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La responsabilité pénale du fait de l’empoisonnement et de ses problèmes en droit positif congolais.par André-JoàƒÂ«l MAKWA KANDUNGI Université de Lubumbashi - Licence en Droit 2015 |
§2. Cas de contamination volontaire du VIH/SidaUn autre cas que le problème de l'empoisonnement appelle, c'est la contamination volontaire d'une personne au VIH. Est-ce que le fait de transmettre intentionnellement le VIH à une autre personne est une infraction ? La personne adopte alors des attitudes, des comportements irresponsables en vue de contaminer volontairement les autres. Et s'il y a infraction, laquelle ? Est-ce qu'on peut dire qu'il y a empoisonnement ? On peut poursuivre la personne qui transmet volontairement la maladie pour empoisonnement. Mais il y a une différence, on se trouve en présence d'une personne malade. Les médecins disent qu'à un certain stade de cette maladie, la personne peut avoir des troubles psychiques. Il faut alors chercher à savoir si la personne avait toutes ses capacités de choix pour subir la rigueur de l'empoisonnement. Une autre différence c'est qu'en droit congolais, l'empoisonnement est une infraction matérielle. Il n'est consommé que s'il produit le résultat mortel. Si la victime n'en meurt pas, ou bien il y a tentative d'empoisonnement ou bien administration des substances nocives (art. 50, code pénal livre II). La différence c'est qu'au moment d'apporter l'affaire au tableau, la personne n'est pas encore morte, ça ne sera pas l'empoisonnement. Mais pourquoi ne pas retenir l'empoisonnement quand on sait que la personne est en processus de mourir. Jadis, le fait de contaminer le VIH à une autre personne par voie sexuelle était un empoisonnement parce que la loi dit « de quelque manière que cette substance soit administrée ». La différence c'est celle de la preuve. Peut-être que la « victime » avait auparavant le VIH. Il faut des recherches poussées, pour arriver à comparer le virus de deux personnes pour voir si le virus vient de celui qui l'a transmis. Mais les virus ont la forte capacité de se transmuer aussitôt transmis. A ce propos, plusieurs positions ont été adoptées par les juridictions françaises s'agissant de la contamination par VIH. En effet, Depuis quelques années130(*), des personnes sciemment contaminées par leur partenaire atteint(e) par le virus du Sida ont porté plainte pour « administration de substance nuisible ». Au départ certaines plaintes furent déposées pour « empoisonnement », mais cette qualification fût écartée au motif que : ce crime implique pour être constitué que soit rapportée la preuve chez son auteur de la volonté de donner la mort (Animus necandi) : Cass. Crim. 22.06.94 n°93-83900. Et « la seule connaissance du pouvoir mortel de la substance administrée ne suffit pas à caractériser l'intention homicide ». (Cass crim 2 juillet 1998 N°98-80529). Par ailleurs le droit distingue : « incurable » et « mortel », incurable n'est pas inéluctablement mortel. Dans L'Arrêt Christophe MORAT l'on parle donc de « risques manifestes, de contamination par une maladie incurable » que « le prévenu ne pouvait ignorer ». (Cour d'Appel de Colmar, 04.01.2005 ARRÊT N° 05/00003). En 2006, toujours en France, dans la même affaire, La Cour de Cassation tranche en faveur des victimes énonçant que : « Justifie sa décision la cour d'appel qui, pour déclarer le prévenu coupable du délit d'administration de substances nuisibles aggravé prévu et puni par les articles 222-15 et 222-9 du Code pénal, retient que, se sachant porteur du virus de l'immuno-déficience humaine (VIH), il a multiplié les relations sexuelles non protégées avec plusieurs jeunes femmes auxquelles il dissimulait son état de santé et a contaminé deux d'entre elles, désormais porteuses d'une affection virale constituant une infirmité permanente ». (Crim 10.01.2006 N° 05-80787) « L'élément intentionnel du crime ne suppose que l'administration volontaire, en connaissance de cause, de la substance nuisible à la santé de la victime ».131(*) Et L'article 121-3 alinéa 1 du Code pénal pose le principe suivant lequel : « Il n'y a point de crime ou délit sans intention de le commettre». Du coup le " déni " psychologique fût plaidé par la défense dans quasiment toutes les affaires de ce genre. Arguant chaque fois que le/la présumé(e) coupable aurait dénié sa séropositivité au point de perdre toute conscience des risques qu'il/elle pouvait faire courir à sa/son partenaire. Une quinzaine d'affaires en France ont donné lieu à des condamnations allant de quelques mois de détention avec sursis, à 9 ans de prison ferme (Cour d'Assises de Paris 29.10.2011) Avec l'affaire Gharsallah Hicheim. La position des Associations de Lutte contre le Sida sur ces procédures est claire depuis quelques années : elles refusent la judiciarisation des affaires de transmission volontaire du VIH. Pour argumenter cette prise de position en faveur des présumés contaminateurs, les associations expliquent que : « les séropositifs étant déjà en souffrance, cela ne fait que renforcer celle-ci en les stigmatisant ». Nous nous sommes basés sur ces positions jurisprudentielles de la France faute d'en trouver des pareilles dans la jurisprudence congolaise. Toutefois, ces positions prouvent à suffisance l'un des problèmes que pose l'administration des substances nuisibles qui portent atteintes à la vie de la personne humaine. Dans l'empoisonnement, l'infraction est parfaitement consommée, lorsque se produit la mort de la victime. Dans l'hypothèse de l'art. 50 du code pénal, administration des substances nuisibles, l'infraction est consommée dès lors que vous administrez les substances. En France, l'empoisonnement est une infraction formelle. Dès l'instant qu'il y a administration du poison, l'infraction est consommée. Signalons cependant qu'actuellement le législateur congolais, par la loi n°08/011 du 4 juillet 2008 portant protection des droits des personnes vivant avec le vih/sida et des personnes affectées. La contamination d'un enfant du vih/sida et la transmission délibérée du vih/sida sont actuellement érigées en infractions autonomes. La peine est de cinq à six ans de servitude pénale principale et d'une amende de cinq cents mille francs congolais. * 130 http://www.action-po.org/droit-et-contaminations-intentionnelles/le-regard-du-droit-fran%C3%A7ais/ * 131 Cour d'Appel d'Orléans 09.11.2007 N° de RG: 07/00291. |
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