RÉPUBLIQUE DU NIGER
CABINET DU PREMIER MINISTRE
MÉMOIRE DE FIN DE CYCLE POUR L'OBTENTION DU
DIPLÔME DU
NIVEAU II
Sujet :
LA STRATÉGIE DU NIGER DANS LA LUTTE CONTRE LA
RADICALISATION ET L'EXTRÉMISME VIOLENT :
CAS DE LA RÉGION DE TILLABERI
Présenté par : Directeur de
Mémoire
Nom : ABDEL-HADI Nom :
SAMBO
Prénom : Moussa Hassabal kerim
Prénom : Bodé
Niveau : II Grade :
Maître de conférences
Section : Administration
Générale Fonction : Conseiller Technique
Promotion : 2020 du Président de la
HACP/PRN
Année académique :2021-2022
i
DÉDICACE
Je dédie ce mémoire à ma grande soeur AZIZA
ALBECHIR.
ii
REMERCIEMENTS
Nous adressons nos remerciements :
- à Monsieur Bodé SAMBO, conseiller Technique du
Président de la Haute Autorité à la Consolidation de la
Paix (HACP), qui malgré ses multiples
occupations a accepté de diriger ce travail combien dur et
pénible.
- au corps professoral et à l'administration de
l'École Nationale d'Administration (ENA) pour la qualité de
l'enseignement dispensé durant les deux années et, notamment au
Directeur général (DG) de l'ENA, Monsieur BOUCAR ABBA KAKA ;
- au Directeur général de l'Administration
Territoriale et de la déconcentration, Monsieur HAIDARA ABDOULAYE pour
la contribution et les conseils ;
- à ma mère et à mon père qui sont
mes piliers, mes exemples, mes premiers supporteurs et ma plus grande force
dans cette vie ;
- à mes grands frères ADOUM MAHAMAT BOUCAR,
ABDELHAKIM NASSOUR et OUMAR MOUSSA HASSABALKERIM pour leurs soutiens
indéfectibles et précieux conseils ; sans oublié M. Sayadi
Abdou Chafai.
- à tous mes petits frères, mes tantes, mes
cousin(e)s ne vous sentez pas oublié, car vous êtes ma motivation
et ma source de réussite ;
- à mes oncles AHMAT HASSABALLAH ABDEL-HADI et OUTHMANE
HASSABALLAH ABDEL-HADI pour leurs conseils ;
Enfin, mes remerciements vont à l'endroit de toutes
celles et tous ceux qui ont apporté de loin ou de près leur
modeste contribution pour la réalisation de ce mémoire.
iii
LISTE DES SIGLES ET ABRÉVIATIONS
AQMI : Al-Qaeda au Maghreb Islamique
AGR : Activités
Génératrices des Revenues
BH : Boko Haram
CCP : Comités Communaux de Paix
CDIR : Comités de Dialogue Inter et
Intra Religieux
CDS : Conseil Départemental de
Sécurité
CEDEAO : Communauté Économiques
des États de l'Afrique de l'Ouest
CELLERAD : Antenne Nationale de la Cellule
Régionale de Prévention de la
Radicalisation et de l'Extrémisme Violent
CNESS : Centre National d'Études
Stratégiques et de Sécurité
CNS : Conseil National de
Sécurité
CPS : commissions paix et
sécurité
CUE : Commission de l'Union
Européenne
EIGS : État islamique au Grand
Sahara
ENA : École Nationale
d'Administration
EV : Extrémisme Violent
FDS : Forces de Défense et de
Sécurité
FMM : Forces Multinationales Mixtes
GANE : Groupe Armé Non
Étatique
GAT : Groupe Armé Terroriste
GATIA : Groupe d'autodéfense touareg
Imghad
HACP : Haute Autorité à la
Consolidation de la Paix
ICSP : Instrument Contribuant à la
Stabilité et à la Paix
iv
IFTIC : Institut de Formation aux Techniques
de l'Information et de la Communication
JNIM : Jama'at Nusrat al-Islam wal Muslimin
LASDEL : Laboratoire d'Études et de
Recherche sur les Dynamiques Sociales et le Développement Local
MINUSMA : Mission Multidimensionnelle
Intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali
MNLA : Mouvement National pour la
Libération de l'Azawad
MSA : Mouvement pour le salut de l'Azawad
MUJAO : Mouvement pour l'Unicité et du
jihad en Afrique de l'Ouest
OCRTIS : Office Central de Répression du
Trafic Illicite des Stupéfiants
ONG : Organisations Non Gouvernementales
ONU : Organisation des Nations Unies
PNUD : Programme des Nations Unies pour le
Développement
SCLCT/CTO : Service Central de Lutte Contre le
Terrorisme et le Crime Transnational Organisé
SNPREV : Stratégie Nationale de
Prévention de la Radicalisation et de l'Extrémisme Violent
UA : Union Africaine
UEMOA : Union Économique et
Monétaire Ouest-Africaine
UNDSS : Département de la
sûreté et de la Sécurité des Nations Unies
UNOCHA : Bureau Humanitaire de l'Organisation des Nations
unies.
v
LISTE DES TABLEAUX
Tableau : nombre des incidents sécuritaires dans la
région de Tillabéri 30
vi
TABLE DES MATIÈRES
DÉDICACE i
REMERCIEMENTS ii
LISTE DES SIGLES ET ABRÉVIATIONS iii
LISTE DES TABLEAUX v
TABLE DES MATIÈRES vi
INTRODUCTION 1
PREMIÈRE PARTIE : CADRE THÉORIQUE,
APPROCHE
MÉTHODOLOGIQUE ET PRÉSENTATION DE LA
RÉGION DE TILLABERI.
4
CHAPITRE I : CADRE THÉORIQUE ET APPROCHE
MÉTHODOLOGIQUE . 5
1.1 Cadre théorique 5
1.1.1 Justification du choix du sujet 5
1.1.2 Revue de la littérature 6
1.1.3 Problématique 11
1.1.4 Hypothèses de la recherche 15
1.1.5 Définition des concepts 15
1.1.6 Objectifs de recherche 18
1.1.6.1 Objectif général 18
1.1.6.2 Objectifs spécifiques 18
1.2 Approche méthodologique 19
1.2.1 Champ d'investigations 19
1.2.2 Méthodes utilisées 19
1.2.2.1 Recherche documentaire 20
1.2.2.2 Entretiens 20
vii
1.2.3 Analyse des données 20
1.2.4 Difficultés rencontrées 21
CHAPITRE II : LA PRÉSENTATION DU CADRE
D'ÉTUDE 22
2.1 La présentation de la région de
Tillabéri 22
2.1.1 Situation géophysique 22
2.1.2 Contexte démographique 23
2.1.3 Contexte économique 24
2.1.4 Contexte sécuritaire 26
2.1.5 Contexte de gouvernance foncière 30
2.2 Organisation administrative de la région de
Tillabéri 32
DEUXIÈME PARTIE : ANALYSE DES FACTEURS DE LA
RADICALISATION ET FORMES DE VIOLENCE EXTRÉMISTE, STRATÉGIES DE
LUTTE,
LIMITES ET RECOMMANDATIONS 35
CHAPITRE III : ANALYSES DES FACTEURS DE LA
RADICALISATION ET LES FORMES DE VIOLENCE EXTRÉMISTE DANS LA
RÉGION DE
TILLABERI. 36
3.1 Analyse des facteurs de la radicalisation dans la
région de Tillabéri 36
3.1.1 La pauvreté 36
3.1.2 L'injustice sociale 38
3.1.3 La mauvaise gouvernance 39
3.1.4 Les conflits inter et intracommunautaires dans la
région de Tillabéri 40
3.1.5 La recherche de sécurisation 41
3.2 Les formes de violence extrémiste
42
3.2.1 Les attaques physiques ou armées 43
3.2.2 La violence économique 43
3.2.3 La violence psychologique 44
viii
CHAPITRE IV : STRATÉGIES DE LUTTE CONTRE
L'EXTRÉMISME
VIOLENT, LIMITES ET RECOMMANDATIONS 45
4.1 Stratégie de prévention et de lutte
contre l'extrémisme violent 45
4.1.1 Mesures préventives 45
4.1.1.1 La sensibilisation 45
4.1.1.2 L'éducation 46
4.1.1.3 L'information 49
4.1.1.4 La stabilisation 52
4.1.1.5 Les mécanismes de résilience contre
l'extrémisme violent 53
4.1.1.6 Les actions des projets et des Organisations Non
Gouvernementales 54
4.1.2 stratégies de lutte contre l'extrémisme
violent 55
4.1.2.1 Les moyens juridiques 55
4.1.2.2 Les moyens institutionnels 58
4.1.2.3 Les moyens militaires 63
4.1.2.4 Les moyens politiques 64
4.1.3 La stratégie au niveau des pays du G5 Sahel 68
4.1.4 La déradicalisation 69
4.2 Limites et recommandations 72
4.2.1 Limites 72
4.2.2 Recommandations 74
CONCLUSION 77
BIBLIOGRAPHIE 79
ANNEXES I
1
INTRODUCTION
Partageant ses frontières avec le Mali et le Burkina
Faso à l'ouest, le Nigeria et le Bénin au sud, l'Algérie
et la Libye au nord, et le Tchad à l'est, le Niger fait face depuis 2012
à des défis sécuritaires, imbriqués à ceux
liés aux changements climatiques et à la croissance
démographique.
Au cours de ces deux dernières décennies, la
radicalisation, l'extrémisme violent et le terrorisme religieux sont
devenus une préoccupation pour les États du Sahel et plus
particulièrement pour le Niger. Ceux-ci, superposés aux
problématiques du banditisme, à la criminalité
transfrontalière, à l'accroissement de l'économie
criminelle, aux effets du changement climatique constituent des menaces pour la
sécurité et la paix. Dans la région du Liptako-Gourma, le
climat d'insécurité et de violence continue de se dégrader
en raison des actes des Groupes Armés Non Etatiques, en particulier
l'État Islamique au Grand Sahara (EIGS) et la Jama'at Nusrat
al-Islam wal Muslimin (JNIM), affilié à Al-Qaeda.
Parmi les zones du Liptako Gourma confrontées aux
menaces terroristes, l'ouest du Niger, notamment la région de
Tillabéri reste particulièrement confrontée à une
montée de l'extrémisme violent qui résulte de sa
proximité avec la zone d'influence qui donne lieu à un manque de
perspectives économiques, en particulier chez les jeunes, qui sont les
plus vulnérables à la radicalisation.
En effet, la radicalisation est définie comme un
processus de façonnement d'un individu le conduisant à adopter
une idéologie extrémiste, ou de transformation des frustrations
individuelles ou collectives en source de colère, rendant les
concernés réceptifs à des offres de participation à
des actions armées1.
1 Lexique de la Radicalisation et de l'Extrémisme violent
du G5 Sahel, 2020.
2
Aussi, l'extrémisme violent est défini comme
toute forme de croyances et d'actions de personnes soutenant ou usant de la
violence pour atteindre des objectifs idéologiques, religieux ou
politiques, incluant le terrorisme et autre forme de violence politique et
communautaire2.
C'est ainsi que la radicalisation ou l'extrémisme,
qu'il soit politique ou religieux, n'est pas un problème en soi et ne
pose pas de danger pour la société tant qu'il n'est pas
lié à la violence ou à d'autres actes illégaux tels
que l'incitation à la haine. Ces deux termes se sont affirmés
comme deux phénomènes complexes et ne bénéficiant
pas d'une définition faisant l'unanimité, restent un défi
majeur aujourd'hui pour le Niger ; en bousculant profondément l'Est et
l'Ouest du pays dans l'insécurité.
Compte tenu de l'importance d'une telle préoccupation,
le sujet retenu du mémoire est : « la stratégie du
Niger dans la lutte contre la radicalisation et l'extrémisme violent :
cas de la région de Tillabéri ». Son choix
répond à notre souci de renforcer nos capacités à
la fois en matière de lutte contre la radicalisation et
l'extrémisme violent et de contribuer à apporter un début
de solution.
Au début de cette recherche, nous avons collecté
des données et eu des entretiens sur le terrain, notamment dans la
région de Tillabéri avec quelques cadres des institutions
concernées par la question de la radicalisation.
Il est important de faire une analyse sur les facteurs qui
poussent les jeunes à la radicalisation et à l'extrémisme
violent et faire un état des lieux sur les stratégies mises en
place par le Niger pour contrecarrer ces phénomènes dans ladite
région.
Cette étude est articulée autour de deux parties
dont chacune des parties comprend deux chapitres. La première partie
traite le cadre théorique, l'approche méthodologique et la
présentation du cadre d'étude ; quant à la
2 Lexique de la Radicalisation et de l'Extrémisme violent
du G5 Sahel, 2020.
3
deuxième partie, elle traite l'analyse des facteurs de
la radicalisation et les formes de violence extrémiste, les
stratégies de lutte afin de montrer les limites et de proposer des
recommandations.
4
TILLABERI.
PREMIÈRE PARTIE : CADRE THÉORIQUE,
APPROCHE
MÉTHODOLOGIQUE ET PRÉSENTATION DE LA
RÉGION DE
La première partie comporte deux chapitres. Le premier
chapitre traite le cadre théorique et l'approche méthodologique
et le deuxième chapitre aborde la présentation de la
région de Tillabéri.
5
CHAPITRE I : CADRE THÉORIQUE ET APPROCHE
MÉTHODOLOGIQUE
Ce chapitre, qui s'articule autour de deux points, aborde
d'abord le cadre théorique, puis l'approche méthodologique.
1.1 Cadre théorique
Cette partie est constituée de six (6) points qui
seront successivement abordés à travers la justification du choix
du sujet, la revue de la littérature, la problématique, les
hypothèses de la recherche, la définition des concepts et les
objectifs de la recherche.
1.1.1 Justification du choix du sujet
Notre choix pour ce thème intitulé «
la stratégie du Niger dans la lutte contre la radicalisation
et l'extrémisme violent : cas de la région de
Tillabéri », se justifie par des raisons
multiples que nous annonçons de manière suivante :
Premièrement, ce sujet nous permet d'élargir nos
connaissances sur le processus de la radicalisation et de l'extrémisme
violent qui sévit dans les pays du Sahel et plus particulièrement
au Niger.
Il s'en suit que le Niger est l'un des pays du Sahel qui est
affecté dans ses parties Nord-ouest et Sud-est par le
phénomène de la radicalisation et de l'extrémisme violent.
Toute chose qui met à rude épreuve la paix, la quiétude
sociale, la cohésion sociale, la sécurité et les
conditions de développement socioculturelles du pays. À cet
effet, il est important de mettre l'accent sur cette thématique pour
trouver, comprendre et mieux endiguer le mal à la racine.
Enfin, l'insuffisance de travail de recherche nous a
inspiré l'idée d'apporter un début de solution à la
question de lutte contre la radicalisation et l'extrémisme violent. Nous
avons relevé que la thématique est devenue une
préoccupation majeure pour le gouvernement nigérien depuis au
moins une décennie, en ce sens qu'elle perturbe la cohésion
sociale et le vivre-ensemble. C'est pourquoi nous avons pensé d'une
part, d'apporter une contribution peu
6
qu'elle soit dans ce domaine et d'autre part, adopter une
approche pondérée des problèmes liés à la
radicalisation et à l'extrémisme violent.
1.1.2 Revue de la littérature
Dès le début de cette recherche, nous avons
consulté quelques documents en vue de permettre de voir clair et de
comprendre facilement le sujet de mémoire d'étude. À cet
effet, quelques auteurs et chercheurs ont donné leur point de vue
à travers leurs écrits sur la question de la radicalisation et de
l'extrémisme violent. Parmi ces auteurs, nous avons entre autres :
KHOSROKHAVAR, Farhad (2014), a
évoqué les phénomènes de la radicalisation qui
suscite aujourd'hui tant la curiosité que la crainte. La partie
introductive de l'ouvrage s'intéresse au sens et aux enjeux entourant la
notion de la radicalisation et s'interroge sur deux aspects éminemment
contemporains liés aux questions de la radicalisation. En premier lieu,
les défis en matière de gestion de déradicalisation ou de
sortie des trajectoires djihadistes. Alors que le modèle
républicain de la laïcité soulève une série
des frictions quant à la mise en place de structures de prises en charge
où se côtoieraient autorités, membres de la
société civile et figures religieuses, seules à même
de déconstruire les systèmes de croyances endossés par les
individus radicalisés. Dans un second temps, l'auteur s'interroge avec
raison, quant à la montée de ce que certains nomment aujourd'hui
un extrémisme réactionnaire, illustré par les actions
violentes d'acteurs isolés comme les terroristes.
DAVID PUAUD (2018) dans «LE
SPECTRE DE LA RADICALISATION» tente quant à lui de
saisir plusieurs problématiques : il met l'accent sur l'analyse des
dispositifs et discours liés à l'administration sociale en temps
de menace terroriste avec l'hypothèse d'un développement d'une
administration socio-sécuritaire qui réagit à la peur,
mais paradoxalement la produit également (P.14). Dans les faits, deux
axes sont privilégiés par l'auteur : le premier, c'est
l'étude du dispositif de mobilisation institutionnelle et le second,
c'est la focalisation politique, médiatique et sécuritaire sur la
notion de radicalisation.
7
Ensuite, Mathieu Pellerin (2017) dans son
analyse sur «Les trajectoires de la radicalisation religieuses
au Sahel» a évoqué le poids des facteurs
extérieurs dans le processus de la radicalisation. Selon lui, les
contextes locaux ne sont pas les seuls à prédisposer à la
radicalisation religieuse. Ce sont les influences extérieures qui
nourrissent quotidiennement l'amertume des populations sahéliennes. Il
souligne ensuite que tous les pays du Sahel ont pour l'heure
échoué à concevoir et à mettre en oeuvre des
politiques de lutte contre l'extrémisme violent et le radicalisme, qui
sont l'objet d'un consensus entre les différentes tendances
représentatives de l'Islam. Cet auteur démontre dans son
étude que les facteurs de radicalisation au Sahel sont très
nombreux, qu'aucune trajectoire privilégiée ne se dessine, mais
qu'elles se construisent autour d'un dénominateur commun qui est le
sentiment de l'injustice. Il peut s'agir, selon l'auteur, d'une injustice
sociale, d'une injustice étatique, d'une injustice économique,
d'une injustice religieuse, etc. qui nourrissent des frustrations productrices
de radicalisation.
Pour cet auteur, une analyse détaillée de
trajectoire de la radicalisation au Sahel donne à voir l'engagement
d'individus majoritairement jeunes qui se trouve dans l'Islam, et parfois dans
les groupes djihadistes, une voie d'expression de leurs frustrations sociales,
communautaires, économiques ou politiques. Dans son étude,
l'auteur observe sur le cas du Niger, les conséquences des prêches
inadaptés au type de gouvernance laïque, du fait qu'elle n'apporte
qu'injustice et pauvreté. Cette situation a eu plus d'échos dans
la région de Diffa, qui a toujours été laissée pour
compte dans les politiques publiques en matière de
développement.
