, qui, bien que fournissant des
denrées limitées, a l'avantage de permettre la constitution des
stocks des réserves toute l'année durant.
Le Baka quant à lui se trouve dans une
position d'infériorité technologique. Il ne travaille en effet
ni argile ni fer dont les produits sont pourtant nécessaires pour sa
vie quotidienne. Le recours aux échanges s'avérait
impérieux pour chacun dans le but de combler ses manques. Il
s'était ainsi installé entre les deux communautés, une
symbiose qui se traduisait par le principe du «troc
équilibré . A ce propos, Séverin Cécile
Abega indique que :
Ces rapports étaient empreints de
spontanéité, et les deux partenaires engagés dans le cycle
de prestation et de contre prestation savaient ce qui était bon pour
l'autre, n'hésitant pas à le lui offrir même si le besoin
n'avait pas été exprimé124(*).
Aussi le Baka troquait-il le produit de sa venaison
composée d'excédents de chasse, d'amande de mangue sauvage, de
miel et de plusieurs variétés de feuilles comestibles contre des
féculents, des céréales, du sel, du tabac, des noix de
kola, des ustensiles en argile, ainsi que des objets en fer125(*). Les biens ainsi
échangés parvenaient au coeur de chaque société par
l'intermédiaire des nombreux réseaux d'amitié
établis entre les membres des deux communautés. Des
amitiés qui, pour se consolider davantage ont eu recours à la
sacralité126(*)6(*).
2. Alliances et pactes sociaux
Le déroulement des échanges entre les deux
communautés était entouré de mystère en raison des
préjugés que les uns avaient des autres127(*). Les traditions orales
rapportent que le Baka venait déposer dans le sous bois
situé non loin de la concession de son partenaire les produits qu'il
lui proposait, en l'invitant par les signes à les découvrir. Plus
tard, il venait au même endroit pour récupérer ce qui lui
était destiné car, chacun connaissait les besoins de l'autre. La
transaction étant devenue spontanée, il s'était
établi une amitié (lotis) qui s'étendait aux
membres de leurs familles respectives.
Le Baka avait choisi par la suite de s'installer
derrière la concession du Bantou. Cette décision
était motivée à la fois par un souci commercial et la
recherche de la sécurité. En effet, le Baka, en se
rapprochant de son associé, était mu par la fuite du
Limassa128(*),
une sorte de croque mitaine qui sévissait dans la forêt129(*) ; d'où sa
propension à se cacher dans le sous bois, au moindre contact avec un
étranger. Il n'avait non plus choisi de s'installer au village car
redoutant le Kaka, un autre personnage avec qui il avait eu maille
à partir dès le premier contact. Tout étranger pour le
Baka est un Kaka envers qui il éprouve la peur et la
méfiance130(*).
Dans le souci de garantir l'inviolabilité de ces liens, des pactes de
sang (Mponi) furent scellés entre eux131(*). Les parentés
artificielles s'établissaient entre les membres des deux
communautés. A Mbangoye I, village situé à dix-sept
kilomètres de Moloundou, les traditions orales rapportent que Sakanda
est l'ancêtre Bangando qui aurait établi le pacte avec
les Pygmées qui s'y trouvent de nos jours1(*)0. Ainsi, des Baka
étaient liés à des familles bantoues. Un certain Massa du
village Mbatéké par Moloundou abrite encore dans sa concession
des Pygmées dont le pacte d'amitié avait été
scellé entre les grand-parents1(*)1.
Ces pactes ont servi de levier à une certaine
fraternité entre les deux communautés allant jusqu'à la
participation commune aux activités religieuses de chaque
société. A cet effet, les Baka ont été les premiers
à admettre les Bantou au sein du jengui, rite au cours duquel
Komba, le créateur, manifeste sa bonté1(*)2. Dans un premier temps, les
Bantou y assistaient par simple curiosité. Abasourdis par des miracles
réalisés au cours de cette cérémonie dont les
retombées s'appliquaient en même temps aux communautés
Baka et Bantou, ils avaient décidé de
l'intégrer véritablement1(*)3. Ces derniers voyaient leur récolte
augmenter et les parties de chasse devenaient fructueuses1(*)4. Jengui indiquait
aussi de nouvelles plantes médicinales dont les bienfaits
s'étendaient aux deux communautés1(*)5. Enfin, les initiés étaient
désormais placés sous la protection de jengui et
pouvaient par conséquent chasser dans la forêt sans se faire
dévorer par une bête sauvage représentant un esprit
malveillant1(*)6.
Par cet acte, les Baka avaient ouvert la porte de
leur culture aux Bantou. Mieux encore, ils les introduisaient dans les
profondeurs de la forêt dont ils maîtrisent les secrets132(*).
Les enfants des deux communautés, tout en grandissant
ensemble, étaient soumis aux mêmes rites d'initiation1(*)8. C'est le cas du Beka
qui est une circoncision publique d'origine Essel, un peuple
bantou. Cérémonie de grande envergure, elle mobilise l'ensemble
de la communauté et nécessite un gros investissement de la part
des aspirants. C'est à un Bantou qu'il revient
d'exécuter l'opération. Les petits Baka et
Bantou initiés au même moment deviennent des
frères de sang et de classe d'âge. Ils partageront à
jamais ce souvenir commun.
