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Migrations et impacts socio-économiques à  Béguédo, centre-est, Burkina Faso : 1919-2017


par Thomas Frank Bancé
Université Joseph Ki-Zerbo - Master de recherche 2021
  

Disponible en mode multipage

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UNIVERSITÉ JOSEPH KI-ZERBO BURKINA FASO

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Unité de Formation et de Recherche en Unité-Progrès-Justice

Sciences Humaines (UFR/SH)

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Département d'Histoire & Archéologie

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Option : Histoire économique, Population et Relations internationales

Mémoire de Master

MIGRATIONS ET IMPACTS SOCIO-

ÉCONOMIQUES A BÉGUÉDO, CENTRE-EST,

BURKINA FASO (1919-2017)

Présenté par : Sous la direction de :

Thomas Frank BANCÉ Claude Etienne SISSAO

N° Matricule : 1607335K Professeur Titulaire

Université Joseph KI-ZERBO Année académique 2020-2021

UNIVERSITÉ JOSEPH KI-ZERBO

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Unité de Formation et de Recherche en Sciences Humaines (UFR/SH)

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Département d'Histoire & Archéologie

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Option : Histoire économique, Population et Relations internationales

Mémoire de Master

MIGRATIONS ET IMPACTS SOCIO-

ÉCONOMIQUES A BÉGUÉDO, CENTRE-EST,

BURKINA FASO (1919-2017)

Présenté par : Sous la direction de :

Thomas Frank BANCÉ Claude Etienne SISSAO

N° Matricule : 1607335K Professeur Titulaire

Université Joseph KI-ZERBO

Année académique 2020-2021

DÉDICACE

É

É

É

REMERCIEMENTS

Ce travail est le résultat d'une fructueuse collaboration de plusieurs acteurs à qui nous tenons à témoigner nos sincères reconnaissances pour avoir contribué de quelques manières que ce soit à la réalisation de ce document. Nous disons merci :

À tous les enseignants du département d'Histoire et Archéologie et en particulier ceux du laboratoire SYPERC de l'option Histoire économique, Population et Relations internationales pour leur précieux encadrement et accompagnement durant cette étude.

À notre Directeur de Mémoire, Professeur Claude Étienne SISSAO qui n'a ménagé aucun effort pour nous encadrer, soutenir et se rendre disponible au moment opportun.

Au Docteur Serge Noël OUÉDRAOGO, qui a accepté de nous assister tout le long de la rédaction de ce présent document.

Aux professeurs Willy Moussa BANTENGA et Maurice BAZEMO, de nous avoir initié à la méthodologie de la recherche historique.

À tous nos camarades et collègues d'études du département d'Histoire. Votre appui et vos suggestions nous ont été d'une grande portée.

À notre famille pour sa présence permanente tout au long de nos recherches. Vos encouragements ont renforcé ma détermination pour ce projet d'étude.

À toutes les autorités administratives et aux présidents d'association de la commune de Béguédo pour leur accompagnement au cours de nos différents travaux de terrain, leur aide fut grande.

À la Direction Générale des Burkinabè de l'Extérieur et à l'Institut National de la Statistique et de la Démographie pour la mise à disposition de données quantitatives et qualitatives sur les migrations.

II

SOMMAIRE

INTRODUCTION GÉNÉRALE 1

PREMIÈRE PARTIE : LA PRÉSENTATION DE LA COMMUNE DE BÉGUÉDO 27

Chapitre I_ Situation géographique et caractéristiques de la zone d'étude .29

I_ Cadre physique de la zone d'étude .29

II_ Cadre démographique de la zone d'étude 34

III_ Organisation socio-administrative de la zone d'étude 39

Chapitre II_ Cadre humain et économique de la zone d'étude 42

I_ Composition ethnique, linguistique et religieuse de Béguédo 42

II_ Potentialités économiques de Béguédo .45

DEUXIÈME PARTIE : LE CONTEXTE HISTORIQUE DES MIGRATIONS

INTERNATIONALES DES BISSA 51

Chapitre III_ Aperçu historique des migrations internationales au Burkina Faso 53

I_ Migrations internationales des Burkinabè 53

II_ Gestion des migrations internationales des Burkinabè 64

Chapitre IV_ Historique des migrations internationales des Bissa 70

I_ Aperçu historique des migrations internationales en pays bissa .70

II_ Historique des migrations internationales des Bissa de Béguédo .75

TROISIÈME PARTIE : IMPACTS SOCIO-ÉCONOMIQUES DES MIGRATIONS .80

Chapitre V_ Caractéristiques des ménages de la commune de Béguédo .82

I_ Les caractéristiques sociales des ménages 82

II_ Les conditions économiques des ménages 87

Chapitre VI_ Fonds et investissements dans la commune de Béguédo 98

I_ Les envois de fonds des émigrés à Béguédo .98

II_ Les investissements des émigrés à Béguédo 104

III_ L'approche variée des migrations internationales à Béguédo 112

CONCLUSION GÉNÉRALE 117

Sources et Bibliographie 120

III

SIGLES ET ACRONYMES

AEPS : Adduction d'Eau Potable Simplifiée

AJPB : Association des Jeunes Patriotes de Béguédo

AME : Association des Mères Éducatrices

AOF : Afrique Occidentale Française

APD : Aide Publique au Développement

APE : Associations des Parents d'Elèves

ARBI : Association des Ressortissants de Béguédo en Italie

BADCOM : Bureau d'Assistance au Développement des Communes

BCEAO : Banque Centrale des États de l'Afrique de l'Ouest

BNDT : Base Nationale des Données Topographiques

CEB : Circonscription d'Enseignement de Base

CEDEAO : Communauté Économique des États de l'Afrique de l'Ouest

CERPOD : Centre d'Etudes et de Recherche sur la Population pour le Développement

CHR : Centre Hospitalier Régional

CIGEM : Centre d'Information et de Gestion des Migrations

CISSE : Centre d'Information Sanitaire et de Surveillance Épidémiologique

CM : Centre Médical

CM : Chef de Ménage

CMA : Centre Médical avec Antenne chirurgicale

CNAB : Centre National des Archives du Burkina

COGES : Comité de Gestion des formations Sanitaires

CONAPO : Conseil National de Population

COOPEL/AUE : Coopérative d'Électricité/ Association des Usagers de l'Eau

CRDI : Centre de Recherche pour le Développement International

CSBE : Conseil Supérieur des Burkinabè de l'Étranger

CSPS : Centre de Santé et de Promotion Sociale

CVD : Conseil Villageois de Développement

CVLS : Comité Villageois de Lutte contre le Sida

IV

DGBE : Direction Générale des Burkinabè de l'Extérieur

DREP-CE : Direction Régionale de l'Économie et de la Planification du Centre Est

F CFA : Franc de la Communauté Financière Africaine

FMI : Fonds Monétaire International

HCR : Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés

IDE : Investissement Direct Étranger

IDH : Indice de Développement Humain

INSD : Institut National de la Statistique et de la Démographie

ISSP : Institut Supérieur des Sciences de la Population

MIAEB : Ministère de l'Intégration Africaine et des Burkinabè de l'Extérieur

MIGRINTER : Migration internationale (revue scientifique électronique)

OCDE : Organisation de Coopération et de Développement Economique

OCT : Office Central du Travail

OIM : Organisation Internationale pour les Migrations

OIT : Organisation Internationale du Travail

ORSTOM : Office de la Recherche Scientifique et Technique Outre-Mer actuel IRD : Institut de

Recherche pour le Développement

OTAN : Organisation du Traité de l'Atlantique Nord

PCD : Plan Communal de Développement

PIB : Produit Intérieur Brut

RGPH : Recensement Général de la Population et de l'Habitation

SERF Burkina : Société d'Etudes, de Recherches et de Formation pour le développement

SIAMO : Syndicat Interprofessionnel pour l'Acheminement de la Main d'oeuvre

SONAPOST : Société Nationale des Postes

SP/CONAPO : Secrétariat Permanent du Conseil National de Population

UA : Union Africaine

UEMOA : Union Économique et Monétaire Ouest Africaine

USD : Dollar américain

V

INTRODUCTION GÉNÉRALE

1. La mise en contexte

L'ancienneté, la permanence et l'importance contemporaine du fait migratoire dans le monde et au Burkina Faso particulièrement commandent qu'il fasse l'objet d'études approfondies. Les résultats des différentes opérations démographiques (recensements, enquêtes et études) réalisées sur les migrations au Burkina Faso à partir de la période coloniale montrent qu'il s'agit de « mouvements forcés ou spontanés, individuels ou collectifs, ayant eu au fil des années une ampleur, des formes et des conséquences significatives, en raison notamment des effets conjugués du fait colonial, des mutations socio-économiques et de l'austérité du milieu naturel burkinabè. »1 Les migrations constituent de ce fait des mouvements inscrits au coeur de l'histoire de l'humanité. A ce propos, Hervé DOMENACH affirmait que « La mobilité s'est accrue par-delà les saisons, les climats, les distances, les socio-systèmes, etc. »2

Le phénomène migratoire au Burkina Faso a été marqué par de nombreuses séquences. Pendant la colonisation, la Haute-Volta a été considérée comme un réservoir de main d'oeuvre compte tenu de sa démographie importante. C'est ainsi que de nombreux fils et filles de la Haute-Volta se sont retrouvés impliquer dans des migrations à destination essentiellement de la Gold Coast (actuel Ghana) ou de la Côte d'Ivoire. La migration était essentiellement une migration de travail. Après la période coloniale, la migration du peuple voltaïque se poursuivra dans un contexte différent et vers des destinations variées. Irissa ZIDNABA affirmait à ce propos que : « Pays à forte tradition migratoire depuis l'époque coloniale, les migrations internationales burkinabè [ex voltaïques]3 ont évolué de plusieurs types, passant du type temporaire des années 1970 à celui permanent, créant actuellement des déplacements circulaires entre les pays d'accueil et d'origine, notamment avec la Côte d'Ivoire, le Ghana, l'Italie. »4

1 DABIRE Der Laurent, 2009, Émigration internationale des Burkinabè, Paris, Harmattan, p.5.

2 DOMENACH Hervé,1996, « De la « migratologie » » in Revue européenne de migrations internationales, vol. 12, n°2, p. 77.

3 De sa création le 1 mars 1919 par la France (puissance coloniale) jusqu'au 2 août 1984, le territoire de l'actuel Burkina Faso s'appelait Haute-Volta et sa population, les Voltaïques. Source : Journal officiel du Burkina Faso, n°33 du 16 août 1984.

4 ZIDNABA, Irissa, 2016, Migrations internationales et développement : l'impact socioéconomique des pratiques transnationales des émigrés de Béguédo résidant en Italie, Thèse de doctorat, Département de Géographie, Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, p. 2.

1

Le peuple bissa au Burkina Faso figure parmi les grands adeptes de la migration surtout celle internationale. Le mobile des migrations des jeunes bissa vers l'extérieur demeure la recherche d'un emploi rémunérateur en vue d'améliorer leurs conditions de vie et celles de leurs familles d'origine. C'est ainsi qu'une fois dans le pays d'accueil, des fonds sont rapatriés par les migrants pour leurs familles afin d'améliorer leurs conditions de vie. D'autres migrants, en plus des transferts ordinaires, investissent une partie de leurs capitaux dans des secteurs productifs et bénéfiques avec la volonté de contribuer ainsi au développement économique et social de leur région d'origine. La commune de Béguédo dans la région du Centre-Est burkinabè est celle qui semble avoir le plus bénéficié de cette forme d'investissement en pays bissa. Irissa ZIDNABA observait que « Longtemps considérés comme les maillons manquants au processus de développement de leur pays d'origine, les migrants internationaux sont devenus plutôt de véritables bailleurs de fonds et entrepreneurs au service de leur région. »5

Ce nouveau statut que les migrants occupent dans les pays d'origine conduit de nombreux chercheurs à vouloir comprendre davantage cette interrelation entre la migration et le développement. C'est dans ce contexte que s'inscrit notre étude intitulée Migrations et impacts socio-économiques à Béguédo, Centre-Est, Burkina Faso : 1919-2017. Il s'agira d'aborder la migration internationale à Béguédo pour évaluer l'apport des émigrés dans le développement social et économique de la commune de Béguédo.

2. L'intérêt et la justification du sujet

· Intérêt du sujet

Cette étude suscite de l'intérêt pour nous car les enjeux de développement social et économique engendrés par les migrations dans le pays bissa méritent d'être parcourus. Malgré l'ancienneté, l'ampleur, et la constance du phénomène migratoire, nous avons toujours voulu connaitre et faire connaitre les contours de ce phénomène au Burkina Faso et particulièrement à Béguédo à travers une approche historique. Cette approche nous permettra d'appréhender d'une part les mobiles, les typologies, les aspects de la migration internationale des habitants de Béguédo et d'autre part l'évolution historique de la migration. En outre, les changements socio-politiques, culturels et économiques générés par les migrations internationales à Béguédo nous

5 ZIDNABA, Irissa, Idem, p. 1.

2

laissent percevoir une relation consubstantielle entre la migration et le développement. Il est de notre intérêt ainsi d'évaluer l'impact des migrations internationales des Bissa sur le développement local de Béguédo entre 1919 à 2017. Dans cette étude, nous mettrons plus en lumière les impacts positifs que ceux négatifs.

· Justification du sujet de recherche

Tout d'abord, la revue de littérature sur la migration nous a révélé que le phénomène migratoire a fait l'objet de plusieurs études. Les auteurs de ces études étaient tantôt des spécialistes du métier (démographes, historiens, sociologues, ethnologues, géographes, anthropologues, organismes spécialisés, etc.) tantôt des amateurs du phénomène (les journalistes, les administrateurs, les politiques, etc.). Ils ont, à travers leurs oeuvres, développé plusieurs problématiques sur la migration à Béguédo et/ou l'impact des migrations sur Béguédo mais celles ayant bénéficiées d'une approche historique abondent très peu. Aborder la présente étude dans sa profondeur historique se révèle être une épreuve motivante pour nous.

Ensuite, une autre raison ayant conduit au choix du sujet est notre désir de contribuer à la réalisation d'études et de recherche sur les migrations comme recommandée par la Stratégie Nationale de Migration6 à travers le Programme 4 de son Plan d'action pour la période 20142016 : « La connaissance de la migration reste un défi à relever en permanence. Il s'avère nécessaire, dans un souci de mesure de l'impact de la migration, d'en approfondir la connaissance au double plan qualitatif et quantitatif. »7

A juste titre, Bernard DANTIER dans ses Textes de méthodologie en sciences sociales note que « Les historiens contemporains, plus que leurs prédécesseurs, ont sur leur travail une attitude réflexive. Ils observent, mettent en question et étudient leurs méthodes et leurs finalités presque autant qu'ils observent, mettent en question et étudient la matière et la forme de cette histoire qu'ils se donnent pour tâche de connaître et de faire connaître. »8 En effet, nos origines ethniques nous ont motivés à entreprendre la présente étude sur les migrations et leurs impacts socio-économiques à Béguédo. Issu du cadre d'étude de notre thème, nous avions aimé étudier

6 Elaborer en 2016 et adoptée officiellement le 8 février 2017, elle est le nouveau référentiel en matière de migration au Burkina Faso. Elle est accompagnée par l'OIM et financée par l'Union Européenne.

7 Ministère de l'Economie et des Finances, 2013, Stratégie Nationale de Migration 2014-2025, Projet, p.43.

8 DANTIER Bernard, 2005, Comment écrit-on l'histoire ? Paul Veyne et la construction d'intrigues, Paris, Col. Les classiques des sciences sociales, p. 3.

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les causes, les variantes et l'évolution du phénomène migratoire dans la commune de Béguédo mais aussi les retombés des pratiques migratoires sur le développement communal de Béguédo.

· Délimitation du sujet

Dans Apologie pour l'histoire ou Métier d'historien, Marc BLOCH9 définit l'histoire comme « la science des hommes dans le temps. ». Et cette définition revêt trois caractères importants de l'histoire : la société, la chronologie et l'espace. On en déduit que toute approche historique nécessite une prise en compte d'une dimension temporelle et spatiale de la question étudiée. C'est à cet effet que nous avons décidé d'étudier le présent sujet « Impacts socio-économiques des migrations » dans l'espace géographique de « Béguédo, Centre-Est, Burkina Faso » durant la fourchette chronologique de « 1919 à 2017 ».

Le choix porté sur la commune de Béguédo comme cadre d'étude s'explique à plus d'un titre :

- Béguédo est l'une des 30 communes de la région du Centre-Est. Elle est peuplée en majorité par l'ethnie bissa, « une ethnie très réputée pour les migrations internationales depuis les années 1970. » 10 Autrement dit, la commune apparaît comme une référence en matière de migration à l'extérieur (nombre de migrants) en comparaison aux vingt-neuf autres communes de la région. En 2006, la région du Centre-Est était la deuxième principale zone de départ des Burkinabè à l'émigration avec 12,3% du total des émigrés (même pourcentage que la région du Sud-Ouest)11.

- En outre, à l'opposé des villages administratifs du département de Béguédo, Béguédo est le chef-lieu du département et regroupe à cet effet la plupart des infrastructures politico-religieuse, socio-économique et culturelle. Le département connait également des mutations sans précédent. En plus de son évolution démographique, on constate un développement particulier des infrastructures sociocommunautaire, immobilière et commerciale. La commune de Béguédo constitue de ce fait un cadre spatial adéquat pour la mise en lumière de plausibles effets de la migration.

9 BLOCH Marc, 1949, Apologie pour l'histoire ou Métier d'historien (Cahiers des Annales, 3), Paris, Librairie Armand Colin, p. 18.

10 BANGRE Éric-Bertrand Pasba, 2005, Les migrations internationales des Bissa en Italie : réseau, stratégie et parcours migratoire, Mémoire de maitrise en Sociologie, Université de Ouagadougou, p. 8.

11 Institut National de la Statistique et du Développement (INSD), 2008, Recensement Général de la Population et de l'Habitat (RGPH) de 2006. Résultats définitifs, Ouagadougou, p. 77.

4

- Enfin, en tant que natif de la région bissa, ce choix est une opportunité pour nous de montrer la dynamique du courant migratoire et l'impact que peut avoir la migration internationale sur le développement de la ville de Béguédo en particulier et du pays bissa en général. Notre connaissance de la langue locale constitue un autre atout précieux pour mener à bien ce travail.

En ce qui concerne la fourchette chronologique de l'étude, nous avons retenu la période de 1919 à 2017 pour plusieurs raisons :

- L'année 1919, correspondant à la création de la colonie de Haute-Volta le 1er mars 1919. La gestion socio-politique et économique de la nouvelle colonie par la puissance coloniale (la France) conduira des milliers de Voltaïques à l'émigration vers les autres colonies françaises de l'Afrique Occidentale Française (AOF) mais également vers les colonies britanniques.

- L'année 2017, faisant allusion à la date d'adoption officielle de la Stratégie Nationale de Migration. Cette stratégie, élaborée en 2016 mais adoptée en 2017, est la première de toute l'histoire des migrations au Burkina Faso. Établi sur une période de dix ans, soit de 2016 à 2025, le Gouvernement à travers cette stratégie veut parvenir à un développement humain durable, à travers une gestion cohérente, intégrée et concertée des migrations. Avant que les actions de cette Stratégie nationale ne se déploient sur le terrain, nous avons trouvé utile de faire un point de toutes les actions posées au préalable en matière de migration au Burkina Faso.

3. La définition des concepts de la recherche

L'étude du sujet sur les migrations et leurs impacts requiert la clarification des concepts et déterminants clés qui y sont rattachés. Ces concepts sont entre autres : migration ; flux migratoire ; impact socio-économique ; développement ; transferts de fond ; investissement.

· Migration

L'Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) à travers son Glossaire de la migration définit la migration comme le « déplacement d'une personne ou d'un groupe de personnes, soit entre pays, soit dans un pays entre deux lieux situés sur son territoire. La notion de migration englobe tous les types de mouvements de population impliquant un changement du

5

lieu de résidence habituelle, quelles que soient leur cause, leur composition, leur durée, incluant ainsi notamment les mouvements des travailleurs, des réfugiés, des personnes déplacées ou déracinées. »12 La migration selon l'Institut National de la Statistique et du Développement (INSD) est un « un changement de résidence habituelle d'un individu (d'une localité à une autre), pendant une durée effective d'au moins six mois, ou avec l'intention de l'effectuer. »13 Le concept de migration est donc un concept multicritère dont les critères de définition sont l'espace (la notion de distance entre les zones de déplacement), la résidence (en rapport avec le lieu et le séjour), la durée (la dimension temporelle de la migration et qui pose la nécessité d'une définition d'une période de référence), l'activité (en rapport avec le changement de lieu d'activité engendré par la migration).14 Ainsi, on parlera tantôt de migration interne et de migration externe.

Le Glossaire de la migration définit la migration interne comme le « mouvement de personnes d'une région d'un pays à une autre afin d'y établir une nouvelle résidence. Cette migration peut être provisoire ou permanente. » et la migration externe ou internationale comme le « mouvement de personnes qui quittent leur pays d'origine ou de résidence habituelle pour s'établir de manière permanente ou temporaire dans un autre pays. Une frontière internationale est par conséquent franchie. »15 Quand on s'appesantit sur la migration internationale, selon qu'une personne se situe au lieu de départ ou au lieu d'arrivée de l'individu qui effectue une migration, cette personne parlera d'émigration ou d'immigration. L'émigration est l'action de quitter son État de résidence pour s'installer dans un État étranger16 alors que l'immigration est l'action de se rendre dans un État dont on ne possède pas la nationalité avec l'intention de s'y installer.17

Dans le cadre de notre étude, le migrant (pour désigner plus l'émigrant) désigne tout individu originaire de la commune de Béguédo qui est en déplacement provisoire ou définitif hors du Burkina Faso et maintient des liens sociaux, économiques et culturels avec sa terre de départ. Il est donc en situation de migration internationale.

12 Organisation Internationale pour les Migrations, 2007, Glossaire pour la migration, Droit international de la migration n°9, Genève, OIM, p.47.

13 Institut National de la Statistique et du Développement (INSD), 2000, Analyse des résultats du recensement général de la population et de l'habitation de 1996, Volume II, Ouagadougou, p. 127.

14 YABRE N. Baowenison, 2010, Contribution des émigrés Bissa en Italie au Développement de la ville de Béguédo, Mémoire de maitrise, Département de Géographie, Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, p. 14.

15 Organisation Internationale pour les Migrations, 2007, op.cit., p. 49.

16 Organisation Internationale pour les Migrations, Idem, p. 26. 17Organisation Internationale pour les Migrations, Ibidem, p. 38.

6

· Flux migratoire

Par flux migratoire, Le Petit Robert désigne un « mouvement de population de grande ampleur. »18 Quant au Petit Larousse, il évoque l'idée des « dispositifs spatiaux qui assurent la circulation par exemple des biens, des personnes et de l'information ».19 Selon la base de données des termes clés de la migration de l'Organisation Internationale pour la Migration, les flux migratoires renvoient au « nombre de migrants internationaux arrivant dans un pays (immigrants), ou le nombre de migrants internationaux quittant un pays (émigrants) pendant une période déterminée. »20 Autrement dit, les flux migratoires correspondent au nombre de migrants entrant ou sortant du Burkina Faso à une période donnée.

· Impact socio-économique

Le concept impact socio-économique est un concept qui prend en compte l'impact social et l'impact économique. Selon le Dictionnaire Le Grand Robert, l'impact est un « effet, une influence »21. Autrement dit, l'impact est l'effet ou le retentissement produit par un phénomène sur un autre phénomène. Selon le site wikipédia.org, l'impact désigne « les retentissements (indirects ou non) d'un évènement, d'un processus, d'une activité, d'une infrastructure sur l'environnement, la santé, la société, l'économie, etc. »22

L'impact social ou l'impact économique correspondant à l'ensemble des influences d'un évènement ou d'une activité sur un milieu social ou un milieu économique. Ainsi, dans la présente étude, l'impact socio-économique désigne l'ensemble des effets positifs (directs et indirects) et négatifs de l'émigration des fils et filles de Béguédo sur le développement social et économique de la commune. Mais tout au long de cette étude, nous allons nous attarder plus sur les impacts positifs de l'émigration qu'aux impacts négatifs.

18 REY-DEBOVE Josette, REY Alain (dir.), 2012, Le Petit Robert, Paris, Editions Les Presses de Jouve, p. 428.

19 Petit Larousse illustré, 2013, Paris, Larousse, p. 560.

20 https://www.iom.int/fr/termes-cles-de-la-migration consulté en ligne le 29 juillet 2019 à 18h24mn.

21 Le Grand Robert, 2005, Paris, Editions Le Robert, [version électronique].

22 https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Impact consulté en ligne le 02 août 2021 à 20h12.

7

· Développement

Le développement désigne, selon le Dictionnaire Le Petit Robert, « l'action de développer, de déployer quelque chose. »23 Dans Le Dictionnaire des sciences humaines, les auteurs expliquent que « Le développement concerne un champ d'intérêt vaste, allant du développement humain jusqu'au développement économique. Le terme même s'apparente le plus souvent au mot progrès, même si le sens du mot dépend du domaine dans lequel on l'utilise : économie, géographie, politique, mathématique, clinique, photographie, etc. »24 Irissa ZIDNABA dans sa thèse de doctorat unique pense que « Le développement désigne tout processus d'accroissement des capacités d'un individu, d'un ménage ou d'une collectivité territoriale permettant de satisfaire de façon autonome les besoins indispensables tels que l'alimentation, l'éducation, la santé, le cadre de vie, les moyens de déplacement, la sécurité, etc. »25 Dans le cadre de cette étude, nous retenons la définition précédente comme adaptée à la notion de développement dans la commune de Béguédo.

· Les transferts de fonds

Pour l'OIM, les transferts de fonds ou rapatriements de fonds désignent tous « les transferts monétaires effectués par les migrants individuellement ou collectivement vers leur pays d'origine »26. Cependant, quand on se connecte au Portail sur les données migratoires : Pour une perspective globale27, on peut lire ceci : « Le rapatriement de fonds, généralement compris comme l'argent ou les biens que les migrants envoient à leur famille et à leurs amis dans leur pays d'origine, constitue souvent le lien le plus direct et le plus connu entre migration et développement. »28 Le portail renchérit en disant que « les envois peuvent également être de nature sociale : les migrants peuvent apporter à leur communauté d'origine un capital social ou

23 REY-DEBOVE Josette, REY Alain (dir.), 2012, op.cit., p. 316.

24 MESURE Sylvie, SAVIDAN Patrick (dir.), 2006, Le dictionnaire des sciences humaines, Paris, Editions France Quercy, p. 269.

25 ZIDNABA, Irissa, 2016, op.cit., p. 39.

26 https://www.iom.int/fr/termes-cles-de-la-migration consulté en ligne le 29 juillet 2019 à 18h40mn.

27 Le Portail mondial sur les données migratoires est un tableau de bord numérique présentant une série d'outils pour aider les décideurs politiques, les responsables nationaux de statistiques, les journalistes et le grand public à accéder aux dernières données sur la migration. Il est hébergé par l'Organisation Internationale pour les Migrations.

28 https://www.migrationdataportal.org/fr/themes/rapatriements-de-fonds#definition consulté en ligne le 01 août 2021 à 19h00.

8

des idées, comportements, identités et connaissances acquis pendant leur séjour dans une autre partie du pays ou à l'étranger. »29

Tout au long de cette étude, la notion de transferts de fonds désignera l'ensemble des envois d'argent effectués par les émigrés en destination de leurs familles restées à Béguédo. En effet dans cette commune, les envois de fonds se résumeront aux transferts monétaires effectués à titre individuel par un émigré bissa au profit de ses proches dans son pays d'origine. Il peut s'agir souvent de fonds à investir ou à épargner par le migrant (épargne) dans son pays d'origine.

· Investissement

Etymologiquement, le mot investissement est issu du verbe investir, lui-même issu du latin investire qui veut dire employer, utiliser (une somme, des capitaux) à quelque chose30. Le mot a plusieurs sens. Il désigne l'action d'investir (une place, une ville, une armée) ; c'est aussi le résultat de cette action31. En économie politique, l'investissement désigne l'action d'investir dans une entreprise des capitaux destinés à son équipement, à l'acquisition de moyens d'équipement ; résultat de cette action32. Selon le Dictionnaire le Petit Larousse, investissement signifie l'ensemble des capitaux, des biens investis33.

Mais quand on parle d'investissement migratoire, Irissa ZIDNABA dans sa Thèse de doctorat unique observe que « Le concept d'investissement migratoire fait référence à l'usage ou l'affectation des fonds transférés par les migrants dans des domaines productifs ou sociaux. »34 Autrement dit, c'est l'ensemble des fonds injectés par les migrants dans un domaine politique, économique, social ou culturel dans le but de les fructifier ou d'obtenir une amélioration de la situation initiale. Cette définition fait ressortir l'obligation d'effectuer une action bénéfique. Dans notre étude, nous analyserons principalement deux types d'investissements issus de la migration : les investissements collectifs et les investissements individuels. Les investissements collectifs désignent les biens investis par un groupe d'émigrés de Béguédo au profit de toute la commune tandis que les investissements individuels renvoient aux capitaux investis par l'émigré au profit de sa famille ou de sa terre d'origine.

29 https://www.migrationdataportal.org/fr/themes/rapatriements-de-fonds#definition, Idem.

30 Le Grand Robert, 2005, op.cit., [version électronique].

31 Le Grand Robert, Idem.

32 Le Grand Robert, Ibidem.

33 Petit Larousse illustré, 2013, Paris, Larousse, p. 970.

34 ZIDNABA, Irissa, 2016, op.cit. p. 38.

9

4. L'état de la question

Dans le milieu des sciences humaines, il est recommandé au chercheur d'effectuer une lecture profonde de la littérature existante avant toute recherche scientifique. C'est dans cette mesure que, dans le cadre de notre approche historique du thème Migrations et impacts socio-économiques à Béguédo, Centre-Est, Burkina Faso : 1919-2017, nous avons lu et exploité quelques travaux de nos prédécesseurs. Cette étape nous a permis de mener une approche différente des premières approches sur la question de recherche.

Au Burkina Faso (ex Haute-Volta), les études centrées sur la migration des Burkinabè (ex Voltaïques) ont débuté pratiquement dans les années 70. Il s'agit tout d'abord d'enquête démographique urbaine migratoire conduite par l'Etat et ses principaux partenaires afin de comprendre les enjeux démographique, économique, social et culturel de la migration interne et externe sur les populations du pays. Les auteurs sont entre autres le CERPOD35, ORSTOM36 ou encore des Ministères étatiques37. Ensuite, de nombreux chercheurs vont rédiger des articles scientifiques, des ouvrages, des mémoires et même des thèses de doctorat. On note l'article de Issiaka MANDE38 et celui de Claude Etienne SISSAO39 portant sur les fondements historiques de l'émigration internationale des Burkinabè. Les mobiles, les zones de départ, les flux migratoires et l'évolution historique des courants migratoires voltaïques y sont clairement développés. Sidiki COULIBALY, Joel GREGORY et Victor PICHE40 présentent dans leur ouvrage les résultats de l'enquête nationale sur les mouvements migratoires en Haute-Volta. La thèse de doctorat unique

35 CERPOD, 1995, Enquête Migration et Urbanisation au Burkina Faso (EMUBF), 1993, rapport national descriptif, Ouagadougou, INSAH-CILSS, 350 p.

36 Enquête sur les Mouvements de Population à partir du Pays Mossi (Haute-Volta), 1975, Les Migrations Internes Mossi, des aires-refuges du passé aux « terres neuves » d'aujourd'hui, ORSTOM, Fascicule I, 212 p. ou encore Enquête sur les Mouvements de Population à partir du Pays Mossi (Haute-Volta), 1975, Les Migrations Mossi, une société bousculée par son destin, Rapport de synthèse, ORSTOM, Fascicule I, 52 p.

37 Ministère de l'Économie et du Développement, 2006, Bilan global des migrations au Burkina Faso : panorama rétrospectif et tendances actuelles, Symposium sur les migrations au Burkina Faso, 13 au 15 juillet 2006, Rapport final, Secrétariat Permanent du Conseil National de la Population, 42 p. ou encore

Ministère de l'Économie et des Finances, 2013, Stratégie Nationale de Migration 2014-2025, Projet, 56 p.

38 MANDE Issiaka, 1995, « Les migrations de travail des Voltaïques. Une panacée pour l'économie ivoirienne de 1919 à 1960, in MASSA Grégory et MADIEGA Georges (sous la dir.), La Haute Volta coloniale : témoignages, recherches, regards, Paris, Khartala, pp. 313-339.

39 SISSAO Claude Etienne, 2012, « Esquisse sur les migrations au Burkina Faso : manifestation face aux normes de la période coloniale à nos jours », in MANDE Issiaka, Le Burkina Faso contemporain ; racines du présent et enjeux nouveaux, Paris, Harmattan, pp. 67-84.

40 COULIBALY Sidiki, GREGORY Joel et PICHE Victor, 1980, Les migrations voltaïques, Tome 1, Importance et ambivalence de la migration voltaïque, Ottawa, CRDI, 144 p.

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de Issiaka MANDE41 ou celle de Serge Noël OUÉDRAOGO42 ont le mérite d'avoir établi une approche historique des migrations voltaïques (actuel burkinabè) avec des thématiques sur l'origine des courants migratoires, la gestion du courant, la dynamique des flux migratoires, les stratégies d'insertion des immigrés ou encore la diaspora burkinabè vivant au Ghana et en Côte d'Ivoire.

Toutes ces études sur la migration des Burkinabè nous ont beaucoup guidé même s'il y a eu une prédominance des études sur la migration des Moose par rapport à celles menées sur les Bissa.

En ce qui concerne les études sur les impacts socio-économiques des migrations internationales sur la commune de Béguédo, il faut dire que la question a été abordée surtout par certains auteurs, des sociologues ou encore des géographes.

Ainsi, Paul LAHUEC43, est l'un des pionniers à conduire une étude sur le peuple bissa. Il a eu le mérite de présenter dans son ouvrage les courants migratoires de deux peuples : la mobilité humaine du peuple mossi et la mobilité humaine du peuple bissa. Il est suivi par Jean-Benoît HAZARD44, qui a mené une étude approfondie (thèse de doctorat) sur le Bisaku45. Dans ces travaux, on y retrouve l'historique du peuplement de l'espace bisaku, la diversité ethnique, la mobilité humaine et les trajectoires des migrations internationales.

Des chercheurs nationaux ont également travaillé sur la zone d'étude (Béguédo) tout en mettant en exergue l'interrelation qui existe entre migrations et développement. Le sociologue Éric-Bertrand BANGRE46 a développé la question de la migration des Bissa vers l'Italie dans son

41 MANDE Issiaka, 1996-1997, Les migrations du travail en Haute-Volta (actuel Burkina Faso), mise en perspective historique (1919-1960), thèse de doctorat unique, Dynamique comparée des sociétés en développement, Université Paris 7 Dénis Didérot, 307 p.

42 OUÉDRAOGO Serge Noël, 2016-2017, La migration des Burkinabè (Voltaïques) vers le Ghana (Gold Coast) de 1919 à 2010 : origines, gouvernances migratoire et stratégies d'intégration, thèse de doctorat, Histoire africaine, Université Ouaga 1 Professeur Joseph KI-ZERBO, 540 p.

43 LAHUEC Jean-Paul, et al., 1979, La mobilité du peuplement bissa et mossi, Paris, ORSTOM, 149 p.

44 HAZARD Benoît, 2007, L'aventure des Bisa dans les ghettos de `'l'Or rouge» (Burkina Faso- Italie) : trajectoire historique et recomposition des réseaux migratoires burkinabè dans la région des Pouilles, thèse en anthropologie sociale et ethnologie. Ecoles des Hautes Etudes en Sciences Sociales, Paris, 1360 p. ou encore

HAZARD Benoît, 2004, op.cit., 16 p.

45 Le terme Bisaku traduit littéralement en langue bissa signifie pays bissa, « Bisa- » pour Bissa et « -Ku » pour pays. En d'autres termes, le territoire bissa. Cependant, si l'on veut désigner plusieurs territoires où vivent des Bissa, on parlera de Bisanoku pour dire pays des Bissa.

46 BANGRE Éric-Bertrand Pasba, 2005, op.cit. 116 p.

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mémoire. Les géographes Baowenison YABRE47 et Irissa ZIDNABA48 ont eu le mérite d'étudier la migration en pays bissa mais aussi l'impact des pratiques transnationales sur le développement local de la commune. Il faut noter que ces données qualitatives sont appuyées par la disponibilité des données quantitatives élaborées par les structures nationales et internationales en charge des statistiques sur les populations.

