III.5.3. Evaluation de l'âge des enfants
Pour évaluer l'âge des enfants nous
allons examiner :
ü Le déplacement des dates de naissance des
enfants en calculant les rapports des naissances annuelles ;
ü Les préférences pour certains âges
en calculant les ratios à l'âge x ;
ü La variation des rapports de masculinité
à la naissance et des rapports de masculinité classés
selon l'âge des mères ;
ü La variation du nombre moyen de décès par
femme et la variation des enfants décédés parmi les
enfants nés vivants selon l'âge des mères et le sexe de
l'enfant.
a). Déplacement des
dates de naissance
Le rapport des naissances annuelles peut rendre compte du
déplacement différentiel des dates de naissances des enfants. En
effet, selon que les enfants soient vivant ou décédés et
bien que n'affectant pas les niveaux de mortalité de l'ensemble de la
période rétrospective, ces déplacements peuvent induire
une sous estimation de la mortalité d'un intervalle donné et par
conséquent une surestimation de la mortalité d'un autre
intervalle. Il s'agit ici des intervalles quinquennaux par exemple. Ils peuvent
également affecter la mortalité différentielle selon le
sexe dans la mesure où ces transferts peuvent être importants pour
un sexe que pour l'autre.
RNA= [ ]*100
Tableau3.2 : Rapport des naissances annuelles
(RNA en %)
Années
|
garçons
|
RNA
|
Filles
|
RNA
|
Ensemble
|
RNA
|
1994
|
312
|
|
305
|
|
617
|
|
1995
|
359
|
108,2
|
362
|
113,0
|
721
|
110,6
|
1996
|
351
|
88,6
|
337
|
84,3
|
687
|
86,4
|
1997
|
434
|
118,8
|
437
|
127,2
|
870
|
122,9
|
1998
|
379
|
82,8
|
350
|
81,2
|
729
|
82,1
|
1999
|
481
|
125,5
|
426
|
105,0
|
907
|
115,0
|
2000
|
388
|
84,6
|
460
|
103,5
|
849
|
93,9
|
2001
|
437
|
96,9
|
464
|
102,8
|
901
|
99,8
|
2002
|
514
|
|
442
|
|
956
|
|
En l'absence de déplacement d'années de
naissance, d'attraction sur les années de naissance particulières
ou d'évolution erronée du nombre total des naissances, la valeur
attendue du ratio des naissances serait approximativement égale à
100. On soupçonnerait un transfert de naissances lorsque cette valeur
est significativement inférieure ou supérieur à 100.
L'analyse du tableau ci-dessus fait observer un report de naissances pour les
années 1996,1998 et 2000.
En effet, on note un déficit de naissances au cours de
ces années pour l'ensemble des deux sexes tout comme au niveau de
chacun des sexes. Ces déficits pourraient également traduire un
sous enregistrement de naissances pendant cette année.
Cependant un transfert important de naissances de 2000 se
serait produit au profit de l'année 1999, notamment chez les
garçons où le RNA s'élève à 125,5 en 1999
contre 84,6 en 2000. Ce plafonnement des naissances au cours de la
septième année précédent l'enquête peut
être interprétée comme un report de naissances qui serait
survenues pendant la sixième année avant l'enquête. Cela
est d'autant plus vrai du moment où on observe un déficit de
naissances au cours de cette année. On peut supposer comme M. Barbieri
que les enquêtrices, cherchant à alléger leur travail ont
eu tendance à repousser de quelques années les naissances limites
(c'est-à-dire proche des cinq dernières années avant
l'enquête).
En effet, « les questions
qui concernent les naissances ayant eu lieu au cours des cinq dernières
années précédents l'enquête sont beaucoup plus
nombreuses et détaillées que pour les naissances ayant eu lieu
antérieurement. Les enquêteurs ont eu tendance à repousser
d'un an les naissances ayant eu lieu cinq ans avant l'enquête pour
alléger leur charge de travail », cité par M.
BIAYE.
