EPIGRAPHE
« Si la justice de chaque État doit en
général se borner à punir les crimes commis dans son
territoire, il faut excepter de la règle les scélérats
qui, par la qualité et la fréquence habituelle de leurs crimes,
violent toute sûreté publique et se déclarent les ennemis
du genre humain. »
Emmerich DE VATTEL, Le droit des gens ou les principes de la
loi naturelle. Appliquée à la conduite et aux affaires
des Nations et des Souverains, Paris, Rey et Gravier, 1820.
DEDICACE
A la mémoire de notre tante, MBABAZI
Caritas ;
A notre grand-père, NYAMUCAHAKOMEYE
Anselme ;
A nos père et mère, MBEMBE NDOY Égide
et MBAKESHAYEZU Anne Marie ;
A tous nos frères et soeurs ;
A toute notre famille.
REMERCIEMENTS
Ce mémoire est le fruit du concours des personnes
tellement nombreuses qu'il nous serait ingrat de ne pas leur consacrer ne
serait-ce que quelques lignes en guise de reconnaissance.
Nos remerciements au Dieu Tout Puissant de continuer à
nous prêter cet oxygène qui nous a permis et continue à
nous permettre de nous tenir débout.
Nous remercions vivement nos géniteurs pour tous les
sacrifices qu'ils ont consentis pour faire de nous ce que nous sommes en passe
de devenir.
Que monsieur Jules Marius NTETE trouve aussi à travers
ces lignes l'expression de notre profonde gratitude pour avoir accepté
de diriger diligemment et avec tout dévouement ce travail en
dépit de ses multiples autres tâches !
Ce travail ne se serait pas réalisé à
temps utile sans l'affection et les encouragements de tous nos frères et
soeurs, cousins et cousines, oncles et tantes. A chacun d'eux, nous disons
merci.
Nous ne pouvons pas nous permettre d'oublier d'adresser nos
vifs remerciements aux familles SEMUKANYA Jean et UMULISA Eugénie pour
leur soutien d'ordre divers.
Nous sommes aussi reconnaissants envers tous nos ami(e)s et
connaissances dont la présence à nos cotés a balisé
notre parcours académique d'une très bonne humeur.
Nos reconnaissances s'adressent également au corps
professoral de la Faculté de Droit de l'Université Nationale du
Rwanda pour le dévouement dont il a fait preuve tout au long de notre
formation universitaire. Nous réitérons aussi nos remerciements
envers le TPIR et plus particulièrement au staff du centre de
documentation « Umusanzu » pour sa
serviabilité.
Enfin, que toute personne qui, de près ou de loin, a
nourri le voeu de nous voir franchir cette étape de la vie
académique reçoive l'expression de notre reconnaissance.
bindael@yahoo.fr
SIGNES ET ABREVIATIONS
§ : paragraphe
AGNU : Assemblée
Générale des Nations Unies
art. : article
c. : contre
CDI : Commission du Droit
International
chap. : chapitre
CIJ : Cour Internationale de
Justice
Coll. : Collection
CPI : Cour Pénale
Internationale
DEA : Diplôme d'Etudes
Approfondies
DIH : Droit International
Humanitaire
Dir(s) : Directeur(s)
Éd(s). : Éditeur(s)
éd. : édition
etc. : et cætera
(et les autres choses)
FIDH : Fédération
Internationale des Droits de l'Homme
NEPAD : New Partenership for
Africa's Development (Nouveau partenariat
pour le développement
de l'Afrique)
ONG : Organisation Non
Gouvernementale
ONU : Organisation des Nations
Unies
Op. cit. : Opere citato
(ouvrage déjà cité)
OTAN : Organisation du Traité
Atlantique Nord
OUA : Organisation de
l'Unité Africaine
p. : page
pp. : pages
PUF : Presses Universitaires de
France
RCADI : Recueil des Cours de
l'Académie de Droit International de La Haye
RDC : République
Démocratique du Congo
RGDIP : Revue Générale
du Droit International Public
RICR : Revue Internationale de la Croix
Rouge
SOFAs : Status Of Forces
Agreements
TPI : Tribunal Pénal
International
TPIR : Tribunal Pénal
International pour le Rwanda
TPIY : Tribunal Pénal
International pour l'ex-Yougoslavie
UA : Union Africaine
Voy. : voyez
TABLE DE MATIERES
EPIGRAPHE i
DEDICACE ii
REMERCIEMENTS iii
SIGNES ET ABREVIATIONS iv
TABLE DE MATIERES vi
INTRODUCTION GENERALE 1
LA PROBLÉMATIQUE DU SUJET 2
CHOIX ET INTERET DU SUJET 3
OBJECTIFS DU TRAVAIL 4
METHODOLOGIE DU TRAVAIL 5
DELIMITATION DU SUJET ET SUBDIVISION DU TRAVAIL 5
CHAPITRE I : GENERALITES SUR LA JUSTICE PENALE
INTERNATIONALE 6
SECTION PREMIERE : BREF HISTORIQUE DE LA JUSTICE PENALE
INTERNATIONALE 6
§ 1. UN DEBUT HESITANT 6
§ 2. DE NUREMBERG A ROME : UN PROCESSUS ESSOUFLANT
8
A. L'espoir suscité par les tribunaux de Nuremberg et de
Tokyo 8
B. La création d'une juridiction pénale
internationale hypothéquée par les
Relations internationales. 9
1) L'impossible création d'une juridiction
pénale internationale pendant la
guerre froide 10
2) Le ballon d'oxygène des tragédies des
années 90. 10
C. L'aboutissement d'une longue démarche 12
SECTION II : LES OPPORTUNITES D'UNE JUSTICE PENALE
INTERNATIONALE 12
§ 1. LA COMPETENCE UNIVERSELLE DES JURIDICTIONS NATIONALES
13
A. Fondements juridiques à l'égard des
« crimes graves » 13
B. La poursuite des crimes internationaux devant les
juridictions nationales 14
§ 2. LES TRIBUNAUX PENAUX INTERNATIONAUX AD HOC
17
A. Les compétences des Tribunaux pénaux
internationaux 17
1) La compétence matérielle (ratione
materiae) 17
2) La compétence territoriale et personnelle
(ratione loci et personae) 18
3) La compétence temporelle (ratione
temporis) 18
B. Quelques apports des TPI en droit international 19
1) Le statut propre du crime de génocide 19
2) Des progrès en droit international humanitaire
20
3) L'humanité érigée en sujet de droit
21
4) La reconnaissance internationale de la primauté
des droits humains 22
5) L'accélération de la mise en place de la
Cour pénale internationale. 23
§ 3. LA COUR PENALE INTERNATIONALE 24
A. La CPI est différente d'autres juridictions
internationales existantes 25
B. L'apport de la création de la CPI sur la scène
internationale 26
SECTION III : QUELQUES CRITIQUES SUR LA JUSTICE PENALE
INTERNATIONALE 26
§ 1. LIMITATIONS A LA SOUVERAINETE NATIONALE 27
A. En ce qui concerne la compétence universelle des
juridictions nationales 27
B. En ce qui concerne le statut de la Cour pénale
internationale 29
§ 2. UNE MISE EN DANGER DE LA RECONCILIATION NATIONALE
30
CHAPITRE II : LES REGLES DE LA COMPETENCE DE LA COUR
PENALE INTERNATIONALE 32
SECTION PREMIÈRE : LA COMPETENCE DE LA COUR 32
§1. COMPÉTENCE MATÉRIELLE (RATIONE
MATERIAE) 33
A. Généralités 33
B. Le noyau dur des crimes 34
1) Le crime de génocide 34
1°. Le développement du crime de
génocide 35
2°. Le contenu de l'article 6 35
2)Le crime contre l'humanité 38
1°. Développement du crime contre
l'humanité 39
2°. Le contenu de l'article 7 39
3)Le crime de guerre 44
1°. Le crime de guerre en droit international 44
2°. Le crime de guerre commis au cours des conflits
armés internationaux 45
a) Violations graves des quatre conventions de
Genève de 1949 45
b) Violations des lois et coutumes de la guerre
46
3°. Crimes de guerre commis au cours des conflits
armés internes 48
C. Autres incriminations 50
§2. LA COMPETENCE TEMPORELLE (RATIONE TEMPORIS )
51
A.Une compétence temporelle mobile 51
B. Ratione temporis et les crimes continus 52
§3. LA COMPETENCE TERRITORIALE (RATIONE LOCI)
53
A. La problématique de la détermination des
limites d'un État 53
B. La question des crimes produisant des effets sur le
territoire d'un autre État 55
§4. LA COMPETENCE PERSONNELLE (RATIONE PERSONAE)
56
A. Pour une responsabilité pénale individuelle
56
B. La question des immunités 60
SECTION II : LA SAISINE ET LA RECEVABILITE DES PLAINTES
DEVANT LA CPI 62
§1. LA SAISINE DE LA COUR 62
A. La saisine par un État partie 62
B. La saisine par le Procureur 63
C. La saisine par le Conseil de Sécurité des
Nations Unies 65
§2. LA RECEVABILITE D'UNE AFFAIRE DEVANT LA COUR. 67
A. Le principe de la complémentarité 67
B. Le principe de non bis in idem 70
CHAPITRE III : LIMITATIONS A LA COMPETENCE DE LA CPI
73
SECTION PREMIÈRE : LES LIMITATIONS ENDOGENES 73
§1. La non rétroactivité du Statut de Rome
73
§2. L'article 124 77
§3. Le sursis à enquêter ou à
poursuivre du Conseil de Sécurité 79
§4. Le manque d'instruments coercitifs 81
SECTION II : LES LIMITATIONS EXOGENES 83
§1. La pression américaine sur les États
signataires et les États tiers au Traité de
Rome 83
A. The American service Members Protection Act (ASPA) 84
B. Les accords du type « article 98 ». 86
§2. Les problèmes posés par la
coopération des États 91
CONCLUSION GENERALE 95
BIBLIOGRAPHIE CHOISIE 98
ANNEXES 105
INTRODUCTION GENERALE
Il y a plusieurs milliers d'années, le monde
était assemblé dans un bloc compact appelé le
GONDWANA1(*). Suite à
des mouvements tectoniques, ce bloc se serait désagrégé
pour laisser place à ce que nous connaissons aujourd'hui sous le nom des
continents. Ceux-ci, à leur tour, se sont scindés en
États.
Les États se sont alors emparés des
systèmes complexes et multiples dans leur organisation politique,
sociale et économique incluant la présence d'un exécutif,
d'un législatif et, plus tard, d'un judiciaire. Tout ce contenu
présente aujourd'hui le monde comme une mosaïque faite des
morceaux épars, différents et, souvent,
incompréhensibles.
Cependant, l'homme reconnaissant la vertu de l'unité
d'antan ne ménage actuellement aucun effort à la recherche du
Gondwana perdu.
Bien attendu, du point de vue physique ou matériel, il
est impossible de ressouder les terres à jamais séparées.
Néanmoins, dans le domaine socio-politico-économico-juridique,
des avancées manifestes sont en train d'être enregistrées
(ONU, OMC, OTAN, des ensembles régionaux divers,...). Toutes ces
tentatives d'unification s'effectuent dans le cadre de la globalisation.
Le processus de la globalisation a des nombreuses incidences
sur la souveraineté des Etats, sur leurs régimes politiques et
même sur le droit et la justice. Pour ne parler que de ce dernier point,
il convient de constater que le vingtième siècle s'est
achevé sur un paradoxe : il a été l'un des siècles
les plus violents et sanglants de l'Histoire mais il est également
apparu comme le siècle ayant posé les fondations de ce que l'on
appelle aujourd'hui communément la justice pénale
internationale.
Les promoteurs de cette justice mettent en avant un double
objectif : d'abord s'assurer que les coupables de crimes graves sont
jugés d'une façon ou d'une autre quelle que soit leur position
sociale (exigence absolue de la justice) ensuite, d'une façon indirecte,
permettre que la justice débouche sur un apaisement des conflits et une
extinction des rancoeurs (objectif de paix civil).
Pour y parvenir, on est de nos jours renvoyé à
trois types de procédures : les actions devant les tribunaux
pénaux internationaux ad hoc (TPIR et TPIY), les actions
menées dans le cadre des juridictions nationales se reconnaissant une
compétence universelle pour connaître de certains crimes sans
être liées par les critères traditionnels de
compétence territoriale ou personnelle et les actions menées
devant l'actuelle Cour Pénale Internationale (CPI).
La Cour Pénale Internationale votée en juillet
1998 par le traité de Rome attendra quatre ans pour son entrée en
vigueur et sa mise en place à la Haye (Pays Bas). Sa compétence
et ses modes de saisine ont présagé un bel envol pour cette
justice pénale internationale aux ailes tordues. Cependant, des
réticences de certains États2(*) (et non les moindres), des résistances et
même des objections farouches lui sont dores et déjà
opposées. Les États-Unis d'Amérique, tenant la tête
de la cohorte, sont allés jusqu'à voter une loi interdisant toute
coopération avec cette Cour.
1. LA PROBLÉMATIQUE DU SUJET
Plus de trois ans après l'entrée en vigueur du
Statut de Rome, aucun arrêt n'est rendu, aucune poursuite achevée.
Les récentes discussions sur sa compétence à être
saisie des dossiers de Darfour remettent en bloc son effectivité.
- La cour sera-t-elle vraiment à mesure de poursuivre
tous les criminels du monde en vertu de sa vocation universelle ? Sa
compétence n'est-elle pas assujettie à des limitations qui la
rendent inefficace envers une certaine catégorie des criminels
jusqu'à consacrer une justice à deux vitesses : la justice
des puissants contre celle des faibles ?
- L'activisme des États-Unis d'Amérique en
l'encontre de cette Cour et la position de la France3(*) n'ont-ils pas vocation à
limiter la compétence de la Cour Pénale Internationale ?
- Une compétence restreinte n'aura-t-elle pas comme
impact la limitation des poursuites devant cette juridiction à vocation
pourtant universelle ? Et le non-accomplissement de la vocation
universelle de la CPI n'est-il pas un revers à l'effectivité et
à l'efficacité de la justice pénale
internationale ?
Autant des questions qui nous permettront d'analyser les
règles de la compétence de la Cour Pénale Internationale.
Celle-ci sera analysée non pas en tant que le fruit d'un traité
multilatéral, moins encore en tant qu'une entité supranationale,
mais en qualité d'un mécanisme nouveau au service de la justice
pénale internationale. Cette étude conduira certainement à
épingler les défis auxquels la justice pénale
internationale (à travers la CPI) fait face pour engager des poursuites
dignes et efficaces.
2. CHOIX ET INTERET DU SUJET
Le choix de ce sujet était fondamentalement
aiguisé par l'importance que l'actualité juridique internationale
accorde ces derniers temps à la justice pénale internationale et,
d'une façon particulière, à la Cour Pénale
Internationale.
La Cour Pénale Internationale est confrontée
à plusieurs limitations que nous jugeons utiles d'épingler afin
d'attirer l'attention de la Communauté internationale. Nul n'ignore la
déclaration du Secrétaire Générale des
Nations-Unies, monsieur KOFFI ANNAN, qui qualifiait la mise en place de cette
juridiction de salutaire pour les générations futures. Il serait
alors absurde d'instituer une juridiction si ambitieuse et ne pas lui doter des
compétences nécessaires en vue d'engager des poursuites
efficaces.
Ce modeste travail présente un intérêt
pour les acteurs du monde international qui puiseront de sa lecture certaines
suggestions qui les orienteront à adopter des décisions ou des
résolutions positives en faveur de la protection juridictionnelle des
droits humains.
Aussi ce travail présente-t-il un grand
intérêt pour le monde académique car il vient s'ajouter
à d'autres mémoires et documents mis à la disposition des
étudiants, professeurs et chercheurs pour constituer une banque des
données, si pas suffisante, utile pour la réalisation des
recherches ultérieures.
Ce travail est, enfin, pour nous une occasion de
réflexion et de compréhension approfondie de la justice
pénale internationale, et de la Cour Pénale Internationale en
particulier.
3. OBJECTIFS DU TRAVAIL
Aux termes de ce travail, nous souhaitons :
a. Établir de façon nette et précise les
différentes imperfections ou limitations tant internes qu'externes
à la compétence de la Cour Pénale Internationale qui la
gênent à engager des poursuites dignes et efficaces ;
b. Aviser les États-parties au statut de Rome des
délicatesses qui entourent la CPI pour qu'ils en prennent compte lors
des rencontres ultérieures visant la modification des dispositions de ce
texte dans l'ultime but de revivifier tout l'espoir dont la création de
cette juridiction était porteuse ;
c. Faire un plaidoyer auprès des pays qui n'ont pas
encore ratifié le Traité de Rome en vue de les encourager
à le faire d'autant plus que la coopération sans réserve
des États est la condition sine qua non de l'efficacité
des poursuites devant cette juridiction.
d. Interpeller la Communauté internationale à
donner un coup de main utile à cette juridiction pour mener à
bien la tâche noble à laquelle elle est appelée.
4. METHODOLOGIE DU TRAVAIL
Pour trouver des réponses adéquates à la
problématique que nous avions posée, nous avons fait
référence à certaines méthodes et technique.
Les techniques et les méthodes sont
interdépendantes puisque les techniques sont considérées
comme des moyens mis à la disposition des méthodes afin de
répondre aux problèmes posés.
De ce fait, pour cerner la réalité de notre
tâche, nous avons exclusivement utilisé la technique documentaire
qui, avec les méthodes historique, analytique, comparative et
exégétique, nous a permis d'atteindre les objectifs
assignés à ce travail.
La première méthode nous a aidés à
retracer l'histoire de la justice pénale internationale en vue de
comprendre ce qu'elle est aujourd'hui pour enfin essayer de faire des
projections sur ce que sera son éventuel avenir. La méthode
analytique quant à elle nous a permis d'analyser de temps
à autre divers textes et documents relatifs à la Justice
pénale internationale. Par contre, nous avons fait recours à la
méthode comparative toutes les fois qu'il nous était
nécessaire d'établir un parallélisme entre la Cour
Pénale Internationale et d'autres types de procédures auxquelles
fait référence la justice pénale internationale. La
méthode exégétique, enfin, nous a été
très utile au moment où nous avons été
appelés à nous référer au statut de la Cour
Pénale Internationale ou autres conventions internationales pour les
analyser.
5. DELIMITATION DU SUJET ET SUBDIVISION DU
TRAVAIL
Étant donné que la justice pénale
internationale fait référence à plusieurs types de
procédures, nous nous sommes principalement attelés, dans ce
travail, sur l'impact de la compétence de la Cour Pénale
Internationale sur les poursuites à mener devant elle.
Notre travail se subdivise en trois chapitres :
après un bref panorama sur la justice pénale internationale
(Chap. I), nous nous attarderons longuement sur les règles de la
compétence de la Cour Pénale Internationale (Chap. II) avant
d'aborder les diverses limitations auxquelles les États l'ont soumise
(Chap. III)
CHAPITRE I : GENERALITES SUR LA JUSTICE PENALE
INTERNATIONALE
La justice pénale internationale est le fruit d'une
union entre deux branches de droit a priori incompatibles4(*). Dans la doctrine juridique
classique, en effet, droit national et droit international s'excluent
réciproquement. Ils n'ont pas la même échelle : l'un
ne connaît que les États, l'autre que les individus. Le premier
est un droit de coordination des souverainetés indépendantes, le
second un attribut fondamental de chacune des souverainetés.
Ainsi, dans ce chapitre nous tenterons d'éclaircir la
notion de la justice pénale internationale en retraçant, d'abord,
son évolution historique (Section I), ensuite en évoquant les
différentes opportunités d'intervention d'une justice
pénale internationale (Section II) et, enfin, en essayant de ressortir
quelques critiques que cette justice nourrit (Section III).
SECTION PREMIERE : BREF HISTORIQUE DE LA JUSTICE
PENALE INTERNATIONALE
La justice pénale internationale n'est pas un
« deus ex machina »5(*), elle est le résultat d'âpres travaux,
d'inestimables sacrifices, d'une très longue patience, mais surtout, le
résultat d'une volonté soutenue de la communauté
internationale. Ses plus proches prémisses sont repérées
au sein du traité de Versailles qui mit fin à la première
Guerre mondiale (§1). Mais c'est surtout le Tribunal Militaire de
Nuremberg qui est considéré comme ayant lancé sa
codification. De là, les tribunaux pénaux internationaux ad
hoc viendront lui emboîter les pas pour culminer après des
sérieuses tractations à l'actuelle Cour Pénale
Internationale (§2).
§ 1. UN DEBUT HESITANT
Depuis l'Antiquité, la responsabilité de
l'individu peut être engagée du fait de ses agissements
privés contraires aux « règles internationales ». On se
souvient, à titre d'exemple, de la loi Gabinia6(*) votée en 67 avant
notre ère par le Sénat romain et investissant Pompée du
pouvoir proconsulaire sur tout Mare nostrum pour éradiquer la
piraterie, « la forme la plus typique et la plus ancienne des crimes
internationaux »7(*)
ou, plus récemment, la prohibition de la traite d'esclaves, «
premier type de crime international »8(*).
L'extension de cette responsabilité à des
individus agissant à titre public et l'institutionnalisation de ce
phénomène normatif, heurtant de plein front les
souverainetés étatiques, furent longues à
émerger.
Il fallut attendre le Traité de Versailles du 28 juin
19199(*), le Traité
de Sèvres du 10 août 192010(*) et surtout, la création des tribunaux
militaires internationaux de Nuremberg11(*) et de Tokyo, après la seconde guerre mondiale
et son cortège d'atrocités, pour que le droit international
public consacre qu'un individu agissant au nom de l'État puisse se
rendre coupable, par son action personnelle, d'actes d'une gravité telle
que l'État ne peut plus « faire écran »
Ainsi la première tentative de mise en accusation fut
celle du roi de Prusse et Empereur d'Allemagne, Guillaume II. Devant être
jugé par un tribunal spécial, cette première
expérience se soldera par un échec. En fait,
réfugié aux Pays-Bas, il fallait extrader Guillaume II pour le
juger. La demande en fut faite, sans grande conviction, et les Hollandais
refusèrent l'extradition. Guillaume II mourut en 1941 aux Pays-Bas
occupés par l'Allemagne nazie.
A notre avis, même si cette tentative fut infructueuse,
elle a le mérite d'avoir posé que les individus pouvaient
être poursuivis devant des juridictions internationales, en tout cas en
théorie.
§ 2 . DE NUREMBERG A ROME : UN PROCESSUS
ESSOUFLANT
A. L'espoir suscité par les tribunaux de
Nuremberg et de Tokyo
Les consécrations du traité de Versailles n'ont
pas eu d'écho immédiat car dans l'entre-temps des planificateurs
et des auteurs des grands massacres ont continué à rester
à l'abri de toute poursuite jouissant alors de la bannière de
leurs Etats jusqu'au moment où l'Accord de Londres du 08 août 1945
créant le Tribunal Militaire International de Nuremberg (TMIN) et la
déclaration du Commandement allié au Japon créant son
alter ego à Tokyo ont consacré la responsabilité
pénale internationale des individus agissant en tant qu'agents publics.
Désormais ils ne pouvaient plus s'abriter derrière leur
rôle subalterne ni derrière la souveraineté de l'Etat au
nom duquel ils prétendaient agir.
C'est dans cet esprit que les gouvernements de la
Norvège, de la Hollande, de la Belgique, du Luxembourg, de la Pologne,
de la Yougoslavie, de la Tchécoslovaquie et de la Grèce ainsi que
le Comité national français réfugiés à
Londres ont décidé de collaborer afin d'assurer le
châtiment de tous les coupables : c'est la déclaration de Saint
James Palace du 12 janvier 1942. Puis, les Etats-Unis, l'Union
soviétique et la Grande-Bretagne ont publié à Moscou, le
30 octobre 1943, une déclaration12(*) affirmant leur détermination à
châtier les criminels de guerre après la victoire.
A la fin de la guerre deux juridictions sont
créées : le Tribunal militaire international de Nuremberg par
l'accord de Londres du 8 août 1945 et le Tribunal international pour
l'extrême Orient (Tribunal de Tokyo) par une déclaration du
Commandant suprême des Forces Alliées le 19 janvier 1946.
Nous sommes convaincus que ces procès ont une valeur
exemplaire devant l'histoire, ils sont essentiels dans le combat contre l'oubli
et le négationnisme. Ces tribunaux n'ont pas eu qu'à juger les
crimes de guerre mais ils ont eu à connaître également,
pour la toute première fois, du crime contre l'humanité dont
l'accord de Londres a le mérite d'avoir donné la première
définition. Une autre chose à souligner c'est que la
qualification des infractions ainsi que la fixation des peines étaient
indifférentes de la qualité officielle du prévenu13(*).
Malgré leurs apports, le tribunal de Nuremberg et celui
de Tokyo ont été sujets à vives critiques pour deux
raisons majeures : l'application de la justice du vainqueur sur le
vaincu14(*) et la
violation du principe nullum crimen nulla poena sine lege15(*), mais cela ne peut nous
empêcher de dire, sans peur d'être contredit, que le Tribunal de
Nuremberg a dessiné les fondements du droit pénal international
moderne.
B. La création d'une juridiction pénale
internationale hypothéquée par les Relations
internationales.
Les Nations Unies ont très tôt voulu
conférer un prolongement aux juridictions de Nuremberg et de Tokyo
notamment par l'adoption par l'Assemblée Générale des
Nations Unies16(*) en 1948
de la Convention de Genève sur la prévention du crime de
génocide17(*) mais
sur une toile de fond dominée par la guerre froide et la
décolonisation, toute avancée était illusoire. Seuls les
crimes perpétrés en ex-Yougoslavie et au Rwanda contre des civils
viendront alors souligner l'urgence de la création d'une instance
permanente pour en connaître.
1) L'impossible création d'une juridiction
pénale internationale pendant la guerre froide
Les premières initiatives des Nations Unies en la
matière se fondent sur le statut et la juridiction du tribunal de
Nuremberg approuvés par les résolutions du 11 décembre
1946. Une "commission pour le développement progressif du droit
international et sa codification" est alors instituée. Le
représentant français, M. Henri DONNEDIEU DE VABRES, juge au
Tribunal de Nuremberg, soumet en 1947 à cette commission un
mémorandum contenant son Projet de création d'une juridiction
criminelle internationale, mais sa proposition ne parvient pas à
réunir l'accord général parce qu'elle
« dépasse la compétence de la commission ».
Une résolution du 21 novembre 1947 a confié
à la Commission du Droit International (CDI) le soin d'élaborer
un code des crimes contre la paix et la sécurité de
l'humanité ; une résolution du 9 décembre 1948, quant
à elle, a chargé la CDI d'examiner la création d'une cour
pénale internationale. Elle est l'aboutissement des débats sur la
Convention du même jour (9 décembre 1948) qui prévoiyait
dans son article 6 la possibilité de traduire les personnes
accusées d'un tel crime "devant la Cour criminelle internationale qui
sera compétente à l'égard de celles des parties
contractantes qui en auront reconnu la juridiction".
Mais par la résolution du 14 décembre 1954,
l'Assemblée générale décidera de suspendre la
discussion de ce projet jusqu'à la reprise de celle portant sur la
définition de l'agression, premier des crimes internationaux, ainsi que
sur le projet pour un code des crimes contre la paix et la
sécurité de l'humanité. La définition du crime
d'agression en période de guerre froide resta problématique et la
procédure s'enlisa jusqu'à la chute du mur de Berlin.
2) Le ballon d'oxygène des tragédies des
années 90.
Si entre 1942 et 1992 aucun des grands massacres qu'a connus
notre planète n'a pu mobiliser l'opinion internationale en faveur de la
justice pénale internationale, les raisons de cette inertie n'ont rien
de mystérieux : elles sont bien politiques. Pour la
communauté internationale, le Biafra ou l'horreur des khmers rouges
entre autres sont des affaires internes. Et au nom du principe de la
non-ingérence, il fallait bien se tenir à l'écart.
Il faut attendre les années 90 pour constater un regain
de l'idée d'une justice pénale internationale. Au cours de
l'année 1991, un conflit armé éclate entre plusieurs Etats
de la Yougoslavie. Le conflit lui-même et les atrocités commis
entre les combattants ont interpellé le Conseil de
Sécurité des Nations Unies d'user du chapitre VII de la Charte
des Nations Unies pour gérer cette crise. Dans le même ordre
d'idées, en avril 1994 - pendant que tous les regards sont
tournés vers le Kossovo - les présidents du Rwanda et du Burundi
sont assassinés à la suite des tirs de missiles sur leur avion
commun. Dans quelques heures, une large campagne de massacre visant
essentiellement les civils tutsis gagna toute l'étendue de la
République Rwandaise.
Devant ces crimes particulièrement révoltants et
médiatisés commis dans les différents conflits
armés depuis plus de 4 ans en ex-Yougoslavie et face au génocide
perpétré entre avril et juillet 1994 au Rwanda
« provoquant une catastrophe humanitaire sans précédent
dans le premier cas et à l'échelle mondiale dans le
second »18(*)et
sous la pression de nombreux rapports émanant d'instances des Nations
Unies, d'organisations non-gouvernementales et des sources privées ayant
révélé ou confirmé une « victimisation
à grande échelle », le Conseil de
Sécurité des Nations Unies par ses résolutions 808 (1993)
et 955 (1994) décidait, en vertu de son pouvoir de maintien de la paix,
d'instituer respectivement le Tribunal Pénal International pour
l'Ex-Yougoslavie (TPIY) et le Tribunal Pénal International pour le
Rwanda (TPIR).
De tous les reproches formulés à l'encontre de
ces tribunaux, personne ne peut leur en vouloir d'avoir démontré
pour la toute première fois qu'en pratique une justice pénale
internationale sans racine dans quelques pays que ce soit et pouvant juger les
plus odieux des criminels n'était pas du domaine de l'utopie. Si
Nuremberg a eu le mérite d'avoir codifié pour la première
fois dans l'histoire de l'humanité la notion de la justice pénale
internationale, c'est aux Tribunaux Pénaux Internationaux ad
hoc qu'appartient la palme d 'or de sa mise en effectivité
réelle comme le souligne si bien Antoine GARAPON :
« Voici donc, enfin, une justice, une vraie, qui accuse
régulièrement un chef d'Etat sur la base des véritables
instruments juridiques (...) et non pas une fois le crime consommé comme
à Nuremberg »19(*)
Certes, la popularité dont ne tardèrent de jouir
les Tribunaux Pénaux Internationaux ad hoc a évidemment
hâté la décision de l'établissement d'une Cour
Pénale Internationale.
C. L'aboutissement d'une longue
démarche
A proprement parler, ce fut Trinité-et-Tobago qui
ramena la question de créer une Cour pénale internationale sur
l'agenda politique des Nations Unies20(*). Par sa résolution 44/39, l'Assemblée
Générale des Nations Unies demanda à la CDI de mentionner
cette question à l'ordre du jour de sa session de 1990.
En 1993, profitant de l'impulsion amenée par la
création du TPIY, la CDI présenta à l'Assemblée
Générale des Nations Unies un projet de statut21(*). C'est ainsi que les
représentants de plus de cents pays et des centaines d'ONG se sont alors
réunis du 17 mars au 4 avril 1998 à New York, dans le cadre du
Comité préparatoire pour l'établissement d'une Cour
pénale internationale.
Après des laborieuses tractations, les Etats-membres de
Nations Unies se sont enfin réunis le 15 juin 1998 à Rome pour
parachever la tache historique que fut la création de la Cour
pénale internationale.
L'idée sous-jacente de la mondialisation de la justice
pénale que contient le statut de Rome fait que la création de la
CPI apparaît comme un pas géant sur la voie du respect universel
des droits de l'homme.
SECTION II : LES OPPORTUNITES D'UNE JUSTICE PENALE
INTERNATIONALE
Avant la cruauté dont l'homme de notre siècle a
fait preuve d'excellence, une justice pénale internationale
n'était simplement pas pensable faute d'un accord politique sur les
règles communes à appliquer dans des cas internationaux. Il
était aberrant de concevoir un panel des juges, dénués de
tout lien avec le crime, tabler et condamner des coupables. Quelle serait leur
légitimité étant donné que le droit international
attribuait cette compétence exclusivement aux Etats dans lesquels le
crime a été commis ?
Pour pallier cette difficulté et contourner le niveau
central de l'Etat qui demeure le lieu privilégié de la justice,
la justice pénale internationale renvoie de nos jours à trois
types de procédures : les actions sont menées devant les
juridictions nationales se reconnaissant une compétence universelle
(§1), les poursuites peuvent être introduites devant les tribunaux
pénaux internationaux (§2) ou devant l'actuelle Cour pénale
internationale (§3).
§ 1. LA COMPETENCE UNIVERSELLE DES JURIDICTIONS
NATIONALES
A. Fondements juridiques à l'égard des
« crimes graves »
Classiquement, la compétence d'une juridiction d'un
Etat à l'égard d'un crime est limitée aux principes de
territorialité et de personnalité; ce qui signifie qu'elle ne
peut s'exercer que si le crime a été commis sur le territoire de
cet Etat ou si le criminel est l'un de ses ressortissants ou encore si le
ressortissant de ce pays en est la victime.
Une exception a toutefois été faite pour les
crimes les plus graves22(*).
Les
quatre Conventions
de Genève de 1949 et les deux Protocoles additionnels23(*) ont prévu une
compétence universelle des juridictions nationales à
l'égard des violations graves du droit international humanitaire. Tout
État-partie à ces conventions est compétent pour juger
toute personne présumée coupable d'infractions graves se trouvant
sur son territoire quelle que soit la nationalité de cette personne ou
le lieu où elle a commis les infractions24(*).
De plus, l'article 88 du Protocole additionnel aux Conventions
du 12 août 1949 "relatif à la protection des victimes des conflits
armés internationaux" (Protocole Additionnel I du 8 juin 1977) stipule
que "Les Hautes Parties contractantes s'accorderont l'entraide judiciaire la
plus large possible dans toute procédure relative aux infractions graves
aux Conventions et au présent Protocole" et prévoit une
coopération en matière d'extradition.
De même la
Convention
contre la Torture et les autres peines ou traitements cruels, inhumains ou
dégradants, prévoit à son article 7.1 que "l'Etat
partie sur le territoire sous la juridiction duquel l'auteur
présumé d'une infraction visée à l'article 4 est
découvert, s'il n'extrade pas ce dernier, soumet l'affaire, dans les cas
visés à l'article 5, à ses autorités
compétentes pour l'exercice de l'action pénale."