Un brassage linguistique s'était établi entre
les deux communautés. Cependant, le Baka était plus
prompt à parler la langue du Bantou, nécessaire dans
les échanges. Chaque Baka se trouvait ainsi annexé
à une famille Bantou dont il devenait le membre sans pour autant devenir
Bantou d'autant qu'«un morceau de bois, à force de
séjourner longtemps dans l'eau, ne se sera jamais caïman». Les
distances observées entre les deux communautés donnaient toute la
mesure de cet adage. Jamais elles ne partageaient en commun leur repas. Pire
encore, les interdits sexuels étaient formels entre les deux groupes qui
tenaient chacun à sa pureté. Un Baka n'osait même pas
regarder une femme bantoue avec convoitise ; et même s'il lui
arrivait de le faire, sa demande n'aurait pas été
agréée, en raison du complexe de supériorité qui
animait les femmes bantoues. En revanche, le Bantou qui venait à
transgresser cet interdit était déclaré impur et
dénoncé tout de suite. Cela se révélait lors de la
réduction du fer où la présence de celui qui avait
touché à une femme Baka faisait échouer
l'opération jusqu'à ce qu'il passe aux aveux et se
purifie1(*)9.
Cette distance n'était nullement une
ségrégation entre les deux peuples plutôt une mesure visant
à préserver la paix et l'harmonie entre les membres des deux
sociétés qui vivaient dans la cordialité, les uns se
mettant à l'école des autres.
3. La transmission des techniques
Du fait de son ignorance de la technologie du fer, le
Baka se trouvait dans une position de faiblesse vis à vis du
Bantou. En effet, cette technologie produit une gamme d'objets qui sont d'une
grande utilité dans la vie courante : sagaies, haches, couteaux...
qui accentuent et systématisent l'exploitation des ressources
naturelles. Guillaume explique à cet effet que «c'est l'acquisition
d'objets forgés qui constitue la base matérielle du rapport
d'association et lui donne son caractère contraignant»2(*)0.
Cette lacune ne constitue nullement un handicap dans sa
relation avec le Bantou. Bien au contraire, le Baka est
crédité d'une grande science dont il mettait les applications et
les savoirs à la disposition du Bantou. A cet effet, on
assistait à un véritable «rendez-vous du donner et du
recevoir». On est même tenté de se demander si ce n'est pas
le Baka qui donnait plus qu'il ne recevait étant entendu qu'il
ne recevait de son associé que des objets usuels alors qu'en retour, il
lui apprenait des techniques et des savoirs à perpétuer un peu
dans l'esprit de cet adage chinois qui dit qu'il vaut mieux apprendre
à quelqu'un à pêcher que de lui donner du poisson.
Tout d'abord, le Baka enseignait au Bantou
les techniques de chasse nouvelles. Une meilleure exploitation des richesses
naturelles, exige-t-elle de remarquables capacités d'observation et
d'analyse de l'environnement. Elle fait appel à une grande acuité
visuelle et auditive. Le Baka, maître absolu de la forêt,
trouve du gibier là où les autres trouvent inutile de chasser. Il
prévoit même l'arrivée des animaux qu'il peut
appeler2(*)1.
A partir de cette haute éthologie, le Baka
conditionnait l'accès du Bantou dans l'univers forestier en vue
d'une exploitation optimale des ressources. Il lui apprenait à
repérer les traces des animaux, à tuer les singes à
l'aide des flèches empoisonnées et lui indiquait le
procédé même de fabrication de cette substance dont les
effets nocifs n'ont aucune répercussion sur le consommateur2(*)2.
En outre, le Baka indiquait au Bantou
comment soigner les morsures des serpents et de scorpions, nombreux en
forêt. Henri Koch à fort bien montrer la présence des
techniques de chasse des Baka dans l'univers des Bantou,
marqué par la présence des campements de chasse dont
l'architecture n'est pas moins un trait de la culture pygmée. Alphonse
Moussa, un patriarche Mpouomam fait un témoignage
élogieux de cette pédagogie quand il confie que «c'est
grâce à eux que nous avons appris à chasser
l'éléphant»2(*)3.
L'éléphant est un pachyderme qui fait partie des
animaux redoutés de la forêt. Sa masse de chair estimée
à plus de sept tonnes2(*)4, peut nourrir des villages entiers pendant
plusieurs jours. Son ivoire a été de tout temps l'objet d'un
commerce florissant entre les Bantou et les Européens. Aussi
était-il vivement recherché. Cependant, les Bantou
redoutaient cet animal car l'épreuve de sa chasse présente des
risques. Pour avoir l'ivoire, il fallait faire recours aux Baka
doués en la matière ; ils ont appris aux Bantou
qu'ils pouvaient détecter sa présence, par le bourdonnement des
mouches ; ainsi que la façon de l'aborder sans être
perçu, et comment se défendre en cas d'attaque2(*)5. Toutes ces épreuves
nécessitaient beaucoup de subtilité, d'où cette invite
à la prudence contenue dans cet autre proverbe Baka qui dit :
Mo olo a la ya a c'est-à-dire «on ne grimpe pas en face de
l'éléphant».
