MODÉLISATION DE L'AQUIFÈRE
PLIO-QUATERNAIRE DE LA CÔTE ORIENTALE DU CAP-BON (TUNISIE)
A .ZGHIBI*, J. TARHOUNI*, N. GAALOUL**,
*Département de Génie Rural, Eaux et
Forêts, Institut National Agronomique de Tunisie, Tunis, Tunisie
**Institut National de Recherche en Génie Rural, Eaux
et Forêts, Tunis, Tunisie
RESUME
La modélisation hydrodynamique de l'aquifère
plio-quaternaire de la côte orientale du Cap-Bon par le code MODFLOW a
permis de comprendre le fonctionnement hydrodynamique de l'aquifère, en
estimant les échanges latéraux de la l'aquifère avec la
mer Méditerranéen et son réseau hydrographique. Ainsi le
calage du modèle mathématique en régime permanent sur
l'état piézomètrique de 1970 a permis d'affiner la
distribution spatiale de la perméabilité sur l'ensemble du
domaine et de dresser le bilan de l'aquifère en régime permanent.
Le calage du modèle en régime transitoire a permis d'affiner la
distribution spatiale du coefficient d'emmagasinement de l'aquifère. Le
bilan issu de ce calage a mis en évidence des entrées d'eau de
mer. Le déstockage enregistré est de l'ordre de
4Mm3/an. La recharge artificielle de l'aquifère dans la zone
de Diarr El Hojjaj-Menzel Témime avec un débit d'injection de 200
l/s est capable d'inverser le gradient hydraulique et donc de faire reculer le
biseau salé dans cette zone.
Mots clés : Côte orientale,
MODFLOW, piézomètrie, modélisation, régime
permanent - transitoire, biseau salé.
INTRODUCTION
La région du Cap-Bon est localisée au Nord-Est
du pays. Elle est limitée au Sud-Est par la mer
Méditerranée, au Sud par le gouvernorat de Sousse et à
l'Ouest par les gouvernorats de Zaghouan et de Ben Arrous. Elle se situe entre
les parallèles 36°20'et 37°10'de latitude Nord et entre les
méridiens 10°30'et 10°10'Est.
L'aquifère de la côte orientale occupe une
superficie d'environ 475Km2 (Fig.1), elle s'étend depuis Beni
Khiar jusqu'à Kélibia sur environ 45Km. Elle est limitée
à l'Ouest par Jebel Sidi Abderrahmane, au Nord par Oued H'jjar (ville de
Kélibia), à l'Est par la mer Méditerranée et au Sud
par la région de Béni Khiar.
Elle est comptée parmi les principaux aquifères
des plaines côtières Tunisiennes. Cette plaine est
dépourvue de cours d'eau pérennes et l'apport des Oueds
Bouleddine, Lebna, Chiba, Abidis, El K'bhir et El H'jarr qui la traversent ne
sont apparents qu'en période de crues.
Ainsi, la seule ressource en eau disponible sur place,
provient des eaux souterraines peu profondes. Cette disposition favorable
à l'irrigation par pompage a été l'un des atouts majeurs
du développement des cultures. Par ailleurs, le développement des
pompages a engendré la surexploitation de l'aquifère, son
dénoyage par endroits et par conséquent l'avancée, a un
rythme très accéléré, du biseau salé.
CONTEXTE HYDRO-CLIMATOLOGIQUE GENERAL
Le climat de la côte orientale du Cap-Bon est du type
semi-aride à influence méditerranéenne. La
pluviométrie moyenne annuelle est de 450mm. La température
moyenne est de 19,2°C (27,3°C en été et 12,3°C en
hiver). Les Oueds Lebna, Chiba, Abidis, et Bouleddine qui traversent la plaine
sur toute sa largeur, sont de faible importance, leurs écoulements ne
sont possible que pendant de courtes durées et en périodes des
crues.
Les oueds El K'hbir et El H'jarr, qui constituent
respectivement les limites Nord et Sud de l'aquifère, contribuent
partiellement à son alimentation.