La compétence universelle des juridictions nationales
à l'égard des crimes contre l'humanité et des crimes de
génocide n'a pas été établie en termes
précis par des textes internationaux mais est souvent
considérée comme faisant partie du droit international
coutumier25(*).
B. La poursuite des crimes internationaux devant les
juridictions nationales
Au lendemain de la seconde guerre mondiale et à la
suite des procès de Nuremberg et Tokyo, les juridictions nationales des
pays alliés avaient intenté de nombreuses poursuites contre des
ressortissants allemands accusés de crimes contre la paix, de crimes
contre l'humanité ou de crimes de guerre.
L'activité des juridictions nationales s'était
ensuite tarie malgré l'entrée en vigueur en 1950 des Conventions
de Genève qui leur attribue, comme il vient d'être dit, une
compétence universelle pour la répression des violations graves
du droit humanitaire. L'absence d'application de cette disposition peut
s'expliquer notamment par le fait qu'elle n'a pas été
incorporée dans toutes les législations nationales des Etats (188
Etats) qui ont ratifié les Conventions. Or, cette incorporation, si elle
n'est pas considérée comme nécessaire par un certain
nombre de pays pour lesquels les traités font automatiquement partie du
droit national26(*), est
au contraire une condition requise par la plupart des législations.
C'est aussi le cas du Rwanda.
La Belgique, quant à elle, l'a fait en adoptant la
loi du 16 juin
199327(*) "relative
à la répression des infractions graves aux conventions
internationales de Genève du 12 août 1949 et aux protocoles I et
II du 8 juin 1977, additionnels à ces conventions" révisée
par la
loi du 10
février 1999 "relative à la répression des violations
graves du droit international humanitaire". La loi de 1999 a donné
compétence universelle aux juridictions belges pour poursuivre les
violations graves du droit international humanitaire.
La Convention contre la Torture a en revanche
été incorporée dans la législation d'un certain
nombre d'Etats dont le Royaume-Uni, la France, le Canada, les Etats-Unis, les
Pays-Bas, le Rwanda...
L'affaire Pinochet a incontestablement marqué un
tournant dans la pratique de répression des crimes internationaux par
des juridictions d'Etats "étrangers" aux actes commis28(*).
A partir de 1996, les tribunaux espagnols ont accepté
de donner suite aux poursuites contre Pinochet demandées par les avocats
de victimes de la répression militaire au Chili qui avaient choisi
d'agir en Espagne - en vertu du principe de compétence universelle.
L'arrestation de l'ancien dictateur à Londres le 16
octobre 1998 a été rendue possible par l'intégration
à la législation du Royaume-Uni du principe de compétence
universelle issue de la Convention sur la torture.
En Belgique, c'est l'affaire Pinochet qui avait conduit le
juge qui l'instruisait, Damien VANDERMEERSCH, à demander la
révision de la loi de 1993. Les dispositions de la loi modifiée
permettent désormais aux juridictions belges d'accomplir un travail
pionnier dans l'élaboration, au niveau national, d'une jurisprudence
portant sur les crimes internationaux les plus graves.
La Cour d'assises de Bruxelles va d'ailleurs utiliser les
dispositions de cette loi pour juger des rwandais accusés de
participation au génocide de 199429(*) et d'autres dossiers relatifs au Rwanda seraient
toujours en instruction. C'est en outre la première fois qu'un jury
populaire est amené à se prononcer sur des faits commis à
l'occasion d'un génocide.
Les juridictions de certains Etats, dont la France, ont
également intenté des poursuites contre l'ancien dictateur
chilien en s'appuyant sur le principe de "compétence personnelle
passive" car plusieurs de leurs ressortissants avaient été
victimes de la répression du général Pinochet.
A notre humble avis, la loi belge du 16 juin 1993
reflétait exactement ce que l'on devrait entendre par la justice
pénale internationale d'autant plus que cette loi méconnaissait
tout critère de rattachement et elle ne tenait compte d'aucune
immunité.
Précisons que l'article 31, §1 de la Convention de
Vienne de 1961 sur les relations diplomatiques dispose que tout agent
diplomatique qui se rendrait suspect comme auteur ou complice est immun des
juridictions nationales du pays dans lequel il est en fonction. Les tribunaux
nationaux sont ainsi privés de tout pouvoir de sorte qu'aucune action
publique engagée contre eux ne serait recevable : il importe peu
que l'infraction soit grave ou non, ni qu'elle ait été commise
sur le territoire de l'État accréditaire ou dans un État
étranger30(*).
Le contenu de la loi belge de 1993 s'érigeait alors en
faux contre ce principe de longue date en droit international.
C'est ainsi que dans un laps de temps toutes les grosses
pointures se sont retrouvées sur le banc des accusés. En raison
du caractère progressiste de cette loi, tous les potentiels criminels se
sont levés de toute part en vue d'interpeller la Belgique à
« être compréhensive » envers les
prévenus. Pressée de l'extérieur31(*) comme de
l'intérieur32(*),
la Belgique a fini par craquer et céder.
Enfin, le principal obstacle à un jugement dans le
cadre de la juridiction nationale des personnes poursuivies étant moins
le risque de partialité que le temps qu'il faille attendre pour que les
conditions d'un procès équitable soient réunies, nous
trouvons alors justifié que la justice pénale internationale
fasse recours à des juridictions carrément internationales.
§ 2. LES TRIBUNAUX PENAUX INTERNATIONAUX AD
HOC
A. Les compétences des Tribunaux pénaux
internationaux
Les deux tribunaux pénaux internationaux ad
hoc, le TPIY et le TPIR, créés par Résolution du
Conseil de sécurité des Nations Unies ont offert à la
justice pénale internationale une autre possibilité de se
manifester. En effet, ces créations furent une innovation historique
remarquable même si la compétence de ces juridictions est
limitée dans le temps et dans l'espace. Mises à part leurs
différences des compétences, ces deux tribunaux obéissent
aux mêmes règles de procédure.
1) La compétence matérielle
(ratione materiae)
Pendant que le TPIY est compétent à
connaître du crime de génocide(art. 4), des crimes contre
l'humanité(art. 5), des violations des lois et coutumes de la
guerre(art. 3) et des infractions graves aux conventions de Genève de
1949(art. 2), le TPIR, quant à lui, connaît du crime de
génocide(art. 2), des crimes contre l'humanité(art. 3) et des
violations de l'article 3 commun aux quatre conventions de Genève de
1949(art.4)33(*).
Il faut noter que le Statut du TPIR ne contient aucun article
analogue à l'article 2 du Statut de TPIY, cependant son article 4
prévoit sa compétence sur les violations seulement de l'article 3
commun aux conventions de Genève et du Protocole Additionnel II, le
noyau du droit applicable dans des conflits armés internes
2) La compétence territoriale et personnelle
(ratione loci et personae)
Le TPIY est compétent à se saisir des
infractions ci-haut cités (pour son compte) commises sur le territoire
de l'ancienne République fédérative socialiste de
Yougoslavie lorsque ces préventions pèsent uniquement sur des
personnes physiques. Alors que le TPIR a compétence à ne juger
que des infractions perpétrées par des personnes physiques sur le
territoire du Rwanda et celui des Etats voisins à condition que ces
crimes (sur les territoires des Etats voisins) aient été commis
par des citoyens rwandais.
Cette extension du ratione loci du TPIR sur les
territoires des Etats voisins se comprend, à notre avis, par le fait que
pendant les troubles du Rwanda (1994), beaucoup des rwandais s'étaient
réfugiés dans les pays voisins (ex-Zaïre, Burundi, Tanzanie,
Ouganda) et des fois on signalait ça et là des tueries et
d'autres violations de droits humains qui, vraisemblablement, s'inscrivaient
dans la continuation des événements qui se déroulaient au
Rwanda34(*).
3) La compétence temporelle (ratione
temporis)
Faisant suite à des événements qui se
sont inscrits dans une période déterminée, il était
alors normal que leurs compétences temporelles soient
hermétiquement fixées. C'est ainsi que le TPIY ne peut poursuivre
que des crimes commis dans son ressort territorial « à partir
du 01 janvier 1991 ». Qu'il soit déjà dit en passant
que jusqu'au moment où nous sommes en train de coucher ces lignes, le
dies ad quem de cette compétence n'est pas encore
définitivement fixé quand bien même que cette tache avait
été confié au Conseil de Sécurité des
Nations Unies.35(*). Il
n'y aurait donc pas d'inconsistance juridique si jamais le procureur de ce
tribunal se résolvait à poursuivre les crimes commis après
l'an 2000.
Par contre son alter ego, le TPIR ne peut
connaître que des crimes commis entre le 01 janvvier et le 31
décembre 1994. Constatons tout de même que les juridictions
nationales rwandaises poursuivent les présumés auteurs de ces
mêmes crimes en ayant une compétence temporelle dont le dies a
quo est ramené jusqu'au 01 octobre 199036(*).
Il faut noter à ce point que les TPI ad hoc
ont toute la possibilité de dessaisir toute juridiction nationale
en vertu du principe de la primauté des TPI37(*) sur les juridictions
nationales en vue de poursuivre eux-mêmes les présumés
auteurs des infractions rentrant dans leurs compétences.
A notre avis, ce principe devrait être
matérialisé dans les textes créateurs de toutes
juridictions internationales d'autant plus qu'il constitue non seulement un
moyen de dissuasion à l'égard des autorités nationales -
en ce sens que, craignant de se voir dessaisies d'une affaire donnée,
elles ne ménageront plus aucun effort pour traquer les auteurs des
crimes odieux - mais aussi constitue une véritable garantie de la
protection des droits humains. Nous pensons que c'est à cause de son
caractère très protecteur que beaucoup d'États se sont
montrés très réticents envers ce principe lors de la
conférence de Rome jusqu'à voter comme principe de base de la CPI
son inverse, le principe de la complémentarité, avec toute
l'ambiguïté qu'elle incarne.
Il est vrai que le caractère ad hoc de ces
tribunaux pénaux internationaux ne pouvait pas satisfaire à
toutes les attentes de la justice pénale internationale mais nous
admettons que leur mise en place et les travaux abattus par eux ont enrichi et
donné un coup de pouce non négligeable au village du droit
international sur plusieurs points.
B. Quelques apports des TPI en droit
international
1) Le statut propre du crime de
génocide
Par rapport à Nuremberg (et même par rapport
à l'actuelle CPI), les TPI ne sont pas compétents pour
connaître du crime d'agression, mais voient le crime de génocide
prendre son autonomie à coté du crime contre
l'humanité.38(*)
Depuis les procès de Nuremberg et de Tokyo, le
génocide était toujours traité sous le chapeau du crime
contre l'humanité. Et même si en 1948, on est parvenu à
mettre sur pied une convention prévenant et réprimant le crime de
génocide, la nature sui generis de ce crime ne sera
confirmée que grâce aux travaux des TPI ad hoc39(*). Le génocide a
été défini par les articles 4 et 2 respectivement du
statut du TPIY et celui du TPIR comme un acte « commis dans
l'intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national,
racial ou religieux comme tel », cet acte pouvant être le
meurtre des membres du groupe, la soumission intentionnelle du groupe à
des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique
totale ou partielle ( alors que la preuve d'une telle intention n'est pas
requise pour qualifier le crime contre l'humanité) d'un groupe (alors
que le crime contre l'humanité est punissable indépendamment de
l'appartenance à groupe déterminé), à tout
moment.
2) Des progrès en droit international
humanitaire
On peut affirmer que l'apport des jurisprudences de ces
tribunaux au droit international humanitaire se situe dans trois directions
distinctes40(*) mais qui
se recoupent les unes les autres. En premier lieu, les TPI ont affirmé
le caractère coutumier d'un certain nombre de principes qui lient donc
tous les États, qu'ils soient ou non parties aux instruments
conventionnels qui les contiennent. Par le biais de la consécration du
caractère coutumier de certaines normes, ces Tribunaux ont,
deuxièmement, contribué à considérablement
rétrécir le fossé séparant les règles
substantielles applicables dans le cadre des conflits armés
internationaux et non internationaux. Enfin, par leur interprétation
parfois très libérale de certaines dispositions relativement
anciennes du droit de La Haye comme du droit de Genève, ces Tribunaux
ont contribué à une certaine adaptation du DIH pour tenir compte
des réalités modernes.
Nous pouvons, de ce fait, argumenter que, conscients des
difficultés inhérentes à toute réforme
conventionnelle, les États se seraient accordés sur la voie
coutumière pour rénover le DIH et l'adapter aux
réalités sociales contemporaines. Loin de créer du droit,
les TPI auraient alors simplement fait preuve de leur très grande
capacité d'appréhender une réalité
coutumière en perpétuel mouvement; pour reprendre une image fort
heureuse, leurs jurisprudences ne seraient donc que le reflet d'une
«coutume à grande vitesse»41(*).
Cela étant, il n'est pas non plus totalement exclu
qu'un certain nombre d'États contestent les conclusions des TPI,
jugées trop progressistes. Les conséquences immédiates
seraient alors désastreuses tant pour le DIH lui même que pour la
crédibilité de la justice pénale internationale.
Cela n'empêcherait pourtant pas ces idées,
toujours orientées vers une meilleure protection des victimes, de
triompher à terme, lorsque les générations futures de
juristes internationaux s'en seront imprégnées.
3) L'humanité érigée en sujet de
droit
En date du 29 octobre 1996, pour la première fois
depuis la fin de la IIe Guerre mondiale, la Chambre de
première instance du TPIY avait rendu une décision condamnant
l'accusé Erdemovic à 10 ans d'emprisonnement pour crime contre
l'humanité42(*).
Dans l'affaire Erdemovic43(*), deux passages du jugement démontrent que la
Chambre I du TPIY manifeste la volonté, de faire avancer le droit en
érigeant l'humanité en sujet de droit. Par exemple (jugement,
§ 19) ; elle « prend en considération qu'il n'y a pas totale
équivalence entre la vie de l'accusé et celle de victime. A la
différence du droit commun, l'objet de l'atteinte n'est plus la seule
intégrité de la victime mais l'humanité tout
entière». Un peu plus loin (§ 28) elle ajoute pour qualifier
le crime contre l'humanité : « il s'agit d'actes inhumains qui de
par leur ampleur ou leur gravité outrepassent les limites
tolérables de la communauté internationale qui doit en
réclamer la sanction ». On ne peut être que d'accord
avec elle.
Toutefois ce qui suit semble dépasser largement
l'état du droit positif : « mais les crimes contre
l'humanité transcendent l'individu puisqu'en attaquant l'homme, est
visée et niée l'Humanité ». C'est l'identité
de la victime, l'Humanité, qui marque d'ailleurs, la
spécificité du crime contre l'humanité.
Faire de l'Humanité un sujet de droit est sans doute
souhaitable. Il nous semble que cela ne soit pas le cas en droit positif.
L'ensemble de la jurisprudence des TPI pourra, peut-être, contribuer
à la construction de l'édifice, mais à condition qu'une
norme de droit positif soit à la base. Nous pouvons estimer cependant
à la décharge du TPIY qu'il ne pouvait certainement pas s'adosser
à une jurisprudence antérieure, si ce n'est celle d'autres
juridictions préexistantes mais ne possédant pas sa
singularité. En adoptant une conception progressiste du crime contre
l'humanité, le TPIY a ainsi commencé son oeuvre, talonné
par le TPIR.
4) La reconnaissance internationale de la
primauté des droits humains
La mise en oeuvre des droits de l'homme au plan individuel
demeure un sujet de réflexion délicat. Leur reconnaissance en
droit interne ou international devrait logiquement impliquer la mise au point
de mécanismes efficaces permettant de garantir leur respect au niveau
des individus.
Depuis la Seconde Guerre mondiale il existe au sein de la
communauté internationale, une volonté politique sans cesse
croissante de promouvoir le respect des droits fondamentaux.
Au-delà des traités, cette volonté peut
même se traduire dans certains cas, par de véritables exigences
politiques. Tel Etat verra subordonner l'octroi de l'aide qu'il sollicite
à l'amélioration de la situation des droits de l'homme...
En matière judiciaire la mise sur pied des Tribunaux
ad hoc est également révélatrice de cette
évolution. La répression des crimes contre l'humanité et
du génocide, atteintes les plus graves au droit fondamentaux,
échappe désormais en partie à l'autorité des Etats.
(Aujourd'hui, le génocide est un crime par le Droit pénal
international, mais il en n'a pas toujours été ainsi).
Certes, la portée de ce phénomène est
encore très relative compte tenu notamment de la compétence
limitée du Juge international dans le temps et dans l'espace, ainsi que
du nombre restreint de justiciables susceptibles d'être poursuivis.
Toutefois, il s'agit incontestablement d'une étape
importante dans la reconnaissance progressive d'une norme internationale
s'imposant aux Etats, assortie d'un véritable mécanisme de
sanction pénale.
Qu'il s'agisse de traités, d'exigences politiques ou de
juridictions internationales, nous constatons cependant que la reconnaissance
des droits de l'homme implique nécessairement une limitation à la
souveraineté des Etats. Les droits fondamentaux échappent
progressivement à leurs compétences réservées. Plus
encore, ces droits constituent peu à peu, une norme supranationale qui
leur est imposée. Cette lente évolution fait clairement
apparaître la dimension humaine des droits de l'homme qui naturellement
attachés à l'individu ne peuvent s'accommoder des
frontières.
La souveraineté ne résiste plus à cette
nouvelle domination et à cette responsabilité sans règles
strictes qui en dérive. En même temps, cette innovation forte qui
bouscule le jeu international à la manière d'un séisme de
moyenne intensité demande énormément à l'Etat,
jusqu'à parfois son auto négation ou en tout cas l'abandon de
quelques siècles de traditions. On avance ainsi, vers une
société internationale dans laquelle, la toute puissance de la
raison d'Etat serait battue en brèche par une justice internationale
rendue possible par les Tribunaux ad hoc et consacrée par
l'adoption de la Cour pénale internationale.
5) L'accélération de la mise en place de
la Cour pénale internationale.
Les règles subséquentes des TPI ad hoc
ont nourri les débats sur la création d'une CPI sur plusieurs
points. Les verdicts de l'affaire Tadic44(*) eu égard aux crimes de guerre
étaient essentiellement incorporés dans le statut de Rome. Son
obiter dictum45(*) selon lequel les crimes contre l'humanité
pouvaient être commis en temps de paix, et pas seulement en temps de
guerre, comme ce fut le cas à Nuremberg, était aussi maintenu.
Mais, ces tribunaux ont fait mieux que créer des
précédents pouvant éclairer les négociateurs. Ils
ont également ébauché ce à quoi devrait ressembler
une Cour pénale internationale. Ceci était surtout important en
ce qui concerne le rôle du procureur. L'intégrité, la
neutralité et le bon jugement des différents procureurs de TPI
ont répondu à ceux qui se doutaient du danger et du manque de
prudence d'un Procureur indépendant.
§ 3. LA COUR PENALE INTERNATIONALE
Ce vieil idéal qui appartenait au domaine de l'utopie
s'est enfin concrétisé ouvrant ainsi des voies nouvelles à
la justice pénale internationale. Le lecteur assidu se sera sans doute
rendu compte que les deux précédentes possibilités
d'intervention d'une justice pénale internationale, id est la
compétence universelle des tribunaux nationaux et le tribunaux
pénaux internationaux ad hoc, ne se présentent que comme
des palliatifs.
En effet, le statut de Rome répond à la
préoccupation de garantir une justice de qualité et corriger par
là-même les faiblesses et les insuffisances
déplorées dans le fonctionnement des tribunaux ad hoc et
à travers les limitations que posent les juridictions nationales saisies
au nom de la compétence universelle. Très proche des TPI ad
hoc de par sa morphologie et même sa constitution, il nous est
important à ce point de relever en quoi la CPI en est différente
avant d'évaluer son apport à la justice pénale
internationale.
A. La CPI est différente d'autres juridictions
internationales existantes
La Cour internationale de justice (CIJ) est un tribunal civil
qui traite des différends entre pays. La CPI est un tribunal
pénal qui poursuit en justice des individus.
Les deux tribunaux ad hoc pour crimes de guerre en ex
Yougoslavie et au Rwanda sont semblables à la CPI mais ont une
portée géographique limitée alors que la CPI a vocation
à couvrir le monde entier. Le caractère permanent de la CPI lui
permet d'éviter délais et coûts de lancement
inhérents à la création complète de tribunaux
spécifiques à des pays, chaque fois que les besoins s'en font
sentir46(*).
Par ailleurs en ce qui concerne les règles de
procédure, à la différence des TPI ad hoc, la
Cour est privée de l'essentiel du pouvoir d'auto-organisation. Le
règlement est en effet adopté par la conférence des chefs
des Etats-parties. Rompant ainsi la fâcheuse impression tenant aux
multiples modifications de règle de fonctionnement des TPIY et de TPIR.
La solution retenue à Rome tient à garantir la solennité
et la stabilité des règles de procédure.
C'est encore l'expérience des TPI ad hoc qui a
justifié la création d'une chambre préliminaire qui prend
les principales décisions dans la phase des poursuites et d'instruction.
Evitant alors la concentration de l'autorité entre les mains du
procureur47(*) ; ceci
est une preuve que la Cour entend prévenir toute utilisation du pouvoir
d'accusation à des fins étrangères à
l'administration de la justice internationale.
Le Traité de Rome réalise une avancée
décisive par rapport aux statuts des TPI ad hoc en ce qui
concerne la condition des victimes : à Nuremberg, les victimes
n'avaient pas d'autre place que celle des témoins utiles pour
l'établissement des faits constitutifs d'une violation d'ordre
international ; les TPI, quant à eux, les considèrent comme
des personnes ayant subi un préjudice sans pourtant prévoir un
mécanisme d'indemnisation48(*). Le statut de Rome prévoit par contre leurs
droits d'être entendues, à être protégées et
à obtenir réparation : il est créé à
cette fin un fonds d'indemnisation49(*), sur le modèle de ce qui se pratique de plus
en plus en droit interne. Restera à trancher la question de la
recevabilité des plaintes déposées devant cette instance
par les ayants droit (enfants des victimes et disparus) et les
associations50(*).
B. L'apport de la création de la CPI sur la
scène internationale
La CPI contribuera à mettre un terme à
l'impunité dont bénéficient souvent les personnes
responsables des crimes internationaux les plus graves contre les droits
humains.
La CPI fournit déjà incitations et conseils aux
pays qui veulent poursuivre en justice de tels criminels devant leurs propres
cours et elle offre un recours permanent dans les cas où les pays ne
veulent ou ne peuvent juger eux-mêmes ces criminels, du fait de
violences, d'intimidations, du manque de ressources ou de volonté
politique. Dans le cas où le criminel se trouverait à
l'étranger, la coopération obligatoire des États obligent
ceux-ci à les rendre à la CPI ou à le juger sur base de la
compétence universelle.
Bien attendu, la CPI n'a pas vocation à se substituer
aux cours nationales. Pour poursuivre en justice de tels crimes, les
systèmes judiciaires nationaux restent en première ligne dans la
recherche des responsabilités. La CPI veille à ce que les
personnes qui ont commis les crimes les plus graves contre les droits humains
soient punies même si les cours nationales ne veulent ou ne peuvent le
faire. En effet, la possibilité d'une intervention de la CPI pourrait
encourager des poursuites judiciaires nationales dans des pays qui sans cela,
auraient évité d'intenter des procès contre des criminels
de guerre51(*).
Cependant, toute médaille ayant son revers, la justice
pénale internationale dont l'objectif est de juger afin de condamner les
coupables ne saurait, à plus forte raison, se soustraire des
critiques.
SECTION III : QUELQUES CRITIQUES SUR LA JUSTICE
PENALE INTERNATIONALE
Après le droit d'ingérence qui, progressivement,
bouscule les frontières du droit international et qui, sous la
poussée de certaines organisations non-gouvernementales, se mue en
devoir d'ingérence, troublant le sommeil des dictateurs du monde entier,
voilà que s'est ébauchée peu à peu une justice
pénale internationale dont la CPI constitue la première
consécration. Cette justice pénale internationale n'a pas que
d'amis. Se fondant sur son éloignement des victimes et du lieu où
le crime a été commis ainsi que sur sa lenteur naturelle dans le
fonctionnement, ses pourfendeurs lui reprochent principalement de porter
atteinte au principe de la souveraineté des Etats (§1) et
d'être un frein à tout mécanisme de réconciliation
nationale (§2).
§ 1. LIMITATIONS A LA SOUVERAINETE NATIONALE
Les tenants de cette hypothèse se fondent
principalement sur les « entorses » de la justice
pénale internationale à la souveraineté nationale lorsque
les juridictions nationales se saisissent d'une affaire au nom de la
compétence universelle mais également en passant le statut de
l'actuelle Cour pénale internationale à peigne fin.
A. En ce qui concerne la compétence universelle
des juridictions nationales
L'exercice par les juridictions nationales de leur
compétence universelle est dénoncé par certains Etats au
motif qu'il constitue une violation du principe de souveraineté
nationale des États.
Prenons le cas de la République démocratique du
Congo qui a, le 17 octobre 2000, introduit une instance auprès de la
Cour internationale de justice contre la Belgique au sujet d'un mandat
d'arrêt international décerné par le juge Damien
VANDERMEERSCH contre le Ministre des Affaires Etrangères en exercice de
la République Démocratique Congo, M. Yerodia Abdoulaye Ndombasi.
Dans sa requête, la RDC a relevé que le mandat
d'arrêt, décerné par M. Vandermeersch, juge d'instruction
du tribunal de première instance de Bruxelles, qualifiait les faits
allégués de «crimes de droit international constituant des
infractions graves portant atteinte par action ou omission, aux personnes et
aux biens protégés par les conventions signées à
Genève le 12 août 1949 et par les protocoles I et II additionnels
à ces conventions, crimes contre l'humanité» et citait comme
textes de loi prétendument applicables des articles de la loi belge du
16 juin 1993 modifiée par la loi du 10 février 1999 relative
à la répression des violations graves de droit international
humanitaire.
La RDC a soutenu que l'article 7 de la loi belge et le
mandat d'arrêt décerné en application de cet article
constituait une «violation du principe selon lequel un Etat ne peut
exercer son pouvoir sur le territoire d'un autre Etat et du principe de
l'égalité souveraine entre tous les Membres de l'Organisation des
Nations Unies», proclamé par l'article 2, paragraphe 1, de la
Charte. Elle a également soutenu que l'article 5, ainsi que le mandat
d'arrêt, contrevenaient au droit international en tant qu'ils ont
prétendu déroger à l'immunité diplomatique du
ministre des affaires étrangères d'un Etat souverain,
«découlant de l'article 41, paragraphe 2, de la convention de
Vienne du 18 avril 1961 sur les relations diplomatiques».
En conséquence, la RDC a prié la Cour de
dire que la Belgique devait annuler le mandat d'arrêt international
décerné contre M.Yerodia Abdoulaye Ndombasi52(*).
Dans sa décision du 14 février 200253(*), la CIJ a finalement
donné raison à la RDC, estimant que l'ancien ministre des
affaires étrangères congolais était protégé
par l'immunité due à sa fonction. Elle a en conséquence
demandé à la Belgique de retirer le mandat d'arrêt
déposé par le juge VANDERMEERSCH. Cet arrêt de la CIJ est
perçu par beaucoup d'observateurs comme une remise en cause du principe
de la compétence universelle54(*).
Nous sommes aussi de cet avis, car la CIJ a eu la
présence d'esprit de notifier que la demande de la RDC ne serait pas
recevable devant une juridiction pénale internationale qui, tout le
monde le sait, n'est pas obligé par la Convention de Vienne de 1961 sur
les relations diplomatiques. Par contre, la Belgique ayant souscrit à
cet instrument se doit d'observer ces dispositions et nous ne voyons rien qui
puissent justement motiver une telle décision. La compétence
universelle s'est érigée en norme de droit international. Elle
doit maintenant vivre en paix avec ses pairs tels que le principe de
l'immunité diplomatique, exactement en conformité avec l'esprit
de cette décision de la Chambre des Lords qui insiste que « la
base sur laquelle un État est considéré comme immun de la
compétence territoriale des tribunaux d'un autre État est le
principe `par in parem non habet imperium' qui effectivement signifie
que les actes souverains ou gouvernementaux d'un Etat ne peuvent faire l'objet
des poursuites devant les juridictions d'un autre
État »55(*)
B. En ce qui concerne le statut de la Cour
pénale internationale
Il est également allégué que plusieurs
limitations à la souveraineté étatique peuvent être
relevées du statut de la Cour pénale internationale.
Il est vrai que le statut recèle des limitations
ponctuelles à la souveraineté étatique. Nous avons pu en
distinguer trois, d'inégale ampleur :
1) - Une première limitation découle des
règles de compétence de la Cour.
Celle-ci peut en effet s'estimer compétente, si un
crime international a été commis sur le territoire d'un Etat
Partie ou s'il l'a été par le ressortissant d'un Etat Partie. Il
se peut donc que le ressortissant d'un Etat non partie au Statut ayant par
exemple commis un crime de guerre sur le territoire d'un Etat partie soit
attrait devant la Cour pénale internationale. De sorte qu'un Etat qui
n'a pas souscrit à la convention peut -à travers le sort
judiciaire réservé à son ressortissant devant la Cour
pénale internationale- être malgré tout lié par un
texte sans que cet Etat ait pourtant, à aucun moment, accepté de
souscrire au dispositif et donné son consentement à être
lié par le Traité.
2) - Une seconde limitation concerne l'exercice de la
souveraineté judiciaire
interne. En dépit de la priorité reconnue aux
juridictions nationales, un Etat a-t-il toute latitude pour exonérer
éventuellement les coupables de crimes internationaux ? Le statut de la
Cour répond à cette question par la négative. Il peut donc
en résulter une forme d'atteinte à certains principes de
souveraineté nationale.
Si, par exemple, un Etat ayant adhéré
à la convention de Rome, décidait, une fois la Cour entrée
en fonction, d'amnistier ou de prescrire certains actes relevant de sa
compétence judiciaire, cette décision, plaçant alors ses
tribunaux dans l'impossibilité légale de juger les auteurs de
tels crimes, pourrait entraîner, ipso facto, la
compétence de la Cour.
3) - Enfin, une troisième limitation à la
souveraineté des Etats peut intervenir
dans le cadre d'une saisine de la Cour par le Conseil de
sécurité56(*). A cet instant, l'État en question n'aura plus
qu'à se plier57(*).
§ 2. UNE MISE EN DANGER DE LA RECONCILIATION NATIONALE
Dans un article, Marc PERRIN DE BRICHAMBAUT se pose toute une
série de questions sur la justice pénale internationale dont
« (...) La justice est-elle préférable à
l'amnistie ou à d'autres solutions à un conflit ? (...) N'y
a-t-il pas place pour des modes non juridictionnels de reconstruction
politique ? »58(*) comme par exemple la commission
« vérité et réconciliation » en
Afrique du Sud. D'où il est alors soutenu que l'exercice de la justice
pénale internationale pourrait conduire à
déposséder certains Etats du jugement de leurs propres criminels
et ainsi entraver le travail de mémoire et de réconciliation
nationale.
Cette hypothèse vaut surtout pour les Tribunaux
pénaux internationaux qui ont primauté sur les juridictions
nationales.
Les dirigeants yougoslaves, le président Kostunica
et le Premier ministre Zoran Djindjic, avaient d'ailleurs eu recours à
cet argument pour refuser dans un premier temps d'extrader vers La Haye
Slobodan Milosevic comme l'exigeait le procureur du TPIY, Carla del Ponte.
En revanche, le principe de complémentarité de
compétence de la Cour pénale internationale devrait permettre de
ne pas porter atteinte aux processus de réconciliation nationale et de
laisser dans certains cas le choix aux Etats de mettre en place des instances
non judiciaires, à l'instar des commissions "Vérité et
justice" (Haïti) et "Vérité et
réconciliation" (Afrique du Sud), pour satisfaire un besoin de
réparation sans procéder à des condamnations.
Plusieurs pays ont tenté, et certains y sont parvenus,
de passer d'un régime de dictature, de violences politiques et d'absence
de libertés fondamentales à une démocratie, en concluant
une sorte de pacte préalable, prévoyant de ne pas poursuivre les
responsables de la dictature, en échange de leur retrait politique et de
la mise en place, dans les meilleurs délais, d'un Etat de droit.
Vécue et acceptée dans un premier temps comme la seule voie
possible pour remettre un pays sur la voie de la démocratie, cette
démarche ne saurait à l'évidence conduire à l'oubli
des souffrances endurées59(*).
A notre humble avis, nous pensons qu'il ne peut y avoir de
réconciliation nationale durable sans justice, celle-ci étant la
voie obligée pour établir, aux yeux de tous, la
vérité sur une période douloureuse de l'histoire du pays
et sur ceux qui en ont été les instigateurs.
Cependant, pour préserver ce type de situations,
le Statut de la Cour pénale internationale comporte à l'article
53, § 2 c) une disposition qui ouvre au Procureur la faculté de ne
pas ouvrir une enquête " parce que poursuivre ne servirait pas les
intérêts de la justice compte tenu de toutes les circonstances, y
compris la gravité du crime, les intérêts des victimes
(...) ».
Cette disposition, qui confie au Procureur une marge
d'appréciation, plus politique que judiciaire, de l'opportunité
de poursuivre, devra être de nature à ne pas empêcher,
à l'avenir, la mise en place de telles démarches de
réconciliation qui sont souvent des étapes indispensables vers la
démocratisation.
CHAPITRE II : LES REGLES DE LA COMPETENCE DE LA
COUR
PENALE
INTERNATIONALE
La CPI est déjà opérationnelle. Cinq pays
africains sont sur la planche du Procureur à des degrés divers
(examen d'une situation, ouverture d'une enquête, délivrance de
mandats d'arrêt...) : l'Ouganda, la République Démocratique
du Congo, la République Centrafricaine, la Côte d'Ivoire et le
Soudan. Mais à ce jour, il n'y a encore eu aucune inculpation formelle,
ni arrestation60(*).
Cependant, tout porte à croire que dans les prochains
jours les mandats d'arrêt internationaux lancés en octobre dernier
contre Joseph KONY et Vincent OTTI, les chefs de l'Armée de
Résistance du Seigneur (ARS), mouvement rebelle opérant au Nord
de l'Ouganda et classé mouvement terroriste par les États Unis,
porteront bientôt leurs fruits et mettront à la disposition de la
Cour ses premiers détenus. Ce qui aura comme conséquence, le
début des audiences devant la Cour.