D'une manière générale, les réflexions sur les migrations au Burkina Faso et leurs impacts sur le développement sont relativement importantes en nombre et riches en données. Toutefois, le cadre spatial choisi n'a pas toujours été la commune de Béguédo. Et dans le cas où l'étude des migrations porte sur Béguédo, une approche historique manque dans les analyses. C'est pour cette raison que nous avons éprouvé le besoin d'effectuer une analyse historique sur l'impact social et économique des migrations internationales sur la commune de Béguédo.

5. La problématique du sujet

Une problématique fait allusion à l'existence d'une ou plusieurs questions sur un sujet de recherche. « Et l'ensemble des questionnements, des hypothèses de recherche, des réflexions qui se construiront autour de cette question de recherche constituent la problématique » selon Michel BEAUD49.

· La question principale

Une étude sur les migrations cherchera à répondre nécessairement à une question posée. De ce fait, une mise au jour sur la question des migrations au Burkina Faso et de leurs impacts étaient d'emblée nécessaire. L'étape qui nous a permis donc de nous imprégner des contours du sujet et d'aboutir à la structuration de la problématique de notre sujet d'étude. La question principale qui se dégage est de savoir : En quoi les migrations internationales ont un impact sur le développement social et économique de la commune de Béguédo ?

De cette question principale, résulte d'autres interrogations : Quelles sont les caractéristiques socio-économiques des ménages à Béguédo ? Quel est l'état des transferts de fonds des émigrés de Béguédo dans leur pays d'origine ? Quels sont les investissements réalisés

47 YABRE N. Baowenison, 2010, Contribution des émigrés bissa en Italie au développement de la ville de Béguédo, mémoire de maîtrise, Département de Géographie, Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, 146 p.

48 ZIDNABA, Irissa, op.cit. 271 p.

49 BEAUD Michel, 2006, L'art de la thèse : comment préparer et rédiger un mémoire de master, une thèse de doctorat ou tout autre travail universitaire à l'ère du net, Editions la Découverte, Paris, p. 55.

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par les émigrés bissa à Béguédo ? Ainsi, de telles interrogations requièrent la formulation de réponses adaptées.

· Les objectifs

Dans le cadre de cette étude, l'objectif général est d'évaluer la contribution des migrants bissa sur le développement social et économique de la commune de Béguédo.

Outre cet objectif principal, il sera question de faire une analyse comparée des conditions de vie des familles ayant des émigrés et celles n'ayant pas d'émigrés. Enfin, nous présenterons les différents types d'investissements sociaux et économiques réalisés dans la ville de Béguédo.

· Les hypothèses

Notre hypothèse principale est que les émigrés bissa apportent une contribution au développement social et économique de la ville de Béguédo.

Les hypothèses secondaires qui résultent de notre hypothèse générale sont que premièrement, la comparaison des ménages révèle que les familles ayant des émigrés ont de meilleures conditions de vie que celles n'en ayant pas. Deuxièmement, on constate que chaque année, pour des motifs variés, les émigrés réalisent d'importants transferts monétaires à Béguédo par le biais de divers canaux d'envois. Troisièmement, une bonne partie des fonds issus de l'émigration des Bissa est investie dans les domaines éducatif et immobilier de la ville de

Béguédo.

6. La méthodologie de recherche

Pour la réalisation de la présente étude, nous avons adopté une méthodologie de travail. Cette méthodologie a nécessité la réalisation de recherche documentaire d'une part et d'autre part, la réalisation d'enquêtes de terrain. L'objectif était de collecter et analyser toutes les données quantitatives et qualitatives sur la question abordée dans le sujet de recherche.

6.1. La recherche bibliographique

L'une des composantes essentielles de la méthodologie de recherche historique pour le chercheur réside dans la phase de documentation de son thème de recherche. C'est dans cet élan que nous avons parcouru plusieurs bibliothèques, des centres de documents, des instituts ou encore des structures administratives ; tous localisés au Burkina Faso.

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La recherche documentaire a commencé d'abord dans les bibliothèques et Centres d'archives. On a la Bibliothèque Universitaire Centrale (BUC) de l'Université Joseph Ki-Zerbo où nous avons consulté essentiellement les Dictionnaires et Atlas ; ensuite le Centre National des Archives du Burkina Faso où nous avons eu accès aux documents de première source et aux ouvrages relatifs aux enquêtes des années 70 menées sous l'égide du Gouvernement. Également, nous avons fait recours à la Bibliothèque Cheick Anta Diop du Département d'Histoire et Archéologie de l'Université Joseph Ki-Zerbo afin d'avoir accès aux mémoires de maitrise et de master et aux thèses de ce département. Enfin, la pluridisciplinarité en histoire étant importante, nous avons exploré les Bibliothèques des autres filières de formation de l'Université Joseph Ki-Zerbo. Ce sont la bibliothèque du Département de Géographie et celle du Département de Sociologie.

Quant aux centres d'archives, c'est le Centre National des Archives du Burkina Faso qui a été visité. Ce centre, réputé pour être une source immense d'archives et d'ouvrages généraux sur la plupart des thématiques, nous a permis de collecter des données sur la migration durant la période coloniale et au lendemain des indépendances.

En outre, nos investigations nous ont conduits dans des structures et des services tels que l'Institut National de la Statistique et de la Démographie (INSD) sis à Ouaga 2000 où nous avons pu consulter les données statistiques sur la population du Burkina Faso mais aussi sur la région du Centre-Est. Ensuite, nous nous sommes rendus à la Direction Générale des Burkinabè de l'Extérieur (DGBE)50 où nous avons eu accès à la documentation disponible sur la diaspora burkinabè et ses actions de développement. La bibliothèque de l'Institut Supérieur des Sciences de la Population (ISSP) a fait l'objet d'investigation. Toujours dans cette démarche méthodologique, nous nous sommes rendus dans les locaux de la Préfecture et de la Mairie de Béguédo. Sur ces lieux, nous avons eu des interviews fructueux avec les premiers responsables et des mises en contact par la suite avec des personnes ressources pour notre étude. La documentation disponible sur la ville a été mise à notre disposition. Leur coopération nous a été d'une aide incommensurable.

50 La Direction Générale des Burkinabè de l'Extérieur est une des directions générales placée sous l'égide du Ministère de l'Intégration Africaine et des Burkinabè de l'Extérieur.

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6.2. La recherche des sources orales

Serge Noël OUÉDRAOGO disait que : « Les sources orales sont des sources qui occupent une place de choix dans l'écriture de l'histoire africaine. »51 Au regard donc de l'importance des sources orales pour notre recherche, nous avons effectué des enquêtes orales et entretiens sur terrain pour compléter ou renforcer les sources écrites parfois limitées. Pour commencer, nous avons initié un premier déplacement à Béguédo du 20 septembre au 23 septembre 2018 pour entrer en contact avec les personnes ressources à notre étude et établir les premiers contacts de communication. Deux autres phases de travail ont suivi : du 15 août au 20 septembre 2019 et du 20 au 27 octobre 2019. Ces deux dernières phases (périodes de collecte de données) ont été consacrées à la réalisation des enquêtes dans les ménages de la commune de Béguédo et auprès des autorités administratives, coutumières et religieuses. Pour ce faire, des questionnaires ont été élaborés et adressés aux ménages, aux émigrés séjournant, aux responsables administratifs et aux responsables religieux-coutumiers. Des échanges constructifs ont été entretenus tout au long de notre travail de recherche avec des personnes ressources. Ces personnes nous fournissaient des informations complémentaires et des orientations sur des questions auxquelles nous étions sans réponses.

Les sources orales nous ont été d'une importance incommensurable dans la mesure où elles nous ont permis de récolter des informations sur l'impact (positif et négatif) social et économique des migrations internationales dans le pays bissa.

6.3. L'analyse des sources

6.3.1. Les sources archivistiques

Considérées comme des sources de premières mains, les archives ont mis à notre disposition des données sur le phénomène migratoire de la période précoloniale à la période coloniale. Serge Noël OUÉDRAOGO affirme ceci : « Produites surtout par les administrations, les archives sont une mine d'information pour le chercheur. »52 Nous avons consulté au Centre National des Archives du Burkina Faso, des archives en lien avec la gestion coloniale et postcoloniale des migrations. Ce sont :

51 OUÉDRAOGO Serge Noël, 2016-2017, op.cit., p. 21.

52 OUÉDRAOGO Serge Noël, 2016-2017, op.cit., p. 18.

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- La série 3V, nommée « Répertoire numérique du fonds de l'Afrique Occidentale Française (A.O.F.) / Territoire de la Haute-Volta (1931-1958 et 1958-1974) » ;

- La série 42V, intitulée « Répertoire numérique du fonds du Ministère de l'intérieur, rubrique «A.O.F.» (1852-1960) » ;

- La série 44V, intitulée « Répertoire numérique du fonds du Ministère de l'intérieur, rubrique « A.O.F » (1895-1960) » ;

- La sous-série 2G qui porte sur les rapports périodiques des gouverneurs et chefs de service de 1904 à 1957 en Haute-Volta.

Tous ces répertoires contiennent des informations sur les lois, les décrets, les rapports, les procès-verbaux, les missions, les correspondances, ou encore les circulaires de la Haute-Volta de 1852 à 1974.

6.3.2. Les sources orales

Les sources orales de cette étude proviennent des enquêtes de terrain réalisées.

Ø Population d'enquête

La population de la commune de Béguédo a été notre population cible dans cette étude mais l'enquête de terrain a concerné trois types de structures sociales : les ménages, les émigrés et les autorités. La première structure sociale de la commune touchée a été les autorités coutumières, les autorités administratives et les autorités religieuses de la commune de Béguédo. Ensuite, les ménages ont été abordés. L'enquête sur les ménages de Béguédo a consisté à adresser un questionnaire sur deux types de ménages : les ménages n'ayant pas de migrants et les ménages ayant des migrants avec pour objectif d'établir une comparaison entre les deux ménages. Pour finir, nous avons eu des entretiens avec des émigrés en vacances ou des émigrés de retour de l'aventure.

Ø Echantillonnage

Conscient de l'importance de produire une étude qualitative et quantitative, nous avons accordé une place importante à l'échantillonnage de notre population. Les derniers chiffres officiels sur le nombre de ménages de la commune de Béguédo datant du RGPH de 2006 (3 267

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ménages)53, nous avons travaillé sur un échantillon de 320 ménages enquêtés, soit 10% du nombre total de ménages. Avec ce pourcentage, nous espérons atteindre de meilleures représentations de la population et réaliser des analyses plus englobantes. Toutefois, n'eut été nos moyens limités, cet échantillon aurait connu un plus grand taux. Parallèlement, une vingtaine d'entretiens ont été menés à Béguédo, Garango et Ouagadougou.

Ø Outils de recueil de données54

Plusieurs outils ont été utilisés dans le cadre de la collecte des données sur le terrain avec pour objectif de recueillir des données sur les conditions socioéconomiques des ménages et sur l'impact des émigrés dans le développement de la commune. Il y a eu entre autres :

§ Une fiche de questionnaire : autour d'une quarantaine de questions, cette fiche adressée aux 320 chefs de ménages a permis d'avoir des informations quantitatives sur les conditions de vie sociale et économique de chaque ménage enquêté ;

§ Un guide d'entretien semi-directif : une vingtaine de personnes (autorités, responsables d'associations, émigrés) a accepté échanger avec nous. Ces échanges ont été le lieu d'expression de leurs perceptions, leurs observations, leurs suggestions et leurs expériences sur le phénomène migratoire à Béguédo ;

§ Un magnétophone : appareil utilisé pour enregistrer les entretiens afin de les retranscrire par la suite.

§ Parallèlement à ces outils et durant toutes nos sorties terrain, nous avons fait aussi de « l'observation sur terrain ». Cet outil nous a permis soit de confirmer ou infirmer les propos de l'enquêté en cours, soit de constater par nous-même les différentes réalisations faites dans la ville par les émigrés et/ou leurs associations. Des clichés ont été prises en passant (confère annexe).

Ø Méthodes de traitement et d'analyse des données

Le traitement des données a été réalisé en plusieurs étapes. D'abord, nous avons travaillé à classifier les données selon les personnes enquêtées : CM de famille ayant des migrants ; CM

53 Institut National de la Statistique et du Développement (INSD), 2008, op.cit., p. 42.

54 L'enquête dans les ménages a été réalisée à partir de la méthode de l'échantillonnage en boule de neige développée par l'Anglais Goodman en 1961. Cette méthode est une forme de plan d'échantillonnage par détection de liens pendant lequel on demande aux enquêtés faisant parti de l'échantillon de départ d'identifier des ménages auxquels on demande d'identifier, à leur tour, des ménages, et ainsi de suite jusqu'à atteindre la taille de l'échantillon défini.

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des familles n'ayant pas de migrants ; Autorités et Emigrés. Après regroupement, nous sommes passés à l'enregistrement numérique de toutes ces données à l'aide du logiciel Microsoft Excel. Une fois les données enregistrées, nous les avons synthétisées et regroupées en fonction de nos thématiques : conditions sociales ; conditions économiques ; investissements individuels ; investissements collectifs. Pour terminer, nous avons dressé des graphiques pour mieux représenter certaines variables et voir leurs impacts directs sur notre zone d'étude. Des commentaires sur chaque graphique s'en sont suivis.

6.3.3. Les sources internet

Michel BEAUD observait que : « Comme l'ordinateur, l'internet prend une part de plus en plus importante dans l'activité des chercheurs. »55 Cette affirmation confirme l'importance de l'exploitation de l'internet à des fins de recherches scientifiques. Dans le cadre de notre étude sur les migrations, nous avons exploité ce réseau planétaire de données dans le but de cerner les contours et les dimensions spatio-temporelles des migrations.

Pour ce faire, deux principaux moteurs de recherche de données ont été utilisé : Google chrome et Google Scholar. Ces deux serveurs informatiques nous ont permis d'accéder à des sites internet officiels, à des portails d'institutions, à des bases de données, à des ouvrages et des illustrations.

Plusieurs portails d'institutions ont été parcourus. Il y a Open Edition, JSTOR (Journal Storage), PERSÉE, Burkina Faso Open Data, Migration Data Portal). Ces portails nous laissaient accéder à des ouvrages, des statistiques, des définitions de concepts. Les informations disponibles sont consultables en ligne, par téléchargement ou par achat. En plus de ces portails, nous avons consulté des sites de référence tels que celui de l'INSD ( www.insd.bf), de l'OIM ( www.oim.org), de l'OCDE ( www.ocde.org), de l'ARBI ( www.associazionarbi.it.fr), etc. Plusieurs données en lien direct avec les migrations internationales et leurs impacts au Burkina Faso en général et à Béguédo en particulier sont disponibles.

En sommes, nous retenons que l'exploitation des sources internet à donner accès à des articles scientifiques, des thèses et mémoires, des rapports d'études, des définitions conceptuelles,

55 BEAUD Michel, 2006, op.cit. p. 50.

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des ouvrages électroniques rares ou anciens. Le recueil de données à l'intérieur de ces sources a enrichi notre capacité d'analyse qualitative et quantitative sur ce sujet.

6.4. Le commentaire bibliographique

Plusieurs écrits ont été lus dans le cadre de nos recherches sur les migrations. Ce sont entre autres des thèses, des mémoires, des rapports, des articles scientifiques, des ouvrages généraux et des ouvrages spécifiques. Les thématiques développées sont la méthodologie de recherche, le Burkina Faso, Béguédo, la migration internationale, les flux migratoires, l'impact socio-économique des migrations, etc.

6.4.1. Les ouvrages

COULIBALY Sidiki, GREGORY Joel et PICHE Victor, 1980, Les migrations voltaïques, Tome 1, Importance et ambivalence de la migration voltaïque, Ottawa, CRDI, 144 p. Les auteurs présentent les résultats de l'enquête nationale sur les mouvements migratoires en Haute-Volta, enquête réalisée entre 1974 et 1975. L'objectif de leur enquête est de mesurer l'ampleur, la direction et les caractéristiques de la migration voltaïque d'une part, et d'autre part d'en cerner les causes et les effets. Cependant, on note l'absence d'un aperçu historique des migrations dans l'oeuvre mais aussi aucune analyse sur l'impact socio-économique de ces migrations. Tous les villages de la Haute-Volta n'ayant pas fait objet de l'enquête, 120 villages et 11 centres urbains, cela semble être aussi une des limites de l'ouvrage.

MIYAJI Mieko, 1976, L'émigration et le changement socio-économique d'un village Kabyle (Algérie), Tokyo, Institute for the Study of Languages and Cultures pf Asia an Africa, 87 p. Cette oeuvre a le mérite de vouloir mettre en lumière les effets des migrations internationales des Algériens sur le développement local à travers une étude cas dans le village de la Kabylie. Les différentes caractéristiques socio-professionnelles des émigrés du village y sont présentées et des réflexions et perspectives sur le dynamisme de l'émigration sont faites. Ainsi, nous avons pu voir à travers cette oeuvre les méthodes utilisées par l'auteur pour mettre en lumière les changements intervenus dans le village avec les pratiques migratoires.

Conseil Municipal de Béguédo, 2015, Plan de Développement Communal, Commune rurale de Béguédo, 112 p. Considéré par les autorités administratives de Béguédo comme le document référentiel sur la situation de la commune, le Plan Communal de Développement

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(PCD) présente la commune de façon succincte. En effet dans le PCD, on retrouve une exposition des caractéristiques naturelle, physique, politique, économique, religieuse et culturelle de Béguédo. La diaspora et les partenaires techniques et financiers de la commune y sont mentionnés. Les projets de développement prévus sont présentés ainsi que le budget communal. Toutefois, les informations contenues dans le plan sont très sommaires et donc superficielles sur les thématiques abordées.

DABIRE Der Laurent, 2009, Emigration internationale des Burkinabè, Paris, Harmattan, 104 p. L'auteur dans son oeuvre cherche à connaitre les tenants et les aboutissants du phénomène migratoire du Burkina des Indépendances à nos jours. Il fait une analyse très importante sur tous les aspects de l'émigration, allant des causes à la nécessité d'encadrement de ce phénomène en passant par l'impact économique de l'émigration burkinabè. Mais force est de souligner que l'auteur n'a analysé qu'un aspect des Migrations (émigration) et de surcroît juste l'internationale (absence de migration interne).

FAURE Armelle, 1996, Le pays bissa avant le barrage de Bagré, Athènes, Editions Athanassopoulos, 311 p. Avec le désir du gouvernement burkinabè d'aménager un nouveau barrage à Bagré (dans le Centre-Est du pays) d'ici 2000, FAURE a eu l'idée de présenter dans un ouvrage la dynamique culturelle et sociale des peuples vivant dans cet espace. C'est ainsi que tout au long de son ouvrage, elle tente de faire connaitre le peuple bissa à travers son organisation sociale, administrative et culturelle. Une grande partie de l'oeuvre porte sur la gestion du foncier en pays bissa et des nombreux conflits qui s'y rapportent.

LAHUEC Jean-Paul, MARCHAL Jean-Yves, 1979, La mobilité du peuplement bissa et mossi, Paris, ORSTOM, 149 p. Les deux auteurs ont choisi de présenter un ouvrage sur les courants migratoires de deux peuples distincts : le peuple bissa et le peuple mossi. La première partie de l'oeuvre est consacrée au peuplement et à l'abandon de la vallée de la Volta blanche en pays bissa, Sous-préfecture de Garango. Dans cette partie écrite par Jean-Paul LAHUEC, on y voit les mobiles qui ont entrainé les Bissa de Garango à migrer pendant la période coloniale dans d'autres régions ou hors de la Haute-Volta. Dans la deuxième partie, Jean-Yves MARCHAL s'intéresse à la dynamique de peuplement des Moose dans deux régions voisines du royaume de Yatenga. Ce sont le pays Samo (Tougan) et le pays peul-kurumba (Djibo).

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6.4.2. Les thèses et mémoires

Dans le cadre de leurs travaux de fin de cycle universitaire, des sociologues, des géographes et des historiens ont soutenu des mémoires et des thèses sur la thématique des migrations.

BANGRE Éric-Bertrand Pasba, 2005, Les migrations internationales des Bissa en Italie : réseaux, stratégies et parcours migratoires, Mémoire de maîtrise en sociologie, Université de Ouagadougou, 116 p. BANGRE a développé la question de la migration des Bissa vers l'Italie et le développement dans son mémoire. Il montre comment les émigrés de Béguédo et Niaogho, à travers leurs associations, arrivent à réaliser des investissements sociocommunautaires et économiques importants. Ces investissements contribuent à améliorer le niveau de vie sociale et économique des habitants de Béguédo.

BAYIRE Piga Sylvette, 2006, Migration et développement. Les « Italiens » dans le développement de Béguédo, mémoire de maitrise en sociologie, Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, 101 p. et YABRE Noel Baowenison, 2010, Contribution des émigrés Bissa en Italie au développement de la ville de Béguédo (province du Boulgou), Mémoire de maitrise en Géographie, Université de Ouagadougou, 141 p. Dans ces deux mémoires, on perçoit l'impact des pratiques migratoires des Italiens sur le développement local de la commune. Les mobiles, les zones de départ et d'accueil des candidats à l'émigration, les parcours, les conditions de voyages, sont présentés tout au long des documents.

Au titre des Thèses, on note : HAZARD Benoît, 2007, L'aventure des Bisa dans les ghettos de `'l'Or rouge» (Burkina Faso- Italie) : trajectoire historique et recomposition des réseaux migratoires burkinabè dans la région des Pouilles, thèse en anthropologie sociale et ethnologie, Ecoles des Hautes Etudes en Sciences Sociales, Paris, 1360 p. HAZARD a consacré une thèse de doctorat sur le Bisaku. Dans ces travaux, on y retrouve l'historique du peuplement de l'espace bisaku, la diversité ethnique, la mobilité humaine et les trajectoires des migrations internationales. Les informations fournies dans cette thèse sur le peuple bissa sont d'une richesse inestimable au regard des sources de première main exploitées pour sa rédaction.

ZIDNABA, Irissa, 2016, Migrations internationales et développement : l'impact socioéconomique des pratiques transnationales des émigrés de Béguédo résidant en Italie, Thèse

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de doctorat, Département de Géographie, Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, 271 p. La principale problématique de cette étude est de connaitre l'impact des pratiques transnationales des émigrés bissa sur le développement local de la commune de Béguédo. ZIDNABA montre les liens entre les migrations internationales et le développement, les formes et les domaines d'investissement des migrants, les facteurs de leur engagement, et l'insertion socio-économique des migrants en Italie.

Dans sa thèse de doctorat unique, Serge Noël OUÉDRAOGO56 a eu le mérite d'avoir établi une approche historique des migrations voltaïques (actuel burkinabè) avec des thématiques sur l'origine des courants migratoires voltaïques vers la Gold Coast, la gestion du courant, la dynamique des flux migratoires, les stratégies d'insertion des immigrés ou encore la diaspora burkinabè vivant au Ghana et en Côte d'Ivoire. La migration des Burkinabè vers le Ghana a été ainsi mis en perspective de la création de la colonie de Haute-Volta en 1919 jusqu'en 2010.

6.4.3. Les articles scientifiques et rapports d'activités

On note l'article de Issiaka MANDE57 et celui de Claude Etienne SISSAO58 portant sur les fondements historiques de l'émigration internationale des Burkinabè. Les mobiles, les zones de départ, les flux migratoires et l'évolution historique des courants migratoires voltaïques y sont clairement développés.

DE HASS, Hein, 2010, « Migration et développement : une perspective théorique », In International Migration Review, vol. 44, n° 1[version traduite en français], pp. 227-264. Dans cet article, l'auteur veut expliquer comment la migration et le développement ont évolué au cours des 50 dernières années. Il détermine quatre (04) principales phases d'évolution des discours des politiques et des recherches sur les liens migration et développement. La première phase va de la période post-1945 à 1973 ; la seconde phase commence en 1973 jusqu'en 1990 ; la troisième va de 1990 à 2001 et la dernière phase concerne la période post-2001. DE HASS a su montrer l'évolution des conceptions sur la migration et le développement qu'elle pourrait engendrer.

56 OUÉDRAOGO Serge Noël, 2016-2017, op.cit., 428 p.

57 MANDE Issiaka, 1995, « Les migrations de travail des Voltaïques. Une panacée pour l'économie ivoirienne de 1919 à 1960, in MASSA Grégory et MADIEGA Georges (sous la dir.), La Haute Volta coloniale : témoignages, recherches, regards, Paris, Khartala, pp. 313-339.

58 SISSAO Claude Etienne, 2012, « Esquisse sur les migrations au Burkina Faso : manifestation face aux normes de la période coloniale à nos jours », in MANDE Issiaka, Le Burkina Faso contemporain ; racines du présent et enjeux nouveaux, Paris, Harmattan, pp. 67-84.

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Jean- Benoît HAZARD59 à travers cet article veut redonner, durant la période coloniale et post-coloniale, un autre statut politique aux villes définit par la construction d'une forme de souveraineté. Pour HAZARD, la ville n'est pas une forme antagonique au monde des communautés rurales car il peut exister une relation d'enracinement entre les villes et l'arrière-pays. Pour illustrer sa théorie, il a choisi de prendre le cas de la localité de Béguédo, comptabilisant à l'époque 14 000 habitants (1994). La mobilité humaine de cet espace et la dynamique des flux qui en découlent sont impressionnantes.

GOSSELIN Gabriel, 1970, « Travail, tradition et développement en pays bisa » in ORSTOM, série sciences humaines, volume VII, n°1, 18 p. Cet article fournit de précieuses caractéristiques sur l'organisation du travail dans le pays bissa précolonial et colonial. Les coutumes et us des Bissa y sont présentés et la mobilité humaine organisée durant des générations est perceptible également. En parallèle les actions et les mutations d'une structure française, la Société d'Aide Technique et de Coopération en Haute-Volta (SATEC) sont présentées en début d'article.

Plus tard, entre 2005 et 2006, deux grands symposiums ont été organisés sur les transferts de fonds des émigrés et sur la contribution de la migration à la lutte contre la pauvreté. Il s'agit des congrès placés sous la tutelle du Conseil National de la Population (CONAPO).60 Il ressort de ces deux symposiums que le Burkina Faso dispose d'un important capital humain dont il serait judicieux de l'encadrer afin d'en faire une source de financement des projets de développement de leur terre d'origine. L'apport des Burkinabè de l'étranger au développement de leur pays était clairement approuvé par les participants.

D'une manière générale, les réflexions sur l'impact des migrations sont relativement importantes en nombre et riches en données mais ne prenant pas en compte le cas de la ville de Béguédo. Et dans le cas où notre cadre d'étude est pris en compte, il lui manque une approche historique. C'est la raison pour laquelle nous avons éprouvé le besoin d'analyser l'impact tant

59 HAZARD Benoît, 2004, op.cit, 16 p.

60 OUÉDRAOGO L., 2005, Symposium sur les migrations au Burkina Faso : migrations internationales régionales et sous régionales et économie extraterritoriale : les transferts de fonds des émigrés burkinabè (flux, volume, et importance), Ouagadougou, CONAPO, 57 p. et

CONAPO, 2006, Symposium sur les migrations : gestion des migrations internes et externes, quelle politique migratoire en vue de la réduction de la pauvreté au Burkina Faso, Ouagadougou, CONAPO, 31 p.

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social qu'économique de la migration sur la ville de Béguédo. Cependant, notre travail de recherche a été marqué par quelques difficultés.

7. Les difficultés rencontrées et les limites de l'étude

Un travail de recherche scientifique peut être confronté à des obstacles de natures diverses. Ce fut le cas pour notre sujet d'étude où nous avons été confrontés à des difficultés tantôt scientifiques tantôt personnelles.

7.1. Les difficultés de la recherche

La première difficulté majeure était liée à la documentation dont la constitution a été jalonnée par quelques obstacles. Après le choix du thème de recherche, il fallait établir une historiographie autour de notre thème. Mais le constat a été que les documents écrits, abordant les migrations et leurs impacts, n'abondent pas dans les bibliothèques et les centres de documentation que nous avons visités. Les quelques ouvrages existants traitaient soit partiellement notre thématique ou ne présentaient que des généralités sur la thématique. Aussi, la plupart de ces ouvrages ayant été rédigés au cours du XXe siècle, toutes les dimensions des migrations et leurs impacts n'étaient pas parcourues (il était plus question de migration de travail des voltaïques, des mobiles des migrations, des parcours des migrants, etc.). Ce fut pour le moment, les mémoires, les thèses et quelques articles qui nous ont été d'ordre spécifique.

La deuxième difficulté était issue de la collecte des sources orales, lesquelles sources sont nécessaires pour analyser l'impact socio-économique des migrations sur la ville de Béguédo. D'abord, la grandeur de notre échantillon a été une difficulté : 320 ménages. Ceci nous a nécessité davantage de temps et de ressources financières. Ensuite, une autre difficulté était la méfiance de certains de nos enquêtés envers nous. Il a fallu à certains moments que nous nous exprimions en langue bissa afin de mettre ces derniers en confiance. En plus, la rétention des Chefs de Ménages (CM) à nous fournir des informations liées à leur finance était une de nos difficultés. Pour ces CM, l'anonymat sur les possesseurs de ces informations n'allait pas être respecté et les informations fournies allaient être divulguées. Mais après quelques échanges, nous arrivions à rassurer certains de nos enquêtés. Une dernière difficulté liée à la collecte des informations orales a été d'abord l'absence de certains Chefs de Ménage, occupés soit par leurs travaux champêtres ou en déplacement dans une ville voisine pour un court séjour. Ensuite, il y a

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la forte mobilité des émigrés séjournant à Béguédo au moment des enquêtes. Ces derniers étaient à cheval entre la capitale Ouagadougou et Béguédo, une situation qui rendait difficile leur rencontre pour des entretiens.

La troisième difficulté était liée à la phase de traitement des données collectées grâce à l'enquête terrain. N'ayant pas accès aux dernières technologies en matière de collecte et de traitement de données récoltées sur terrain, nous étions contraints de traiter nos données manuellement avec l'assistance du logiciel Microsoft Excel pour l'élaboration des tableaux et des graphiques. Mais les limites de ce logiciel nous ont amené à consacrer plus de temps au traitement des données.

Nous avons du reste fait face à des moyens matériels très limités qui, avec les difficultés que nous avons citées plus haut, ont contribué à ralentir notre étude thématique. Par ailleurs, ces difficultés n'ont pas pu entamer notre détermination à conduire cette étude et nous en appelons à ce propos à l'indulgence de toutes celles qui liront ce projet de recherche et que leurs apports et critiques seront appréciés à juste valeur.

7.2. Les limites de l'étude

Comme on le dit très souvent, la perfection totale ne réside pas dans une oeuvre humaine. Par conséquent, notre travail de recherche sur le phénomène migratoire et ses impacts ne fait pas exception à la règle. En effet, la méfiance, la réticence et l'oubli de certains Chefs de Ménage sur les informations récoltées rendent les données sur la contribution des migrations au développement socio-économique de Béguédo limitées quantitativement et qualitativement. Aussi, notre incapacité à obtenir des données chiffrées sur les transferts de fonds des Burkinabè de l'extérieur auprès des institutions financières de la place rend partielle ou insuffisante l'analyse sur la contribution des migrations au développement de la commune. Enfin, notre analyse personnelle des informations recueillies peut connaitre des insuffisances, ce qui pourrait affecter la qualité générale de notre travail de recherche.

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8. L'annonce du plan

L'analyse historique de notre thème va s'organiser autour de trois (03) parties :

Ø La première partie propose une description de la zone d'étude : la commune de Béguédo. Cette description fait ressortir la situation géographique et les caractéristiques majeures de Béguédo dans un premier temps et dans un deuxième temps, elle traite du cadre humain et économique de Béguédo.

Ø La deuxième partie présente le contexte historique des migrations internationales des Bissa. Subdiviser en deux chapitres, le premier chapitre donne un aperçu historique des migrations internationales au Burkina Faso. Le deuxième chapitre porte sur l'historique des migrations internationales des Bissa.

Ø La troisième partie concerne l'impact socio-économique des migrations à Béguédo. Cette partie consacre un chapitre sur les caractéristiques des ménages de Béguédo. Ensuite, un autre chapitre met en lumière les fonds et investissements de la commune et un dernier chapitre présente les retombées négatives des migrations sur le développement de la commune.

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PREMIÈRE PARTIE : LA PRÉSENTATION

DE LA COMMUNE DE BÉGUÉDO

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La présente étude sur les migrations internationales a pour cadre d'étude, la commune de Béguédo. La commune de Béguédo est l'une des trente (30) communes de la région du Centre-Est. Elle appartient à la province du Boulgou, chef-lieu de la région du Centre-Est. Bien que la commune ne figure pas parmi les plus grandes de la région en termes de superficie ; elle se fait remarquée tout de même par le caractère migratoire de sa population et son impressionnant niveau de développement urbain dans la région. Le milieu physique de la commune offre dans l'ensemble de nombreuses potentialités à la population.

C'est dans cette optique que nous analysons dans cette première partie, la situation géographique, démographique et socio-économique de la commune de Béguédo avant la naissance du courant migratoire. Nous présentons d'abord le contexte général qui a conduit à la dynamique migratoire des populations de Béguédo et ensuite nous expliquerons le contexte historique des migrations externes des Bissa.

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Chapitre I : Situation géographique et caractéristiques de la zone d'étude

Tout comme la plupart des communes de la région, la commune de Béguédo présente un cadre physique diversifié. Situé en périphérique de la région du Centre-Est, Béguédo bénéficie de ressources naturelles favorables aux cultures et d'un climat soudano-sahélien. L'hydrographie y est dense et des atouts économiques y sont présents. En plus, Béguédo possède l'une des plus fortes densités humaines de la région.

Dans ce chapitre, ce sont les caractéristiques physiques, démographiques et socio-économiques de Béguédo qui sont développées dans le but de comprendre la dynamique migratoire qui s'en est suivie dans cet espace du pays.

I_ Cadre physique de la zone d'étude

Plusieurs éléments concourent dans la présentation du milieu physique de notre zone d'étude. Mais les caractéristiques physiques susceptibles d'expliquer la forte mobilité humaine dans la zone seraient entre autres : sa géographie, son relief, ses sols, son climat et son hydrographie.

I_1. La situation géographique de Béguédo

Avec une superficie d'environ 40 km2, la commune de Béguédo est comprise entre 0°47'17» et 0°41'48» de longitude Ouest et entre 11°40'16» et 11°45'50» de latitude Nord. Elle est située au Nord-Ouest de la Province du Boulgou, (Région du Centre-Est). Son chef-lieu (Béguédo) se trouve à une distance de 45 km de Tenkodogo qui est le chef-lieu de la région. La commune partage ses limites avec les communes de Komtoèga au Nord-Est sur environ 07,68 Km, de Boussouma à l'Est sur une longueur d'environ 08,63 km et de Niaogho au Sud et à l'ouest sur une longueur voisine de 15 Km dont plus de la moitié est constituée du fleuve Nakambé et de son plan d'eau61. La carte 1 met en exergue la situation de la commune par rapport au pays et à la région ainsi que les communes limitrophes ci-dessus citées.

La commune de Béguédo compte neuf villages qui sont : Béguédo-Centre, Béguédo-Peulh, Diarra, Diarra-Peulh, Fingla, Gnintala, Kiéflè, Tanvoussé et Tombeyao. La distance moyenne qui sépare les villages au chef-lieu est inférieure à 05 Km avec toutefois des extrema

61 Conseil Municipal de Béguédo, 2015, Plan de Développement Communal, Commune rurale de Béguédo, p. 11.

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variant de 02 à 09 Km. Malgré cette proximité des villages, certains villages restent difficilement accessibles en période d'hivernage en raison de l'existence de nombreux bas-fonds.

Carte n°1 : Localisation de la commune de Béguédo

I_2. Le relief et les sols de Béguédo

La commune de Béguédo occupe une position synclinale du bassin versant du Nakambé. Son relief est une pente douce orientée Nord-est/Sud-ouest avec une altitude moyenne de 240 m d'où prédomine des appointements rocheux isolés. Le substratum géologique est majoritairement constitué de migmatites et granites indifférenciés (70%) sur toute la moitié centre et sud de la commune. Au nord, il est surtout constitué de migmatites à biotite amphibole et de méta-volcanites neutres à basiques.

On rencontre principalement trois (03) types de sols dans la commune de Béguédo : les sols bruns eutrophes, les sols ferrugineux tropicaux peu lessivés et les sols hydromorphes.

§ Les sols bruns eutrophes qu'on retrouve sur des roches cristallines basiques (dolérites) ou neutres (migmatites) avec une profondeur supérieure à 100 cm.62 Ils couvrent près de 41% de la superficie totale des sols de la commune. Avec une valeur agronomique moyenne, ils peuvent supporter des cultures variées : le maïs, le sorgho, le coton, le manioc, etc. Ils se prêtent aisément aux actions de récupération et/ou d'amélioration.