Figure 1 : Situation hydro-géographique de
l'aquifère plio-quaternaire de la côte orientale du
Cap-Bon.
CONTEXTE GEOLOGIQUE
La plaine de la côte orientale correspond à une
partie de la péninsule du Cap-Bon qui s'étend dans le Nord-Est de
la Tunisie et correspond à des affleurements des terrains qui couvrent
l'Eocène moyen et le Quaternaire. En effet, la plaine de la côte
orientale correspond au flanc Est de l'anticlinal de Jebel Abderrahmane, est
déterminée par le synclinal de Dakhla qui constitue les
dépôts aquifères du Pliocène et de Quaternaire
discordant sur le Miocène supérieur. La série
stratigraphique visible allant de l'Eocène jusqu'au Vindobonien
supérieur au coeur de l'anticlinal présente un pendage
Sud-Est.
Les séries néogènes du Cap-Bon, sont
formées par un groupe, d'âge Langhien moyen à
supérieur et constitué par une succession de la formation Ain
Grab à la base et la formation Mahmoud au sommet, et un groupe Oum
Dhouil, d'âge Langhien supérieur au Tortonien inférieur,
est formé par un corps sableux à la base attribué à
la formation Beglia. La formation Saouaf constitue la partie principale et
supérieur du groupe. La région de Menzel Temime est
caractérisée par l'absence des séries du Miocène
supérieure qui sont en majorité d'origine marine alors que le
Pliocène repose en discordance angulaire sur les alternances
argilo-gréseuses de la formation Saouaf d'âge
Serravalien-Tortonien. Ces séries du Pliocène sont
réduites et ne dépassent pas 100m. La totalité des
structures plissées de la péninsule du Cap-Bon, a montré
une prédominance de direction atlasique avec une déviation axiale
vers l'Est au niveau de leur terminaison Nord-Orientale. La phase de serrage
atlasique a provoqué des structures plissées ainsi que des grands
accidents dextres, les plis NE-SW se tordent jusqu'à aboutir à
une structure orientée E-W.
CONTEXTE HYDROGEOLOGIQUE
Le système aquifère de la côte orientale
comprend deux aquifères :
- de surface : celle du Quaternaire,
- profonde : logée dans le dépôts du
Pliocène.
Ces deux aquifères sont confondues sur les plans
hydraulique et lithologique, puisqu'il n'y a eu identification d'aucun
imperméable qui permet leur individualisation
piézomètrique et les puits de surface recoupent
généralement les deux horizons. Mais vu que le modèle
utilisé exige un mono-couche, on a supposé une
schématisation à un horizon le deux couches aquifères (la
première couche est celle du pliocène, la deuxième du
quaternaire).
En amont, l'alimentation se fait par les importantes
séries gréseuses inférieures de l'Oligo-Miocène. La
vitesse d'écoulement entre les oueds Bouleddine et Lebna vers la mer, se
fait d'une manière très faible, l'eau s'enfonce
profondément sous la puissante série marneuse de Miocène
terminal sans échange possible avec les aquifères superficielles,
ce qui permet une recharge de l'aquifère.
L'alimentation de l'arrière pays de Kelibia se fait
à partir des nombreuses barres de grès peu épaisses, des
séries moyennes et terminales en disposition périsynclinale. Ces
barres qui sont souvent en contact avec le Quaternaire permettent des
échanges verticaux ou latéraux. Vers le Sud, le sable de
Somâa joue à priori le rôle des relais entre le
Miocène et les formations plus récentes du fait du grand accident
tectonique qui tronque le synclinal.
Le Pliocène molassique ou sableux à des
caractéristiques hydrauliques plus favorables et forme en profondeur le
synclinal de Tafelloune qui est composé des matériaux
détritiques riches en bioclastes. A la surface, il se présente
sous forme d'un vaste glacis découpé en plateaux par des cours
d'eau permettant ainsi une alimentation de l'aquifère.