Mais en attendant ce moment, dans ce chapitre nous nous
assignons la tâche d'épingler des restrictions qui freinent la
vocation universelle de la compétence de la CPI.
Il s'agit ainsi de scruter les modalités de la
compétence de la Cour (Section I) et celles de ses modes de saisine
(Section II).
SECTION PREMIÈRE : LA COMPETENCE DE LA
COUR
La plus caricaturale des positions de certains États
lors des négociations de Rome était de faire dépendre la
compétence de la Cour au consentement de quatre États :
celui où le crime a été commis, celui dont le criminel est
ressortissant, celui de la nationalité des victimes et celui où
se trouve le criminel. Il est évident que cette proposition revenait
à signer `l'arrêt de mort' de la Cour61(*).
Finalement, la solution était celle d'un compromis
parce qu'ayant renoncé au fameux « quadruple contentement des
États » et ayant assoupli certaines de leurs positions, les
États ont fixé de façon souveraine la compétence
matérielle (§1), temporelle (§2), territoriale (§3) et
personnelle (§4) de la Cour.
§1. COMPÉTENCE MATÉRIELLE (RATIONE
MATERIAE)
A. Généralités
La compétence de la Cour pénale internationale
se fonde sur la volonté des États qui se sont convenus que ne
seront poursuivis que les crimes commis soit sur leur territoire soit par leurs
ressortissants. Aux termes de l'article 5 du statut de Rome, la
compétence matérielle de la CPI est limitée aux crimes les
plus graves, notamment le crime de génocide, le crime contre
l'humanité, le crime de guerre et le crime d'agression62(*), qu'ils soient commis au cours
des guerres mettant aux prises plusieurs États ou au cours des conflits
internes. L'établissement de la différence entre ces crimes
n'étant pas notre tâche primordiale, nous essayerons quand
même de les distinguer à travers les définitions pourvues
sous la rubrique consacrée à chacun d'eux.
Rappelons que chacun de ces crimes a déjà fait
l'objet des poursuites, ne serait-ce que dans une forme embryonnaire, devant le
Tribunal Militaire International de Nuremeberg ou devant les autres
juridictions de l'après guerre. Seulement qu'actuellement le terme
« crime contre la paix » est remplacé par le
terme « crime d'agression ». Bien que n'étant
pas identiques, ces deux termes chevauchent étroitement.
Il est à souligner qu'une autre différence tient
du fait que les définitions contenues dans la charte de Nuremberg
étaient très laconiques et que le domaine de ces quatre crimes,
tel que conçu à nos jours, a considérablement
évolué. La longueur des dispositions du statut de Rome
reflète en quelque sorte l'évolution des définitions de
ces crimes. Les Etats ont en fait argumenté que le « principe
de la légalité » imposait des dispositions
détaillées et précises édictant les crimes
punissables. Aussi les arguments en faveur des textes très
détaillés se basaient-ils sur les principes de la justesse de la
procédure en droit pénal, lesquels principes sont aussi reconnus
en droit des droits humains63(*).
B. Le noyau dur des crimes
En terme du droit humanitaire, les articles 6, 7 et 8
constituent la partie la plus importante du Statut de Rome. Ces articles sont
sans doute destinés à une grande influence dans la pratique et
dans la doctrine. C'est ainsi que nous nous proposons de passer en revue le
contenu de chacun d'eux en vue de mettre en relief les principaux faits
constitutifs des crimes sous la compétence de la CPI et
d'apprécier dans quelle mesure les dispositions de ce Statut `martyrise'
le caractère universel que se réclame pourtant cette
juridiction.
1. Le crime de génocide
Ce mot est formé de deux entités :
"genos ", terme grec, d'un côté, signifiant race ou clan,
et "cide " suffixe latin de l'autre comportant la notion de tuer.
Ainsi, le terme "génocide" prendra rang dans la famille des termes
tyrannicide, homicide, parricide64(*). De nos jours, le génocide constitue la forme
la plus aggravée du Crime contre l'humanité65(*). Le TPIR l'a même
qualifié du « crime des crimes »66(*). Et naturellement, il
constitue le premier crime défini par le Statut de Rome et le
« seul à avoir été adopté par les
négociateurs sans controverse »67(*).
1°. Le développement du crime de
génocide
Le mot « génocide » était
inventé en 1944 par Raphaël LEMKIN dans son livre consacré
aux crimes nazis en Europe occupée68(*). En effet, Lemkin était très
préoccupé du manque de mécanisme de poursuites des crimes
dirigés contre un groupe donné des personnes qu'accusait le
traité sur la protection des minorités nationales établi
entre les deux Grandes Guerres69(*). En 1945, ce mot était utilisé par les
Procureurs du TMIN70(*) et
en 1946, le génocide était reconnu comme tel et
érigé au rang des crimes internationaux sur décision de
l'AGNU71(*).
Déjà à cette époque il était important de
définir le génocide en tant que crime à part en vue de le
distinguer du Crime contre l'humanité. Ce dernier désignait alors
des larges atrocités commises contre les populations civiles au cours
des conflits armés.
Le prix à payer fut alors le confinement du crime de
génocide dans une définition très étroite de ses
éléments moral et matériel tel que nous le trouvons dans
la Convention de 1948 sur la Prévention et la Répression du Crime
de Génocide. Cependant malgré cette définition, il fallait
attendre longtemps après pour que le Crime de Génocide puisse
vraiment conquérir son indépendance.
2°. Le contenu de l'article
6
Reprenant verbatim dans ses dispositions l'essentiel
de la définition pourvue dans l'article II de la Convention de 1948,
l'article 6 du statut de Rome définit le génocide comme 5 actes
spécifiques commis dans « l'intention de
détruire en tout ou en partie un groupe national, ethnique, racial et
religieux comme tel ».
Ces 5 actes sont : le meurtre des membres du groupe, la
soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant
entraîner la destruction physique totale ou partielle, les mesures visant
à entraver les naissances au sein du groupe et le transfert forcé
d'enfants du groupe à un autre groupe72(*).
Il est souvent soutenu que ce qui distingue le crime de
génocide des autres crimes, c'est son « dolus
specialis »73(*).
En effet, tous les crimes définis dans le Statut de
Rome envisagent des poursuites pour meurtre et homicide mais ce qui singularise
le génocide du crime contre l'humanité, par exemple, c'est que
l'acte - qu'il s'agisse du meurtre ou de tous les quatre autres - doit
être commis dans l'intention spécifique et manifeste de
« détruire en tout ou en partie un groupe national, ethnique,
racial ou religieux en tant que tel ».
Comme nous pouvons le constater, cette « intention
spécifique » comprend plusieurs composantes.
L'intention de l'auteur de l'acte doit être celle de
`détruire' le groupe visé. Cette destruction peut
être physique, biologique ou culturelle74(*).
Il n'est pas nécessaire que l'acte incriminé
soit commis comme faisant partie d'une « attaque
généralisée ou systématique » ni comme
partie d'un « plan organisé et
général » visant à détruire ledit
groupe.
Cependant, nous sommes de l'avis de la Chambre d'Appels du
TPIY qui affirme que « l'existence d'un plan ou d'une politique
n'est pas un ingrédient du crime. Cependant, dans le cadre de prouver
une intention criminelle spécifique, l'existence d'un plan ou d'une
politique peut devenir un facteur important dans la plupart de
cas ».75(*)
Par contre, les Éléments des crimes
adoptés par l'Assemblée des États parties prennent une
perspective un peu différente, demandant qu'un acte de génocide
puisse s'inscrire « dans le cadre d'une série manifeste de
comportements analogues dirigés contre ce groupe, ou (puisse) en
lui-même produire une telle destruction »76(*).
A notre avis, les mots « en tout ou en
partie » inscrivent la définition dans une dimension
quantitative. La quantité ou le nombre considéré doit
être significatif et nous pouvons à juste titre conclure, avec
William SCHABAS, qu'une intention de tuer seulement quelques membres du groupe
ne peut être considérée comme constitutive du crime de
génocide77(*). A ce
niveau, l'idée est que, s'il s'agit simplement d'une partie du groupe
qui est détruite, ce doit alors être une partie
`substantielle'78(*).
Nous voulons lever toute confusion à ce point : on
a toujours tendance à penser qu'il existe un seuil numérique
précis des victimes pour qu'un acte soit qualifié de
génocide. Pour SCHABAS, la référence au nombre des
victimes n'est faite que pour décrire l'élément moral du
crime, et ce qui est important ce n'est pas le nombre de victimes mais
plutôt que l'auteur de l'acte avait l'intention de détruire un
nombre élevé des membres d'un groupe donné. Le nombre des
victimes ne devient intéressant que lorsqu'il devient question de
prouver l'intention génocidaire du responsable de l'acte. Plus le nombre
des victimes est élevé, plus logique sera la conclusion selon
laquelle l'intention de l'auteur de l'acte était celle de
détruire en tout ou en partie un groupe donné
d'individus79(*).
Par ailleurs, la destruction dont nous sommes en train de
parler doit viser exclusivement les quatre groupes listés dans la
définition de l'article 6. Il s'agit notamment d'un groupe national,
ethnique, racial ou religieux.
Nous reprouvons cette énumération à cause
de son cadre très restrictif et aussi à cause du manque d'une
définition satisfaisante de chacun de ces quatre adjectifs. En plus,
nous pensons qu'il devient de plus en plus délicat de se
référer à ces termes puisque le sens des concepts communs
tels que `groupe racial' a considérablement changé depuis 1948
et croyons que des changements futurs sont plus que probables vu la mutation de
plus en plus enregistrée en droit international.
Par ailleurs, considéré comme un ensemble, les
termes `national, ethnique, racial et religieux' correspondent
étroitement à ce que le droit des droits humains appelle des
`minorités ethniques ou nationales'80(*), expression échappant, à son tour,
à toute définition précise.
Par contre la définition de l'élément
moral ou du mens rea à travers l'expression
« comme tel » est à apprécier. Nous
sommes d'avis que ces mots sont venus préciser que le crime de
génocide nécessite non seulement l'élément
intentionnel mais aussi un motif.
Ces deux termes ne sont pas synonymes. En effet, les individus
peuvent commettre intentionnellement des crimes mais pour des motifs
variés : avidité, jalousie, haine,...
La preuve des motifs d'un crime a toujours créé
un obstacle supplémentaire aux poursuites effectives et c'est pour cette
raison que les juridictions appelées à interpréter cette
définition s'abstiennent simplement à aborder la question des
motifs ou mobiles du crime81(*).
Nous déplorons enfin que la liste de ces actes soit
exhaustive et que nous ne puissions pas l'étendre à d'autres
actes de persécution dirigés contre des minorités
ethniques. Heureusement que de telles atrocités peuvent être
poursuivies sous l'étiquette des crimes contre
l'humanité82(*).
Mais s'il arrivait un jour au droit pénal international
de prévoir une fourchette de peines différente selon qu'il s'agit
du génocide ou du crime contre l'humanité, nous pensons qu'il
serait alors impérieux d'allonger un peu cette liste jusqu'à
inclure l'épuration ethnique et d'autres actes semblables.
2. Le crime contre l'humanité
Nous allons tout d'abord retracer le développement du
crime contre l'humanité en droit international avant de sonder le
contenu de l'article 7 du Statut de Rome.
1°. Développement du crime contre
l'humanité
Même si à travers des années, on peut
trouver des références occasionnelles à l'expression
« crime contre l'humanité », ce terme n'a
été utilisé pour la toute première fois dans son
sens moderne qu'en 1915. En effet, dans la Déclaration des trois
Puissances Alliées, les massacres des Arméniens par les Turcs
étaient dénoncés en terme de crime contre
l'humanité83(*).
Même dans un usage lointain, le crime contre
l'humanité avait un sens étroit, par exemple lorsqu'il devait
s'appliquer sur le commerce des esclaves84(*). Des références à l'esclavage
ont même été transmises au Statut de Rome en passant,
naturellement, par des développements au niveau des cas de
l'Arménie, de Nuremberg et des récents statuts des TPIY et
TPIR.
En effet, les statuts de ces deux TPI incluent sous leur
compétence matérielle le crime contre l'humanité,
même si ces définitions diffèrent un peu
légèrement85(*).
Le statut de Rome joue un rôle très important
pour le crime contre l'humanité, car, à notre avis, il constitue
sa cristallisation en droit international des traités. En effet, il n'y
avait jamais auparavant une convention réprimant expressis
verbis le crime contre l'humanité.
2°. Le contenu de l'article
7
Généralement parlant, l'article 7 du Statut de
Rome est un proche descendant de l'article 6 (c) de la Charte de Nuremberg et
des articles 5 et 3, respectivement des statuts des TPIY et TPIR. Chaque fois
que le Statut de Rome s'écarte des formulations de ces instruments,
c'est par souci de détails, lesquels détails étaient
d'ailleurs contenus implicitement dans les textes de ses aïeux.
Cependant, nous pouvons exceptionnellement noter que la
référence au « genre » (gender) comme
base proscrite de persécution dans l'article 7 (1)(h) est un
élément nouveau en rapport avec la Charte de Nuremberg.
Son inclusion à côté des critères
plus traditionnels (politique, racial, ethnique, culturel, et religieux) est
cependant à saluer si nous considérons les développements
récents de la discrimination en droit international.
En outre, il est vrai que
le « viol », l'« esclavage
sexuel » et la « prostitution forcée »
étaient implicitement contenus dans les textes antérieurs au
Statut de Rome mais leurs poursuites étaient
irrégulières ; et même quand il y avait des
poursuites, ces actes avaient tendance à être poursuivis sous la
rubrique du crime de guerre plutôt qu'à celle du crime contre
l'humanité.
La question qui se pose à présent est de savoir
si les dispositions prolixes mais strictes du Statut de Rome protègent
mieux les femmes que les dispositions larges et archaïques de la
VIe Convention de Genève86(*).
A notre avis, les dispositions larges sont souvent
bénéfiques aux victimes car, une fois le litige porté
devant le juge, celui-ci aura une si grande liberté dans
l'interprétation desdites dispositions que les victimes auront beaucoup
de chance de voir le juge les redresser dans leurs droits. Alors que des
définitions longues mais strictes ont le défaut de confiner le
juge dans les limites magistralement dessinées par le traité.
Cependant, pour ce cas d'espèce, nous croyons
qu'inclure des références claires et spécifiques est
d'une signification considérable aussi bien pour l'articulation des
implicites que pour l'enracinement des nouvelles idées.
Certes, l'article 7 contient la définition la plus
détaillé qui n'ait jamais existé du crime contre
l'humanité. Sans doute représente-t-il aussi bien une
« codification » que, dans un moindre degré, un
« développement progressif » du droit
international87(*) tel que
l'attend la Charte des Nations Unies88(*).
Le paragraphe 1er contient l'aspect principal de
toute la disposition alors que les autres qui suivent n'en fournissent que des
définitions.
Le chapeau du paragraphe 1er dispose qu'
« aux fins du Statut le crime contre l'humanité
signifie » l'un des onze « actes »,
quand ceux-ci sont « commis dans le cadre d'une attaque
généralisée ou systématique lancée contre
une population civile et en connaissance de cette attaque ».
Il nous paraît utile de faire un petit commentaire sur
ces deux éléments du chapeau :
D'abord, nous voudrions revenir sur les termes
« aux fins du Statut» : nous pensons que l'usage
de ce groupe de mots n'est pas hasardeux. Si la conférence de Rome a
jugé bon de le mentionner c'est en fait pour délimiter la
sphère d'application de la définition pourvue dans l'article 7.
En peu de mots, nous pouvons affirmer que ce groupe de mots n'a vocation
à rendre obligatoire la définition du crime contre
l'humanité prévue dans l'article 7 du Statut qu'à
l'égard des juges de la CPI pour ainsi laisser libres les juges qui
seraient saisis sur d'autres bases d'adopter la définition de leur choix
(en se fondant bien attendu sur d'autres instruments).
Nous trouvons important de revenir sur les mots
« actes » et « attaque » repris dans
cet article.
Actes :
A notre sens, et comme le soutient à juste titre M.
DEGUZMAN, le terme « actes » fait
référence à beaucoup plus qu'aux `éléments
physiques'89(*) de
l'infraction. Et on peut sans difficulté argumenter que ce terme
contient aussi bien l'élément matériel que moral du crime
si l'on se réfère à la liste même des composantes du
crime contre l'humanité sous le Statut de Rome.
Prenons l'exemple du « meurtre » qui,
comme tout le monde le sait, contient intrinsèquement un
élément moral d'imputabilité en plus de l'évidence
de l'acte matériel de tuer une personne90(*).
D'ailleurs, l'usage du terme
« actes » pour contenir à la fois les
éléments matériel et moral du crime remonte à la
formulation de la Charte de Nuremberg91(*). Les Conventions sur le Génocide et
l'Apartheid se sont inscrites dans le même ordre d'idée.
Les actes constitutifs du crime contre l'humanité sont
repris à l'article 792(*).
Une attaque :
Ce n'est pas tout meurtre ni viol qui devient la
préoccupation de la communauté internationale et partant ne doit
faire l'objet de la justice pénale internationale. Si le Statut de Rome
a exigé une attaque à l'encontre d'une population civile pour que
l'un des actes ci-haut cités soit constitutif du crime contre
l'humanité, c'est probablement parce que la Cour s'attendait à
restreindre sa compétence au profit des juridictions nationales qui sont
présumées très compétentes à poursuivre des
actes isolés.
Pourtant, il n'est pas du tout aisé de retracer la
façon dont la notion d'« attaque » a pu se frayer le
passage jusqu'à s'ériger en élément
préalable du crime contre l'humanité. Elle est totalement absente
de la charte de Nuremberg, on n'aperçoit même pas son ombre dans
la version de 1991 de la CDI sur le Projet du code des crimes contre la paix et
la sécurité humaine. Il faut noter, néanmoins, que
même si le mot `attaque' n'est pas repris expressis verbis dans
le statut du TPIY93(*), il
a toutefois fait l'objet des débats houleux au sein du Conseil de
Sécurité94(*).
Par contre le Statut du TPIR dispose expressément que
les crimes doivent être « commis en tant qu'une partie d'une attaque
généralisée ou systématique contre toute population
civile en raison de son appartenance nationale, politique, ethnique, raciale ou
religieuse »95(*).
Nous pensons alors que la référence à une
attaque est un héritage du statut du TPIR.
Deux choses sont cependant claires en ce qui concerne le
Statut de Rome : il exige une attaque, quelles que soient sa définition
et sa qualification et rejette toute référence à la
discrimination pour qu'un acte soit qualifiable de crime contre
l'humanité. En plus, le terme « armé », comme
dans un `conflit armé' n'a pas été retenu par le Statut de
Rome.
De ce fait, nous pensons typiquement que la non exigence d'un
conflit armé est salutaire parce qu'il peut y avoir des violences
armées ou non armées impliquant des exactions contre les
populations civiles, mais il ne sera pas nécessaire à la victime
ou au Procureur de prouver l'usage des armes pour convaincre les juges à
considérer tel ou tel acte comme constitutif de crime contre
l'humanité.
Ce bénéfice est double : non-seulement il
allège la tache du plaignant en ce qui concerne les preuves mais encore
il constitue une protection de plus en plus développée des
victimes.
Une « attaque systématique et
généralisées lancée contre toute population
civile » signifie, selon le Statut de Rome, une suite des conduites
impliquant la commission multiple des actes dont fait référence
le §1 de l'article 7 contre toute population civile dans le but de
poursuivre ou de servir une politique d'un État ou d'une organisation,
consistant à commettre une telle attaque96(*).
Roger CLARK97(*), trouve que le mot
`généralisée' contient des connotations
objectives de taille, une sorte de volume plutôt qu'une formulation
relative aux buts subjectifs des auteurs du crime. Aussi, ajoute-t-il, que le
sens ordinaire du mot `systématique' est plutôt subjectif
et comporte alors des connotations d'un plan délibéré.
Nous sommes de l'avis de CLARCK d'autant plus qu'une attaque
généralisée représente un assaut d'un espace
donné sans distinction des gens poursuivis de telle sorte que tout
habitant de la communauté en question se sente plus ou moins visé
et concerné. Tandis que par le terme `systématique', nous pensons
à la méthode utilisée par ceux qui attaquent.
3. Le crime de guerre
1°. Le crime de guerre en droit
international
Historiquement, le crime de guerre constitue le crime le plus
ancien de tous les quatre à être poursuivis devant la CPI. En
effet, le crime de guerre a fait l'objet des poursuites devant les juridictions
internes depuis, probablement, le début du droit pénal98(*).
Les procès conduits dans les années 20 à
Leipzig en conséquence des articles 228 à 230 du Traité de
Versailles ont condamné de nombreux soldats allemands pour
« actes en violation avec les lois et coutumes de la
guerre ». En droit international, cette incrimination avait pour
fondement les `Règlements' annexés à la Convention de La
Haye de 1907.
C'est en effet à partir de ce moment que l'argument de
l'existence du crime de guerre commence à faire surface en droit
international99(*).
En conséquence le crime de guerre a été
codifié par le statut de Nuremberg pour avancer quatre ans plus dans les
Conventions de Genève de 1949. Malheureusement, aucun de ces deux
instruments ne couvre les violations des lois et coutumes de la guerre aux
cours des conflits armés internes et tous les deux ne s'étendent
qu'aux atrocités les plus sévères et leurs victimes
devraient en grande partie être des civils ou des non-combattants.
Le statut du TPIR100(*) sera le premier à établir la
responsabilité pour crime de guerre au cours d'un conflit armé
interne et plus tard la Chambre d'Appels du TPIY va lui emboîter le pas
en tirant les deux catégories du crime de guerre à travers une
interprétation large et innovatrice de l'article 3 du Statut du
TPIY101(*).
Le grand apport de la CPI en ce qui concerne le crime de
guerre correspond justement à la dissipation de toute controverse en
incluant dans la définition du crime de guerre quatre catégories
d'actes dont deux concernent les conflits internationaux et deux autres, les
conflits armés internes.
2°. Le crime de guerre commis au cours des
conflits armés internationaux
C'est l'article 8 (2) du Statut de Rome qui fait
référence au crime de guerre commis au cours des conflits
armés internationaux. Deux catégories en sont faites : les
violations graves des Conventions de Genève de 1949 (a) et les autres
sérieuses violations des lois et coutumes applicables dans des conflits
armés (b).
a) Violations graves des quatre conventions de
Genève de 1949
Il y avait quelque doute que les graves violations des
conventions de Genève pouvaient occuper la première
catégorisation des crimes envisagés par l'article 8(2),
étant donné que les Conventions de Genève en soi sont
depuis longtemps considérées comme faisant partie du droit
international coutumier.
En parcourant l'article 8(2)(a) du Statut de Rome, on
s'aperçoit que ses dispositions reprennent exactement le contenu des
Conventions de Genève102(*) et sont assujetties à une même
limitation id est l'acte ne sera constitutif de crime de guerre que
s'il est commis contre les personnes (ou biens) protégées par
l'une ou l'autre convention103(*).
Le viol, l'esclavage sexuel, la prostitution forcée, la
grossesse forcée et la stérilisation forcée ayant lieu au
cours d'un conflit armé international sont aussi constitutifs de crime
de guerre, étant donné qu'ils constituent également une
violation grave des Conventions de Genève.
Rappelons-nous que ces mêmes actes sont définis
à l'article 7(2) (f) du statut, sous la rubrique du crime contre
l'humanité et peuvent faire l'objet des poursuites en tant que tel.
Maintenant se pose la question de savoir en quelles
circonstances est-ce que ces actes peuvent faire l'objet des poursuites sous
tel ou tel autre crime. Rappelons-nous encore que le crime contre
l'humanité peut bien se commettre en temps de paix ou en temps de guerre
(attaque armée ou non armée). Pour le crime de guerre, les
circonstances sont bien claires.
En cas d'attaque (guerre), quels sont les critères qui
peuvent guider le Procureur à qualifier ces faits de constitutifs de
crime contre l'humanité ou de crime de guerre?
A notre avis, étant donné que toute inculpation
demande des preuves solides, nous croyons que le Procureur devrait se fonder
objectivement sur les preuves disponibles en ce sens qu'il devrait inculper
l'auteur de ces actes du crime le plus facile à prouver. Surtout que le
Statut ne prévoit pas des peines inégales selon qu'il s'agit des
crimes contre l'humanité ou du crime de guerre. Et il me semble que le
crime de guerre est plus facile d'autant plus qu'il n'existe presque pas des
conditions préalables telles que « attaque
généralisée ou systématique » ou la
nécessité d'une « population
civile » comme victime. Il est certain que les avocats de la
défense profitent d'habitude de tels termes ou catégorisations
pour durcir la tache du Procureur.
b) Violations des lois et coutumes de la guerre
A la lecture de l'article 8(2)(b), il ressort une seconde
catégorie de crime de guerre répressible devant la CPI. Ce sont
des sérieuses violations des lois et coutumes applicables au cours des
conflits armés internationaux, « dans le cadre
établi du droit international ». Ce groupe de mots fait,
sans doute, référence aussi bien au droit international coutumier
des conflits armés (tel que codifié par la Convention de La Haye
de 1907) qu'aux accords internationaux de l'ordre du premier Protocole
Additionnel de 1977 ainsi qu'aux autres traités applicables aux conflits
armés internationaux.
A part quelques dispositions reflétant les termes de la
Convention de 1907, le paragraphe b reprend un type nouveau d'actes
constitutifs de crime de guerre.
Nous pouvons citer à titre exemplatif les dispositions
relatives à la protection des missions humanitaires et de maintien de la
paix104(*) et celles
relatives à l'interdiction d'endommager l'environnement105(*).
Probablement que ceux qui seront, dans le futur, poursuivis
sur base de ces deux points ne manqueront d'attaquer ces deux dispositions
comme ne faisant pas encore partie du droit international coutumier applicable
au moment de l'adoption du Statut de Rome.
Nous déplorons par contre que, parmi les violations des
Conventions de Genève et du Protocole Additionnel I, les
représailles contre les personnes protégées ne soient pas
qualifiées de « graves violations » et même
elles n'apparaissent nulle part sur la longue liste de l'article 8(2)(b).
Est-ce pour laisser entendre qu'une décision ou une planification
à recourir à des représailles interdites (par exemple des
représailles comme moyen de guerre) ne peut être constitutive de
crime de guerre?
L'interprétation de l'article 31(1) du statut semble
répondre par la négative.
De cet article, la Cour devrait considérer les
représailles en application des « traités et les
principes et règles du droit international, incluant le droit
international des conflits armés » et les principes
généraux de droit découlant des « lois
nationales et systèmes juridiques du monde »106(*).
Ainsi, nous pensons que les représailles contre les
personnes protégées ne peuvent être exonératoires
parce qu'elles sont contraires aux Conventions de Genève et aux
principes généraux de droit.
Toutefois, Gabrielle VENTURIN pense que ces
représailles peuvent être exonératoires si les armes
interdites sont utilisées contre des cibles militaires107(*).
Quoique ouvertes aux débats, nous pensons que les
représailles, interdites par le Protocole Additionnel I de 1977,
poseront des problèmes lors des audiences devant la Cour. Par exemple,
une attaque par représailles contre un environnement naturel peut-elle
être exonératoire (sur base des représailles des
belligérants) devant la CPI ?108(*) Notre réponse est négative car
l'environnement doit être protégé de toutes les
façons d'autant plus que une attaque dirigée contre elle serait,
par ricochet, dirigée contre l'humanité.
C'est aussi l'avis de GEHRING et de ROBERGE qui regrettent que
la CPI n'ait pas prévu des dispositions protégeant fermement
l'environnement et pensent qu'on peut facilement imaginer un certain
élargissement du Statut de Rome par le biais de l'article 10 pour se
référer chaque fois que de besoin au Protocole Additionnel I de
1977109(*).
3°. Crimes de guerre commis au cours des
conflits armés internes
Les dispositions de l'article 8(2)(c),(d),(e) et (f) nous
aident à identifier deux autres catégories de crimes des faits
constitutifs de crimes de guerre : il s'agit des sérieuses
violations de l'article 3 commun aux Conventions de Genève et les
sérieuses violations des lois et coutumes de la guerre.
La première catégorie rappelle, sans doute,
l'article 4 du statut du TPIR et la jurisprudence du TPIY, interprétant
son propre statut.
L'article 8 du Statut de Rome se présente alors comme
une continuité du statut du TPIR et de la jurisprudence du TPIY. En
retenant l'expérience précédente et en confirmant
l'application des règles internationales relatives aux crimes de guerre
au cours des conflits internes, le Statut de Rome apparaît à nos
yeux comme un progrès important pour la codification du crime de guerre
commis au cours d'un conflit armé interne.
Cependant, nous remarquons avec M. Luigi CONDORELLI qu'il y a
à présent deux pas en avant et un pas en arrière.
Deux pas en avant, parce que le statut constitue le tout
premier instrument normatif, écrit potentiellement en des termes
à caractère universel, qui qualifie des sérieuses
violations du droit international au cours des conflits internes de
constitutives de crime de guerre, et le tout premier à en prévoir
un mécanisme de poursuites au niveau international.
Un pas en arrière, parce les définitions
proposées sont très restrictives si nous essayons de les comparer
aux résultats recueillis des pratiques antérieures, attendu les
statuts des TPI ad Hoc et leurs jurisprudences110(*).
Nous déplorons par contre l'existence d'une distinction
au sein même de l'article 8 du Statut entre les deux catégories de
conflits armés non-internationaux. En effet, selon cette distinction,
ces deux catégories peuvent être soumises à deux
régimes distincts pour être constitutives de crime de guerre.
En vertu de l'article 8 (2)(c) et (d), les sérieuses
violations de l'article 3 commun aux Conventions de Genève de 1949 sont
constitutives de crime de guerre lorsqu'elles sont commises au cours de
n'importe quel conflit armé interne (probablement à l'exception
des troubles et des tensions internes) quelle que soit sa durée.
Alors que les violations des lois et coutumes de guerre
(article 8 (2)(e)(f)) ne sont constitutives de crime de guerre que si elles
sont commises au cours des conflits armés prolongés.
Nous pensons ainsi qu'il est simplement déraisonnable
que des attaques contre les unités sanitaires, des viols massifs, des
déportations ou des mutilations intentionnelles ne soient constitutifs
de crime de guerre que si ils sont commis au cours d'un conflit armé
« prolongé ». Surtout que le Statut n'a
même pas eu la peine de définir l'espace de temps à
considérer pour qualifier un conflit de prolongé !
Nous trouvons démesuré que, au cours d'un long
conflit interne, des sérieuses violations de l'article 3 commun aux
Conventions de Genève et des violations graves des lois et coutumes de
la guerre puissent être constitutives de crime de guerre mais que ces
mêmes actes ne puissent pas mériter la même qualification
lorsque le conflit dure moins longtemps. On dirait que le temps devient alors
l'unité de mesure de l'intensité d'un crime.
Nous désapprouvons aussi le fait qu'une attaque
dirigée contre un environnement naturel ne puisse être
constitutive de crime de guerre que si elle est faite au cours d'un conflit
armé international et que, quelle que soit la disproportion entre
l'endommagement de l'environnement et le bénéfice militaire qu'on
en tire, toute attaque en ce sens engagée au cours d'un conflit
armé non international ne puisse engager la responsabilité de son
auteur devant la CPI111(*).
C. Autres incriminations
À côté de ces trois crimes que nous venons
d'analyser, la CPI a aussi compétence sur les actes que le Statut de
Rome qualifie des « atteintes à l'administration de la
justice » lorsqu'ils sont relatifs aux poursuites devant
elle112(*).
Le statut précise, cependant, que de tels actes doivent
avoir été commis intentionnellement pour justifier la
compétence de la Cour. Il s'agit de : parjure ou
présentation d'une preuve sachant qu'elle est fausse ou forgée,
subornation des témoins ou des officiels de la Cour, des
représailles contre les officiels de la Cour,...
Les officiels de la Cour, eux, peuvent être poursuivis
en cas de corruption aussi bien active que passive.
Dans tous ces cas, la cour peut en effet prononcer des peines
allant jusqu'à 5 ans de prison ou une amende. Le Statut demande, en
plus, aux États-parties d'étendre les dispositions de leurs lois
pénales et procédurales relatives à la répression
des atteintes à l'intégrité des procédures
d'enquêtes aux atteintes à l'administration de la justice commises
sur leur territoire ou par leurs nationaux à l'encontre de la CPI.
La cour est aussi compétente à sanctionner
« l'inconduite à l'audience », telle que
l'interruption de ses poursuites, le refus délibéré de
suivre ses instructions ou la perturbation de ses audiences. Mais,
contrairement aux « atteintes à l'administration de la
justice », les peines se limitent à l'expulsion
temporaire ou permanente de la salle d'audience et à une amende pouvant
s'élever jusqu'à deux mille euros113(*).
§2. LA COMPETENCE TEMPORELLE (RATIONE TEMPORIS
)
La compétence temporelle de la CPI pose aussi beaucoup
de questions qu'elle n'en résout. Nous allons d'abord présenter
la problématique que soulève la mobilité de cette
compétence qui dépend de la date d'adhésion d'un
État donné et après nous aborderons la question
intentionnellement abandonnée sans réponse par la
Conférence de Rome, celle des crimes continus.
A. Une compétence temporelle mobile
La CPI est une juridiction prospective, en ce sens qu'elle ne
peut exercer sa compétence sur les crimes commis avant l'entrée
en vigueur du Statut de Rome, soit le 01 juillet 2002114(*). Et pour les pays qui
deviendront parties après cette date, la CPI ne sera compétente
qu'en ce qui concerne les crimes commis après l'adhésion de ces
États. Il ressort de ce qui précède que la Cour a une
compétence mobile qui reste tributaire de la volonté des
États.
Nous pensons que, même si la CPI est
réputée être entrée en vigueur en juillet 2002,
cette juridiction peut toujours assister impuissante devant d'autres crimes qui
peuvent se commettre sur le territoire d'un État non-partie ; si
jamais le Conseil de sécurité se décidait de ne pas
référer la situation à la Cour.