Par contre plus loin des cinq ans précédents
l'enquête, les transferts de naissances peuvent s'expliquer par la
tendance des mères de rajeunir leurs enfants pour
éviter le déphasage entre l'âge exact de l'enfant et
l'âge d'entrer à l'école. Ce serait par exemple le cas des
enfants nés en novembre et décembre et les parents se sont
arrangés à obtenir un acte de naissance pour l'année
suivante afin d'éviter que l'enfant ait une année de plus
à cause d'un ou de deux mois supplémentaires. En
dehors des déficits constatés en 1996 (plus importants chez les
filles), qui pourront sous-estimer la mortalité de la période
1996-2000, ceux de 1998 et 2000 sont sans conséquences sur les niveaux
de mortalité, car se produisant à l'intérieur de
l'intervalle.
b) Rapports de
masculinité à la naissance
Tableau3.3: Rapports de
masculinité à la naissance (RMN)
Années
|
garçons
|
Filles
|
RMN
|
1996
|
351
|
337
|
104
|
1997
|
434
|
437
|
99
|
1998
|
379
|
350
|
108
|
1999
|
481
|
426
|
113
|
2000
|
388
|
460
|
84
|
Ensemble
|
2033
|
2010
|
101
|
Les rapports de masculinité à la naissance
permettent de déceler les omissions sélectives des enfants selon
le sexe. Il est établi qu'à la naissance, il nait 105
garçons contre 100 filles, ce qui signifie qu'un rapport de
masculinité à la naissance qui s'éloignerait de 105 peut
être interprété comme une omission des garçons ou
celle des filles selon que ce dernier est considérablement
inférieur à 105 ou significativement supérieur à
105 respectivement.
Pour bien interpréter les rapports de
masculinité nous pouvons calculer l'intervalle de confiance par rapport
à l'échantillon pour voir s'il y a des valeurs extrêmes.
IC= avec p=105/205=0,512 et q=1-p ou q=100/205=0,488 et n=4043.
IC= [0.49659 ; 0.52741], en multipliant par 205, on
peut déterminer la variation normale des rapports de masculinité
à la naissance pour cette échantillon : IC= [101,8 ;
108,12]. Lorsqu'on observe le tableau, on remarque que les naissances semblent
être males déclarées en 1997, 1999 et en 2000, les rapports
de masculinité n'étant pas bien encadrés par l'intervalle
de confiance (IC), tout en acceptant une marge d'erreur de 5%. Ces
résultats supposent qu'il y a eu omission des garçons pour les
années 1997 et 2000 alors que celle des filles se fait remarquer pour
l'année 1999. Cette tendance est mieux illustrer par le graphique.
Graphique3.6 : Variation des rapports de
masculinité à la naissance
c). Le ratio à
l'âge x
Le calcul (sous l'hypothèse de
linéarité) de l'indice d'attraction centré sur un
âge x, en rapportant l'effectif des enfants survivants à cet
âge à la demi somme des effectifs des enfants ayant
survécus jusqu'aux âges encadrant, nous permet d'examiner la
nature et l'ampleur de l'attraction de certains âges.
Le tableau ci-après donne les résultats du
calcul de cet indice entre 4 ans et 9 ans.
Le ratio à l'âge x =
Tableau3.4 : Ages attractifs pour les enfants
survivants
Ages (ans)
|
Garçons
|
âge ratio
|
Filles
|
âges ratio
|
Ensemble
|
âges ratio
|
3
|
101
|
-
|
113
|
-
|
214
|
-
|
4
|
384
|
162
|
405
|
154,0
|
789
|
157,6
|
5
|
373
|
100
|
413
|
113,3
|
786
|
106,6
|
6
|
363
|
103
|
324
|
87,0
|
686
|
94,9
|
7
|
330
|
92
|
331
|
96,4
|
661
|
93,9
|
8
|
358
|
119
|
363
|
117,7
|
721
|
118,2
|
9
|
272
|
90
|
286
|
93,5
|
558
|
91,5
|
10
|
250
|
-
|
248
|
-
|
498
|
-
|
Certes, les petits écarts
par rapport à 100 à un âge donné ne sauraient
être systématiquement interprétés comme le fait
d'une attraction ou répulsion de cet âge. Si dans ce cas
précis, les écarts importants inférieurs à 100
peuvent être considéré comme le résultat d'une
mortalité sélective des enfants de 7 ans et 9 ans (à cause
des effets de la situation socioéconomique et politique sur les
enfants), l'écart supérieur à 100, peut au contraire
être interprété comme le résultat d'une attraction
à l'âge 8 ans, chez les filles comme chez les garçons. On
peut supposer que les mères ont plus ou moins déclarés les
enfants âgés de 9 ans parmi ceux de 8 ans. Ce
phénomène d'attraction est également observé chez
les filles à l'âge de 5 ans dont l'écart par rapport
à 100 est de 13 points.
d). Répartition des
enfants (nés vivants et décédés) par sexe et
rapports de masculinité selon l'âge de la mère
Les données fournies par ce tableau sont
nécessaires pour estimer le nombre moyen d'enfants
décédés par femme ainsi que la proportion d'enfants
décédés parmi les enfants nés vivants. Lesquelles
données permettront d'évaluer la complétude des
événements (naissances vivantes et décès). On peut
également se prononcer sur les omissions sélectives par sexe
puisque les événements sont répartis par sexe.