L'infiltration directe de la pluie se fait sur tous les
affleurements Pliocènes de la plaine, une partie de l'écoulement
souterraine dans ces formations transite par le Quaternaire avant d'atteindre
la mer ou bien est repris par le réseau hydrographique.
Les limites du Pliocène peuvent être
débordées par le recouvrement Quaternaire qui peut se trouver en
relation avec le Miocène comme à l'arrière pays de
Kélibia et au niveau de la région de Somâa. Il faut
signaler aussi que le cordon dunaire fossile qui jalonne la plage du
Tyrrhénien, joue un rôle particulier dans la capacité
d'infiltration favorisée par le barrage topographique qu'il constitue
pour le ruissellement de surface. Ces caractéristiques lui permettent
d'exercer tout au long de la côte un effet de barrière hydraulique
superficielle (Fig.2).
Figure 2 : Modèle géologique et
hydrogéologique utilisé pour élaborer un modèle
conceptuel.
Les principales caractéristiques
hydrogéologiques de l'aquifère plio-quaternaire sont
récapitulées dans le tableau 1.
Tableau 1 : Principales caractéristiques
hydrogéologiques de l'aquifère plio-quaternaire de la côte
orientale du Cap-Bon.
Aquifère
|
Recharge
|
Substratum
|
Epaisseur saturée (m)
|
Profondeur (m)
|
T(m2/j)
|
S (%)
|
Quaternaire
|
Pluies
|
Marno-Gréseux
|
10 à 15
|
0 à 70
|
60
|
9
|
Pliocène
|
Pluies
|
Argiles
|
10 à 20
|
70 à 150
|
30
|
4
|
T est la transmissivité et S est le coefficient
d'emmagasinement. Le sens de l'écoulement de la l'aquifère se
fait généralement du l'Ouest vers Est, sauf au Nord de Menzel
Témime où il change de direction pour s'orienter vers l'oued El
H'jarr (Kélibia). Entre Diarr El Hojjaj et El Mida, la surface
piézométrique est plate, présentant un espacement constant
et un gradient hydraulique faible (1%). Entre Menzel Horr et Tefelloune, le
gradient est de l'ordre de 3%. Cette différence du gradient hydraulique
d'une zone à l'autre est due principalement à la variation de la
perméabilité.
SALINITE DES EAUX DE L'AQUIFERE PLIO-QUATERNAIRE
La carte de la de salinité de l'aquifère
plio-quaternaire de 2005 montre une concentration excessive de l'eau dans la
bande côtière, ayant dépassée 8g/l à l'Est de
la plaine (Diarr El Hojjaj-Tefelloune), au Nord de l'oued Bouledine et à
l'Ouest de l'oued Lebna, alors qu'elle n'excédait pas dans ces lieux 3
g/l en 1970. Cette augmentation de la salinité est due à l'appel
du biseau salé suite à la multiplication des pompages et la
réduction des apports à l'aquifère ce qui a
entraîné l'abandon de plusieurs puits au début de
l'année 1990. En dehors de la bande côtière, la
salinité de l'eau a atteint 2.5 g/l entre Mâamoura et Tazarka
contre 1.5 g/l en 1970 et 4 g/l entre Menzel Témime et Hammam El Guezaz
contre 2 g/l en 1970.
ETAT D'EXPLOITATION DE L'AQUIFERE PLIO-QUATERNAIRE
L'intensification de l'exploitation de l'aquifère,
conjuguée à la sécheresse, a entraîné :
- une baisse du niveau piézomètrique atteignant
10m par endroits, avec une baisse moyenne de 0,66cm par an.
- l'avancée de l'isopièze zéro à
environ 5Km à l'intérieur de la plaine.
- la dégradation de la qualité de l'eau avec des
salinités pouvant atteindre 10g/l notamment dans la bande
côtière.
Depuis le premier inventaire fait en 1961, l'exploitation de
l'aquifère a largement évolué suite à
l'électrification de plusieurs puits et à l'approfondissement
d'autres. Le nombre total de puits équipés est passé de
270 en 1962 à 6069 en 2004 (Tab.2) ; de même, le taux
d'équipement a connu durant la même période un
accroissement remarquable. Cependant, il a été constaté
que le nombre de puits abandonnés (comblés ou sec) n'a
cessé également d'augmenter.