Un autre problème que la compétence temporelle
de la CPI soulève mérite d'être abordé à ce
niveau. La CPI est entrée en vigueur en juillet 2002 mais ne sort des
effets à l'égard des États n'ayant pas ratifié le
traité à cette date qu'au jour où l'Etat en question se
décide à en faire la ratification. Ce qui veut dire que la CPI
restera toujours incompétente face aux crimes commis entre le 01 juillet
2002 et la date de la ratification du Traité par l'État
concerné. Sauf si l'Etat en question décide de saisir la CPI sur
une base ad hoc telle que prévu par l'article 12 (3). Nous
doutons fort que beaucoup d'Etats aient la volonté de recourir à
ce mode de saisine.
Nous croyons que c'est l'un des sacrifices consentis à
Rome par complaisance à l'égard des États sceptiques
à l'adhésion au Traité.
B. Ratione temporis et les crimes
continus
La compétence temporelle de la CPI tranchée par
l'article 11(1) du Statut ne résout pourtant pas la problématique
qui peut être soulevée en cas des crimes continus.
Prenons le cas de la disparition forcée des personnes
qui est un acte constitutif de crime contre l'humanité aux termes de
l'article 7(i). Une personne pourrait avoir disparu avant l'entrée en
vigueur du statut de Rome mais ce crime pourrait aussi continuer
jusqu'après son entrée en vigueur, aussi longtemps que perdure la
disparition.
Ce serait aussi le cas lors de déportation ou transfert
forcé des personnes suivi d'une interdiction faite à celles-ci de
revenir à domicile.
Cependant, il est inquiétant de remarquer que cette
question reste toujours sans réponse comme le souligne la note
infrapaginale insérée par le Comité préparatoire
à la fin du paragraphe 1er de l'article 24 du
Statut : « la question a été soulevée
en ce qui concerne un comportement qui a commencé avant l'entrée
en vigueur du Statut et qui continue après elle »115(*).
D'où la question des crimes continus est restée
sans suite et il appartient dès lors à la cour d'étudier
la façon dont elle doit être abordée.
Néanmoins, nous pensons que les crimes continus
devraient faire l'objet des poursuites devant la CPI pour la simple raison que
nous sommes certains qu'à une date où la Cour était
déjà opérationnelle ces crimes étaient en
commission. Mais nous ignorons complètement le moment de leur
commencement. De ce fait, il appartiendra à celui qui allègue le
commencement de ces actes avant l'entrée en vigueur du statut d'en
produire les preuves pour se soustraire à la compétence de la
CPI.
§3. LA COMPETENCE TERRITORIALE (RATIONE LOCI)
La CPI a compétence sur les crimes commis sur le
territoire des États-parties, nonobstant la nationalité du
présumé auteur de ce crime. C'est ce qui ressort de la lecture de
l'article 12(2)(a) du Statut. Cependant, la cour a aussi compétence sur
les crimes commis sur le territoire des États qui lui reconnaissent
cette compétence sur une base ad hoc116(*) et sur un territoire
désigné comme tel par le Conseil de
Sécurité117(*).
Nous allons d'abord montrer la problématique de la
détermination du territoire d'un État vis-à-vis de la
compétence de la CPI avant d'aborder la question des crimes produisant
des effets sur le territoire d'un autre État.
A. La problématique de la détermination
des limites d'un État
Les débats sur l'étendue des
territoires118(*) des
États conduisent nécessairement aux conflits et il est probable
que les juges de la CPI seront confrontés à la question de la
détermination des frontières internationales et de ceux qui ont
un titre sur un territoire donné afin d'établir la
compétence territoriale de la Cour.
Il est dit qu'un peu plus des 50% des frontières
internationales sont contestées119(*). Évidemment, c'est aux endroits où ces
disputes sont les plus nourries que la Cour a à focaliser son attention.
Prenons le cas du Moyen Orient.
A supposer que le chef de l'autorité palestinienne
déclare l'indépendance de la Palestine et, au même moment,
adhère au Statut de Rome. Sans aucun doute, la Cour devrait normalement
avoir compétence sur « le territoire » de cette
Palestine libre dont la grande partie, si pas la totalité, des
frontières actuelles sont contestées.
Le même problème se pose également si nous
considérons ce cas à l'inverse. Dans l'hypothèse où
Israël proclame, en vertu de l'article 12(3) du Statut reconnaissant la
compétence de la CPI sur une base ad hoc, qu'il voudrait que la
Cour se saisisse de certains crimes commis sur son territoire.
Dans l'un ou l'autre cas, il sera délicat pour la Cour
d'épingler les affaires rentrant effectivement sous sa compétence
territoriale pour la simple raison que les frontières de ces
« Etats » ne sont pas unanimes. En pareille circonstance,
la Cour va-t-elle renvoyer ces Etats devant la CIJ pour la précision de
leurs frontières ? Cette question nous implique aussi à nous
demander ce que peut être la force obligatoire d'un arrêt rendu par
la CIJ devant la CPI.
Au moment de la ratification du traité de Rome,
très peu d'États ont fait des déclarations en rapport avec
l'étendue territoriale assignée au Statut. Contrairement à
plusieurs autres instruments internationaux multilatéraux, le Statut de
Rome ne prévoit aucune disposition en ce sens. Les Pays Bas ont fait une
déclaration sans danger, mais rassurante, selon laquelle le Statut
devrait s'applique non seulement sur son territoire européen mais aussi
sur les Antilles hollandaises et sur Aruba120(*).
Plus inquiétant, par contre, est la déclaration
du Danemark selon laquelle il ne destine pas le statut de Rome à
s'appliquer sur les Iles Féroé et sur le Groenland121(*).
Pendant que l'argument du Danemark était
particulièrement motivé par un sentiment admirable du respect
à l'égard de l'autonomie locale de ces entités, nous y
voyons par contre l'effet d'une volonté d'exclure la Cour de pouvoir
exercer sa compétence sur des territoires qui, d'eux-mêmes, n'ont
aucune possibilité de corriger cette situation d'autant plus que ni les
Iles Féroé ni le Groenland ne sont des États souverains et
par conséquent ne peuvent adhérer au Statut de Rome. En
conséquence, ils peuvent bien avoir la volonté de
référer une affaire à la Cour mais, n'étant pas des
Etats souverains, leur initiative ne peut aboutir. Sauf, bien sûr, si le
CS décide de saisir la Cour en leur faveur.
Toutefois, si un cas se présentait en rapport avec ces
territoires, la CPI pourrait se fonder sur la jurisprudence de la Cour
européenne des droits humains122(*) et considérer la déclaration du
Danemark comme étant illégale et de nul effet,
conformément à l'article 120 du Statut, afin de reconnaître
sa compétence sur des territoires en contestation.
B. La question des crimes produisant des effets sur le
territoire d'un autre État
Plusieurs juridictions internes étendent la
compétence territoriale jusqu'à contenir les crimes produisant
certains effets sur le territoire d'un autre État.
Il peut, par exemple, être allégué qu'en
cas de planification à commettre le génocide, la Cour est
compétente même si les planificateurs ont mijoté leur plan
à l'extérieur du territoire où le crime a eu lieu.
La question devient un peu plus claire en cas d'incitation ou
d'encouragement à commettre un crime donné.
La CPI serait-elle compétente à poursuivre des
planificateurs qui ont définitivement organisé un crime sur le
territoire d'un État non-partie et que ce crime s'est commis, par
exemple, sur le territoire d'un État-partie ?
Nous ne le pensons pas, en moins que cette situation ne soit
déférée par le Conseil de Sécurité.
Néanmoins, vu le silence du statut en ce qui concerne
cette façade du crime, nous sommes pour une interprétation
stricte de l'article 12 et, de ce fait, sur l'exclusion pure et simple d'un tel
concept.
§4. LA COMPETENCE PERSONNELLE (RATIONE
PERSONAE)
La CPI a une vocation universelle, c'est-à-dire qu'elle
est appelée à juger toute personne physique. Or sa vocation
universelle heurte de plein front certains principes du droit international tel
que la consécration des immunités diplomatiques qui a depuis
belle lurette fait la pluie et le beau temps dans les relations
internationales.
Avant d'aborder la question des immunités (B), nous
allons d'abord nous attarder sur la responsabilité pénale
internationale que consacre le Statut de Rome (A).
A. Pour une responsabilité pénale
individuelle
La Cour pénale internationale ne s'occupe que de juger
et punir les individus, et non les Etats123(*). Cependant, il y avait plusieurs propositions selon
lesquelles la Cour devrait aussi s'occuper des actes commis par des personnes
morales. Mais, une difficulté s'est imposée : pendant que
tous les systèmes juridiques des Etats prévoient la
responsabilité pénale des individus, leurs approches de la
question sur la responsabilité pénale des personnes morales
divergent d'une façon considérable. Avec une CPI fondée
sur le principe de la complémentarité, « il aurait
été injuste d'établir une forme de compétence que
les Etats n'auraient pu appliquer pour la simple raison qu'ils ne
reconnaissent pas la responsabilité pénale des personnes morales
en leur droit interne »124(*).
Cependant avec la question de la responsabilité des
personnes morales se pose aussi celle de la responsabilité de l'Etat
pour violations des normes du jus cogens, par exemple.
Dans les années 70-80, la CDI a tenté
d' « inventer » le terme `crime d'Etat' faisant
référence aux violations graves du droit humanitaire commises par
les agents-organes de l'Etat soit sous son autorisation soit sous son
parrainage soit à son nom. Mais une telle terminologie a vivement
partagé la Communauté internationale125(*).
Pour certains126(*), il était important que la criminalisation de
la responsabilité de l'Etat s'établisse, notamment parce qu'il
convient de proposer pour les crimes internationaux des États un
régime consistant précisément à attacher à
ces crimes les conséquences juridiques qu'un comportement moralement
inique devrait comporter127(*). L'attrait inhérent à cette approche
est double :
- Premièrement, elle tient compte de la
réalité, à savoir que les organes de l'État peuvent
être associés à un comportement criminel
généralisé - un génocide, des actes visant
à faire disparaître un État et expulser sa population ou la
réduire en esclavage. Mais les individus ayant posé ces actes
peuvent être difficiles à retrouver ou à
appréhender, et en outre, en cas de violation massive, quelques-uns ne
pourraient diriger sans la coopération de nombreux autres.
- Deuxièmement, elle sert l'état de droit. Le
droit international définit maintenant certains comportements comme
criminels lorsqu'ils sont le fait d'individus, y compris en leur qualité
de chefs d'État ou de hauts responsables de l'État, et il
interdit à ces individus d'invoquer l'ordre d'un supérieur comme
moyen de défense. Pourtant, il serait étrange que l'État
lui-même demeure à l'abri de toute culpabilité. Il serait
étrange que le sujet par excellence du droit international,
l'État, bénéficie de l'immunité lorsqu'il commet
les crimes mêmes que le droit international qualifie maintenant de crimes
dans tous les cas.
Selon une autre opinion128(*), largement répandue dans la
doctrine129(*), la
notion de « crime d'État » n'est pas suffisamment
fondée en droit international positif, et il n'y a aucune bonne raison
de développer une telle notion. Il n'y a pas d'exemple clair attestant
qu'un État n'ait jamais été considéré, avec
quelque autorité, comme ayant commis un crime.
La notion ne répond pas non plus à un besoin
évident, étant donné la généralité du
régime ordinaire de la responsabilité des États130(*), et l'ampleur des pouvoirs
dont dispose le Conseil de sécurité en vertu de la Charte pour
réagir aux menaces contre la paix et la sécurité
internationales ou aux ruptures de la paix et de la sécurité
internationales, pouvoirs qu'il exerce maintenant vigoureusement et qu'on ne
peut affecter d'aucune manière.
Nombre de crimes d'État affectent au premier chef la
population de l'«État criminel» lui-même; punir
l'État dans de tels cas revient, indirectement, à punir les
victimes.
Quant à nous, il n'est ni nécessaire ni possible
de régler pour l'avenir la question des crimes d'État. La notion
recueille un certain appui dans la pratique, mais, mis à part
peut-être le crime d'agression, qui fait l'objet d'un traitement
particulier dans le Statut de Rome, cette pratique est embryonnaire. Il y
existe déjà, à l'heure actuelle, un système
cohérent de réaction à la conduite criminelle des
États, tant du point de vue procédural que du point de vue du
fond, et les deux points de vue sont d'égale importance. Nous pensons
que c'est `le projet de la CDI sur la responsabilité de l'Etat pour fait
internationalement illicite' qui a joué ce rôle important.
D'autre part, la notion d'obligations erga omnes
- obligations vis-à-vis de la communauté internationale dans
son ensemble - ainsi que celle de normes ne souffrant d'aucune
dérogation (jus cogens) existent déjà. Ces deux
notions ont déjà leur place dans ce projet. D'où il n'est
plus nécessaire de réintroduire la notion de «crime
d'Etat» sous quelque nom que ce soit. Historiquement, d'ailleurs, le
régime général de la responsabilité des
États a été utilisé pour couvrir toute la gamme des
violations du droit international, jusqu'aux plus graves131(*). Et les réactions aux
violations les plus graves ne sont pas la prérogative exclusive des
organisations internationales, en particulier du Conseil de
sécurité. Les États, mus par leur solidarité avec
ceux qui sont le plus directement lésés, ont aussi un rôle
à jouer.
Se basant sur le fait que le plus grand nombre de soi-disant
« crimes d'Etat » implique nécessairement des crimes
individuels étant donné qu'ils ne peuvent être commis
qu'à travers les actions ou omissions des agents publics ou de l'Etat,
nous nous allions à l'avis selon lequel le châtiment pénal
devrait se borner à punir l'agent-organe ayant directement commis le
crime pour la simple raison qu'à nos jours aucune forme de sanction
pénale ne peut être envisagé contre un Etat, personne
morale, sans que sa population n'en pâtisse132(*).
Et soulignons qu'en droit international classique, la
répression des actes criminels d'un officiel de l'Etat constitue l'un
des moyens de satisfaction que l'Etat ou la personne lésée peut
obtenir, mais cela reste autonome et séparé des
réparations et autres obligations qui pèsent sur l'Etat
`criminel'. C'est exactement ce qui ressort de la lecture de l'article 25 (4)
du statut de Rome. En effet, à l'état actuel du droit
international, les poursuites contre un agent de l'Etat suspect est l'un des
devoirs de l'Etat incriminé. Ce devoir peut se traduire par un
procès au niveau national, une extradition ou un procès devant la
CPI. Un Etat qui se conforme à cette obligation n'est pas toutefois
exempt de sa responsabilité international133(*).
C'est sûrement pour toutes ces raisons que le Statut de
la CPI s'est résigné à ne consacrer qu'une
responsabilité pénale individuelle.
D'ailleurs, établir la compétence personnelle
d'une juridiction sur base de la nationalité de l'auteur de l'acte
criminel ou celle de la victime est sans doute la forme la moins
controversée des compétences personnelles134(*) et, à notre avis,
c'était le minimum absolu que nous pouvions attendre des États
à l'issue de la Conférence de Rome. Seulement qu'il peut y avoir
des cas où c'est le concept de la nationalité elle-même qui
est remis en cause devant la CPI.
Dans ce cas, en vertu des principes généraux du
droit international public, la Cour devrait alors considérer
l'État avec lequel la personne concernée a des liens les plus
authentiques et les plus importants au lieu de se laisser guider par une
nationalité issue, peut-être, d'une naturalisation
frauduleuse135(*).
En peu de mots, les États-parties au traité de
Rome se sont engagés à reconnaître la personnalité
tant active que passive de la Cour, alors que les États non-parties sont
obligés à reconnaître la personnalité active de la
Cour conformément à l'universalité des règles du
jus cogens, sauf dans le cas où ils feraient application de
l'article 12(3) ci haut mentionné136(*).
B. La question des immunités
Faisant écho des dispositions de la charte de Nuremberg
et celles de la Convention de 1948 (Génocide), le Statut de Rome
déclare à son article 27 que les règles aussi bien de
droit interne que celles du droit international accordant des immunités
ou autres formes de protection face aux poursuites pénales sont de nul
effet devant la Cour.
Signalons déjà que, traditionnellement, les
immunités ont deux formes principales : d'abord, certains
États, à travers leur Constitution ou leurs lois ordinaires,
prévoient que leurs propres chefs d'État et, dans certains cas,
les autres officiels du gouvernement ou les représentants élus du
peuple sont immuns de toute poursuite ; en second lieu, aussi bien en
droit international coutumier qu'en droit des traités, les chefs
d'État en fonction, les Ministres des Affaires Etrangères et les
diplomates ne sont pas justiciables, en principe, devant les juridictions des
autres États.
Signalons toutefois qu'un pas important a été
franchi par certains États137(*) qui ont eu à amender leur constitution pour
éliminer ces régimes spéciaux en vue d'uniformiser leur
législation avec le statut de Rome.
Rappelons-nous que dans sa décision de 2002, sur une
affaire de mandat d'arrêt la CIJ a reconnu que un ex-Ministre des
Affaires Etrangères ou en fonction ne devrait jamais être
considéré comme immun devant un tribunal international, à
l'instar de la CPI, lorsque celui-ci justifie sa compétence138(*).
Il est certain que la CIJ n'a pas fait cas du fait que
l'article 27 du statut de Rome pourvoit même une base juridique à
cet argument et que les chefs d'État en exercice ou d'autres Officiels
tels que les Ministres des Affaires Etrangères ne jouissent pas de leurs
immunités traditionnelles comme il en a toujours été
question en droit international coutumier139(*).
Cependant il existe une exception pratique importante qui peut
servir de bouclier à une catégorie donnée des personnes
contre les poursuites devant la CPI. En vertu de l'article 98(1), il est
interdit à la Cour de poursuivre une demande de remise ou d'assistance
qui contraindrait l'État requis à agir de façon
incompatible avec les obligations qui lui incombent en droit international
à l'égard d'un État tiers, sauf approbation de ce
dernier.
Évidemment, l'immunité diplomatique rentre dans
cette catégorie. Pour dire que, pendant qu'un État partie ne peut
protéger son propre chef d'État ou Ministre des Affaires
Etrangères des poursuites devant la CPI, celle-ci ne peut en aucun cas
demander la coopération de cet État en ce qui concerne la remise
ou tout autre acte impliquant un État tiers.
Notons que rien n'empêche pourtant l'État-partie,
s'il le souhaite, à coopérer même dans ce dernier cas.
Ainsi, une fois que le chef d'État ou le ressortissant d'un État
tiers est sous la garde de la CPI, il devra désormais être
traité comme tout autre inculpé.
De la même manière, la Cour est interdite
à poursuivre une demande de remise qui obligerait un État-partie
à agir d'une façon incompatible avec certains accords
internationaux conclus avec un État tiers.
Malheureusement, certains ingénieux juristes au
Département d'État américain ont tenté de
dénaturer cet article en ébauchant des traités ou accords
de toute sorte qui viseraient la protection des ressortissants
américains contre les poursuites devant la CPI. Hélas, beaucoup
d'États parties ont déjà succombé devant la
pression des États-Unis et cédé face à ces
arrangements.
SECTION II : LA SAISINE ET LA RECEVABILITE DES
PLAINTES DEVANT
LA CPI
Si les compétences de la Cour se trouvent très
encadrées, il convient également de souligner que le
Traité impose encore d'autres garde-fous quant aux modalités de
sa saisine.
En outre des conditions strictes sont posées pour que
les plaintes soient déclarées recevables. Toutes ces mesures
restreignent autant la compétence de la cour que les poursuites devant
elle.
§1. LA SAISINE DE LA COUR
En vertu de l'article 13 du statut, la Cour peut être
saisie de trois manières : par n'importe quel État-partie ou
sur l'initiative du Procureur de la Cour ou encore par l'entremise du Conseil
de Sécurité des Nations Unies140(*).
A. La saisine par un État partie
La compétence pour saisir la Cour appartient d'abord
aux États-partie sans qu'elle soit limitée à un
État lié à l'accusé ou à la victime ou au
lieu de la commission du crime.
Cependant, ce dernier n'a aucune obligation de saisir la Cour
s'il a connaissance d'un fait rentrant dans la compétence de ses
juridictions nationales. Ceci, en vertu du principe de la
complémentarité.
En fait, un État partie peut soumettre une
« situation », dans laquelle un ou plusieurs crimes
rentrant sous la compétence de la Cour paraissent avoir
été commis, en demandant au Procureur d'enquêter sur elle
en vue d'établir si une ou plusieurs personnes sont impliquées
dans la commission de ces crimes. Il ressort de ce qui précède
que l'État partie ne dénonce pas une personne ou un individu,
mais simplement une « situation » ; exactement comme
ça se fait en droit interne où les citoyens peuvent informer la
police ou le Procureur qu'un crime a été commis quelque part,
sans nécessairement identifier la personne responsable.
Nous sommes persuadés qu'en déclenchant une
action devant la CPI, les États doivent être animés des
considérations altruistes et de justice ; cependant, il est tout
à fait probable que les agendas politiques ne manqueront pas à en
motiver certains. C'est pour cette raison que nous doutons beaucoup de
l'utilisation effective de ce mode de saisine.
D'ailleurs, beaucoup de traités141(*) prévoient un
schéma analogue c'est-à-dire permettant aux États de
dénoncer des violations des droits humains commis dans d'autres
États. Or de cette multitude des traités, un seul est très
rarement invoqué : il s'agit de la Convention Européenne sur
les Droits Humains142(*). Ce qui nous fait penser qu'il aurait
été dangereux de laisser l'initiative de saisir la Cour aux seuls
Etats.
B. La saisine par le Procureur
Le Procureur a la possibilité d'engager des
enquêtes proprio motu c'est-à-dire de sa propre
initiative. Cependant, contrairement à ce qui est le cas pour les
Procureurs des TPI ad hoc, qui agissent en toute indépendance
et qui sont les maîtres absolus des poursuites, l'activité de
celui de la CPI est contrôlée par la Cour elle-même puisque
l'ouverture d'une enquête formelle est subordonnée à
l'autorisation d'une « chambre préliminaire »
En effet, accorder au Procureur le pouvoir d'entamer des
poursuites devant la CPI est le mécanisme le plus analogue à ce
qui se passe devant les juridictions internes. Mais ce fut aussi le plus
controversé pendant les négociations de Rome143(*).
Pendant que certains Etats et la quasi-totalité des
ONGs étaient tout à fait pour l'existence d'un Procureur
indépendant, certains autres se sont rigoureusement opposés
à cette idée144(*). Des ces derniers, les États-Unis ont
déclaré qu'un Procureur indépendant « non
seulement est moins important pour l'exécution du mandat de la Cour
aussi bien pour l'indépendance que pour l'effectivité des
principes guidant les poursuites, mais aussi (le rôle du Procureur)
rendra délicat les poursuites des crimes les plus odieux qui
nécessitent équité et justice»145(*).
D'une façon générale, nous pouvons
affirmer que ces deux points de vue ont été pris en compte par
les dispositions du Statut qui reconnaissent aux juges le pouvoir de superviser
l'opportunité des poursuites. En conséquence, toute
décision du Procureur relative au déclenchement des poursuites
(proprio motu) doit avoir l'aval de la Chambre préliminaire,
qui est composée de trois juges. Quand le Procureur juge qu'il existe un
« fondement raisonnable » pour entamer des poursuites,
c'est devant cette chambre qu'il doit en déposer la demande
d'autorisation146(*)
munie des preuves matérielles des faits ou crimes
allégués.
Toutefois, ceci ne veut pas dire que la question de la
compétence et celle de la recevabilité devant la Cour sont
définitivement tranchées et que celle-ci ne pourra plus
reconsidérer sa décision à quelque autre niveau de
l'instance.
Il est enfin important de signaler qu'il peut arriver à
la Chambre Préliminaire de rejeter la demande du procureur. Dans ce cas,
celui-ci a toujours la possibilité de revenir avec la même affaire
devant la Chambre, mais cette fois là, il devra se fonder sur des faits
ou des preuves nouvelles.
Le Statut offre au Procureur la possibilité d'entamer
des poursuites proprio motu « sur base
d'information »147(*). Bien attendu, ces informations doivent venir de
quelque part148(*).
Le Procureur est libre d'apprécier que telle ou telle
autre information justifie des poursuites. Alors, dans le cas où il
jugerait les informations non pertinentes, le procureur doit aviser ceux qui
lui ont fourni l'information en question.
Un informateur non satisfait ne dispose d'aucune voie de
recours et ne peut en aucun cas défier la décision du Procureur,
même si le Statut prévoit expressis verbis la
possibilité de soumettre la même affaire en se basant sur des
faits nouveaux149(*).
Il apparaît donc clair que le Procureur a la
discrétion de choisir les cas sur lesquels enquêter. Comme l'a
d'ailleurs noté l'ex-Procureur du TPIY, devant une juridiction
internationale, spécialement celles qui sont basées sur le
principe de la complémentarité, « la liberté
dans l'opportunité des poursuites est considérablement plus large
et les critères sur lesquels cette opportunité doit s'exercer
sont mal définis et très complexes. Dans mon expérience,
basée sur les deux TPI ad hoc, je crois que le vrai défi
posé au Procureur est de choisir parmi plusieurs plaintes
méritoires, les plus appropriées à une intervention
internationale que d'en éliminer les moins dignes »150(*).
C. La saisine par le Conseil de Sécurité
des Nations Unies
Un « troisième larron » peut
également saisir la Cour, il s'agit du Conseil de
Sécurité.
En effet, à la base de la possibilité ouverte au
Conseil de Sécurité des Nations Unies se trouvent les
précédents des TPI ad hoc, qui ont montré que -
dans le cadre des fonctions que lui confère le Chapitre VII de la Charte
des Nations Unies - le Conseil de Sécurité pouvait être
conduit à décider qu'une situation justifie des poursuites
pénales internationales contre des violations graves du droit
humanitaire.
Ce qui est alors envisagé par l'article 13 (b) du
statut, c'est l'utilisation de la Cour en tant qu'un tribunal ad hoc,
s'il arrivait au Conseil de Sécurité à ordonner des
poursuites dans le même ordre d'idée que ce qu'il fait à
l'égard de l'ex Yougoslavie ou du Rwanda.
Mais la CPI n'est pas un organe des Nations Unies et celles-ci
ne contribuent pas énormément dans le financement de la cette
juridiction. De ce fait, il nous semble qu'il est anormal qu'on accorde
gratuitement toute cette facilité à saisir la CPI au Conseil de
Sécurité. C'est pour cette raison que nous sommes de ceux qui
pensent que le Conseil de Sécurité, lorsqu'il saisit la Cour,
doit se confiner dans les stricts paramètres du statut de Rome entre
autres eu égard à la compétence.
Par exemple, le Conseil de Sécurité ne pourrait
pas saisir la CPI sur base des atrocités commises par les Khmers rouge
au Cambodge dans les années 90, par respect au contenu de l'article 11
du statut. Une telle éventualité conduit alors le Conseil de
Sécurité à créer d'autres TPI ad hoc151(*). Pour des raisons
d'équité, le Conseil de Sécurité ne devrait pas
transférer à la CPI les pouvoirs des tribunaux ad hoc
existants.
Il reste, néanmoins, incertain de savoir si le Conseil
de Sécurité doit aussi se plier à d'autres critères
de recevabilité et au respect du principe de la
complémentarité. Cette question nous semble avoir
été intentionnellement abandonnée sans réponse
durant les assises de Rome, comme l'approuve par ailleurs Ruth
PHILIPS152(*).
A notre avis, lorsque les poursuites sont engagées
à la demande d'un État partie ou celle du Conseil de
Sécurité, il semble que le Procureur ne jouit plus de sa
discrétion à poursuivre ou non. Cependant, le Statut
reconnaît au Procureur le pouvoir de déclarer, après
l'ouverture des enquêtes, que celles-ci doivent être
arrêtées. L'une des raisons que peut pousser le Procureur à
faire une telle déclaration serait, par exemple, qu'il n'existe aucun
fondement convaincant justifiant les poursuites153(*).
Néanmoins, l'État-partie ou le Conseil de
Sécurité, selon le cas, peut demander à la Chambre
Préliminaire de reconsidérer cette décision du
Procureur154(*). Dans ce
cas, il apparaît alors très mitigé d'affirmer que la
discrétion dans l'opportunité des poursuites appartient
totalement au Procureur.
§2. LA RECEVABILITE D'UNE AFFAIRE DEVANT LA COUR.
Une fois la compétence d'une juridiction
établie, vient alors la question de savoir si l'affaire est recevable.
La recevabilité est le caractère d'une demande en justice rendant
possible son examen au fond par la juridiction saisie155(*).
Sur la question de la recevabilité, le statut de Rome
établit une compétence partagée entre les juridictions
nationales et la Cour pénale internationale. Ainsi, la CPI n'agira donc
qu'en complémentarité des juridictions nationales mais les
États sont tenus de coopérer pleinement avec la Cour dans les
enquêtes et poursuites pour les crimes relevant de sa
compétence.
Nous allons d'abord éclaircir le principe de la
complémentarité avant de considérer la teneur de celui de
« non bis in idem ».
A. Le principe de la
complémentarité
Sous la rubrique « recevabilité »,
à l'article 17, le Statut fait référence à la
complexe relation entre les systèmes judiciaires nationaux et la CPI.
Celle-ci doit juger un cas irrecevable lorsqu'une juridiction nationale
compétente est en train d'en connaître d'une façon
appropriée.
A ce stade, le mot clé est sans doute le terme
« complémentarité », qui n'apparaît en
fait nulle part dans le Statut156(*).
Cette solution est donc différente de celle qui avait
prévalu lors de la création des tribunaux pénaux pour
l'ex-Yougoslavie et le Rwanda.
Le statut de ces tribunaux pose en effet le `principe de la
primauté' sur les juridictions nationales qui leur permet de demander le
dessaisissement de ces juridictions à tout stade de la procédure.
Aux termes de l'article 18 du statut de Rome, le procureur
doit informer les États dès le début de l'enquête.
L'État dont le suspect a la nationalité dispose d'un délai
d'un mois pour faire connaître l'état des poursuites concernant
cette personne. L'existence de telles poursuites oblige le Procureur de la CPI
à suspendre l'instruction.
La Cour doit s'assurer, aux termes de l'article 19 du Statut,
qu'elle est compétente pour connaître d'une affaire portée
devant elle et peut d'office se prononcer sur la recevabilité de
l'affaire.
Le principe de la primauté de la compétence des
États est tempéré par le fait que cette règle ne
s'applique pas lorsqu'il apparaît que l'État en cause
« n'a pas la volonté ou est dans l'incapacité de mener
véritablement à bien » l'enquête ou les
poursuites157(*). Le
Statut précise les circonstances qui permettent de déterminer
qu'il y a un manque de volonté de l'État. Il en va notamment
ainsi lorsque la procédure est engagée dans le dessein de
soustraire la personne concernée à sa responsabilité
pénale ou de l'indisponibilité de l'État en question de se
saisir de l'accusé, de réunir les éléments de
preuve et les témoignages nécessaires ou de mener autrement
à bien la procédure. Le Statut précise que ce manque de
capacité peut aussi se traduire par un « effondrement total ou
d'une partie substantielle » du système judiciaire de l'Etat
concerné158(*).
A cet effet, nous pensons, par exemple, qu'un système
judiciaire développé et fonctionnel qui est incapable d'obtenir
la garde d'un prévenu à cause du manque des traités
d'extradition pourrait toujours résister aux poursuites devant la CPI en
se fondant sur le principe de la complémentarité.
Le principe de la complémentarité, même
s'il a été retenu dans le Statut de Rome, a fait l'objet des
critiques acerbes même de la part des experts en droit international
pénal. L'ex-Procureure des TPI, Louise ARBOUR, par exemple, a
essentiellement argumenté que le régime de ce principe ne
marcherait qu'en faveur des pays riches et développés et au
détriment des pays pauvres. C'est ce qui nous a fondés à
craindre le risque de la consécration d'une justice à deux
vitesses, celle des riches contre celle des pauvres.
Nous considérons par exemple qu'il serait très
facile au Procureur d'alléguer que le système judiciaire d'un
pays sous développé n'est pas efficace et donc
« incapable » d'engager des poursuites, fondamentalement
pour des raisons de pauvreté. Alors qu'il lui serait très
difficile de défier un Etat comme la Belgique ou la France, ayant un
système judiciaire très sophistiqué et très
opérationnel. Et pour preuve, aucune des affaires soumises à la
CPI impliquant des pays africains n'a été déclarée
irrecevable sur base de ce principe159(*). N'est ce pas que cela fait réfléchir
deux fois et soulève un tas de questionnement dont le plus
évident, à nos yeux, serait de savoir pourquoi une telle
limitation géographique uniquement axée sur l'Afrique ?
Est-ce parce que c'est le terrain le moins risqué politiquement ?
L'histoire récente nous montre que l'Afrique n'est pas le seul continent
du monde où il y a eu des crimes de guerre suivi des crimes contre
l'humanité au cours des trois dernières années. Pourquoi
le Conseil de Sécurité n'a pas saisi la Cour en vertu de
l'article 13 (b) des exactions qui se commettent tous les jours en Irak ?
Certainement nous pensons qu'il existe un danger imminent que
les dispositions de l'article 17 ne deviennent l'instrument d'une
surenchère arbitraire dans l'évaluation du mécanisme
judiciaire des pays en développement.
D'où personne ne peut s'étonner de voir dans le
futur que seuls les dirigeants des pays pauvres ou faibles défileront
à la barre de la CPI pendant que certains autres `criminels' se
trouveront en paix sous l'abri du classement sans suite par leurs tribunaux
nationaux des plaintes déposées contre eux. Aussi longtemps que
ce principe persistera dans le statut de Rome, Tommy FRANKS, Collin POWELL
moins encore G. W. BUSH ou Ariel SHARON160(*), par exemple, ne pourront répondre de leurs
actes devant cette juridiction, quelle que soit la nationalité des
victimes, pour la simple raison que leurs systèmes judiciaires ne
peuvent raisonnablement être remis en question. Par contre,
BEMBA, Kony et les autres du Tiers Monde resteront longtemps
inquiétés.
C'est vrai que les criminels doivent répondre de leurs
actes devant la justice mais pas devant une justice à deux mesures.
Sinon, où serait l'universalité tant attendue de la CPI ?
B. Le principe de non bis in idem
Lorsqu'une affaire a déjà fait l'objet d'un
jugement au niveau d'une juridiction interne compétente, la disposition
du Statut de Rome relative à la
« complémentarité » fait
référence à une autre disposition, celle de l'interdiction
de juger deux fois la même personne pour les mêmes faits,
prévue par l'article 20 du Statut et longtemps codifiée dans des
traités importants des droits humains, à l'instar du Pacte
international relatif aux droits civils et politiques161(*).