C'est pour cette raison que le chasseur
d'éléphant était un homme adulé. C'était
l'échelon le plus élevé de la cynégétique.
Il était suivi par le chasseur du gorille, car ces deux animaux
réputés dangereux sont difficiles à abattre2(*)6; y parvenir relevait de
l'exploit célébré par toute la communauté. Le
chasseur était porté en triomphe. Les Baka, en
permettant aux Bantou d'accéder à cette gloire,
s'étaient ouverts sans réserve à leurs voisins.
En dehors de la chasse, les Baka initiaient
également les Bantou à connaître les noms des
plantes, ainsi qu'à maîtriser leurs vertus. Ces plantes servaient
aussi bien dans le domaine médicinal que dans l'alimentation. C'est le
cas de l'ayous (Triptochiton Scleroylon) dont la chair pilée
permettait d'obtenir du sel indispensable à la cuisson des repas. Ils
leur enseignaient aussi des thérapies à base d'écorce
d'arbres. Ils leur ont appris, par exemple, l'utilisation d'écorces de
sapelli (Cutandrophoama) pour soigner les blessures. De même
que les hémorroïdes pouvaient se traiter à l'aide d'une
décoction faite avec l'écorce d'acajou, ou encore, et les
céphalées aiguës grâce à une poudre obtenue de
la crémation de la peau du singe magistrat2(*)7entre autres.
C'est sur cette base des rapports diversifiés et
d'échanges de connaissances, des techniques et des capacités
différentes de mise en valeur du milieu naturel que les Baka et
les Bantou se sont associés, chaque partie
bénéficiant des potentialités originelles de l'autre.
Conclusion
Cette présentation non exhaustive des multiples
utilisations des produits de chasse par les populations du Sud-est Cameroun
à l'époque précoloniale, permet d'évaluer
l'encrage de l'activité cynégétique dans la vie
quotidienne des Baka et des Bantou. Elle rend compte à merveille de la
gamme de services que cette activité procure à ces populations.
Aussi, le lien est-il très profond entre les hommes et la chasse qui,
dès lors apparaît comme une activité vitale et un facteur
structurant des rapports inter individuels d'une part, et entre l'homme et la
nature d'autre part.
La chasse fournit aux ménages leur nourriture
quotidienne. Elle est un cadre idoine de manifestation du communautarisme dont
le pendant reste la solidarité africaine. Elément de base dans
les échanges, elle constitue un élément
d'appréciation du degré d'estime que l'on porte à un
étranger. Ses produits ont des vertus médicinales certaines.
Celles-ci vont de la guérison des maladies courantes au rôle de
fétiche133(*).
Source de matières premières dans le domaine de
l'esthétique, baromètre éprouvé des relations inter
communautaires, enjeu important dans le mariage, la chasse occupe une place
cardinale dans la vie des populations du Sud-est Cameroun. Bon nombres
d'aspects qui restent encore pratiqués dans cette région de nos
jours.
Face à l'urgence de la sauvegarde de la faune sauvage,
il convient de relever que toute tentative d'abandon de l'activité
cynégétique par ces populations participe d'une
déstructuration sociale de ces peuples. Par ailleurs les mesures
alternatives préconisées dans le cadre de la lutte anti
braconnage, devront prendre en compte cette dimension multifonctionnelle de la
chasse pour ces populations. Il y a donc lieu de les impliquer de façon
active dans le processus de protection de la biodiversité, dans le cadre
d'un dialogue de cultures entre les peuples.
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I. SOURCES ORALES
Noms et prénoms
|
Age
|
Qualité
|
Ethnie
|
Date et lieu d'entretien
|
Alamba Samuel
|
62 ans
|
Agro-chasseur
|
Baka
|
26/02/2005 à Mbol XII
|
Allo Daniel
|
60 ans
|
Agro-chasseur
|
Baka
|
12 /04/2008
Nguilili
|
Ambatta Philippe
|
45 ans
|
Animateur AAPEC
|
Bangando
|
13 Avril 2005 à Moloundou
|
Alembo Jacques
|
62 ans
|
Chef de village
|
Mpyemo
|
10 /06/2008 à Mparo
|