Tableau 2 : Exploitation de
l'aquifère plio-quaternaire de la côte orientale du
Cap-Bon.
Année
|
nbr. de puits
équipés
|
nbr. de puits
non équipés
|
nbr. de puits
abandonnés
|
nbr. total
de puits
|
Exploitation
en m3
|
1962
|
270
|
15
|
15
|
300
|
4.701.850
|
1974
|
954
|
156
|
90
|
1200
|
18.203.950
|
1987
|
1067
|
---
|
219
|
1286
|
11.865.745
|
2004
|
6069
|
3170
|
---
|
9239
|
54.000.000
|
Les volumes d'eau prélevés à partir des
eaux souterraines ont été estimés à 1712 l/s, soit
un volume total annuel de 54 Mm3/an , (1200 l/s pour l'irrigation et
500 l/s pour l'alimentation en eau potable des populations et l'abreuvement du
cheptel). Il a été constaté que malgré la
réalisation de certains puits en 1960 leur utilisation effective
à des fins agricoles n'a démarré qu'en 1970. Ainsi, sur
les 9239 puits, 65 % ont été réalisés et
équipés en motopompes entre 1980 et 1990. D'autre part, la
fréquence des pompages opérés est souvent
inférieure à 15mn/jour à cause des baisses rapides des
niveaux d'eau.
Avant 1970, le bilan était équilibré et
les prélèvements modérés par rapport à la
recharge moyenne. Par contre le bilan de 2004 (Total des entrées: 50Mm3,
Total des sorties: 54Mm3) montre un déficit relativement important de
4Mm3, corollaire d'une exploitation abusive de la l'aquifère et d'un
déficit pluviométrique d'environ 790mm/an soit donc un
déficit moyen à combler d'environ 7900m3/ha/an.
MODELISATION DE L'AQUIFERE PLIO-QUATERNAIRE EN REGIME
PERMANENT ET BILAN
La modélisation hydrodynamique de l'aquifère
côtière du Cap-Bon est réalisée par l'application du
code MODFLOW . Le maillage adopté dans ce cas est un maillage
carré régulier de 250m de côté. La
discrétisation du domaine est composée de 104 colonnes et 208
lignes avec 6352 mailles de calcul, 1145 mailles à potentiel
imposé et 1299 mailles à débits imposés, soit au
total 8796 mailles actives (Fig.3). La dimension des mailles a
été choisie en tenant compte de la densité et de la
variabilité des données disponibles .
Figure 3: Représentation du maillage choisi
et des conditions aux limites considérées.
Les conditions aux limites adoptées dans la conception
du modèle sont : potentiel imposé constant égal à
zéro le long de la mer Méditerranée ; potentiel
imposé constant le long de la limite Nord constituée par l'oued
H'jarr à Kélibia (La charge hydraulique considérée
est égale à la différence entre le niveau topographique et
la hauteur du lit de l'oued. Dans le cas présent, la charge varie entre
2 et 3 mètres) et le long de la limite Sud de l'aquifère
constituée par l'oued El K'bhir à Béni Khiar (en adoptant
les même hypothèses que pour la limite Nord) ; débit
imposé constitué par les puits d'exploitation de la
région. La limite Ouest est une limite fictive dans laquelle on
considère l'écoulement latéral .
La distribution des perméabilités est
représenté dans la figure 4.
Figure 4 : Carte de la
conductivité hydraulique de l'aquifère
plio-quaternaire.
Pour le régime permanent, on va adopté un
coefficient d'infiltration estimé à 15% pour les affleurements
Plio-quaternaires dominants sur l'ensemble des mailles actives du domaine de
travail. La recharge actuelle de l'aquifère plio-quaternaire s'effectue
par l'infiltration :
- des ruissellements en amont essentiellement par les
puissantes séries gréseuses inférieures qui enserrent
l'Oligocène du jbel Abd Errahmen,
- des eaux de crues des oueds traversant la plaine, des pluies
excédentaires des années exceptionnelles.
