Huynh To Uyen Julie NGUYEN
La loi spéciale de lutte contre le
terrorisme
du 2 novembre 2001
Mémoire pour l'obtention de la
Maîtrise de langue et civilisation
japonaises
Préparé sous la direction de
Monsieur le professeur Eric SEIZELET
Et de Monsieur Pascal GRIOLET, Maître de
Conférence
INALCO
Département de langue et civilisation japonaises
Septembre 2004
INTRODUCTION
Le choc des attentats du 11 septembre
|
L
e 11 septembre 2001, les Etats-Unis ont été
frappés de plein fouet par une série d'attentats suicides
simultanés ciblant principalement les villes de New York et de
Washington. Ces agressions terroristes ont été ressenties comme
un électrochoc par toute la communauté internationale car,
au-delà des milliers de victimes innocentes qui y ont perdu la vie,
elles ont démontré avec brutalité que la citadelle
américaine réputée inviolée était, elle
aussi, vulnérable.
Il n'est pas question ici de retracer les causes et raisons
qui ont conduit à ces attaques, ni de faire le compte rendu de leur mise
en oeuvre. Pléthore d'ouvrages y a déjà été
consacré1(*).
Soulignons seulement que l'onde de choc provoquée par ces attentats
marquait l'entrée dans une nouvelle ère des rapports de force
entre nations. Certains auteurs, comme André Kaspi, historien et
spécialiste des relations internationales, parlent même d'une
nouvelle ère des relations internationales. Désormais, les plus
grandes puissances, non seulement sur le plan militaire mais également
dans les domaines économique et financier, doivent composer avec cette
forme de menace « exogène » et incontrôlable.
La répartition des forces avait déjà été
ébranlée et recomposée après la fin de la guerre
froide et l'effondrement de l'Union soviétique entre 1989 et 1991. Le
rapport de force avait basculé de facto en faveur des Etats-Unis en tant
que première puissance militaire mondiale. Ils se sont
érigés en « gendarme du monde » pour lequel
cette agression sur son propre sol était un défi sans
équivoque. Désormais, le rôle des Etats-Unis en tant que
tel prenait une autre dimension. Les Américains devaient confirmer aux
yeux du monde la légitimité de leur position au sommet de la
hiérarchie des grandes puissances en engageant des représailles
à l'échelle mondiale. Les implications pour les alliés des
Etats-Unis étaient d'importance puisque par l'effet d'un autre
« jeu de dominos » ils devaient également, dans le
sillage des Etats-Unis, confirmer leur position dans ce système de
rapport des forces. Le Japon, moins que n'importe quel autre allié des
Américains, n'échappait pas à la règle.
De prime abord, la situation du Japon pourrait sembler
aisée, dans la mesure où il est un fidèle allié des
Etats-Unis, lié par un traité d'alliance militaire solide.
Pourtant, l'engagement des Japonais dans le nouveau conflit qui
s'annonçait soulevait de nombreuses difficultés induites par un
système de défense aliénant. Pour mieux appréhender
ces difficultés, revenons sur les circonstances du réarmement
japonais.
Les Forces d'autodéfense ont été
créées en 1954 dans le cadre d'un effort de remilitarisation du
Japon mené sous l'impulsion des Etats-Unis. Dans le contexte de la
guerre froide, la constante de la politique américaine vis-à-vis
du Japon dès le début des années 50 était de le
pousser à se réarmer. La question devenait d'autant plus
pressante quand en 1949 la Chine est devenue communiste et surtout quand en
1950 a éclaté la guerre de Corée. Pour les
Américains, la lutte contre l'expansion du communisme sur ce nouveau
front asiatique s'annonçait difficile à mener si leur poste
avancé dans la zone, dont le Japon représentait
l'élément fondamental, n'était pas militarisé.
Aussi, le Japon a-t-il été fortement encouragé à
prendre des mesures de remilitarisation afin de permettre aux Etats-Unis de
faire l'économie d'une présence trop coûteuse en
Asie-Pacifique.
Le Japon a été tout d'abord réticent,
notamment les partis de gauche et l'opinion publique qui étaient
fortement attachés au pacifisme institutionnalisé par l'article 9
de la Constitution de 1946 relatif à la renonciation de la
guerre 2(*).
Originellement, la mission des Forces d'autodéfense japonaises
était essentiellement d'assurer la protection des bases
américaines installées au Japon et la défense du
territoire national. Cependant, au fur et à mesure que progressait la
guerre froide en Extrême-Orient et le réarmement du Japon, leurs
activités se sont étendues. Ainsi, en 1963, le plan MITSUYA
élaboré en secret avait pour objectif la prise de mesures
communes entre les Etats-Unis et le Japon (sous commandement américain)
pour faire face à une situation de crise en Corée. Cependant, les
Etats-Unis n'avaient alors pas encore formulé le souhait de mobiliser
les Forces d'autodéfense directement dans les combats. Les
premières études d'une réelle participation des Forces
d'autodéfense dans des opérations conjointes
nippo-américaines ont été mises en oeuvre à
l'occasion de la définition en 1978 des directives sur la
coopération nippo-américaine en matière de défense,
les premières guidelines. Ainsi, les manoeuvres conjointes
impliquant les forces terrestres d'autodéfense et les forces maritimes
d'autodéfense prenaient de plus en plus d'importance.
Lorsqu'en 1989 la guerre froide a pris fin, le Japon aurait
dû entrer dans un processus de désarmement, mais la guerre du
Golfe, qui a éclaté en 1991, a ouvert une nouvelle phase dans la
politique de défense des Etats-Unis. Le Japon a vu alors sa position de
base arrière de l'armée américaine se confirmer. Dans ce
contexte, l'Initiative Nye3(*), énoncée en 1993, précisait les
modalités du maintien des forces américaines au Japon et la
déclaration conjointe nippo-américaine d'avril 1996 sur les
questions de sécurité réévaluait les accords de
sécurité. Les nouvelles guidelines,
édictées en 1997, fixaient enfin les modalités de la
concrétisation de ce dispositif, dont fait partie la loi sur les
situations de crise en zones périphériques votée en
août 1999. En matière de politique de défense et de
sécurité, le Japon a toujours dû subir le joug
américain et ce depuis le traité de San Francisco. Même si
à l'époque de la guerre de Corée les Etats-Unis ont
regretté d'avoir imposer une constitution pacifiste au Japon lui
interdisant de posséder une armée, il n'en reste pas moins que ce
cadre constitutionnel contraignant a permis aux Américains de tirer
à leurs profits les futures évolutions de la politique de
défense japonaise. En effet, ces dispositions leur ont permis de
maintenir leurs bases avancées dans le Pacifique grâce à un
allié japonais fidèle et docile. Le Japon a pourtant nourri des
velléités d'émancipation mais elles ont été
difficiles à concrétiser.
Les Forces d'autodéfense sont néanmoins
aujourd'hui une véritable armée de métier qui compte 240
000 hommes et qui dispose d'un budget comparable à celui de la France.
Elles sont la septième force militaire du monde, mais ses
activités sont strictement limitées à la défense.
Dans les premiers jours qui ont suivi les attentats du 11
septembre, le Japon s'est interrogé pour savoir quel genre de soutien il
pourrait concrètement apporter aux Etats-Unis. Le Président Bush,
dans les premières heures qui ont suivi les attentats, déclarait
déjà qu'il allait engager une riposte à l'envergure de la
tragédie. Or, pour le Japon, apporter son soutien et son assistance
à une campagne de représailles en Afghanistan, pays où se
cacherait le commanditaire des attentats, posaient de nombreux
problèmes. En effet, le cas de figure d'une telle opération
n'entrait pas dans le cadre de sa législation en matière de
défense.
Pour saisir les enjeux que posaient les questions du soutien
et de la contribution du Japon aux opérations américaines en
réponse aux événements du 11 septembre, il convient tout
d'abord d'analyser la réaction du Japon au lendemain de ces attaques
terroristes (1ère Partie, Chap. 1) et l'état de la
politique extérieure et de la politique de défense du Japon
(1ère Partie, Chap. 2) avant d'aborder la situation du Japon
vis-à-vis de la lutte contre le terrorisme (1ère
Partie, Chap. 3).
L'analyse des conditions de l'élaboration du projet de
loi spéciale de lutte contre le terrorisme nous permet de comprendre
comment et pourquoi le Premier ministre japonais s'est dirigé vers cette
solution pour consolider la politique de contribution du Japon
(2ème Partie, Chap. 1). Ce projet de loi, qui met en place un
double dispositif de mesures en réponse aux attentats du 11 septembre
(2ème Partie, Chap. 2), a été
délibéré lors de la session extraordinaire de la
Diète d'octobre 2001 et soumis au vote des parlementaires qui l'ont
adopté malgré de nombreuses difficultés et oppositions
(2ème Partie, Chap. 3).
La loi spéciale de lutte contre le terrorisme a ainsi
été promulguée le 2 novembre 2001, date à laquelle
elle a été également mise en application. De prime abord,
cette nouvelle loi apparaissait davantage comme la justification légale
de mesures anticipées (3ème Partie, Chap. 1). Mais
s'arrêter à cette analyse serait négliger les raisons
profondes pour lesquelles le Premier ministre Koizumi a pris la
responsabilité de faire voter cette loi dont la portée va
bien au-delà de la seule lutte contre le terrorisme. Cette loi, en
effet, représente un progrès essentiel dans la définition
de la politique de défense et de sécurité du Japon en
permettant notamment d'envoyer pour la première fois les Forces
d'autodéfense à l'étranger en dehors du cadre de la
participation aux opérations de maintien de la paix de l'ONU
(3ème Partie, Chap. 2).
Malgré le manque de recul historique, la documentation
pour analyser ce sujet n'a pas manqué. La nature des
événements, au contraire, a galvanisé les commentateurs,
journaux, spécialistes et hommes politiques. Dans un premier temps
cependant, les commentaires et analyses se sont focalisés sur le
phénomène terroriste, mais très rapidement les enjeux
vis-à-vis de la politique de défense et de sécurité
du Japon ont orienté les écrits vers des études plus
approfondies sur la loi à proprement parler.
L'outil de recherche que représente Internet s'est
également révélé très précieux pour
recueillir des documents bruts comme le texte loi ou des communiqués du
Premier ministre et du gouvernement. Les sites officiels des institutions
japonaises sont pour cela excellemment conçus et faciles d'accès.
Malheureusement les inconvénients d'un archivage trop rapide des
informations sur certains sites, en particulier les sites de journaux, limitent
les recherches par cet intermédiaire.
Le caractère audacieux et inédit de certaines
mesures mises en place par la loi spéciale de lutte contre le terrorisme
a néanmoins suscité un discours majoritairement critique
inspiré par le fait que cette loi se heurtait à l'article 9 de la
Constitution et à de nombreuses dispositions de la législation
déjà existante sur les activités des Forces
d'autodéfense. Le journal Asahi shinbun en est un excellent
baromètre. En fait, mis à part les commentaires du Premier
ministre et de son entourage direct et les analyses des commentateurs
étrangers, rares sont les écrits qui soulignent les
avancées qu'apporte la loi spéciale de lutte contre le terrorisme
dans la définition de la politique de défense du Japon.
Les principales sources de ce devoir proviennent donc des
articles de revues spécialisées, en particulier des revues
d'analyse politique et juridique, et des articles du journal Asahi
shinbun.
1ÈRE PARTIE
Le contexte avant le vote de la loi du 2 novembre 2001 :
Les questions du soutien et de la contribution du Japon
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CHAPITRE 1
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LA REACTION DU JAPON AU LENDEMAIN
DES ATTENTATS DU 11 SEPTEMBRE
D
ès que les premières images des attentats
dirigés contre les Etats-Unis ont envahi les écrans de
télévision et que la terrible nouvelle s'est répandue
quasiment en simultané avec les événements
eux-mêmes, de toutes parts dans le monde les déclarations de
soutien moral et de solidarité se sont multipliées.
Le 12 septembre, au cours de la première d'une longue
série de déclarations officielles en relation avec ce qu'on
allait désormais connaître sous l'appellation
« événements du 11 septembre », le Premier
ministre japonais Koizumi Jun.ichirô
\u23567\u23567è#172;êòèÉòÉàêYêY
adressait au gouvernement Bush et au peuple américain ses
condoléances pour les milliers de victimes et les familles
touchées par le drame et leur exprimait son entière
solidarité.
Les événements dramatiques survenus
récemment aux Etats-Unis sont des actes de violence d'une indicible
ignominie que l'on ne saurait jamais pardonner, et j'en suis moi-même
fortement indigné. Au nom du peuple japonais, j'aimerais adresser au
Président des Etats-Unis et au peuple américain ma sympathie la
plus sincère.
Le 12 septembre 2001
Jun.ichirô Koizumi, Premier Ministre du Japon 4(*)
Cette déclaration marquait le prélude d'une
vaste campagne de sensibilisation et de préparation de la classe
politique mais aussi de l'opinion publique japonaise, non pas à la lutte
contre le terrorisme mais à la question de la contribution du Japon dans
une guerre de représailles menées par les Américains
contre le commanditaire des attentats qui avait été
identifié en la personne d'Oussama ben Laden, milliardaire saoudien,
ancien agent de la CIA, chef d'un réseau terroriste, Al-Qaïda, qui
compterait près de 18 000 membres disséminés dans le
monde, et qui se cacherait en Afghanistan.
Or, si toutes les opinions étaient unanimes pour
condamner le terrorisme et lutter contre cette menace, au sein de la classe
politique des positions discordantes se faisaient entendre sur le contenu de la
contribution japonaise à cette guerre, tandis que la position de
l'opinion publique japonaise oscillait entre approbation et scepticisme.
I ) « Le Japon doit soutenir les
Etats-Unis » mais comment ?
Au-delà des grands problèmes de politique de
défense et de sécurité que mettaient à jour les
événements du 11 septembre, la préoccupation fondamentale,
sur le plan politique, pour le Premier ministre japonais et son gouvernement
était de donner une dimension concrète au soutien qu'ils allaient
apporter aux Américains. Dans cette perspective, des mesures japonaises
en réponse aux attentats perpétrés aux Etats-Unis ont
été prises relativement rapidement, mais progressivement. On peut
ainsi distinguer deux grandes étapes préliminaires :
l'annonce de premières mesures d'urgence, puis l'annonce d'un plan de
base de « 7 mesures » immédiates.
A) La question de la
« contribution » du Japon : un soutien
concret
Il s'agissait en effet de donner une réponse
matériellement palpable à la question de la contribution du
Japon. Il était en effet aisé de soutenir, au sens moral du
terme, un pays allié, à plus forte raison si ce dernier semblait
être dans son bon droit, mais c'était tout autre chose que de
contribuer, d'agir concrètement avec ce pays. Cependant, ce
n'était pas la première fois que cette question du soutien
japonais se posait, mais force était de constater que, chaque fois
qu'elle surgissait, elle véhiculait de nombreuses ambiguïtés
et polémiques, comme le décrit Yamamoto Takeshi
\u23665\u23665éR-{{ \u21083\u21083çémm, spécialiste
des relations internationales en Extrême-Orient :
[...] que ce soit au moment du début des bombardements
du Nord Vietnam par les Américains lors de la guerre du Vietnam en
février 1965, ou à l'occasion des bombardements de l'Irak en
décembre dernier [98] par les forces armées
anglo-américaines, le gouvernement japonais s'est empressé de les
soutenir. Il a déclaré, à l'occasion de l'invasion du
Panama par l'armée américaine en décembre 1988, invasion
qui violait la loi internationale, que cette action était regrettable
mais compréhensible (ce qui ne signifie pas la même chose
que de « comprendre qu'une telle action était
regrettable »). En août dernier, le gouvernement japonais a
affirmé qu'il pouvait également comprendre les attaques de
l'armée américaine contre le Soudan et l'Afghanistan5(*), sans pour autant se justifier.
6(*)
En définitive, la question du soutien du Japon est une
fausse question puisque ce soutien est déjà acquis, ne serait-ce
que parce que les Etats-Unis et le Japon sont deux démocraties
libérales, liées en outre par des accords de
sécurité. Le véritable problème était en
réalité celui de la nature concrète de ce soutien. Dans le
cas présent, s'il s'agissait pour le Japon d'assister des mesures de
riposte, la préoccupation essentielle était avant tout de montrer
l'image d'un allié fort et solide sur lequel le gouvernement Bush
pourrait compter. A la suite de cette première déclaration
officielle donnée le lendemain des attentats, les annonces et
réactions du gouvernement et du Premier ministre à propos des
attentats et des mesures en réponse se sont succédées.
Elles ont été consciencieusement retranscrites sur le site
officiel du Premier ministre 7(*) sous une rubrique spécialement consacrée
aux évènements. La chronologie et la teneur de leurs
décisions sont également minutieusement
répertoriées sur le site, répondant ainsi à un
souci de transparence, pour tenir la population informée.
Mais il s'agissait également pour le Premier ministre
et le gouvernement de préparer l'opinion publique japonaise à la
contribution du Japon, d'autant plus que l'ampleur des événements
laissait présager sans l'ombre d'un doute une réaction offensive
à grande échelle de la part des Américains. Le
gouvernement japonais se préparait déjà à cette
éventualité, qui au fil des heures devenait une certitude, car en
tant qu'allié des Etats-Unis, la question de la contribution japonaise
pouvait impliquer de contenir un volet militaire. La définition de cette
contribution du Japon s'est réalisée en plusieurs temps :
tout d'abord, des mesures d'urgence ont été mises sur pied, puis
un plan de base de « 7 mesures immédiates » a
été arrêté.
B) Les premières mesures
d'urgence
La première initiative du gouvernement Koizumi a
été de créer une cellule de crise, composée du
Bureau du Premier ministre, du Ministre des Affaires étrangères
et des diplomates et agents consulaires en poste aux Etats-Unis. Lors de la
première conférence de presse donnée le 12 septembre 2001,
après avoir notamment déclaré qu'il soutenait fermement
les Etats-Unis en ne « reculant devant aucun effort pour leur
apporter l'aide et l'assistance nécessaires », le Premier
ministre annonçait déjà la mise en oeuvre de 6 mesures
d'urgence :
[...] Le Conseil pour la Sécurité nationale a
tenu une réunion avec les assistants de tous les membres du Cabinet et a
établi les six mesures suivantes :
1) Tous les ministères concernés et le
gouvernement feront tout leur possible pour rassembler des informations
précises sur la situation, notamment sur l'assurance de la totale
sécurité des ressortissants japonais concernés ;
2) Il sera étudié dans la mesure du possible la
mise sur pied de mesures de sauvetage des ressortissants japonais
concernés tel que l'envoi d'une équipe du dispositif JDR, de
manière à permettre une action rapide si cela s'avère
nécessaire ;
3) La sécurité des équipements et des
établissements rattachés aux États-Unis sur le sol
japonais sera renforcée, et tout le nécessaire sera fait pour
répondre de manière appropriée aux circonstances ;
4) Nous nous efforcerons de fournir à la nation
japonaise toutes les informations nécessaires et de la maintenir au
courant de la situation ;
5) Le Japon, en coopération avec les États-Unis
et les autres pays concernés, prendra des mesures pour combattre le
terrorisme international ;
6) Les mesures appropriées seront prises afin
d'empêcher la confusion dans le système économique du Japon
autant que ceux des autres pays du monde. 8(*)
Au-delà des soucis, légitimes, de protection et
d'assistance des ressortissants japonais contenus au premier point, le point
numéro 2 est particulièrement intéressant. En effet, le
dispositif JDR (Japan Disaster Relief Team) 9(*), le système japonais de
secours d'urgence et de sécurité civile, est composé
notamment de soldats des Forces d'autodéfense (Jieitai
\u-32278\u-32278é(c)%oqq\u-26998àà). Certes, ce ne serait
pas la première fois que les Forces d'autodéfense seraient
amenées à mener ce genre de mission à l'étranger,
mais le symbole est ici d'importance : il ne s'agissait pas cette fois de
porter secours et assistance à un pays dont la population avait
été victime d'une catastrophe naturelle, tel un tremblement de
terre, mais un pays victime d'un acte terroriste. La possibilité
d'envoyer des troupes japonaises pour secourir les victimes du World Trade
Center pouvait alors laisser présager leur éventuel
déploiement dans le cadre de missions spécifiquement militaires.
Cet aspect militaire est d'ailleurs abordé dans la mesure numéro
3 qui annonce le renforcement des mesures de sécurité et de
surveillance des bases et équipements américains installés
sur le sol japonais.
Le souci de transparence et d'information de la population
japonaise est par ailleurs confirmé au point numéro 4. Il faut
cependant souligner que le gouvernement souhaite seulement tenir
informés les Japonais, mais qu'il ne cherche pas obligatoirement leur
approbation explicite, présupposant que cette approbation lui est
acquise de façon implicite, eu égard à la gravité
de la situation et pour laquelle seules les hautes autorités de l'Etat
sont compétentes.
Il est enfin intéressant de constater que le terme de
« terrorisme » n'est, non seulement, mentionné qu'au
point numéro 5, mais en outre qu'il est associé à
l'adjectif « international ». Mise à part la
référence aux bases américaines au point numéro 3,
à aucun moment il n'est fait allusion explicitement et
spécifiquement aux actes terroristes qui se sont produits aux
Etats-Unis. Cette ellipse est loin d'être anodine et montre la
volonté du Premier ministre japonais de ne pas mettre en avant la seule
coopération bilatérale avec l'allié américain mais
de mettre l'accent sur la place du Japon au sein de la communauté
internationale. Ce souci est également souligné par l'expression
« autres pays du monde » mentionnée au point
numéro 6 concernant la sécurisation de la stabilité
économique et financière.
C) Le plan de base de « 7 mesures
immédiates »
Par la suite, le 19 septembre, le Premier ministre Koizumi a
confirmé l'engagement du Japon dans la lutte contre le terrorisme le
considérant comme « une menace pour la propre
sécurité du Japon ». Il a en outre
réaffirmé vigoureusement son soutien vis-à-vis des
Etats-Unis en tant que pays allié et a souligné sa volonté
d'agir de concert avec la communauté internationale. A la suite de quoi,
le Premier ministre a présenté un plan de base de « 7
mesures » immédiates qui constituaient une
véritable politique globale, expression de la ferme détermination
du Japon :
Mesures immédiates :
1) Le gouvernement japonais va prendre d'urgence les mesures
nécessaires à l'envoi des Forces d'autodéfense, afin
qu'elles offrent un soutien médical, logistique et de ravitaillement
à l'armée des États-Unis et à celle des autres pays
qui prendront des mesures en rapport avec ces attaques terroristes, reconnues
par la résolution 1368 du Conseil de Sécurité de l'ONU
comme une menace pour la paix et la sécurité internationale.
2) Le gouvernement japonais va prendre d'urgence des mesures
pour renforcer plus encore la protection des équipements et des zones
militaires américaines au Japon et celle des principaux
équipements de notre pays.
3) Le gouvernement japonais va rapidement envoyer des
bâtiments de guerre appartenant aux Forces d'autodéfense dans le
but de rassembler des informations.
4) Le gouvernement japonais va renforcer plus encore la
coopération internationale, entre autres par l'échange
d'informations, dans des domaines tels que le contrôle de
l'immigration.
5) Le gouvernement japonais offrira une assistance humanitaire
et économique aux pays concernés et aux pays voisins. Dans ce
cadre, il va accorder une aide économique d'urgence à l'Inde et
au Pakistan, pays qui coopèrent avec les États-Unis dans ces
circonstances critiques.
6) Le gouvernement japonais fournira une aide aux personnes
amenées à fuir en fonction des besoins dans ce domaine. Cela
comprend la possibilité pour les Forces d'autodéfense d'assurer
une aide humanitaire.
7) Le gouvernement, en collaboration avec les autres pays,
prendra les mesures adéquates pour répondre à
l'évolution de la situation afin d'éviter la confusion des
systèmes financiers japonais et internationaux. 10(*)
En dépit de grandes similitudes, en particulier la
confirmation du renforcement du dispositif de protection et de surveillance des
bases américaines installées sur le territoire japonais, le plan
de base de « 7 mesures » immédiates se distinguait
nettement des six premières mesures d'urgence annoncées le 12
septembre. Si les premières mesures mettaient l'accent sur le secours et
l'assistance des victimes des attentats et sur la sécurité des
Japonais, le plan de « 7 mesures » intégrait la
volonté de représailles de l'allié américain. Le
premier point annonçait en effet sans ambages l'intention du
gouvernement Koizumi d'envoyer les Forces d'autodéfense soutenir
l'armée américaine dans le cadre de missions de
« soutien médical, de logistique et de
ravitaillement », mais également dans le cadre
d'opérations à caractère humanitaire comme le mentionne le
point numéro 6. Le point numéro 3 annonçait en outre le
prochain déploiement de « bâtiments de
guerre » des Forces maritimes d'autodéfense dans le cadre de
mission de renseignement. Ces deux mesures fondamentales annonçaient
donc l'envoi inédit des Forces d'autodéfense japonaises à
l'étranger, c'est-à-dire en dehors du territoire japonais et
au-delà de ses zones périphériques, afin de soutenir et
assister l'armée américaine.
Néanmoins, les autorités japonaises soulignaient
aussi clairement leur volonté d'inscrire leurs actions dans le cadre
d'une « coopération internationale » qu'elles
souhaitaient renforcer. Cette dimension internationale était
confirmée par plusieurs formules explicites : tout d'abord, la
référence à la résolution 1368 du Conseil de
Sécurité de l'ONU qui condamnait les attaques terroristes
reconnues comme « une menace pour la paix et la
sécurité internationale » ; puis par l'allusion
aux « pays concernés et [aux] pays voisins » de
l'Afghanistan, en particulier l'Inde et le Pakistan, à qui le Japon
souhaite offrir une aide humanitaire et économique ; et surtout par
l'annonce explicite que les mesures de soutien médical, de logistique et
de ravitaillement n'allaient pas concerner uniquement l'armée
américaine mais également les armées « des
autres pays » engagées dans ces opérations de lutte
contre le terrorisme. Cette dimension internationale du rôle que
souhaitait jouer le Japon était fondamentale car elle dévoilait
la dimension proprement diplomatique et multilatérale des mesures
japonaises. Toutefois, il n'était pas encore précisé la
méthode qu'allait suivre le gouvernement japonais pour
concrétiser ces mesures. La question était en effet complexe car,
pour mettre en oeuvre ses intentions, le Japon allait devoir surmonter les
difficultés induites par les dispositions constitutionnelles et
légales concernant le fonctionnement des Forces d'autodéfense.
II ) Les opinions de la classe politique sur la nature
concrète de la contribution japonaise : entre unisson et
discordances
Le plan de base de « 7 mesures
immédiates » répondait néanmoins à la
question que toute la classe politique japonaise se posait :
« Dômei koku toshite Nihon ha nani wo su beki
ka »\u12300\u12300u«\u30431-\u22269çÆÆuu\u12390ÄÄ\u26085«ú-{ú{ÍÍ\u20309%o½½\u12434ð·ð·××\u12365««\u12363(c)(c)\u12301vv(« En
tant que pays allié, que doit faire le Japon ? »). Le
Parti libéral démocrate (Jimintô
\u-32278\u-32278é(c)-\u20826«}}), le parti majoritaire,
réclamait une « attitude forte », mais le
véritable problème était de définir la nature
concrète de la contribution du Japon, ce qui était
extrêmement difficile à résoudre :
Concernant le soutien à apporter aux Etats-Unis, des
voix s'élèvent au sein du Parti libéral démocrate
pour réclamer « une attitude forte en tant que pays
allié », mais il n'est pas facile de tirer des conclusions
quant au genre d'appui que demanderont les Américains si l'on
réfléchit à la nature d'une « guerre »
contre un réseau terroriste qui se défie des
frontières. 11(*)
Le cas de figure d'une guerre (dans le sens
« militaire » du terme) de représailles contre un
réseau terroriste dont les exactions entraient dans le cadre du
terrorisme international12(*), ne s'était en effet jamais
présenté auparavant. Aussi, le thème essentiel des
débats a-t-il été de savoir comment, en l'état
actuel de la législation en matière de défense, le Japon
pouvait-il faire pour apporter son aide aux Etats-Unis. Une chose était
certaine : la classe politique japonaise était unanime pour ne pas
réitérer les erreurs commises dans la gestion de la guerre du
Golfe. En d'autres termes, il ne fallait pas privilégier le soutien
financier contre un soutien concret, visible sur le terrain. Dans cette
perspective, le gouvernement a donc décidé d'envoyer les Forces
d'autodéfense japonaises soutenir l'armée américaine au
Pakistan et en Afghanistan. Dès lors, le problème qui se
présentait à lui était de savoir comment d'une part rendre
ce déploiement possible et comment d'autre part le faire accepter par
les parlementaires et par l'opinion publique ?
A) La position de la majorité
Que ce soit au sein du Parti libéral démocrate
ou des autres partis qui composaient la majorité politique, les avis
convergeaient vers la prise de mesures appropriées et la
définition en urgence de la contribution du Japon aux mesures en
réponse aux attentats du 11 septembre. En particulier, l'une des
premières préoccupations a concerné la question de la
surveillance et de la protection des bases américaines installées
sur le territoire national, notamment à Okinawa. Sur ce sujet, le
débat s'est engagé pour savoir s'il était possible de
mettre en application la loi sur les situations de crise en zones
périphériques (shûhen jitai hô
\u21608\u21608éüïÓÓ\u20107é-Ô-Ô-@@)
votée en août 1999. Très tôt, dès la
réunion d'information tenue le 12 septembre et qui réunissait les
membres du gouvernement et de la majorité, le Directeur de l'Agence de
Défense, Nakatani \u20013\u20013''JJ, soulignait qu'en temps de
paix cette mission de surveillance et de protection des bases
américaines était du ressort des forces de police, et non des
Forces d'autodéfense. Or, même si l'atrocité des
événements pouvait les faire comparer à un état de
guerre, le territoire japonais ne pouvait être dit en situation de
guerre. Aussi Nakatani émettait-il d'ores et déjà
l'idée d'une réforme de la loi d'août 1999 :
La loi en vigueur ne permet pas aux Forces
d'autodéfense d'assurer la protection des bases américaines
installées sur le territoire national. S'agissant principalement d'une
mission confiée aux forces de police, je voudrais au plus vite modifier
la loi. 13(*)
Les discussions se sont donc très vite orientées
vers l'éventualité d'une modification de la législation en
matière de défense. Cependant, certains hommes politiques, comme
le président du Parti conservateur (Hoshutô
\u20445\u20445ïÛéç«}ç}), Ôgi Chikage
\u25159\u25159êî \u21315\u21315êçOEii, étaient
d'avis qu'il fallait plutôt réétudier le système
japonais de gestion de crise en accélérant l'examen de la
législation en matière de situations d'urgence
(yûjihôsei
\u26377\u26377Lé--@-@ꧧ) et qui était
à l'étude depuis les années 70. D'ailleurs, nombreux
étaient ceux qui pensaient qu'il était nécessaire et
urgent de réunir une session extraordinaire de la Diète pour en
discuter. Toutefois, d'autres hommes politiques souhaitaient modérer ce
caractère d'urgence, comme un cadre du Parti libéral
démocrate qui soulignait : « il faut progresser par
étapes », ou un membre du Kômeitô
(\u20844\u20844OEö-¾¾\u20826«}}) qui
déclarait : « Je ne m'y oppose pas mais il faut
être prudent ». 14(*)
Ces diverses propositions témoignaient bien de la
volonté des partis de la majorité de définir une politique
de contribution concrète. Certaines notes discordantes se faisaient
toutefois entendre entre les partisans de mesures d'urgence immédiates,
principalement le Parti libéral démocrate, et les partisans de la
prudence qui s'opposaient à ce « sentiment
d'exaltation » contre lequel l'éditorial de l'Asahi
shinbun
\u26397\u26397'(c)«úêVúVï·· du 26
septembre 2001 mettait en garde : « Kono kôyôkan ha
abunai »
\u12371\u12371#177;ÌÌ\u-25896çgg''\u12399ÍÍ\u21361ëcentsE
(Ce sentiment d'exaltation est dangereux). Pourtant, les propositions des
partis de la majorité restaient dans le cadre de la législation
déjà existante. En réalité, l'idée d'une
nouvelle loi allait être plus du fait du Premier ministre Koizumi que de
celui du Parti libéral démocrate.
B) La position de l'opposition
Le 12 septembre, l'opposition a également tenu une
réunion en rapport avec les attentats. Cette réunion informelle
rassemblait les chefs du Parti démocrate (Minshutô
\u27665\u27665-éå«}å}), du Parti libéral
(Jiyûtô \u-32278\u-32278é(c)RR\u20826«}}), du Parti
communiste (Kyôsantô \u20849\u20849éYY\u20826«}}) et du
Parti social démocrate (Shamintô
\u31038\u31038éÐ-\u20826«}}). Tous ont déclaré
d'une voix commune que ces actes étaient impardonnables et que le monde
devait adopter une politique ferme et unanime. Au sein de l'opposition,
l'atmosphère était donc aussi au consensus pour condamner le
terrorisme. Les prises de position ne démarquaient d'ailleurs pas de
celles de la majorité et les opinions convergeaient pareillement vers
l'adoption d'une politique ferme et réfléchie, comme on pouvait
le lire dans l'Asahi shinbun qui rapportait le 13 septembre les
déclarations du porte-parole du Parti démocrate, Hatoyama Yukio
\u-25367\u-25367»uéRR \u30001\u30001RNN\u22827ïvv, à
l'occasion d'une conférence de presse donnée le 12 :
« Nous collaborons aux démarches pour
élucider cette affaire et pour venir au secours des Japonais en passant
outre les barrières qui séparent la majorité et
l'opposition. » Il a proclamé en outre qu'il fallait
être ferme dans la gestion de crise.
Les propositions de l'opposition pour gérer la crise se
rapprochaient en effet de celles de la majorité. Elles les rejoignaient
même. L'opposition demandait notamment la constitution en urgence d'une
commission de sécurité et l'ouverture d'une session
extraordinaire de la Diète. Tous proclamaient qu'il était urgent
et nécessaire de mettre sur pied un système de gestion de crise,
notamment le secrétaire général du Parti libéral,
Fujii Hirohisa \u-31260\u-31260«àä\u12539E
\u-30507\u-30507Tvv qui estimait que :
Il n'y a pas, dans notre pays, de mécanisme qui
corresponde à un système de gestion de crise. C'est une
négligence de la part du Parti libéral démocrate qui est
au pouvoir. 15(*)
Le Président du Parti communiste, Shii Kazuo
\u24535\u24535éuàÊÊ \u21644\u21644aïvv, et le
chef du Parti social démocrate, Doi Takako
\u22303\u22303«yàä\u12539E
\u12383\u12383½(c)(c)\u23376éqq, quant à eux, se sont
contentés de condamner le terrorisme et de mettre l'accent sur
l'importance de l'adoption d'une attitude réfléchie.
En définitive, il n'y avait pas de grande
différence entre les positions de la majorité et celles de
l'opposition. Elles étaient même identiques. L'heure était
au consensus et tous les partis politiques faisaient front commun pour soutenir
les Etats-Unis dans la résolution de cette crise.
III ) La position de l'opinion publique japonaise
Habituellement sur les questions de défense et de
sécurité, l'opinion publique japonaise, qui est
traditionnellement pacifiste, représente un élément
d'influence très important. Pourtant, au lendemain des attentats du 11
septembre, elle a semblé être relayée au second plan. En
trois mois, de septembre à novembre, l'Asahi shinbun n'a
effectué que deux sondages sur les événements et le
premier n'a été publié que le 16 octobre, soit plus d'un
mois après les attentats. Le reste du temps, l'essentiel de
l'information était monopolisé par les positions, opinions,
déclarations et propositions des hommes politiques, des partis, du
gouvernement et du Premier ministre. Deux raisons peuvent être
avancées pour expliquer le peu d'importance accordée
à l'opinion publique : d'une part, la soudaineté des
événements et le caractère urgent de la réponse
à définir pressaient le gouvernement et le Premier ministre
à prendre des mesures sans nécessairement attendre le
consentement du peuple ; d'autre part, les sentiments de condamnation des
attentats et du terrorisme et la forte empathie pour les victimes ont eu pour
effet de faire consentir implicitement les Japonais à toute proposition
des politiques pour répondre à ces actes atroces.