Djasso Baoue Thimothée
|
49 ans
|
Cultivateur
|
Bangando
|
10/04/2005 à Mbangoye I
|
Ekwas Sébastien
|
62 ans
|
Cultivateur
|
Mpouomam
|
26/02/2005 à Mbol XII
|
Epack Daniel
|
75 ans
|
Cultivateur
|
Mpoumpo'oh
|
07/11/2004 à Massiang
|
Ateme
Jerôme
|
56 ans
|
Chef de village
|
Sanga-Sanga
|
11/04/2008 à Moloundou
|
Jemba Jean
|
71 ans
|
Cultivateur
|
Bangando
|
08/04/2005 à Mbangoye I
|
Lessie Patrice
|
62 Ans
|
Chef traditionnel
|
Essel
|
11/04/2008 à Nguilili
|
Massa Ernest
|
52 Ans
|
Cultivateur
|
Bangando
|
10/04/2005 à Mbangoye II
|
Gussaki Gaston
|
56 Ans
|
Agent communal
|
Bangando
|
11/04/2008 à Nguilili
|
Mboloko Emile
|
79 Ans
|
Ancien
combattant
|
Mpyemo
|
10 /06/2008 à
Yokadouma
|
Mediké John Albert
|
59 Ans
|
Agent de l'Etat retraité
|
Bangando
|
12/04/2008 à
Banana
|
Mekoulagna Basile
|
68 Ans
|
Cultivateur
|
Mpoumpo'oh
|
26/02/2005 à Mbol XII
|
Mikpok Jasimin
|
52 Ans
|
Chasseur-collecteur
|
Baka
|
18/02/2005 à
Madoungué
|
Mgbeni Benoît
|
62 Ans
|
Chasseur- collecteur
|
Baka
|
05/02/2005 à Massiang
|
Moampi Romain
|
39 Ans
|
Agro-chasseur
|
Baka
|
08/04/2005 à Mbangoye I
|
Mongonando Gilbert
|
63Ans
|
Chef traditionnel
|
Bangando
|
10/04/2005 à Moloundou
|
Mossadikou Eugène Raphaël
|
81 Ans
|
Ancien parlementaire
|
Bangando
|
10/04/2008 à Moloundou
|
Essomo Justine
|
62 Ans
|
Ménagère
|
Mpoumpo'oh
|
18/02/2005 à Madoungué
|
Mossus Bertin
|
36 Ans
|
Animateur rural
|
Koumabeemb
|
05/02/2008 à Ngato
|
Mvogo Suzanne
|
59 Ans
|
Cultivatrice
|
Baka
|
11/04/2008 à Nguilili
|
Ndongo Pascal
|
58 Ans
|
Chasseur-collecteur
|
Baka
|
18/02/2005 à Madoungué
|
Annexes
ANNEXE I
DONNEES SUR LA DIVERSITE BIOLOGIQUE EN AFRIQUE EN
CENTRALE
ET AU CAMEROUN
I - AFRIQUE CENTRALE
- Superficie totale
423.341.000 ha
- Population :
100.500.000habitants.
- Superficie des forêts du Bassin du Congo : 210
Millions d'ha
2ème plus grand massif forestier d'un seul
tenant du monde après l'Amazonie
26% des forêts humides du monde
70% du couvert forestier africain
Un des plus importants foyers de méga diversité
biologique du monde.
Plusieurs centres d'endémisme refuge interglaciaire du
Bassin du Congo central, massif montagneux surélevé du Congo
oriental, montagnes du Cameroun, refuse interglaciaire du Gabon, mangroves des
côtes de l'Atlantique, écosystèmes dulçaquicoles du
fleuve Congo avec ses lacs et ses affluents. Gamme très variée de
biomes, d'écosystèmes et d'habitants comprenant des forêts
inondées, des forêts afro montagneuses, des mangroves, des
bois.
Plus de 50% d'espèces animales et
Végétales du Contient ; 1er rang des
régions africaines pour plusieurs groupes taxonomiques, avec notamment
Ø 852 espèces de mammifères
Ø 1086 espèces d'oiseaux
Ø 216 espèces d'amphibies
Ø 280 espèces de reptiles
Ø 48 espèces de papillons
Ø 10.000 espèces de plantes vasculaires
II - CAMEROUN
5ème rang africain au niveau de la
diversité biologique , après la RDC , Madagascar, Tanzanie
et Afrique du Sud
Ø Superficie : 475.000 km2 (1,6% de
la superficie globale du continent africain)
Ø 406 espèces de mammifères (48% du
continent) dont 23 sont endémiques
Ø 846 espèces d'oiseaux (54%) dont 21 sont
endémiques
Ø 190 espèces d'amphibiens (50ù) dont
21 sont endémiques
Ø 183 espèces de reptiles (30 - 75%)
Ø 39 espèces de papillons (25 - 50%) 10.000
espèces de plantes vasculaires
Ø Source : MINEF, rapport du séminaire
national d'élaboration des stratégies de lutte contre le
braconnage Yaoundé 10-11- août 1999, p.58.
ANNEXE 2
Animaux protégés au Sud - Est Cameroun
Animaux de la classe A1
La classe A comprend les espèces rares ou en voie
de disparition.ces espèces sont de fait intégralement
protégés et ne doivent en aucun cas être abattues ou
capturés. Toutefois, leur capture ou détention est
subordonnée à l'obtention d'une autorisation spéciale
délivrée par l'administration en charge de la faune.