L'évaporation directe est considérée non
nulle lorsque la profondeur de la nappe est inférieure à 10m. On
comptabilise un déficit pluviométrique d'environ 790mm/an.
Les prélèvements par pompages sont
supposés nuls en régime permanent (état
piézomètrique de1970).
Calage du modèle
L'état de référence retenu pour caler le
modèle en régime permanent est la piézomètrie de
1970 correspondant à l'état avant le début des pompages.
La carte (Fig.5) montre la distribution de la perméabilité
obtenue à l'issue du calage. On distingue principalement quatre zones
:
- au Sud d'oued H'jarr (Kélibia) où
l'aquifère circule dans les calcaires et les dolomies, la
perméabilité varie entre 10 et 12m/j,
- au voisinage de l'Oued Chiba et El K'hbir, la
perméabilité est faible, allant de 4 à 5m/j (les
dépôts d'alluvions limoneux peuvent expliquer ces faibles
valeurs),
- à proximité du barrage Chiba où la
l'aquifère circule dans les schistes, la perméabilité
varie entre 9 et 11m/j, avec 10m/j comme valeur prépondérante,
- le long de la bande côtière, elle est en
général de l'ordre de 8m/j, ce qui est légèrement
inférieur à l'ordre des perméabilités
mesurées.
Figure 5 : Carte de la perméabilité
après calage du modèle plio-quaternaire de l'aquifère
de la côte orientale.
Figure 6: Comparaison entre la carte
piézomètrique de 1970 observée et celle simulée par
la modèle en régime permanent.
Ce calage du modèle en régime permanent a permis
la reconstitution du bilan global de l'aquifère par évaluation de
ses différentes composantes (Fig.7).
ENTRÉES À LA NAPPE (+) :
Recharge par les oueds+barrage =
161666,25m3/j
SORTIES DE LA NAPPE (-) :
Drainage par les oueds =
95144,7m3/j
SORTIES DE LA NAPPE (-) :
Pompage des puits + évaporation =
147945,2m3/j
ENTRÉES À LA NAPPE(+) : Recharge
directe et indirecte =81422,38m3/j
AQUIFÈRE PLIO-QUATERNAIRE
DE LA CÔTE ORIENTALE
Figure 7 : Bilan hydrogéologique du
modèle plio-quaternaire de l'aquifère de la côte
orientale.
MODELISATION DE L'AQUIFERE PLIO-QUATERNAIRE EN REGIME
TRANSITOIRE ET BILAN
Cette partie, consacrée au modèle en
régime transitoire représente une continuité au calage en
régime permanent. L'objectif principal de cette étape de la
modélisation hydrodynamique est le calage du coefficient
d'emmagasinement et l'homogénéisation des données du
système hydraulique en régime transitoire. Les pompages n'ayant
commencé à se développer qu'a partir de 1973, ce qui
laisse supposer que la piézométrie de 1970 s'est maintenue
jusqu'à cette date.
La phase de simulation est considérée de 1975
à 2005. L'absence de données consistantes nous a conduit à
subdiviser cette phase en 3 périodes avec un pas de temps de 5 ans.
Les deux premières parties sont utilisées pour
le calage du modèle et la troisième partie est utilisée
pour la vérification.
La première période (1975-1993) se
caractérise par une exploitation moyenne de 40Mm3/an. Les
niveaux piézomètriques observés dans quelques puits de
contrôle sont utilisés pour le calage du modèle. Cette
phase servira pour étudier le comportement général de
l'aquifère plio-quaternaire et produire la carte
piézomètrique qui sera utilisée comme carte
d'initialisation de la deuxième période.
La deuxième période (1994-2001) est la phase la
plus importante pour la construction du modèle. En effet, le
réseau piézomètrique est constitué 28 puits de
contrôle, répartis sur tout le domaine de l'aquifère
plio-quaternaire fournit une chronique de référence bien plus
riche. Une fois le modèle calé, il est validé sur une
troisième période (2002-2005).