§ Les sols ferrugineux tropicaux peu lessivés sur matériaux riches en argile kaolinique, en oxyde et hydroxyde de fer et de manganèse. Ils sont peu profonds et couvrent une superficie totale de 24%. Ces sols ferrugineux sont légèrement favorables à la culture du mil, du sorgho et du niébé et fortement favorables au maïs et au coton.63

§ Les sols hydromorphes sur matériaux alluviaux divers ou sur matériau argilo-sableux bigarré. Ils couvrent environs 30% des superficies et se rencontrent dans les bas-fonds et les zones d'inondation des cours d'eau. Ce sont des sols lourds et à une haute valeur agronomique mais ils sont aussi difficiles à travailler. Ils sont favorables à la culture maraîchère. La forte pression foncière au niveau de ces sols constitue une menace pour les lits des cours d'eau.64

Il ressort de l'étude du relief et des sols de la commune de Béguédo, qu'elle dispose de très peu de superficie. Et sur ces terres étroites, se trouvent des sols disposant tantôt de terres riches pour l'agriculture, tantôt de terres pauvres en composants agricoles. Ainsi, les familles

62 ZIDNABA, Irissa, 2016, op.cit., p. 69.

63 ZIDNABA, Irissa, Idem, p. 69.

64 Conseil Municipal de Béguédo, 2015, op.cit., p. 12.

31

occupant les sols peu riches ou ne possédant même pas de terres cultivables sont contraintes pendant la saison hivernale d'effectuer des déplacements saisonniers dans les alentours de Béguédo (Ouarégou, Niaogho, Boussouma, Komtoèga, voire même Bagré) à la recherche de sols agricoles.

I_3. Le climat et l'hydrographie de Béguédo

D'une manière générale, la Province du Boulgou a un climat tropical de type soudano-sahélien. La commune de Béguédo, malgré sa localisation dans la partie septentrionale de la Province, bénéficie toujours d'un climat soudano-sahélien. C'est un type de climat compris dans l'isohyète 800 mm et se caractérisant par l'alternance de deux saisons : une saison sèche s'étendant de Octobre à Avril et une saison pluvieuse de Mai à Septembre. Selon les données de l'Agence Nationale de la Météorologie (ANAM), la température moyenne de la commune de Béguédo varie entre 27,8° à 29,6° Celsius.65 Il résulte de cette température moyenne qu'il fait moins chaud dans la commune. Au regard de la quantité moyenne des précipitations et de la longue durée de la saison sèche dans la commune, les diverses pratiques d'activités agro-pastorales et des cultures de contre-saison sont effectuées très souvent dans des conditions pénibles par les populations. Ces facteurs peuvent pousser certains individus à des migrations temporaires ou définitives dans des zones d'accueil plus favorables.

La commune de Béguédo est située dans le grand bassin hydrographique du Nakambé66 qui est l'un des plus importants fleuves du pays et le plus important cours d'eau de la province du Boulgou. Il prend sa source à l'est de Ouahigouya, dans une région qui reçoit 500 à 600 mm d'eau par an. Dans son long parcours, le Nakambé traverse longitudinalement la commune du Nord au Sud, d'où l'importance de ses eaux de surface favorisant la conduite des activités agricoles, maraîchères et de pêche.67 En plus de bénéficier d'une partie du potentiel hydrique national, Béguédo profite également des retenues d'eau du barrage de Bagré. En effet, aménagé en 2000, le barrage hydro-agricole de Bagré est situé à une soixantaine de km de

65 Information issue de la compilation des températures annuelles à Béguédo de 2000 à 2014. La compilation a été faite par ZIDNABA Irissa, grâce aux données météorologiques collectées à la direction de la météorologie.

66 Autrefois désigné par le terme Volta blanche, le Nakambé est l'un des trois plus grands fleuves du Burkina Faso. Il draine un bassin versant de 50 000 km2 qui prend sa chute dans la mer du Ghana. Il draine toute la partie centrale et le nord du plateau central et ne coule que pendant la saison des pluies. Les premiers écoulements intermittents peuvent se produire en mai, mais ce n'est qu'en juillet/août que les débits deviennent permanents à la station de Wayen et se renforcent vers l'aval pour atteindre à Bagré un débit moyen de 145 m3/s en août.

67 Conseil Municipal de Béguédo, 2015, op.cit., p. 14.

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Béguédo. Et pour Irissa ZIDNABA, « cette infrastructure hydraulique constitue le premier pôle de croissance économique du pays avec un aménagement potentiel de 30 000 hectares dont 21 000 hectares en aval et 9 000 hectares en amont du barrage. »68 La commune dispose aussi d'énormes potentialités en eaux souterraines et la profondeur de la nappe phréatique est de l'ordre de 50 à 60 mètres. L'exploitation de cette ressource précieuse a atteint un niveau assez important avec la réalisation d'un certain nombre de forages dans les villages et d'une Adduction d'Eau Potable Simplifiée (AEPS) au chef-lieu de la commune.

Malgré la disponibilité d'un climat assez clément et des aménagements hydro-agricoles très denses, une partie de la population de Béguédo réalise en permanence des mobilités humaines vers d'autres espaces géographiques. Ce paradoxe pourrait s'expliquer par l'inaccessibilité de toutes les couches sociales de la commune aux différents potentiels hydro-agricoles. Autrement dit, la gestion administrative des ressources de la commune à une époque a-t-elle été rationnelle et équilibrée ?

68 ZIDNABA, Irissa, 2016, op.cit., p. 67.

33

II_ Cadre démographique de la zone d'étude

Entre l'arrivée des premiers hommes sur le territoire actuel de Béguédo jusqu'à la présence de la population actuelle, plusieurs siècles de peuplement se sont déroulés sur cet espace géographique. Il est question alors dans cette partie de comprendre comment s'est déroulée la mise en place du peuplement bissa dans un premier temps. Et dans un second temps, il s'agit de définir les caractéristiques démographiques de la population de Béguédo.

II_1. L'historique du peuplement de Béguédo

L'histoire du peuplement de Béguédo est tributaire de l'histoire de la mise en place du pays bissa en général. En effet, vouloir expliquer la mise en place de la population de Béguédo nécessite une connaissance sur l'installation des Bissa dans le « Bisaku ». Plusieurs auteurs69 ont eu le mérite d'avoir établi des hypothèses sur l'historique du peuplement en pays bissa en général et du peuplement de Béguédo en particulier. Ils se sont appuyés soit sur la tradition orale pour élaborer leur étude soit à partir d'autres auteurs qui les avaient précédés.

La plupart des sources sur la mise en place du peuplement de Béguédo, raconte que les premiers habitants de Béguédo seraient venus de la région de « Bitou »70 (située au sud de la province du Boulgou) au XIXe siècle. La tradition orale donne deux raisons à cette mobilité des premiers habitants. La première raison pourrait être que ces premiers habitants sont arrivés à Béguédo de façon aventurée. En effet, ces habitants étaient un peuple de chasseurs vivant à « Guélama », une des localités de « Bitou ». Dans l'exercice de leur métier, ils se rendirent jusqu'à l'actuel Béguédo au bord du fleuve Nakambé. Ce fut alors l'émigration. Vu l'importance de leur nombre, ils se répartirent en trois groupes pour trois localités différentes : le premier groupe s'installa à « Kénoko », localité située près de Garango, le second à « Samsagbo » et le troisième groupe à « Béguédo », avec à sa tête un homme du nom de Séèm. Son premier fils organise le groupe et devient chef de village de Béguédo. Il prit le nom de « Naaba Pollé ». Pour

69 Parmi ces auteurs, nous pouvons citer :

LAHUEC Jean-Paul, MARCHAL Jean-Yves, 1979, La mobilité du peuplement bissa et mossi, Paris, ORSTOM, 149 p. ;

FAURE Armelle, 1996, Le pays bissa avant le barrage de Bagré, Athènes, éditions Athanassopoulos, 311 p. ; HAZARD Benoît, 2004, « Entre le pays et l'outre-pays », In Journal des africanistes [mis en ligne le 10 avril 2007], n° 74-1/2, [version numérique obtenue en juillet 2021 : http://africanistes.revues.org/427 ], 16 p. ;

ZIDNABA Irissa, 2016, Migrations internationales et développement : l'impact socioéconomique des pratiques transnationales des émigrés de Béguédo résidant en Italie, Thèse de doctorat, Département de Géographie, Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, 271 p.

70 L'orthographe actuelle du nom de cette localité est Bittou.

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maintenir l'unité entre les différents groupes, il nomma des petits chefs dans les villages relevant de sa tutelle de même des chefs de quartiers. Par la suite, des peuhls à la recherche de pâturage pour leurs animaux vinrent implorer le chef pour qu'il leur attribuât une terre d'asile ; c'est ainsi que Béguédo-Peulh (un des neuf villages du département aujourd'hui) vit le jour. L'actuel chef, le Naaba Tigré est le 5e chef de Béguédo. Sa famille porte le nom BARA. Ainsi à sa création en décembre 1985, le Département de Béguédo a respecté les limites exactes établies par la chefferie traditionnelle (limite du pouvoir coutumier).71

La deuxième explication donnée à l'origine des premiers habitants de Béguédo est la fuite de ces derniers face à l'envahissement de leur territoire par les peuples mossi. Benoît HAZARD explique que « l'installation des premiers groupes de peuplement à Béguédo est consécutive à la politique de fuite des Bisa vers les zones de protection naturelle, telles que Garango et la région du Léré, qui débuta au XIXe siècle dans la région de Bitou. »72 Cette justification se rapproche plus du contexte général de la mise en place des peuples au Burkina Faso. En effet, on se rappelle que les Moose, l'un des plus grands conquérants de territoires, utilisaient les mêmes stratégies d'organisation dans les territoires conquis. Deux possibilités s'offraient aux peuples conquis : rester sur leur terre d'origine mais accepter une nouvelle organisation de vie (assimilation) ou refuser d'être dirigés par les conquérants (résistance). Les peuples qui refusèrent l'assimilation, abandonnèrent leur terre d'origine pour s'installer dans des terres nouvelles. Les premiers habitants de Béguédo auraient pu donc être des Bissa résistants aux conquérants moose.

Pour ce qui est de l'appellation de notre cadre d'étude par le terme « Béguédo », Irissa ZIDNABA fournit une interprétation dans sa thèse de doctorat unique : « Selon la première explication, le nom Béguédo viendrait du terme «bergo» en langue bissa qui veut dire se regrouper autour de quelque chose. »73 La monographie actuelle sur Béguédo semble partager cette première explication car selon elle, les chasseurs saisonniers aimaient s'installer au pied d'un rocher appelé « Gankima ». Ils se résolurent un jour à quitter leur village pour s'installer définitivement à Béguédo avec tout leur peuple.74 ZIDNABA continue avec la deuxième explication en ces termes : « La thèse la plus courante soutient que l'appellation Béguédo vient de la description de l'humidité du milieu en langue mooré «béguédo», qui veut dire zone

71 Monographie accessible dans le Plan Communal de Développement.

72 HAZARD Benoît, 2004, op.cit., p. 6.

73 ZIDNABA, Irissa, 2016, op.cit., p. 70.

74 Conseil Municipal de Béguédo, 2015, op.cit., p. 18.

35

boueuse. »75 Béguédo serait alors une région dont la terre était couverte de boue en saison pluvieuse : d'où l'appellation mooré « begdo » qui signifie boue.

En ce qui concerne la création des villages, on retient que les villages de Samsabgo, Béguédo, Fingla, Dierma n'ont pas exercé une grande influence sur la distribution actuelle du peuplement. Seul [le village] Béguédo a donné naissance à quelques essaimages à courte distance et accueilli sur son territoire les groupes « étrangers » de Widi (venant de Niaogho) et de Zabendila (des Banse venant de Ouarégou) ; ce dernier quartier étant d'ailleurs fondé aux environs de 1920.76

II_2. Les caractéristiques démographiques de Béguédo II_2.1. Évolution et répartition de la population Évolution de la population

D'après les résultats du Recensement Général de la Population et de l'Habitat réalisé en 2006, 19 153 habitants ont été recensés au niveau de la commune de Béguédo. La population résidente fut répartie au sein de 3 267 ménages dans la même période. Selon les projections (au taux d'accroissement de 3,3% pour la commune de Béguédo), elle serait estimée à 23 213 en 2014 et devrait passer à 27 904 habitants en 2016, puis à 30 174 habitants en 2020 pour une superficie de 40 km2.77

Durant la période coloniale, la population de Béguédo n'a pas connu une évolution particulière. En effet, les nombreuses mesures (souvent coercitives) de l'administration coloniale n'ont pas eu d'impact sur les effectifs démographiques. Béguédo, à l'instar du pays bissa, a observé une évolution démographique régulière. Benoît HAZARD renchérit en ce propos : « De même, l'exercice d'un contrôle sur les représentants de l'autorité traditionnelle, les échanges commerciaux et les mouvements des populations qui engendrèrent des fuites massives vers la Gold Coast jusqu'en 1946 n'ont pas provoqué de pertes démographiques significatives, tout au moins comparativement au reste de la région. » L'irrégularité des effectifs démographiques commence à la veille des indépendances pour se poursuivre jusqu'à nos jours. En effet depuis 1985, la population de Béguédo n'a fait que varier. Le tableau ci-dessus en est l'illustration.

75 ZIDNABA, Irissa, 2016, op.cit., p. 70.

76 Conseil Municipal de Béguédo, 2015, op.cit., p. 19.

77 Ministère de l'Economie et des Finances, 2009, Profil des régions du Burkina Faso, Ouagadougou, p. 162.

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Tableau 1 : Evolution de la population de Béguédo de 1975 à 2014.

Effectifs/années

19751

1985

1996

2006

20142

Total

-

9 523

13 847

19 153

24 029

% des Hommes

-

47,6

46,6

45,4

46,2

% des Femmes

-

52,4

53,4

54,6

53,8

Taux d'évolution en %

-

-

45,4

38,3

25,4

 

1 Nous n'avons pas trouvé de statistiques officielles sur la population de Béguédo en 1975.

2 Les données de 2014 sur Béguédo sont des prévisions faites par l'INSD en 2011.

Source : données extrait des RGPH de 1985, 1996 et 2006 et des prévisions de 2014.

Ce tableau montre une évolution de la population de Béguédo. Par ailleurs deux observations peuvent être faites. La première est qu'on constate une supériorité permanente du genre féminin sur le genre masculin. Ceci peut être en partie dû à l'émigration des hommes de Béguédo. La deuxième observation est relative à la baisse continuelle du taux d'évolution de la population. Un taux d'évolution en baisse se justifie par soit une natalité en recul (ce n'est pas évident avec l'indice de fécondité de 6,5 enfants/femme en 2006 dans la province) soit un solde migratoire négatif (explication plus juste au regard du caractère émigratoire des jeunes de Béguédo).

Densité et répartition spatiale

En outre, la croissance rapide de la population de Béguédo entraîne également une évolution de sa densité (561,7 habitants/km2 en 2006). Par conséquent, les populations sont tentées de se tourner vers d'autres zones proches de leur terre (migration interne) ou éloignée (migration externe). L'objectif étant de trouver de nouveaux espaces de travail.

La répartition spatiale des habitants de la commune de Béguédo permet de noter selon le RGPH (2006) une forte concentration humaine au niveau du chef-lieu qui totalisait déjà en 2006, près de 80% de la population totale, suivi de Fingla (13%) et de Diarra (5,8%). Le village de Béguédo-peuhl était de loin la moins peuplée avec 0,2% de la population totale.

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II_2.2. Structure de la population par sexe et par âge

La population de Béguédo, à l'instar de celle de la province du Boulgou et de la région du Centre-est, était constituée de 45,45% d'hommes contre 54, 55 % de femmes en 2006.78 Le rapport de masculinité qui s'en déduit est de 84 hommes pour 100 femmes contre 88 hommes pour 100 femmes au niveau régional. Par ailleurs, quand on sait que l'indice synthétique de fécondité est de 6,5 enfants par femme, on comprend qu'une bonne partie des hommes n'était pas présente lors des recensements. Et la première raison de cette absence serait leur pratique migratoire. Le tableau ci-dessus nous laisse entrevoir les chiffres du rapport de masculinité pour les quatre plus grands villages de la commune.

Tableau 2 : Structure de la population de Béguédo par sexe en 2006.

 

Hommes

Femmes

Ensemble

Rapport de masculinité

Béguédo-centre

 

6

996

 

8 343

 

15

339

 

83,9

Béguédo-peulh

 
 

83

 

86

 
 

169

 

96,5

Diarra

 
 

505

 

605

 

1

110

 

83,5

Fingla

 

1

121

 

1 414

 

2

535

 

79,3

Total

8

705

 

10

448

19

153

 

83,3

 
 

Source : Institut National de la Statistique et du Développement, 2009.

L'examen de la répartition de la population selon les grands groupes d'âge, permet de constater que 47,97% des habitants de la commune ont moins de 15 ans, 47,69% ont un âge compris entre 15 et 69 ans. Les personnes âgées (plus de 65 ans) ne représentent que 3, 89%.79 Et lorsqu'on cumule la proportion des moins de 15 ans à celle des plus de 65 ans, on constate que 51,86% de la population de Béguédo n'est pas en âge de travailler. Seuls 47,69% constituent une force de travail. Ce manque de bras valides peut se justifier par le fait que les jeunes en âge de travail préfèrent monnayer leurs forces de travail hors de Béguédo.

78 Institut National de la Statistique et du Développement (INSD), 2008, Recensement Général de la Population et de l'Habitat (RGPH) de 2006. Résultats définitifs, Ouagadougou, p. 20.

79 Conseil Municipal de Béguédo, 2015, op.cit., p. 20.

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III_ Organisation socio-administrative de la zone d'étude

Avant l'arrivée des peuples conquérants dans le « Bisako », les Bissa dans l'ensemble avaient une organisation socio-politique basée sur le système de lignage. Les villages étaient constitués de plusieurs clans, tous issus d'un même ascendant. L'organisation administrative du pays bissa n'apparaîtra qu'avec la colonisation française avant d'aboutir à sa forme actuelle.

III_1. L'organisation sociale en pays bissa

Le contact des Bissa avec les peuples envahisseurs (Moose, Dagomba, Gurunsi) a entraîné des transformations du système social préexistant dans le Bisako. Autrement dit, une nouvelle organisation sociale naît de l'assimilation des Bissa par les Moose.

Avant le contact avec les peuples envahisseurs, le Bisako était organisé en lignage. L'unité sociale et politique était le clan ou village. Le système politique existant était la gérontocratie. Ainsi, le plus âgé (le patriarche) avait la charge de s'occuper de ses pairs. En langue bissa, il s'appelait le Jitarè (pour les adeptes du Lébir) ou le Gutarè (pour les adeptes du Barka).80 B.H GUÉBRÉ explique les responsabilités du plus ancien en ces termes : « A ce titre, il était chargé de la distribution des terres aux nouveaux immigrants et à ceux qui désirent essaimer d'un site à un autre. Il avait aussi la charge de faire les sacrifices sur les autels du village pour éviter que des malheurs comme les maladies, la sécheresse, la famine et les guerres ne s'abattent sur les habitants. »81 Afin de bien gérer sa communauté, le patriarche se faisait assister par des personnes sages et dignes de confiance. B.H. GUÉBRÉ et H.A.V. ZOURÉ racontent à propos du Jitarè qu'« il nommait alors en accord avec ses administrés le Poo-zaa (responsable de la brousse), le Daasi-zaa (le responsable du marché) auxquels s'ajoute le Koyaa-zaa (responsable du fleuve) pour les riverains de cours d'eau comme à Niaogo. »82

Après le contact avec les Moose et plus récemment la mise en place du système administratif colonial, le système politique dans le Bisako est passé de la gérontocratie au

80 Il y a en général deux dialectes de la langue bissa : c'est le Lébir parlé par les habitants situés du côté Ouest de Garango et le Barka parlé par les habitants de l'Est de Garango. Armelle FAURE ajoute un troisième, le Gorminè, parlé dans la localité de Bittou.

81 GUÉBRÉ B.H, 1996, Essai sur l'origine et la mise en place du peuplement précolonial du Bisano, cas de Nyaa, province du Boulgou, Mémoire de maitrise, Université de Ouagadougou, p. 70.

82 GUÉBRÉ B.H et ZOURE H.A.V., 2009, « Le Bisako : genèse, population et organisation sociopolitique précoloniale » In HIEN Pierre Claver et GOMGNIMBOU Moustapha (dir.), Histoire des royaumes et chefferies au Burkina Faso précoloniale, Ouagadougou, CNRST, p. 322.

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système politique centralisé : c'est l'apparition des chefs coutumiers ou Naaba en moore. Le nouveau système social est construit autour du chef coutumier de chaque village. Le chef coutumier choisit des notables pour le conseiller et l'aider à diriger sa communauté. A Béguédo, il y a eu cinq chefs coutumiers en tout. Le premier était Naaba Pollé et celui en exercice actuellement est Naaba Tigré.

III_2. L'organisation administrative en pays bissa (de la période coloniale à nos jours)

Pendant la période coloniale, Béguédo était l'un des huit cantons du cercle de Garango. Il conservera ce statut de canton de Garango jusqu'en 1946, date du nouveau découpage des cercles coloniaux, où il obtient le statut de canton indépendant. Béguédo évoluera avec ce statut jusqu'à la fin de la colonisation. A la veille des indépendances, les nouvelles autorités adoptent un nouveau découpage du territoire de la Haute-Volta : Béguédo est considéré comme un village. Mais en Décembre 1985, le village de Béguédo est érigé au rang de Département de quatre (04) villages qui sont : Béguédo-centre, Béguédo-peulh, Fingla et Diarra. Avec l'adoption de la loi n°055-2004/AN portant code général des collectivités territoriales, Béguédo devient une commune rurale de la région du Centre-Est. A partir de ce moment, Béguédo était sous le contrôle de deux autorités : une autorité administrative, en la personne du Préfet et une autorité communale, représentée par le Maire. On dénombre actuellement neuf (09) villages dans la commune rurale de Béguédo.

De façon pratique à Béguédo, la gestion administrative générale est assurée par la préfecture qui représente également l'autorité judiciaire. Son action s'étend sur les différents villages sur le plan des actes administratifs. Le préfet coordonne aussi les activités de tous les services techniques étatiques à l'échelle de la commune, veille également à l'exercice des lois, règlements et politiques du gouvernement dans le département et au maintien de l'ordre public. Ensuite on trouve à la tête de la commune pour la première fois, une femme élue Maire (décédée en plein exercice le 16 juillet 2019). Elle était assistée d'un premier et d'un deuxième adjoint. Le premier adjoint, M. BARA assurait l'intérim. Le Maire est le chef de l'administration communale. Il est à la tête d'un personnel de 07 agents et est appuyé dans ses tâches par un Secrétaire Général. Les principales tâches du Maire sont l'exécution des délibérations du Conseil Municipal et la coordination de l'action de l'administration communale.

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En appui de ces autorités, on note un Conseil Municipal, qui est l'organe délibérant dans la gestion des affaires de la commune et un Conseil Villageois de Développement (CVD). Le CVD d'un village est un regroupement des forces vives dudit village doté d'une assemblée générale et d'un organe dirigeant de douze (12) membres.83

En sommes, on retient que la commune de Béguédo est située dans la province du Boulgou, laquelle province appartient à la région du Centre-Est. Son climat est du type soudano-sahélien avec des précipitations moyennes de 800 mm par an. Ses sols sont favorables à l'agriculture avec une prédominance des sols bruns eutrophes. Sa situation dans le grand bassin du Nakambé et sa proximité avec le barrage de Bagré offrent une hydrographique riche à Béguédo. Toutefois, la faible superficie de la commune, l'instabilité du climat ou encore la variation du climat d'une année à une autre, constituent autant de difficultés au développement de la commune. Concernant le cadre démographique de Béguédo, on observe une forte croissance depuis la fin de la colonisation. En 2006, la densité moyenne était de 561,7 habitants au km2 pour une commune qui n'a que 40 km2. Cette faible superficie conduit à un manque de terres pour les agriculteurs et les éleveurs. Par conséquent, ceux qui ne possèdent pas de terres agricoles sont contraints de se rendre dans les territoires proches ou éloignés, à la recherche de terres cultivables. L'organisation administrative de Béguédo a connu une évolution de la période coloniale jusqu'à nos jours. En effet, elle a commencé comme un canton dépendant de Garango avant de devenir un canton indépendant en 1946. Et pendant la période postcoloniale, elle évoluera de simple village à un département pour atteindre le statut de commune rurale en 2004.

83 Conseil Municipal de Béguédo, 2015, op.cit., p. 53.

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Chapitre II : Cadre humain et économique de la zone d'étude

A travers l'analyse des traits humains de la société bissa de Béguédo, il est question de rechercher un rattachement entre la migration de la population et les différents traits culturel, religieux, ethnique, linguistique, etc. Aussi, la recherche de meilleures conditions de vie économique étant l'un des principaux mobiles de la migration, il serait opportun d'avoir un aperçu sur les potentialités économiques de la ville. Cet aperçu nous permettra d'établir un lien de causalité entre ces potentialités et les pratiques migratoires des jeunes de Béguédo.

Il est question dans ce chapitre de donner un aperçu sur la composition ethnique, religieuse, culturelle et linguistique de la population de Béguédo tout d'abord. Ensuite, il s'agit de présenter les potentialités économiques de la commune rurale de Béguédo.

I_ Composition ethnique, linguistique et religieuse de Béguédo

A l'instar des autres peuples du Burkina Faso, le peuple bissa a développé et entretenu une identité culturelle propre à lui-même. Cette identité lui a permis de rester attaché à ses principes et valeurs fondamentaux mais aussi de se distinguer des autres peuples qui l'entourent.

I_1. La structure ethnique des Bissa

Au Burkina Faso, on dénombre une soixantaine d'ethnies réparties sur tout le territoire national. L'ethnie mossi est la plus dominante avec 48,5% de la population totale. Elle est suivie par des ethnies comme les Peulhs (7.8%), les Gulmantché (7%), les Mande (y compris les Bissa 11,4%), les Bobo (6.8%), les Gurunsi (6%), les Lobi-Dagara (4.3%), ou encore les Senoufo (2.2%)84. On remarque ainsi que sur la soixante d'ethnies, les Bissa (l'ethnie qui peuple notre zone d'étude) figurent parmi les ethnies majoritaires du pays. De ce fait, on peut se poser la question de savoir quelle est l'origine de l'ethnie bissa ? Avec quels dialectes le peuple bissa communique-t-il ?

Encerclé par les peuples envahisseurs moose à partir du XVe siècle, on a souvent l'impression que le pays bissa partage la même origine ethnique avec le peuple mossi : la famille ethnique voltaïque. En effet, les Bissa appartiennent à la famille ethnique mandé, plus précisément le sous-groupe Mandé-sud. De nos jours, on retrouve le peuple bissa majoritairement

84 Données issues du Résultat définitif du RGPH de 2006, INSD.

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dans deux provinces du Burkina Faso : le Boulgou et le Zoundwéogo. Mais GUEBRE et ZOURE rappellent que « Ce territoire [le Bisako] s'étendait au-delà de ses limites actuelles pour couvrir une partie des provinces actuelles du Ganzourgou, du Kouritenga et du Namatenga. »85 (confère carte 1 de l'annexe 3/Photos).

Malgré l'absence de données chiffrées sur les effectifs de chaque ethnie présente à Béguédo, nous avons pu avec l'aide des autorités administratives et le constat fait sur le terrain, catégoriser les principales ethnies par ordre d'importance numérique. Ce sont : les Bissa, les Moose, les Peuhl, les Haoussa. Nous avons également poussé les investigations pour savoir si l'ethnie bissa était la seule ethnie à Béguédo qui pratique les migrations internationales ? Mais une fois de plus, les source écrites et orales ont été muettes. En attendant donc d'approfondir la question dans un sujet de recherche, tout semble indiqué l'absence d'une autre migration de masse dans la commune de Béguédo en dehors de celle effectuée par les Bissa.

I_2. La composition linguistique des Bissa

La langue commune aux habitants du Bisaku est le « Bissa » ou « Bisa ». Cette langue appartient à la grande famille de langues mandé. Elle est parlée par tous ceux qui sont originaires du peuple bissa. Il y a deux dialectes de la langue bissa : le Lébir et le Barka. En fonction de la situation géographique dans le pays bissa, le dialecte utilisé varie. Ainsi, quand on se retrouve dans la partie Ouest du pays bissa (Lébinoko), c'est le Lébir qui est parlé (Zabré, Béguédo par exemple). Mais quand on est situé dans la partie Est du pays bissa (Baroko), c'est le Barka qui est utilisé (Garango, Bittou par exemple).86 La langue comme identité culturelle, est très importante car dans des situations où les moyens courants (noms, origine, ethnies, etc.) ne permettent pas de reconnaître une personne ou un peuple, la langue parlée peut renfermer beaucoup d'informations.

En ce qui concerne les langues parlées présentement à Béguédo, le dialecte Lébir est majoritairement parlé. Mais on note néanmoins la présence de locuteurs du mooré et du fulfulde.

Suite à cette présentation des caractéristiques ethnolinguistiques de Béguédo, nous retenons que ses habitants, les Bissa, ont été un peuple de mobilité durant le temps. Migration volontaire ou non, les Bissa n'hésitent pas à changer de résidence lorsqu'ils se sentent menacés

85 GUÉBRÉ B.H et ZOURE H.A.V., 2009, op.cit., p. 309.

86 GUÉBRÉ B.H et ZOURE H.A.V., 2009, Idem, p. 318.

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ou lorsque les conditions de vie ne sont pas favorables. Fiers de leur liberté, leur indépendance ou encore leur langue, les Bissa ont parfois préféré la mobilité humaine que l'assimilation à un autre peuple.

I_3. La structure religieuse des Bissa

Nous avons trouvé peu d'écrits sur les religions pratiquées dans la commune rurale de Béguédo. Nous nous sommes donc résolus aux informations émanant de nos personnes ressources mais aussi au contenu du Plan Communal de Développement disponible sur la commune.

Trois religions principales sont pratiquées dans la commune. Ce sont par ordre d'importance : l'islam ; le christianisme (catholicisme et protestantisme) et l'animisme. Comme un peu partout au Burkina Faso, le syncrétisme religieux est aussi présent dans la ville de Béguédo avec une place importante accordée aux pratiques coutumières.

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II_ Potentialités économiques de Béguédo

La population active de la commune de Béguédo s'adonne vivement à plusieurs activités à longueur de journée. La première et la principale activité économique de la commune reste l'agriculture. Elle est soutenue par l'élevage, la pêche et le commerce. Toutes ces activités économiques ont chacune une place importante dans le développement local de la ville.

II_1. L'agriculture

L'agriculture demeure la principale activité économique des populations de la commune. Elle occupe la quasi-totalité des populations qui sont avant tout des cultivateurs de céréales. Elle demeure encore une agriculture de subsistance, extensive et largement tributaire des aléas climatiques. Les céréales constituent l'alimentation de base des populations. Le mil et le sorgho sont les céréales dont la production est la plus importante dans la commune, suivis du riz et du maïs. Essentiellement destinées à la vente, les principales cultures de rente sont l'arachide, le coton, le soja et le sésame. Les populations pratiquent également des cultures maraîchères pendant la saison sèche. Ces cultures sont plus l'apanage des femmes que des hommes. Il ressort que les principales productions maraîchères dans la commune sont l'oignon, la tomate, le melon, les courgettes, les aubergines, etc.

Quant aux difficultés du secteur agricole, Irissa ZIDNABA fait le point en ces termes : « Les activités agricoles sont cependant confrontées aux aléas climatiques et aux problèmes fonciers liés à la pression démographique et à l'étroitesse de la superficie de la commune. »87 Si l'on se base sur les données du RGPH de 2006, qui fait mention d'une densité de 561,7 habitants au km2, alors des problèmes fonciers existeront sans doute dans la commune. Et ces problèmes opposeront d'une part les propriétaires fonciers et les exploitants, et d'autre part les agriculteurs et les éleveurs. D'ailleurs, les habitants de Béguédo et leurs voisins de Niaogho ont toujours en mémoire ce problème foncier qui les a opposés en 1982 et 1983. Armelle FAURE explique que « Le 26 avril 1982, les habitants de deux bourgades voisines, Niaogho et Beghedo, s'affrontent à propos de terres cultivables en région bissa, [...] On compte une vingtaine de blessés graves et divers dégâts matériels ; [...] L'année suivante (en 1983), le conflit reprend, alors que l'administration et les responsables villageois essayent de trouver les termes d'une

87 ZIDNABA, Irissa, 2016, op.cit., p. 78.

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conciliation. »88 En plus de ces problèmes fonciers et agraires, les habitants de Béguédo sont obligés de subir les caprices du climat.

En sommes, on note qu'il y a autant de potentialités agricoles à Béguédo que de difficultés dans ce même secteur. Et face à des difficultés croissantes du secteur agricole, conjuguées avec l'absence d'une réponse efficace des autorités locales et nationales à ces difficultés ; certains jeunes de la commune préfèrent quitter temporairement ou définitivement leur commune à la recherche d'autres espaces agricoles.

II_2. L'élevage

L'élevage dans la commune de Béguédo est essentiellement de type traditionnel en ce sens que les espèces produites sont des variétés locales. Il est également extensif dans la mesure où l'accent est mis sur la taille du cheptel et non sur l'accroissement des rendements. En plus, l'embouche bovine, ovine, caprine y est également pratiquée permettant ainsi aux populations de diversifier leur source de revenu et leur alimentation en viande. Même si toutes les familles à Béguédo semblent s'adonner aux activités pastorales, les grands adeptes de ce secteur restent les habitants de Béguédo-peul et ceux de Diarra.

Le domaine de l'élevage est encadré par un agent vétérinaire de l'Etat burkinabè. Plusieurs associations et groupements sont nés pour mieux organiser le secteur. Malgré cette assistance aux acteurs de l'élevage, leur grosse difficulté reste la présence des épizooties telles que le charbon symptomatique, la dermatose nodulaire, la fièvre aphteuse et la pasteurellose.89 L'importance des retenues d'eau de la commune semble faciliter la pratique de l'élevage.

L'élevage étant une activité de transhumance, il n'est pas rare de voir des populations de Béguédo se déplacer avec leurs cheptels à la recherche de pâturage ou suite à un conflit avec les paysans.

88 FAURE Armelle, 1993, « Niagho versus Beghedo : un conflit foncier à la veille de la révolution burkinabè », in Cahiers des Sciences Humaines, n° 29, p. 105.

89 ZIDNABA, Irissa, 2016, op.cit., p. 79.

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II_3. La pêche

Le Nakambé qui borde la commune à l'ouest, offre d'énormes potentialités en ressources halieutiques. La pêche est une activité naissante qui commence à occuper une place de choix dans les activités économiques de la commune. Son poids économique pour l'instant est minime vu que ses produits sont destinés en grande partie à la consommation locale. Toutefois, la présence de pêcheurs professionnels, semi-professionnels et des productrices atteste que la pisciculture est en voie de développement dans la commune. D'ailleurs, un nouveau périmètre vient d'être créé : le Périmètre Aquacole d'Intérêt Economique de Bagré (PAIE/Bagré) dont l'antenne de Niaogho est chargée du contrôle de l'activité et de l'encadrement des acteurs.90

Le faible niveau de développement du secteur piscicole de Béguédo diminue sa capacité à attirer les jeunes. Et si les potentialités de ce secteur ne sont pas perçues par les jeunes, alors ces derniers ne s'intéresseront pas à cette filière. Ce qui pourtant pourrait être un facteur de rétention de certains jeunes dans la commune.

II_4. Le commerce

Constatant la faiblesse de ces espaces agricoles, la commune de Béguédo a compris qu'elle gagnerait à faire du commerce le fondement de son économie. C'est ainsi que depuis la période précoloniale et coloniale, le village de Béguédo a été une référence dans le commerce de certains produits. Cela commença d'abord durant la période coloniale, avec la vente du cola et des esclaves sur les marchés de la Gold Coast (Ghana actuel) mais aussi des marchés intérieurs de la Haute-Volta. Pendant la période coloniale, c'est la commercialisation des oignons qui prit le dessus. Pour mémoire, c'est l'administration coloniale qui a décidé à partir de 1930 de mettre l'accent sur la production de l'oignon dans la Volta blanche et précisément à Béguédo.91 Cette politique a fait de Béguédo un véritable pôle de croissance économique pendant l'ère coloniale.