ESPECES
|
BAKA
|
BANGANDO
|
KOUNABEEMB
|
MPYEMO
|
Elephant
|
Ya'a
|
Foloh
|
Zok
|
Ntchogui
|
Gorille
|
Ebobo
|
Ko'o
|
Tchil
|
ntchilo
|
chimpanzé
|
Seko
|
waké
|
waak
|
wago
|
Colobe guereza
|
kalou
|
sombo
|
guiyan
|
djano
|
Cercopithèque de Brazza
|
Mambe
|
Punga
|
Pouoh
|
pondi
|
Orycterope
|
Bienga
|
Bamba
|
Biap
|
Biambeh
|
Cercocèbe agile
|
Tamba
|
Pangué
|
Peueh
|
Pouong
|
Panthère
|
Souha
|
Gô
|
Keuh
|
Nkoy
|
Chevrotin aquatique
|
Akolo'oh
|
Boèle
|
Akolo
|
Wiong
|
Cephalo à dos jaune
|
Bemba
|
Mbo'o
|
Edjam
|
Adjemo
|
Crocodile
|
Souha
|
Mokakoulé
|
Keere
|
Nkando
|
Potto de bos man
|
Katou
|
Katou
|
Direll
|
Dindougou
|
|
Koukoulou
|
Bika
|
Heus
|
Koé
|
Article 2(1) de l'arrête N°0648/MINFOF du 18
décembre 2006
Animaux de la classe B1
« La classe B comprend les espèces
bénéficiant d'une protection .elles ne peuvent être
chassées, capturés ou abattues qu'après obtention de
titre d'exploitation de la faune.
ESPECES
|
BAKA
|
BANGANDO
|
KOUNABEEMB
|
MPYEMO
|
Buffle
|
Mboko'o
|
Yelé
|
Zoum
|
Ntsomo
|
Potamochère
|
Bea
|
Koduk
|
Koduk
|
Nkoediki
|
Civette
|
Liabo
|
Ndima
|
Gouoh
|
Mpa
|
Genette
|
Longue
|
Longue
|
Mpa
|
Sing
|
Cephalope de Peters
|
Nguendi
|
Mbindi
|
Piin
|
Mpindi
|
Bongo
|
Mbongo
|
Mbonga
|
Poualik
|
Mpongo
|
Sitatunga
|
Mbilia
|
Mboudi
|
Poul
|
Mpouli
|
Cephalope à bande dorsale noire
|
Mgbomou
|
Ba
|
Etsien
|
Adjemo
|
Loutre à joues blanches
|
Londo
|
Fima
|
Ebo'oh
|
Londô
|
Pyton
|
Meke
|
Mbomo
|
Mpouam
|
Mpomo
|
Tortue
|
Kounda
|
Tana
|
Koul
|
Kouli
|
Article 3 (1) de l'arrête N°0648/MINFOF du 18
décembre 2006
* 1 Depuis 1968, date de la
création du club de Rome prenant en compte la question de
l'environnement, plusieurs sommets y relatifs se sont tenus. les plus
significatifs sont le sommet de la terre de Rio de Janeiro en 1992 et le sommet
sur le développement durable de Johannesburg en 2002. On peut aussi
ajouter à cette liste, le protocole de Kyoto sur la réduction des
gaz à effet de serre entré en vigueur en 2005.
* 2 La chasse est clairement
attestée dans les gisements archéologiques liés à
l'Homme de Neandertal.
* 3 G. H. Brundtland, `` Notre
avenir à tous'', Rapport de la Commission mondiale sur l'environnement
et le développement, 1987.
* 4 Ibid.
* 5 Le relativisme culturel est
une doctrine philosophique qui s'oppose à une morale absolue et
préconise que tout varie en fonction de son milieu
d'émergence.
* 6 UNESCO, ''Convention sur la
sauvegarde du patrimoine culturel immatériel '', octobre 2000.
* 7 C. Beck, Intervention
à l'atelier sur l'histoire de l'environnement, Université de
Nantes, 2002, in
http://wikipedia.org/histoire_environnement.
* 8 K. Marx, Manuscrits de
1884, Editions Sociales, p.96
* 9 T.Obenga, Pour une
nouvelle histoire, Paris, Présence africaine, 1980, p.9.
* 10 La désertification
due à l'avancée du Sahara et la sauvegarde des massifs forestiers
de l'Afrique centrale sont entre autres certains des ces problèmes.
* 11 M. Chastanat, Plantes
et paysages d'Afrique. Une histoire à explorer .Paris,
Karthala,/CRA, 1998, p.21.
* 12 Le CODESRIA a
organisé un atelier à Ndjamena en 1989 sur le thème :
Quelle Histoire pour l'Afrique de demain ?
* 13
http://wilpekédia.org_chasse
* 14 Ibid.
* 15 Les modes sociaux des
chasseurs-cueilleurs se heurtent violemment depuis l'invention de
l'agriculture, il y a 10000ans aux sociétés pastorales ou
agricoles.
* 16 P.Bgombe Logo, ``Le
phénomène du pouvoir politique chez les pygmées
Baka de l'Est- Cameroun'', Mémoire de Maîtrise en Sciences
Politiques, Université de Yaoundé 1990, p.7.
* 17 Ibid.
* 18 G. Burdeau,
Traité des sciences politiques, Paris LGDJ 1980, p.2.
* 19 Ibid.
* 20 http://
wikipedia.org_societé
* 21 Ibid.
* 22 G. Rocher, L'action
sociale..., p.65.
* 23 G. Rocher,
Introduction à la sociologie générale, tome 2,
HMH, 1964, p.130.
* 24 Tendance de l'école
historique des annales, la nouvelle histoire est lancée au cours des
années 1970 par Pierre Nora et Jacques Le Goff.
* 25 Radcliffe-Brouwn,
Structure et fonction dans la société primitive,
Londres, 1952, p.11.