Naturellement, la personne en question ne peut être
poursuivie deux fois que si la procédure devant cette juridiction avait
pour but de soustraire la personne à sa responsabilité
pénale ou si elle a été menée de manière qui
démentait l'intention de traduire l'intéressé en
justice162(*).
Nous pensons que dans le cas d'un individu
régulièrement jugé et qu'il est par la suite
`gracié', la Cour devrait, en principe, demeurer incompétente.
Loin d'être hypothétique, un tel cas peut se présenter,
exactement comme il en a été au début des années 70
où William CALLEY était condamné à
perpétuité pour crimes de guerre à cause d'un massacre
atroce perpétré au village de MY LAI au Vietnam. La justice a
fait son travail mais le Président des Etats Unis d'alors, Richard
NIXON, est intervenu et lui a accordé la grâce
présidentielle après une brève période de
détention.
Rappelons pour la mémoire que pour pouvoir
bénéficier de la grâce, la personne doit avoir fait l'objet
d'une condamnation. Il peut s'agir d'une peine d'emprisonnement, d'une amende
ou d'un travail d'intérêt général. Mais cette
condamnation doit être définitive et exécutoire163(*). Toutes les voies de recours
devant être épuisées. Ainsi, un condamné ne peut
demander de grâce s'il a interjeté appel ou si l'exécution
de sa peine est suspendue par un sursis ou par une mise à
l'épreuve164(*).
La grâce présidentielle ne doit pas être
confondue avec l'amnistie. L'amnistie est une mesure générale,
votée par le Parlement (c'est une loi) et qui efface la condamnation. La
grâce est une mesure individuelle qui est de la compétence
exclusive du Chef de l'exécutif. Si elle dispense de l'exécution
d'une peine, elle n'efface pas la condamnation. Et par conséquent, le
casier judiciaire en restera marqué165(*).
De ce fait, nous sommes d'avis que contrairement à
l'amnistie qui peut être contestée à cause des
circonstances qui l'entourent et surtout qu'elle peut être
accordée même avant le jugement, la grâce
présidentielle, quant à elle, est à considérer
comme une expiration de la peine régulièrement prononcée
par une juridiction donnée et doit, par conséquent,
empêcher la Cour pénale internationale à poursuivre un
individu ainsi gracié. D'ailleurs l'amnistie intervenant avant toute
condamnation ne saurait remettre en question le principe « non
bis in idem » pour la simple raison qu'il n'y a eu aucune
condamnation.
Nous pensons, en outre, qu'il est un peu douteux d'appliquer
les principes de la «complémentarité » et
«non bis in idem » à une situation où un
individu est reconnu coupable de meurtre (par exemple) par une juridiction
interne alors que le droit international classe son acte parmi les crimes
odieux tel que le génocide, le crime contre l'humanité ou encore
le crime de guerre. Evidemment, il serait plus aisé à un
prévenu d'accepter que son acte soit constitutif de meurtre ou de coups
et blessures volontaires que de se laisser incriminer pour crimes graves du
droit humanitaire. Il est tout à fait vrai qu'une telle qualification
par les juridictions internes banalise les crimes et contribue au
révisionnisme et au négationnisme, même si le meurtre est
un crime grave en droit interne et est sévèrement puni.
Toutefois, ce qui ressort de l'article 20 (3) est que des
poursuites sont interdites devant la CPI s'il y a déjà eu un
procès `pour une conduite (comportement) aussi interdite sous les
articles 6, 7 et 8'. Pour dire qu'une fois la bonne foi de la juridiction
interne ayant effectué une telle qualification établie, la CPI
n'aura qu'à déclarer irrecevable toute poursuite
ultérieure devant elle.
`Non bis in idem' interdit aussi, en inverse, qu'une
juridiction interne puisse de nouveau poursuivre un individu ayant
déjà fait l'objet d'un procès équitable devant la
CPI, quel qu'en soit le verdict. Cette interdiction est, à notre avis,
restrictive en ce sens qu'elle n'exclut que des poursuites devant les
juridictions nationales sur base de génocide, crime contre
l'humanité ou crime de guerre. Et nous pensons que si un individu est
acquitté du crime de génocide par la CPI faute de preuve de son
intention `à détruire en tout ou en partie' un groupe
donné ; il n'est pas, par contre, dispensé des poursuites
devant les juridictions nationales pour crime de meurtre. D'ailleurs, les
juridictions internationales ont toujours considéré le principe
«non bis in idem » comme ne s'appliquant
qu'à l'égard d'une même juridiction et n'interdit pas des
poursuites ultérieures devant une autre juridiction166(*).
CHAPITRE III : LIMITATIONS A LA COMPETENCE DE LA
CPI ET
EBAUCHES DES
SOLUTIONS
Il va sans dire que la mise en place de la Cour Pénale
Internationale, initiée dans l'euphorie, cède le pas de plus en
plus au scepticisme et aux critiques. Son instauration soulève en effet
de nombreux problèmes qui affectent son intégrité, son
indépendance et son efficacité. A côté de ceux que
nous avons eu à soulever ça et là dans le chapitre
précédent, les restrictions posées à la
compétence de la CPI sont de deux ordres : D'un côté on
peut relever les faiblesses endogènes à la Cour Pénale
internationale, à savoir celles posées par son statut même
(section I). D'autre part, il faut relever les obstacles exogènes
édifiés par certains États pour limiter la portée
de ses actions (section II).
SECTION PREMIÈRE : LES LIMITATIONS
ENDOGENES
§1. La non rétroactivité du Statut
de Rome
Le droit des droits de l'homme international reconnaît
comme l'un de ses principes fondamentaux l'interdiction de la
rétroactivité des crimes et des peines. Connu sous l'adage latin
de « nullum crimen nulla poena sine lege », ce
principe général du droit interdit toute poursuite des crimes qui
n'étaient pas encore reconnus comme tels au moment de leur commission.
Naturellement, il existe plusieurs interprétations en
ce qui concerne l'étendu de ce principe.
Par exemple, à ceux qui accusaient le Tribunal
Militaire International de Nuremberg de porter atteinte à ce principe,
le tribunal pointait du doigt les textes juridiques existants en ce
moment-là telle que la Convention IV de La Haye de 1907 (en cas de crime
de guerre) et le Pacte de Kellogg Briand (en cas de crime contre la
paix)167(*). Toutefois,
même si ces instruments décrivaient certains actes comme
contraires au droit international, ils ne les définissent pourtant pas
comme engageant la responsabilité pénale individuelle de leurs
auteurs.
Le Tribunal Militaire International de Nuremberg a simplement
répondu à la charge que le principe « Nullum
crimen » était un principe de justice et qu'il serait
alors injuste de laisser impunis les leaders nazis168(*).
Dès lors cet argument a eu des échos dans
l'affaire Eichman de 1961 et même récemment dans le jugement
Erdemovic du TPIY169(*).
En tout cas « nullum crimen » est
matérialisé aux articles 22 et 23 du statut de Rome.
D'une façon spécifique, l'article 21(1) dispose
que « une personne n'est responsable pénalement en vertu du
présent Statut que si son comportement constitue, au moment où il
s'est produit, un crime relevant de la compétence de la
Cour ».
A notre avis, l'importance de cet article est mitigée
surtout du fait de l'interdiction de la compétence de la Cour à
l'égard des crimes commis avant l'entrée en vigueur du statut.
Toute la question se pose alors si nous considérons la
prérogative reconnue à certains États d'émettre une
déclaration ad hoc reconnaissant à la cour la
compétence sur les crimes commis avant l'entrée en vigueur du
statut de Rome pour ce pays. L'accusé peut facilement alléguer
qu'en rapport avec cet État, la cour viole le principe
« nullum crimen » ; ou encore que les
dispositions des articles 6, 7, et 8 ne sont pas reconnues comme norme du droit
international coutumier et, par conséquent, ne peut être poursuivi
et puni devant la Cour.
D'ailleurs, cette question peut facilement être
soulevée dans tous les cas, exactement comme elle a été
soulevée par les avocats de défense devant le TPIY et le
TPIR170(*).
Cet argument, même s'il n'est pas totalement banal, n'a
jamais connu de succès devant n'importe quelle juridiction
internationale et n'aura éventuellement pas beaucoup de chance devant la
CPI171(*).
L'attitude adoptée par la cour européenne des
droits de l'homme à l'égard des crimes rétroactifs est
qu'ils doivent être prévisibles par leurs auteurs172(*).
Cette question a fait couler beaucoup d'encre aux experts en
droit international et a fait l'objet des doctrines, des fois,
contradictoires.
GLASER estime que le principe de la
non-rétroactivité, dont le principe de la légalité
des délits et des peines est le corollaire, n'est pas obligatoire en
droit international173(*). Il affirme, dans le même ouvrage, que
« ce principe a été développé sur base du
droit écrit(...) Or, le droit international n'a pas été
codifié » et même dans le cas où il dresserait
une liste de crimes de guerre, sa « source se trouve toujours dans la
coutume(...) car le droit conventionnel (...) fixe seulement un état de
chose antérieur, il précise, et peut-être complète,
une coutume internationale préexistante. Donc, conclue-t-il, dans le
droit international actuel, il n'y pas de place pour le principe `nullum
crimen' »
DONNEDIEU DE VABRES (qui était juge au TMIN) est
plutôt nuancé. Il pense que l'exclusion du principe de la
légalité des rapports internationaux est
« d'emblée inadmissible, car il y a au fond du de la
règle nullum crimen, une vérité
générale et permanente »174(*). Mais « il n'est
pas vrai non plus de prétendre que cette règle a une valeur
absolue » : Son application ne doit pas être rigide et
« il est normal que cette souplesse se rencontre à un plus
haut degré dans l'évolution du droit pénal international
étant donné que l'exigence d'incriminations précises et de
sanctions nettement définies s'adaptent mal aux aspects changeant de la
vie et de la délictuosité internationale »175(*).
Aussi DONNEDIEU pensait-il que l'application du statut de
Nuremberg aux crimes contre la paix et aux crimes de guerre commis avant le 8
août 1945 n'a pas heurté le principe de la non
rétroactivité, car ces crimes étaient l'objet
d'incriminations préexistantes au Statut de 1945, puisqu'ils
étaient déjà prohibés par le droit international
(même si celui-ci n'édictait pas des sanctions pénales) et,
pour nombre de crimes de guerre, par les droits nationaux.
Le tribunal de Nuremberg, quant à lui, a reconnu qu'il
a agit d'une façon rétroactive et a justifié cette
rétroactivité. Au sujet de crimes de guerre, il a
considéré que le Statut est déclaratif d'un droit
préexistant, et non créateur d'un droit nouveau car
« dès avant le Statut, le crimes de guerre était
prévus par les articles 46, 50 et 56 de la Convention de la Haye de
1907(...) » . A propos des crimes contre la paix, le tribunal a
déclaré que :
Il faut rappeler que la maxime nullum crimen sine
lege ne limite pas la souveraineté des États ; elle ne
formule qu'une règle généralement suivie ; or, il est
faux de présenter comme injuste le châtiment infligé
à ceux qui, au mépris d'engagements et de traités
solennels, ont, sans avertissement préalable, assailli un État
voisin. En pareille occurrence, l'agresseur sait le caractère odieux de
son action (...), les accusés connaissent les traités
signés par l'Allemagne qui proscrivaient le recours à la guerre
pour régler les différends ; ils savaient que la guerre
d'agression est mise hors la loi par la plupart des États du monde, y
compris par l'Allemagne elle-même (...), c'est en pleine connaissance de
cause qu'ils violaient le droit international.
Par ailleurs, si le tribunal a écarté la
qualification de crime contre l'humanité pour les brutalités et
atrocités commises avant le 1er septembre 1939, ce n'est pas
au motif que le principe de la non rétroactivité interdisait de
prendre en compte les actes de cette nature, mais parce que ceux-ci
n'étaient pas en rapport avec un complot ou un plan concerté en
vue de déclencher ou de conduire une guerre d'agression.
Plus récent est le point de vue de Jean François
ROULOT qui affirme que « le droit international autorise des
aménagements au principe de la
non-retroactivité »176(*) et cite comme argument les articles 15 alinéa
2 du Pacte relatif aux droits civils et politiques et 7 alinéa 2 de la
Convention de Sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés
fondamentales qui prévoient que si l'incrimination est conforme aux
principes généraux du droit reconnus par l'ensemble des Nations,
le principe de la légalité n'est pas méconnue. Et tout le
monde sait que les dispositions qui régissent les crimes devant la CPI
« résultent des traités régulièrement
intégrés dans l'ordre juridique interne» de beaucoup de
pays.
A notre humble avis, nous pensons que la CPI devrait adopter
l'attitude du Tribunal Militaire International de Nuremberg et le Procureur
devrait faire sien l'argument développé ci-haut pour se saisir
même des crimes commis avant l'entrée en vigueur de la CPI pour la
simple raison qu'à partir du moment où la Cour est entrée
en vigueur, tout le monde avait reçu des avertissements suffisants qu'il
est exposé au risque d'être poursuivi pour de tels crimes et que
le Statut lui-même à son article 12(3) prévoit une telle
poursuite même à l'égard des États non encore
parties au Traité de Rome.
En outre, personne ne peut valablement alléguer la
violation du principe « nullum crimen » à
l'égard des crimes sous la compétence de la CPI puisque beaucoup
de conventions et traités antérieurs au Statut avaient
déjà érigé ces actes en crimes au regard du droit
international.
Nous citerons à titre principal les Conventions de
Genève de 1949 et la Convention de 1948 sur la prévention et la
répression du crime de Génocide qui, à notre sens, posent
une base suffisante aux trois crimes dont la compétence est reconnue
à la CPI. Même si ces instruments n'étaient pas encore
compilés dans un même texte (chose que le Statut de Rome a le
mérite d'avoir fait), du moins, personne ne peut - de bonne foi - les
remettre en cause en ce qui concerne la protection des droits de l'homme en
face du crime de Génocide, du crime contre l'humanité et du crime
de guerre.
Le Statut de la Cour Pénale Internationale est
basé sur la non-rétroactivité. Dès lors, il va sans
dire que ses initiatives immédiates s'en trouvent
considérablement limitées. Beaucoup de dictateurs, actuellement
en asile politique, pourront ainsi échapper à la justice
universelle et couler des jours heureux, en possession de fortunes
accumulées illégalement durant leur présidence. C'est
ainsi qu'Amin DADA restera protégé jusqu'à sa mort par
l'Arabie Saoudite. Il en va de même de Milton OBOTÉ, ou de
l'Ethiopien MENGISTU Hailé Maryam, actuellement sous la protection du
dictateur zimbabwéen MUGABÉ.
Nous pensons que la consécration de ce principe dans le
Statut de Rome était beaucoup plus mue par des motifs politiques que par
souci de justice et d'équité. Et nous n'avons qu'à
déplorer une fois de plus que le cynisme politique puisse encore prendre
le dessus des droits des victimes.
§2. L'article 124
La France a posé comme condition de son adhésion
l'intégration de l'article 124, permettant un moratoire de 7 ans
à l'égard des crimes de guerre. En effet, selon les dispositions
de cet article, l'État signataire peut décliner la
compétence de la CPI pendant 7 ans eu égard au crime de guerre.
Une fois la période de 7 ans achevée, l'Etat qui
a demandé le bénéfice de l'article 124 dispose des trois
options : il peut simplement approuver le Statut de Rome in toto
ou il peut carrément se retirer du Statut conformément à
l'article 127 ou encore il peut essayer, une fois que les modifications sont
devenues possibles, de persuader les autres Etats-parties à amender cet
article en vue de la prolongation du délai qu'il
prévoit177(*).
Mais en attendant l'arrivée du moment des modifications
du Statut de Rome, cet article constitue une « véritable
licence de tuer pendant 7ans »178(*) en ce sens que l'Etat qui a
requis son bénéfice peut impunément commettre le crime de
guerre sans jamais se voir inquiéter par la CPI.
Heureusement que jusqu'à présent, la France est
le seul Etat-partie à avoir fait recours aux dispositions de cet
article. Cela implique que les crimes de guerre commis par un français
ou sur le territoire de la République française entre 2002 et
2009 ne pourront être jugés devant la CPI.
Malgré cette disposition, des poursuites au niveau
national français sont, pour l'instant impossibles, car rappelons-le, le
droit pénal français ne connaît toujours pas de
définition de crime de guerre179(*). Si en effet le génocide et les crimes contre
l'humanité sont prévus et réprimés par la loi
française - même si se posent des questions d'adéquation
avec les définitions du statut de la CPI - celle-ci ne reconnaît
pas les crimes de guerre en tant que tels. En l'état actuel de la
législation française donc, les tribunaux français ne
seraient pas en mesure de juger comme tels des faits commis par des
ressortissants ou sur le territoire français depuis le 1er juillet 2002
et qui seraient identifiés comme crimes de guerre par le Statut de la
CPI et par les Conventions de Genève et leurs protocoles additionnels,
également ratifiés par la France.
Cette lacune est regrettable quand nous savons que, comme le
rappelle le préambule du Statut de la CPI, c'est aux États
qu'incombe le devoir premier de juger ces crimes, la compétence de la
Cour n'étant que complémentaire. Mais bien plus
préoccupant encore, la CPI ne pourra pas combler cette lacune et, par
application du principe de complémentarité posé par son
statut, juger d'éventuels crimes de guerre qui seraient commis par des
ressortissants ou sur le territoire français pendant sept ans à
compter du 1er juillet 2002180(*). La raison officielle de la France pour le maintien
de cet article serait de lui permettre d'avoir le temps nécessaire en
vue d'adapter son droit pénal interne à la lettre et à
l'esprit du Statut de Rome.
D'après la FIDH «cet article n'a absolument
aucune justification morale et peut être décrite comme un permis
de tuer »181(*). La Coalition mondiale pour la CPI oeuvre activement
pour la disparition de cet article et nous souhaitons que cette action
aboutisse et que cet article ne puisse plus exister dans le Statut de Rome
parce que, à notre avis, il va sans dire que son contenu porte
sensiblement atteinte à l'efficacité de la Cour.
§3. Le sursis à enquêter ou à
poursuivre du Conseil de Sécurité
L'article 16 prévoit la saisine négative de la
Cour. En effet, aux termes de cet article, le Conseil de Sécurité
peut demander à la Cour de suspendre ses poursuites, s'il est saisi d'un
conflit en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies en
matière de maintien de la paix. Cette disposition a fait couler beaucoup
de salive lors des assises de Rome à cause de son interférence
sur l'indépendance et l'impartialité de la Cour.
Un compromis, inspiré par le projet
déposé par Singapore, a fini par résoudre le
problème en autorisant le Conseil de Sécurité à
suspendre les poursuites seulement par une résolution positive,
renouvelable chaque fois après douze mois182(*).
Cependant, nous pensons que même ce compromis ne dissipe
pas la fameuse interférence qu'une telle intervention du Conseil de
Sécurité causerait à l'indépendance et
l'impartialité de cette juridiction. Nous nous convenons avec l'Inde
qu'il est difficile de comprendre tout le pouvoir du Conseil de
Sécurité à arrêter les poursuites parce que,
(...) d'une part, il est argumenté que la CPI doit
être mise en place en vue de juger les crimes de haute magnitude ;
et, d'autre part, il est soutenu que le maintien de la paix et de la
sécurité devrait permettre à ceux qui ont commis ces
crimes d'échapper à la justice, si le Conseil de
Sécurité le veut ainsi. Du moment que cet argument est en soi
vrai, la Conférence devrait accepter la proposition selon laquelle la
justice doit supplanter la paix et la sécurité
internationale.183(*)
C'est qui est encore grave, c'est qu'à Rome, personne
ne s'attendait que le Conseil de Sécurité puisse faire usage de
cette disposition avant même que la Cour ne soit
opérationnelle184(*).
Or, c'est exactement ce qui est arrivé en juillet 2002,
seulement quelques jours après l'entrée en vigueur du statut de
Rome.
En conséquence des menaces des États Unis, le
Conseil de Sécurité a adopté, en date du 12 juillet 2002,
la Résolution 1422. Dans cette résolution, le Conseil de
Sécurité «demande » que «s'il arrive qu'un
cas impliquant les officiels ou les personnels actuels ou anciens, originaires
d'un État contributeur non-partie au Traité de Rome, pour des
actes ou omissions relatives à une opération établie ou
autorisée par les Nations Unies ; la Cour devra, pour une
période de douze mois - allant du 1er juillet 2002 - ne pas
commencer ou arrêter les enquêtes ou les poursuites sur un tel
cas, en moins que le Conseil de Sécurité ne décide
autrement ». Une telle résolution étend alors ce sursis
même aux opérations telle que « Stabilisation
Force » (SFOR) en Bosnie et en Herzégovine dont le rôle
a été autorisé par le Conseil de Sécurité
même si cette opération ne se trouve pas du tout sous le
contrôle des Nations Unies. Bien attendu, cette Résolution ne
protège que les ressortissants des États non-parties au Statut de
Rome.
Naturellement, la légalité de cette
Résolution est sérieusement douteuse en ce sens que l'article 16
dispose que le Conseil de Sécurité, pour surseoir les
enquêtes ou les poursuites devant la CPI, doit être en train d'agir
en vertu du Chapitre VII de la charte des nations unies - qui ne s'applique que
lorsqu'il y a menace contre la paix ou contre la sécurité
(notamment en cas d'atteinte à la paix ou en cas d'acte d'agression).
Cependant, il convient de souligner que cette apparente
restriction est loin d'en être une. Les termes du Chapitre VII sont assez
larges pour être interprétés selon les convenances, et peut
être compris comme « menace contre la paix » toute action qui
conviendra au Conseil de Sécurité.
Or tout le monde sait pertinemment bien que ce n'est pas dans
toutes les missions qu'elles autorisent que les Nations Unies agissent en vertu
de ce Chapitre185(*).
De façon raisonnable, nous pensons - comme DEEN
RACSMANY - qu'il devrait appartenir à la Cour d'apprécier si le
Conseil de Sécurité agit réellement en vertu du Chapitre
VII ou non186(*).
Mentionnons tout de même que le débat sur la
remise en question de la légalité des Résolutions du
Conseil de Sécurité par les tribunaux n'est pas encore clos. La
CIJ a souvent manifesté un scepticisme à remettre en question une
Résolution du Conseil de Sécurité pour la simple raison
qu'aussi bien le Conseil de Sécurité que la CIJ sont des
principaux organes des Nations Unies et la Charte des Nations Unies ne
prévoit nulle part la hiérarchie selon laquelle un organe
important des Nations Unies devrait revoir les décisions d'un autre.
La CPI n'est pas concernée par cette version car elle
n'a pas été créée par les Nations Unies et n'en est
pas du tout un organe. D'ailleurs, si le TPIY s'est arrogé la
qualité d'apprécier la légalité de la
Résolution 827 - qui est par ailleurs son acte constitutif187(*) - ; nous pensons
qu'à plus forte raison la CPI devrait se considérer comme
fondée à défier la légalité de la
Résolution 1422, prise en `abus de pouvoir' par le Conseil de
Sécurité.
Il est évident que la Résolution 1422 est un
exemple patent et dégoûtant de l'intimidation des États
Unis et une entorse considérable à la crédibilité
du Conseil de Sécurité. Cette possibilité lui offerte
risque de bloquer le fonctionnement de la Cour et de jeter un discrédit
sur l'indépendance de cette juridiction et, partant, sur son
efficacité. D'où nous sommes de l'avis que la Cour doit avoir
toute latitude d'apprécier chaque fois l'opportunité d'une telle
suspension des poursuites.
§4. Le manque d'instruments
coercitifs
La Cour, comme les TPI ad hoc, n'a pas à sa
disposition de force de contrainte : elle est donc dépendante de la
bonne volonté et de la coopération des États-parties. Or
Celles-ci sont déterminantes pour l'effectivité des poursuites
qui peuvent être exercées par les Etats eux-même, pour la
remise à la Cour des personnes qui font l'objet de poursuites ainsi que
pour l'exécution des décisions de la Cour. Les conditions de
travail de la Cour dépendent donc substantiellement du degré de
coopération des Etats, et à ce titre, restent aléatoires
pour la simple raison que le Statut de Rome ne prévoit aucune sanction
applicable à un Etat qui se serait abstenu de coopérer avec la
Cour.
A part le fait que la Cour doive informer l'Assemblée
Générale des Etats-parties ou encore le Conseil de
Sécurité, selon que la saisine a été
effectuée par un Etat partie ou le Conseil de Sécurité, le
Statut est totalement muet en ce qui concerne la suite d'une telle information.
Or nous sommes sans ignorer le comportement des Etats dans les relations
internationales.
L'exemple actuel d'Hissein Habré est très
éloquent quand le Président sénégalais, Abdoulaye
WADE, déclare que « c'est avant tout une affaire
africaine » et que même si la Cour d'Appel de Dakar
décidait son extradition vers la Belgique, WADE se réserve encore
le droit de « consulter l'UA »188(*). Ceci dénote
énormément le manque de volonté du Sénégal
à coopérer avec la justice pénale internationale, qui -
dans la plupart des fois - ne dispose que des pressions diplomatiques comme
force de dissuasion. Il est sans rappeler que l'efficacité de cette
option s'est montrée très défaillante parce que si
certains Etats peuvent manifester leurs hostilités envers les
régimes qui protègent les criminels, certains autres se montrent
plutôt tolérants. Et comme en ce qui concerne la Cour
pénale internationale, les Etats Unis, maître du monde, seront du
côté de ceux-ci ; il va sans dire que la pression d'autres
Etats n'aura pas autant de poids qu'elle en aurait avec le concours des Etats
Unis.
Il est un peu ridicule de penser à l'heure actuelle de
la mise en place d'une force internationale totalement indépendante du
bon vouloir des États mais nous sommes d'avis qu'un organe comme
l'Interpol peut être renforcé et doté des moyens
nécessaires pour s'occuper de la traque des individus voulus par la
Cour. Encore une fois, il faudrait que les États avalisent parce ce
travail devra nécessairement s'effectuer sur leurs territoires de ces
États.
SECTION II : LES LIMITATIONS EXOGENES
Ces limitations tiennent essentiellement de l'hostilité de
certains pays à l'instauration d'une Cour Pénale
Internationale. Sept Etats ont voté, le 17 juillet 1998, contre la
convention portant sur le Statut de la Cour Pénale Internationale. Parmi
eux : - deux membres permanents du Conseil de Sécurité, la
Chine et les Etats Unis - des Etats qui comme l'Inde ou Israël sont en
conflit avec leur voisin - des Etats qui comme la Chine qui exerce une
domination politique et militaire sur un territoire, le Tibet. - D'autres
Etats enfin, comme le Qatar, l'Irak, le Soudan, le Rwanda,...
L'absence de tels membres, en particulier des Etats Unis, dans
une instance internationale dont l'universalité constitue l'un des
critères majeurs de crédibilité, pose problème.
Elle enlève une grande part à la légitimité de la
Cour Pénale Internationale.
§1. La pression américaine sur les
États signataires et les États tiers au Traité de
Rome
Après avoir exercé d'intenses pressions sur les
Nations Unies et obtenu, par la menace, que les membres américains des
forces de maintien de la paix ne puissent être inquiétés
par la CPI, le gouvernement américain a continué à
chercher par tout moyen comment étendre les effets de la
résolution 1422 à tout ressortissant américain, quelle que
soit sa fonction.
Ainsi, pour parvenir à un tel résultat, les
États Unis ne ménagent aucun effort. D'où il fallait
mettre en oeuvre des nouveaux instruments tel que « The American
Service Member protection act » qui, devenue loi
américaine depuis le 02 août 2002, interdit toute autorité
américaine de coopérer de quelque façon que ce soit avec
la cour et menace de mettre un terme à l'assistance militaire
accordée par les États unis aux États qui ont
déjà ratifié le traité de Rome. La conclusion
d'accords bilatéraux avec le plus grand nombre d'États permettra
d'assurer l'immunité à tout ressortissant américain contre
les poursuites devant la CPI.
Après une brève présentation de cet
instrument, nous en apprécierons la légitimité de ces
accords que les Etats-Unis signent avec des nombreux Etats dans l'obscure
dessein de limiter la conséquence de la Cour.
A. The American service Members Protection Act
(ASPA)
Dès novembre 2000, des militants opposés
à la CPI estimaient qu'il n'était plus possible d'obtenir
l'insertion des dispositions chères aux États Unis dans le
Traité établissant cette cour. D'où la seule solution
consistait alors à en « limiter
l'efficacité »189(*).
Ainsi fut introduite l'idée de l'ASPA. L'une des
raisons qui ont milité pour le vote en faveur de cette loi était
lié au contexte et à la lourde atmosphère
américaine consécutive aux attentats du 11 septembre2001. A un
moment où les dirigeants se devaient d'apparaître unis contre
l'ennemi et à quelques mois seulement des élections de 2002 au
Congrès, il était difficile pour un membre du Congrès de
s'opposer à une loi intitulée « loi de protection
du personnel américain »190(*).
Selon Richard DICKER de Human Rights Watch, beaucoup
de membres du congrès américain n'étaient même pas
au courant des garde-fous pourvus par le Statut de Rome en vue de
prévenir des poursuites qui ne serviraient pas les intérêts
de la justice191(*).
L'ASPA prévoit les dispositions suivantes192(*) :
· Interdiction de toute coopération
américaine avec la CPI193(*). En précisant que la loi n'interdit pas la
coopération américaine avec les TPI ad hoc, elle dispose
que les juridictions américaines, les gouvernements locaux et le
gouvernement fédéral ne devraient pas coopérer avec la
Cour en matière d'arrestation, d'extradition des suspects,
d'enquêtes, de mise sous séquestre, de recueil des preuves et de
saisie.
· Interdiction de toute assistance militaire envers les
États ayant ratifié le traité de Rome. Cette interdiction
dure douze mois renouvelables, elle ne peut avoir lieu que si les
intérêts américains en dépendent. Toutefois, cette
interdiction ne s'applique pas aux États membres de l'OTAN ni aux
alliés essentiels des États unis non-membres de l'OTAN, tel que
Israël, Australie, Égypte, Japon, Jordanie, Argentine,
République de Corée du sud, la Nouvelle Zélande et le
Taiwan194(*)
· La loi interdit la transmission des informations
relevant de la sécurité nationale aux pays ayant ratifié
le Statut ;
· Elle restreint également la participation
américaine aux opérations de maintien de la paix de
l'ONU195(*).
· Dans le cas où un citoyen américain
serait détenu par la CPI, l'ASPA donne tout pouvoir au Président
des Etats Unis en vue d'utiliser « tous les moyens
nécessaires et appropriés » pour le
libérer196(*).
· Néanmoins, elle permet l'assistance
américaine à tout effort, y compris de la CPI, pour soumettre des
criminels étrangers à la justice197(*).
· Enfin, l'ASPA prévoit un mécanisme de
levée d'interdictions par le Président. Ainsi, par exemple, les
articles relatifs à l'interdiction de coopération et à
l'interdiction de fournir les informations touchant à la
sécurité nationale sont inapplicables, lorsque le
Président décide d'agir en qualité du commandant
suprême de l'armée. De même les restrictions à la
participation des forces américaines aux Opérations de Maintien
de la Paix (OMP) et l'interdiction d'assistance militaire aux pays ayant
ratifié le Statut de la CPI peuvent être suspendues par le
Président198(*).
Dès lors, il nous est permis d'espérer que
l'élection d'un Président, plus ouvert à l'idée de
coopération multilatérale que ne l'est G. W. BUSH, pourra avoir
une influence très positive sur cette collaboration nécessaire
entre la première puissance mondiale et la CPI.
Quoiqu'il en soit, nous considérons cette loi comme une
nouvelle illustration de l'unilatéralisme dont les États Unis
font souvent preuve dans leurs relations extérieures et plus encore
depuis l'arrivée à la Maison Blanche de BUSH Junior avec sa
politique conservatrice et unilatérale.
Cette loi n'étant pas suffisante aux yeux des
américains pour les protéger contre les poursuites devant la CPI,
l'administration Bush se devait de franchir une nouvelle étape. Ainsi,
beaucoup d'accords bilatéraux viennent alors compléter l'ASPA sur
le plan international.
B. Les accords du type « article
98 ».
Après le retrait de la signature du Traité de
Rome, les menaces exercées sur les missions de la paix dans les Balkans
et l'adoption de l'ASPA, l'administration républicaine adopte une
nouvelle politique à l'égard de la CPI, moins agressive mais
«certainement plus grave pour la compétence future de la
cour »199(*). En effet, depuis juillet 2002, les
États-Unis utilisent le «mécanisme prévu par
l'article 98 » du statut de Rome et proposent des accords
bilatéraux à des nombreux États, pour garantir
l'immunité des ressortissants américains devant la CPI.
Selon que l'État approché a signé,
ratifié le traité de Rome ou, au contraire, n'est pas
État-partie ; l'accord d'immunité prend l'une des 3 formes
suivantes :
· Selon la première forme, chaque État
signataire accepte réciproquement de ne pas remettre à la Cour
les nationaux de l'autre État sans le consentement exprès du
partenaire.
· La deuxième forme, non réciproque cette
fois et s'adressant aux États-parties au Traité, ne remet pas en
cause la compétence de la CPI sur les nationaux du second État
mais seulement sur ceux des États-Unis, qui doivent donner leur
consentement à toute remise d'un de leurs ressortissants à la
cour par le second État.
· La troisième forme, enfin, qui concerne les
États qui n'ont ni signé ni ratifié le Traité de
Rome - à l'instar du Rwanda - comprend un paragraphe prévoyant
que les parties ne doivent pas délibérément faciliter,
consentir à ou coopérer aux efforts de toute partie ou tout
État tiers d'extrader, remettre ou transférer un ressortissant de
l'autre partie à la CPI.
Selon Amnesty international, dans son rapport
d'août 2002, ces accords bilatéraux posent un certain nombre de
problèmes quant à leur conformité avec les principes du
droit international relatif aux traités : d'abord, contrairement
à ce qu'assurent les États Unis quant aux poursuites des crimes
éventuels de génocide, crime de guerre et les crimes contre
l'humanité commis par leurs ressortissants, la loi
fédérale américaine ne serait pas adaptée à
juger des tels crimes quand ils sont commis en dehors du territoire
américain200(*).
De même les cours fédérales ne sont pas
compétentes pour juger les crimes de génocide commis par les
membres de l'armée américaine.