De nos jours, le commerce dans la commune de Béguédo est caractérisé toujours par un assez bon niveau de développement. Le commerce avec les pays voisins est toujours en vogue même si les produits commercialisés sont plus variés. A ce propos, Irissa ZIDNABA observe que : « En effet, la commune constitue un lieu d'échanges où les commerçants venus des pays

90 Conseil Municipal de Béguédo, 2015, op.cit., p. 44.

91 FAURE Armelle, 1993, op.cit., p. 108.

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voisins (Ghana, Togo et Bénin) apportent des produits manufacturés, des ignames, des ustensiles de cuisine, des habits pour y vendre. Les populations locales exportent à leur tour, les produits agricoles : oignons, tomates, arachides décortiquées ou fraîches, bétail. Une partie de ces produits est également acheminée vers les marchés de l'intérieur : Manga, Koupéla, Pouytenga, Tenkodogo, Ouagadougou. »92 Une autre variable du commerce contemporain de Béguédo est la forte présence des femmes dans les pratiques commerciales. On retrouve les femmes dans des activités comme la vente des légumes et des céréales, la restauration et la vente de dolo. Leur présence dans le commerce des articles et divers, reste néanmoins significative. A Béguédo-centre, elles occupent près de 30% des boutiques.93

Béguédo est un pôle d'attraction de commerçants en provenance d'une part de l'intérieur du pays et d'autre part de l'extérieur du pays. Lorsque les commerçants de Béguédo se déplacent hors de Béguédo pour la vente de leurs produits ou l'approvisionnement en de nouveaux produits, on dit qu'ils effectuent une migration de travail. De ce fait, le commerce devient un mobile d'émigration pour certaines populations de Béguédo.

Pour conclure, on retient que le peuple bissa a pu développer un espace culturel dynamique et varié au fil du temps. Il a été parfois contraint de changer de zone de résidence afin de fuir les persécutions émanant des peuples voisins ou des mesures coercitives de l'administration coloniale. Quand il n'était pas contraint, il se déplaçait volontairement avec l'esprit de revenir parmi les siens. Mais au détriment de toutes ces mobilités humaines, les Bissa en général et ceux de Béguédo en particulier ont su conserver jusqu'à nos jours certaines valeurs caractéristiques de leur culture. En outre, on a pu mettre à jour des potentialités économiques de la commune de Béguédo ; lesquelles potentialités constituent la base de développement de la commune. Toutefois, ces potentialités économiques que regorge la commune sont enjambées de difficultés. Ces difficultés sont si immenses qu'elles empêchent un développement serein de l'activité économique : c'est l'exemple des pratiques agricoles. Or, si l'agriculture n'arrive pas à employer les jeunes en âge de travailler, la résultante est que ces derniers se feront employés hors de la commune de Béguédo. L'objectif étant de trouver une activité rémunératrice pour subvenir à leurs besoins économiques. Le lien entre la disponibilité des potentialités économiques à Béguédo et la migration de la population est rapidement établi.

92 ZIDNABA, Irissa, 2016, op.cit., p. 81.

93 Conseil Municipal de Béguédo, 2015, op.cit., p. 45.

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L'étude du cadre humain et économique de Béguédo met en exergue d'abord les caractéristiques ethnique, linguistique et religieuse des Bissa de Béguédo. L'ethnie bissa appartient à la grande famille ethnique mandé et à la famille linguistique mandé. La religion majoritaire est l'islam, introduit dans la commune depuis l'époque précoloniale. Le développement économique de Béguédo s'appuie sur ces secteurs clés qui sont l'agriculture, l'élevage, la pêche et le commerce. Quand bien même que l'agriculture soit le principal secteur économique, les autres secteurs offrent de potentiels emplois aux populations. Toutefois, ces secteurs gagneront à être bien structurés afin de retenir les jeunes de la commune.

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La situation géographique de la commune de Béguédo a permis de découvrir les atouts et les contraintes du milieu physique la commune. Les sols et le relief sont en général favorables aux cultures agricoles. La présence du fleuve Nakambé et la proximité du barrage de Bagré mettent à la disposition de la commune d'immenses sources hydrauliques utilisées pour les cultures maraîchères mais aussi dans l'élevage et la pêche. La population est marquée par une forte densité de l'ordre de 561 habitants au km2. Certes, la population de la commune de Béguédo est jeune, mais la population active (48,14%) est moindre par rapport à la population inactive (51,86%). Ceci s'explique en partie par l'absence des populations en force de travail.

L'ethnie bissa est l'ethnie majoritaire de la province du Boulgou. Depuis leur installation sur le sol du Burkina Faso actuel, les Bissa ont connu une forte mobilité humaine due tantôt à des envahissements de territoires, tantôt à des mesures coercitives de l'administration coloniale. Cette tradition migratoire va se transmettre de génération en génération jusqu'à la population bissa actuelle. L'agriculture, l'élevage, la pêche et le commerce sont les principales activités de base de la commune. Elles offrent à la population une source de revenus. Cependant, de nombreuses difficultés gangrènent ces secteurs économiques de la commune et développent chez les populations un désintérêt de ces activités. Ce désintérêt serait en partie une raison de l'émigration de la population. Vu sous cet angle, on peut se poser la question de savoir : dans quel contexte les migrations internationales des Bissa ont eu lieu ? La réponse à cette question permet de comprendre les mobiles, l'évolution et la dynamique des pratiques migratoires chez les Bissa.

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DEUXIÈME PARTIE : LE CONTEXTE

HISTORIQUE DES MIGRATIONS

INTERNATIONALES DES BISSA

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Quand on étudie de près l'historique du peuplement du territoire du Burkina Faso actuel, on s'aperçoit que le Burkina Faso a été au départ une terre d'émigration. En effet, la plupart des populations traditionnelles installées sur le sol actuel du Burkina Faso ont eu des origines autres que leurs terres d'accueil. Cette situation montre que la migration en général n'est pas un phénomène nouveau pour ces populations. Toutefois, l'avènement de la colonisation viendra amplifier le phénomène migratoire en Haute-Volta (actuel Burkina Faso) avec une forte mobilisation de la main d'oeuvre voltaïque pour la mise en valeur de la colonie voltaïque mais aussi des colonies voisines. Cette mobilité humaine des populations voltaïques continuera même au-delà de la période coloniale.

Parmi les peuples qui fournissent un grand contingent de migrants au Burkina Faso, figure le peuple bissa. En réalité, les Bissa sont reconnus pour leurs fortes mobilités humaines depuis la période coloniale jusqu'à nos jours. Quand on analyse les différentes zones de départ dans le "pays bissa", on constate que les émigrés de Béguédo se démarquent encore plus dans les migrations internationales. Et comprendre la prépondérance des Bissa de Béguédo dans l'émigration par rapport aux autres peuples de la région du Centre-Est burkinabè, a été l'une des raisons du choix de Béguédo comme cadre d'étude.

Dans cette deuxième partie de notre sujet de recherche, il est question de donner dans un premier chapitre un aperçu historique des migrations internationales au Burkina Faso. Le deuxième chapitre présente l'historique des migrations internationales des Bissa.

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Chapitre III : Aperçu historique des migrations internationales au Burkina Faso

Pour mieux comprendre le contexte historique dans lequel les migrations internationales ont évolué au Burkina Faso, il est important de remonter aux origines des migrations internationales ; de découvrir les mobiles qui ont poussé les Burkinabè à l'émigration et d'analyser l'évolution des flux de migrants internationaux. En outre, la connaissance des stratégies nationales de gestion des migrations internationales permettrait de mesurer l'importance et la place des migrations dans les politiques nationales.

Le présent chapitre s'est construit autour de deux grandes parties. La première partie analyse les migrations internationales des Burkinabè d'abord, et ensuite la deuxième partie aborde la gestion nationale des migrations internationales.

I_ Migrations internationales des Burkinabè

Une analyse rétrospective sur l'histoire des migrations internationales au Burkina Faso permet de répertorier trois moments importants du phénomène. Ce sont entre autres : la création de la colonie de Haute-Volta en 1919 ; la proclamation de l'indépendance de la République de Haute-Volta en 1960 et les mesures de réajustement de l'économie ivoirienne à partir des années 1979. De ces trois dates clés, nous établissons trois périodes déterminantes des mouvements migratoires burkinabè : la période coloniale ; la période postcoloniale à 1980 et la période 1980 à nos jours.

I_1. La période coloniale (1919-1960)

La plupart des études et des recherches portant sur les migrations internationales des Burkinabè reconnaissent que l'émigration des Burkinabè (ex Voltaïques) a existé bien avant la période coloniale. Mais si l'origine des migrations internationales au Burkina Faso est souvent attribuée à la période coloniale, c'est parce que l'administration coloniale a amplifié considérablement le phénomène à travers sa politique coloniale. Abraham SONGRE disait ceci : « Avec ses diverses formes d'exploitation elle aura contribué plus que tout autre facteur aux déplacements massifs des Voltaïques à l'étranger : le travail forcé, le système d'exploitation des importantes concessions détenues par des sociétés privées, les grands travaux d'infrastructures entrepris par le colonisateur, l'enrôlement sous les drapeaux, le système du « volontariat », les motivations économiques enfin, ont provoqué une émigration massive vers presque tous les pays

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de l'Afrique occidentale : Mali, Sénégal, Ghana et Côte d'Ivoire. »94 Ainsi, les politiques coloniales vont entrainer deux types de migration des Voltaïques : la migration de travail et la migration de refuge.

A propos de la migration de travail, Irissa ZIDNABA explique que « La migration de travail a été organisée et entretenue par l'administration coloniale à travers les politiques de mise en valeur des colonies de l'Afrique Occidentale Française. »95 Cette migration a été qualifiée de migration de travail forcé dans la mesure où les migrants étaient recrutés de force dans les cercles de commandement et acheminés dans les futurs chantiers de travail. Concernant la nature et le lieu du travail à effectuer par les migrants voltaïques, le Processus de Rabat explique que : « [...] la colonie de Haute-Volta ayant eu pour fonction à l'époque, d'être le réservoir de main d'oeuvre, qui devait servir aux grands travaux d'aménagements (routes, constructions, transports, contingents de la 2e portion des conscriptions militaires) et à l'exploitation des richesses agro-industrielles des colonies voisines (café et cacao en Côte d'Ivoire, arachide au Sénégal, riz à l'Office du Niger au Soudan français, actuel Mali). »96 On remarque ainsi que même pour les deux guerres mondiales, des Voltaïques ont été recrutés. La colonie de Côte d'Ivoire a été la plus grande bénéficiaire de ces migrations de travail au regard des flux migratoires de la période coloniale. Par exemple, entre 1951 et 1958, on a enregistré 230 000 travailleurs voltaïques en destination de la Côte d'Ivoire. Ce recrutement a été l'oeuvre du Syndicat Interprofessionnel pour l'Acheminement de la Main d'oeuvre (SIAMO). Créé en janvier 1950, le SIAMO était devenu l'organisme chargé du recrutement de la main d'oeuvre voltaïque en direction de la Côte d'Ivoire. Avec la suppression du travail forcé en 1946, l'administration coloniale ne pouvait plus continuer ses mesures contraignantes de recrutement. Il fallait donc laisser la tâche à une structure privée comme le SIAMO.

Parallèlement aux migrations de travail initié par l'administration coloniale, un autre courant migratoire s'est développé durant la période coloniale : c'est la migration de refuge. Cette migration, essentiellement destinée vers la Gold Coast (Ghana actuel), était effectuée par des

94 SONGRE Abraham, 1973, L'émigration massive des Voltaïques : réalités et effets, Genève, Revue Internationale du Travail, vol 18, n°2-3, p. 22. OEuvre citée par

BOUTILLIER Jean-Louis et al., 1985, « La migration de la jeunesse du Burkina », in Cahiers de l'ORSTOM, Série sciences humaines, vol. XXI, n° 2-3, p. 243.

95 ZIDNABA Irissa, 2016, op.cit., p. 82.

96 Dialogue Euro-Africain sur la Migration et le Développement (Processus de Rabat), 2014, Guide d'utilisation des données migratoires au Burkina Faso, ICMPD-FIIAPP, p. 3.

54

Voltaïques qui ont refusé de se soumettre aux conditions inhumaines.97 Les flux migratoires de ce type de migration sont difficilement accessibles compte tenu de la nature illicite des migrations de refuge mais aussi à cause du changement d'identité des migrants une fois à destination. Ce changement d'identité allait leur permettre de ne pas se faire prendre par les autorités coloniales.

L'analyse des flux migratoires de la période coloniale permet de percevoir une évolution du contingent des migrations de travail durant la période coloniale. Elle nous permet de comprendre également les variations du choix de la zone de destination des migrants d'une période à une autre. Le premier tableau ci-dessus est consacré à l'évolution des flux migratoires de la période coloniale.

Tableau 3 : Nombre de migrants internationaux de la Haute-Volta par zones et périodes de départ.

Destinations

Périodes

 

1924-

1932

1933-

1939

1940-

1945

1946-

1950

1951-

1955

1956-

1960

Non
déclarés

TOTAL

Côte d'Ivoire

310

1 480

4 100

8 750

10 020

21 280

33 960

210

80 110

Ghana

930

3 450

3 910

5 210

7 810

12 630

15 470

700

50 110

Mali

130

500

690

1 580

610

170

350

 

4 030

Sénégal

530

920

750

1 010

910

290

420

 

4 830

Autres pays africains

1 570

3 170

2 840

2 040

970

640

950

 

12 180

 

Source : Service de la Statistique et de la Mécanographie (actuel INSD), Enquête démographique par sondage 1960-1961.

Les chiffres de ce tableau ont été obtenus grâce à une enquête démographique rétrospective menée entre 1960-1961 en Haute-Volta. Mais compte tenu du caractère rétrospectif de l'enquête, les mémoires humaines n'ont pas pu donner les chiffres justes de plus de 30 ans. Ce qui fait de ces chiffres obtenus, des chiffres minimes par rapport à la réalité. Toutefois, cette enquête officielle est très importante pour l'analyse de l'évolution des flux d'émigration car elle permet d'aboutir à quelques conclusions :

97 ZIDNABA Irissa, 2016, op.cit., p. 83.

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- La Côte d'Ivoire et la Gold Coast ont été les deux principaux pays de destination des émigrés voltaïques durant la période coloniale ;

- Les flux migratoires des voltaïques vers le Ghana ont été plus importants que ceux en destination de la Côte d'Ivoire jusqu'en 1932, date de la dislocation de la colonie de Haute-Volta. Autrement dit, les migrations de refuge ont pris la primauté sur les migrations de travail.

- A partir de 1932 jusqu'à la veille des indépendances, la Côte d'Ivoire prend la primauté des flux migratoires des Voltaïques au détriment de la Gold Coast. Ceci traduit l'importance des migrations de travail et donc de la propagation des politiques d'orientation des flux migratoires voltaïques voulue par l'administration française.

Pour comparer les flux migratoires des deux destinations, M. LARRUE, Administrateur du travail de la Haute-Volta observait ceci : les chiffres officiels en 1949 montraient que la Côte d'Ivoire recevait 50 000 travailleurs contre 25 000 au Ghana. Et les chiffres non officiels, estimaient à 150 000 le nombre de travailleurs voltaïques en Côte d'Ivoire contre 100 000 en Gold Coast.98

Par ailleurs, Serge Noël OUÉDRAOGO rappelle que « les deux courants migratoires ont continué à exister dans le cadre des migrations libres ».99

I_2. La période postcoloniale aux années 1980

Le changement des statuts politiques des colonies d'Afrique de l'Ouest, désormais des Républiques et États, n'impactera pas nécessairement les courants migratoires préexistants en Haute-Volta. En effet, les flux migratoires enclenchés pendant la période coloniale continueront de se produire. Toutefois, on constatera quelques changements. Le premier changement majeur réside dans le choix des terres d'accueil : la République de la Côte d'Ivoire100 est préférée au Ghana101. Le second grand changement a été le remplacement des migrations de travail et de fuite par des migrations conventionnelle, libre, saisonnier ou circulaire. Un dernier changement

98 CNAB, 42V272: Minutes of the first meeting of the inter-colonial conference on medical control of immigrant workers held at the office of the honorable the Directory of the medical services. Victoriaborg, Accra on Friday the 26th august 1949.

99 OUÉDRAOGO Serge Noël, 2016-2017, op.cit., p. 277.

100 Décembre 1958 : la Côte d'Ivoire devient une République autonome dans le cadre d'une association avec la France appelée Communauté française. Puis le 7 août 1960, la Côte d'Ivoire accède à l'indépendance sous le nom de République de la Côte d'Ivoire (RCI).

101 6 mars 1957 : la colonie britannique Gold Coast accède à l'indépendance sous le nom de Ghana.

56

mineur, a été le début des migrations de retour en masse de Burkinabè vivant à l'extérieur. La situation économique des nouveaux États au lendemain des indépendances est à l'origine de ces changements intervenus dans le phénomène migratoire.

Au lendemain des indépendances, la situation économique des deux principaux pays bénéficiaires des flux migratoires de la Haute-Volta, le Ghana et la Côte d'Ivoire sont dans une situation opposée. En effet, pendant que le Ghana est en train de perdre son statut de « eldorado » pour les émigrés burkinabè, la Côte d'Ivoire est en train de réaliser un « miracle économique » selon beaucoup d'auteurs.

En 1942, Serge Noël OUÉDRAOGO résume la situation économique de la Gold Coast en ces termes :

« La Gold Coast était plus attrayante que toutes les autres destinations. Elle était avantagée par la liberté de son marché du travail, ses salaires élevés, la nourriture saine et suffisante, l'absence de tracasseries administratives, l'offre plus grande et diversifiée et ayant un taux de change plus favorable a attiré les travailleurs migrants dans la localité anglaise. »102 Avec toutes ces qualités, la Gold Coast devrait continuer à attirer le maximum d'émigrés en provenance de la Haute-Volta. Mais à partir des années 1946, la Gold Coast doit faire face à des difficultés économiques suivies de l'adoption de politiques nationales défavorables au climat de travail des migrants voltaïques. Serge Noël OUÉDRAOGO explique :

« La crise économique au Ghana, notamment, ses manifestations comme la hausse du chômage, le marasme économique, la dépréciation de 44% du cedi [monnaie ghanéenne] le 27 décembre 1971, ainsi que les mesures « xénophobes », sinon de préférence nationale du régime du Premier Ministre Kofi Abrefa BUSIA, ont terni l'image de la « destination Ghana ». »103 On perçoit ainsi les mobiles ayant concourus à la chute de la destination de l'hégémonie du Ghana dans les courants migratoires voltaïques. Parallèlement, on peut s'interroger de savoir si la Côte d'Ivoire, pays en course pour le monopole des flux de migrants voltaïques, traversait les mêmes difficultés que le Ghana ?

Pour la période 1960-1980, la Côte d'Ivoire a bénéficié de situations politiques et économiques avantageuses. En fait, tout part de la dislocation de la colonie de la Haute-Volta en

102 OUÉDRAOGO Serge Noël, 2016-2017, op.cit., 258 p.

103 OUÉDRAOGO Serge Noël, Idem, 278 p.

57

1932. Après la dislocation du territoire de l'ancienne Haute-Volta, il a été convenu que les 2/3 des territoires voltaïques soient rattachés à la Côte d'Ivoire et les 1/3 restants seront répartis entre le Soudan français et le Niger. A partir de ce moment, la Côte d'Ivoire bénéficia de nouvelles terres mais surtout des hommes qui les peuplent. Ce rattachement des territoires de la Haute-Volta à la Côte d'Ivoire allait normalement augmenter le recrutement des Voltaïques dans les chantiers et plantations ivoiriens. En plus, l'administration française avait commencé à baisser les mesures coercitives à l'égard des Voltaïques, créant un climat atténué dans les relations. Sur le plan économique, à partir de 1943 la Côte d'Ivoire offrait désormais aux migrants voltaïques des salaires attractifs, des systèmes de rémunération variés, une prise en charge financière du processus de recrutement à l'arrivée du migrant en Côte d'Ivoire. Pour finir, l'arrivée du chemin de fer en 1954 à Ouagadougou et en 1934 auparavant à Bobo Dioulasso a facilité la mobilité humaine des émigrés. Autant de facteurs cumulés ont donc été à la base d'une réorientation des flux migratoires du Ghana vers la Côte d'Ivoire.

Durant la période 1960 aux années 1980, deux principaux types de migrations internationales étaient pratiqués par les Burkinabè. En effet avec la suppression du travail forcé en 1946, les Burkinabè avaient le libre choix d'effectuer une migration. C'est ainsi qu'on assiste à des départs volontaires des Burkinabè vers l'extérieur. La « migration libre » des Burkinabè revêt un double caractère. Elle prend souvent la forme d'une migration saisonnière, qui consiste à se déplacer pendant la saison sèche pour aller monnayer sa force de travail durant toute la saison et revenir avant le début de la saison des pluies. Lorsque la migration saisonnière est répétée au fil des années, on parle alors de migration circulaire pour désigner les allers et retours d'un migrant entre deux pays. Un autre type de migration apparait en Haute-Volta aux lendemains des indépendances : ce sont les « migrations conventionnelles » ou « migrations légales ». En effet, réputé être un « réservoir de main d'oeuvre », la Haute-Volta va signer des conventions avec certains pays à partir de 1960. L'objectif de ces conventions était d'offrir un cadre légal aux mouvements migratoires des populations mais aussi une protection des candidats à l'émigration. Malheureusement, la plupart de ces conventions ne durera qu'une dizaine d'années à cause des difficultés liées à sa mise en pratique.104

104 On peut citer la convention de main d'oeuvre avec la Côte d'Ivoire qui a duré 14 ans (1960-1974) ; La convention d'établissement et de circulation avec le Mali, 9 ans (1969-1978) et

La convention avec la République du Gabon, a duré 4 ans (1973-1977).

58

L'analyse des flux migratoires de la première partie de la période postcoloniale se résume par une nette domination de la destination Côte d'Ivoire par rapport à celle du Ghana. En effet, au regard du « marasme économique » de la Gold Coast dans les années 1940 et face à l'hostilité des autorités ghanéennes pour les étrangers, le Ghana a commencé à ne plus être le premier choix pour les émigrés voltaïques. La proportion des flux d'émigrés dans ce premier tableau illustre la prédominance de la destination Côte d'Ivoire.

Tableau 4 : Flux migratoires des Voltaïques des zones rurales vers l'étranger de 1969 à 1973.

Origine

Destination

Taux annuel
d'émigration
pour 1 000

 

Ghana

Autres

Total

 

204 845

10 229

2 502

215 576

20

Rurale de l'Ouest

77 761

15 163

1 254

94 178

11

Total de la zone rurale 290 714 27 484

6 553

324 753

15

 

Source : COULIBALY Sidiki et al., 1980, op.cit., p.39.

Quand bien même que ce tableau comporte quelques insuffisances (absence des émigrés en provenance des zones urbaines ; toutes les zones rurales de la Haute-Volta n'y figurent pas), force est de reconnaitre qu'il est l'un des plus importants sur les flux migratoires de cette période. En effet, ce tableau nous montre que la zone rurale mossi est la première fournisseuse de migrants à l'étranger durant la période 1969-1973. Ensuite, on observe que la Côte d'Ivoire est de loin la première destination du contingent de migrants voltaïques. Le Ghana, qui jouissait d'un immense privilège pendant la colonisation a perdu cet honneur. En plus, on constate que le taux annuel d'émigration des Voltaïques était de 15%o. Quelques années plus tard, soit en 1975, la Haute-Volta effectue le premier recensement démographique de sa population en général. Les résultats définitifs font état de 334 715 émigrés vivant à l'étranger, avec 70,4% d'hommes et 29,6% de femmes.105 On n'aperçoit pas malheureusement la répartition des émigrés par zone de destination.

Malgré la primauté du courant voltaïque vers le Ghana, aucune convention officielle de migration n'a été signée après les indépendances.

105 COUREL Marie-Françoise et al., 1979, « La population de la Haute-Volta au recensement de décembre 1975 », In Cahiers d'Outre-mer, n°125-32 année, p. 54.

59

A la fin des années 1970, le déclin de la destination du Ghana était amorcé tandis que la suprématie de la Côte d'Ivoire s'imposait dans les flux migratoires internationaux des Voltaïques. Les Burkinabè représentaient 18% de la population masculine (15 à 54 ans) de la Côte d'Ivoire. 106 Cet état de changement a été l'émanation de plusieurs facteurs économiques et politiques qui prévalaient dans les territoires d'accueil des migrants internationaux.

I_3. Les années 1980 à nos jours

Pendant que l'« Eldorado » perdait sa renommée auprès des Voltaïques, la Côte d'Ivoire semblait être le « nouveau Eldorado » des émigrés de la Haute-Volta. Les flux migratoires vers la Côte d'Ivoire témoignaient de la primauté de cette destination dans les migrations internationales. Mais à la fin des années 1978-1979, la situation économique en Côte d'Ivoire rencontre de grandes difficultés.

Entre 1978 et 1979, les deux produits d'exportation de la Côte d'Ivoire connaissent une chute de leurs cours. Et la conséquence directe de cette chute a été la contraction des marchés traditionnels du café et du cacao, marché sous-régional et international.107 Avec le ralenti économique général observé dans le monde à partir de 1980, c'est tout le commerce extérieur de la Côte d'Ivoire qui est à l'arrêt. Or, si le marché stagne, la production ralentie. C'est ainsi qu'on commence à observer des licenciements massifs des travailleurs nationaux et internationaux dans les plantations, les sociétés de transformation ou encore les chantiers publics. C'est dans ces turbulences du secteur économique que les émigrés voltaïques se retrouvent sans emplois, obligés de retourner dans leurs zones de départ. Conséquence, on observe un nouveau type de migration chez les Voltaïques : les migrations de retour. Irissa ZIDNABA revient sur cela : « Cette turbulence migratoire a été essentiellement marquée par des retours des émigrés de la Côte d'Ivoire, en majorité des femmes, des enfants et des personnes âgées de plus de 55 ans. Ces retours migratoires sont liés aux licenciements et à la baisse de revenus consécutifs à la chute des cours des produits de base, café, cacao, en 1978-1979. »108 Les données recueillies lors du Recensement Général de la Population de 1985 mentionnent la preuve des migrations de retour à travers deux chiffres :

106 BOUTILLIER Jean-Louis et al., 1985, op.cit., p. 246.

107 MOUSSA Bemba, 1985, « Les mesures de réajustement de l'économie ivoirienne face à la crise économique mondiale : leurs résultats et leurs implications sociales », In Afrique Développement/Afrique et Développement, CODESRIA, vol. 10, n°1/2, p. 151.

108 ZIDNABA Irissa, 2016, op.cit., p. 88.

60

- Seulement 83 479 Burkinabè résidaient à l'étranger contre 334 715 au premier recensement de 1975. Ces chiffres attestent de la baisse des migrations internationales des Burkinabè.

- Solde migratoire : - 170 000 en 1989 contre -11 359 en 1975 : bien que le solde migratoire reste négatif, on assiste par contre à une baisse du solde migratoire. Ce qui signifie qu'il y a eu moins d'émigrés à ce recensement que celui du précédent.109

Toutefois, Irissa ZIDNABA rappelle que les premières migrations de retour avaient commencé déjà dans les années 1970 : « Ces migrations de retour [les migrants touchés par la crise économique des années 1980 en Côte d'Ivoire] diffèrent de celles des années 1970 durant lesquelles les retours étaient plus volontaires et non contraignants. »110

Les premières réponses politiques face à la crise migratoire, engendrées par les difficultés économiques, ont été elles-mêmes des sources de nouvelles crises sociales en Côte d'Ivoire et au Burkina Faso. En effet, l'adoption d'un « Ordre de Conformité des Étrangers » au Ghana dans les années 1970 et la vulgarisation de la notion « d'ivoirité » en Côte d'Ivoire suivie de l'imposition d'une carte de séjour aux migrants dans les années 1990 ont mis les travailleurs migrants dans des situations d'instabilité professionnelle. Les migrants burkinabè ont commencé à être persécutés par certaines populations autochtones au Ghana et en Côte d'Ivoire. Face à cela, les émigrés se retrouvaient dans une mauvaise posture : revenir dans leurs pays avec le statut de migrants de retour ou émigrer dans un autre pays voisin, de la sous-région ou en Europe en tant qu'aventurier. Ces nouvelles orientations des migrants vont marquer le début de la diversification des zones d'arrivée des migrants burkinabè d'une part, et d'autre part de l'amplification des migrations de retour. Les données de l'enquête démographique de 1991 au Burkina Faso étaient sans appel : 188 331 immigrés enregistrés en dix ans d'intervalle. Et 85% de ces émigrés provenaient de la Côte d'Ivoire.111

Malgré ce contexte économique et politique défavorable à l'émigration, on a continué à enregistrer des départs au Burkina Faso vers l'étranger. Irissa ZIDNABA disait que :

109 Institut National de la Statistique et du Développement (INSD), 1989, Recensement Général de Population, décembre 1985. Analyse des résultats définitifs, Ouagadougou, Ministère du plan et de la coopération, 326 p.

110 ZIDNABA Irissa, 2016, op.cit., p. 88.

111 Institut National de la Statistique et du Développement (INSD), 1994, Analyse des données de l'Enquête Démographique de 1991. Deuxième partie : Phénomène démographique, Ouagadougou, Ministère du plan et de la coopération, 175 p.

61

« Parallèlement à ces mouvements de retour, on enregistrait des départs migratoires. Les résultats de l'enquête ont également dénombré 293 870 émigrés durant la période de référence, soit presque 49 000 personnes par an. Ces départs migratoires traduisent en partie la forte circulation migratoire entre le Burkina Faso et la Côte d'Ivoire. »112 Ces chiffres montrent que des flux migratoires ont bien continué à la veille du XXIe siècle.

A partir des années 2000, la situation socio-politique, économique et culturelle des pays au monde est très changeant et varie d'une année à une autre, d'un pays à un autre. Ces bouleversements permanents qui surviennent dans les pays font des migrants internationaux en général et des émigrés burkinabè en particulier des potentielles populations en situation permanente d'expulsion dans leurs pays d'accueil. « La crise ivoirienne de 2002, les expulsions des Burkinabè de la Libye, du Gabon et de la Guinée, ont suscité des retours massifs. »113 explique Irissa ZIDNABA. A cela s'ajoutent, les effets de la crise économique de 2008 en Italie, en Allemagne, en France ; la crise sécuritaire au nord du Mali, au nord du Nigeria ; etc. Ces crises ont toutes entrainé des vagues de migrants burkinabè de retour, parfois minime et parfois immense.

Des nouveaux concepts migratoires sont nés à partir des années 1990 et se poursuivent jusqu'à nos jours chez les migrants burkinabè. Ce sont les « migrations circulaires », les « pratiques transnationales migratoires », les « investissements migratoires », les « migrations de refuge », les « personnes déplacées internes », etc. Autrement dit, la migration connait une diversification sans précédent de ses mobiles, sa typologie, ses trajets, ses impacts. Plusieurs diasporas burkinabè existent de par le monde avec pour objectif de faciliter l'insertion de leurs compatriotes dans les zones d'accueil.

Les migrations internationales des Burkinabè peuvent être réparties en trois séquences chronologiques allant de la période coloniale à nos jours en passant par la période postcoloniale. Le contexte politique, socio-économique dans lequel se pratiquait l'émigration des Burkinabè conditionnait la nature de ces migrations : migration de travail, migration libre et volontaire, migration forcée, migration de fuite, etc. Plusieurs mobiles, dépendants (condition sociale ou économique précaire) ou indépendants (contexte politique et économique) du migrant justifiaient son choix d'émigrer. Du Ghana à la Côte d'Ivoire, puis de l'Afrique à l'Europe, tel a été le parcours résumé des migrations internationales des Burkinabè depuis la période coloniale.

112 ZIDNABA Irissa, 2016, op.cit., p. 89.

113 ZIDNABA Irissa, Idem, p. 89.

62

II_ Gestion des migrations internationales des Burkinabè

Plusieurs autorités publiques, des structures nationales, des organismes internationaux en charge de la migration, des organisations de la société civile, des partenaires techniques et financiers ont travaillé sur la question de la migration internationale des Burkinabè. Cependant, l'immensité des acteurs chargés de la question migratoire au Burkina Faso n'a pas toujours facilité l'atteinte des résultats escomptés. Pour se faire, nous allons donner un bref aperçu de la gestion des migrations internationales des Burkinabè depuis la période coloniale jusqu'à nos jours.

II_1. L'administration coloniale face à la question de la migration

Sous la période coloniale, l'administration était l'autorité compétente en charge de la mobilité humaine des Voltaïques. Elle était chargée d'organiser, d'orienter et de suivre les flux migratoires. Ainsi, des décrets et recommandations issus du Gouvernement général de l'Afrique Occidentale Française parvenaient à l'administration coloniale. Ces mesures portaient sur des actions à mener en lien avec la gestion de la main-d'oeuvre voltaïque.

Ce n'est qu'avec la création de l'Office Central du Travail (OCT), qu'une structure en charge de la gestion de la main d'oeuvre va apparaître. L'objectif principal de cet office était d'apporter une meilleure gestion à la question de la main-d'oeuvre à travers une répartition optimale des territoires de l'AOF. Par la suite, le mécanisme sera renforcé avec la création d'une structure financière pour les migrations de travail : la Caisse Provisoire de Main-d'oeuvre. Selon Serge Noël OUÉDRAOGO, cette structure « couvrait dans l'immédiat toutes les dépenses urgentes après le recrutement des manoeuvres, c'est-à-dire, le transport, les frais de route, l'hébergement, etc. »114 Toujours dans l'objectif de mieux réguler le secteur des migrations de travail, le Syndicat Interprofessionnel pour l'Acheminement de la Main-d'oeuvre (SIAMO) sera également créé en janvier 1950 en Côte d'Ivoire. Très rapidement, le SIAMO va installer des centres de recrutement à Ouagadougou, Bobo Dioulasso et Koudougou. L'objectif du syndicat était d'« assurer la migration du plan grand nombre possible de travailleurs au profit de toutes les entreprises ivoiriennes. »

114 OUÉDRAOGO Serge Noël, 2016-2017, op.cit., 171 p.

63

La période coloniale a donc été une période où la gestion de la migration avait pour but de mettre à disposition des colonies ou des entreprises privées, des migrants de travail issus de la colonie de Haute-Volta.

II_2. La gestion des migrations internationales burkinabè pendant la période postcoloniale

Il est fortement regrettable que le Burkina Faso, pays à caractère migratoire, n'ai pas pu se doter d'une politique nationale en matière de gestion des migrations dès les indépendances. Il a fallu attendre le 07 mars 2012 pour qu'une Politique Nationale de Population115 soit adoptée. C'est à cette démarche qu'on doit la mise en place en 2016 de la Stratégie Nationale pour la Migration, 2014-2025. A la question de savoir pourquoi les décideurs politiques ont mis assez d'années avant de consacrer à la migration internationale une attention particulière, la réponse la plus plausible semble être le manque de volonté de la part des premières autorités du pays.

Toutefois, d'un régime présidentiel à un autre, la situation nationale en matière d'émigration des populations a nécessité la prise de certaines mesures ou directives. C'est le cas en 1981, où le gouvernement du Comité Militaire de Redressement pour le Progrès National (CMRPN) a émis une ordonnance face à la situation économique ivoirienne dégradante. Il s'agissait de : « l'ordonnance n° 81-8 PRES.CMRPN du 11 mars 1981 portant suspension de l'émigration et du décret n° 81-135 PRES.CMRPN du 12 mars 1981 définissant les conditions de délivrance et d'utilisation du laissez-passer institué par l'ordonnance n° 81-8 PRES.CMRPN du 11 mars 1981. »116 L'objectif principal du régime militaire dirigé par le Colonel Saye ZERBO était de suspendre temporairement les migrations de travail des Voltaïques à l'étranger. En raison de plusieurs facteurs, cette ordonnance n'arrivera pas à atteindre les résultats escomptés.

Un autre régime politique, le Conseil National de la Révolution (CNR) du Capitaine Thomas Isidore SANKARA, a adopté une autre ordonnance en 1984 pour contrôler toute mobilité humaine au Burkina Faso. Il s'agissait de « l'ordonnance n°84-49 CNR.PRES du 4 août 1984 fixant les conditions d'entrée, de séjour et de sortie du Burkina Faso des nationaux et des

115 Décret n° 2012-253/PRES/PM/MEF du 7 mars 2012 a adopté l'actuelle Politique Nationale de Population qui couvre la période 2010-2030. Décret cité par le Ministère de l'Economie et de Finances, 2012, Politique Nationale de Population 2010-2030, p. 48.

116 Journal officiel de la République de Haute-Volta n° du 19 mars 1981.

64

étrangers. »117 Cette mesure dans la pratique cherchait à protéger l'émigré burkinabè lors de son activité migratoire.