Dans un Rapport du PNUD (2016), les
participants ont souligné la précarité économique
et sociale qui prédispose les personnes vivant à la
frontière à des comportements radicaux et violents. Aussi, ils
ont souligné le manque de régulation de l'expression religieuse,
notamment dans les médias et l'utilisation de la religion à des
fins économiques et politiques qui favorisent le développement de
comportements radicaux. C'est ainsi que les populations
8
ressentent une augmentation de l'insécurité et
de la violence aux frontières, mais ne l'associent quasiment jamais
à la présence de discours des groupes religieux radicaux.
Marc-Antoine Pérouse de Montclos
(2020) a souligné la question de fanatisme et de
l'endoctrinement religieux, qui seraient à l'origine des insurrections
qui ravagent aujourd'hui le Sahel. Selon lui, les leaders religieux les plus
radicaux n'auraient rencontré aucune difficulté pour embrigader
de jeunes chômeurs dans la guerre sainte, en leur promettant le paradis
après la mort. Leurs messages sont diffusés dans les
mosquées et dans les écoles coraniques. Ces discours constituent
le début d'un extrémisme, et ont gagné la bataille
idéologique sans que les États interagissent.
Paul-Henri Sandaogo DAMIBA, (2021), a
évoqué les actions violentes s'inscrivant dans l'idée de
déstabiliser la société et de faire péricliter
l'ordre ou le système établi de gouvernance. Dans la poursuite de
son programme, un dialogue de circonstance est très souvent
observé entre les extrémistes radicaux et les groupes de toute
tendance déjà opposés aux dépositaires de l'ordre
établi (en particulier les groupes idéologiques ou politiques et
les groupes criminels ou hors-la-loi). Pour être effective, la relation
entre criminels et extrémistes religieux passe par le biais
d'éléments de liaisons, de finances, de refuges
sécurisés, de soutien en combattant, de laissez-passer et bien
d'autres types de services offerts (par exemple santé, école,
hydraulique, etc.). Dans ces zones où ne s'exerce plus l'autorité
politique légale, la cohabitation entre pouvoirs tribaux, criminels,
mafieux, groupes indépendantistes et cellules islamistes radicales se
sont fortement consolidés.
Selon Theophilus Ekpon (2017), les groupes
extrémistes violents ont profité d'une gouvernance inefficace et
d'une mauvaise prestation de services, de niveaux élevés de
divisions sociétales basées sur des critères ethniques ou
religieux, exacerbés par les élites et combinés avec de
faibles niveaux de confiance. Le sentiment de marginalisation politique et
économique, les niveaux élevés de pauvreté, le
sentiment d'injustice et d'inégalité à l'échelle
mondiale
9
sont perçus comme les causes des conflits (PNUD,
rapport 2016). C'est dans ce contexte que les groupes extrémistes
radicalisent et recrutent des jeunes, hommes et femmes, pour terroriser les
populations dans la région du lac Tchad3.
Selon Guilaine DENOEUX et Lynn CARTER
(2009) qui ont distingué deux types de facteurs ou niveaux
d'explications sur les phénomènes de l'extrémisme violent
: premièrement, les causes profondes, d'ordre structurel qui, dans un
environnement social donné, pousse des individus vulnérables sur
le chemin de la radicalisation et de la violence extrémiste. En effet,
la pauvreté généralisée, le chômage des
jeunes, le manque d'opportunités économiques, la mauvaise
gouvernance, les violations des droits humains par un régime
répressif, l'inaccessibilité ou la mauvaise qualité des
services publics de base, et la corruption sont les facteurs dits incitatifs.
Cependant, ces facteurs à eux seuls ne suffirent pas, comme l'ont
montré Guilaine Denoeux et Lynn Carter, à expliquer pourquoi
certaines personnes vivant dans les mêmes conditions structurelles
s'engagent sur le chemin de l'extrémisme violent et d'autres pas.
D'où le besoin de faire à un deuxième niveau
d'explication.
Deuxièmement, les facteurs attractifs, ce sont des
éléments qui jouent un rôle critique pour attirer certains
individus vers des groupes extrémistes : par exemple le charme d'un
leader charismatique, la satisfaction psychologique ou spirituelle qu'une
personne a ressenti d'appartenir à un certain groupe ou de participer
à certaines activités, le besoin de reconnaissance, ou encore un
certain idéal de réussite sociale.
Selon BODE Sambo et al. (2016) deux grandes
catégories de facteurs sont à distinguer : ceux qui poussent vers
l'extrémisme violent (la situation
3 Une recherche faite par Théophilus Ekpon
sur `»Le rôle des jeunes dans la Prévention de
l'Extrémisme Violent dans le Bassin du Lac Tchad»
dans le cadre de contribution à l'étude des
Progrès réalisés sur La Jeunesse, la Paix et la
Sécurité mandatée par la résolution 2250 (2015) du
Conseil de Sécurité des Nations Unies.
10
structurelle et conjoncturelle dans laquelle la radicalisation
se produit) et ceux qui attirent (le parcours individuel et les motivations
personnelles) tous jouant un rôle déterminant dans le passage des
idées abstraites et du mécontentement à l'action violente.
Dans cette optique, aucun pays n'est épargné avec une
diversité de facteurs conduisant à l'extrémisme violent.
Néanmoins, lorsqu'un pays connait la précarité du fait de
la rareté de ses ressources comme la région sahélienne par
exemple, et qu'un seul groupe, ou une communauté détient le
pouvoir politique et économique au détriment d'autres groupes, le
risque de tensions intercommunautaires, de stigmatisation,
d'inégalités entre les sexes, de marginalisation, d'exclusion et
de discrimination s'accroissent. Cela se traduit par des problèmes
d'accès aux services publics et à l'emploi, mais au sentiment
d'être écarté du développement, ou celui
d'être privé de sa liberté de religion ou voulant propager
une idéologie (Grégoire Emmanuel, 2015). Dans ces situations, les
individus, en particulier les jeunes qui se sentent exclus, peuvent alors
céder à la tentation de l'extrémisme violent, dans lequel
ils voient un moyen d'atteindre leurs buts.
Dans certains cas, poursuivent BODE et al.
(2016) l'extrémisme violent a aussi tendance à prospérer
en cas de déficit démocratique où règnent la
mauvaise gouvernance, la corruption et une culture de l'impunité pour
l'État ou de certains agents qui se livrent à des actes
illicites. Il a d'autant plus d'attrait que la mauvaise conduite des affaires
publiques va de pair avec des politiques répressives et des pratiques
contraires aux droits de l'homme et à l'État de droit.
Dans les pays sahéliens, les conflits prolongés
et non réglés sont un terreau fertile pour l'extrémisme
violent, non seulement à cause de la détresse occasionnée
par l'état de guerre et des problèmes de gouvernance qui
s'ensuivent, mais aussi par le ressentiment qu'ils créent
peut-être exploités par les groupes étrangers
extrémistes violents en vue de mettre la main sur des territoires, des
populations et des ressources. Dans ce cas, il faut d'urgence prendre des
mesures de prévention visant à régler les conflits
prolongés, car c'est ainsi qu'on limitera les effets du discours
insidieux des groupes extrémistes
11
violents. Lorsque la prévention échoue, la
meilleure stratégie à adopter pour assurer une paix durable et
lutter contre l'extrémisme violent doit inclure des solutions politiques
(actions de développement) qui ne fassent pas de
laissés-pour-compte et donnent toute sa place au principe de
responsabilité.
Les experts en la matière pensent que le risque
général de conflit va augmenter avec ses corollaires comme les
frustrations sociales, économiques et politiques de la population et
notamment la jeunesse ainsi que les conflits concernant l'accès aux
ressources naturelles, dans un environnement en mutation (Bonnecase, 2014).
Dans la zone d'étude, les constats font apparaitre que l'origine
ethnique et religion ont une profonde influence sur les relations sociales
(Choplin, 2008).
Les groupes extrémistes violents dénaturent la
foi, exagèrent les différences ethniques et pervertissent les
idées politiques ; ils se servent de fausses vérités pour
légitimer leurs actes, justifier leurs revendications et recruter dans
les camps des frustrés comme cela se passe actuellement au nord Mali
avec une répercussion dans les pays voisins comme le Niger et le Burkina
Faso.
1.1.3 Problématique
Au cours de ces deux dernières décennies, la
radicalisation et l'extrémisme violent sont devenus une
préoccupation internationale et plus particulièrement pour le
continent africain. L'Afrique, surtout dans la vaste zone
sahélo-saharienne, a été touchée par les
phénomènes de la radicalisation et de l'extrémisme
violent. Ceux-ci constituent des menaces sur la paix, la
sécurité, la cohésion sociale et le développement,
avec notamment la présence des Groupes Armés Non Etatiques (GANE)
dans les pays du Sahel, notamment la région de Liptako-Gourma (Burkina,
Mali et Niger).
La région du Liptako Gourma, faisant déjà
face à des défis structurels et climatiques majeurs, est
affectée aussi par une crise sécuritaire depuis 2012 suite
à l'insurrection au Mali de plusieurs groupes extrémistes
violents, adeptes
12
d'un islamisme radical et revendiquant principalement la
libération de l'Azawad et l'instauration de la charia islamique comme
loi fondamentale dans le nord du pays. Il s'agit principalement d'Ansar Eddine,
d'Al-Qaïda au Maghreb Islamique et du Mouvement pour l'Unité et le
Djihad en Afrique de l'Ouest (MUJAO), auxquels s'ajoutent de narcotrafiquants
et de bandits armés dont les mouvements déstabilisent le Mali et
au-delà les deux autres pays de la région du Liptako Gourma du
fait de la porosité des frontières que ses Etats membres
n'arrivent pas à assurer pleinement le contrôle.
Cette crise sécuritaire est aussi
caractérisée par la présence active et continue des
groupes armés. La criminalité et les conflits intercommunautaires
qui n'épargnent aucun des pays du Liptako Gourma, notamment, le Niger
où depuis la fin des campagnes militaires majeures qui, dans le cadre de
l'opération Serval, ayant permis de libérer le nord du Mali,
occupé par les principaux Groupes Islamistes, la situation
sécuritaire s'est particulièrement dégradée.
Parmi les zones du Liptako Gourma confrontées aux
menaces terroristes, l'ouest du Niger reste particulièrement
confronté à une montée de l'extrémisme violent qui
résulte de sa proximité avec la zone d'influence qui donne lieu
à un manque de perspectives économiques, en particulier chez les
jeunes, qui sont les plus vulnérables à la radicalisation, et les
femmes, dans un contexte généralisé de pauvreté et
de fragilité.
Depuis 2012, les parties Nord des régions du Mali, du
Burkina Faso et du Niger sont devenues des zones de conflits, avec comme
corollaire la prolifération d'armes illicites provenant de la Libye, la
constitution de groupes criminels organisés, les trafics de tout genre
et l'existence des groupes terroristes. La détérioration de la
situation sécuritaire, marquée par la prolifération des
groupes armés, la recrudescence des affrontements communautaires et la
montée de l'extrémisme violent, soulève de profondes
inquiétudes au niveau de la région de Liptako-Gourma.
13
C'est dans ce contexte que la région de
Tillabéri, dans sa partie septentrionale, fait face à une
recrudescence des conflits locaux et des attaques terroristes de plus en plus
violentes avec des impacts majeurs sur les programmes de développement
et sur le processus de consolidation de la paix. Ces actes d'une violence
extrême ont entraîné des pertes en vies humaines, des
enlèvements des personnes et des biens ainsi qu'un important flux des
populations déplacées.
Cependant, toutes les menaces citées ci-haut peuvent
causer un certain nombre de facteurs sur le parcours d'une personne vers ces
phénomènes. Ces facteurs peuvent être propres à la
personne selon son environnement immédiat (endogène) ou dans la
société (exogène).
Aussi, une jeunesse sans emploi, sans activité, vivant
dans l'oisiveté, peut constituer une proie facile à la
manipulation des activités pouvant éclater une crise au sein de
la société.
En plus, le mécontentement et le manque de confiance
à l'égard du gouvernement sont préoccupants dans les
localités du Niger qui enregistrent la plus forte incidence de
l'extrémisme violent. Ces sentiments sont dus au délaissement,
à l'injustice, à la marginalisation sur le plan politique et
touchés par une pauvreté multidimensionnelle plus
accentuée dans certaines régions du Niger, notamment le
septentrion de la région Tillabéri. Tous ces facteurs
créent des frustrations et des replis identitaires conduisant à
l'insécurité.
Cette insécurité dans la région de
Tillabéri est liée à l'intensification des conflits
locaux, à la persistance de la criminalité transnationale
organisée et à l'activisme de groupes extrémistes violents
comme le groupe des insurgés islamistes peuls Ansar al-islam et la
Jamaat nosrat al-Islam (Al Mourabitoun, Al-Qaeda au Maghreb Islamique (AQMI),
Ansar dine dont les démembrements sont la Katibat du Gourma). Ces
groupes, qui cherchent à agrandir leur sanctuaire, commettent des
incursions criminelles, aussi, dans l'ouest de la région de
Tillabéri.
14
Pour une meilleure prise en charge de cette
problématique au niveau international qu'au niveau de chaque
État, le plan d'action des Nations Unies pour la prévention et la
lutte contre la radicalisation et l'extrémisme violent a
recommandé à chaque État de prendre des mesures
nécessaires pour se doter d'un cadre d'action intégré pour
prévenir et lutter contre la radicalisation et l'extrémisme
violent4.
Au niveau national, le Plan de Développement Economique
et Social (PDES 2017-2021) du Niger préconise l'élaboration et la
mise en oeuvre d'une stratégie nationale de prévention et de
lutte contre la radicalisation et de l'extrémisme violent5
comme un des piliers importants pour l'amélioration du cadre
stratégique de la gouvernance sécuritaire. Malgré les
conditions des luttes que le Niger a créées, on constate toujours
que le nombre de groupes extrémistes violents continue d'augmenter dans
certaines régions, notamment dans la région de Tillabéri.
Alors la question centrale de la recherche est la suivante :
- La stratégie mise en place par l'État du Niger
dans la lutte contre la radicalisation et l'extrémisme violent est-elle
efficace ?
Pour tenter de répondre à cette question
centrale, des questions spécifiques ci-après méritent
d'être abordées :
- Quels sont les mécanismes mis en place par
l'État dans le cadre de la lutte contre l'extrémisme violent dans
la région de Tillabéri ?
- Quels sont les facteurs de ralliement et les raisons qui
poussent les jeunes à la radicalisation ?
Pour répondre à cette préoccupation, des
hypothèses de recherche peuvent être avancées.
4 Stratégie Nationale de Prévention de
la Radicalisation et de l'Extrémisme Violent-NIGER, 2020
5 Cf. PDES 2017-2021, Programme 9 : Renforcement de
la sécurité et de la consolidation de la paix ; sous-programme
9.1 : Amélioration du cadre stratégique de la gouvernance
sécuritaire, page 117.
15
1.1.4 Hypothèses de la recherche
Les hypothèses sont en effet des réponses
provisoires aux questions préalablement posées. Elles tendent
à émettre une relation entre des faits significatifs et
permettent de les interpréter. Pour que la recherche soit valable, les
hypothèses doivent cependant être vérifiables, plausibles
et précises. Pour répondre à notre problématique,
les hypothèses retenues sont les suivantes :
Ø L'efficacité de la stratégie repose
sur les mécanismes juridiques, institutionnels, politiques et à
la fois militaires quant à la lutte contre la radicalisation et
l'extrémisme violent.
Ø Les facteurs de la radicalisation tournent autour de
la pauvreté, l'injustice sociale, les conflits inter et
intracommunautaires, la mauvaise gouvernance et la recherche de
sécurisation.
1.1.5 Définition des concepts
Dans un travail de recherche, il est nécessaire de
définir systématiquement les concepts fondamentaux. Cette
définition nous permet de bien cerner le sujet. Il est question pour
nous de définir les concepts suivants :
Extrémisme : c'est une opinion
radicale sur un sujet idéologique ou politique qui se manifeste par le
refus du compromis et des points de vue opposés. Il est aussi
défini comme le fait de défendre des idées politiques,
idéologiques, religieuses, ethnocentriques ou racistes très
éloignées de ce que la plupart des gens jugent correct.
(Source : Lexique de la Radicalisation et de
l'Extrémisme Violent dans l'espace du G5 Sahel)
Radicalisation : c'est un processus de
façonnement d'un individu le conduisant à adopter une
idéologie extrémiste, ou de transformation des frustrations
individuelles ou collectives en source de colère, rendant les
concernés réceptifs à des offres de participation à
des actions armées. (Source : Lexique de la
Radicalisation et de l'Extrémisme Violent dans l'espace du G5 Sahel).
contre des groupes extrémistes engagés dans des
opérations asymétriques ou
16
La radicalisation peut être définie comme un
engagement d'un individu ou d'un groupe dans un projet politique en rupture
avec l'ordre existant, fondé sur une idéologie qui rejette le
pluralisme et la diversité et qui considère que la violence est
un moyen légitime pour atteindre des objectifs.
Extrémisme violent : c'est le synonyme
de radical, de fanatique. Il désigne une personne qui a des opinions
religieuses, ou politiques intransigeantes pouvant la conduire à
manifester des comportements agressifs ou violents pour imposer son point de
vue. L'extrémisme violent consiste à promouvoir, encourager ou
commettre des actes pouvant mener au terrorisme qui visent à
défendre une idéologie prônant une suprématie
raciale, nationale, ethnique, ou religieuse ou s'opposant aux valeurs et aux
principes fondamentaux de la société.
Le concept de l'extrémisme violent est loin de faire
consensus. Malgré son emploi récurrent, il garde en effet un
degré considérable d'ambiguïté, en raison de
l'absence d'une définition universelle acceptée.
L'extrémisme violent, au même titre que le terrorisme, ne fait pas
l'objet d'un encadrement univoque au sein du droit international. Le Plan
d'action du Secrétaire général de l'ONU observe en effet
que « l'extrémisme violent est un phénomène
multiforme, qui échappe à toute définition claire ».
Son emploi en tant que catégorie scientifique fait aussi l'objet de
contestations : la notion d'extrémisme violent relève plus des
pratiques politiques et sécuritaires du contre-terrorisme que des
exigences de précision du discours savant.
En effet, la radicalisation et l'extrémisme violent ne
sont pas l'apanage uniquement des seules personnes ayant un
antécédent psychosocial, notamment culturel ou religieux, mais
bien d'autres personnes atteintes du syndrome de la pauvreté
endémique ou d'un subconscient infecté par la violence.
Lutte contre l'extrémisme violent :
actions militaires et non militaires
Prévention de l'extrémisme violent
: mesures proactives visant à identifier et à agir
contre les déterminants du basculement d'un individu ou d'un
17
conventionnelles. La lutte contre l'extrémisme violent
est aussi un ensemble de mesures de contre-terrorisme visant des groupes
formellement identifiés ou associés au terrorisme au niveau
local, régional ou international. Elle s'opère à travers
des mesures intégrées de renseignement, de mutualisation des
forces, d'opérations transfrontalières, de partenariats
stratégiques régionaux et internationaux.
