INTRODUCTION GENERALE
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INTRODUCTION GENERALE
La dégradation des écosystèmes naturels
constitue l'un des sujets les plus préoccupants de nos jours. Dans les
zones sub-sahariennes, les écosystèmes sont soumis à des
perturbations de toutes sortes (pertes irréversibles de la
diversité biologique, feux de végétation, modification des
habitats naturels, etc.). Pour le Groupe Intergouvernemental d'Etude sur le
Climat (GIEC, 2007), si l'augmentation de la température excède
2°C, près de 20 à 30 % des espèces
végétales et animales seront menacées d'extinction. Dans
ces conditions, d'importants changements dans la structure et la fonction des
écosystèmes sont attendus, ce qui aura des conséquences
négatives sur la biodiversité et les biens et services rendus par
ceux-ci, notamment l'eau et la nourriture. L'Afrique en général
et le Bénin en particulier sont confrontés au problème de
plus en plus aigu et généralisé de dégradation de
l'environnement.
De nombreuses études (Boko, 1988 ; Afouda, 1990 ; Issa,
1995 ; Ogouwalé, 2004) ont montré que la plupart des
écosystèmes des différentes régions
agro-écologiques au Bénin sont aujourd'hui marqués par une
dégradation du fait de la forte variabilité climatique
associée à une plus grande fréquence des
phénomènes extrêmes (sécheresse, inondations, etc.)
au cours des trois dernières décennies (Issa, 2012).
Le bassin versant de la Pendjari à l'exutoire de Porga
en République du Bénin, partie intégrante d'une de ces
régions agro-écologiques, n'échappe pas à ces
problèmes. En effet, selon les études réalisées par
la Direction de l'Hydraulique (actuelle Direction Générale de
l'Eau) en 2000, le bassin versant de la Pendjari est façonné sur
le socle cristallin. La dynamique de l'eau y est influencée par une
géologie assez rigide rendant difficile l'infiltration et un relief
accidenté (la chaîne de l'Atacora aux pentes fortes) qui
accentuent l'écoulement. Les pratiques agricoles encore dominées
par une agriculture extensive contribuent à la désertification
(déforestation, appauvrissement des sols, etc.) et en conséquence
au déficit hydrique (Idiéti, 2004). D'après Ouassa Kouaro
(2003), la pression démographique est de plus en plus forte "autour de
la réserve de la biosphère de la Pendjari". Selon Ogouwalé
(2006), le contexte climatique est influencé par une
irrégularité et une diminution pluviométrique
saisonnière. Au plan hydrologique, certains affluents des cours d'eau et
bas-fonds sont en voie de disparition. Pourtant, les populations vivent parfois
des inondations spontanées à certains endroits de la
vallée de la rivière Pendjari. Ces inondations sont dues au
débordement du cours d'eau en période de hautes eaux
(Idiéti, 2009).
Face à toutes ces menaces, l'accessibilité
actuelle des ressources en eau et la satisfaction des besoins (biologiques et
socio-économiques) déjà faibles, sont gravement
compromises et le problème d'eau se pose en termes de sa maîtrise.
L'amélioration de la gestion des écosystèmes naturels
(aquatiques et terrestres) paraît être le meilleur moyen pour
atteindre l'objectif du 21ème
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siècle qui est de satisfaire les besoins en eau de
qualité et de protéger l'Environnement (Soulet, 2001).
D'après Ouassa Kouaro (2008), la protection et la restauration des
écosystèmes vulnérables apparaissent comme une
préoccupation majeure des Etats et des agences de
développement.
C'est dans ce souci que la 19ème session
extraordinaire de l'Assemblée Générale des Nations Unies
(FAO, 1997) a donné l'alerte sur les menaces liées à l'eau
et souligné un besoin urgent : (i) de politiques et de programmes de
gestion de l'eau, (ii) d'intensification de la coopération
régionale et internationale en matière de transfert de
technologies et, (iii) d'amélioration de la capacité de gestion
des données scientifiques, sociales et environnementales pour les
gouvernements et les institutions internationales. Cette protection et la
restauration des écosystèmes requièrent la connaissance et
la maîtrise des différents facteurs de modification et de
dégradation de ces écosystèmes. Pour ce faire, la
6ème session de la Commission pour le Développement
Durable (décembre 1997 à avril 1998) a invité les
gouvernements à se pencher sur les problèmes liés à
l'eau en attribuant plus d'attention à l'hydrologie en
général et à la capacité à évaluer la
disponibilité et la variabilité des ressources en eau.