Le régime politique qui s'en suivra, celui du Président Blaise COMPAORE, va se démarquer de ces prédécesseurs par la création de structures techniques et nationales en charge de la migration. C'est l'exemple de la création du Conseil Supérieur des Burkinabè de l'Étranger (CSBE) le 07 mai 1993118 puis réaménagé le 24 mai 2007119, en tant que structure chargée de la gestion de la diaspora burkinabè. D'autres actions seront posées par le gouvernement pour accompagner la diaspora : l'ouverture de nouveaux Consulats, d'Ambassade ou la participation des Burkinabè de l'Extérieur notamment ceux de la Côte d'Ivoire aux dernières élections présidentielles120 et référendaires.

De nos jours, sous la présidence de son excellence Roch Marc Christian KABORE, différentes politiques migratoires nationales sont orientées vers la mobilisation de la diaspora burkinabè afin d'en faire un partenaire financier pour le développement socio-économique du pays. C'est d'ailleurs dans cette optique, qu'en 2018, tout un Ministère est aménagé et alloué à la gestion des Burkinabè de l'Extérieur : c'est le Ministère de l'Intégration Africaine et des Burkinabè de l'Extérieur (MIABE)121. L'édification d'un Ministère chargé de la définition et de la mise en oeuvre de la politique de migration122, atteste de tout l'intérêt que les décideurs politiques actuels accordent à la question des migrations internationales des Burkinabè.

En rappel, avant même l'adoption de toutes ces mesures politiques et la création des structures de gestion des migrations internationales des Burkinabè, des accords et conventions ont été signés au lendemain des indépendances entre la Haute-Volta et quelques États de la sous-région. Ces accords établissent les termes de collaboration entre les deux États pour la gestion de la main-d'oeuvre voltaïque. Ce sont entre autres :

117 Journal officiel du Burkina Faso n° 33 du 16 août 1984.

118 Décret n° 93/132/PRES/PM/REX du 07 mai 1993 cité par OUÉDRAOGO Serge Noël, 2016-2017, op.cit., p. 211.

119 Décret n° 2007-38/PRES/PM/MAECR du 24 mai 2007 portant création, attributions, organisations et fonctionnement du Conseil Supérieur des Burkinabè de l'Étranger, Journal Officiel du Faso n° 24 du 14 juin 2007.

120 Prévu pour être effectif lors des élections de 2010 et celles de 2015, le vote des Burkinabè de l'extérieur a finalement eu lieu en 2020. Au total, 18 563 burkinabè ont pu voter en restant dans leurs pays d'accueil.

121 Décret n° 2018-0035/PRES/PM portant remaniement du Gouvernement.

122 Décret n° 2018-1162/PRES/PM/MIABE portant organisation du Ministère de l'Intégration africaine et des Burkinabè de l'extérieur.

65

- La Convention du 9 mars 1960 entre le Gouvernement de la République de Haute-Volta et le Gouvernement de la République de la Côte d'Ivoire relative aux conditions d'engagement et d'emploi des travailleurs voltaïques en Côte d'Ivoire.

- Le Protocole d'accord entre le Niger et la Haute-Volta du 23 juin 1964 autorisant la libre circulation et le droit d'établissement pour les citoyens des deux États.

- La Convention d'établissement et de circulation des personnes entre la Haute-Volta et le Mali du 30 septembre 1969.

- La Convention du 13 août 1973 entre le Gouvernement de la République de Haute-Volta et le Gouvernement de la République gabonaise relative à la coopérative technique en matière de main-d'oeuvre.

- L'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Burkina Faso relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au développement solidaire du 10 janvier 2009.

II_3. L'accompagnement des organismes sous-régionaux et mondiaux dans la gestion des
migrations internationales burkinabè

Plusieurs structures, services et directions existent sur le territoire national et sont impliquées dans la question migratoire du Burkina Faso. Certaines de ces structures sont chargées de collecter des données sur la migration : c'est le cas de l'INSD, de l'Agence Nationale pour l'Emploi, de la Direction de la Police des Frontières, etc.). D'autres par contre comme l'ISSP, les laboratoires de recherches universitaires, les structures bancaires sont spécialisées dans la production des données migratoires. Enfin, une dernière catégorie est celle du groupe des consommateurs de données produites sur la migration : les organismes sous-régionaux et internationaux, la communauté des chercheurs, les partenaires financiers, etc. De nos jours, les Organisations de la Société Civile (OSC) s'intéressent également à la question des migrations internationales et de la diaspora. C'est le cas de l'Associations Tous pour le Combat de la Solidarité et de l'Intégration (TOCSIN). Le TOCSIN, créé en 1997 a été reconnu en 2013 d'utilité publique pour ses multiples actions d'intégration et de sensibilisation des migrants burkinabè.

L'Etat burkinabè bénéficie de l'appui stratégique, technique et financier de quelques institutions internationales représentées à Ouagadougou. Il s'agit de l'Organisation Mondiale

66

pour la Migration (OIM), l'Organisation Internationale du Travail (OIT), le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR), l'Union Européenne (UE), etc.

L'analyse des flux migratoires des Burkinabè de l'extérieur permet de distinguer trois principales phases dans l'évolution des migrations internationales. La première phase, la période coloniale est celle qui a amplifié les flux migratoires. En effet, l'objectif de faire de la Haute-Volta un « réservoir de main-d'oeuvre » a entrainé la réalisation de plusieurs recrutements de travailleurs voltaïques en destination des colonies comme la Côte d'Ivoire, le Sénégal, le Mali. Mais une partie des populations s'opposa à ces migrations de travail et préféra fuir les recrutements forcés pour se réfugier dans la colonie de Gold Coast : c'est le début des migrations de fuite. Durant la période coloniale, la plus grande partie du flux migratoire était dirigée vers la Gold Coast jusqu'en 1947, période à laquelle la Côte d'Ivoire commençait à supplanter la colonie britannique. Cette dualité entre la Gold Coast et la Côte d'Ivoire dans le monopole des flux migratoires burkinabè se poursuit dans la deuxième phase : de la période postcoloniale aux années 1980. Entre 1947 à 1969, le Ghana perd donc son monopole des flux migratoires à la faveur de la Côte d'Ivoire. Tandis que l'économie ghanéenne faisait face à des difficultés, la Côte d'Ivoire réalisait un « miracle économique » avec une croissance qui attirait de plus en plus de migrants travailleurs. Les Voltaïques vont effectuer durant cette deuxième phase des migrations libres, des migrations saisonnières ou circulaires en destination de la Côte d'Ivoire. Quant à la troisième phase débutée en 1980, elle est marquée par de vastes turbulences économiques et politiques en Côte d'Ivoire. Un climat d'insécurité et de persécutions des travailleurs voltaïques s'installe. Deux nouvelles trajectoires dans les migrations apparaissent : le courant migratoire de retour en Haute-Volta et le courant migratoire en destination des pays de la sous-région, de l'Europe et même d'Amérique. C'est le début de la diversification des migrations internationales des Burkinabè. Puis à partir des années 1990-2000 jusqu'à nos jours, ce sont beaucoup plus les conditions économiques, sociales et culturelles qui poussent les jeunes burkinabè à l'émigration. La Banque Mondiale a estimé à 1 642 600 émigrés burkinabè en 2013 soit 9.6% de la population totale (population estimée à cette année à 17 600 000).123

123 World Banque Group, 2016, Migration and Remittances Factbook 2016, Third edition, [version numérique téléchargée en juillet 2020], p. 110.

67

L'évolution des flux migratoires burkinabè ne s'est pas passée à l'insu des autorités politiques. De l'administration coloniale au Gouvernement actuel en passant par les régimes présidentiels du Burkina Faso, chaque décideur politique a tenté de contrôler le phénomène migratoire. Mais sa densité et sa dynamique ont très souvent mis en échec les mesures politiques adoptées à son égard. Par conséquent, la gestion nationale des migrations se retrouve avec un bilan mitigé. Mais avec l'aménagement du Ministère de l'Intégration Africaine et des Burkinabè de l'Extérieur en 2018, nous nous attendions à une meilleure gestion nationale de la question migratoire à travers la mise en place de politiques nationales migratoires.

Nous retenons de ce chapitre, que les migrations internationales des Burkinabè ont connu trois phases majeures : la période coloniale, la période postcoloniale jusqu'aux années 1980 et la période des années 1980 à nos jours. Plusieurs mobiles ont été à la base des migrations voltaïques à l'extérieur. Il y a les contraintes coloniales, le manque de terres agricoles, les difficultés socio-économique et politique des pays d'accueil (Ghana et la Côte d'Ivoire). Pour échapper aux conséquences de ces crises, certains Burkinabè vont migrer de la Côte vers les pays africains (Gabon, Libye, Mali, etc.) ou de la Côte d'Ivoire vers les pays européens (Italie, Allemagne). Le reste des Burkinabè fera une migration de retour sur leur terre d'origine.

Quant aux migrations internationales des Bissa, ils sont similaires à celui du pays en général. On y trouve trois séquences du phénomène.

68

Chapitre IV : Historique des migrations internationales des Bissa

Les Bissa, peuples originaires du nord Ghana actuel, partagent la région du Centre-Est burkinabè avec les Moose. Au regard des multiples déplacements que le peuple bissa a subi lors de son installation dans le « Bisako », la mobilité humaine est devenue une pratique très courante. La situation économique parfois difficile associée aux mesures coercitives engendrées par l'administration coloniale, certaines populations bissa se voient contraintes à émigrer. L'histoire des migrations internationales des Bissa est étroitement liée à celle des Burkinabè dans l'ensemble. Pour ce faire, nous avons distingué trois phases dans l'historique de l'émigration des Bissa : la période coloniale ; la période postcoloniale jusqu'aux années 1980 et des années 1990 à nos jours. Béguédo est certes une ville bissa mais la forte mobilité de sa population requiert que nous établissions l'historique des migrations internationales des populations de Béguédo.

Dans ce chapitre à deux parties, nous donnons un aperçu historique des migrations internationales en pays bissa dans la première partie. La deuxième partie est consacrée à l'historique des migrations des Bissa de Béguédo.

I_ Aperçu historique des migrations internationales en pays bissa

L'analyse des mobiles, du choix de la destination ou encore de la durée des migrations internationales des Bissa a conduit à la détermination de trois principales phases dans l'historique des migrations bissa. Durant chacune de ces phases, d'importants flux migratoires sont enregistrés.

I_1. La période coloniale

Situés au sud de la Haute-Volta, les Bissa occupaient pendant la période coloniale les cercles de Zabré et de Garango et une partie du cercle de Tenkodogo. Cette situation géographique des Bissa les rapprochait de la partie nord de la colonie de Gold Coast. C'est

pourquoi ils n'ont pas hésité à émigrer en Gold Coast lorsqu'ils fuyaient les recrutements forcés
de travailleurs ou encore les recouvrements d'impôts. C'est la naissance du courant migratoire des Bissa en destination de la Gold Coast. Les populations qui acceptaient de se faire recruter dans l'armée ou les travaux à l'étranger se retrouvaient dans des colonies comme la Côte d'Ivoire, le Sénégal, le Gabon ou en Afrique du Nord. Le tableau ci-dessous nous donne une vue large de la présence des Bissa à l'extérieur mais aussi des autres ethnies.

69

Tableau 5 : Répartition des émigrations (%) selon le groupe ethnique et selon la destination.

Destination/Ethnie

Mossi

Bissa

Gourmantché

Bobo

Divers
mandingues

Gourounsi

Famille
Sénoufo

Lobi-
Dagari

Peuls

Ensemble

Côte d'Ivoire

56,2

28,2

13,6

51,9

45,9

39,2

78,9

31,8

34,7

49

Ghana

28,6

52,7

65,6

3,7

10,3

38,2

1,4

52,2

31,6

30,6

Autres pays

15,2

15,2

20,8

44,4

43,8

22,6

19,7

16

33,7

20,4

Total

100

100

100

100

100

100

100

100

100

100

 

Source : RHV et RF, 1972, p. 26.

Ce tableau sur la proportion des ethnies émigrantes de la Haute-Volta permet de savoir que les populations choisissent d'émigrer dans la zone de destination la plus proche de leur localisation géographique. Ainsi, les Bissa (sud-est), les Gourmantché (Est) et les Lobi-Dagari (Sud-ouest) sont les ethnies dominantes en Gold Coast. Par contre, les Moose et les Senoufo émigrent plus en Côte d'Ivoire. Dans l'ensemble, on retient que les Bissa représentaient une proportion importante parmi les populations émigrantes de la Haute-Volta.

70

I_2. La période postcoloniale aux années 1980

Les migrations internationales des Bissa à partir de 1960 se feront toujours en direction de la Côte d'Ivoire et du Ghana mais cette fois-ci avec deux types de mobilité : des allers et retours fréquents (migration circulaire) ou des installations définitives dans le pays d'accueil (migration définitive).

Tableau 6 : Répartition des migrations circulaires (%) selon les zones de départ et d'arrivée.

Destination

Koudougou

Yatenga

Bissa

Ouagadougou

Koupéla

Kaya

Ensemble

Côte d'Ivoire

59

50

76

54

56

52

55

Ghana

10

18

58

16

31

16

29

 

Source : RHV et RF, 1975, p. 95.

Ce tableau montre que les Bissa représentent l'ethnie qui a le plus grand nombre d'émigrés à l'étranger qui effectuent des migrations circulaires. 76% des émigrés Bissa pratiquent la migration de mobilité en Côte d'Ivoire contre 58% au Ghana. Une autre caractéristique de ce tableau est qu'il montre que seuls les Bissa continuent à migrer au Ghana. Les autres ethnies abandonnant la destination Ghana.

Les migrations internationales des Bissa pendant la période postcoloniale s'expliquent par une situation socio-économique complexe dans le pays bissa. Irissa ZIDNABA observe que :

« Les caractéristiques migratoires des Bissa tiennent aux facteurs sociohistoriques et géographiques : le système colonial et l'insalubrité liée à l'onchocercose. Les migrations de refuge vers le Ghana se sont en effet inscrites dans un contexte de refus du système colonial qui a duré jusqu'en 1947, date à laquelle le travail forcé a été aboli, favorisant ainsi les installations définitives dans les pays d'immigration. L'épidémie de l'onchocercose ne favorisait pas également des retours migratoires, notamment dans les villages riverains des cours d'eau, Nakambé, Nazinon à cause de la contagion de la maladie. »124 Ainsi dit, on comprend aisément le dilemme dans lequel étaient les émigrés bissa, celui de choisir entre revenir au pays de départ avec tous les risques que cela comporte ou soit rester dans les pays d'accueil tout en risquant de ne plus revoir leur famille d'origine.

124 ZIDNABA Irissa, 2016, op.cit., p. 94.

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L'analyse des flux migratoires des Bissa est riche en données au regard des nombreuses études qui ont été menées à partir des années 1960. Les Bissa ont une fois de plus figuré parmi les populations dominantes en matière de migrations internationales en Haute-Volta. Les résultats du Recensement Général de la Population de 1975 chiffraient à 24 605 émigrés issus de la région du Centre-Est, un nombre qui équivaut à 5,7% de la population totale résidente. Quand bien même qu'il n'y ait pas de chiffres exacts sur le nombre de Bissa émigrés, on sait tout de même que 25% des émigrés de la région appartenait à Garango (terre des Bissa)125. La recherche de meilleures conditions de vie était le principal mobile des émigrés bissa.

Le Recensement Général de la Population et de l'Habitat de 1985 fournit encore des données sur les flux migratoires des Bissa à l'international. La province du Boulgou, province peuplée en majorité par des Bissa, était la quatrième province qui fournit le plus d'émigrés avec 5,4% du flux total des émigrés du Burkina Faso. Les trois premières provinces étaient respectivement la province du Yatenga (14%), du Boulkiemdé (8%) et du Passoré (7%).126 Cette position de la province vient confirmer la présence des Bissa dans les courants migratoires internationaux. Cette place avancée des Bissa dans les mouvements migratoires au Burkina Faso les expose aussi aux bouleversements subis par les migrations internationales. A partir des années 1980, on assistait à des migrations de retour en masse dans la province du Boulgou. L'INSD avait enregistré 12 825 migrants de retour entre 1985 et 1991.127

I_3. Des années 1990 à nos jours

Les années 1990 vont constituer des années décisives dans les migrations internationales des Bissa dans la mesure où elles riment avec une approche nouvelle du phénomène migratoire. La crise sociale, économique et politique qui caractérise cette décennie sème le désarroi dans l'esprit des travailleurs étrangers. Et face aux licenciements consécutifs dû au marasme économique ivoirien, les étrangers étaient obligés de retourner sur les terres d'origine ou de s'aventurer sur de nouveaux horizons. Pour Irissa ZIDNABA, « c'est ainsi qu'à partir de ce pays [la Côte d'Ivoire], les migrants bissa ont saisi l'opportunité offerte par les réseaux cosmopolites

125 Institut National de la Statistique et du Développement (INSD), 1982, Recensement Général de la Population de 1975. Analyse des données démographiques, Département du Centre-est, Ouagadougou, République de la Haute-Volta, 57 p.

126 Institut National de la Statistique et du Développement (INSD), 1989, op.cit., 57 p.

127 Institut National de la Statistique et du Développement (INSD), 1994, Analyse des résultats de l'enquête démographique 1991, Ouagadougou, République de la Haute-Volta, 175 p.

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pour émigrer en Italie. »128 L'émigration des Burkinabè vers l'Italie venait de commencer. Le FORIM ajoute en disant que « les zones de départ sont par ailleurs beaucoup plus localisées que dans les cas français et ivoirien. Elles sont concentrées essentiellement dans la région du Centre-Est et plus spécifiquement dans la Province du Boulgou et des départements de Niahogo et de Béguédo. »129 Autrement dit, les Bissa sont l'ethnie majoritaire en Italie.

L'analyse des flux des migrations internationales des Bissa à partir des années 1990 montre deux trajectoires migratoires distinctes : les migrations de retour et les migrations en Italie. Au Recensement Général de la Population et de l'Habitat de 2006, la région du Centre-Est, région des Bissa, avait accueillie 1 653 migrants de retour. Ce chiffre est important car il équivaut à 5,6% du total des émigrés de retour au Burkina Faso.130 Cette situation traduit la pertinence de la détérioration du contexte socio-politique et économique ivoirien. Par contre, les statistiques en Italie ont connu de grands bouleversements à partir des années 2000. Le FORIM observait que « Entre 1993 et 2007, l'effectif des immigrés burkinabè dénombrés en Italie par le Ministère de l'Intérieur italien est passé de 763 à 5 178, soit une augmentation d'environ 300 individus par an. » Cela atteste que les migrants burkinabè en l'occurrence les Bissa ont décidé de faire de l'Italien, le « nouvel eldorado » après le Ghana et la Côte d'Ivoire. Le FORIM ajoute que « la croissance de l'effectif des Burkinabè en Italie s'est accélérée de 2007 à 2013 à travers une augmentation de près de 1 000 individus. »131

Depuis les années 2010, suite à la crise économique de 2007-2008 en Italie et à une mécanisation des industries, l'Italie est de moins en moins attractive pour les émigrés bissa, surtout ceux qui sont à leur première tentative migratoire. Les destinations actuelles des jeunes bissa sont entre autres le Gabon, l'Algérie, la Guinée, l'Allemagne ou encore les Etats-Unis d'Amérique.

128 ZIDNABA Irissa, 2016, op.cit., p. 95.

129 Forum des Organisations de Solidarité Internationale issue des Migrations (FORIM), 2018, Comprendre et promouvoir la contribution de la diaspora dans le développement du Burkina Faso : Etudes de cas sur les organisations diasporiques en France, Italie et Côte d'Ivoire et leur rôle dans la création et la consolidation d'emplois, Made Afrique de l'Ouest, Paris, p. 16.

130 Institut National de la Statistique et du Développement (INSD), 2009, Recensement Général de la Population et de l'Habitat (RGPH) de 2006. Analyse des résultats définitifs ; thème 8 : migration, Ouagadougou, p. 58.

131 Forum des Organisations de Solidarité Internationale issue des Migrations (FORIM), 2018, op.cit., p. 18.

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II_ Historique des migrations internationales des Bissa de Béguédo

L'histoire des migrations internationales des Bissa de Béguédo est en partie liée à l'histoire des migrations internationales des Bissa. Les premiers bissa ayant émigrés en Italie via la Côte d'Ivoire dans les années 1980 étaient en majorité des ressortissants de Béguédo. Si aujourd'hui la commune de Béguédo est souvent appelée « petit Italien » ou « little Italian », c'est aussi montrer à quel point les ressortissants de Béguédo ont fait de cette destination migratoire leur « préférence ». Par ailleurs, la génération actuelle de jeunes émigrés semble ne plus avoir les mêmes préférences que leurs aînés ou leurs parents.

Cette partie est structurée en deux points : le premier point traite des différentes vagues de migration en Italie et le deuxième point présente les nouvelles destinations des émigrés bissa de

Béguédo.

II_1. Les vagues d'émigration en Italie

L'émigration des Bissa en Italie s'est faite autour de trois vagues distinctes les unes des

autres.

Tous les Bissa de Béguédo qui ont émigré en Italie avant 1990 en provenance de la Côte d'Ivoire font partie de la première vague. Ainsi, on comprend que les premiers émigrés Bissa en Italie n'ont pas quitté Béguédo pour aller en Italie. Ils ont d'abord émigré de Béguédo en Côte d'Ivoire et de la Côte d'Ivoire à l'Italie. Irissa ZIDNABA explique qu' « ils [les émigrés bissa] ont émigré en Italie à partir de la Côte d'Ivoire comme précédemment expliqué. La plupart des pionniers sont des Bissa qui se sont appuyés sur leurs relations professionnelles nées avec des cadres italiens en fin de mandat. »132 Quant au nombre et aux mobiles des émigrés bissa de Béguédo en Italie, Bernard HAZARD observe qu'« À partir de 1987, en fonction du processus de recomposition des espaces migratoires en Afrique de l'Ouest, les anciens migrants de Côte d'Ivoire reconvertis dans le commerce allèrent alors tenter leur chance en Italie, dans l'espoir de trouver des fonds permettant de redynamiser leurs affaires. De là, entre 1987 et 1994, ils organisèrent une filière familiale qui permit à un millier de Béguédolais de « partir à l'aventure », d'où ils assurèrent une diversification des sources de production de revenus et un

132 ZIDNABA Irissa, 2016, op.cit., p. 100.

74

accroissement de la rente migratoire. »133 Mais pour plus de détails sur les pionniers de l'émigration bissa en Italie, Irissa ZIDNABA explique que le premier bissa à émigrer en Italie en partant de la Côte d'Ivoire est originaire du village de Ouarégou (5km de Béguédo) et c'était en 1973. Le deuxième bissa est allé en 1975 en provenance de la Côte d'Ivoire mais cette fois-ci originaire de Béguédo.134

La deuxième vague concerne tous les Bissa de Béguédo qui ont émigré en Italie entre 1990 et 1994. En effet, craignant une arrivée massive d'étrangers sur son sol, l'Italie a décidé de conditionner l'accès sur son territoire aux émigrés par la présentation d'un visa à partir de 1994. Mais avant, la loi 419 du 30 décembre 1989 dite « loi Martelli » adoptée en février 1990135 avait commencé à contrôler les entrées en Italie et établir des quotas annuels aux émigrés. Par ailleurs, au regard du besoin ardent en main d'oeuvre des activités arboricoles et maraichères au Sud de l'Italie, des migrations clandestines ou illégales étaient organisées : c'est le début de l'immigration clandestine en Europe. En d'autres termes, cette loi dit loi Martelli n'a pas pu arrêter les émigrations des Bissa en Italie. Les Bissa ont usé de leurs réseaux familiaux pour aider les nouveaux à s'insérer en Italie. Il y a eu très peu de chiffres sur les émigrés de la deuxième vague au regard du type d'émigration qui prévalait. Toutefois, Éric-Bertrand Pasba BANGRE note que le Ministère de l'intérieur italien a délivré 769 permis de séjour à des émigrés Burkinabè136 qui sont en majorité des émigrés bissa.

Les émigrés bissa de Béguédo arrivés en Italie à partir de 1994 sont des émigrés de la troisième vague. Ils sont rentrés sur le sol italien à travers deux stratégies : les migrations de regroupements familiaux et l'immigration clandestine. Pour les émigrés ayant utilisés le premier canal, Irissa ZIDNABA explique que « le regroupement familial est un droit accordé au travailleur migrant résidant légalement dans un pays donné de réunir les membres de sa famille afin de rétablir l'unité familiale de façon permanente. » C'est donc en application de ce droit, que la plupart des émigrés de la première vague vont faire émigrer leurs femmes, leurs enfants et leurs parents proches. Les candidats à l'émigration n'ayant pas donc d'affiliation avec un immigrant bissa en Italie étaient contraints d'utiliser l'autre canal : celui de l'immigration

133 HAZARD Benoît, 2004, op.cit., p. 8.

134 ZIDNABA Irissa, 2016, op.cit., p. 100.

135 ZIDNABA Irissa, 2016, Idem, p. 101.

136 BANGRE Eric-Bertrand Pasba, 2005, op.cit., p.95.

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clandestine. Toutefois, les émigrés clandestins avaient une trajectoire migratoire différente car ils devaient transiter par la région de Naples (Sud de l'Italie) avant de rejoindre la région du Nord, plus industrialisée avec des droits de travail meilleurs que ceux du Sud. 137 Deux des caractéristiques de cette troisième vague migratoire en Italie sont la jeunesse de ses émigrés mais aussi la présence du genre féminin. Tous les Bissa qui émigrent actuellement en Italie sont classés dans cette troisième vague migratoire.

II_2. Les nouvelles destinations des émigrés bissa de Béguédo

L'Italie n'est pas la seule zone d'accueil des émigrés bissa. Ce pays a juste eu le mérite d'être la première destination des Bissa en Europe mais aussi d'avoir permis à plus de trois générations de populations bissa de pouvoir se ressourcer financièrement pour offrir de meilleures conditions de vie économique à leurs familles d'origine.

Par ailleurs, avec la crise économique de 2008 qui a entrainé deux recessons en Italie (2008-2009 et 2011-2012), le marché de l'emploi de la main d'oeuvre non qualifiée s'est atténué. Il devenait plus difficile d'obtenir un emploi sans une qualification dans un domaine. Aussi, la modernisation de l'agriculture italienne à partir des années 2000 a rendu minime le besoin en main d'oeuvre agricole. Souvent qualifiés de « cultivateurs de tomates » par les autres ethnies burkinabè, la force de travail des émigrés bissa semble ne plus être nécessaire en Italie. Bref, on assiste doucement à une saturation du marché italien. La réorientation du flux migratoire des Bissa commence à se faire valoir.

A cette même période en Afrique, d'autres pays laissaient entrevoir des besoins de main d'oeuvre pour soutenir leurs secteurs économiques. En effet, certains pays de l'Afrique du Nord, de l'Afrique centrale et de l'Afrique de l'Ouest ont mis en place une économie florissante. C'est pour cela que de nos jours, les émigrés bissa sont plus attirés par des destinations africaines comme le Gabon, l'Algérie, la Guinée, la Libye, etc. Ces pays africains se révèlent être en majorité des territoires de transit vers l'Europe pour les émigrés.

En sommes, on retient que ce chapitre sur les migrations internationales des Bissa nous a permis de retracer l'historique d'un phénomène débuté au XXe siècle pour se poursuivre au siècle suivant. En effet, l'administration coloniale semble avoir été la variable qui a intensifié

137 Forum des Organisations de Solidarité Internationale issue des Migrations (FORIM), 2018, op.cit., p. 30.

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l'émigration des Bissa. Les premières destinations étaient le Ghana et la Côte d'Ivoire puis vint la traversée du continent africain vers l'Europe. Les flux migratoires produits lors des migrations des Bissa à l'étranger sont énormes et sont restés constants dans la majorité du temps.

Les Bissa de Béguédo se singularisent dans cette émigration de masse pour avoir eu le mérite d'être aujourd'hui l'ethnie majoritaire d'émigrés en Italie. Ce statut leur confère de nombreux avantages tels que l'amélioration des conditions de vie de leurs familles restées à Béguédo, la réalisation d'investissement immobilier à usage économique ou social, des investissements économiques.

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En guise de conclusion, on retient que cette deuxième partie qui traite du contexte des migrations internationales des Bissa a permis de découvrir le climat socio-économique et politique dans lequel les migrations internationales des Burkinabè en général et des Bissa en particulier se sont déroulées. Partis de l'étude des migrations des Burkinabè à l'étranger dans un premier temps, nous avons pu établir que les mesures administratives prises pendant la colonisation ont été à l'origine de la migration de masse des Voltaïques avant les années 1960. Puis, ce sont les potentialités économiques de la Gold Coast (Ghana actuel) qui attireront les travailleurs voltaïques avant que la Côte d'Ivoire offre à son tour des conditions économiques plus attractives aux Burkinabè. On s'aperçoit donc que les principales destinations des émigrés burkinabè ont été le Ghana et la Côte d'Ivoire dans un premier temps puis le reste de l'Afrique et de l'Europe dans un second temps.

Les migrations internationales des Bissa, une des ethnies les plus mobiles du Burkina Faso, est singulière mais pas assez différente de celles des Burkinabè en général. L'émigration des Bissa tire son origine également de la période coloniale avec les mêmes zones d'arrivée : Ghana, Côte d'Ivoire, Italie. C'est surtout la préférence de l'Italie (comme zone de destination) aux autres pays européens par les Bissa qui fait la particularité de cette émigration. Les émigrés bissa ont fait de l'Italie leur « fief » en réalisant de fortes émigrations de masses depuis les années 1980 jusqu'à nos jours. Ce choix de destination des Bissa semble être efficace au regard des investissements réalisés par ces derniers en pays bissa. Et c'est justement en termes d'impacts socio-économiques des migrations internationales, que les émigrés de la commune de Béguédo ou « les Italiens »138 attirent toute l'attention de leurs confrères. Par conséquent, on peut se demander de savoir : quels sont les impacts socio-économiques des migrations internationales dans la commune de Béguédo ?

138 Le terme Italien a été attribué aux émigrés bissa d'Italie. Le terme offre un certain nombre de prestiges à son porteur construisant un certain mythe au passage. Le rêve de nombreux candidats à l'émigration est de pouvoir porter un jour ce titre d'Italien nous confient les jeunes de la commune de Béguédo.

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TROISIÈME PARTIE : IMPACTS SOCIO-

ÉCONOMIQUES DES MIGRATIONS

 

79

Plusieurs travaux scientifiques ont été effectués sur la migration avec des problématiques aussi diverses que riches en enseignement. La problématique de la contribution des migrations au développement économique des pays bénéficiaires revêt de plus en plus une importance au sein de la communauté scientifique et des décideurs publics. En effet, les transferts de fonds des migrants constituent la première source de financement en Afrique se situant en première position devant les investissements directs étrangers (IDE) et l'aide publique au développement (APD) selon une étude publiée par le Policy Center for the New Sud139.

Pour une petite commune comme Béguédo de par sa superficie, les migrations internationales de sa population semblent avoir des impacts sur le développement social et économique de la commune. Il s'avère important de montrer en quoi les fonds transférés par les émigrés améliorent la vie sociale et économique des ménages bénéficiaires ? Quels types d'investissements sont réalisés par les émigrés à travers les fonds transférés ? Dans quelle mesure les investissements des émigrés contribuent-ils à accélérer la croissance de Béguédo ? Quelles peuvent être les retombées négatives du phénomène migratoire sur les populations de la commune ? Pour répondre à toutes ces questions, des données statistiques ont été mises à contribution (appuyées d'enquêtes terrains) sur la ville de Béguédo lors de ces trois (03) dernières années soient de 2017 à 2019. Toutefois, comme annoncer au début de notre étude, nous accordons plus d'intérêt aux effets positifs de l'émigration à Béguédo qu'aux conséquences négatives.

Cette troisième partie est subdivisée en deux chapitres. Le premier chapitre présente les caractéristiques des ménages de la commune de Béguédo. Le deuxième chapitre révèle les fonds et les investissements des émigrés de Béguédo puis évoque les retombées négatives de la migration sur Béguédo.

139 OUMANSOUR Nor-eddine et al., 2019, Les transferts de fonds des migrants vers l'Afrique exercent-ils un effet de levier sur l'investissement et sur la croissance économique ? Rabat, Policy Center for the New Sud, p.7.

80

Chapitre V : Caractéristiques des ménages de la commune de Béguédo

Selon l'INSD, « Le ménage est une unité socio-économique de base au sein de laquelle les différents membres, apparentés ou non, vivent dans la même maison ou concession, mettent en commun leurs ressources et satisfont en commun à l'essentiel de leurs besoins alimentaires et autres besoins vitaux, sous l'autorité d'une seule et même personne appelée chef de ménage.140 On distingue dans la commune de Béguédo 3 267 ménages (RGPH 2006) répartis en 7 villages. D'un ménage à un autre, les conditions de vie socio-économique diffèrent. Malgré le fait que chaque ménage ait ses propres conditions de vie socio-économique, nous pouvons toutefois les regrouper en deux grands groupes : les ménages n'ayant pas d'émigrés et les ménages ayant des émigrés. Nous appelons ici ménages n'ayant pas d'émigrés les ménages dans lesquels il n'y a aucun membre de la famille vivant hors du Burkina Faso. A l'opposé, les ménages ayant des émigrés sont les familles dans lesquelles un ou plusieurs membres vivent à l'extérieur du Burkina Faso. Les données recueillies sur les fonds transférés par les migrants couvrent la période de 2017-2019

I_ Les caractéristiques sociales des ménages

Les caractéristiques sociales d'un ménage renvoient à l'ensemble des indices permettant de déterminer le niveau de vie sociale de ce ménage. Ces indices sont liés à la structuration du ménage (taille du ménage ou la zone de résidence) ou soit à des caractéristiques du chef de ménage (âge, sexe, statut matrimonial, niveau d'instruction).

Tableau 7 : Caractéristiques des ménages enquêtés à Béguédo

Type de ménages

Ménage n'ayant pas
d'émigrés (en %)

Ménage ayant des
émigrés (en %)

Ensemble (en

%)

Taille moyenne du ménage

6,16 personnes

8,29 personnes

7,22 personnes

Age moyen du CM

36,1 ans

44,3 ans

40,2 ans

Pourcentage des hommes CM

91,9

95

93,45

Pourcentage des femmes CM

8,1

5

6,55

 

140 Institut National de la Statistique et du Développement (INSD), 2009, Analyse des résultats définitifs : évaluation de la qualité des données, Ouagadougou, Burkina Faso, Ministère de l'économie et des finances, [version numérique obtenue en juin 2021], p. 28.

81

Pourcentage des CM lettrés

76,25

68,12

72,18

Pourcentage des CM illettrés

23,75

31,87

27,82

Pourcentage des CM Mariés

73,75

87,5

80.62

Pourcentage des CM Célibataires

15,62

7,5

11,56

Pourcentage des CM Divorcés

5

1,87

3,43

Pourcentage des CM Veufs (ves)

5,62

3,12

4,37

 

Source : Enquête terrain d'août à septembre 2019.

I_1. La taille et la zone de résidence des ménages

Les ménages ayant des émigrés ont plus de membres dans leur famille que les ménages qui n'ont pas d'émigrés. La preuve en est que la taille moyenne des ménages est de 8,29 pour les ménages ayant des émigrés contre 6,16 pour les ménages n'ayant pas d'émigrés. La principale raison avancée pour justifier cet écart réside dans l'adoption d'un style de vie communautaire caractérisé par des familles élargies des ménages ayant des émigrés. Autrement dit, on trouve plus de familles monoparentales élargies dans les ménages ayant des émigrés tandis que dans les ménages n'ayant pas d'émigrés, ce sont des familles monoparentales rétrécies.

Parmi les neuf (09) villages que compte de nos jours la commune de Béguédo, seul le village de Béguédo-centre a connu un lotissement en 1997. Les huit autres villages sont donc classés comme des zones non loties. Notre enquête terrain s'est étendue sur une zone lotie (Béguédo-centre) et deux zones non loties (Fingla et Diarra).

I_2. Répartition par âge et par sexe des chefs de ménages

Sur un ensemble de 320 ménages enquêtés (160 ménages ayant des émigrés et 160 n'ayant pas des émigrés), il ressort une inégale répartition par âge et par sexe de ces ménages. En effet, l'âge moyen des chefs de ménages enquêtés est de 40,2 ans, ce qui atteste de la jeunesse des chefs de ménages. Mais lorsqu'on inclut la variable de migration dans les ménages, l'écart est important avec 36,1 ans en moyenne pour les chefs de ménage n'ayant pas d'émigrés contre 44,3 ans en moyenne pour les chefs de ménage ayant des émigrés. Cet écart s'explique par le fait que dans les familles ayant des émigrés, les personnes âgées sont plus nombreuses que dans les familles n'ayant pas d'émigrés où les jeunes deviennent des chefs de ménages plutôt.