À part les concepts clés définis
ci-dessus, il y a d'autres concepts qui concourent à la
compréhension du sujet et il serait utile de les définir. Parmi
ces concepts, nous avons entre autres :
Extrémisme religieux : c'est une
attitude intransigeante des adeptes d'une doctrine religieuse qui refusent tout
compromis sur les prescriptions que dicte leur doctrine.
Facteurs de radicalisation : ce sont les
opinions, les actes et/ou les faits réels ou apparents qui créent
les conditions favorables à la radicalisation d'une personne ou d'une
communauté.
Voie de la radicalisation : c'est le moyen
utilisé par certains leaders (souvent extrémistes) pour
convaincre une personne ou une communauté de se rallier à leur
cause.
Prévention : mesures visant à
empêcher le passage à l'action violente.
Prévention de la radicalisation :
actions spécifiques d'une politique publique visant à identifier
les facteurs de risques de radicalisation parmi les personnes
vulnérables et à y apporter des réponses
conséquentes. Ces actions peuvent être de nature psychologique et
pédagogique, socio-économique ou autre. Les actions de
prévention de la radicalisation ciblent généralement les
jeunes séparés de leurs familles, sans emploi, vivant dans les
zones d'influence de la propagande extrémiste ou en instance d'exode.
(Lexique de la radicalisation et de l'extrémisme violent
dans l'espace du G5 Sahel, 2020)
18
groupe radicalisé vers un groupe armé ou
à participer à la commission des violences.
Endoctrinement : c'est la persuasion par la
propagande collective ou le conditionnement individuel de personnes
vulnérables afin de les amener à endosser et à
défendre une cause radicale.
Fanatisme religieux : obstination d'un voyant
à s'accrocher à des idées arrêtées, le
rendant imperméable à tout argument visant le contraire à
cette opinion à laquelle il adhère. Cette expression se
raréfie au profit du radicalisme religieux.
Profilage : c'est le traitement des
données personnelles d'un individu associé à une
organisation terroriste ou extrémiste pour déterminer son
degré de radicalisation et d'implication dans ses activités et
apprécier le risque qu'il présenterait pour la
société.
Repenti : membre d'un groupe armé
extrémiste ayant rompu volontairement avec ledit groupe et avec
l'idéologie radicale ou extrémiste, à la suite d'un
processus de déradicalisation ou de dialogue. Une personne
radicalisée ayant renoncé à l'extrémisme violent
à la suite d'un éveil de conscience ou d'une confrontation
doctrinaire l'ayant convaincu de l'inexactitude de ses certitudes
idéologiques antérieures.
1.1.6 Objectifs de recherche
Notre recherche vise deux objectifs à savoir : un
objectif général et des objectifs spécifiques.
1.1.6.1 Objectif général
L'objectif général de ce travail est de
contribuer à la connaissance de lutte contre la radicalisation et
l'extrémisme violent et d'apporter un début de solution.
1.1.6.2 Objectifs spécifiques
Les objectifs spécifiques que vise ce travail sont entre
autres :
19
- Analyser les facteurs contribuant à
l'émergence de la radicalisation au Niger et plus
précisément à Tillabéri ;
- Identifier les formes des violences extrémistes dans
la région de Tillabéri ;
- Connaître les stratégies adoptées par le
Niger pour lutter contre les phénomènes extrémistes dans
ladite région ;
- Proposer des recommandations à l'endroit des
institutions et populations concernées.
1.2 Approche méthodologique
Cette partie de l'étude comprend deux sous-parties, il
s'agit des techniques utilisées et des difficultés
rencontrées dans le cadre de la conduite de ce travail.
1.2.1 Champ d'investigations
Au début de cette recherche, des investigations ont
été menées dans différentes institutions telles que
la Haute Autorité à la Consolidation de la Paix, le
Ministère de l'Intérieur et de la Décentralisation du
Niger et le Centre National d'Etudes Stratégiques et de
Sécurité. A cela s'ajoutent les missions effectuées sur
Tillabéri pour la collecte des données auprès des
autorités administratives et les comités locaux de la
région.
Aussi, une deuxième rencontre avec les autorités
de ces localités, lors du forum sur le maintien et le renforcement de la
cohésion sociale organisé par le Ministère de
l'Intérieur et de la Décentralisation du 24 au 26 novembre 2021
à Niamey dans le local du centre international Mahatma Gandhi, nous a
permis de poursuivre nos investigations et échanges sur le
problème. C'est ce qui nous amène à utiliser les
différentes méthodes de la recherche.
Nous allons évoquer dans un premier temps la recherche
documentaire, et dans un second les entretiens et enfin l'analyse et le
traitement des données.
1.2.2 Méthodes utilisées
20
1.2.2.1 Recherche documentaire
La collecte des données a débuté par une
revue documentaire. La collecte de ces documents a été faite au
Centre National d'Études Stratégiques et de
Sécurité (CNESS), au Laboratoire d'Études et de Recherche
sur les Dynamiques Sociales et le Développement Local (LASDEL), à
la bibliothèque de L'École Nationale d'Administration (ENA),
à la bibliothèque de l'Université Abdou Moumouni et
à l'Institut de Formation aux Techniques de l'Information et de la
Communication (IFTIC). Par ailleurs, notre travail s'est inspiré des
mémoires, des articles, des rapports, des ouvrages, et même des
documents via Internet.
1.2.2.2 Entretiens
Sur le terrain, des entretiens sont menés avec des
personnes ressources en matière de la radicalisation et de
l'extrémisme violent, ce qui nous a permis d'avoir plus des informations
sur le sujet.
À cet effet, le guide a été
élaboré pour les entretiens avec les responsables du Centre
National d'Études Stratégique et de Sécurité
(CNESS) qui est une autorité administrative indépendante,
certains responsables du Ministère de l'Intérieur et de la
Décentralisation, populations et leaders communautaires dans la
région de Tillabéri.
Les questionnaires du guide d'entretien sont relatifs aux
attentes de la population de la région de Tillabéri et les chefs
traditionnels touchés directement par la question de la
problématique de la radicalisation et de l'extrémisme violent. Ce
guide est adressé aussi aux autorités administratives centrales
et locales qui sont censées protéger la population contre cette
menace.
L'étape suivante de notre travail consiste à
l'analyse des données.
Durant nos recherches, nous avons recensé et
collecté quelques informations et documents relatifs à notre
sujet de mémoire. Après avoir
1.2.3 Analyse des données
21
recensé et collecté les informations, nous avons
parcouru et exploité afin de nous permettre de réaliser ce
travail.
1.2.4 Difficultés rencontrées
Les difficultés rencontrées lors de
l'élaboration et de la réalisation de ce travail. Il s'agit
notamment des contraintes liées à la disponibilité et
à l'accessibilité des documents appropriés portant sur
l'extrémisme violent au Niger en général et dans la
région de Tillabéri en particulier.
- Il y a aussi les difficultés liées à
l'indisponibilité des rapports annuels des institutions travaillant dans
le cadre de la lutte contre la radicalisation et l'extrémisme violent et
la rétention de l'information par certains répondants.
- Les difficultés liées à la
barrière linguistique pour conduire les entretiens du fait qu'on ne
comprend pas la langue locale des communautés rencontrées lors
des entretiens ou des enquêtes d'où il nous a fallu un
facilitateur/traducteur pour qu'on ait accès aux informations voulues
surtout avec certaines communautés dans la région.
- L'inaccessibilité de certaines zones compte tenu de
l'insécurité, nous n'avons pas pu faire des entretiens avec
certaines communautés qui se trouvent dans des zones des conflits.
Après avoir terminé le cadre théorique et
l'approche méthodologique, nous allons aborder le deuxième
chapitre qui traite la présentation du cadre d'étude.
22
CHAPITRE II : LA PRÉSENTATION DU CADRE
D'ÉTUDE
Dans ce chapitre, nous allons présenter la région
de Tillabéri et son organisation administrative.
2.1 La présentation de la région de
Tillabéri
Il sera question de la situation géophysique,
démographique, économique, sécuritaire et contexte de
gouvernance foncière.
2.1.1 Situation géophysique Carte de la
région de Tillabéri
Source : Carte
confectionnée par Sayadi Abdou
Située dans l'extrême Ouest du territoire
nigérien entre 11°50 et 15°45 de latitudes Nord et 0°10
et 4°20 de longitude Est, la région de Tillabéri est
limitée
23
à l'Ouest et au Nord-est par la République du
Mali et la région de Tahoua (Nord-est), à l'Est par la
région de Dosso, au Sud et Sud-ouest par le Burkina Faso.
La région de Tillabéri couvre une superficie de
97 251 km2, soit environ 7,7 % du territoire national. Elle peut
être divisée en une partie (Nord et Sud). La partie Sud est
tournée vers l'exploitation des terres et une économie agricole
et la partie nord est une zone semi-aride et agropastorale. Cette
dernière est administrativement délimitée par le
récent Code Pastoral mis en place au travers de l'ordonnance 2010-029
qui reprend la délimitation établie par la loi 61-5 datant de
1961. Elle marque la limite nord des cultures et donc le début des zones
de pâturage. C'est ce qui nous permet d'aborder le contexte
démographique.
2.1.2 Contexte démographique
La région de Tillabéri compte une population de
2 722 482 habitants dont 49,5 % d'hommes et 50,5 de femmes, soit 15,9 % de la
population nigérienne selon le Recensement général de la
Population et de l'Habitat du 17 décembre 2012. Du fait de la pression
démographique croissante, la compétition entre communautés
pour accéder aux ressources naturelles est de plus en plus âpre
dans la région de Tillabéri.
Quelques années plus tard, la population de la
région de Tillabéri se voit en hausse. Les villes se sont
progressivement agrandies et l'espace rural a perdu de sa taille. Sous la
pression démographique, plusieurs zones traditionnellement
inutilisées ont été occupées par l'habitat. Au
Nord, le front agricole est allé bien au-delà des limites
fixées aux cultures. Au Sud, les zones qui depuis fort longtemps
étaient réservées à l'élevage ont disparu
sous la poussée des systèmes de production intensive de
l'agriculture pluviale. Dans plusieurs villages, les cultures occupent aussi
l'espace qui devrait être réservé aux nouvelles habitations
d'une population en croissance continue. Par conséquent, les
ménages les plus pauvres ont été contraints de s'installer
dans
24
les zones inappropriées aux cultures, le plus souvent
les abords des cours d'eau qui sont potentiellement exposés aux
inondations6.
En plus des facteurs économiques qui contribuent
souvent à la production agricole dans la région, il semble y
avoir un problème structurel qui réduit considérablement
la productivité, comme les sècheresses, les inondations, les
autres aléas climatiques et la pauvreté des ménages.
L'ensemble de ces facteurs décrivent les difficultés
rencontrées par les populations de cette région pour assurer sa
sécurité alimentaire de manière satisfaisante,
régulière7 et ceci influencera sans doute son
économie.
2.1.3 Contexte économique
La région de Tillabéri dispose également
d'un potentiel important en matière de production
céréalière. En 2018, les superficies cultivées de
mil représentaient 20 % du total national et la proportion de la
production de céréales représentait 17 % de la production
nationale. Cette région, qui abrite le fleuve Niger, disposait de 48 %
des superficies cultivées pour le riz et jusqu'à 52 % de la
production nationale en 2018. Dans la même année, la région
possédait 20 % des superficies cultivées dans le pays pour le
niébé et 21 % de la production nationale ce qui fait de la
région la plus grande productrice de ce dernier.
Concernant le cheptel, la région est une grande
productrice de bovins avec 22 % de la production nationale en 2018.
Comparée à la région de Tahoua, ses proportions pour les
autres catégories de cheptel sont moins importantes, 14 % pour les
ovins, 13 % pour les caprins et seulement 5% pour les camelins.
Au niveau de la région de Tillabéri, le
système de production est viable économiquement. Le taux de
création de valeur à l'hectare, ou productivité de
6 Région de Tillabéri-Analyse
situationnelle mensuelle - Juin 2021
7 Ibid.
25
la terre est de 85 %, ce qui permet à la cheffe
d'exploitation de dégager une VAB totale de 1 530 750 francs
CFA8 en moyenne par an sur la période de l'étude
(Abdoulaye S. Soumaila, 2020). Les productivités du travail et du
capital sont à un niveau élevé : elles sont largement
supérieures respectivement au salaire journalier considéré
au moment de l'étude (3 000 francs CFA/homme/jour) et au taux
d'intérêt annuel courant (moins de 30 % dans tous les
établissements financiers et bancaires de la place).
Dans la région de Tillabéri, l'occupation des
terres agricoles est en constante croissance d'où une forte pression
anthropique sur les ressources foncières, aggravées par
l'extension rapide et débordante de la ville de Niamey sur les communes
voisines. Le cheptel de la région a connu une nette progression
grâce aux nombreuses campagnes de vaccination et de sensibilisation des
éleveurs. La dégradation et la rareté des espaces
pastoraux sont des sources potentielles d'intensification des conflits sociaux
(professionnels et territoriaux) liés à l'accès et au
contrôle des ressources naturelles.
En plus des conflits locaux, la persistance des groupes
extrémistes a perturbé l'économie dans cette région
de Tillabéri. L'économie nigérienne dans son ensemble ne
peut résorber la masse des jeunes qui sont sur le marché de
l'emploi, reste encore largement dominée par le secteur informel,
notamment le secteur agricole qui peine à se moderniser et qui est
lourdement affecté par la pression démographique et les
aléas climatiques9. Les données collectées par
le CNESS lors des concertations régionales montrent que 30,77 %
(région de Tillabéry) des participants relèvent que les
domaines économiques génèrent des facteurs incitatifs
à la radicalisation et à l'extrémisme violent, à
travers la persistance de la pauvreté, le chômage des jeunes et
des femmes et de
8 Il s'agit du site d'irrigation de Sarando
9 La Stratégie Nationale de la
Prévention de la radicalisation et de l'Extrémisme violent-Niger,
2020.
26
l'absence de visibilité de perspectives attrayantes.
C'est ce qui conduit à l'insécurité.
2.1.4 Contexte sécuritaire
La situation sécuritaire dans la région ne cesse
de se détériorer depuis 2012. La guerre du nord Mali, qui a
opposé les rebelles touareg et militants djihadistes, contre la
malveillante intervention de l'armée malienne s'est transformée,
en un conflit dans lequel les Français sont intervenus à travers
l'opération Serval. Au fur et à mesure que la guerre progressait,
notamment avec l'expansion de la zone de conflit au nord-est du Burkina, les
organisations djihadistes ont commencé à s'implanter fortement
dans la région de Tillabéri qui est attenant au Mali et au
Burkina, par effet d'entraînement.
Alors que le Niger s'enlise davantage sur la voie de
l'escalade de la violence, de la détérioration de la gouvernance
et des problèmes environnementaux croissants, Tillabéry est de
plus en plus confronté à des niveaux de violence qui favorisent
l'insécurité et les déplacements de population. Cette
région qui borde le Burkina Faso et le Mali, est touchée par les
activités des groupes extrémistes violents et de groupes
armés depuis au moins les soulèvements de 2012 dans le nord Mali.
Le nord de Tillabéry a des liens sociaux et économiques forts
avec les régions de Gao et Ménaka au Mali, zone où la
présence de groupes extrémistes violents est
cruciale10.
Des militants de ces groupes, dont l'État islamique au
Grand Sahara (EIGS) et le Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans
(Jama'at Nusrat al-Islam wal Muslimin, JNIM), affilié à
Al-Qaeda, se déplacent librement à travers la frontière
entre le Mali et le Niger. Ils recrutent des membres de l'autre
côté de la frontière et s'efforcent d'accroître leur
pouvoir dans le but de prendre à terme
10 Nations unies, Conseil de
sécurité, «Militants Continue to Stage Deadly Attacks as
Insecurity Expands into Previously `Safe' Zones in West Africa, Sahel, Top
Official Tells Security Council», Communiqué de presse SC/14406
du 11 janvier 2021.
27
le contrôle des territoires. Dans la partie nord de
Tillabéry, les militants ont d'abord exploité des tensions
communes dans les zones agricoles et pastorales sahéliennes, dans
l'hémisphère nord du Sahel, entre éleveurs et agriculteurs
et entre les éleveurs des différentes ethnies pour prendre pied.
Mais leur emploi transcende désormais les frontières ethniques et
communautaires.
Outre la violence liée aux organisations
extrémistes violents, au cours des deux dernières années,
il y a eu un taux élevé à caractère ethnique. Alors
que la violence entre les communautés pastorales était
déjà généralisée en 2017 dans les zones
frontalières entre le Mali et le Niger11.
Dans ce contexte, démêler les sources de violence
djihadiste, rivalité ethnique et banditisme ne sont pas une tâche
aisée. Mais les conséquences sont désastreuses, y compris
des massacres dans les communautés qui ont essayé de se
protéger face à l'incapacité de l'État à les
protéger.
Parallèlement à la violence des groupes
extrémistes, ces parties de Tillabéri sont devenues un terrain de
jeu pour la violence opportuniste des criminels qui ont profité de
l'effondrement des systèmes de gouvernance et de sécurité.
Le plus grand nombre d'incidents violents s'est produit au cours des deux
années (2019-2020), lorsque des groupes extrémistes violents ont
cherché à briser la résistance à leur
présence non seulement par l'État, mais aussi par les civils. En
conséquence, 2020 a vu des nouvelles tendances, la région
étant confrontée à des attaques contre des écoles,
des sites miniers, ainsi qu'à l'enlèvement et de l'assassinat des
travailleurs d'Organisations Non Gouvernementales (ONG). Cela a conduit
à des massacres, comme ceux commis le 2 janvier 2021, qui ont tué
au moins 158 civils12. Au cours de la seule première
moitié du mois de mai 2021, plus de 16 000 personnes ont
été
11 En 2017 et 2018, les forces nigériennes
et françaises ont collaboré aux efforts de lutte contre le
terrorisme avec les groupes armés à dominante touareg du nord du
Mali, notamment le MSA et le GATIA.
12 Lyammouri, R. 2021 «Tillabéri
Region : Concerning Cycles of Atrocities,» Policy Brief -10/21, Rabat
: Policy Center for the New South.
28
déplacées au nord de Tillabéri du fait
des violences armées13. Le tableau ci-dessous indique les
nombres des incidents sécuritaires dans la région de
Tillabéri de 2018 à 2021 selon le Bureau Humanitaire de
l'Organisation des Nations unies (UNOCHA).
Tableau : nombres des incidents sécuritaires dans
la région de Tillabéri
N°
|
Date
|
Nombre des incidents sécuritaires
|
1
|
Du 1er janvier au 31décembre 2018
|
106
|
2
|
Du 1er janvier au 31 décembre 2019
|
102
|
3
|
Du 1er janvier au 31 décembre 2020
|
265
|
4
|
Du 1er janvier au 31 décembre 2021
|
318
|
Source : Données du Bureau des affaires
humanitaires de l'ONU (OCHA).