Pour calculer la recharge de chaque période, deux
coefficients d'infiltration sont utilisés : 15% pour les formations
quaternaires (particulièrement pour les limons rouges superficielles en
amont) et le barrage topographique du cordon dunaire et 7% pour les
affleurements Pliocène et ces échanges latéraux avec les
séries gréseuses d'Oligo-Miocène. Le tableau 3 donne le
taux de recharge pour chaque période.
Tableau 3 : Recharge de l'aquifère
plio-quaternaire en Mm3/an par période.
Période
|
1
|
2
|
3
|
4
|
5
|
6
|
Recharge (Mm3/an)
|
65,22
|
60,32
|
63,92
|
60,25
|
34,46
|
48,44
|
L'accroissement de l'exploitation de l'aquifère
plio-quaternaire de la côte orientale est en relation avec une
évolution économique de la région. Aux années
soixante, l'exploitation se faisait par des dâlous et des seaux. Ces
techniques de captage qui ne se permettent pas l'exhaure d'un débit qui
peut affecter le régime naturel des nappes, sont actuellement
changées par des équipements modernes électriques ou
à combustion ainsi que la pratique de forage profond qui permet
l'exploitation intensive des nappes. Depuis 1974 jusqu'à actuellement,
l'exploitation de l'aquifère a connu une évolution suite à
l'électrification de plusieurs puits et à l'approfondissent
d'autres.
Le tableau 4 donne les prélèvements par
périodes de temps.
Tableau 4 : Prélèvement de
l'aquifère plio-quaternaire en Mm3/an par
période.
Période
|
1
|
2
|
3
|
4
|
5
|
6
|
Prélèvement
(Mm3/an)
|
18,20
|
32,83
|
34,50
|
43,93
|
46,50
|
50
|
Le calage est basé sur le suivi
piézométrique disponible au niveau de 8 points d'observation
choisis pour leurs séries longues parmis le réseau de
contrôle existant (Fig.8).
Figure 8 : Localisation de 8 points d'observation
utilisés dans le calage en régime transitoire.
La figure 9 montre l'évolution de la
piézométrie calculée et celle mesurée durant la
période de simulation. Dans l'ensemble, la piézométrie
calculée au droit du contrôle présente des résultats
satisfaisants avec celle mesurée.
Figure 9. Comparaison de l'évolution de la
piézométrie calculée et mesurée dans deux puits de
surveillance (IRH : 8420 et 8862).
En l'absence de mesures disponibles de la porosité
efficace, on a considéré que chaque faciès
géologique à une porosité relativement constante. La carte
de la répartition de la porosité efficace obtenue par le calage
du modèle est assez homogène, avec les caractéristiques
suivante (Fig.10) :
- dans la zone côtière, à l'Est de Diarr
El Hojjaj, une porosité efficace de 9% correspond à
l'aquifère des calcaires gréseux qui est doté de bonnes
capacités d'emmagasinement,
- pour les argilo-grézeuses, elle varie de 6% dans la
bande côtière à 4 % dans le reste de la zone,
dénotant un aquifère micro-fissuré et poreux, peu
capacitif,
- Pour les marno-calcaires, elle est de 5%, confirmant le
caractère plus capacitif de ces formations.
Figure 10 : Porosité et emmagasinement
spécifique de l'aquifère plio-quaternaire de la côte
orientale du Cap-Bon.
Ce calage du modèle en régime transitoire a
permis la reconstitution du bilan global de l'aquifère par
évaluation de ses différentes composantes (Fig.11). Il
dépend de la recharge et du régime de l'exploitation, ces deux
paramètres présentent une forte irrégularité.
Figure 11 : Bilan hydrogéologique du
modèle plio-quaternaire de l'aquifère de la côte
orientale en régime transitoire.