82

En ce qui concerne le caractère sexuel des chefs de ménages, la différence est nette : 93,45% des ménages sont dirigés par des hommes contre 6,55% de femmes chefs de ménage. Dans les ménages n'ayant pas d'émigrés, 91,9% des chefs de ménages sont des hommes contre 8,1% de femmes. Le constat est un peu plus grand dans les ménages ayant des émigrés avec 95% de chefs de ménages hommes contre 5% de chefs de ménages femmes.

Graphique 1 : âge moyen des CM Graphique 2 : Répartition par sexe des CM

Ménage sans émigrés Ménage avec émigrés

91,9

8,125 5

95

Ménage avec émigrés

44,3

Ménage sans émigrés

36,1

Source : Enquête terrain d'août à septembre 2019. Source : Enquête terrain d'août à septembre 2019.

I_3. Le statut matrimonial des chefs de ménages

Sur les 320 ménages enquêtés, 80,62% des chefs de ménages sont mariés ; 11,56% sont célibataires ; 3,43% sont divorcés et 4,37% sont des veufs (ves). Ceci fait état de l'importance que les habitants de Béguédo accordent au sacrément de mariage.

Les ménages ayant des émigrés sont les familles où il y a plus de CM mariés et moins de célibataires ainsi que de divorcés et de veufs. En effet, 87,5% des CM dans les ménages ayant des émigrés sont mariés contre 73,75% des CM chez les ménages n'ayant pas d'émigrés. Aussi, on compte seulement 7,5% de célibataires dans les ménages ayant des émigrés contre jusqu'à 15,62% des CM célibataires chez les ménages n'ayant pas d'émigrés. Même constat quand on compare le pourcentage des divorcés et des veufs : 1,87% de divorcés chez les ménages ayant des émigrés contre 5% dans l'autre camp et 3,12% de veufs chez le camp des émigrés contre 5,62% dans les ménages n'ayant pas d'émigrés. Les premières conclusions montrent qu'il y a beaucoup plus de mariages célébrés dans les familles ayant d'émigrés que dans les familles n'en ayant pas.

83

Graphique 3 : situation matrimoniale des chefs de ménage (en pourcentage)

100,00

40,00

90,00

80,00

70,00

60,00

50,00

30,00

20,00

10,00

-

73,75

Ménages sans émigrés Ménages avec émigrés

15,63

Marié Célibataire Divorcé Veuf (ve)

5,00

5,63

87,50

7,50

1,88

3,13

Source : Enquête terrain d'août à septembre 2019.

I_4. Le niveau d'instruction des chefs de ménages

L'analyse du niveau d'instruction (enseignement laïc et enseignement religieux) des chefs de ménage montre qu'en moyenne 72,18% des chefs de ménage sont instruits contre 27,82% non instruits. Ce taux élevé d'instruction est dû au passage des CM par l'école coranique ou par l'école franco-arabe (plus des 2/3). L'école francophone n'ayant pas réussie à tous. En rappel, l'islam est la religion majoritaire à Béguédo.

Les ménages n'ayant pas d'émigrés enregistrent les CM les plus instruits avec 76,25% contre 68,12% de CM instruits dans les ménages ayant des émigrés. Ici aussi, l'instruction est basée sur le passage dans une école coranique ou dans une école franco-arabe. La stabilité des CM n'ayant pas d'émigrés à Béguédo est l'une des raisons de leur niveau d'instruction élevé.

Graphique 4 : répartition par niveau d'instruction des chefs de ménages

CM instruits

72,18

27,82

CM non instruits

Source : Enquête terrain d'août à septembre 2019.

84

Encadré 1 : écarts du niveau de vie sociale des ménages

Quand on essaie de comparer le statut social des deux types de ménage à Béguédo, les ménages ayant des émigrés et les ménages n'ayant pas des émigrés ; deux (02) variables permettent aux ménages ayant des émigrés dans leur famille d'avoir une position sociale nettement meilleure que les ménages ne comptant pas d'émigrés dans leur rang, ce sont :

§ Les ménages ayant des émigrés ont plus de personnes dans leurs concessions (8.29 personnes en moyenne) que les ménages n'ayant pas d'émigrés (6,16 personnes) : la stabilité financière permet d'accueillir et prendre en charge des membres n'appartenant pas à la famille directe ;

§ Les chefs de ménage des foyers ayant des émigrés se marient beaucoup plus (87,5%) que les chefs de famille n'ayant pas d'émigrés (73,75%) : le statut de marié permet de prouver à la société sa responsabilité et sa capacité à prendre en charge une famille. Et avec l'appui des émigrés, la célébration d'un mariage semble devenir une question de choix et non une question de moyens financiers.

85

II_ Les conditions économiques des ménages

Les conditions économiques d'un ménage font état des biens et du niveau de vie économique du ménage. Cela prend en compte le type d'habitation du ménage, les biens individuels et collectifs mais aussi l'accès à l'éducation, à l'électricité, à l'eau ou encore aux soins sanitaires.

II_1. Caractéristiques de l'habitat

Tableau 8 : Caractéristiques des habitats des ménages enquêtés à Béguédo

Caractéristiques de l'habitat

 

Ménage n'ayant pas Ménage ayant des

d'émigrés émigrés

Moyenne

 
 

1. Type d'habitat (en %)

 
 

Immeuble à appartements

 

0

2.50

1.25

Maison traditionnelle (case)

 

11.87

6.25

9.06

Villa

 

13.12

9.37

11.24

Maison individuelle

 

32.5

27.5

30

Bâtiments à plusieurs logements

 

42.50

54.37

48.43

 
 

2. Nature du toit (en %)

 
 

Terre

 

1.25

2.5

1.87

Pailles

 

21.88

10

15.94

Tôles

 

76.88

87.5

82.19

 
 

3. Nature des murs (en %)

 
 

Béton

 

5

5.63

5.31

Briques de terre

 

30.62

16.25

22.81

Ciment

 

64.38

78.13

71.25

 
 

4. Statut d'occupation (en %)

 
 

Locataire

 

16.25

6.87

11.56

Propriétaire

 

83.75

93.12

88.43

 

5.

Possession d'autres habitats (en %)

 
 
 

Plus

 

2.50

3.10

2.80

Trois

 

3.75

4.38

4.06

Deux

 

10

21.30

15.65

Un

 

20

30.63

25.31

Zéro

 

64

41

52.50

Source : Enquête terrain d'août à septembre 2019.

86

Au Burkina Faso, avoir un habitat où s'abriter est très important pour la population mais avoir un habitat de très haut niveau témoigne du statut social et économique du possesseur. Cet état de fait est aussi présent dans la commune de Béguédo. Analyser l'habitat de nos ménages conduit à comparer le type d'habitat, le statut d'occupation, la nature des murs et des toits.

II_1.1- Type d'habitat

Quand on s'intéresse au type d'habitat des ménages enquêtés, on s'aperçoit que la plupart des CM (48,43%) vivent dans des bâtiments à plusieurs logements (une maison principale à laquelle est rattachée de petits logements). Cette proportion est encore élevée avec les ménages ayant des émigrés car 54,35% des CM ayant des émigrés vivent dans des bâtiments à plusieurs logements contre 42,5% des CM n'ayant pas d'émigrés. Après les bâtiments à plusieurs logements viennent les maisons individuelles (une seule petite ou moyenne maison construite dans l'espace réservé au ménage) qui constituent les habitats de 27,5% des CM ayant des émigrés et 32,5% des CM n'ayant pas d'émigrés. Puis s'en suivent les villas (une seule vaste maison construite dans l'espace réservé au ménage) où vivent 9,37% des CM ayant des émigrés contre 13,12% des CM n'ayant pas d'émigrés. On rencontre enfin dans la commune de Béguédo des cases (6,25% des CM ayant des émigrés contre 11,87% des CM n'ayant pas d'émigrés) puis quelques immeubles à appartements (2,5% des CM ayant des émigrés contre aucun CM n'ayant pas d'émigrés). Une fois le type d'habitation des ménages connu, qu'en est-il de la nature des murs et du toit ?

II_1.2- Nature du toit

En ce qui concerne la nature des toits, l'enquête rapporte que la plupart des habitations des ménages ont un toit en tôle : 82,19% des ménages. Le reste des ménages ont un toit soit en pailles (15,94%) soit en terre (1,87%). Des écarts existent quand on compare la nature du toit des deux types de ménages. En effet 87,5% des ménages ayant des émigrés ont un toit en tôle contre 76,88% des ménages n'ayant pas d'émigrés. Aussi, tandis que seulement 10% des ménages ayant des émigrés ont un toit en pailles, jusqu'à 21,88% des ménages n'ayant pas d'émigrés ont toujours un toit en pailles. Par contre, les ménages n'ayant pas d'émigrés ont moins de toit en terre (1,25%) que les ménages ayant d'émigrés (2,5%).

87

II_1.3- Nature des murs

Même s'il existe des murs en béton et en terre, la majorité des murs des ménages enquêtés (71,25%) est en ciment. Ce chiffre va jusqu'à 78,13% pour les familles ayant des émigrés contre 64,38% pour les familles n'ayant pas d'émigrés. Pour les murs en brique de terre, c'est seulement 16,25% des ménages ayant des émigrés contre 30,62% des ménages n'ayant pas d'émigrés. 5,62% des ménages ayant des émigrés ont pu dresser des murs en béton contre 5% des ménages n'ayant pas d'émigrés : ceci atteste de la qualité des infrastructures.

II_1.4- Statut d'occupation

Quand bien même que les ménages de Béguédo offrent des habitations d'un niveau élevé comme celles des villes modernes, on peut se demander quand même de savoir si ces habitations sont la propriété ou non des ménages qui y vivent ? La réponse est oui car 88,43% des ménages enquêtés sont propriétaires des habitations. Pour les familles ayant des émigrés, ce pourcentage va jusqu'à 93,12 contre 83,5 pour les familles sans émigrés.

II_1.5- Possession d'autres habitats

Pour la possession d'autres habitations en dehors de la principale, il ressort que la moitié des ménages n'ont aucune habitation de plus que l'endroit où ils vivent : 52,5%. La partie restante a soit un habitat de plus (25,31%), deux (15,65%), trois (4,06%) et plus de trois (2,8%).

II_2. Fonctionnement des ménages

Tableau 9 : Quelques points de fonctionnement des ménages enquêtés à Béguédo.

Caractéristiques du ménage

 

Ménage n'ayant pas Ménage ayant des

d'émigrés émigrés

Moyenne

 

1.

Accès à l'alimentation (en %)

 
 

Un repas/ jour

 

24

8

16

Deux repas/ jour

 

43.80

23.25

33.52

Trois repas/ jour

 

31

62.50

46.75

Quatre repas/ jour

 

1.20

6.25

3.72

88

 

2. Accès aux soins sanitaires (en %)

 
 

Fréquentation des dispensaires

79.37

86.25

82.81

Automédication

20.62

13.75

17.18

3.

Accès à l'éducation (en nombre et en %)

 
 

Enfants inscrits à l'école

257 enfants 296 enfants

276.50 enfants

Enfants inscrits au Public

55.25

53.72

54.48

Enfants inscrits au Privé

23.70

28.70

26.20

Enfants inscrits au Public et au Privé

21.01

17.56

19.28

4. Principale source d'accès à l'eau de boisson (en %)

 

Abonnés de BADCOM

23.12

42.5

32.81

Utilisateurs d'eau de forage

31.25

44.38

37.81

Utilisateurs d'eau de puits

37.50

12.50

25

Utilisateurs d'eau de rivière

8.12

0.62

4.37

5. Principale source d'accès à l'électricité (en %)

 

Abonnées de la COOPEL

40.13

49.01

44.57

Utilisateurs de panneaux solaires

48.98

49.02

49

Utilisateurs de lampes à pétrole

6.12

1.30

3.71

Utilisateurs de lampes rechargeables

4.76

0.65

2.70

6. Principale source de cuisson des aliments (en %)

 

Gaz butane

33.12

73.12

53.12

Bois de chauffe

39.37

15

27.18

Charbon de bois

27.50

11.87

19.68

7.

Mode d'évacuation des ordures (en %)

 
 

Coin du quartier

43.12

31.25

37.18

Poubelle privée

25.62

28.75

27.18

Poubelle publique

31.25

40

35.62

Source : Enquête terrain d'août à septembre 2019.

II_2.1- Accès à l'alimentation

Le nombre de repas pris par jour par les familles au Burkina Faso varie entre un à trois repas. A Béguédo dans les ménages enquêtés, acquérir trois repas par jour demeure un combat

89

quotidien. En effet, dans les familles n'ayant pas d'émigrés, seulement 31% des 160 ménages peuvent s'offrir trois repas par jour. La plupart n'ayant que deux repas par jour (43,8%). Le reste a soit un repas par jour (24%) soit quatre repas par jour (1.2%). Toutefois, la situation économique des familles ayant des émigrés semble être meilleure car jusqu'à 62.5% des ménages ont trois repas au quotidien ; 23.25% ont deux repas par jour et seulement 8% ont un repas par jour. 6.25% s'offrent le luxe d'avoir 4 repas quotidien. On retient donc que les familles avec émigrés s'offrent plus de repas quotidiens que celles sans émigrés.

II_2.2- Accès aux soins sanitaires

82,81%, c'est le taux de fréquentation des centres médicaux de la population de la commune rurale de Béguédo. Ce chiffre témoigne donc de l'engagement de la population auprès de la médecine moderne, ce qui n'est pas certain dans les autres communes environnantes. Les ménages ayant des émigrés ont encore un taux de fréquentation des dispensaires beaucoup plus élevé (86,25%) que les ménages n'ayant pas d'émigrés (79,37%). Quant aux adeptes de l'automédication avec tous ses risques, seulement 13,75% s'y adonnent dans les ménages ayant des émigrés contre 20,62% de ménages n'ayant pas d'émigrés.

II_2.3- Accès à l'éducation

L'école formelle laïque n'étant toujours pas gratuite au pays des hommes intègres, son accès et sa fréquentation requièrent des parents d'élèves des fonds financiers chaque année. Par conséquent, tous les parents n'arrivent pas à scolariser leurs enfants ou soit le font mais pour une courte durée. Cette difficulté financière est l'une des raisons du fort taux d'inscription des élèves dans les écoles publiques vu que les coûts sont moindres par rapport aux écoles privées. En effet, 54,48% des élèves des ménages enquêtés sont inscrits dans des écoles publiques, 26,20% dans des écoles privées de la ville et les 19,28% sont inscrits à la fois dans des écoles publiques et privées.

II_2.4- Principale source d'accès à l'eau de boisson

Nous avons normalement tous accès à l'eau mais consommer de l'eau pure et potable au quotidien s'avère des fois être un luxe pour certaines familles dans certaines zones. Dans le cadre de notre enquête, est considérée comme eau potable et de boisson toute eau fournie par la société

90

BADCOM141 l'eau de robinet et l'eau de forage. L'eau de puits142, de rivière et de surface ne sont pas considérées potables au regard de l'absence de tout traitement préalable. Quand on s'intéresse aux chiffres, les familles ayant des émigrés ont le mieux accès à l'eau potable. Autrement dit, 86,88% des familles ayant des émigrés consomment de l'eau potable contre 54,37% des familles n'ayant pas d'émigrés. Ceci atteste de la capacité des familles ayant des émigrés à s'offrir des conditions de vie meilleure dans leurs ménages.

II_2.5- Principale source d'accès à l'électricité

Sa facilité d'acquisition, d'installation et son énergie permanente font que les ménages à Béguédo se tournent de plus en plus vers l'énergie solaire au détriment de l'énergie électrique gérée par la COOPEL. En effet, 93,57% des concessions ont un éclairage électrique parfait au quotidien. Sauf 6,41% utilisent des lampes rechargeables ou à pétrole pour s'éclairer les nuits. Et quand on compare les deux types de ménages, les chiffres sont intéressants : la quasi-totalité des ménages ayant des émigrés ont accès à l'électricité (98,03%) contre 89,11% des ménages n'ayant pas d'émigrés.

II_2.6- Principale source de cuisson des aliments

Le gaz butane est de loin l'énergie adéquate et adaptée pour la cuisson des aliments mais son acquisition nécessitant des frais, toutes les familles n'arrivent pas à l'utiliser. Ces familles se contentent alors des énergies classiques comme le charbon de bois ou le bois de chauffe (avec des conséquences néfastes pour la nature). Parmi nos ménages enquêtés, c'est jusqu'à 73,12% des ménages ayant des émigrés qui utilisent le gaz butane comme énergie pour la cuisine, 15% utilisent le bois de chauffe et les 11,87% se contentent du charbon de bois. Dans les ménages n'ayant pas d'émigrés, ceux qui utilisent le gaz butane ne représentent que 33,12% ; le reste utilise soit du bois de chauffe (39,37%) ou du charbon de bois (27,5%).

II_2.7- Mode d'évacuation des ordures

L'assainissement de la commune ne semble pas être une priorité à ce que l'on voit car de nombreux domaines restent sans plan de développement : le traitement des eaux usées, la

141 La société privée d'eau BADCOM ne couvre qu'une seule zone : Béguédo-centre. Donc les huit autres villages n'y ont pas accès rendant ainsi son taux d'abonnement très faible.

142 La plupart des puits que nous avons visités ne sont pas protégés et donc exposés à l'air libre.

91

construction des toilettes publiques/privées ou encore le traitement des ordures. Quand on prend le traitement des ordures, de nombreux progrès restent à faire par les ménages pour assainir leurs foyers. En effet, seulement 28,75% des ménages avec des émigrés ont une poubelle privée où stocker leurs ordures de ménage avant de les détruire contre 25,62% dans les ménages sans émigrés. Ensuite 40% des familles ayant des émigrés font l'effort d'aller stocker leurs ordures dans les poubelles publiques aménagés par quartier/secteur contre 31,25% des familles n'ayant pas d'émigrés. Enfin, pour les concessions qui font des coins de la rue leur dépotoirs d'ordures, on en compte 31,25% dans les familles avec émigrés contre 43,12% des familles sans émigrés. Bref, des initiatives doivent être prises pour changer les attitudes des ménages et les rendre beaucoup plus sains.

II_3. Biens et équipements des ménages

Tableau 10 : Quelques biens et équipements des ménages enquêtés à Béguédo.

Nature du bien

Ménage n'ayant pas Ménage ayant des

d'émigrés émigrés

Moyenne

 

1. Biens d'équipement (en %)

 

Radio

19.60 7.62

13.61

Télévision

15.65 29.87

22.76

Ordinateur

9.25 5.48

7.36

Matelas

12.10 11.58

11.84

Meubles

5.33 13.11

9.22

Chaises en bois/plastiques

37.36 27.74

32.55

Réfrigérateur

0.71 4.57

2.64

 

2. Principal moyen de déplacement (en %)

 

Pieds

14.38 2.5

8.44

Bicyclette

17.5 8.75

13.12

Mobylette

40 53.12

46.56

Moto tricycle

8.12 10.62

9.37

Voiture

20 25

22.50

 

3. Possession d'appareil téléphonique (en %)

 

Dispose d'un cellulaire

88.75 99.38

94.06

Ne dispose pas de cellulaire

11.25 0.62

5.93

92

 
 

4. Accès à internet (en %)

 

Utilisateurs d'internet

 

67 90

78.50

Non utilisateurs d'internet

 

33 10

21.50

 

5.

Coût de la connexion mensuelle (en %)

 

Moins de 5.000 F.CFA

 

66.66 33.33

49.99

Entre 5.000 et 15.000 F.CFA

 

27.77 52.77

40.27

Plus de 15.000 F.CFA

 

5.55 13.88

9.74

 
 

6. Accès à un emploi (en %)

 

Inactifs

 

2.5 11.87

7.18

Salariés du secteur public

 

0.62 0.62

0.62

Salariés du secteur privée

 

4.37 0

2.18

Travailleurs indépendants

 

92.51 87.51

90.01

Source : Enquête terrain d'août à septembre 2019.

II_3.1- Biens d'équipement

Toutes les familles enquêtées, qu'elles aient un membre à l'extérieur ou pas, possèdent des biens d'équipement dans leurs concessions. Seulement, la différence réside dans la quantité, la qualité et la valeur du bien. Ainsi, le bien le plus présent dans les ménages sont les chaises en bois ou en plastique (32,55%) et le bien le moins utilisé dans les ménages est le réfrigérateur (2,64%). Plus le ménage n'a pas de fortes conditions économiques, plus ses biens sont limités. En effet, quand on prend un outil comme la télévision, 29,87% des ménages ayant des émigrés en possèdent contre 15,65% des ménages sans émigrés. Un autre exemple, c'est celui des meubles où 13,11% des familles ayant des émigrés en possèdent contre 5,33% de l'autre côté. Quant au réfrigérateur, lui il est présent dans 4,57% des ménages avec émigrés contre 0,71% de ménages sans émigrés. La balance penche encore du côté des familles ayant des émigrés.

II_3.2- Principal moyen de déplacement143

Avec 46,56% des ménages, la mobylette est le moyen de déplacement le plus utilisé dans les ménages de la commune. Le reste des ménages utilise leurs pieds, leurs bicyclettes, leurs tricycles ou leurs voitures pour se déplacer. Bien plus souvent, le moyen de déplacement utilisé par le Chef de ménage témoigne de ses conditions de vie économique. Ainsi, les CM n'ayant pas

143 Jl y a des chefs de ménage qui possèdent plusieurs moyens de déplacement dans leur ménage mais c'est le moyen de déplacement le plus utilisé qui a été retenu ici.

93

d'émigrés se déplacent beaucoup plus à pied (14,38%) que les CM ayant des émigrés dans leurs ménages (2,5%). Aussi la bicyclette est plus utilisée par les CM n'ayant pas d'émigrés (17,5%) que par ceux ayant des émigrés (8,75%). Quand on arrive à la mobylette, la tendance change puisque 53,12% des CM ayant des émigrés utilisent la mobylette contre 40% de ceux n'en ayant pas. Pour la moto tricycle, 10,62% des ménages avec émigrés la possèdent contre 8,12% des ménages sans émigrés. Enfin 25% des CM ayant des émigrés ont une voiture contre 20% des CM n'ayant pas d'émigrés.

II_3.3- Possession d'appareil téléphonique

En ce XXIe siècle, on dirait qu'il est quasiment impossible de vivre sans téléphone au regard de son utilité mais hélas, à Béguédo des familles n'ont toujours pas accès à cet outil de communication. En effet, dans les familles ayant des émigrés, la quasi-totalité des CM (99,38%) utilise des téléphones contre seulement (0,62%) qui n'en utilise pas. Par contre dans les familles n'ayant pas d'émigrés, la situation reste un peu difficile avec 88,75% des CM possédant des téléphones contre 11,25% ne possédant pas de téléphone.

II_3.4- Accès à internet

Si toutes les familles ne peuvent pas s'offrir des téléphones, il est fort probable que toutes les familles n'aient pas accès à internet. En effet, sur les 160 ménages ayant des émigrés, sauf 10% n'ont pas accès à internet sinon le reste (90%) surfe sur internet. Cependant, dans les 160 autres ménages sans émigrés, seulement 67% ont accès à internet et les 33% restants sont sans connexion.

II_3.5- Coût de la connexion mensuelle

Une chose est d'avoir accès à internet mais une autre est d'en avoir les moyens pour se procurer des passes (forfaits internet). Des fois, votre régularité sur internet est fonction de votre capacité financière à avoir en permanence des forfaits internet. A Béguédo quand on compare les internautes, les internautes ayant des émigrés dépensent plus pour l'achat des forfaits internet que les internautes n'ayant pas d'émigrés. Pour preuve, c'est seulement 33,33% des CM ayant des émigrés qui achètent chaque mois des forfaits internet à moins de 5.000 francs contre 66,66% des CM n'ayant pas d'émigrés. Mais quand on passe aux CM qui consacrent entre 5.000 et 15.000 francs comme frais de connexion par mois, ce sont 52,77% des CM ayant des émigrés qui le font

94

contre 27,77% des CM sans émigrés. L'écart existe encore quand on arrive aux CM qui dépensent plus de 15.000 francs par mois pour leur connexion : c'est 13,88% des CM avec émigrés contre seulement 5,55% des CM n'ayant pas d'émigrés.

II_3.6- Accès à un emploi

Parmi les 320 ménages enquêtés, nous avons rencontré très rarement des CM inactifs (7.27%). Et ces CM inactifs sont soit des élèves/étudiants soit des femmes ménagères qui vivent grâce aux transferts de fonds des émigrés de leurs familles. Le reste des CM sont soit des salariés de la fonction publique (0,62%) ; soit des salariés du privé (2,18%) ou soit des travailleurs indépendants (90,01%). A Béguédo, que vous ayez des émigrés dans votre famille ou non, les chefs de ménage ont pour la plupart un métier qui leur permette dans un premier temps de subvenir à leurs besoins fondamentaux qui sont l'alimentation, la santé et le logement. Quant au faible taux de salariés publics, il s'explique par le fait que nous avons rencontré très peu dans notre échantillon (2 salariés) au regard du statut de "petite commune rurale" qu'a la ville.

95

Encadré 2 : écarts du niveau de vie économique des ménages

La comparaison des deux types de ménage (ménages ayant des émigrés versus ménages n'ayant pas d'émigrés) de notre étude a fait ressortir d'importantes différences sur leurs conditions économiques. Des variables comme l'habitat, l'accès à l'eau potable, l'accès à l'alimentation, l'énergie de cuisson des aliments, les moyens de déplacement ou encore l'usage de la connexion internet nous ont permis de comprendre que les familles qui avaient ne serait-ce qu'un membre à l'extérieur, jouissent de conditions de vie meilleure que les familles ne comptant pas d'émigrés dans leur rang. En chiffre, ça donne ceci :

Quand on analyse l'habitat, les ménages bénéficiant de l'aide financière des émigrés ont un meilleur habitat que les ménages n'en bénéficiant pas. Ceci se constate sur le choix des murs de l'habitat (en ciment ou en béton), sur le choix du toit (en tôle) et enfin sur le modèle de l'habitat (villa ou logement à plusieurs appartements). Les ménages ayant des émigrés prennent le dessus avec au moins un écart de 10% ;

Après l'habitat, c'est sur l'accès en eau potable de boisson que les ménages ayant des émigrés font la différence : 86,88% pour les foyers avec émigrés contre 54,37% pour les foyers sans émigrés ;

Quant à comparer les capacités nutritionnelles de chaque famille, les familles ayant des émigrés semblent se nourrir deux fois plus que celles n'ayant pas d'émigrés car 62,5% d'entre eux ont accès à trois repas par jour contre 31% de l'autre côté ;

C'est le même constat quand l'objet de comparaison est l'énergie utilisée pour la cuisson des aliments : 73,12% des ménages ayant des émigrés utilisent le gaz butane pour cuir leurs aliments contre 33,12% des ménages n'ayant pas d'émigrés ;

Si l'on part du principe que les moyens de déplacement les plus commodes sont la mobylette et la voiture, alors les ménages ayant des émigrés ont un pouvoir d'achat supérieur à ceux n'ayant pas d'émigrés car 78,12% des CM se déplacent grâce à ces deux engins contre 60% de CM n'ayant pas d'émigrés ;

Un dernier objet de comparaison est celui de la connexion internet : 90% des CM ayant des émigrés se connectent à internet contre seulement 67% du côté des CM sans émigrés. Aussi les CM ayant des émigrés allouent beaucoup d'argent à l'achat de forfaits de connexion que les autres CM.

96

Chapitre VI : Fonds et investissement dans la commune de Béguédo

La commune rurale de Béguédo alimente son économie grâce à des sources de financements internes et externes. Les fonds internes proviennent en général des secteurs d'activités comme l'agriculture, l'élevage et le commerce. Quant aux fonds externes, ils proviennent des partenaires financier et technique de la commune et de l'émigration des fils et filles de la commune. Mais dans le cadre de cette étude, il est question d'analyser les transferts de fonds effectués par les émigrés de Béguédo dans un premier temps. Et dans un second temps, nous présentons les différents investissements réalisés à Béguédo grâce aux fonds transférés.

I_ Les envois de fonds des émigrés à Béguédo

Les envois de fonds encore appelé transferts de fonds, désignent généralement l'argent ou les biens144 que les migrants envoient à leur famille et à leurs amis dans leurs pays d'origine. Il arrive que ces transferts constituent souvent le lien le plus direct et le plus connu entre migration et développement. Le rapatriement de fonds dépasse largement l'aide publique au développement depuis une dizaine d'années. Mais avant, ces transactions devront passer par plusieurs canaux pour parvenir aux destinataires. Ces canaux de transfert sont soit des canaux formels (banques, institutions financières d'envois d'argent, téléphonies mobiles, etc.) ou soit des canaux informels (les proches en voyage, l'insertion dans des envois de matériels, etc.).

I_1. Volume des transferts à Béguédo

Tableau 11 : Fonds transférés dans les ménages enquêtés de 2017 à 2019.

Années

Montant des transferts

Moyenne annuelle

2016-2017

28

400

000

61 552 333

2017-2018

44

129

000

2018-2019

112

128

000

TOTAL

184

657

000

Source : Enquête terrain d'août à septembre 2019

144 Dans le cadre de cette étude, nous n'allons pas prendre en compte les transferts de bien (appareils électroménagers, téléviseur, vêtements, réfrigérateur, etc.) car nous manquons de compétences pour estimer le coût de ces biens.

97

Sur les 160 ménages enquêtés et classés comme des ménages ayant des émigrés, la quasi-totalité des chefs de ménages (96,25%)145 reçoit des transferts de fonds chaque année en provenance d'autres pays. Ces fonds reçus sont transférés de façon irrégulière et le volume vari d'une famille à une autre et d'une année à une autre. Les principales allocations de ces fonds transférés sont la construction de logements sociaux (40%), la gestion de la famille (25%) et pour d'autres occasions (35%).

Partant du tableau ci-dessus, on voit que c'est en moyenne 61 552 333 francs CFA qui sont transférés chaque année à Béguédo de 2017 à 2019. Quant au volume annuel perçu par notre échantillon de ménages à Béguédo, il est évalué à 112 128 000 millions de francs CFA pour la période 2019-2018. Ce volume est en croissance linéaire car il a quitté de 28 400 000 entre 20172018 pour atteindre les 112 128 000 en 2019. Cette croissance du volume des transferts s'explique par « l'augmentation des émigrés dans les familles ; l'amélioration des conditions de travail à l'étranger et l'augmentation du sens de redevabilité des émigrés envers leurs familles d'origine » selon S.A.K, ancien émigrant en Italie. Ajoutons que cette croissance du volume des transferts peut se justifier par le fait que plus nous avons reculé dans le temps pour récolter les données auprès des CM, plus nous avons constaté qu'ils oubliaient le montant exact des fonds reçus. Conséquence, après les deux récentes années, plus de la moitié des familles ne se souvenaient plus du montant reçu de la part de leurs émigrés.

Par ailleurs, il faut noter que la Banque Mondiale a estimé en 2019, à 476 millions de dollar américain (environ 263 milliards de francs CFA) les transferts de fonds des migrants vers le Burkina Faso146. Malheureusement, notre échantillon représentatif sur les ménages enquêtés à Béguédo ne nous permet pas d'établir une comparaison avec les données nationales (10% du nombre total de ménages enquêtés). Cette comparaison allait nous montrer la proportion des transferts de fonds de Béguédo par rapport aux transferts de fonds en destination du Burkina Faso en général. Aussi, même si tous les ménages de la commune avaient été enquêtés, les données resteraient limitées car Béguédo ne représente qu'une seule commune parmi les 301 communes rurales que compte le pays.

145 Ce pourcentage correspond à 154 ménages sur 160 bénéficiant des transferts de fonds. Les 6 familles qui ne reçoivent pas de transfert des émigrés s'explique par le fait que soit l'émigré est parti de Béguédo il y a moins de 3 mois soit parce qu'il a des difficultés à trouver du travail dans son pays d'arrivée.

146 World Banque International, October 2020, Inward Remittance flows, excel sheet.

98

Graphique 5 : Répartition des fonds transférés à Béguédo lors des cinq (05) dernières années.

160000 000

112128 000

44129 000

28400 000

1800 000 2100 000

140000 000

120000 000

100000 000

80000 000

60000 000

40000 000

20000 000

-

Source : Enquête terrain d'août à septembre 2019.

2014015 20152016 2

I_2. Pays de provenance des fonds

Tableau 12 : Répartition en % des fonds reçus selon le pays et le continent de provenance (20182019)

PAYS

Pourcentage

Total

EUROPE

Belgique

0,40

43,65

France

0,40

Italie

42,06

Norvège

0,40

Turquie

0,40

AFRIQUE

Algérie

14,68

56,35

Angola

0,79

Cameroun

0,79

Côte d'Ivoire

2,38

Egypte

0,4

Gabon

22,22

Ghana

0,4

Guinée

11,51

Guinée équatoriale

1,59

Libye

1,19

Togo

0,4

Source : Enquête terrain d'août à septembre 2019

99

La moitié des fonds reçus par les ménages enquêtés provient du continent africain (56,35%) représenté par des pays comme le Gabon ou l'Algérie. Mais quand on compare les pays de provenance, c'est l'Italie qui est le premier pourvoyeur de fonds avec 42,06% des fonds reçus. Ceci s'explique par le fait que l'Italie soit une destination historique des Burkinabè en général et des habitants de Béguédo en particulier. L'Italie est suivie de loin par le Gabon avec 22,22% des fonds reçus à Béguédo. Enfin, plus de neuf (09) pays sur les seize (16) ont un pourcentage inférieur à 1% des fonds transférés.

Graphique 6 : Répartition en % des fonds reçus selon le pays d'envoi (2018-2019).

 

22,22

 

14,68

 
 
 

11,51

 
 

2,38

 

1,59

 
 
 

1,19

 
 
 

0,79

 

0,79

0,40

 

0,40

 
 
 

0,40

 
 

42,

0,40

0,40

0,40

 
 
 

0,40

 

- 5,00 10,00 15,00 20,00 25,00 30,00 35,00 40,00 45,00

6

Gabon

Algérie

Guinée Conakry

Côte d'Ivoire

Guinée Equatoriale

Libye

Cameroun

Angola

Togo

Ghana

Egypte

Italie

Norvège

Turquie

France

Belgique

Source : Enquête terrain d'août à septembre 2019

I_3. Caractéristiques des émigrés

Tableau 13 : Caractéristiques des émigrés de la commune de Béguédo.

 

SEXE

 

AGE

Masculin

212

Nombre

%

%

84,80

Moins de 20 ans

11

4,40

Féminin

38

20-40 ans

216

86,40

%

15,20

40-60 ans

21

8,40

 

Plus de 60 ans

2

0,80

Source : Enquête terrain d'août à septembre 2019

100

Les hommes sont les plus nombreux parmi les émigrés à rapatrier des fonds à Béguédo, soit 84,80% d'hommes contre 15,20% de femmes. Cet écart se justifie par le fait que les hommes émigrent beaucoup plus que les femmes.

Quant à l'âge des sexes des émigrés, la majorité d'entre eux a un âge compris entre 20 et 40 ans (86,40%). Ensuite vient la tranche des 40 à 60 ans (8,40%) ; des plus de 60 ans (0,80%) et enfin la tranche des moins de 20 ans (4,40%). Si la plupart des émigrés ont entre 20 à 40 ans, c'est parce selon Jean Marie Bambara (commerçant à Béguédo) que « les employeurs à l'extérieur préfèrent embaucher des jeunes virils et physiquement bien portants que d'employer des hommes un peu vieux ou trop jeune ».

I_4. Canaux de transfert des fonds

La voix par laquelle les émigrés de Béguédo passent pour venir en aide à leurs familles ou pour investir dans la ville est appelée canal de transferts de fonds. On distingue plusieurs canaux de transferts de fonds regroupés en deux grands groupes : les canaux formels et les canaux informels.

I_4.1- Les canaux formels

Les émigrés privilégient les canaux formels lors de leur rapatriement de fonds car ces canaux sont simples, sûrs et rapides. Toutefois, les frais de transfert sont souvent très chers ; ce qui amène d'autres émigrés à passer par des voix informelles pour envoyer leurs fonds. Parmi les canaux de transferts formels, on retrouve :

§ Les banques : Coris Bank ; Ecobank, Société Général, Banque atlantique, etc.

§ Les transferts instantanés : Western union, Ria, Money gram, Rapid transfert, Wari, Transfert SONAPOST, etc.

§ Les sociétés de transfert mobile : Mobicash, Orange money, Yup, Coris money ; etc.147

I_1.2- Les canaux informels

Une partie des fonds transférée à Béguédo ne ressort pas dans les données statistiques de rapatriement de fonds car ces fonds passent par des canaux informels. Les objectifs des émigrés

147 Dans le cadre de notre étude, nous n'avons pas pu collecter des données quantitatives sur les transferts d'argent via les canaux formels.