Commentaire : selon le Bureau des affaires
humanitaires de l'ONU (OCHA) 106 incidents sécuritaires en 2018, 102 en
2019, et 318 incidents sécuritaires ont couté la vie à 645
civiles du 1er janvier au 31 décembre 2021, comparativement
à l'année 2020 à la même période au cours de
laquelle 265 incidents ont couté la vie à 145 civils et 45 autres
sont portés disparus. Ce qui donne le nombre de 791 incidents
sécuritaires en quatre (4) ans.
Selon les données de Département de la
Sûreté et de la Sécurité des Nations Unies (UNDSS)
136 incidents sécuritaires ont été recensés de
janvier à avril 2022. Aussi, du 1er au 19 mai de la
même année, 43 civils ont été tués et 22
personnes enlevées dans les départements de Torodi, Téra
et Gothèye.
Aussi, selon les statistiques mentionnées par OCHA dans
sa plus récente note d'information, douze (12) départements sur
les treize (13) que compte la région de Tillabéri ont accueilli
aux environs de 115.150 Personnes Déplacées Internes (PDI).
13 Internal Displacement Monitoring Centre, 2021,
Niger.
29
La présence active des GANE dans les localités
est à l'origine de cette détérioration, notamment dans le
nord et le nord-est des communes de Makalondi, Inatès, Tondikwindi et de
Banibangou, dans le sud d'Abala, dans l'Anzourou et dans les différents
axes reliant les villages. Les personnes vivant dans ces zones sont
particulièrement vulnérables aux violations des droits humains
tels que les assassinats ciblés, des agressions physiques, de vol de
bétail et l'incendie des réserves alimentaires des
communautés et des établissements de santé.
La montée de « l'insécurité est
attribuée à l'exacerbation de trois phénomènes :
l'extrémisme violent, la criminalité transnationale
organisée et les conflits locaux ».
Au vu de l'augmentation de l'insécurité, les
populations de cette région font face à une violence
généralisée et sont victimes de nombreuses
atrocités commises par des groupes armés non étatiques et
parfois par les forces de défense et de sécurité.
Chaque attaque terroriste crée un état de
panique et de psychose. Les activités professionnelles, les loisirs et
les déplacements sont plombés par celui-ci. La communauté
victime se replie sur elle-même. Ceci est de nature à causer une
stigmatisation des personnes susceptibles d'être identifiées aux
Groupes Armées Terroristes. De même, les pertes en vies humaines
enregistrées (par attentat, fusillade, prise d'otages, etc.) diminuent
de la main-d'oeuvre existante et de la communauté. Le vivre-ensemble se
transforme rapidement en un sentiment de méfiance et de peur
générale.
C'est ainsi que les GANE ont commis de meurtres lorsqu'ils ont
entamé leurs campagnes de sensibilisation auprès des habitants de
certaines localités frontalières pour gagner leur confiance et
recruter de nouveaux éléments. Ces campagnes ont
été mal accueillies par les chefs coutumiers de la région.
Les GANE semblent désormais s'en prendre à ceux qui refusent de
coopérer avec eux ou soupçonnés « de
complicité avec les autorités et les forces de
sécurité ».
30
(Source : Protection cluster et UNHCR, 25/02/2020, art.cit).
Au vu de cette analyse, l'absence de l'État dans certaines zones
occasionne un vide juridique et la gestion foncière se voit
controverser.
2.1.5 Contexte de gouvernance foncière
La gouvernance foncière est un élément
essentiel pour déterminer si les personnes, les communautés et
les autres acteurs peuvent acquérir les droits et s'acquitter des
devoirs qui y sont associés sur l'utilisation et le contrôle des
terres, des pêches et des forêts, et comment ils pourront
l'obtenir. De nombreux problèmes mondiaux découlent d'une
mauvaise gouvernance, et les efforts pour résoudre ces problèmes
dépendent du niveau de gouvernance. La mauvaise gouvernance a un impact
négatif sur la stabilité sociale, l'utilisation durable des
ressources, l'investissement et la croissance économique. Des
populations peuvent être condamnées à la famine et à
la pauvreté si elles perdent leurs droits sur leurs habitations, leurs
terres et leurs moyens de subsistance du fait de pratiques foncières
marquées par la corruption ou l'incapacité des organismes
d'exécution à protéger les droits fonciers.
L'une des caractéristiques de la zone de Liptako-Gourma
est que le même espace est souvent utilisé à des fins
multiples. Cette diversité des besoins et des intérêts est
à la base de la multiplicité de l'accès et de l'exercice
des droits. Le terme d'accès aux ressources naturelles est
utilisé ici au sens large et offre aux acteurs la possibilité de
bénéficier d'un bien particulier et de jouir de droits
d'accès non seulement au sens juridique du terme, mais d'un point de vue
social, économique et culturel. Dans cette optique, l'accès a
ciblé à la fois les ressources naturelles elles-mêmes et
les institutions chargées de
31
leur gestion. L'utilisation généralisée
des zones rurales et l'exploitation des ressources naturelles sont une source
des conflits14.
Les causes de ce type de conflit renvoient
généralement à la contestation des limites des champs,
à l'application des règles d'héritage (répartition
du domaine foncier familial entre les ayants droit) et aux prêts de
terres. En ce qui concerne cette forme de transaction foncière, on
constate qu'elle a connu une forte régression dans certaines zones
agricoles du Niger, après l'adoption du Code rural en 199315.
À travers l'attribution de titres fonciers en milieu rural, le Code
rural favorise la création d'un marché foncier ; ce qui renforce
les inégalités socio-économiques dans les zones où
la spéculation foncière est développée (Lawali,
2004).
Aussi, l'expansion des cultures a entraîné une
modification progressive des relations entre l'agriculture et l'élevage.
Si des formes de complémentarité ont été
développées, il reste que la cohabitation entre ces deux
activités se traduit actuellement par un accroissement des concurrences
autour de l'accès à l'espace. Une telle évolution est
d'autant plus inévitable que la stratégie adoptée par les
exploitations familiales consiste à accroître leurs productions
par l'extension des surfaces cultivées, de manière à
maximiser la productivité du travail et à réduire les
risques liés aux aléas climatiques.
Nous avons abordé la présentation de la
région sur les différents contextes, il est question de
connaître aussi son organisation administrative.
14 Chaque groupe d'utilisateur de ces espaces et/ou ressources
communes cherche à sécuriser son droit d'accès en se
fondant sur la législation moderne, le droit coutumier ou les
prérogatives conférées par la délimitation des
espaces ou l'occupation des terres.
15 L'ordonnance n° 93-015 du 2 mars 1993 fixant les
principes d'orientation du Code rural a défini le cadre juridique
régissant les activités agricoles, sylvicoles et pastorales, dans
la perspective de l'aménagement du territoire, de la protection de
l'environnement et de la promotion humaine. Elle vise à assurer la
sécurité foncière des opérateurs ruraux, à
travers la reconnaissance de leurs droits et à favoriser le
développement harmonieux, grâce à une organisation
rationnelle du monde rural.
32
2.2 Organisation administrative de la région de
Tillabéri
Avec le découpage administratif, toutes les
régions du Niger se sont retrouvées avec une carte propre, dont
celle de la région de Tillabéri.
L'administration territoriale repose sur les principes de la
décentralisation et de la déconcentration. Les
collectivités territoriales sont créées par une loi qui
détermine les principes fondamentaux de la libre administration des
collectivités territoriales, leurs compétences et leurs
ressources. Par la loi N° 42-2008 du 31 juillet 2008 relative à
l'organisation et de l'administration du territoire de la République du
Niger, en son article 6, la région de Tillabéri devient
collectivité territoriale.
Sur le plan de la déconcentration, la région de
Tillabéri est dirigée par un gouverneur qui incarne la
représentation de l'État sous toutes ses formes. Au niveau des
départements sont nommés les préfets qui assurent
l'autorité de l'État au même que le gouverneur dans leur
circonscription administrative à qui ils rendent compte
quotidiennement.
Pour mener à bien les responsabilités,
l'État a mis à leur disposition des cadres compétents et
des ressources à travers les directions techniques régionales et
leurs démembrements au niveau départemental et communal.
Sur le plan de la décentralisation,
érigée en département par l'ordonnance n° 88-20 du 7
avril 1998 pour couvrir le territoire de la communauté urbaine de
Niamey. La région de Tillabéri doit son statut actuel grâce
à la loi n° 98-20 du 14 septembre 1998 portant création des
régions et fixant leurs limites et le nom des chefs-lieux.
Au terme de l'ordonnance 2010-054 du 17 septembre portant code
général des collectivités territoriales du Niger, la
région de Tillabéri compte de nos jours treize (13)
départements et quarante et cinq (45) communes, dont six (6) urbaines et
trente-neuf (39) rurales réparties comme suit :
- département d'Abala : 02 communes ;
- département d'Ayorou : 02 communes ;
33
- département de Balleyara : 01 commune ;
- département de Banibangou : 01 commune ;
- département de Bankilaré : 01 commune ;
- département de Filingué : 04 communes ;
- département de Gothéye : 02 communes ;
- département de Kollo : 11 communes ;
- département de Ouallam : 04 communes ;
- département de Say : 03 communes ;
- département de Téra : 05 communes ;
- département de Tillabéri : 07 communes et ;
- département de Torodi : 02 communes.
La région de Tillabéri compte trente et un (31)
cantons, neuf (9) groupements nomades ; et mille-neuf-cent-quarante-six (1946)
villages et tribus.
Ces entités sont dirigées par les chefs
traditionnels de la région, dont la création remonte depuis la
période coloniale en ce qui concerne les cantons et les groupements.
Toutefois, aujourd'hui l'on assiste à une création anarchique de
villages administratifs.
La région de Tillabéri est composée de
quarante-et-un (41) conseillers élus, dont six (6) femmes,
conseillères élues et conseillers de droits :
(députés, chefs traditionnels) sont au nombre de vingt-sept
(27).
Sur le plan fonctionnel, presque tous les services techniques
de l'État sont représentés à l'échelon
régional. C'est ainsi que la région de Tillabéri compte
plus de vingt-huit (28) directions régionales.
Après avoir achevé cette première partie
qui nous a permis d'analyser le cadre théorique et l'approche
méthodologique de notre travail, nous allons aborder dans la
deuxième partie l'analyse de facteurs de la radicalisation et les formes
de violence extrémiste dans la région de Tillabéri, les
stratégies de lutte afin de montrer les limites et de proposer des
recommandations.
34
35
DEUXIÈME PARTIE : ANALYSE DES FACTEURS DE LA
RADICALISATION ET FORMES DE VIOLENCE EXTRÉMISTE,
STRATÉGIES DE LUTTE, LIMITES ET
RECOMMANDATIONS
La deuxième partie comprend deux chapitres. Analyse des
facteurs de la radicalisation et formes de violence extrémiste (chapitre
III) et le chapitre IV traite les stratégies de lutte, les limites et
les recommandations.
16 James Wilfenson, Sommet annuel collectif du FMI
et de la Banque Mondiale, Hongkong. Le 23/09/1999.
36
CHAPITRE III : ANALYSES DES FACTEURS DE LA
RADICALISATION ET LES FORMES DE VIOLENCE EXTRÉMISTE DANS LA
RÉGION DE TILLABERI.
Ce chapitre traite l'analyse des facteurs de la radicalisation
et les formes de violence extrémiste dans la région de
Tillabéri.
3.1 Analyse des facteurs de la radicalisation dans la
région de Tillabéri
Dans cette section, nous allons analyser la pauvreté,
l'injustice sociale, la mauvaise gouvernance, les conflits interethniques et la
recherche de sécurisation.
3.1.1 La pauvreté
La pauvreté est le socle de toute violence dans
l'espace sahélien et surtout au Niger. Certes, c'est un
phénomène, mais, à l'heure de la mondialisation, elle n'a
pas cessé d'augmenter. C'est pourquoi James Wilfenson disait à
propos de la pauvreté que je cite : « Nous portons, donc, entre
nos mains, la bombe de la pauvreté, qui est une bombe prête
à exploser dans n'importe quel moment... »16.
La pauvreté, combinée à la
criminalité transnationale organisée et à la faiblesse des
institutions, crée un sentiment croissant d'insécurité,
d'instabilité et de conflits dans la région. La pauvreté
est devenue le terreau de toute violence et demeure une préoccupation
majeure dans la région de Tillabéry. Cette pauvreté
engendre la frustration qui peut facilement être exploitée par les
groupes extrémistes violents, notamment lorsque la population est
privée d'un accès inéquitable aux services sociaux de
base.
Conséquemment à toutes ces
caractéristiques, les jeunes se retrouvent pour la plupart dans la
précarité et perdent de plus en plus la confiance à la
37
société et à l'État qu'ils
considèrent comme étant indifférent à leur
« sort de misère »17. Ce sentiment est
davantage accentué par la désarticulation des cellules familiales
victimes de la pauvreté et des mutations exogènes des valeurs
socioculturelles qui sont mal appréhendées. Face à cette
situation, les jeunes deviennent de plus en plus attentifs aux discours des
groupes extrémistes violents. Les jeunes, piégés par des
perspectives nébuleuses d'une vie meilleure, socialement plus juste et
fautes d'alternatives, se retrouvent acteurs involontaires de la radicalisation
et de l'extrémisme violent.
Aussi, la déscolarisation ou le manque de
fréquentation des enfants est considéré comme une des
problématiques majeures dans certaines localités de la
région de Tillabéri a l'exemple de Ouallam, Bankilaré et
Ayérou. Ces problèmes ont poussé plusieurs enfants
à quitter les villages soit pour rejoindre les groupes
extrémistes soit pour migrer vers les grandes villes.
Les niveaux d'éducation restent faibles, en particulier
chez les jeunes filles. De plus, l'offre de formation technique et
professionnelle formelle s'avère insuffisante pour relever le
défi de l'emploi des jeunes. Ce déficit prédispose la
plupart des jeunes au désoeuvrement ou à des emplois qui ne leur
permettent pas de subvenir dignement à leurs besoins fondamentaux. Cela
participe à casser leur estime de soi et à renforcer leur
sentiment d'être des victimes d'un système d'exclusion. Ce qui
constitue une porte ouverte à toutes les dérives dont les
stratégies négatives18.
La pauvreté demeure une préoccupation majeure
pour la population et plus précisément les jeunes. Cette
pauvreté, exacerbée par le chômage et le sous-emploi,
touche de plus en plus les populations, dont les jeunes sont victimes. Les
conditions de vie fragile des jeunes et leur désespoir incluent les
17 Ces propos ont été
récurrents dans plusieurs entretiens de groupe avec les jeunes lors des
concertations régionales par le CNESS
18 Stratégie Nationale de Prévention de
la radicalisation et de l'extrémisme Violent-Niger
38
dangers de la stigmatisation sociale. Les populations sont
soumises à de multiples privations, en particulier les zones rurales, ce
qui constitue une base d'adhésion aux groupes terroristes et criminels
présents dans certaines régions du Niger et augmente le sentiment
d'injustice sociale.
3.1.2 L'injustice sociale
Le sentiment d'injustice est également l'une des causes
qui motivent les individus à la radicalisation. Ce sentiment est souvent
exploité par des groupes extrémistes pour inciter les populations
à la violence. C'est un sentiment largement partagé au sein de la
population. La stratégie utilisée consiste à
démontrer aux jeunes que ce qu'ils pensent est une réalité
et qu'ils peuvent et doivent combattre l'injustice par tous les moyens.
À cet effet, la justice et l'équité
constituent le fondement le plus sûr pour construire une nation en
magnifiant la nécessité de s'unir d'une part et d'autre part,
suscitent des perceptions très mitigées et demeurent, enfin, un
problème crucial dans les différentes localités du pays.
L'impunité, la violation des droits humains, notamment les droits
économiques, sociaux et culturels semblent gagner du terrain au
détriment de l'intérêt général.
Ainsi, selon une enquête (juin 2018) menée par le
Centre National d'Études Stratégiques et de
Sécurité (CNESS), il ressort de cela qu'en milieu rural à
Tillabéri, 58 % des jeunes pensent que les riches et les pauvres ne sont
pas égaux devant la loi et 56 % pensent la même chose entre les
citoyens ordinaires et les hommes politiques. Les raisons restent les
mêmes : la corruption et le trafic d'influence19.
Aussi, faut-il le rappeler que lors du forum sur le maintien
et le renforcement de la cohésion sociale tenu à Niamey du 24 au
26 novembre
19 Étude approfondie sur les facteurs de la
radicalisation en milieu rural, urbain, carcéral et universitaire dans
cinq régions du Niger de juin 2018 menée par le Centre National
d'Études Stratégiques et de Sécurité-Niger.
39
2021, certaines personnes aient relevé l'injustice dans
la succession au niveau de la chefferie traditionnelle. Pour les tenants de
cette assertion, lorsqu'un chef traditionnel décède, le
successeur serait quelqu'un qui utilise les moyens possibles pour
accéder au trône. Cette pratique révolte certains
prétendants légitimes qui font les recours à la violence
pour revendiquer leur place en tant que successeurs de droit. Tous ces
phénomènes illustrent et donnent l'impression d'une mauvaise
gouvernance.
3.1.3 La mauvaise gouvernance
La précarité de la gouvernance et son effet sur
les institutions étatiques ont réduit la capacité des
États du G5 Sahel à fournir des services publics efficaces,
à promouvoir une large participation des citoyens à la vie
politique, à garantir les droits humains et à lutter contre la
corruption avec un accès équitable aux services sociaux de
base20.
L'une des leçons les plus importantes de la
dernière décennie de pratique antiterroriste au Sahel est que les
opérations militaires ne peuvent pas à elles seules
empêcher la propagation de l'extrémisme violent. Même
lorsqu'ils réussissent à débarrasser certains secteurs de
la présence de groupes extrémistes violents, les gouvernements ne
parviennent pas à améliorer la gouvernance locale et à
fournir des services sociaux et se retrouvent de facto dans l'incapacité
à maintenir les acquis militaires. Comme ailleurs au Sahel,
l'insécurité et l'extrémisme violent s'appuient pour
prospérer, sur les échecs de gouvernance, y compris dans le
secteur de la sécurité.
Des faiblesses liées à la gouvernance
administrative qui génèrent beaucoup de frustrations,
découlant de la politisation de l'administration publique, de la
prévalence de certains comportements néfastes à
l'efficacité des services publics (corruption, trafic d'influence,
favoritisme, etc.). Les modalités de dévolution dans la plupart
des responsabilités administratives et techniques
20 Stratégie pour le Développement et la
Sécurité des pays du G5 Sahel, septembre, 2016, P.23.
40
qui sont principalement basées sur des critères
d'appartenance politique, et de la tendance au transfert de l'exercice de
redevabilité de la chaîne administrative et technique de
l'État vers la chaîne décisionnelle des partis politiques
(SNPREV-NIGER, 2020).
Selon une analyse réalisée par le PNUD, la
faible responsabilisation des communes et la faible intégration des
espaces transfrontaliers dans les politiques nationales de
développement, l'absence des services publics et d'investissements
productifs constituent la cause essentielle de la rupture de confiance entre
l'État et les communautés. Le sentiment d'exclusion ressentie par
ces communautés crée un déficit de confiance entre
l'État et les communautés.