Cependant, la position de l'opinion publique ne pouvait
être négligée. Les résultats des sondages ont en
effet mis en lumière des avis contrastés, à la fois
approbateurs mais aussi sceptiques. Cette ambivalence peut s'expliquer par une
condamnation traditionnellement moins forte du terrorisme que dans d'autres
pays, et par un certain sentiment anti-américain.
A) Une opinion contrastée : entre
approbation ...
Le phénomène terroriste, de la même
façon que toute forme de violence, provoque un profond sentiment
d'empathie vis-à-vis des victimes, se manifestant par une
réaction de compassion et de condamnation et l'apparition d'un fort
consensus contre cette violence, mais également un profond sentiment
d'insécurité. C'est du moins ainsi que fonctionnent les
mécanismes qui régissent les opinions publiques lorsqu'elles sont
confrontées à ce genre de phénomène d'ultra
violence comme le terrorisme, mais également les guerres, la
torture ou encore la dictature.
Dans le cas présent aussi, l'opinion publique
japonaise, relayée et amplifiée par les médias, n'est pas
restée insensible et s'est même sentie profondément
concernée par les événements. Elle a d'ailleurs toujours
été très sensible aux questions de défense et de
sécurité. Certains éléments d'analyse sont
révélés par l'extrait du sondage qui suit 16(*) :
· Soutenez-vous le Cabinet Koizumi ?
Oui 71 % (70 %)
Non 13 % (14 %)
Autre, sans réponse 16 % (16 %)
[...]
· Les bons et les mauvais aspects du gouvernement
Koizumi
(Choisir une réponse parmi celles
proposées :
Réponses de droite : les bons aspects
Réponses de gauche : les mauvais aspects)
L'attitude politique du Premier ministre 35 % (33 %) 4 %
(3 %)
La réforme de l'administration et des finances 27 % (29
%) 8 % (7 %)
La politique économique et de l'emploi 9 % (9 %)
35 % (34 %)
La politique diplomatique et de défense 6 % (6 %)
22 % (22 %)
Aucune réponse en particulier
20 % (20 %) 27 % (29 %)
Autre, sans réponse
3 % (3 %) 4 % (5 %)
[...]
· A propos des attentats terroristes aux
Etats-Unis, approuvez-vous la collaboration du Japon avec Etats-Unis aux
mesures de lutte contre le terrorisme ?
Oui 71 % (62 %)
Non 17 % (25 %)
Autre, sans réponse 12 % (13 %)
[...]
· Appréciez-vous les mesures du Premier
ministre Koizumi concernant ces attentats terroristes ?
Oui 57 % (55 %)
Non 28 % (28 %)
Autre, sans réponse 15 % (17 %)
|
La tendance principale qui se dégage de ces
données est que l'opinion publique japonaise était
majoritairement favorable au gouvernement Koizumi (70 % en septembre, 71 % en
octobre) et à la collaboration du Japon aux mesures de lutte contre le
terrorisme prises par les Etats-Unis (62 % en septembre, 71 % en octobre).
Ce taux de 71 % peut cependant être
interprété de deux façons différentes. Soit, d'une
part, l'opinion publique japonaise, au diapason de l'opinion publique
internationale, a ressenti le même sentiment de profonde empathie pour le
peuple américain et se révoltait contre ce genre de crime aveugle
et atroce que pouvaient engendrer des actes terroristes. A ce titre, il
était donc du devoir du Japon en tant qu'allié des Etats-Unis
d'être solidaire et donc de collaborer aux mesures de représailles
pour punir les coupables de ces actes barbares.
Soit, d'autre part, elle estimait que la lutte contre le
terrorisme devait faire partie des priorités d'une grande puissance
internationale défendant les valeurs de la démocratie, de la
liberté et de la paix. A ce titre, les attentats du 11 septembre ne
représentaient qu'un triste exemple d'une menace grandissante contre la
paix dans le monde. Il était de ce fait du devoir du Japon en tant que
grande puissance mondiale de collaborer à la lutte contre le
terrorisme.
B) ... et scepticisme
Ceci étant dit, les événements ont
suscité une moindre émotion au Japon en comparaison, par exemple,
aux réactions dans les pays d'Europe par exemple. Il est à
souligner qu'en temps normal, les Japonais condamnent moins fortement le
terrorisme que d'autres pays, comme l'explique Eric Seizelet, chercheur en
droit et sciences politiques japonais au CNRS et au CERI :
[...] Les Japonais condamnent-ils le terrorisme ? [...] Sans
rappeler nécessairement l'indulgence dont a longtemps
bénéficié le meurtre politique au Japon, l'enquête
internationale précitée sur les «valeurs humaines»
montre que seuls 58 % des Japonais - contre 70 % de la moyenne des Occidentaux
- condamnent le terrorisme quel qu'en soit le motif. Et, si on peut
naturellement s'attendre à des résultats quelque peu
différents en cas d'attentats aveugles dont ils seraient eux-mêmes
victimes, il n'en reste pas moins vrai que les Japonais, à froid,
manifestent une condamnation moins forte du terrorisme que les Occidentaux.
17(*)
La conception des Japonais du sacrifice, de
l'abnégation, principes que l'on retrouve dans le terrorisme, est en
effet différente de celle qu'ont les Occidentaux. Il est
intéressant de voir par exemple que le premier attentat suicide de
l'histoire, le « massacre de Lod » du 30 mai 1972, du nom
de l'aéroport de Tel-aviv où il a été commis, a
été perpétré par trois Japonais, membres du Nihon
Sekigun
\u26085\u26085«ú-{{\u-29340êÔÔ\u-28979OERR,
et dont un seul survécut 18(*).
Il est à noter par ailleurs que, si le Premier ministre
Koizumi Jun.ichirô était très populaire (70 % d'opinions
favorables en septembre et 71 % en octobre), il semble que sa façon de
gérer cette crise n'a pas eu d'impact significatif sur son taux de
popularité. Pourtant, seulement 55 % des personnes interrogées
(en septembre) puis 57 % (en octobre) appréciaient les mesures qu'il
avait entreprises dans le cadre précis des attentats terroristes du 11
septembre. En outre, 22 % jugeaient que la politique diplomatique et de
défense était le principal mauvais aspect de la politique
gouvernementale, contre 6 % seulement qui pensaient que c'était le
meilleur. La raison en est que l'opinion publique japonaise est habituellement
plus encline à juger son Premier ministre en fonction de son attitude
générale (35 % estimaient que c'était le principal bon
aspect de la politique gouvernementale) et à l'aune de dossiers qui leur
apparaissent plus préoccupants, ou du moins qui les intéressent
en premier lieu comme la politique économique et de l'emploi (35 % des
sondés jugeaient qu'il s'agissait du principal mauvais aspect de la
politique gouvernementale).
Cependant, 62 % (en septembre) puis 71 % (en octobre) des
sondés approuvaient la collaboration du Japon avec les Etats-Unis contre
le terrorisme. Autrement dit, si une très large majorité des
Japonais soutenait la collaboration du Japon aux mesures prises par le
gouvernement Bush en représailles des attentats, ils étaient
moins nombreux à apprécier les initiatives engagées en la
matière par le Premier ministre Koizumi. En d'autres termes, l'opinion
publique japonaise, qui est traditionnellement pacifiste, condamnait
massivement les attentats terroristes survenus aux Etats-Unis mais semblait
encore une fois réticente à envisager l'éventualité
d'un engagement militaire du Japon aux côtés de l'armée
américaine impliquant le possible déploiement des Forces
d'autodéfense.
L'ETAT DES POLITIQUES EXTERIEURE
ET DE DEFENSE DU JAPON
AU MOMENT DES ATTENTATS
L''
'opinion publique japonaise ne s'y trompait pas :
condamner le terrorisme n'était pas la même chose que d'engager
une guerre contre les terroristes auteurs des attentats du 11 septembre. Le
premier relevait du bon sens que possède tout être humain digne de
ce nom, respectueux de son prochain et de la vie. Le second relevait d'une
volonté de vengeance. Ceci étant dit, il faut aussi
préciser que cette volonté de vengeance n'était pas celle
du gouvernement Koizumi mais celle du gouvernement Bush et des
Américains. La volonté du gouvernement japonais était d'un
autre ordre : montrer qu'il était capable de prétendre
à un grand rôle diplomatique au niveau mondial. Depuis la fin de
la guerre froide, le Japon se trouve dans une situation nouvelle et doit
définir de nouveaux objectifs au risque de connaître un
déclin de sa situation internationale. Autrement dit, il ne peut plus se
contenter d'être un simple pion de la politique américaine de
défense en Asie-Pacifique.
La situation dans laquelle se trouvait le Japon
vis-à-vis de la guerre de représailles des Américains n'a
fait que mettre davantage en exergue l'inadéquation entre les ambitions
internationales d'une politique extérieure et les obstacles
imposés par une politique de défense trop restrictive.
I) La situation de la politique
extérieure : « éviter l'isolement
diplomatique »
Comme nous l'avons vu plus haut, la volonté des
autorités japonaises d'inscrire leur politique de soutien et de
contribution dans le cadre d'une « coopération
internationale » tient une place prépondérante dans les
mesures d'urgence annoncées au lendemain des attentats du 11 septembre.
Il s'agissait en effet pour le gouvernement japonais
d'« éviter l'isolement diplomatique », car la
gestion de cette crise n'était évidemment pas sans rappeler celle
de la guerre du Golfe lors de laquelle Tôkyô avait
été fustigé par la communauté internationale et les
pays de la coalition pour ne pas avoir engagé de troupes sur le terrain.
Et les relents des sentiments d'échec et de
« honte » ressentis onze ans plus tôt n'ont fait
qu'encourager davantage le gouvernement japonais à faire la
démonstration concrète de sa volonté de soutien et de
collaboration.
Il s'agissait donc pour le gouvernement japonais
d'éviter autant que possible de réitérer les erreurs
commises lors de la guerre du Golfe. La coopération auprès des
Etats-Unis dans ce nouveau conflit était en effet l'occasion de relever
ce que Jean-Marie Bouissou appelle « le défi de la place du
Japon dans le monde » 19(*), ce qui a été tenté maintes fois
mais avec des résultats mitigés, du moins insuffisants pour
prouver que le Japon pouvait prétendre à une place de choix au
sein de la communauté internationale.
A) Eviter à tout prix une deuxième
« guerre du Golfe »
Le 30 août 2001, douze jours avant les attentats
terroristes dirigés contre le World Trade Center et le Pentagone, le
Premier ministre Koizumi, qui était en visite aux Etats-Unis,
s'interrogeait avec le ministre des Affaires étrangères, Tanaka,
et le directeur de l'Agence de Défense, Nakatani : « Si
un conflit tel que la guerre du Golfe éclatait, que pourrait faire le
Japon ? »20(*). Certains diraient que la réflexion du Premier
ministre était prémonitoire, mais ce serait sans
considérer le fait que la question préoccupait
profondément les hommes politiques japonais. Les sentiments
d'échec et de honte éprouvés par la classe politique
japonaise et le corps diplomatique étaient encore profondément
ancrés dans les mémoires, comme le souligne l'éditorial de
l'Asahi shinbun du 18 septembre 2001 intitulé
« Wangan go ishô kara dakkyaku wo »
\u28286\u28286p\u24460OEãàâãâèÇÇ\u12363(c)(c)\u12425ç'EçEpp\u12434ð\u12539E
(Se délivrer du syndrome hérité de la guerre du Golfe)
:
Lors de la guerre du Golfe, le Japon a fourni un soutien
financier exorbitant, mais il en a été particulièrement
critiqué. Il est compréhensible qu'il s'impatiente
d' « apporter aux Américains un soutien visible
» qui le délivrera de ce syndrome psychologique
hérité de la guerre du Golfe.
La guerre du Golfe posait en effet pour la première
fois depuis la fin de la Guerre froide et de façon concrète la
question de la contribution internationale (kokusai kôken
\u22269\u22269ççÛÛ\u-29534çvv\u29486OE££)
du Japon pour la construction du nouvel ordre mondial : quelle assistance
le Japon peut-il apporter à ses alliés, au premier rang desquels
se trouvent les Etats-Unis ? En 1991, la contribution a été
essentiellement financière : 13 milliards de dollars ont
été injectés dans l'effort de guerre. Mais le Japon
pouvait-il aller plus loin que la « politique du
chéquier » ?
La question a fait débat au sein de la classe politique
japonaise dès l'automne 1990. En novembre, le Premier ministre Kaifu
Toshiki \u28023\u28023Cï»\u12539E
\u20426\u20426èré÷÷ et son gouvernement avaient mis au
point un premier projet de loi permettant au Japon de participer à une
opération internationale sous l'égide des Nations unies et qui
n'excluait pas les opérations militaires. Cette initiative a
enclenché un double débat sur la nature de l'opération
« tempête du désert » qui était
une opération militaire autorisée par l'ONU mais qui
n'était pas dirigée par l'ONU. La polémique n'a fait que
soulever l'ambiguïté de la participation du Japon, aussi le projet
de loi a-t-il été rejeté. Par ailleurs, l'opinion publique
japonaise, de même que l'opposition de gauche, s'était
majoritairement prononcée contre la participation de leur pays à
ce genre d'opération. A la fin des hostilités, le Japon a
envoyé des dragueurs de mines dans le Golfe, mais il n'avait
apporté aucun soutien logistique ni militaire durant les
opérations.
Le débat ouvert à l'automne 90 a duré
deux ans. Il s'agissait avant tout pour le Japon de mettre en cohérence
ses velléités de puissance internationale et ses attributs de la
puissance. L'attribut économique et financier était acquis.
Pourtant, le Japon a appris de la guerre du Golfe que c'était
insuffisant et que l'attribut militaire était indispensable pour
prétendre au rang de grande puissance mondiale. En définitive, le
Japon a tenté de faire du mieux qu'il pouvait avec les
« armes » dont il disposait : des dispositions
constitutionnelles contraignantes, des structures légales insuffisantes,
mais surtout une opinion publique hostile à tout engagement militaire.
Malgré tout, les 13 milliards de dollars fournis par Tôkyô
ne représentaient pas un effort suffisant aux yeux des alliés qui
considéraient que le Japon avait joué la carte de la
facilité. Donner de l'argent sans se compromettre sur le terrain
était d'autant plus insuffisant que cela était indigne d'un Etat
qui revendiquait le retour à un rôle prépondérant au
sein de la société internationale.
B) Le « défi de la place du Japon
dans le monde »
Pour Jean-Marie Bouissou, le « défi de la
place du Japon dans le monde » est le quatrième défi
que doit relever le Japon après le défi des communautés
locales et du pouvoir périphérique, le défi du
réveil de la société civile et le défi du
leadership politique. Pour lui, « la diplomatie japonaise n'a jamais
cessé de se chercher » :
Le développement très rapide de l'Asie
jusqu'à la crise de 1997 a mis à la mode l'idée d'un
recentrage de la diplomatie japonaise sur ce qui devrait devenir le
« premier pôle de la puissance mondiale du
XXIème siècle », mais sans que les moyens ni
les objectifs de cette réorientation soient clairement définis.
21(*)
Reconquérir sa place au sein du concert des grandes
puissances mondiales était donc le principal objectif plus ou moins
avoué de la diplomatie japonaise, du moins depuis la fin de l'occupation
américaine. Cette politique de reconquête n'a pas
été menée sans mal et a connu de nombreux échecs.
Depuis la signature du « traité de
coopération et sécurité mutuelles » en 1960, le
Japon avait fait sentir sa volonté de définir une politique
extérieure « à la japonaise » et autonome de
la ligne diplomatique américaine. Sur le papier, le second traité
de sécurité nippo-américain consacrait en effet le Japon
comme « partenaire » des Etats-Unis en
Extrême-Orient, faisant passer les relations nippo-américaines
d'une situation de leadership à une situation de
partnership (article 3), notamment par l'instauration d'une politique
de défense concertée à propos des territoires sous
administration japonaise (article 5) 22(*). Ainsi, le Japon fondait sa politique d'affirmation
face aux Etats-Unis sur la recherche d'une plus grande autonomie politique,
militaire et diplomatique, mais aussi sur cette relation de partenariat qui
mettait fin à une situation en tant que pays occupé et
satellisé. Mais, les limites de la politique de consultation et du
partnership nippo-américain, et, en corollaire, les limites
d'une politique extérieure à la japonaise étaient aussi
inscrites dans l'article 5 qui stipulait que la concertation se ferait
« de temps à autre » 23(*). Cela s'est confirmé
dans les faits, en particulier au moment de la guerre du Vietnam. De fait, de
« mutuelle » ce traité de Coopération et de
Sécurité n'en avait que le nom et le gouvernement japonais
n'avait pas d'autre choix que d'être un
« partenaire » consentant, qu'il ait été
consulté ou non par les Américains.
Par la suite, pendant la période de haute croissance,
le Japon s'est forgé en tant que grande puissance économique
mondiale, mais en parallèle il a été critiqué pour
la ligne pacifique de sa politique étrangère car elle trahissait
un manque de responsabilité vis-à-vis de la communauté
internationale. Or, depuis la fin du système de 55 24(*), qui a entraîné
la perte de vitesse de la ligne pacifiste, et surtout depuis la fin de la
guerre froide, il semble que s'est raffermie l'affirmation d'un
« Japon, grande puissance ». En particulier, le Japon s'est
efforcé de jouer un rôle de plus en plus présent au sein de
l'Organisation des Nations unies et souhaiterait même une réforme
de la Charte afin de pouvoir faire partie du Conseil de
Sécurité.
A la fin de la guerre froide, et afin de réaliser ses
velléités de grande puissance, le Japon s'est investi tout
particulièrement dans deux nouvelles voies : la voie humanitaire,
comme l'illustre la création du dispositif JDR en 1992 pour redorer le
prestige international du Japon. Ce dispositif réunissait des forces
d'intervention susceptibles d'être déployées en cas de
catastrophes naturelles à l'étranger, soit 150 000 hommes issus
de plusieurs corps de métiers (la sécurité maritime,
des services de police de 7 départements, des services de lutte contre
les incendies de 40 départements, des médecins, des
administratifs), et disposait de représentants basés à
Narita, Mexico, Singapour, en Italie et aux Etats-Unis. Le dispositif JDR
comptait également des éléments issus des Forces
d'autodéfense : 270 militaires, 300 aéroportés et 140
forces du génie (pour les installations en eau potable par exemple).
L'autre voie était celle de la lutte contre le terrorisme, tout
particulièrement au sein de l'organisation du G8 25(*).
Cette politique de reconquête diplomatique a suivi et
continue de suivre des voies diverses. Les voies économique et
humanitaire sont celles qui ont certainement donné le plus de
résultats positifs, ce qui n'est pas le cas de la voie
sécuritaire. En matière de politique de défense, le Japon
n'est toujours pas autonome et reste dans l'ombre des Etats-Unis, aussi bien
sur le plan international que sur le plan régional. Concernant en
particulier les activités des Forces d'autodéfense, les champs
d'activités restent restreints à des tâches humanitaires et
d'assistance. La politique de soutien et de contribution aux opérations
américaines en représailles des attentats du 11 septembre pouvait
donc être l'occasion pour le Japon de réaffirmer ses ambitions
internationales.
II) La situation de la politique japonaise de
défense
Le Premier ministre Koizumi déclarait le 14 septembre
lors d'une conférence devant la presse étrangère à
Tôkyô : « Je déciderai de notre contribution
en fonction des actions arrêtées à Washington »
26(*), car, en
matière de défense, le Japon restait assujetti aux Etats-Unis.
Or, le débat s'était déjà engagé pour savoir
s'il fallait envoyer les Forces d'autodéfense japonaises à
l'étranger. Jusqu'alors, elles n'étaient jamais intervenues en
dehors du territoire japonais et des régions environnantes comme le
Cambodge ou le Timor, mise à part dans le cadre d'opérations de
maintien de la paix sous l'égide de l'ONU (Peace Keeping
Operations, PKO).
Mais, comme le soulignait notamment le Directeur de l'Agence
de Défense Nakatani, la législation en vigueur permettait
difficilement l'envoi des Forces japonaises à l'étranger. Les
restrictions imposées par la loi sur les situations de crise en zones
périphériques et les lacunes d'un système de gestion de
crise ont alors amené certains à envisager une révision de
la loi sur les Forces d'autodéfense.
A) Une législation trop restrictive en
matière de défense
Comme il a été mentionné plus haut, lors
de la guerre du Golfe, le gouvernement de l'époque avait
déjà tenté de faire passer une loi durant l'automne 1990
afin de permettre le déploiement des Forces d'autodéfense
à l'étranger pour soutenir les opérations militaires de la
coalition internationale. Cependant, si à l'époque la loi a
été rejetée, pourquoi l'envoi des Forces japonaises
serait-il réalisable aujourd'hui, en 2001 ? C'est parce que, depuis
l'époque de la guerre du Golfe, l'arsenal légal de la
défense japonaise s'était étoffé et surtout parce
que l'opinion publique était prête à accepter l'idée
que les Forces d'autodéfense pouvaient être
dépêchées en dehors du territoire national et de ses zones
limitrophes. Pourtant, la législation japonaise en matière
de défense restait trop restrictive et rigide. Les différentes
lois qui la composaient ont été adoptées pour
répondre à des circonstances bien spécifiques. A ce
propos, Okamoto Yukio \u23713\u23713%o-{{ \u-30644\u-30644çsïvv,
critique diplomatique et responsable des questions de sécurité au
Ministère des Affaires étrangères, explique dans une
interview pour l'Asahi shinbun que :
Le Japon ne s'est pas encore globalement bien remis de la
guerre du Golfe. Assurément, les mesures japonaises pour faire face aux
situations de crise dans les zones périphériques, la
participation aux opérations de maintien de la paix de l'ONU (PKO), le
sauvetage des Japonais résidant à l'étranger, dans ces
trois domaines le Japon a élaboré de nouvelles lois et a en a
réformé d'autres. Cependant, [...] il ne peut appliquer aucune de
ces législations à la situation présente. Le Japon est
dans une conjoncture qui n'a pas beaucoup changé par rapport à
celle de la guerre du Golfe. 27(*)
En effet, l'application de la législation existante
pour mettre en oeuvre des mesures en réponse à ces attentats
terroristes soulevait deux questions fondamentales : la première
était de savoir si les représailles de l'armée
américaine s'appliquaient aux situations de crise en zones
périphériques et la seconde était de déterminer
s'il n'y avait pas un risque de contrevenir à la position du Japon
vis-à-vis de l'utilisation du droit à la défense
collective.
Le système de gestion de crise japonais restait donc
très circonscrit, même si des discussions pour mettre sur pied un
système global avaient été engagées depuis les
années 70 28(*).
Les activités des Forces d'autodéfense sont en effet strictement
encadrées, non seulement leur nature, mais aussi les circonstances dans
lesquelles elles sont exécutées. La loi PKO votée en 1992
permettait certes l'envoi des Forces japonaises à l'étranger mais
dans le seul cadre d'opérations de maintien de la paix menées
sous l'égide de l'ONU. Autrement dit, elles ne pouvaient intervenir
qu'une fois les combats terminés, dans des zones
sécurisées et pour accomplir des missions à vocation
logistique et humanitaire. Enfin, les règles d'utilisation des armes ne
permettaient d'y avoir recours uniquement dans les seuls cas de légitime
défense.
B) La législation sur les situations
d'urgence et la loi sur les situations de crise en zones
périphériques : divergences d'opinions sur le principe d'un
aménagement
En matière de situations d'urgence, la
législation en vigueur au Japon ne concernait que les situations
susceptibles de survenir dans les zones périphériques telles que
définies par la loi sur les situations de crise en zones
périphériques mise en vigueur en août 1999. Cette loi
elle-même se basait sur les directives de coopération
nippo-américaine en matière de défense ou
Guidelines. Selon le texte, « en cas de crise grave dans les
zones périphériques du Japon ayant une grave influence sur la
paix et la sécurité du Japon » (situations de crises en
zones périphériques, comme les menaces d'invasion), les Forces
d'autodéfense peuvent mener des opérations de soutien de
l'armée américaine dans les zones arrière qui sont
délimitées par une ligne de démarcation séparant
ces zones de celles où se déroulent des combats. Ces
opérations de soutien comprennent des activités de soutien en
zones arrière (comme le transport de matériel ou le soutien
logistique) et des activités de secours et d'assistance en zones
arrière auprès des personnes participant aux combats et qui sont
en détresse.
Comme l'indiquait l'article de l'Asahi shinbun du 13
septembre 2001 sous-titré « Yûji hôsei maetaoshi
ron mo »
\u26377\u26377Lé--@-@ꧧ\u21069OO\u20498«||\u12375uu\u-29994__\u12418àà
(Débat anticipé sur la législation sur les situations
d'urgence), dès le lendemain des attentats, le premier réflexe de
la classe politique japonaise a été de demander un premier
aménagement, voire une accélération des discussions sur la
législation en matière de situations d'urgence. C'était le
cas du Parti libéral démocrate mais également d'une partie
de l'opposition, comme le par exemple Nakazuka Kazuhiro
\u20013\u20013''ËË \u19968\u19968àêçGG, du
Parti libéral, qui estimait que la loi sur les situations d'urgence
devait être aménagée lors de la prochaine session
extraordinaire de la Diète. A cela, le Premier ministre Koizumi
répondait que le sujet n'était pas à l'ordre du jour et
qu'il existait bien d'autres points qui posaient problème 29(*).
Les opinions divergeaient également en ce qui
concernait la question de la surveillance des bases américaines
installées sur le territoire japonais, autre élément
fondamental de la législation en situations d'urgence. Au sein de la
majorité, le Kômeitô n'était pas de l'avis du Parti
libéral démocrate. Il pensait que, si conformément
à la loi les missions de surveillance relevaient de la police,
l'intervention des Forces d'autodéfense ne devait être
autorisée que dans le cadre d'opérations de
sécurité publique et qu'il valait mieux établir les
mesures à prendre en se basant sur la législation en vigueur
plutôt que d'aménager la loi 30(*). Or, comme le Directeur de l'Agence de Défense
Nakatani l'indiquait, la loi sur les situations de crise en zones
périphériques ne permettait pas aux Forces d'autodéfense
d'assurer la surveillance des bases américaines dans la mesure où
les événements terroristes du 11 septembre n'entraient pas dans
le cadre d'une « situation de crise survenant dans les zones
périphériques du Japon et présentant une grave influence
sur la paix et la sécurité du Japon ». Les attentats
avaient été perpétrés en effet aux Etats-Unis,
c'est-à-dire bien loin des « zones
périphériques » du Japon.
En outre, le théâtre des opérations de
représailles, autrement dit l'Afghanistan et ses environs, n'entrait pas
non plus dans la définition des « zones
périphériques du Japon » telle que l'entendait la
loi. En fait, le désir de résoudre le problème des mesures
en réponse aux événements du 11 septembre par un
aménagement de la loi sur les situations de crise en zones
périphériques émanait essentiellement de l'Agence de
Défense. Cette dernière estimait que, même si la
probabilité était faible pour que le Japon, en tant
qu'allié des Américains, puisse être menacé par des
attentats terroristes, cette menace ne devait pas être
négligée et pouvait justifier la mise en application de la loi
sur les situations de crise en zones périphériques. Cependant, un
soutien direct à des opérations offensives de représailles
ne cadrant pas avec les dispositions de la loi, l'Agence de Défense
étudiait donc les possibilités d'une application de la loi par
interprétation. Selon l'organisme, une « interprétation
extensive » de la définition des « zones
périphériques » pouvait permettre des opérations
de soutien arrière comme le transport de matériel ou le
ravitaillement. Or, lorsque la loi a été votée en
août 1999, Obuchi \u23567\u23567è#172;·°°, le Premier
ministre de l'époque, avait expliqué officiellement que sa
portée ne concernait pas les zones du Moyen-orient, de l'océan
Indien et ni des régions au-delà. Cependant, la loi
elle-même ne donnait pas de définition claire des
« zones périphériques ». C'est ce qu'explique
Yamamoto Takeshi 31(*)
:
Les zones visées par le traité de
sécurité nippo-américain sont le Japon étendu
à l'Extrême-Orient. L'Extrême-Orient désigne une zone
qui peut s'étendre des zones limitrophes au nord des Philippines,
Taiwan, la Corée du Sud, ainsi que la Corée du Nord. En outre, de
l'opinion du gouvernement, ce terme vise également les « zones
périphériques » extérieures à ces zones
pour les cas de situations de crise engendrant une menace pour l'
« Extrême-Orient » (février 1960). Autrement
dit, il s'agit d'une structure à trois composantes selon laquelle la
sécurité du Japon (les frontières japonaises) est
assurée par le maintien de la sécurité et de la paix en
Extrême-Orient (Extrême-Orient) contre les menaces dirigées
vers l'Extrême-Orient (les zones périphériques).
A cet égard, la loi sur les situations de crise dans
les zones périphériques considère les zones
périphériques et l'Extrême-Orient comme les zones
visées dans le cas de situations de crise ayant une grave influence sur
la paix et la sécurité du Japon. Cette loi est ambiguë car
elle ne spécifie pas clairement les zones en question.
Les Guidelines en outre ne faisaient qu'ajouter
à l'ambiguïté en stipulant que cette définition
n'était pas d'ordre géographique mais qu'elle s'appréciait
selon la teneur de la situation, ce que précise également
Yamamoto Takeshi : « Le gouvernement japonais
détermine de façon autonome les situations de crise dans les
zones limitrophes » 32(*).
Or, le Ministère des Affaires étrangères
et les partis de la majorité n'étaient pas du même avis que
l'Agence de Défense et estimaient que :
Si le site des opérations de combat se trouve
être en Afghanistan, il sera difficile d'intervenir même en
interprétant la loi de façon extensive ». 33(*)
Ils seraient par contre plus favorables à une
révision de la loi sur les Forces d'autodéfense.
C) La proposition d'une réforme de la loi
sur les Forces d'autodéfense
Comme il a déjà été
mentionné plus haut, le Directeur de l'Agence de Défense Nakatani
proposait dès le lendemain des attentats de réformer la loi
réglementant les activités des Forces d'autodéfense pour
qu'elles puissent, en temps de paix sur le territoire japonais et dans ses
zones périphériques, assurer la protection et la surveillance des
bases nippo-américaines et américaines. Cette loi permettait aux
Forces d'autodéfense d'utiliser leurs armes pour assurer la protection
des équipements et armements et de mener des opérations de
surveillance des bases conjointement utilisées avec l'armée
américaine. Mais ces dispositions ne pouvaient être
appliquées en ce qui concernait les bases à l'usage exclusif de
l'armée américaine, à moins que le Premier ministre ne
donne l'ordre de mener des opérations de sécurité
publique.
Le Premier ministre Koizumi, ainsi que le Parti libéral
démocrate, approuvaient la nécessité de réformer la
loi afin d'étendre le champ d'application des activités des
Forces d'autodéfense. Le 13 septembre en effet, lors d'une
réunion rassemblant les secrétaires généraux des
trois partis de la majorité, le secrétaire général
du PLD, Yamazaki \u23665\u23665éRçèè, a
formulé des propositions en ce sens. Toutefois, le Kômeitô
et le Parti conservateur n'ont pas souhaité se prononcer avant d'avoir
pris connaissance du projet final.
Pour le directeur de l'Agence de Défense, qui a
élaboré le nouveau concept de « situation de
tension », le but de la réforme était de faire en sorte
que les Forces d'autodéfense puissent intervenir dans les cas
d'exposition à un danger terroriste34(*). Cependant, il pensait également qu'
« il ne s'agit pas de réformer la loi mais de surmonter le
débat sur son interprétation » 35(*).
LE JAPON ET LA LUTTE
CONTRE LE TERRORISME
P
our les dirigeants des pays touchés par des actes
terroristes, la première nécessité qui s'impose de
façon naturelle et impérieuse est de lutter contre cette menace.
Il s'agit dès lors de définir la forme que doit prendre cette
lutte. Dans un pays démocratique, elle fait généralement
l'objet d'une politique publique, c'est-à-dire élaborée
par les hautes instances de l'appareil d'Etat, et se caractérise par
l'application d'un programme d'action et d'une mise en oeuvre sur le terrain
susceptible d'être réaménagée en fonction des
résultats et de son efficacité. Il s'agit de défendre le
droit naturel et imprescriptible de l'homme à la sécurité.
Or, jusqu'à présent, la plupart des initiatives
en matière de politique de lutte contre le terrorisme n'ont
trouvé de véritable concrétisation qu'à un niveau
national. Bien sûr il existe des mesures communes mises en oeuvre
à une échelle régionale, au niveau européen par
exemple, mais elles sont encore balbutiantes. Elles le sont davantage au niveau
mondial36(*). Des mesures
telles que la guerre de représailles annoncée par les Etats-Unis
n'ont jusqu'alors jamais été engagées dans le cadre de la
lutte contre le terrorisme. L'extrémisme d'une telle démarche ne
tient d'ailleurs pas tant dans les énormes moyens militaires mis en
oeuvre, mais surtout dans le fait que le gouvernement Bush cherche à
engager dans son sillage ses alliés, dont le Japon qui se trouve alors
confronter à la difficile question de savoir quel rôle il doit
jouer dans cette guerre contre le terrorisme.
I) « La guerre contre le
terrorisme »
La mise en oeuvre d'une politique de lutte contre le
terrorisme se caractérise en premier lieu par l'existence d'un
très fort consensus, non seulement entre les autorités politiques
et les citoyens, qui réclament la justice pour les victimes et des
mesures pour assurer leur sécurité, mais aussi au sein de la
classe politique elle-même qui adopte alors un discours unitaire. Comme
nous l'avons vu plus haut, la classe politique japonaise n'échappe pas
à cette règle.
Dans le cas des événements du 11 septembre, la
question de la nature du soutien japonais était directement liée
à celle de la nature de la riposte américaine. Or celle-ci allait
être, sans équivoque, d'un caractère offensif et militaire.
Les déclarations du Président Bush ne laissaient d'ailleurs aucun
doute là-dessus : une « nouvelle forme de
guerre » s'annonçait imminente. Toutefois, avant d'analyser
les significations et les implications de cette expression, qui sont par
ailleurs directement liées à la nature particulière des
événements du 11 septembre, il convient tout d'abord de
définir ce qu'est le terrorisme.
A) Qu'est-ce que le
terrorisme ?
Comme le mot l'indique, le terrorisme vise à susciter
la terreur au sein de l'opinion publique et des dirigeants d'un Etat afin de
les ébranler, de faire passer un message, ou pour faire valoir certaines
revendications. Sado Ryûki, chercheur à l'Institut de gestion des
risques (risuku kanri kenkyû
\u12522\u12522ÉÉXX\u12463ÉNN\u31649ÇÇ\u29702ùOEù)
écrit à ce propos dans l'Asahi shinbun
que « le terrorisme est une guerre qui a recours à
la « menace » comme action de coercition morale »
37(*). Le terrorisme
relève donc de la menace psychologique comme l'explique également
Gérard Chaliand, théoricien des conflits :
L'objectif premier du terrorisme est de répandre la
terreur. Celle-ci peut être exemplaire (« tuer un, être
vu de mille ») ou massive. [...]
[Le nombre de victimes est] de peu de conséquence. Le
véritable impact est d'ordre psychologique : ce qui est d'abord
visé, ce sont les esprits et les volontés. 38(*)
Les causes du terrorisme sont multiples et fonction de chaque
forme qu'il revêt. Leur dénominateur commun semble cependant
être la volonté de faire valoir telle ou telle revendication.