En outre, cette ONG dénonce le fait que ces accords ne
prévoient aucune obligation pour le second État partie
d'enquêter ou de juger les crimes si les États Unis s'y refusent,
qu'ils rendent nécessaire la renégociation de tous les accords
d'extradition préalablement en vigueur, ou encore, qu'ils couvrent un
plus grand spectre de personnes que les SOFAs201(*) ou la Résolution 1422.
Rappelons que les accords que signent les États-Unis
avec d'autres États pour échapper à la CPI ne s'appliquent
pas seulement aux membres en service de l'armée américaine ou aux
civils associés mais également aux anciens membres du
gouvernement ou de l'armée et à tout civil.
Malgré la réticence de la majeure partie des
États constituant la Communauté internationale à s'engager
dans de tels accords aux côtés des américains prouvant,
s'il en était besoin, que ces accords posent des sérieux
problèmes quant à leur conformité avec le Statut de Rome
et le droit international, les États Unis affirment la
légitimité de leur démarche sur la base de l'article 98 du
statut de Rome202(*).
Selon le mécanisme de cet article, la cour devra
s'abstenir de faire une requête de coopération ou de remise d'un
accusé auprès d'un État-partie, si cela devait être
en contradiction avec un engagement préalable
de droit international.
TREAN CLAIRE déclare même que
« l'article 98 a été introduit dans le statut, lors des
négociations de 1998, pour répondre à la crainte de
certains pays que le traité sur la CPI n'entre en contradiction avec des
obligations internationales préexistantes. Les États-Unis en font
aujourd'hui une interprétation manifestement abusive en cherchant de
l'utiliser pour assurer l'immunité à leurs
citoyens »203(*).
En outre, les experts en droit international s'accordent
à reconnaître que les engagements auxquels l'article 98 fait
référence sont les SOFAs, dont les plus connus sont ceux de
l'OTAN, et non les accords bilatéraux que les États-Unis
s'efforcent aujourd'hui de conclure204(*). Rappelons que le but d'un SOFA n'est pas de
consacrer l'impunité aux membres des forces armées du pays
d'envoi, mais bien de désigner à qui revient la
responsabilité de mener une enquête et de juger le crime
commis.
De toute évidence, l'article 98 aurait donc
été introduit pour assurer le respect de ce type d'accords,
conclus avant l'entrée
en fonction de
la CPI, et ne s'adressait pas - comme
l'affirment les États Unis - aux accords passés
ultérieurement dans le but de soustraire les nationaux américains
à la compétence de la CPI.
En outre, les accords
d'« impunité » seraient contraires à
l'article 98 en ce sens qu'au lieu de dire à qui appartient la
compétence de mener une enquêter et de juger les crimes commis
par les ressortissants américains, ces accords se bornent à
empêcher la CPI d'exercer sa compétence sur ceux-ci.
Comme l'affirme KRINDSAK KITTICHAISAREE, « le Statut
de la Cour pénale internationale est un traité qui s'impose aux
parties. Il est alors sujet d'interprétation comme prévue dans la
Convention de Vienne sur le droit des traités de
1969 »205(*),
nous sommes d'avis que la ratification de tels accords par les
États-parties constitue une situation de non respect du droit
international aux termes de l'article 31, §1 de la Convention de Vienne
sur le droit des traités du 23 mai 1969 qui stipule
qu' « un traité doit être interprété
de bonne foi suivant le sens ordinaire à attribuer aux termes du
traité dans leur contexte et à la lumière de son objet et
de son but ».
L'objectif du Traité de Rome206(*) est d'assurer que les
responsables des crimes les plus attentatoires aux droits humains sont
livrés à la justice et répondent de leurs actes, devant
une juridiction étatique ou la CPI.
Ainsi, nous semble-t-il évident que tout accord qui
empêcherait la cour d'exercer cette compétence est contraire
à l'objet et au traité de Rome.
Aussi la position américaine chancelle comme un
château de cartes si l'on évoque l'article 32 de la convention de
Vienne susmentionnée qui prévoit qu'il peut être fait appel
à des moyens complémentaires d'interprétation, et
notamment aux travaux préparatoires et aux circonstances dans lequel le
traité a été conclu « lorsqu'une
interprétation aurait conduit à un résultat qui est
manifestement absurde ou déraisonnable ».
En effet, nous trouvons « absurde et
déraisonnable » d'admettre que l'article 98 permet la mise en
place d'accords bilatéraux qui donneraient aux États le droit de
violer le principe fondamental du statut de Rome selon lequel quiconque, quelle
soit sa nationalité, commet un crime de génocide, un crime contre
l'humanité ou un crime de guerre sur le territoire d'un
État-partie ou alors qu'il est le ressortissant d'un État partie
est soumis à la compétence de la CPI.
Par conséquent, les États-parties qui s'engagent
dans des tels accords violent, à notre avis, non seulement plusieurs
articles du Statut de Rome, dont l'article 27207(*) qui interdit toute immunité empêchant
la Cour d'exercer sa compétence et les articles qui font de la
coopération avec la cour une obligation contraignante pour les
États-parties208(*), mais aussi l'article 18 de la Convention de Vienne
sur le droit des traités qui veut que les États s'abstiennent de
tout acte qui priverait un traité de son objet et de son but.
Cependant, même si ces accords sont vivement
critiqués et dénoncés par une majeure partie de la
communauté internationale, jamais aucun État n'a eu le courage de
le dénoncer devant la CIJ. Peut-être ne serions-nous pas
étonnés de voir, dans un avenir proche, certains États
remettre en question ces accords lorsque leurs intérêts
s'affronteront devant la CPI.
Une nouvelle fois, cette « croisade » fait
apparaître l'impérialisme judiciaire américain qui se
matérialise par l'opposition contre la compétence de la CPI
à l'égard des ressortissants américains et qui mine de
facto la crédibilité et l'effectivité de cette
nouvelle juridiction.
Toutefois, le danger réel de ces accords ne
réside pas sur le fait que les États Unis s'en servent mais bien
plus sur le fait que, si beaucoup de pays se résolvaient à y
recourir, cela endommagerait gravement l'efficacité de la Cour. C'est
dans ce cadre que nous saluons l'initiative européenne d'avoir
adopté en date du 30 septembre 2002 une position commune, même si
pour beaucoup d'observateurs celle-ci manque de fermeté209(*).
Une telle initiative aurait été souhaitable du
côté de l'UA, mais la configuration contemporaine de notre
continent sur une toile de fond dominée par la pauvreté et une
tendance, de plus en plus naturelle, de recourir aux aides extérieures
crée la fragilité et cristallise l'utopie d'un tel voeu.
§2. Les problèmes posés par la
coopération des États
L'efficacité de la CPI repose en grande partie sur la
bonne volonté des Etats à coopérer avec celle-ci. Or ce
sont justement ces modalités qui posent particulièrement
problème, surtout en Afrique.
Ainsi, la lutte contre l'impunité est encore
aujourd'hui particulièrement ardue en Afrique. Malgré le passage
de l'OUA à l'Union Africaine et la mise en place de mécanisme de
bonne gouvernance politique, économiques et autres - notamment dans le
cadre du Mécanisme d'évaluation par les Pairs du NEPAD - l'image
de syndicat de chefs d'Etats colle toujours à l'UA.
Et à raison : les Etats africains éprouvent
encore de fortes réticences à dénoncer leurs semblables.
On peut citer à ce titre le cas de Hissein HABRÉ, Charles TAYLOR,
Laurent GBAGBO, Jean Pierre BEMBA210(*),...
A ce point nous allons beaucoup plus nous focaliser sur la
coopération internationale et l'assistance judiciaire qui, comme nous
l'avons souligné à l'introduction, constituent la condition
sine qua non de l'efficacité des poursuites devant la CPI.
Principalement, nous allons nous attarder sur le manque de
coopération réglementé par l'article 87, §5 et
§7 du statut de Rome.
Évidemment les conséquences du manque de
coopération diffèrent selon que l'État qui refuse de
coopérer est partie ou non au traité de Rome.
En ce qui concerne les États-parties, l'article 86 et
plusieurs autres dispositions les obligent à coopérer. Cependant,
en ce qui concerne les États tiers, le statut prévoit la
conclusion des accords généraux ou arrangements ad hoc
sur la coopération entre l'État concerné et la Cour.
Maintenant la question qui se pose est celle de savoir ce qui
peut arriver si cette coopération n'est pas accordée et ce que
peuvent être les conséquences de ce manque de
coopération.
Deux réponses sont envisageables dépendamment de
la qualité de l'État en question.
D'abord, si l'État qui refuse de coopérer est un
État-partie au Traité de Rome, la CPI peut dénoncer un tel
comportement à l'Assemblée des États parties, ou si
c'est le Conseil de Sécurité qui a saisi la cour, celle-ci
doit alors l'informer.
Ensuite, si l'État qui a refusé de
coopérer a signé un accord avec la Cour ; dans ce cas, la
Cour informe alors l'Assemblée des États parties ou le Conseil de
Sécurité des Nations Unies, suivant l'organe qui l'a saisi.
On peut alors se demander ce qui peut arriver dans le cas
où l'État tiers ne serait obligé par aucun lien
conventionnel à coopérer avec la Cour.
Normalement, en vertu des principes généraux du
droit, tel que « Pacta tertiis nec nocent nec
prosunt », tout État tiers est exempt de l'obligation de
coopérer avec la Cour.
Néanmoins, deux éléments nous
suggèrent qu'à des conditions spécifiques même les
États non parties n'ayant signé aucun accord de
coopération avec la CPI sont, quand même, obligés à
le faire.
Référons-nous spécialement, d'une part,
aux modes de saisine de la Cour ; d'autre part, à la nature des
crimes dont la CPI est compétente aux termes de l'article 5 de son
Statut.
Au regard du premier point, si le Conseil de
Sécurité saisit la Cour d'une situation donnée en vertu du
Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, c'est-à-dire une situation
pouvant être qualifiée de menace à la paix et à la
sécurité (article 13,b), il est pertinemment clair que tout
État-membre des Nations Unies - et non nécessairement partie au
statut de Rome - est soumis à l'obligation de coopérer.
Dans ce cas, la Résolution du Conseil de
Sécurité par laquelle une situation a été transmise
à la CPI sera sensée constituer la source ou le fondement de
l'obligation de coopération pour tout État-membre des Nations
Unies; exactement comme il en était question lors de l'adoption des
Résolutions ayant établi le TPIY et le TPIR211(*).
C'est en ce terme que le premier élargissement de
l'obligation de coopération aux États tiers peut être
obtenu.
En second lieu, si nous considérons la nature des
crimes rentrant dans la compétence de la CPI notamment le
Génocide, les Crimes contre l'Humanité et les crimes de
guerre ; il y a bien lieu de trouver un deuxième argument de
l'élargissement.
Les crimes de guerre, par exemple, ont obtenu l'accord de tous
les États-parties aux quatre Conventions de Genève de 1949 de les
respecter et d'en assurer le respect pour les raisons du doit international
humanitaire. Et ce, en vertu de l'article 1 commun aux quatre conventions de
Genève.
Il n'est pas besoin de rappeler que la CIJ considère
l'obligation de respecter et de faire respecter d'une règle du droit
international humanitaire comme une obligation du droit international
général212(*).
En vue de respecter et de faire respecter une règle de
droit international humanitaire, tous les États-parties aux Conventions
de Genève ( qui ne doivent pas être nécessairement partie
au traité de Rome) doivent être prêts à
coopérer, conformément à l'article 88, §1 du
Ier Protocole Additionnel de 1977 selon lequel « Les
Hautes Parties contractantes et les Parties au conflit doivent charger les
commandants militaires, en ce qui concerne les membres des forces armées
placés sous leur commandement et les autres personnes sous leur
autorité, d'empêcher que soient commises des infractions aux
Conventions et au présent Protocole et, au besoin, de les
réprimer et de les dénoncer aux autorités
compétentes.»
Ainsi, la nature des crimes à poursuivre devant la CPI
nous conduit à croire que tous les États parties aux Conventions
de Genève de 1949 et au Protocole Additionnel I de 1977, même
s'ils ne sont pas parties au Traité de Rome, ont l'obligation de
coopérer dans la répression de ces crimes. C'est sans doute en se
basant sur un tel argument que le Procureur la CPI a envoyé une lettre
à la République du Rwanda afin de lui demander des
« informations » en rapport avec ce qui s'était
passé en Ituri, dans le Nord-Est de la RDC213(*).
C'est dans cet esprit que le comportement des États qui
ne se conformeraient pas à l'obligation de coopérer avec la CPI
peut être sanctionné aussi bien par les autres États que
par le Conseil de Sécurité des Nations Unies. Nous sommes
persuadés que même les Nations Unies ont, parmi leurs taches,
l'obligation de respecter et d'assurer le respect des règles du droit
international humanitaire. D'où l'existence d'une telle obligation
implique - comme l'atteste GIUSEPPE NESI - que les États-membres des
Nations Unies, en coopération avec ces dernières sur base de
l'article 89 du Protocole Additionnel I, puissent intervenir activement dans la
répression des crimes listés à l'article 5 du Statut de
Rome214(*).
En définitive, nous pensons humblement que l'obligation
de coopérer même à l'égard des États tiers,
qui n'ont signé aucun accord de coopération avec la CPI devrait
être déduite d'autres instruments internationaux différents
du Statut de Rome. Et de cette façon, les lacunes du statut de Rome, en
ce qui concerne l'obligation de coopérer, pourraient facilement
être comblées.
CONCLUSION GENERALE
La justice pénale internationale constitue de nos jours
une réelle garantie du respect et de la promotion des droits de l'homme
de par le monde. L'adoption du Statut de la CPI n'est pas moins à
qualifier d'événement de portée exceptionnelle au regard
du droit pénal international que d'aucuns peuvent affirmer que la Cour
pénale internationale constitue la pierre angulaire de l'édifice
de la justice pénale internationale à laquelle l'humanité
a depuis si longtemps aspiré. En conséquence de la
création des TPI ad hoc, mais surtout grâce à leur
jurisprudence courageuse, imaginative et innovatrice, le statut de Rome
réalise ce qui a été un rêve pour des
générations et des générations des juristes
engagés.
Toutefois, si symboliquement la CPI est un immense
progrès du droit international ; concrètement le tableau est
moins enthousiasmant inter alia eu égard aux règles
établissant sa compétence.
La cour est tributaire du bon vouloir des États depuis
sa conception à son fonctionnement en passant par sa naissance. Trop de
prudences président à sa naissance, trop de petites adresses
limitent sa compétence et trop de restrictions menacent son action.
Les États ont été les maîtres pour
refuser la compétence de la Cour concernant les crimes de guerre et ils
ont encore décidé de la suspension de sa compétence
à l'égard du crime d'agression. Ils décideront encore de
l'avenir de l'institution lors de la conférence de révision en
2009. Enfin, ils seront toujours un élément clé pour les
poursuites et pour faire arrêter et livrer les criminels. Le
résultat : une Cour pénale internationale
« dénaturée ».
Dénaturée en rapport avec la conception de ceux
qui ont nourri l'idée de l'établissement d'une Cour pénale
internationale il y a de cela plus de cinquante ans.
En effet, la Cour n'est pas en mesure d'intervenir contre tous
les criminels de la planète, malgré sa vocation universelle. Ses
compétences ratione materiae, ratione personnae, ratione loci et
ratione temporis sont très encadrées.
Alors que les Tribunaux pénaux exercent une
compétence subsidiaire qui les autorisent à se substituer aux
États lorsque les besoins de la justice le justifient, la Cour, en
revanche offre un moyen complémentaire de lutter contre
l'impunité des crimes les plus graves.
Ce principe, auquel une très nette majorité des
États a manifesté un attachement farouche, implique une
restriction très sévère à la compétence de
la Cour, laquelle restriction a des conséquences lourdes et
fâcheuses sur les poursuites devant elle.
Celle-ci, en effet, ne pourra pas juger d'une affaire si un
État compétent s'est déjà chargé de la
répression.
C'est à l'évidence l'expression d'une
philosophie bien précise, ayant amené à concevoir la Cour
comme rien de plus qu'un simple `bouche-trou' et non pas comme le moyen de
répression le plus approprié.
Pour parfaitement remplir sa vocation universelle la CPI
devrait entre autre contenir en plus des crimes déjà rentrant
sous sa compétence matérielle des termes un peu plus larges tels
que `autres actes d'égale ampleur' pour prévenir les innovations
criminelles futures en vue d'éviter que le droit reste toujours aux
trousses des tragédies et de stupéfactions, à cause des
longues attentes des compromis des sommets et négociations visant
à incorporer tel ou tel autre acte comme étant constitutif d'un
type nouveau de crime international.
Mais avant cela, la première conférence de
modification de 2009 devrait accorder au crime d'agression son droit de
cité devant la CPI puisque la définition et la précision
des éléments de ce crime sont per se très
importantes d'autant plus que la Charte de Nuremberg le considérait
déjà comme le crime international par excellence.
Cependant, l'activation du crime d'agression dans le Statut de
Rome impliquerait, à notre avis, des remaniements au niveau de la
compétence personnelle de la Cour pour la simple raison qu'il n'y a
qu'un État qui puisse agresser un autre. Et comme il serait
délicat de condamner, par exemple, le chef d'un État donné
pour agression, nous trouvons alors adéquat que le Statut consacre pour
ce fait la responsabilité de l'Etat dans les limites actuelles du droit
international et d'une façon singulière au regard du seul crime
d'agression.
En plus, à part le crime d'agression, de nos jours le
terrorisme, le trafic des stupéfiants, le trafic des êtres humains
et le blanchiment d'argent constituent aussi des préoccupations de la
Communauté internationale. D'où l'impérieuse
nécessité de les codifier dans le Statut de Rome pendant la
Conférence de révision de 2009. C'est seulement en ce moment
là qu'on pourra dire que la CPI se charge des crimes internationaux les
plus graves existants à nos jours. L'intégration du terrorisme,
par exemple, sera un remède puissant contre les abus des droits humains
de toutes sortes dont sont accusés les Etats Unis à l'encontre
des prisonniers de Guantanamo Bay. Les poursuites devant la CPI seront sans
doute beaucoup plus transparentes et justes que celles menées en
catimini par les États-Unis.
D'autre part, s'il est vrai que la CPI ne devrait pas
rétroagir pour éviter son encombrement par des nombreuses
plaintes sur les affaires datant d'avant son entrée en vigueur et pour
esquiver le risque du manque du soutien nécessaire pour l'adoption de
son statut, nous trouvons qu'il est injuste de sacrifier autant de victimes
pour des raisons qui ne tiennent aucunement de la justice. A notre avis, il
existe des conflits qui ont mobilisé l'opinion internationale de telle
sorte qu'il n'aurait pas été inconsistant aux négociateurs
de faire rétroagir la CPI à l'égard notamment du conflit
en RDC ou celui du Cambodge, exactement dans le même ordre d'idée
de l'article 12 (3) qui permet aux Etats non-parties de saisir la Cour des
crimes commis avant même l'entrée en vigueur de celle-ci pour ces
États.
Une autre chose que nous pouvons souhaiter serait une
redéfinition des critères du principe de la
complémentarité notamment l'assouplissement du « manque
de volonté » d'un État appelé à
poursuivre et une clarification du groupe adverbial « mener
véritablement à bien » de l'article 17. A l'état
actuel des textes, ces concepts laissent planer sur la Cour un vent
d'arbitraire qui ferait d'elle un mystérieux filet qui retiendrait des
petits poissons tout en laissant passer les gros.
D'où, il est un peu tôt de penser que le chemin
de la justice pénale internationale s'arrête à Rome. Pour
être totalement effective et efficace, cette justice doit endiguer les
considérations politiques pour ne se confiner que sur le droit et la
justice.
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II. CHAPITRE VII DE LA CHARTE DES NATIONS UNIES.
III. RESOLUTION 1422 (2002), ADOPTEE PAR LE CONSEIL DE SECURITE A
SA 4572è
SEANCE, LE 12 JUILLET 2002.
ANNEXE I
QUELQUES ARTICLES DU STATUT DE LA COUR PENALE
INTERNATIONALE215(*)
ADOPTE LE 17 JUILLET 1998
PREAMBULE
Les États Parties au présent Statut,
Conscients que tous les peuples sont unis par des
liens étroits et que leurs cultures forment un patrimoine commun, et
soucieux du fait que cette mosaïque délicate puisse être
brisée à tout moment,
Ayant à l'esprit qu'au cours de ce
siècle, des millions d'enfants, de femmes et d'hommes ont
été victimes d'atrocités qui défient l'imagination
et heurtent profondément la conscience humaine,
Reconnaissant que des crimes d'une telle
gravité menacent la paix, la sécurité et le
bien-être du monde,
Affirmant que les crimes les plus graves qui touchent
l'ensemble de la communauté internationale ne sauraient rester impunis
et que leur répression doit être effectivement assurée par
des mesures prises dans le cadre national et par le renforcement de la
coopération internationale,
Déterminés à mettre un terme
à l'impunité des auteurs de ces crimes et à concourir
ainsi à
la prévention de nouveaux crimes,
Rappelant qu'il est du devoir de chaque État
de soumettre à sa juridiction criminelle les
responsables de crimes internationaux,
Réaffirmant les buts et principes de la Charte
des Nations Unies et, en particulier, que tous les États doivent
s'abstenir de recourir à la menace ou à l'emploi de la force,
soit contre l'intégrité territoriale ou l'indépendance
politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible
avec les buts des Nations Unies,
Soulignant à cet égard que rien dans le
présent Statut ne peut être interprété comme
autorisant un État-Partie à intervenir dans un conflit
armé ou dans les affaires intérieures d'un autre État,
Déterminés, à ces fins et dans
l'intérêt des générations présentes et
futures, à créer une cour pénale internationale permanente
et indépendante reliée au système des Nations Unies, ayant
compétence à l'égard des crimes les plus graves qui
touchent l'ensemble de la communauté internationale,
Soulignant que la cour pénale internationale
dont le présent Statut porte création est complémentaire
des juridictions pénales nationales,
Résolus à garantir durablement le
respect de la justice internationale et sa mise en oeuvre,
Sont convenus de ce qui suit :
Article premier
LA COUR
Il est créé une Cour pénale
internationale («la Cour ») en tant qu'institution permanente,
qui peut exercer sa compétence à l'égard
des personnes pour les crimes les plus graves ayant une portée
internationale, au sens du présent Statut. Elle est
complémentaire des juridictions pénales nationales. Sa
compétence et son fonctionnement sont régis par les dispositions
du présent Statut.
Article 5
CRIMES RELEVANT DE LA COMPÉTENCE DE LA COUR
1. La compétence de la Cour est limitée aux
crimes les plus graves qui touchent l'ensemble de la communauté
internationale. En vertu du présent Statut, la Cour a compétence
à l'égard des crimes suivants:
a) Le crime de génocide ;
b) Les crimes contre l'humanité ;
c) Les crimes de guerre ;
d) Le crime d'agression.
2. La Cour exercera sa compétence à
l'égard du crime d'agression quand une disposition
aura été adoptée conformément aux
articles 121 et 123, qui définira ce crime et fixera les conditions de
l'exercice de la compétence de la Cour à son égard. Cette
disposition devra être compatible avec les dispositions pertinentes de la
Charte des Nations Unies.
Article 6
CRIME DE GÉNOCIDE
Aux fins du présent Statut, on entend par crime de
génocide l'un quelconque des actes ci-après commis dans
l'intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national,
ethnique, racial ou religieux, comme tel :
a) Meurtre de membres du groupe ;
b) Atteinte grave à l'intégrité physique
ou mentale de membres du groupe ;
c) Soumission intentionnelle du groupe à des conditions
d'existence devant entraîner
sa destruction physique totale ou partielle ;
d) Mesures visant à entraver les naissances au sein du
groupe ;
e) Transfert forcé d'enfants du groupe à un
autre groupe.
Article 7
CRIMES CONTRE L'HUMANITÉ
1. Aux fins du présent Statut, on entend par crime
contre l'humanité l'un quelconque des actes ci-après lorsqu'il
est commis dans le cadre d'une attaque généralisée ou
systématique lancée contre toute population civile et en
connaissance de cette attaque :
a) Meurtre ;
b) Extermination ;
c) Réduction en esclavage ;
d) Déportation ou transfert forcé de population
;
e) Emprisonnement ou autre forme de privation grave de
liberté physique en violation des dispositions fondamentales du droit
international ;
f) Torture ;
g) Viol, esclavage sexuel, prostitution forcée,
grossesse forcée, stérilisation forcée ou toute autre
forme de violence sexuelle de gravité comparable ;
h) Persécution de tout groupe ou de toute
collectivité identifiable pour des motifs d'ordre politique, racial,
national, ethnique, culturel, religieux ou sexiste au sens du paragraphe 3, ou
en fonction d'autres critères universellement reconnus comme
inadmissibles en droit international, en corrélation avec tout acte
visé dans le présent paragraphe ou tout crime relevant de la
compétence de la Cour ;
i) Disparitions forcées de personnes ;
j) Crime d'apartheid ;
k) Autres actes inhumains de caractère analogue causant
intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à
l'intégrité physique ou à la santé physique ou
mentale.
2. Aux fins du paragraphe 1 :
a) Par «attaque lancée contre une population
civile », on entend le comportement qui consiste en la commission multiple
d'actes visés au paragraphe 1 à l'encontre d'une population
civile quelconque, en application ou dans la poursuite de la politique d'un
État ou d'une organisation ayant pour but une telle attaque ;
b) Par «extermination », on entend notamment le fait
d'imposer intentionnellement des conditions de vie, telles que la privation
d'accès à la nourriture et aux médicaments,
calculées pour entraîner la destruction d'une partie de la
population;
c) Par « réduction en esclavage », on entend
le fait d'exercer sur une personne l'un quelconque ou l'ensemble des pouvoirs
liés au droit de propriété, y compris dans le cadre de la
traite des être humains, en particulier des femmes et des enfants ;
d) Par « déportation ou transfert forcé de
population », on entend le fait de déplacer de force des personnes,
en les expulsant ou par d'autres moyens coercitifs, de la région
où elles se trouvent légalement, sans motifs admis en droit
international ;
e) Par « torture », on entend le fait d'infliger
intentionnellement une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou
mentales, à une personne se trouvant sous sa garde ou sous son
contrôle ; l'acception de ce terme ne s'étend pas à la
douleur ou aux souffrances résultant uniquement de sanctions
légales, inhérentes à ces sanctions ou occasionnées
par elles ;
f) Par « grossesse forcée », on entend la
détention illégale d'une femme mise enceinte de force, dans
l'intention de modifier la composition ethnique d'une population ou de
commettre d'autres violations graves du droit international. Cette
définition ne peut en aucune manière s'interpréter comme
ayant une incidence sur les lois nationales relatives à la grossesse
;
g) Par « persécution », on entend le
déni intentionnel et grave de droits fondamentaux
en violation du droit international, pour des motifs
liés à l'identité du groupe ou de la collectivité
qui en fait l'objet ;
h) Par « crime d'apartheid », on entend des actes
inhumains analogues à ceux que vise le paragraphe 1, commis dans le
cadre d'un régime institutionnalisé d'oppression
systématique et de domination d'un groupe racial sur tout autre groupe
racial ou tous autres groupes raciaux et dans l'intention de maintenir ce
régime ;
i) Par « disparitions forcées de personnes »,
on entend les cas où des personnes sont arrêtées,
détenues ou enlevées par un État ou une organisation
politique ou avec l'autorisation, l'appui ou l'assentiment de cet État
ou de cette organisation, qui refuse ensuite d'admettre que ces personnes sont
privées de liberté ou de révéler le sort qui leur
est réservé ou l'endroit où elles se trouvent, dans
l'intention de les soustraire à la protection de la loi pendant une
période prolongée.
3. Aux fins du présent Statut, le terme « sexe
» s'entend de l'un et l'autre sexes, masculin et féminin, suivant
le contexte de la société. Il n'implique aucun autre sens.
Article 8
CRIMES DE GUERRE
1. La Cour a compétence à l'égard des
crimes de guerre, en particulier lorsque ces crimes s'inscrivent dans le cadre
d'un plan ou d'une politique ou lorsqu'ils font partie d'une série de
crimes analogues commis sur une grande échelle.
2. Aux fins du Statut, on entend par «crimes de guerre
» :
a) Les infractions graves aux Conventions de Genève du
12 août 1949, à savoir l'un quelconque des actes ci-après
lorsqu'ils visent des personnes ou des biens protégés par les
dispositions des Conventions de Genève :
i) L'homicide intentionnel ;
ii) La torture ou les traitements inhumains, y compris les
expériences biologiques ;
iii) Le fait de causer intentionnellement de grandes
souffrances ou de porter gravement atteinte à l'intégrité
physique ou à la santé ;
iv) La destruction et l'appropriation de biens, non
justifiées par des nécessités militaires et
exécutées sur une grande échelle de façon illicite
et arbitraire ;
v) Le fait de contraindre un prisonnier de guerre ou une
personne protégée à servir dans les forces d'une puissance
ennemie ;
vi) Le fait de priver intentionnellement un prisonnier de
guerre ou toute autre personne protégée de son droit d'être
jugé régulièrement et impartialement ;
vii) La déportation ou le transfert illégal ou
la détention illégale ;
viii) La prise d'otages ;
b) Les autres violations graves des lois et coutumes
applicables aux conflits armés
internationaux dans le cadre établi du droit
international, à savoir, l'un quelconque des actes ci-après :
i) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre
la population civile en tant que telle ou contre des civils qui ne participent
pas directement part aux hostilités ;
ii) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre
des biens de caractère civil, c'est-à-dire des biens qui ne sont
pas des objectifs militaires ;
iii) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre
le personnel, les installations, le matériel, les unités ou les
véhicules employés dans le cadre d'une mission d'aide humanitaire
ou de maintien de la paix conformément à la Charte des Nations
Unies, pour autant qu'ils aient droit à la protection que le droit
international des conflits armés garantit aux civils et aux biens de
caractère civil ;
iv) Le fait de diriger intentionnellement une attaque en
sachant qu'elle causera incidemment des pertes en vies humaines dans la
population civile, des blessures aux personnes civiles, des dommages aux biens
de caractère civil ou des dommages étendus, durables et graves
à l'environnement naturel qui seraient manifestement excessifs par
rapport à l'ensemble de l'avantage militaire concret et direct attendu
;
v) Le fait d'attaquer ou de bombarder, par quelque moyen que
ce soit, des villes, villages, habitations ou bâtiments qui ne sont pas
défendus et qui ne sont pas des objectifs militaires ;
vi) Le fait de tuer ou de blesser un combattant qui, ayant
déposé les armes ou n'ayant plus de moyens de se défendre,
s'est rendu à discrétion ;
vii) Le fait d'utiliser indûment le pavillon
parlementaire, le drapeau ou les insignes militaires et l'uniforme de l'ennemi
ou de l'Organisation des Nations Unies, ainsi que les signes distinctifs
prévus par les Conventions de Genève, et, ce faisant, de causer
la perte de vies humaines ou des blessures graves ;
viii) Le transfert, direct ou indirect, par une puissance
occupante d'une partie de sa population civile, dans le territoire qu'elle
occupe, ou la déportation ou le transfert à l'intérieur ou
hors du territoire occupé de la totalité ou d'une partie de la
population de ce territoire ;
ix) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre
des bâtiments consacrés à la religion, à
l'enseignement, à l'art, à la science ou à l'action
caritative, des monuments historiques, des hôpitaux et des lieux
où des malades ou des blessés sont rassemblés, à
condition qu'ils ne soient pas des objectifs militaires;
x) Le fait de soumettre des personnes d'une partie adverse
tombées en son pouvoir à des mutilations ou à des
expériences médicales ou scientifiques quelles qu'elles soient
qui ne sont ni motivées par un traitement médical, dentaire ou
hospitalier, ni effectuées dans l'intérêt de ces personnes,
et qui entraînent la mort de celles-ci ou mettent sérieusement en
danger leur santé ;
xi) Le fait de tuer ou de blesser par traîtrise des
individus appartenant à la nation ou à l'armée ennemie
;
xii) Le fait de déclarer qu'il ne sera pas fait de
quartier ;
xiii) Le fait de détruire ou de saisir les biens de
l'ennemi, sauf dans les cas où ces destructions ou saisies seraient
impérieusement commandées par les nécessités de la
guerre ;
xiv) Le fait de déclarer éteints, suspendus ou
non recevables en justice les droits et actions des nationaux de la partie
adverse ;
xv) Le fait pour un belligérant de contraindre les
nationaux de la partie adverse à prendre part aux opérations de
guerre dirigées contre leur pays, même s'ils étaient au
service de ce belligérant avant le commencement de la guerre ;
xvi) Le pillage d'une ville ou d'une localité,
même prise d'assaut ;
xvii) Le fait d'employer du poison ou des armes
empoisonnées ;
xviii) Le fait d'employer des gaz asphyxiants, toxiques ou
similaires, ainsi que tous liquides, matières ou procédés
analogues ;
xix) Le fait d'utiliser des balles qui s'épanouissent
ou s'aplatissent facilement dans le corps humain, telles que des balles dont
l'enveloppe dure ne recouvre pas entièrement le centre ou est
percée d'entailles ;
xx) Le fait d'employer les armes, projectiles, matières
et méthodes de guerre de nature à causer des maux superflus ou
des souffrances inutiles ou à frapper sans discrimination en violation
du droit international des conflits armés, à condition que ces
armes, projectiles, matières et méthodes de guerre fassent
l'objet d'une interdiction générale et qu'ils soient inscrits
dans une annexe au présent Statut, par voie d'amendement adopté
selon les dispositions des articles 121 et 123 ;
xxi) Les atteintes à la dignité de la personne,
notamment les traitements humiliants et dégradants ;
xxii) Le viol, l'esclavage sexuel, la prostitution
forcée, la grossesse forcée, telle que définie à
l'article 7, paragraphe 2, alinéa f), la stérilisation
forcée ou toute autre forme de violence sexuelle constituant une
infraction grave aux Conventions de Genève ;
xxiii) Le fait d'utiliser la présence d'un civil ou
d'une autre personne protégée pour éviter que certains
points, zones ou forces militaires ne soient la cible d'opérations
militaires ;
xxiv) Le fait de diriger intentionnellement des attaques
contre les bâtiments, le matériel, les unités et les moyens
de transport sanitaires, et le personnel utilisant, conformément au
droit international, les signes distinctifs prévus par les Conventions
de Genève ;
xxv) Le fait d'affamer délibérément des
civils comme méthode de guerre, en les privant de biens indispensables
à leur survie, y compris en empêchant intentionnellement l'envoi
des secours prévus par les Conventions de Genève ;
xxvi) Le fait de procéder à la conscription ou
à l'enrôlement d'enfants de moins de 15 ans dans les forces
armées nationales ou de les faire participer activement à des
hostilités ;
c) En cas de conflit armé ne présentant pas un
caractère international, les violations graves de l'article 3 commun aux
quatre Conventions de Genève du 12 août 1949, à savoir l'un
quelconque des actes ci-après commis à l'encontre de personnes
qui ne participent pas directement aux hostilités, y compris les membres
de forces armées qui ont déposé les armes et les personnes
qui ont été mises hors de combat par maladie, blessure,
détention ou par toute autre cause :
i) Les atteintes à la vie et à
l'intégrité corporelle, notamment le meurtre sous toutes ses
formes, les mutilations, les traitements cruels et la torture ;
ii) Les atteintes à la dignité de la personne,
notamment les traitements humiliants et dégradants ;
iii) Les prises d'otages ;
iv) Les condamnations prononcées et les
exécutions effectuées sans un jugement préalable, rendu
par un tribunal régulièrement constitué, assorti des
garanties judiciaires généralement reconnues comme indispensables
;
d) L'alinéa c) du paragraphe 2 s'applique aux conflits
armés ne présentant pas un caractère international et ne
s'applique donc pas aux situations de troubles et tensions internes telles que
les émeutes, les actes isolés et sporadiques de violence ou les
actes de nature similaire ;
e) Les autres violations graves des lois et coutumes
applicables aux conflits armés ne présentant pas un
caractère international, dans le cadre établi du droit
international, à savoir l'un quelconque des actes ci-après :
i) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre
la population civile en tant que telle ou contre des personnes civiles qui ne
participent pas directement aux hostilités ;
ii) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre
les bâtiments, le matériel, les unités et les moyens de
transport sanitaires, et le personnel utilisant, conformément au droit
international, les signes distinctifs des Conventions de Genève ;
iii) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre
le personnel, les installations, le matériel, les unités ou les
véhicules employés dans le cadre d'une mission d'aide humanitaire
ou de maintien de la paix conformément à la Charte des Nations
Unies, pour autant qu'ils aient droit à la protection que le droit
international des conflits armés garantit aux civils et aux biens de
caractère civil ;
iv) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre
des bâtiments consacrés à la religion, à
l'enseignement, à l'art, à la science ou à l'action
caritative, des monuments historiques, des hôpitaux et des lieux
où des malades et des blessés sont rassemblés, pour autant
que ces bâtiments ne soient pas des objectifs militaires ;
v) Le pillage d'une ville ou d'une localité, même
prise d'assaut ;
vi) Le viol, l'esclavage sexuel, la prostitution
forcée, la grossesse forcée, telle que définie à
l'article 7, paragraphe 2, alinéa f), la stérilisation
forcée, ou toute autre forme de violence sexuelle constituant une
violation grave de l'article 3 commun aux quatre Conventions de Genève
;
vii) Le fait de procéder à la conscription ou
à l'enrôlement d'enfants de moins de 15 ans dans les forces
armées ou dans des groupes armés ou de les faire participer
activement à des hostilités ;
viii) Le fait d'ordonner le déplacement de la
population civile pour des raisons ayant trait au conflit, sauf dans les cas
où la sécurité des civils ou des impératifs
militaires l'exigent;
ix) Le fait de tuer ou de blesser par traîtrise un
adversaire combattant ;
x) Le fait de déclarer qu'il ne sera pas fait de
quartier ;
xi) Le fait de soumettre des personnes d'une autre partie au
conflit tombées en son pouvoir à des mutilations ou à des
expériences médicales ou scientifiques quelles qu'elles soient
qui ne sont ni motivées par un traitement médical, dentaire ou
hospitalier, ni effectuées dans l'intérêt de ces personnes,
et qui entraînent la mort de celles-ci ou mettent sérieusement en
danger leur santé ;
xii) Le fait de détruire ou de saisir les biens d'un
adversaire, sauf si ces destructions ou saisies sont impérieusement
commandées par les nécessités du conflit ;
f) L'alinéa e) du paragraphe 2 s'applique aux conflits
armés ne présentant pas un caractère international et ne
s'applique donc pas aux situations de troubles et tensions internes telles que
les émeutes, les actes isolés et sporadiques de violence ou les
actes de nature similaire. Il s'applique aux conflits armés qui opposent
de manière prolongée sur le territoire d'un État les
autorités du gouvernement de cet État et des groupes armés
organisés ou des groupes armés organisés entre eux.