Introduire les principes d'inclusion et de participation
citoyenne des populations dans la vie politique, économique et sociale
peut constituer un facteur catalyseur de bonnes relations entre
l'administration et les administrés. Ce déficit de la gouvernance
engendre un sentiment des frustrations et des replis inter et
intracommunautaires.
3.1.4 Les conflits inter et intracommunautaires dans la
région de Tillabéri
Les conflits inter et intracommunautaires dans la
région de Tillabéri sont l'une des causes de la radicalisation et
de l'extrémisme violent. Ces conflits peuvent prendre de multiples
formes traversant les frontières et inclure des composantes liées
aux groupes armés radicaux. Les conflits interethniques se manifestent
sous différentes formes : i) entre les Peuls et les Touaregs, ii) entre
les Sonrais, les Peuls et entre les Touaregs, iii) entre les Touaregs, les
Arabes et les Peuls, selon les localités.
L'existence des conflits entre éleveurs et agriculteurs
dans les communes d'Inatès, Tondikwindi, Dingazi, Bankilaré,
Téra, Gorouol, Anzourou, Ouallam, Ayorou sont dus principalement au
non-respect des couloirs de passage d'animaux et des aires de pâturage
définies de manière consensuelle entre les acteurs (gouvernement,
sédentaires, éleveurs et autorités locales). Ils
41
occasionnent des dégâts champêtres pour les
agriculteurs, et sèment la division entre les différentes
corporations. D'autant plus qu'il est admis comme étant l'agriculteur
est pasteur, et l'éleveur est agriculteur, et partageant un même
espace dans la région de Tillabéri.
La plupart de ces conflits sont survenus lors de la
transhumance des animaux et de l'accès aux ressources partagées,
notamment le pâturage et l'eau des deux côtés de la
frontière. Les zones transfrontalières entre le Mali et le Niger
ont été marquées par une combinaison de sècheresses
généralisées et d'extension progressive des terres
agricoles qui rétrécit le pâturage du bétail.
À cela, s'ajoutent les effets des changements climatiques qui
fragilisent d'année en année les ressources naturelles et
réduisent les moyens d'existence des populations locales. La
prévalence de ce type de conflit au sein d'une communauté semble
augmenter la probabilité que les jeunes rejoignent le mouvement
extrémiste. Ainsi, la radicalisation du groupe extrémiste et leur
présence dans la communauté facilitent le processus du
recrutement surtout quand une communauté se sent rejetée par les
autres.
C'est pourquoi au Niger, le rang des ennemis grossit depuis
une dizaine d'années dans certaines régions du pays et surtout la
région de Tillabéri. Vu la persistance des conflits dans l'espace
nigérien dus aux facteurs ci-haut cités, certaines personnes qui
sont victimes de cet amalgame rejoignent les groupes terroristes et autres
groupes armés pour se venger. D'autres par contre rejoignent les groupes
extrémistes après avoir perdu un parent proche ou un frère
dans l'attaque de son village ou de son campement par les Groupes Armés
Non Étatiques. Cette prévalence de l'insécurité
incite certaines personnes à se rallier pour réduire la menace
par la possession d'armes de guerre avec pour seule ambition sécuriser
leurs biens et leurs familles.
Pour les jeunes sahéliens, le fait de prendre une arme
est devenu une manière de se protéger et combattre avec les
groupes radicaux, et d'être à l'abri
3.1.5 La recherche de sécurisation
42
de leurs menaces lui et sa famille, de protéger le
bétail de la famille, et de vivre tranquillement dans le territoire
contrôlé par les groupes radicaux. De ce fait, pour eux,
l'engagement dans le groupe a été un moyen de jouir du statut de
combattant, des avantages et de l'accès aux ressources, surtout d'une
arme lui permettant de se porter garant de la protection des biens et de la
famille. Relevons que hormis tout le développement ci-dessus
évoqué, la volonté de se protéger, de
protéger sa famille, sa communauté ou son activité
économique parait comme un des facteurs importants de leur engagement.
Les facteurs interagissent dans la plupart des cas ; il est donc vain de
rechercher un seul et unique motif d'adhésion. Il importe d'analyser de
façon détaillée les réalités locales
à l'origine de l'engagement des jeunes et de résister à la
tentation d'appliquer les conclusions à d'autres contextes.
Tous ces facteurs évoqués qui sont
occasionnés par l'arbitraire, et le libre recours aux armes conduisent
aux différents actes de criminalités et de violence extrême
d'où les bilans négatifs qui suivent les différentes
formes des attaques extrémistes.
3.2 Les formes de violence extrémiste
Les formes de violences extrémistes de la
radicalisation dans la région se manifestent par les attaques
armées des villages et des positions des forces de défense et de
sécurité, par le trafic de drogue et d'armes à feu, par
les enlèvements des personnes, notamment les femmes et les jeunes
filles, les chefs traditionnels, les agents de l'État et les
commerçants (voir annexe les analyses synoptiques des formes de
violences dans la région de Tillabéri).
Les formes de violence extrémistes de la radicalisation
sont entre autres : les attaques physiques ou armées, les violences
économiques, les violences psychologiques, etc.
43
3.2.1 Les attaques physiques ou armées
Il s'agit ici des attaques armées
perpétrées dans les villages, les campements et les positions
avancées des FDS à travers des assassinats ciblés contre
les chefs traditionnels (chefs de cantons et de groupements, chefs de villages,
etc.), les prises d'otages (enlèvements avec demande de rançon),
les attentats-suicides (extrait de la Stratégie Nationale de
Prévention de la Radicalisation et de l'Extrémisme Violent-Niger,
2020). Ces types de violences visent autant des cibles militaires et civiles,
et s'aggravent d'année en année.
Quant aux auteurs des attaques, ils sont
généralement des individus armés non identifiés et
circulant à moto. Les attaques se font souvent pendant la nuit quand la
visibilité est réduite, même si certaines attaques se font
de plus en plein jour. Quant aux cibles ou victimes, elles sont en premier lieu
les forces de défense et de sécurité, puis en second des
civiles, le plus souvent représentants de l'État. Cette violence
physique ou armée exacerbe les communautés et conduit vers une
violence économique.
3.2.2 La violence économique
C'est tout simplement les pillages des biens publics et
privés dans les villages et les campements, les multiples braquages
à mains armées sur les routes, les commerces sont
perturbés par l'incendie des marchandises, les vols de bétail, la
destruction des infrastructures, le prélèvement obligatoire de
zakat.
Les pillages des biens privés et publics dans les
villages et les campements constituent la toile de fond depuis 2015 ; selon les
entretiens avec les populations de la région, ces groupes s'en prennent
aux civils pour arracher leur bétail, incendient leurs greniers de
vivres, etc.
Les groupes extrémistes ont adopté d'autres
manières pour faire pression sur la population en prélevant la
dime comme on appelle communément la zakat, surtout dans la zone de
trois frontières, notamment à Tillabéry. À cet
effet, au nord de Tillabéry, les GANE y collectent des impôts dont
la nature n'est pas clairement établie. Certains villageois soutiennent
qu'il s'agit de la zakat (impôt
44
islamique), au moment où d'autres la perçoivent
comme une contribution à l'effort de guerre de l'EIGS, qui en retour
garantit une protection des populations. Selon les personnes
interrogées, elles en témoignent que ces malfaiteurs viennent
nuitamment dans le village surtout aux environs de 3 h ou 4 h du matin pour
faire leurs opérations des pillages, de vol de bétail, de
destruction des infrastructures et de prélèvement obligatoire de
la zakat, et partir, c'est ce qui sème la panique et la psychose au sein
de la population.
3.2.3 La violence psychologique
C'est ce mode opératoire de semer la terreur dans les
zones affectées par l'insécurité, qui impacte
sournoisement l'esprit des individus et provoque un traumatisme avec un effet
néfaste de séquelles graves chez certaines personnes. Il convient
de noter que ce sentiment de peur affecte non seulement les individus, mais
largement la fourniture des services liés à la satisfaction des
besoins fondamentaux, aux activités économiques, administratives
et parfois politiques dans les zones touchées par
l'insécurité.
Face à toutes les formes de violence extrémiste
qui affectent au quotidien la quiétude sociale et la
sécurité humaine dans presque toute la région de
Tillabéri, le gouvernement nigérien doit adopter des
stratégies pour contrecarrer l'extrémisme violent. D'où la
nécessité de définir une approche stratégique
inclusive.
45
CHAPITRE IV : STRATÉGIES DE LUTTE CONTRE
L'EXTRÉMISME VIOLENT, LIMITES ET RECOMMANDATIONS
Dans ce chapitre, nous allons aborder les stratégies de
lutte contre l'extrémisme violent adoptées par le gouvernement du
Niger dans la région de Tillabéri, afin de relever les limites et
formuler des recommandations.
4.1 Stratégie de prévention et de lutte
contre l'extrémisme violent
Il est question de faire ressortir les mesures
préventives et les stratégies de lutte.
4.1.1 Mesures préventives
La mesure préventive est cette stratégie qui est
conduite à travers la sensibilisation sur des thématiques portant
sur l'éducation, l'information, le mécanisme de
résiliences contre l'extrémisme violent, et les actions des
projets de développement.
4.1.1.1 La sensibilisation
Pour mieux rapprocher les citoyens, des mesures de
sensibilisation doivent être régulières pour les
conscientiser sur les dangers de l'extrémisme violent et ses
conséquences sur la vie sociale. Les activités de sensibilisation
(fora, caravanes de paix, etc.) sont organisées par la Haute
Autorité à la Consolidation de la Paix (HACP). Elles permettent
de prévenir les conflits par des activités de promotion de la
paix et de la cohésion sociale à travers des messages.
La stratégie de prévention préconise la
sensibilisation sur la responsabilité et les rôles des cellules
familiales en matière de prévention de la radicalisation et de
l'extrémisme violent, la sensibilisation des populations sur les dangers
de la radicalisation et l'extrémisme violent, et la sensibilisation des
jeunes sur les valeurs traditionnelles et culturelles favorables à la
prévention de la radicalisation et de l'extrémisme violent.
46
Le programme cohésion communautaire au Niger a
été mis en oeuvre par le gouvernorat de Tillabéri,
à travers une caravane de sensibilisation qui a sillonné le
département d'Abala pour sensibiliser la jeunesse à ne pas
répondre « au chant des sirènes » des groupes
armés, et attirer leur attention sur les effets néfastes
liés à la montée de l'extrémisme violent. Le
programme a mis en place au profit des jeunes des clubs de loisirs, des
tournois de lutte traditionnelle, des tournois de football et des cadres de
concertation communautaires et communaux.
Des séances de sensibilisation ont été
organisées à Tillabéri dans le but de réduire le
risque de l'extrémisme violent. L'objectif global de séance de
sensibilisation est de permettre aux jeunes d'échanger et de partager
sur la coexistence pacifique, la culture de la paix et la non-violence. De
manière spécifique, il s'agit d'édifier les jeunes sur les
conséquences de l'extrémisme violent dans la région de
Tillabéri ; de cultiver l'esprit de tolérance, la coexistence
pacifique, la culture de la paix et d'encadrer des jeunes afin de les mettre
à l'abri du chômage et de la précarité. Ces actions
n'ont été possibles qu'avec l'implication des organisations de la
société civile qui ont oeuvré aux côtés du
gouvernement dans son programme de sensibilisation et l'éducation
à la citoyenneté.
4.1.1.2 L'éducation
L'éducation citoyenne est reconnue mondialement comme
un élément essentiel pour prévenir l'extrémisme
violent, instaurer la paix et promouvoir le développement durable. La
stratégie du Niger préconise l'éducation citoyenne comme
outil de lutte contre la radicalisation et l'extrémisme violent. Pour
renforcer l'intégration sociale et économique de tous et ainsi
conforter la cohésion sociale capable de maintenir la paix, il est
nécessaire d'assurer l'accès de tous à une
éducation de qualité et de promouvoir des acquis d'apprentissage
tout au long de la vie, tel que le mentionne l'objectif de développement
durable n° 4 de l'Agenda 2030.
47
L'éducation et la formation sont des principes
fondamentaux des valeurs humaines qui permettent aux jeunes de ne pas
être tentés par les discours de la violence. La stratégie
du Niger préconise l'éducation comme un outil permettant de
relever les défis de la société. L'éducation est un
facteur qui outille les jeunes vers des valeurs sociales et des
compétences. Elle permet aux jeunes, tout en favorisant leur insertion
sociale et professionnelle, d'offrir des opportunités pour les
protéger contre les méfaits de l'extrémisme
violent21.
En effet, l'État dans sa politique de lutte contre la
radicalisation et l'extrémisme violent considère la
prévention de l'extrémisme violent par le développement du
capital humain - à travers l'éducation et la formation - comme
une priorité. C'est ainsi qu'un guide des enseignants relatif à
la prévention de l'extrémisme violent par l'éducation a
également été conçu par les équipes
techniques des ministères sectoriels de l'éducation. Ce guide a
fait l'objet de vulgarisation auprès de certains enseignants des
régions de Diffa et de Tillabéri (Torodi) qui ont
été formés à son utilisation22. La
prévention de l'extrémisme violent par l'éducation,
mentionnée dans la stratégie, intégrée aux
curricula de l'enseignement primaire et secondaire vise à
développer chez les jeunes des compétences à la
résilience face à l'extrémisme violent et à
encourager les engagements pacifiques et citoyens au sein de la
communauté.
Cette éducation est également directement
reliée à la formation professionnelle et au développement
des compétences pour veiller à ceux qui sont laissés pour
compte de bénéficier d'un renforcement de capacités qui
leur permet de contribuer à la main-d'oeuvre locale.
Compte tenu de centres de formation professionnelle de
qualité dans la région de Tillabéri, cet objectif
stratégique devrait inclure l'extension des centres
21 La prévention de l'extrémisme violent et de
la radicalisation, Rapport présenté par M. Christian Levrat,
Sénateur (Suisse), le 3 mai 2017.
22
https://fr.unesco.org/news/enseignents-du-niger-apprennent-prevenir-l'extrémisme-violent-introduire-culture-paix-classe.
48
d'apprentissage bien que ces derniers ciblent ceux qui ont
été laissés pour compte, ils devraient être mis
à la disposition de tous ceux qui cherchent à acquérir des
compétences et une formation pour améliorer leurs
capacités productives.
Il convient de noter que l'État à lui seul ne
peut absorber tous les jeunes non scolarisés ou n'ayant pas suivi un
cursus scolaire normal. Les jeunes en chômage et/ou en désespoir
social constituent un danger ou une bombe à retardement qui peut
être une source de fracture sociale surtout quand ceux-ci sont porteurs
d'ambitions.
Aussi, la formation professionnelle pourrait être une
alternative pacifique et digne pour subvenir à leurs besoins et ceux de
leurs familles. Elle constitue un réel espoir de vie, car elle les
prépare à la responsabilité sociale.
C'est pourquoi l'État et les partenaires techniques au
développement doivent intégrer cette approche dans des
filières porteuses et diverses afin d'aider la jeunesse à
développer ses compétences et ses initiatives pour
autonomisation.
Aussi, l'éducation islamique est celle qui est
fondamentalement enseignée dans les normes religieuses à la
lumière du coran, de la sunna et de la jurisprudence. Cette
éducation intéresse et concerne bon nombre de la population
nigérienne, surtout celle qui se trouve en milieu rural et à
laquelle sont envoyés les enfants dès leurs bas âges.
À cet égard, les efforts doivent explorer pour
encourager l'acquisition des connaissances traditionnelles (islamiques) et
occidentales afin d'envisager leur possible intégration dans des
programmes hybrides qui permettent de tirer le meilleur parti du savoir, et de
la valeur de chaque système éducatif.
Notons que tout en reconnaissant une part non
négligeable de l'apprentissage se déroule en dehors des cadres
formels. La Stratégie doit encourager et renforcer les mécanismes
d'apprentissage informel, en particulier par le biais des structures sociales
et culturelles.
49
Face à ces risques, le gouvernement préconise
dans la stratégie le renforcement de la résilience de
l'école nigérienne à la radicalisation et à
l'extrémisme violent en introduisant dans le curricula des écoles
(publiques et coraniques) des notions du civisme, des cultures de la paix et
des droits humains. Il préconise aussi le renforcement de l'encadrement
des écoles coraniques et des lieux de cultes pour valoriser le
système de valeurs socioculturelles favorables à la
cohésion sociale et à la consolidation de la paix en respectant
la culture islamique.
De plus, cet enseignement adjoint à la formation
civique et morale qui a disparu des programmes scolaires depuis un certain
temps. Pourtant, le développement de l'éducation civique
correspond aux valeurs républicaines en réaction contre
l'impunité. Elle fait connaître à l'enfant les valeurs
sociétales de justice et de l'équité ce qui constitue un
levier de la lutte contre l'injustice et l'intolérance. L'État et
les partenaires dans le domaine doivent faire plus d'effort par la
sensibilisation et les actions de masse pour une éducation
opérationnelle à la citoyenneté. Ceci doit se faire par
des actions de salubrité, des rencontres culturelles, des travaux
d'intérêt général, des rencontres d'échange
sur le développement, et toute autre action citoyenne appelant à
la responsabilité.
4.1.1.3 L'information
L'information est un produit rare en raison du faible
accès de la majorité des citoyens aux moyens de communication. En
effet, l'information est de nos jours un outil essentiel de
développement pour les générations présentes et
futures.
Face à l'insécurité et aux menaces
multiformes, l'accès à l'information, comme la sensibilisation et
l'éducation suscitent une responsabilisation du citoyen, éveille
la conscience et permet de sortir du sous-développement mental.
L'information est un pilier de construction sociale unipersonnelle d'autant
qu'elle participe à éclairer la vision d'un individu sur les
phénomènes sociaux, à renforcer sa capacité
d'analyse critique et permettre, de façon
- Rôle des femmes dans l'information et des jeunes
leaders : qu'elles prennent la forme de plateformes de rencontres et
d'échange, d'écoute,
50
doctrinale, une prise de décision
éclairée. Les actions d'information visent principalement
à éviter la polarisation entre radicalisation et valeurs
sociales, et à prévenir ainsi toute promotion de la
radicalisation au niveau d'un individu (en particulier chez les jeunes) ou
d'une ou plusieurs communautés, et de ses conséquences violentes.
Il est également nécessaire de renforcer la position de la
prévention de la radicalisation et de l'extrémisme violent, en
rendant disponible et accessible à toutes les informations de
qualité sur la prévention de la radicalisation et de
l'extrémisme violent.
L'information peut être partagée à travers
différents canaux et peut porter sur plusieurs thématiques.
Pour ce faire, les différents acteurs doivent prioriser
l'information comme un moyen efficace pour prévenir et combattre la
radicalisation et l'extrémisme violent qui paralysent la coexistence
pacifique au Niger et en particulier dans la région de Tillabéri.
Il s'agit de :
- Autorités coutumières et leaders
d'opinion (leader religieux, personnes âgées, enseignants, etc.)