* 26C. Levi-Strauss
Anthropologie structurale, Paris, 1974, p.141.
* 27 P.Bgombe, ``Le
phénomène du pouvoir politique...'', p.32.
* 28 G. Rocher,
Introduction générale à la sociologie,
p.165.
* 29 Robert King Merton,
cité par P.Bgombe, ``Le phénomène du pouvoir
politique...'', p.32.
* 30 Au départ,
l'histoire de l'environnement est suspectée être de
l'idéologie et fait face à des ombreuses lacunes
méthodologiques.
* 31 Elide Mircea,
Traité d'histoire des religions, Paris, Payot, 1949.
* 32 J.Maley, La
sédimentation pollinique dans l'actuel bassin du lac Tchad, Paris,
pollens et spore, 1972
* 33 J.Boutrais et al,
Le Nord Cameroun : Bilan de dix ans de recherche, Yaoundé,
ISH, ORSTOM, 1979.
* 34J.P. Chrétien,
Histoire rurale de l'Afrique des Grands Lacs, Paris, Karthala/CRA,
1983.
* 35 A.,
Beauvilain, ``Nord Cameroun : Crises et peuplement'', thèse de
Doctorat, Lettres et sciences Humaines , Université de Rouen, 2
tomes.
* 36 B., D.,
Nizezeté, ``Les hommes et le bois dans les hauts plateaux de l'ouest
-Cameroun. Des éléments pour une la technologie du bois dans les
grassfields'', Thèse de Doctorat nouveau régime,
université de Paris I panthéon, Sorbonne
* 37 M .Chastanet, Plantes
et paysages d'Afrique. Une histoire à explorer .Paris, Karthala,
/CRA, 1998.
* 38 Le cas de la R.C.A et
du Tchad y est explicitement évoqué.
* 39 T.M. Bah.,
«Guerre, pouvoir et société dans l'Afrique
précoloniale entre le lac Tchad et la côte du Cameroun»,
thèse de Doctorat d'Etat es lettres, Paris I Panthéon-Sorbone,
vol.1, 1985.
* 40 On peut évoquer
les cas des abris sous roche.
* 41 Un bon chasseur devait
automatiquement être un bon guerrier.
* 42 J. M., Essomba, Le fer
au Cameroun méridionale, thèse de Doctorat d'Etat es lettres,
Paris I Panthéon-Sorbone, vol.1
* 43 C.Mbida,
L'émergence des premières communautés villageoises,
Thèse de Doctorat Ph.D, Université libre de Bruxelles.
* 44 M. Elouga,
Archéologie des sites au Sud de la boucle de la Sanaga, thèse de
Doctorat Ph.D en Archéologie, Université de Yaoundé I,
2001.
* 45 G.Venetier,
Géographie du Congo, Ganthier vieillards, Paris 1966
* 46 C.M .Hladick et
al : Alimentation en forêt tropicale, ORSTOM.
* 47 F Gastine, Etude
sur la Culture Bantou, Collège Libermann, Douala 1972.
* 48 Cet aspect sera
développé de façon exhaustive au chapitre sept.
* 49S. Bahuchet, Les
pygmées AKA et la forêt Centrafricaine. Selaf Paris 1985 638
pages : Se nourrir en forêt équatoriale. France anthropologie
alimentaire des populations des régions forestières d'Afrique
96 pages
* 50H. Koch, Magie et chasse
dans la forêt camerounaise, Paris, Berger-Levrault, 1968
* 51 G de Foh
Phillipart. , Les Pygmées d'Afrique Centrale,
Parenthèses, 1984
* 52P. Laburthe Tolra.,
Les Seigneurs de la forêt : Essai sur le passé
historique, l'organisation sociale et normes ethniques des anciens Betis du
Cameroun, Paris, Sorbonne, 1981.
* 53 S.M. Rondet,
Organisation des colonies françaises du point de vue
cynégétique.
* 54 S. Ango Mengue.,
«L'Est camerounais : une géographie du sous-peuplement et de
la marginalité», thèse de Doctorat 3e cycle,
université de Bordeaux III, 1982.
* 55 Y.C Madzou,
« Pygmées et Bantou dans le bassin du Congo. Les terroirs de
Bomassa-Bon coin et Makao-Lngaga, riverains du Parc National de
Nouabale-Ndoko, Nord Congo », Mémoire de DEA,
Université Michel de Montaigne, Bordeaux 3, 2002.p. 4.
* 56Les études
réalisées par le WWF ont permis d'identifier plus de cinquante
larges mammifères qui sont pour la plus part des espèces
menacées de disparition dont les éléphants, les
gorilles , les chimpanzés, ainsi que trois cents espèces
d'oiseaux endémiques, cent vingt un espèces de poissons, deux
cents quinze espèces de pavillons, deux cent onze essences de bois
appartenant à quarante sept familles.
* 57 Les traditions orales
des peuples de la foret présentent les pygmées comme une
population préétablie, accueillant les envahisseurs.
* 58 C. Turnbull, The
forest people, London, Paladin, 1984, p.35.
* 59 MINEF, rapport du
séminaire national d'élaboration des stratégies de lutte
contre le braconnage, Yaoundé, 10-11 août 1999, p. 37.