3. Rien dans le paragraphe 2, alinéas c) et e),
n'affecte la responsabilité d'un gouvernement de maintenir ou
rétablir l'ordre public dans l'État ou de défendre
l'unité et l'intégrité territoriale de l'État par
tous les moyens légitimes.
Article 11
COMPÉTENCE RATIONE TEMPORIS
1. La Cour n'a compétence qu'à l'égard
des crimes relevant de sa compétence commis après l'entrée
en vigueur du présent Statut.
2. Si un État devient Partie au présent Statut
après l'entrée en vigueur de celui-ci, la Cour ne peut exercer sa
compétence qu'à l'égard des crimes commis après
l'entrée en vigueur du Statut pour cet État, sauf si ledit
État fait la déclaration prévue à l'article 12,
paragraphe 3.
Article 12
CONDITIONS PRÉALABLES À L'EXERCICE DE LA
COMPÉTENCE
1. Un État qui devient Partie au Statut accepte par
là même la compétence de la Cour à l'égard
des crimes visés à l'article 5.
2. Dans les cas visés à l'article 13,
paragraphes a) ou c), la Cour peut exercer sa compétence si l'un des
États suivants ou les deux sont Parties au présent Statut ou ont
accepté la compétence de la Cour conformément au
paragraphe 3 :
a) L'État sur le territoire duquel le comportement en
cause a eu lieu ou, si le crime a été commis à bord d'un
navire ou d'un aéronef, l'État du pavillon ou l'État
d'immatriculation ;
b) L'État dont la personne accusée du crime est
un ressortissant.
3. Si l'acceptation de la compétence de la Cour par un
État qui n'est pas Partie au présent Statut est nécessaire
aux fins du paragraphe 2, cet État peut, par déclaration
déposée auprès du Greffier, consentir à ce que la
Cour exerce sa compétence à l'égard du crime dont il
s'agit. L'État ayant accepté la compétence de la Cour
coopère avec celle-ci sans retard et sans exception conformément
au chapitre IX.
Article 13
EXERCICE DE LA COMPÉTENCE
La Cour peut exercer sa compétence à
l'égard d'un crime visé à l'article 5, conformément
aux dispositions du présent Statut :
a) Si une situation dans laquelle un ou plusieurs de ces
crimes paraissent avoir été commis est
déférée au Procureur par un État Partie, comme
prévu à l'article 14 ;
b) Si une situation dans laquelle un ou plusieurs de ces
crimes paraissent avoir été commis est
déférée au Procureur par le Conseil de
sécurité agissant en vertu du chapitre VII de la Charte des
Nations Unies ; ou
c) Si le Procureur a ouvert une enquête sur le crime en
question en vertu de l'article 15.
Article 15
LE PROCUREUR
1. Le Procureur peut ouvrir une enquête de sa propre
initiative au vu de renseignements concernant des crimes relevant de la
compétence de la Cour.
2. Le Procureur vérifie le sérieux des
renseignements reçus. À cette fin, il peut rechercher des
renseignements supplémentaires auprès d'États, d'organes
de l'Organisation des Nations Unies, d'organisations intergouvernementales et
non gouvernementales, ou d'autres sources dignes de foi qu'il juge
appropriées, et recueillir des dépositions écrites ou
orales au siège de la Cour.
3. S'il conclut qu'il y a une base raisonnable pour ouvrir une
enquête, le Procureur présente à la Chambre
préliminaire une demande d'autorisation en ce sens, accompagnée
de tout élément justificatif recueilli. Les victimes peuvent
adresser des représentations à la Chambre préliminaire,
conformément au Règlement de procédure et de preuve.
4. Si elle estime, après examen de la demande et des
éléments justificatifs qui l'accompagnent, qu'il existe une base
raisonnable pour ouvrir une enquête et que l'affaire semble relever de la
compétence de la Cour, la Chambre préliminaire donne son
autorisation, sans préjudice des décisions que la Cour prendra
ultérieurement en matière de compétence et de
recevabilité.
5. Une réponse négative de la Chambre
préliminaire n'empêche pas le Procureur de présenter par la
suite une nouvelle demande en se fondant sur des faits ou des
éléments de preuve nouveaux ayant trait à la même
situation.
6. Si, après l'examen préliminaire visé
aux paragraphes 1 et 2, le Procureur conclut que les renseignements qui lui ont
été soumis ne constituent pas une base raisonnable pour
l'ouverture d'une enquête, il en avise ceux qui les lui ont fournis. Il
ne lui est pas pour autant interdit d'examiner, à la lumière de
faits ou d'éléments de preuve nouveaux, les autres renseignements
qui pourraient lui être communiqués au sujet de la même
affaire.
Article 16
SURSIS À ENQUÊTER OU À POURSUIVRE
Aucune enquête ni aucune poursuite ne peuvent être
engagées ni menées en vertu du présent Statut pendant les
douze mois qui suivent la date à laquelle le Conseil de
sécurité a fait une demande en ce sens à la Cour dans une
résolution adoptée en vertu du Chapitre VII de la Charte des
Nations Unies ; la demande peut être renouvelée par le Conseil
dans les mêmes conditions.
Article 17
QUESTIONS RELATIVES À LA RECEVABILITÉ
1. Eu égard au dixième alinéa du
préambule et à l'article premier, une affaire est jugée
irrecevable par la Cour lorsque :
a) L'affaire fait l'objet d'une enquête ou de poursuites
de la part d'un État ayant compétence en l'espèce,
à moins que cet État n'ait pas la volonté ou soit dans
l'incapacité de mener véritablement à bien l'enquête
ou les poursuites ;
b) L'affaire a fait l'objet d'une enquête de la part
d'un État ayant compétence en l'espèce et que cet
État a décidé de ne pas poursuivre la personne
concernée, à moins que cette décision ne soit l'effet du
manque de volonté ou de l'incapacité de l'État de mener
véritablement à bien des poursuites ;
c) La personne concernée a déjà
été jugée pour le comportement faisant l'objet de la
plainte, et qu'elle ne peut être jugée par la Cour en vertu de
l'article 20, paragraphe 3 ;
d) L'affaire n'est pas suffisamment grave pour que la Cour y
donne suite.
2. Pour déterminer s'il y a manque de volonté de
l'État dans un cas d'espèce, la Cour considère
l'existence, eu égard aux garanties d'un procès équitable
reconnues par le droit international, de l'une ou de plusieurs des
circonstances suivantes :
a) La procédure a été ou est
engagée ou la décision de l'État a été prise
dans le dessein de soustraire la personne concernée à sa
responsabilité pénale pour les crimes relevant de la
compétence de la Cour visés à l'article 5 ;
b) La procédure a subi un retard injustifié qui,
dans les circonstances, est incompatible avec l'intention de traduire en
justice la personne concernée ;
c) La procédure n'a pas été ou n'est pas
menée de manière indépendante ou impartiale mais d'une
manière qui, dans les circonstances, est incompatible avec l'intention
de traduire en justice la personne concernée.
3. Pour déterminer s'il y a incapacité de
l'État dans un cas d'espèce, la Cour considère si
l'État est incapable, en raison de l'effondrement de la totalité
ou d'une partie substantielle de son propre appareil judiciaire ou de
l'indisponibilité de celui-ci, de se saisir de l'accusé, de
réunir les éléments de preuve et les témoignages
nécessaires ou de mener autrement à bien la procédure.
Article 20
NE BIS IN IDEM
1. Sauf disposition contraire du présent Statut, nul ne
peut être jugé par la Cour pour des actes constitutifs de crimes
pour lesquels il a déjà été condamné ou
acquitté par elle.
2. Nul ne peut être jugé par une autre
juridiction pour un crime visé à l'article 5 pour lequel il a
déjà été condamné ou acquitté par la
Cour.
3. Quiconque a été jugé par une autre
juridiction pour un comportement tombant aussi sous le coup des articles 6, 7
ou 8 ne peut être jugé par la Cour que si la procédure
devant l'autre juridiction :
a) Avait pour but de soustraire la personne concernée
à sa responsabilité pénale pour des crimes relevant de la
compétence de la Cour ; ou
b) N'a pas été au demeurant menée de
manière indépendante ou impartiale, dans le respect des garanties
d'un procès équitable prévues par le droit international,
mais d'une manière qui, dans les circonstances, était
incompatible avec l'intention de traduire l'intéressé en
justice.
Article 22
NULLUM CRIMEN SINE LEGE
1. Une personne n'est responsable pénalement en vertu
du présent Statut que si son comportement constitue, au moment où
il se produit, un crime relevant de la compétence de la Cour.
2. La définition d'un crime est d'interprétation
stricte et ne peut être étendue par analogie. En cas
d'ambiguïté, elle est interprétée en faveur de la
personne qui fait l'objet d'une enquête, de poursuites ou d'une
condamnation.
3. Le présent article n'empêche pas qu'un
comportement soit qualifié de crime au regard du droit international,
indépendamment du présent Statut.
Article 23
NULLA POENA SINE LEGE
Une personne qui a été condamnée par la
Cour ne peut être punie que conformément aux dispositions du
présent Statut.
Article 24
NON-RÉTROACTIVITÉ RATIONE PERSONAE
1. Nul n'est pénalement responsable, en vertu du
présent Statut, pour un comportement antérieur à
l'entrée en vigueur du Statut.
2. Si le droit applicable à une affaire est
modifié avant le jugement définitif, c'est le droit le plus
favorable à la personne faisant l'objet d'une enquête, de
poursuites ou d'une condamnation qui s'applique.
Article 98
COOPÉRATION EN RELATION AVEC LA RENONCIATION À
L'IMMUNITÉ ET LE CONSENTEMENT À LA REMISE
1. La Cour ne peut poursuivre l'exécution d'une demande
de remise ou d'assistance qui contraindrait l'État requis à agir
de façon incompatible avec les obligations qui lui incombent en droit
international en matière d'immunité des États ou
d'immunité diplomatique d'une personne ou de biens d'un État
tiers, à moins d'obtenir au préalable la coopération de
cet État tiers en vue de la levée de l'immunité.
2. La Cour ne peut poursuivre l'exécution d'une demande
de remise qui contraindrait l'État requis à agir de façon
incompatible avec les obligations qui lui incombent en vertu d'accords
internationaux selon lesquels le consentement de l'État d'envoi est
nécessaire pour que soit remise à la Cour une personne relevant
de cet État, à moins que la Cour ne puisse au préalable
obtenir la coopération de l'État d'envoi pour qu'il consente
à la remise.
Article 121
AMENDEMENTS
1. À l'expiration d'une période de sept ans
commençant à la date d'entrée en vigueur du présent
Statut, tout État Partie peut proposer des amendements à
celui-ci. Le texte des propositions d'amendement est soumis au
Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies,
qui le communique sans retard à tous les États Parties.
2. Trois mois au plus tôt après la date de cette
communication, l'Assemblée des États Parties, à la
réunion suivante, décide, à la majorité de ses
membres présents et votants, de se saisir ou non de la proposition.
L'Assemblée peut traiter cette proposition elle-même ou convoquer
une conférence de révision si la question soulevée le
justifie.
3. L'adoption d'un amendement lors d'une réunion de
l'Assemblée des États Parties ou d'une conférence de
révision requiert, s'il n'est pas possible de parvenir à un
consensus, la majorité des deux tiers des États Parties.
4. Sous réserve des dispositions du paragraphe 5, un
amendement entre en vigueur à l'égard de tous les États
Parties un an après que les sept huitièmes d'entre eux ont
déposé leurs instruments de ratification ou d'acceptation
auprès du Secrétaire général de l'Organisation des
Nations Unies.
5. Un amendement aux articles 5, 6, 7 et 8 du présent
Statut entre en vigueur à l'égard des États Parties qui
l'ont accepté un an après le dépôt de leurs
instruments de ratification ou d'acceptation. La Cour n'exerce pas sa
compétence à l'égard d'un crime faisant l'objet de cet
amendement lorsque ce crime a été commis par un ressortissant
d'un État Partie qui n'a pas accepté l'amendement ou sur le
territoire de cet État.
6. Si un amendement a été accepté par les
sept huitièmes des États Parties conformément au
paragraphe 4, tout État Partie qui ne l'a pas accepté peut se
retirer du présent Statut avec effet immédiat, nonobstant
l'article 127, paragraphe 1, mais sous réserve de l'article 127,
paragraphe 2, en donnant notification de son retrait au plus tard un an
après l'entrée en vigueur de cet amendement.
7. Le Secrétaire général de
l'Organisation des Nations Unies communique à tous les États
Parties les amendements adoptés lors d'une réunion de
l'Assemblée des États Parties ou d'une conférence de
révision.
Article 124
DISPOSITION TRANSITOIRE
Nonobstant les dispositions de l'article 12, paragraphes 1 et
2, un État qui devient partie au présent Statut peut
déclarer que, pour une période de sept ans à partir de
l'entrée en vigueur du Statut à son égard, il n'accepte
pas la compétence de la Cour en ce qui concerne la catégorie de
crimes visée à l'article 8 lorsqu'il est allégué
qu'un crime a été commis sur son territoire ou par ses
ressortissants. Il peut à tout moment retirer cette déclaration.
Les dispositions du présent article seront réexaminées
à la conférence de révision convoquée
conformément à l'article 123, paragraphe 1.
ANNEXE II
CHAPITRE VII DE LA CHARTE DES NATIONS UNIES
ACTION EN CAS DE MENACE CONTRE LA PAIX, DE RUPTURE DE LA
PAIX ET D'ACTE D'AGRESSION
Article 39
Le Conseil de sécurité constate l'existence
d'une menace contre la paix, d'une rupture de la paix ou d'un acte d'agression
et fait des recommandations ou décide quelles mesures seront prises
conformément aux Articles 41 et 42 pour maintenir ou rétablir la
paix et la sécurité internationales.
Article 40
Afin d'empêcher la situation de s'aggraver, le Conseil
de sécurité, avant de faire les recommandations ou de
décider des mesures à prendre conformément à
l'Article 39, peut inviter les parties intéressées à se
conformer aux mesures provisoires qu'il juge nécessaires ou
souhaitables. Ces mesures provisoires ne préjugent en rien les droits,
les prétentions ou la position des parties intéressées. En
cas de non-exécution de ces mesures provisoires, le Conseil de
sécurité tient dûment compte de cette défaillance.
Article 41
Le Conseil de sécurité peut décider
quelles mesures n'impliquant pas l'emploi de la force armée doivent
être prises pour donner effet à ses décisions, et peut
inviter les Membres des Nations Unies à appliquer ces mesures. Celles-ci
peuvent comprendre l'interruption complète ou partielle des relations
économiques et des communications ferroviaires, maritimes,
aériennes, postales, télégraphiques,
radioélectriques et des autres moyens de communication, ainsi que la
rupture des relations diplomatiques.
Article 42
Si le Conseil de sécurité estime que les mesures
prévues à l'Article 41 seraient inadéquates ou qu'elles se
sont révélées telles, il peut entreprendre, au moyen de
forces aériennes, navales ou terrestres, toute action qu'il juge
nécessaire au maintien ou au rétablissement de la paix et de la
sécurité internationales. Cette action peut comprendre des
démonstrations, des mesures de blocus et d'autres opérations
exécutées par des forces aériennes, navales ou terrestres
de Membres des Nations Unies.
Article 43
1. Tous les Membres des Nations Unies, afin de contribuer au
maintien de la paix et de la sécurité internationales, s'engagent
à mettre à la disposition du Conseil de sécurité,
sur son invitation et conformément à un accord spécial ou
à des accords spéciaux, les forces armées, l'assistance et
les facilités, y compris le droit de passage, nécessaires au
maintien de la paix et de la sécurité internationales.
2. L'accord ou les accords susvisés fixeront les
effectifs et la nature de ces forces, leur degré de préparation
et leur emplacement général, ainsi que la nature des
facilités et de l'assistance à fournir.
3. L'accord ou les accords seront négociés
aussitôt que possible, sur l'initiative du Conseil de
sécurité. Ils seront conclus entre le Conseil de
sécurité et des Membres de l'Organisation, ou entre le Conseil de
sécurité et des groupes de Membres de l'Organisation, et devront
être ratifiés par les Etats signataires selon leurs règles
constitutionnelles respectives.
Article 44
Lorsque le Conseil de sécurité a
décidé de recourir à la force, il doit, avant d'inviter un
Membre non représenté au Conseil à fournir des forces
armées en exécution des obligations contractées en vertu
de l'Article 43, convier ledit Membre, si celui-ci le désire, à
participer aux décisions du Conseil de sécurité touchant
l'emploi de contingents des forces armées de ce Membre.
Article 45
Afin de permettre à l'Organisation de prendre d'urgence
des mesures d'ordre militaire, des Membres des Nations Unies maintiendront des
contingents nationaux de forces aériennes immédiatement
utilisables en vue de l'exécution combinée d'une action
coercitive internationale. Dans les limites prévues par l'accord
spécial ou les accords spéciaux mentionnés à
l'Article 43, le Conseil de sécurité, avec l'aide du
Comité d'état-major, fixe l'importance et le degré de
préparation de ces contingents et établit des plans
prévoyant leur action combinée.
Article 46
Les plans pour l'emploi de la force armée sont
établis par le Conseil de sécurité avec l'aide du
Comité d'état-major.
Article 47
1. Il est établi un Comité d'état-major
chargé de conseiller et d'assister le Conseil de sécurité
pour tout ce qui concerne les moyens d'ordre militaire nécessaires au
Conseil pour maintenir la paix et la sécurité internationales,
l'emploi et le commandement des forces mises à sa disposition, la
réglementation des armements et le désarmement éventuel.
2. Le Comité d'état-major se compose des chefs
d'état-major des membres permanents du Conseil de sécurité
ou de leurs représentants. Il convie tout Membre des Nations Unies qui
n'est pas représenté au Comité d'une façon
permanente à s'associer à lui, lorsque la participation de ce
Membre à ses travaux lui est nécessaire pour la bonne
exécution de sa tâche.
3. Le Comité d'état-major est responsable, sous
l'autorité du Conseil de sécurité, de la direction
stratégique de toutes forces armées mises à la disposition
du Conseil. Les questions relatives au commandement de ces forces seront
réglées ultérieurement.
4. Des sous-comités régionaux du Comité
d'état-major peuvent être établis par lui avec
l'autorisation du Conseil de sécurité et après
consultation des organismes régionaux appropriés.
Article 48
1. Les mesures nécessaires à l'exécution
des décisions du Conseil de sécurité pour le maintien de
la paix et de la sécurité internationales sont prises par tous
les Membres des Nations Unies ou certains d'entre eux, selon
l'appréciation du Conseil.
2. Ces décisions sont exécutées par les
Membres des Nations Unies directement et grâce à leur action dans
les organismes internationaux appropriés dont ils font partie.
Article 49
Les Membres des Nations Unies s'associent pour se prêter
mutuellement assistance dans l'exécution des mesures
arrêtées par le Conseil de sécurité.
Article 50
Si un Etat est l'objet de mesures préventives ou
coercitives prises par le Conseil de sécurité, tout autre Etat,
qu'il soit ou non Membre des Nations Unies, s'il se trouve en présence
de difficultés économiques particulières dues à
l'exécution desdites mesures, a le droit de consulter le Conseil de
sécurité au sujet de la solution de ces difficultés.
Article 51
Aucune disposition de la présente Charte ne porte
atteinte au droit naturel de légitime défense, individuelle ou
collective, dans le cas où un Membre des Nations Unies est l'objet d'une
agression armée, jusqu'à ce que le Conseil de
sécurité ait pris les mesures nécessaires pour maintenir
la paix et la sécurité internationales. Les mesures prises par
des Membres dans l'exercice de ce droit de légitime défense sont
immédiatement portées à la connaissance du Conseil de
sécurité et n'affectent en rien le pouvoir et le devoir qu'a le
Conseil, en vertu de la présente Charte, d'agir à tout moment de
la manière qu'il juge nécessaire pour maintenir ou
rétablir la paix et la sécurité internationales.
ANNEXE III
RESOLUTION 1422 (2002), ADOPTEE PAR LE CONSEIL DE SECURITE A
SA 4572è SEANCE, LE 12 JUILLET 2002.
Le Conseil de sécurité,
Prenant acte de l'entrée en vigueur, le 1er
juillet 2002, du Statut de la Cour pénale internationale, fait à
Rome le 17 juillet 1998 (le Statut de Rome),
Soulignant l'importance que revêtent les
opérations des Nations Unies pour la paix et la sécurité
internationales,
Notant que tous les États ne sont pas parties
au Statut de Rome,
Notant que les États parties au Statut de Rome
ont choisi d'accepter la compétence de la Cour conformément au
Statut et en particulier au principe de complémentarité,
Notant que les États qui ne sont pas parties
au Statut de Rome continueront de s'acquitter de leurs responsabilités
devant leurs juridictions nationales en ce qui concerne les crimes
internationaux,
Considérant que les opérations
établies ou autorisées par le Conseil de sécurité
de l'Organisation des Nations Unies ont pour mission de maintenir ou de
rétablir la paix et la sécurité internationales,
Considérant en outre qu'il est dans
l'intérêt de la paix et de la sécurité
internationales de faire en sorte que les États Membres soient en mesure
de concourir aux opérations décidées ou autorisées
par le Conseil de sécurité,
Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des
Nations Unies,
1. Demande, conformément à l'article 16
du Statut de Rome, que, s'il survenait une affaire concernant des responsables
ou des personnels en activité ou d'anciens responsables ou personnels
d'un État contributeur qui n'est pas partie au Statut de Rome à
raison d'actes ou d'omissions liés à des opérations
établies ou autorisées par l'Organisation des Nations Unies, la
Cour pénale internationale, pendant une période de 12 mois
commençant le 1er juillet 2002, n'engage ni ne mène aucune
enquête ou aucune poursuite, sauf si le Conseil de sécurité
en décide autrement;
2. Exprime l'intention de renouveler, dans les
mêmes conditions, aussi longtemps que cela sera nécessaire la
demande visée au paragraphe 1, le 1er juillet de chaque année,
pour une nouvelle période de 12 mois;
3. Décide que les États Membres ne
prendront aucune mesure qui ne soit pas conforme à la demande
visée au paragraphe 1 et à leurs obligations internationales;
4. Décide de rester saisi de la question.
* 1 Il y a à peu
près 180 millions d'années : voy. M. Beniamino, « Une
géographie mythique : La lémurie »,
www.litterature-reunionnaise.org/ histoirelitt/geomyth.htm,
visité le 30 septembre 2005.
* 2 Notamment les USA, la
Russie, la Chine, l'Israël, etc. Voir le liste complète sur
http://www.icc-cpi.int/statesparties/allregions.php
* 3 La France a
négocié son adhésion contre l'ajout d'un article 124 au
Traité qui prévoit que les Etats qui le souhaitent pourront
décliner la compétence de la Cour pendant 7 ans en matière
de crime de guerre.
* 4 A. GARAPON, «De
Nuremberg au TPI: naissance d'une justice universelle?» in Critique
internationale, n°5, automne, 1999, p. 168.
* 5 C'est-à-dire
littérallement un dieu tombé du ciel.
* 6 Voy., M. MOURRE ,
Dictionnaire encyclopédique d'histoire, Bordas, Paris,
1996, p. 353.
* 7 Q. SALDANA, « La
justice pénale internationale », R.C.A.D.I., vol. 10,
1925, p. 337.
* 8 ibidem
* 9 L'article 227 du
Traité de Versailles : l'Empereur Guillaume II responsable à
titre personnel de la guerre
* 10 Le Traité de
Sèvres signé entre les Alliés et la Turquie envisageait
également la responsabilité pénale des personnes qui
avaient organisé dans ce pays des massacres durant la guerre.
Dénoncé par le mouvement nationaliste de Moustafa Kemal, ce
Traité ne sera jamais ratifié. Voy., article 226 du Traité
de Sèvres : « The Turkish Government recognises the right of
the Allied Powers to bring before military tribunals persons accused of having
committed acts in violation of the laws and customs of war. Such persons
shall, if found guilty, be sentenced to punishments laid down by law. This
provision will apply notwithstanding any proceedings or prosecution before a
tribunal in Turkey or in the territory of her allies. The Turkish Government
shall hand over to the Allied Powers or to such one of them as shall so request
all persons accused of having committed an act in violation of the laws and
customs of war, who are specified either by name or by the rank, office or
employment which they held under the Turkish authorities ».
* 11 H. D. DE VABRES, «
Le procès de Nuremberg devant les principes modernes de droit
pénal international », R.C.A.D.I., 1947, pp. 481-581.
* 12 Dans l'extrait de cette
déclaration, on peut lire : « le Royaume Uni, les
Etats Unis et l'Union des Républiques Socialistes et Soviétiques
ont reçu des nombreuses sources la preuve des atrocités, des
massacres et des exécutions sommaires effectués de sang froid par
les forces hitlériennes(...)les trois puissances alliées(...)
poursuivent ces criminels jusqu'au bout de la terre et les remettront aux mains
de leurs accusateurs pour que justice soit faite », voy.
« Accord concernant la poursuite et le châtiment des grands
criminels de guerre des Puissances européennes de l'Axe et statut du
tribunal international militaire. Londres, 8 août 1945 » in
Recueil des traités des Nations Unies, Vol.82, pp.281-301.
* 13 A.M. VON HEBEL «An
ICC- Historical perspective», in A. M. Von Hebel et al. (Eds.),
Reflections on the International Criminal Court, The Hague, TMC Asser
Press, 1999, p. 20.
* 14 Aucune juridiction
n'ayant eu à examiner les terribles bombardements des alliés et
particulièrement ceux d'Hiroshima et de Nagasaki.
* 15 Au moment des faits, le
crime contre la paix était considéré par des nombreux
auteurs comme ne faisant pas encore partie du droit international. Voir
à ce sujet R. H. Minear, «victor's justice», in The Tokyo
war crimes trial, Princeton University Press, Princeton, New Jersey, 1971,
pp. 47-55 et B. V. A. Roling, «The Tokyo trial and beyond», in
Reflections of a peacemonger, Polity Press, Cambridge, 1993, pp. 10 et
65-67.
* 16 Résolution 260
(III) B du 9 décembre 1948.
* 17 Pour plus de details
sur les discussions au sujet de cette convention, lire M. Lippman, «The
1948 Convention on the prevention and the punishment of the Crime of Genocide:
Forty five years later» in 8 Temple International and Comparative Law
Journal, 1994, pp. 1-84.
* 18 K. ELBEDAD et
B. VAN ROMPU, Les tribunaux pénaux
internationaux, Mémoire DEA, Université de Lille,
faculté des sciences juridiques, 1998-1999, p. 47 (non
publié).
* 19 A. GARAPON, op.
cit., p.168.
* 20 Dans la demande
originale de l'établissement d'une cour pénale internationale,
Trinité-et-Tobago se préoccupait de l'incapacité des
droits pénaux nationaux et de la compétence des tribunaux
nationaux à poursuivre le trafic des stupéfiants. La proposition
de Trinité était qu'une Cour pénale internationale puisse
remplacer les juridictions nationales dans des telles poursuites et ainsi
isoler les juridictions nationales. Cette idée ne fut pas acceptable par
la majorité des Etats négociant les Statuts. Pour plus de
détails lire H. V. Hebel, op. cit., p.68
* 21 Idem, p.30.
* 22 Aux termes de l'article
5 du Statut de Rome, il s'agit du crime de génocide, du crime contre
l'humanité, des crimes de guerre et, dans une certaine mesure, du crime
d'agression.
* 23La convention de
Genève sur l'amélioration du sort des blessés et des
malades des forces armées (Convention de Genève I), la convention
de Genève sur l'amélioration du sort des blessés, des
malades et des naufragés des forces armées (Convention de
Genève II), la Convention sur le traitement des prisonniers de guerre
(Convention de Genève III) et la Convention de Genève sur la
protection des personnes civiles en temps de guerre (Convention de
Genève IV) ont été signée à Genève
(Suisse), le 12 août 1949 et deux Protocoles Additionnels y ont
été ajoutés en 1977 notamment celui relatif à la
protection des victimes des conflits armés internationaux (Protocole
Additionnel I) et un autre relatif à la protection des victimes des
conflits armés non internationaux (Protocole Additionnel II).
* 24 Chapitre X. art.49 de
la Convention (I) de Genève, article 50, chapitre VIII de la Convention
(II) de Genève, art.129 de la Convention III et art. 146 de la
Convention IV : « Chaque Partie contractante aura l'obligation
de rechercher les personnes prévenues d'avoir commis, ou d'avoir
ordonné de commettre, l'une ou l'autre de ces infractions graves, et
elle devra les déférer à ses propres tribunaux, quelle que
soit leur nationalité. Elle pourra aussi, si elle le
préfère, et selon les conditions prévues par sa propre
législation, les remettre pour jugement à une autre Partie
contractante, pour autant que cette Partie contractante ait retenu contre
lesdites personnes des charges suffisantes. »
* 25 Pour de plus amples
détails sur la compétence universelle, voy. J.-M. NTETE, La
compétence universelle et le terrorisme, Séminaire,
Université Catholique de Louvain, 2004 (non publié).
* 26 Inter alia
Allemagne, Autriche, Danemark, Espagne, Russie, Suisse...,
* 27 Il convient de rappeler
que cette loi, a mis la Belgique dans un imbroglio politico-économique
inextricable à tel point que les dispositions de cette loi seront
modifiées deux fois.
Lire à ce propos Prof. E. David, « Que
reste-t-il de la loi du 5 août 2003? », sur
http://www.law.kuleuven.ac.be/jura/40n1/david.html
consulté le 09 septembre 2005.
* 28 "Etrangers" dans la
mesure où la nationalité de l'inculpé n'est pas celle de
ces Etats et où les infractions n'ont pas été commises sur
leur territoire.