101

en utilisant les canaux informels sont selon les émigrés d'éviter le payement des frais de transaction ; de profiter du retour d'un émigré au pays ; d'éviter les contrôles des cartes de séjour en se rendant en ville ; etc. Quelques exemples de canaux informels de rapatriement :

§ Les compagnies de transport terrestre et aérien disposant d'un service courrier ;

§ Les voyageurs : qui sont les personnes désirant rentrer en famille pour un séjour ;

§ Le mandat postal : disparu en 2018, il permettait d'envoyer et de recevoir des fonds sans passer par la banque et sans frais de retrait ;

L'envoi d'argent en espèce par des proches rentrant au pays ne ressort pas dans les statistiques officielles de rapatriement d'argent. Et selon l'Organisation de Coopération et de Développement Economique (OCDE), ces transferts informels pourraient représenter 35% à 75% des flux financiers comptabilisés, en fonction d'une région à une autre.

102

II_ Les investissements des émigrés à Béguédo

Les fonds rapatriés par les émigrés à Béguédo en provenance de plusieurs pays d'Afrique et d'Europe sont alloués à deux types d'investissement : les investissements individuels et les investissements collectifs.

II_1. Les investissements individuels

Tableau 14 : Répartition en % des fonds reçus selon le motif économique.

MOTIFS ECONOMIQUES

PROPORTION EN %

Investissements immobiliers

40

Consommation courante

24.81

Education

16.67

Evènements
familiaux/religieux

Festivités

8.15

 

0.74

Autres investissements
individuels

Santé

5.93

 

1.85

 

1.48

 

0.37

TOTAL

100

 

Source : Enquête terrain d'août à septembre 2019

On parle d'investissements individuels lorsque les fonds envoyés par l'émigré sont destinés à répondre uniquement à un ou plusieurs besoins de sa famille d'origine ou au lancement d'une activité. Parmi ces besoins, on peut citer la consommation courante, la santé, l'éducation, l'investissement immobilier ou encore les évènements religieux.

II_1.1- Les investissements immobiliers

Les investissements immobiliers ou encore les constructions de logements sociaux constituent le premier motif de transfert de fonds vers Béguédo car ils représentent 40% des fonds rapatriés. En effet, investir dans l'immobilier semble être le premier souci des émigrés une fois qu'ils obtiennent un travail. « Tous les émigrés rêvent de construire des habitats descends et

103

durables pour les familles car c'est le premier signe de réussite de la famille. » selon B. F., agent retraité de la préfecture.

Si les émigrés investissent tant dans la construction ou la réhabilitation de bâtiments, c'est aussi pour soutenir la mairie dans son objectif de faire de Béguédo une ville moderne et attractive. Et vue que l'urbanisation d'une ville passe en grande partie par les investissements immobiliers, alors les émigrés ne ménagent aucun effort à s'y donner. Grâce à ces investissements, Béguédo de nos jours n'affiche plus l'image d'une simple communale rurale éloignée de la capitale burkinabè mais plutôt l'image d'une ville en pleine croissance. En rappel, ces constructions de logement sont réalisées en grande partie par les familles ayant des émigrés.

II_1.2- La consommation courante

Après les investissements dans l'immobilier, vient la consommation courante avec 24,81% des fonds reçus à Béguédo. Il faut entendre par consommation courante l'ensemble des besoins familiaux nécessitant un financement. Parmi ces besoins, on peut citer :

§ La restauration des membres de la famille de l'émigré avec deux ou trois repas quotidiens en fonction des moyens de chaque CM ;

§ L'équipement des logements avec des appareils électroniques (téléphone, télévisions, radios, etc.), des appareils électroménagers (foyer de cuisine, four électrique, etc.), des meubles, etc. ;

§ L'acquisition en vêtements et en chaussures, la gestion des dépenses imprévues.

II_1.3- L'éducation

L'éducation ou la scolarisation des enfants à Béguédo occupe la troisième place des motifs économiques de transfert de fonds avec 16,67% des fonds reçus par les familles. Ceci atteste de l'engouement qu'ont les émigrés à l'égard de la scolarisation de leurs enfants, les frères et soeurs, leurs cousins, etc. Cet appui à l'éducation contribue à diminuer l'envie des jeunes à aller à l'aventure selon les propos de Monsieur Noro BARA, Maire par intérim de la commune de Béguédo. K. A, étudiant à Ouagadougou, nous racontait ceci : « Si je n'avais pas des oncles et des frères à l'extérieur actuellement, je n'aurai pas pu poursuivre mes études car j'allais

104

chercher à aller en aventure. Mais aujourd'hui, je n'ai aucune envie de quitter le pays sans avoir terminer mes études ». (Béguédo, mai 2019)

On peut retenir de ces témoignages que l'appui des émigrés à l'éducation des membres de la famille contribue énormément à l'élévation du taux d'alphabétisation des jeunes de la commune148.

II_1.4- Les évènements familiaux ou religieux

La quatrième place dans l'allocation des fonds rapatriés par les émigrés est occupée par les évènements familiaux et religieux à hauteur de 8,15% des fonds reçus. Ainsi, l'aide financière des émigrés est sollicitée par le CM lors des événements tels que les mariages, les baptêmes religieux, les funérailles, les fêtes religieuses, les fêtes nationales, etc. Les évènements religieux et familiaux sont des évènements temporaires.

G. M déclara que c'est « Grâce à mes enfants qui sont à l'extérieur (Gabon et Algérie), je ne suis plus stressé dans l'organisation des fêtes. Chacun de mes fils m'envoient une somme suffisante pour les fêtes ». On retient de là que les émigrés contribuent énormément au bien-être des ménages en leur offrant de meilleures conditions de vie.

Béguédo étant une ville à majorité musulmane, le pèlerinage à la Mecque est le désir ultime de la plupart des CM. Et pour arriver à accomplir ce désir qui coûte des millions de francs CFA, les CM sont obligés de demander l'aide à leur fils. C'est ainsi que 0,74% des fonds rapatriés servent à exécuter ce pilier de l'islam. « Si je meurs aujourd'hui, je n'aurai aucun regret car grâce à mes enfants en Italie j'ai pu accomplir le dernier pilier de l'islam qui me restait : le pèlerinage à la Mecque » dixit B. H.

II_1.5- Autres investissements individuels

Les fonds rapatriés à Béguédo ne servent pas uniquement à subvenir aux investissements immobiliers, aux besoins de consommation, aux besoins d'éducation. Ces fonds permettent de prendre en charges d'autres charges financières des ménages. En effet, 5,93% des fonds rapatriés sont alloués à la santé des ménages ayant des émigrés. Vient ensuite l'achat de moyens de

148 Nos recherches ne nous ont pas permis d'obtenir des données chiffrées sur le taux d'alphabétisation de la commune de Béguédo.

105

déplacement (souvent plus de trois motos/voitures dans les ménages) 1,85%. Le reste des fonds est alloué au petit commerce (1,48%) et la réhabilitation des logements sociaux (0,37%). Les émigrés soutiennent massivement le commerce local en aidant leurs familles à installer ou à agrandir les activités commerciales. A titre de témoignage, S.!, un marchand à Béguédo nous disait ceci : « C'est grâce à mon frère qui est en Italie que j'ai pu ouvrir mon magasin de matériaux de construction. Il m'a envoyé 5 000 000 au début et 2 000 000 l'année qui a suivi ». A partir des années 2000, les émigrés se lancent dans le commerce international à travers l'exportation de marchandises de l'Italie vers le Burkina Faso. Ces marchandises couramment appelées « France-aurevoir » sont composées de matelas, de vélos, de voitures, d'appareils électro-ménagers, des appareils électriques, des vêtements ou encore des chaussures. Les bénéfices issus de ce commerce sont transformés le plus souvent en épargne selon S.!.

Graphique 7 : Répartition en % des fonds reçus selon le motif économique.

Evènements religieux

8%

Scolarisation

17%

Achat de
motocyclette

2%

Santé

6%

Gestion familiale

25%

Commerce

1%

Pèlerinage Réhabiliation

1% 0%

Construction de logements

40%

Source : Enquête terrain d'août à septembre 2019.

106

II_2. Les investissements collectifs

En dehors du fait que chaque migrant, une fois installé à l'étranger, cherche à améliorer les conditions de vie de sa famille d'origine ; il faut noter que ces mêmes migrants contribuent encore dans le développement de toute la commune à travers des investissements collectifs. Ces investissements touchent des domaines tels que l'éducation, la santé, l'administration, etc.

Toutefois, dans le but d'aligner les investissements aux besoins réels des populations, les émigrés vont se réunir en plusieurs associations en fonction de leurs pays d'accueil. Ces associations travailleront en étroit lien avec le Conseil municipal de Béguédo.

II_2.1- Les associations de développement à Béguédo

Plusieurs associations ont été créées à Béguédo avec pour principal but de contribuer au développement socio-économique de leur village d'origine. Parmi ces associations, on peut citer :

§ L'Association des Ressortissants de Béguédo en Italie en abrégé ARBI : fondée par le premier émigré de Béguédo en Italie : Moustapha BARA, il crée l'ARBI en 1989 à Rome, Italie. Aujourd'hui à sa tête Monsieur Abdoul Salam BARA, l'objectif de cette association est de promouvoir la solidarité des fils de Béguédo en Italie à travers l'esprit d'assistance et d'entraide mutuelle et la contribution au développement de la ville de Béguédo. L'ARBI compte de nos jours selon son président 900 à 1 000 membres actifs avec une contribution annuelle de 25€ (environ 16 000 francs CFA) chacun. L'ARBI, avec ses 30 ans d'existence est l'association la plus figurante en termes d'investissements socio-culturels et le premier bailleur de fonds de la commune ;

§ L'Association des Jeunes Patriotes de Béguédo (AJPB) : créée en 2016, cette association vise à mobiliser les jeunes de Béguédo dans la réalisation des projets de développement de la commune ; à cultiver le sens du civisme et de la citoyenneté auprès de la jeunesse ; à sensibiliser la jeunesse sur l'excision, le mariage précoce, l'émigration clandestine, le grand banditisme, etc. Depuis sa création en 2016, l'AJPB a organisé des activités telles que de multiples journées de salubrité dans les établissements de santé de la commune. Elle organise en plus des activités de reboisements dans les écoles, les centres de santé ou encore le commissariat de Béguédo. Des conférences, des formations, et des activités de sensibilisation sont organisées chaque année à Béguédo par l'AJPB. Tout récemment, avec la pandémie de Covid19, l'Association des Jeunes Patriotes de Béguédo a fait des dons de matériels de protection à toutes les structures publiques de la commune. Cette association est actuellement dirigée par le jeune patriote Adama BARA.

L'ARBI et l'AJPB entretiennent de très bonnes relations surtout de complicité, l'une pourvoyeuse de fonds et l'autre pourvoyeuse de ressources humaines quantitative et qualifiée.

§ D'autres associations existent mais de façon informelle : ce sont l'Association des Ressortissants de Béguédo au Gabon, en Guinée, Solidarité Italie-Béguédo, etc.

107

II_2.2- Les investissements des émigrés de Béguédo

Tableau 14 : Inventaire des investissements communautaires des émigrés à Béguédo.

Nature de l'investissement

Année de
réalisation

Coût

(estimatif)
francs CFA

Poids de
l'investissement

1. EDUCATION

Construction d'une école primaire à 3 classes

1993

5 000 000/an

Totalité

Construction de nouvelles écoles de 3 classes

En

continue

10 000 000/an

Extension des écoles de 3 à 6 classes

Equipement de salle de classes en table-bancs

Dotations en fournitures scolaires

Réhabilitation des écoles dégradées

Aménagement du bâtiment de l'inspection

Dotation en salle d'informatique du Lycée

2. SANTE

Extension du CSPS de Béguédo-centre en CM

2012

300 000 000

Totalité

Equipement du CM en matériaux médico-technique

Annuel

-

Totalité

Dons d'ambulance au CM

En

continue

-

Totalité

Contribution à la construction du CSPS de Fingla

-

-

En partie

Contribution à la construction du CSPS de Diarra

En cours

-

En partie

3. SOCIO-CULTUREL

Réalisation d'un complexe culturel et sportif

En cours

200 000 000

Totalité

Réalisation de dizaines de forage

Annuel

10 000 000

Totalité

Accompagnement aux projets d'agriculture, élevage

Annuel

-

En partie

Partition à divers évènements socio-culturels

Annuel

-

En partie

4. RELIGIEUX

Réhabilitation de la cour royale

-

-

En partie

Constructions de mosquées de quartier

-

-

Totalité

Construction d'une grande mosquée de type R+1

En cours

300 000 000

Totalité

Appui pour les pèlerinages annuels à la Mecque

Annuel

20 000 000

En partie

5. PUBLIC

Construction de la préfecture et du commissariat

1991

12 000 000

En partie

Financement du lotissement de la commune

1997

15 000 000

En partie

Contribution à la construction de la mairie de Béguédo

-

 

En partie

Contribution à la construction d'une gare routière

En cours

 

En partie

Aménagement de la voirie Béguédo centre- Fingla

2007

1 150 000

Totalité

Source : Enquête terrain d'août à septembre 2019149

149 Une partie des données ont été fournies par le site officiel de l'ARBI, https://www.associazionearbi.it/fr/home consulté en avril 2021.

108

Les grands investissements à Béguédo ont été réalisés en grande partie par l'ARBI à travers ses fonds propres ou en co-finançant l'investissement avec la Mairie et ses partenaires. Ainsi, les investissements réalisés concernent plus les domaines suivants :

a) Domaine de l'éducation : l'éducation étant le socle de développement de toute nation, de nombreux investissements y sont faits chaque année par la Mairie à travers ses partenaires. La construction d'écoles primaires de 3 classes, l'équipements de salles de classes en table bancs, dotations en fournitures scolaires, la réhabilitation des écoles dégradées et la réhabilitation de l'inspection d'enseignement primaire sont entre autres les investissements de l'ARBI pratiquement chaque année dans le secteur éducatif (voir Annexe Photos n°2-4). « Nous allouons plus de 10 millions chaque année pour aider nos enfants à bénéficier d'une éducation de qualité » dixit le Président de l'ARBI, Monsieur Abdoul Salam BARA. Le lycée lui a été doté d'une salle informatique ;

b) Domaine de la santé : ici les investissements sont énormes et ont débuté depuis 2006 avec l'idée de construction d'un nouveau centre de santé. Ainsi en 2012, l'ARBI a pu réaliser l'extension du CSPS en Centre Médical (CM) à hauteur de 300 millions de francs CFA sur une aire de 680 m2. Cette extension a permis de disposer d'une salle d'opération chirurgicale, une salle d'accouchement, une salle de consultation dentaire, une salle d'électrophorèse, une salle de fibroscopie, une salle d'échographie, et un laboratoire d'analyse. Des matériaux médico-techniques (électrocardiogramme, lits, gans, seringues, etc.) et plus de 4 ambulances ont été fournis également (voir Annexe Photos n°5-12). L'ARBI a contribué également à la construction du CSPS de Fingla et celui de Diarra (en cours). Parallèlement depuis 2006, plus de 250 interventions chirurgicales ont été effectuées dans le centre de santé avec l'appui de quelques bénévoles italiens qui viennent chaque année à Béguédo ;

c) Domaine socio-culturel : un complexe culturel et sportif (de 8 000 m2) a été érigé à Fingla et à coûter en tout 200 millions de francs CFA à l'ARBI selon son Président (voir Annexe Photos n°13-15). La réalisation d'une dizaine de forage dans les villages de la commune et un important appui au secteur de l'agriculture, de l'élevage et de la pêche avec des outils et méthodes de travail moderne sont à mettre au compte de l'ARBI. Cette association soutient également les évènements heureux ou malheureux des autorités administratives, coutumières et religieuses de la commune. A titre d'exemple, elle a pris en charge la défunte Maire depuis ses moments de maladie jusqu'à ses obsèques ;

109

d) Domaine religieux : l'ARBI a contribué à la réhabilitation de la cour royale ; à la construction de nombreuses mosquées de quartiers, et à la construction d'une grande mosquée de type R+1 à hauteur d'au moins 300 millions de francs CFA (voir Annexe Photos n°16-17). Elle alloue un budget chaque année pour la prise en charge du pèlerinage à la Mecque d'un certain nombre de fidèles musulmans ;

e) Domaine public : l'ARBI a contribué à la construction de la préfecture et du commissariat en 1991. Récemment, elle a contribué à la construction de la Mairie de Béguédo ou encore d'une gare routière (en cours) à Béguédo-centre (voir Annexe Photos n°18). On note aussi les aménagements routiers afin de faciliter l'accès aux différents villages tel l'aménagement de la voirie Béguédo-centre-Fingla qui a coûté plus de 5 millions de francs CFA.

110

III_ L'approche variée des migrations internationales à Béguédo

La complexité du phénomène migratoire est ressentie chez tous les acteurs qui y sont liés. Son importance dans la vie des bénéficiaires semble ne plus à démontrer. Toutefois, ses effets négatifs pèsent sur les populations d'origine du phénomène. De ce fait, l'opinion des personnes liées directement ou indirectement aux migrations internationales à Béguédo, pourraient se révéler riche en données.

Dans cette partie, nous présentons dans un premier temps le point de vue des ménages enquêtés sur la question migratoire. Dans un second temps, nous traitons de quelques effets négatifs des migrations internationales sur la commune de Béguédo.

III_1. L'approche variée des migrations

En plus de l'approche que la communauté scientifique se fait de la migration au Burkina Faso, nous avons voulu faire de cette étude une connaissance des approches que se font les populations touchées de près par ce phénomène planétaire. Nous avons ainsi donné l'occasion à nos enquêtés ainsi qu'à nos interviewés de donner leur perception de la migration en toute sérénité. Il ressort ainsi de ces entrevus que les populations locales ont une approche bigarrée sur la question du phénomène migratoire. Les uns pensent que le phénomène est bon, les autres qu'il est mauvais et enfin le troisième groupe reste indifférent face à la question.

Parmi les 320 Chefs de ménages avec lesquels nous avons échangé, 13% d'entre eux pensent que la migration est une pratique néfaste pour les jeunes de leur village et ceux du Burkina Faso en général. Les arguments qui justifient leur choix se présentent comme suit :

- La migration est une activité dangereuse car elle peut entrainer des pertes en vies humaines lors du voyage ;

- Elle est source de fuite des cerveaux et bras valides du pays au service des pays d'accueil. A côté il y a les migrants qui abandonnent leur terre d'origine pour rester à l'étranger ;

- Elle est aussi source du fort taux d'abandon scolaire dans la commune car l'aventure faisant rêver les plus jeunes, ils sont donc préoccupés à trouver les voies et moyens pour s'y rendre que de chercher à se former ;

111

- Le phénomène migratoire est également source de développement de certains comportements juvéniles comme l'addiction au tabac et/ou à l'alcool, l'impolitesse, l'abandon des moeurs et coutumes au détriment de la civilisation soi-disant "européenne" ;

- L'exposition à la xénophobie dans les pays étrangers semble être une difficulté que rencontrent les émigrés vivants loin de leurs terres ;

- L'augmentation des divorces, la dislocation de certaines familles suite à des querelles entre frères, l'augmentation du coût élevé de la vie à Béguédo, la liste est longue.

Nonobstant toutes ces réalités, les jeunes de Béguédo choisissent d'aller de "l'autre côté de la mer" comme ils le disent. Ces jeunes qui y vont sont fortement soutenus en témoigne le taux des chefs de ménages enquêtés qui trouvent que la migration est une bonne chose : 46%. Pour eux, seule la migration pouvait permettre d'améliorer les conditions de vie sociale et économique de leurs familles. Ils s'expliquent par ces points de vue :

- La migration est une source sûre et durable de revenus pour les familles d'origine. Elle permet de subvenir aux besoins courants de la famille mais aussi d'offrir des conditions de vie meilleures à ces familles ;

- Elle contribue énormément à réduire le taux de chômage chez les jeunes et donc à repousser la pauvreté ;

- Elle permet d'accroître le développement socio-économique des villes à travers les investissements individuels et collectifs qui y sont faits ;

- Le phénomène migratoire éveille la conscience des émigrés, apporte des nouvelles techniques et méthodes de travail, etc. Ce sont là d'autres arguments donnés par les CM pour soutenir leur position.

Quant au reste des chefs de ménages, 41% du nombre total des CM, il préfère ne donner aucun avis sur cette question liée au phénomène migratoire. La raison de leur neutralité s'explique :

- soit parce qu'en étant un bénéficiaire direct des fonds rapatriés par les émigrés, ils se voient en mal de donner leur avis sur la question même s'ils reconnaissent la dangerosité de la migration ;

112

- soit parce que n'ayant pas de membres à l'étranger, ils pensent ne pas percevoir dans leurs ménages les effets de ce phénomène.

III_2. Les effets négatifs de la migration sur la commune de Béguédo

L'arbre ne doit pas cacher la forêt dit-on très souvent. Les pratiques migratoires des Bissa de Béguédo ont prouvé toute leur importance aux yeux de tous. Les retombées financières sont énormes et contribuent au développement communal de Béguédo. Toutefois, comme le constatent certains chefs de ménages, il y a beaucoup d'effets négatifs liés directement ou indirectement aux migrations internationales.

L'un des premiers effets négatifs des migrations internationales à Béguédo à l'échelle sociale est l'apparition des inégalités sociales. En fait, les ménages bénéficiant de la rente migratoire se démarquent des ménages n'en bénéficiant pas à travers le type de logement, les équipements, le moyen de déplacement ou encore le train de vie économique. Une nette hiérarchisation des couches sociales est visible. En outre, un désintéressement pour l'école anime l'esprit des jeunes de Béguédo. Les effets positifs de la rente migratoire sont tellement frappants que les jeunes ne voient plus l'intérêt de poursuite des études à débouchés incertains ou à débouchés inférieurs à ceux de l'émigration. Par conséquent, Irissa ZIDNABA constate que le « la faible scolarisation des enfants est associés au problème de déperdition scolaire. Les enfants abandonnent l'école en milieu d'année. »150 En plus, on constate malheureusement de nombreux divorces à Béguédo suite à l'infidélité de certaines épouses. Après leur mariage, les émigrés sont souvent contraints d'abandonner leurs épouses et répartir seuls dans leur pays d'accueil. La nouvelle mariée reste seule à Béguédo, le temps que son époux trouve les documents nécessaires avant que le couple ne se rejoigne. C'est dans cette période d'attente (1 à 3 ans) que peut survenir l'infidélité de la femme. La perte de certaines valeurs culturelles bissa chez les descendants des émigrés sont également un des problèmes engendrés par la migration internationale des Bissa de Béguédo.

Sur le plan économique, on observe une inflation anarchique du prix des produits de première nécessitées à Béguédo. En effet, les « Italiens », avec leur pouvoir d'achat élevé ont conduit les commerçants à augmenter le prix des produits dans le but de se faire beaucoup plus de

150 ZIDNABA Irissa, 2016, p. 200.

113

bénéfices que dans une autre ville. La commune n'étant pas constituée que de familles d'émigrés, les autres familles subissent alors cette inflation généralisée des produits.

Pour nous, au regard de l'ampleur du phénomène et de ses retombées sur ses adeptes, l'interdiction aux populations de migrer à l'étranger ne serait pas la solution adéquate. Nous pensons que les discussions doivent tendre vers la recherche de solutions idoines pour encadrer et consolider les pratiques migratoires au Burkina Faso. Autrement dit, il faut que la politique nationale actuelle à travers la Stratégie Nationale pour les Migrations puisse arriver à contrôler, à encadrer, à orienter et à soutenir les émigrés burkinabè dans leur projet migratoire. La diaspora doit être prise en compte dans les grandes politiques nationales en tant que partenaires externes de premier choix. En retour, cette vaste diaspora mettra au service de leur pays d'origine leurs ressources financières, leurs ressources relationnelles et leurs savoir-faire. C'est à partir de ce moment que la migration et le développement socio-économique ne feront que deux faces d'une même monnaie.

114

La partie qui évalue l'impact des migrations internationales sur le développement de la commune de Béguédo nous a permis dans un premier d'apercevoir les caractéristiques des ménages ayant des émigrés et ceux n'ayant pas d'émigrés. Une nette différenciation est observée sur le plan social et économique. Les familles ayant des émigrés bénéficient d'un statut social meilleur que celui des familles sans émigrés. En plus, le niveau de vie élevé des ménages ayant des émigrés est assez stable. Cette situation entraine une inégalité entre les deux types de ménages. Concernant les transferts de fonds et les investissements réalisés à Béguédo, la commune semble être un bon exemple de l'impact des migrations internationales. Les transferts de fonds en direction de Béguédo sont estimés à des centaines de millions par an. Dès lors que ces fonds sont perçus, ils sont investis soit dans des besoins familiaux soit dans des investissements socio-économiques et communautaires en faveur des populations restées à Béguédo. Cependant, les migrations internationales ont entrainé avec elles des effets négatifs. Ce sont des effets liés à la perte de certaines valeurs ethniques et culturelles, et des multiples problèmes matrimoniaux. Si donc des sensibilisations suivies des mesures adéquates ne sont pas prises, ces pratiques migratoires pourront à long terme déstabiliser toute une population et entraîner une perdition des peuples qui la vivent.

115

CONCLUSION GÉNÉRALE

Le présent sujet de recherche intitulé Migrations et impacts socio-économiques à Béguédo, Centre-Est, Burkina Faso (1919-2017) a pour objectif d'évaluer l'impact des migrations internationales sur le développement de la commune de Béguédo. Dans un contexte où la mobilité humaine est l'un des traits caractéristiques des Bissa de Béguédo, il était nécessaire pour nous d'étudier les pratiques migratoires de ces populations situées au Centre-Est du pays. Dès lors que le contexte fut connu, il était question de montrer qu'il y a un lien consubstantiel entre les migrations internationales et le développement local dans la commune de Béguédo.

Les migrations internationales des Bissa de Béguédo sont de plus en plus étudiées au regard de leur ampleur et de leur singularité par rapport aux autres types de migrations pratiquées au Burkina Faso. Amplifiées avec la période coloniale, les migrations internationales des Bissa se sont poursuivies jusqu'à nos jours avec l'enregistrement d'importants flux migratoires. L'émigration des Bissa de Béguédo a commencé par des migrations de fuite vers la Gold Coast (Ghana actuel). En effet, face aux mesures coercitives de recrutement de main d'oeuvre voltaïques (Burkinabè) pour la mise en valeur de la colonie de Haute-Volta et des autres colonies françaises voisines, certaines populations s'opposant à ce recrutement vont décider de se réfugier en Gold Coast. Le reste de la population active est recruté et acheminé vers les chantiers coloniaux, les mines, les industries et les plantations. On parlera ainsi de migration de travail des Voltaïques. Durant la période postcoloniale, les deux destinations privilégiées des migrants bissa connaîtront de lourdes crises socioéconomiques. Ces crises viendront bouleverser le secteur de l'emploi avec des licenciements des travailleurs. Une partie des émigrés choisira de revenir sur les terres d'origine et une autre, choisira de migrer vers d'autres destinations d'Afrique et d'Europe. Le reste des travailleurs burkinabè a préféré rester dans leur pays d'accueil malgré les difficultés d'emploi.

Pour parvenir à trouver une interrelation entre les migrations internationales des Bissa de Béguédo et le développement socio-économique de la commune, il faut connaître les caractéristiques socio-économiques des ménages de Béguédo. C'est dans ce sens que notre première hypothèse qui part de la comparaison des ménages de Béguédo pour montrer que les ménages ayant des émigrés ont de meilleures conditions de vie que ceux n'en ayant pas est tout à fait justifiée. La synthèse de données que notre recherche offre sur la question montre

116

qu'effectivement les familles dont on compte à l'intérieur au moins un émigré, ont un pouvoir d'achat plus élevé que les familles ne comptant aucun émigré dans leur rang. Ainsi, comparés aux ménages des familles n'ayant pas d'émigrés, les ménages des émigrés bénéficient d'un meilleur accès à certaines commodités de la vie quotidienne, commodités relatives à l'habitat, au niveau de vie économique élevé, au statut social important de leurs Chefs de Ménage, etc.

Les données recueillies essentiellement grâce à l'enquête de terrain, aux rapports nationaux et internationaux sur les transferts de fonds des migrants attestent de l'important flux de transfert de fonds effectués. En 2019, la Banque mondiale a estimé à environ 263 milliards de francs CFA transférés au Burkina Faso par les émigrés. Quant à Béguédo, l'ensemble des fonds reçus par les ménages enquêtés en 2019 était estimé à 184 657 000. Et si l'on considère les transferts de fonds effectués par les émigrés durant les trois précédentes années (2017-2019), ce sont en moyenne 61 552 333 francs CFA. La grande partie des fonds transférés transite généralement par des canaux formels tels que les institutions bancaires et les sociétés de transfert mobile. Le reste des fonds transférés parvient aux destinataires par des canaux informels que sont les sociétés de transport ou les voyageurs. Par conséquent, la deuxième hypothèse de cette étude est vérifiée car chaque année, pour des motifs variés, les émigrés réalisent d'importants transferts monétaires à Béguédo par le biais de divers canaux d'envois.

Les émigrés bissa par les fonds qu'ils envoient et les investissements qu'ils réalisent, apportent un concours précieux à la réalisation des objectifs de développement durable. Ils contribuent notamment à éliminer la pauvreté, à éliminer la faim, à promouvoir la santé, à faciliter l'accès à une éducation de qualité, à garantir l'accès à une eau propre et à des services d'assainissement, à promouvoir le travail décent et la croissance économique et à réduire les inégalités. Et le fait qu'ils investissent majoritairement dans l'immobilier, la consommation courante et l'éducation dans la ville de Béguédo, prouve que la troisième hypothèse de notre travail a été vérifiée en partie. En effet, il est ressorti de notre analyse que le niveau d'urbanisation de la ville de Béguédo dépasse celui de ses voisins (Ouarégou, Boussouma, Komtoèga, Niaogho et même Garango). Cette urbanisation se caractérise principalement par la construction de grandes infrastructures éducatives, sanitaires et administratives. Il y a aussi la construction des logements sociaux avec des standings des grandes villes et la présence de

117

quelques immeubles. C'est donc montrer l'impact surtout positif que les transferts de fonds des émigrés a sur le développement de la ville.

Toutefois, l'une des limites de cette recherche a été l'absence de données quantitatives et qualitatives sur le montant des transferts de fonds de l'étranger en destination de Béguédo. En effet, ces chiffres auraient été nécessaires pour évaluer réellement le poids des investissements sur les familles d'origine des migrants en particulier et sur la commune en général. Certes qu'il y a quelques rapports de la Banque mondiale et du Fonds Monétaire International sur les fonds rapatriés au Burkina Faso (jusqu'en 2014) mais cela reste d'ordre général. Pour les transferts de fonds à destination de Béguédo, on est contraint de s'appuyer sur deux sources : nos enquêtes de terrain réalisées sur un échantillon de 10% des ménages sur les trois dernières années et les propos du Président de l'ARBI qui estime entre 200 et 300 millions par an le montant des fonds transférés par les émigrés à Béguédo (il affirme tirer sa source d'un Directeur de banque de la place). Une autre limite de notre étude a été la taille de l'échantillon des données recueillies sur les familles (10% du nombre total des ménages). Cette faiblesse d'échantillon s'explique en grande partie par la faiblesse de nos moyens matériels et humains.

En somme, cette étude a été d'un grand intérêt pour nous dans la mesure où elle nous a permis d'apporter notre modeste contribution à la recherche historique sur les migrations internationales à Béguédo et leurs impacts socio-économiques. Que cette étude puisse servir de source d'informations sur la migration et son impact au Burkina Faso à travers le cas de la commune de Béguédo, cela est notre plus grand désir. Toutefois, nous reconnaissons que notre étude comporte des limites et pourra être révisée au besoin et à tout moment afin de s'aligner avec les nouveautés et les actualités du moment.

118

Sources et Bibliographie

A- Les Sources

A-1. Les archives

Ø CNAB, 42V272: Minutes of the first meeting of the inter-colonial conference on medical control of immigrant workers held at the office of the honorable the Directory of the medical services. Victoriaborg, Accra on Friday the 26th august 1949.

Ø CNAB, 3V7, Rapport sur les plaintes des populations indigènes contre l'administration pour abus de pouvoir, 1941-1954.

Ø CNAB : 44V108, Rapport sur les migrations des Indigènes de la Haute Côte d'Ivoire vers la Gold Coast, 1939.

Ø CNAB, 44V133, Territoires de la Haute-Volta, liste des cercles, des subdivisions et postes administratifs au deuxième trimestre, tableaux, 1956.

Ø Décret n° 2012-253/PRES/PM/MEF du 7 mars 2012 a adopta l'actuelle politique nationale de Population qui couvre la période 2010-2030. Décret cité par le Ministère de l'Economie et des Finances, 2012, Politique Nationale de Population 2010-2030, p. 48.

Ø Décret N° 2018-0035/PRES/PM portant remaniement du Gouvernement.

Ø Décret N° 2018-1162/PRES/PM/MIABE portant organisation du Ministère de l'Intégration africaine et des Burkinabè de l'extérieur.

Ø Décret N° 93/132/PRES/PM/REX du 07 mai 1993 cité par OUÉDRAOGO Serge Noël, 2016-2017, op.cit., p. 211.

Ø Décret N° 93-135/PRES/MFP portant réorganisation du Conseil National de Population.

Ø Décret N°2007-308/PRES/PM/MAECR du 24 mai 2007 portant création, attributions, organisation et fonctionnement du Conseil Supérieur des Burkinabè de l'Etranger.

Ø Journal officiel de la République de Haute-Volta, n° du 19 mars 1981.

Ø Journal officiel du Burkina Faso, n° 33 du 16 août 1984.

119

A-2. Les sources orales

Le tableau ci-dessous est la base de données des personnes avec lesquelles nous avons eu des échanges fructueux et qualitatifs lors de nos enquêtes de terrain.

D'ORDRE

NOM & PRENOM (S)

SEXE

AGE

PROFESSION/FONCTION

DATE

D'ENTRETIEN

LIEU

D'ENTRETIEN

01

BAMBABA Jean-Marie

M

33

Employé de commerce

02/09/2019

Garango

02

BANCE François (B.F)

M

-

Agent de la préfecture à la retraite

22/09/2019

Ouarégou

03

BANCE Hamidou (B.H)

M

-

Président du Conseil Villageois de

Développement de Fingla

31/08/2019

Fingla

04

BANCE Souleymane (B.S)

M

37

Conseiller Municipal à Béguédo

29/08/2019

Diarra

05

BARA Abdoul Salam

M

-

Président de l'Association des Ressortissants de Béguédo en Italie

25/08/2019

Fingla

06

BARA Adama

M

-

Président des Jeunes Patriotes de Béguédo

29/09/2019

Béguédo

07

BARA Noro

M

-

Maire par intérim

11/09/2019

Mairie

08

BARRY Hamidou (B.H 2)

M

58

Paysan

18/09/2019

Béguédo

09

COMPAORE Moussa (C.M)

M

35

Commerçant

04/05/2019

Garango

10

GUEBRE Dramane (G.D)

M

-

Conseiller Villageois de Développement

31/08/2019

Fingla

 

120

11

GUEBRE Moussa (G.M)

M

48

Conseiller Municipal de Fingla

22/09/2019

Béguédo

12

GUEBRE Salfo

M

-

Secrétaire au tribunal départemental de Béguédo

29/08/2019

Préfecture

13

KOBRE Mariamou (K.A)

F

26

Etudiante en Economie à Ouagadougou

04/05/2019

Garango

14

KOMPAORE Béatrice (K.B)

F

30

Chef de ménage

04/05/2019

Garango

15

SAGNE Idriss (S.I)

M

-

Conseiller Municipal à Béguédo

29/08/2019

Béguédo

16

SARE Abdoul Karim (S.A.K)

M

65

Ancien émigré en Italie de retour

21/09/2019

Béguédo

17

SSARE Issouf (S.I)

M

36

Marchand à Béguédo-centre

28/08/2019

Diarra

18

BATIONO Léonce Romuald

M

-

Conseiller des affaires étrangères au Ministère des affaires

Personne ressource

Ouagadougou

19

SANOU Arouna

M

-

Conseiller des affaires étrangères auprès de la DGBE

Personne ressource

Ouagadougou

20

DENE Souhaybou

M

31

Technicien communal en Eau et assainissement

Personne ressource

Béguédo

 

121

A-3. Sites internet

Ø https://www.iom.int/fr/termes-cles-de-la-migration consulté le 29 juillet 2019 à 18h40mn.

Ø https://www.toupie.org/Dictionnaire/Societe.htm consulté le 29 juillet 2019 à 18h35mn.

Ø https://www.oim.org/migration_en_afrique/burkina_faso consulté le 31 juillet 2018 à 10h35mn.