* 60 En mars 1999, six chefs
d'Etats de l'Afrique centrale ont tenu un sommet à Yaoundé au
Cameroun sur la gestion des forets de la sous région. Des
décisions prises ont permis d'élaborer une plate forme commune de
protection de la biodiversité
* 61 Les sept aires
protégés sont les suivantes : les parcs de Boumba Beuk et
Nki et la réserve du djah pour le Cameroun, du Congo Brazzaville, et
les parcs nationaux de Minkebe, Mwagne, d'Ivindo,et d'odzala koukoua pour le
Gabon.
* 62 Ce plan de zonage a
été adopté au Cameroun à partir de la loi
94 /portant sur le régime des forêts.
* 63 L'ancien Maire de la
commune rurale de Yokadouma est en ce moment écroué à la
maison d'arrêt de Yokadouma pour sa gestion jugée peu orthodoxe
à la tête de l'exécutif communal. Quant à l'actuel
Maire, il fait l'objet d'une instruction judiciaire pour des mêmes
raisons. Selon la presse nationale, celui de Moloundou aurait
été convoqué au contrôle supérieur de l'Etat
pour rendre compte de sa gestion.
* 64 Trois sites ont
été découverts dans le village Mbateka.
* 65 Synthèse des
enquêtes de terrain effectuées par nous dans les différents
cantons.
* 66 Résultats des
enquêtes effectuées dans les villages Mparo, Mans, Bompello et
Djalabekoe au mois d'avril 2008.
* 67 La recherche des ignames
sauvages fait partie des activités de prédilection des Baka. Elle
est surtout l'oeuvre des femmes et nécessite une dépense de temps
et d'énergie considérables.
* 68 Synthèse des
enquêtes orales effectuées dans les villages Mbangoye1et 2,
Nguilili1et 2, Mbateka, Makoka, et Mbangoye en août 2008 dans le cadre
du projet LLS /TNS.
* 69 C.M .Hladick et al :
Alimentation en forêt tropicale, ORSTOM, p.23
* 70 S.C.Abega, Les
pygmées Baka, le droit à la différence,
Yaoundé, INADES /FORMATION, 1998, p.50.
* 71 Dellemmmes, Le
père des Pygmées..., p.54.
* 72 F. Angoula, 46 ans,
entretien du 26 mars 2008 à Yokadouma.
* 73 Il s'agit de l'une des
quatre personnalités qui assurent l'harmonie et la concorde au sein de
la société Baka. Les trois autres étant le Kobo (sage), le
Ngangan (guérisseur) et la Ngangue Wose (Doyenne des femmes).
* 74 La danse du Yeli
était l'occasion où les femmes appliquaient des potions sur le
front des chasseurs , afin d'attirer vers eux des animaux.
* 75 S.C. Abega,
Pygmées Baka, ...p.36.
* 76 L'Afrique est souvent
présentée comme une terre de partage.
* 77 Zouya, 76 ans, entretien
du 23 mars 2008 à Mole XII.
* 78 Il n'est pas surprenant
d'entendre quelqu'un de nos jours dire à un voyageur de lui garder comme
provision de son voyage, tel gibier qu'on lui servira.
* 79J.C. Gnangue,
«Evolution des techniques de chasse chez les Bangando du sud-est Cameroun
des origines à 1994», mémoire de DIPESII, ENS,
Yaoundé, 1998, p.53.
* 80 Ibid.
* 81 P.Kebikiile, 85 ans,
guérisseuse traditionnelle, interrogée le 26 octobre 1987
à Dioula par J.C Gnangue.
* 82 F .Angoula, entretien du
26 mars 2008.
* 83 B.Mekoulagna, entretien du
26 mars 2007 à Mbol XII.
* 84 I.B.Kavala, "Essai
d'analyse historique du rite familial de la réconciliation chez les
Baveuk du cours supérieur de la Sanaga", Mémoire de
Maîtrise en Histoire, Université de Yaoundé I, 2005.
* 85 J. Mindjoss, entretien
du 13 juin 2008 à Massiang.
* 86 M. Assue, entretien du
13 mai 2008 à Mboy I.
* 87 E. Mboloko, entretien
du 10 juin 2008 à Yokadouma.
* 88 M. Liankom, entretien
du 13 juin 2008 à Ngolla 20.
* 89 J.Essomo, 62 ans,
guérisseuse traditionnelle, entretien du août 2008 à Mbol
XII.
* 90P. Kebikibele, 85 ans,
entretien du 26 octobre 2007 à Dioula .
* 91 J.C.Ngangue,
«évolution des techniques ...», p.54.
* 92 Cette pratique est
encore usitée de nos jours dans toute la région.
* 93 J.D.Diro, 48 ans
environ, entretien du 12 juin 2008 à Yokadouma.
* 94 Synthèse des
enquêtes de terrain dans les différents villages.
* 95 Ibid.
* 96 Ces deux espèces
sont protégées chez les Bangando.
* 97 J.C.Gnangue,
«évolution des techniques ...», p.56.
* 98 Synthèse des
informations recueillies dans le cadre du projet LLS/TNS.
* 99 F.Angoula, entretien du
1er juin 2008 à Yokadouma.
* 100 Ibid.
