I.2.2. Théories sur le Financement
La règle de l'orthodoxie financière
(équilibre financier minimum) recommande que les immobilisations soient
financées par des ressources stables (capitaux propres et dettes de long
terme) et que les emplois cycliques (circulants) soient financés par des
ressources cycliques. Cette notion implique que l'on admette une certaine
spécialisation des ressources aux emplois. Ainsi, les notions de Fonds
de Roulement et de Besoin en Fonds de Roulement (FR et BFR) ne sont que
l'expression de cette exigence.46 Les ressources nécessaires
pour la satisfaction de ces besoins proviennent des diverses structures de
financement.
1. Les structures de financement
La question de la structure financière des entreprises,
entendue comme la répartition des dettes financières et des fonds
propres a toujours suscité réflexion et controverse. Nous passons
en revue les deux théories représentatives, à savoir : la
théorie du financement par compromis, autrement dite « Trade Off
Théorie (TOT) »et la théorie du financement
hiérarchique, dite aussi « Packing Oder Theory (POT) », la
première mettant l'accent sur les taxes et la seconde sur l'existence de
l'asymétrie de l'information.47
46 Prof MUSHAGALUSA NSOMBO Jean-Marie, « cours
d'analyse financière », G3 Economie, UOB, 2015-2016,
Inédit.
47 Prof MUTABAZI NGABOYEKA, cours de gestion
financière à Court Terme», G3 Economie, UOB, 2015-2016,
Inédit.
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a. La théorie de Trade Off (TOT)
Pour la TOT, l'analyse de la structure financière est
basée sur le ratio du cout d'opportunité entre les ressources
internes et externes à l'entreprise. Il s'agit donc d'un arbitrage en
terme d'avantages et inconvénients de deux principales sources de
financement en prenant en compte les diverses incidences qui
prédéterminent cet arbitrage, entre autres : la fiscalité,
les coûts de défaillance ou ceux de mandat, etc. c'est en fait le
prolongement du modèle de Modigliani et Miller prônant la
neutralité de la structure financière par rapport à la
valeur de la firme sous restriction de certaines hypothèses : les
marches sont parfaits, les agents économiques peuvent prêter ou
emprunter à un taux fixe et sans limite, non existence des coûts
de faillite, présence de deux types des titres (actions et obligations),
non prise en compte des effets de la fiscalité, constance de tous les
flux et donc aucune croissance possible, absence d'asymétrie
d'information entre les agents et la poursuite par les intérêts
des actionnaires.48
Les résultats de ce modèle renseigne que toutes
les formes de financement sont équivalentes sur les marchés
financiers parfaits du fait que les écarts de rentabilité
corrigent exactement les écarts de risque, le cout moyen
pondéré du capital reste constant pour des firmes appartenant
à la même classe de risque et la taille n'intervient pas dans la
détermination du cout, etc. ; d'autres auteurs se sont penchés
sur la question relative à la problématique de la théorie
de la TOT, en l'occurrence de Jensen et Meckling. Leurs travaux laissent
entendre que quand les entreprises sont rentables, elles devraient
préférer la dette pour bénéficier de la
déductibilité des intérêts financiers. En outre, si
la rentabilité passée est un bon indicateur pour la
rentabilité future, les entreprises rentables seront moins soumises au
rationnement et aux autres contraintes financières.49
Concernant spécifiquement les PME, Aghion & Bolton
montrent que le taux d'imposition réduit dont bénéficient
ces entreprises limite, à un certain point, la pratique d'une politique
d'endettement conditionnée à la déductibilité des
charges d'intérêts. De plus la réalisation des
économies d'impôts liées à l'endettement est
influencée par la variabilité supérieure des
48 F. Modigliani, and M. Miller, « The cost of
capital, corporate finance, and the theory of investment » American
Economic Review 48, 1958, p 261.
49 M. Jensen, and W. Meckling, « Theory of the
firm: managerial Behavior, agency costs, and capital structure »,
Journal of Financial Economics 3, 1976, p.305.