Toutefois, le terrorisme reste un phénomène d'une nature
imprévisible, multiforme et hétérogène qui appelle
des contre-mesures adaptées. Pourtant, le phénomène
terroriste étant très complexe, du fait de la
variété des ses acteurs et de la multiplicité de leurs
motivations et de leurs modes d'action, il est difficile de donner une
définition précise du terrorisme. La typologie des terrorismes
cependant permet de faire la distinction entre deux grands types de
terrorisme : le terrorisme interne et le terrorisme international ou
transnational. Ce dernier se caractérise par une menace terroriste
exogène, pouvant prendre pour cible ou terrain d'action n'importe quel
pays, quelles que soient l'origine et les revendications de ses auteurs. C'est
ce qui lui confère sa nature diffuse et explique le caractère
unanime et solidaire de la volonté de la communauté
internationale pour lutter contre cette menace car n'importe quel pays est
susceptible d'être concerné par ce problème.
De très nombreux événements empreints de
terrorisme jalonnent l'histoire du monde. Le premier d'entre eux daterait du
premier siècle de notre ère 39(*). Le terrorisme n'est donc pas un
phénomène nouveau ou caractéristique de l'époque
contemporaine, contrairement à ce que certains observateurs ou auteurs
laisseraient entendre. Le « terrorisme contemporain »,
quant à cette forme spécifique du phénomène, n'est
pas né avec les attentats du 11 septembre mais en 1968 :
Le terrorisme contemporain a bientôt trois
décennies d'existence. Il est en effet convenu de situer sa double
naissance à la date de 1968.
D'une part, la matrice proche-orientale qui voir le jour
lorsque le Front populaire de libération de la Palestine de Georges
Habache détourne deux avions de la compagnie israélienne El Al
(été 1968). [...]
D'autre part, la matrice latino-américaine, qui,
après l'échec du Che en Bolivie, préconise la
guérilla urbaine. 40(*)
Le Japon également a été le
théâtre de séries d'attentats, à la fin des
années 60 et dans les années 70, organisés par des
mouvements gauchistes étudiants qui ont donné naissance au Nihon
Sekigun 41(*). Le Nihon
Sekigun était un groupe de terroristes japonais qui sévissait
essentiellement à l'étranger, notamment en Europe et au
Moyen-orient. Ses membres s'entraînaient dans des camps du Moyen-orient
et ont souvent mené des opérations en collaboration avec des
terroristes d'autres nationalités. De nombreux observateurs se sont
pourtant accordés pour parler des attentats du 11 septembre comme
d'événements annonçant l'ère du terrorisme
international, alors que, selon Gérard Chaliand, c'est le FPLP qui a
inauguré le phénomène :
Le FPLP inaugurait la vague contemporaine du terrorisme
transnational, c'est-à-dire celui qui frappe ailleurs que sur
le théâtre même où se situe le conflit. Les
émules ne manqueront pas et le Moyen-Orient se distingue comme la source
la plus fertile en terrorisme transnational. 42(*)
Le Nihon Sekigun a fortement contribué à
élaborer les modalités du terrorisme international, en
particulier par l'apport de techniques terroristes radicales comme le
détournement d'avion ou l'attentat suicide.
On peut donc définir le terrorisme comme l'ensemble des
formes de violences utilisées à l'égard de cibles non
combattantes, de populations civiles, choisies pour leur impact symbolique ou
médiatique afin de provoquer un effet de terreur, de
vulnérabilité et d'impuissance dans le but d'obtenir un
résultat politique déterminé. Toutefois, comme le souligne
André Kaspi, historien et spécialiste des relations
internationales, le terrorisme, plus qu'un ensemble de formes de violences, est
surtout une méthode fondée sur la violence :
Le terrorisme n'est pas une doctrine que l'on pourrait placer
sur le même plan que le communisme, le nazisme ou le tiers-mondisme. Il
est avant tout un moyen, une méthode pour faire peur, pour imposer une
volonté, des objectifs rationnels ou irrationnels. Il ne s'embarrasse
pas de considérations morales : il exécute des innocents, au
prétexte qu'aucun d'entre nous n'est vraiment innocent. 43(*)
Il s'agit en effet d'une méthode de guerre dont les
moyens obéissent à des règles fondées sur des
principes extrémistes afin de provoquer l'impact le plus
retentissant possible. Or, c'est précisément parce que le
terrorisme est une méthode de guerre que la rhétorique de guerre
va presque naturellement trouver sa place dans les discours des chefs d'Etat,
au premier rang desquels se place le président Bush, et dans les
commentaires des médias.
B) « Une nouvelle forme de
guerre » ou la rhétorique de guerre
Marie-Hélène Gozzi souligne dans son ouvrage,
Le terrorisme, que le terrorisme est à la fois une
idéologie et une méthode. Le terrorisme n'est pas en soi une
guerre, mais plutôt une méthode de guerre :
D'aucun parlent à propos des actes de terrorisme,
d'actes de guerre. Les attentats du 11 septembre sont particulièrement
nommés ainsi car « même si on appelle cela du
terrorisme, c'est aussi une agression » [Article 2 de la Convention
de Strasbourg]. Doit-on alors comprendre que toute agression est une guerre.
Nous ne le croyions pas. Il est des différences fondamentales entre la
guerre et le terrorisme. 44(*)
Déclarer la guerre au terrorisme revient alors à
déclarer la guerre à une certaine forme de guerre.
« Pur jeu de mots » diraient certains, mais la nuance est
ici essentielle car il semble que cette rhétorique de guerre soit la
première, et seule, légitimation officielle qui ait
été avancée pour justifier des représailles et la
mise en action des systèmes d'alliances de sécurité, en
particulier ceux institués par l'Organisation du Traité de
l'Atlantique Nord (OTAN) et le traité de sécurité
nippo-américain. L'essentiel, en effet, était d'établir la
pertinence d'une déclaration de guerre et dans le cas présent il
importait peu que l'ennemi ne soit pas un Etat hostile. Le terrorisme et, par
extension, les individus qui en usent représentaient une menace
suffisamment grave et dangereuse pour que se justifie la mise en oeuvre de
mesures contre-offensives.
Dans son ouvrage «Tero to no sensô» to ha
nani ka ? - 9.11 igo no sekai
\u12300\u12300uÉee\u12525ÉçÆçÆÌÌ\u25126êíàúvv\u12392ÆÆ\u12399ÍÍ\u20309%o½½\u12363(c)(c)
-
9.11\u20197\u20197àÈOEãÌãÌêcentscents\u30028EE
(Qu'est-ce que «la guerre contre le terrorisme» - Le monde depuis le
11 septembre), Nishitani Osamu \u-30337\u-30337ê¼'JJ
\u20462\u20462èC analyse la rhétorique de guerre
développée par le président George W. Bush,
rhétorique relayée par les média américains, au
premier rang desquels la chaîne de télévision CNN.
Nishitani Osamu note en effet que :
Le président Bush, s'arrangeant pour éluder les
questions demandant « pourquoi ? » qui devaient
naturellement surgir, présumait qu'il s'agissait d'une
« guerre », la qualifiant d'« agression ignoble
» contre « la liberté » et « la
démocratie » et annonçait des
« représailles » globales.
[...] Depuis, la rhétorique de
« guerre » abonde. Ce qui est stupéfiant c'est la
surprenante « unanimité » qui s'est propagée
dans les pays occidentaux (bien sûr, la position diffère selon
chaque pays mais cette position s'unifie autour du soutien à la
« guerre de représailles » des Etats-Unis et d'une
assistance active). 45(*)
Cette rhétorique de guerre était ainsi
symbolisée par la loi du talion, « oeil pour oeil, dent pour
dent », qui dans la volonté de riposte que nourrissaient les
Américains devenait synonyme du « God bless
America » dont le président Bush ponctuait immanquablement ses
interventions. Les Etats-Unis voulaient se venger.
La question qui se posait dès lors pour les
traditionnels alliés des Etats-Unis était de savoir s'ils
devaient leur apporter leur soutien. La réponse pouvait paraître
évidente au regard de la gravité et de la barbarie des crimes
commis. Pourtant l'équation était bien plus compliquée. En
effet, les Américains entendaient mener le combat dans une
« nouvelle forme de guerre » contre la menace que
représente le terrorisme international. En elle-même, la formule
légitimait la possibilité de mener des représailles
militaires et présupposait donc l'éventuelle mise en action des
alliances de sécurité.
Cependant, l'expression « guerre contre le
terrorisme » désigne un ennemi informel, sans identité
ni patrie ou territorialité. Les systèmes d'alliances militaires
conventionnels visent traditionnellement à réagir contre des
Etats belligérants, en réponse à un acte de guerre. Or, le
terrorisme n'est pas un Etat. Le terrorisme n'est pas non plus une guerre.
C'est une forme d'action violente.
La querelle terminologique n'a pour le moment trouvé
aucune issue, du moins tant que sur le plan du droit international ces concepts
n'auront pas été clairement et définitivement
définis. L'essentiel, pour ce qui nous intéresse, est de
constater que le président Bush a nourri son discours de cette
rhétorique de guerre afin de légitimer des représailles
militaires. D'autres commentateurs vont même plus loin en évoquant
des raisons moins avouables que la seule défense des valeurs de la
liberté et de la démocratie, raison telle que la volonté
de consolider la présence américaine au Moyen-orient afin d'avoir
un meilleur contrôle sur les ressources pétrolières de la
région.
Quoi qu'il en soit, bonne raison ou mauvais prétexte,
Washington était décidé à envoyer des troupes au
Pakistan et en Afghanistan. Pour le Japon, seul ce fait importait ; et
malgré la crainte qu'un cercle vicieux des représailles ne
s'engage, Tôkyô ne pouvait se dérober à son
rôle d'allié militaire des Etats-Unis.
C) Le cas particulier des attentats du 11
septembre
Le cas des événements du 11 septembre sont en
effet particulier car dans ces attentats contre les Etats-Unis,
l'identité de la cible a été certainement
l'élément déterminant qui a permis de mettre en branle
toutes ces initiatives pour cimenter une riposte d'envergure mondiale.
Cependant, ce n'était pas la première fois que les Etats-Unis
étaient victime d'attentats terroristes. Sur leur propre sol, le
gouvernement américain a déjà vécu des attentats
dirigés contre des symboles de l'Etat fédéral, notamment
orchestrés par des groupuscules d'extrême droite. Les ambassades
américaines ont déjà aussi été la cible
d'attentats dirigés ou commandités par des islamistes.
Mais dans le cas présent, c'est la première fois
que le sol américain est touché par des terroristes
extérieurs. C'est la première puissance économique et
militaire mondiale, le « gendarme du monde », qui a
été attaquée et ce sont les symboles de sa puissance qui
ont été visés. Tous les commentateurs du monde entier,
comme Gérard Chaliand notamment, se sont accordés sur ce
point : le 11 septembre marque un tournant de l'histoire du
terrorisme :
Les attentats du 11 septembre 2001 marquent une date dans
l'histoire du terrorisme international. Bien qu'ils se situent dans le fil du
terrorisme classique, ils se distinguent par le nombre des victimes et parce
qu'ils ont, par le recours aux commandos suicides, frappés les
Etats-Unis de façon spectaculaire au coeur même de ses
symboles.
Ils ne marquaient pas le début d'une ère
nouvelle, celle d'un terrorisme dévastateur pouvant contribuer à
mettre à genoux un puissant Etat mais ils parvenaient à produire
un effet de choc en montrant la vulnérabilité du sanctuaire
américain. [...]
Le retentissement des attentats tient d'abord au fait qu'ils
ont eu lieu aux Etats-Unis et qu'ils ont provoqué un nombre de victimes
encore jamais atteint par le terrorisme non étatique. Ils
démontraient, en passant, l'importance prise par la privatisation de la
violence organisée et son caractère transnational. L'impact
psychologique en était sans précédent. Le 11 septembre
était bien le jour qui ébranla l'Amérique. Et l'onde de
choc, puisqu'elle concernait les Etats-Unis de façon aussi fortement
symbolique, était mondiale. 46(*)
Toutefois, le triste record qu'a représenté le
nombre de victimes n'a été qu'une circonstance aggravante. En
effet, pour mettre sur pied une politique de lutte contre le terrorisme, le
nombre de victimes qu'engendrent les attentats terroristes n'est pas la
première donnée prise en compte, celui-ci étant
plutôt faible comparé à d'autres formes de violence.
Malgré cela, la symbolique que ces attentats véhiculent et les
cibles (bâtiments officiels, institutions de l'Etat, lieux de grande
fréquentation) que choisissent les terroristes nécessitent des
mesures adaptées. En premier lieu, c'est avant tout l'Etat
démocratique lui-même qui est visé au travers de ses
institutions et de ses citoyens. Les habitants d'un pays ne sont pas
visés en tant que personnes mais en tant que citoyens d'un Etat. Cela se
vérifie d'ailleurs avec les attentats perpétrés contre les
communautés expatriées ou les touristes. L'Etat reste toujours la
première cible à atteindre, quels que soient les
moyens employés : prises d'otages, destructions de bâtiments
publics, attentats à la bombe dans les transports en commun ou autres.
Bien sûr, et contrairement à d'autres formes de terrorisme, comme
le terrorisme nationaliste, pour lesquels les victimes humaines ne sont souvent
qu'un « dommage collatéral » et les
dégâts généralement d'ordre matériel, dans le
cas présent l'intention des terroristes était clairement de tuer
le plus de personnes possible afin de conférer à leur action un
impact aussi grand que possible.
Cela étant dit, il n'en restait pas moins qu'il
s'agissait surtout pour le gouvernement Bush de laver l'honneur
américain bafoué par des terroristes qui pour la première
fois de l'histoire des Etats-Unis sont parvenus à violer cette citadelle
réputée inviolable, et accessoirement de venger les quelque 3 000
victimes du World Trade Center. C'est parce que ce sont les Etats-Unis qui ont
été visés, et touchés de plein fouet, que l'ampleur
des représailles s'annonçait à l'échelle mondiale.
D'autres pays, qui avaient également connu des attentats très
meurtriers, n'avaient simplement pas le poids politique et diplomatique des
Etats-Unis pour mettre sur pied une riposte de grande ampleur. Ils pouvaient
seulement espérer que leurs services de police, avec le soutien
d'Interpol, collaborent avec leurs homologues des pays dont étaient
originaires les auteurs des attentats, ou avec ceux des pays les abritant, afin
de les rechercher et de les traduire en justice.
II) Quel rôle pour le Japon dans cette guerre
contre le terrorisme ?
Les attentats du 11 septembre sont certes inédits par
leur impact, leur mode opératoire, le nombre de victimes et le
théâtre d'action, mais ils ne sont pas les premiers actes de
terrorisme international. A cet égard, certaines initiatives, quoique
encore insuffisantes, ont déjà été mises en oeuvre
pour organiser un système de lutte contre cette menace, à
l'échelle européenne par exemple. Le Japon n'est pas non plus en
reste dans ce domaine et participe déjà activement à
l'élaboration de politiques de lutte contre le terrorisme international,
notamment au sein de l'organisation du G8.
Le rôle des Forces d'autodéfense est tout
particulièrement actif dans la lutte contre le terrorisme et l'impulsion
donnée par le Premier ministre Koizumi à la suite des
événements du 11 septembre n'a fait que le renforcer. Cependant,
quelles que soient les compétences des Forces japonaises, il n'en reste
pas moins que la nature des opérations lancées par les Etats-Unis
font craindre par l'opinion publique et une certaine partie de la classe
politique japonaises l'engrenage dans un cercle vicieux des
représailles.
A) Le Japon, les Forces d'autodéfense
japonaises et la lutte contre le terrorisme
Les Forces d'autodéfense japonaises ne sont pas novices
en matière de lutte contre le terrorisme. Bien au contraire, au temps
déjà de la menace soviétique et chinoise dans le contexte
de la guerre froide, les Forces japonaises avaient déjà
commencé à s'entraîner aux techniques de lutte
anti-terroriste. Et depuis l'attentat au gaz sarin perpétré par
la secte Aum (Aumu Shinrikyô
\u12450\u12450ÉAÉEE\u12512É€€\u30495ê^^\u29702ùù)
dans le métro de Tôkyô en août 1995 47(*), attentat qui fait partie des
événements marquants de l'histoire du terrorisme, ces techniques
de lutte anti-terroriste et les mesures de prévention ont
été renforcées et ne cessent de l'être.
La nature de la menace contre laquelle il fallait alors faire
face avait davantage orienté les Forces japonaises vers la
maîtrise et le développement de mesures de lutte contre le
terrorisme en zone urbaine et contre le terrorisme chimique et
bactériologique. Konishi Makoto
\u23567\u23567è#172;ê¼¼ \u-30048\u-30048ê½
rapporte d'ailleurs dans son ouvrage Jieitai no tai tero sakusen
\u-32278\u-32278é(c)%oqq\u-26998àÌàÌÎÎ\u12486Éee\u12525Éççìçìêíí
(Les Stratégies de lutte contre le terrorisme des Forces
d'autodéfense) à ce propos qu'en juin 1999, autrement dit avant
la révision de la législation en matière de
sécurité et de défense, des exercices d'entraînement
aux techniques de lutte contre le terrorisme en milieu urbain avaient
été menés. Il souligne également le fait que les
mesures de lutte et de prévention contre les menaces NBC,
c'est-à-dire nucléaires, bactériologiques et chimiques,
ont été renforcées à la suite de l'attentat au gaz
sarin de 1995.
Ces différentes initiatives indiquent que les Forces
d'autodéfense japonaises savent maîtriser les techniques de
guérilla urbaine et qu'elles sont à la pointe des méthodes
de lutte contre les menaces NBC, probablement mieux que l'armée
américaine. La gestion de l'attentat au gaz sarin a en effet
démontrer la grande maîtrise des Forces japonaises en la
matière, même si certains détracteurs ont pointé du
doigt la lenteur de la mise en place de ces mesures, lenteur inhérente
à la lourdeur de l'appareil administratif japonais en matière de
sécurité. Il n'en reste pas moins que les Forces
d'autodéfense sont rompues aux techniques de lutte dans le cadre des
conflits LCI (Light Conflict Intensity), c'est-à-dire les
conflits de faible intensité, dont font partie les actes terroristes.
Cette partie des activités des Forces
d'autodéfense japonaises montre d'ailleurs de façon flagrante la
volonté, et la concrétisation avant même l'inscription dans
les textes, de diversifier ses compétences au-delà des simples
opérations de surveillance ou de soutien arrière. Or, les
techniques de lutte contre la guérilla urbaine sont d'une nature bien
plus offensive que passive. Ce ne sont pas de simples techniques
d'autodéfense mais bien des techniques de défense active. Ce qui
indique qu'au-delà de la seule volonté de diversifier ses
activités, les Forces japonaises cherchent également à se
légitimer en tant que véritable armée professionnelle
rompue aux toutes dernières techniques de pointe et prête à
affronter n'importe quel type de conflit, en particulier les conflits LCI qui,
vraisemblablement, sont le type majeur des conflits à venir. Le temps
des grandes guerres conventionnelles est en effet désormais
révolu. Les conflits et les crises qui ont marqué la
dernière décennie sont d'un genre nouveau,
caractérisés par le contraste entre la haute technologie et les
techniques de la guérilla (réseaux de partisans, snipers, actes
terroristes).
B) La crainte d'un cercle vicieux des
représailles
Malgré tout, les Japonais se sentaient fortement
menacés, comme l'indique l'extrait de ce sondage réalisé
par l'Asahi shinbun 48(*) :
· Etes-vous inquiet que des attentats terroristes
tels que ceux qui se sont produits aux Etats-Unis puissent se produire
également au Japon ?
Oui 81 %
Non 15 %
Autre, sans réponse 4 %
· Pensez-vous que le risque que se produisent au
Japon des attentats terroristes augmente si le Japon participe aux
opérations de représailles ?
Oui 77 %
Non 15 %
Autre, sans réponse 8 %
|
81 % des sondés affirment en effet qu'ils sont inquiets
que le Japon soit victime d'un attentat similaire à celui qui a
frappé les Etats-Unis. Et 77 % en seraient d'autant plus inquiets si le
Japon décidait de participer aux opérations américaines de
représailles. Cette inquiétude peut certes s'expliquer par le
fait que le Japon a déjà vu se perpétrer un attentat
meurtrier en plein coeur de Tôkyô, inquiétude d'autant plus
compréhensible si l'on considère que les Etats-Unis ont dû
faire face à plusieurs alertes contre des actes de terrorisme chimique
à l'anthrax juste après les attentats du 11 septembre. Ces
menaces de terrorisme chimique n'étaient en effet pas sans rappeler
l'attentat au gaz sarin de 1995 dans l'esprit des Japonais.
Mais ce sentiment d'inquiétude peut également
s'expliquer par une certaine remise en cause de l'alliance de défense
nippo-américaine. Cette alliance est en effet de nature
inégalitaire et fait du Japon moins un partenaire militaire qu'un pion
des Américains, pion exposé malgré lui à des
dangers et des menaces qui ne le concernent que secondairement. Ce thème
du risque de l'engrenage est une des préoccupations essentielles des
politiques de sécurité et de défense du Japon, comme le
rappelle Hokkiri Kazumasa \u22528\u22528-xêØØ
\u21644\u21644a%oëë, rédacteur de la revue Sekai :
La thèse de l'engrenage est l'un des points centraux de
l'opposition aux accords de sécurité qui s'est
développée dès lors. Il y a le danger que le Japon, base
arrière américaine, soit attaqué au regard de la guerre
menée par les Etats-Unis qui ont approfondi leur engagement au Vietnam
et qui cherchent à encercler l'Union soviétique. Autrement dit,
il y a l'idée que le Japon peut être une victime du système
de sécurité. 49(*)
Cette thèse a de nouveau été mise en
avant par l'opposition de gauche qui voyait dans la volonté de
représailles des Etats-Unis la mise en action d'un cercle vicieux dans
lequel le Japon risquait de s'enliser si le gouvernement nippon persistait dans
sa politique de soutien militaire. C'est cette crainte qu'exprimait
notamment Doi Takako du Parti social démocrate lors d'une
conférence de presse donnée le 17 septembre 2001 :
Il est absolument certain que des représailles
appellent d'autres représailles et si une guerre éclate notre
pays doit pouvoir indiquer fermement qu'il n'y collaborera pas, ni y
participera. 50(*)
Fuwa Tetsuzô \u19981\u19981ïs»jj
\u21746\u21746«NéOO, président du Parti communiste, abondait
dans ce sens et soutenait que le concours des Nations unies était
indispensable et que le règlement de la situation devait intervenir sous
l'égide de la loi :
(...) le fait que les Etats-Unis poursuivent les
préparatifs d'attaques en représailles des attentats terroristes
risque de provoquer un cercle vicieux de la menace terroriste et des
représailles militaires et conduire à ce que la situation
s'enlise. Il faut que les Nations unies soit au centre des opérations,
arrêter les individus suspects et les personnes qui soutiennent et
constituent une menace criminelle et les sanctionner selon la loi. 51(*)
Cette crainte d'un cercle vicieux des représailles est
certes forte mais à aucun moment n'est remis en question la
participation du Japon au règlement de la crise, sauf bien sûr
dans le cadre d'une « guerre », ou plus
précisément d'opérations militaires. Le Japon peut
soutenir les Etats-Unis mais il doit surtout éviter d'outrepasser les
règles de droit et la légalité pour apporter cette aide.
Il en va bien sûr de la bonne marche de la politique gouvernementale mais
également de son rang de grande puissance internationale respectueuse de
la loi.
2EME PARTIE
Le projet de loi spéciale de lutte contre le
terrorisme
|
CHAPITRE 1
|
LES CONDITIONS DE L'ELABORATION
DU PROJET DE LOI
P
lusieurs facteurs ont ainsi présidé à ce
qu'un projet de loi spéciale répondant directement à la
question de la contribution du Japon aux opérations de
représailles américaines soit élaboré et
adopté. La recherche d'une application de la législation
déjà existante en matière de défense et de
sécurité a dominé les débats et le constat
d'échec qui en a découlé a bien sûr
été essentiel. Toutefois, cet élément du processus
qui a conduit à l'élaboration du projet de loi spéciale de
lutte contre le terrorisme n'a pas été le seul. D'autres
éléments du débat ont par contre été
minorés, voire négligés. Ainsi, les voix s'élevant
pour mettre en garde contre un risque d'engrenage dans un cercle vicieux des
représailles n'ont pu infléchir la volonté gouvernementale
de s'investir sur le terrain.
D'autres facteurs sont en effet à prendre en compte,
comme le facteur de l'urgence qui a été un élément
déterminant. La volonté du gouvernement japonais et de son
Premier ministre d'inscrire ce projet de loi dans le cadre d'une politique
globale tournée vers la communauté internationale a
été également un autre élément essentiel des
conditions entourant son élaboration.
I) La pression de l'urgence
L'élément certainement le plus frappant qui a
dominé le processus conduisant à l'élaboration d'un projet
de loi spéciale pour faire intervenir les Forces d'autodéfense
japonaises aux mesures de représailles des Etats-Unis a
été la pression exercée par l'urgence. Il s'agissait
d'agir rapidement non seulement afin de montrer le plus de fermeté
possible vis-à-vis du terrorisme, mais également pour montrer que
le Japon était capable de tenir son rang dans le concert des grandes
nations.
La première manifestation de cette pression de
l'urgence s'est d'abord cristallisée dans une sorte de course aux
déclarations de soutien qu'ont semblé se livrer les principaux
alliés des Etats-Unis. L'annonce rapide de mesures spéciales par
le gouvernement japonais devait ainsi prouver, notamment vis-à-vis des
autres pays partenaires de la coalition américaine comme l'Angleterre ou
l'Allemagne, que le soutien du Japon ne risquait pas de s'essouffler à
cause de contraintes légales. La pression américaine a enfin
été déterminante, pression qui s'est manifestée par
la hâte avec laquelle le gouvernement Bush a mis sur pied les
opérations de représailles, mais surtout par l'exhortation
explicite faite au Japon d'y participer.
A) La course aux déclarations de
soutien
Dès le lendemain des attentats, le 12 septembre, le
Premier ministre Koizumi annonçait à l'occasion d'une
conférence de presse que le Japon soutenait les Etats-Unis :
Le Japon soutient fermement les États-Unis et est
déterminé à ne reculer devant aucun effort pour fournir
toute l'assistance et la coopération nécessaires. Nous devons
nous montrer fortement solidaires avec les autres nations du monde
concernées afin de nous assurer que de tels actes ne se reproduisent
jamais. 52(*)
Pourtant, le Premier ministre japonais avait fait son annonce
déjà un jour trop tard. Il n'a pas été en effet le
premier à déclarer son soutien aux Etats-Unis, devancé en
cela par l'Allemagne et l'Angleterre. Sasato Masahiko
\u31545\u31545çù' \u-26939\u-26939%oëïFF, journaliste
au quotidien Yomiuri \u-30035\u-30035«Ç»
53(*), remarquait
ainsi que la première intervention avait été celle du
Premier ministre anglais, Tony Blair, une heure et quinze minutes après
les événements, lors d'une conférence de presse
donnée à Brighton, une ville du sud de l'Angleterre :
Ce terrorisme de grande envergure est le nouveau mal de notre
monde. Nous devons de concert combattre et arracher ce mal jusqu'à ce
qu'il soit complètement éradiqué. 54(*)
Le Premier ministre japonais quant à lui n'a fait sa
première intervention que douze heures après les attentats,
à 10 heures 15 le lendemain du 11 septembre. Il est en outre
intéressant de noter les termes employés par le Premier ministre
anglais, en particulier le terme « éradiquer » qui a
été repris par les autorités japonaises, notamment dans le
texte de loi, pour qualifier la lutte contre la menace terroriste.
Cette « lenteur » du Premier ministre
Koizumi à annoncer la position du Japon a déçu la
communauté internationale et les Japonais, comme le soulignait Okamoto
Yukio dans un article de l'Asahi shinbun :
Les amis des Japonais aux Etats-Unis ont les uns après
les autres dit qu'ils « [n'ont pas] vu le Japon se
montrer ». Tout le monde a dit avec déception que
« le Japon n'a pas du tout annoncé sa position, alors que
Blair (le Premier ministre anglais), Poutine (le Président russe), Jiang
Zemin (le chef de l'Etat chinois) sont tous apparus sur les écrans de
télévision ». Au Japon aussi, ce jour-là, tout
le monde a regardé la télévision de trois à quatre
heures de l'après midi. Sur ce, le Premier ministre Koizumi est apparu
sur les écrans. En outre, si ce-dernier avait lancé un message
fort, il aurait communiqué la gravité de la situation au peuple
et la réaction des Etats-Unis aurait été
différente. 55(*)
L'expression des condoléances par les Japonais a
également été l'objet de manifestations non seulement
quelque peu tardives mais aussi moins « expressives » en
comparaison avec celles des pays occidentaux. Sasato Masahiko constatait que la
reine Elisabeth d'Angleterre avait présenté ses
condoléances lors d'une cérémonie dans son palais de
Buckingham Palace et qu'en Allemagne environ 200 000 personnes s'étaient
rassemblées à Berlin. Le 20 septembre, le Président Bush a
exprimé sa reconnaissance envers les élans de compassion des
peuples anglais, français, allemands, sud-coréen, australien. Le
Japon n'a pas été cité dans cette liste. Ce n'est que le
23 septembre qu'une cérémonie du souvenir en hommage aux victimes
a été organisée à Tôkyô. Pourtant un
communiqué du gouvernement en date du 13 septembre 2001 intitulé
« Le Japon en deuil pour les victimes » déclarait
que :
Le Japon est en deuil pour ceux qui ont subi des pertes lors
des attaques. Le Japon est fermement en faveur de la proposition du
Président Bush de déclarer le 14 septembre un jour de
"prière et du souvenir" pour rendre honneur aux victimes des terribles
attaques. La Chambre des Représentants a observé ce
jour-là [le jour des attentats] un moment de prière silencieuse
pour les victimes lors d'une réunion spéciale de la commission
budgétaire, à laquelle participaient le Premier ministre Koizumi
et d'autres ministres. Le même jour, Makiko Tanaka, ministre japonaise
des Affaires étrangères, s'est rendue à l'ambassade des
États-Unis à Tokyo pour y présenter ses
condoléances. Elle a écrit "Puisse dieu sauver et aimer
l'Amérique" dans un registre de condoléances. Des Japonais ont
aussi été touchés. Des ressortissants japonais font partie
de ceux portés disparus à la suite des attaques terroristes du 11
septembre. Le Japon rend hommage à ceux qui participent aux
activités de sauvetage et apprécie hautement leur
dévouement héroïque pour venir en aide aux victimes au
risque de leur propre vie. 56(*)
Seulement, le peuple japonais n'avait, semble-t-il, pas
exprimé ses condoléances aussi spontanément et massivement
que cela a été le cas dans d'autres pays. Toutefois, la
cérémonie présidée par le Premier ministre Koizumi
et donnée le 23 septembre à Tôkyô en hommage aux
victimes des attentats a tout de même rassemblé 3 200 personnes.
Comme nous l'avons vu plus haut, le peuple japonais condamne moins fortement le
terrorisme que les opinions occidentales, mais cela explique-t-il vraiment
cette prise de position plus tardive comparée à celles des
peuples européens ? Il semble surtout qu'ici la tension de la
situation était telle que le moindre élément pouvait
servir de prétexte aux détracteurs du Japon pour lui faire sentir
qu'il devait absolument affermir sa position.
B) L' annonce de l'élaboration d'un projet de
loi spéciale de lutte contre le terrorisme
Au terme de l'évaluation de la situation au lendemain
des attentats, l'idée de créer une nouvelle loi est, semble-t-il,
apparue avec le constat de l'impossibilité d'appliquer, même par
le biais d'une interprétation extensive, la loi sur les situations
d'urgence en zones périphériques. Cette alternative s'est
imposée comme le « seul choix » possible, comme
l'écrit l'éditorial de l'Asahi shinbun du 18 septembre :
Le Premier ministre Koizumi Jun.ichirô a engagé
l'examen d'une nouvelle loi pour que les Forces d'autodéfense apportent
un soutien arrière à l'armée américaine comme le
transport de matériels. Peut-être est-ce le seul choix, d'autant
que la loi sur les situations de crise en zones périphériques ne
suppose pas ce cas de figure.
Le Premier ministre Koizumi n'en a fait cependant l'annonce
officielle que le 8 octobre, soit près d'un mois après les
événements, à l'occasion d'une déclaration exposant
un troisième plan de mesures d'urgence élaboré par le
Centre pour les mesures anti-terroristes d'urgence en rapport avec les
attentats et les représailles américaines :
Troisièmement, nous allons élaborer le plus
rapidement possible un projet de loi de mesures spéciales pour lutter
contre le terrorisme, dans le but de contribuer activement aux efforts
entrepris par la communauté internationale pour prévenir et
éradiquer le terrorisme. 57(*)
Pourquoi une annonce officielle si tardive alors que
l'idée avait germé dans l'esprit du Premier ministre près
de trois semaines auparavant ? En réalité, le fameux projet
de loi spéciale de lutte contre le terrorisme avait déjà
été fini d'être rédigé et avait
été soumis à l'approbation du gouvernement le 3 octobre
comme l'annonçait ce communiqué de l'Ambassade du Japon :
Le Gouvernement japonais a approuvé aujourd'hui un
nouveau projet de loi pour combattre le terrorisme. Il constitue un nouveau
volet des importantes mesures prises par le gouvernement du Japon en
réaction aux attaques terroristes qui ont eu lieu le 11 septembre aux
États-Unis. Cette nouvelle législation permettra aux Forces de
défense du Japon de fournir un appui en matière de logistique et
autres soutiens non-combattants aux forces américaines et d'autres pays
qui prennent des mesures suite aux attaques terroristes. Cet appui
non-combattant comprendra l'approvisionnement en vivres, des moyens de
transport, des services de réparations et d'entretien, des services
médicaux, des moyens de communication, l'exploitation de ports marins et
d'aéroports, ainsi que de bases. Cette législation a
été soumise ce soir à la Diète pour qu'elle en
délibère. Le Premier ministre Koizumi a exhorté les
membres de gouvernement à oeuvrer pour que cette législation soit
adoptée le plus rapidement possible étant donné son
importance et son caractère urgent. 58(*)
En vérité, il ne s'agissait pas d'une erreur de
calendrier. En habile stratège de la communication média, le
Premier ministre Koizumi a su ménager ses effets. Cela dénotait
davantage d'une démarche extrêmement pragmatique et prudente du
Premier ministre. Il s'agissait bien entendu de ménager l'opinion
publique et une partie de la classe politique, surtout l'opposition de gauche,
qui craignaient l'engrenage dans un cercle vicieux des représailles et
de la violence. Mais cette considération n'était pas la seule. Il
s'agissait surtout de faire en sorte que ce projet de loi aurait le soutien
suffisant pour passer. En effet, Koizumi ne pouvait se permettre d'être
désavoué, ce qui aurait été le cas si son projet
n'était pas accepté. Un tel échec n'aurait
évidemment pas été sans rappeler celui du Premier ministre
Kaifu et de son projet de loi sur la participation des Forces
d'autodéfense à la guerre du Golfe.
L'élaboration d'en tel projet de loi répondait
bien sûr à la nécessité de contourner les obstacles
légaux, mais également à la volonté du gouvernement
et du Premier ministre de marquer d'une pierre blanche la participation du
Japon. A événements exceptionnels, loi exceptionnelle. Pour le
moins, cela ne pouvait que faire taire certaines voix, aussi bien au Japon que
parmi les alliés, accusant le Premier ministre de trop tergiverser. En
définitive, le gouvernement japonais a réagi moins sous le coup
de l'émotion et de l'indignation que sous celui de la prudence et du
pragmatisme. La position du Japon était en effet délicate :
proclamer trop tôt un soutien inconditionnel, en d'autres termes une
participation militaire, aurait équivalu à prendre des
engagements que le gouvernement et le peuple japonais n'auraient
peut-être pas pu honorer. L'enjeu pour le Premier ministre Koizumi
était de s'assurer qu'il avait une marge de manoeuvre suffisante pour
que le Japon ne risque pas de revenir sur la promesse d'une contribution
militaire.
