SECTION 1 : la banque centrale indépendante et le
biais inflationniste
Avant d'analyser l'effet de l'indépendance de la
banque centrale sur l'inflation, il faut d'abord définir la notion de
l'indépendance des banques centrales.
I) La notion d'indépendance appliquée aux
banques centrales
1/définition de l'indépendance
Accorder leur indépendance aux banques centrales
signifie que nul corps constitué, gouvernement, Parlement ou l'un de
leurs membres respectifs, ne détient le pouvoir d'interférer dans
les décisions prises par la Banque centrale dans l'exercice de sa
mission statutaire et encore moins de renverser le cours des décisions
prises.
L'indépendance des banques centrales s'entend
principalement sur les plans organisationnel et économique.
* L'indépendance organisationnelle tient aux relations
entre la Banque centrale et l'état, et concerne l'ensemble des
dispositions qui régissent l'organisation institutionnelle de la banque
centrale, à savoir, la composition de ses instances
De décision, le mode de recrutement et de
révocation des dirigeants, la durée du mandat, la
responsabilité des instances dirigeantes de la banque et leur devoir de
communication des résultats obtenus, etc.
* L'indépendance économique des banques
centrales s'exerce en matière de politique monétaire et se
décline en indépendance d'objectifs et/ou indépendance
d'instruments. C'est le champ d'application de l'indépendance que nous
retenons à titre principal. Est donc indépendante une banque
centrale qui définit et met en oeuvre la politique monétaire d'un
pays ou d'un groupe de pays dans le cadre d'une loi ou d'un traité.
2/L'indépendance légale et
l'indépendance réelle :
Selon Cukierman et Al(1992 ) : L'indépendance
légale est fondée sur les éléments inscrits dans la
législation, telles que la procédure de nomination des membres du
conseil de la banque ou plus souvent la nomination du gouverneur, la
durée de leurs mandats, l'objectif qu'ils doivent poursuivre,
l'obligation de rendre compte à un autre organe (législatif ou
exécutif), la présence ou pas dans les membres du conseil de la
banque d'un représentant du gouvernement, la responsabilité
ultime de la politique monétaire, la procédure de
résolution des éventuels conflits avec le gouvernement,
l'interdiction de ou de ne pas monétiser le déficit public ou
d'accorder des prêts à l'économie, la libre
détermination du taux d'intérêt, le rôle du
gouvernement dans la détermination des revenus des membres de la banque
centrale....
L'indépendance décrite dans la
législation doit encore se traduire dans la pratique :
l'indépendance légale, bien qu'importante, n'est pas un
élément suffisant pour garantir l'indépendance
réelle.
L'indépendance réelle peut être
détectée, d'après Cukierman et al (1992), soit par des
questionnaires adressées aux spécialistes des banques
centrales ; soit par l'analyse de la durée effective des mandats du
gouverneur de la banque centrale. Cependant, la seconde mesure de
l'indépendance réelle qui consiste en l'analyse des durées
des mandats du gouverneur réduit l'indépendance réelle
à une seule variable, et peut être source de confusion : une
longue durée du mandat peut être aussi le signe de
dépendance, le gouverneur s'étant mis plus facilement à la
disposition du gouvernement pour éviter d'être
déplacé. Pour résoudre cette lacune, Cukierman et Webb
(1995), ont inclus la variabilité politique dans l'examen de
l'indépendance.
Ainsi, les deux auteurs ont étudié chaque
changement du gouverneur qui se fait juste après un changement de
l'exécutif dans le pays, ou toute transformation dans le cadre
politique. Dès lors, cette variabilité politique concerne la
distribution du pouvoir politique entre les partis politiques adverses ou tout
changement radical et inconstitutionnel dans le régime.
En définitive, l'indépendance légale
concerne le côté législatif du rapport entre la banque
centrale et le gouvernement, alors que l'indépendance réelle
concerne le côté pratique. Le cadre légal n'étant
qu'une garantie partielle de l'indépendance réelle.
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