* 29 Le dernier jugement en
date étant celui de Etienne NZABONIMANA et Samuel NDASHYIKIRWA
condamnés respectivement à 12 et 10 ans de prison en date du 29
juin 2005 pour participation au génocide dans la région de
Kibungo (Sud-Est du Rwanda) en 1994. Rwanda-Assises de Bruxelles, sur
http://www.opjdr.org/new_page_11.htm
consulté le 09 septembre 2005. Les récentes tractations sur
l'affaire Hissein HABRE est aussi une consécration de plus de la
ténacité belge à faire usage de la compétence
universelle de leurs juridictions.
* 30 A. Huet et R.
Koering-Loulen, Le droit pénal international, Paris, PUF, 1994,
p. 238.
* 31 Notamment les Etats
unis qui menaçaient la Belgique de perdre le sacro-saint siège de
l'OTAN.
* 32 P. Couve,
« La Belgique ronge `sa loi de compétence
universelle' » publié sur
http://www.rfi.fr/actufr/articles/042/article_26480.asp
publié le 23 juin 2003 et consulté le 09 septembre 2005. Au
lendemain d'une élection et à la veille de la formation d'un
gouvernement, le lobby flamand - proche des milieux anglo-saxons- a maintenu
sur Louis Michel, vice premier Ministre et Ministre des Affaires
étrangères, menacé de perdre son poste, une pression
intolérable.
* 33 Pour les articles
cités, il faut se référer respectivement au Statut du TPIY
et celui du TPIR.
* 34 J.-F. ROULOT, Le
crime contre l'humanité, Paris, L'Harmattan, Coll. Logiques
Juridiques, 2OO2, p. 332 ; voy. Aussi M. Mubiala, «Le Tribunal pour le
Rwanda: vraie ou fausse copie du Tribunal pénal International pour
l'Ex-Yougoslavie?, RGDIP, p. 948.
* 35 W. A. SCHABAS, An
introduction to the International Criminal Court, 2nd ed.,
Cambridge University Press, 2004, p.11.
* 36 La loi organique
n° 08/96 du 30 août 1996 portant l'organisation des poursuites des
infractions constitutives du crime de génocide ou de crimes contre
l'humanité, commises à partir du 1er octobre 1990 in Journal
Officiel de la République du Rwanda n° 17 du 11 septembre 1996.
* 37 Article 9 et 8
respectivement du statut du TPIY et celui du TPIR.
* 38 W. A. SCHABAS, op.
cit., p.37.
* 39 H. VON HEBEL and D.
ROBINSON, «Crimes within the jurisdiction of the Court», in R. S. Lee
(Ed.), The international Criminal Court. The making of the Rome Statute.
Issues, Negotiations, Results, The Hague, Kluwer Law International, pp.
79-126, passim
* 40 J. F. QUEGUINER,
«Dix ans après la création du Tribunal pénal
international pour l'ex-Yougoslavie: évaluation de l'apport de sa
jurisprudence au droit international humanitaire», in
RICR, No 850, Vol. 85, Juin 2003, p. 271
* 41 L. CONDORELLI, «
La Cour pénale internationale : Un pas de géant (pourvu qu'il
soit accompli...) », RGDIP, 1999 (1), p. 12.
* 42 La notion de crime
contre l'humanité est apparue, semble-t-il, lors du massacre des
arméniens par les Turcs en 1915 et définie pour la
première fois par l'accord de Londres (8/08/1945). Constituent des
crimes contre l'humanité : « l'assassinat, l'extermination,
la réduction en esclavage, la déportation et tout autre
acte inhumain commis contre toutes populations civiles avant ou
pendant la guerre ou bien des persécutions pour des motifs
politiques, raciaux ou religieux ». Cette définition est
reprise à l'article 5 du Statut du TPIY et 4 du Statut du TPIR
* 43 Procureur c. Erdemovic
(TPIY, Affaire n° IT-96-22-A), siégeant en Appel, 7 oct. 1997
(1998) 111 IRL 298.
* 44 Prucureur c. Tadic
(Affaire n° IT-94-1-AR72) Decision on the Defence Motion for Interlocutory
Appeal on Jurisdiction, 2 october 1995, (1997) 105 IRL 453, 35 ILM 32. Il n'ya
pas d'équivalent à ce jugement au TPIR. Une telle motion
était refusée par la Chambre d'accusation du TPIR et l'Appel n'a
pas continué. Voy. Procureur c. KANYABASHI (Affaire n°
ICTR-96-15-T) Decision on The Defence motion on Jurisdiction, 18 june 1998.
* 45 Dans la décision du
juge anglais, il convient de faire une distinction entre ce qui est le support
nécessaire du jugement (ratio decidendi) et ce qui ne l'est pas
(obiter dictum). Ce dernier n'a qu'une force de persuasion et ne peut
en aucun cas fonder un précédent. Voy. H. ROLAND et L. BOYER,
Locutions latines du droit francais, 4e éd., Paris,
Litec, 1998, p. 327.
* 46 «Cour
pénale internationale: questions-réponses» publié
sur
http://hrw.org/french/themes/icc/iccqna.htm
sans date consulté le 09 septembre 2005 à 10H12.
* 47 Comme c'est le cas
devant le TPIY et le TPIR!
* 48 Pourtant -c'est une
lacune grave- la sécurité des victimes venant déposer
n'est réellement garantie que pendant le témoignage oral devant
ces TPI et n'est plus assurée par la suite, faute d'un équivalent
international des forces qui protègent victimes et témoins en
droit interne (lois et polices).
* 49 Statut de la Cour
pénale internationale, article 79: il convient de rappeler que le besoin
du fonds de ce genre était clairement ressenti dans l'expérience
du génocide rwandais de 1994.
* 50 Voy. X,»Les
victimes au coeur des débats sur la justice internationale» in
la nouvelle lettre de la FIDH, n°19, pp. 10-11.
* 51 «Quels sont les
bénéfices à attendre de la Cour pénale
internationale ?», publié sur
http://hrw.org/french/themes/icc/iccqna.htm
, non daté, consulté le 9 septembre 2005 à 10H23.
* 52 Communiqué de
presse de la Cour Internationale de Justice 2000/32 publié sur
http://www.icj-cij.org/cijwww/cpresscom/cpresscom2000/cpresscom2000-32_CBE_20001017.htm,
non daté, consulté le 09 septembre 2005 à 12h22.
* 53
http://www.icj-cij.org/cijwww/cdocket/cCOBE/ccobejudgment/ccobe_cjudgment_20020214.PDF
consulté le 09 septembre 2005 à 12h29
* 54 E. DAVID, «La
question des immunités des Chefs d'Etats étrangers à la
lumière des arrêts de la Cour de Cassation française du 13
mars 2001 et de la Cour internationale de justice du 14 février
2002» in SOS Attentats, Terrorisme, victimes et responsabilité
pénale internationale, Calmann-Levy, 2003, p. 441.
* 55 Lord WIBERFORCE,
The decision of the House of Lords I Congreso del Partido, (1983),
A.C. 244, 262 ; cité par J. Brohmer, State Immunity and violation of
human rights, The Hague, Martinus N. Publishers, 1997, p. 14.
* 56 A. DULAIT, Rapport
d'information sur la cour pénale internationale(n°313/1998-99)
Paris, sénat, sur
http://www.senat.fr/rap/r98-313/r98-313.html
consulté ce 09 septembre 2005 à 13H30.
* 57 Voy. Infra,
chap. II, section II, §3
* 58 M. PERRIN DE
BRICHAMBAUT, «Les tribunaux pénaux internationaux, la Cour
pénale internationale» in Léçons de droit
international public, Presses de Sciences Po/Dalloz, 2002, p. 243.
* 59 A. KROG, La Douleur
des mots, Actes Sud, Arles, 2004, p. 201.
* 60 S. BUKHARI DE PONTUAL,
« la justice pénale internationale s'universalise »,
sur www.acat.asso.fr/courrier/annee_2005/
Courrier_258/just_penal_inter_258.htm, consulté le 12 novembre
2005
* 61 En effet, selon ce
schéma, la Cour aurait dû d'abord obtenir l'accord des criminels
eux-mêmes, notamment dans le cas de la mise en accusation des chefs
d'États responsables des violations du Droit International
Humanitaire.
* 62 Faute d'une
définition unanime du crime d'agression, la compétence de la Cour
est sursise à l'égard de ce crime. C'est ainsi que dans nos
développements, nous ne ferons aucune référence à
ce crime comme rentrant dans la compétence de cette juridiction.
* 63 T.
MERON, « Crimes under the jurisdiction of the International
criminal Court », in H. V. HEBEL et al.(Ed.), op. cit.,
p. 48.
* 64 R. LEMKIN, «Crime
de génocide», in Revue de Droit International, de Sciences
Diplomatiques et Politique, vol. 24, octobre -décembre, 1946,
pp.213-222.
* 65 Voy. N. ROBINSON,
The génocide Convention : A commentary, New York,
Institute of Jewish Affairs, 1960, p. 42 ; P. N. DROST,
Génocide : United nations Legislation on International criminal
Law, Leyden , A. W. Sithoff, 1959, p. 56.
* 66 Procureur c. Kambanda,
Affaire n° ICTR-97-23-S, Jugement et Sentence, 4 septembre 1998,
§16 ; Procureur c. Serashugo, Affaire n° ICTR 98-39-S, Sentence,
2 février,1999, §15 ; Voy. aussi W. A. Schabas,
Génocide in international law : Crime of Crimes,
Cambridge, Cambidge University Press, 2000, p. 27.
* 67 W. A. SCHABAS,
Supra, note 34, p.32
* 68 R. LEMKIN, Axis
Rule in Occupied Europe: Laws of Occupation, Analysis of Government, Proposal
for redress, Washington, Carnegie Endowment for the World Peace, 1944,
cité par W.-A. SCHABAS, Op. cit., note 33, p. 36.
* 69 Ibidem
* 70 Il faut noter que les
juges, eux, n'ont jamais fait usage de ce terme.
* 71 Résolution 96
(1) de l'AGNU du 11 décembre 1946.
* 72 Article 6 du statut de
Rome
* 73 H. ASCENSIO, E. DECAUX
et A. PELLET (Dirs), Droit international pénal, Paris, Editions
A. PEDONE, 2000, passim
* 74 Ibidem
* 75 Procureur c. Jelesic,
Affaire IT-95-10-A, Jugement, 5 juillet 2001, §48. L'obiter
dictum de la chambre d'Appels était suivi notamment dans le
procès Procureur c. Sikirica et al, Affaire IT-95-8-I,
Arrêt relatif à l'Appel de la Défense concernant
l'acquittement, 3 septembre 2001, §62.
* 76 Éléments
de crimes, ICC-ASP/1/3, pp.113-115.
* 77 W.-A. SCHABAS, op.
cit., note 64, p. 47.
* 78 Procureur c. Jelesic,
Affaire n° IT-95-10-T, Jugement, 14 décembre 1999, §
82.
* 79 W. -A. SCHABAs, op.
cit., note 34, p.39
* 80 Procureur c. Krstic,
Affaire n° IT-98-33-T, Jugement, 2 août 2001, §556.
* 81 W.-A. SCHABAS, op.
cit., note 34, p.40
* 82 Par exemple, le
Procureur du TPIY inculpait Slobodan MILOSEVIC des crimes contre
l'humanité et non du génocide, eu égard aux
allégations d' « épuration ethnique »
au Kossovo en 1999. Voy. Procureur c. Milosevic et al., Affaire
n°IT-99-37-I, Inculpation, 22 mai 1999.
* 83 Pour des plus amples
détails, Voy. R. S. Clark, « Crimes against humanity at
Nuremberg », in ,G. Ginsburgs and V. N. Kudriavitsev (Eds), The
Nuremberg Trial and International Law, Boston, Dordrecht, 1990, pp.
195-198 et E. Schwelb, « Crimes against Humanity », in 23
Brit. Y. B. Int'l, 1946, pp. 178 et 181
* 84 R. Lansing,
« Notes on World Sovereignty », in 1Am. J. Int'l.
L., 1921, pp. 13-25 (Faisant la distinction entre la piraterie et le
commerce des esclaves, en tant que crime contre l'humanité) :
Même si l'article était publié en 1921, une de ses notes
précise qu'il a été écrit en 1906. De cet article,
il ressort qu'il y a eu des usages sporadiques de cette expression ou quelque
chose de très proche avant l'an 1915.
* 85 J. Jones, The
practice of the ICTY and ICTR, New York, Irvingston-Hudson, 1198, pp.
49-55.
* 86 Dans plusieurs articles
de la Convention de Genève IV, on peut lire sans beaucoup plus de
précision que «les femmes et les autres personnes
vulnérables doivent être protégées».
* 87 S. Clarck, Op.
cit., p. 193, n°65 : un progrès du droit coutumier et du
principe général de droit. Voy. l'article 38 (1)(b) et (c) du
statut de Rome. L'explication la plus convaincante du fondement juridique du
crime contre l'humanité en 1945/1946 était qu'il était un
principe général de droit alors que la pratique ultérieure
lui ajoutera une base de la coutume. Cependant, le statut de Rome lui donne une
base Conventionnelle.
* 88 Voy. La Charte des
Nations Unies, article 13 selon lequel l'AGNU devra initier des études
et faire des recommandations pour « encourager le
développement progressif du droit international et sa
codification ». Pour des plus amples détails, voy. R. Rayfuse,
« The Draft Code of Crimes against peace and Security of
Mankind : Eating Disorders at the International Law Commission »
in 8 Crim. L. F.,1997, p. 43.
* 89 Il faut noter que le
terme « éléments » de l'article 9 du
Statut de Rome n'est défini nulle part dans ce statut mais il nous est
permis de penser qu'il devrait faire référence aux
éléments classiques constitutifs d'un crime :
élément matériel, moral et légal. Voy. par exemple
La délégation de Samoa, Elements of the Elements : An
informal Discussion Paper, August 13,1999 et M. Deguzman, « The
Road to Rome : the developing law of crimes against humanity »
in Human Rights Quaterly, May 2000, p. 21.
* 90 Notons aussi que le
dernier groupe de mots du Chapeau « en connaissance de cette
attaque » vient encore ajouter un mens rea
général sur l'élément moral particulier que
contient chacun des actes constitutifs du crime contre l'humanité aux
termes de l'article 7.
* 91 Voy. l'article 6 (c) de
la Charte de Nuremberg.
* 92 Voy. Article 7 du
statut de Rome en annexe.
* 93 Article 5 du Statut du
TPIY. Voy. les commentaires sur l'Affaire Tadic, IT-94-1-T, 2 octobre 1995,
§141.
* 94 Voy. par exemple la
Déclaration de Mme Madeleine ALBRIGHT, Représente des
États Unis aux Nations Unies, le 25 mai 1993 au UN Doc.
S/PV.3217, p. 15.
* 95 Le Statut du TPIR ne
fait aucune référence au conflit armé mais ajoute que pour
tout acte doit être basé sur la discrimination pour être
constitutif du crime contre l'humanité.
* 96 W. A. Schabas, op.
cit., note 34, p. 41.
* 97 R. S. Clark, op.
cit, p. 91.
* 98 L. C. Green,
« International Regulation of Armed Conflict » in C.
Bassioumi (Ed), Intenational criminal Law, Vol. I, 2nd ed.,
New York, Ardsley Transnational Publishers, 2003, pp. 355-391.
* 99 W. A. Schabas, op.
cit., note 34, p. 52.
* 100 Article 4 du Statut
du TPIR
* 101 Procureur c. Tadic,
op. cit, § 70 : de cette interprétation, la Chambre
d'Appels du TPIR a affirmé que la responsabilité pour crime de
guerre pouvait bien être engagée lors d'un conflit armé
interne.
* 102 Voy. article 50 de la
Convention de Genève I, l'article 51 de la Convention de Genève
II, article 130 de la Convention de Genève III et l'article 147 de la
Convention de Genève IV.
* 103 Nous
réitérons notre point de vue selon lequel tous ces
détails, et même ces répétions, qu'accuse le
Traité de Rome est la conséquence de la volonté des
négociateurs de Rome d'être le plus précis et
d'élaborer un Statut qui ne pourra pas, par exemple tolérer des
exceptions dilatoires qu'un avocat pourrait soulever à propos du
fondement juridique de tel ou tel autre crime reproché à son
client, allant même jusqu'à évoquer la violation du
principe de la légalité des délits.
* 104 Art. 8(b)(iii)
* 105 Article 8(b)(iv)
* 106 Tel que prévu
dans l'article 21(1)(b) et (c).
* 107 G. Venturin,
« War crimes in international armed conflict », in M.
Politi et G. Nesi (Eds.), The Statute of the International Criminal Court.
A challenge to impunity, Burlington, Ashgate Publishing Company, 2002, p.
104.
* 108 Voy. E. Burnand,
Les faits justificatifs lorsque la loi est transgressée pour
protéger l'environnement, Mémoire DEA, Université de
Lausanne, 2000-2001, p. 7. (non publié).
* 109 R. Gehring,
La
protection de l'environnement en période de conflit armé. Que
peut-ou pourrait apporter la Cour pénale internationale
(CPI)?, Mémoire DEA, Université de Lausanne,
2001, p. 18 (non publié) et M-C. Roberge, « La nouvelle Cour
pénale internationale : évaluation
préliminaire », RIRC n° 832, p.725-739
* 110 L. Condorelli,
« War crimes and internal conflict in the International Criminal
Court », in M. Politi et G. Nesi (Eds.), op. cit., p.
107.
* 111 Voy. Rea GEHRING,
op. cit., p. 20.
* 112 Article 70 du Statut
de Rome, Règlements 162-169 et 172 du Règlement de
Procédure et de Preuve.
* 113 Article 71 du Statut
de Rome, Reglements 170-172 du Reglement de Procédure et de Preuve.
* 114 Article 11(1) du
Statut de Rome
* 115 UN Doc. A/CONF. 183/
C1/ L. 65/ Rev.1, p. 2. A noter toutefois que cette note infrapaginale n'a pas
été reprise dans la version finale adoptée par la
Conférence : UN Doc.A/CONF.183/C.1/L.76/Add.3, pp.1-2 .
* 116 Article 12(3) du
Statut de Rome.
* 117 Article 13(b) du
Statut de Rome.
* 118 Selon le Black's Law
Dictionary, le mot `territoire' fait référence à une
surface géographique sous la compétence d'un gouvernement
donné ou encore une portion de la surface terrestre qui est sous le
contrôle et sous la possession exclusive d'un État donné.
Black's Law dictionary, 6e éd, V° Territory.
* 119G. Etienne,
« L'emploi de la force armée devant la Cour internationale de
justice ». sur
http://www.afri-ct.org/article.php3?id_article=90#haut
consulté le 18 novembre 2005.
* 120 Voy. Egalement la
déclaration de la Nouvelle Zélande en ce qui concerne Talekau
à l'Acte final de la Conférence de Rome
sur
www.un.org/News/fr-press/docs/2005/AG10417.doc.htm, visité
le 20 octobre 2005.
* 121 Idem
* 122 Voy. Loizidou c.
Turquie,(Exceptions préliminaires), Séries A, n°
310.
* 123 Voy. L'article 25 du
Statut de Rome.
* 124 W. A. Schabas,
op. cit., note 34, p. 101
* 125 Y. Dubois et H.
Tigrouda, Droit international public, Paris, Viubert, Coll. Dyna's Up,
p. 197.
* 126
http://lcil.law.cam.ac.uk/ILCSR/rft/A490-A3f.rtf,
Nations Unies A/CN.4/490/Add.3 consulté le 21 novembre 2005.
* 127 Voir, par exemple, B.
Fisse & J. Braithwaite, Corporations, Crime and Accountability,
Cambridge, Cambridge University Press, 1993, p. 47.
* 128 Voy.
notamment Yannick Dubois et Hélène Tigrouda, op.
cit., pp. 95-101.
* 129 Voy. aussi le Rapport
de la CDI des Nations Unies A/CN.4/490/Add.3 publié sur
http://lcil.law.cam.ac.uk/ILCSR/rft/A490-A3f.rtf,
consulté le 18 novembre 2005.
* 130 Voy. «Le projet
de la CDI sur la responsabilité de l'Etat pour fait internationalement
illicite» définitivement adopté par la CDI des Nations Unies
en 2001 et entériné par l'AGNU dans sa Résolution 56 / 83
du 12 décembre 2001.
* 131 Rapport de la CDI,
op. cit.
* 132 Nous faisons
référence aux sanctions pénales applicables aux autres
personnes morales, en France par exemple: la dissolution ne peut être
prononcée contre un Etat tandis que les amendes et les peines privatives
de droits (embargo,...) ont toujours été valablement
appliquées contre les Etats en vertu de leur responsabilité
internationale sans pourtant faire référence à la notion
du «crime d'Etat».
* 133 G. Connetti,
«State's crime and individuals' crimes: what relationship?», in M.
Politi and G. Nesi (Eds), op cit., p. 132
* 134 A. Huet et R.
Koering-Loulen, Le droit pénal international, Paris, PUF, 1994,
p. 222
* 135 Affaire Nottebow
(2e phase), jugement du 06 avril 1955, in (1955) ICJ Report
24 ; Amendments to the naturalisation Provisions of the Constitution
of Costa Rica, Advisory Opinion, OC-4/84, 19 janvier 1984, Series A,
n°4, §35.
* 136 Pour plus de
détails sur la personnalité active et passive d'une juridiction,
voy. A. Huet et R. Koering, op. cit., p. 57-60 et H. Bosly et D.
Vandermeersch, Droit de la procédure pénale,
3e éd., Bruges, La Charte, 2003, pp. 75-79.
* 137 A l'instar des
Pays-Bas.
* 138 Mandat d'arrêt du
11 avril 2002 (RDC c. Belgique),§61 sur
http://www.icj-cij.org/cijwww/cdocket/cCOBE/ccobejudgment/ccobe_cjudgment_20020214.PDF
consulté le 22 septembre 2005.
* 139 Idem,
§58. Notons que, en ce sens, la CIJ annule en effet la
célèbre décision de la « House of
Lords » dans l'affaire Pinochet : R.V. Bono Street
Stipendiary Magistrate and others, Ex parte Pinochet Urgate, (1998) 4 All
ER 879 ; (1998) 3 WLR 1456.
* 140 Les ONG et les
Organisations internationales, les individus et les États non partie au
traité n'ont aucune compétence de saisir la Cour. Toutefois, en
pratique, ils peuvent tous contacter le Procureur et le persuader à
engager des poursuites.
* 141 Voy. Par exemple le
Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques, la Convention de
Sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et
même la Convention Internationale relative au Blanchiment, au
dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits
du crime (1990).
* 142 D. N. Nsekero,
« The international Criminal Court : Jurisdictional and related
issues », in Criminal Law Forum, 1999, pp. 87-109.
* 143 Voy.
« Rapport de la CDI sur le travail de sa 46e session, 2
mai - 22 juillet 1994 », UN Doc. A/49/10, pp. 89-90.
* 144 Ces Etats sont
allés jusqu'à utiliser l'expression « Doctor
Strangelove Prosecutor », faisant allusion à un film
classique dans lequel un dingue scientifique américain perd ses
pédales et déclenche, lui seul, une guerre nucléaire.
* 145 «The concerns of
the USA regardind the proposal for a Proprio motu Prosecutor», 22
juin 1998, p.1 (traduction libre)
* 146 Règlement de
Procédure et de Preuve, UN Doc. PCNICC/2000/INF/3/Add.3,
Règlement n° 50.
* 147 Article 15 (1) du
Statut de Rome.
* 148 D'où il est
évident que le Statut invite plutôt le Procureur à demander
« l'information » auprès des États, des
organes des Nations Unies, des ONG et intergouvernementales, et des autres
sources qu'il estime pertinentes.
Sans pourtant préciser si ces Etats doivent être
parties ou non au traité de Rome.
* 149 Article 15 (6); voy.
Aussi S. Fernandez De Gurmendi, «The role of the Prosecutor» in M.
Politi et G. Nesi (Eds), Op. cit., p. 57
* 150 « Statement
by justice Louise ARBOUR to the Preparatory Committee on establishment of an
International criminal Court», December 8, 1997, pp. 7 - 8.
* 151 Ce qui remettrait en
cause l'une des raisons de l'accélération de la mise en place de
la CPI.
* 152 R. Philips,
« The international Criminal court statute: Jurisdiction and
Admissibility », in (1999) 10 Criminal Law forum, pp. 61-73,
81.
* 153 Article 53 (2) du
statut de Rome.
* 154 Art. 51 (3) du statut
de Rome et Les Règlements 107-110 du règlement de
Procédure et de preuve.
* 155 R. Guillien et J.
Vincent, Lexique des termes juridiques, 14e éd.,
Paris, Dalloz, 2003, pp. 128 et 481
* 156 Cependant, le
paragraphe 10 du Préambule du Statut de la CPI dispose que
« la CPI dont le présent Statut porte création est
complémentaire des juridictions nationales » et l'article
1 ne fait que le répéter.
* 157 Article 17 explique
les termes « manque de volonté » et
« manque de capacité » même si
l'énigmatique adverbe
«véritablement » dépend
entièrement de l'appréciation de la Cour.
* 158 Holmes,
« principle of complementarity », in R. Lee (Ed), The
making of the Rome Statute: Issues-Negociations-Results, The Hague, Kluwer
Law International, 1999., pp. 75-76.
* 159 Cinq cas africains
sont pendants devant la CPI soit sur la saisine du Conseil de
Sécurité (cas Soudan) soit par la saisine des Etats
concernés (RDC, Ouganda, Cote d'ivoire et la République
Centreafricaine)
* 160 Pour mémoire,
des plaintes déposées contre ces hautes personnalités pour
crimes contre l'humanité devant les juridictions belges sur base de la
compétence universelle ont énormément contribué
à la modification de la loi belge du 16 juin 1993. Voir la plainte
contre la campagne américaine en Irak sur
http://www.informationclearinghouse.info/pdf/plainte.pdf
consulté le 22 novembre 2005.
* 161 Le
Pacte international relatif aux droits civils et politiques est entré
en vigueur le 23 mars 1976, conformément aux dispositions de son
article 49.
* 162 R. Badinter,
Projet de loi
constitutionnelle relatif à la cour pénale
internationale (n°318/1998-99) Paris, Sénat, 1999, p.
22
* 163 Y. Mayaud, Droit
pénal général, Paris, PUF, coll. Droit fondamental,
Classiques, novembre 2004, p. 492.
* 164 Ibidem
* 165 J. Pradel, Droit
pénal général, 15e éd., Paris,
Cujas, coll. Manuels, novembre 2004, p. 602.
* 166 AP c. Italy
(n° 204 / 1986), § 7.2
* 167 W. A. Schabas,
op. cit.,, note 34, p. 79
* 168 H. Kelsen,
« Will the judgement in the Nuremberg Trial constitute a Precedent in
International law? », in 1 International Law Quaterly, 1947,
pp. 153-165.
* 169 Procureur c.
Erdemovic, supra.
* 170 Procureur c. Tadic,
op. cit., 2 octobre 1995.
* 171 W. A. Schabas,
op. cit., note 34, p. 71
* 172 SWv CRv, Royaume Uni,
Séries A, N° 325-B, 22 nov. 1995, §35-36 et CRv, Royaume Uni,
Séries A, N° 325-B, 22 nov. 1995, § 32 et 34.
* 173 S. Glaser,
« Le principe de la légalité des délits et des
peines et le procès des criminels de guerre », in Rev. dr.
pén. et crim., 1947-1948, p. 230.
* 174 D. De Vabres,
« Le jugement de Nuremberg et le principe de la
légalité des délits et des peines », Rev. dr
pén. et crim., 1946-1947, p. 813.
* 175 Idem, p.
816.
* 176 J.-F. Roulot, op.
cit., p. 393.
* 177 T. Neroni et R.
Clarck, «Preamble and final clauses» in R. Lee (Ed.), op.
cit., pp. 421-450.
* 178 K. Elbedad et B. Van
Rompu, op. cit.,, p. 65
* 179 S. Bukhari de
Ponctual, op. cit.
* 180 Les récents
actes de l'armée française en Cote d'Ivoire est un cas
emblématique.
* 181 W.
Bourdon, «Tout reste à faire» in Rapport de la FIDH. La
route ne s'arrête pas à Rome, sur
http://www.fidh.org/rapports/r266.htm
, consulté le 11 novembre 2005.
* 182 L. Lee,
« The international Criminal Court and the Security Council :
articles 13 (b) and 16 », in R. Lee (Ed), Op. cit., pp.
143-152.
* 183
« Explanation of vote by India on the Adoption of the Statute of the
International Criminal Court, Rome, July 17, 1998 », p. 3.
* 184 W. A. Schabas,
op. cit., note 34, p. 83.
* 185 « La
décision de placer une mission de paix sous le chapitre VII n'est jamais
facile et le Conseil de Sécurité ne le fait que très
rarement. Aujourd'hui (2004) sur 15 missions de paix en place, il n'y en a que
5 qui sont sous le chapitre VII : RDC, Cote d'Ivoire, Kossovo,
Libéria et Sierre Léone » :H.
Okaré, « Seule, l'application du chapitre VII peut-elle
ramener la paix ? », in Monuc Magazine, n° 16, pp.
16-18.
* 186 Voy. Z. S.
Deen-Racsmany, « The International Criminal Court and the resolution
1422 : Will the Court defer to the Council ? », (2002) 49
Netherlands International Law Revew, p. 378.
* 187 Voy. Procureur c.
DuskoTadic, op. cit., § 37-39.
* 188 X,
« Après l'arrestation de Hissein Habré », sur
http://news.abidjan.net/article/?n=159681
publié le 18 novembre 2005.
* 189 C. Bouquemont, La
Cour pénale internationale et les Etats unis, Paris, l'Harmattan,
2003, p. 102.
* 190 « American
Service Members Protection » (notre traduction)
* 191 Notamment le principe
de la «complémentarité», etc.
* 192 Voy.
FIDH, « Non à l'exception américaine »,
rapport de la position de décembre 2002, pp. 6-8.
* 193 Section 2004 de
l'ASPA: Prohibition of the cooperation with the International criminal
court.
* 194 Section 2007 de la
loi : Prohibition of the US Military assistance to Parties to
International criminal court. Notons que cette menace a dores et
déjà été mise en exécution, puisqu' en
juillet 2003, l'Administration Bush annonçait la suspension de l'aide
militaire américaine en défaveur de 35 pays qui en
bénéficiaient jusque-là. Voy. C. Lesnes, « Les
États Unis durcissent leur campagne contre la cour pénale
internationale », in Le Monde, 3 juillet 2003, passim.
* 195 Section 2005 de
l'ASPA : restriction of the US participation in certain UN
Peacekeeping Operation.
Comme c'est déjà le cas avec la
résolution du Conseil de Sécurité du 01 août 2003,
les soldats américains ont dû obtenir une immunité du
Conseil de Sécurité pour tout acte commis au cours de leur
opération au Libéria. Malgré la grogne de la France, de
l'Allemagne et du Mexique qui n'ont fait que s'abstenir pendant le vote de
cette Résolution.
* 196 C'est de cette
disposition que vient le surnom de « The Hague Invasion
Act » que la Coalition internationale pour la CPI a donné
à l'ASPA. Il est sans rappel que le siège de la CPI se situe
à La Haye et libérer un prisonnier supposerait une action contre
cette ville.
* 197 Section 2015 :
Assistance to international efforts.
Citation intégrale : « Nothing
shall prohibit the United states of America from rendering assistance to
international efforts to bring to justice SADDAM HUSSEIN, SLOBODAN MILOSEVIC,
OSAMA BEN LADEN, other members of Al Qaeda, leaders of Islamic Jihad or other
foreign nationals accused of genocide, war crimes or crimes against
humanity ».
* 198 Section
2003 : Waiver and termination of prohibition.
* 199 C. Bouquemont,
Op. cit., p.106
* 200 À l'exception
des actes de torture.
* 201 Abréviation
anglaise de « Status Of Forces Agreements ». Les SOFAs sont
des accords entre États dont l'un a des forces armées sur le
territoire de l'autre. Ils ont pour but de désigner la juridiction ayant
la compétence de juger d'éventuels crimes commis par les
militaires ainsi stationnés.
* 202 Voy. Le contenu de
l'article 98 en annaxe I.
* 203 C. Trean, «Une
interprétation abusive de l'article 98 du Traité de Rome» in
Le Monde, 4 septembre 2002, p. 2.
* 204 Amnesty
international, « US efforts to obtein impunity for genocide, crimes
against humanity and war crimes », july 2002.
* 205 K. Kittichaisaree,
International criminal law, New York, Oxford University Press, 2001,
p. 50.
* 206 L'objet et le but du
traité de Rome sont clairement définis dans le Préambule
du Statut de la CPI. ; voy. Annexe I.
* 207 L'article 27
s'intitule « Défaut de pertinence de la qualité
officielle ». Si même un chef d'État peut être
poursuivi devant la CPI, nous trouvons risible qu'un simple citoyen
américain ne la soit pas, simplement parce qu'il est ressortissant des
États-Unis.
* 208 Notamment les
articles 86, 87, 89 et 90 du statut de Rome.
* 209 Voy. Notamment J.
Quatremer, «Cour pénale internationale : l'Europe
cède à Washington », in Libération,
1er octobre 2002, p. 16.
* 210 A. Tine,
« Les défis de la Cour pénale
internationale », sur
http://www.frontlinedefenders.org/platform/1404,
consulté le 30 septembre 2005.
* 211 G. Palmisano,
« The International criminal court and the Third states »,
in F. Lattanzi and W. A. Shabas (Eds), Essays on the Rome Statute of the
International Criminal Court, Vol. I, L'Aquila, 1999, pp. 391-426.
* 212 Voy. La
décision de la CIJ sur « Affaire des Activités
Militaires et Paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci » sur
http://www.icj-cij.org/cijwww/ccases/cnus/cnus_cjudgment/cnus_cjudgment_19860627.pdf
consulté le 14 novembre 2005.
* 213 Il ne nous a pas
été permis de tirer une copie de cette lettre auprès du
MINAFFET à cause de sa nature « confidentielle ».
* 214 G. Nesi, «
the obligation to cooperate with the International criminal court and the
states not party to the Statute », in M. Politi and G. Nesi (Eds),
Op. cit., p. 221
* 215 Les articles du Statut
de Rome repris ci-après sont des extraits du document distribué
sous la cote A/CONF.183/9, en date du 17 juillet 1998, et amendé par les
procès-verbaux en date des 10 novembre 1998, 12 juillet 1999, 30
novembre 1999, 8 mai 2000, 17 janvier 2001 et 16 janvier 2002. Le Statut est
entré en vigueur le 1er juillet 2002.
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