C) La pression américaine :
« Show the flag »
Le troisième élément de pression, et
certainement le plus fort, a été la pression exercée par
l'administration Bush. Les Etats-Unis ont averti en effet par la voix du
secrétaire d'Etat Colin Powell qu'ils jugeront les pays en fonction du
soutien qu'ils leur apporteront pour lutter contre le terrorisme. Cette
pression, exprimée sans prendre de gants, a été
symbolisée par l'expression « show the flag »,
autrement dit : « le drapeau japonais doit flotter à nos
côtés ». Telles étaient les paroles du
secrétaire d'Etat adjoint Richard Armitage qui rencontrait le 15
septembre à Washington l'ambassadeur japonais aux Etats-Unis, Yanagii
Shunji \u26611\u26611-öàä\u12539E
\u20426\u20426èr«ññ. Pour ce dernier, cette phrase
signifiait que :
Il ne s'agissait pas seulement d'une action symbolique de
l'alliance nippo-américaine mais de la
« nécessité de rapidement ordonnancer la
possibilité de mener des opérations aux cours desquelles on
pourrait voir le visage des Japonais » 59(*).
Pour Yoshida Yasuhiko \u21513\u21513g«cc
\u24247\u24247çNïFF, spécialiste de la coopération
internationale, le Premier ministre Koizumi a cédé sous la
pression américaine et a dû élaborer dans la hâte la
réponse japonaise :
Je comprends le sentiment né de l'expérience de
la guerre du Golfe ressenti par Koizumi qui se préoccupe d'une
« contribution visible à l'oeil nu », mais il a agi
hâtivement sous la pression extérieure. Il n'est pas
nécessaire d'envoyer les forces maritimes d'autodéfense jusque
dans l'océan Indien pour fournir un soutien arrière aux
« représailles » de l'armée
américaine. 60(*)
Le plan de base de « 7 mesures
immédiates » a été élaboré en huit
jours et le projet de loi spéciale de lutte contre le terrorisme a
été rédigé en seulement deux semaines environ. Pour
les standards en matière de rédaction d'un projet de loi,
c'était extrêmement rapide. Evidemment, si l'on compare avec les
autres pays, notamment les pays de l'OTAN comme l'Angleterre ou l'Allemagne, le
temps de réaction du Japon a été relativement moins
rapide, car contrairement à ces pays, le Japon ne disposait pas de
dispositif lui permettant d'exercer son droit à l'autodéfense
collective. L'OTAN offre en effet un cadre organisationnel fondamental de
défense collective et est capable d'entrer en action
immédiatement sans qu'il soit nécessaire de passer par le
débat politique et l'élaboration de mesures spécifiques.
Contraint de chercher des moyens de rechange tels que l'interprétation
d'une législation existante ou la création d'une loi
spécifique, le Japon partait donc avec un lourd handicap, celui d'une
grave lacune de structures et de cadres légaux en matière de
politique de défense globale capable de répondre à
n'importe quels cas de figure.
II) Un projet de loi faisant partie d'une politique
globale
Le Blue Book 61(*), le rapport annuel du Ministère japonais
des Affaires étrangères, de l'année 2002, explique au
début de la section consacrée au « Soutien envers les
Etats-Unis et autres forces », que la loi spéciale de lutte
contre le terrorisme s'inscrit spécifiquement dans le cadre de la lutte
contre le terrorisme en tant que menace contre la sécurité du
Japon :
Le Japon considère la lutte contre le terrorisme comme
un problème concernant sa propre sécurité et de ce fait
croit qu'il doit agir de concert avec les autres nations du monde afin
d'éradiquer le terrorisme. A cette fin, la Loi spéciale de lutte
contre le terrorisme a été votée le 29 octobre et
promulguée et mise en action le 2 novembre afin de fournir toute
l'assistance et la coopération nécessaire aux opérations
militaires entreprises par les Etats-Unis et les autres forces combattant
contre les Talibans dans les limites permises par la Constitution du Japon.
62(*)
Si l'on considère la place consacrée à la
loi du 2 novembre 2001 dans le chapitre du Blue Book 2002 traitant des
attaques terroristes dirigées contre les Etats-Unis et la lutte contre
le terrorisme, cette nouvelle loi apparaît comme le volet militaire d'une
vaste politique comprenant également des mesures diplomatiques,
financières et humanitaires. Les mesures engagées par le Japon en
réponse aux événements du 11 septembre et pour lutter
contre le terrorisme s'inscrivaient en effet dans le cadre d'une politique
globale. Cette politique pouvait être décomposée en deux
grands volets : d'une part, le soutien aux Etats-Unis, mais surtout la
volonté de renforcer la place du Japon et son rôle au sein de la
communauté internationale fédérée autour de la
lutte contre le terrorisme ; d'autre part, une ouverture diplomatique non
seulement vers la Chine et la Corée du Sud mais aussi vers les pays du
Moyen-Orient, région où le Japon est encore peu présent.
Toutefois, avant d'examiner dans le détail ces deux volets, il convient
tout d'abord de faire le point sur les objectifs du projet de loi
présenté par le gouvernement Koizumi.
A) Les objectifs du projet de loi :
participation aux opérations américaines ou lutte contre le
terrorisme ?
Il est en effet nécessaire de clarifier la question car
à en lire le texte proposé par le gouvernement Koizumi la
définition des objectifs visés n'est pas aussi simple qu'elle y
paraît. En premier lieu, le titre du projet de loi spéciale
anti-terroriste place les mesures japonaises dans le cadre des
représailles contre les attentats du 11 septembre, ce qui répond
bien au point numéro 1 du plan de « 7 mesures
immédiates » annoncées par le Premier ministre le 19
septembre 2001. Dès les premières lignes, ce projet de loi est
donc un ensemble de mesures d'exception dont le champ d'application est
clairement délimité :
1. Titre
Loi sur les mesures spéciales concernant les mesures
prises par le Japon pour appuyer les activités des pays étrangers
dans le but d'accomplir les objectifs de la Charte des Nations unies en
réponse aux attaques terroristes qui ont eu lieu le 11 septembre 2001
aux Etats-Unis d'Amérique et aux menaces en résultant ainsi que
les mesures humanitaires fondées sur les résolutions pertinentes
des Nations unies ou sur les demandes faites par les Nations unies et autres
organisations internationales. 63(*)
Pourtant, l'article premier, qui est consacré
explicitement et spécifiquement aux objectifs visés par le projet
de loi, stipule clairement que le but de la loi est la lutte contre le
terrorisme international, ce qui est en cohérence avec les
précédentes déclarations du Premier ministre, en
particulier le point numéro 3 des mesures d'urgence annoncées le
8 octobre 2001 :
2. Objectifs (relatifs à l'article 1)
[...]
l'objectif de la Loi est de spécifier les mesures
suivantes afin de permettre au Japon de contribuer activement et positivement
aux efforts de la communauté internationale pour prévenir et
éradiquer le terrorisme international, et assurer ainsi la paix et la
sécurité de la communauté internationale, dont le Japon.
Est-ce à dire qu'aux yeux du gouvernement Koizumi
contribuer aux opérations américaines en représailles des
attentats du 11 septembre revient à lutter contre le terrorisme
international ? Nous avons auparavant vu que pour l'opinion publique
japonaise les deux se distinguaient, mais il semble que les rédacteurs
du projet de loi jouent ici l'amalgame. La raison peut résider dans le
fait que le Premier ministre ne souhaitait pas limiter la politique de
contribution du Japon à la seule participation aux mesures
américaines mais l'élargir au problème global de la lutte
anti-terroriste. Il est en effet remarquable que la référence
explicite aux événements du 11 septembre n'est faite que dans le
titre du projet de loi, tandis que l'article 1er ne s'y rapporte que
par le biais du rappel de la résolution 1368 du Conseil de
Sécurité de l'ONU qui considère les attaques terroristes
du 11 septembre 2001 perpétrés aux Etats-Unis comme une
« menace contre la paix et la sécurité
internationale » (article 1er, alinéa 1). Or, il
est évident que dans un texte de loi, un article pèse d'un poids
plus important que son titre.
Cette volonté d'élargissement de la
participation japonaise à un cadre international est d'ailleurs
confirmée par la double référence aux résolutions
du Conseil de Sécurité de l'ONU, non seulement dans le titre
lui-même mais aussi dans l'article 1er. Elle est
également affirmée par le rappel régulier à la
« communauté internationale », expression qui est
répétée à deux reprises dans la définition
de l'objectif de la loi.
B) La lutte contre le terrorisme
international : le « renforcement de la solidarité
internationale »
Les événements du 11 septembre ont en effet
brutalement révélé à la face du monde entier le
réel danger que représentait le terrorisme international. La
nature de cette menace nécessite des contre-mesures adaptées,
autant à un niveau national qu'international. En réponse aux
attentats américains, le Japon a donc pris un ensemble de mesures
répondant à cette double exigence, comme il est décrit au
début de la section consacrée aux « Efforts du
Japon » du Blue Book 2002 :
A la suite des attentats terroristes, le Japon a fait de son
mieux pour protéger les citoyens japonais. Le Japon a également
étendu une forte assistance aux Etats-Unis et a fait un effort commun
avec la société internationale pour faire face activement
à ce problème, reconnaissant que la lutte contre le terrorisme
est un défi personnel. En particulier, le Japon a travaillé dans
le sens du renforcement de la solidarité internationale pour
prévenir et éradiquer le terrorisme au moyen d'efforts
diplomatiques dirigés vers les pays environnant l'Afghanistan, les Etats
islamiques et les pays d'Asie, ainsi que les Etats-Unis, la première
cible des attentats. Les sous-sections suivantes donnent une vue d'ensemble des
mesures du Japon pour faire face aux attentats et les efforts intensifs qui ont
été fournis dans divers domaines. L'attention a aussi
été accordée aux efforts diplomatiques pour renforcer la
solidarité internationale. 64(*)
Naturellement, la sécurité des Japonais est
mentionnée en premier, mais très vite l'accent est mis sur les
efforts diplomatiques et les efforts dirigés vers la communauté
internationale. Le Ministère japonais des Affaires
étrangères insiste en effet beaucoup sur le fait que les
dispositions prises par le Japon ne sont pas uniquement tournées vers
les Etats-Unis mais vers la communauté internationale. En d'autres
termes, ces mesures ne concernaient pas uniquement les attentats du 11
septembre, mais la lutte contre le terrorisme en général. La
politique japonaise se voulait globale. Ce faisant, le Japon souhaitait montrer
qu'il n'agissait pas uniquement en tant qu'allié militaire des
Etats-Unis mais en tant que membre de la communauté internationale. Ce
point est d'ailleurs reconnu par l'ensemble de la classe politique japonaise, y
compris le principal parti de l'opposition, le Parti démocrate dont le
leader Hatoyama déclarait :
Si le Japon ne s'en tient qu'aux seules possibilités
laissées par l'actuelle législation, même s'il est
lui-même confronté au terrorisme, il ne pourra prétendre
faire partie de la communauté internationale. 65(*)
Pour le Japon, en effet, la participation active à ce
genre d'initiative était la démonstration d'une ferme
volonté de jouer un rôle dans le maintien de la paix et de la
sécurité aux niveaux régional et mondial, comme le
soulignait le Premier ministre Koizumi lors d'une conférence de presse
donnée le 17 septembre 2001 :
La paix du monde libre et la liberté sont
menacées. En n'adoptant pas une attitude responsable vis-à-vis de
ce genre de terrorisme, nous risquons de nous isoler de la communauté
internationale. 66(*)
La lutte contre le terrorisme international était
pourtant déjà inscrite parmi les objectifs des accords de
sécurité nippo-américains révisés en 1997.
Cependant, la lutte contre le phénomène terroriste ne pouvait
raisonnablement faire uniquement l'objet d'accords bilatéraux de
sécurité. La nature hétérogène de cette
menace désigne en effet des cibles potentielles parmi tous les Etats
démocratiques. Le thème de la lutte contre le terrorisme
international représente donc une opportunité pour le Japon
d'élaborer et de mettre en oeuvre une politique de défense et de
sécurité indépendante des directives américaines,
du moins dans le cadre d'accords autres que ceux passés avec les
Etats-Unis. Ce gage d'autonomie était d'autant plus précieux que
la nature de la menace à combattre a amené le Japon à
négocier au plus au niveau régional et mondial et donc de
renforcer sa position sur la scène internationale.
Comparés aux nombreux autres attentats qui composent
l'histoire du terrorisme les événements du 11 septembre se
démarquaient non seulement par leur caractère inédit mais
également par la mobilisation sans précédent de toute la
communauté internationale autour de la lutte contre le terrorisme
international. La première initiative significative en la matière
revient au Conseil de Sécurité de l'Organisation des Nations
unies qui dès le 12 septembre a voté la Résolution 1368
qui reconnaît le droit à l'autodéfense individuelle et
collective (article 1), considère ces attaques terroristes comme une
menace contre la paix et la sécurité internationales (article 2)
et appelle la communauté internationale à fournir tous les
efforts possibles afin d'empêcher et d'éradiquer de tels actes
terroristes (article 3). Cette résolution a d'ailleurs été
reprise dans le texte du projet de loi anti-terroriste élaboré
par le gouvernement Koizumi à l'article 1 relatif aux objectifs
(alinéa 1), article qui fait également référence
à d'autres résolutions pertinentes du Conseil de
Sécurité (alinéa 2) :
2. Objectifs (relatifs à l'article 1)
(1) Rappelant que la résolution 1368 du Conseil de
Sécurité de l'ONU considère les attaques terroristes qui
ont eu lieu aux États-Unis le 11 septembre 2001 comme une menace
à la paix et à la sécurité internationale,
(2) et prenant aussi note que les résolutions 1267,
1269 et 1333 du Conseil de Sécurité de l'ONU et d'autres
résolutions pertinentes condamnent les actes de terrorisme
international, et demandent à tous les États de prendre des
mesures appropriées pour empêcher de tels actes,
Par la suite, le Conseil de Sécurité a aussi
adopté le 28 septembre la Résolution 1373 qui contient des
mesures spécifiques contre le financement du terrorisme.
L'organisation du G8 67(*), au sein de laquelle le Japon est
particulièrement actif, a aussi apporté une importante
contribution à la lutte contre le terrorisme international. Le 19
septembre, les leaders des pays du G8 ont tenu une réunion au sommet
afin de mettre sur pied une politique commune de réponse à ces
attentats et au terrorisme international. Chaque pays membre a condamné
d'une voix unanime et ferme ces actes barbares et se sont engagés
à ratifier aussi tôt que possible les douze conventions
internationales de mesures anti-terroristes qui ont d'ailleurs
été élaborées avant que les
événements du 11 septembre ne se soient produits.
Pour le Japon, toutes ces actions au sein des plus grandes
instances internationales contribuent à affermir sa position sur la
scène internationale. Le « renforcement de la
solidarité internationale » et la lutte contre le terrorisme
international ne sont-ils que des moyens, certes légitimes, pour
atteindre cet objectif ? Pour le moins, le Premier ministre Koizumi et le
Ministère japonais des Affaires étrangères creusent
efficacement ce filon.
C) Une politique de promotion et de transparence
auprès des pays d'Asie
Ainsi que nous l'avons vu plus haut, le soutien et la
contribution du Japon aux opérations de représailles des
Etats-Unis étaient acquis, malgré une opinion publique
réticente et une certaine partie de la classe politique plus encline
à la prudence. Les initiatives du gouvernement Koizumi se heurtaient
également à une autre difficulté non
négligeable : les craintes des pays voisins, en particulier la
République Populaire de Chine et la Corée du Sud, qui pouvaient
voir dans la politique japonaise un regain de militarisme suspect. A ce propos,
Philippe Pons, correspondant permanent du journal Le Monde écrivait en
effet que :
Un dernier élément pèse sur les
initiatives du Japon en matière de contribution internationale : la
méfiance qu'elles suscitent chez ses voisins (la Chine et la
Corée). Le Premier ministre Koizumi vient de se rendre successivement
à Pékin puis à Séoul afin de remédier
à la tension provoquée par sa visite, en août, au
sanctuaire Yasukuni (où sont honorées les âmes de criminels
de guerre), mais surtout pour rassurer ses interlocuteurs sur les intentions
japonaises en étendant son rôle militaire. 68(*)
Les tensions existant entre Tôkyô et les
gouvernements voisins, principalement Pékin et Séoul, perdurent
depuis des décennies. Une fois encore, la perspective d'un engagement
militaire japonais dans ce nouveau conflit ne pouvait que raviver certaines
inquiétudes nées de l'époque où le Japon
nourrissaient des desseins militaristes et expansionnistes. Les efforts
dirigés vers la communauté internationale devaient donc prendre
en compte cette donnée. Dans cette perspective, le Premier ministre et
son équipe ont mené une vaste campagne de promotion et de
transparence auprès des gouvernements des pays d'Asie pour en appeler
à leur solidarité. Même s'ils condamnaient fermement les
attentats du 11 septembre et le terrorisme, les pays d'Asie orientale
étaient en effet réticents à s'engager aux
côtés des Américains. Une vaste tournée diplomatique
a donc été menée, ce dont rend compte le Blue
Book 69(*) : le
Premier ministre Koizumi s'est ainsi rendu en Chine le 8 octobre et en
Corée du Sud le 15 octobre afin d'expliquer les mesures engagées
par le Japon. Le Japon a profité aussi de la réunion des pays
membre de l'APEC (Asia-Pacific Economic Cooperation) qui a eu lieu les
20 et 21 octobre à Shanghai, du sommet des pays de l'ASEAN (Association
des nations du Sud-Est asiatique) + 3 (Japon, Chine et Corée du Sud) du
5 novembre pour affirmer sa solidarité et sa coopération dans la
lutte contre le terrorisme.
Les efforts diplomatiques japonais ont également
été renforcés vis-à-vis des pays voisins de
l'Afghanistan. Le Premier ministre Koizumi a ainsi adressé des lettres
aux Etats islamiques leur demandant de se joindre à la lutte contre le
terrorisme tout en soulignant qu'il ne s'agissait pas d'une lutte contre
l'Islam. Une série de visites officielles a été
également programmée, notamment la visite du vice-Ministre des
Affaires étrangères Sugiura Seiken au Pakistan entre le 25 et 28
septembre, les visites de l'ancien Ministre des Affaires
étrangères Kômura Masahiko en Arabie Saoudite et en Iran
entre le 30 septembre et le 5 octobre et les visites de l'ancien Directeur
général de l'Agence de Développement de Hokkaidô et
Okinawa, Suzuki Muneo, au Tadjikistan et en Ouzbékistan les 7 et 8
octobre. L'ancien Premier ministre Hashimoto Ryûtarô s'est rendu en
Egypte et aux Emirats arabes unis entre le 7 et le 12 octobre tandis que
l'ancien Premier ministre Mori Yoshirô et Sugiura Seiken se sont rendus
en Inde entre le 28 et 30 octobre. La Ministre des Affaires
étrangères Tanaka Makiko quant à elle est allée au
Pakistan entre les 22 et 27 octobre.
Il serait facile mais réducteur de ne voir dans cette
série de visites en Asie et au Moyen-Orient qu'un simple marathon
diplomatique. Il est certain que le Ministère japonais des Affaires
étrangères les présente dans son Blue Book de
2002 comme une tournée de promotion pour la lutte contre le terrorisme
et d'appel au renforcement de la solidarité internationale. Toutefois,
il apparaît évident qu'il s'agissait également d'une
occasion non seulement de montrer une diplomatie japonaise active et
engagée, mais aussi d'apaiser les inquiétudes vis-à-vis de
la politique de contribution du Japon.
Un dernier aspect enfin ne doit pas être
négligé : de façon intentionnelle ou non, cette
tournée diplomatique donnait une définition extensive de la zone
Asie. Or, nous avons vu plus haut que le Premier ministre Obuchi avait exclu
les zones du Moyen-orient, de l'océan Indien et des régions
au-delà de la définition des zones périphériques
visées par loi d'août 1999 sur les situations de crise en zones
périphériques. Tout laisse donc croire que le Premier
ministre Koizumi remettait en cause cette définition, ce qui ne pouvait
qu'apporter du poids à la légitimation de l'envoi des Forces
japonaises en soutien aux Américains.
UN PROJET DE LOI ELEMENT D'UN DOUBLE DISPOSITIF DE
MESURES EN REPONSE AUX ATTENTATS DU 11 SEPTEMBRE
D
ans les grandes lignes, la volonté du gouvernement
Koizumi était de mettre en place un dispositif s'organisant autour de
deux axes : d'une part, le déploiement à l'étranger
de militaires japonais pour apporter une assistance logistique et sanitaire aux
forces américaines ; et, d'autre part, la mobilisation des Forces
d'autodéfense pour la protection des bases militaires installées
sur le territoire japonais. Ces dispositions impliquaient donc un
élargissement non seulement du rôle des Forces
d'autodéfense mais également de leur champ d'action. Le premier
objectif est concrétisé par le projet de loi spéciale de
lutte contre le terrorisme, tandis que le second a fait l'objet d'une
réforme partielle de la loi sur les Forces d'autodéfense.
Dans le détail, les mesures prévues par le
projet de loi anti-terroriste pouvaient être réparties selon deux
grands thèmes : d'une part, la participation des Forces japonaises
aux opérations en réponse aux attentats du 11 septembre 2001 et,
d'autre part, les mesures encadrant cette participation. Cependant, le
dispositif mis en place ne serait pas complet, et cohérent, sans la mise
en oeuvre de mesures spécifiques de renforcement des contrôles.
I) La participation des Forces japonaises aux
opérations en réponse aux attentats du 11
septembre
Bien que le gouvernement Koizumi, à travers son projet
de loi anti-terroriste, semblait présenter la participation des Forces
d'autodéfense japonaises aux opérations menées par les
Etats-Unis en représailles des attentats du 11 septembre comme un des
aspects d'une politique plus globale de lutte contre le terrorisme
international, cette participation n'en était pas moins un des piliers
principaux de la politique de contribution du Japon. D'ailleurs, à bien
lire le projet de loi, il apparaît que la grande majorité des
dispositions proposées concernent ce déploiement des Forces
japonaises.
Deux de ces dispositions étaient
particulièrement importantes et fondamentales. Il s'agissait tout
d'abord de définir le champ d'application de la loi, autrement dit
où précisément les Forces d'autodéfense pouvaient
intervenir. Il s'agissait ensuite de préciser leurs domaines
d'activité, c'est-à-dire ce qu'elles pouvaient faire.
A) La définition du champ d'application de
la loi : « hors des zones
combattantes »
Tout d'abord, l'article 2 alinéa 3 du projet de loi
spéciale de lutte contre le terrorisme définit les zones
où les mesures prévues seront appliquées. Deux types de
zones sont distingués : d'une part le territoire japonais, et
d'autre part les zones ainsi définies :
3. Principes fondamentaux (relatifs à l'article 2)
[...]
ii) zone où n'ont pas lieu des opérations de
combat et où de telles opérations ne sont pas prévues
pendant la mise en oeuvre des activités japonaises, en haute mer et dans
l'espace aérien situé au-dessus, territoires étrangers.
Il est précisé en outre que l'assentiment des
pays concernés sera nécessaire pour que les Forces japonaises
puissent agir sur leur territoire.
Cette définition des zones d'application de la loi ne
donne cependant aucune précision explicite sur la situation
géographique des ces zones. A aucun moment l'océan Indien ou le
Pakistan n'est mentionné. La dénomination utilisée est en
effet très floue et laisse donc une marge assez large pour une
interprétation extensive. Le terme même de « territoire
étranger », mis en opposition avec celui de
« territoire du Japon », entérine le fait que, pour
la première fois, les Forces d'autodéfense sont destinées
à être déployées hors du territoire national, mais
l'imprécision des termes employés est probablement
intentionnelle. La seule restriction mentionnée, avec la réserve
concernant l'assentiment des pays concernés, est la limitation aux zones
non combattantes, ce qui est en cohérence avec les restrictions qui
entourent encore les activités des Forces d'autodéfense.
La condition sine qua non qui préside avant
toute chose à l'élaboration de ce projet de loi est en effet la
non-participation des Forces japonaises aux opérations de combat, comme
le stipule explicitement l'article 2 alinéa 2 : « Ces
mesures ne sauront recommander l'usage de la force », et comme le
réaffirme la deuxième section de l'article 2 alinéa
3 concernant les zones d'application des mesures prises :
« zone où n'ont pas lieu des opérations de
combat ». Cette condition est à la base même de
l'existence des Forces d'autodéfense, conformément aux
dispositions de l'article 9 de la Constitution de 1946. Ici encore, de
même que pour toutes les activités des Forces
d'autodéfense, ces dernières ne seront pas autorisées
à participer aux opérations de combat, ni à mener des
opérations d'aucune sorte dans les zones combattantes.
B) Des opérations de soutien, d'assistance
et de logistique
Les principes fondamentaux décrits à l'article 2
stipulent en outre que le gouvernement japonais exécutera des
« activités de coopération et de soutien, des
opérations de recherche et sauvetage, une aide aux personnes
touchées et d'autres mesures nécessaires » afin de
contribuer efficacement aux mesures et efforts de lutte contre le terrorisme
(alinéa 2). Ces principes fondamentaux sont détaillés
à l'article 3.
Ainsi, les activités de coopération et de
soutien concerneront essentiellement des opérations de ravitaillement et
des services qui seront exécutés par les « agences
gouvernementales concernées dont les Forces de
défense ». Concrètement, ces agences gouvernementales
fourniront notamment le ravitaillement, les réparations et l'entretien,
les services médicaux, les communications et l'exploitation de ports
maritimes, d'aéroports et de bases. Les activités de recherche et
de sauvetage seront dirigées vers les « combattants en
situation de détresse suite à des opérations de
combat », ainsi que vers les « non-combattants en
détresse ». L'assistance aux personnes touchées concernera
« le transport des éléments nécessaires à
la vie », ce qui implique en particulier l'approvisionnement de
nourriture, de vêtements, de médicaments et de services
médicaux. Enfin, parmi les autres « mesures
nécessaires », le texte de loi cite en particulier la mise en
place de « moyens de transport à des ressortissants
étrangers ou à des ressortissants japonais ». Toutes
ces mesures seront exécutées par « les agences
gouvernementales concernées dont les Forces de
défense ».
Le rôle principal et essentiel des Forces
d'autodéfense sera donc de mener des opérations de
« soutien arrière » et de soutien logistique, ainsi
que des actions d'assistance humanitaire et de secours. Ainsi, les Forces
japonaises pourront ravitailler les bases américaines, comme celle de
Diego Garcia dans l'océan Indien, en armements mais également en
munitions. Elles pourront aussi fournir une aide médicale au Pakistan
aux réfugiés et toutes personnes victimes des combats. Plusieurs
centaines de soldats japonais seront ainsi déployés dans le cadre
d'opérations d'appui logistique, mais aussi de surveillance et de
renseignement.
II) Le cadre de la participation des Forces
japonaises
Le champ d'application et les domaines d'activité
étant ainsi définis, il restait à préciser le cadre
de cette participation des Forces d'autodéfense. Autrement dit, il
s'agissait de définir comment la coopération militaire japonaise
pouvait être réalisable sans qu'elle ne risque de devenir
illégale vis-à-vis de la législation déjà
existante.
Cette préoccupation a fait l'objet d'une série
de trois grands ensembles de dispositions. Elles concernaient tout d'abord les
questions de l'approbation par la Diète et du rapport à la
Diète, puis l'épineux problème de l'usage des armes, et
enfin le principe de limitation de la durée de la loi.
A) L'approbation par la Diète et le rapport
à la Diète
Selon le texte du projet de loi présenté par le
gouvernement Koizumi, l'intervention de la Diète allait s'opérer
en deux temps. Tout d'abord, les parlementaires devaient donner leur
approbation aux activités et opérations des Forces
d'autodéfense définies dans le plan de base d'exécution.
Dans le cas d'un avis défavorable, elles devaient cesser dès que
possible. Ces dispositions sont ainsi présentées à
l'article 5 :
L'approbation par la Diète (relatif à l'article
5)
(1) Le Premier ministre soumettra les activités de
coopération et de soutien, les opérations de recherche et
sauvetage ou d'aide aux personnes touchées exécutées par
les Forces d'autodéfense spécifiées dans le plan de base
à l'ordre du jour de la Diète pour approbation dans les vingt
jours après leur déclenchement.
(2) Si la Diète désapprouve, les
activités de coopération et de soutien, les opérations de
recherche et sauvetage ou d'aide aux personnes touchées devront
promptement prendre fin.
Cette phase d'approbation par la Diète pouvait
apparaître comme un élément essentiel dans le processus de
mise en application des mesures proposées par le projet de loi.
Toutefois, trois points doivent être soulignés. En premier lieu,
le Premier ministre Koizumi disposait d'une solide majorité au sein de
la Diète 7(*)1, ce
qui laissait à penser que l'agrément des députés
lui serait facilement acquis. En second lieu, il est à noter que la mise
à l'ordre du jour pour approbation des activités et
opérations des Forces d'autodéfense ne se fera qu'après
leur mise à exécution, au maximum dans les vingt jours. Or, dans
le cas où la Diète les désapprouverait, chacun sait qu'il
ne sera pas aussi aisé de démobiliser les forces engagées
comme le veut l'alinéa 2 de l'article 5. Les conséquences au
niveau international seraient considérables, pires que si le Japon
n'avait pas du tout participé aux opérations américaines,
car un retrait des soldats japonais serait très probablement ressenti
comme un recul du Japon sur ses engagements auprès de leur allié
américain et de la communauté internationale. Enfin, il est
essentiel d'observer que l'approbation de la Diète n'est requise que
pour « les activités de coopération et de
soutien » et « les opérations de recherche et
sauvetage » et d'assistance. Autrement dit, l'approbation ne concerne
pas l'intégralité du plan de base. En effet, selon l'article 4
alinéa 1 relatif au « Plan de base », c'est le
gouvernement, réuni en Conseil des ministres, qui doit donner son
approbation au plan de base. En d'autres termes, la Diète ne sera
qu'informée des autres dispositions, comme notamment la
définition des zones d'intervention ou les mesures d'assistance
financière.
L'article 11 stipule en outre que le Premier ministre
informera la Diète du contenu de toute décision ou modification
du plan de base et de ses résultats :
6. Rapport à la Diète (relatif à
l'article 11)
Le Premier ministre informera la Diète du contenu de
toute décision prise ou de toute modification du Plan de base. De plus,
lorsque des mesures spécifiées par le Plan de base prendront fin,
le Premier ministre informera sans délai la Diète de leurs
résultats.
De la même façon que l'article 5, ce très
court article 11 semblait montrer la volonté du gouvernement d'inclure
le pouvoir législatif dans le processus d'exécution des mesures
établies par le plan de base, mais il est aussi évident que cette
mesure n'était que symbolique. En effet, il n'est aucunement
précisé que le rapport à la Diète des
décisions ou modifications du plan de base doit être une
obligation, ce qui laisse à penser que cette démarche pourrait se
faire à la discrétion du Premier ministre. Par ailleurs, s'il est
indiqué que l'information des résultats se fera « sans
délai », l'article 11 indique aussi que le Premier ministre le
fera « lorsque les mesures [...] prendront fin ». Autrement
dit, la Diète ne disposera pas nécessairement d'un suivi en temps
réel des résultats des mesures du plan de base.
Cette distinction entre
« approbation » des « mesures
d'exécution » et « information » du
« plan de base », dissociation qui rappelle celle introduite
dans la loi de 1999 sur les situations de crise en zones limitrophes, est
essentielle car elle permet au gouvernement de garder la maîtrise totale
du projet de loi. Elle bride considérablement le pouvoir civil en
cantonnant son contrôle à des mesures uniquement techniques.
Malgré la volonté du pouvoir législatif de jouer un
rôle politique actif dans la définition des politiques de
défense et de relations extérieures, le gouvernement indiquait
encore une fois, implicitement, que la lutte contre le terrorisme concernait le
pouvoir exécutif et qu'il devait le rester. En d'autres termes, la
politique de défense et les relations extérieures relèvent
de la compétence du gouvernement et du Premier ministre.
B) L'usage des armes
Une des éléments les plus délicats
à préciser a été l'utilisation des armes. Selon les
dispositions légales en vigueur régissant les activités
des Forces japonaises, en particulier l'article 95 de la loi sur les Forces
d'autodéfense relatif à l'usage des armes pour la protection de
leurs installations et matériels, l'utilisation de l'armement est
strictement réglementée et ne doit se faire qu'en cas de
légitime défense. De la même façon, dans le cadre de
la participation aux représailles américaines, les soldats
japonais pourront faire usage de leurs armes pour assurer leur propre
défense et la protection des blessés ou des
réfugiés. L'article 12 du projet stipule en effet que :
Les membres des unités des Forces de défense
pourront user de leurs armes de manière proportionnelle lorsqu'il existe
une cause inévitable et justifiée pour l'usage d'armes, pour
protéger leur vie et leur intégrité corporelle, ainsi que
la vie et l'intégrité corporelle de ceux effectuant ces
activités à leurs côtés ou de ceux dont ils ont pris
le contrôle dans l'exécution de ces mesures.
L'usage des armes par les Forces d'autodéfense
japonaises est un sujet extrêmement sensible, essentiellement au regard
des principes pacifistes inscrits dans la Constitution et du passé
militariste du Japon. Aussi leur utilisation est-elle fortement
encadrée, ce que ne manque pas de spécifier le projet de
loi anti-terroriste : non seulement les Forces japonaises ne pourront, en
principe, faire usage de leurs armes que sous l'autorité d'un officier
supérieur (alinéa 2), mais en outre elles ne devront le faire ou
bien dans les cas très spécifiques de légitime
défense (conformément à l'article 36 du Code pénal
relatif à l'autodéfense) ou d'absolue nécessité
(conformément à l'article 37 du Code pénal relatif
à l'absolue nécessité), ou bien « sans [que ne
soit occasionné] de mal aux personnes » (alinéa 3), par
exemple en tirant en l'air pour dissuader l'ennemi ou pour faire des coups de
semonce.
L'article 12 semble donc n'être qu'un rappel des
principes de légitime défense et d'absolue
nécessité réglementant l'usage des armes par les
militaires japonais. Toutefois, comme il est interdit aux Forces japonaises de
pénétrer dans les zones de combat, elles ne pourront pas, en
principe, être confrontées à des situations de riposte,
encore moins d'attaque.
C) Une loi limitée dans le
temps
Une dernière mesure caractérise
l'originalité de ce projet de loi. Mentionnée dans les
dispositions supplémentaires, elle stipule que la loi ne prendra effet
que pour une durée de deux ans, avec cependant la possibilité de
la prolonger :
Cette loi expirera deux ans après son entrée en
vigueur. Si cela est jugé nécessaire, l'effet de la loi pourra
être prolongé pour une période inférieure à
deux ans comme stipulé par une loi distincte. (Cela s'appliquera aussi
à toute prolongation supplémentaire de la loi.)
Cette dernière disposition est particulièrement
intéressante dans la mesure où elle apporte une autre
légitimation à la volonté du Japon de soutenir les
Etats-Unis dans des opérations de représailles. Comme nous
l'avons déjà abordé plus haut, le problème des
objectifs visés par le projet de loi donne un premier
élément de réponse à l'introduction de cette clause
de limitation dans le temps. En effet, la nature polémique de ces
opérations et les difficultés inhérentes à la marge
de manoeuvre japonaise en matière de défense et de
sécurité ne pouvaient justifier la prise de mesures permanentes.
Ainsi, l'objectif, ou la justification, tel que présenté dans le
titre du projet de loi imposait que le soutien japonais soit limité
à la seule période que dureraient les opérations de
représailles des Américains, ce qui a été
estimé à deux ans.