* 101A. Medika, entretien du
12 mars 2008 à Banana.
* 102 E .R.Mossadikou,
entretient du 10 mars 2008 à Moloundou.
* 103 B.Mossus, entretien du 5
février 2008 à Ngato.
* 104 E.R.Mossadikou,
entretien du 14 avril 2008 à Moloundou.
* 105 La société
africaine est accusée de conservatrice et de gérontocratique. Les
jeunes ne peuvent avoir accès à certains lieux et n'ont pas droit
à certaines pratiques.
* 106 Zouya ....
* 107 Il fallait éviter
tout contact entre cette substance nocive et l'utilisateur.
* 108 L'habitat des Baka
était fait de branches et de feuilles tandis que chez les Bamtous, les
murs de terre en écorce d'arbre.
* 109 F. Ambassa,
« Etude ethno historique de Bangando du Sud- Est des origines
à 1960 » , mémoire de maîtrise en Histoire,
Université de Yaoundé I, 2008, p.73.
* 110 Ibid.
* 111 P.Lessié,
entretien du 11 avril 2008 à Nguilili
* 112 J. Alembo, entretien du
10 juin 2008 à Mparo.
* 113 Entretien avec Massa
Ernest, 66 ans, notable, 25 juin 2008 à Mabtéka.
* 114 T.M.Bah, «Les
mécanismes traditionnels de prévention, et de résolution
des conflits en Afrique Noir», UNESCO, 1999, p.1.
* 115 F. Eboussi Boulaga,
les conférences nationales en Afrique, une affaire à suivre,
Paris, Karthala, 1993.
* 116 P.Ambatta, entretien du
10 avril 2008 à Dioula.
* 117 Il s'agit d'une pratique
dissuasive qui laissait une chance de compromis aux deux parties en
présence.
* 29 M. Mveng Ayi,
«Echanges commerciaux au Cameroun méridional«,
Contribution de la recherche..., p.47.
* 30 Ibid.
* 118 J. Médika,
entretien du 11 avril 2008 à Banana.
* 119 E. R Mossadikou,
entretien du 10 avril 2008 à Moloundou.
* 120 R. Moampi, entretien
du 08 mars 2008 à Mbangoye 1
* 121 S. Bahuchet, «Les
Pygmées aujourd'hui en Afrique centrale», Africa, Londres,
1996, p.98.
* 122 H. Guillaume et al.,
Encyclopédie des Pygmées Aka, techniques, langues et
société des chasseurs-cueilleurs de la forêt
centrafricaine, 1991, p.176.
* 123 Dellemmmes, Le
père des Pygmées..., p.62.
* 124 S.C. Abega,
Pygmées Baka..., p.58.
* 125 Moussa Moagound
Alphonse, entretien du 26 février 2005 à Mbol XII.
* 126 Mbita Léon,
entretien du 13 mars 2008 à Nguilili.
* 127 Ambata Philippe,
entretien du 13 avril 2008 à Dioula.
* 128 L'évocation de ce
nom continue à provoquer des frissons au sein de la communauté
Baka.
* 129 Moampi Romain, Baka,
entretien du 19 novembre 2005 à Madoungué.
* 130 Aujourd'hui encore,
son attitude trahit cette peur. Au moindre contact avec un inconnu, il penche
sa tête, détourne son regard, à la manière d'une
bête traquée qui cherche à s'enfuir. Dans ces conditions,
il n'avait confiance qu'en son partenaire devenu son ami.
* 131 Mambé
Eugène, entretien du 13 mars 2005 à Mbangoye.
* 10 Mambé
Eugène, entretien du 13 mars 2005 à Mbangoye.
* 11 Massa Ernest, entretien
du 12 mars 2005 à Mbatéka.
* 12 Mgbeni
Bénoît, entretien du 5 février 2005 à Massiang.
* 13 Mambé
Eugène, entretien du 13 mars 2005 à Mbangoye.
* 14 Ibid.
* 15 Massa Ernest, entretien
du 12 mars 2005 à Mbatéka.
* 16 Infra, p.72.
* 132H. Guillaume et al.,
Encyclopédie des Pygmées Aka...p180.
* 18 Mbita Léon,
entretien du 13 mars 2005 à Nguilili.
* 19 Jema Jean, entretien du
14 mars 2005 à Mbangoye.
* 20 H. Guillaume et al.,
Encyclopédie des Pygmées Aka...p184.
* 21 Dellemmmes, Le
père des Pygmées..., p.64.
* 22 Djiasso Timothée,
entretien du 10 avril 2005 à Mbatéka.
* 23 Moussa Mouagound
Alphonse, entretien du 27 janvier 2005 à Mbol XII.
* 24 Dellemmes, Le
père des Pygmées..., p.79.
* 25 Djiasso Timothée,
entretien du 10 avril 2005 à Mbatéka.
* 26 Un vieux Baka, Alamba,
cloué par la maladie sur son lit pour magnifier ses exploits me disait
«je fus un homme, j'ai eu à tuer le gorille et non
l'éléphant».
* 27 Ngbeni Benoît,
entretien du 24 novembre 2004 à Massiang.
* 133 Ce sont des objets
doués d'un pouvoir surnaturel.