: leur influence dans les informations est importante parce qu'ils
jouent un rôle clé dans l'orientation du jeune. Ce sont aussi bien
les pouvoirs traditionnels (chefferies locales, ainés, les leaders
socioprofessionnels et d'opinion), les commerçants influents, les
acteurs confessionnels qui sont négligés de nos jours qui ont une
influence des acteurs communautaires de par l'information qu'ils
véhiculent auprès de la communauté. Ils jouent un
rôle prépondérant dans des sociétés où
l'identité est fortement déterminée par l'appartenance
religieuse (leaders d'opinion), de même que les réseaux de
sociabilité. Ils peuvent constituer des interlocuteurs clé pour
accéder aux jeunes et constituer des « passeurs », en raison
de l'écoute grandissante dont ils bénéficient
auprès de ces derniers.
51
de concertation, des lieux de sociabilité, d'expression
politique et de militantisme, ou qu'elles promeuvent la culture, ces
associations, lorsqu'elles existent, constituent des « soupapes de
sécurité » permettant aux jeunes de s'exprimer et de faire
entendre certaines revendications. À cet effet, le rôle des femmes
et des jeunes leur permet de participer pleinement aux processus de
planification et de prise de décision, à toutes les actions de
résolution des conflits, de relèvement rapide et de
développement, ainsi qu'à tous les mécanismes
d'évaluation et de responsabilisation.
- Acteurs de la société civile :
acteurs de proximité, les organisations de la
société civile présentent de fortes capacités de
mobilisation sociale due à une bonne intégration au niveau local
et communautaire et à une bonne connaissance de leur environnement. La
société civile forme une véritable force de plaidoyer et
de sensibilisation. Les représentants doivent plaider en faveur de
questions transversales, de défis et de solutions possibles pouvant
avoir une valeur et un impact plus large quant à la lutte contre
l'extrémisme violent. Sur ce point, la stratégie prévoit
d'assigner un rôle important aux organisations de la
société civile susceptibles de contribuer au cadre plus large de
la coordination, de l'efficacité et de la pertinence des efforts de
stabilisation.
- Rôle de l'Administration au niveau local dans
l'information : il s'agit notamment des collectivités
territoriales et des fonctionnaires qui, pour les jeunes, incarnent
l'État. Leurs actions peuvent contribuer à accroître la
participation des jeunes à la gouvernance locale, ou au contraire,
à l'en exclure davantage. Les collectivités territoriales sont
les acteurs qui connaissent le mieux le besoin des jeunes. Ces
différentes instances peuvent être aussi mises à
contribution pour construire la paix entre les différentes
communautés et usagers des ressources naturelles à travers les
informations.
52
- Les rôles des médias (radios
communautaires) : par leur existence, les médias conditionnent
en partie la capacité des jeunes à être informés,
notamment de leurs droits, à se mobiliser et à prendre des
décisions quant à la lutte contre l'extrémisme violent.
Dans un contexte régional marqué par un très fort taux
d'analphabétisme, les médias écrits sont les moins
consultés par les jeunes, au détriment de la radio et de la
télévision et des Nouvelles Technologies de l'Information et de
Communication (NTIC). Donc les radios rurales ou communautaires peuvent
être mises à profit pour faire passer des messages de
tolérance entre les acteurs pour faire apaiser ou comprendre certains
conflits.
- Rôle des Forces de Défense et de
sécurité dans l'information : les FDS sont au coeur
même du dispositif de lutte contre la radicalisation et
l'extrémisme violent. Leurs rôles dans les différents
aspects de la prévention sont souvent mésestimés. La
mission de protection de FDS ne se situe pas seulement à un niveau de
réaction, elle s'inscrit plutôt dans une démarche
d'anticipation afin d'informer les populations du danger contre
l'extrémisme violent.
- Rôle des élus locaux : les
élus, locaux constituant les conseils communaux et régional,
agissent en tant qu'acteurs de proximité pour promouvoir le
développement économique, social et culturel à
l'échelon exclusif du territoire de leurs collectivités
respectives. Ils contribuent à assurer la cohésion sociale,
à promouvoir et à réconforter la paix et à assurer
la sécurité des biens et des personnes. Ils ont un rôle
à jouer en informant la population sur un danger quelconque.
4.1.1.4 La stabilisation
Dans le cadre du renforcement de la résilience des
communautés dans les zones à risques sécuritaires, la
stabilisation des populations apparait stratégique. Aussi, un indicateur
spécifique mesurant cette stabilisation devra être construit. Il
devra notamment prendre en compte les notions de relance
53
économique, de réconciliation et de pacification
du territoire, sur les piliers de l'intervention publiques, notamment la Bonne
Gouvernance, la Justice, la reconstruction des systèmes de garantie
sécuritaire aux populations et les secteurs sociaux.
4.1.1.5 Les mécanismes de résilience contre
l'extrémisme violent
L'inclusion et l'engagement des populations locales dans les
mécanismes de sécurité de proximité s'articulent
autour de deux composantes principales : la première est
constituée de comités formels de paix qui ont été
créés pour rassembler et informer les autorités sur
l'extrémisme violent dans leurs communautés, et pour soutenir
l'amélioration de la coopération entre les populations et les
acteurs de la sécurité et la seconde est constituée de
réunions informelles où les acteurs de la sécurité,
les acteurs politiques et les membres des communautés se rencontrent
pour discuter des problèmes de sécurité dans leurs
communautés.
Ces deux mécanismes, en plus des actions de
sensibilisation et des caravanes de la paix, semblent axés sur
l'amélioration des relations entre les gouvernements et les
communautés. La Haute Autorité à la Consolidation de la
Paix (HACP) joue un rôle important dans l'organisation de ces
activités.
À cette fin, des comités de vigilance communaux,
combinés à un système d'informateurs au niveau des tribus
et des hameaux, ont été mis en place.
La HACP a mis en place des mécanismes locaux de
prévention et de gestion des conflits. Quatre relais principaux sont
accompagnés : les comités communaux de paix (CCP), les
commissions de paix et sécurité (CPS) au niveau de conseils
régionaux, les comités de dialogue inter et intra religieux
(CDIR) et les autorités traditionnelles.
Il y a aussi les projets qui stimulent les Activités
Génératrices de Revenus qui appuient les jeunes en moyens
économiques afin de leur permettre de se prendre en charge et de
subvenir à leurs besoins.
54
4.1.1.6 Les actions des projets et des Organisations Non
Gouvernementales
L'État doit pleinement jouer son rôle
régalien et multiplier ses efforts à travers ses structures
créées pour la nécessité de renforcer la
sécurité. Il doit définir sa feuille de route dans les
actions de lutte contre l'extrémisme violent et disposer d'un cahier de
charges afin de permettre aux ONG et autres accompagnateurs dans le domaine du
relèvement d'intervenir avec efficacité à ces
côtés.
Les ONG nationales, internationales, confessionnelles ou non,
à travers les projets qu'elles mettent en oeuvre, constituent des
acteurs engagés auprès des populations ; elles ont
développé des méthodes et des approches adaptées
aux enjeux de l'insertion sociale des jeunes. Elles contribuent
également à promouvoir les droits et devoirs des jeunes au sein
de leurs communautés. À travers les interventions de ces
organisations de la société civile, ces acteurs se focalisent sur
des thématiques diverses telles que :
ü Le renforcement des capacités des acteurs (les
FDS, les chefs traditionnels et religieux, les leaders des jeunes, les
associations et les groupements des femmes) dans le cadre de la
prévention de la radicalisation et de l'extrémisme violent ;
ü Les appuis spécifiques au renforcement des
cadres et mécanismes d'information tels que les radios communautaires et
les activités civilo-militaires.
À titre illustratif le Projet d'Appui à
l'Autonomisation des Jeunes et des Femmes les plus Vulnérables face
à la Radicalisation et à l'Extrémisme Violent dans la
région de Tillabéri (Jeunes et Femmes/PEV) qui a formé 35
journalistes des Radios communautaires de la région le 10 juin 2022.
Cette formation permettra aux participants d'améliorer leurs
connaissances en matière de prévention de l'extrémisme
violent.
55
Le Projet d'Appui à l'Autonomisation des Jeunes et des
Femmes les plus Vulnérables face à la Radicalisation et à
l'extrémisme violent dans la région de Tillabéri mis en
oeuvre par l'Association des Scouts du Niger en consortium avec la Cellule de
Prévention de la Radicalisation et de l'Extrémisme Violent
(CELLRAD) et le conseil Régional de la Jeunesse de Tillabéri
concerne 12 communes des 11 départements cibles de la région de
Tillabéri à savoir : Abala, Ayorou, Ballayara, Filingué,
Gothèye, Kollo, Ouallam, Say, Téra et Torodi. Son objectif
principal est d'accroître la résilience sociale et
économique des jeunes et des femmes de la région de
Tillabéri face à la radicalisation et l'extrémisme
violent.
Il faut par ailleurs définir pour chaque acteur les
rôles, responsabilités et défis attendus pour la
construction de la paix avant d'engager une action.
À titre d'exemple, le Projet « Stabilisation dans
la région du Liptako-Gourma » mis en oeuvre par le Programme des
Nations Unies pour le Développement intervient pour contribuer à
résoudre les problèmes liés à l'extrémisme
violent. Le projet a pour objectif global de réduire la
vulnérabilité à l'extrémisme violent en
renforçant les outils permettant de traiter les griefs fondamentaux qui
alimentent l'extrémisme dans les régions du Niger exposées
à l'insécurité et sustenter la cohésion sociale
inter et intracommunautaire. Comme mesure préventive, il y a aussi
l'état d'urgence instauré par le gouvernement du Niger dans la
région de Tillabéri.
4.1.2 stratégies de lutte contre l'extrémisme
violent
Les stratégies de lutte contre l'extrémisme
violent sont mises en oeuvre à travers les moyens juridiques,
institutionnels, militaires et politiques.
4.1.2.1 Les moyens juridiques
Parlant des instruments juridiques face à
l'implantation des groupes terroristes au Sahel liés aux réseaux
du crime organisé, le Niger s'est doté de la
quasi-totalité des outils juridiques contre le terrorisme. Il dispose
d'un cadre
56
juridique impressionnant qui répond à la lutte
contre le terrorisme par divers moyens. La réforme du système
juridique qui a intégré les recommandations des organisations
internationales concernant la lutte contre le terrorisme et le banditisme
transnational.
Le gouvernement du Niger a finalisé les bases
légales du processus de la reddition en adoptant la modification de
l'article 399.1.20 du Code pénal dans le respect des avantages en
matière des droits humains et de la justice transitionnelle de lutte
contre le terrorisme. L'article 399.1.20 de la loi n°61-27 du 15 janvier
1961 portant institution du Code pénal garantit un statut légal
aux personnes ayant fait acte de reddition volontaire.
Les actes réglementaires viennent compléter
l'ordonnancement juridique en la matière. C'est ainsi que le Niger a
procédé à la révision de l'ordonnancement de sa
législation par l'adoption de :
- L'Ordonnance N° 2011-11 du 27 janvier 2011
créant un pôle judiciaire spécialisé dans la lutte
contre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée
;
- L'Ordonnance N° 2011-12 du 27 janvier 2011 modifiant et
complétant la loi 61.27 du 15 juillet 1961 portant institution du Code
pénal ;
- L'Ordonnance N° 2011-13 du 27 janvier 2011 organisant
la procédure à suivre en matière de lutte contre le
terrorisme et le financement du terrorisme ;
- La loi N° 2016-21 du 16 juin 2016 modifiant la Loi
n°61-33 du 14 août 1961 portant institution du code de
procédure pénale
- La loi N° 2017-07 du 31 mars 2017 modifiant et
complétant la loi N°6127 du 14 août 1961 portant institution
du code de procédure pénale.
- La Loi n°2016-19 modifiant et complétant la Loi
n°2004-50 fixant l'organisation et la compétence des juridictions
au Niger et la Loi n°201622 modifiant et complétant la Loi
n°61-33 du 14 août 1961 portant institution du code de
procédure pénale ont élargi la compétence du
pôle
23
https://scienceetbiencommun.pressbooks.pub/droitniger/chapter/chapter-1/=return-footnote-5-7
, consulté le 20 avril 2022
57
judiciaire spécialisé en matière de lutte
contre le terrorisme à la criminalité transnationale
organisée.
Aussi, il est important de mentionner les instruments
juridiques adoptés par les organisations régionales et
sous-régionales telles que de l'Union africaine, de la CEDEAO et de
l'UEMOA.
La CEDEAO s'est dotée d'un certain nombre d'outils tant
textuels qu'institutionnels. Il existe des moyens de prévention, de
contrôle et de résolution des conflits, établis par
l'accord de décembre 1999, qui joue un rôle clé dans la
lutte contre le terrorisme. Il a été suivi par le protocole
additionnel du 21 décembre 2001 sur la démocratie et la bonne
gouvernance, qui permet de s'attaquer aux enjeux politiques, diplomatiques et
militaires à l'origine du conflit.
Enfin, l'UEMOA qui a élaboré le règlement
N°14/2002/CM/UEMOA relatif au gel des fonds et autres ressources
financières dans le cadre de la lutte contre le financement du
terrorisme dans les États membres. Citons aussi la Directive
N°02/2015/CM/UEMOA relative à la lutte contre le blanchiment des
capitaux et le financement du terrorisme, qui renforce les dispositifs en
prévoyant de nouvelles infractions en matière de terrorisme.
Cette directive a été transposée dans l'ordre juridique
nigérien par la loi N°2016-33 du 31 octobre 2016 relative à
la lutte contre le blanchiment des capitaux et du financement du
terrorisme23.
Tous ces textes s'enrichissent de dispositions
réprimant la criminalité transfrontalière
organisée, ce qui permet de rendre la répression encore plus
efficace en s'appuyant sur les moyens institutionnels.
Instrument politique pour accomplir différentes
missions qui peuvent concourir à l'unité nationale, la Haute
Autorité à la Consolidation de la Paix est
58
4.1.2.2 Les moyens institutionnels
L'ancrage institutionnel permet de promouvoir une synergie
d'action avec les institutions nationales et organisations partageant les
idéaux du G5 Sahel. La création de plusieurs structures a permis
de renforcer l'État en matière de sécurisation des
populations. Ces structures sont entre autres :
Ø Le Conseil National de Sécurité
et ses démembrements
Il est ancré à la présidence de la
République, est un organe consultatif, qui assiste le président
de la République en émettant des avis sur les questions relatives
à la sécurité de la Nation, à la défense,
à la politique étrangère et, d'une manière
générale sur toutes les questions liées aux
intérêts vitaux et stratégiques du pays. Les avis de ce
conseil consultatif qu'est le Conseil National de Sécurité n'ont
pas un caractère contraignant au président de la
République, qui est seul décideur en matière de
définition de la politique étrangère.
Ø La Haute Autorité à la
Consolidation de la Paix
La Haute Autorité à la Consolidation de la Paix
(HACP) a été créée le 04 octobre 2011 par
Décret n°2011-481/PRN du 04 octobre 2011. Elle est un instrument au
coeur du processus de Consolidation de la Paix au Niger.
La mission générale de la Haute Autorité
à la Consolidation de la Paix (HACP) est de « entreprendre toute
initiative ou action orientée vers la consolidation de la paix, le
renforcement de l'unité nationale et le développement
économique et social ». Elle est, en outre, chargée
d'entreprendre, conformément aux orientations nationales en
matière de développement et de sécurité, toute
initiative ou action orientée vers la consolidation de la paix, le
renforcement de l'unité nationale, l'entraide, la solidarité et
le développement économique et social.
59
unique en son genre en Afrique de l'Ouest. Elle est
jugée par les différents acteurs du domaine comme une Institution
crédible, pertinente et nécessaire dans un contexte national et
régional où l'insécurité grandie avec comme
conséquence majeure la remise en cause de la stabilité sociale,
la montée de l'extrémisme et l'effondrement du tissu
économique locale.
La HACP possède et maitrise parfaitement les
instruments de cohésion et de relèvement social, qu'elle met en
oeuvre, directement ou indirectement, depuis plusieurs décennies.
Les actions et programmes concourant au renforcement de la
résilience sociale sont couverts par les programmes de prévention
des conflits et de cohésion sociale (Axe 3 de son Plan
Stratégique). Ils regroupent entre autres les « caravanes de la
paix », la sensibilisation, les audiences foraines, les activités
civilo-militaires et foras, qui sont largement plébiscités par
les élus locaux, les chefs traditionnels et les représentants de
la population.
Ces activités de prévention des conflits
apparaissent auprès des bénéficiaires comme ayant un
impact très important sur le maintien de la cohésion sociale, la
prévention des conflits inter et intracommunautaires et le maintien des
populations à risque (notamment les jeunes) dans la
société.
La HACP a mis sur place des comités communaux de paix
dans la région de Tillabéri depuis 2015 dans le but de concilier
les communautés et consolider la paix, mais surtout pour renforcer son
dispositif de prévention et gestion des conflits. Ce dispositif de
prévention et gestion des conflits est composé des comités
communaux de paix présidés par les maires. Ces comités
sensibilisent les communautés à la gestion non violente des
conflits et alertent les autorités en cas de signes de conflits.
Ø Le Centre National d'Études
Stratégiques et de Sécurité
Dans sa politique nationale de sécurité et de
défense, le gouvernement du Niger a jugé utile de créer le
Centre National d'Études Stratégiques et de
Sécurité par Décret N°2015-013/PRN du 16 janvier
2015.
60
Le centre a pour mission de : effectuer des études
prospectives et procéder à une évaluation globale des
questions sécuritaires et stratégiques; mener des
réflexions dans le domaine des relations internationales, des questions
de défense et de sécurité, leur évolution et leur
implication sur le développement national ; proposer des perspectives
pour le renforcement de la paix et de la stabilité au Niger ; faire des
propositions sur les moyens d'action permettant d'anticiper et de faire face
aux événements et d'impulser toute initiative de nature à
préserver l'intérêt national ; et faire des études,
des recherches et des formations à la demande des services et des
institutions publiques nationales. Le Centre a réalisé des
travaux importants sur la question de la radicalisation et l'extrémisme
violent qui sont soumis au gouvernement pour sa mise en oeuvre.
Ø La Stratégie pour le
Développement et la Sécurité des Zones
Sahélo-Sahariennes du Niger (SDS- Sahel-Niger)
La SDS-Sahel adoptée en 2012 est une initiative du
gouvernement nigérien qui traduit les engagements du Président de
la République contenus dans son programme politique intitulé
« Programme de Renaissance ». Elle a été conçue
sur la base d'une analyse participative profonde et réaliste de la
problématique spécifique relative aux conditions
d'insécurité et au développement des zones
sahélo-sahariennes au Niger.
La SDS-Sahel contribue à réduire la
vulnérabilité globale et les besoins non satisfaits des personnes
les plus vulnérables, à renforcer la gestion des risques et les
capacités et à s'attaquer aux causes profondes des crises. Ses
missions principales de SDS-Sahel sont : le Pilotage stratégique de la
stratégie (SDS) axé sur le suivi de la performance de toutes les
interventions concourant à sa mise en oeuvre et le plaidoyer pour la
mobilisation des ressources et ; la coordination de la mise en oeuvre des
programmes et projets et initiatives catalytiques dont le SE SDS assure la
maîtrise d'oeuvre.