En revanche, l'objectif clairement défini à
l'article 1er inscrivant les mesures japonaises dans le cadre
beaucoup plus large de la lutte contre le terrorisme international justifiait
que cette loi spéciale puisse être prorogée car il
était évident que la lutte contre le terrorisme mondial ne
pouvait ne limiter aux seules opérations menées en Afghanistan.
Ainsi, la possibilité de prolonger la loi, afin d'assurer la
continuité du soutien japonais dans le cas où les
opérations américaines en Afghanistan dureraient plus longtemps
que prévu, apporte un bémol au principe d'une loi votée
à titre exceptionnel. En outre, il n'est à aucun moment
précisé combien de fois la loi pourra être
prolongée, seulement qu'elle le serait d'une durée
inférieure à deux ans.
Bien sûr, même si cette disposition exclut toute
possibilité de pérenniser les dispositions de cette loi, il n'en
reste pas moins que ce projet de loi ouvre une nouvelle perspective dans la
marge de manoeuvre des Forces japonaises et constitue une jurisprudence
essentielle en la matière.
III) Le renforcement des mesures anti-terroristes
sur le territoire national
Comme l'indique la définition des zones où se
dérouleront les mesures établies par la loi spéciale de
lutte contre le terrorisme (article 2, alinéa 3), ces mesures seront
exécutées en premier lieu sur le territoire du Japon, ce qui
répond à la préoccupation qui avait transparu des
premières déclarations du Premier ministre Koizumi d'assurer la
protection de la population japonaise. Cette définition des zones
d'application de la loi présuppose en outre que le Japon est une cible
potentielle du terrorisme international.
Au lendemain des événements du 11 septembre, la
nécessité s'est donc imposée de consolider les
dispositions en matière de contrôle et de surveillance afin de
prévenir tout danger terroriste. A cet effet, toute une batterie des
mesures a été prise, les plus importantes concernant la
surveillance des bases américaines installées sur le sol japonais
et le renforcement du dispositif de veille anti-terroriste déjà
existant.
A) La surveillance des bases
américaines
La principale mesure en réponse aux attentats du 11
septembre prise sur le territoire national a été le renforcement
de la surveillance et de la protection des bases et des équipements
américains installés au Japon. Comme nous l'avons
déjà vu plus haut, cette tâche incombait habituellement
à la fois aux Forces d'autodéfense et aux forces de police
civile. Mais, compte tenu du caractère particulier de la menace, en
particulier le risque que d'autres attentats kamikazes pouvaient viser ces
installations américaines, la première volonté des
politiques a été de renforcer cette mission de surveillance. Dans
une interview réalisée par l'Asahi shinbun, à la
question : « Pourquoi est-il préférable que les
Forces d'autodéfense participent à la surveillance des bases
américaines ? », Nishimoto Tetsuya
\u-30337\u-30337ê¼OE \u24505\u24505«O-çç, ancien
Président du Conseil des Etats-majors unifiés
(Tôgô bakuryô kaigi
\u32113\u32113«ùç-»»\u20250%oïcE),
répond :
En temps de paix, je pense que la police peut être
suffisante pour protéger les bases américaines. Mais en
période de crise, il est curieux du point de vue de l'armée
américaine et du point de vue international que ce soit la police qui
protège l'armée. 70(*)
Toutefois, cette mesure n'est pas inscrite explicitement dans
le projet de loi anti-terroriste. Pourquoi cela n'a-t-il pas
été le cas ? La première réponse qui semble
évidente si l'on prend en considération la nature et l'objectif
non avoué de ce texte était de mettre l'accent sur la projection
vers l'extérieur et non sur le territoire intérieur. Toutefois,
la définition des zones d'application de la loi mentionne bien le
territoire japonais, et à vrai dire cela pouvait sembler suffisant pour
justifier le renforcement de cette mission de surveillance, d'autant plus
qu'elle a déjà fait l'objet d'une législation (les
Guidelines). Mais personne ne pouvait décemment envisager que
le terrorisme soit éradiqué par les seules opérations de
représailles menées par les Etats-Unis. Par conséquent, le
renforcement de la protection par les Forces d'autodéfense des bases
américaines installées sur le sol japonais contre la menace
terroriste ne pouvait logiquement pas faire l'objet d'un projet de loi
limité dans le temps. Une telle mesure devait donc faire l'objet de
dispositions particulières. Celles-ci ont vu le jour sous la forme d'une
réforme partielle de la loi sur les Forces d'autodéfense, ce
qu'annonçait un communiqué du gouvernement en date du 3
octobre :
Le gouvernement a aussi approuvé ce jour un projet de
loi qui renforce la protection des installations et des zones des forces
américaines ainsi que des équipements importants au Japon. Cette
nouvelle législation constitue un amendement à la loi sur les
Forces de défense. 71(*)
Cette initiative a été confirmée par le
Premier ministre Koizumi à l'occasion de l'annonce du plan de mesures
d'urgence du 8 octobre :
Nous allons renforcer la surveillance tout d'abord des
principaux équipements de notre pays mais aussi des installations
liées aux États-Unis et autres. Par de telles mesures, nous
allons empêcher les actions terroristes, et nous ferons tout pour
garantir à la nation un cadre de vie où chacun se sent en
sécurité.
Cette réforme partielle de la loi sur les Forces
d'autodéfense a été enfin notifiée dans le texte du
projet de loi anti-terroriste au deuxième point des dispositions
supplémentaires 72(*).
B) Les mesures de renforcement des
contrôles
D'autres mesures sont également prises sur le
territoire national. Ce sont essentiellement des mesures de renforcement des
contrôles aux frontières, ce qui concerne en particulier les
contrôles douaniers et les contrôles d'immigration. Ce renforcement
des mesures de sécurité s'applique tout particulièrement
dans les lieux sensibles tels que les avions et les aéroports. Dans les
avions par exemple, les couverts des plateaux repas ne sont plus en
métal mais en plastique, afin de prévenir toute utilisation
criminelle.
Il apparaît cependant que, pour un pays tel que le Japon
où l'immigration d'origine moyen-orientale est extrêmement faible,
de telles mesures peuvent sembler ridicules, répondant plus au principe
de précaution qu'à un réel danger. Néanmoins,
lorsqu'on sait que des terroristes du Nihon Sekigun ont pu à plusieurs
reprises entrer sur le territoire japonais sans être inquiéter par
les autorités, on peut légitimement se dire que le renforcement
des contrôles aux frontières et dans les aéroports n'est
pas une mesure superflue.
L'intention de renforcer le dispositif en matière de
contrôles a notamment été proclamée par le Premier
ministre Koizumi dans sa déclaration du 8 octobre 2001, dans laquelle
d'ailleurs elle tient la première place des mesures
annoncées :
Premièrement, nous allons renforcer les systèmes
de surveillance et de protection pour garantir la sécurité de la
nation.- Les activités de collecte d'information liées au
terrorisme seront renforcées pour surveiller les mouvements des
terroristes. - Afin d'empêcher l'entrée de terroristes au Japon,
nous allons mettre en place une surveillance renforcée du contrôle
des frontières.- Nous allons renforcer le système de
sécurité des aéroports, entre autres par une inspection
plus rigoureuse des bagages à main, afin de prévenir les
détournements d'avion. 73(*)
Plus précisément, les dispositions, qui allaient
être mises en place « pour protéger la
sécurité de la nation », sont détaillées
dans le plan de mesures d'urgence délivré le jour même de
la déclaration du Premier ministre :
1. Afin de garantir la sécurité du peuple
japonais, le système de surveillance à l'intérieur du pays
est renforcé comme suit :
- Renforcement du contrôle des frontières et
surveillance exhaustive des clandestins
- Renforcement de la collecte des informations liées au
terrorisme et de la collaboration internationale dans ce domaine
- Afin d'empêcher les détournements d'avions et
autres incidents de ce type, application stricte du renforcement maximal des
mesures de sécurités et de surveillance des aéroports
- Renforcement des mesures contre le terrorisme
nucléaire, bactériologique et chimique
- Renforcement des dispositifs de garde et de surveillance des
principaux équipements japonais et des installations liées aux
États-Unis et autres au Japon
- Strict respect du contrôle au moment de la
réception des plans de vol des avions légers etc. et de
l'interdiction de survol des installations de l'armée américaine
- Surveillance volontaire par les entreprises de fret maritime
et strict respect de la surveillance des marchandises suspectes
- Strict respect du renforcement du système
d'inspection douanière 74(*)
Outre la volonté de renforcer la protection et la
surveillance des bases américaines (point numéro 5), deux grands
ensembles ressortaient de plan de mesures d'urgence. Tout d'abord, l'accent est
mis sur le renforcement des mesures de contrôle des frontières et
douanières afin d'empêcher toute entrée sur le territoire
national de marchandises suspectes et de clandestins. Il est cependant
remarquable que l'intention de prévenir l'intrusion d'éventuels
terroristes n'a pas été explicitement mentionnée. Le terme
« terrorisme » n'est d'ailleurs cité que deux fois,
aux points numéro 2 (relatif à la collecte des informations) et 4
(relatif au renforcement des mesures contre le terrorisme NBC). Cette
imprécision pourrait pourtant laisser dire qu'il serait facile de faire
l'amalgame entre clandestins et terroristes. Quoi qu'il en soit, il
apparaît que le renforcement des mesures de surveillance des clandestins
a vocation à dépasser le seul cadre de la lutte contre le
terrorisme.
Le second ensemble de mesures concernait quant à lui le
renforcement des mesures de sécurité dans les aéroports et
les avions. Les attentats du 11 septembre ayant été
perpétrés au moyen de détournements d'avions, ces
dispositions apparaissaient non seulement nécessaires mais aussi
indispensables. La psychose d'un nouvel acte terroriste aérien
était en effet profonde. Ici, il ne s'agissait plus uniquement du seul
principe de précaution mais réellement de prendre des mesures
pour empêcher qu'une telle chose ne se reproduise.
L'EXAMEN ET LE VOTE
DE LA LOI ANTI-TERRORISTE
L
e 27 septembre 2001, une session extraordinaire de la
Diète a été convoquée afin notamment de
débattre d'un ensemble de trois textes composé par un projet de
réforme de la loi relative à l'Agence de sécurité
maritime, un projet de réforme de la loi sur les Forces
d'autodéfense et le « fameux » projet de loi
spéciale de lutte contre le terrorisme. Ce dispositif a surtout fait
l'objet d'un examen devant la Commission du Budget de la Chambre des
Représentants et d'un examen conjoint mené par un ensemble de
trois commissions directement concernées par le projet de loi : la
Commission des relations diplomatiques et de la défense (Gaikô
Bôei Iinkai
\u22806\u22806OOEð-hðh%oqq\u22996àÏÏ\u21729àõ%oïõï),
la Commission du Cabinet (Naikaku Iinkai
\u20869\u20869«àtt\u22996àÏÏ\u21729àõ%oïõï)
et la Commission du Territoire et des Transports (Kokudo Kôtsû
Iinkai
\u22269\u22269ç«yy\u20132OEð'ÊðÊàÏÏ\u21729àõ%oïõï).
Le 5 octobre, le gouvernement présentait à la Diète son
projet de loi anti-terroriste et son examen en séance
plénière devant la Chambre des Représentants
débutait le 10 octobre.
L'enjeu essentiel des débats était de
légitimer la participation du Japon à des opérations de
représailles qui ne s'appliquaient pas à la législation
existante. Il s'agissait en effet d'organiser et de mettre en cohérence
les principes de soutien et d'assistance fondés sur l'alliance
nippo-américaine avec le rôle du Japon dans l'organisation de la
lutte internationale contre le terrorisme.
Sans être particulièrement houleux, les
débats n'en ont été pas moins âpres et tendus.
Malgré l'existence d'un fort consensus sur le principe d'une
contribution du Japon, plusieurs des propositions du gouvernement y donnant
corps étaient loin d'être approuvées par l'ensemble de la
classe politique. Bien sûr, les contestations venaient de l'opposition,
mais également du Parti libéral démocrate lui-même.
L'opinion publique aussi se montrait peu favorable à certaines mesures
prises par le gouvernement. Malgré tout, la loi spéciale de lutte
contre le terrorisme a été adoptée à une large
majorité.
I) Divergences d'opinions sur plusieurs aspects du
projet de loi anti-terroriste
La nature même du projet de loi présenté
par le gouvernement Koizumi laissait présager des divergences
d'opinions. Les questions de défense et de sécurité sont
en effet des points ultra-sensibles de la vie politique japonaise. Ainsi, les
trois partis de la majorité n'ont donné leur accord sur le texte
que le 2 octobre alors que la session extraordinaire de la Diète avait
été convoquée le 27 septembre. Ce délai
était symptomatique d'importants désaccords sur le contenu du
projet de loi, non seulement entre les partis et le gouvernement mais aussi au
sein même du Parti libéral démocrate.
Le Kômeitô par exemple soulignait la
nécessité de mettre en place des mesures restrictives claires, en
particulier la nécessité de limiter l'application de la loi
à une durée de deux ans. Dans la nuit du 1er octobre,
les trois partis composant la majorité se sont donc mis d'accord pour
proposer une loi de deux ans.
Si ce point a été facilement
réglé, cela n'a pas été le cas pour de nombreux
autres aspects du projet de loi. Dans le détail, les débats
à la Diète ont porté sur des points traditionnels
d'achoppement concernant les activités des Forces d'autodéfense,
notamment le principe de conformité à l'article 9 de la
Constitution, l'usage des armes et le problème du droit à
l'autodéfense collective, lui-même lié au problème
de la légalité des opérations de représailles.
A) Le problème de la conformité
à l'article 9 de la Constitution
Le problème de la conformité à l'article
9 de la Constitution de 1946 est la question centrale, le fil rouge de toute la
problématique développée autour des questions de
sécurité et de défense du Japon depuis l'instauration de
cette Constitution. L'esprit pacifiste, mais également les
hésitations d'une classe politique se complaisant dans le statu quo et
l'accord de principe d'une réforme nécessaire de la Constitution
ont fait que la question de l'article 9 est devenue aujourd'hui une question
rhétorique. Ainsi, comme l'explique Jean-Marie Bouissou, le Japon a
pendant longtemps brandi l'article 9 pour éviter de trop s'investir et
donc se compromettre en participant à des opérations de combat,
mais en même temps le Japon a cherché à « aller
au-delà de la défense du territoire national, seule mission
légitime indiscutable au regard de l'article 9 » 75(*).
Toutefois, même si les diverses avancées
réalisées dans les domaines de la sécurité et de la
défense, ont fortement affaibli le sacro-saint principe pacifiste, il
n'en reste pas moins que le problème de la conformité à
l'article 9 est un point incontournable lorsqu'il s'agit de questions
militaires. Aussi est-il de nouveau soulevé à propos de la
participation du Japon aux opérations de représailles
engagées par les Etats-Unis en Afghanistan. Malgré les infinis
précautions inscrites dans le projet de loi par le gouvernement Koizumi
pour encadrer la participation des Forces d'autodéfense
(déploiement en dehors des zones combattantes, usage des armes
uniquement en cas de légitime défense), les réticences,
voire les oppositions à leur envoi à l'étranger dans le
cadre d'opérations qui ne sont pas reconnues comme étant des
opérations défensives sont très fortes et nombreuses.
Certaines opinions très tranchées comme celle de Shii Kazuo,
président du Parti communiste, demandaient un strict respect de la
législation en vigueur et de l'esprit de l'article 9 :
Les opérations de logistique que le gouvernement
appelle « soutien arrière » entrent dans le cadre de
l'utilisation de la force armée selon le droit international. Il n'est
pas permis d'avoir pour but de participer à une guerre de
représailles qui n'a pas de fondement du point de vue du droit
international, ni de bafouer l'article 9 de la Constitution. 76(*)
Cependant, pour le Premier ministre Koizumi et Tsuno Osamu
\u27941\u27941'-ì\u12539E \u20462\u20462èC, chef du Bureau
législatif du Cabinet, le projet de loi spéciale de lutte contre
le terrorisme comble un vide législatif existant entre le
préambule de la Constitution 77(*) et l'article 9 :
La Constitution fixe le cadre fondamental de l'exercice du
pouvoir. Nous devons répondre aux situations nouvelles pour lesquelles
il ne correspond pas de principe général du droit et dans les cas
où il n'y a pas de norme juridique il est nécessaire
d'établir de nouvelles lois. Nous avons présenté le projet
de loi spéciale de lutte contre le terrorisme pour combler le vide
juridique qu'il y a entre le préambule de la Constitution et l'article
9. 78(*)
En effet, le préambule de la Constitution de 1946
exprime clairement la volonté d'un Japon désireux de jouer un
rôle prépondérant au sein de la société
internationale et de participer au maintien de la paix et à la
préservation des valeurs démocratiques dans le monde. Or,
à l'heure où le monde est menacé par le terrorisme, le
principe de renonciation à la guerre défini à l'article 9
est un obstacle à la réalisation des objectifs inscrits dans le
préambule. Toutefois, certains spécialistes du droit comme
Narisawa Takato \u25104\u25104ê#172;àVV
\u23389\u23389çFêll, professeur non titulaire à
l'Université d'Utsunomiya, considéraient que légitimer la
participation des Forces d'autodéfense aux opérations
américaines par un tel raccourci juridique était plus que
douteux :
Il est tout-à-fait impossible selon la logique du droit
d'accepter l'explication du Premier ministre Koizumi disant que, selon le
« bon sens », les Forces d'autodéfense sont une
force militaire et que par « bon sens » il a
été établi un « vide » entre le
préambule de la Constitution et l'article 9 à propos de
l'utilisation des armes. Pourtant, cette intervention
« politique » devant la Diète est passée.
79(*)
Ce qui est le plus remarquable concernant ce point, c'est que
le gouvernement Koizumi a de la sorte érigé le préambule
de la Constitution de 1946 au sommet de la hiérarchie des normes
juridiques en conférant à son contenu une importance plus grande
que l'article 9. Tout en s'en défendant pourtant, le Premier ministre
mettait ainsi en avant une nouvelle interprétation de la Constitution,
celle du « vide juridique », pour justifier son projet de
loi.
Le problème de la conformité à l'article
9 de la Constitution était donc particulièrement délicat,
d'autant plus qu'il combinait par définition un faisceau de nombreux
autres problèmes dont les plus importants étaient l'usage des
armes et la définition des zones d'intervention et le problème du
droit à l'autodéfense collective.
B) L'usage des armes et la définition des
zones d'intervention
Selon la réglementation fixée par la loi
relative aux Forces d'autodéfense, les soldats japonais ont la
possibilité d'utiliser leurs armes pour protéger les
installations et les armements dans le cadre de situations d'attaques et de
légitime défense. Le projet gouvernemental assouplit ces
règles d'utilisation des armes et confirme que les soldats japonais
pourront en faire usage pour assurer leur propre défense et pour assurer
la protection des personnes en détresse, blessés ou
réfugiés, ce qui était déjà prévu par
la loi PKO. En effet, comme nous l'avons vu plus haut, l'article 12 du projet
de loi anti-terroriste rappelait les principes de légitime
défense et d'absolue nécessité réglementant l'usage
des armes par les militaires japonais. Par ailleurs, les zones d'intervention
étant strictement limitées aux zones non combattantes, les Forces
d'autodéfense ne devraient, en principe, pas avoir à utiliser
leurs armes pour notamment riposter à des situations d'attaques.
Pourquoi alors assouplir les règles d'utilisation des
armes ? Il s'agissait en fait pour le gouvernement de donner la
possibilité aux forces japonaises de répondre à toutes les
éventualités. En effet, selon son interprétation,
l'article 9 de la Constitution interdit l'exercice de la force armée
mais pas l'usage des armes, par exemple pour les cas d'autodéfense ou de
protection des individus placés sous la responsabilité des
soldats japonais. De plus, les difficultés inhérentes au
phénomène terroriste et à la définition des zones
d'intervention des Forces d'autodéfense supposaient des règles
d'utilisation des armes plus souples :
Le projet de loi spéciale de lutte contre le terrorisme
limite les zones d'exécution des opérations aux zones non
combattantes et aux zones où des combats ne risquent pas
d'éclater. La même idée était
développée par la loi sur les situations de crise en zones
périphériques, mais cette fois elle inclut les frontières
de pays étrangers. Dans la situation actuelle, il est prévu
d'envoyer des forces japonaises au Pakistan.
Seulement, contrairement à une guerre entre des
nations, le terrorisme est difficilement prévisible. Le Premier ministre
Koizumi a expliqué le 5 [octobre] devant la Commission du budget de la
Chambre des Représentants que « nous ne savons pas où
les combats vont éclater. (Les zones d'opérations) sont sans
limites », reconnaissant la difficulté de les
délimiter.
Pour le gouvernement (c'est-à-dire le cabinet),
« les éventuels actes de terrorisme qui ne sont ni
prémédités ou organisés ne sont pas des combats.
Les zones où éclatent de tels actes de terrorisme ne sont pas des
zones de combat. » 80(*)
De nombreuses oppositions se sont élevées contre
cette conception gouvernementale. Le Parti démocrate notamment
retournait l'argument basé sur les difficultés de
délimitation des zones d'intervention pour demander le
non-déploiement des Forces d'autodéfense dans des pays qui ne
sont pas totalement sécurisés.
Par ailleurs, le Parti démocrate, mais aussi le
Kômeitô, souhaitaient que le transport d'armes et de munitions par
les Forces d'autodéfense ne soit pas autorisé. Hatoyama Yukio
déclarait ainsi que les règles d'utilisation des armes telles que
définies par la législation existante étaient suffisantes
et qu'elles impliquaient l'impossibilité d'envoyer les Forces
d'autodéfense au Pakistan et de transporter des armes et des
munitions :
Nous abordons la question en nous fondant sur les arguments
issus de la loi sur les situations de crise en zones
périphériques et dans le cadre de la Constitution. Les
activités des Forces terrestres d'autodéfense au Pakistan,
même si elles ont pour objectif d'aider les réfugiés et
d'apporter une assistance médicale, sont fondamentalement difficiles.
Les règles d'utilisation des armes, puisqu'elles dessinent une ligne de
démarcation délimitant les zones de combats, sont jusqu'à
aujourd'hui suffisantes. Le transport des armes et des munitions ne doit pas
être autorisé. 81(*)
D'autres positions sont encore plus virulentes, comme celle
d'Ozawa Ichirô \u23567\u23567è#172;ò\u12539E
\u19968\u19968àêYY, chef du Parti libéral, qui est
allé jusqu'à dire que l'intervention des forces japonaises,
même si elle s'inscrit dans un cadre humanitaire, sera forcément
de nature militaire. Mais jusqu'à la fin des débats, le
gouvernement Koizumi est resté inébranlable sur ses positions,
d'autant plus que ces points, en particulier celui concernant la
définition des zones d'intervention, constituaient le pilier essentiel
sur lequel reposait la viabilité et l'intérêt du projet de
loi spéciale de lutte contre le terrorisme qu'il présentait.
C) Les problèmes du droit à
l'autodéfense collective et de la légalité des
représailles
Nishitani Osamu \u-30337\u-30337ê¼'JJ
\u20462\u20462èC développe dans son ouvrage «Tero to no
sensô» to ha nani ka ? - 9.11 igo no sekai
\u12300\u12300uÉee\u12525ÉçÆçÆÌÌ\u25126êíàúvv\u12392ÆÆ\u12399ÍÍ\u20309%o½½\u12363(c)(c)
- 9.11\u20197\u20197àÈOEãÌãÌ
\u19990\u19990êcentsEE (Qu'est-ce que «la guerre contre le
terrorisme» - Le monde depuis le 11 septembre), l'idée que la
rhétorique de guerre développée par le président
George W. Bush, relayée par les média américains, comme la
chaîne de télévision CNN, ne servait qu'à justifier
une « justice illégale ». En effet, les
spécialistes du droit ont soulevé l'illégalité
vis-à-vis du droit international des opérations de
représailles, comme l'expliquait l'avocat Arai Seiichirô
\u-31918\u-31918çràä\u12539E
\u-30048\u-30048ê½àêYêY dans un article de la
revue Hô to Minshu shugi
\u27861\u27861-@ÆÆ\u27665-\u20027éåéååå``
:
[...] Après les sommets d'horreur atteint par la
Seconde guerre mondiale, outre la guerre, la Charte des Nations unies interdit
de façon générale la menace par la force armée, y
compris l'exercice de la force militaire. Rassemblant les intelligences,
l'humanité, pour empêcher les horreurs de l'usage de la force
armée et de la guerre, a progressivement élargi les infractions
à la loi internationale, comme la guerre et l'emploi de la force
militaire. La « guerre de représailles » des
Etats-Unis constitue une méconnaissance de ces lois internationales.
82(*)
Pour de nombreux commentateurs et juristes, la guerre de
représailles des Américains était un acte d'agression
contre le régime des Talibans, d'autant plus qu'il n'était pas
responsable des attentats du 11 septembre. Mais les Etats-Unis ont mis en avant
le principe du droit à l'autodéfense collective pour justifier
les bombardements sur l'Afghanistan et entraîner dans leur combat leurs
alliés. Or, selon l'interprétation officielle du gouvernement
japonais, qui émane du bureau législatif du Cabinet, le Japon
possède le droit à l'autodéfense collective au regard du
droit international, notamment l'article 51 de la Charte des Nations unies,
mais il ne peut pas y recourir à cause de l'article 9 de sa
Constitution. De nombreux hommes politiques japonais, notamment au sein du
Parti démocrate, du Parti social démocrate et du Parti
libéral, n'ont pas manqué de soulever ce problème lors des
débats sur la participation du Japon aux opérations de
représailles des Etats-Unis. Ainsi, Doi Takako déclarait :
Tout d'abord, il ne faut pas envoyer les Forces
d'autodéfense à l'étranger. Je crains une application du
droit à l'autodéfense collective et je soupçonne fortement
une violation de la Constitution. Le terrorisme n'est pas une guerre mais un
crime atroce. Il doit être jugé selon les règles
internationales. 83(*)
Yamaoka Kenji \u23665\u23665éR%o
\u-29470\u-29470OE«é··, du Parti libéral, est
même allé jusqu'à suggérer qu'il ne relevait pas de
la responsabilité du Premier ministre de reconnaître la
possibilité de recourir au droit à l'autodéfense
collective. Pour ces opposants à la politique gouvernementale, le projet
de loi anti-terroriste était donc contraire à l'article 9 de la
Constitution car il était une application implicite du droit à
l'autodéfense collective. Mais, sur ce point, le gouvernement Koizumi a
opposé le même argument que celui avancé pour la question
de la compatibilité entre l'article 9 et le projet de loi
spéciale de lutte contre le terrorisme. Selon le Premier ministre, le
vide juridique existant entre le préambule de la Constitution et
l'article 9 permet d'envisager le recours au droit à
l'autodéfense collective.
II) Une opinion publique peu
convaincue
Lorsqu'il s'agit des questions de défense et de
sécurité, la position de l'opinion publique japonaise a toujours
pesé d'un lourd poids sur les décisions politiques prises dans
ces domaines. Longtemps traumatisés par les deux bombes
nucléaires lâchées sur Hiroshima et Nagasaki en août
1945 et profondément marquée par le pacifisme de la Constitution
de 1946, les Japonais se sont toujours montrés réticents à
l'idée d'un réarmement du Japon, probablement autant que les pays
alliés et les voisins asiatiques.
Il était donc ainsi établi, de façon
quasi coutumière, que l'avis favorable de cette opinion publique
était nécessaire pour mettre en oeuvre des mesures tendant vers
un renforcement du dispositif militaire japonais. Cependant, la gestion des
questions de défense et de sécurité par les gouvernements
successifs a démontré que, bien souvent, les mesures ont
été quand même prises, malgré la
désapprobation des Japonais. Par la suite, l'état de fait
était progressivement accepté. Le renouvellement des
générations en est certainement une des raisons principales. Mais
l'opinion japonaise reste difficile à convaincre, ce qui a
été une nouvelle fois le cas pour ce qui est du projet de loi
spéciale de lutte contre le terrorisme.
A) L'évolution de la position de l'opinion
publique sur les questions de défense
Philippe Pons écrivait dans le Monde le 25 octobre
2001 que :
Le nouveau type de guerre qu'est le terrorisme pourrait
changer la donne. Il y a assurément de la part du gouvernement Koizumi
un souci de visibilité et de percée politique. Mais les
mentalités ont aussi évolué. Le débat à la
Diète ainsi que les éditoriaux des journaux montrent que les
Japonais sont à la fois conscients qu'ils ne peuvent pas rester les bras
croisés mais qu'ils sont toujours très réticents au
recours à la force.
La position de l'opinion publique japonaise a en effet
évolué et le pacifisme a perdu du terrain, notamment depuis la
fin du système de 55. Concernant notamment l'image des Forces
d'autodéfense, l'accueil par la population japonaise s'est nettement
améliorée, surtout à la suite des opérations
menées dans le cadre des opérations de maintien de la paix et des
interventions de sécurité civile, comme les opérations de
secours menées lors de l'attentat au gaz sarin dans le métro de
Tôkyô perpétré par la secte Aum. Ces
opérations ont familiarisé la population japonaise avec les
Forces d'autodéfense. Elle a pu en effet voir que leurs activités
principales étaient des activités de secours et d'assistance, ce
qui a d'une certaine façon l'a rassurée.
Cependant, les gouvernements successifs n'ont eu de cesse
d'élargir le champ d'action des Forces d'autodéfense, en
particulier en adoptant une interprétation souvent très extensive
des dispositions constitutionnelles et légales. Or, il semble que cette
politique d'élargissement progressif des activités de
défense soit passée relativement bien auprès de l'opinion
publique comme l'indiquent l'évolution des sondages 84(*). L'habilité du
gouvernement japonais a été en effet de progresser par
étapes sans bousculer la population, tout en respectant autant que
possible l'esprit pacifiste qui anime toujours une large majorité des
Japonais.
Aujourd'hui pourtant, les circonstances exceptionnelles qui
entourent les mesures prises en représailles des attentats du 11
septembre, la nature même des événements et la pression de
l'urgence ont contraint le gouvernement japonais à adopter des mesures
qui devaient obligatoirement aller à l'encontre de la sensibilité
pacifiste de l'opinion publique. L'envoi des Forces d'autodéfense
à l'étranger, la question de l'usage des armes, la question d'une
participation, aussi éloignée soit-elle, à des
opérations de représailles étaient autant de points
sensibles auxquels les Japonais se sont immédiatement montrés
défavorables.
L'opinion publique japonaise a donc été
bousculée, elle n'a pas eu le temps de se familiariser aux questions
imposées par la situation. Il est ainsi à noter que les sondages
d'opinion ont été moins nombreux que lors par exemple de la
guerre du Golfe et plus récemment lors de la guerre contre l'Irak en
2003. Or les sondages, par le biais des organes de presse, sont le
baromètre l'opinion d'une population. Entre septembre et novembre 2001
l'Asahi shinbun n'en a réalisé et publié que deux
qui soient en relation directe avec les événements du 11
septembre. Peut-être cela s'explique-t-il par le manque de temps et la
rapidité avec laquelle se sont enchaînés les
événements. Mais cela pourrait également s'expliquer par
le fait qu'en matière de sécurité nationale et de
défense, et à plus forte raison dans une situation de crise et
d'urgence, l'opinion publique doit s'en remettre à ses élus pour
prendre les décisions qui s'imposent. Dans le cas du terrorisme, comme
l'explique Nathalie Cettina, le consensus pour lutter contre cette menace est
à un tel point fort, solide et unanime que le soutien de la population
ne peut se démentir et est pris pour acquis par les gouvernants. Il ne
s'agit pas non plus d'oublier que, même s'il est légitime que dans
une démocratie la nation souveraine ait son mot à dire sur une
politique concernant directement le cadre de l'Etat-Nation, la défense
et la direction de l'armée font partie des fonctions régaliennes
de l'Etat et qu'à ce titre la nation est incompétente en la
matière. La position de l'opinion est certes importante, mais il n'est
pas condamnable que le gouvernement prenne des mesures impopulaires si elles
relèvent d'un cas de force majeure.
B) Entre intérêt et
désapprobation
Quelle est alors la position de l'opinion publique
vis-à-vis du projet de loi anti-terroriste ? Examinons l'extrait
des deux sondages qui suivent et qui ont été
réalisés par l'Asahi shinbun 85(*) :
· En rapport avec la collaboration avec les
Etats-Unis, le Premier ministre Koizumi, afin d'apporter un soutien
arrière à l'armée américaine, élabore un
nouveau projet de loi et a lancé des directives pour déployer les
Forces d'autodéfense. Si elles sont mises à exécution,
exception faite des activités sous l'égide des Nations unies, ce
sera la première fois que les Forces d'autodéfense seront
envoyées à l'étranger. Approuvez-vous le
déploiement à l'étranger des Forces
d'autodéfense ?
Oui 42 %
Non 46 %
Autre, sans réponse 12 %
· Les trois partis de la majorité pensent
introduire dans ce nouveau projet de loi des mesures d'assouplissement des
règles d'utilisation des armes par les Forces d'autodéfense.
Approuvez-vous l'assouplissement des règles d'utilisation des
armes ?
Oui 39 %
Non 51 %
Autre, sans réponse 10 %
|
[...]
· A propos des attentats terroristes aux
Etats-Unis, approuvez-vous la collaboration du Japon avec les Etats-Unis aux
mesures de lutte contre le terrorisme ?
Oui 71 % (62 %)
Non 17 % (25 %)
Autre, sans réponse 12 % (13 %)
· Le 8 [octobre] les Etats-Unis ont engagé
l'offensive militaire en Afghanistan pour anéantir les organisations
terroristes. Soutenez-vous l'offensive militaire en Afghanistan ?
Oui 46 %
Non 43 %
Autre, sans réponse 11 %
· Pensez-vous que l'offensive militaire
américaine soit efficace pour résoudre l'affaire des attentats
terroristes ?
Oui 36 %
Non 49 %
Autre, sans réponse 15 %
· Dans le cadre des contre-mesures relatives
à l'affaire des attentats terroristes, un projet de loi spéciale
de lutte contre le terrorisme est discuté à la Diète pour
que les Forces d'autodéfense apportent leur soutien aux armées
engagées dont celle des Etats-Unis. Vous intéressez-vous au
contenu de cette loi ?
Oui 79 %
Non 16 %
Autre, sans réponse 5 %
· Approuvez-vous le projet de loi spéciale
de lutte contre le terrorisme ?
Oui 51 %
Non 29 %
Autre, sans réponse 20 %
· Ce projet de loi, avec l'accord des pays
étrangers, permettra aux Forces d'autodéfense d'aller agir dans
des zones de ces pays où ne se déroulent pas de combats.
Approuvez-vous l'élargissement des activités à
l'étranger des Forces d'autodéfense ?
Oui 49 %
Non 40 %
Autre, sans réponse 11 %
· Ce projet de loi introduit des mesures
d'assouplissement des règles d'utilisation des armes par les Forces
d'autodéfense. Approuvez-vous l'assouplissement des règles
d'utilisation des armes ?
Oui 48 %
Non 42 %
Autre, sans réponse 10 %
|
Comme nous l'avons déjà vu plus haut, la
majorité des personnes sondées n'approuvent pas l'envoi des
Forces d'autodéfense à l'étranger, pourtant elle est
favorable à la prise de mesures pour lutter contre le terrorisme. En
effet, 42 % seulement approuvent le déploiement à
l'étranger des Forces d'autodéfense contre 46 %, tandis que
71 % approuvent la collaboration du Japon avec les Etats-Unis aux mesures de
lutte contre le terrorisme.