Les cartes piézomètriques de 2002 et 2005
produites par le modèle coïncide, sur une grande part du domaine
de l'aquifère, avec la carte observée. Cépondant, la
partie amont présente une erreur importante, peut être liée
à des erreurs d'observation ou à des
hétérogénéités géologiques locales,
par exemple au voisinage du puit de contrôle n0 0001.
Figure 12 : Comparaison entre la carte
piézomètrique observée et modelée de 2002 en
régime transitoire de l'aquifère plio-quaternaire de la
côte orientale.
Figure 13 : Comparaison entre la carte
piézomètrique observée et modelée de 2005 en
régime transitoire de l'aquifère plio-quaternaire de la
côte orientale.
Sorties du modèle de transport
«MODPATH »
Le modèle de simulation MODPATH a la
propriété de représenter la migration des flux de
pollution à l'interface des aquifère côtiers et de simuler
le cheminement des particules de sel (chlorure et sulfate).
En effet, le code numérique de ce modèle se base
sur la différence de gradients de concentration en sel. Le cheminement
se fait de la zone à gradient fort vers la zone la zone à
gradient faible.
Figure 14: Cheminement des particules de sel dans la
région de Korba simulée par le modèle
`MODPATH'.
L'OUTPUT du modèle de simulation MODPATH (Fig.14)
confirme bien une invasion saline d'origine marine provoquant la l'augmentation
de la salinité des eaux de l'aquifère plio-quaternaire. En plus,
les flux verticale de la pollution met en relief une salinisation d'origine
anthropique due à l'usage intensif des engrais chimique et au lessivage
des terres agricoles lors de l'irrigation.
En effet les lignes rouges indiquent le sens de cheminement et
de déplacement des particules de sel ainsi que leurs positions
après chaque jour.
GESTION DES RESSOURCES EN EAU DANS LA ZONE
CÔTIERE DU CAP-BON
Les résultats du modèle hydrodynamique en
régime transitoire montrent que l'aquifère côtière
de la côte orientale du Cap-Bon est surexploitée avec un
déstockage moyen de l'ordre de 4 Mm3/an. Ce déstockage
a engendré la baisse du niveau piézométrique et la
dégradation de la qualité de l'eau, en raison de l'intrusion
marine. Ces deux facteurs limitent le développement agricole dans la
zone.
De ce fait, des mesures devront être prises pour
améliorer la qualité de l'eau. Pour le secteur en état de
surexploitation (la zone Korba et Menzel Horr), une stabilisation des pompages
à leur niveau actuel couplée à une recharge artificielle
de l'aquifère permettront vraisemblablement une amélioration de
la qualité des eaux de la nappe. Pour cela on a adopté une
méthodologie basée sur l'index d'amélioration de la
salinité qui a été défini en comparant le rapport
eau douce / eau de mer dans le bilan de 2005 par rapport à la situation
actuelle (2002) qui est utilisé comme référence, les
valeurs d'index inférieures à 1 témoignent d'une
détérioration de la qualité de l'eau, les valeurs
supérieures à 1 dénotent une amélioration qui est
d'autant plus importante que l'index est élevé. Après
plusieurs scénarios d'injection, il s'est avéré que
l'impact positif de ce projet ne se fait sentir qu'a partir d'un débit
d'injection supérieur à 100l/s. Deux scénarios ont
été choisis : a - injection de 100l/s dans les mailles (108/63) ;
(109/62) ; (110/61), b - injection de 200l/s dans les mailles (85/75) ;
(85/76) ; (85/77) ; (85/78).