61
Ø L'Antenne Nationale de la Cellule
Régionale de Prévention de la Radicalisation et de
l'Extrémisme Violent (CELLERAD)
Créée par arrêté
N°00315/MISPD/ACR/SG du 16 avril 2020 sous la tutelle du ministère
de l'Intérieur, et elle est chargée de : appuyer les
activités du Ministère en charge des Affaires Religieuses et du
culte ; harmoniser le plan d'action de la Cellule Régionale de
Prévention de la Radicalisation et de l'Extrémisme Violent du G5
Sahel au niveau national conformément aux besoins nationaux et assurer
le suivi de sa mise en oeuvre ; organiser des activités de plaidoyer, de
séances de réflexion, de sensibilisation, d'éducation et
de restitution des résultats ; contribuer à l'élaboration
de rapports annuels de la mise en oeuvre de la déclaration des pays du
G5 Sahel sur la lutte contre la radicalisation et l'extrémisme violent
au Sahel ; élaborer et mettre en oeuvre des projets de renforcement de
capacités et de prévention de la Radicalisation et de
l'Extrémisme violent ; mettre en contribution les acteurs religieux dans
différents domaines d'action comme l'éducation et le travail
social à travers les lieux de culte et autres structures
concernées.
La Cellule Régionale de Prévention de la
Radicalisation et de l'Extrémisme violent a pour mission principale de
suivre la mise en oeuvre des 16 recommandations contenues dans la
Déclaration de Niamey issue de la 47ème session du
Conseil des ministres des Affaires étrangères de l'Organisation
de la Coopération Islamique (OCI) tenue en novembre 2020 sous le
thème : « Unis contre le terrorisme, pour la paix et le
développement ». Ces recommandations toutes concourent à la
prévention de la radicalisation et à la lutte contre
l'extrémisme violent.
Ø Le Service central de lutte contre le
terrorisme (SCLT)
Créé par l'Ordonnance n° 2011-11 modifiant
et complétant la Loi de 1961 instituant le code de procédure
pénale et est chargé de coordonner, diriger et traiter l'ensemble
des enquêtes relatives à la lutte contre le terrorisme sur
l'intégralité du territoire national ; de recueillir,
centraliser, analyser et exploiter
62
tout renseignement et information afin de prévenir et
de réprimer le terrorisme sous toutes ses formes en collaboration avec
les autres services concernés ; de prévenir autant que faire se
peut tout acte de terrorisme ; de réprimer tous les actes et agissements
tombant sous le coup des lois et règlements relatifs au terrorisme et de
veiller à la coopération nationale et internationale avec les
autres services compétents en la matière.
Ø L'Association des chefs
traditionnels
Elle est un cadre de résolution des problèmes
qui se posent dans leurs communautés à travers une approche
basée sur la mobilisation sociale et le dialogue communautaire avec les
principaux acteurs en s'appuyant sur les traditions et les valeurs
socio-culturelles positives du changement social et de comportement. Cette
association s'appuie sur les chefs traditionnels en tant que garants des us et
coutumes qui se trouvent au premier rang des acteurs incontournables dans la
prévention de l'extrémisme violent dans leurs localités
respectives.
Ø Le Cadre du Dialogue Inter et Intra
religieux
Il est un cadre formel de dialogue intra et interreligieux
dans le cadre de la promotion de la paix. Il a pour but de développer le
dialogue et de favoriser la compréhension et la collaboration entre des
personnes et des communautés de religions différentes, pour
rendre possible le vivre ensemble et la paix.
Ø Le Conseil National de la Jeunesse (CNJ) et ses
démembrements
Il est un cadre représentatif de concertation et
d'échange entre les jeunes. Il est chargé de formuler des
propositions pour orienter en faisant mieux connaitre les pratiques et les
besoins culturels des jeunes et améliorer l'élaboration, la mise
en oeuvre et l'évaluation des politiques publiques qui leur sont
destinées.
24 Crisis Group, entretien avec un officier des
FDS, février 2018. « Niger : nouvelle opération contre les
«terroristes» venus du Mali Agence France-Presse (AFP), 17 juin
2017.
63
4.1.2.3 Les moyens militaires
Selon Belkacem IRATNI (2017), sur le plan militaire, les
groupes terroristes opérant dans le nord du pays sont presque totalement
éradiqués à travers une vigilance continue, un
redéploiement sur le terrain des forces de sécurité et
l'acquisition d'équipement approprié à la lutte
antiguérilla (satellites, radars de surveillances, détecteurs,
drones).
En 2014, l'opération Zarmaganda, du nom d'un ancien
royaume Djerma, est mise sur pied dans le Nord-Tillabéri afin de
sécuriser la frontière avec le Mali. Après une
série d'attaques contre les FDS, le président Issoufou juge le
dispositif insuffisant et le remplace en juin 2017 par l'opération Dongo
qui veut dire, « foudre » en langue djerma -, une « force mieux
armée et plus mobile forte de 245 hommes principalement basés
à Tilwa »24. Les autorités ont
décidé de redéployer du personnel militaire à la
frontière malienne et relancer l'opération Chara, en
étroite coordination avec l'opération Zarmaganda. Après
l'embuscade tendue aux forces de sécurité nigérienne
à Ouallam le 22 février 2017 qui a fait 15 morts et 19
blessés et a été revendiquée par l'État
Islamique au Grand Sahara. La France a annoncé qu'elle enverrait 80
commandos des forces spéciales pour soutenir les Nigériens (RFI,
2017).
À cet effet, il y a aussi l'opération conjointe
Antiterroriste Niger-Burkina Taanli 3 qui veut dire alliance et cohésion
en langue gulmancema, a comme les deux qui l'ont précédée,
débouche sur de résultats plus satisfaisants.
Néanmoins, il y a quelques opérations
militaires existantes dans la région de Tillabéri, et qui sont
entre autres : Almahaw (Ouallam), Niya (rive droite), Yardi
(Tillabéri-est), Fassa (Anzourou), Bataillon du G5 Sahel
(Bankilaré) qui est installé à Ayorou et à
Bankilaré et à Banibangou.
64
Même si les opérations militaires ont finalement
eu les effets pervers, elles ont fait reculer l'État Islamique dans le
Grand Sahara (EIGS). A titre illustratif, en septembre 2018, le groupe
armé de l'EIGS s'est temporairement retiré de certaines parties
du nord de Tillabéri sous la pression de l'action militaire.
4.1.2.4 Les moyens politiques
L'escalade de l'extrémisme violent dans la
région a été conjuguée à l'ascension de la
criminalité transnationale organisée, une sécheresse
cyclique, les conflits locaux et autres actes de banditisme. Il convient de
faire le point de l'état de la région et du bilan des diverses
initiatives en matière de paix et de sécurité.
L'État, détenteur des prérogatives de la
puissance publique, fait recourt habituellement à la force. Ce recourt
peut-être source d'alimentation d'un cycle de
provocation-répression-justification, qui induira une réponse du
« berger à la bergère ». C'est de cette
répression que les Groupes Armés Non Étatiques tirent une
certaine `'crédibilité politique» de leur lutte et de leur
opération (Linhart, 2004).
Aussi, la recherche d'une solution conciliant la force et le
dialogue pourrait paraitre comme une approche utile et idoine. Il est
souhaitable dans chaque conflit d'engager le dialogue avec les parties
prenantes, les leaders communautaires et religieux influents qui sont soit
acteurs au conflit soit directement exposés aux effets de la
radicalisation et de l'extrémisme violent.
Ø La stratégie du dialogue
Le dialogue est la suite de stratégie adoptée
par le Gouvernement du Niger dans le cadre de la lutte contre la radicalisation
et l'extrémisme violent au Niger notamment dans la région de
Tillabéri. Le dialogue peut avoir pour but ultime d'offrir aux
terroristes la possibilité de se repentir et de renoncer à la
violence. L'objectif est de maintenir le contact avec les communautés
qui sont
65
issues de groupes extrémistes, et d'être en
mesure d'identifier et de proposer des solutions aux aspirations des
populations. En arbitrant les conflits dans lesquels elles peuvent être
engagées, en particulier ceux du foncier pastoral25. Le
dialogue politique avec les communautés, c'est prendre conscience de
cette exclusion et réfléchir aux moyens d'y mettre un terme.
Les opérations militaires ne permettent pas à
elles seules d'atteindre les objectifs d'un retour de la paix dans la
région de Tillabéri, surtout si elles attisent des foyers de
tension inter et intracommunautaires. Le dialogue entre Niamey et les
communautés de la région de Tillabéri sera donc
indispensable pour rétablir la présence de l'État dans les
campagnes. Sur un plan concret, cependant, les autorités devront
résoudre un certain nombre d'obstacles qui ont entravé les
précédents efforts de dialogue. L'un de ces facteurs est le
manque de coordination entre les différentes institutions de
l'État chargées de regagner la loyauté des
communautés mécontentes.
Le dialogue doit être sincère et s'accompagner
de mesures concrètes pour empêcher le recrutement par les groupes
armés non étatiques de se poursuivre. C'est ainsi que Bello
Adamou, un expert nigérien de LASDL, indique :« Cette mission
n'est pas impossible à condition de convaincre les populations
d'adhérer au dialogue et d'accepter de vivre avec leurs anciens
bourreaux ».
Cette approche permettra de rétablir la confiance et
la sécurité, de réhabiliter les services sociaux de base,
de déradicaliser les communautés locales et d'isoler
l'extrémisme violent. Il faut également privilégier, en
cas de conflit, les cadres officiels pour le dialogue et la consultation, ainsi
que des mécanismes de médiation formels et informels y compris le
dialogue inter et interreligieux avec les leaders d'opinion, le dialogue
civilo-militaire, et inter et intracommunautaires.
25 Programme National de Prise en Charge de la Reddition, mai
2021, page 07.
26 Mission d'appui à l'élaboration
du plan stratégique 2022-2026 de la Haute Autorité à la
Consolidation de la Paix_HACP, rapport diagnostic, page 24-25.
66
Ø Les renforcements des capacités des
acteurs locaux
Les renforcements des capacités de leaders
communautaires et leurs organisations (Chefferie traditionnelle, leaders
religieux et organisation de la société civile), des jeunes et
femmes, des collectivités décentralisées et des acteurs
des médias qui visent à assurer efficacement leurs rôles en
matière de prévention de la radicalisation et de
l'extrémisme violent ont été mentionnés dans la
stratégie.
En effet, avec le soutien continu de diverses institutions
locales en matière de gestion des conflits entrepris depuis 2015, avec
l'appui à la structuration des comités communaux de paix, la
HACP, comme d'autres institutions, renforce depuis deux ans ses appuis aux
acteurs locaux dans la prise en compte des dynamiques de continuité de
dialogue, et la prise en compte de la dimension « Paix et
Sécurité » au niveau de la planification26.
L'appui aux comités communaux de paix est une pratique
courante depuis plusieurs années, il concerne actuellement 38 communes
et se traduit par un appui au fonctionnement et à la structuration de
ces comités, mais aussi par le financement d'une partie des plans
d'action desdits Comités.
Par ailleurs, le renforcement des capacités des
acteurs locaux notamment par l'appui aux réunions élargies
(mensuelles) des Conseils Départementaux de Sécurité (CDS)
constitue la pierre angulaire vers un maillage de l'ensemble du pays de
structures de concertation, de partage d'information et de message de
transparence portée envers toute la population.
Ces réunions élargies se tiennent mensuellement
et sont ouvertes à tous les acteurs « civils » qui participent
non seulement au renforcement du dialogue sur les questions de
sécurité, mais également à la restauration de la
crédibilité de l'État et de la confiance des populations
envers les FDS.
Pour une cohésion sociale réussie, il faut
impliquer les différents acteurs tels que les familles ou
communautés, les acteurs publics locaux, les
67
Ø Le renforcement de la cohésion
sociale
La cohésion sociale dans et entre les
communautés, et entre l'État et la population locale a
été affaiblie dans la région. Le conflit a
altéré les relations entre les familles, entre les
différents groupes ethniques et les communautés. La
cohésion sociale est aussi mise à mal par l'augmentation des
litiges liés aux droits fonciers et à l'accès aux
ressources naturelles. Elle est également fragilisée par les
comportements de forces de défense et de sécurité et le
changement climatique. La cohésion sociale est donc un facteur
déterminant pour construire la résilience face à ces
menaces. Pour y parvenir, il faut, entre autres, établir une relation de
confiance et d'échange entre les individus, les groupes et les
communautés.
Dans cette optique, le gouvernement nigérien à
travers le Ministère de l'Intérieur et de la
Décentralisation a organisé en novembre 2021 un forum sur le
maintien et le renforcement de la cohésion sociale pour discuter des
questions de sécurité. Les participants à ce forum sont
les acteurs de la Chefferie traditionnelle, les leaders religieux, les
autorités administratives locales, les élus et les autres
personnalités publiques, ressortissants des régions (Dosso,
Tahoua et Tillabéri). Ainsi, l'un des intervenants a souligné que
l'une des causes de l'insécurité est l'effritement de la
cohésion sociale, car c'est un facteur important pour répondre
à ce phénomène.
Les causes de déficit de la cohésion sociale
sont : la collaboration timide pour se sécuriser, l'injustice au niveau
des instances décisionnelles, les acteurs politiques qui augmentent les
tensions intercommunautaires. Pour résoudre une crise qui touche en
premier lieu la population, il faut se concentrer sur la population même.
Plus spécifiquement, cela pourrait impliquer des mécanismes
garantissant l'accès à la justice et le dialogue entre les
populations locales, entre communautés et entre
générations.
68
associations de jeunes, le groupement des femmes et les
espaces d'écoute et de concertation, les médias locaux et
nationaux.
4.1.3 La stratégie au niveau des pays du G5
Sahel
L'organisation sous-régionale des pays de G5 Sahel, la
réunion des ministres en charge de la sécurité et des
affaires religieuses des pays du G5 Sahel, organisée du 11 au 14 mai
2015 à Niamey (Niger), a adopté une importante déclaration
sur la lutte contre la radicalisation et l'extrémisme violent au
Sahel27. Lors de cette réunion, les ministres des pays du G5
Sahel ont pris des mesures concrètes pour combattre la radicalisation et
l'extrémisme violent. Ces mesures sont :
« Sensibiliser les populations sur le danger de la
radicalisation ; contrôler les flux financiers susceptibles d'alimenter
la radicalisation ; mettre en place des mécanismes régionaux
d'analyse contextuelle et d'alerte précoce ; mettre en place des cadres
de dialogue culturel et religieux ; promouvoir la tolérance, la paix et
la stabilité par le dialogue intra et interreligieux ; encadrer et
formaliser l'éducation confessionnelle et promouvoir son
intégration dans le système éducatif des États du
Sahel ; développer des opportunités d'insertion
socio-économique en faveur des jeunes à risques en vue de
prévenir leur radicalisation ; contrer les discours extrémistes
destinés aux groupes à risques en mettant à profit les
médias, les réseaux sociaux et les prêches ; renforcer la
capacité des institutions judiciaires et carcérales dans la
prévention et la lutte contre la radicalisation et mettre en place des
procédures de déradicalisation ; promouvoir la protection des
valeurs civiques et socioculturelles comme moyens de prévention de la
radicalisation et de l'extrémisme violent ; renforcer les
capacités des leaders religieux dans la lutte contre la radicalisation
et en faveur de la déradicalisation ; créer ou renforcer des
cadres d'échanges de bonnes pratiques en matière de lutte contre
la radicalisation entre les pays du
27 Stratégie Nationale de Prévention de
la Radicalisation et de l'Extrémisme Violent-Niger.
69
G5 Sahel ; renforcer le rôle des organes de
régulation des médias dans la lutte contre la radicalisation en
faveur de la déradicalisation; promouvoir la participation des femmes et
de la société civile dans la prévention et la lutte contre
la radicalisation et l'extrémisme violent ; renforcer et harmoniser les
cadres juridiques relatifs à la lutte contre la radicalisation dans la
région du Sahel ; mettre en place, au sein du Secrétariat
Permanent du G5 Sahel, « une Cellule régionale de prévention
de la radicalisation ».
Les autorités des États membres du G5 Sahel
collaborent avec les organisations de la société civile
sahéliennes, notamment les institutions religieuses, les chefs
traditionnels et les organisations des femmes et des jeunes, pour soutenir
leurs décisions dans les États membres afin de traduire en acte
le contenu de la déclaration relative à la lutte contre la
radicalisation et l'extrémisme violent. Elles ont appelé leurs
partenaires à soutenir les efforts des États pour mettre en
oeuvre la déclaration.
4.1.4 La déradicalisation
Pour empêcher la radicalisation, de nombreux pays ont
mis en place des stratégies dites de « déradicalisation
», à savoir un type d'action destinée à ramener ceux
qui se sont engagés dans le djihadisme vers une « normalité
» définie par le renoncement à la violence comme solution
aux maux dont souffre la société.
Il s'agit d'un programme initié par le ministère
en charge de l'intérieur en collaboration avec la HACP pour permettre
aux personnes qui veulent faire l'acte de reddition volontaire dans les
conditions prévues à l'article 399.1.20 du Code pénal
nigérien, peut bénéficier d'un programme de
réhabilitation et de réintégration.
Conformément à la nouvelle teneur de l'article
399-1-20 du Code Pénal nigérien, les éléments qui
faisaient acte de reddition volontaire pourront être exemptés de
toute poursuite pénale seulement s'ils n'ont pas commis des
70
crimes. S'ils ont été soupçonnés
de crime, ils seront transférés au parquet du pôle
judiciaire spécialisé dans la lutte contre le terrorisme pour
être jugé.
C'est le Service Central de Lutte contre le Terrorisme et la
Criminalité Transnationale Organisée (SCLCT/CTO) qui s'en charge
de la mission de son service d'enregistrement biométrique, le transport
des personnes associées à des groupes terroristes en reddition au
centre d'accueil de Goudoumaria, et ceux qui sont logés au sein de
l'école de la police de Niamey seront transférés au centre
d'accueil de la région de Tillabéri.
Le profilage est un élément essentiel du
processus de réhabilitation des repentis volontaires après
l'enregistrement biométrique. Ce dernier conduit au profilage qui permet
au procureur du Pôle Judiciaire Spécialisé dans la lutte
contre le terrorisme et la criminalité transnationale de faire un triage
des ex-associés aux GANE qui est admissible au processus de
réintégration et qui sera face aux instances judiciaires pour
expier ses fautes conformément aux dispositions de l'article 399.1.20 du
Code pénal. La durée consacrée au profilage est de 30
jours maximum et doit avoir lieu au centre de réinsertion.
Le profilage consiste à recueillir les actions
auxquelles la personne en reddition volontaire a effectivement pris part
volontairement sans aucune contrainte. Il permet d'apprécier le niveau
d'implication et le rôle joué dans la commission des actes
qualifiés de crimes contre l'humanité ou crimes de guerre commis
à l'occasion de son appartenance au groupe terroriste. Cette
appréciation par simulation permet à terme de faire le triage des
ex-éléments.