Cependant, une faible majorité, seulement 46 %,
soutient l'offensive militaire américaine en Afghanistan. Ce chiffre
peut être la démonstration d'un certain antiaméricanisme,
mais il est surtout la manifestation du traditionnel pacifisme qui anime
l'opinion publique japonaise. En effet, 49 % des sondés estiment que
l'offensive américaine n'est pas efficace pour résoudre l'affaire
des attentats terroristes du 11 septembre, contre seulement 36 %. En d'autres
termes, les Japonais condamnent les attentats du 11 septembre et le terrorisme
de façon générale, mais ils sont moins enclins à
employer la force pour contrer cette menace.
Pourtant, 79 % déclarent s'intéresser au contenu
du projet de loi spéciale de lutte contre le terrorisme, mais seulement
51 % des sondés approuvent ce projet de loi. Ces chiffres indiquent que
l'opinion publique japonaise se sent concernée par les problèmes
de sécurité et de défense de leur pays, en particulier
lorsqu'il s'agit de lutter contre une menace aussi sérieuse que le
terrorisme, mais elle reste cohérente avec son esprit pacifiste et
désapprouve la prise de mesures offensives. Cette tendance est
confirmée par les réponses données aux questions
concernant l'usage des armes. En effet, selon le sondage publié le 16
septembre, 51 % des sondés désapprouvent l'assouplissement des
règles d'utilisation des armes contre seulement 39 %. Cependant, la
tendance s'inverse en octobre et 48 % se prononcent en faveur de ces mesures
contre 42 %. Ces résultats indiquent clairement une meilleure
connaissance de l'opinion des mesures proposées et certainement une
bonne politique de promotion et d'explication de la part du gouvernement, ce
qui apparaît dans les résultats à la question concernant
l'élargissement des activités à l'étranger des
Forces d'autodéfense. En effet 49 % des personnes interrogées,
quasiment la majorité, approuvent cette disposition, contre 40 % qui la
désapprouvent.
Ces chiffres confirment par ailleurs la tendance
générale de l'opinion publique japonaise à bien accepter
l'existence et la légitimité des Forces d'autodéfense. Il
apparaît pourtant que le gouvernement japonais s'engageait sur un terrain
glissant vis-à-vis de l'opinion publique qui a exprimé sa
préférence pour un règlement pacifique à l'occasion
de plusieurs manifestations contre la participation des Forces
d'autodéfense aux opérations américaines.
III) L'adoption par la
Diète
Le 18 octobre devant la Chambre des Représentants et le
29 octobre 2001 devant la Chambre des Conseillers, un ensemble de trois projets
de loi a donc été soumis au vote de la Diète : le
projet de loi spéciale de lutte contre le terrorisme, un projet de
révision de la loi sur les Forces d'autodéfense et un projet de
réforme de la loi relative à l'Agence de sécurité
maritime.
Les commentateurs ont tout d'abord retenu la rapidité
avec laquelle le projet de loi spéciale de lutte contre le terrorisme a
été adopté par la Diète. Les résultats du
vote par les Sénateurs pourtant ont montré que l'issue des
discussions n'a pas convaincu les plus réticents, en particulier au sein
du Parti libéral démocrate dont de nombreux membres ont
profité de cette session extraordinaire de la Diète pour exprimer
leurs oppositions à d'autres aspects de la politique du Premier ministre
Koizumi.
A) Un record de rapidité
L'adoption de la loi spéciale de lutte contre le
terrorisme est d'une « exceptionnelle rapidité »,
seulement deux semaines après sa présentation devant la
Diète pour le vote par la Chambre des Représentants et un peu
plus de trois semaines pour le vote par la Chambre des Conseillers. Tous les
commentateurs se sont en effet accordés pour souligner la promptitude,
voire la hâte, du gouvernement Koizumi à faire passer son projet
de loi. L'Asahi shinbun écrivait ainsi à ce propos
que :
Plus de trois semaines se sont écoulées entre la
présentation du projet de loi devant la Diète et l'adoption le 29
[octobre] de la loi spéciale de lutte contre le terrorisme. On peut dire
que la « rapidité des délibérations »
a été exceptionnelle pour un projet de loi important dans la
politique de sécurité.
Les délibérations devant les commissions
à l'intérieur des deux Chambres ont duré environ 62
heures. Parmi les anciens grands projets de loi, les
délibérations de la loi PKO ont duré 179 heures et celles
de la loi sur les situations de crise en zones périphériques 154
heures.
Les débats de la loi elle-même ont tiré
parti des anciennes délibérations devant la Diète de la
loi PKO et de la loi sur les situations de crise en zones
périphériques et on peut penser que le Parti démocrate les
a fait traîner en renchérissant sur certains points des
discussions. 86(*)
La rédaction du texte lui-même a
été extrêmement rapide, environ deux semaines. Mais ce qui
a le plus marqué les esprits a été la rapidité des
délibérations. Bien sûr, la pression de l'urgence a ici
aussi joué un rôle essentiel. Cela signifie-t-il pour autant que
les débats ont été bâclés ? De nombreux
observateurs ont en effet parlé de précipitation de la part du
Premier ministre, et, à vrai dire, le fait-même que l'on souligne
autant la courte durée des délibérations devant la
Diète montre qu'elles n'ont certainement pas été
suffisantes pour être efficaces, même si du temps a
été gagné grâce aux renvois aux débats tenus
pour la loi PKO et la loi sur les situations de crise en zones
périphériques.
On peut penser cependant que, dans une certaine mesure,
l'unanimité des opinions pour lutter contre le terrorisme et la forte
empathie suscitée par les événements du 11 septembre ont
contribué à ce que ce projet de loi ait été
adopté aussi rapidement. Il n'en est pas moins certain que la ferme
volonté du Premier ministre Koizumi d'« organiser le plus tôt
possible un cadre légal permettant de soutenir l'allié
américain par le déploiement d'une force d'action »
87(*) a été
déterminante.
B) Entre adhésion et
contestations
Le 18 octobre 2001, la loi spéciale de lutte contre le
terrorisme a été votée par la Chambre basse réunie
en séance plénière. Elle a été
approuvée à une large majorité des voix, notamment
grâce à la coalition des trois partis de la majorité, le
Parti libéral démocrate, le Kômeitô et le Parti
conservateur qui ont soutenu le projet gouvernemental. Ce résultat a
été confirmé le 29 octobre 2001 par la Chambre haute qui a
adopté la loi par 140 voix contre 100. Les deux autres projets de
réforme présentés en même temps que la loi
anti-terroriste ont été adoptés à une plus large
majorité encore.
La politique de Koizumi était donc appuyée non
seulement par l'ensemble de la majorité mais aussi par une partie de
l'opposition. Les députés du Parti démocrate contestant le
projet de loi sont en effet restés réduits au minimum et, en
réalité, de nombreux membres du parti soutenaient l'action du
gouvernement, comme l'écrivait l'Asahi shinbun le 19
octobre :
Tandis que les bombardements sur l'Afghanistan par
l'armée américaine ont commencé, le souhait du
gouvernement d'« organiser aussi tôt que possible un cadre
légal permettant de soutenir l'allié américain par le
déploiement d'une force d'action » n'est pas seulement
partagé par les partis de la majorité, mais il est aussi soutenu
par une grande partie du Parti démocrate qui appartient à
l'opposition.
Pourtant, au sein des partis eux-mêmes, des discordances
se faisaient entendre, au gré des oppositions entre les factions.
C'était le cas du Parti démocrate, poussant un de ses
députés à parler de « querelle interne au
parti » :
Un député démocrate déclarait le
20 septembre que « c'est une querelle interne au parti ».
Au sein du Parti démocrate, les opinions pour et contre le soutien
à l'armée américaine s'affrontent. Nombreux sont les
députés séduits par la nouvelle loi de soutien
portée par le gouvernement et la majorité, tranchant de ce fait
avec les députés sympathisants de l'ancien Parti socialiste qui
est opposé à la nouvelle loi. 88(*)
Mais surtout, la procédure d'adoption de la loi
anti-terroriste devant la Chambre des Représentants a été
marquée par la fronde d'une partie des parlementaires du Parti
libéral démocrate, vingt-cinq d'entre eux
précisément. En effet, certaines grandes figures, Nonaka Hiromu
\u-28210\u-28210-ì'\u12539E \u24195\u24195çL-#177;#177; ou
Koga Makoto \u21476\u21476OE%oê\u12539E \u-30048\u-30048ê½,
tous deux ancien secrétaire général du parti, ont
quitté ostensiblement la Chambre au moment du vote pour protester contre
les directives du parti, ce qu'explique l'Asahi shinbun :
L'opposition de M. Nonaka ne se dirige pas contre le projet de
loi en lui-même, mais contre les modalités du vote. Le
Kômeitô et le Parti conservateur ont demandé à ce que
le vote soit nominatif arguant qu'il s'agissait d'un « projet de loi
essentiel », mais c'est un vote debout qui a été
décidé. M. Nonaka ainsi que la faction Hashimoto demandaient un
vote nominatif. 89(*)
Le Parti libéral démocrate a
considéré que ce n'était pas contraire à la
discipline du parti car ces contestations n'étaient pas dirigées
contre le projet de loi. Pourtant, ces parlementaires ont bien refusé de
voter la loi anti-terroriste pour protester contre la politique contradictoire
de leur parti. Ainsi, bien que certains députés du parti avaient
accepté l'envoi de porte-avions dans l'océan Indien, ils n'ont
pas voté la loi à cause des problèmes liés au droit
de regard de la Diète sur les opérations japonaises,
c'est-à-dire les problèmes liés au contrôle du
militaire par le civil.
Pour le gouvernement et le Premier ministre Koizumi,
l'épreuve était d'autant plus difficile que la moindre erreur
pouvait être retournée contre eux par leurs adversaires
politiques. Pour le Parti libéral démocrate, six mois
après l'entrée en fonction de Koizumi Jun.ichirô au poste
de Premier ministre, cette crise était l'occasion de mettre à
l'épreuve ses compétences à la tête de l'Etat.
C'était également l'occasion d'évaluer les
capacités du gouvernement à gérer une crise d'envergure
internationale, surtout en ce qui concernait la Ministre des Affaires
étrangères, Tanaka Makiko \u30000\u30000«c'\u12539E
\u30495\u30495ê^II\u23376éqq, dont la nomination avait fait couler
beaucoup d'encre.
Comme pour le Parti démocrate, le Parti libéral
démocrate était aussi la proie de querelles internes, non
seulement à propos de la loi spéciale de lutte contre le
terrorisme mais également à propos de la politique de
réformes du Premier ministre Koizumi. C'est ce qu'explique le
journaliste politique Kobayashi Kazuhiro
\u23567\u23567è#172;ÑÑ
\u19968\u19968àê»éé dans un article de la revue
Kankai \u23448\u23448EE :
Le 27 septembre a été convoquée une
session extraordinaire de la Diète et le Premier ministre Koizumi
prononça sa déclaration de politique générale. Les
principaux thèmes en étaient la politique vis-à-vis du
terrorisme et la politique de réformes.
[...]
Au cours du discours du Premier ministre, la coutume veut que
la majorité le ponctue par ses applaudissements, mais lors du discours
du Premier ministre Koizumi il s'est produit un renversement de situation de
telle sorte que les applaudissements d'encouragement de l'opposition
étaient plus nombreux.
[...]
Lors d'une conférence donnée à la fin du
mois de septembre sur les attentats terroristes aux Etats-Unis, le
secrétaire général du Parti libéral
démocrate Nonaka Hiromu s'est clairement prononcé contre la
position du gouvernement qui se dirigeait vers l'envoi des Forces
d'autodéfense.
Nonaka, en tant que personnalité importante de la
faction Hashimoto, se présentait comme le chef de la force
contestataire. Il voulait non seulement déclarer son hostilité
contre la politique anti-terroriste mais aussi contre les réformes de
Koizumi. 90(*)
Tout portait en effet à croire que l'explication,
à propos des modalités du vote, de Nonaka Hiromu pour justifier
son refus de participer au scrutin n'était qu'un prétexte pour
montrer son opposition à la politique du Premier ministre Koizumi sans
aller à l'encontre des indications de la commission sur la discipline du
parti (tôki iinkai
\u20826\u20826«}II\u22996àÏÏ\u21729àõ%oïõï).
De plus, lorsqu'on sait que Nonaka Hiromu est l'une des grandes figures de la
faction Hashimoto (Hashimoto Ryûtarô \u27211\u27211'-{{
\u-24691\u-24691'¾¾\u-28466YY était arrivé
deuxième derrière Koizumi aux élections pour la
présidence du Parti libéral démocrate en avril 2001 ;
Nonaka Hiromu avait été également pressenti pour
être candidat à ces élections), première faction du
parti, rivale de Koizumi Jun.ichirô et de la faction Tanaka qui le
soutient, il apparaît que ses intentions en quittant la Chambre des
Représentants étaient claires.
Malgré tout, la loi spéciale de lutte contre le
terrorisme a été votée à une confortable
majorité et a été promulguée le 2 novembre 2001,
date à laquelle elle a pris effet.
3EME PARTIE
La mise en application de la loi du 2 novembre
2001
|
CHAPITRE 1
|
ENTRE ANTICIPATION ET
JUSTIFICATION LEGALE
C
omme nous l'avons vu plus haut, la loi spéciale de
lutte contre le terrorisme n'a pas été la seule mesure qui ait
été prise à la suite des événements du 11
septembre 2001. Le 29 octobre, la Diète avait ainsi voté un
ensemble de trois projets de loi dont la loi anti-terroriste et une loi de
réforme partielle de la loi relative aux Forces d'autodéfense.
D'autres dispositions ont également été
mises en oeuvre. En effet, si l'urgence a contribué à ce que la
loi spéciale de lutte contre le terrorisme a été
élaborée et adoptée en un temps record, elle a aussi fait
prendre des mesures anticipées, sans attendre le vote par la
Diète. Le gouvernement Koizumi a-t-il pêché par
excès de confiance dans la légitimité de son action ?
Il n'en reste pas moins que les autorités japonaises ont d'abord agi par
anticipation sur une justification légale qui aurait forcément
suivi.
Concrètement, cela s'est traduit par des mesures
« visibles à l'oeil nu » engagées
« sans délai » dès la mi-septembre. La
conduite des mesures japonaises dépassait donc en réalité
largement le seul cadre d'une loi anti-terroriste dont les limites
étaient déjà en germe entre ses propres lignes.
I) Des mesures « visibles à
l'oeil nu » et « sans
délai »
Le gouvernement Koizumi souhaitait donner « sans
délai » un aspect concret « visible à l'oeil
nu » à la politique de contribution du Japon aux mesures
prises en réponse aux attentats du 11 septembre. En d'autres termes, il
fallait que la présence japonaise soit manifeste, ce qui devait passer
par l'envoi des Forces maritimes d'autodéfense, seule initiative
possible avant le vote d'une loi permettant le déploiement des Forces
d'autodéfense au Pakistan. De ce fait, la première mesure
marquante a été l'envoi de trois porte-avions dans l'océan
Indien. Cet aspect concret s'est également manifesté par l'envoi
sur le terrain de matériels et d'équipements dans le cadre d'un
important soutien humanitaire.
A) L'envoi des Forces maritimes
d'autodéfense
L'éditorial de l'Asahi shinbun du 21 septembre
2001 intitulé « Beigun shien no jôken wo
kangaeru »
\u31859\u31859ïÄOERR\u25903éxx\u25588%oÌEèðOEèðèðçlðl\u12427éé
(Réfléchir aux conditions du soutien apporté à
l'armée américaine) écrivait que :
Le Premier ministre Koizumi a pris la responsabilité
politique de donner l'ordre à des unités de la marine
d'appareiller pour l'océan Indien sans attendre le vote de la
Diète.
Une telle décision n'était en effet pas
évidente à prendre étant donné les
difficultés qu'opposait la législation sur les activités
des Forces d'autodéfense. Le Premier ministre Koizumi a cependant
« pris la responsabilité » de montrer la bonne
volonté du Japon à apporter son soutien aux forces
américaines en décidant le 19 septembre d'envoyer
« sans délai », donc sans attendre le vote de la loi
anti-terroriste par la Diète, un bâtiment des forces maritimes
d'autodéfense dans l'océan Indien pour
« escorter » le Kitty Hawk, un porte-avions de la
septième flotte américaine qui a quitté son port de
Yokozuka le 21 septembre. Une telle manoeuvre avait déjà
été réalisée dans le cadre d'exercices, mais
c'était la première fois que le gouvernement japonais autorisait
une telle opération en dehors de ce cadre. La marine comptait aussi
envoyer quatre ou cinq unités en escorte au Kitty Hawk.
Afin de justifier l'envoi de ce bâtiment des Forces
maritimes d'autodéfense, le gouvernement japonais et l'Agence de
Défense se sont fondés sur une interprétation extensive
des dispositions constitutionnelles et de la loi sur les situations de crise en
zones limitrophes qui limitent la participation du Japon à des
opérations militaires. En effet, aux termes des dispositions du
traité de sécurité nippo-américain
révisé en 1999, les nouvelles guidelines, le Japon ne
peut apporter de soutien logistique aux Américains que lorsque le
territoire japonais lui-même ou ses « zones
limitrophes » sont menacés.
Du point de vue de l'Agence de Défense, il s'agissait
également de légitimer cette opération par une
interprétation élargie de la loi portant création de
l'Agence de Défense, comme le souligne le journal Asahi
shinbun :
Dans l'actuelle législation, les Forces maritimes
d'autodéfense ne peuvent pas escorter un porte-avions américain
dans le cadre de manoeuvres. Il s'agit d'une opération de surveillance
qui se fonde sur l'article 5 alinéa 18 de la loi portant création
de l'Agence de Défense et stipulant que cette dernière est
habilitée à mener les enquêtes et études
nécessaires à l'exercice des ses compétences. 91(*)
D'ailleurs, sur la base de cette interprétation et du
vote de la loi spéciale de lutte contre le terrorisme qui est
entrée en vigueur le 2 novembre, deux destroyers des Forces maritimes
d'autodéfense, le Kirisame et le Kurama,
accompagnés du navire ravitailleur Hamana, quittaient le matin
du 9 novembre la base navale de Sasebo dans le département de Nagasaki
pour la base américaine de Diego Garcia dans l'océan Indien. Par
la suite, même si l'envoi du destroyer Isis, qui est
équipé du radar de combat Aegis, a posé problème et
soulevé la désapprobation de l'opposition, et même si
l'opinion publique japonaise restait hostile au déploiement des Forces
maritimes d'autodéfense dans l'océan Indien (en effet, dans le
cadre d'un sondage effectué par l'Asahi shinbun et
publié le 27 novembre, à la question concernant ce sujet, 48 %
des personnes interrogées déclaraient y être
défavorables, contre 44 % d'opinions favorables et 8 % d'abstention),
ces dispositions ont été organisées dans le plan de base
relatif aux mesures d'exécution adopté le 16 novembre et
validées par les parlementaires le 30 novembre dans le cadre de la
procédure d'approbation par la Diète prévue par la loi du
2 novembre 2001.
B) Le soutien humanitaire et financier
Les efforts du Japon se sont également
manifestés par un important soutien humanitaire et financier qui allait
être d'autant plus conséquent que l'aspect militaire de la
contribution japonaise n'allait être réduit qu'à des
opérations de soutien arrière et de logistique. D'ailleurs,
l'aide humanitaire occupait déjà une place importante dans la
politique extérieure du Japon qui en est le premier fournisseur en Asie.
Dès le 19 septembre, le gouvernement japonais a
débloqué 10 millions de dollars pour financer les
activités de recherche et de secours sur le terrain :
Le 19 septembre au soir, Jun.ichirô Koizumi, Premier
ministre du Japon, a informé Howard Baker, Ambassadeur des
États-Unis au Japon, que le gouvernement japonais allait fournir dix
millions de dollars aux fonds appropriés établis aux
États-Unis afin de soutenir les efforts de recherche et de sauvetage en
cours, et lui a transmis l'expression de ses condoléances les plus
sincères pour les pompiers, les policiers, les personnels
médicaux d'urgence et toutes les autres personnes qui moururent en
accomplissant leur devoir alors qu'ils tentaient de sauver des vies humaines
après les attaques terroristes multiples. 92(*)
Cet « esprit humanitaire » des mesures
prises par le Japon, qui les voulait étroitement liées aux
mesures de coopération avec la communauté internationale
organisée autour du Conseil de Sécurité des Nations unies,
a été confirmé et renforcé dans la loi
spéciale de lutte contre le terrorisme comme le souligne la
deuxième section de l'article 1 alinéa 2 :
Les mesures japonaises dans un esprit humanitaire fondé
sur les résolutions pertinentes du Conseil de Sécurité des
Nations unies ou sur des demandes faites par les Nations unies et par d'autres
organisations internationales.
Ainsi, malgré la volonté du gouvernement
japonais de ne pas rééditer les erreurs de la politique du
chéquier comme au moment de la guerre du Golfe, le soutien financier a
occupé une place importante de la politique de contribution du Japon.
Certes, il a été bien moins important du fait de la mauvaise
conjoncture économique que connaît le Japon depuis le début
des années 90. Cette aide s'est néanmoins élevée
à plusieurs millions de dollars, essentiellement destinés aux
réfugiés et à la reconstruction de l'Afghanistan.
L'assistance et l'aide humanitaire japonaises ont été
également tournées vers les pays voisins de l'Afghanistan. Ainsi,
le 21 septembre le Japon a annoncé une aide d'urgence bilatérale
de 4,7 billions de yens pour le Pakistan.
Dès la fin du mois de septembre, les
conséquences humanitaires de l'intervention américaine en
Afghanistan s'annonçaient en effet être très graves :
D'après l'UNHCR, avant les événements
terroristes, le nombre de réfugiés afghans s'élevait
à 50 000 personnes. Si des représailles militaires s'engagent,
les prévisions annoncent une augmentation du nombre de ces
réfugiés de plus de 10 000 personnes. Si la riposte se
concrétise, les réfugiés qui se tourneront vers le
Pakistan où sont centralisés les camps de réfugiés
vont certainement augmenter.
Au Japon, parviennent des demandes de l'UNHCR demandant
notamment de l'eau et des tentes. A moins que le Pakistan ne connaisse des
situations de conflit, il est possible que soit transporté du
matériel par des éléments des Forces d'autodéfense
sur le fondement des requêtes de l'ONU et de la loi de participation aux
opérations de maintien de la paix. 93(*)
D'après le Blue Book de 2002, environ 3,5
millions de réfugiés ont quitté l'Afghanistan, beaucoup
bien avant les attaques terroristes. Deux millions sont partis vers le Pakistan
et 1,5 millions en Iran. Après les attentats, 200 000 autres
réfugiés ont également rejoint le Pakistan. Tandis que les
Nations unis ont débloqué 580 millions de dollars pour leur venir
en aide, le Japon a annoncé le 4 octobre 2001 qu'il fournirait un
maximum de 120 millions de dollars, soit 20 % des fonds de l'ONU. Les fonds
japonais ont ainsi été répartis notamment vers l'UNHCR, le
Programme alimentaire mondial, le Comité international de la Croix
rouge, l'UNICEF et l'Organisation mondiale pour les Migrations. Plus tard, 59,5
millions de dollars supplémentaires ont été
débloqués le 18 janvier 2002.
Par ailleurs, pour répondre aux demandes de l'UNHCR, le
Japon a fourni des tentes, des couvertures et autres produits de
première nécessité transportés au Pakistan le 9
octobre par des avions cargo C-130 des Forces aériennes des Forces
d'autodéfense. L'assistance humanitaire a été
également prise en charge par les ONG japonaises dans le cadre du
programme Japon Platform Force (JPF) soutenu par le gouvernement
japonais à hauteur de 580 millions de yens.
Après le vote de la loi spéciale de lutte contre
le terrorisme, d'autres fournitures de ce genre ont été fournies
par les Forces d'autodéfense dans le cadre des mesures
arrêtées par le plan de base de mise en application du 16 novembre
et ont été transportées jusqu'au Pakistan par les navires
des Forces d'autodéfense le 12 décembre. Au total, les trois
navires dépêchés ont fourni 1 840 tentes de 10 personnes,
18 800 couvertures, 20 000 matelas, 20 000 containers d'eau et 8 000 draps
plastifiés.
II) Les limites de la loi du 2 novembre 2001 :
une loi symbole
Le déploiement des Forces d'autodéfense et
l'ensemble de ces dispositions humanitaires ont été inscrits dans
la loi spéciale de lutte contre le terrorisme du 2 novembre
2001. Pourtant, malgré l'aspect concret que le Premier ministre Koizumi
voulait donner à la contribution japonaise, il apparaît que les
mesures prévues par cette loi anti-terroriste avaient surtout une
portée symbolique. C'était là sa principale limite. Bien
sûr, le déploiement des Forces d'autodéfense ne pouvait
être que fortement limité et réglementé étant
donné les difficultés constitutionnelles et légales
liées à leur existence et leurs activités. La
participation militaire japonaise sur le terrain ne pouvait donc être que
réduite au minimum, dans le strict respect de ces restrictions. Ainsi,
environ 1 200 hommes ont été mobilisés à bord des
navires des Forces maritimes d'autodéfense et 180 hommes à bord
des avions des Forces aériennes d'autodéfense.
De fait, la nature restrictive des dispositions de la loi
spéciale de lutte contre le terrorisme, comme la définition des
zones d'activité, la définition de la mission des Forces
japonaises, ou encore, de façon plus emblématique, la
durée de validité limitée à deux ans, en faisait
fondamentalement une loi symbole. Cette dimension symbolique a d'ailleurs
été confirmée par le plan de base relatif aux mesures
d'exécution adopté le 16 novembre 2001. En définitive,
cette loi symbole ne trouvait sa raison d'être que dans le fait qu'elle
était avant tout une loi à projection diplomatique.
A) Le plan de base relatif aux mesures
d'exécution du 16 novembre 2001 : des « mesures
concrètes » symboliques
L'article 4 de la loi spéciale
de lutte contre le terrorisme projetait, pour définir la mise en
application des mesures prévues, l'élaboration d'un plan de base
qui a été accepté par le gouvernement réuni en
Conseil des ministres le 16 novembre 2001. Ce plan de base décrivait
avec précision le cadre, géographique et temporel, ainsi que le
contenu des activités de coopération et de soutien, des
activités de recherche et d'assistance et des activités de
secours des populations en détresse 94(*). Cependant, lors de la déclaration du
secrétaire général du gouvernement annonçant
l'adoption du plan de base, les opérations de coopération et de
soutien sont passées sous silence et ne sont mentionnées que les
deux autres catégories d'activités. L'exposé du dispositif
intitulé « mesures concrètes » (gutai
tekina sochi
\u20855\u20855ïÌÌ\u30340«II\u12394ÈÈ\u25514[[\u32622'uu)
95(*), et dont voici un
résumé, confirme d'ailleurs cette absence :
1. Assistance aux réfugiés et aux
personnes déplacées
(1) 36,875 millions de dollars (2) rôle important des
ONG japonaises ("Japan Platform".)
2. Vis-à-vis de l'Afghanistan :
réunion le 20 novembre présidée conjointement par le Japon
et les Etats-Unis.
3. Dispositifs pour garantir la sécurité
du peuple japonais
Renforcement et intensification des dispositifs de
contrôle de l'immigration, les mesures pour la sécurité des
transports aériens y compris celles pour empêcher les
détournements d'avions, les mesures contre le terrorisme NBC, la
surveillance des principaux équipements au Japon, le contrôle
douanier, et enfin les mesures pour garantir la sécurité des
transports maritimes.
4. Coopération internationale pour lutter
contre le terrorisme
(1) Renforcement des mesures pour lutter contre le financement
du terrorisme, conclusion de la Convention Internationale pour la
Répression du Financement du Terrorisme,
(2) Accord rapide sur la convention générale sur
le terrorisme international et sur la convention pour la répression des
actes de terrorisme nucléaire en cours de discussion aux Nations Unies.
5. Assistance supplémentaire au Pakistan
(1) Assistance financière : don de 300 millions de
dollars
(2) Aide à la dette : rééchelonnement de
la dette au sein du Club de Paris et d'autres instances.
(3) Soutien par l'intermédiaire des organismes
financiers internationaux : FMI, la Banque Mondiale et la Banque Asiatique de
Développement. Financement approprié de la Facilitation pour la
Réduction de la Pauvreté et de la Croissance (FRPC) de l'IMF.
6. Efforts diplomatiques pour renforcer la
solidarité internationale : prochain séminaire
d'intellectuels.
Ces « mesures concrètes » ne
représentent pas l'intégralité du plan de base mais ce
sont elles que le gouvernement a choisi de mettre en avant dans sa
déclaration. La raison en est peut-être que la description des
activités de coopération et de soutien dans le plan de base est
très technique et qu'elle est donc moins parlante pour l'opinion
publique que celle des autres activités, surtout celles qui sont de
nature humanitaire.
En effet, le dispositif de « mesures
concrètes » mettait l'accent sur les efforts humanitaires et
financiers dont le Japon allait faire bénéficier l'Afghanistan et
le Pakistan (points numéro 1, 2 et 5) en annonçant très
clairement le montant des aides allouées, leur nature et leurs
destinataires institutionnels. Concernant la lutte contre le terrorisme, la
question est bien mentionnée, aux points numéro 3 et 4, mais rien
de vraiment concret ni nouveau n'est annoncé. En fait, les
« dispositifs pour garantir la sécurité du peuple
japonais » n'étaient qu'un rappel du plan de mesures d'urgence
annoncé par le Premier ministre le 8 octobre. Quant aux dispositions
relatives à la « coopération internationale pour lutter
contre le terrorisme », il est seulement annoncé la conclusion
de plusieurs accords internationaux, sans que l'on sache réellement
quelles en seront les concrétisations.
Ces « mesures concrètes » avaient
surtout une portée symbolique. Le montant de l'aide humanitaire et
financière annoncée pouvait paraître important, mais il ne
l'était pas tant que cela si on le compare avec par exemple le montant
de l'Aide Publique au Développement que fournit le Japon (en 1993, il
occupait le premier rang, devant les Etats-Unis, avec 11,2 milliards de dollars
soit 20,1 % de l'aide mondiale totale). En outre, l'annonce d'un prochain
séminaire d'intellectuels pour marquer les « efforts
diplomatiques pour renforcer la solidarité internationale » ne
pouvait apparaître qu'accessoire par rapport l'ampleur de la tâche.
En définitive, il semble que ces mesures devaient avant tout donner le
change vis-à-vis d'une opinion publique encore majoritairement hostile
au déploiement à l'étranger des Forces
d'autodéfense.
B) Une loi à projection
diplomatique
Malgré la « faiblesse » des
dispositions du plan fondamental concernant les « efforts
diplomatiques », la loi spéciale de lutte contre le terrorisme
était fondamentalement une loi à projection diplomatique dont la
collaboration symbolique des Forces d'autodéfense était le pilier
principal. Cette dimension diplomatique, comme nous l'avons déjà
vu plus haut, illustrait la volonté du Japon d'« éviter
l'isolement diplomatique » vis-à-vis de la communauté
internationale. D'ailleurs, de ce fait, peu importait que la contribution
japonaise soit restreinte du moment qu'il y avait bien une contribution
japonaise. Autrement dit, l'honneur était sauf sur un plan diplomatique,
même si les détracteurs du Japon peuvent toujours le critiquer
pour ne pas avoir fait davantage.
Il est en outre intéressant de constater que les
rédacteurs du projet de loi ont insisté à plusieurs
reprises sur le fait que les Forces d'autodéfense n'étaient pas
les seules structures à être mobilisées. Dès le
début de la description des principes fondamentaux visés par
l'article 2, c'est le « gouvernement japonais » qui est mis
en avant et non pas les Forces d'autodéfense. Par la suite,
ces-dernières ne sont jamais mentionnées seules mais
associées à l'ensemble des « agences gouvernementales
concernées ». Le gouvernement japonais souhaitait ainsi
montrer qu'il ne s'agissait pas uniquement d'un projet de loi à
visée militaire mais politique et diplomatique.
Cette dimension diplomatique limitait pourtant la
portée de la loi car elle contribuait à renforcer son
caractère symbolique. En effet, en élaborant et faisant voter
cette loi spéciale de lutte contre le terrorisme, le gouvernement
japonais prétendait contribuer activement à la lutte contre le
terrorisme international. Or, il apparaît très vite que les
dispositions, en particulier humanitaires et financières, visaient des
objectifs très éloignés de la lutte anti-terroriste. En
fait, sans l'avouer, le Japon a probablement cherché à compenser
la faiblesse de la participation des Forces d'autodéfense par un soutien
financier important. En outre, le fait que cette aide ait été
distribuée non seulement à l'Afghanistan (sous forme d'aide
à la reconstruction notamment), mais aussi au Pakistan et à
l'Inde, montre que le Japon avait une politique qui dépassait la seule
coopération aux mesures de représailles américaines en
Afghanistan.
POURQUOI ADOPTER UNE NOUVELLE LOI ?
P
ourquoi adopter une nouvelle loi ? La législation
relative au déploiement des Forces d'autodéfense était
trop restrictive et ne s'appliquait qu'au cas d'espèce : les PKO,
les situations de crise en zones périphériques, les menaces
dirigées contre le Japon. Or, le cas des représailles en
réponse aux attentats du 11 septembre ne cadre avec aucune de ces
législations. Il ne s'agit en effet ni une opération de maintien
de la paix dirigée sous l'égide de l'ONU, ni d'une situation de
crise en zone périphérique, ni d'une opération
d'autodéfense contre une agression du territoire national. Cette
impossibilité d'avoir recours à la législation
déjà existante a conduit le Premier ministre Koizumi et son
gouvernement à envisager l'adoption d'une nouvelle loi.
I) Les événements du 11 septembre :
une fenêtre d'opportunité
Quel était donc l'intérêt du Japon
à collaborer à une opération de contre-offensive
décidée unilatéralement par les Etats-Unis et dont le
théâtre se situait en Afghanistan et dans les régions
environnantes (Pakistan, Arabie Saoudite et océan Indien
essentiellement) ? C'est que les événements offraient au
gouvernement japonais une fenêtre d'opportunité qui pouvait se
révéler très profitable. La force du Premier ministre
Koizumi a ainsi été d'avoir su saisir cette opportunité
pour étoffer un peu plus la législation en matière de
défense.
A) La force du Premier ministre Koizumi : saisir
l'opportunité ...
La personnalité du Premier ministre a
été déterminante dans la gestion de cette crise des
événements du 11 septembre. Koizumi Jun.ichirô a
été populaire avant même d'être élu. Son
profil et son parcours atypiques en font un chef de gouvernement majeur,
à l'instar d'un Nakasone pour la politique étrangère ou
d'un Suzuki pour la volonté de réforme et les
événements du 11 septembre ont été pour lui
l'occasion de montrer ses compétences d'homme d'Etat
En tant que pays allié lié par un pacte de
sécurité aux Etats-Unis, le Japon pouvait craindre d'être
la cible de prochains attentats. Selon certains observateurs, il était
fort peu probable que les terroristes s'en prennent de nouveau aux Etats-Unis,
d'autant que désormais les mesures de sécurité et de
surveillance étaient maximales. Il était par contre plus probable
qu'ils s'attaquent aux postes avancés et aux bases américaines
établies dans les pays alliés, comme le Japon qui possède
le plus large contingent américain d'outre-mer (48 000 hommes et femmes)
dont 75 % est basé à Okinawa, soit 25 000 soldats. Depuis le 11
septembre, ces-derniers étaient en état d'alerte pour
répondre à d'éventuels nouveaux attentats. L'Agence de
Défense déclarait d'ailleurs que :
Les pays alliés des Etats-Unis, dont le Japon fait
partie, et qui ont exprimé leur soutien aux opérations de
l'armée américaine après les attaques terroristes
dirigées contre les Etats-Unis, sont exposés à la menace
de représailles terroristes. 96(*)
Dans l'atmosphère d'urgence et de crise qui
régnait alors, la prudence était de rigueur et soutenir les
Américains c'était aussi s'assurer de la protection
américaine. Pourtant, tout cela ne restait que spéculatif et il
apparaît clairement que, sous couvert de prudence, le gouvernement
Koizumi a su profiter de la situation pour s'engouffrer dans une certaine
fenêtre d'opportunité pour faire évoluer la politique de
défense du Japon. L'intention principale du Premier ministre Koizumi
était en effet sans équivoque :
[Je vais] profiter de l'occasion pour pouvoir
régler le problème resté en suspens de la
contribution internationale du Japon. 97(*)
Ce regain de tension au niveau mondial offrait donc au Japon
l'opportunité d'avancer ses pions sur l'échiquier international
et faire la démonstration de ses nouvelles capacités en
matière de défense acquises notamment depuis la guerre du Golfe.