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investissements et le caractère moins prévisible
des bénéfices réalisés par ce type
d'entreprise.50
b. La « Pecking Oder theory » (POT) ou
théorie du financement hiérarchique
La Théorie du Pecking Order consiste en une combinaison
des ressources financières qui, sous un climat d'asymétrie
d'information et respectant une certaine hiérarchie (autofinancement,
endettement et obligation), maximise la valeur de la firme.
A l'inverse des théories de la TOT, celles de la POT
privilégient l'élaboration d'une règle de comportement
générale sur la détermination d'un montant optimal
d'endettement de l'entreprise. Cette règle de comportement se traduit
par l'existence d'une hiérarchie des sources de financement
établie principalement selon les hypothèses d'asymétrie
d'information, laquelle hiérarchie intègre également des
éléments décisionnels réalités à
l'objectif principal poursuivi par le dirigent d'entreprise et qui sont
particulièrement pertinents dans un cadre d'analyse dédié
aux PME.51
La théorie de financement hiérarchique,
développée par Myers et Majluf est comme dit tantôt, la
conséquence de l'asymétrie d'information qui existe entre les
acteurs internes (propriétaire, dirigent) et les acteurs externes
(bailleurs de fonds) à l'entreprise. Les dirigeants adoptent une
politique financière qui a pour but de minimiser les coûts
associés et ils préfèrent le financement interne au
financement externe. Selon cette théorie, le dirigeant doit respecter la
hiérarchie suivante : l'autofinancement, la dette non risquée, la
dette risquée, l'augmentation du capital. Le respect de cette
hiérarchie a pour avantage de dividendes pour augmenter
l'autofinancement, de réduire le coût du capital en limitant le
plus possible le recours aux emprunts.52
La suite de la littérature insiste beaucoup sur
l'accomplissement des hypothèses de neutralité de la structure
financière et Modigliani et Miller ont même remis en cause cette
neutralité,
50 Aghion & Bolton, «An Incomplete
Contracts Approach to Financial Contracting », Review of Economic
Studies, 59(3), 1992, p.94.
51 M.C. Adam., A. FARBER et P. MICHEL, «
Théorie financière et PME », Nouvelles de la Science et des
Technologies, Vol.7, n°3, p64.
52 S. Myers, and N. MajLuf, «Corporate
financing and investment decisions when firms have information that investors
do not have », Journal of Financial Economics 13, 1984, p187.
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considérant que les entreprises sont incitées
à recourir à l'endettement plus qu'aux fonds propres dont les
rémunérations ne sont pas déductibles
d'impôt.53
La théorie du signal suppose que les agents internes
à l'entreprise plus informés que les agents externes qui sont
principalement les banques, dans le cas des PME, ont intérêt
à transmettre une partie de l'information à ces derniers par le
biais de signal afin d'accéder à la dette. Cette signalisation
peut se transmettre soit par niveau de l'endettement de la firme ou par le
degré d'implication du dirigeant lui-même dans le financement des
projets d'investissement.54
D'une manière brève, le travail ici
présent est assis sur la théorie des parties prenantes
(stakehoders theory). Cette théorie sous-entend une réflexion
à long terme et l'entreprise qui met en pratique ce concept se concentre
sur le fait de maximiser les bénéfices économiques et
sociaux à long terme, et non seulement sur la création de profit
à court terme. Concernant la théorie de financement, nous basons
cette étude sur la théorie du financement hiérarchique
(Pecking Order Theory) du fait que les PME dans le choix du mode de financement
de leurs besoins financiers raisonnent en termes d'hiérarchie et
préfèrent le financement interne au financement externe.
53 J. Tiemy, « Décision
économique et valeur actionnariale chez Michelin »In Revue Analyse
Financière, N° 115, Juin 1998, p.122.
54 S.A. ROSS, Finance Corporate, éd. Dunod,
Paris, 2005, p.54.
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