C'est ainsi qu'au moment de triage, les éléments
sont répartis en deux groupes : le groupe d'éléments
à poursuivre en justice et le groupe d'éléments à
réhabiliter.
À Diffa, par exemple, la réinsertion et la
réintégration de la première vague des repentis
accompagnés de leurs familles dans la communauté d'accueil ont
lieu en décembre 2019. La même année, une première
vague de 125 ex-combattants de Boko Haram a été formée,
certifiée et réhabilitée. En
71
décembre 2021, une deuxième vague de
quarante-deux (42) ex-combattants de Boko Haram a acquis le même
traitement que la première vague. Cette deuxième est mixée
à quarante-deux (42) jeunes (filles et garçons) victimes
formées au Centre de Goudoumaria, et cent soixante-dix-huit (178)
formés au niveau des Centres de Formation aux Métiers des
communes de N'Guigmi, Bosso, Toumour, Mainé Soroa et Diffa qui regroupe
les jeunes de Diffa et de Gueskérou.
En outre, entre autres stratégies pour résoudre
ce problème, il y a l'encadrement des ex-combattants dans le domaine de
l'agriculture. Cette activité qui leur est familière n'exige pas
beaucoup d'efforts particuliers, surtout que le territoire d'Uvira
présente de grands atouts en matière de développement
agricole.
Au-delà de l'agriculture, il faut apprendre aux
ex-combattants les métiers dans des filières porteuses comme la
formation professionnelle en menuiserie, en maçonnerie, en couture, en
mécanique rurale, etc. Cet encadrement, approprié des
ex-combattants, fait renaitre l'espoir et la possibilité de vivre en
harmonie dans les milieux d'accueil.
Cette initiative, initialement lancée dans la
région de Diffa, a été répliquée pour la
région de Tillabéri dans la commune rurale de Hamdallaye au cours
de l'année 2022. Le centre de réinsertion socio-économique
a été construit et les instruments de mobilisation des
ex-associés aux GANE ont été élaborés pour
mener une sensibilisation qui est déjà en cours avec la HACP dans
la région de Tillabéri.
En réponse à cette campagne de sensibilisation,
57 éléments du terrorisme (2018) ont fait défection et se
sont rendus aux autorités de la région de Tillabéri. Ces
ex-associés ont été hébergés à
l'École Nationale de la Police et de la Formation Permanente jusqu'en
février 2022.
Aussi, l'État avec l'appui des partenaires techniques
et financiers (OIM et PNUD) a créé le centre de Hamdallaye dans
la région de Tillabéri pour
72
permettre davantage aux personnes engagées dans les
groupes extrémistes violents de déposer les armes et de suivre un
programme de déradicalisation et de réintégration et/ou de
réinsertion socio-économique comme dans la région de
Diffa.
4.2 Limites et recommandations
Nous avons évoqué les stratégies de
prévention et de lutte contre le terrorisme et l'extrémisme
violent, il est préférable aussi de faire ressortir les limites
et proposer des recommandations à l'endroit des institutions et les
populations concernées.
4.2.1 Limites
Les problèmes liés à la radicalisation et
à l'extrémisme violent au Niger en général et dans
la région de Tillabéri en particulier sont liés à
une fragilité structurelle profonde à laquelle le pays est
confronté.
La faible présence de l'État - ou « son
absence totale » - dans certaines zones induit une mauvaise
répartition des investissements publics et surtout aux problèmes
liés à l'inégalité quant à l'accès
aux services sociaux de base. Ajoutons aussi la persistance des conflits inter
et intracommunautaire, l'injustice, la vulnérabilité des jeunes,
le mal gouvernance et d'autres problèmes qui alimentent la tension entre
les populations.
Les groupes extrémistes et autres groupes criminels
profitent de ce vide pour exploiter la frustration et la détresse des
populations qui constituent leurs cibles principales en matière de
recrutement, d'endoctrinement et d'embrigadement.
Si l'une ou l'autre des réponses engagées par
l'État a sa propre valeur, elles ne constituent cependant pas, prises de
manière isolée, un moyen efficace pour lutter contre les facteurs
favorisant la violence. De nombreuses limites ressortent de notre analyse.
73
Tout d'abord, le phénomène de
l'extrémisme violent a généralement donné lieu
à des actions d'ordre purement militaire. Si de telles réponses
restent nécessaires et permettent à l'État d'adresser les
violences et ses effets dans le court terme, elles se sont
avérées insuffisantes sur la durée quand elles n'ont pas
simplement alimenté le phénomène lorsque la
causalité des violences n'est pas apaisée ou éteinte, ou
lorsque des violations des droits de l'homme résultant de ces
réponses militaires les ont exacerbés.
La seconde limite repose sur la méconnaissance des
réalités locales et des causes profondes de la
conflictualité qui caractérisent la société de
Tillabéri, et par conséquent de l'inadéquation des
réponses jusque-là mises en oeuvre - notamment des programmes et
projets étatiques ou non - aux besoins de la communauté. Si
beaucoup font le lien entre radicalisation et idéologie religieuse, ou
encore entre radicalisation et pauvreté, une des principales causes de
la pauvreté - et donc de la vulnérabilité aux discours
radicaux - repose sur les sentiments d'inégalités et d'injustice,
et la compétition pour les ressources non adressées par ces
programmes et projets.
À titre d'illustration, dans les communes de
Bankilaré, de Banibangou, d'Ayorou, de Torodi et/ou d'Abala, des
inégalités d'investissements publics sont observées en
comparaison aux autres communes de la région plus proche de la capitale
Niamey. (Par exemple dans la commune de Dorgol, de Torodi, Ayérou,
etc.).
De nombreux projets ont été mis en oeuvre dans
ces zones sans pour autant que l'impact positif recherché n'ait pu
être atteint. Ainsi, le Projet Emploi des Jeunes et Inclusion Productive
qui est un projet chargé de réduire le chômage et lutter
contre les emplois des jeunes, mais ce projet a eu du mal à
démarrer ses activités depuis l'avènement de COVID-19
couplé au problème d'insécurité qui sévisse
dans ces zones.
À cet effet, l'analyse utilisée a d'abord
examiné les facteurs liés à l'émergence et au
développement de la radicalisation et de l'extrémisme violent
74
dans la région de Tillabéri. L'un des plus
grands obstacles est le manque de sensibilisation et le renforcement des
capacités dans certaines zones, et surtout le manque de confiance aux
forces de défense et de sécurité. Il faut souligner que
certaines personnes collaborent timidement avec les groupes extrémistes
violents pour se sécuriser soit de sécuriser leurs familles
respectives.
Enfin, la faible capacité des collectivités
territoriales à mobiliser des ressources conséquentes et à
les investir dans le développement local restreint la capacité
des élus locaux à dialoguer avec leurs administrés et
à les influencer, en particulier les jeunes. De sensibilisation et
organisation de séances de concertation entre les parties prenantes, les
chefs traditionnels et religieux, en les impliquant dans les instances
décisionnelles pour plus d'efficacité dans la lutte contre ce
phénomène.
Au regard de ce qui précède, des solutions
devraient être envisagées pour « pallier » les
difficultés auxquelles fait face la région de
Tillabéri.
4.2.2 Recommandations
La présence de l'État dans les zones qui ont
été touchées par l'extrémisme violent est
déterminante au maintien de la stabilité et de la
sécurité. Les principales recommandations qui ressortent de cette
analyse sont les suivantes :
Dans la région de Tillabéri sachant, bien qu'il
existe de séance de sensibilisations, mais ces séances de
sensibilisation doivent être régulières et à grande
échelle afin de toucher les communautés dont sont issues les
jeunes (pour une éducation à la paix et à la
tolérance, et des valeurs traditionnelles surtout le renforcement des
valeurs sociales).
Dans ses services régaliens, l'État doit
renforcer la capacité des FDS pour assurer la sécurité de
la population et aussi les services de renseignements.
75
La justice sociale est le fondement de la
société demeure mitigée dans certaines localités de
la région de Tillabéri, il est indispensable que l'État
assure l'impartialité de la justice et traite la population sur le
même pied d'égalité.
Du point de vue des ONG et Projets intervenant dans la
région, il faudra que l'État veille et réglemente les
actions des ONG qui oeuvrent ou interviennent dans la zone par la
recommandation des bilans et dans l'opération sur le terrain.
Il faudra de la part de l'État, renforcer les
capacités des jeunes quant à la lutte contre la radicalisation et
l'extrémisme violent à travers des formations et les appuyer
financièrement quant à la création des Activités
Génératrices de Revenus pour leur permettre de satisfaire leurs
besoins essentiels.
Il faut entreprendre de manière préventive des
activités stratégiques comme les rencontres d'échanges et
de partage entre les jeunes eux-mêmes, de sensibilisation sur la
coexistence pacifique, la culture de la paix et de la nonviolence.
L'éducation à la paix et à la
tolérance est une responsabilité portée par tous les
acteurs de la société qui doivent s'efforcer de transmettre des
valeurs traditionnelles et morales saines aux enfants.
Par conséquent, l'extrémisme violent et la
radicalisation ne peuvent et ne sauraient être associés à
aucune religion, nationalité ou civilisation. La lutte contre
l'extrémisme violent et la radicalisation passe nécessairement
par la compréhension et le dialogue.
L'accent devrait également être mis sur le
développement des programmes de déradicalisation, de
désendoctrinement et de rééducation des jeunes comprenant
des activités de réhabilitation et de
réintégration, afin que ces jeunes d'aujourd'hui qui sont les
adultes de demain ne soient ni victimes ni acteurs de violences ou d'entraves
à la consolidation de la paix.
Nous sommes convaincus que rien de durable ne saurait se
construire sans la paix et la sécurité, il est plus que
nécessaire que tous les acteurs s'investissent pleinement en vue de la
promotion de la culture de la paix et de
76
la concorde pour que la paix s'installe dans les esprits, dans
les coeurs et dans les comportements des citoyens.
77
CONCLUSION
Le Niger, situé dans la zone sahélo-saharienne,
a été touché par les phénomènes de la
radicalisation et de l'extrémisme violent ces deux dernières
décennies. Ceux-ci constituent des menaces sur la paix, la
sécurité, la cohésion sociale et le développement,
notamment avec la présence des groupes armés terroristes tels que
Boko Haram dans le lac Tchad, les mouvements djihadistes dans le
Liptako-Gourma.
En effet, la région a subi plusieurs attaques qui ont
entraîné des pertes en vies humaines, enlèvement, perte des
biens et un important flux des populations déplacées. La
pauvreté, la faiblesse des liens sociaux et communautaires, le manque
d'opportunités de développement économique et social et la
mauvaise gouvernance rendent les jeunes particulièrement
vulnérables à la marginalisation, à l'exclusion et
à la radicalisation sociale.
La capacité limitée des autorités et des
communautés à engager efficacement une population jeune
croissante, associée à un manque d'informations et de
"contre-récits" positifs, augmente la vulnérabilité des
jeunes à l'égard de l'éducation virtuelle. Aussi, une
jeunesse sans emploi, sans activité, vivant dans l'oisiveté peut
devenir une proie facile à la manipulation, et pourrait être
facilement recrutée dans des activités pouvant même
créer une crise et compromettre la vie au sein de leur propre
société.
C'est ainsi qu'un certain nombre des facteurs (la
pauvreté, l'ignorance, les inégalités, les injustices, le
chômage, l'exclusion de la vie économique et sociale, etc.), qui
mènent sans nul doute à l'extrémisme violent, et à
la radicalisation.
Ainsi, les objectifs de notre recherche consistent à
contribuer à la connaissance de lutte contre la radicalisation et
l'extrémisme violent, notamment à analyser les facteurs
contribuant à l'émergence de la radicalisation et
l'extrémisme violent dans la région de Tillabéri, à
identifier les formes de violence extrémiste, à connaître
les stratégies adoptées par le Niger
78
pour lutter contre les phénomènes
extrémistes dans ladite région, afin de proposer des
recommandations à l'endroit des institutions et des populations
concernées.
Pour ce travail, nous avons adopté une
méthodologie objective qui s'articule autour de la recherche
documentaire, des questionnaires ; du traitement et de l'analyse de ces
données en passant par la présentation de champs d'études
qui ont abouti à la formulation des recommandations.
Quant aux hypothèses, nous avons affirmé que
l'efficacité de la stratégie repose sur les mécanismes
juridiques, institutionnels, politiques et à la fois militaires quant
à la lutte contre la radicalisation et l'extrémisme violent.
Aussi, la pauvreté, l'injustice sociale, les conflits inter et
intracommunautaires, la mauvaise gouvernance ainsi que la recherche de
sécurisation incitent à la radicalisation et à
l'extrémisme violent.
En tout état de cause, au vu de ce résultat, ces
hypothèses se voient confirmées. Malgré les efforts
fournis par le gouvernement et les Partenaires Techniques et Financiers, force
est de constater que la lutte contre la radicalisation et l'extrémisme
violent dans la région de Tillabéri souffre de mauvaise
intégration de parties prenantes et parfois de mobilisations de
ressources. L'Etat doit faciliter le dialogue avec toutes les structures
sociales et de créer une coopération pour que les chefs
traditionnels, les chefs religieux, la société civile et les ONG
puissent participer à la lutte contre la radicalisation et
l'extrémisme violent.
Le développement de la localité et de tout le
Niger est inconditionnellement lié à sa stabilisation. La
région de Tillabéri se situe dans un coin stratégique qui
peut permettre facilement la criminalité transfrontalière. De
là, on s'interroge quel sera l'avenir du pays si jamais ce
problème n'est pas résolu ?
79
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80
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l'Islam : les enjeux africains de la lutte contre le terrorisme, Paris,
Albin Michel, P.295.
- VINCENT Bonnecase, 2016, La pauvreté au Sahel. Du
savoir colonial à la mesure internationale, Paris, Karthala,
P.286.
- VINCENT Bonnecase et JULIEN Brachet, 2013, Les «
crises sahéliennes » entre perceptions locales et gestions
internationales, Paris, « Politique africaine », édit.
Karthala, N°130, P.260.
- THUAL François, 1995, Les conflits identitaires,
Paris, Ellipses, P.156.
C- Rapports
- Stabiliser les zones de conflit, Capitalisation de
l'expérience de la HACP, 1994-2020.
- ABDOU A S, 2012. Vulnérabilité et
résilience des systèmes pastoraux à Abalak, rapport
de stage, master 2, UAM, p.33.
- Rapport sur les séances de sensibilisation des
jeunes de la région de Tillabéri sur la paix et la
sécurité, la lutte contre l'extrémisme violent la gestion
non violente des conflits, lors du festival de la parenté à
plaisanterie Tillabéri du 10 au 12 décembre 2021, page 2-3,
4-7.
- William Assanvo, Baba Dakono, Lori-Anne
Théroux-Bénoni et Ibrahim Maïga, Extrémisme
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Liptako-Gourma, rapport sur l'Afrique de l'ouest 26/Décembre 2019,
page.3,6 et 7.
- Mission d'appui à l'élaboration du plan
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Consolidation de la Paix, Rapport diagnostic final, décembre 2021,
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- Malam ARI Maïna Issa, Rapport de capitalisation du
programme national de prise en charge de la reddition (PNPCR) du Niger de
décembre 2016 à avril 2021, Page.9-10 et 11-16.
81
D- Mémoires
- Abdoulaye ADOUM BAKHIT, Le G5 Sahel et la lutte contre le
terrorisme, mémoire de fin de cycle pour l'obtention du Niveau III, ENA
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E- Sites Internet
-
https://doi.org/10.4060/cb7446fr
consulté le 07 janvier 2022 à 10h 30min -
https://scienceetbiencommun.pressbooks.pub/droitniger/chapter/chapter
-1/=return-footnote-5-7 consulté le 02 mars 2022 16h 15min
-
https://reliefweb.int/report/mali/d-claration-des-pays-du-g5-sur-la-lutte-contre-ka-radicalisation-et-l-extrémisme
(consulté le 28 mars 2022 à 22h30 min.
-
https://www.actuniger.com/societe/17844-indice-de-perception-de-la-corruption-ipc-2021-la-corruption-gagne-toujours-du-terrain-au-niger-transparency-international.html
consulté le 18 avril 2022 à 16h30min
II
LISTE DES ANNEXES
Annexe 1 : Carte de la région de
Tillabéri
Annexe 2 : Analyse synoptique des formes de violence
extrémiste dans la région de Tillabéri (Source : CNESS)
III
Annexe 1 : Carte de la région de
Tillabéri
Source : DR/INS/Ti -Base de
données Tillabéri.Info
IV
Annexe 2 : Analyse synoptique des formes de violence
extrémiste dans la région de Tillabéri
Formes de violences extrémistes
|
Acteurs porteurs de violence
|
Principaux groupes affectés
|
Attaques armées des
|
·
|
Divers groupes djihadistes
|
·
|
Populations
|
villages et des
|
|
(Al-Qaeda pour le Djihadiste
|
|
civiles(ménages)
|
campements
|
|
en Afrique ; État islamique du Grand Sahara, Ansar
al-
|
·
|
Forces de Défense et de Sécurité
|
|
|
islam, Jamaat Nosrat al-
|
·
|
Agent de l'État
|
|
|
Islam, Ansar Dine (Katibat
du Macina et celle de
|
·
|
Réfugiés (camps des réfugiés)
|
|
|
Gourma))
|
|
|
Attaques des positions des Forces de défense et de
sécurité (FDS)
|
·
|
Divers groupes djihadistes
|
·
|
Forces de défense et sécurité
|
Destruction des
infrastructures et
|
·
|
Divers groupes djihadistes
|
·
|
État et collectivités
locales
|
équipements privés et publics
|
|
|
·
|
Opérateurs
économiques privés
|
Assassinats ciblés
|
·
|
Groupes djihadistes
|
·
|
Chefs traditionnels
|
|
|
|
·
|
Chefs religieux
|
|
|
|
·
|
Individus considérés
comme informateurs
des FDS
|
Irrédentisme
|
·
|
Groupes irrédentismes
|
·
|
État du Niger
|
|
|
séparatistes et
indépendantistes
|
·
|
Populations dans les zones concernées
|
V
Trafics de drogues et d'armes à feu
|
· Trafiquants de drogues et d'armes, etc.
|
· Chefs traditionnels
· Individus considérés
comme informateurs des FDS
· Jeunes
|
Enlèvements des
personnes
|
· Divers groupes djihadistes
|
· Femmes et jeunes filles
· Chefs traditionnels et chefs religieux
· Agents de l'État et commerçants
|
Vols de bétail
|
· Divers groupes djihadistes
· Bandits armés organisés en
réseaux
|
· Éleveurs transhumants
· Ménages
|
Conflits liés à
l'exploitation des
ressources naturelles
partagées
|
· Agriculteurs
· Éleveurs
|
· Agriculteurs
· Éleveurs
|
Razzias sur les
marchés
|
· Divers groupes djihadistes
· Bandits armés organisés en
réseaux
|
· Population civile (ménages)
· Opérateurs
économiques ruraux
|
|
Source : Centre National d'Études
Stratégiques et de Sécurité (CNESS)
|