En application des recommandations de la
19ème session extraordinaire de l'Assemblée
Générale des Nations Unies et de la 6ème
session de la Commission pour le Développement Durable, l'Union
Européenne élabore et publie la Directive Cadre sur l'Eau (DCE,
2000) qui pose les jalons d'une nouvelle politique de l'eau harmonisée
à l'échelle européenne. Cette directive introduit la
notion de masse d'eau qui doit présenter une certaine
homogénéité du point de vue des caractéristiques
naturelles (pour que les conditions de référence y soient
homogènes) et du point de vue des perturbations exercées par les
activités humaines (pour que l'état constaté y soit
homogène) (AELB, 2004). Dans ce cadre, de nombreux travaux de
régionalisation des écosystèmes naturels notamment
aquatiques et de typologie des eaux de surface ont été
réalisés dans plusieurs pays européens et
américains (France, Martinique, Guyane, Belgique, Allemagne, Espagne,
etc.). Tous ces travaux ont utilisé la même approche, celle des
Hydro-Eco-Régions (HER). Une approche dont la méthode permet
d'atteindre l'objectif de la DCE qui est de regrouper des milieux aquatiques
homogènes du point de vue de certaines caractéristiques
naturelles (relief, géologie, climat, géochimie des eaux,
débit, etc.), qui ont une influence structurante sur la
répartition géographique des organismes biologiques.
Dans le contexte actuel où la gestion durable des
ressources naturelles (ressources en eau, végétation, sols, etc.)
prend de plus en plus d'importance, il est impérieux d'analyser les
facteurs de la dynamique des écosystèmes suivant une nouvelle
approche applicable aux milieux
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subsahariens. C'est dans cette perspective que nous avons
axé notre étude sur les hydro-écorégions du bassin
de la Pendjari.
Les recherches sur « Les
hydro-écorégions du bassin de la Pendjari : analyse des
déterminants socio-économiques et environnementaux de la
dynamique des écosystèmes naturels » ont
permis d'introduire cette nouvelle approche au Bénin avec les
données dont nous disposons et de mieux appréhender les facteurs
déterminants de la dynamique des écosystèmes naturels au
sein des entités homogènes et distinctes.
Ce sujet s'insère dans les objectifs du projet
ESPRIT-EDULINK au CIFRED, dont l'étude a bénéficié
l'appui matériel et financier. Ces objectifs sont formulés comme
suit :
Objectif global du projet . ·
Contribuer à la durabilité écologique et
agricole dans les zones arides au Bénin, au Burkina Faso et au Cameroun
dans un contexte de croissance démographique et le changement
climatique. Objectifs spécifiques du projet . ·
- Renforcer la gestion du réseau interinstitutionnel
des centres d'Etudes environnementales au Bénin, Burkina-Faso et le
Cameroun ;
- Renforcer par la participation commune au
développement de la recherche et à des cours entre les centres
africains associés et les pays européens du projet,
- Améliorer la qualification du corps enseignant des trois
Centres d'Etudes,
- Renforcer l'expertise stratégique du Bénin, du
Burkina-Faso et du Cameroun dans la gestion des terres fermes par la
disponibilité d'une base de connaissances régulièrement
mise à jour.
Pour contribuer au développement
socio-économique des populations des bassins du Nord Bénin, les
recherches du CIFRED permettent aux habitants de la zone de prendre conscience
des impacts de leurs diverses activités d'exploitation des terres sur
les ressources en eau et les écosystèmes naturels.
Ces recherches visent à contribuer au changement de
comportement des populations par l'adoption des nouvelles techniques
appropriées pour une utilisation et une gestion durables des terres afin
de réduire considérablement l'ensablement des cours d'eau et leur
pollution.
Elles visent également à aider les
décideurs à connaître les potentialités et les
menaces sur les ressources en eau du bassin, ce qui pourra les aider dans la
conception et la mise en oeuvre de activités de gestion rationnelle des
écosystèmes naturels et de l'eau pour un développement
local durable à travers :
- la proposition de systèmes culturaux moins
vulnérables ;
- le zonage agro climatologique pour la diversification des
cultures ;
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- la protection des écosystèmes naturels qui
soutiennent le bien être des communautés rurales (sol,
végétation, etc.).
La présente étude est structurée en cinq
chapitres. Le premier chapitre présente le cadre géographique. Le
second le cadre théorique et méthodologique. Le troisième
décrit les hydro-écorégions identifiées dans leurs
caractéristiques. Le quatrième chapitre expose l'analyse des
déterminants de la dynamique des écosystèmes naturels. Le
cinquième chapitre examine les stratégies d'adaptation à
la dynamique des écosystèmes naturels dans les
hydro-écorégions identifiées.
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