Eventuellement les ressources en eau superficielles de Lebna
et Bouleddine peuvent être utilisées pour accomplir la recharge
artificielle l'aquifère côtière. Les résultats de la
recharge artificielle sont donnés par le tableau 5 :
Tableau 5 : Effet d'une recharge artificielle sur la
qualité des eaux de l'aquifère plio-quaternaire de côte
orientale.
|
Situation en 2002
|
|
Situation en 2005
|
Débit de recharge l/s
|
-
|
|
100
|
200
|
Apport eau douce l/s
|
226,36
|
|
212,49
|
212,49
|
Entrée eau de mer l/s
|
20,5
|
|
16,5
|
9,42
|
Eau douce/ eau de mer
|
11,04
|
|
12,87
|
22,55
|
Index d'amélioration de
salinité
|
1
|
|
1,15
|
2,32
|
Piézométrie minimum (m)
|
-5
|
|
-8,7
|
-5,7
|
La recharge artificielle dans la zone menacée, a un
effet direct sur la salinité de la zone en réduisant les
entrées d'eau de mer et en provoquant une remontée de la
piézométrie. Un débit de recharge supérieur
à 200l/ s est nécessaire pour obtenir une amélioration
significative de la salinité dans le secteur Korba-Menzel Horr avec un
rapport eau douce / eau de mer supérieur à 2 et une
piézométrie minimum égale à - 5,7m NGT largement
inférieure à la piézomètrie minimum observée
en 2005 qui est de -15m NGT.
CONCLUSIONS
La modélisation hydrodynamique de l'aquifère
plio-quaternaire de la côte orientale du Cap-Bon par le code Modflow a
permis de comprendre le fonctionnement hydrodynamique de l'aquifère, en
estimant les échanges latéraux de l'aquifère avec la mer.
Le calage du modèle en régime permanent a permis la
détermination de la perméabilité qui varie de 5 à
12m/j. Les porosités et l'emmagasinement spécifique sont
déduits à partir du calage du modèle en régime
transitoire. La porosité de l'aquifère plio-quaternaire de la
côte orientale du Cap-Bon est comprise entre 3 et 9%. L'emmagasinement
spécifique oscille entre 3 10-5 et 2 10-3
m-1. La simulation des scénarios dans la zone Korba-Menzel
Horr à montré qu'un débit d'injection de 200 l/s permet
d'inverser le gradient hydraulique et donc de faire reculer le biseau
salé dans cette zone.
La modélisation de l'aquifère suggère la
présence de valeurs piézomètriques erronées. Ces
erreurs semblent liées aux données topographiques ou à la
hétérogénéités géologiques locales.
Des compagnes piézomètriques et topographiques sont
nécessaires pour améliorer le modèle. Le modèle
ainsi construit n'est qu'un premier outil de synthèse et de
contrôle des données hydrogéologiques. Ses insuffisances
nous poussent à compléter le jeu de données actuellement
disponibles. Ce n'est qu'ultérieurement que devra être
envisagé le développement d'un modèle plus fiable, pouvant
aider à la gestion de ressources en eaux souterraines de la
région.
Références
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cas : Nebhana et Chiba. PFE. INAT, 116p.
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à l'étude de la géologie, Stratigraphie, Tectonique et
Sédimentologie. Thèse de 3ème cycle,
Faculté des sciences de Tunis, 203 p.
3- Chihi L. (1995). - les fossés
néogènes à quaternaire de la Tunisie et de la mer
pélagienne : une étude structurale et signification dans le
cadre géodynamique de la Méditerranée centrale. Doctorat
d'Etat. Univ. De TunisII. Fac. Sc. De Tunis. 324p.
4- C. R. D. A Nabeul (2005). - Rapport
d'activité.
5- Ennabli M. (1980). - Etude
hydrogéologique des aquifères de Nord-Est de la Tunisie par une
gestion intégrée des ressources en eau. Thèse de doctorat
d'état.
6- Jemai S. (1998). - Evolution de
l'état de la nappe de Korba. Etude hydrogéochimique et
modélisation numérique, D. E. A, I. N. A. T. Tunis, 180 pages.
7- Macdonald ,M., G. & Harboaugh A., W., (1988).-
A modular three-dimensional finite difference groundwater flow
model.
8- Zheng C. and Wang P.P. (1999). -
MT3DMS, A modular three-dimensional multispecies transportmodel for
simulation of advection, dispersion and chemical reactions of contaminants in
groundwater systems: Vicksburg, Miss., Waterways Experiment Station, U.S. Army
Corps of Engineers.
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