Ø htpps:// www.cret.org/migration-en-haute-volta-coloniale/introduction/ccl consulté le 02 octobre 2018 à 11h00mn.

Ø htpps:// www.ocde.org/fr/els/mig/dioc/htm consulté le 20 juin 2019 à 18h34mn.

Ø https://www.associazionearbi.it/fr/home consulté le 05 avril 2021 à 10h07mn.

Ø https://www.unhcr.org/dach/ch-fr/en-bref/qui-nous-aidons/deplaces-interne consulté le 31 juillet 2021 à 19h00mn.

Ø https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Impact consulté en ligne le 02 août 2021 à 20h12.

Ø https://www.migrationdataportal.org/fr/themes/rapatriements-de-fonds#definition consulté

en ligne le 01 août 2021 à 19h00.

B- La Bibliographie

B-1. Ouvrages

Ø BALIMA Salfo-Albert, 1996, Légende et histoire des peuples du Burkina Faso, Paris, Ed. L'Indépendant, 396 p.

Ø BEAUD Michel, 1993, L'art de la thèse . comment préparer et rédiger une thèse de doctorat, un mémoire de DEA ou de maitrise ou de tout autre travail universitaire, Paris, La Découverte, 202 p.

Ø CONAPO, 2006, Symposium sur les migrations . gestion des migrations internes et externes, quelle politique migratoire en vue de la réduction de la pauvreté au Burkina Faso, Ouagadougou, CONAPO, 31 p.

Ø Conseil Municipal de Béguédo, 2015, Plan de Développement Communal, Commune rurale de Béguédo, 112 p.

Ø COULIBALY Sidiki, GREGORY Joël, PICHE Victor, 1980, Les migrations voltaïques, Tome 1 . importance et ambivalence de la migration voltaïque, CRDI, 144 p.

Ø DABIRE Der Laurent, 2009, Emigration internationale des Burkinabè, Paris, Harmattan, 104 p.

122

Ø FAURE Armelle, 1996, Le pays bissa avant le barrage de Bagré, Athènes, éditions Athanassopoulos, 311 p.

Ø Institut National de la Statistique et du Développement (INSD), 1982, Recensement Général de la Population de 1975. Analyse des données démographiques, Département du Centre-est, Ouagadougou, République de la Haute-Volta, 57 p.

Ø Institut National de la Statistique et du Développement (INSD), 1989, Recensement Général de Population, décembre 1985. Analyse des résultats définitifs, Ouagadougou, Ministère du plan et de la coopération, 326 p.

Ø Institut National de la Statistique et du Développement (INSD), 2000, Analyse des résultats du recensement général de la population et de l'habitation de 1996, Volume II, Ouagadougou, 180 p.

Ø Institut National de la Statistique et du Développement (INSD), 2008, Recensement Général de la Population et de l'Habitat (RGPH) de 2006. Résultats définitifs, Ouagadougou, 52 p.

Ø Institut National de la Statistique et du Développement (INSD), 2009, Recensement Général de la Population et de l'Habitat (RGPH) de 2006. Analyse des résultats définitifs ; thème 8 : migration, Ouagadougou, 150 p.

Ø LAHUEC Jean-Paul, MARCHAL Jean-Yves, 1979, La mobilité du peuplement bissa et mossi, Paris, ORSTOM, 149 p.

Ø MESURE Sylvie, SAVIDAN Patrick (dir.), 2006, Le dictionnaire des sciences humaines, Paris, Editions France Quercy, 1277 p.

Ø Ministère de l'Economie et du Développement, 2006, Atlas du Burkina Faso, Tunis, Pictura, 215 p.

Ø Ministère de l'Economie et des Finances, 2009, Profil des régions du Burkina Faso, Ouagadougou, 450 p.

Ø Ministère de l'Economie et des Finances, 2013, Stratégie Nationale de Migration 20142025, Projet, 56 p.

Ø MIYAJI Mieko, 1976, L'émigration et le changement socio-culturel d'un village Kabyle (Algérie), Tokyo, Institute for the Study of Languages and Cultures of Asia and Africa, 87p.

123

Ø NONJON Alain, 1995, Comprendre l'économie mondiale, Normandie, Roto impression, 286 p.

Ø OUEDRAOGO L., 2005, Symposium sur les migrations au Burkina Faso . migrations internationales régionales et sous régionales et économie extraterritoriale . les transferts de fonds des émigrés burkinabè (flux, volume, et importance), Ouagadougou, CONAPO, 57p.

Ø RHV & RF, 1972, Enquête démographique par sondage en République de Haute-Volta 1960-1961 . les émigrations, Rapport d'étude, République de la Haute-Volta, République Française : service de la statistique et de la mécanographie, INSEE et Secrétariat d'Etat aux Affaires étrangères, 220 p.

Dictionnaires

Ø Le Grand Robert, 2005, Paris, Editions le Robert, [version électronique].

Ø Petit Larousse illustré, 2008, Paris, Larousse, 1874 p.

Ø Petit Larousse illustré, 2013, Paris, Larousse, 1996 p.

Ø REY-DEBOVE Josette, REY Alain (dir.), 2012, Le Petit Robert, Paris, Editions Les Presses de Jouve, 2837 p.

B-2. Les articles scientifiques

Ø BANDAOGO Zacharia, 1999, « Les migrants burkinabè en Côte d'Ivoire : réflexions sur la participation au développement et l'implication dans le banditisme (1947-1997) », in Sociétés en développement dans l'espace et dans le temps (SEDET), Migrations, économie et commerce, Université de Paris 7, pp. 37-57.

Ø BANTENGA Willy Moussa, 2015, « Les migrations des Voltaïques au cours de la période coloniale », in DIALLO Hamidou et BANTENGA Willy Moussa (sous la dir.), Le Burkina Faso Passé et Présent, Presse Universitaire de Ouagadougou, pp. 259-271.

Ø BANTENGA Willy Moussa, 2015, « L'évolution économique du Burkina Faso de 1960 à nos jours », in DIALLO Hamidou et BANTENGA Willy Moussa (sous la dir.), Le Burkina Faso Passé et Présent, Presse Universitaire de Ouagadougou, pp. 395-416.

Ø GUÉBRÉ B.H et ZOURE H.A.V., 2009, « Le Bisako : genèse, population et organisation sociopolitique précoloniale » In HIEN Pierre Claver et GOMGNIMBOU Moustapha (sous

124

la dir.), Histoire des royaumes et chefferies au Burkina Faso précoloniale, Ouagadougou, CNRST, pp. 309-325.

Ø MANDE Issaka, 1995, « Les migrations de travail des Voltaïques. Une panacée pour l'économie ivoirienne de 1919 à 1960 », in MASSA Grégory et MADIEGA Georges (sous la dir.), La Haute Volta coloniale . témoignages, recherches, regards, Paris, Karthala, pp. 313-339.

Ø SISSAO Claude Etienne, 2012, « Esquisse sur les migrations au Burkina Faso : manifestation face aux normes de la période coloniale à nos jours », in MANDE Issiaka, Le Burkina Faso contemporain ; racines du présent et enjeux nouveaux, Paris, Harmattan, pp. 67-84.

B-3. Les Thèses de Doctorat, Mémoire de Master, Rapport de DEA, Mémoire de Maitrise

Ø BAHIRE Piga Sylvette, 2006, Migration et développement . les "Italiens" dans le développement du département de Béguédo, Mémoire de maitrise, Département de sociologie, Université de Ouagadougou, 107 p.

Ø BANGRE Éric-Bertrand Pasba, 2005, Les migrations internationales des Bissa en Italie . réseau, stratégie et parcours migratoire, Mémoire de maitrise, Département de sociologie, Université de Ouagadougou, 117 p.

Ø COULIBALY Sidiki, 1978, Les migrations voltaïques . les origines, les motifs et les perceptions des politiques, Thèse de doctorat, département de Démographie, Université de Montréal, 370 p.

Ø GUÉBRÉ B.H, 1996, Essai sur l'origine et la mise en place du peuplement précolonial du Bisano, cas de Nyaa, province du Boulgou, Mémoire de maitrise, Université de Ouagadougou, 105 p.

Ø MANDE Issaka, 1997, Les migrations de travail en Haute-Volta (actuel Burkina Faso), mise en perspective historique (1919-1960), Thèse de doctorat, Université Paris 7 Denis Diderot, p.

Ø MODRE Moussa, 2013, Migration et développement : l'autre face de l'« Italian dream » dans la commune rurale de Béguédo, Mémoire de maitrise, Département de sociologie, Université de Ouagadougou, 104 p.

125

Ø OUÉDRAOGO Serge Noël, 2016-2017, La migration des Burkinabè (Voltaïques) vers le Ghana (Gold Coast) de 1919 à 2010 : origines, gouvernances migratoire et stratégies d'intégration, thèse de doctorat, Histoire africaine, Université Ouaga 1 Professeur Joseph KI-ZERBO, 540 p.

Ø YABRE N. Baowenison, 2010, Contribution des émigrés Bissa en Italie au Développement de la ville de Béguédo, Mémoire de maitrise, Département de Géographie, Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, 146 p.

Ø ZIDNABA, Irissa, 2016, Migrations internationales et développement : l'impact socioéconomique des pratiques transnationales des émigrés de Béguédo résidant en Italie, Thèse de doctorat, Département de Géographie, Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, 271 p.

B-4. Rapports scientifiques

Ø CERPOD, 1995, Enquête Migration et Urbanisation au Burkina Faso (EMUBF), 1993, rapport national descriptif, Ouagadougou, INSAH-CILSS, 350 p.

Ø Organisation Internationale pour les Migrations, 2016, Etudes sur la diaspora burkinabè au Burkina Faso, en Côte-d'Ivoire, en Italie et en France, Rapport final, Ouagadougou, 142 p.

Ø TRAORE Sadio et BOCQUIER Philippe, 1998, Réseau Migration et Urbanisation en Afrique de l'Ouest (REMUA) 1997, synthèse régionale, Bamako, CERPOD, 149 p.

B-5. Documents numériques
Ouvrages

Ø BLOCH Marc, 1949, Apologie pour l'histoire ou Métier d'historien (Cahiers des Annales, 3), Paris, Librairie Armand Colin, [version numérique consultée en juillet 2020], 110 p.

Ø BREANT Hugo, 2013, Démontrer le rôle positif des migrations internationales par les chiffres. Une analyse de la rhétorique institutionnelle du système des Nations Unies, [version numérique téléchargée en juillet 2019], 16 p.

126

Ø DANTIER Bernard, 2005, Comment écrit-on l'histoire ? Paul Veyne et la construction d'intrigues, Paris, Col. Les classiques des sciences sociales, [version numérique téléchargée en juillet 2021], 10 p.

Ø DE HASS, H, 2010, « Migration et développement : une perspective théorique », In International Migration Review, [version traduite en français], [version numérique téléchargée en juillet 2021], 44 p.

Ø DELAUNAY Daniel, BOYER Florence, 2017, Capital social, migration et développement. Ouagadougou, Burkina Faso, [version numérique téléchargée en juillet 2018], 84 p.

Ø Dialogue Euro-Africain sur la Migration et le Développement (Processus de Rabat), 2014, Guide d'utilisation des données migratoires au Burkina Faso, ICMPD-FIIAPP, [version numérique téléchargée en mai 2021], 57 p.

Ø Direction nationale de la BCEAO pour le Burkina Faso, 2013, Enquêtes sur les envois de fonds des travailleurs migrants au Burkina, [version numérique téléchargée en mai 2021], 48p.

Ø FOGAM Abdoul Karim Nchare, 2015, Analyse comparative de la pauvreté et de la structure de consommation des ménages dans la principale agglomération des Etats membres de l'UEMOA en 2008, Mémoire de grade M.Sc en sciences économiques, Université de Montréal, [version numérique téléchargée en mai 2020], 88 p.

Ø Forum des Organisations de Solidarité Internationale issues des Migrations, 2018, Comprendre et promouvoir la contribution de la diaspora dans le développement du Burkina Faso : Etudes de cas sur les organisations diasporiques en France, Italie et Côte d'Ivoire et leur rôle dans la création et la consolidation d'emplois, Made Afrique de l'Ouest, Paris, [version numérique obtenue en juin 2019], 43 p.

Ø GOSSELIN Gabriel, 1970, « Travail, tradition et développement en pays bisa » in ORSTOM, série sciences humaines, volume VII, [version numérique téléchargée en juillet 2021], n°1, 18 p.

Ø HAZARD Benoît, 2004, « Entre le pays et l'outre-pays », In Journal des africanistes [mis en ligne le 10 avril 2007], n° 74-1/2, [version numérique obtenue en juillet 2021 : http://africanistes.revues.org/427 ], 16 p.

Ø Institut National de la Statistique et de la Démographie, 2017, Tableau de Bord Social du Burkina Faso, [version numérique obtenue en juin 2019], 287 p.

127

Ø Institut National de la Statistique et du Développement (INSD), 1994, Analyse des résultats de l'enquête démographique 1991, Ouagadougou, République de la Haute-Volta, [version numérique obtenue en juin 2019], 175 p.

Ø Institut National de la Statistique et du Développement (INSD), 2009, Analyse des résultats définitifs . évaluation de la qualité des données, Ouagadougou, Burkina Faso, Ministère de l'économie et des finances, [version numérique obtenue en juin 2021], 100 p.

Ø KALIKA Michel, 2012 (4e édition), Le mémoire de master, [version numérique téléchargée en mai 2019], 191 p.

Ø Organisation Internationale pour les Migrations, 2007, Glossaire pour la migration, Droit international de la migration n°9, Genève, OIM, [version électronique], 104 p.

Ø Organisation Internationale pour les Migrations, 2016, Migration au Burkina Faso : profil migratoire, [version numérique téléchargée en mai 2020], 124 p.

Ø OUMANSOUR Nor-eddine et al., 2019, Les transferts de fonds des migrants vers l'Afrique exercent-ils un effet de levier sur l'investissement et sur la croissance économique ? Rabat, Policy Center for the New Sud, [version numérique téléchargée en août 2021], 24 p.

Ø RHV et RF, 1975, Les migrations de travail mossi . évolution récente et bilan actuel de travail . les migrants et la société mossi (fascicule n°1, volume 2), Ouagadougou, ORSTOM, [version numérique téléchargée en juillet 2021], 206 p.

Ø World Bank Group, 2016, Migration and Remittances Factbook 2016, Third edition, [version numérique téléchargée en juillet 2020], [version numérique téléchargée en juillet 2021], 299 p.

Ø World Bank, October 2020, Inward Remittance flows, excel sheet, [version numérique téléchargée en août 2021].

Articles

Ø BOUTILLIER Jean-Louis et al., 1985, « La migration de la jeunesse du Burkina », in Cahiers de l'ORSTOM, Série sciences humaines, vol. XXI, n° 2-3, [version numérique téléchargée en juillet 2021], pp. 243-249.

Ø COUREL Marie-Françoise et al., 1979, « La population de la Haute-Volta au recensement de décembre 1975 », In Cahiers d'Outre-mer, n°125-32 année, [version numérique téléchargée en juillet 2021], pp. 39-65.

128

Ø DOMENACH Hervé, 1996, « De la « migratologie » » in Revue européenne de migrations internationales, vol. 12, n°2, [version numérique téléchargée en juillet 2021], pp. 73-86.

Ø FAURE Armelle, 1993, « Niagho versus Beghedo : un conflit foncier à la veille de la révolution burkinabè », in Cahiers des Sciences Humaines, n° 29, [version numérique téléchargée en mai 2020], pp. 105-119.

Ø MOUSSA Bemba, 1985, « Les mesures de réajustement de l'économie ivoirienne face à la crise économique mondiale : leurs résultats et leurs implications sociales », In Afrique Développement/Afrique et Développement, CODESRIA, vol. 10, n°1/2, [version numérique téléchargée en juin 2021], pp. 150-160.

129

ANNEXES

Annexe 1 : Guide d'enquête

BANCE Thomas Frank, Etudiant en fin de deuxième cycle à l'Université Joseph KI-ZERBO

Madame, Monsieur, étudiant en Histoire option Population à l'Université Joseph Ki-Zerbo, je réalise un mémoire de Master sur l'impact socio-économique des migrations sur la commune de Béguédo, Centre-Est. L'objectif de ce questionnaire est donc de collecter toutes les informations sur d'éventuelles actions ou oeuvres posées par les migrants dans leur commune de départ dans le but de contribuer au développement socio-économique de la commune de Béguédo. Ainsi vous qui aviez de la famille vivant hors du Burkina ou pas, votre contribution pour notre étude serait d'une importance incontestée.

Dans ce cadre, je vous remercie de bien vouloir consacrer quelques minutes pour répondre au questionnaire ci-joint. Vos réponses sont et resteront anonymes.

I_ Informations générales

1. Avez-vous été une fois interviewé lors d'une enquête ?

1. Oui 2. Non

2. Est-ce qu'il y a des habitants de Béguédo qui vivent hors du Burkina Faso ?

1. Oui 2. Non

3. Avez-vous déjà effectué un voyage hors du Burkina Faso ?

1. Oui 2. Non

4. Pendant combien de temps y êtes-vous resté ?

1. Moins d'une année 2. Deux à trois années 3. Plus de trois années

5. Depuis combien de temps vivez-vous à Béguédo ?

1. Natif 2. Un an 3. Entre un et cinq ans 4. Plus de cinq ans

II_ Conditions sociales des ménages

6. Combien d'enfants avez-vous ?

1. Un 2. Deux 3. Trois 4. Quatre 5. Plus

7. Avez-vous des enfants inscrits à l'école ?

1. Oui 2. Non

8. Si oui, combien d'enfants sont inscrits à l'école ?

1. Un 2. Deux 3. Trois 4. Plus

9. Sont-ils inscrits dans des établissements publics ou privés ?

1. Publics 2. Privés 3. Les deux 4. Autre

10. En cas de problèmes sanitaires, que faites-vous ?

1. Dispensaire 2. Auto-traitement 3. Autre .

VI

11. Dans quelle zone de résidence êtes-vous ?

1. Lotie 2. Non lotie

12. Quel type de logements avez-vous ?

1. Maison traditionnelle 2. Bâtiment à plusieurs logements 3. Villa

4. Maison individuelle 5. Immeuble à appartements

13. Quels sont les matériaux de construction de votre toit ?

1. Tôles 2. Pailles 3. Terre

14. Quels sont les matériaux de construction de vos murs ?

1. Briques de terre 2. Ciment 3. Béton

15. Que faites-vous de vos ordures dans vos ménages ?

1. Au coin du quartier 2. Poubelles privées 3. Poubelles publiques

16. Quelle est votre source d'approvisionnement en eau ?

1. BADCOM 2. Forage 3. Puits 5. Rivières

17. Principales sources d'énergie pour la restauration

1. Gaz butane 2. Bois de chauffe 3. Charbon de bois 4. Autres

18. Avez-vous accès à l'électricité ?

1. Oui 2. Non

19. Principales sources d'énergie pour l'éclairage

1. COOPEL 2. Plaque solaire 3. Lampe à pétrole 4. Autres

20. Utilisez-vous un appareil téléphonique (portable ou fixe) ?

1. Oui 2. Non

III_ Conditions économiques des ménages

21. Type d'occupation du logement

1. Locataire 2. Propriétaire

22. Combien d'autres logements avez-vous ?

1. Zéro 2. Un 3. Deux 4. Trois 5. Plus

23. Vos biens immobiliers

1. Télévision 2. Radio 3. Ordinateur 4. Matelas 5. Meubles

6. Autres

24. Quels sont vos moyens de transport

1. Véhicule 2. Tricycle 3. Motocyclette 4. Vélomoteur 5. Piéton

25. Quel est votre ratio alimentaire par jour ?

1. Un 2. Deux 3. Trois 4. Quatre

26. Utilisez-vous de la connexion internet ?

1. Oui 2. Non

VII

27. Quelle est votre fréquence d'utilisation d'internet ?

1. Une fois par jour 2. Chaque deux jours 3. Une fois/semaine

Autre mode :

28. Combien de francs CFA mettiez-vous dans votre connexion par mois ?

1. = 5.000 FCFA 2. 5.000 =X? 15.000 FCFA 3. ?15.000 FCFA

IV_ Informations personnelles du Chef de Ménage

29. Nom du chef de

ménage .

30.

Age

31. Sexe : 1. Masculin 2. Féminin

32. Situation matrimoniale : 1. Marié 2. Célibataire 3. Divorcé 4. Veuf (ve)

33.

Nombre total des membres du ménage :

34. Niveau d'instruction :

35. Profession :

36. Avez-vous d'autres sources d'entrée d'argent en dehors de votre occupation actuelle ?

1. Oui 2. Non

37. Quelles sont vos autres sources d'entrée d'argent ?

1. Activités secondaires 2. Envois de fonds 3. Autre :

38. Avez-vous un ou plusieurs membres de votre famille vivant à l'extérieur ?

1. Aucun 2. Un 3. Plusieurs

Nom et prénom (s)

Sexe

Age

Statut familial

Lieu de résidence
actuelle (Pays/ville)

Durée d'absence (mois)

01

 
 
 
 
 
 

02

 
 
 
 
 
 

03

 
 
 
 
 
 

VIII

04

05

39. Si oui, veuillez remplir le tableau suivant :

40. Dites-nous davantage des fonds reçus en remplissant ce tableau ci-dessous

Période de transfert

Montant du transfert en FCFA

Allocation des fonds reçus

2019-2018

 
 

2018-2017

 
 

2017-2016

 
 

2016-2015

 
 

2015-2014

 
 

41. Pensez-vous que la migration est une bonne activité ?

1. Oui Non Aucun avis

42. Si non, dites-nous pourquoi ?

43. Si oui, donnez-nous quelques bienfaits.

REMERCIEMENTS

Nous vous remercions pour avoir accordé tout ce temps à notre étude. Ce fut un plaisir pour nous de vous avoir interviewé. Et nous vous reviendrons à la fin avec les résultats de notre étude.

IX

Annexe 2 : Guides d'entretien

BANCE Thomas Frank, Etudiant de Master II en Histoire économique, Démographie à l'Université Joseph KI-ZERBO

Entretien n° avec une des Autorités administratives/coutumières/religieuses de Béguédo

Personne interviewée :

Date : Lieu : Durée :

1. Importance de l'émigration pour Béguédo selon vous ?

2. Quels sont les investissements faits par les émigrés ?

3. Comment trouvez-vous ces investissements ?

1. Moins important 2. Important 3. Très important

4. Le développement actuel de Béguédo est-il lié aux émigrations ? Justifiez.

1. En petite partie 2. En grande partie 3. Aucunement

Justification :

5. Comment les émigrés participent-ils au développement socio-économique de Béguédo ?

6. Existe-t-il une coopération entre Béguédo et une (des) localités italienne (s) ? Laquelle ?

1. Oui 3. Non

X

XI

Citation :

7. Doit-on encourager ou condamner la migration à Béguédo ?

1. Encourager 2. Condamner 3. Ni l'un, ni l'autre

Commentaire :

8. La commune de Béguédo est-elle une référence en matière de migration dans la région ? Pourquoi ?

1. Oui 2. Non

Justification :

9. Quels sont vos suggestions pour une meilleure gestion des migrations à Béguédo ?

10. Avez-vous quelques recommandations à nous faire ?

XII

BANCE Thomas Frank, Etudiant de Master II en Histoire économique, Démographie à l'Université Joseph KI-ZERBO

Entretien n° avec un Responsable d'Association de Béguédo

Personne interviewée :

Date : Lieu : Durée :

1. Que faites-vous dans votre association ? A quand date sa création ?

2. Dans quel domaine les émigrés investissent-ils le plus ? Pourquoi ?

Domaine : .

Justification :

3. Quels sont les investissements réalisés par les émigrés à Béguédo ?

4. Comment trouvez-vous ces investissements ?

1. Moins important 2. Important 3. Très important

5. Le développement actuel de Béguédo est-il lié aux émigrations ? Justifiez.

1. En petite partie 2. En grande partie 3. Aucunement

Justification :

XIII

6. Doit-on encourager ou condamner la migration ?

1. Encourager 2. Condamner 3. Ni l'un, ni l'autre

Commentaire :

7. La commune de Béguédo est-elle une référence en matière de migration dans la région ? Pourquoi ?

1. Oui 2. Non

Justification :

8. Quels sont vos suggestions pour une meilleure gestion des migrations à Béguédo ?

9. Quelles relations aviez-vous entre votre structure et les autres structures de migration de Béguédo ?

10. Avez-vous quelques recommandations à nous faire ?

XIV

BANCE Thomas Frank, Etudiant de Master II en Histoire économique, Démographie à l'Université Joseph KI-ZERBO

Entretien n° avec un Emigré présent à Béguédo

Personne interviewée :

Date : Lieu : Durée :

1. Depuis votre migration, avez-vous constaté des changements dans votre famille ? Si oui, dans quels domaines ?

Domaines :

2. A quoi sont dus ces changements ?

3. Quelle est l'importance de l'émigration pour Béguédo ?

4. Par quel (s) moyen (s) faites-vous vos transferts d'argent ?

5. Pourquoi utilisez-vous ce (s) moyen (s) ?

6. Quelles utilisations fait-on de ces sommes transférées ?

7. Avez-vous des projets pour votre famille ? Lesquels ?

8. XV

Possédez-vous un bien mobilier (réfrigérateur, télévision, bétail) et/ou immobilier (maison, parcelle) au village ou ailleurs au Burkina Faso ? Si oui quelle est la nature du bien ?

Mobilier :

Immobilier :

9. Quels sont vos sentiments après avoir fait un séjour à l'étranger ?

10. Dans quel domaine investissez-vous le plus ? Pourquoi ?

Domaine : .

Justification :

11. A combien pouvez-vous estimer vos transferts de fonds chaque année ?

1. < 100.000 2. 100.000 < X ? 500.000 3. ? 500.000

12. Quels conseils pouvez-vous donner à vos frères qui ont l'intention d'émigrer un jour ?

13. Avez-vous quelques recommandations à nous faire ?

Annexe 3 : Photos

Photo 1 : carte des limites du Bisako

XVI

Photo 2 : une école à deux classes

Photo 3 : un bureau d'éducateurs

Photo 4 : une école à six classes

Photo 5 : une vue extérieure du Centre Médical

XVII

Photo 6 : un lit d'hospitalisation du Centre Médical

Photo 7 : un appareil médical Photo 8 : un appareil médical

Photo 9 : une salle d'intervention

XVIII

Photo 11 : des ambulances amorties

Photo 10 : des ambulances fonctionnelles

Source : Droit Libre TV

Photo 12 : un bloc opératoire

XIX

Photo 13 : une vue aérienne du complexe culturel et sportif Source : ZAKBAMEDIA

Photo 15 : la salle de spectacle du complexe Source : ZAKBAMEDIA

XX

Photo 14 : une vue de l'entrée du complexe culturel et sportif Source : ZAKBAMEDIA

Photo 16 : La grande mosquée en construction

Photo 17 : une vue de l'intérieur de la mosquée R+1

XXI

Photo 18 : devanture de la gare routière en cours

TABLE DES ILLUSTRATIONS

Table des cartes :

Carte n°1 : Localisation de la commune de Béguédo 35
Table des encadrés :

Encadré 1 : Écarts du niveau de vie social des ménages 91

Encadre 2 : Écarts du niveau de vie économique des ménages ....102

Table des tableaux :

Tableau 1 : Évolution de la population de Béguédo de 1975 à 2014 42

Tableau 2 : Structure de la population de Béguédo par sexe en 2006 43

Tableau 3 : Nombre de migrants internationaux de la Haute-Volta par zone et période de départ 60

Tableau 4 : Flux migratoires des Voltaïques des zones rurales vers l'étranger de 1969 à 1973 64

Tableau 5 : Répartition des émigrations (%) selon le groupe ethnique et selon la destination ..76

Tableau 6 : Répartition des migrations circulaires (%) selon les zones de départ et d'arrivée .77

Tableau 7 : Caractéristiques des ménages enquêtés à Béguédo .87

Tableau 8 : Caractéristiques des habitats des ménages enquêtés à Béguédo .92

Tableau 9 : Quelques points de fonctionnement des ménages enquêtés à Béguédo .94

Tableau 10 : Quelques biens et équipements des ménages enquêtés à Béguédo 98

Tableau 11 : Fonds transférés dans les ménages enquêtés de 2014 à 2019 ..103

Tableau 12 : Répartition en % des fonds reçus selon le pays et le continent de provenance 105

Tableau 13 : Caractéristiques des émigrés de la commune de Béguédo .....106

Tableau 14 : Répartition en % des fonds reçus selon le motif économique 109

Tableau 15 : Inventaire des investissements communautaires des émigrés de Béguédo .114

Table des graphiques

Graphique 1 : Age moyen des CM 82

Graphique 2 : Répartition par sexe des CM ..89

Graphique 3 : Situation matrimoniale des CM (en pourcentage) 90

Graphique 4 : Répartition par niveau d'instruction des chefs de ménages 90

Graphique 5 : Répartition des fonds transférés à Béguédo lors des cinq dernières années 105

Graphique 6 : Répartition en % des fonds reçus selon le pays d'envoi (2018-2019) 106

Graphique 7 : Répartition en % des fonds reçus selon le motif économique 112

Table des photographies

Photo 1 : carte du Bisako .XVII

Photo 2 : une école à deux classes ..XVIII

Photo 3 : un bureau d'éducateurs

XXII

Photo 4 : un école à six classes .XVIII

Photo 5 : une vue extérieure du Centre Médical XVIII

Photo 6 : un lit d'hospitalisation .XIX

Photo 7 : un appareil médical .XIX

Photo 8 : un appareil médical .XIX

Photo 9 : une salle d'intervention XIX

Photo 10 : des ambulances fonctionnelles XX

Photo 11 : des ambulances amorties .XX

Photo 12 : un bloc opératoire XX

Photo 13 : une vue aérienne du complexe culturel et sportif XXI

Photo 14 : une vue de l'entrée du complexe culturel et sportif XXI

Photo 15 : la salle de spectacle du complexe XXI

Photo 16 : la grande mosquée en construction XXII

Photo 17 : une vue de l'intérieure de la mosquée de type R+1 XXII

Photo 18 : la devanture de la gare routière XXII

XXIII

TABLE DES MATIÈRES

DÉDICACE I

REMERCIEMENTS II

SOMMAIRE III

SIGLES ET ACRONYMES IV

INTRODUCTION GÉNÉRALE 1

1. La mise en contexte 1

2. L'intérêt et la justification du sujet 2

3. La définition des concepts de la recherche 5

4. L'état de la question 10

5. La problématique du sujet 12

6. La méthodologie de recherche 13

6.1. La recherche bibliographique 13

6.2. La recherche des sources orales 15

6.3. L'analyse des sources 15

6.4. Le commentaire bibliographique 19

7. Les difficultés rencontrées et les limites de l'étude 24

7.1. Les difficultés de la recherche 24

7.2. Les limites de l'étude 25

8. L'annonce du plan 26

PREMIÈRE PARTIE : LA PRÉSENTATION DE LA COMMUNE DE BÉGUÉDO 27

Chapitre I : Situation géographique et caractéristiques de la zone d'étude 29

I_ Cadre physique de la zone d'étude 29

I_1. La situation géographique de Béguédo 29

I_2. Le relief et les sols de Béguédo 31

I_3. Le climat et l'hydrographie de Béguédo 32

II_ Cadre démographique de la zone d'étude 34

II_1. L'historique du peuplement de Béguédo 34

II_2. Les caractéristiques démographiques de Béguédo 36

II_2.1. Evolution et répartition de la population 36

II_2.2. Structure de la population par sexe et par âge 38

III_ Organisation socio-administrative de la zone d'étude 39

XXIV

III_1. L'organisation sociale en pays bissa 39

III_2. L'organisation administrative en pays bissa (de la période coloniale à nos jours) 40

Chapitre II : Cadre humain et économique de la zone d'étude 42

I_ Composition ethnique, linguistique et religieuse de Béguédo 42

I_1. La structure ethnique des Bissa 42

I_2. La composition linguistique des Bissa 43

I_3. La structure religieuse des Bissa 44

II_ Potentialités économiques de Béguédo 45

II_1. L'agriculture 45

II_2. L'élevage 46

II_3. La pêche 47

II_4. Le commerce 47
DEUXIÈME PARTIE : LE CONTEXTE HISTORIQUE DES MIGRATIONS

INTERNATIONALES DES BISSA 51

Chapitre III : Aperçu historique des migrations internationales au Burkina Faso 53

I_ Migrations internationales des Burkinabè 53

I_1. La période coloniale (1919-1960) 53

I_2. La période postcoloniale aux années 1980 56

I_3. Les années 1980 à nos jours 60

II_ Gestion des migrations internationales des Burkinabè 63

II_1. L'administration coloniale face à la question de la migration 63

II_2. La gestion des migrations internationales burkinabè pendant la période postcoloniale 64

II_3. L'accompagnement des organismes sous-régionaux et mondiaux dans la gestion des migrations

internationales burkinabè 66

Chapitre IV : Historique des migrations internationales des Bissa 69

I_ Aperçu historique des migrations internationales en pays bissa 69

I_1. La période coloniale 69

I_2. La période postcoloniale aux années 1980 71

I_3. Des années 1990 à nos jours 72

II_ Historique des migrations internationales des Bissa de Béguédo 74

II_1. Les vagues d'émigration à Béguédo 74

II_2. Les nouvelles destinations des émigrés bissa de Béguédo 76

XXV

TROISIÈME PARTIE : IMPACTS SOCIO-ÉCONOMIQUES DES MIGRATIONS 79

Chapitre V : Caractéristiques des ménages de la commune de Béguédo 81

I_ Les caractéristiques sociales des ménages 81

I_1. La taille et la zone de résidence des ménages 82

I_2. Répartition par âge et par sexe des chefs de ménages 82

I_3. Le statut matrimonial des chefs de ménages 83

I_4. Le niveau d'instruction des chefs de ménages 84

II_ Les conditions économiques des ménages 86

II_1. Caractéristiques de l'habitat 86

II_1.1- Type d'habitat 87

II_1.2- Nature du toit 87

II_1.3- Nature des murs 88

II_1.4- Statut d'occupation 88

II_1.5- Possession d'autres habitats 88

II_2. Fonctionnement des ménages 88

II_2.1- Accès à l'alimentation 89

II_2.2- Accès aux soins sanitaires 90

II_2.3- Accès à l'éducation 90

II_2.4- Principale source d'accès à l'eau de boisson 90

II_2.6- Principale source de cuisson des aliments 91

II_2.7- Mode d'évacuation des ordures 91

II_3. Biens et équipements des ménages 92

II_3.1- Biens d'équipement 93

II_3.2- Principal moyen de déplacement 93

Avec 46 93

II_3.3- Possession d'appareil téléphonique 94

II_3.4- Accès à internet 94

II_3.5- Coût de la connexion mensuelle 94

II_3.6- Accès à un emploi 95

Chapitre VI : Fonds et investissement dans la commune de Béguédo 97

I_ Les envois de fonds des émigrés à Béguédo 97

I_1. Volume des transferts à Béguédo 97

XXVI

I_2. Pays de provenance des fonds 99

I_3. Caractéristiques des émigrés 100

I_4. Canaux de transfert des fonds 101

I_4.1- Les canaux formels 101

I_1.2- Les canaux informels 101

II_ Les investissements des émigrés à Béguédo 103

II_1. Les investissements individuels 103

II_1.1- Les investissements immobiliers 103

II_1.2- La consommation courante 104

II_1.3- L'éducation 104

II_1.4- Les évènements familiaux ou religieux 105

II_1.5- Autres investissements individuels 105

II_2. Les investissements collectifs 107

II_2.1- Les associations de développement à Béguédo 107

II_2.2- Les investissements des émigrés de Béguédo 108

a) Domaine de l'éducation 109

b) Domaine de la santé 109

c) Domaine socio-culturel 109

d) Domaine religieux 110

e) Domaine public 110

III_ L'approche variée des migrations internationales à Béguédo 111

III_1. L'approche variée des migrations 111

III_2. Les effets négatifs de la migration sur la commune de Béguédo 113

CONCLUSION GÉNÉRALE 116

Sources et Bibliographie 119

A- Les Sources 119

A-1. Les archives 119

A-2. Les sources orales 120

A-3. Sites internet 122

B- La Bibliographie 122

B-1. Ouvrages 122

B-2. Les articles scientifiques 124

XXVII

B-3. Les Thèses de Doctorat, Mémoire de Master, Rapport de DEA, Mémoire de Maitrise 125

B-4. Rapports scientifiques 126

ANNEXES VI

Annexe 1 : Guide d'enquête VI

Annexe 2 : Guides d'entretien X

Annexe 3 : Photos XVI

TABLE DES ILLUSTRATIONS XXII

TABLE DES MATIÈRES XXIV

XXVIII

VI






La Quadrature du Net

Ligue des droits de l'homme