Ces événements terroristes offraient en outre
l'opportunité au Premier ministre Koizumi de faire accepter par
l'opinion publique japonaise, traditionnellement pacifiste, de nouvelles
avancées en matière de politique de défense et de
sécurité. En effet, le fort sentiment de consensus pour lutter
contre le terrorisme ne pouvait qu'endormir les réticences pacifistes
(d'autant plus que les Japonais se sentaient menacés par
d'éventuels attentats terroristes98(*)) et donc permettre de soumettre plus aisément
l'idée de déployer les Forces d'autodéfense à
l'étranger.
B) ... d'étoffer la législation en
matière de défense : la politique des « petits
pas » 99(*)
Les événements du 11 septembre offraient donc
l'opportunité au gouvernement Koizumi de consolider la place du Japon
sur la scène internationale et de prouver qu'il pouvait prétendre
au rang de grande puissance mondiale. Pour y parvenir, le Japon doit se doter
des capacités de puissance nécessaires et, en l'occurrence, seule
une politique autonome de défense lui fait défaut. Même si
depuis la guerre du Golfe les activités des Forces d'autodéfense
et leurs champs d'application se sont progressivement élargis en dehors
de la seule coopération militaire avec les Etats-Unis, il reste encore
beaucoup à faire pour construire une politique de défense globale
et autonome. Or, les événements du 11 septembre ouvraient une
formidable fenêtre d'opportunité pour que le Japon progresse
encore dans ce sens. Non seulement il allait pouvoir montrer au monde entier et
en particulier aux Etats-Unis qu'il était capable de s'investir
efficacement dans un conflit d'envergure international, mais également,
en prenant part activement à la lutte contre le terrorisme
international, il allait prouver à la communauté internationale
qu'il était capable d'être le garant de la sécurité
et des valeurs de cette communauté internationale.
Il s'agissait donc bien pour le gouvernement japonais
d'étoffer encore un peu plus sa législation en matière de
défense. Cette « politique des petits pas » ne
pouvait en effet être que le seul moyen de procéder sans risquer
de se heurter de plein fouet aux obstacles que représentent les
dispositions de l'article 9 de la Constitution et une opinion publique
traditionnellement pacifiste. Les pays voisins, tels que la Chine ou les deux
Corée, pouvaient en outre s'effrayer d'un Japon complètement
remilitarisé et agiter le spectre du militarisme. Les Etats-Unis
pouvaient aussi prétendre avoir leur mot à dire dans
l'éventualité d'une revendication ouverte du Japon à une
politique de défense totalement indépendante, mais ce serait
négliger le rééquilibrage qui s'est produit au sein de ce
partenariat depuis la fin de la guerre froide. Toutefois, ce serait
placé l'épicentre du problème au mauvais endroit : il
ne s'agit en définitive pas d'un problème de politique
extérieure mais intérieure. Si le Japon parvenait à
réviser la Constitution afin de supprimer ses dispositions pacifistes
contraignantes, le chemin vers l'indépendance de sa politique de
défense lui serait grand ouvert. Et cela quoique puissent en dire les
Etats-Unis car le véritable débat doit avoir lieu au niveau
national et non bilatéral.
Pour l'instant, la situation de la politique de défense
du Japon est loin d'en être à ce stade et c'est une progression
pas à pas qui prévaut. Ainsi, depuis leur création en
1954, lentement mais sûrement, les Forces d'autodéfense japonaises
ont vu leurs champs d'action s'étendre. Le système de
sécurité du Japon a suivi les évolutions de la
stratégie américaine, mais, depuis la guerre du Golfe, le Japon
n'est plus un allié passif mais un partenaire stratégique des
Etats-Unis et aspire parallèlement à plus d'autonomie, comme
l'illustre le développement des activités des Forces
d'autodéfense dans le cadre de la loi PKO votée en juin 1992, ou
encore dans le domaine de la lutte contre le terrorisme. C'est dans cette
même logique de progression pas à pas que le Premier ministre
Koizumi, à l'occasion de la politique de contribution japonaise
vis-à-vis des attentats du 11 septembre, a étoffé de
façon significative la politique de défense et de
sécurité du Japon, notamment en faisant voter la loi
spéciale de lutte contre le terrorisme.
II) Les apports de la loi
anti-terroriste
Les apports de la loi spéciale de lutte contre le
terrorisme sont en effet d'une grande importance, non seulement d'un point de
vue qualitatif mais également d'un point de vue quantitatif. Nous avons
vu plus haut que la nature symbolique de cette loi en limitait la
portée, mais il n'en reste pas moins que les dispositions qu'elle met en
oeuvre sont d'une grande portée du fait de leur caractère
inédit. Pour la première fois, les Forces d'autodéfense
seront dépêchées à l'étranger et pourront
fournir une assistance aux Etats-Unis en dehors de du territoire japonais.
D'ailleurs, le fait que ces dispositions aient fait l'objet d'une loi
adoptée par la Diète en fait un précédent sur
lequel il sera difficile de revenir.
Cette avancée, par ailleurs, est d'autant plus grande
qu'elle combine plusieurs progrès bien spécifiques. Tout d'abord,
la loi du 2 novembre 2001 élargit le champ géographique d'action
des Forces d'autodéfense. Elle permet ensuite d'étendre le cadre
et les moyens d'intervention des Forces d'autodéfense. Enfin, elle ouvre
une nouvelle brèche dans l'interprétation de la Constitution
vis-à-vis du débat sur le droit à l'autodéfense
collective.
A) L'extension du champ géographique
d'action des Forces d'autodéfense
L'extension du champ géographique d'action des Forces
d'autodéfense est la première avancée importante
qu'apporte la loi spéciale de lutte contre le terrorisme comme
l'explique Mizushima Asaho \u27700\u27700ê...«\u12539E
\u26397\u26397'(c)ïää, professeur à l'Université
de Waseda :
Or, quels sont les apports de la loi spéciale de lutte
contre le terrorisme ? En premier lieu, le champ géographique du
soutien et de la coopération des opérations de combat de
l'armée américaine a été considérablement
élargi. Cette loi étend les zones d'application des
activités de soutien et de coopération avec l'armée
américaine au (1) territoire japonais, (2) aux zones de haute mer et
l'espace aérien, (3) et aux territoires étrangers (article 2,
alinéa 3). Les points (2) et (3) nécessitent qu'il soit manifeste
que des actes de combat ne se déroulent ni présentement, ni
pendant l'exécution des opérations. Reste le gros problème
de la définition par le gouvernement de Tôkyô de ce
critère. Or, il est clairement écrit pour la première fois
que les opérations de soutien à l'armée américaine
se dérouleront aussi sur le « territoire de pays
étrangers » (sous la condition de l'assentiment des pays
concernés). Cela ne nécessite ni le parapluie onusien comme dans
la loi PKO, ni la notion de « zones
périphériques » comme dans la loi sur les situations de
crise en zones périphériques. 100(*)
En effet, pour la première fois des soldats japonais
seront envoyés dans des pays étrangers dans un autre cadre que
ceux prévus par la loi de participation aux opérations de
maintien de la paix de l'ONU. Cet élargissement géographique du
déploiement des Forces d'autodéfense constitue une avancée
considérable, même s'il est sous à conditions. Ces
conditions, qui sont au nombre de deux, concernent le niveau de risque de
combat armé et le consentement des pays concernés.
Au sujet de la seconde condition d'une part, si elle est
nécessaire, il semble qu'elle ne soit pas très difficile à
satisfaire. Il est évident en effet que les Forces japonaises seront
envoyées dans des pays qui sont déjà alliés des
Etats-Unis ou qui auront déjà accepté la présence
de l'armée américaine. Le Japon étant un allié des
Etats-Unis, il est logique que ces pays accepteront également la
présence de ses soldats.
Concernant le niveau de risque de combat armé d'autre
part, Mizushima Asaho fait remarquer le flou de la définition de ce
critère (« zones non combattantes »,
c'est-à-dire où ne se déroulent pas des combats ni
présentement, ni pendant l'exécution des opérations), le
caractère imprévisible du terrorisme impliquant qu'un niveau de
risque nul peut difficilement être garanti. Même si la
présence japonaise est cantonnée à l'océan Indien
et au Pakistan, la proximité avec l'Afghanistan où se
déroule la campagne militaire implique obligatoirement que le niveau de
risque n'est pas nul.
Ceci étant dit, le principal n'était-il pas en
réalité de faire mettre aux Forces d'autodéfense
japonaises un pied à l'étranger pour soutenir l'armée
américaine, quelles que soient les difficultés de leurs
conditions de déploiement ? En effet, peu importait finalement
pourquoi, en quel nombre et pour combien de temps elles seraient là-bas,
pourvu qu'elles y étaient et pourvu qu'un texte de loi l'approuve. En
fait, cette définition des « zones non
combattantes » est la même employée dans la loi sur les
situations de crise en zones périphériques pour expliquer la
notion de « zones arrière ». Cela implique, sans que
ce soit explicite dans le texte, un considérable élargissement de
cette notion au « territoire de pays étrangers ». En
définitive, c'est cette avancée implicite qui est la plus
remarquable qu'apporte la nouvelle loi.
B) L'extension du cadre et des moyens
d'intervention des Forces d'autodéfense
La loi spéciale de lutte contre le terrorisme permet
par ailleurs d'étendre le cadre et les moyens d'intervention des Forces
d'autodéfense. Cette avancée comporte trois aspects : les
critères définissant les opérations des Forces
d'autodéfense, la définition d'une nouvelle mission, la lutte
contre le terrorisme international, et les critères d'utilisation des
armes.
Au sujet des critères définissant les
opérations des Forces d'autodéfense, il est important de
souligner qu'à aucun moment le texte de la loi du 2 novembre 2001
n'utilise l'expression « soutien arrière » pour
décrire les opérations de soutien à l'armée
américaine, mais n'emploie que les termes de
« soutien », « assistance »,
« logistique », ou encore
« ravitaillement ». C'est ce que remarque Mizushima Asaho
en comparant la loi du 11 novembre 2001 avec celle relative aux situations de
crise en zones périphériques :
La loi sur les situations de crise en zones
périphériques, qui prévoyait des activités de
soutien à l'armée américaine dans les « zones
périphériques du Japon », définissait les
« zones arrière » comme étant les
« zones où ne se déroulent pas des actions de
combat », ainsi que les « zones où ne sont pas
prévues des actions de combat pendant la mise en oeuvre des
opérations de soutien» et expliquait par le concept de
« soutien en zones arrière » le soutien
arrière intervenant des ces zones. Ce concept de « soutien en
zones arrière » n'est pas utilisé dans la loi
spéciale de lutte contre le terrorisme. On trouve aussi dans la loi
anti-terroriste la référence à des
« activités d'assistance et de recherche » qui est
une simplification de l'expression « activités d'assistance et
de recherche en zones arrières » de la loi sur les situations
de crise en zones périphériques. D'un point de vue lexical,
nombreux sont les passages qui semblent reformuler des expressions de la loi de
participation aux PKO ou de la loi sur les situations de crise en zones
périphériques mais il faut souligner que leurs significations
diffèrent sensiblement. A l'origine, l'expression « soutien
arrière » ne désigne pas un soutien par des troupes de
renfort physiquement à distance. Les capacités de ravitaillement
sont réglementées selon trois éléments qui sont la
quantité, la qualité et la rapidité du ravitaillement.
101(*)
L'absence de l'expression « soutien en zones
arrière » et les différences de définition des
opérations dans le cadre de la nouvelle loi avec celle des lois
antérieures sont précisément la marque de la
volonté des autorités japonaises d'élargir les domaines
d'intervention des Forces d'autodéfense. Même si la loi du 2
novembre 2001 met en place un dispositif qui ressemble beaucoup à du
« soutien en zones arrière », le fait de ne pas
reprendre cette expression permet d'échapper à son
caractère restrictif. Ainsi, les activités des Forces japonaises
sont qualifiées d'« activités de soutien »
comportant de multiples des activités d'assistance, de logistique et de
ravitaillement. La nuance est faible mais elle est importante car elle implique
que le Japon est un véritable partenaire des Etats-Unis et non plus un
simple appui militaire.
L'élargissement du domaine d'intervention des Forces
japonaises se manifeste également par la définition d'une
nouvelle mission qui est la lutte contre le terrorisme international. Cette
mission était bien sûr déjà inscrite dans les
nouvelles guidelines mais c'est la première fois qu'elle se
concrétise par un ensemble de dispositions spécifiques. Ceci dit,
la nouvelle loi ne contient pas de mesures particulières, qu'il faut
surtout aller chercher dans le plan de base relatif aux mesures
d'exécution du 16 novembre 2001. Toutefois, la définition de
cette nouvelle mission permet non seulement d'allonger la liste des
activités des Forces d'autodéfense, mais aussi d'éviter la
référence aux opérations en temps de crise de la loi sur
les situations de crise en zones périphériques.
Enfin, les moyens d'intervention des Forces
d'autodéfense sont également élargis par l'assouplissement
des critères d'utilisation des armes. Dans le cadre de la loi
spéciale de lutte contre le terrorisme, les Forces japonaises pourront
faire usage de leurs armes pour assurer la protection des « personnes
placées sous leur contrôle », ce qui implique un
très grand nombre de personnes, notamment les réfugiés
abrités dans les camps ou les personnes dans les hôpitaux.
Malgré les fortes restrictions conditionnant l'emploi des armes,
l'élargissement considérable de cette notion de
« personnes placées sous leur contrôle » a
été très critiqué car il est évident que
plus le nombre de personnes à protéger est grand, plus le risque
de contrevenir aux règles d'utilisation des armes est grand.
C) Une nouvelle brèche dans
l'interprétation de la Constitution : le débat sur le droit
à l'autodéfense collective
Nous avons vu plus haut que le Premier ministre Koizumi a
utilisé une nouvelle interprétation de la Constitution, celle du
« vide juridique », selon laquelle il existerait une
« ambiguïté » entre le préambule de la
Constitution et l'article 9, pour justifier plusieurs dispositions de la loi
anti-terroriste, mais aussi pour expliquer que cela permettait d'envisager le
recours au droit à l'autodéfense collective. Beaucoup d'hommes
politiques avaient d'ailleurs profité des débats sur la nouvelle
loi pour relancer la polémique sur l'interprétation de la
Constitution. La polémique touchait aussi le Parti libéral
démocrate qui a entamé dès la mi-septembre un débat
sur la question :
Yamazaki, secrétaire général du Parti
libéral démocrate, a déclaré le 14 [...] que
« certains reconnaissent le droit à l'autodéfense
collective sans modifier la Constitution mais la Constitution ne peut
être modifiée par interprétation. On doit ouvertement
réviser la Constitution ». 102(*)
La loi spéciale de lutte contre le terrorisme
permettait en effet d'ouvrir une nouvelle brèche dans
l'interprétation de la Constitution vis-à-vis du débat sur
le droit à l'autodéfense collective. Mizushima Asaho remarque
d'ailleurs que la nouvelle loi y fait implicitement
référence :
Dans la première moitié [de la loi
spéciale de lutte contre le terrorisme], il est mentionné
l'expression « les activités des divers pays étrangers
pour accomplir les objectifs de la Charte des Nations Unies », ce qui
implique aussi les activités se fondant sur l'article 51 de la Charte
relatif au droit à l'autodéfense individuelle et collective.
103(*)
Cependant, pour Okamoto Yukio, critique diplomatique et
responsable des questions de sécurité au Ministère des
Affaires étrangères, les opérations qui ne font pas appel
à l'« usage de la force militaire » ne sont pas une
application du droit à l'autodéfense collective :
[...] Il y a le problème de l'interprétation de
la disposition constitutionnelle stipulant que « le Japon
possède le droit à la défense collective mais au regard de
la Constitution il ne peut pas en faire l'usage ». Quelque difficile
qu'il soit de la changer, il existe une large gamme d'interprétations
pour établir si une action tombe sous le coup de l'utilisation du droit
à la défense collective. L'interprétation de l'actuel
corps législatif est extrêmement stricte. Le soutien
arrière, qui ne fait pas appel à « l'usage de la force
militaire », comme le transport de matériels ou la
coopération en matière de soins médicaux, n'est pas une
utilisation du droit à la défense collective. Ce n'est pas un
problème constitutionnel. 104(*)
Tout dépendrait donc de la nature des opérations
pour lesquelles les Forces d'autodéfense sont déployées.
Or, la politique de contribution du Japon aux mesures américaines
reconnaît implicitement la légitimité d'une action
militaire de représailles, ce qui n'entre pas dans le cadre de la
définition de l'autodéfense. Autrement dit, tant que les
opérations ne relèvent pas de l'autodéfense, les Forces
japonaises peuvent intervenir quel que soit le nombre de pays engagés.
Cela implique aussi qu'elles pourront agir alors que le Japon est en temps de
paix. Cette interprétation répondait notamment aux critiques de
certains détracteurs de la politique du Premier ministre Koizumi qui
accusait la nouvelle loi de mettre en place un dispositif imitant
l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord. Elle permettait
également de donner le change aux Américains qui avaient
sévèrement critiqué le Japon pour son refus de la
légitime défense collective à l'occasion de la publication
du rapport Armitage-Nye 105(*) en octobre 2000. Quoi qu'il en soit, cette nouvelle
brèche dans l'interprétation de la Constitution a
été entérinée par le vote de la Diète de la
loi spéciale de lutte contre le terrorisme.
E
n définitive, quelle est la part d'opportunisme dans
la manière qu'a eu le Premier ministre Koizumi Jun.ichirô de
gérer la « crise » du 11 septembre ? Il est
évident que les événements offraient au Japon de
nombreuses opportunités. En premier lieu, ils offraient
l'opportunité de se délivrer de ce
« syndrome » de la guerre du Golfe et de montrer aux
Etats-Unis et à l'ensemble de la communauté internationale que le
Japon en était un membre à part entière. La situation
offrait également l'opportunité de faire progresser la
législation en matière de défense. Le Premier ministre
Koizumi a saisi toutes ses opportunités et a fait tout ce qui
était possible pour que le Japon participe aux opérations, mais
était-ce vraiment le seul choix possible ? Toujours est-il que
l'occasion était trop belle pour la laisser passer.
Le constat d'échec d'une application de la
législation déjà en vigueur peut en effet apparaître
davantage comme un prétexte qu'une véritable justification. Le
Japon, par sa position aux Nations unies, aurait très bien pu soumettre
l'idée d'une résolution sur le principe d'une intervention de
maintien de la paix et à caractère humanitaire au Pakistan. Ce
pays s'était désolidarisé du régime des Talibans
mais sa position limitrophe avec l'Afghanistan pouvait justifier une
présence des casques bleus pour sécuriser la zone. Les Forces
japonaises auraient pu intervenir dans un tel contexte. En outre, cela serait
allé dans le sens de la fameuse volonté du gouvernement japonais
et du Ministère des Affaires étrangères d'une plus forte
implication et collaboration avec la communauté internationale. Cela
aurait également servi ses ambitions concernant sa position au sein de
l'Organisation des Nations unies.
Pourtant, le Premier ministre Koizumi a choisi de suivre son
allié américain. Il a choisi non seulement de le suivre, mais
surtout de tout mettre en oeuvre, quitte à être aux marges de
légalité, pour répondre à ses attentes. La question
qui se pose alors est de savoir si c'était par pur loyalisme envers le
traditionnel allié ou si c'était pour servir d'autres desseins.
Un élément de réponse est révélé par
l'étude de l'évolution de la politique de sécurité
et de défense du Japon. Il s'avère en effet que l'une des grandes
ambitions du Japon en la matière est d'acquérir davantage
d'autonomie vis-à-vis des Etats-Unis, ou du moins une plus grande marge
de manoeuvre. Les progrès réalisés dans la gestion des
Forces d'autodéfense japonaises en sont emblématiques.
Aujourd'hui il ne serait d'ailleurs pas exagéré de dire qu'il ne
manque à cette armée que le titre officiel
d'« armée ».
Quoi qu'il en soit, les enjeux étaient tels que le
gouvernement japonais ne pouvait se payer le luxe d'être taxer de
pleutre, une seconde fois, par toute la communauté internationale. La
réaction des autorités japonaises en a été d'autant
plus rapide, ce qui était inhabituel. Dès le lendemain des
attentats du 11 septembre, le gouvernement Koizumi a annoncé qu'il
soutiendrait les initiatives de Washington. Et un peu plus d'un mois
après, le Japon s'est doté des dispositions légales lui
permettant de rompre avec son traditionnel refus d'apporter un soutien à
une opération militaire en vertu de l'article 9 de la Constitution. La
loi spéciale de lutte contre le terrorisme a ainsi été
votée. D'ailleurs, le titre relativement ronflant de cette nouvelle loi
est symptomatique de son caractère opportuniste. En effet, on peut se
demander où se situe la frontière entre coopération avec
les Etats-Unis et la communauté internationale et défense du
territoire national dans la mesure où la menace terroriste est à
la fois si diffuse, si éloignée et si localisée, en
Afghanistan. Il peut apparaître que cette précision ne soit que de
pure forme car l'essentiel reste bien de soutenir l'effort de guerre
américain et de contribuer aux efforts de la communauté
internationale pour lutter contre le terrorisme, même si la lutte contre
le terrorisme n'est pas l'objectif essentiel de cette loi malgré son
titre pourtant sans équivoque, tout cela dans le but de justifier la
légitimité d'un déploiement des Forces
d'autodéfense à l'étranger.
Puis, très vite, les progrès de la politique de
défense et de sécurité se sont succédés au
rythme des soubresauts de la situation internationale. Les multiples
avancées permises par la loi spéciale de lutte contre le
terrorisme ont déjà sans conteste fait progresser la
législation relative aux Forces d'autodéfense. Certains
commentateurs ont même qualifié d'historique le vote de la loi du
2 novembre 2001. Cette nouvelle loi constituait en effet un
précédent essentiel. Une série de lois a suivi pour
répondre au contexte international, toujours tendu, et contribuant par
la même occasion à élargir davantage la législation
en matière de défense et de participation militaire. La loi
spéciale de lutte contre le terrorisme a d'ailleurs été
prorogée afin de faire face aux mêmes nécessités.
Elle a été une première fois prolongée de six mois
le 19 novembre 2002, c'est-à-dire jusqu'au 19 mai 2003. Mais le 13 juin
2003, le gouvernement a décidé de la proroger de deux ans
à compter du 2 novembre 2003, date anniversaire de sa promulgation, afin
de permettre aux Forces d'autodéfense de poursuivre leur mission.
La volonté du Japon d'élargir sa politique de
défense et de sécurité a été constante,
surtout depuis la fin de la guerre froide. Elle s'est manifestée par le
développement continu des moyens matériels dont disposent les
Forces d'autodéfense, en capacités de détection et de
projection (satellite d'observation, transports aérien et naval
lourds, ravitaillement en vol) pour aller au-delà de la
défense du territoire national, seule mission légitime
indiscutable au regard de l'article 9.
Cette volonté s'est aussi concrétisée par
l'adoption d'un arsenal législatif que les suites des attentats du 11
septembre 2001 ont permis d'étoffer non seulement par le vote le 29
octobre 2001 de la loi anti-terroriste, mais aussi par l'adoption le jour
même d'un projet de réforme partielle de la loi sur les Forces
d'autodéfense pour permettre aux Forces d'autodéfense d'assurer
la protection et la surveillance des bases américaines même en
temps de paix. Le 7 décembre 2001 une révision de la loi PKO a
été également votée levant le gel de la
participation à des opérations risquées. Les Forces
d'autodéfense peuvent désormais participer à toutes les
activités des opérations de maintien de la paix et utiliser leurs
armes pour se protéger ou protéger les autres contingents des
Nations unies.
Ces événements de la fin 2001 ont permis
d'accélérer le débat relatif à la
législation sur les situations d'urgence et de faire aboutir les efforts
qui avaient débuté en 1977 sous l'égide du Premier
ministre Fukuda pour doter le Japon d'une législation dans ce domaine.
Ainsi, la loi sur les situations d'urgence a été votée par
la Diète le 15 mai 2003 et complétée par un dispositif,
voté le 6 juin 2003, de trois lois d'urgence dont la loi
révisée sur les Forces de défenses qui avait pour but de
faciliter, en cas d'urgence, les activités des Forces
d'autodéfense en créant des dispositifs spéciaux
concernant une vingtaine de lois, notamment en matière de transports et
de mouvements de troupes. Ces dispositions ont été
adoptées à une écrasante majorité, plus de 90 % des
voix à la Chambre des Représentants, que ce soit pour la loi du
15 mai que celles du 6 juin, ce qui marque un tournant dans l'histoire
politique du Japon. En effet, même si les questions de défense
sont un motif de débat au sein de la classe politique japonaise, la
preuve est faite qu'elles ne sont plus un clivage politique.
Peu après, alors que les événements en
Irak étaient marqués par le début de l'occupation
américaine, le Japon s'est doté d'une loi de participation le 26
juillet 2003 adoptée dans une atmosphère particulièrement
houleuse. Cette loi spéciale pour soutenir la reconstruction de l'Irak
rendait possible l'envoi dans ce pays des Forces d'autodéfense qui
devaient accomplir des activités d'assistance humanitaire, en
distribuant des produits de première nécessité aux
populations affectées, ainsi que des activités d'assistance pour
garantir la sécurité en aidant l'armée américaine
à maintenir l'ordre public. C'est la première fois que les Forces
japonaises seront envoyées dans un pays occupé. Plus de mille
soldats ont été déployés, ce qui est un acte sans
précédent et en fait la plus importante opération
japonaise jamais menée à l'étranger. Cette nouvelle loi se
fondait sur les résolutions du Conseil de Sécurité de
l'ONU relatives à l'intervention en Irak et permettait l'intervention
des Forces de défense hors des zones de combat et l'usage des armes
selon les critères déjà existant. Cette loi est
limitée dans le temps, puisqu'elle ne durera que quatre ans, et stipule
que l'approbation du Parlement doit être obtenue dans les vingt jours qui
suivent l'envoi de troupes.
Ces dispositions ne sont pas sans rappeler celles de la loi
spéciale de lutte contre le terrorisme, comme si cette-dernière
avait servi de modèle pour élaborer cette loi spéciale de
soutien à la reconstruction de l'Irak, ce qui confirme le
caractère inaugural de la loi du 2 novembre 2001. Il est envisageable en
effet que dès qu'un foyer de tension éclatera et si le Japon est
amené à participer aux mesures pour y remédier, il le fera
en faisant voter ce même genre de loi spéciale fixant un objectif
de mission bien précis et limité dans le temps.
Encore une fois, comme dans bien d'autres domaines, le Japon
fait preuve d'une originalité toute particulière. Au lieu de
faire en sorte de se doter officiellement d'une armée, il choisit de
ménager le pacifisme de sa Constitution et d'aménager par
interprétations extensives successives une législation en
matière de défense et de sécurité de plus en plus
étoffée. Et c'est peut-être là la force du Japon qui
invente ainsi un autre genre d'instrument de puissance, un instrument pacifique
de puissance.
Références en langue française
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Japon :
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Armand Colin, 1992, 191 p.
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terrorisme :
CETTINA Nathalie, Les enjeux organisationnels de la lutte
contre le terrorisme, Mémoire de DEA de Sciences
administratives sous la direction de Jacques CHEVALLIER, Université
Panthéon-Assas (Paris II), LGDJ, Paris, 1994, 153 p. +
annexes
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terrorisme, Paris, Desclée de Brouwer, 1999 (Nouvelle
édition augmentée, 2002), 251 p.
GOZZI Marie-Hélène, Le terrorisme,
Paris, Ellipses, 2003, 160 p.
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l'armée rouge japonaise, Paris, Editions du Seuil, 2002, 300 p.
Articles :
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politique ? », Notes et études documentaires, La
Documentation Française, n° 5147-février, 2002, pp.
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réforme est possible ! » », Politique
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défense collective et l'alliance nippo-américaine »,
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PERON-DOISE Marianne, « Les nouvelles orientations
stratégiques du Japon : changement de style ou changement
d'époque ? », Politique étrangère,
n° 1-janv., 2002, pp. 91-101
SEIZELET Eric, « Contraintes et défis de la
puissance », dans CHARILLON Frédéric « Les
politiques étrangères - Ruptures et
continuités », Paris, Les études de La Documentation
française, pp. 179-196
SEIZELET Eric, « La société japonaise
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CERI, n° 2-juin, 1995, pp. 1-26
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en quête d'une nouvelle politique de défense », dans
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stratégique ou coopération ?, Paris, La Documentation
française, 1999, pp. 65-103
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http://www.fr.emb-japan.go.jp/politique_e/liste-2001.html
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Japon
http://www.infojapan.org
Le Ministère des Affaires étrangères du
Japon - les pages sur la politique de défense et la lutte contre le
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http://www.infojapan.org/region/n-america/us/terro0109/index.html
Le Blue Book 2002 - Chapitre B :
« Terrorist Attacks in the United States and the Fight against
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http://www.mofa.go.jp/policy/other/bluebook/2002/chap1-b.pdf
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Articles de journaux (par ordre
chronologique) :
Asahi shinbun
\u26397\u26397'(c)«úêVúVï··, 12
septembre 2001 - décembre 2001
« Dômei Nihon mazu «shien» »
\u21516\u21516«-\u26085«ú-{ú{
\u12414\u12414Ü\u12300uu\u25903éxx\u25588%ovE(L'alliance
japonaise : d'abord soutenir), Asahi shinbun
\u26397\u26397'(c)«úêVúVï··, 13
septembre 2001
« Kiki kanri taisei ni hamon »
\u21361\u21361ë@@\u31649ÇÇ\u29702ùÌùÌꧧ\u12395ÉÉ\u27874»gg\u32011-ää
(Remous dans le système de gestion de crise), Asahi shinbun
\u26397\u26397'(c)«úêVúVï··, 13
septembre 2001
NISHIMURA Yôichi \u-30337\u-30337ê¼°°
\u-27011\u-27011zàêê, « Nihon no tachiba sadameru
toki »
\u26085\u26085«ú-{{\u12398ÌÌ\u31435§§\u22580èê'èEßß\u12427ééúéú
(Au moment de fixer la position du Japon), Asahi shinbun
\u26397\u26397'(c)«úêVúVï··, 16
septembre 2001
SADO Ryûki \u20304\u20304粫nn
\u-24691\u-24691'OEÈÈ, « Kajô hôfuku no
yûhatsu ga nerai »
\u-28594\u-28594%oßèèïñèñïoeÌoeÌUU\u30330»\u12364\u29401__\u12356centscents
(L'engendrement de représailles excessives dans la ligne de mire),
Asahi shinbun
\u26397\u26397'(c)«úêVúVï··, 16
septembre 2001
« Wangan go ishô kara dakkyaku wo
» \u28286\u28286p\u24460OEãàâãâèÇÇ\u12363(c)(c)\u12425ç'EçEpp\u12434ð\u12539E
(Se délivrer du syndrome hérité de la guerre du
Golf ), Asahi shinbun
\u26397\u26397'(c)«úêVúVï··,
éditorial du 18 septembre 2001
OKAMOTO Yukio \u23713\u23713%o-{{
\u-30644\u-30644çsïvv, Shushô shudô de koritsu kaihi wo
\u-26218\u-26218éñéåå«#177;#177;\u12391ÅÅ\u23396OEÇÇ\u31435§§\u22238%oñ»ðñðð\u12539E
(Eviter de s'enfermer dans les initiatives du Premier ministre), Asahi
shinbun
\u26397\u26397'(c)«úêVúVï··, 18
septembre 2001
« Beigun shien no jôken wo
kangaeru »
\u31859\u31859ïÄOERR\u25903éxx\u25588%oÌEèðOEèðèðçlðl\u12427éé
(Réfléchir aux conditions du soutien apporté à
l'armée américaine), Asahi shinbun
\u26397\u26397'(c)«úêVúVï··,
éditorial du 21 septembre 2001
TONOOKA Hidetoshi \u22806\u22806O%o
\u31168\u31168èGèrr, « Kenpôjô no konkyo
doko ni »
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« Naze shinhô nano ka ? »
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(Pourquoi une nouvelle loi ?), Asahi shinbun
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2001
« Kogeru na, nigeru na, takaburu na - Tero taisaku
tokubetsu sochi hô seiritsu »
\u28966\u28966èÅéÈéÈAA\u-28669«\u12370°°\u12427éÈéÈAA\u-25896çÔÔéÈéÈ
-
\u12486\u12486ÉeÉçÎçÎçô«ÁôÁïÊÊ\u25514[[\u32622'uu\u27861-@@\u25104ê#172;#172;\u31435§§
(Pas d'impatience, pas de fuite, pas d'énervement - l'adoption de la loi
spéciale de lutte contre le terrorisme), Asahi shinbun
\u26397\u26397'(c)«úêVúVï··,
éditorial du 30 octobre 2001
« Wahei gaikô, shikinseki ni »
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([Une loi] pierre de touche de la diplomatie de la paix), Asahi
shinbun
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2001
« Sôki haken kodawaru »
\u26089\u26089ú»húhOE\u12371#177;#177;\u12384¾¾\u12431íéûH
(Ergotage sur un envoi précoce [des Forces d'autodéfense]),
Asahi shinbun
\u26397\u26397'(c)«úêVúVï··, 9 novembre
2001
« Kihon keikaku, konyû ni kettei ; jisshi
yôkô ha 22 nichi ni sakutei »
\u22522\u22522î-{{\u-30200OEvv\u30011%oæAæAç\u22805[[\u12395ÉÉ\u27770OEà'èàè
-
\u23455\u23455éÀé{{\u-30335vv\u-26619瀀\u12399ÍÍ22\u26085\u26085«úÉÉ\u31574çô'èôè
(Le plan de base fixé ce soir ; des principes d'exécution
élaborés en 22 jours), Asahi shinbun
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Articles de revues :
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\u28009\u28009ç_«ññ, « Beigun shien ha
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(Le soutien à l'armée américaine n'entre pas dans le
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(»Les événements du 11 septembre» - Les
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n° 364, déc., 2001, pp. 37-43
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(Le système international du 21ème siècle et la diplomatie
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WATANABE Osamu \u28193\u28193«nïÓÓ
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taikoku no kansei ka, heiwa kokka no michi ka ? »
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-
\u12464\u12464ÉOÉç[ç[Éoo\u12523ÉååçÌÌ®®\u25104ê#172;#172;\u12363(c)(c)\u12289AA\u24179ï½½\u21644aa\u22269ç%oÆÆÌÌ\u-28589«\u12363(c)(c)?
(Où se dirige le Japon ? - Vers l'accomplissement d'une grande puissance
globale ou sur le chemin d'un Etat pacifique ?), Hôritsu
jihô
\u27861\u27861-@\u26178éúïñúñ, n°
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han'i »
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(Le champ d'application des « zones
périphériques »), Sekai
\u19990\u19990êcentsEE, avril 1999, p. 75
Sites Internet :
Le site officiel du Premier ministre japonais - les pages sur
le terrorisme : http://www.kantei.go.jp/jp/saigai/terojiken/
Le site du Ministère des Affaires
étrangères :
http://www.mofa.go.jp
Le site de l'Agence de Défense :
http://www.jda.go.jp
Le site de l'Agence nationale de police :
http://www.npa.go.jp
Loi spéciale de lutte contre le terrorisme
*(*)
1. Titre
Loi sur les mesures spéciales concernant les mesures
prises par le Japon pour appuyer les activités des pays étrangers
dans le but d'accomplir les objectifs de la Charte des Nations unies en
réponse aux attaques terroristes qui ont eu lieu le 11 septembre 2001
aux Etats-Unis d'Amérique et aux menaces en résultant ainsi que
les mesures humanitaires fondées sur les résolutions pertinentes
des Nations unies ou sur les demandes faites par les Nations unies et autres
organisations internationales.