Tableau3.5: Répartition d'enfants nés
vivant et décédés selon l'âge de la
mère
Ages
|
Femmes
|
Masculin
|
Féminin
|
Ensemble
|
RM
|
NV
|
DC
|
NV
|
DC
|
NV
|
DC
|
15-19
|
1814
|
7
|
4
|
7
|
5
|
14
|
9
|
100
|
20-24
|
1690
|
236
|
38
|
258
|
27
|
494
|
65
|
91,5
|
25-29
|
1389
|
565
|
97
|
598
|
82
|
1163
|
179
|
94,5
|
30-34
|
1083
|
470
|
52
|
500
|
57
|
970
|
109
|
94,0
|
35-39
|
963
|
404
|
62
|
362
|
43
|
766
|
105
|
111,6
|
40-44
|
664
|
223
|
34
|
200
|
26
|
423
|
60
|
111,5
|
45-49
|
536
|
130
|
23
|
84
|
13
|
214
|
36
|
154,8
|
Graphique3.8 : Variation des rapports de
masculinité selon l'âge de la mère
La courbe ci-dessus donne la variation des rapports de
masculinité selon les groupes d'âges des mères. A
l'exception du groupe des 15 à 19 ans, ces rapports devraient être
compris entre 102 et 107 et ne devraient pas croître en fonction de
l'âge de la mère. Or, cette courbe est constante et est en dessous
de 100 entre 15 et 30 ans avant de croître au-delà de 107 entre 35
et 49 ans. Cette variation anormale des rapports de masculinité laisse
penser à une omission sélective des enfants de sexe masculin chez
les femmes de moins de 35 ans et celle des filles chez les femmes de plus de 35
ans. Cela peut également traduire le mauvais classement des mères
selon leurs groupes d'âges. Par exemple, lorsqu'une femme de 34 ans
déclare avoir 36 ans, elle sera classée dans le groupe
d'âge 35-39 ans avec ses enfants plutôt que dans le groupe 30-34
ans où ils devraient être.
Les données du tableau3.5 permettent aussi de calculer
le nombre moyen d'enfants décédés par femme et la
proportion d'enfants décédés parmi les enfants nés
vivants. Les graphiques ci-dessous en sont une illustration. Le nombre moyen
d'enfants décédés et la proportion d'enfants
décédés parmi les enfants nés vivants devraient
croître avec l'âge des mères, sinon les enfants
décédés ont été omis dans une proportion
importante que ceux qui sont restés en vie.
L'examen du premier graphique montre une décroissance
du nombre moyen d'enfants décédés par femme au-delà
de 25 ans. On peut aussi constater que la proportion des garçons
décédés décroît plus vite que celle des
filles. Cela suppose une omission des décès, qui serait plus
important chez les garçons pour les femmes âgées de plus de
25 ans.
Graphique3.9 : Variation du nombre d'enfants
moyen décédés par femme
Graphique3.10 : Proportion d'enfants
décédés parmi les enfants nés vivants selon
l'âge des mères
Ce graphique confirme les résultats
précédents avec la variation du nombre moyen d'enfants
décédés. Car la chute rapide de la proportion d'enfants
décédés parmi les enfants nés vivants traduit une
omission importante des enfants décédés par rapport aux
enfants restés en vie. Cependant, si ce phénomène
d'omission peut affecter considérablement le niveau de mortalité
générale, cela ne devrait pas être autant pour la
mortalité différentielle. En effet, on constate que toutes les
courbes chutent avec le même rythme et varient-en suivant une même
tendance entre 10 et 20 %. Cela suppose que le gap entre les omissions des
décès et celles des survivants est très important, car si
cette proportion devrait croître comme on pouvait s'y attendre, le point
le plus bas se situerait entre 50 et 70 %.
|