2 Novembre 2001
Loi numéro 113
2. Objectifs (relatifs à l'article
1)
(1) Rappelant que la résolution 1368
du Conseil de Sécurité de l'ONU considère les attaques
terroristes qui ont eu lieu aux États-Unis le 11 septembre 2001 comme
une menace à la paix et à la sécurité
internationale,
(2) et prenant aussi note que les
résolutions 1267, 1269 et 1333 du Conseil de Sécurité de
l'ONU et d'autres résolutions pertinentes condamnent les actes de
terrorisme international, et demandent à tous les États de
prendre des mesures appropriées pour empêcher de tels actes,
l'objectif de la Loi est de spécifier les mesures
suivantes afin de permettre au Japon de contribuer activement et positivement
aux efforts de la communauté internationale pour prévenir et
éradiquer le terrorisme international, et assurer ainsi la paix et la
sécurité de la communauté internationale, dont le Japon.
i) Les mesures japonaises prises pour appuyer
les activités des forces américaines et autres (ci-après
"les forces étrangères et autres") qui visent à
éradiquer la menace d'attaques terroristes, contribuant ainsi à
accomplir les objectifs de la Charte des Nations unies
ii) Les mesures japonaises dans un esprit
humanitaire fondé sur les résolutions pertinentes du Conseil de
Sécurité des Nations unies ou sur des demandes faites par les
Nations unies et par d'autres organisations internationales
3. Principes fondamentaux (relatifs à l'article
2)
(1) Le gouvernement du Japon exécutera
de manière appropriée et rapide des activités de
coopération et de soutien, des opérations de recherche et
sauvetage, une aide aux personnes touchées et d'autres mesures
nécessaires, contribuant ainsi activement et positivement aux efforts de
la communauté internationale pour prévenir et éradiquer le
terrorisme international, assurant ainsi la paix et la sécurité
de la communauté internationale, dont le Japon.
(2) Ces mesures ne sauront recommander
l'usage de la menace ou de la force
(3) Ces mesures seront
exécutées dans les zones suivantes :
i) le territoire du Japon
ii) zone où n'ont pas lieu des
opérations de combat et où de telles opérations ne sont
pas prévues pendant la mise en oeuvre des activités japonaises.-
En haute mer et dans l'espace aérien situé au-dessus- Territoire
étrangers (L'exécution en sera limitée aux cas où
l'assentiment des pays concernés a été obtenu.)
4. Mesures qui seront prises (relatives à
l'article 3 et aux tableaux 1 et 2)
(1) Activités de coopération et
de soutien
i) Ravitaillement et services,
commodités et autres mesures de soutien seront fournis aux forces
étrangères et aux autres internationales.
ii) Ces activités seront
exécutées par les agences gouvernementales concernées dont
les Forces de défense.
iii) Le contenu du matériel et des
services que les Forces de défense fourniront sera le ravitaillement, le
transport, les réparations et l'entretien, les services médicaux,
les communications, l'exploitation de ports marins et d'aéroports et de
bases. (Cependant ni armes ni munitions ne seront fournies. Il ne sera
procédé ni au ravitaillement en combustible ni à des
réparations d'avions américains préparant leur
départ pour des opérations de combat.)
(2) Activités de recherche et de
sauvetage
i) Seront conduites des activités de
recherche et de sauvetage des combattants en situation de détresse suite
à des opérations de combat (y compris pour des non-combattants en
détresse).
ii) Ces activités seront
effectuées par les Forces de défense et autres.
iii) Le contenu des matériels et des
services qui pourront être fournis dans l'exécution des
activités de recherche et sauvetage sont le ravitaillement, les
transports, les réparations et l'entretien, les services
médicaux, le cantonnement et la décontamination. (Cependant ni
armes ni munitions ne seront fournies. Il ne sera procédé ni au
ravitaillement en combustible ni à des réparations d'avions
américains préparant leur départ pour des
opérations de combat.)
(3) Assistance aux personnes touchées
i) Il sera procédé, en se
fondant sur les résolutions pertinentes des Nations unies portant sur
les attaques terroristes ou les demandes faites par les Nations unies et
d'autres organisations internationales, au transport des éléments
nécessaires à la vie, comme la nourriture, les vêtements,
les médicaments, les services médicaux, ainsi qu'à
d'autres activités humanitaires.
ii) Ces activités seront
exécutées par les agences gouvernementales concernées dont
les Forces de défense.
(4) Autres mesures nécessaires
i) Il s'agira par exemple de fournir des
moyens de transport à des ressortissants étrangers ou à
des ressortissants japonais vivant ou séjournant à
l'étranger notamment à bord d'avions des Forces de
défense.
ii) Ces activités seront
exécutées par les agences gouvernementales concernées dont
les Forces de défense.
5. Plan de base (relatif à l'article
4)
(1) Le plan de base, qui sera approuvé
par une décision du gouvernement, définira une politique
fondamentale, et les types, contenus et domaines en ce qui concerne chaque
activité stipulée dans le paragraphe 4 ci-dessus.
(2) Lorsque ces mesures seront
exécutées hors du territoire national, le gouvernement du Japon
consultera les gouvernements concernés afin de spécifier les
domaines de mise en oeuvre des mesures.
L'approbation par la Diète (relatif à
l'article 5) *(*)
(1) Le Premier ministre soumettra les
activités de coopération et de soutien, les opérations de
recherche et sauvetage ou d'aide aux personnes touchées
exécutées par les Forces d'autodéfense
spécifiées dans le plan de base à l'ordre du jour de la
Diète pour approbation dans les vingt jours après leur
déclenchement.
(2) Si la Diète désapprouve,
les activités de coopération et de soutien, les opérations
de recherche et sauvetage ou d'aide aux personnes touchées devront
promptement prendre fin.
6. Rapport à la Diète (relatif à
l'article 11)
Le Premier ministre informera la Diète du contenu de
toute décision prise ou de toute modification du Plan de base. De plus,
lorsque des mesures spécifiées par le Plan de base prendront fin,
le Premier ministre informera sans délai la Diète de leurs
résultats.
7. Usage des armes (relatif à l'article
12)
(1) Les membres des unités des Forces
de défense pourront user de leurs armes de manière
proportionnelle lorsqu'il existe une cause inévitable et
justifiée pour l'usage d'armes, pour protéger leur vie et leur
corps, ainsi que la vie et le corps de ceux effectuant ces activités
à leurs côtés ou de ceux dont ils ont pris le
contrôle dans l'exécution de ces mesures.
(2) En principe les armes ne seront
utilisées que sous les ordres d'un officier supérieur
présent sur les lieux.
(3) L'usage des armes ne devra pas
occasionner de mal aux personnes, sauf dans les cas de légitime
défense ou d'absolue nécessité
8. Autres (relatifs aux dispositions
supplémentaires)
Une partie de la loi sur les Forces d'autodéfense sera
amendée. *(*)*
Cette loi expirera deux ans après son entrée en
vigueur. Si cela est jugé nécessaire, l'effet de la loi pourra
être prolongé pour une période inférieure à
deux ans comme stipulé par une loi distincte. (Cela s'appliquera aussi
à toute prolongation supplémentaire de la loi.)
INTRODUCTION
........................................................................
1ERE PARTIE :
LE CONTEXTE AVANT LE VOTE DE LA LOI DU 2/11/2001 :
LES QUESTIONS DU SOUTIEN ET DE LA CONTRIBUTION DU JAPON
CHAPITRE 1 : La réaction du Japon au
lendemain des attentats du 11 septembre
..............................................................
I) « Le Japon doit soutenir les
Etats-Unis », mais comment ? ............
A) La question de la « contribution » du
Japon : un soutien concret ...
B) Les premières mesures d'urgence
........................................
C) Le plan fondamental de « 7 mesures »
immédiates ....................
II) Les opinions de la classe politique sur la nature
concrète de la contribution japonaise : entre unisson et
discordances ......................
A) La position de la majorité
...............................................
B) La position de l'opposition
..............................................
III) La position de l'opinion publique
japonaise .............................
A) Une opinion contrastée : entre approbation ...
.....................
B) ... et scepticisme...
......................................................
CHAPITRE 2 : L'état des politiques
extérieure et de défense du Japon au moment des attentats
................................................
I) La situation de la politique
extérieure : « éviter l'isolement
diplomatique »
..........................................................................
A) Eviter à tout prix une deuxième
« guerre du Golfe » .................
B) Le « défi de la place du Japon dans le
monde » ........................
1
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8
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10
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15
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24
26
II) La situation de la politique japonaise de
défense .........................
A) Une législation trop restrictive en
matière de défense ................
B) La législation sur les situations d'urgence et la
loi sur les situations de crise en zones périphériques :
divergences d'opinions sur le principe d'un aménagement
.............................................
C) La proposition d'une réforme de la loi sur les
Forces d'autodéfense
CHAPITRE 3 : Le Japon et la lutte contre le
terrorisme ...........................
I) « La guerre contre le
terrorisme ».............................................
A) Qu'est-ce que le terrorisme ?
............................................
B) « Une nouvelle forme de guerre » ou la
rhétorique de la guerre ......
C) Le cas particulier des attentats du 11 septembre
.....................
II) Quel rôle pour le Japon dans cette guerre
contre le terrorisme ? ......
A) Le Japon, les Forces d'autodéfense
japonaises et la lutte contre le terrorisme
..................................................................
B) La crainte d'un cercle vicieux des représailles
........................
2EME PARTIE :
LE PROJET DE LOI SPECIALE DE LUTTE CONTRE LE
TERRORISME
............................................................................
CHAPITRE 1 : Les conditions de
l'élaboration du projet de loi ..................
I) La pression de l'urgence
.......................................................
A) La course aux déclarations de
soutien .................................
B) L'annonce de l'élaboration d'un projet de loi
spéciale de lutte contre le terrorisme
......................................................
C) La pression américaine : « Show the
flag » .............................
II) Un projet de loi faisant partie d'une
politique globale ..................
A) Les objectifs du projet de loi : participation aux
opérations américaines ou lutte contre le terrorisme ?
.............................
B) La lutte contre le terrorisme international : le
« renforcement de la solidarité internationale »
................................................
C) Une politique de promotion et de transparence
auprès des pays d'Asie
......................................................................
CHAPITRE 2 : Un projet de loi
élément d'un double dispositif de mesures en réponse aux
attentats du 11 septembre ......................
I) La participation des Forces japonaises aux
opérations en réponse aux attentats du 11 septembre
.....................................................
28
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64
A) La définition du champs d'application de la
loi : « hors des zones combattantes »
............................................................
B) Des opérations de soutien, d'assistance et de
logistique .............
II) Le cadre de la participation des Forces
japonaises ......................
A) L'approbation par la Diète et le rapport à
la Diète ....................
B) L'usage des armes
.........................................................
C) Une loi limitée dans le temps
.............................................
III) Le renforcement des mesures anti-terroristes
sur le territoire national
................................................................................
A) La surveillance des bases américaines
..................................
B) Les mesures de renforcement des contrôles
............................
CHAPITRE 3 : L'examen et le vote de la loi
anti-terroriste........................
I) Divergences d'opinions sur plusieurs aspects du
projet de loi anti-terroriste
..............................................................................
A) Le problème de la conformité à
l'article 9 de la Constitution ........
B) L'usage des armes et la définition des zones
d'intervention .........
C) Les problèmes du droit à
l'autodéfense collective et de la légalité des
représailles
............................................................
II) Une opinion publique peu
convaincue ....................................
A) L'évolution de l'opinion publique sur les questions
de défense ......
B) Entre intérêt et désapprobation
.........................................
III) L'adoption par la
Diète.......................................................
A) Un record de rapidité
....................................................
B) Entre adhésion et contestations
........................................
3EME PARTIE :
LA MISE EN APPLICATION DE LA LOI DU 2 NOVEMBRE
2001 .........
CHAPITRE 1 : Entre anticipation et
justification légale ..........................
I) Des mesures « visibles à
l'oeil nu » et « sans délai »
.......................
A) L'envoi des Forces maritimes d'autodéfense
..........................
B) Le soutien humanitaire et financier
.....................................
II) Les limites de la loi du 2 novembre
2001 : une loi symbole ............
A) Le plan de base relatif aux mesures
d'exécution du 16 novembre 2001 : des « mesures
concrètes » symboliques.........................
B) Une loi à projection
diplomatique ......................................
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101
CHAPITRE 2 : Pourquoi adopter une nouvelle
loi ? ...............................
I) Les événements du 11 septembre :
une fenêtre d'opportunité ..........
A) La force du Premier ministre Koizumi : saisir
l'opportunité .........
B) ... d'étoffer la législation en
matière de défense : la politique des « petits
pas »
......................................................................
II) Les apports de la loi
anti-terroriste ..........................................
A) L'extension du champ géographique d'action des
Forces d'autodéfense
.............................................................
B) L'extension du cadre et des moyens d'intervention des
Forces d'autodéfense
.............................................................
C) Une nouvelle brèche dans l'interprétation de
la Constitution : le débat sur le droit à
l'autodéfense collective ............................
CONCLUSION
............................................................................
Bibliographie
...............................................................................
Annexes ......................................................................................
La loi spéciale de lutte contre le terrorisme - texte
intégral, en japonais .........
La loi spéciale de lutte contre le terrorisme -
extraits, traduction en français ....
Tables des
matières ...........................................................................
103
103
104
105
107
107
109
111
113
119
126
126
132
135
* 1 Citons notamment
l'ouvrage de Gérard Chaliand qui dans sa nouvelle édition
augmentée consacre l'introduction aux attentats du 11 septembre
2001 : CHALIAND Gérard, Les Stratégies du
terrorisme, Paris, Desclée de Brouwer, 1999 (Nouvelle
édition augmentée, 2002), pp. I-XI.
* 2 « Le peuple
japonais, aspirant sincèrement à une paix internationale
fondée sur la justice et l'ordre, renonce à jamais à la
guerre en tant qu'exercice de la puissance de l'Etat, et à la menace ou
à l'usage de la force comme moyen de règlement des conflits
internationaux.
« Pour atteindre le but fixé à
l'alinéa précédent, il ne sera jamais maintenu
d'armées terrestres, navales, aériennes ou autres forces
militaires. Le droit de belligérance de l'Etat ne sera pas reconnu.
», dans Etude du droit japonais, Paris, Société de
législation comparée, 1989, pp. 362-370. Traduction de MINAMINO
Shigeru sur la base de la « Traduction française
recommandée par le Ministère des Affaires
étrangères du Japon »
* 3 Accord de
coopération stratégique nippo-américaine dans le cadre de
la guerre de Formose (94-95) et portant sur l'évolution de l'état
des relations entre les Etats-Unis et le Japon.
* 4 Site de l'Ambassade du
Japon en France : http://www.fr.emb-japan.go.jp (ci-après
« Ambassade du Japon »). Traduction française de la
déclaration du Premier Ministre japonais concernant les attaques
terroristes aux Etats-Unis (12/09/2001) - adresse :
http://www.fr.emb-japan.go.jp/politique_e/2001/01-0069-att-koizumi-us.html
* 5 Il s'agissait d'attaques
de représailles contre l'Afghanistan et le Soudan qui auraient
abrité les terroristes responsables d'une série d'attentats en
Afrique (Kenya, Yémen) contre les ambassades américaines.
* 6 YAMAMOTO Takeshi
\u23665\u23665éR-{{ \u21083\u21083çémm,
« »Shûhen» no han'i »
\u12300\u12300uéüïÓEvv\u12398ÌÌ\u31684»ÍÍ\u22258àÍÍ
(Le champ d'application des « zones
périphériques »), Sekai
\u19990\u19990êcentsEE, avril 1999, p. 75
* 7
http://www.kantei.go.jp
* 8 Kantei, op.
cit., lien :
« \u32207\u32207çùLùLéÒÒ\u20250%oïOE(c)E
(01/09/12 10:20) » (Sôri kisha kaiken
Conférence de presse du Premier ministre, 12/09/01 10h20),
http://www.kantei.go.jp/jp/koizumispeech/2001/0912sourikaiken.html
* 9 Voir 1ère
Partie, Chap. 2, I), B)
* 10 Ambassade du Japon,
op. cit. Traduction française - adresse :
http://www.fr.emb-japan.go.jp/politique_e/2001/01-0070-terro.html
* 11 Asahi shinbun, 13
septembre 2001
* 12 ou transfrontalier, ou
encore transnational
* 13 Asahi shinbun, 13
septembre 2001
* 14 Ibidem
* 15 Ibidem
* 16 Asahi shinbun,
16 octobre 2001 - Extrait du sondage réalisé par
téléphone les 13 et 14 octobre 2001 sur 2000 personnes. Les
données entre parenthèses ont été recueillies les
28 et 29 septembre 2001. Cependant, ce sondage posant également des
questions concernant spécifiquement la loi spéciale de lutte
contre le terrorisme, nous y reviendrons plus tard (Voir
2ème Partie, chapitre 3, II), B)
* 17 SEIZELET Eric,
« La société japonaise et la mutation du système
des valeurs », Les Etudes du CERI, n° 2-juin, 1995, p.
24
* 18 PRAZAN Michaël,
Les Fanatiques, histoire de l'armée rouge japonaise, Paris,
Editions du Seuil, 2002, pp. 75-105
* 19 BOUISSOU Jean-Marie,
« Changement ou immobilisme politique ? », Notes
et études documentaires, La Documentation Française, n°
5147-février, 2002, pp.176-177
* 20 Asahi shinbun, 16
septembre 2001
* 21 BOUISSOU Jean-Marie,
op. cit., pp.176-177
* 22
« Traité de coopération et de sécurité
mutuelles entre les Etats-Unis d'Amérique et le Japon (19 janvier 1960),
dans JOYAUX François, La nouvelle question d'Extrême-Orient 2,
l'ère du conflit sino-soviétique, 1959-1978, Paris, Editions
Payot, 1988, pp. 412-414
* 23 Ibidem
* 24 Système de
domination du Parti libéral démocrate
* 25 Voir
2ème Partie, Chap. 1, II), B)
* 26 Asahi shinbun, 15
septembre 2001
* 27 OKAMOTO Yukio
\u23713\u23713%o-{{ \u-30644\u-30644çsïvv, Shushô shudô
de koritsu kaihi wo
\u-26218\u-26218éñéåå«#177;#177;\u12391ÅÅ\u23396OEÇÇ\u31435§§\u22238%oñ»ðñðð\u12539E
(Eviter de s'enfermer dans les initiatives du Premier ministre), Asahi
shinbun, 18 septembre 2001
* 28 La loi sur les situations
d'urgence ne sera votée que le 15 mai 2003
* 29 Asahi shinbun, 15
septembre 2001
* 30 Ibidem
* 31 YAMAMOTO Takeshi
\u23665\u23665éR-{{ \u21083\u21083çémm, op. cit.,
p. 75
* 32 Ibidem
* 33 Asahi shinbun, 16
septembre 2001
* 34 Asahi shinbun, 15
septembre 2001
* 35 Asahi shinbun, 16
septembre 2001
* 36 Voir GOZZI
Marie-Hélène, op. cit, Chapitre III :
« La lutte contre le phénomène terroriste : les
moyens de la riposte », pp. 96-150
* 37 Asahi shinbun, 16
septembre 2001
* 38 CHALIAND Gérard,
« La mesure du terrorisme », dans CHALIAND Gérard,
op. cit., pp. 10-11
* 39 Voir GOZZI
Marie-Hélène, Le terrorisme, Paris, Ellipses, 2003, p.
20
* 40 CHALIAND Gérard,
op. cit., p. 7
* 41 Sur l'armée
rouge japonaise (Nihon Sekigun), consulter le livre de PRAZAN Michaël
précédemment cité. Michaël Prazan est journaliste et
enseignant. Son livre se lit comme un documentaire qui retrace l'histoire du
Nihon Sekigun.
* 42 CHALIAND Gérard,
op. cit., p. 7
* 43 DUROSELLE Jean-Baptiste
et KASPI André, Histoire des relations internationales de 1945
à nos jours, Tome II, Paris, Armand Colin, 2002, p. 612
* 44 GOZZI
Marie-Hélène, op. cit., pp. 53-54
* 45 NISHITANI Osamu,
«Tero to no sensô» to ha nani ka ? - 9.11 igo no sekai
\u12300\u12300uÉee\u12525ÉçÆçÆÌÌ\u25126êíàúvv\u12392ÆÆ\u12399ÍÍ\u20309%o½½\u12363(c)(c)
-
9.11\u20197\u20197àÈOEãÌãÌêcentscents\u30028EE
(Qu'est-ce que «la guerre contre le terrorisme» - Le monde depuis le
11 septembre), Tôkyô, Ibunsha
\u20197\u20197àÈï\u31038éÐÐ, 2002, pp. 8-9
* 46 CHALIAND Gérard,
op. cit., pp. I-II
* 47 De nombreux ouvrages
ont été consacrés à la secte Aum. Citons entre
autres CAMPBELL James « Ken », « La Secte
japonaise Aum Shinrikyô », dans CHALIAND Gérard, op.
cit., pp. 163-193
* 48 Asahi shinbun,
1er octobre 2001 - Extrait du sondage réalisé par
téléphone les 28 et 29 septembre 2001 sur 2000 personnes.
* 49 HOKKIRI Kazumasa
\u22528\u22528-xêØØ \u21644\u21644a%oëë,
« Shûhen jitai hô wo meguru kii gainen »
\u21608\u21608éüïÓÓ\u20107é-Ô-Ô-@@\u12434ðßðß®®\u12427éÉLéL[[\u27010TT\u24565»OO(Concept
clef relatif aux lois sur les situations d'urgence dans les zones limitrophes),
Sekai \u19990\u19990êcentsEE, avril 1999, pp. 73-74
* 50 Asahi shinbun, 18
septembre 2001
* 51 Ibidem
* 52 Site officiel du
Premier ministre japonais, pages sur le terrorisme, op. cit.,
lien :
« \u32207\u32207çùLùLéÒÒ\u20250%oïOE(c)E
(01/09/12 10:20) » (Sôri kisha kaiken
Conférence de presse du Premier ministre, 12/09/01 10h20),
http://www.kantei.go.jp/jp/koizumispeech/2001/0912sourikaiken.html
* 53 SASATO Masahiko
\u31545\u31545çù'
\u-26939\u-26939%oëïFF,\u12300\u12300u«ú-{ú{ÌÌ\u23550ÎÎ\u24540%oúvúv,
Nihon no taiô (La position du Japon), dans Centre
d'études et de recherches du Journal Yomiuri (ouvrage
collectif)
\u-30035\u-30035«Ç»êVVï··\u-30017'²²\u26619ç\u30740OE\u31350-{Eï»\u12539E
\u32232\u32232ïÒ', Tai terorizumu sensô
\u23550\u23550ÎÉee\u12525ÉçÉçÉYY\u12512É€€\u25126êíàú
(La guerre contre le terrorisme), Tôkyô, Chûô
kôron shinsha
\u20013\u20013'%oOEöö__\u26032êVV\u31038éÐÐ,
coll. « Chûkô shinsho La Clef »
\u20013\u20013'OEöêVöVèÉ%o%oÉNN\u12524ÉOEOE,
n° 24, 2001, pp. 143-145
* 54 Ibidem
* 55 OKAMOTO Yukio
\u23713\u23713%o-{{ \u-30644\u-30644çsïvv, op. cit.,
Asahi shinbun, 18 septembre 2001
* 56 Ambassade du Japon,
op. cit. Traduction française - adresse : http://
www.fr.emb-japan.go.jp/politique_e/2001/01-0068-us.html
* 57 Ambassade du Japon,
op. cit. Traduction française - adresse : http://
www.fr.emb-japan.go.jp/politique_e/2001/01-0078-terrorisme.html
* 58 Ambassade du Japon,
op. cit. Traduction française - adresse : http://
www.fr.emb-japan.go.jp/politique_e/
2001/01-0079-projet.html
* 59 SASATO Masahiko
\u31545\u31545çù' \u-26939\u-26939%oëïFF,op.
cit., p. 140
* 60 Asahi shinbun, 21
septembre 2001
* 61 Site du
Ministère japonais des Affaires étrangères,
http://www.mofa.go.jp/policy/other/bluebook/2002/
chap1-b.pdf
* 62 Blue Book 2002,
p. 18
* 63 Voir Annexes pour le
texte du projet de loi (texte intégral en japonais et traduction en
français des points essentiels).
* 64 Blue Book 2002,
p. 15
* 65 Asahi shinbun, 20
septembre 2001
* 66 Asahi shinbun, 18
septembre 2001
* 67 L'organisation du G8
est à l'origine un instrument créé en 1975 par la France
qui a réuni ainsi un club de nations
« occidentales » en intégrant des nations vaincues
de la seconde guerre mondiale disposant d'un poids sur la scène
internationale, en particulier économique et financier. Le G8 rassemble
lors de sommets les ministres des Finances, des Affaires
étrangères et les chefs d'Etat des huit pays les plus
développés du monde. Il est d'une grande importance pour le
Japon car en tant que pays vaincu de la seconde guerre mondiale, il n'a
pas été membre fondateur de l'ONU, encore moins membre permanent
du Conseil de Sécurité. Or le Japon est membre fondateur du G8.
* 68 Le Monde, 25 octobre
2001
* 69 Blue Book 2002,
pp. 17-18
* 71 Les élections
à la Chambre haute de juillet 2001 avait vu le retour en force du Parti
libéral démocrate qui a obtenu 65 des 121 sièges en lice.
Cette victoire était due principalement à la très forte
popularité de Koizumi, nouveau chef du PLD élu depuis le 26
avril, non seulement auprès des partisans du PLD mais aussi
auprès d'une grande partie des partisans du Parti démocrate (un
quart environ) - Voir KABASHIMA Ikuo, « Le gouvernement Koizumi et
les élections de juillet 2001 », Cahiers du Japon, n° 91
- printemps, 2002, pp. 24-31
* 70 Asahi shinbun, 21
septembre 2001
* 71 Ambassade du Japon,
op. cit. Traduction française - adresse : http://
www.fr.emb-japan.go.jp/politique_e/
2001/01-0079-projet.html
* 72 Voir Annexes p. 134
* 73 Ambassade du Japon,
op. cit. Traduction française - adresse : http://
www.fr.emb-japan.go.jp/politique_e/
2001/01-0078-terrorisme.html
* 74 Ibidem
* 75 BOUISSOU Jean-Marie,
op. cit., pp. 176-177
* 76 Ibidem
* 77 « Nous, le
peuple japonais, agissant par l'intermédiaire de nos
représentants dûment élus à la Diète,
résolus à nous assurer, à nous et à nos
descendants, les bienfaits de la coopération pacifique avec toutes les
nations et les fruits de la liberté dans tout ce pays,
décidés à ne jamais plus être témoins des
horreurs de la guerre du fait de l'action du gouvernement, proclamons que la
souveraineté appartient au peuple et établissons fermement cette
Constitution. Le gouvernement est le mandat sacré du peuple, dont
l'autorité dérive du peuple, dont les pouvoirs sont
exercés par les représentants du peuple et dont les
bénéfices sont à la jouissance du peuple. Tel est le
principe universel de l'espèce humaine, et cette Constitution se base
à tel principe. Nous rejetons toutes les constitutions, lois,
ordonnances et rescrits impériaux y contrevenant.
Nous, le peuple japonais, désirons la paix
éternelle et sommes profondément conscients des idéaux
élevés présidant aux relations humaines et nous avons
décidé de préserver notre sécurité et notre
existence, en nous confiant à la justice et à la foi des peuples
du monde épris de paix. Nous désirons occuper une place d'honneur
dans une société internationale luttant pour le maintien de la
paix et l'élimination perpétuelle de la face de la terre, de la
tyrannie et de l'esclavage, de l'oppression et de l'intolérance. Nous
reconnaissons que tous les peuples du monde ont également le droit de
vivre en paix, à l'abri de la peur et du besoin.
Nous croyons qu'aucune nation ne doit s'occuper uniquement
d'elle-même et ignorer d'autres nations, que les lois de la
moralité politique sont universelles et que l'obéissance à
ces lois incombe à toutes les nations essayant de maintenir leur propre
souveraineté et d'établir une relation égale avec les
autres nations.
Nous, le peuple japonais, nous engageons, sur notre honneur de
nation, à accomplir ces idéaux élevés et nobles
desseins par tous nos moyens. »
Dans Etude du droit japonais, Paris,
Société de législation comparée, 1989, pp. 362-370.
Traduction de MINAMINO Shigeru sur la base de la « Traduction
française recommandée par le ministère des Affaires
étrangères du Japon »
* 78 Asahi shinbun, 24
octobre 2001
* 79 NARISAWA Takato
\u25104\u25104ê#172;àVV \u23389\u23389çFêll, «
Tero taisaku tokubetsu sochi hô, kaisei PKO nado kyôryoku hô
to kenpô »
\u12486\u12486ÉeÉçÎçÎçô«ÁôÁïÊÊ\u25514[[\u32622'uu\u27861-@@\u12289AA\u25913%oüêEPKO\u31561\u31561«\u21147ÍÍ\u27861-@@\u12392ÆÆ\u25010OE-@@
(La Constitution et les lois en matière de coopération telles que
la loi spéciale de lutte contre le terrorisme et l'amendement à
la loi PKO), Hôgaku seminaa
\u27861\u27861-@ww\u12475ÉZZ\u12511É~~\u12490Éii\u12540[[,
n° 567, mars, 2002, p. 45
* 80 Asahi shinbun, 6
octobre 2001
* 81 Asahi shinbun, 3
octobre 2001
* 82 ARAI Seiichirô
\u-31918\u-31918çràä\u12539E
\u-30048\u-30048ê½àêYêY, «
«Hôfuku sensô» no ihôsei »
\u12300\u12300uïñïoeñoeêíàúvv\u12398ÌÌ\u-28587àá-@á@ê««
(L'illégalité de la «guerre de représailles»),
Hô to Minshu shugi
\u27861\u27861-@ÆÆ\u27665-\u20027éåéååå``,
n° 364, déc., 2001, p. 21
* 83 Asahi shinbun, 3
octobre 2001
* 84 Voir en particulier les
sondages réalisés par le Ministère des Affaires
étrangères
* 85 (1er
extrait) Asahi shinbun, 16 octobre 2001 - Extrait du sondage
réalisé par téléphone les 13 et 14 octobre 2001 sur
2000 personnes. Les données entre parenthèses ont
été recueillies en septembre 2001. Nous en avons auparavant
déjà étudié un extrait : voir Chap. 1, I),
C).
(2ème extrait) Asahi Shinbun,
1er octobre 2001 - Extrait du sondage réalisé par
téléphone les 28 et 29 septembre 2001 sur 2000 personnes. Les
données entre parenthèses ont été recueillies en
août 2001.
* 86 Asahi shinbun, 30
octobre 2001
* 87 Asahi shinbun, 19
octobre 2001
* 88 Asahi shinbun,
1er octobre 2001
* 89 Asahi shinbun, 19
octobre 2001
* 90 KOBAYASHI Kazuhiro
\u23567\u23567è#172;ÑÑ
\u19968\u19968àê»éé, « Koizumi kaikaku -
Asiki seiji fûdo to no tatakai »
\u23567\u23567è#172;êò%oüòüvv -
\u24746\u24746à«uu\u12365««\u25919ê\u27835é\u-26456ï«yyÆÆ\u12398ÌÌ\u-27176«#172;#172;\u12356centscents
(Les réformes de Koizumi - Son combat contre un climat politique
malsain), Kankai \u23448\u23448EE, n° 11-nov., 2001, p. 23
* 91 Asahi shinbun, 21
septembre 2001
* 92 Ambassade du Japon,
op. cit. Traduction française - adresse :
http://www.fr.emb-japan.go.jp/politique_e/
2001/01-0071-terro.html
* 93 Asahi shinbun, 26
septembre 2001
* 94 Pour
l'intégralité du dispositif, voir Kantei, op. cit.,
lien :
« \u12486\u12486ÉeÉçÎçÎçô«ÁôÁ[[\u27861-@@\u12395ÉÉ\u22522îûß\u23550ÎÎ\u24540%oú[ú['uu\u12395ÉÉ\u-27230ÖÖ\u12377··\u12427éé
\u22522\u22522î-{{\u-30200OEvv\u30011%oæiæi-{{\u25991ï\u-247jj(01/11/16\u-247\u-247j»
(Tero taisaku tokuso hô ni motoduku taiô sochi ni kansuru kihon
keikaku (honbun) (01/11/16), Plan de base relatif aux mesures s'appuyant
sur la loi spéciale de lutte contre le terrorisme (texte) (16/11/01)),
http://www.kantei.go.jp/jp/kakugikettei/2001/1116keikaku.html
* 95 Ambassade du Japon,
op. cit. Traduction française - adresse : http://
www.fr.emb-japan.go.jp/politique_e/
2001/01-0085-declaration.html ;
* 96 Asahi shinbun, 16
septembre 2001
* 97 Asahi shinbun,
16 septembre 2001
* 98 Voir
1ère Partie, Chapitre 1, II), B)
* 99 La théorie de
la politique des « petits pas » ou spill over a
été élaborée par l'école
néo-fonctionnaliste pour analyser la dynamique d'intégration de
la construction européenne : « Fidèles à la
théorie du ruissellement, les néo-fonctionnalistes mettent
l'accent sur la réalisation de l'intégration par étapes
successives, le passage d'une étape à l'autre s'appuyant sur le
phénomène de spill over (débordement), tout
progrès dans l'intégration appelant nécessairement
d'autres progrès. » Dans J. RIDEAU, Droit institutionnel
de l'Union européenne, Paris, L.G.D.J., coll. Manuels, 2002, p.
25
* 100 MIZUSHIMA Asaho
\u27700\u27700ê...«\u12539E
\u26397\u26397'(c)ïä\u12539E, « «Tero taisaku tokubetsu
sochi hô» ga motarasu mono »
\u12300\u12300uÉee\u12525ÉçÎçÎçô«ÁôÁïÊÊ\u25514[[\u32622'uu\u27861-@@\u12301vv\u12364\u12418à½à½ç·ç·àÌàÌ
(Les apports de la «loi spéciale de lutte contre le
terrorisme»), Hôritsu jihô
\u27861\u27861-@\u26178éúïñúñ, n°
913, janv., 2002, p. 2
* 101 MIZUSHIMA Asaho
\u27700\u27700ê...«\u12539E
\u26397\u26397'(c)ïä\u12539E, op. cit., p. 2
* 102 Asahi shinbun,
15 septembre 2001
* 103 MIZUSHIMA Asaho
\u27700\u27700ê...«\u12539E
\u26397\u26397'(c)ïä\u12539E, op. cit., p. 1
* 104 OKAMOTO Yukio
\u23713\u23713%o-{{ \u-30644\u-30644çsïvv, op. cit. ,
Asahi shinbun, 18 septembre 2001
* 105 Rapport
rédigé par Richard Armitage et Joseph Nye et publié par
l'Institut d'études stratégiques nationales de
l'Université de défense nationale
* * Site
de l'Ambassade du Japon en France : http:// www.fr.emb-japan.go.jp. -
Traduction française des points essentiels de la Loi spéciale de
lutte contre le terrorisme - adresse : http://
www.fr.emb-japan.go.jp/politique_e/2001/01-0079-projet.html
* * Cet
article n'a pas été traduit dans la version
délivrée par l'Ambassade du Japon sur son site.
* ** Cette
disposition n'a pas été traduite dans la version
délivrée par l'Ambassade du Japon sur son site.
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